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Université Rennes 2
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THESE
Pour obtenir le grade de
DOCTEUR DE L UNIVERSITE RENNES 2
Discipline : linguistique française
Présentée et soutenue publiquement par
CAMUSSI-NI Marie-Armelle
Le 11 décembre 2006
Analyse formelle et conceptuelle des formes verbales du français contemporain : A la croisée du passé simple et de limparfait, du futur et du conditionnel, les concepts « (potentiel » et « (défini ».
Directrice de thèse : Mme LE BOT Marie-Claude
JURY
Mme LE BOT Marie-Claude
M. LE GOFFIC Pierre
Mme LEEMAN Danielle
M. VETTERS Carl
Je remercie Marie-Claude Le Bot pour sa confiance et son soutien.
« Maintenant on aurait dit que tu travaillais mais au fond, tout et nimporte quoi pouvait se relier à la question du temps et tu ne savais vraiment pas jusquoù il fallait explorer les niches et fissures sans nombre de ce sujet caverneux.
Bon, te dis-tu dune voix intérieure dont la jovialité forcée ne parvenait pas tout à fait à te tromper, est-ce quil faudrait aborder la question du point de vue chronologique, géographique ou bien philosophique ? Ny aurait-il pas une manière élégante de combiner les trois approches ? » Nancy Huston. Cantique des plaines.
TOC \o \h \z
HYPERLINK \l "_Toc148728579" Introduction PAGEREF _Toc148728579 \h 9
HYPERLINK \l "_Toc148728580" Première partie : Analyse formelle PAGEREF _Toc148728580 \h 12
HYPERLINK \l "_Toc148728581" 1- Etat des lieux de lanalyse formelle du futur et du conditionnel PAGEREF _Toc148728581 \h 17
HYPERLINK \l "_Toc148728582" 1-1 Une analyse qui sépare linfinitif et un suffixe constitué du verbe avoir. PAGEREF _Toc148728582 \h 18
HYPERLINK \l "_Toc148728583" 1-1-1 Une analyse diachronique PAGEREF _Toc148728583 \h 18
HYPERLINK \l "_Toc148728584" 1-1-2 Une analyse synchronique sous-tendue par létymologie PAGEREF _Toc148728584 \h 21
HYPERLINK \l "_Toc148728585" 1-1-2-1 Identité remarquable du radical PAGEREF _Toc148728585 \h 22
HYPERLINK \l "_Toc148728586" 1-1-2-2 Prise en compte du temps des désinences PAGEREF _Toc148728586 \h 24
HYPERLINK \l "_Toc148728587" 1-1-2-3 Prise en compte de la signification lexicale du verbe avoir PAGEREF _Toc148728587 \h 26
HYPERLINK \l "_Toc148728588" 1-1-3 Une autre analyse diachronique PAGEREF _Toc148728588 \h 26
HYPERLINK \l "_Toc148728589" Bilan : PAGEREF _Toc148728589 \h 31
HYPERLINK \l "_Toc148728590" 1-2 Une analyse structurale qui sépare le R de la base. PAGEREF _Toc148728590 \h 32
HYPERLINK \l "_Toc148728591" 1-2-1 Le découpage dune désinence Ra au futur. PAGEREF _Toc148728591 \h 34
HYPERLINK \l "_Toc148728592" 1-2-1-1 Martinet, 1958 PAGEREF _Toc148728592 \h 34
HYPERLINK \l "_Toc148728593" 1-2-1-2 Dubois,1967 PAGEREF _Toc148728593 \h 35
HYPERLINK \l "_Toc148728594" 1-2-2 Le découpage au futur dun suffixe -Ra + suffixes personnels. PAGEREF _Toc148728594 \h 36
HYPERLINK \l "_Toc148728595" Bilan : PAGEREF _Toc148728595 \h 38
HYPERLINK \l "_Toc148728596" 1-2-3 Le découpage dun suffixe /R/+ désinence /a/. PAGEREF _Toc148728596 \h 39
HYPERLINK \l "_Toc148728597" 1-2-3-1 Pinchon et Couté, 1981 PAGEREF _Toc148728597 \h 39
HYPERLINK \l "_Toc148728598" 1-2-3-2 Van den Eynde et Blanche-Benveniste (1970) PAGEREF _Toc148728598 \h 41
HYPERLINK \l "_Toc148728599" Bilan : PAGEREF _Toc148728599 \h 44
HYPERLINK \l "_Toc148728600" 2- Pour un autre découpage du futur et du conditionnel PAGEREF _Toc148728600 \h 45
HYPERLINK \l "_Toc148728601" 2-1-1 Faut-il séparer le R- de la base ? PAGEREF _Toc148728601 \h 45
HYPERLINK \l "_Toc148728602" 2-1-2 Les analyses divergentes du futur et du conditionnel correspondent-elles à un simple problème dallomorphisme ? PAGEREF _Toc148728602 \h 48
HYPERLINK \l "_Toc148728603" 2-1-2-1 Allomorphisme de la base ou allomorphisme du R- ? PAGEREF _Toc148728603 \h 48
HYPERLINK \l "_Toc148728604" 2-1-2-2 Des suffixes du futur arbitrairement découpés ? PAGEREF _Toc148728604 \h 50
HYPERLINK \l "_Toc148728605" 2-1-3 Faut-il poser un morphème zéro ? PAGEREF _Toc148728605 \h 53
HYPERLINK \l "_Toc148728606" 2-1-4 Pour une analyse qui prenne en compte le zéro PAGEREF _Toc148728606 \h 62
HYPERLINK \l "_Toc148728607" 2-1-4-1 La distribution des zéros PAGEREF _Toc148728607 \h 69
HYPERLINK \l "_Toc148728608" 3- Bilan et perspectives PAGEREF _Toc148728608 \h 71
HYPERLINK \l "_Toc148728609" 3-1- De la nécessité de réinvestir en sens cette analyse morphologique : PAGEREF _Toc148728609 \h 73
HYPERLINK \l "_Toc148728610" 3-2- De la difficulté de prendre en compte les implications sémantiques dune analyse morphologique qui pose deux morphèmes PAGEREF _Toc148728610 \h 76
HYPERLINK \l "_Toc148728611" 3-3- Une interrogation plus générale sur la validité des classifications habituelles. PAGEREF _Toc148728611 \h 81
HYPERLINK \l "_Toc148728612" Deuxième partie : Analyse sémantique PAGEREF _Toc148728612 \h 82
HYPERLINK \l "_Toc148728613" 1 Préalables à lanalyse sémantique PAGEREF _Toc148728613 \h 83
HYPERLINK \l "_Toc148728614" 1-1 Désignation et situation dénoncé PAGEREF _Toc148728614 \h 83
HYPERLINK \l "_Toc148728615" 1-2 Réflexion sur la notion de procès PAGEREF _Toc148728615 \h 84
HYPERLINK \l "_Toc148728616" 2- Signification de lopposition du R, propre au futur, au conditionnel et à linfinitif, à son absence, propre à limparfait et au passé simple. PAGEREF _Toc148728616 \h 91
HYPERLINK \l "_Toc148728617" 2-1 Opposition du présent aux autres formes de lindicatif PAGEREF _Toc148728617 \h 92
HYPERLINK \l "_Toc148728618" 2-2 Quel concept dénoté par lopposition (R se combine avec le concept dénoté ai/a ? PAGEREF _Toc148728618 \h 97
HYPERLINK \l "_Toc148728619" 2-2-1 Valeur de lopposition (R PAGEREF _Toc148728619 \h 98
HYPERLINK \l "_Toc148728620" 2-2-1-1 Linfinitif : un procès potentiel ? PAGEREF _Toc148728620 \h 99
HYPERLINK \l "_Toc148728621" 2-2-1-1-1 Le « sujet » de linfinitif PAGEREF _Toc148728621 \h 102
HYPERLINK \l "_Toc148728622" 2-2-1-1-2 Infinitif et temps PAGEREF _Toc148728622 \h 105
HYPERLINK \l "_Toc148728623" 2-2-1-1-3 Valeur de linfinitif PAGEREF _Toc148728623 \h 107
HYPERLINK \l "_Toc148728624" 2-2-1-1-4 Quelques exemples danalyse de linfinitif PAGEREF _Toc148728624 \h 111
HYPERLINK \l "_Toc148728625" 2-2-1-2 Procès attestés/procès potentiels PAGEREF _Toc148728625 \h 116
HYPERLINK \l "_Toc148728626" 2-2-2 Réinvestissement sémantique du morphème ai/a dans limparfait et le passé simple. PAGEREF _Toc148728626 \h 120
HYPERLINK \l "_Toc148728627" 2-2-2-1 Le trait sémantique « (défini » PAGEREF _Toc148728627 \h 120
HYPERLINK \l "_Toc148728628" 2-2-2-1-1 Le concept de rupture avec la sphère du locuteur dans lopposition passé simple / imparfait PAGEREF _Toc148728628 \h 120
HYPERLINK \l "_Toc148728629" 2-2-2-1-1-1 Rupture avec le moment de lénoncé : PAGEREF _Toc148728629 \h 120
HYPERLINK \l "_Toc148728630" 2-2-2-1-1-2 Rupture entre le procès et le locuteur PAGEREF _Toc148728630 \h 128
HYPERLINK \l "_Toc148728631" 2-2-2-1-1-3 Limparfait et le trait de rupture avec la sphère du locuteur PAGEREF _Toc148728631 \h 134
HYPERLINK \l "_Toc148728632" 2-2-2-1-2 Un univers du procès défini ou indéfini PAGEREF _Toc148728632 \h 138
HYPERLINK \l "_Toc148728633" 2-2-2-1-2-1 Désignation dune durée du procès. PAGEREF _Toc148728633 \h 139
HYPERLINK \l "_Toc148728634" 2-2-2-1-2-1-1 Repères de durée introduits par depuis. PAGEREF _Toc148728634 \h 140
HYPERLINK \l "_Toc148728635" 2-2-2-1-2-1-2 Repères de durée de x à y. PAGEREF _Toc148728635 \h 144
HYPERLINK \l "_Toc148728636" 2-2-2-1-2-2 « Définition » et « indéfinition » dune série de procès PAGEREF _Toc148728636 \h 148
HYPERLINK \l "_Toc148728637" 2-2-1-3 Bilan PAGEREF _Toc148728637 \h 152
HYPERLINK \l "_Toc148728638" 2-2-2-2 Effets de sens découlant de la valeur opposant limparfait et le passé simple : PAGEREF _Toc148728638 \h 160
HYPERLINK \l "_Toc148728639" 2-2-2-2-1 Effets de sens aspectuels de lopposition imparfait / passé simple. PAGEREF _Toc148728639 \h 160
HYPERLINK \l "_Toc148728640" 2-2-2-2-1-1 Mise en relation de limparfait ou du passé simple avec des repères temporels ponctuels PAGEREF _Toc148728640 \h 164
HYPERLINK \l "_Toc148728641" 2-2-2-2-1-2 Effets de sens de déjà et encore dans leur mise en relation avec des verbes à limparfait et au passé simple PAGEREF _Toc148728641 \h 169
HYPERLINK \l "_Toc148728642" 2-2-2-2-1-2-1 Déjà et encore « continuatifs » PAGEREF _Toc148728642 \h 170
HYPERLINK \l "_Toc148728643" 2-2-2-2-1-2-2 Déjà et encore itératif PAGEREF _Toc148728643 \h 174
HYPERLINK \l "_Toc148728644" 2-2-2-2-1-3 Mise en relation dun verbe au passé simple et dun verbe à limparfait - le schéma dincidence : PAGEREF _Toc148728644 \h 182
HYPERLINK \l "_Toc148728645" 2-2-2-1- 4 Bilan PAGEREF _Toc148728645 \h 188
HYPERLINK \l "_Toc148728646" 2-2-2-2-2 Analyses textuelles de limparfait et du passé simple PAGEREF _Toc148728646 \h 189
HYPERLINK \l "_Toc148728647" 2-2-2-2-2-1 Premier plan /arrière-plan du récit PAGEREF _Toc148728647 \h 190
HYPERLINK \l "_Toc148728648" 2-2-2-2-2-2 Mise en relation de deux passés simples PAGEREF _Toc148728648 \h 192
HYPERLINK \l "_Toc148728649" 2-2-2-2-2-3 Mise en relation de deux imparfaits PAGEREF _Toc148728649 \h 198
HYPERLINK \l "_Toc148728650" La thèse anaphorique PAGEREF _Toc148728650 \h 210
HYPERLINK \l "_Toc148728651" 2-2-2-2-3 Les emplois dits « modaux » de limparfait PAGEREF _Toc148728651 \h 218
HYPERLINK \l "_Toc148728652" 2-2-2-3 Un emploi célinien de limparfait et du passé simple ? PAGEREF _Toc148728652 \h 222
HYPERLINK \l "_Toc148728653" 2-2-2-3-1 Le brouillage du récit par limparfait PAGEREF _Toc148728653 \h 223
HYPERLINK \l "_Toc148728654" 2-2-3 Comment futur et conditionnel combinent-ils le réinvestissement sémantique de lopposition ±R avec celui de lopposition ai/a ? PAGEREF _Toc148728654 \h 236
HYPERLINK \l "_Toc148728655" 2-2-3-1 Analyse du futur et du conditionnel PAGEREF _Toc148728655 \h 237
HYPERLINK \l "_Toc148728656" 2-2-3-2 Analyse des effets de sens du futur et du conditionnel PAGEREF _Toc148728656 \h 242
HYPERLINK \l "_Toc148728657" 2-2-3-2-1 Enoncés non complexes PAGEREF _Toc148728657 \h 242
HYPERLINK \l "_Toc148728658" 2-2-3-2-1-1 Au futur : PAGEREF _Toc148728658 \h 242
HYPERLINK \l "_Toc148728659" 2-2-3-2-1-2 Au conditionnel : PAGEREF _Toc148728659 \h 249
HYPERLINK \l "_Toc148728660" 2-2-3-2-2 Les énoncés hypothétiques en si PAGEREF _Toc148728660 \h 261
HYPERLINK \l "_Toc148728661" 2-2-3-2-2-1 Le conditionnel PAGEREF _Toc148728661 \h 262
HYPERLINK \l "_Toc148728662" 2-2-3-2-2-2 Le futur PAGEREF _Toc148728662 \h 265
HYPERLINK \l "_Toc148728663" 2-2-3-2-3 Futur et conditionnel dans le discours indirect. PAGEREF _Toc148728663 \h 268
HYPERLINK \l "_Toc148728664" 2-2-3-2-4 Bilan : PAGEREF _Toc148728664 \h 274
HYPERLINK \l "_Toc148728665" 2-2-3-3 Un emploi célinien du futur et du conditionnel ? PAGEREF _Toc148728665 \h 277
HYPERLINK \l "_Toc148728666" 2-2-3-3-1 Le brouillage de lénonciation par le conditionnel PAGEREF _Toc148728666 \h 277
HYPERLINK \l "_Toc148728667" 2-2-3-3-2 Le futur comme moyen - parmi dautres - de dénonciation de la parole PAGEREF _Toc148728667 \h 281
HYPERLINK \l "_Toc148728668" Retour à linfinitif : PAGEREF _Toc148728668 \h 288
HYPERLINK \l "_Toc148728669" Conclusion PAGEREF _Toc148728669 \h 289
HYPERLINK \l "_Toc148728670" Bibliographie PAGEREF _Toc148728670 \h 294
Introduction
Futur, conditionnel et imparfait ont en commun de susciter des débats sur leur statut : avons-nous affaire à des temps, à des modes, à des aspects, à des déictiques, à des anaphoriques
? Si la diversité des débats sexplique par lexistence dapproches descriptives différentes, elle ne peut se résoudre à cette seule explication. En effet, létude des analyses morphologiques du futur et du conditionnel et leur mise en relation met en évidence la difficulté que pose lidentification du R que le conditionnel partage avec le futur et du ai quil partage avec limparfait. Autant de similitudes formelles qui ont amené à intégrer le conditionnel dans le mode indicatif. Intégration facilitée dans la mesure où les descriptions des valeurs modales du conditionnel trouvaient écho à des valeurs dites modales du futur et de limparfait dont le classement dans le mode indicatif na été discuté que de façon sporadique.
Notre intérêt sest donc porté sur ce R : est-il un morphème identifiable ou lélément dune corrélation ? Pour répondre à cette question, nous avons mené jusquà son terme une analyse morphologique dont les résultats ne manquaient dêtre problématiques tant ils se différenciaient des analyses précédentes.
En effet, notre analyse nous a conduite à poser lexistence de la combinaison de deux morphèmes au lieu dun seul. Ce qui était reconnu comme une étrangeté formelle du conditionnel allait sappliquer à tous les autres « temps » de lindicatif ce qui fait que, paradoxalement, cette analyse morphologique devrait permettre, du moins est-ce notre ambition, dunifier la multiplicité des analyses sémantiques en éclairant dun jour nouveau la diversité des effets de sens.
Dun côté, nous aboutissons à léclatement des tiroirs verbaux, déstabilisant alors un système qui semblait satisfaisant, de lautre, nous proposons une approche des valeurs dites temporelles qui rend compte aussi des valeurs modales.
Bien que consciente de la difficulté de la tâche, nous avons essayé de la mener jusquau bout en choisissant une voie de traverse entre la liberté et lérudition, une voie qui consiste à chercher à établir un dialogue entre les résultats potentiels de notre analyse et les questions qui se posent de façon récurrente dans la littérature linguistique traitant du système verbal, ne suivant pas ainsi la mise en garde de Noreiko :
« Assurément, pour prétendre à démêler le problème de lagencement temporel des formes verbales en français, là où tant de savants, et non des moindres, se sont déjà aventurés, il faut une dose de témérité dépassant lordinaire. »
Notre démarche consistera en un va-et-vient entre ces analyses et lélaboration dun système dexplications basé sur lexploitation sémantique des oppositions morphologiques et sur le concept de combinaisons de variables.
Notre objectif final est didentifier des valeurs fondatrices qui permettent de réduire latomisation des explications des formes verbales, de comprendre pourquoi leur usage permet une telle dispersion du sens. Bien évidemment, il ne sagit pas de nier lexistence dénoncés qui peuvent sembler paradoxaux mais de comprendre comment les valeurs fondamentales servent de tremplin à lélaboration de sens en contexte -quil soit linguistique ou extra linguistique. Pour cela, nous tâchons dexplorer lanalyse des variantes que permet la convocation de lun ou de lautre paramètre de la situation dénoncé dans la désignation dun procès.
Le corpus que nous utiliserons est élaboré à partir du roman Voyage au bout de la nuit de Céline. Il sera complété dexemples extraits de la vie quotidienne, de journaux ou empruntés aux analyses linguistiques qui ont précédé cette recherche. Le corpus célinien sera exploité également dans le cadre dune stylistique qui postule que lécrivain, par lusage original quil fait du langage, en met au jour les possibles.
Après avoir mené lanalyse morphologique des « temps », nous examinerons le réinvestissement sémantique de la combinaison de deux imbrications dune double opposition [Ø/(±R)] et [Ø/(ai/a)] : la première imbrication introduit à lintérieur dune opposition du présent aux quatre autres « temps » un morphème ±R qui, apparaissant également à linfinitif, différencie le couple (futur-conditionnel) du couple (passé simple-imparfait). La seconde introduit à lintérieur dune opposition du présent aux quatre « temps » un morphème ai/a qui différencie le couple (conditionnel-imparfait) du couple (futur-passé simple).
Première partie : Analyse formelle
« Les sons, Monique, se déploient dans le temps comme les formes dans l'espace, et, jusqu'à ce qu'une musique ait cessé, elle reste, en partie, plongée dans l'avenir. » Yourcenar, M., Alexis ou le traité du vain combat.
Pourquoi sattarder sur laspect formel des « temps » pour mener leur analyse ? Ne serait-il pas plus probant de lister les effets de sens possibles des variantes verbales et de les rapporter aux situations pragmatiques de leur emploi pour en saisir lessence ? Ne sagit-il pas dun détour inutile ?
Sil nous paraît nécessaire de nous arrêter dabord sur la forme, telle quelle a été analysée et telle quil est possible de lanalyser, cest parce que le conceptuel ne sénonce quà travers du matériau, plus précisément à travers des rapports formels marqués.
« Le signe est dun ordre de réalité particulier, que nous appelons précisément le formel, lequel se met en uvre dans de la matérialité. Le problème majeur de la linguistique contemporaine est toujours celui de lémergence au formel, qui ne saurait être conçu comme une logique transcendante, ni, à linverse réifié. »
Sil est stérile de sarrêter à lanalyse formelle sans la réinvestir en sens, il nous paraît également vain délaborer une recherche sémantique qui ne prenne pas en compte ce système de la langue, ces oppositions formelles que tout locuteur prend en compte et réaménage pour désigner ce quil est convenu dappeler le « réel ».
Or, cette prise en compte naurait été sans doute quun simple rappel si lon navait pas fait le constat que les linguistes, même au sein dune seule théorie comme les structuralistes, nadoptaient pas tous la même déconstruction morphologique du futur et du conditionnel sans pour autant remettre en cause lidée que leur objet détude soit le même. Ils posaient un certain nombre danalogies mais sans préciser lensemble de leur analyse. Létude approfondie de certains dentre eux permet de comprendre quon peut adopter une analyse morphologique avec des démarches sensiblement différentes et que ces différences conduisent à des résultats fort divers.
Malgré la diversité de ces analyses, il est frappant de constater la grande homogénéité des analyses sémantiques du conditionnel qui se réclament dun fondement morphologique. En effet, tout en notant létrangeté de la construction sur laquelle ils basent leurs analyses sémantiques, les descriptions classiques partent dun découpage du conditionnel qui cumule le morphème du futur et celui de limparfait, découpage quils présentent comme une évidence. En témoignent ces quelques exemples :
« La recherche de linvariant sémantique est fondée sur le principe de correspondance « une forme, un sens » et sur la conviction que les effets de sens dune forme naissent de linteraction du sens unique avec les éléments du contexte [
]. Appliqué au conditionnel, ce principe incite à chercher un sens unique, stable, au morphème rais, morphème composé comme on sait qui intègre les morphèmes de limparfait et du futur. »
On trouve cette figure de lajout, dans la grammaire de Riegel, par exemple :
«Le conditionnel présent est formé par adjonction de la désinence de limparfait (-ais, -ait, -ions,
) à la désinence spécifique du futur (-r-) : il chante-r-ait. Cette formation saccorde avec le réseau de relations et les emplois du conditionnel : il peut marquer le futur et semploie souvent en corrélation avec un temps du passé. »
Ou encore chez Csecsy :
« Le Conditionnel Présent est vraiment à cheval sur les deux types de paradigmes [futur et imparfait], il représente comme la synthèse ou la réconciliation des deux. »
Cest aussi lanalyse de spécialistes des temps verbaux comme Gosselin qui fait du conditionnel un temps spécifique, le seul pour lequel il postule deux intervalles de référence :
« Cette exigence est tout à fait singulière dans le système verbal du français. Elle peut être mise en rapport avec la constitution morphologique du conditionnel, qui articule deux morphèmes temporels (lun qui exprime le passé, et lautre la postériorité). »
ou Abouda :
« Les deux informations (la prospection et la disjonction entre lespace du locuteur et celui de lautre énonciateur) sont directement lisibles au niveau morphologique (laccumulation de deux morphèmes temporels du futur et de limparfait). »
Ou comme Vetters et Caudal, très récemment :
« le conditionnel associe la sémantique de limparfait en tant que marqueur du non-actualisé et celle du futur, en tant que marqueur de consécution.. [
] Nous commencerons par étudier la sémantique des composants morphologiques du conditionnel, à savoir limparfait et le futur. »
On pourrait multiplier encore les exemples, tant cette analyse est effectivement banalisée.
Dès lors, il nous a semblé nécessaire, dans un premier temps, de revenir sur les descriptions morphologiques du futur et du conditionnel. Devant le foisonnement des analyses, nous avons recouru à deux critères très généraux de classement : la diachronie et la synchronie. Le premier critère nous donne une classe dans laquelle sont évoquées les analyses qui se basent sur létymologie latine du futur et du conditionnel. Le second regroupe les analyses structurales.
« entendant donc le temps geindre, cogner, ahaner, cheminer sans trêve dans le noir (et, dans les instants de silence, lugubrement ponctué par les lointains et sporadiques meuglements de bufs oubliés sur une voie de garage) tandis que la lugubre et frivole pendule Louis XV détraquée pour toujours, aux aiguilles immobilisées pour toujours, et le fatidique et cyclopéen cadran lumineux emplissant la fenêtre comme un astre voyeur, se trouvent là pour imprimer avec insistance dans lesprit du voyageur ou des amants clandestins cette furieuse et haletante angoisse du provisoire, du limité, conférant même au plaisir son caractère tragique qui est davoir, bref ou long, une fin » C. Simon, LHerbe.
1- Etat des lieux de lanalyse formelle du futur et du conditionnel
Nous nous proposons, dans cette partie, de faire létat des lieux des analyses formelles du futur et du conditionnel. Cet état des lieux prend tout son sens dans le constat dune véritable diversité des résultats. Il est possible de classer ces résultats selon deux analyses morphologiques différentes de ces formes verbales : une présentation qui prend appui sur lanalyse diachronique de ces temps ou une analyse structurale qui aboutit elle-même à des découpages variables selon les postulats des auteurs. A travers les écrits des linguistes les plus représentatifs, nous verrons quels sont les principes danalyse qui sous-tendent et expliquent cette diversité.
1-1 Une analyse qui sépare linfinitif et un suffixe constitué du verbe avoir.
1-1-1 Une analyse diachronique
Aujourdhui, la plupart des historiens de la langue (à lexception notable de Lanly dont nous parlerons plus loin) considèrent que le futur et le conditionnel ont vu leur formation à partir de la périphrase latine habere + infinitif (« avoir à + infinitif »). Tous les ouvrages magistraux admettent cette étymologie du futur français sans discussion depuis Brunot, Dauzat, Bruneau et Brunot, Edouard Bourciez, P. Fouché, Wagner, entre autres.
Selon ces auteurs, mais aussi des linguistes plus récents comme Moignet, Zink et Burridant, le futur latin est tombé en désuétude du fait de son évolution phonétique qui tendait à le confondre avec d autres temps, comme le montre Zink :
« Au IIIe siècle, les évolutions de /b/ intervocalique en /²/ > /v/ et de /-/ bref en // entraînent la confusion de amabit (fut.3) avec amavit (parf.3) et de legis it (prés.2-3) avec leges et (fut. 2-3). »
De ce fait, ce sont des périphrases qui deviennent le moyen privilégié dexpression du futur du latin populaire. Zink cite par exemple lecturus sum (part. fut., je me propose de lire) ou legendus est (hic liber. Adj .vbal, ce livre est à lire) et les périphrases infinitives formées avec les auxiliaires de modalité debeo, venio, volo, incipio, possum et habeo. Ce dernier auxiliaire aurait eu une fortune tout à fait particulière puisque les historiens proposent de voir dans la désinence du futur simple de lancien français attesté pour la première fois au VIIè siècle, cet auxiliaire habeo. Le futur serait alors le fruit dun phénomène de grammaticalisation de la périphrase Infinitif + habeo,( jai à chanter). Moignet souligne dailleurs qu « il nest nullement nécessaire de supposer au syntagme une valeur dobligation » et propose plutôt de traduire par « jai la perspective de chanter », justifiant ainsi par le caractère neutre de lexpression, le fait quelle ait été privilégiée par lévolution.
Passer de habeo cantare à je chanterai demande d intervertir l ordre des constituants de la périphrase et de substituer à l auxiliaire postposé des formes contractées ou amputées du radical. Zink propose ces deux paradigmes intermédiaires : *ayyo, as, at, mus, tis, aunt pour le présent, am, as, at, emus, etis, ant pour le passé. Les linguistes sont contraints de les reconstituer car ils ne sont pas attestés, les premiers écrits en ancien français correspondant à un état déjà avancé de la langue. C est pourquoi lépoque à laquelle se sont figés les éléments du syntagme est difficile à préciser.
Pour présenter un récapitulatif de lévolution du futur, la grammaire de Burridant offre lavantage de présenter lensemble du paradigme :
habeo > cantaraio > chanterai
habes > cantaraes > chanteras
habet > cantaraet > chantera(t)
CANTARE + habemus >habumus > cantaraunt > chanterons
habetis > cataretis >chanteroiz
habent > habunt > cantaraunt > chanteront
La forme ai est une forme attestée du verbe avoir en latin tardif. As et at correspondent à une réduction de habes et habet. Aunt demande de poser lhypothèse dune forme tardive habunt non attestée, mais qui pourrait venir dune analogie avec sunt selon Burridant. Ce sont surtout les formes verbales des deux premières personnes du pluriel qui sont problématiques car elles imposent la chute du radical hab qui ne sest pas produite pour le verbe avoir lui même : nous avons, vous avez et non* nous ons *,vous ez. Moignet lexplique ainsi :
« Linfinitif fournissant un radical de futur, la présence du radical du verbe auxiliaire est disconvenante là où il se distingue clairement la désinence : av-ons, av-eiz se réduisent ainsi à ons, -eiz. Cest un fait dordre systématique dont les règles de la phonétique historique ne rendent pas compte. »
Lanalyse diachronique du conditionnel est parfaitement symétrique de celle du futur. Les historiens de la langue postulent la synthétisation de la même périphrase à limparfait, cette fois. Ce qui amène à reconstituer ces paradigmes :
habebam > * cantaream > chantereie > chanteroie
habebas > * cantareas > chantereis > chanteroies
habebat > *cantareat > chantereit > chanteroit
CANTARE + habebamus >* cantareamus > chanteriiens > chanterions
habebatis > *catareatis > chanteriiez > chanteriez
habebant > *cantareant > chantereient > chanteroient
Si les désinences de limparfait sont aisément repérables, ce temps pose cependant une difficulté sur le plan sémantique pour justifier de son rapport avec le conditionnel. En effet, si jai à chanter offre une certaine équivalence sémantique avec je chanterai, il est diffcile de trouver une correspondance entre javais à chanter et je chanterais. Zink propose cette explication :
« En contexte hypothétique, le recul du projet dans le passé se veut une manière de suggérer quil nest pas venu à réalisation : sanare te habebat Deus per indulgentiam, si fatereris (Dieu te guérissait par sa grâce, pour peu que tu passes aux aveux. Pseudo-Augustin, Serm., 253, 4). De cet emploi dérive le conditionnel. »
Il est intéressant de remarquer que le phénomène de la grammaticalisation est perçu comme un phénomène cyclique par les historiens de la langue qui, tous, remarquent que la formation du futur de lancien français est la même qui avait générée celle du latin :
« Le futur sest constitué dans les langues romanes selon les processus mêmes qui lavaient généré en latin et pour des raisons identiques qui tiennent à la difficulté de se représenter lavenir autrement que sous la forme dun mouvement de pensée vers un procès souhaité mais retardé, ou déjà en voie de réalisation, ou simplement possible. Le latin a dabord exprimé le futur par le biais du subjonctif : legam es
, ero is
(doù les croisements avec amem es
et legam as) et par recours à la périphrase (thème + racine bhew = être, devenir) : ama bo bis
(littéralement je suis pour aimer) avant que lusage ne grammaticalise les finales pour en faire des morphèmes spécifiquement temporels. »
Selon cette théorie de la grammaticalisation, expression synthétique et expression analytique du futur alterneraient dans le temps.
1-1-2 Une analyse synchronique sous-tendue par létymologie
De cette analyse diachronique découle une première analyse du futur et du conditionnel en synchronie, cette fois : de nombreux linguistes considèrent que linfinitif du verbe forme le radical des formes verbales du futur et du conditionnel et le verbe avoir conjugué le suffixe, ce qui aboutit à ce type de présentation :
Infinitif / radicalSuffixes du futur/verbe avoir au présentSuffixes du conditionnel /verbe avoir à limparfaitJe
chanteraiaisTuasaisIlaaitNousonsionsVouseziezIlsontaientFig.1
Ce tableau est tout théorique. Rares sont les linguistes qui en reprennent tous les critères pour justifier de leurs analyses, si ce nest Yvon. Plus souvent, ladhésion à lexplication diachronique est partielle et le linguiste ne la reprend que pour justifier une de ses analyses. Il est remarquable dailleurs de constater que lon retrouve certains éléments de cette analyse imbriqués à une analyse structurale morphophonétique ou générativiste comme nous le verrons, plus loin.
1-1-2-1 Identité remarquable du radical
Cette formation, dans la mesure où elle postule un radical commun au futur et au conditionnel, rend compte du fait que futur et conditionnel présentent toujours une base identique, comme la souligné Yvon en 1952 :
« Pour la forme aussi le sauriez ressemble au saurez plus quil nen diffère : la différence porte uniquement sur les syllabes finales, -ai, -as, -a, -ons, -ez, -ont dune part, -ais, -ais, -ait, -ions, -iez, -aient dautre part ; mais il est remarquable que dans tous les verbes français la notion envisagée est exprimée dans le saurez et le sauriez par les mêmes phonèmes, si différents que ceux-ci soient de ceux qui figurent dans les autres tiroirs du même verbe, serez et seriez (êtes), aurez et auriez (avez), irez et iriez (aller), verrez et verriez (voyez), craindrez et craindriez (craignez) par exemple. Ainsi le saurez et le sauriez constituent dans le verbe français un groupe bien caractérisé. »
Cette identité si remarquablement régulière entre radical-infinitif du futur et du conditionnel explique que certains descripteurs aient opté, au moins partiellement pour cette analyse même si linfinitif ne correspond pas toujours au radical du futur et du conditionnel. Cest le parti que prend Hervé Curat dans son analyse du futur. Il montre tout dabord à laide dun tableau que linfinitif ne correspond pas à la base de plusieurs futurs et conditionnels.
« Bien que simple, cette description est inadéquate car elle ne convient pas pour les verbes polyradicaux : même sils montrent bien un radical identique suivi dun r- au futur et au conditionnel, ce nest pas le radical de linfinitif :
RADICAL 1RADICAL 2 Voir
Etre
Avoir
Aller
cueillirverras
seras
auras
iras
cueillerasverrais
serais
aurais
irais
cueillerais
Après quoi, il propose cette définition :
« La base sur laquelle sont construits le futur et le conditionnel doit être décrite [radical2 + -r-] et non [infinitif]. »
Autrement dit, il insère le r- à la base de ces deux formes verbales, posant le radical dun radical en quelque sorte.
Lui aussi insiste sur cette particularité du futur et du conditionnel:
« La description [radical2+ -r-] met en relief deux points communs entre les sémiologies du futur et du conditionnel : la présence du r-, et aussi quils ont, précisément, toujours un radical commun, qui pour certains verbes polyradicaux ne se rencontre même quà ces deux temps (ir-, fer-, ser-, aur-, etc.) »
1-1-2-2 Prise en compte du temps des désinences
Létymologie peut aussi servir à justifier du classement du futur et surtout du conditionnel parmi les temps de lindicatif. En effet, reconnaître un suffixe présent ou un suffixe imparfait conduit à accorder au futur et au conditionnel, le même statut quà ces deux formes verbales. Cest ainsi que, par exemple, Imbs justifie son classement :
« Du point de vue de son étymologie, le conditionnel est un imparfait de lindicatif, comme le futur est un présent. La morphologie actuelle a laissé au conditionnel toutes ses caractéristiques dimparfait. Il y a donc lieu, en morphologie pure, de classer le conditionnel avec les formes de lindicatif, il est un imparfait à côté de ce présent dun type spécial quest le futur français. »
Considérer le verbe avoir dans les désinences du futur et du conditionnel conduit certains auteurs à justifier cette présence sur le plan sémantique : il sagit alors de retrouver les sèmes du présent ou de limparfait dans les formes synthétiques respectivement du futur et du conditionnel. Ainsi, Yvon cherche-t-il à faire coïncider parfaitement létymologie et le sens moderne :
« Les syllabes finales du saurez, continuation du présent de lindicatif dun verbe latin, situent au moment de la parole le point doù lesprit envisage, imagine ou suppose le procès à réaliser ; continuation dun tiroir passé du même verbe, les syllabes finales du sauriez situent au contraire ce point dans le passé et contribuent ainsi à augmenter la dose dhypothèse exprimée ; le locuteur qui emploie ce tiroir sait souvent au moment où il parle que lévénement supposé nest pas, ne peut pas être réalisé. »
De même Maingueneau conclut-t-il à la proximité du futur simple et du futur périphrastique en montrant que tous deux sont constitués dun présent :
« Le FS peut sanalyser comme la combinaison de linfinitif boxer- et du présent de lauxiliaire avoir : ai, as, a, av-ons, av-ez, ont (cette « coïncidence » sexplique diachroniquement puisque le FS est issu de la combinaison dun infinitif et de létymon du verbe avoir, le latin habere). Cette analyse permet de voir que FS et FP sont morphologiquement identiques, étant constitués des mêmes éléments, mais combinés différemment :
FP = v-(((((, al-((((, v-(( + Infinitif
FS = Infinitif + (((((((((((((. »
Inversement, Guillaume, sil se rallie apparemment au découpage dun radical qui correspond à linfinitif car il inclut le r-, ne conserve que limparfait dans les désinences du conditionnel et pose une nouvelle analyse du futur qui inclut le suffixe du passé simple :
« Le conditionnel [est] une forme temporelle qui est au futur communément dit ce que limparfait est au parfait défini. Les indices de flexion : aim-ais, aimer-ais, aim-ions, aimer-ions, et aim-ai, aimer-ai, aim-as, aimer-as, aim-a, aimer-a en sont un indice.
1-1-2-3 Prise en compte de la signification lexicale du verbe avoir
Enfin, le parallélisme avec lanalyse étymologique impose de conserver la signification du lexème avoir intégré au futur. Il sagit alors pour certains auteurs, comme Yvon, de justifier de cette signification dans celle du futur :
« On peut dire encore à ce propos que les deux séries de terminaisons, continuant un verbe latin qui exprimait en gros lidée de posséder, détenir, occuper, dénotent leffort de la pensée qua signalé M. Guillaume pour semparer de lavenir, pour réaliser au maximum les faits imaginés et pour faire de lépoque future un pendant symétrique de lépoque passée. »
1-1-3 Une autre analyse diachronique
La plupart des historiens de la langue se rallient à létymologie du futur et du conditionnel exposée plus haut. Il est cependant intéressant de relever quelle a été soumise à controverse, dans les années cinquante, par un linguiste, Lanly, qui récuse cette analyse :
« Cest parce que lon a cru voir dans le futur chanter-ai deux composants, linfinitif chanter et la première personne du verbe avoir, que lon a dit quil remontait à cette périphrase : puis on a essayé de justifier son sens et on a cherché des exemples dans le latin classique et le latin vulgaire. [
] la règle commune qui a été pratiquée pendant tout le Moyen Age et le XVIème siècle, pour le verbe quon créait, cétait de tirer le futur de linfinitif (suivant le type 2 [jobéirai] en y ajoutant les désinences a, as, a, (av)ons, (av)ez empruntées au verbe avoir mais devenues de véritables flexions temporelles et personnelles. Cela nétait cependant pas une raison pour ériger ce procédé empirique, valable à une époque, en vérité scientifique. »
Même si lanalyse, originale, de Lanly na pas donné lieu à des analyses morphologiques en synchronie, il peut être utile de faire le résumé de ses arguments pour évaluer les perspectives quelle peut ouvrir ou mesurer la part dincertitude de lhypothèse diachronique habituellement retenue.
Au lieu de faire dériver le conditionnel de la forme « infinitif + habere » à limparfait par analogie avec la formation communément acceptée du futur, Lanly propose den établir lorigine au subjonctif imparfait latin. Selon lui, cette forme latine, au moment où elle menaçait de se confondre avec linfinitif, se serait renforcée du suffixe imparfait par irradiation. Dès lors, il inverse le rapport analogique entre le futur et le conditionnel : ce serait le futur qui se serait créé, par analogie, sur le conditionnel. Ses principaux arguments sont dordre phonétique, syntaxique et sémantique.
Sur le plan phonétique, Lanly met en doute la formation « infinitif + habere ». En particulier, il souligne que la chute de la syllabe hab nest pas justifiée par les historiens de la langue.
Selon lui, chantereie, première forme attestée du conditionnel en ancien français postule cantaréa, qui nest pas attesté, qui permettrait de remonter à cantar(em), le subjonctif latin décadent auquel sajoute le suffixe éa.
Ce suffixe éa est un suffixe de limparfait qui, selon lui, se serait ajouté au subjonctif imparfait décadent par irradiation -ou symétrie- du fait de lemploi habituel de cette forme dans des corrélatives hypothétiques ou encore des complétives de discours indirect qui présentaient un imparfait dans la seconde proposition :
« La langue a pallié cette infirmité par un moyen assez simple : dans le couple hypothétique elle a étendu le morphème du verbe subordonné au verbe principal :
*Si voléa, cantar(em) ( *si voléa, cantar-éa
Si voléatis, cantarétis ( * si voléatis cantareatis »
Il aurait pu obtenir son morphème de renfort également dans la subordonnée complétive de discours indirect :
« Dicit quod veniet » (il dit quil viendra)
au passé :
Dicebat quod veniret.
Dans la lingua romana rustica cette phrase devenait sans doute :
Dicéat quod venir-éat (par extension du morphème éat au second verbe)
Et en ancien français :
(il) diseiet que (il) viendreiet.
Français moderne : il disait quil viendrait. »
Sur le plan phonétique, cette solution permet dexpliquer aussi certaines formes aberrantes des bases au futur : jirais dérive plus logiquement de irem, subjonctif imparfait latin que de « je + aller + habebam », linfinitif latin ire ayant disparu avant lapparition de la forme synthétique du futur en ancien français. Cette base est la plus significative mais Lanly cite également : je serais, jaurais, je viendrais, je tiendrais dans un article récent de LInformation grammaticale et je ferai, je donnerai, jaurai et je saurai dont il détaille létymologie dans son article de 1958.
Sur le plan syntaxique, Lanly développe aussi tout un argumentaire selon lequel le passage dune périphrase à une forme synthétique ne peut se faire aussi rapidement que le suppose lanalyse « infinitif + habere». Lanly compare lévolution supposée du futur simple français à ce temps en anglais pour remarquer que sa grammaticalisation, dans cette langue nest pas encore parfaitement opérée au bout de douze siècles :
« Certes, il est avéré que des périphrases peuvent être senties à la longue comme des futurs. Nous pensons dabord à langlais : les sujets parlants qui ne sont pas grammairiens sentent en général « I shall sing, you will sing »
comme un futur. Mais dès que les auxiliaires sont inversés (I will sing, you shall sing
) ce nest plus exactement un futur et will, en particulier, retrouve son sens propre. [
]
Même dans lordre normal (I shall sing) « il suffit de la plus légère emphasis pour rendre à shall et will un peu de leur sens plein [shall : devoir, will : vouloir]. Lidée de futurité nest presque jamais totalement dépouillée de ce sens originel de devoir et de vouloir
»
Il est donc surprenant, selon lui, que lancien français ait su synthétiser en si peu de temps (les données historiques ne permettent pas de situer précisément le figement de la périphrase) la périphrase « habeo + infinitif » dautant que lauxiliaire qui compose la périphrase na pas encore acquis la transparence sémantique dun shall anglais qui permette de le fondre au lexème quil introduit.
Il résume plus tard cette idée ainsi :
« Nous nous fonderons aussi sur des nécessités linguistiques : il aurait fallu bien longtemps pour quune périphrase du type « elle avait à supporter » prît un sens modal (« elle supporterait »). Imagine-t-on que la langue ait pu se passer un siècle, un an, voire un seul jour, de la forme exprimant le procès imaginé ? A supposer quune forme nouvelle fût alors en voie dévolution pour ce faire, ne devait-elle pas entrer en concurrence avec elle ? Nous navons pas soutenu une chose très différente, sauf toutefois que la forme nouvelle, en se greffant sur lancienne et en la revigorant physiquement, aurait fait léconomie dune évolution sémantique nécessairement lente et longue et même dune évolution phonétique complète. »
Lanly interroge également linversion de lordre que suppose la grammaticalisation de la périphrase verbale « jai à chanter » :
« A partir du moment où une préposition sest introduite entre habeo et cantare, elle a été nettement distinguée du futur, sous sa forme définitive « (j)ai à chanter ». Habeo cantare et cantare habeo nauraient pas pu produire en même temps deux résultats de formation aussi populaire- aussi différents de sens et de forme, situés à des degrés dévolution aussi éloignés que « jai à chanter » et « je chanterai ». Si la préposition « à » introduite entre habeo et cantare, a été exigée en quelque sorte par la logique de la langue française pour orienter linfinitif vers lavenir (et marquer ainsi une différence avec jai chanté), lexpression serait devenue, dans lordre inverse des éléments :
à chanter (j) ai.
Or, cet ordre nest pas conforme au génie de la langue française. Nous savons bien que dans les textes latins du VIIIè siècle les termes figurent tantôt dans un ordre, tantôt dans lautre et quà partir du VIIIè siècle, cest plutôt lordre cantare habeo qui domine. Mais il serait surprenant que dans la langue parlée ce fût lordre qui nétait pas français qui eût triomphé, précisément dans une période où se manifestent les tendances de la nouvelle langue et particulièrement celle qui consiste à placer lobjet après le verbe et qui est fondamentale. Lordre des termes cantare habeo ne pouvait pas sinstaller dans le français en formation sous la forme « à chanter (j)ai » ni sous la forme « (je) chanter + ai ».
Sur le plan sémantique, enfin, un contre-argument et un argument semblent particulièrement probants : Lanly souligne la difficulté que peuvent avoir les linguistes à trouver un lien sémantique entre la périphrase « infinitif + habebam », javais à chanter et la forme synthétique du conditionnel je chanterais. Il cite à ce propos R.-L. Wagner :
« Il nous est impossible de fournir un seul exemple de infinitif + habebam qui soit par rapport à infinitif + habeo (= futur simple) dans la situation où notre forme en rais se trouve vis-à-vis de la forme en rai. »
et aussi :
« Il faut jongler avec les hypothèses pour établir que la forme en rais, originellement forme du passé, a pu devenir une forme modale propre à engager le présent et lavenir. »
A linverse, le conditionnel français correspond au sens du subjonctif imparfait latin que Lanly requalifierait bien volontiers « conditionnel latin » - ou plus exactement à un syncrétisme entre lirréel et le potentiel latins qui se serait produit au cours de lévolution du latin à lancien français. Les premiers emplois attestés du conditionnel en ancien français paraissent étonnamment modernes ce qui attesterait aussi de cette filiation directe.
«Viendrait ou chanterais reproduisent de si près valeur et forme- deux emplois caractéristiques du subjonctif latin quils ne peuvent pas ne pas être le prolongement de cette forme verbale »
Au total, le système explicatif de Lanly, sil nest généralement pas retenu, est de nature, nous semble-t-il, à remettre en cause une analyse diachronique qui fonde une analyse synchronique adoptée, en partie ou en totalité, par de nombreux théoriciens de la langue.
Bilan :
Il ne sagit pas dans le cadre de cette recherche de valider ou dinvalider la thèse généralement admise de la formation du futur et du conditionnel pour en tirer des conclusions en synchronie mais, dans la mesure où, comme nous lavons montré, cette thèse est souvent reprise pour valider une analyse synchronique sous la forme dun argument dautorité, il paraît important de savoir la repérer et den mesurer les limites. Dune part, cette analyse diachronique nest pas attestée par un corpus en ancien-français : il sagit dune reconstruction logique qui peut donc être soumise à contestation. Dautre part, comme nous allons le voir, admettre que futur et conditionnel diffèrent des autres temps de lindicatif du fait quils seraient composés de linfinitif implique une déconstruction inaboutie dans la mesure où linfinitif présente un morphème R dont on peut postuler quil est commun au futur et au conditionnel.
1-2 Une analyse structurale qui sépare le R de la base.
Les fonctionnalistes sont probablement les premiers à avoir proposé une analyse du futur qui sépare le R de la base. Cest parce que lanalyse structurale pose pour principe premier la prise en compte de la forme orale et quà loral, lanalyse du futur et du conditionnel construits sur la base de linfinitif nest plus aussi pertinente quelle pouvait le paraître à lécrit quil est devenu nécessaire de revoir le statut de linfinitif.
Ces linguistes remarquent que la présentation traditionnelle des conjugaisons « ne sattache quaux formes écrites du verbe ». Or, « la conjugaison orale doit être considérée comme la conjugaison de base », la conjugaison écrite devrait correspondre à un simple passage du code oral au code écrit. Il y a inversion de lanalyse dans la présentation traditionnelle: on oublie que lécrit nest quune transcription de loral et ne permet donc pas de fonder lanalyse des formes. Suivant cette remarque, on constate, par exemple, que le tableau du futur que nous avions présenté plus haut nest plus aussi valide si lon opte pour sa transcription phonétique, infinitif et radical ne coïncidant pas pour le verbe présenté :
Infinitif / radicalSuffixes du futurSuffixes du conditionnel((
(((t(((((t(((((((((((((((((((((((((((((Fig.2
Le second principe adopté par les structuralistes est celui de la commutation entre les différentes formes pour en dégager les morphèmes. Selon la définition de Martinet,
« Cest lopération dite de commutation qui permet de dégager les monèmes. La commutation réussit lorsquon constate quune différence de sens correspond à une différence de forme et vice-versa. Lutilisation de cette opération se fonde sur la notion saussurienne de signe qui suppose la coïncidence dun signifié et dun signifiant et dont on peut déduire que rien nest proprement linguistique qui nimplique une telle coïncidence. Lopération commutative qui permet de dégager les différences de sens correspondant à des différences de forme sera poursuivie dans lanalyse de la langue jusquau moment où lon aboutira à des signes quil nest plus possible danalyser comme la somme de deux signes distincts.»
Selon Hjelmslev,
« lépreuve de commutation est un outil dinvestigation indispensable qui permet non seulement de rendre compte de la structure dune langue à un stade donné de son développement, et des changements linguistiques mais aussi détablir une typologie des langues. »
Cette méthode scientifique appliquée aux formes verbales doit permettre daboutir à un résultat fiable sur le plan formel. Pour autant, nous constaterons que, pour le futur et le conditionnel, elle fournit des découpages variables selon les linguistes qui lont utilisée. Dune part, on trouvera les tenants dune analyse du futur en base + désinence Ra (Martinet, Dubois, Touratier
), que cette désinence soit précisément définie ou non ; de lautre, les tenants dune analyse en base + R + A (Pinchon et Couté, Van den Eynde et Blanche-Benveniste
) dans laquelle le R est le suffixe du futur et le A un suffixe de personne. Ces résultats divergents sont également repris dans de nombreuses analyses ultérieures.
1-2-1 Le découpage dune désinence Ra au futur.
1-2-1-1 Martinet, 1958
Dans larticle intitulé « De léconomie des formes du verbe en français parlé » repris dans Le Français sans fard en 1969, Martinet cherche à montrer les phénomènes danalogie qui aboutissent à simplifier les conjugaisons dans lusage parlé de la langue. Il souligne en particulier que lisolement de certaines distributions verbales conduit à en éviter lemploi. Ce faisant, il sattache à repérer les différents radicaux ou thèmes des verbes conjugués, ce qui le conduit à découper avant le r- au futur et au conditionnel :
« On aura en pratique intérêt à choisir linvariabilité comme critère pour déterminer ce que, dans le cas des modes personnels, nous considérons comme faisant partie de la désinence ; par exemple, la désinence de futur sg. 3, sera donnée comme /-ra/, et non comme /-a/, parce que /-ra/ est ce qui est commun à tous les futurs sg.3 »
Mais il ne sattache pas à déconstruire ce quil nomme désinence : dans son analyse, la désinence du futur a pour initiale r-, la désinence du conditionnel est constituée de r- + les désinences de limparfait. Il nentre pas dans son projet de les opposer pour déconstruire, il sintéresse plutôt au « lieu » de découpage entre radical et suffixation. Enfin, il faut remarquer, quau moins dans cet article, lobjectif de Martinet nest pas dopérer une analyse systématique. Il le signale dailleurs :
« Il ne faudrait pas chercher dans létude qui précède ce quon na pas voulu y mettre, notamment une analyse formelle du verbe français visant à la présentation la plus simple compatible avec lexhaustivité. »
Cest ce qui peut expliquer labsence de déconstruction des désinences.
Cependant, dans sa Grammaire fonctionnelle du français, Martinet détaille plus précisément son analyse du futur :
« Le monème futur présente toujours un r- /-r-/ qui apparaît seul dans nous chanter-ons /nu ((((-r-(/. Mais le /-r-/ nest plus seul dans /il ((((-ra/. On verra toutefois dans /-ra/ plutôt une variante du monème futur quune combinaison de /-r-/ avec un élément personnel /-a/ inconnu par ailleurs. »
1-2-1-2 Dubois,1967
Contrairement à ce qui est affiché par Martinet, on trouve un objectif de présentation ordonnée des conjugaisons du verbe dans La Grammaire structurale du français de Dubois, dont on peut dire quil cherche à systématiser dans un but denseignement les propositions de larticle « De léconomie des formes du verbe en français parlé » de Martinet, propositions qui étaient plus de lordre de lobservation que de la prescription. Pourtant, Dubois reprend son découpage en [ra] et en [-r(] sans le justifier et consacre toute son analyse au classement par bases sans reconsidérer les désinences posées par Martinet.
Ce désintérêt sexplique surtout par le fait quil sagit délaborer, pour la première fois, un classement par bases quil faut imposer en place du classement traditionnel par groupes fondé sur les désinences. La difficulté de la tâche est mesurable au fait que ce classement, à la fois plus probant et plus didactique, ne sest toujours pas imposé dans lenseignement du français langue maternelle aujourdhui. Dubois sest donc focalisé sur létablissement des bases et a rejeté lanalyse précise de ce quil appelle, comme Martinet, les désinences, comme sans intérêt pour létablissement dun classement des verbes.
De fait, Dubois montre le caractère infondé du classement de la grammaire traditionnelle qui prend pour critère les désinences verbales :
« Létablissement des conjugaisons classiques [
] repose fondamentalement sur la régularité des désinences, considérées comme lélément essentiel ;les conjugaisons sont formées à partir des marques spécifiques des verbes. Cette régularité est envisagée en minimisant les oppositions singulier/pluriel à la 3e personne, ou les différences entre les 1ère et 3e personnes. »
Il souligne aussi que les groupes correspondent à un classement des verbes latins, ce qui sadapte mal à la morphologie du français. On peut penser que cette critique que Dubois a menée de limportance accordée par les grammairiens aux désinences a pu le conduire a occulter de lanalyse de la suffixation.
Ces raisons expliquent que ne soit pas prise en compte la comparaison entre les suffixes du futur et du conditionnel chez Dubois comme chez Martinet.
1-2-2 Le découpage au futur dun suffixe -Ra + suffixes personnels.
Dans son ouvrage intitulé Le Système verbal français, Touratier se rallie à la thèse proposée par Martinet mais en prenant en compte les analyses différentes opérées depuis, en particulier les travaux de morphophonologie de Van den Eynde et Blanche-Benveniste et en analysant plus précisément la suffixation. Il part dune comparaison entre le futur et le conditionnel pour définir ce dernier :
« Il est difficile de ne pas retrouver dans le conditionnel dune part la marque de limparfait et dautre part la marque /R/ du futur, comme le montrent les deux paires minimales :
/nu ((((-(R-i-((/ ~ /nu ((((-(R-((/ ; nous chant-er-i-ons ~ nous chant-er-ons
/nu ((((-(R-i-((/ ~ /nu ((((-i-((/ ; nous chant-er-i-ons ~ nous chant-i-ons
Ceci veut dire quau point de vue morphologique, le conditionnel dit présent a tout lair dêtre un futur imparfait et donc dappartenir aux temps de lindicatif. Car si le futur est un temps de lindicatif et limparfait un autre temps de lindicatif, on ne voit pas comment la combinaison de ces deux temps de lindicatif pourrait ne pas appartenir aussi au mode indicatif. »
Chez Touratier, ces oppositions servent à définir le conditionnel et non le futur dont Touratier signale plus loin quil «est plus délicat à analyser». Il sagit de faire apparaître des morphèmes communs à ces trois formes verbales, dans une sorte de logique de lajout : le conditionnel serait du futur auquel on ajoute de limparfait. A défaut de poser un zéro, ce dont il sexplique par ailleurs, Touratier doit prendre en compte le /a/ qui apparaît aux personnes 2 et 3, le /(/ qui apparaît à la personne 1 et le /((( qui apparaît à la personne 6. Comme Martinet, il se propose dallier le /a/ au R pour en faire une variante du R du conditionnel. Mais il précise la formulation dun suffixe Ra en le rattachant, non seulement aux personnes 2 et 3, mais aussi aux autres pour lesquelles il propose des règles de réduction à la forme Ra, règles dont on peut comprendre la nécessité, ici, quand on sait que Touratier pose, à linstar de Martinet une hiérarchie des formes dans les cas dallomorphisme :
« Le futur est marqué par un segment /(()Ra/, auquel sajouterait, pour les deux dernières personnes, la marque de la série dallomorphes, à savoir /ty
(z)/ et /il
(t)/. La première personne, elle, ajouterait au segment /((()/ ce quon appelle une forme de remplacement, qui sécrit : /( ( ¢ (a)/ et veut dire que la voyelle /a/ du segment /Ra/ de futur, comme celle du segment /a/ de passé simple de conjugaison est remplacée par une voyelle de timbre /(/. »
« On peut admettre que les désinences de ces formes [aux trois dernières personnes] du futur présentent des réalisations particulières du même segment /(()Ra/ quaux trois premières personnes. [
] /R/ est une variante de /Ra/ devant voyelle et que /il(z)
. (((t)/ est une variante de /il(z)
(t)/, qui apparaît précisément dans le contexte du futur. »
Par ailleurs, Touratier propose plusieurs variantes du suffixe /Ra/ quil a identifié comme étant le suffixe du futur :
la variante /(Ra/ après un radical sachevant sur une consonne.
la variante /iRa/ pour un certain nombre de verbes qui ont un infinitif en ir, où le i est la voyelle thématique. (offrir, mentir, partir, dormir
)
les variantes /dRa/ et /tRa/
Bilan :
Si le découpage du futur Ra peut sembler identique chez Martinet, Dubois et Touratier, on constate cependant quon passe dune désinence non identifiée à un suffixe allomorphique parfaitement défini, y compris sur le plan phonétique. De plus, il faut signaler la proximité de vue dans lanalyse structurale que développent ces trois auteurs : il y a, en particulier, communauté didées sur les questions de lallomorphisme, du zéro, ce qui peut expliquer, nous le verrons plus loin, ce résultat commun.
Il faut souligner que ce découpage dun suffixe Ra, allomorphe du R du conditionnel, est passé dans la littérature linguistique et quon le retrouve notamment sous la plume de Wilmet, de Maingueneau, entre autres.
Pour autant, et nous lavons déjà signalé, ce nest pas la seule analyse que proposent les structuralistes et on trouve également un découpage en Base + R + a où le /a/ se combine cette fois avec les suffixes de personnes, pour composer une série allomorphique des marques personnelles.
1-2-3 Le découpage dun suffixe /R/+ désinence /a/.
1-2-3-1 Pinchon et Couté, 1981
Pinchon et Couté reprennent, en le modifiant, le classement par bases de Dubois pour le didactiser, ce qui les amène à présenter aussi un découpage des désinences. Le terme de désinence qui amalgamait plusieurs notions chez Martinet et Dubois (désinence de lindicatif présent aux trois premières personnes par exemple) se précise pour désigner la marque de la personne.
Ces auteurs procèdent à des commutations pour préciser les suffixes et logiquement, ils aboutissent à un découpage du conditionnel en base + 3 suffixes :
« vous liriez ;
[cette forme verbale a ] deux marques : /r/ + /j/ /vu li-r-j-ez/ vous li-r-i-ez. »
Mais ils évitent une analyse similaire pour le futur en posant un allomorphe du suffixe de personne a- :
« /il v(((dra/ : futur 3 comporte trois fois lindication du futur :
lélément caractéristique /r/,
la désinence /a/,
la base /v(((d/. »
Le /a/ est considéré comme une variante combinatoire du Ø, suffixe des personnes 1, 2, 3, au même titre que la variante de la base. Cette hypothèse se comprend si lon considère, par exemple, que mes et -tes sont les variantes combinatoires de ons et -ez au passé simple, on convient quune variante allomorphique de la personne peut napparaître que pour une forme verbale unique.
Dans les tableaux que proposent Pinchon et Couté apparaissent bien trois suffixes à la suite de la base mais ces trois suffixes sont aléatoires : Pinchon et Couté excluent clairement que cette analyse en trois suffixes soit pertinente pour toutes les formes verbales de lindicatif, cest-à-dire quils excluent la présence dun suffixe zéro. Cest ce que signifie, sans équivoque possible le ou de leurs conclusions :
« Entre la base et la désinence peut sinsérer un élément ou deux éléments.
/j/ : /nu liz-j-(( / i- : nous lis-(-ons.
/r/ : /il li-r-a/ r- : il li-r-a
/r + j/ : /nu li-r-j-(( / r + i : nous li-r-i-ons.
« Toute forme verbale régulière présente une succession de deux, trois ou quatre éléments selon le schéma suivant :
base /r/ /j/ désinence
1 2 3 4
(((((( ( ( (( /(((((((((((- nous conclurions
(((((( ( e /(((((((e( - vous conclurez
(((((( ( (( /(((((((((( - nous concluions
(((((y e /((((((e( - vous concluez »
Ainsi, la possibilité de découper trois suffixes ne serait propre quau conditionnel, le futur présentant deux suffixes : le /r/, commun au conditionnel et le /a/, allomorphe du / ((/ et du /e/.
1-2-3-2 Van den Eynde et Blanche-Benveniste (1970)
Dans un article paru dans Orbis en 1970, Van den Eynde et Blanche-Benveniste se proposent de réduire les oppositions entre les conjugaisons en assimilant les allomorphes combinatoires de façon à aboutir à la présentation la plus économique possible de la conjugaison française à loral, leur objectif étant de limiter la conjugaison à seulement deux classes de verbes.
Cet objectif les amène à considérer que le suffixe r- est commun au futur, au conditionnel et à linfinitif :
« Il paraît intéressant dès lors de donner aux autres éléments r- et ir- un statut autonome et de leur trouver également une analogie. Les déclarer allomorphes du morphème de linfinitif peut se faire, moyennant insertion des règles distributionnelles supplémentaires suivantes :
en position non finale,
- pour le morphème de la catégorie A
°eR_______ : /(r/
- pour le morphème de la catégorie B,
: /ir/ après °rC (autre que °d), °~ t, °Cr
°r : / r/ dans tous les autres cas »
Dans lanalyse du reste de la suffixation du futur et du conditionnel, les auteures commencent par déconstruire un morphème supplémentaire :
« On peut reconnaître au conditionnel les marques de temps de limparfait et les marques des personnes y afférentes. On peut poser une marque de temps supplémentaire pour les allomorphes /-r/ et /-ir/, dont il est possible détablir la distribution complémentaire. Cette dernière marque est commune dailleurs au conditionnel et au futur.
Pour lanalyse du futur, on peut distinguer les formes du singulier de celles du pluriel. La marque de temps du passé simple de la catégorie A ainsi que les marques de personne y afférentes se retrouvent au futur, pour le singulier. On y reconnaît le morphème °A et les marques de personnes : °zéro, °Z, °T.
(me (mre
(m-a (mra
(m-a-(t) (mra(t) »
Cependant, Van den Eynde et Blanche-Benveniste relèvent aussitôt labsence de régularité du suffixe du passé simple pour les personnes du pluriel au futur, en particulier pour la troisième personne du pluriel dont le /((/ ne présente plus danalogie avec aucune marque de temps. Cela les amène à préférer une autre analyse du futur plus économique en terme dexplications:
Remarquant que lélément /-(((t)/ se retrouve dans /s(((t)/, /v(((t)/, /f(((t)/ et /(((t)/ et que la conjugaison de lindicatif présent du verbe /avwar/ offre une analogie parfaite avec lensemble des désinences du futur, elles proposent de présenter :
« les finales du futur : e, a(z), (((z), e(z), (((t), comme nétant que les formes de lindicatif présent du verbe /avwar/, et de poser la règle distributionnelle suivante : le radical av nest pas représenté, sauf en position initiale de forme ; autrement dit, sil figure comme suffixe à une forme, il nest pas représenté. »
Ce qui les conduit à ce résultat danalyse pour le conditionnel :
« Si lon opte pour une analyse selon laquelle le futur est composé de radical + morphème infinitif + verbe avwar au présent, on peut opter pour une analyse analogue du conditionnel, sans devoir faire appel à une seule nouvelle règle : radical + morphème infinitif + verbe avwar à limparfait. »
En définitive, Van de Eynde et Blanche-Benveniste sont animées par la volonté de présenter les flexions verbales de façon économique. Cest ce qui leur fait rejeter la reconnaissance dun suffixe supplémentaire au futur, car la série PS nest pas complète et préférer une version qui correspond partiellement à lanalyse qui sappuie sur létymologie car la liste des suffixes est alors complète.
On retrouve cette analyse chez Le Goffic qui prend en compte, dans Les Formes conjuguées du verbe français, les acquis de lanalyse structurale sans renier pour autant une analyse basée sur la diachronie. Le Goffic présente le futur de la sorte :
« Futur : suffixe [r] + désinences proprement dites. [
] Les désinences proprement dites ne sont autres que les formes du présent du verbe avoir (sauf aux personnes 4 et 5) : ai, as, a, (av)ons, (av)ez, ont, ce qui sexplique par lorigine du futur : infinitif (doù le [r]) + présent du verbe avoir, cest-à-dire originellement une forme modale périphrastique proche de « jai à (Infinitif) ». »
Il fait une analyse parallèle du conditionnel :
« suffixe [r] + désinences proprement dites (qui sont exactement celles de limparfait, et tirent comme elles leur origine du verbe avoir).
Ce qui sépare cette analyse, comme la précédente, de celle qui est basée sur létymologie, cest la prise en compte dun suffixe [r] dans le découpage du futur et du conditionnel :
« La formation du futur daprès linfinitif- fait historique- ne peut être érigée en règle du français actuel : synchroniquement il aim e ra [(((() ra] nest pas formé sur linfinitif [(((] non plus que il viendra, devra, courra, cueillera, ou dautres, sur leurs infinitifs respectifs. »
Bilan :
Que ce soit pour ne pas contredire une analyse traditionnelle du futur ou au contraire parce quils se battent sur dautres fronts, les linguistes ont souvent laissé à larrière-plan aussi bien la question des suffixes du futur que lanalyse de leurs prédécesseurs. Il est particulièrement remarquable que lanalyse structurale ne parvienne pas à trancher entre les deux découpages : R+AS ou RA+S, chaque camp ayant de bonnes raisons de rejeter lautre option. Martinet pense peu souhaitable détablir un allomorphe de la personne qui nait cours que pour le futur et préfère établir un allomorphe du suffixe r-, suivi en cela par de nombreux descripteurs ; Pinchon et Coute choisissent de découper le a du r- et de le poser comme allomorphe de la personne au futur
Ce sont, entre autres, ces contradictions, ces silences qui nous ont conduite à mener notre propre analyse du futur et du conditionnel.
« S'en aller, s'éloigner, regarder toute sa vanité, porter la main dans son vide, la voir repasser encore devant soi, et puis soi partir, être sûr qu'elle s'en est bien allée sa jeunesse et tranquillement alors, de son côté, bien à soi, repasser tout doucement de l'autre côté du temps pour regarder vraiment comment qu'ils sont les gens et les choses. » (L-F. Céline, Voyage au bout de la nuit)
2- Pour un autre découpage du futur et du conditionnel
2-1-1 Faut-il séparer le R- de la base ?
En premier lieu, poser que la base du futur et du conditionnel est linfinitif comme le fait la grammaire traditionnelle, cest, de toute façon, noter leur différence radicale avec les autres temps simples de lindicatif qui sont formés sur la base dun lexème auquel on rajoute une suffixation.
Certains auteurs, dailleurs, ne sy sont pas trompés qui investissent de sens cet infinitif, comme Yvon :
« Quant au premier élément du sauriez qui dans certains verbes reproduit exactement la forme usuelle de linfinitif présent (aimer, marcher dans aimerez, marcherez ; finir, partir dans finirez, partirez) et dans les autres continue avec des transformations phonétiques linfinitif présent du verbe ancien dont il dérive (mittere dans mettrez, videre dans verrez, sapere dans saurez par exemple), il exprime comme virtuel le procès dont le locuteur déduit, imagine ou suppose la réalisation. »
Cependant, il est difficile de soutenir la présence de linfinitif dans le futur et le conditionnel dans la mesure où il ny a pas toujours coïncidence formelle entre linfinitif, dune part et les deux autres formes verbales, de lautre. On en a déjà fait la remarque, à travers les propos de Curat, mais cette absence de coïncidence peut aussi être illustrée par des exemples de la grammaire des fautes, comme le fait Sundell :
« La tendance qui veut que le futur se remodèle à la base de linfinitif donne parfois signe de vie : je mourirai, il venira. On reconnaît les tendances, qui déjà à une époque antérieure, opposaient par exemple je cueillirai à je cueillerai et jenvoirai à jenverrai. »
En réalité, tous les cas de combinaison sont possibles entre infinitif et futur. Il peut y avoir coïncidence de la base et du suffixe comme dans chant-er / nous chant-er-ons ; coïncidence de la base mais divergence du suffixe comme dans cour-ir / nous cour-r-ons ou cueill-ir/ nous cueill-er-ons ; coïncidence du suffixe mais divergence de la base comme dans achet-er/ nous achèt-er-ons ou voi-r/ nous ver-r-ons ou enfin divergence de la base et du suffixe comme dans ven-ir / nous viend-r-ons.
Cette latitude complète des combinaisons possibles entre une base allomorphique et des suffixes également allomorphiques pèse en faveur dun découpage du suffixe R. Puisque linfinitif est lui-même composé dune base et dun suffixe, pourquoi ne pas prendre en compte ce suffixe dans lanalyse du futur et du conditionnel surtout quand on constate ces cas dallomorphisme ?
A moins de reconnaître dans le futur et le conditionnel un cas de formation où ce qui était décomposable au moment de la formation ne lest plus. Assimiler linfinitif dans une nouvelle base est-il identique à la démarche danalyse qui reconnaît, dans la base d/(((((((( -(((, -((((, -(((( (institut/eur, /rice /ion), un suffixe latin /-((( (ut) (ou /at/ (at) dans /am-at-((( (am-at-eur)) sans le prendre en compte en synchronie ?
En réalité, il sagit de cas différents car, si dans le cas damateur, ce découpage étymologique a perdu son sens, car on serait incapable de donner des significations différentes à une base am- ou une base amat- , il y a lieu de distinguer aujourdhui, entre aim- et aimer- dans aimait et aimerait pour distinguer imparfait et conditionnel. En effet, la commutation entre lensemble des flexions de limparfait et du conditionnel met au jour une opposition minimale : la présence ou labsence de /((/ (er, à lécrit). Le matériau [(,( ] (ai,i) se retrouvant dans une distribution différente et la base également, on peut postuler la présence dun suffixe [((], (er). Certes, il est également possible darguer une homophonie entre le matériau [(,( ], (ai, i), du conditionnel et celui qui entre dans la variante imparfait. Mais il y a une totale analogie entre les deux séries, et aucun énoncé ne vient rompre cette similitude. Cest cette absence totale de différenciation qui nous permet de soutenir lhypothèse de lexistence dun morphème x marqué par lopposition : er / Ø à lécrit, [((] / Ø à loral. Nous reviendrons sur cette commutation fondamentale dans lanalyse du conditionnel et du futur.
Pour autant, ce qui peut faire hésiter à isoler un suffixe R dune base au futur et au conditionnel, cest la similarité totale entre [base + suffixe R] du futur et du conditionnel qui peut donner le sentiment dune unité. En effet, quel que soit le verbe étudié, on constatera que lallomorphe de la base et celui du R sont tous deux identiques au futur et au conditionnel. On ne peut évidemment parler de hasard ou de coïncidence et il est tentant de prendre en charge cette similarité dans lanalyse synchronique. Pourtant, on peut penser que si lun des deux temps sest formé par analogie sur lautre, cela pourrait suffire à expliquer cette similarité liée à un emprunt systématique.
En définitive, conserver le R dans la base, cest créer un allomorphisme de la base qui ne se trouverait que dans deux variantes : le conditionnel présent et le futur. Cest affirmer la corrélation entre cet allomorphe +R et ces deux temps, ce qui équivaut à dire que le matériau R participe de la dénotation du futur et du conditionnel présent. Puisquil est pertinent disoler un suffixe dans linfinitif, puisque le suffixe R du conditionnel est porteur dun sème spécifique en français moderne comme le montre lopposition du conditionnel et de limparfait, on ne voit pas lintérêt quon peut avoir à éviter de le découper. On court plutôt le risque alors dopacifier lanalyse du futur et du conditionnel.
Cest pourquoi nous postulerons le découpage du R qui peut permettre de poser un suffixe commun au futur, au conditionnel et à linfinitif.
2-1-2 Les analyses divergentes du futur et du conditionnel correspondent-elles à un simple problème dallomorphisme ?
2-1-2-1 Allomorphisme de la base ou allomorphisme du R- ?
Un certain nombre de difficultés dans la description du futur et du conditionnel vient de la nécessité de poser des allomorphes qui leur sont spécifiques, quon ne retrouve dans aucune autre distribution. Ce qui amène à des choix arbitraires dans le découpage, comme nous allons le voir.
Le premier cas darbitrarité se situe au niveau du découpage précédemment évoqué, celui qui permet de délimiter la base et le R. En effet, le R présente un allomorphisme qui, combiné à celui, éventuel, de la base, interdit de trancher de façon absolue entre plusieurs hypothèses. Le suffixe R peut se présenter sous différents allomorphes : -r- /r/ dans, par exemple, nous cour-r-ions, si on loppose à nous cour-ions ; -er- /((/ dans nous cass-er-ions, si on loppose à nous cass-ions ; -ir- /i(/ dans nous dorm-ir-ions si on loppose à nous dorm-ions.
Il sagit là de variantes combinatoires dont la règle de distribution a été présentée par Marc Plénat. A la première conjugaison, il pose deux variantes phonologiques /R/ et /(R/ pour les verbes dont le radical se termine par une consonne. A la seconde conjugaison, il présente une variante combinatoire /iR/ que présentent « tous les verbes qui ont un infinitif en ir, où i est la voyelle thématique », qui saffaiblit en /(()R/ avec les verbes « dont le radical se termine par /j/ » et « dont la dernière voyelle du radical est [-arrière] » Cette variante se réduit à /R/ quand le radical se termine par une voyelle suivie de /n/ ou de /R/.
Touratier, quant à lui, propose deux autres allomorphes : le -dr- et le tr- pour les verbes comme venir, tenir, paraître, à linverse de Dubois qui considère que ces consonnes sajoutent à la base. En réalité, ce sont des cas problématiques pour lesquels il est impossible de trancher autrement quarbitrairement : soit on pose un allomorphe de la base spécifique au futur et au conditionnel : /((((d/, /(((((/, /par(t/ (viend-, tiend-, paraît-) ce qui permet de conserver un suffixe /(/ quon retrouve dans de nombreux autres verbes, soit on opte pour un allomorphe du suffixe spécifique au futur et au conditionnel : /d(/, /t(/ de façon à conserver une base quon retrouve par ailleurs : /((((((/, /((t(((/, /((((((/, ( je vien-s ,tu tien-s, il paraî-t).
Le problème se pose dailleurs de la même façon pour le suffixe ir- qui permet de conserver une base existante par ailleurs : /d(((/ (dorm-) dans /nud(((((/ (nous dorm-ons), ou /(((/ (offr-) dans /((((/ joffr-e. On peut cependant opter pour un autre découpage qui permet de retrouver le suffixe /(/ à condition détablir un allomorphe de la base spécifique au futur et au conditionnel /d((((/ (dormi-), /((((/ (offri-).
Certains linguistes, comme Martinet, optent pour une troisième solution qui leur permet de ne pas trancher : il sagit de poser un son intermédiaire (que Martinet dénomme lubrifiant) ainsi, -d- ,-t-, -i- ou -(- sont posés comme des phonèmes intermédiaires.
Quelle que soit loption de présentation choisie, il nous semble surtout important de veiller à la cohérence du choix. Pour notre part, nous suivrons celle de Touratier en proposant cinq allomorphes du suffixe commun au futur et au conditionnel : /(/, ((((,((((, /((, /((/, (-r-, -er-, -ir-, dr-, -tr-) et en préservant lhomogénéité des bases. Nous symboliserons ensuite ces allomorphes par R.
2-1-2-2 Des suffixes du futur arbitrairement découpés ?
La divergence de découpage entre les suffixes du futur et du conditionnel que nous avons repérée chez les linguistes relève du même type de difficulté.
Martinet présente clairement cette alternative entre deux découpages :
« Le monème futur présente toujours un r- /-r-/ qui apparaît seul dans nous chanter-ons /nu ((((-r-((/. Mais le /-r-/ nest plus seul dans /il ((((-ra/. On verra toutefois dans /-ra/ plutôt une variante du monème futur quune combinaison de /-r-/ avec un élément personnel /-a/ inconnu par ailleurs. »
A linverse, Pinchon et Couté préfèrent poser un suffixe personnel spécifique au futur de façon à préserver lhomogénéité du suffixe R.
On peut en conclure que le choix entre ces deux présentations relève de larbitraire et quil ne sagit pas dun véritable problème.
Cependant, que ce soit lune ou lautre analyse du futur, elles amènent à poser une sorte de hiatus pour le conditionnel : que faire de ces deux suffixes R et ai unanimement reconnus, quand on les positionne dans un tableau en face du suffixe du futur, dune part et du suffixe de limparfait, de lautre ? Poser le suffixe du futur comme équivalent au suffixe de limparfait, dire quil sagit de deux suffixes de « temps » implique quil ny a quune case pour R et ai du conditionnel et lon trouve donc des présentations de ce type qui posent pour le moins un problème de cohérence :
personne + basesuffixe de tempssuffixe de personneImparfaittu chantaisFuturtu chanter
(ou era)as
(as)Conditionneltu chanter-ais
En effet, le suffixe du conditionnel semble bien composé de deux suffixes. Touratier pose dailleurs le problème quand il commente la présence conjointe du suffixe futur et du suffixe de limparfait dans le conditionnel :
« On constate que lunité morphologique dImparfait appartient à une autre classe que celle de Futur, pour autant que la présence de limparfait nexclut pas celle du Futur, et que dautre part le Futur appartient à la même classe que le Subjonctif, dans la mesure où le Futur et le Subjonctif se combinent également avec lImparfait. Si lon considère que lImparfait est un temps, on doit admettre que le Futur nest pas un Temps, mais, exactement comme le Subjonctif, un Mode. [
] Le futur est non seulement un temps qui logiquement exclut le passé et le présent, mais aussi un temps qui, en latin, exclut limparfait. Mais, en français, le Futur a un fonctionnement différent : cest un Mode et non un Temps, dans la mesure où il est compatible avec lImparfait. »
Cependant, accepter de séparer les suffixes apporte une autre difficulté, en obligeant à poser un zéro, à limparfait, et un autre au futur, au minimum pour les personnes 4 et 5.
personne + basesuffixe 1 suffixe 2suffixe de personneImparfaittu chant
nous chantØ
Øai
is
onsFuturtu chant
nous chanter
era (?)
Øs
onsConditionneltu chant
nous chanter
erai
is
ons
Le choix daccepter de poser un zéro dans lanalyse du futur est central. En effet, si lon oppose nous chanterons et nous chanterions, la non-reconnaissance du zéro dans quelques flexions du futur empêche de déconstruire le morphème R du morphème [a, ai, Ø] et lanalyse du conditionnel aboutit alors à lajout du suffixe de limparfait à celui du futur, alors que la présence de la série morphématique autorise léchange du suffixe Ø du futur et du suffixe /j/ du conditionnel. Or, la question du morphème zéro a été et est encore très débattue. Il paraît donc nécessaire de revenir à ce sujet sur les positions des linguistes ayant abordé le sujet du futur et du conditionnel.
2-1-3 Faut-il poser un morphème zéro ?
De nombreux structuralistes considèrent quil ne faut pas prendre en compte tous les zéros que pose lanalyse structurale. Cest le cas de Martinet qui soutient la thèse que certains effets de sens ou même certaines catégories grammaticales qui correspondent à des zéros sont abusifs. Sil accorde lexistence de « signifiant zéro » dans certains cas « [où] linsertion, dans un contexte, dun nouvel effet de sens ou le remplacement dun effet de sens préexistant par un autre, a pour résultat lélimination, dans la chaîne parlée, dun segment de lénoncé de départ, [et où] il y a bien modification formelle de lénoncé, donc monème», il dénonce lexistence de plusieurs catégories grammaticales fondées sur labsence dun matériau, comme par exemple le singulier qui est non-marqué et dont lunicité de sens est, selon lui, contestable :
« si au signifié hypothétique, correspondait régulièrement une absence de réalisation formelle, on serait légitimement tenté de postuler, non seulement un signifiant zéro, mais également un signe zéro, cest-à-dire linexistence dun signe. [
] On peut estimer, en principe, quun signifié hypothétique dont le signifiant est constamment zéro ne saurait avoir dexistence linguistique que si ses emplois attestent pour lui une existence sémantique incontestable : si, au signifiant zéro dun singulier, correspondait toujours, effectivement, lunicité, il conviendrait, sans doute, de poser lexistence dun tel monème. »
Martinet propose donc de se baser sur « des considérations sémantiques » pour examiner la pertinence du morphème zéro. Démarche qui lamène à réfuter également certaines catégories verbales du classement traditionnel :
« En fait, lexpérience montre quil y a généralement coïncidence de zéro sémantique et de zéro phonique et que linexistence dune marque formelle pour une certaine «catégorie» grammaticale établit une présomption du caractère sémantiquement non positif de la dite «catégorie». Cest ainsi que ce quon désigne traditionnellement comme lindicatif, à quoi ne correspond dordinaire aucune marque formelle, représente les emplois les plus ordinaires du verbe, statistiquement les plus fréquents et ne mérite pas, de ce fait, quon lidentifie comme un signe linguistique distinct du monème verbal. Il en va de même, le plus souvent, du présent dont la forme zéro va de pair avec une absence deffet de sens. Il va sans dire que là où, comme à un certain stade de lévolution des langues indo-européennes, le présent est positivement marqué comme tel (adjonction dun i aux désinences verbales indo-européennes), la question se repose de savoir sil sagit ou non dun monème particulier avec le sens positif de présent hic et nunc. »
Labsence de marque est donc analysée chez Martinet, non comme une marque zéro mais comme la forme de base à laquelle peuvent sajouter des suffixes : ainsi en est-il du présent, modèle basique auquel sajoutent les suffixes (ai, i) à limparfait, par exemple, ou de lindicatif auquel sajoutent le morphème que et le suffixe i- au subjonctif.
« Le « présent » est labsence de temps spécifié, et l« indicatif » labsence de spécification modale, correspondant, lun et lautre, à la forme nue du monème verbal. Il ny a donc pas plus de monème « présent » ou de monème « indicatif » que de monème de « singulier » : chante dans il chante, nest pas, pour nous, la « 3è personne du singulier du présent de lindicatif », mais le monème verbal nu. »
Il propose aussi cependant danalyser comme des amalgames certaines absences, ce qui permet déviter de poser trop de zéros et donc déliminer trop de catégories :
« Il faut toutefois se garder de conclure hâtivement de labsence de manifestation formelle identifiable dun monème à son inexistence, puisquil est possible que son signifiant soit amalgamé avec celui de monèmes voisins. En italien et en espagnol, les troisièmes personnes du singulier, après la chute de t latin final, apparaissent sous la forme du thème nu, et lon pourrait être tenté de poser, pour une forme comme esp. quiere « il aime », un signifiant zéro de 3e personne. Un contexte comme quiere a su madre « il aime sa mère » montre que quiere englobe un sujet repris par le possessif su. Il y a donc sujet de 3e personne du singulier, et on peut préférer concevoir son signifiant comme amalgamé avec celui du verbe que dopérer avec un zéro. En face dune première personne quiero « jaime », on pourrait dailleurs analyser quiere en /kier/ + /e/ et voir dans cet /e/ le signifiant de 3e personne. On notera quune fois admis le concept opératoire damalgame, on voit mal comment on pourrait, au nom de la forme, dénier lexistence linguistique à un signifié positivement bien établi comme lest celui de la 3e personne dans lexemple qui précède. »
Cette analyse de Martinet et ses principes sont à la base de la démarche de Touratier dans Le système verbal du français. Ce nest dailleurs sûrement pas un hasard si Touratier pose assez longuement le problème du zéro dans cet ouvrage car sa présentation du système verbal est tributaire de sa conception du zéro. Il soupèse deux choix opposés : la position maximaliste représentée par Nida et la position minimaliste pour laquelle il cite Martinet et Gleason :
« Pour éviter probablement la prolifération des morphèmes à signifiant zéro, certains linguistes prudents, comme Gleason (1969), se donnent la règle méthodologique suivante : « sauf sil se révèle plus tard être un allomorphe dun morphème qui a des formes visibles, il faudra toujours éliminer de la description finale » les zéros que lon aura été amené à introduire provisoirement au cours de lanalyse. »
Cette démarche qui consiste à voir dans le zéro un outil danalyse quon nutilise que provisoirement pour léliminer ensuite du résultat, est celle qui est manifestement à luvre dans lanalyse du futur et du conditionnel de Pinchon et Couté :
En effet, le zéro apparaît bien dans les paradigmes que posent ces auteurs :
« En chaque point (1, 2, 3, 4) de la suite syntagmatique apparaît la possibilité de procéder à des commutations qui établissent quatre paradigmes selon le schéma suivant :
1 2 3 4
base lexicale /(( /(( /(((
Ø ((( (((
Ø (((
(((
Ø
Mais cest pour disparaître dans les différents tableaux quils présentent ensuite où les zéros sont remplacés par des cases grisées :
« Les tableaux suivants donnent toutes les combinaisons possibles des quatre éléments :
Base + marque 1 + marque 2 + désinence :
Code oral :
variable Eléments stables 1 2 3 4Séries formées base (() ( (i) ( (( e eCond. Prés. 4-5 base(() ( (Cond. Prés 4-5 base(() ((aFutur 1-2-3-4-5-6((e base(i) j(( eImp. 4-5 Subj.prés. 4-5 base(Imp. 1-2-3-6 base(( eInd. Prés. 4-5 base(éroInd. Prés. 1-2-3-6
Subj. Prés. 1-2-3-6
Code écrit :
variableEléments stables1234Séries formées(ase(e) r ((ns/ezCond. Prés. 4-5(ase(e) r (((
(
(ntCond. Prés. 1-2-3-6(ase(e) r((
(s/ (
(ns/(nt
(zFutur 1-2-3-4-5-6(ase((ns/ez(ase(((
(
(nt(ase(ns/ezPrés. 4-5(ase(.(
(
(nt(
(s
(ntPrés. 1-2-3-6
Subj. Prés. 1-2-3-6
Dans ces tableaux apparaissent bien trois suffixes à la suite de la base mais ces trois suffixes sont aléatoires : Pinchon et Couté excluent clairement que cette analyse en trois suffixes soit pertinente pour toutes les formes verbales de lindicatif, cest-à-dire quils excluent la présence dun suffixe zéro. Cest ce que signifie, sans équivoque possible, le ou de leur conclusion que nous avons déjà signalé :
« Entre la base et la désinence peut sinsérer un élément ou deux éléments. /j/ : /nu liz-j-(( / i- : nous lis-(-ons.
/r/ : /il li-r-a/ r- : il li-r-a
/r + j/ : /nu li-r-j-(( / r + i : nous li-r-i-ons.
Pour revenir à Touratier, il fait, quant à lui, coïncider ce principe de Gleason avec lanalyse de Martinet :
« Appliquée au verbe français, cette consigne oblige à considérer que ni le présent ni lindicatif ne sont des morphèmes, puisquils ne voient jamais alterner leur absence de marque formelle avec une marque différente de zéro. Cest ce quon peut appeler la position minimaliste. »
Cest cette position quil fera sienne pour présenter le système verbal du français mais il présente également la thèse adverse :
« A lopposé, dautres linguistes, comme Eugène Nida, estiment quil existe deux sortes de morphèmes à signifiant zéro : à côté de labsence significative dans une série de variantes, à laquelle Gleason reconnaît volontiers le statut de morphème et quEugène Nida appelle « le zéro allomorphique », on doit admettre un « zéro morphémique » qui, lui, a toujours un signifiant zéro et qui se définit comme « une absence significative non dans une série de variantes, mais dans une série de morphèmes » (daprès Nida, 1967, p.46). Ce « zéro morphémique » correspond très exactement à ce que lécole genevoise a appelé « signe zéro ». Comme le dit en effet Bally :
« [
] dans tout paradigme grammatical, lorsquune forme dépourvue de morphème est nécessairement liée à un ensemble de formes qui en sont pourvues, labsence de signe dans le premier cas est interprétée comme valant, non pas zéro signe, mais signe zéro. » (1922, p.2)
Les tenants de cette position que lon peut considérer comme maximaliste, sont alors conduits à admettre que le présent et lindicatif sont des morphèmes, lun temporel et lautre modal, qui ont toujours un signifiant zéro, puisquils appartiennent lun à la série des temps et lautre à la série des modes. Le présent soppose en effet au moins au morphème qui a pour signifiant limparfait, et lIndicatif soppose à celui qui a pour signifiant le Subjonctif. »
Touratier, en définitive, réfute cette position maximaliste :
« Il est probablement faux que toute absence formelle qui commute avec des morphèmes soit nécessairement un morphème à signifiant zéro. Car cela reviendrait à assimiler abusivement tout paradigme à une classe de suites, et à récuser ainsi la notion de «modèle» dun paradigme, les différentes suites qui appartiennent à un même paradigme étant forcément censées contenir le même nombre de morphèmes. »
Pour Touratier, lidée dun modèle, cest-à-dire dune hiérarchie entre les différentes variantes formelles est décisive. Cette notion de modèle est probablement à rattacher à celle dallomorphes combinatoires ou non. Il y aurait, selon Touratier, des variantes phonologiques et des variantes morphologiques qui permettraient de poser des modèles de base. Il semble donc que la conception de lanalyse combinatoire soit une raison de la divergence dans les manières de poser le problème du zéro :
« On considère en effet comme le modèle dun paradigme la suite la plus courte parmi les suites de morphèmes qui appartiennent à un même paradigme (cf. Wells, 1970, p.63 ; Dubois et al., 1973, p.322) ; par exemple, vous aimez dans le paradigme de la figure 16.
vu(z) (m e(z) vu(z) (m Ø Ø e(z)
vu(z) (m i e(z) vu(z) (m Ø i e(z)
vu(z) (m (R e(z) vu(z) (m (R Ø e(z)
vu(z) (m (R i e(z) vu(z) (m (R i e(z)
Figure 15 Figure 16
Si toute absence qui commute avec des morphèmes était un morphème à signifiant zéro, le paradigme de la figure 15 serait alors une classe de suites, comme dans la figure 16, et naurait pas, à proprement parler, de modèle. »
En définitive, les arguments avancés par les tenants dune utilisation minimale du zéro nous semblent infondés pour plusieurs raisons.
Tout dabord, le postulat dun modèle, dune hiérarchie entre les variantes ne se justifie pas. Pourquoi ne pas admettre tout aussi bien que toutes les variantes sont combinatoires, même si lon nen perçoit plus aujourdhui la logique phonétique et quelles sont donc toutes à égalité ?
La prise en compte de lallomorphisme peut conduire à une focalisation sur la matérialité de la marque et ainsi à positiver cette marque. Cest ce quon peut déduire dailleurs danalyses qui élaborent un modèle de base et ses allomorphes. Or, « la marque de lopposition sémiologique nest pas dans la diversité des variantes, mais dans la constance du rapport [dopposition] quel que soit lallomorphe. »
Par ailleurs, il semble bien que la nécessité que simposent les « minimalistes » déliminer certains zéros les conduisent à une aporie de lanalyse formelle puisquen définitive, Martinet et Touratier proposent de rechercher dans le domaine sémantique les critères pour justifier de la pertinence des zéros, ce qui renverse lordre de lanalyse :
« Seule une étude sérieuse au niveau des signifiés permettrait de savoir ce quil en est exactement, et donc de trancher en faveur de lune des deux positions théoriques. « Dans les cas où labsence de marque formelle correspond manifestement à une signification aussi repérable que précise, il faudra bien admettre que labsence dunité morphologique est le support de cette signification, et est par conséquent le signifiant dun morphème qui est un zéro morphémique. Et dans les autres cas, on aura affaire à une absence de signifié qui va de pair avec une absence de signifiant, et par conséquent à une absence de morphème. »
Enfin et surtout, ces analyses aboutissent à positiver la marque. Par exemple, la démarche qui consiste à poser des zéros lors de lanalyse mais à ne pas les conserver lors du résultat en est caractéristique. On opère des commutations pour découper des morphèmes qui sont le résultat de lanalyse. Or, cest lopposition elle-même qui est marque et non le matériau quelle permet de découper, cest donc lopération qui est porteuse de sens et non son résultat.
De même, juger de la pertinence du morphème zéro selon sa commutabilité avec un matériau dans un même paradigme ne suffit pas. Cette notion dalternance de la marque se base sur un certain refus de lexistence du zéro. A un signifiant zéro correspondrait préférentiellement linexistence de signe. Derrière cette authentification de la marque par sa matérialité, on peut repérer une positivation : on sappuie sur le matériau pour repérer la marque selon cette conception et non sur lopposition de matériau qui constitue véritablement la marque.
Cest parce que la marque est assimilée à du matériau et non pas à un rapport entre matériaux quil paraît difficilement concevable que le matériau zéro soit une marque. Or, précisément le zéro nest pas une marque, pas plus que ne lest le matériau auquel il soppose, cest lopposition significative entre la présence et labsence de matériau qui constitue la marque, telle que le souligne Urien :
« La marque est dans le rapport du silence au bruit, et non dans lun ou dans lautre. »
Pour nous, prendre en compte le zéro, ce nest pas plus lutiliser comme un outil opératoire que poser un morphème zéro en tant que tel mais cest prendre en compte la différence de sens générée par lopposition entre un matériau et son absence.
2-1-4 Pour une analyse qui prenne en compte le zéro
Notre analyse formelle qui s'appuie sur une série d'oppositions observées à partir du matériau oral et écrit, va nous permettre de montrer successivement que
le présent se différencie de limparfait par lopposition Ø/ai.
limparfait se différencie du conditionnel par lopposition Ø/R.
le conditionnel se différencie du futur par lopposition ai/a.
Le futur se différencie du passé simple par lopposition R/Ø
Le présent soppose à l'imparfait par lopposition entre un zéro et le matériau /(,j/, (ai,i) qui se retrouve sur lensemble des verbes, compte tenu de l'allomorphisme possible de la base. C'est la seule opposition formelle entre présent et imparfait, considérée traditionnellement comme la marque du temps. Soit lanalyse suivante :
Présent Imparfait :
P
Base Tps
P P
Base Tps
P
1 (( gard Ø Ø (( gard ( Ø
2 ty gard Ø Ø tu gard ( Ø
3 il gard Ø Ø il gard ( Ø
4 nu gard Ø (( nu gard j ((
5 vu gard Ø e vous gard j e
6 il gard Ø Ø ils gard ( Ø
Présent Imparfait :
P
Base Tps
P P
Base Tps
P
1 je gard Ø e je gard ai s
2 tu gard Ø es tu gard ai s
3 il gard Ø e il gard ai t
4 nous gard Ø ons nous gard i ons
5 vous gard Ø ez vous gard i ez
6 ils gard Ø ent ils gard ai ent
La même démarche met en évidence l'opposition du conditionnel et de limparfait, à travers celle du zéro et du /(r/, (er). En effet, seule la présence du /(r/ permet de différencier le conditionnel de limparfait, compte tenu de lallomorphisme de la base qui affecte un certain nombre de verbes français. De plus, quel que soit le verbe, on retrouve la série complète des suffixes de limparfait, à lécrit comme à loral, série de suffixes à laquelle sajoute une série de suffixes de personnes qui est attestée aussi au présent.
Conditionnel Présent : Imparfait :
P
Base X Tps
P P
Base X Tps
P
1 (( gard (r ( Ø (( gard Ø ( Ø
2 ty gard (r ( Ø ty gard Ø ( Ø
3 il gard (r ( Ø il gard Ø ( Ø
4 nu gard (r j (( nu gard Ø j ((
5 vu gard (r j e vu gard Ø j e
6 il gard (r ( Ø il gard Ø ( Ø
Conditionnel Présent : Imparfait :
P
Base X Tps
P P
Base X Tps
P
1 je gard er ai s je gard Ø ai s
2 tu gard er ai s tu gard Ø ai s
3 il gard er ai t il gard Ø ai t
4 nous gard er i ons nous gard Ø i ons
5 vous gard er i ez vous gard Ø i ez
6 ils gard er ai ent ils gard Ø ai ent
Si, à présent, on oppose le conditionnel au futur, en respectant la métrique quimpose le découpage du conditionnel, on aboutit à une analyse du futur qui combine à la base un suffixe r-, un suffixe de temps ((, a, Ø), et un suffixe de personne.
Conditionnel Présent : Futur :
P
Base X Tps
P P
Base X Tps
P
1 (( gard (r ( Ø (( gard (r ( Ø
2 ty gard (r ( Ø tu gard (r a Ø
3 il gard (r ( Ø il gard (r a Ø
4 nu gard (r i (( nous gard (r Ø ((
5 vu gard (r j e vous gard (r Ø e
6 il gard (r ( Ø ils gard (r (( Ø
Ø ((
Conditionnel Présent : Futur :
P
Base X Tps
P P
Base X Tps
P
1 je gard er ai s je gard er ai Ø
2 tu gard er ai s tu gard er a s
3 il gard er ai t il gard er Ø a
4 nous gard er i ons nous gard er Ø ons
5 vous gard er i ez vous gard er Ø ez
6 ils gard er ai ent ils gard er o nt
Ø ont
A lécrit, cette analyse amène à découper une série allomorphique de suffixes de personne spécifique au futur : Ø, s, Ø, ons, ez, (o)nt. Cette spécificité pourrait être de nature à remettre en cause lanalyse si on oubliait la dimension arbitraire de lorthographe. En effet, à loral, on retrouve la série des suffixes de personne la plus largement employée, Ø, Ø, Ø, ((, e, Ø (ou (().
Il est intéressant de remarquer aussi, comme la fait Guillaume, que ce découpage permet de recouper, dans sa première partie, celui du passé simple, du moins pour les verbes que nous appellerons, à la suite de Plénat, de la première conjugaison. En effet, lopposition du passé simple au présent est matérialisée par celle dun zéro à la série ((, a, (r), (ai, a, èr).
On peut émettre lhypothèse que le futur partage avec le passé simple le même suffixe de temps pour lequel il présente des allomorphes aux personnes 4, 5, 6. Il sen différencierait alors par la présence du suffixe R, de même que le conditionnel se différencie de limparfait par la présence de ce seul suffixe.
Futur Passé simple :
P
Base X Tps
P P
Base X Tps
P
1 (( gard (r ( Ø (( gard Ø ( Ø
2 ty gard (r a Ø ty gard Ø a Ø
3 il gard (r a Ø il gard Ø a Ø
4 nu gard (r Ø (( nu gard Ø a m
5 vu gard (r Ø e vu gard Ø a t
6 il gard (r (( Ø il gard Ø (r Ø
Futur Passé simple :
P
Base X Tps
P P
Base X Tps
P
1 je gard er ai Ø je gard Ø ai Ø
2 tu gard er a s tu gard Ø a s
3 il gard er a Ø il gard Ø a Ø
4 nous gard er Ø ons nous gard Ø â mes
5 vous gard er Ø ez vous gard Ø â tes
6 ils gard er o nt ils gard Ø èr ent
Le fait que la série identique ne soit pas complète empêche de présenter cette analyse autrement que comme une hypothèse. Si elle contredit le principe déconomie, il nest pas évident que substituer à cette analyse, celle de la série conjuguée du verbe avoir au présent résolve lensemble des difficultés. En effet, que faut-il prendre en compte dans cette analyse : le temps présent et la personne ou également le lexème du verbe avoir, ce qui conduirait à déconstruire quatre sèmes dans la suffixation du futur ? Sans doute est-il plus raisonnable de considérer dans cette similarité parfaite entre les « terminaisons » du futur et celles du verbe « avoir » au présent, leffet dune formation par analogie qui naffecte pas le sens de la forme verbale en synchronie.
En définitive, on constate que la spécificité des allomorphes des suffixes du futur conjuguée à la présence de plusieurs zéros brouille les frontières entre les différents suffixes et amène lanalyste à poser des découpages arbitraires entre la base et les suffixes ou des hypothèses qui ne sont pas entièrement vérifiables pour le découpage entre suffixe du temps et suffixe de personne. Si plusieurs indices convergent pour établir que la série (/(/, /a/) est commune au futur et au passé simple, aucun nest véritablement décisif dans la mesure où lanalogie avec la série des suffixes de temps du passé simple est incomplète et où lon pose des suffixes de personne spécifiques au futur à lécrit.
De même, la série allomorphique des suffixes de linfinitif ne coïncide pas exactement avec celle du premier morphème de flexion le +R du futur et du conditionnel. Linfinitif combine une base et un suffixe, soit le suffixe /e/ (er à lécrit), soit le suffixe /(/ (r ou re à lécrit), soit le suffixe /i(/ (ir) ou encore /wa(/ (oir). (Exemples: parler : /pa(l/ + /e/; ou croire : /k(wa/ +/(/, offrir : /(f(/ + /i(/, devoir : /(((/ + /(((/). On peut cependant sappuyer sur lidentité partielle de cette série avec celle des allomorphes des suffixes /(/ (r), (((( (er), /i(/ (ir)(, /d(( (dr) , /((( (tr) que lanalyse permet de découper au futur et au conditionnel, pour avancer lhypothèse que les suffixes de linfinitif, du futur et du conditionnel sont allomorphes.
Pour autant, ce qui nous semble, à linverse, établi, cest que le conditionnel ne se différencie pas du futur par lajout dun suffixe de limparfait mais bien par lopposition entre deux séries de suffixes dont certains allomorphes au futur ne sont matérialisés que par labsence significative dun suffixe qui apparaît au conditionnel.
2-1-4-1 La distribution des zéros
A cette étape de lanalyse apparaît donc ce bilan morphologique qui permet de transcrire lensemble des suffixes :
à loral :
PersonneBasesuff. 1suff. 2PersonnejeXØ/rØ/ai/aie,s,x,ØtuXØ/rØ/ai/aes,s,xilXØ/rØ/ai/ae,t,ØnousXØ/rØ/i/â (Ø)ons,mesvousXØ/rØ/i/â (Ø)ez, tesilsXØ/rØ/ai/è (Ø)ent,rent,ontà lécrit :
PersonneBasesuff.1 suff. 2Personne((xØ/(Ø/(/(ØtyxØ/(Ø/(/aØil xØ/(Ø/(/aØnuxØ/(Ø/j/a (Ø)((, mvuxØ/(Ø/j/a (Ø)e, milxØ/(Ø/(/((Ø)Ø/(/((
Cette présentation de la suffixation met au jour la présence dopposition à trois termes dans le tableau, le présent/limparfait/le passé simple - dont on peut résumer les paradigmes sous cette forme, par convention : [Ø/(ai/a)]. Le présent, qui est représenté dans ce tableau par trois Ø, soppose à limparfait et au passé simple qui, eux mêmes, sopposent entre eux. Aussi, le présent nentre-t-il pas dans lopposition ai/a. Son Ø ne soppose pas à ai ou à a, il soppose à lopposition ai/a. Cest ainsi que lon peut désigner ce morphème par [Ø/(ai/a)].
Mais le premier Ø du présent, qui soppose au R du futur et du conditionnel, entre, comme le second zéro dans une opposition avec les quatre autres temps. En effet, sil est matériellement le même que le Ø du passé simple et de limparfait, il nest pas le même morphologiquement. En effet, il nentre pas dans la même distribution. Le Ø du présent entre en distribution avec un autre Ø. Le Ø du passé simple et de limparfait entre en distribution avec un morphème ai/a. On ne peut donc pas dire, par exemple, que le présent, le passé simple et limparfait sopposent au futur et au conditionnel par un morphème Ø/R. Le futur et le conditionnel sopposent, dune part, au passé simple et à limparfait sur la présence ou labsence du R, quon notera (R et dautre part au présent. Le Ø du présent est dun autre ordre. Il soppose donc à lopposition (R
Le morphème peut donc se noter [Ø/((R)] pour rendre compte de cette opposition à deux étages.
Par sa distribution, le présent soppose donc aux quatre autres formes verbales.
PrésentImparfaitPassé simpleConditionnelFutur[Ø / ((R)]Ø__++[Ø/(ai/a)]Øaiaaia
Lopposition ai/a qui différencie limparfait du passé simple et le conditionnel du futur et lopposition (R qui différencie limparfait du conditionnel et le futur du passé simple sont subsumées par une autre opposition à un Ø qui distingue le présent des autres formes verbales.
« Mais on n'a pas encore acquis la force de sagesse qu'il faudrait pour s'arrêter pile sur la route du temps et puis d'abord si on s'arrêtait on ne saurait quoi faire non plus sans cette folie d'avancer qui vous possède et qu'on admire depuis toute sa jeunesse. » Céline, Voyage au bout de la nuit.
3- Bilan et perspectives
Au total, la double analyse par opposition et par différenciation que nous avons effectuée autorise à proposer lexistence dun morphème dénoté par lopposition : [Ø /((R)], et suggère qu'existent trois morphèmes de flexion :
un premier morphème de flexion dénoté par l'opposition à double étage [Ø /((R)] : Ø pour le présent, -R pour l'imparfait et le passé simple et +R (ou ses allomorphes : /(/, r dans /(((((((((, je finirai, ((((, er dans /(((((((((/, je garderai, /i(/, ir dans /((((((((((, je dormirai, /d((, dr dans /(((((((((/, je viendrai, /(((, tr dans /(((((((((( je paraîtrai) pour le futur et le conditionnel. Le +R pouvant également être postulé à linfinitif.
un second morphème quon notera [Ø/(ai/a)] mis en évidence par un Ø sopposant à deux séries d'opposition : l'absence significative du présent alterne avec deux séries exclusives l'une de l'autre : /(, j/ et /(, a, Ø/.
enfin, un troisième élément, fragment du morphème de personne.
Le présent se caractérisant par deux zéros qui subsument les oppositions relevées, il soppose en bloc aux quatre autres formes verbales. On peut le formaliser par ce schéma :
Ø (R+R-Rai/aafutur passé simpleaiconditionnelimparfaitØPrésentInfinitif
Ou si lon préfère par la présentation linéaire et schématisée dune forme verbale de lindicatif :
tu + base + Ø + Ø + (es, s, x)
( R ai/a
3-1- De la nécessité de réinvestir en sens cette analyse morphologique :
Lanalyse formelle originale que nous avons opérée conduit à la nécessité de réexaminer en fonction de cet éclairage les analyses sémantiques du futur et du conditionnel qui ont été posées jusquà aujourdhui. En effet, comme le souligne cette citation de Dendale qui figure en exergue dun recueil détudes sur le conditionnel, le rapport sémantique entre futur et conditionnel est établi aujourdhui en fonction dune analyse morphologique qui nest jamais revisitée et qui semble être devenue un lieu commun :
« La recherche de linvariant sémantique est fondée sur le principe de correspondance « une forme, un sens » et sur la conviction que les effets de sens dune forme naissent de linteraction du sens unique avec les éléments du contexte [
]. Appliqué au conditionnel, ce principe incite à chercher un sens unique, stable, au morphème rais, morphème composé comme on sait qui intègre les morphèmes de limparfait et du futur. »
Partant de cette définition, il sagit, pour de nombreux auteurs, de comprendre en quoi le morphème rais dénote du futur et de limparfait, cest-à-dire en quoi le conditionnel cumule le morphème réputé unique- du futur et celui de limparfait.
Wilmet, quant à lui, dans son article « Larchitectonique du conditionnel » montre bien que cette figure de lajout du trait sémantique réputé unique- du futur à celui de limparfait conduit à une impasse de linterprétation car laspect du passé simple quil reconnaît dans le futur, à la suite de lanalyse symétrique de Guillaume, entre en opposition avec laspect de limparfait. Les réunir dans le conditionnel correspond alors à lalliage du feu et de leau :
« Les indices [((], [(( ((], [(((] ne sont daucun secours [pour déterminer laspect du conditionnel], car ils laissent ouverte lalternative dun aspect global (celui du FUT et de linfixe r-) ou dun aspect sécant (celui de lIMP et des désinences ais, -ais, -ait, -ions, -iez, -aient). »
Mais il résout pour sa part la contradiction en proposant de démontrer la «neutralisation des deux aspects mutuellement exclusifs » :
« La résolution exige que lon démontre (1) linadaptation du COND à laspect global pur de tout mélange daspect sécant (en excipant p. ex. de disparités avec le PAS), (2) sa réceptivité à laspect sécant (en soulignant par ex. des similitudes avec lIMP). »
Cependant, la reconnaissance de deux valeurs différentes au futur, dénotées par les deux morphèmes +R et a/ai que nous avons mis au jour, permet léconomie de cette contradiction et de sa résolution puisque les deux valeurs opposées, aspect global et aspect sécant, si lon veut reprendre la terminologie et lanalyse de Wilmet, ne sont pas en co-présence dans le conditionnel, ce dernier ne partageant avec le futur que le réinvestissement sémantique du +R et sopposant à lui sur le réinvestissement sémantique du a/ai - trait sémantique de laspect global sopposant au trait sémantique de laspect sécant-, nous y reviendrons.
La divergence danalyse morphologique que nous avons présentée ne peut que conduire à une divergence danalyse sémantique. En effet, le rapport quentretiennent futur et conditionnel, nest pas un rapport dajout dune valeur celle de limparfait-, mais une relation dopposition ; il correspond à un trait sémantique dénoté par lopposition ai/ a dont nous postulons quil correspond aussi à lopposition imparfait/passé simple.
Inversement, il faut sinterroger sur le rapport entre limparfait et le conditionnel. Là encore, le conditionnel nest pas le fruit de laddition dun trait sémantique celui du futur-, à celui de limparfait. Il entretient avec limparfait une relation dopposition dénotée par celle qui oppose le R, quil partage avec le futur, et labsence significative de R propre aux trois autres temps de lindicatif.
Mais cest sans doute le futur qui apparaît comme un abîme dans cette nouvelle analyse. On peut (à tort) avoir le sentiment que rien na changé pour le conditionnel qui combinait déjà deux traits sémantiques ceux du futur et de limparfait. La différence quon propose ici, une combinaison dun trait sémantique de limparfait et de « quelque chose du futur » peut sembler minime sauf quand on songe quon ne sait plus rien du futur qui apparaît non plus comme un temps à valeur unique, bien délimitée ( ?) mais comme une combinaison de deux valeurs qui, dès lors, apparaissent comme de complètes inconnues.
Si lon pose lhypothèse comme Guillaume que le morphème a du futur correspond à celui du passé simple, lopposition du morphème a du futur au morphème ai du conditionnel se rapportant alors à celle du passé simple et de limparfait, les analyses qui ont pu être effectuées sur limparfait demandent alors à être réexaminées dans le cadre de son opposition avec ce morphème a. Car, si lon retient cette hypothèse, comment ensuite prendre en compte le (R avec lequel se combine le ai/a ? Parmi les analyses effectuées de limparfait et du passé simple, il devient nécessaire de déterminer celles qui sont susceptibles dêtre transposées à lanalyse du futur et du conditionnel.
Dès lors, la question centrale qui se pose est bien celle quavait déjà posée, dans son temps, Imbs : « Que signifie ce R propre au futur et au conditionnel ? », question qui renvoie dans le système à ce qui est commun sémantiquement au futur et au conditionnel mais aussi à ce qui les différencie, ensemble, des autres temps simples de lindicatif, présent, imparfait, passé simple.
Replacer futur, imparfait et conditionnel, non plus en termes de complémentarité mais en termes dopposition conduit à repenser non seulement ces formes verbales mais aussi tout le réseau dopposition dans lequel elles se trouvent, qui constitue le système verbal.
3-2- De la difficulté de prendre en compte les implications sémantiques dune analyse morphologique qui pose deux morphèmes
Le fait de reconnaître lopposition (R pose demblée un certain nombre de difficultés qui peuvent sembler insurmontables. On saperçoit rapidement que le conditionnel et le futur deviennent inclassables.
En effet, si lon opte pour le classement généralement admis aujourdhui qui conserve ces deux formes dans lindicatif, on ne peut plus mettre sur le même plan d'analyse toutes les formes verbales de l'indicatif puisque deux morphèmes entrent en jeu : le futur, par exemple, s'oppose au présent selon deux modalités différentes, contrairement au passé simple et à l'imparfait qui ne s'opposent à lui que sur un morphème. On est alors amené à créer une ligne de partage supplémentaire à lintérieur de lindicatif. Cette ligne de partage correspond certes à des analyses déjà établies comme celle de Maingueneau qui souligne sur le plan sémantique labsence de symétrie entre temps du passé et temps du futur :
« Le présent ne constitue pas [
] une sorte d « axe de symétrie » temporel, comme si le passé était au présent ce que le futur est à ce même présent. Il serait faux de penser que la seule différence entre passé linguistique et futur linguistique est que le premier suppose un regard rétrospectif et le second un regard tourné vers lavenir, en admettant implicitement que lénonciateur a la même attitude à légard du passé et du futur et que son activité se borne à « situer » des énoncés dans le temps. La linguistique générale enseigne un fait révélateur à ce sujet : si, en règle générale, les différentes langues possèdent un passé, il est en revanche très fréquent que le futur soit marqué par des combinaisons du type (Présent + adverbe de temps) ou (vouloir, devoir,
+ verbe à linfinitif) et non par des « temps » spécifiques. Cette dissymétrie est significative : les faits révolus ne sauraient posséder le même statut pour un énonciateur que ceux à venir, lesquels nexistent en fait que comme le terme dune tension de lénonciateur à partir de son présent. Si le passé est par définition coupé du présent de lénonciateur, le futur nest supporté que par lui. Pour les événements passés, limportant cest de déterminer comment ils ont eu lieu, (problème daspect) alors que pour les faits futurs lessentiel est de savoir sils auront lieu ou non, de quelle manière lénonciateur les pose (problème de modalité). »
Pour autant, cette ligne de partage ne correspond à rien de connu : sinscrivant à lintérieur dun « mode », elle ne peut être un « mode », mais elle ne peut non plus être un « temps » déjà dénoté classiquement par lopposition ai/a.
De plus, si lon considère exacte lhypothèse selon laquelle linfinitif partagerait avec le futur et le conditionnel le morphème R, on voit mal comment adjoindre linfinitif au sein de lindicatif, du fait de labsence de variation de cette forme.
Sur le plan sémantique, par ailleurs, certains linguistes comme Tassie refusent de classer le conditionnel parmi les temps de lindicatif du fait des sens quil prend en emploi. Ce dernier soutient la thèse dun conditionnel modal dans tous les cas de figure.
Si on joint cette résistance à un certain « brouillage » de lanalyse sémantique du futur et du conditionnel qui fait que les linguistes sont nombreux à détailler les valeurs modales et temporelles du futur et du conditionnel, et au constat chez certains auteurs dun futur à valeur typiquement modal comme chez Maingueneau dans son ouvrage déjà cité :
« La morphologie montre bien que le futur est le résultat de visées de lénonciateur à partir de son présent.
Dans ces conditions, il nest pas possible dadopter la démarche de beaucoup de grammaires traditionnelles qui, après avoir défini la valeur déictique du FS, ajoutent quelques paragraphes consacrés à ses « valeurs modales ». En réalité, on ne doit pas considérer ces valeurs modales comme des emplois périphériques mais poser dès le départ quelles relèvent de plein droit du fonctionnement du futur et que ce sont plutôt les emplois non-modaux, « neutres » qui sont périphériques. Enoncer au futur, ce nest pas situer un événement dans lavenir, cest désirer, ordonner, craindre, etc. Seule une vision réductrice du langage qui en fait un simple véhicule dinformations permet de rejeter dans les marges ce qui est en réalité lessence même du futur : la tension modale. »
si lon joint ces remarques sémantiques enfin à notre analyse formelle, on pourrait être conduit à remettre en cause les classements récents qui intègrent le conditionnel à lindicatif du fait de sa proximité morphologique avec le futur et de sa valeur « futur dans le passé» du discours indirect sans toutefois interroger l'homogénéité de l'indicatif.
Le morphème dénoté par lopposition R/ Ø qui se combine, entre autre, avec un morphème dit de temps, serait-il un morphème de mode qui amènerait à exclure futur et conditionnel de l'indicatif pour constituer un nouveau mode dont le R serait la marque ?
Cette hypothèse nest pas sans rappeler celle dYvon qui, relançant le débat multiséculaire sur le statut modal ou temporel du conditionnel, a proposé une solution originale qui consistait, au lieu dadjoindre le conditionnel au futur dans le sein de lindicatif, dadjoindre le futur au conditionnel dans le cadre dun mode suppositif quil qualifie de « voisin du subjonctif ».
Il se basait pour cela sur les rapprochements morphologiques, syntaxiques et étymologiques quon peut établir entre futur et conditionnel mais aussi sur les analyses sémantiques de Guillaume et en particulier sur la charge hypothétique quil reconnaît au futur :
« Le futur est essentiellement un temps quon ne tient pas encore, quon imagine. Il emporte ainsi avec soi une part dhypothèse inhérente sans laquelle le futur ne serait pas lui-même. Or, de deux choses lune : ou bien le futur ne porte que la part dhypothèse inhérente, sans plus, et, dans ce cas, il se tient en incidence, sans décadence au-dessous de lui-même ; ou bien le futur porte une charge dhypothèse dépassant celle inhérente, et en ce cas, par leffet dune surcharge dhypothèse, il entre en décadence, il descend au-dessous de lui-même.
« Le futur tenu, soutenu en incidence, sur décadence nulle, cest le futur proprement dit, celui que nous nommons le futur catégorique, et quon a, par exemple, dans vous réussirez. Le futur tenu en incidence sur décadence engagée, acceptée, cest celui que la grammaire traditionnelle nomme conditionnel et que nous nommons futur hypothétique, celui quon a dans vous réussiriez. »
Pour Yvon, cette charge dhypothèse que Guillaume reconnaît au futur catégorique et au futur hypothétique entre en contradiction avec leur classement dans la catégorie guillaumienne in esse, cest-à-dire dans lindicatif car ils correspondent à la définition des temps in fieri que fait Guillaume, dun procès en voie de réalisation, comme les temps du subjonctif :
« Lavenir est du temps qui vient, du temps que lon imagine, que lon suppose, il nest pas : il nappartient donc pas au temps in esse et les tiroirs verbaux qui lexpriment ne sont pas à leur place au mode indicatif. M. Guillaume a signalé leffort de la pensée pour réaliser au maximum les événements supposés pour lavenir : il convient donc de rattacher lépoque future au temps in fieri, et de faire des tiroirs verbaux saurez et sauriez un mode voisin du subjonctif.
Létiquette qui convient le mieux à ce mode est celle de suppositif, qui en indique la valeur essentielle. Ce qui distingue le saurez du sauriez, cest la charge dhypothèse que chacun implique ; on pourrait donc appeler le premier suppositif probable et le second suppositif incertain. »
Cependant, cette hypothèse dun mode spécifique au futur et au conditionnel fondée sur lopposition dun suffixe au zéro pose, elle aussi, un problème logique, comme la souligné immédiatement Moignet dans « Pitié pour lindicatif » :
« Il importe peu, en effet, que dun point de vue spéculatif lavenir soit dune autre nature que le passé et le présent, si la langue, elle, réunit les trois époques dans une construction psychique où la symétrie est rigoureuse. M. G. Guillaume [
] a démontré à maintes reprises quen français les passés et les futurs se font pendant de façon parfaite par rapport au présent unique ; le mode indicatif, en effet, est une construction à cinq postes :
passé simple futur
présent
imparfait conditionnel
[
] et il nous est imposé de voir les choses ainsi par les données mêmes de la morphologie, qui, dans la catégorie des verbes de beaucoup la plus nombreuse, comporte des correspondances et des oppositions de morphèmes éclairantes
-ai -rai
(zéro)
-ais -rais
et qui, dailleurs, souligne, dans lindicatif, la spécificité des futurs par lutilisation dun signe spécial, lindice R-. »
Ce que Moignet fait remarquer ici cest que le futur a parti pris avec le passé simple et le conditionnel avec limparfait, dans une symétrie parfaite. Si le rapprochement que la morphologie permet dopérer entre futur et conditionnel empêche de les disjoindre, celui entre conditionnel et imparfait ou celui entre passé simple et futur devrait de même empêcher de disjoindre futur et passé simple, conditionnel et imparfait. Ces quatre temps ont partie liée.
Il continue en explorant la catégorie de mode, question dont on ne peut faire léconomie, effectivement, si on veut sinterroger sur la pertinence de lappartenance dun temps à un mode :
« En fait, cest hors du domaine des modalités quil faut chercher la définition des modes, cest dans celui de la représentation du temps, qui est à la base de toute la construction linguistique du verbe. »
De plus, cette hypothèse dun mode « suppositif » se heurte lui aussi au problème de linfinitif dont le suffixe R pourrait, comme nous lavons suggéré, à linstar de Van den Eynde et Blanche-Benveniste, être commun au futur et au conditionnel ? On ne peut, en effet, ladjoindre à ces deux formes verbales dans un même mode, quil soit indicatif ou suppositif, du fait de son absence de marque personnelle qui en font une forme figée.
« cherchant à me rappeler depuis combien de temps nous étions dans ce train un jour et une nuit ou une nuit un jour et une nuit mais cela n'avait aucun sens le temps n'existe pas. » C. SIMON, La Route des Flandres
3-3- Une interrogation plus générale sur la validité des classifications habituelles.
Ces questionnements, apparemment sans issue, nous amènent à réinterroger lhermétisme des catégories du classement traditionnel. Le terme de « tiroir verbal » proposé par Damourette et Pichon est significatif dune organisation stratifiée et figée. Or, léventualité dintersections entre catégories conduit à imaginer un système des temps plus dynamique où les formes verbales résulteraient de combinaisons non-limitatives de suffixes, où les catégories ne seraient plus emboîtées les unes dans les autres mais entreraient en combinaison.
Dans ce cadre, le trait résultant du réinvestissement sémantique de lopposition ±R se combinerait à celui de lopposition a/ai, et au trait sémantique de la personne. Sil sagit dune valeur modale, dont il faudrait dailleurs alors examiner léquivalence au subjonctif, il ne sagit pas dun concept englobant mais combinatoire, cest pourquoi la notion de « mode » mériterait dêtre réinterrogée dans ce cadre. On peut aussi penser quil sagit de combinatoire de concepts qui entrent en jeu avec ceux de procès et de personne.
Lexamen du réinvestissement sémantique des oppositions que nous avons mises au jour ou dont nous avons posé lhypothèse devrait nous permettre de mieux appréhender ce système de combinatoires dont nous postulons lexistence.
Deuxième partie : Analyse sémantique
«
le monde arrêté figé seffritant se dépiautant sécroulant peu à peu par morceaux comme une bâtisse abandonnée, inutilisable, livrée à lincohérent, nonchalant, impersonnel et destructeur travail du temps. » C. Simon, La Route des Flandres
1 Préalables à lanalyse sémantique
Lanalyse sémantique que nous allons mener ne sappuie pas sur un modèle théorique préalablement établi mais sur la mise à lépreuve des descriptions existantes au filtre de notre analyse formelle. Dans le va-et-vient empirique entre les différentes analyses et notre propre réflexion sest façonné peu à peu un outillage conceptuel qui nous a permis de donner sens à la combinatoire doppositions formelles que nous avions dégagée.
Un principe fondamental nous a permis de baliser le cheminement de notre réflexion : la situation dénoncé est inséparable de lobjet dans la désignation.
1-1 Désignation et situation dénoncé
Notre analyse se bornera à létude du langage dans sa fonction de désignation, et non dans sa fonction de communication qui sinscrit pour nous dans une perspective sociolinguistique. Pour autant, la désignation de lobjet est, pour nous, inséparable de celle de la situation dénoncé. Lobjet, en effet, ne peut être identifié quen relation avec les paramètres de la situation dénoncé qui sont convoqués dans lénoncé. Nous entendons, par situation dénoncé, non seulement les paramètres de la situation où lacte de langage est produit (je, ici, maintenant) mais aussi le contexte linguistique auquel il réfère. Comme le précise Allaire à propos des « circonstances énonciatives » :
« Sil faut reprendre ce terme passe-partout lors même quil isole arbitrairement, dans la saisie des processus rhétoriques, le texte du hors-texte. A nos yeux, [investir en sens un énoncé
] consiste, nécessairement, à le mettre en rapport soit avec un élément du contexte, phrastique ou non, soit avec un élément du « réel », en dautres mots à dire le monde, que ce monde soit déjà verbalisé ou non. Nulle raison donc, dans létude de la visée du dire, de privilégier le réel, et la référence au réel, comme le veut la pragmatique, ou tout au contraire les mots et la référence au contexte (immédiat) comme le voulait la tradition en construisant une grammaire de la phrase. Quel que soit son point dancrage, cest toujours, dans lopération dinvestissement, de référence quil sagit. »
Il sera donc nécessaire de prendre en compte cette situation dénoncé dans le réinvestissement sémantique des formes verbales. Que signifie la situation dénoncé quand lénoncé est constitué dun verbe ? Quels sont lobjet et les paramètres de la situation dénoncé désignés par un énoncé verbal ?
1-2 Réflexion sur la notion de procès
Si lon interroge les linguistes sur ce qui fait la spécificité du verbe, on rencontre des réponses fort divergentes. Ainsi, chez les guillaumiens, cest le temps qui est spécifique au verbe :
« Le propre du verbe est dêtre sous-tendu de temps. »
Chez Benveniste, à linverse, laccent est mis sur la personne :
« Le verbe est, avec le pronom, la seule espèce de mots qui soit soumise à la catégorie de la personne. »
Rémi-Giraud, en sappuyant sur limportance donnée à la personne dans le verbe par Benveniste, remarque, elle aussi, que les formes verbales personnelles contiennent une référence à la « situation dénonciation » :
« Comme on le sait le verbe saccorde en personne (et en nombre) avec son sujet, cest-à-dire que la personne représente la réinscription, au niveau de la forme verbale, dune catégorie appartenant au constituant nominal en fonction sujet. Or le fait de considérer un constituant nominal sous langle de la personne, cest-à-dire de lintroduire dans un système qui distingue le locuteur (première personne), lauditeur (deuxième personne) et « [la] personne ou [la] chose autre que lauditeur » (troisième personne), revient à identifier le référent de ce constituant nominal comme un « acteur » de la communication et donc à le situer dans le cadre fourni par la situation dénonciation. On peut donc dire que les formes verbales personnelles sont des formes qui, à la différence des formes verbales non personnelles, contiennent une référence à la situation dénonciation. »
On peut en effet souligner que je, tu, il ne prennent de sens quen référence à un je de la situation dénoncé et quainsi la forme verbale qui, morphologiquement porte la marque discontinue de la personne, subit dans le procédé de réinvestissement sémantique le même processus de référenciation à la conjoncture qui est plus large que le simple « objet » à dire. Mais cette définition des rapports entre une situation dénonciation et la conjugaison des verbes à une forme personnelle pose un problème pour ce qui est du statut des modes dits impersonnels, linfinitif et le participe, problème qui se pose aussi dailleurs pour les tenants dune définition temporelle du verbe. On sait que Guillaume fait de linfinitif et du participe des modes quasi-nominaux pour échapper à cet écueil. De son côté, Rémy-Giraud est conduite à introduire, dune manière un peu artificielle, le trait de « dynamisme » pour qualifier le procès verbal, de façon à distinguer linformation véhiculée par le nom et celle véhiculée par linfinitif qui tous deux peuvent renvoyer à un procès.
Il nous semble quinterroger lopposition morphologique entre verbe et nom peut nous éclairer dans cette analyse.
Sur le plan morphologique, ce nest pas le lexème qui permet de catégoriser un verbe, car ce lexème ne lui est pas spécifique mais peut être isolé aussi bien dans le nom, ladjectif ou ladverbe. Ex : je porte - la porte.
Il sagit donc de prendre en compte lensemble du paradigme verbal. Ainsi, sur le plan morphologique, cest la combinaison de morphèmes spécifiques avec un lexème qui permet de catégoriser le verbe par rapport à un nom : morphèmes de personne (je, me, lui
), morphèmes dits « de temps » (ai, a
), etc.
Sur le plan sémantique, si on appelle procès lobjet désigné par le verbe, on constate que le procès, terme englobant une action ou un état, peut tout aussi bien être désigné par un verbe que par un nom. Je choisis ou mon choix réfèrent tous deux au même objet de lénoncé que nous appelons procès. On peut dire que ces deux énoncés sont synonymes. Mais pour désigner la même réalité, le locuteur choisit des biais différents dans la mesure où mon et je entrent dans des listes dopposition différentes, dans la mesure aussi où je choisis peut être opposé à je choisissais, par exemple. La différence entre le verbe et le nom, cest que le locuteur peut choisir quand il désigne un procès dans une situation dénoncé soit de combiner les sèmes lexicaux du procès avec des morphèmes nominaux, soit de les combiner avec des morphèmes verbaux ce qui lui permet, pensons-nous, de désigner des aspects différents de la conjoncture. Le déterminant nominal permet de dire par exemple, par lopposition un choix/le choix si le procès est identifié ou non. Mon choix permet de référer le procès directement au locuteur par rapport à le choix. Il semble bien que la sélection du nom mon choix ne permette pas de combiner un trait sémantique avec le maintenant de la situation dénoncé, de situer le procès par rapport au moment de lénoncé, ce que permet le choix du verbe : je choisis permet de dire, par exemple, en opposition avec je choisissais, que le procès se déroule en coïncidence avec le moment de lénoncé. Je choisis, en opposition avec tu choisis, que le sujet du procès est identifiable avec le locuteur de lénoncé. Quelle que soit la personne déterminant le verbe, elle identifie le procès selon la relation quelle entretient avec le locuteur. Je choisis identifie un autre choix cest-à-dire un autre procès- que celui de tu choisis. Ici, tu est un corrolaire de je. Il na de sens quen fonction du locuteur. Mais il en est de même de il, qui prend sens par opposition avec je, cest un non-je. Le procès désigné par un verbe personnel est donc identifié par référence au locuteur et à son univers. Le procès est identifié également par la façon dont il réfère au moment du locuteur. Le choix que je désigne par je choisis nest peut-être pas le même que celui que je désigne par je choisissais. Le locuteur cherche donc à rendre le procès identifiable par le rapport quil pose avec des paramètres de la situation dénoncé : locuteur, moment de lénoncé.
Cest ainsi que, quand un locuteur emploie un verbe conjugué, il désigne un procès, cest-à-dire non seulement une action -ou un état- mais une action qui est identifiée par son agent, par le moment où elle est effectuée, autant déléments qui ne prennent de sens que dans leur rapport à lunivers du locuteur, à la situation dénoncé que le verbe conjugué désigne en même temps. Le procès, son agent et sa durée interne, un moi-ici-maintenant, tout se cristallise, se combine dans cette visée sémantique, dans cette visée dadéquation au réel, pour causer le monde. Cest ainsi que le terme « procès » employé alors, recouvre ce quon pourrait appeler tout aussi bien « lunivers du procès », ensemble de paramètres par lesquels on peut lidentifier et qui prennent sens en référence avec les paramètres de la situation dénoncé.
Ainsi un énoncé verbal renvoie-t-il non seulement à un procès mais à la situation dénoncé. Enoncer un verbe nest pas désigner un « objet temporel en soi» mais désigner en même temps quun procès un maintenant de lénoncé et un je de lénoncé avec lequel se combinent les traits sémantiques spécifiques au verbe. Ainsi, dans un énoncé verbal, la référence à un moi-ici-maintenant déborde-t-elle le simple problème du temps tel quon limagine couramment : on circonscrit souvent le verbe à la notion de temporalité, à la coïncidence ou à la non-coïncidence du procès avec le maintenant de lénonciation considérée de façon extérieure à lénoncé, alors que cette notion temporelle nest quun élément de la situation dénoncé et quelle est désignée dans lénoncé. En réalité, énoncer un verbe, cest désigner laccomplissement dun procès et la situation dénoncé tout à la fois. Si ce qui différencie le verbe du nom, cest le rapport au temps toujours énoncé dans lénoncé verbal, ce rapport au temps est un des paramètres de la situation dénoncé. Temps et personne sont intriqués dans la désignation de lénoncé verbal.
La limite dune telle analyse peut apparaître dans le fait que lon sappuie sur les formes personnelles pour définir le verbe, évacuant linfinitif et le participe dont le statut peut alors sembler problématique. Pourtant, il faut considérer que la place de la personne et du temps y est figurée par un vide du fait de lopposition possible avec les formes personnelles. Sur le plan sémantique, ce vide est réinvestissable en fonction du contexte, ce qui signifie que le procès désigné par un verbe à linfinitif ou au participe est identifié lui aussi en fonction de lunivers du locuteur même si lidentification nen est pas aussi directe. Comme la bien montré Allaire dans son article « Linfinitif a-t-il un sujet ?», le fait que le verbe subisse un blocage des personnes et de temps à linfinitif nempêche pas, sur le plan sémantique, la référence à la situation de lénoncé. Seulement, ce blocage indique que le rapport entre situation dénoncé et procès nest pas contraint par la morphologie, il est laissé libre à linterprétation selon un contexte qui peut être plus ou moins large. Cest pourquoi le statut des formes verbales impersonnelles nest pas si problématique quon veut le croire ; si lon prend en compte leur fonctionnement particulier, ils permettent, par dautres biais que les verbes personnels didentifier un procès en fonction des paramètres de la situation dénoncé.
Parmi les traits sémantiques dun procès, il sera souvent nécessaire de prendre en compte sa durée interne impliquée lexicalement par la notion de procès, ainsi que le sujet sémantique du procès ou actant qui est désigné dans sa référence à la situation dénoncé. On peut, par ailleurs, attribuer dautres traits lexicaux aux procès. Lopposition lexicale perfectif/imperfectif nous paraît la plus pertinente dans les imbrications avec les traits sémantiques et en particulier avec laspect accompli. Mais de nombreuses autres oppositions lexicales ont pu être relevées. Notre analyse dun énoncé verbal prendra en compte la combinaison de ces traits avec ceux qui correspondent au réinvestissement sémantique des sèmes grammaticaux mis au jour.
Nous nous proposons dessayer de circonscrire les concepts à luvre dans les énoncés verbaux au futur et au conditionnel, ce qui implique de les circonscrire préalablement dans limparfait et le passé simple. Nous avons choisi délaborer notre corpus à partir du premier roman de Louis-Ferdinand Céline : Voyage au bout de la nuit auquel nous joindrons des énoncés extraits de journaux ou de la vie quotidienne ou des exemples des grammaires.
Le choix dune uvre littéraire pour établir un corpus dénoncé peut sembler contestable au premier abord, dans la mesure où cest un rapport singulier au langage qui fait de chaque écrivain, un écrivain. Ainsi constaterons-nous que certains emplois des temps relèvent de la langue de Céline dans ce quelle de plus originale. Dès lors, il ne sagit plus de lanalyse du français mais dune langue au sens littéraire.
Pourtant, il nous semble précieux dinterroger les écrivains qui sont, au même titre que les linguistes, des spécialistes de la langue quils travaillent, eux aussi, en profondeur. Sil leur est possible de faire un usage singulier de la langue, cest bien parce quils ont conscience de ses possibilités, des écarts quon peut produire par rapport à la norme, des moyens de linfléchir en un sens ou un autre pour tenter, encore et toujours, de désigner, par la parole, lindicible.
Il nous semble donc légitime, à condition de faire la part des choses entre un emploi courant et un emploi propre à lécrivain, à laide dun autre corpus, découter ce que les écrivains ont à nous dire de la langue et de mettre à lépreuve de la stylistique les analyses linguistiques que nous pourrons mener.
« Du temps, du passé et du temps encore et puis un moment vint où je subis nombre de chocs et de révulsions nouvelles et puis des secousses plus régulières, celles-là berceuses... couché, je l'étais encore certainement, mais alors sur une matière mouvante.. » Céline, Voyage au bout de la nuit.
2- Signification de lopposition du R, propre au futur, au conditionnel et à linfinitif, à son absence, propre à limparfait et au passé simple.
A lorée du réinvestissement sémantique des morphèmes [Ø/(±R)] et [Ø/(ai/a)], on peut se demander par quel biais aborder des « objets » qui se caractérisent par une combinaison déléments inconnus, du moins dont nous avons montré que nous ne savions plus rien. Nous avons pris le parti dexaminer dabord ce qui pouvait différencier le présent des quatre autres « temps » de lindicatif. Nous distinguerons un premier trait sémantique « (coïncident avec la situation dénoncé ».
Par la suite, nous chercherons à déterminer quelle valeur permet de réinvestir lopposition (R opposant le couple (conditionnel-futur) au couple (imparfait-passé simple). Puisque nous postulons que le +R est commun à linfinitif, nous choisirons le biais de lanalyse de linfinitif pour appréhender ce concept. Nous distinguerons alors le trait «( potentiel » dont il nous faudra vérifier par la suite sil peut dune part, correspondre à la dissociation du trait « non-coïncident à la situation dénoncé » et dautre part à lopposition entre les « temps » dits du « futur » auxquels nous attribuerons le trait « +potentiel » et les « temps » dits du « passé » auxquels nous attribuerons le trait « non-potentiel » ou « avéré ».
Il restera alors à identifier la valeur qui réinvestit lopposition ai/a. Nous examinerons, à travers sa combinaison avec le « non-potentiel », le sens quil peut prendre dans le passé simple et limparfait. Après avoir démontré que lopposition imparfait/passé simple correspondait au concept « (défini », nous verrons comment celui-ci se décline en fonction de la situation dénoncé à travers différents types dénoncé.
Il ne restera plus quà réinvestir les traits « +potentiel » et « (défini »dans lanalyse du futur et du passé simple.
2-1 Opposition du présent aux autres formes de lindicatif
Avant danalyser le réinvestissement sémantique des morphèmes ±R et ai/a, il faut tout dabord déconstruire ce qui relève dans lanalyse du réinvestissement sémantique de leur opposition avec les zéros du présent. Si nous reprenons le tableau que nous avons élaboré à la fin de la première partie :
PrésentImparfaitPassé simpleConditionnelFutur Ø /((R)Ø--++Ø /(ai/a)Øaiaaia
On peut constater une opposition du présent aux valeurs qui opposent le couple (passé simple, imparfait) au couple (futur, conditionnel) dune part, et le couple (passé simple, futur) au couple (imparfait, conditionnel) dautre part. Le présent soppose donc à lensemble de ces quatre formes verbales selon deux modalités différentes.
Il est difficile de préciser ces modalités à ce stade de lanalyse mais on peut faire deux remarques :
Tout dabord, si limparfait est souvent associé au présent dans les analyses linguistiques, au point que limparfait est considéré parfois comme un présent dans le passé, les exemples ne manquent pas qui contredisent ce lien et notent la possible « perfectivité » du présent. Touratier, par exemple, fait la démonstration de son indifférence à lopposition imparfait/passé simple à partir dun exemple de Le Cid de Corneille. Il montre, en effet, que le présent de narration peut servir à « trame événementielle », cest-à-dire à remplacer le passé simple dans certains passages :
« Jen cache les deux tiers, aussitôt quarrivés,
Dans le fond des vaisseaux qui lors furent trouvés ;
Le reste, dont le nombre augmentait à toute heure,
Brûlant dimpatience autour de moi demeure. »
Mais quil est possible aussi de mettre au présent narratif « les subordonnées ou les phrases qui correspondent à des parenthèses narratives », cest-à-dire les passages qui seraient à limparfait, et ce, dans la même tirade de Rodrigue :
« Et je feins hardiment davoir reçu de vous
Lordre quon me voit suivre et que je donne à tous.
Cette obscure clarté qui tombe des étoiles
Enfin avec le flux nous fait voir trente voiles. »
Touratier conclut :
« Le présent de narration correspond donc aussi bien à un imparfait quà un passé simple ; il nous met ainsi dans une situation comparable à celle de lallemand par exemple, où le même prétérit est utilisé pour la trame événementielle et pour les parenthèses à cette trame événementielle, et où la distinction entre ces deux rôles dans le récit na pas dexpression grammaticale. »
Aussi pouvons-nous penser que lopposition imparfait-passé simple nest pas pertinente pour le présent. Le présent serait indifférent à lopposition ai/a que nous définirons plus précisément par la suite.
La deuxième remarque consiste à dire que si lon oppose en bloc les quatre autres temps de lindicatif au présent, leur point commun sur le plan sémantique est de désigner laccomplissement dun procès non-coïncident à la situation dénoncé. Cette absence de coïncidence paraît a priori évidente si on se réfère au moment de lénoncé puisque ces formes verbales sont traditionnellement classées comme « passé » et « futur » soit antérieures ou postérieures au moment de lénoncé. On peut comprendre ainsi la distinction opérée à lintérieur de ces quatre « temps » par lopposition (R : les temps R désigneraient du passé, quand les temps +R désigneraient du futur, lensemble désignant une absence de coïncidence avec le moment de lénoncé. Mais dans la mesure où il y a dautres paramètres en jeu que le moment dans la situation dénoncé, puisque nous incluons linfinitif aux temps +R, cette première distinction entre les formes verbales non-coïncidentes à la situation dénoncé est toute provisoire. Cest pourquoi nous choisirons la dénomination « (coïncident à la situation dénoncé », le mot coïncident étant ouvert à dautres interprétations que linterprétation temporelle (coïncidence spatiale du puzzle, coïncidence didées
). On postulera, inversement, que le présent correspond à une coïncidence entre laccomplissement du procès et la situation de lénoncé auquel le procès fait référence.
Ainsi, le présent est une forme verbale quil faut différencier totalement des autres formes verbales de lindicatif. Cette conclusion est riche de potentialités quil faudrait explorer plus avant. Ce nest pas lobjet de notre recherche mais lon peut signaler, dune part, les analyses de linguistes comme Touratier qui considèrent que le présent est un « temps » non marqué, qui, comme tel, peut exprimer tous les temps, futur, passé, etc. Dans le cadre de cette analyse, les quatre autres formes verbales seraient marquées. Nous ne suivrons pas Touratier jusque là puisque, nous lavons dit, nous ne considérons pas le zéro comme une absence de marque mais les conclusions que tire Noreiko de cette théorie nous semble intéressantes :
Noreiko donne des exemples où le présent convient pour exprimer des actions passées ou dautres situées dans un avenir plus ou moins lointain, des laps de temps plus ou moins longs, des temps ponctuels ou duratifs, des actions uniques ou habituelles. Mais il précise que :
« dans de telles phrases la référence temporelle nest pas une fonction de la forme verbale, mais de lexpression adverbiale, ou de ce que lauditeur peut déduire du contexte. [
] Le point commun de ces différentes références se trouve dans loptique que lénoncé leur impose, et le manque de relief temporel quimplique cet emploi du présent.
De toutes les observations quon peut faire sur lemploi du temps présent en français, il ressort que celui-ci est un temps non marqué, que sa spécificité est cette absence de référence temporelle. Cest en effet une forme qui ne pose pas de séparation entre le moment de lénoncé et le moment de laction. Tout en pouvant se construire avec différents adverbes de temps indiquant les différentes interprétations possibles, la forme verbale par elle-même nindique pas le jalonnement dans le temps.
De ce fait le temps présent du verbe français convient à lexpression du moment présent, cest-à-dire, dans les contextes où le moment de laction et le moment de lénoncé coïncident. Mais il se prête également au discours qui ne tient pas compte dune séparation des deux moments, où le locuteur choisit de ne pas se prononcer à ce sujet, du moins dans la forme du verbe. »
Lanalyse du présent devrait réussir à délimiter, en effet, ce qui ressortit de sa valeur propre et ce qui ressortit de mises en relation avec des éléments du contexte linguistique, entre autres les adverbes de temps. Ce qui permettrait dexaminer sil sagit dune forme omni-temporelle, dune forme totalement « neutre », ou dune forme dont la valeur peut se combiner de façon différente à des valeurs variées qui peuvent sembler antagonistes.
On peut aussi chercher à relier cette représentation du présent à certains concepts philosophiques et en particulier, comme le propose Le Goffic, à la théorie de Minkowski, selon laquelle passé et futur sont « dune autre contexture » que le présent. Le Goffic déduit les conséquences cette théorie philosophique pour lanalyse linguistique du présent :
« Minkowski nous propose une phénoménologie du temps où seul le présent existe. Le langage qui y correspondrait comporterait au surplus, non pas des « temps du passé et du futur », mais des temps du souvenir et de lattente, différenciés selon les modalités de leur intégration à notre présent. »
Sans aller plus loin, nous conviendrons que le présent implique une analyse dun autre ordre que celle des quatre temps qui nous intéressent ici.
2-2 Quel concept dénoté par lopposition (R se combine avec le concept dénoté ai/a ?
Admettre que le futur et le passé simple partagent un morphème commun, de même que limparfait et le conditionnel, nest pas sans poser des problèmes dinterprétation comme le montre le questionnement de Leeman à légard du postulat de Wilmet selon lequel le futur partagerait avec le passé simple laspect global. Klum se pose la même question et son impossibilité dy répondre est symptomatique de la difficulté de ce problème. Après avoir fait un résumé des interprétations parfaitement contradictoires que les linguistes de son temps tirent de la comparaison du futur et du passé simple, Klum fait la description de son propre sentiment dont lambivalence est très révélatrice de limpossibilité de statuer sur linterprétation durative ou non-durative du futur :
« Comme on le verra, notre position est quelque peu ambivalente au sujet de laspect du futur et du conditionnel. On peut dire que par leur valeur structurale fondamentale, [
] le futur et le conditionnel sont en principe non-duratifs. Mais à part les « reformulations » qui nous occuperont dans la discussion qui va suivre, il y a dautres facteurs qui viennent troubler la netteté aspectuelle de ces formes. On pourra invoquer le fait que le futur cumule, pour lavenir, les fonctions que remplissent, pour le passé, limparfait, le passé composé, le passé simple [
]Ce qui pourrait bien expliquer lestompement de la valeur non-durative du futur, cest sans doute le manque dun terme oppositionnel caractérisé par laspect duratif. Il ny a que le présent, dans son emploi particulier dévoquer un avenir généralement lointain, qui puisse constituer une opposition aspectuelle de quelque netteté, mais, même là, on ne sent pas nécessairement laspect non-duratif du futur. Pour résumer - et anticiper disons quil y a des indices qui parlent en faveur de laspect non-duratif ; mais si la situation structurale [
] rend laspect univoque, le manque dun terme oppositionnel et la possibilité dune « reformulation » vectorielle font de cette série verbale une entité aspectuelle équivoque. Le futur est sans doute le plus souvent non-duratif ; seulement on ne le sent pas nettement. »
On le voit, les positions sont radicalement opposées, entre les tenants dun « futur duratif » et ceux dun « futur non-duratif » et Klum hésite à trancher. On saperçoit quon est très loin dun consensus comme il peut en exister pour dautres formes verbales, ce qui ne saurait nous étonner dans la mesure où notre analyse morphologique est différente. La difficulté tient sans doute à la définition de laspect duratif mais au fait aussi que la combinaison dun trait sémantique de limparfait et du passé simple avec un trait différent de celui avec lequel il est combiné au futur ou au conditionnel, conduit très certainement à des effets de sens difficilement comparables du trait sémantique commun.
Notre objectif sera donc didentifier la valeur du morphème (R qui se combine à celle du morphème ai/a, valeur elle-même à redéfinir en tenant compte de cette combinatoire et du fait quil est commun à deux oppositions : passé simple/ imparfait dune part, futur/conditionnel, dautre part.
2-2-1 Valeur de lopposition (R
La question du réinvestissement sémantique du (R a déjà été reconnue comme cruciale par certains linguistes :
«Cest un fait dès longtemps reconnu que le « conditionnel » a tantôt une valeur temporelle, tantôt une valeur modale ; nous trouverons la même ambiguïté dans le futur. La question se pose naturellement de savoir laquelle des deux est la valeur fondamentale : la plupart des grammairiens saccordent pour dire que dans le cas du futur, cest la valeur temporelle ; quelques-uns cherchent à réunir les valeurs temporelle et modale sous une valeur unique (par exemple un concept logique celui de « probabilité ») leur servant de dénominateur commun. La question serait grandement éclairée si lon réussissait à élucider la valeur exacte de r-. »
Déterminer la valeur exacte du morphème (R, cest déterminer ce qui, commun au futur et au conditionnel, soppose au passé simple et à limparfait. Cest aussi éventuellement prendre en compte le fait que ce morphème (R puisse être commun également à linfinitif. Nous nous proposons de partir de lanalyse de linfinitif pour tenter de circonscrire cette valeur. Cette analyse explorera la question du sujet et du temps de linfinitif pour montrer que la latitude interprétative de linfinitif, la potentialité de le relier à la situation dénoncé est liée non seulement aux vides désignés par les zéros de cette forme verbale mais aussi au +R qui participe, dans la distribution à ce réinvestissement sémantique des zéros. Ce cheminement nous conduira à attribuer la valeur « potentiel » à linfinitif.
2-2-1-1 Linfinitif : un procès potentiel ?
La particularité de linfinitif est dêtre une variante verbale qui ne dénote ni « temps » au sens traditionnel, ni personne. Morphologiquement, les places de la personne et du « temps » ont pour particularité dêtre marquées par un zéro, comme le montre, par exemple, lopposition du futur et de linfinitif du verbe prendre :
personnebase ( R« temps »personneInfinitif/ Ø
Øp(((
pren((
dreØ
ØØ /
ØFutur/ ((
tup(((
pren((
dra
aØ /
s
Le verbe à linfinitif ne désigne pas de sujet par lui-même et donc, ne permet pas à lui seul didentifier le procès par le rapport posé entre lagent du procès et le locuteur. Cette forme verbale présente également un zéro au niveau de ce qui est appelé traditionnellement la marque du « temps », cest-à-dire le morphème ai/a. Sagit-il du même zéro que celui du présent ? On ne peut en être sûr dans la mesure où la distribution du présent est différente. Le Ø/(ai/a) du présent entre en distribution avec un autre Ø qui soppose au ( R et avec une marque de la personne. Impossible donc dopposer ces deux formes verbales par une variation minimale.
personnebase ( R« temps »personneInfinitif/ Ø
Øp(((
pren((
dreØ
ØØ /
ØPrésent/ ((
tup(((
prendØ
ØØ
ØØ /
s
Est-ce donc ce zéro de linfinitif qui empêche le verbe de désigner une coïncidence ou une absence de coïncidence avec le maintenant de lénoncé, comme le prétendent certaines descriptions de linfinitif ? A ce stade de lanalyse, puisque nous navons pas mené notre analyse du réinvestissement sémantique du morphème Ø/(ai/a), nous sommes bien en peine de définir ce Ø de linfinitif. En effet, on peut admettre provisoirement que ce zéro dénote une absence de désignation dune opposition temporelle. Mais nous avons vu aussi que pour nous le +R renvoyait à une non-coïncidence à la situation de lénoncé qui pouvait éventuellement se gloser par une « postériorité au moment de lénoncé » si on sélectionnait le paramètre temporel de la situation dénoncé. Une valeur temporelle peut apparaître aussi dans la dénotation par le morphème R. Surtout, on peut considérer quen absence de marque morphologique de la personne, linfinitif interdit la désignation dune référence à un locuteur, et que labsence de référence au locuteur implique labsence de référence à toute la situation dénoncé.
Au total, sélectionner un verbe à linfinitif, équivaut donc à ne pas désigner, du moins par ce verbe, de situation pour lopération de référence, puisque le repérage dun sujet par rapport au locuteur est impossible, et de ce fait, celui du procès par rapport au moment de lénoncé et même à lensemble de la situation dénoncé. Ce qui ne signifie pas quil ny ait pas de situation dénoncé, bien entendu, ni non plus, quil ny ait pas de relation entre le verbe à linfinitif et la situation dénoncé. Seulement, la relation entre la situation dénoncé et le procès nest pas exprimée par le verbe mais par dautres moyens dans lénoncé. Imbs ne dit dailleurs pas autre chose quand il définit le verbe à linfinitif :
« Linfinitif est la forme que prend le verbe lorsque, pour des raisons déconomie, on peut ou veut faire abstraction des actualisations de la personne, du nombre et, dans une large mesure, du temps du verbe. Mais comme ces déterminations sont toujours nécessaires à la pleine représentation dun processus verbal, linfinitif ne peut être employé quappuyé sur un verbe dans lequel ces déterminations sont actualisées ou dans un contexte affectif ou expressif qui supplée par le ton (emplois exclamatif et impératif de linfinitif) à ces actualisations. »
2-2-1-1-1 Le « sujet » de linfinitif
A défaut de sujet grammatical, lon peut toujours trouver un sujet logique à linfinitif, que ce sujet soit lié au verbe à linfinitif par la syntaxe, cest le cas dans un exemple comme :
(1)« Elle était forcée de se courber »
où linfinitif se courber est mis en relation prépositionnelle avec un verbe à la forme personnelle, quil soit en simple relation de co-référence avec un élément du contexte linguistique, comme dans :
(2) « Mais alors où aller ? Droit devant moi ? »
où la deuxième interrogation permet de poser pour sujet logique de linfinitif le je, le narrateur de Voyage au bout de la nuit ou avec du contexte extra-linguistique, comme dans cet exemple, où le soupir du locuteur peut servir à désigner la relation de sujet logique quil faut établir entre lui et linfinitif dormir:
(3) Dormir enfin !
Comme le montre Allaire, en analysant les opérations de réinvestissement sémantique dans des « subordonnées infinitives » restreintes aux systèmes corrélatifs en pour,« linfinitif est là, toujours gros de sujets éventuels ». Elle insiste, en particulier sur limpossibilité de restreindre le sens ouvert que proposent les énoncés ambigus tels que celui-ci : « Létat a là un adversaire trop roué pour se mesurer avec lui » où lon ne se sait pas qui ne peut pas se mesurer avec qui : Létat ? Ladversaire ?
Allaire commente ainsi cet exemple :
« chacun voit bien que le repérage des sujets possibles (soulignons ladjectif) nest pas pris en charge par la syntaxe mais assumé entièrement par le descripteur. [
] Quil ny ait dans lénoncé aucune indication permettant de désigner pour linfinitif tel sujet plutôt que tel autre, mais des virtualités offertes à lexplicitation linguistique, voilà qui constitue à nos yeux le point fondamental. Car, à moins de prendre lambiguïté, ou pour mieux dire limpropriété inhérente à la structure pour un défaut du langage, et dévacuer le problème de sa constitution en travaillant demblée à la réduire, on est tenu de constater que lactivité du sujet parlant ne se déploie dans le cas de lexemple cité quà partir dune organisation syntaxique où la présence de linfinitif est source dambivalence »; une ambivalence que le subjonctif permet certes de contourner sil est porteur de son sujet de verbe conjugué : « LEtat a là un adversaire trop roué pour que cet adversaire se mesure avec lui ». Mais si daventure ce sujet nest pas exprimé devant le subjonctif, il apparaît que le vide de lanaphorique recrée pour le second membre de la phrase la même ambivalence : « LEtat a là un adversaire trop roué pour quil se mesure avec lui. » Tout est donc bien problème de vide grammatical et de vide établi par la forme dans le modèle quelle impose au langage par la forme, et non par le sujet parlant, locuteur-récepteur-descripteur de lénoncé. »
Allaire démontre que le sujet de linfinitif dans les propositions infinitives nest pas pré-établi par la syntaxe comme le prétendent les grammaires mais libre car il est de lordre du réinvestissement sémantique ; « le locuteur qui sattache à construire, ou plutôt à reconstruire, sélectivement le verbe par rapport à un sujet a toute latitude pour tirer de la conjecture du message les types de sujet quelle lui propose »
Cette description de linfinitif est confortées par dautres analyses, comme celle de Rémi-Giraud ou de Riegel, qui récusent également un sujet grammatical de linfinitif pour le fonder uniquement en sémantique. Rémi-Giraud pose, pour cela, lhypothèse dun « actant interne » purement virtuel des formes verbales non personnelles, grammaticalisé par la personne dans les formes verbales personnelles, ce qui lui permet, à sa façon, de rendre compte du « sujet de linfinitif »:
« Linfinitif en fonction nominale nest pas mis en relation par le locuteur avec un constituant nominal en position de thème : il ne devient donc pas prédicat dune proposition infinitive, cest-à-dire quil nexploite pas la possibilité que lui donne cette structure dapporter la « complétude discursive » au référent dun constituant nominal, mis, lui, en situation d« incomplétude discursive ». Mais il conserve lactant interne qui sattache de toute façon à son système aspectuel ; on ne parlera donc pas dans ce cas dun « sujet », mais seulement dune « implication actantielle » de linfinitif. [
] Cette hypothèse me permet dexpliquer certaines variations observées lors du processus de co-référenciation, ainsi que les effets de sens qui peuvent en découler. Comme nous lavons vu, alors que la personne est nécessairement un morphème référentiel, ce qui donne dailleurs au verbe son incomplétude morphologique, lactant interne est purement virtuel, et na, par lui-même aucune fonction référentielle. Mais il peut toujours être identifié contextuellement.»
Et Riegel considère que :
« le sujet [de linfinitif est] de toute façon inexistant, mais latent et donc récupérable. »
Rémi-Giraud, en posant lexistence dun actant interne, un sujet purement virtuel qui ne prend de sens que contextuellement, Riegel, en parlant de « sujet latent et donc récupérable» rejoignent Allaire dans son analyse sémantique. En effet, l « actant interne » de Rémi-Giraud ou le « sujet latent » de Riegel ne sont autres que la face positive du « vide formalisateur » dAllaire, vide qui autorise tous les réinvestissements sémantiques :
« Le sujet nappartient pas à la syntaxe de linfinitif- lors même quil relève de son expansion rhétorique. [
] Le linguiste [
peut] lire, dans la réévaluation propositionnelle de linfinitif, luvre dun locuteur qui, confronté à lévidemment formalisateur de la structure syntaxique, et contraint den récuser la négativité pour ladapter au sens à dire est appelé par là même à doter performantiellement linfinitif dun sujet quinstanciellement il na pas. »
2-2-1-1-2 Infinitif et temps
Allaire suggère, par ailleurs, et nous la rejoignons là-aussi, que le rapport au temps du procès désigné par un infinitif se fait tout pareillement par co-référence avec des éléments du contexte linguistique ou extralinguistique :
« Soulignons plutôt, concernant linfinitif, le parallèle qui simpose entre lopération qui lui donne un sujet, et celle qui lui attache des valeurs temporelles valeurs demprunt toujours, liées à son environnement, verbal ou non verbal, et toujours explicables par la contestation de ses silences syntaxiques : « Cest, cétait, ce sera, ce serait trop tard pour partir. »
Cest ce que détaille Imbs de son côté en fournissant des exemples pour chaque référence temporelle :
« Dès quun mot indique que la phrase a une application actuelle, le champ temporel de linfinitif se rétrécit. Ce mot peut être un mot à valeur temporelle : « Promets-moi de te coucher ce soir de bonne heure, de te reposer. (F.Carco)
Il peut être aussi un mot à simple valeur démonstrative :
« Cest à prendre ou à laisser. »
Ou un pronom personnel :
« Causer avec vous me porte malheur, dit Porthos » (Al.Dumas Père)
« Mais il faut mobéir et ne pas perdre une minute. » (J. Cocteau)
Ou simplement le temps du verbe (par ex. le passé simple, indiquant une action unique) :
« Découter les doléances du vieil ouvrier, de le remonter par de bonnes paroles, détourna le cours de ses idées. » (P. et V. Margueritte) »
Il est particulièrement intéressant de constater quImbs prend pour indice de valeur temporelle, non seulement des repères temporels mais tous les paramètres de la situation dénoncé, ce qui rejoint la notion d« univers du locuteur » et d « univers du procès » que les paramètres déterminent de façon interdépendante.
Imbs ajoute que, quand le contexte ne permet pas dactualiser linfinitif, il prend la valeur dune forme omnitemporelle. Il propose pour exemple des proverbes et des maximes :
« Vouloir, cest pouvoir.
Partir, cest mourir un peu.
Regarder lhorizon, cest regarder loin, mais cest aussi regarder quelque chose de faux. (J. Renard). »
Dans ce cas, la potentialité dactualisation du procès à linfinitif reste ouverte, présenter ces procès comme vrais tout le temps, cest aussi les présenter comme vrais à chaque moment où on les met en uvre. On retrouve pour « le temps de linfinitif » la latitude dinterprétation relevée pour « le sujet de linfinitif ».
2-2-1-1-3 Valeur de linfinitif
Linterprétation sémantique de linfinitif nest pas contrainte formellement, comme nous venons de le voir.
Autrement dit, par lopération de réinvestissement sémantique, nous remplissons les zéros exhibés par linfinitif, zéros qui correspondent à autant de potentialités. Cest bien pourquoi un infinitif nest pas un nom, sauf si on en fait pleinement un nom en lui attribuant un déterminant, comme dans le parler des Français, par exemple. Pour tous les autres cas, il est aisé de montrer que, quelle que soit la fonction attribuée à un infinitif, il se construit toujours selon le schéma verbal et garde donc sa nature verbale. Ainsi de la « fonction sujet » : « Y aller me coûte », de la « fonction objet » : « Il demande à ten parler », de la « fonction complément de nom » : « la peur den rire » etc. Inversement, un exemple, extrait de Voyage au bout de la nuit de Céline, montre combien le fait de conserver le voisinage de ladverbe à un nom construit ainsi par attribution dun déterminant nominal à un verbe à linfinitif- frôle la transgression :
« Ils maigrissaient à force de fièvre soutenue par le manger peu, le vomir beaucoup, lénormément de vin, et le travailler quand même, un jour sur trois à vrai dire. »
Le néologisme tient non seulement au fait de conserver le suffixe de linfinitif quand existe un nom concurrent (le travail/ le travailler) mais surtout au fait de conserver la relation avec ladverbe.
Une remarque de Rémi-Giraud qui parle « du sentiment « incontournable » que linfinitif, sil est bien en fonction de constituant nominal, ne peut pour autant être assimilé à un nom, et quen particulier, à la différence du nom daction ou détat, il implique une relation actancielle du même type que celle du verbe avec son sujet » confirme aussi cette séparation entre nom et infinitif.
Les zéros de linfinitif ne sopposent pas à une marque de genre ou de nombre comme peuvent le faire les zéros du nom, ils ne sont pas non plus de simples silences, ils sopposent aux pleins du verbe conjugué, cest-à-dire aux marques de personne, de « temps », comme le montre le parallèle entre ces tableaux du nom (fig.1) et du verbe (fig.2) :
/(
un ((((((
travailØ/
Ø /(
un ((((((
travaill((
eurØ
Ø
/((
une ((((((
travaill(z
euseØ
Ø
/de
des((((((
travaill((
eursØ
s
Fig.1
/ Ø
Ø((((((
travaille
erØ
ØØ
Ø/ty
tu((((((
travaill((
era
aØ
s Fig.2
Le zéro de la personne désigne donc en creux un sujet potentiel, cest-à-dire un rapport potentiel avec le locuteur, mais aussi un rapport potentiel du procès avec une situation dénoncé, un rapport potentiel du procès avec le maintenant du locuteur. Cest grâce au « vide formalisateur » que tous les réinvestissements sémantiques sont autorisés, le blocage du verbe à linfinitif ouvre tous les possibles pour lidentification du procès en référence à une conjoncture qui sera identifiée. Cest pourquoi le concept de « potentiel » déjà employé par Guillaume nous paraît le terme adéquat pour qualifier sémantiquement le figement du verbe à linfinitif. Selon ses termes,
« A linstant initial, la chronogénèse na pas encore opéré, elle est seulement en pouvoir dopérer : limage-temps saisie sur cet instant de la chronogénèse est le temps in posse (cest-à-dire une image que la pensée na aucunement réalisée, mais quelle est néanmoins, en puissance de réaliser). »
Nombreux, dailleurs, sont les termes signifiant le « potentiel » chez Allaire, le terme gros dans :
« linfinitif est là, toujours gros de sujets éventuels »
le terme riche dans :
« Pour être par rapport au subjonctif grammaticalement privé de « nominatif », linfinitif nen est que plus riche de tous les sujets qui peuvent lui advenir dans la conjoncture du message. »
le terme virtualités dans :
« Quil ny ait dans lénoncé aucune indication permettant de désigner pour linfinitif tel sujet plutôt que tel autre, mais des virtualités offertes à lexplicitation linguistique, voilà qui constitue à nos yeux le point fondamental. ».
Ce terme est employé aussi par Rémi-Giraud dans lexpression « actant virtuel » et elle insiste par ailleurs sur la subjectivité de linfinitif « coupé de toute réalité » :
« Au niveau sémantico-pragmatique, on peut dire que linfinitif se trouve plutôt dans des phrases à modalité « subjective » exprimant le souhait et lindignation, le doute et la volonté qui donnent à linfinitif une valeur modale qui le rapproche respectivement du subjonctif, du conditionnel et de limpératif. Cela peut sexpliquer par la nature même de linfinitif qui, posant le procès comme un pur objet de pensée, coupé de toute référence à la réalité, le prête davantage à lexpression des différents mouvements de la subjectivité. »
Si lon admet que le blocage de linfinitif désigne une valeur de potentialité, quen est-il du R de linfinitif dans la désignation du potentiel ? Notre analyse morphologique nous interdit den faire, à linstar de Berrendonner par exemple, un suffixe amalgamant une opposition à la personne et au temps des formes finies du verbe. Le R, dans la mesure où il peut se combiner avec a et s, par exemple dans tu parleras nentre pas en opposition avec les marques du « temps » et de la personne. Linfinitif sy oppose, nous lavons vu, par des zéros. On peut penser, à la première réflexion, que ce sont ces zéros de linfinitif ou au moins le zéro de personne- et uniquement ces zéros qui dénotent la valeur « potentiel ». Or, la prise en compte non seulement de lopposition des zéros mais aussi de leur distribution montre quil nen est rien : le +R de linfinitif participe au blocage du verbe, à son figement.
En effet, formellement, le suffixe R, associé à labsence significative de déterminant nominal, dénote la catégorie verbale par opposition au nom :
/(
un ((((((
travailØ/
Ø/ Ø
Ø((((((
travaille
erØ
ØØ
Ø
Cest donc ce R qui permet de désigner les zéros qui entrent en distribution avec lui comme des zéros qui sopposent à des marques de la personne et du « temps » et non à des marques de genre ou de nombre. Nous pouvons donc en conclure que le suffixe R de linfinitif participe de la désignation du « potentiel ». Combiné avec le lexème et deux zéros, il désigne un procès possible, cest-à-dire un procès dont laccomplissement peut être mis en relation avec la situation dénoncé.
2-2-1-1-4 Quelques exemples danalyse de linfinitif
La réduction du potentiel propre à linfinitif dans le cadre de son réinvestissement sémantique peut être contrainte par la relation syntaxique dans laquelle entre linfinitif. Cest le cas des formes comme :
(4) Jaime partir en voyage
où linfinitif, dailleurs obligatoire, ne peut avoir pour sujet logique que je, le sujet grammatical du verbe auquel il est lié. Pour autant, la syntaxe ne contraint pas le sens de façon prévisible, comme le montre cet exemple dAllaire :
(5) Il est trop tôt pour te baigner
où elle rappelle que le sujet tu nest pas le seul concevable. Chaque mise en syntaxe de linfinitif implique donc un « parcours dinterprétation » qui peut différer pour un même énoncé selon son contexte, donc à fortiori pour une même syntaxe jusquà autoriser parfois lambiguïté. Cest ce que montre très bien larticle dAllaire.
Dailleurs, inversement, le contexte linguistique peut fort bien contraindre linterprétation en absence de syntaxe. Ainsi linterrogation où aller dans :
(2bis) « Mais alors, où aller ? »
permet un réinvestissement sémantique du sujet logique en toute liberté, y compris celle dun sujet général comme lêtre humain mais cette latitude est réduite à je par le contexte immédiat qui fait apparaître un moi :
(2) « Mais alors, où aller ? Droit devant moi ? »
On conçoit que lénoncé suivant aurait pu se décliner en droit devant eux, droit devant nous, droit devant elle, droit devant soi dans des contextes différents.
Ailleurs, linfinitif dont Rémi-Giraud signale fort justement quil « peut produire lambiguïté, mais peut aussi favoriser une stratégie discursive fondée sur limplicite » peut conserver, en contexte une latitude interprétative. Le choix de linfinitif peut donc être un choix du locuteur de conserver une part dambiguïté dans son dire. Ce type de démarche est particulièrement valorisé en littérature et notre corpus est susceptible de nous en fournir de multiples exemples. Nous en analyserons quelques-uns :
Suite à lattentat raté de Robinson, sa victime, la vieille Henrouille revit :
(5) « Etre vieux, cest ne plus trouver de rôle ardent à jouer, cest tomber dans cette insipide relâche où on nattend plus que la mort. Le goût de vivre lui revenait à la vieille, tout soudain, avec un rôle ardent de revanche. Elle nen voulait plus mourir du coup, plus du tout. De cette envie de survivre, elle rayonnait, de cette affirmation. Retrouver du feu, un véritable feu dans le drame. »
Retrouver ne se rapporte à rien, syntaxiquement. Pour quil se rattache à rayonnait, il faudrait quun de lui soit préposé. Cest comme un cri de délivrance et on lui attribuera pour sujet la vieille Henrouille. Mais il peut aussi être une révélation de la part du narrateur à la recherche de la manière de manuvrer sa propre mort. Comment parvenir au bout de sa vie, au bout de la nuit ? Cest la problématique majeure de ce roman. Ce cri fait pendant à la réflexion de Bardamu à la mort dramatique de Robinson, son double, à la fin du roman :
« javais même pas été aussi loin que Robinson moi dans la vie !
Javais pas réussi en définitive. Jen avais pas acquis moi une seule idée bien solide comme celle quil avait eue pour se faire dérouiller. Plus grosse encore une idée que ma grosse tête, plus grosse que toute la peur qui était dedans, une belle idée, magnifique et bien commode pour mourir
Combien il men faudrait à moi des vies pour que je men fasse ainsi une idée plus forte que tout au monde ?[
] cétait pas à envisager que je parvienne jamais moi, comme Robinson, à me remplir la tête avec une seule idée, mais alors une superbe pensée tout à fait plus forte que la mort et que jen arrive rien quavec mon idée à en juter partout de plaisir, dinsouciance et de courage. Un héros juteux. »
Ainsi, le réinvestissement sémantique « potentiel »de linfinitif retrouver autorise à construire du lien aussi bien avec la situation dénoncé inscrite dans la narration, la scène dimprécations de la vieille Henrouille comme dans une situation dénoncé plus large : celle du narrateur.
De même, la symétrie de la maxime de Bardamu fait cöincider les deux verbes mourir à linfinitif et dans son intemporalité renvoie à priori à une généralité qui concerne tous les êtres humains :
(6) « Quand on a pas dimagination, mourir cest peu de chose, quand on en a, mourir cest trop. »
Mais quand on lit les énoncés qui suivent, on est amené à réinvestir en sens ces infinitifs :
« Le colonel navait jamais eu dimagination lui. Tout son malheur à cet homme-là était venu de là, le nôtre surtout. Etais-je donc le seul à avoir limagination de la mort dans ce régiment ? Je préférais la mienne de mort, tardive
»
Le premier mourir renvoie dans une interprétation possible au colonel qui vient de mourir dune attitude follement inconsciente :
« Et je repensais encore au colonel, brave comme il était cet homme-là, avec sa cuirasse, son casque et ses moustaches, on laurait montré se promenant comme je lavais vu moi, sous les balles et les obus, dans un music-hall, cétait un spectacle à remplir lAlhambra. »
Le second mourir renvoie au personnage-narrateur, à Bardamu, qui a toujours une conscience aiguisée de la mort mais il désigne en même temps tous les soldats entraînés vers la mort par labsence de conscience de leurs supérieurs, en particulier le messager tué avec lui et qui, lui, avait conscience aiguë du danger :
« arriva vers nous au pas de gymnastique, fourbu, dégingandé, un cavalier à pied (comme on disait alors) avec son casque renversé à la main, comme Bélisaire, et puis tremblant et bien souillé de boue, le visage plus verdâtre encore que celui de lautre agent de liaison. Il bredouillait et semblait éprouver comme un mal inouï, ce cavalier, à sortir dun tombeau et quil en avait tout mal au cur. Il naimait donc pas les balles ce fantôme lui non plus ? Les prévoyait-il comme moi ? »
Ainsi, le « potentiel » des infinitifs de la maxime (6) « quand on a pas dimagination, mourir cest peu de chose, quand on en a, mourir cest trop » autorise-t-il à relier sémantiquement les verbes mourir soit à la situation très générale de lêtre humain dans une parfaite intemporalité comme à la situation très particulière des deux militaires qui viennent dêtre fauchés par les tirs adverses, comme, encore, à la situation de Bardamu dans la guerre.
Céline invite le lecteur à faire des rapprochements, à reconstruire le(s) sens de linfinitif dans ce contexte. De même, linterprétation de lénoncé :
(7) « Mais il fallait se méfier
»
qui fait suite au portrait du général des Entrayes est problématique du fait que linfinitif est pris en charge par une forme impersonnelle :
« On menvoyait souvent avec cinq hommes, en liaison, aux ordres du général des Entrayes. Ce chef était petit de taille, silencieux, et ne paraissait à première vue, ni cruel, ni héroïque. Mais il fallait se méfier
»
Est-ce Bardamu qui doit se méfier, lui et ses cinq hommes, les soldats en général, le lecteur, de ce premier portrait ? Encore une fois, linterprétation est ouverte.
Au total, lanalyse de ce petit corpus de Voyage au bout de la nuit montre que le potentiel de linfinitif, qui correspond à une latitude de la référence à une situation dénoncé, autorise non seulement le lecteur à rechercher un « sujet logique » ou un « actant virtuel » dans le contexte et à faire son miel de lambiguïté possible mais avec le sujet logique, cest toute une situation qui est convoquée et qui permet déclairer le rapport que lon peut poser entre linfinitif et la situation dénoncé.
2-2-1-2 Procès attestés/procès potentiels
En explorant la question du statut du « sujet de linfinitif » et de son « temps », notre analyse nous a conduit à considérer que le R de linfinitif participait à la désignation dun « vide formalisateur » susceptible de se réinvestir librement dans une relation à la situation dénoncé. Nous avons convenu de désigner cette latitude interprétative quautorisait linfinitif par le trait sémantique « (potentiel ».
Si lon admet que le +R est commun à la morphologie de linfinitif, du futur et du conditionnel, on peut postuler que sa présence dans le futur et le conditionnel correspond également à un procès potentiel. Ce rapprochement entre infinitif, futur et conditionnel est présent dans les thèses de Guillaume, comme latteste Curat, même si elle ne se base pas sur une identité morphologique :
« Que les r- du futur et du conditionnel ne soient pas le r- de linfinitif nen fait pas pour autant de simples morphèmes homonymes. Guillaume voit lindice dune parenté sémantique dans le fait que linfinitif est la forme potentielle du quasi-nominal, que le conditionnel traite dévénements dont la réalisation est hypothéquée, aléatoire, et que le futur parle de procès encore à venir, cest-à-dire, toujours, incertains. Le morphème r marquerait cette incertitude.
La profonde parenté sémiologique entre futur et conditionnel ne saurait donc être accidentelle. Son absolue cohérence elle ne souffre aucune exception, alors que la sémiologie est, par essence, le domaine des exceptions- interdit par ailleurs dy voir le reliquat de quelque système antérieur, et incite à chercher les relations sémantiques qui lient ces deux temps dans le système moderne. »
La « parenté sémantique » de linfinitif, du futur et du conditionnel que postule Guillaume est basée sur la valeur « potentiel » que nous proposons également.
Lopposition du couple (futur-conditionnel) au couple (passé simple-imparfait) correspond alors à la valeur « -potentiel », cest-à-dire à la représentation dun procès avéré, dun procès attesté par le locuteur. On le voit, lopposition entre les « temps » dits « du futur » et les « temps » dits du « passé » nopère pas sur un concept de temporalité. Cette remarque qui récuse une représentation purement linéaire des « temps » verbaux, nous ne sommes pas, naturellement, la première à la faire. Maingueneau, par exemple, a signalé que ce qui oppose les procès exprimés au futur et au conditionnel de ceux exprimés à limparfait et au passé simple était dun autre ordre que la pure temporalité :
« Le présent ne constitue pas pour autant une sorte « daxe de symétrie » temporel, comme si le passé était au présent ce que le futur est à ce même présent. Il serait faux de penser que la seule différence entre passé linguistique et futur linguistique est que le premier suppose un regard rétrospectif et le second un regard tourné vers lavenir, en admettant implicitement que lénonciateur a la même attitude à légard du passé et du futur et que son activité se borne à « situer » des énoncés dans le temps. La linguistique générale enseigne un fait révélateur à ce sujet : si, en règle générale, les différentes langues possèdent un passé, il est en revanche très fréquent que le futur soit marqué par des combinaisons du type ( présent+adverbe de temps) ou(vouloir, devoir
+verbe à linfinitif ) et non par des « temps » spécifiques. Cette dissymétrie est significative : les fait révolus ne sauraient posséder le même statut pour un énonciateur que ceux à venir, lesquels nexistent en fait que comme le terme dune tension de lénonciateur à partir de son présent. Si le passé est par définition coupé du présent de lénonciateur, le futur nest supporté que par lui. Pour les événements passés, limportant cest de déterminer comment ils ont eu lieu alors que pour les faits futurs lessentiel est de savoir sils auront lieu ou non, de quelle manière lénonciateur les pose. »
Poser que ce qui distingue le couple (futur-conditionnel) du couple (passé simple-imparfait) est une valeur « (potentiel » qui décline une valeur plus générale « -coïncident à la situation dénoncé » remet effectivement en cause la prédominance de la temporalité dans lexplication des « temps ». En effet, labsence de coïncidence à la situation dénoncé peut, certes, se faire sur le plan temporel mais elle peut aussi correspondre à un autre paramètre de la situation dénoncé. Aussi postulons-nous une valeur « potentiel » qui soit plus large que la simple antériorité/postériorité au moment de lénoncé.
Il est possible aussi de rapprocher de ces remarques, lanalyse de Gosselin qui oppose les temps de l« irrévocable » aux temps « possibles ». Pour qualifier le futur de « possible », il part du chapitre 9 du traité De linterprétation dAristote, selon lequel « si une proposition portant sur lavenir est nécessairement, au moment où je parle, soit vraie, soit fausse, cest que les événements quelle prétend décrire sont prédéterminés de toute éternité », ce qui aboutit à nier la liberté de lhomme. Ainsi, « les propositions qui décrivent des événements futurs (à part ceux qui sont inéluctables ou impossibles) ne sont actuellement ni vraies, ni fausses ; elles sont simplement possibles. En revanche, les événements présents et passés, et par voie de conséquence, les propositions qui les expriment sont considérés comme irrévocables. » Cependant, Gosselin se refuse à reprendre telle quelle lanalyse jugeant que les « énoncés au futur ne présentent nullement les propositions quils expriment comme simplement possibles (cest-à-dire comme nétant, au moment où elles sont énoncées ni vraies ni fausses). » Nous pensons également que le futur ne présente pas les procès « comme simplement possibles » car nous postulons que ce trait « potentiel » se combine avec un autre trait sémantique, celui qui est dénoté par le morphème Ø/(ai/a).
Au total, la valeur « potentiel » que nous avons postulée pour linfinitif peut être réinvestie dans lanalyse sémantique de lopposition dénotée par (R. Soulignons encore que si le concept « +potentiel » peut signifier lultériorité par rapport au moment de lénoncé, nous pensons quil peut aussi désigner le possible en référence à un autre paramètre de la situation dénoncé. On pourra dire la même chose de façon symétrique pour les « temps » avérés. Nous postulons donc un concept « potentiel » plus général que celui qui sappliquerait simplement à la temporalité.
« Les vivants qu'on égare dans les cryptes du temps dorment si bien avec les morts qu'une même ombre les confond déjà. » L-F. Céline, Voyage au bout de la nuit.
2-2-2 Réinvestissement sémantique du morphème ai/a dans limparfait et le passé simple.
Passé simple et imparfait se définissent par opposition avec le présent : ils désignent des procès non coïncidents avec la situation dénoncé. Cette absence de coïncidence se décline en une opposition au futur et au conditionnel dénotée par le morphème (R, cest-à-dire que les procès que désignent les verbes à limparfait et au passé simple sont des procès avérés, contrairement à ceux qui sont désignés par des verbes au futur et au conditionnel. Mais ils se définissent aussi par opposition lun par rapport à lautre. Cest à cette opposition à laquelle nous allons nous intéresser dans les pages qui viennent, à la valeur qui correspond au réinvestissement sémantique de lopposition ai/a sans pour autant oublier que cette valeur se combine avec celle de l« avéré », trait sémantique « non-coïncident » avec la situation dénoncé.
2-2-2-1 Le trait sémantique « (défini »
2-2-2-1-1 Le concept de rupture avec la sphère du locuteur dans lopposition passé simple / imparfait
2-2-2-1-1-1 Rupture avec le moment de lénoncé :
Depuis les travaux de Benveniste, toute analyse du passé simple prend en compte le constat que cette forme verbale introduit une rupture entre le procès et le moment de lénoncé alors que le passé composé implique une conséquence du procès sur le moment de lénoncé. Cependant, si lon voit bien que cest la valeur « accompli du présent » qui explique le lien entre un procès au passé composé et le présent de lénoncé, la coupure du passé simple paraît plus problématique dans la mesure où, si lon admet que le passé simple soppose au présent, dont le passé composé est la forme accomplie, cest le cas également de limparfait pour lequel on ne relève jamais le trait de rupture avec la sphère du locuteur. En effet, le passé simple, le plan morphologique le montre, peut être opposé au passé composé en tant que présent accompli mais il en est de même de limparfait. On peut le figurer sous cette forme :
Passé ComposéPrésent Passé simpleImparfait
Ainsi, si le trait sémantique « non coïncident » qui oppose le passé simple au présent peut sembler propre à cette rupture très souvent décrite entre le passé simple et le maintenant de lénoncé, cette hypothèse implique dinclure limparfait dans lanalyse du passé simple car il partage avec lui ce trait de « non-coïncidence » avec le moment de lénoncé. Il faudrait donc attribuer aussi à limparfait le trait sémantique de « rupture avec le présent », alors que ce nest jamais fait. On le constate au hasard de toutes les lectures que lon peut faire sur le passé simple et le passé composé : limparfait est le grand absent de ces analyses, le passé simple est systématiquement décrit seul, en opposition avec le passé composé. Témoins ces quelques exemples :
« Le priscal [= le passé simple] apparaît quand on a à marquer le surgissement dun fait nouveau dans une époque précise, mais sans mettre nullement ce fait en relation avec le présent. Tandis quau contraire, lantérieur [=le passé composé] apparaît quand on tient à marquer la trace au moins mémorielle que le fait passé a laissé dans lépoque présente. [
] On voit donc quici encore lantérieur est employé pour mettre le passé en relation avec le présent, pour le présenter à titre dacquêt, comme une manière de présent, quau contraire, le priscal présente les faits passés comme appartenant en propre à une époque autre que lépoque présentée. »
Pour autre exemple, dans la Grammaire du sens et de lexpression de Charaudeau, lanalyse du passé composé suit immédiatement celle du passé simple en des termes communs qui définissent lopposition de ces deux formes verbales :
« Passé simple : le processus, déjà réalisé, est complètement coupé de la sphère du « présent actuel » du sujet parlant, et na plus aucune répercussion psychologique sur celui-ci. »
« Passé composé : le processus vient de sachever et, tout en faisant déjà partie du passé, il garde encore une présence (physique ou psychologique) dans lactualité du sujet parlant. Le « présent accompli » appartient en fait à la catégorie de l « accomplissement » : il a déjà un pied dans le passé et encore un pied dans le présent. »
Mais cette opposition apparaît aussi chez Benveniste :
« De la forme de parfait jai lu ce livre, où jai lu est un accompli de présent, on glisse à la forme temporelle de passé jai lu ce livre lannée dernière ; jai lu ce livre dès quil a paru. Le discours est alors pourvu dun temps passé symétrique de laoriste du récit et qui contraste avec lui pour la valeur : il fit objectivise lévénement en le détachant du présent ; il a fait, au contraire, met lévénement passé en liaison avec notre présent. »
Face à cette contradiction de la description du passé simple, il nexiste que deux solutions : soit le trait « rupture avec la sphère du locuteur » ne correspond pas à lopposition au PS / présent mais à une opposition PS / imparfait. Soit ce trait est également attribuable à limparfait mais il faut alors déterminer pourquoi on nanalyse pas habituellement limparfait de cette façon, déterminer ce qui loppose, en définitive, au passé simple.
Cest dans cette perspective que nous nous proposons de revenir sur cette analyse sémantique du passé simple et sur ses implications déjà observées.
Cest surtout depuis la théorie de Benveniste, qui en a fait un pivot de sa dichotomie énonciative, le double système histoire/récit que lanalyse sémantique du passé simple comme marquant une coupure avec le moment de lénoncé a été largement exploitée par de très nombreux théoriciens de la linguistique ou de la littérature. Benveniste place en effet le passé simple au cur du système de lénonciation historique dont il précise quil « se reconnaît à ce quil impose une délimitation particulière aux deux catégories verbales du temps et de la personne prises ensemble. » Ces délimitations sont ainsi définies : « [
] On ne constatera dans le récit historique constitué que des formes de « 3è personne ». [
] Lénonciation historique comporte trois temps : laoriste (= passé simple ou passé défini), limparfait (y compris la forme en rait dite conditionnel), le plus-que-parfait ».
Benveniste oppose le plan historique au plan du discours, constitué par « toute énonciation supposant un locuteur et un auditeur ». Si limparfait apparaît aux côtés du passé simple dans la définition du plan historique, il nempêche que Benveniste fait du passé simple un temps à part qui concentre le concept de « rupture avec la sphère de lénonciation » alors que limparfait semble seulement lui faire pendant. En effet, non seulement il dit que le passé simple est le temps fondamental de lhistoire :
« Le temps fondamental est laoriste qui est le temps de lévénement hors de la personne dun narrateur. »
Mais il remarque plus loin :
« [ dans le discours] tous les temps sont possibles, sauf un, laoriste, banni aujourdhui de ce plan dénonciation alors quil est la forme typique de lhistoire. »
Cette analyse est pleinement confortée par le fait que le passé simple peut difficilement être mis en relation avec des déictiques qui renvoient à la situation dénoncé. Dans les statistiques de Klum, la mise en relation des marqueurs temporels déictiques avec le passé simple obtient des scores de 0%. Ces statistiques peuvent être facilement vérifiées aujourdhui par le recours à des logiciels danalyse de discours comme Frantext. Ainsi, un test de co-occurrences de hier avec le passé simple dans 487 uvres de 1950 à 2000 donne-t-il un résultat très limité : seulement onze occurrences. Parmi ces occurrences, certaines peuvent sembler erronées ou, tout au moins, relever de lhyper-correction. Cest le cas des citations suivantes :
« Il montra à Gregor à son tour la feuille de papier trouvée dans la loge de Rita, lui raconta les manifestations dhier au soir comme sil se délivrait de tout cela en le confessant à son collègue. »
« Ce fut, hier, la montée sur Merlette dun Agostinho au maximum de lorgie athlétique, véritable bête de cimes. »
« Ce fut hier la journée des balles fantaisistes. »
« Depuis hier soir huit heures, ce furent le repos, le silence et loubli. »
Dautres par contre semble relever de la volonté du locuteur de mettre hier à distance, dans un passé coupé de la sphère du locuteur :
« Ils forcèrent les maisons et y commirent des abominations, si bien que très vite la population, hier apaisée et plutôt tranquille, se dressa contre ses assaillants et les repoussa à coups de pierres, de jets deau et dhuile bouillante ».
« Il sagit aujourdhui, de rendre à lui-même, par le spectacle de sa joie et lévidence de sa liberté, un peuple qui fut, hier, écrasé par la défaite et dispersé par la servitude. »
« En se promenant autour du sommet de la Butte, il vit que les terrains abandonnés dhier, terrain des Souterrains, des Tuyaux, des Colombins, de la Vieille maison, étaient cernés par des palissades avec lindication Chantier interdit. »
Enfin, chez certains auteurs, il y a là un effet stylistique :
« Elle arriva ce soir plus tard encore quhier, bien après ses invités. »
qui peut tenir du brouillage délibéré du temps :
« Piéton, il ne me reste plus que le chemin, doù je viens, où je vais, où je passai, demain, hier, campagne ou bois, fond plat ou côte raide, le ruisseau qui me suit et déjà me précède, rien ne subsiste au cur stoïque du marcheur, sinon ce que son pas enjambe, la largeur du chemin quun rythme interminable ramène. »
Enfin, le mot hier peut être employé de façon métalinguistique :
« quand ce qui fut malheur ou bonheur se nomme hier
pourtant létoile brille encore et le cur bat »
« Ce lendemain nest pas du jour qui fut hier. »
La même recherche sur la co-occurrence dun verbe au passé simple avec des expressions comme semaine dernière, mois dernier, année dernière et nuit dernière donne un résultat encore plus réduit : seulement quatre occurrences, qui toutes, me semblent relever dun emploi fautif :
« Nicolas regretta de nêtre pas parti la nuit dernière comme le lui conseillait Raphaël. »
« Cest par le truchement de ces déboires télévisuels que Beyssandre, lannée dernière, eut connaissance de lhistoire de Bartlebooth. »
« Jy repensais encore le mois dernier, quand un de mes amis me raconta quil avait beaucoup désiré une femme parce quelle savait shabiller. »
« De même lannée dernière un homme demanda à parler au prêtre de San Giovanni : ceci est pour vous. On déballa le paquet, le Corrège de la collection Ferrari était là, intact. »
Il est à noter dailleurs que ces emplois peuvent correspondre à une forme de résurgence de lusage de lépoque classique qui admettait lemploi du passé simple avec tout repère temporel nincluant pas le maintenant de lénoncé (soit hier, la semaine dernière, lannée dernière
) mais lexcluait avec des repères tels que maintenant, aujourdhui, cette année
Il nest pas exclu que les lecteurs actuels des uvres du 17ème réemploient à loccasion des formes de cette époque.
Quoiquil en soit, le nombre très réduit de ces énoncés confirme les statistiques de Klum et le peu de probabilité dénoncés comme :
(8) ? Hier, il partit à 8 heures.
(9)? Ce matin, il partit à huit heures.
A linverse, il est tout à fait commun de mettre en relation un verbe au passé simple avec des repères temporels anaphoriques, cest-à-dire des repères qui sidentifient non pas en référence au moment de lénoncé mais à un autre moment prédéfini, comme la veille, ce matin-là.. Une recherche sur Frantext des co-occurrences du passé simple avec la veille donne 110 résultats sur le corpus de 1880 à 1900 ou 47 sur celui de 1970 à 2000, par exemple. De même trouve-t-on 18 occurrences de ce matin-là en relation avec un verbe du passé simple dans le premier corpus et 30 dans le second.
De fait, des énoncés tels que :
(8bis) La veille, il partit à 8 heures.
(9bis) Ce matin-là, il partit à huit heures.
sont tout à fait courants.
Lopposition entre repères déictiques et repères anaphoriques en co-présence avec le passé simple est donc flagrante. Klum commente ainsi cette distribution adverbiale avec le passé simple :
« Quant à la distribution adverbiale, le trait le plus frappant est évidemment le rôle extrêmement réduit du passé simple avec les adverbes appartenant au premier système adverbial, à savoir la série nynégocentrique. La rareté de ces combinaisons ne doit pourtant pas nous faire croire que le passé simple soit constitutionnellement incapable dindiquer des procès qui, objectivement, sont en rapport immédiat avec le moment de la parole. Les exemples montrent quon pourra trouver des passés simples mêmes pour des procès expressément indiqués comme tout-à-fait proches du « moi-ici-maintenant »A part le couple en ce moment, maintenant, il ny a pas, pour ainsi dire, dempêchement positif, immanent, à ces combinaisons mais une entrave « négative », extérieure, constituée par les fonctions et la concurrence du passé composé. »
Mais Klum tempère cette latitude du passé simple à se combiner avec des déictiques en notant que dans ce cas, les déictiques ne sont plus interprétables dans leur rapport au moment de lénoncé, ce qui tend à prouver la valeur intrinsèque de « rupture avec le moment de lénoncé » du passé simple :
« Répétons que chaque fois quon se sert, dans des cas pareils, du passé simple leffet sera, quon le veuille ou non, une distanciation psychologique : on « néglige » létroite relation logique exprimée par hier, ce matin, la semaine passée, cette année, etc., on se donne du recul pour parler avec Damourette et Pichon .»
On a vu ci-dessus quon pouvait interpréter ainsi effectivement quelques-unes des occurrences au passé simple avec hier relevées par Frantext.
2-2-2-1-1-2 Rupture entre le procès et le locuteur
Cependant, le moment de lénoncé nest pas le seul élément concerné par la rupture impliquée par le passé simple. Benveniste souligne que le passé simple implique aussi une rupture avec le locuteur lui-même :
« A vrai dire, il ny a même plus alors de narrateur. Les événements sont posés comme ils se sont produits à mesure quils apparaissent à lhorizon de lhistoire. Personne ne parle ici ; les événements semblent se raconter eux-mêmes. »
Pour lui, cest dailleurs en tant quindice de la présence du locuteur que le présent ne peut être exploité dans le plan de lhistoire :
« Pour lhistorien, le présent, le parfait et le futur sont exclus parce que la dimension du présent est incompatible avec lintention historique : le présent serait nécessairement alors le présent de lhistorien, mais lhistorien ne peut shistoriciser sans démentir son dessein. »
Le moment de lénoncé nest donc quun élément de lunivers du locuteur dont la rupture avec le procès est déterminée quand il est désigné par un passé simple. Ce qui est dit en dautres termes par Riegel :
« La disparition du passé simple de lusage oral sexplique par son absence de relation avec la situation dénonciation : à loral, lénonciateur simplique inévitablement dans son énoncé ; pour rapporter des faits passés, il aura naturellement recours au passé composé, et non au passé simple, qui établit une distance par rapport aux événements. Cependant, dans certaines circonstances où la relation à la situation est moins forte, le passé simple se rencontre encore à loral. »
Ce qui vient confirmer cette analyse, cest le fait que le je de la situation dénoncé est lui-aussi très souvent désigné comme non-compatible, ou tout au moins comme coupé du procès énoncé au passé simple. Ainsi, Benveniste est-il assez catégorique en excluant du plan de lénonciation historique toute autre personne que la « 3è personne », réfutant à la limite la possibilité de dire nous arrivâmes et vous arrivâtes :
« nous arrivâmes et surtout vous arrivâtes ne se rencontrent ni dans le récit historique, parce que formes personnelles, ni dans le discours, parce que formes daoriste. »
Il nuance cependant son affirmation en soulignant que « le romancier emploie encore sans effort laoriste aux 1ères personnes du singulier et du pluriel. » On en fournirait, en effet, des exemples à foison, tels ceux-ci :
(10) « Dès que jeus pris la route, à cause de la fatigue, je parvins mal à mimaginer, quoi que je fisse, mon propre meurtre, avec assez de précision et de détails. »
(11) « Nous finîmes par coucher tous en pleins champs, général ou pas. »
Mais cette possibilité de conjuguer une forme verbale au passé simple à la première personne ne constitue pas un contre-argument : elle a été, elle aussi, abondamment glosée par les stylisticiens de la littérature comme une mise à distance du je constitué en personnage du récit, sorte de dédoublement du je qui devient un équivalent du il de lhistoire, cest à dire un je coupé du je de la situation dénoncé. Je devient « un autre » ce qui nest pas sans rappeler ce commentaire de Klum, quant à la possibilité, quoique réduite, de mettre en relation un repère temporel déictique avec un passé simple :
« Répétons que chaque fois quon se sert, dans des cas pareils, du passé simple leffet sera, quon le veuille ou non, une distanciation psychologique : on « néglige » létroite relation logique exprimée par hier, ce matin, la semaine passée, cette année, etc., on se donne du recul pour parler avec Damourette et Pichon .»
Autrement dit, il nest acceptable de désigner un je dans un verbe conjugué au passé simple quà condition de comprendre ce je comme différent du je de la situation dénoncé. La clôture entre le procès et la situation dénoncé impose une clôture entre la personne sujet du procès et la personne je, comme elle impose une clôture entre le moment du procès et le moment de lénoncé, ce qui conduit nécessairement à une interprétation qui distancie les éléments déictiques.
Comme le dit Le Guern :
« Cest un autre lui-même, plus jeune et souvent plus brillant, non pas lui qui écrit ou qui dicte, mais lui qui dans un passé déjà envisagé comme historique, accomplissait les actions dont il parle ou était censé les accomplir. »
ou Joly :
« le roman à la première personne nest au fond quune manière de récit historique à la troisième personne. »
Certains stylisticiens, comme Starobinsky, soutiennent dailleurs que lalliance du je et du passé simple est non seulement possible mais nécessaire dans certains récits mémoriels, pour souligner laltérité entre le je-personnage et le je-narrateur :
« La « première personne » est le support commun de la réflexion présente et de la multiplicité des états révolus. Les changements didentité sont marqués par les éléments verbaux et attributifs : ils sont peut-être encore plus subtilement exprimés par la contamination du discours par les traits propres à lhistoire, cest-à-dire par le traitement de la première personne comme une quasi troisième personne, autorisant le recours à laoriste de lhistoire. Le verbe à laoriste vient affecter la première personne dun certain coefficient daltérité. »
Cest vrai, en particulier, des récits de type picaresque dont Starobinsky souligne lécart maximal entre le héros et le narrateur :
« Dans la narration de type picaresque, cest le passé qui est le « temps faible » : temps des faiblesses, de lerreur, de lerrance, des humiliations, des expédients. Traditionnellement, le récit picaresque est attribué à un personnage parvenu à un certain degré daisance et de « respectabilité », qui se retourne vers un passé aventureux et vers des origines marginales. [
]
Pour le narrateur picaresque, le présent est le temps du repos enfin mérité, du savoir enfin conquis, de lintégration réussie dans lordre social. Il peut se moquer de lêtre obscur et besogneux qui donnait tête baissée dans toutes les illusions du monde. Il parlera donc de son passé avec ironie, condescendance, apitoiement, amusement. »
En définitive, et Weinrich le souligne, cest plutôt avec tu et vous que le passé simple est quasiment incompatible :
« Encore plus rares sont les récits dans lesquels quelquun raconte ce qui est arrivé au récepteur lui-même (« récit à la 2ème personne »). En règle générale, le récepteur connaît déjà ce quil pourrait apprendre sur soi de la part dun autre et un tel récit est ainsi inutile. Cest la raison pour laquelle la littérature na pas fait non plus du récit selon la perspective du lecteur (singulier ou pluriel) un genre propre ou un sous-genre, sauf à titre dexceptions sécartant consciemment de la norme. La combinaison du passé simple avec le rôle du récepteur au singulier ou au pluriel, y compris la forme de politesse (par exemple : tu dormis, vous rêvâtes) est donc la moins établie, elle ne lest pour ainsi dire pas du tout. Cette combinaison est écartée dès que possible des récits écrits par lusage actuel pour qui elle a dans la plupart des cas un accent de pédanterie ridicule. »
On imagine difficilement, en effet où peut-être est-ce un style à inventer ? - un récit qui mette à distance un tu-personnage dun tu-récepteur. Plus exactement, le récepteur nétant désigné que comme pendant du locuteur, la rupture ne se ferait pas entre le tu-personnage et le tu-récepteur mais bien entre ce tu-personnage et locuteur, mise à distance qui explique peut-être laccent de pédanterie ridicule dont parle Weinrich.
La rupture effectuée par le passé simple entre le procès et le locuteur lui-même a été dailleurs souvent remarquée sous des termes comme « rupture psychologique » par des linguistiques comme en témoignent ces quelques citations :
« Le passé composé, qui marque souvent, à létat plus ou moins pur, laspect accompli-présent dune action antérieure et qui relie toujours un procès au moment présent, semploie par rapport à une époque déterminée ou indéterminée complètement écoulée ou non. Plus cette époque est proche de moi qui parle maintenant, et plus grandes seront les chances pour que le passé composé lemporte sur le passé simple. Cette dernière série verbale, qui marque toujours une dissociation psychologique avec le moi-ici-maintenant, semploie, surtout dans des récits suivis, lorsquil est question de présenter des actions délimitées, mais sans quon les indique comme antérieures au moment de la parole. Il y a plus : on néglige tout lien avec la situation présente même là où ce lien semble très naturel « logiquement » ; on « noie », avec le passé simple, les procès dans le passé. »
Chez Imbs :
« Un événement passé rapporté au passé simple est un fait entièrement révolu et sans lien exprimé (la question des liens réels étant toujours réservée) avec la pensée et lexpérience actuelles de celui qui parle. Quand un tel lien est envisagé, ne sagirait-il que du désir de marquer quun fait passé est vu dans la perspective actuelle de celui qui le rapporte, la langue (écrite) a recours au passé composé. Doù la possibilité demployer le passé simple pour situer un fait dans un passé éloigné, comme par exemple au début dun récit, du moins avec certains verbes comme être, ou dans une remarque isolée, qui oppose énergiquement le passé au présent. [
] Le passé peut même être récent, mais alors il est présenté comme entièrement coupé du présent. »
Damourette et Pichon signalent également une « attitude » du locuteur :
« Le locuteur ne se tient pas ici [
] en liaison présente avec le passé et lavenir ; il sisole en quelque sorte deux, quant à lintérêt pratique ; il adopte vis à vis deux une attitude purement spectaculaire. »
Ainsi, on aboutit à la conclusion que le passé simple instaure une clôture non seulement entre le moment du procès et le moment de lénoncé mais entre le procès constitué avec son sujet, son moment et lunivers du locuteur constitué de moi/ici/maintenant.
2-2-2-1-1-3 Limparfait et le trait de rupture avec la sphère du locuteur
Si la rupture introduite par le passé simple a été abondamment glosée, on a sans doute trop négligé dinterroger limparfait dans son rapport avec ce concept de rupture avec la sphère du locuteur.
On constate, en effet, que les faits qui permettent détablir que le passé simple désigne une rupture avec lunivers du locuteur ne sont pas extensibles à lanalyse de limparfait.
Les statistiques de Klum montrent, par exemple, que, dans son corpus, 20 à 25% des adverbes hier se combinent avec limparfait, 14 à 21% des ce matin et 15 à 22% des tout-à-lheure, chiffres tout à fait importants. Cest pourquoi des énoncés comme :
(12ter) Hier, il partait à huit heures.
(13ter) Ce matin, il partait à huit heures.
sont tout à fait courants. Une analyse à laide de Frantext le confirme. Pour en donner un exemple, sur les uvres de 1880 à 1900, on trouve 448 occurences de hier en relation avec un verbe à limparfait.
Faut-il alors en déduire que limparfait ne désigne pas une rupture du procès par rapport à lunivers du locuteur et que cette absence de rupture constitue le trait dopposition entre limparfait et le passé simple ? Mais cette analyse ne va pas sans impliquer un certain paradoxe, voire même une contradiction.
Dabord, les énoncés où un verbe à limparfait est mis en relation avec un anaphorique, désignant donc un procès référé à un moment totalement coupé de la situation dénoncé, sont , eux aussi, tout à fait courants. Par exemple, une recherche sur les uvres de 1880 à 1900 répertoriées par Frantext donne un résultat de 47 énoncés mettant en relation ce matin-là avec un verbe à limparfait. La même recherche sur les uvres de 1970 à 2000 aboutit à 38 co-occurrences.
(12bis) La veille, il partait à huit heures.
(13bis) Ce matin-là, il partait à huit heures.
Cette latitude qua limparfait de se combiner aussi bien avec des déictiques quavec des anaphoriques correspond à son inscription par Benveniste dans les deux systèmes quil distingue : histoire et discours.
De plus, limparfait sopposant au présent, nul doute quun verbe à limparfait ne désigne un procès qui na plus cours au présent, autrement dit achevé au moment de lénoncé. Il existe donc bien une limite dans le « réel » entre un procès à limparfait et le moment de lénoncé mais cette limite nest pas désignée par limparfait. Cette contradiction a déjà été relevée. On en trouve le commentaire sous la plume de Le Goffic :
« Un imparfait ne peut jamais « déborder » sur le présent, alors que sa représentation aspectuelle (absence de borne à droite) ne semble pas linterdire : pourquoi un état de choses apparu dans le passé, et non borné, ne se prolongerait-il pas sans rupture jusque et y compris dans le présent ? Or Picasso était un grand peintre implique que Picasso nest plus, ou quil a cessé dêtre un grand peintre. »
Tasmosky-De Ryck, faisant le récapitulatif de toutes les théories sur limparfait, souligne également cette contradiction :
« LIMP désigne en principe des situations dont les limites ne sont pas envisagées (e.a. Sten 1952). Cependant on voit aussi rejeté lidée que lIMP présente une action inachevée (Ducrot 1979 : 23, note 5). »
Postulant que lopposition de limparfait au présent peut être réinvestie par la valeur de « non-coïncidence à la situation dénoncé », nous pensons que limparfait désigne un procès dans une situation qui est autre que celle de la situation dénoncé et donc, quen particulier, le moment désigné par le procès à limparfait ne peut coïncider, chevaucher le moment de lénoncé. Pourtant, limparfait nindique pas la clôture entre la situation du procès et la situation de lénoncé.
Pour nous, cette contradiction peut se résoudre si lon postule que ce nest pas une absence de clôture du procès que désigne limparfait mais lindéfinition de cette clôture. Le verbe à limparfait désigne bien un procès qui est clôturé par rapport à la situation dénoncé mais il fait abstraction de ces limites. Il indique que ces limites ne sont pas définies. Inversement, le verbe au passé simple désigne un procès qui sinscrit dans une situation autre que la situation dénoncé, ce que dit son opposition au présent mais, du fait de son opposition à limparfait, il dit aussi que la différence qui oppose les deux situations, la clôture entre le procès et la situation de lénoncé est définie. Le passé simple oppose le passé au présent en désignant des limites explicites alors que limparfait oppose le passé au présent en faisant abstraction des limites.
Lopposition imparfait/passé simple correspond donc à un trait sémantique (défini.
Ce nest sans doute pas un hasard si lon retrouve ici les termes-mêmes du « passé défini » et du « passé indéfini » qui servaient à désigner notre passé simple et notre passé composé au début du vingtième siècle, puisquà la base de notre analyse se trouve la rupture effectuée par le passé simple avec la sphère du présent, rupture attribuée à lopposition passé simple / passé composé. Lanalyse du passé simple en terme de défini nest donc pas tout à fait aussi novatrice quon aimerait le croire. Dailleurs, plusieurs linguistes rendent compte de cette valeur à travers le fait quils estiment nécessaire daccoler un qualificatif plus ou moins synonyme de « défini » à la notion de limitation désignée par le passé simple. Ainsi, selon Imbs, le passé simple « oppose énergiquement le passé au présent ».
Pour Riegel et al., « le passé simple, coupé de la situation dénonciation, rejette lénoncé dans un passé révolu nettement délimité. »
et encore :
« Limparfait saccorde ainsi avec lexpression de durée ; selon le sens du verbe, le procès nest pas forcément long objectivement, mais il est perçu « de lintérieur » dans son écoulement, dans la continuité de son déroulement, sans terme final marqué. »
Et pour Touratier, de même, le passé simple présente le procès comme « un fait passé, qui est parfaitement délimité et repérable comme tel »
Le « passé pur » de Damourette et Pichon se fait écho aussi de cette intuition. Il ny a pas seulement délimitation mais une délimitation franche, définie.
Mais, le « passé indéfini » ne peut, selon nous, renvoyer au passé composé, comme le proposent les grammaires du début du vingtième siècle.
Nous ferons, à présent, abstraction de ces « résurgences du passé », pour examiner, en toute liberté, ce que peut recouvrir le trait sémantique ( défini que nous avons commencé à mettre au jour.
« (continuant ainsi pendant peut-être une minute - ou deux, ou dix, ou une demie, ou un million : le temps (cette sorte de temps dans lequel sans doute elle se mouvait) étant impossible à mesurer par le fait que, de toute évidence, il n'était pas de la même espèce que celui que peut arpenter une aiguille se déplaçant sur un cadran ; ce cadran-là (celui sur lequel laiguille ou lesprit de Sabine progressait) étant apparemment constitué par plusieurs cadrans superposés ou, si lon préfère, concentriques » Simon C, LHerbe
2-2-2-1-2 Un univers du procès défini ou indéfini
Nous avons vu quun verbe au passé simple désignait le fait que la clôture du procès est définie par rapport à la sphère du locuteur. Cependant, cette clôture définie nest pas spécifique à une séparation entre le procès dit au passé simple et la situation de lénoncé. En réalité, la définition de la clôture est un trait qui affecte le procès au passé simple lui-même, ce qui suppose quelle est en cause dans toute relation où un procès au passé simple est impliqué. Leemann-Bouix rapporte dailleurs la rupture du passé simple par rapport au présent du locuteur à « lindépendance » constitutive du passé simple :
« Le passé simple est peu compatible avec des adverbes comme hier, avant-hier, tout à lheure, il y a deux heures, etc., qui relient le passé au moment présent où parle le locuteur et donc brisent lindépendance du passé rapporté au passé simple. »
La désignation dune clôture par le passé simple est donc observable non seulement dans le cadre du rapport dun procès au passé simple avec sa situation dénoncé mais aussi dans le cadre de sa mise en relation avec tout autre énoncé. Cest ce que montre lanalyse de la mise en relation des repères de durée avec des verbes à limparfait ou au passé simple. En effet, la mise en relation dun verbe à limparfait avec un repère temporel qui implique une borne indéfinie comme depuis deux ans est possible alors quelle est impossible avec un verbe au passé simple. La mise en relation dun procès avec un repère de durée défini comme de 1980 à 1990 avec un verbe à limparfait ou au passé simple vient confirmer ce résultat de façon symétrique, comme nous allons le montrer. Or, la non-coïncidence avec la situation dénoncé, la rupture avec lunivers du locuteur nest plus en jeu dans ces mises en relation.
2-2-2-1-2-1 Désignation dune durée du procès.
Nous appelons repères de durée des expressions qui désignent une durée (calculable). Cette désignation peut se faire par la désignation du temps écoulé, par exemple : pendant dix ans, depuis dix ans, il y a dix ans que
, il y avait dix ans que
, cela fait dix ans que
, cela faisait dix ans que
. On peut opposer des repères dont le calcul de la durée se fait à partir dun repère dans le passé : il y avait dix ans que
, cela faisait dix ans que
et ceux dont le repère est le moment de lénonciation il y a dix ans que
, cela fait dix ans que
. Depuis peut être utilisé dans les deux sens, cest le temps du verbe auquel il est relié qui permet dindiquer si le repère est maintenant ou un repère du passé. Mais la désignation peut aussi passer par celle de repères ponctuels qui délimitent la durée, par exemple : de 1975 à 1985, depuis 1975, jusquen 1985 dont les indications précises servent à donner le début et/ou la fin dune durée.
Parmi ces repères, certains comme de 1975 à 1985 désignent une durée limitée, clôturée alors que dautres comme depuis dix ans, il y a dix ans que
, il y avait dix ans que
, cela fait dix ans que
, cela faisait dix ans que
, depuis 1975 indiquent une durée dont on ne connaît que le début mais dont la fin nest pas envisagée. Enfin, jusquen 1985 indique une durée dont on ne connaît que la fin mais pas le début. Ces deux derniers types de repère peuvent être qualifiés de non limités. Pendant semble indifférent à cette opposition : il indique une durée sans plus, selon les énoncés et leur contexte, cette durée sera limitée ou non.
durée limitée durée non-limitéeabsence de limite finaleabsence de limite initialeRepère dans le passéRepère au
moment de
lénoncédésignation du temps écoulédepuis dix ans (+imparfait)
il y avait dix ans que
cela faisait dix ans que
depuis dix ans (+ présent)
il y a dix ans que
cela fait dix ans que
désignation des limites de la duréede 1975 à 1985depuis 1975jusquen 1985
Nous nous intéresserons particulièrement à deux repères de durée : un repère de durée indéfinie : depuis x et ses expressions synonymiques il y a x que, cela fait x que et un repère de durée définie : de x à y. Ces repères ont en effet pour intérêt de mettre au jour de façon particulièrement nette des incompatibilités avec des verbes soit à limparfait, soit au passé simple.
2-2-2-1-2-1-1 Repères de durée introduits par depuis.
Les repères de durée introduits par depuis permettent détablir des oppositions tout à fait nettes entre le passé simple et limparfait.
On peut comparer tout dabord ces exemples :
(14)Il vivait à Paris depuis deux ans.
(15)*Il vécut à Paris depuis deux ans.
On constate que il vivait peut être mis en relation avec depuis deux ans alors quà linverse il vécut ne le peut pas. Lexpression depuis deux ans désigne une durée dont la mise en relation avec un verbe permet de quantifier la durée du procès désigné par le verbe. Depuis deux ans désigne donc une durée dont on connaît lampleur à un moment donné qui peut être, soit le moment de lénoncé, soit un repère antérieur au moment de lénoncé mais qui est donnée comme nétant pas close à ce moment-là et dont la limite finale est donc indéfinie.
Dans la phrase (14), le repère auquel réfère depuis deux ans est antérieur au moment de lénoncé. Quand on cherche à mettre en relation ce repère de durée avec un passé simple, comme dans la phrase (15), il y a incompatibilité, comme le montrent les expressions synonymiques qui permettent dopposer les deux valeurs de depuis, que ce repère soit référé par rapport au moment de lénonciation :
(16) *Il y a deux ans quil vécut à Paris.
(17) *Cela fait deux ans quil vécut à Paris.
ou que ce repère soit référé à un moment antérieur à lénonciation :
(18)* Il y avait deux ans quil vécut à Paris.
(19) *Cela faisait deux ans quil vécut à Paris.
Nous ne nous attarderons pas sur les énoncés (16) et (17) dont lincohérence est due à lopposition du passé simple au présent, pour nous intéresser aux phrases (18) et (19) et au cas où depuis deux ans renvoie à un repère antérieur au moment de lénoncé.
Dans ces cas, lincompatibilité du repère de durée « non-close » avec le passé simple est à opposer à sa compatibilité avec limparfait toujours vérifiée :
(18bis)Il y avait deux ans quil vivait à Paris./ (18) * Il y avait deux ans quil vécut à Paris.
(19bis) Cela faisait deux ans quil vivait à Paris./ (19) *Cela faisait deux ans quil vécut à Paris.
On constate donc quun verbe dont la durée du procès est dite « non close » par sa mise en relation avec un repère de durée comme depuis deux ans, il y avait deux ans, cela faisait deux ans peut être à limparfait mais pas au passé simple.
Cette analyse peut être confirmée et précisée par le test de compatibilité de ces formes verbales avec un repère dont la durée est désignée par lindication de la borne initiale comme depuis 1975 :
20)Il vivait à Paris depuis 1975.
21) *Il vécut à Paris depuis 1975
Cette expression, depuis 1975, a pour particularité de désigner une durée à laide de sa seule borne initiale, la seconde borne étant indéfinie et de ce fait, la durée-même du procès.
Pour autant, si la clôture entre le procès et le moment de lénoncé nest pas désignée, cela ne signifie pas que le procès soit non-clos, quil se prolonge jusquau moment de lénoncé, car ce serait alors le présent qui serait convoqué :
22) Il vit à Paris depuis 1975.
Lopposition de limparfait au présent implique que même si le procès est clos, cette clôture finale est indéfinie.
Ainsi, limparfait présente-t-il un trait sémantique qui est compatible avec la désignation dune « indéfinition » de la clôture du procès. A lopposé, le passé simple présente un trait sémantique qui lempêche de désigner un procès dont la clôture serait indéfinie.
Enfin, on constate que la préposition depuis ne peut débuter une unité verbale au passé simple alors quelle le peut si le verbe est à limparfait :
23)Depuis quil parlait
24)*Depuis quil parla
Alors quun procès à limparfait peut servir de référent pour désigner une durée indéfinie car introduite par depuis, il nest pas possible de désigner une durée indéfinie à laide de la durée dun procès au passé simple.
2-2-2-1-2-1-2 Repères de durée de x à y.
Si limparfait est compatible avec un repère de durée indéfinie et non le passé simple, on peut penser que le symétrique est vrai. Certes, le passé simple est compatible avec un repère de durée dont les bornes sont définies :
25) Il vécut à Paris de 1950 à 1960.
26) Il courut de sept heures à huit heures.
Mais il est moins évident de mettre en relief une incompatibilité entre un imparfait et un tel repère doublement borné :
27) De 1950 à 1960, il vivait à Paris.
28) ?Il vivait à Paris de 1950 à 1960.
On peut cependant postuler que lénoncé (28) nest pas correct. Tout au moins une recherche de telles occurrences à laide dun concordancier sur trois mois du journal Le Monde donne-t-elle un résultat négatif.
De même, une recherche sur le corpus de Frantext (1940 textes) sest-elle révélée négative. Une telle recherche sur Frantext est assez difficile à programmer du fait de la multiplicité des compléments possibles en de et en à qui parasitent les résultats. Cest pourquoi nous avons pris le parti de ne faire quune recherche partielle mais ciblée sur un repérage temporel de 19
à
, repérage à priori classique, ce que viendra confirmer un test parallèle des occurrences au passé simple. Sur la totalité des uvres disponibles sur Frantext, soit 1940 textes, le résultat est nul : seules des occurrences au plus-que-parfait peuvent être associées à un repère de type 19
à, ce qui confirme notre sentiment linguistique. A linverse, ce qui confirme dailleurs la validité du test, on trouve six occurrences parfaitement classiques de verbes au passé simple délimités par une expression en de 19
à. En voici les exemples :
« Quand lHistoire bande ses ressorts, comme elle fit, pratiquement sans un moment de répit, de 1929 à 1939
»
« Sur ce mur vous pouvez encore lire les professions de foi de divers détenus qui sy succédèrent de 1914 à 1967
»
« Mais ce nest quune boutade, mieux vaut souffrir un peu en étant heureux que de reprendre la vie vide qui fut la mienne de 1945 à janvier dernier. »
« Les jeunes intellectuels qui eurent vingt ans de 1927 à 1934
»
« vingt autres furent établies de 197 à 177, mais dans une position plus éloignée. »
Il apparaît donc que lénoncé (28) ?Il vivait à Paris de 1950 à 1960 qui met en relation un verbe à limparfait avec un repère de durée délimité de x à y nest pas correct. Inversement, si lénoncé (27), de 1950 à 1960, il vivait à Paris, montre quest autorisé un énoncé très proche, cet énoncé nest pas équivalent et on peut postuler quil sagit dune co-présence dune expression de durée définie et dun verbe à limparfait mais non pas dune mise en relation de ces deux éléments, comme le signale également la virgule qui sépare les deux éléments de lénoncé. Sur le plan sémantique, la différence entre lénoncé (27) et lénoncé (28) est que dans lénoncé (27), lexpression de durée ne désigne pas la durée du procès mais englobe le procès alors que dans lénoncé (28), la mise en relation de lexpression de durée et du verbe implique que lexpression de durée désigne la durée du procès ce qui est incompatible avec un verbe à limparfait.
Ainsi, limparfait présente-t-il un trait sémantique qui est compatible avec la désignation dune « indéfinition » de la durée du procès mais est incompatible avec la désignation de la définition de la durée du procès. A lopposé, le passé simple présente un trait sémantique qui entre en discordance avec un procès dont la durée serait indéfinie alors quil est compatible avec la désignation dune durée définie du procès.
Cette analyse est recoupée par celle de Vetters à propos de deux exemples donnés par Molendijk :
«(43) La guerre de Cent ans qui dura [/*durait] dailleurs 116 ans fut surtout amenée par la rivalité entre Philippe VI et Edouard III. (Molendijk 1990 :11)
(44) Personne naima Néron parce que dès le début de son règne, et jusquà la fin cet homme fut [/*était] un tyran terrible. (Molendijk 1983 : 25)
Dans (43) et (44), dura et fut se trouvent dans des propositions explicatives (respectivement une relative avec dailleurs et une subordonnée introduite par parce que). Bien que la Guerre de Cent ans et Néron fournissent ici une référence temporelle, le PS simpose ici pour des raisons aspectuelles : malgré la neutralité de lIMP, on constate quil est difficile, voire impossible de le combiner avec un complément de durée qui ou bien mesure la durée totale (116 ans), ou bien spécifie les deux bornes de lintervalle (dès le début de son règne, et jusquà la fin). »
Toutefois, lincompatibilité dun verbe à limparfait avec un repère de durée de x à y est également difficile à cerner car elle peut souvent être niée par une interprétation itérative de limparfait comme pour la phrase (29) :
29) Il courait de sept heures à huit heures.
Notre recherche sur Frantext ne nous a pas permis de trouver ce type dénoncé mais une recherche des verbes à limparfait avec le repère du.x.au y permet de montrer un nombre non négligeable doccurrences de lexpression du matin au soir délimitant des procès désignés par des verbes à limparfait : 30 occurrences dans le corpus de 1950 à 2000 de Frantext telles que ces deux exemples :
« On fit même une chanson quon entendait du matin au soir, du haut en bas de limmense bâtiment. »
« Il vivait du matin au soir à contre-cur. »
Nous examinerons ce type dénoncés plus loin et nous montrerons que, là aussi, la possibilité de combiner un verbe à limparfait avec un repère de durée définie ne remet pas en cause la valeur « indéfinie » de limparfait dans la mesure où cette valeur « non-définie » persiste, non plus appliquée au procès lui-même, mais à une série de procès.
Cest ce type dénoncés que nous allons examiner à présent.
«comme une suppliante et bouffonne invocation, un ironique et bouffon reproche, ou rappel, ou mise en garde, ou on ne savait quoi, rien sans doute, sinon les paroles privées de sens, les notes sautillantes, légères, insouciantes, dans une inlassable répétition, le temps pour ainsi dire immobile lui aussi, comme une espèce de boue, de vase, stagnante, comme enfermée sous le poids du suffocant couvercle de puanteur » C. Simon, La Route des Flandres.
2-2-2-1-2-2 « Définition » et « indéfinition » dune série de procès
30) Il courut de sept heures à huit heures.
30bis) Il courait de sept heures à huit heures.
On la déjà constaté, le repère de durée définie de sept heures à huit heures peut être aussi bien mis en relation avec limparfait il courait quavec le passé simple il courut à condition cependant dune interprétation itérative du procès à limparfait. Il semble bien que cette itérativité contrainte par la co-présence dun verbe à limparfait dénotant une « indéfinition » et dun repère de durée définie soit à la source de lattribution de la valeur itérative à limparfait.
Limparfait, on le sait nest pas porteur, en lui-même dune quelconque valeur de répétition. Cest le contexte qui permet dattribuer une valeur itérative à un verbe et ce, quelle que soit sa forme verbale :
(31) Il alla tous les soirs au café.
(32) Jirai chaque matin à lécole.
Mais aussi quelles que soient les manières dexprimer le contexte qui implique litérativité. Ces manières peuvent être explicites comme avec la mise en relation avec une expression itérative chaque jour, tous les dimanches, souvent, etc., mais elles peuvent être également extralinguistiques. Cest ainsi que, dire le dimanche :
(33) Mon fils mange à la cantine.
prend un sens itératif par exclusion dun sens singulatif que cet énoncé aurait si, par exemple, il est dit un matin décole à linstitutrice chargée de comptabiliser les repas de la cantine.
De même, litérativité dun procès à limparfait peut être dite non seulement par sa mise en relation avec un complément comme tous les soirs mais aussi par lexclusion de la signification singulative due à la mise en relation dun verbe à limparfait avec un repère de durée définie, mise en relation impossible si le procès est unique.
En effet, lincompatibilité du repère de durée de x à y avec un verbe à limparfait contraint à interpréter de façon itérative les énoncés :
34) Il parlait de dix heures à midi (à chaque conférence).
30bis) Il courait de sept heures à huit heures (tous les jours).
Nul besoin, dans ce cas, de spécifier par lajout dun complément comme tous les jours que le procès est itératif, limpossibilité de mettre en relation ces expressions de durée avec un verbe à limparfait contraint linterprétation itérative.
Mais sil est assez facile de constater la contrainte de linterprétation, il est sans doute plus complexe de comprendre ce qui autorise la mise en relation de lexpression temporelle en de x à y avec un procès répété. Dans un énoncé comme :
30bis) Il courait de sept heures à huit heures (tous les jours).
la mise en relation entre de sept heures à huit heures et il courait implique le calcul de la durée de chaque procès, comme si on disait :
Lundi, il courut pendant dix minutes. Mardi, il courut pendant dix minutes. Mercredi, il courut pendant dix minutes. Etc.
Bien que dit par limparfait, chaque procès de la suite de procès est donc désigné dans des limites définies. Le réinvestissement sémantique du morphème de limparfait ne se fait donc pas au niveau du procès mais dune suite de procès désignée ou non par ailleurs. En effet, on peut retrouver les mêmes possibilités de combinaison si cette fois on sintéresse à la suite de procès :
35) Depuis dix ans, il courait de sept heures à huit heures, tous les jours.
35bis)*Depuis dix ans, il courut de sept heures à huit heures, tous les jours.
36) De 1975 à 1985, il courut de sept heures à huit heures, tous les jours.
36 bis)*De 1975 à 1985, il courait de sept heures à huit heures, tous les jours.
37) A cette époque-là, il courait de sept heures à huit heures, tous les jours.
Lénoncé (35 bis) indique que la série de procès ne peut être mise en relation avec un repère de durée indéfinie, comme depuis dix ans, si le temps employé est le passé simple. Inversement, lénoncé (36bis) indique que la série de procès ne peut être mise en relation avec un repère de durée définie, comme de 1975 à 1985, si le temps employé est limparfait.
On assiste à une sorte demboîtement des procès dans une série de procès et des durées de chaque procès dans une durée générale.
Cette analyse est recoupée, au moins partiellement, par celle que fait Ducrot de limparfait itératif dans son article « Limparfait en français ». Il montre, en particulier, que limparfait itératif est impossible « si le propos indique un nombre (précis ou non) doccurrences de laction marquée par le verbe [cest-à-dire des expressions comme
] cinq fois, plusieurs fois ou tous les dimanches sauf un. » Il donne pour exemple impossible :
« Le mois dernier Jean allait cinq fois au cinéma. »
Inversement, Ducrot note que « [cet énoncé] ne pose plus de problème si on remplace cinq fois par des expressions indéterminées comme quelquefois, souvent, (presque) tous les dimanches. »
On retrouve lidée selon laquelle limparfait désigne une suite indéfinie de procès : ici, cest le nombre de procès répétés qui est indéfini par la mise en relation du verbe avec lexpression comme quelquefois. Inversement, déterminer le nombre de procès par un nombre ou par plusieurs fois implique lemploi dun passé simple.
Ce quil est intéressant de noter, cest que la série de procès obéit aux mêmes règles que le procès unique et que le trait sémantique de limparfait se déplace dun procès unique à la série de procès, ce qui montre sa combinabilité.
Cette remarque, associée au fait que je puisse être « un autre » quand il accompagne un verbe au passé simple, permet denvisager lhypothèse dun trait sémantique « (défini » qui pourrait se combiner avec dautres paramètres désignés par la conjoncture, non seulement le procès mais aussi lunivers du procès, la situation dans laquelle sinscrit le procès.
« Le temps, le lieu, la substance perdaient ces attributs qui sont pour nous leurs frontières » M. Yourcenar, Luvre au noir.
2-2-1-3 Bilan
Lanalyse sémantique généralement admise selon laquelle « le passé simple coupe le procès de la situation dénoncé » sappuie sur la mise en relation passé composé/ passé simple et ne prend nullement en compte le fait que le passé simple soppose, morphologiquement, à limparfait et non au passé composé, nous a conduite à examiner la relation que pouvait bien entretenir lopposition passé simple/imparfait avec cette analyse sémantique et à considérer, en définitive, que ce qui oppose le passé simple et limparfait est le trait sémantique « ( défini » qui se combine avec le trait sémantique « non-coïncident à la situation dénoncé », « avéré ».
Limpossibilité absolue de mettre en relation un repère à durée indéfinie depuis x avec un verbe au passé simple, cest-à-dire limpossibilité de désigner un procès à durée indéfinie par un passé simple permet de confirmer la pertinence du trait sémantique « défini » pour cette forme verbale. Dautant que le passé simple peut être mis en relation avec un repère à durée définie de x à y.
Inversement, un verbe à limparfait peut être mis en relation avec le repère de durée indéfinie depuis x, ce qui souligne la possibilité de désigner un procès à durée indéfinie par un imparfait. Mais, limparfait ne présente pas une contrainte symétrique au passé simple, cest-à-dire une impossibilité absolue de mise en relation avec un repère de durée définie. Cette mise en relation est, en effet, possible quand le repère de durée défini est préposé à limparfait. De plus, la combinabilité de limparfait avec un repère de durée définie postposé est également possible mais soumise à une modification de linterprétation, au déplacement du trait sémantique « indéfini » à une série de procès et non plus à un seul procès. Le trait « indéfini » autorise donc plus de latitude dans linterprétation.
Il semble que ce qui est important ici cest quavec un repère de durée, on désigne directement les limites du procès, on les définit ou lon indique leur absence de définition. Or, sil y a contradiction à mettre en relation un passé simple qui indique que les limites du procès sont définies et un repère qui indique leur « indéfinition », il ny a pas forcément contradiction entre employer un imparfait qui indique que les limites du procès ne sont pas définies et employer un repère qui permet de les définir, comblant ainsi le manque.
Que sous-tend exactement le concept « ( défini » ?
Selon nous, le passé simple ne désigne pas seulement la durée close du procès avec ses deux limites, mais surtout en désignant ces limites, il désigne un procès défini, identifié. En effet, comme lexplique si bien Jacquard :
« Tout ce qui appartient à lunivers, particule ou galaxie, caillou ou animal, est, par convention, doté dexistence ; tout objet est. Mais, quel quil soit, sa définition est arbitraire. Tel caillou ou telle galaxie nest considéré comme un être individualisé que grâce à lobservateur ; celui-ci, en traçant les limites de ce qui appartient à lobjet, lui assigne une singularité. Pour être objet de lunivers, il faut être objet du discours dun observateur. [
] Sans lhomme, lunivers nest quun continuum sans structure. »
définir, cest découper dans un continuum un objet qui devient singulier. Ici, lobjet désigné na rien dun caillou ou dune galaxie, il sagit dun objet temporel, un procès. Le passé simple le désigne comme une unité découpée, une singularité, un segment opposable à dautres segments par rapport auxquels il est délimité, bref un objet défini.
Il nest sans doute pas étonnant que Le Goffic, faisant un détour par lanalyse du temps du philosophe Minkowski, aboutisse à une définition très proche du passé simple :
« Le passé simple permet de « « découper » un fait précis et isolé, pour le détacher de la forme globale du passé. »
Quest-ce alors que lopposition au concept « défini » que véhicule limparfait ? Limparfait désigne labsence de définition du procès, cest-à-dire un procès dont on na pas fixé les limites. Il ne présente pas le procès comme une unité, un segment opposable à un autre segment mais comme un continuum dont naturellement les limites ne sont pas posées.
Est-il possible de faire lanalogie avec lopposition (défini dans la détermination nominale ? De même que larticle défini suppose lidentification de lobjet désigné par un nom déterminé par un article défini, le passé simple caractériserait un procès défini sans pour autant désigner ce qui le définit. Dire le chat, cest indiquer que le chat en question est identifié, sans pour autant apporter les informations qui permettent de lidentifier. Cest désigner un chat « découpé » parmi tous les chats possibles, lopposer à tous les chats possibles un continuum de chats inconnus- pour lui conférer une individualité. Ce chat du voisinage qui revient toujours parce que nous lavons nourri un jour, sort de lamas que formaient les chats errants dans la mesure où nous nen distinguions aucun, pour devenir dans notre discours familial LE chat.
Il faudrait prendre le temps de mener une recherche parallèle sur le réinvestissement sémantique des morphèmes verbaux et les morphèmes nominaux. Nous nous contenterons dexaminer quelques remarques.
Il faut noter tout dabord que le rapprochement entre « passé défini » et « passé indéfini » et « article défini » et « article indéfini » a déjà été fait par Confais à laide des outils de lanalyse aspectuelle :
« Lanalogie avec les articles définis et les articles indéfinis nest pas un pur hasard : larticle défini lui aussi présente le contenu du syntagme nominal comme une totalité fermée, tandis que larticle indéfini partialise lensemble visé par le syntagme nominal. »
Si on examine quelques définitions des articles définis, on constate que très souvent, elles renvoient à lidée dunicité ou à la présupposition didentification de lobjet désigné. Cest là se placer du côté de la réception plutôt que du côté de la désignation. Ainsi, par exemple de la définition de Riegel et al. :
« Larticle défini présuppose lexistence et lunicité : il ny a pas dautre(s) référent(s) accessible(s) qui vérifie(nt) la description de la réalité désignée par le GN. »
Si larticle défini désigne un objet unique, cest parce que cet objet a été identifié et ce faisant, individualisé parmi dautres objets auxquels on peut lopposer. Autrement dit, étant défini, il devient unique. Larticle défini désignant le fait que lobjet est défini désigne, de ce fait, un objet unique.
Philippe-Coatéval propose, quant à elle, une analyse originale de lopposition entre larticle défini et larticle indéfini. Postulant que la « similitude de lindéfini un et du numéral un est plus quune simple homophonie », elle en tire pour conséquence :
« [Cela] permet dinscrire le nom indéfini dans un processus de variations totalement différent de celui du nom défini puisquil fonde un segment défini par une opposition qui sera ensuite réinterprétée dans lordre du quantitatif. A partir dun lexème central invariant, le préfixe indéfini produit une infinité de noms.
Un+lexème/ deux+ lexème / trois+lexème
/ des+lexèmes
Un passant deux passants trois passants
des passants
Le nom défini par contre, nie, en quelque sorte, ce principe de variation en imposant comme seule variation celle du lexème et comme invariant le préfixe.
Le + lexème 1 / le + lexème 2/ Le +lexème 3
Le passant le marcheur le voisin
La variante indéfinie permet dopposer un nom à un autre nom sans pour autant faire varier le lexème. Le préfixe indéfini dénote la répétition du même lexème en linscrivant dans une série différenciative, alors que le préfixe défini dénote la permanence du même déterminant pour la série des lexèmes. »
Il me semble que, ce faisant, elle replace lindéfini dans la liste des numéraux dont on sait quelle est infinie. Ce qui rejoint dun côté lidée dun continuum sans limite qui peut être dit aussi par dautres indéfinis (quelques, certains) et de lautre, permet dexpliquer le sens de « un parmi dautres » que recouvre le sens dindéfini et qui soppose à lunicité définie par Riegel et al qui rejoignent, par là, « une vaste littérature » :
« Une vaste littérature a montré que dans un acte de référence effectué à laide dune description définie, celle-ci atteint son référent par le truchement de sa signification linguistique : le N signale quil ny a quun seul objet qui correspond au contenu descriptif N. On dira alors que le N véhicule une présupposition dunicité existentielle : il y a un et un seul x qui est N. »
Une dernière note sur le sujet. Dans leur définition de larticle indéfini, Riegel et al. introduisent la différence entre un « sens actuel » et un « sens virtuel » de lindéfini :
« En emploi spécifique, larticle indéfini extrait de la classe dénotée par le nom et son expansion un élément particulier qui est uniquement identifié par son appartenance et qui na fait lobjet daucun repérage référentiel préalable. On peut distinguer entre les cas où lindéfini renvoie à un particulier non autrement identifié mais identifiable (Un enfant blond jouait [
-Qui était-ce ?) et ceux où le référent na quune existence virtuelle (Je cherche un enfant blond pour tenir le rôle de Cupidon). »
Outre que la notion d« identifiable » nous paraît possible à extrapoler pour un procès à limparfait dont nous avons vu quil pouvait être délimité, il nous paraît intéressant de poser que le « sens actuel » ou le « sens virtuel » dépend non pas de la désignation elle-même mais de la référence à la situation dénoncé que pose le contexte. Un enfant blond désigne, dans tous les cas de figure, un enfant blond parmi tous les autres enfants continuum denfants blonds dont il nest pas découpé-, son identification est liée au contexte, avéré pour un enfant blond jouait, possible dans pour tenir le rôle de Cupidon. Cest donc bien le contexte qui autorise lidentification comme cest la mise en relation contextuelle de limparfait avec un repère comme depuis 1989 ou jusquà hier qui permet de lui donner des limites, de lidentifier.
Nous navons guère les moyens daller plus loin ici mais lextrapolation du concept « (défini » de la détermination nominale au réinvestissement sémantique de lopposition ai/a, passé simple/imparfait nous semble possible, en tenant compte du fait que cette valeur se combine avec dautres valeurs selon lobjet désigné ce qui implique quon ne puisse faire danalogie systématique.
Enfin, limportance donnée au locuteur dans la théorie de Benveniste, comme dans les analyses des stylisticiens, nous conduit à initier une réflexion sur la relation qui sétablit entre le concept « défini » et la conjoncture. Cette réflexion sera, dailleurs, poursuivie plus avant au gré des analyses par la suite.
Si nous revenons à la définition du procès que nous avons posée plus haut : quand un locuteur emploie un verbe conjugué, il désigne un procès, cest-à-dire non seulement une action -ou un état- mais une action qui est identifiée par son agent, par le moment où elle est effectuée autant déléments qui ne prennent de sens que dans leur rapport à lunivers du locuteur, à la situation dénoncé que le verbe conjugué désigne en même temps. Le procès, son agent et sa durée interne, un moi-ici-maintenant, tout se cristallise, se combine dans cette visée sémantique, dans cette visée dadéquation au réel. Cest ainsi que le terme « procès » employé alors, recouvre ce quon pourrait appeler tout aussi bien « lunivers du procès », ensemble de paramètres par lesquels on peut lidentifier et qui prennent sens en fonction des paramètres de la situation dénoncé.
Le fait que le je du narrateur soit à réinterpréter quand il détermine un verbe au passé simple est à interroger, par exemple : faut-il en déduire que lactant du procès est défini au passé simple et non pas à limparfait ? Cela signifierait que Ferdinand dans Ferdinand marcha est défini alors que dans Ferdinand marchait, Ferdinand serait indéfini, non-identifié. Nous ne pensons pas quon puisse aller jusque-là et que les choses soient si tranchées mais que la valeur du passé simple ou celle de limparfait interfère avec les paramètres permettant didentifier le procès, dans la mesure où tous ces paramètres se cristallisent dans lacte de désignation. Il peut donc y avoir une forme de contamination de la valeur « définie » sur les paramètres de la situation dénoncé. Ainsi, la valeur « défini » appliquée au je dun énoncé au passé simple me paraît propre à expliquer une mise à distance dun ego quon peut, pour une fois, circonscrire et il semble bien que le découpage quopère le passé simple nest pas un simple découpage temporel mais dun « morceau de réel », même si leffet nest peut-être que stylistique. Inversement, la valeur « indéfinie » de limparfait peut toucher autre chose que la durée du procès mais aussi la situation elle-même qui apparaît comme dans un flou. Leeman-Bouix, qui emploie aussi le terme de « flou » ou de « flottant » pour qualifier limparfait propose dailleurs une analyse de limparfait hypocoristique où cette valeur de limparfait contamine lactant. A propos dénoncés type il était beau, le bébé ou javais bien mangé, moi :
« On pourrait faire lhypothèse que limparfait, passé « flottant » comme on la vu, repousse dans linexistence vague cet être à qui lon sadresse, donc réel, mais qui nest pas pour autant un interlocuteur, être posé donc lui-même comme « flottant », indéfini, entre chair et poisson. »
Nous pourrons analyser, par la suite, des effets de sens qui corroborent cette remarque. Il semble bien que la valeur « défini » du passé simple ou la valeur « non-définie » de limparfait affecte, par contre-coup, lensemble des paramètres de l'univers du procès. Nous pensons cet effet de sens explicable par le type-même de valeur impliquée par lopposition imparfait / passé simple. Dans la mesure où tout lunivers du procès contribue à lidentifier, cet univers est impliqué également par la « définition » ou « lindéfinition » du procès. Limparfait crée donc un « halo dindétermination » autour du procès lui-même, contrairement au passé simple qui définit le procès et, peu ou prou, la situation qui contribue à le définir. Cela peut expliquer une forme de contamination entre lobjet désigné et son contexte. Nous verrons aussi que labsence de définition autorise à se passer de la référence au moment de lénoncé.
Nous allons maintenant confronter ces premiers éléments danalyse aux effets de sens en contexte de la combinaison de la valeur « (défini » avec l « avéré » et le « non-coïncident avec la situation dénoncé ».
« comme sil pouvait passer sans transition du mouvement à limmobilité ou plutôt comme si limmobilité était en quelque sorte le prolongement du mouvement ou, mieux encore, le mouvement lui-même éternisé : capable sans doute de cela (transformer la vitesse même en sa représentation immobile) n'importe quand : au milieu d'un saut, d'une chute, en l'air, ne reposant sur rien d'autre que sur le temps pour ainsi dire solidifié, l'après-midi solidifiée de l'été dans laquelle baignait comme dans une sorte de formol l'exubérante et sauvage végétation de ronces et d'hélianthes et lui aussi » C. Simon, LHerbe.
2-2-2-2 Effets de sens découlant de la valeur opposant limparfait et le passé simple :
« Léternel imparfait » titre Wilmet dans un article de 1987. Imparfait et passé simple ont fait couler beaucoup dencre et cest devenu une tâche fort hasardeuse que de chercher à recenser tout ce qui a pu être dit et écrit à leur propos. Aussi, plus quà un recensement érudit danalyse des effets de sens, nous attacherons-nous à rechercher les articulations qui peuvent exister entre ces analyses et surtout avec notre hypothèse dune valeur fondamentale « (défini » de limparfait et du passé simple. Pour cela, nous nous arrêterons dabord à la théorie aspectuelle, puis aux analyses textuelles avant daborder la question des imparfaits dits « modaux ».
2-2-2-2-1 Effets de sens aspectuels de lopposition imparfait / passé simple.
Il est courant, pour commencer, de rapporter lopposition imparfait / passé simple à une opposition aspectuelle, que ce soit sous les termes « imperfectif / perfectif », « duratif / non-duratif» ou « sécant / non-sécant ». Cette analyse répond initialement au fait quimparfait et passé simple ne sont pas opposables sur le plan temporel. Il faut donc prendre en compte un autre plan danalyse. La prise en compte de laspect, cest-à-dire de la manière dont « le procès est saisi » permet de différencier les deux formes verbales.
Cette notion daspect a été défendue en des termes différents et sinscrit dans des perspectives différentes, guillaumienne, logique ou énonciative qui mettent laccent sur plusieurs effets de sens selon les faits de langue dont elles rendent compte : ponctualité du passé simple, globalité, vision interne ou externe du procès, procès en cours, partie effective et partie virtuelle du procès
Globalement, les linguistes se sont focalisés soit sur la notion de saisie interne ou saisie globale du procès, soit sur la notion de limite, mais, le lien entre les deux présentations peut être facilement fait comme le souligne la définition de Berthonneau et Kleiber, dans sa visée synthétique :
« Loption aspectuelle [postule] que limparfait est imperfectif, parce quil présente la situation dénotée dans sa phase médiane, en déroulement, abstraction faite de son début et surtout de sa fin, alors que le passé simple est perfectif, parce quil la présente dans sa totalité, début et fin compris ».
Tous les effets de sens répertoriés sont en réalité les facettes dune même notion comme le souligne cette explication du « duratif » par Riegel et al., même si chaque effet de sens est précieux pour pouvoir expliquer des énoncés différents :
« Par opposition au passé simple, limparfait nenvisage pas les limites du procès, auquel il nassigne ni commencement ni fin. Limparfait saccorde ainsi avec lexpression de durée ; selon le sens du verbe, le procès nest pas forcément long objectivement, mais il est perçu « de lintérieur » dans son écoulement, dans la continuité de son déroulement, sans terme final marqué. Laspect duratif nest quune conséquence de cette valeur de limparfait. »
Riegel et al. partent de labsence de limites pour expliquer les autres effets de sens. Notre conception des choses est très proche : cest parce quà limparfait le procès nest pas défini dans ses limites quon peut désigner son déroulement interne en faisant abstraction de ces limites.
Inversement, la notion de « globalité » qui sert à qualifier le passé simple et dont on peut retenir, entre autre, cette définition de Martin :
« Le passé simple envisage le procès « comme un noyau indivis, comme un tout fermé sur lui-même et en offre une vision globale, indifférenciée, non sécante. »
peut être reliée à la désignation de limites définies du procès.
Le fait que le procès soit défini signifie implique que lon prenne en compte ces limites définies, elles sont désignées par lemploi du passé simple et elles entrent donc obligatoirement dans linterprétation du procès. Cest pourquoi on ne peut prendre en compte le déroulement interne du procès au passé simple car ce serait ne plus désigner ses limites, ses contours :
« Le passé simple parcourt lespace temporel du procès de sa limite initiale à sa limite finale sans le pénétrer. »
En somme, les schémas qui décrivent respectivement le passé simple et limparfait,
[ ] et ----(----
sont parfaitement adéquats ; le procès au passé simple désignant exclusivement les limites du procès, un séquençage de lespace-temps désigné, et limparfait désignant le déroulement dun procès en cours dont les limites ne sont pas définies, un continuum.
Lanalyse aspectuelle est précieuse car elle souligne une différence fondamentale entre le passé simple et limparfait : la possibilité ou limpossibilité de désigner le cours du procès. Cependant, lexamen de certains énoncés, comme ceux qui mettent en relation ces formes verbales avec un repère temporel ponctuel ou avec des adverbes comme déjà et encore, ou comme le schéma dincidence, modèle micro-textuel proposé par Pollack mettent au jour certaines contradictions dans lanalyse aspectuelle de limparfait. Nous nous proposons de revenir sur lanalyse de ces quelques cas pour examiner, à la lumière de lopposition « (défini », un moyen de résoudre ces contradictions. A travers lanalyse de la distribution de quelques repères temporels et de déjà et encore dans des énoncés à limparfait et au passé simple et celle du schéma dincidence, nous mettrons au jour le fait que les effets de sens relevés sarticulent toujours autour de la même valeur « (défini », qui peut sembler, dans un premier temps coïncider avec « laspect ( perfectif », mais dont nous verrons quelle permet de lenglober dans la mesure où elle rend compte également du fait que limparfait nest pas toujours « imperfectif ».
2-2-2-2-1-1 Mise en relation de limparfait ou du passé simple avec des repères temporels ponctuels
Examiner les différences dinterprétation quentraîne la substitution dun verbe au passé simple par un verbe à limparfait dans des énoncés qui le mettent en relation avec un repère temporel ponctuel permet de mettre au jour la pertinence de lanalyse aspectuelle du passé simple. Nous verrons quil nen est pas forcément de même pour limparfait. Le parallèle sera effectué avec des verbes imperfectif (chercher) et perfectif (trouver).
38) Il chercha la bague à huit heures.
38 bis) Il trouva la bague à huit heures.
39) Il cherchait la bague à huit heures.
39bis) ? Il trouvait la bague à huit heures.
39 ter) A huit heures, il trouvait la bague.
La mise en relation dun repère temporel à huit heures avec un verbe imperfectif au passé simple qui désigne un procès dont les bornes sont définies comme il chercha, dans les énoncés (38) et (38bis), implique la coïncidence entre le repère temporel et la borne initiale du procès quand le verbe est imperfectif. Il chercha la bague à huit heures est interprétable par : il commença à chercher la bague à huit heures. La paraphrase réinvestit la notion de clôture.
Quand le verbe est perfectif, « il implique le terme du procès ». On ne peut alors distinguer les deux limites du procès, et cest la totalité du procès qui coïncide avec le repère temporel ponctuel. Dans lénoncé (38bis), dans la mesure où la signification lexicale de trouver ne comporte pas de durée, la découverte de la bague sest effectuée, en totalité, à huit heures.
Dans les deux cas de figure relevés, il y a coïncidence du repère temporel avec lune ou les deux limites du procès. On ne peut, quel que soit le mode daction du verbe au passé simple interpréter le repère temporel ponctuel comme sinsérant à lintérieur de la durée délimitée par le procès. Cet effet de sens correspond à la notion de « saisie globale du procès » pour lénoncé (38bis) ou, plus généralement, à celle dune « saisie externe du procès ». Mais ce que permettent de souligner ces exemples, cest la prise en compte exclusive des limites du procès quand le verbe est conjugué au passé simple. Cela est dû au trait sémantique « défini » du passé simple qui implique obligatoirement la désignation des limites du procès qui permettent de le définir.
Inversement, quand le verbe est à limparfait, le fait que les limites du procès ne soient pas définies implique quon ninterprète pas obligatoirement le repère temporel à huit heures en fonction des limites du procès. On peut interpréter lénoncé (39) par il avait déjà commencé à chercher à huit heures. Autrement dit, le procès dit par le verbe à limparfait a débuté avant huit heures et se poursuit après huit heures. On parle alors dune « saisie interne du procès », cest-à-dire que le repère ponctuel se situe à nimporte quel moment du déroulement du procès sauf à son début ou à sa fin. Leffet de sens est alors exactement inverse à celui rapporté pour le passé simple : limparfait, porteur du trait sémantique « indéfini », ne désigne pas les limites du procès. Un repère temporel ponctuel ne coïncide donc pas obligatoirement avec ces limites non désignées mais peut sinscrire à lintérieur du procès où il désigne un point parmi dautres.
Cependant, quand le verbe à limparfait est perfectif comme dans lexemple (39bis) ?Il trouvait la bague à huit heures, cette interprétation est plus difficile à envisager : ? il trouvait la bague à huit heures veut-il dire il était en train de trouver la bague quand huit heures sonna ? La coïncidence entre la désignation du terme du procès par le verbe perfectif et la mise en relation avec un repère temporel ponctuel conduit logiquement à une interprétation « perfective » du verbe à limparfait. Linterprétation sera alors préférentiellement soit itérative, soit celle dun imparfait de narration. Dans un cas, le caractère non-défini désigne le fait que soit ignoré combien de fois un même procès se répète, de lautre, il désigne les bornes non-définies dun procès qui sinscrit alors dans une série dautres procès non-définis.
De même, quand le repère temporel ponctuel est préposé comme dans lénoncé (39ter) A huit heures, il trouvait la bague, le procès à limparfait peut être interprété comme un « imparfait de rupture ».
Dans ces deux derniers cas, imparfait de narration ou imparfait de rupture, le repère temporel ponctuel à huit heures coïncide avec les limites du procès dit par un verbe à limparfait. Cela implique que limparfait nempêche pas que ses limites soit désignées. Cest ce quindique dailleurs la possibilité de le mettre en relation avec des repères qui désignent le début ou la fin du procès, comme dans ces exemples :
(40) Il était chauve depuis sa naissance.
(41) Il était chauve jusquà hier.
La perfectivité de limparfait pose des difficultés danalyse qui ont conduit certains linguistes à nier la grammaticalité des « imparfaits de narration » et dautres à mettre en cause lopposition aspectuelle imparfait / passé simple. En fait, cest parce que la perfectivité du passé simple nest quun effet de sens dun trait sémantique qui limplique quelle nest pas opposable à limparfait. En réalité, le trait sémantique qui oppose imparfait et passé simple ne présente pas des contraintes symétriques de part et dautre. La définition des limites du procès dit au passé simple contraint à la coïncidence de ces limites avec un repère temporel ponctuel mais le fait que les limites du procès ne soient pas définies à limparfait autorise deux effets de sens : soit le repère temporel ponctuel désigne le début du procès, soit il désigne un point quelconque à lintérieur du procès.
En labsence de contexte, impossible dinterpréter correctement la mise en relation entre le repère temporel à huit heures et le verbe à limparfait il cherchait, dans lénoncé :
(42) A huit heures, il cherchait la bague.
A huit heures peut désigner la limite du procès dans un contexte de ce type :
(42bis) Ferdinand senferma dans sa chambre malgré les cris de sa sur. Son père arriva et lui passa un bon savon. A huit heures, Ferdinand cherchait la bague.
Mais dans un autre contexte, le repère temporel indiquera un point à lintérieur du procès :
(42ter) Ferdinand ne pouvait pas te rendre ta bague à huit heures. A huit heures, il cherchait la bague.
Laspect lexical perfectif ou imperfectif du verbe joue un rôle complémentaire dans linterprétation de lénoncé par rapport au contexte. Ainsi, dans lexemple (39bis), il trouvait la bague à huit heures, cest le cumul de la désignation dune limite finale par laspect sémantique du verbe trouver avec la désignation de la ponctualité du repère temporel qui incite à interpréter de façon dite « perfective » le procès dit à limparfait. Le verbe trouver peut, en effet, prendre un sens imperfectif avec limparfait dans dautres contextes :
(43) « Ferdinand trouvait la bague quand son frère donna un coup de pied dans le tas de paille. »
Inversement, si le repère ponctuel est mis en relation avec un verbe imperfectif à limparfait, il y a indéfinition des limites du procès, ce qui peut conduire à la non coïncidence avec les limites du procès mais pas forcément. Là aussi, linterprétation de limparfait de narration est possible : Il cherchait la bague à huit heures, à neuf heures il la retrouvait et courait lapporter à Sherlock Holmes.
En définitive, si le trait sémantique « défini » du passé simple contraint à prendre en compte les limites du procès dit au passé simple dans ce quil est convenu dappeler « une saisie globale du procès » et donc à faire coïncider avec ces limites définies tout repère temporel, limparfait ne définissant pas les limites du procès ne contraint pas à cette coïncidence. Linterprétation de la mise en relation du repère temporel ponctuel avec un procès dit à limparfait peut donc correspondre à deux cas de figure : désignation de la limite initiale du procès ou désignation dun moment interne du procès.
2-2-2-2-1-2 Effets de sens de déjà et encore dans leur mise en relation avec des verbes à limparfait et au passé simple
Malgré leur polysémie qui continue dinterroger les linguistes et qui pose des difficultés de classement, il paraît intéressant dexaminer la distribution de déjà et encore dans les énoncés à limparfait et au passé simple.
Ces deux adverbes ont souvent été réunis dans les études du fait dune symétrie certaine même si elle nest pas complète. Cette symétrie sobserve dans la négation de déjà par encore quanalyse Muller dans un article de 1975 :
« Les oiseaux chantent déjà.
Les oiseaux ne chantent pas encore. »
Mais aussi dans le fait que tous deux peuvent avoir une interprétation itérative ou continuative, ce que certains énoncés mettent en exergue :
Jai déjà visité ce musée mais je le visiterai encore.
Il était déjà ministre en 1975 et il lest encore.
Cette symétrie de déjà et encore sobserve également quand on les met en relation avec des verbes à limparfait et au passé simple. En effet, comme nous allons le voir, alors que la mise en relation avec un verbe à limparfait autorise, selon le contexte, les deux effets de sens, itératif ou continuatif, de ces adverbes, la mise en relation avec le passé simple contraint au seul effet de sens « itératif » - étant entendu que nous exceptons de notre étude les effets de sens argumentatifs.
Lanalyse dun échantillon dénoncés extraits de notre corpus permet de constater, en effet, quon peut classer déjà et encore selon deux effets de sens quand ils entrent en relation avec un verbe à limparfait : un effet de sens « continuatif »et un effet de sens « itératif ».
2-2-2-2-1-2-1 Déjà et encore « continuatifs »
Déjà en combinaison avec limparfait peut prendre un effet de sens « continuatif » quand il désigne un moment proche du début du procès, insistant en somme sur le fait que le procès a commencé. Dans chacun de ces énoncés de Voyage au bout de la nuit, on pourrait substituer à déjà, avait(s, ent) commencé à :
(44) « Je ne voyais pas sa figure mais sa voix était déjà autre que les nôtres, comme plus triste, donc plus valable que les nôtres. »
(44bis) « Je ne voyais pas sa figure mais sa voix avait commencé à être autre que les nôtres, comme plus triste, donc plus valable que les nôtres. »
(45) « une longue raie grise et verte soulignait déjà au loin la crête du coteau, à la limite de la ville, dans la nuit»
(46) « Ils se faisaient déjà la main les sacrificateurs. »
(47) « Mon départ pour la forêt, je ne lenvisageais plus quavec désespoir et révolte et me promettais déjà de contracter au plus tôt, toutes les fièvres qui passeraient à ma portée... »
(48) « Dans la rue que javais choisie, vraiment la plus mince de toutes, pas plus épaisse quun gros ruisseau de chez nous, et bien crasseuse au fond, bien humide, remplie de ténèbres, il en cheminait déjà tellement dautres de gens, des petits et des gros quils memmenèrent avec eux comme une ombre. »
Cette paraphrase par avait commencé à indique, par son sens et sa forme composée, que le début du procès est accompli et désigne donc effectivement un moment interne au procès. Cest la « saisie interne du procès », possible seulement à limparfait, qui autorise déjà à désigner un moment certes proche de la limite initiale du procès mais ultérieur à cette limite initiale. Il sajoute à cet effet de sens que Muller qualifie dinchoatif, un jugement du locuteur sur la précocité du procès, une présupposition selon laquelle il aurait dû ou pu débuter plus tard, présupposition qui ninflue pas, semble-t-il, sur notre questionnement sur limparfait et le passé simple.
De même, ladverbe encore peut désigner le procès en cours dont il souligne la prolongation quand il est employé avec un verbe à limparfait. Il correspond alors au sens de continuer auquel sajoute une présupposition selon laquelle le procès aurait pu ou aurait dû sarrêter plus tôt. Linterprétation continuative de encore coïncide bien avec leffet de sens de « saisie interne du procès » quautorise limparfait. Cest le cas de ces quatre exemples de Voyage au bout de la nuit où le procès est montré comme se continuant au-delà de ce qui semble vraisemblable. Le premier énoncé décrit un général que Bardamu croise - à peine - en Afrique. Le encore est mis en rapport avec passé depuis longtemps de façon à insister sur la prolongation du procès tracasser en dépit de la distance, ici temporelle et spatiale, que le général Tombat a établie avec Verdun :
(49) « Mais cependant Verdun passé depuis longtemps le tracassait encore »
Le général Tombat, malgré sa disponibilité obtenue dès le début de la guerre et son départ aux colonies, « si loin » de la France, continue à vivre au rythme des nouvelles de la guerre. Dans le terme tracasser qui évoque davantage la douleur dentaire que limplication militaire, il faut lire toute lironie du narrateur qui dénonce une posture du général embusqué (« Il lavait placée aussitôt dans le service de « la plus grande France » sa disponibilité ») à laquelle répond la posture de son entourage : « Il faisait si chaud dans le hangar et cela se passait si loin de nous, la France, quon dispensait le général Tombat den pronostiquer davantage. Enfin on répéta tout de même en chur par courtoisie, et le Directeur avec nous : « Ils sont admirables ! » et Tombat nous quitta sur ces mots. »
Lénoncé suivant est lun des rares passages où ne perce ni ironie ni dénonciation :
(50) « Je lai embrassé Molly avec tout ce que javais encore de courage dans la carcasse. »
Le verbe à limparfait pourrait être glosé par tout ce qui me restait mais encore insiste sur lidée quil lui faut puiser son courage au-delà de ce qui lui semblait possible. Son chagrin est tel quil ne pensait pas possible de continuer à avoir du courage. Le narrateur rétrospectif en conclut : « Cest peut-être ça quon cherche à travers la vie, rien que cela, le plus grand chagrin possible pour devenir soi-même avant de mourir. »
Cest aussi lidée dune prolongation du procès en cours au-delà dune norme qui explique lemploi de encore dans les deux énoncés suivants :
(51) « Beaucoup détincelles me sautaient encore dans les yeux et cela les faisaient bien rigoler les noirs. »
(52) « Il avait terminé lui aussi sa petite cuisine et sagitait encore pour la forme entre les étuves et les éprouvettes. »
Dans le premier, Bardamu continue à recevoir des étincelles quand il fait du feu alors que cela fait longtemps quil a emprunté leur technique aux indigènes. Dans lautre, le garçon de laboratoire continue à soccuper ou à faire mine de soccuper, alors quil a fini ses manipulations ou la cuisson de son dîner les deux interprétations sont possibles dans lhistoire- de façon à continuer à écouter la conversation de Bardamu et de Parapine, pense Bardamu à tort car il est parfaitement blasé sur les propos de Parapine et ne sintéresse quà ses « petites expériences personnelles ».
Mais, dans certains énoncés de Voyage au bout de la Nuit, limparfait mis en relation avec encore, prend un effet de sens sensiblement différent en soulignant lopposition avec une situation présente. Il sagit toujours de désigner la continuation dun procès à un moment donné mais la présupposition dune prolongation hors-norme renvoie à une nostalgie du passé. Ce passé est désigné par ce moment interne au procès où la limite finale nest pas encore atteinte mais aussi par le trait non-coïncident de limparfait qui loppose au présent. Cest le cas dans cet énoncé où Bardamu et Lola doivent imaginer le fonctionnement passé de la baraque à tir « dune fête que la guerre avait surprise là, et comblée soudain de silence » :
(53) « Une noce pour la rigolade que ça représentait : au premier rang, en zinc, la mariée avec ses fleurs, le cousin, le militaire, le promis, avec une grosse gueule rouge et puis au deuxième rang des invités encore, quon avait dû tuer bien des fois quand elle marchait encore la fête. »
Lénoncé désigne un moment où le procès nest pas parvenu à son terme mais il sagit surtout de signifier, par opposition, que la fête foraine ne marche plus, pour la désolation de Lola qui prend soudain conscience de la mélancolie des lieux et de la fuite des années.
De même, encore dans lénoncé suivant désigne un moment où le procès na pas atteint son terme mais il sagit surtout de souligner quun déniaisement sest opéré entre le personnage-narrateur et le narrateur ultérieur :
(54) « Jétais encore naturel comme un animal en ce temps-là, je ne voulais pas la lâcher ma jolie et cest tout, comme un os. »
Au total, linterprétation continuative de déjà et encore est compatible avec leur mise en relation avec limparfait dans la mesure où ils renvoient alors à un moment interne au procès, proche de sa limite initiale (déjà) ou proche de sa limite finale (encore). Or, le fait que limparfait désigne un procès indéfini, aux limites indéfinies, autorise, on la vu, la désignation dun moment interne au procès. Cependant, linterprétation de déjà et encore ne renvoie pas obligatoirement à une saisie interne du procès à limparfait. Ils peuvent également prendre un effet de sens itératif.
2-2-2-2-1-2-2 Déjà et encore itératif
Le terme ditératif dont on qualifie une interprétation de déjà vient du fait quil peut renvoyer à la totalité dun procès susceptible de se reproduire. Il signifie alors que le procès a été accompli au moins une fois au moment de lénoncé ou à un autre point de référence situé dans le passé. Cet effet de sens de déjà peut se rencontrer alors quil est mis en relation avec un verbe à limparfait. Voyage au bout de la nuit en présente quelques exemples :
(55) « Des trucs jen connaissais déjà et des fameux pour être malade, jen appris encore des nouveaux, spéciaux pour les colonies. »
Martin indique également, sous lappellation de « réitération virtuelle » cette possibilité dinterprétation pour certains énoncés à limparfait tels que A 8 h, Pierre quittait déjà son appartement ou A ce moment-là, Pierre sortait déjà avec Jeanne.
Parallèlement à déjà, encore peut prendre un sens de réitération, équivalent à à nouveau quand il est mis en relation avec un verbe à limparfait. Vet en souligne lanalogie avec linterprétation continuative :
(57) « Il ne sagit pas de la continuation dun intervalle, mais plutôt de la continuation dun ensemble dintervalles quà un moment, on croyait complet, mais qui reçoit un nouvel élément. »
Cest ainsi, en effet, que nous interprétons leffet de sens itératif que peut prendre un verbe à limparfait : lindéfinition sapplique alors à une suite de procès. Encore désigne alors la continuation de la répétition des procès et non la continuation du procès.
Dans lécriture de Céline, linterprétation itérative dencore est souvent accentuée par dautres éléments qui indiquent la répétition des procès, en particulier par le préfixe re en début de verbe :
(58) « il refaisait encore des gestes, il décrivait des paraboles
il promenait les mains dans les voies lactées
haut, très haut dans les atmosphères
il retrouvait encore une cligneuse
une petite chose à mexpliquer. »
(59) « Je me laissais aller et puis je vomissais et je me réveillais encore et je me rendormais. »
(60) « Et je repensais encore au colonel, brave comme il était cet homme-là, avec sa cuirasse, son casque et ses moustaches, on laurait montré se promenant comme je lavais vu moi, sous les balles et les obus, dans un music-hall, cétait un spectacle à remplir lAlhambra dalors. »
(61) « enfin, on arrivait, vanné, je repassais au retour de ces excursions populistes devant linépuisable et double rangée des beautés de mon vestibule tantalien et je repassais encore et toujours songeur et désireux. »
La discontinuité quimplique linterprétation itérative peut aussi être mise en valeur par la juxtaposition de la négation du verbe et son affirmation :
(62) « Y en avait plus quil y en avait encore des rues, et puis dedans des civils et leurs femmes qui nous poussaient des encouragements, et qui lançaient des fleurs, des terrasses, devant les gares, des pleines églises. »
ou par le décompte du procès ajouté par une fois, un coup :
(63) « Et on labandonnait encore un coup dans son réduit à se protéger. »
(64) « Ces maisons du faubourg qui limitaient notre parc se détachaient encore une fois, bien nettes, comme font toutes les choses avant que le soir les prenne. »
Ainsi, encore combiné avec un verbe à limparfait peut tout aussi bien recevoir linterprétation continuative quitérative. On peut remarquer dailleurs que certains énoncés peuvent être sujets à ambiguïté : lénoncé il dormait encore peut aussi être interprété comme la continuation du procès dormir : il continuait à dormir que comme la réitération dun procès déjà réalisé : Il dormait à nouveau. Cette double possibilité dinterprétation est à relier à la latitude de mise en relation quoffre le trait sémantique « indéfini » de limparfait, trait combinable avec un procès comme avec une suite de procès.
A linverse, le passé simple limite linterprétation de déjà et dencore au seul effet de sens itératif. De ce fait, les énoncés mettant en relation un verbe au passé simple avec déjà se révèlent rares. Le corpus de Céline rend compte de cette rareté : en effet, alors que limparfait se combine avec déjà dans 190 occurrences dans les textes de Voyage au bout de la nuit et de Mort à Crédit, la combinaison du passé simple avec déjà en est proprement absente. La rareté de ces emplois a, dailleurs, pu conduire certains linguistes à un verdict dincompatibilité de déjà et du passé simple et ce sujet a animé un débat dans les années 50.
Mais dautres linguistes soulignent lexistence dénoncés tels que, ceux-ci relevés par Klum :
« Il y eut déjà des temps, et certains récents, où lâme et lavenir de la patrie étaient ainsi déposés dans les consciences individuelles. »
« Nous refusons
la compétence du jury appelé à choisir le sujet du concours et à désigner le lauréat. Dans le jury se trouves Charles L.
qui refusa déjà, en 1929, lors dun concours, la copie de Le Corbusier. »
« De retour enfin dun long voyage, je prends connaissance de la lettre dIsabelle Rivière
Jy lis ceci : Gide affirme que ce catholique pratiquant jusquà lâge de seize ans, navait jamais ouvert lévangile. Déjà, peu de temps après la publication du numéro spécial de la NRF
Isabelle Rivière, lorsque je la revis, protesta contre ce quelle considère comme une grosse inexactitude. »
Martin indique quil existe une vingtaine, au moins, de ces exemples dans la documentation TLF et en cite aussi quelques-uns :
« Il se justifia, et déjà ses lettres devinrent moins tendres
»
« Cependant, la liberté trouva déjà moyen de se faire jour
»
« Déjà il me sembla que je devais communiquer la solitaire expérience que jétais en train de traverser. »
Tous ces exemples ont en commun dimpliquer une lecture itérative de déjà et lanalyse quen fait Klum rattache à lanalyse aspectuelle du passé simple limpossibilité dune autre lecture de déjà :
« Sans entrer dans les détails de ce problème difficile, on ne risque guère de se tromper entièrement si lon suppose que lexplication doit résider dans le fait que déjà implique normalement que le procès exprimé par le verbe est (déjà) en partie ou complètement arrivé. Par ce mot, on peut donc se placer en plein déroulement du verbe, ce qui est incompatible avec laspect global, synthétique du passé simple. Les quelques cas de la combinaison déjà + passé simple nous présentent une situation où le mot déjà na plus sa fonction accoutumée, mais assume le sens de « une fois déjà » ou « à ce moment ». Dans limpossibilité dopérer un clivage du corps verbal fortement synthétisé par le passé simple, déjà subirait donc le changement fonctionnel et sémantique quon vient desquisser. »
Déjà mis en relation avec un verbe au passé simple ne peut désigner une phase initiale interne au procès. Comme pour linterprétation des repères temporels mis en relation avec un verbe au passé simple, la définition du procès implique quon ne peut faire abstraction de ses limites en désignant dune manière ou une autre sa partie interne.
La compatibilité de encore avec le passé simple a été moins débattue dans la mesure, sans doute, où les emplois itératifs de encore en relation avec un verbe au passé simple sont relativement nombreux. Voyage au bout de la nuit en présente 45, par exemple. Pourtant, sur le point qui nous intéresse, on peut faire un parallèle entre encore et déjà dans leur mise en relation avec un verbe au passé simple. Ainsi que lexplique Vet, « la raison de la lecture itérative doit être cherchée dans laspect perfectif, qui empêche lidée dune continuation ininterrompue. » Limpossibilité de « saisie interne du procès » par le passé simple interdit la désignation de la continuité du déroulement du procès. Ladverbe encore mis en relation avec un verbe au passé simple ne peut donc qualifier le procès que dans son ensemble et non pas son déroulement interne. Linterprétation itérative simpose alors qui désigne la totalité du procès.
(65) « Jinsistai, je cognai encore, jinterpellai très haut, mi en allemand, mi en français, tour à tour, pour tous les cas, ces inconnus bouclés au fond de cette ombre. »
(66) « -vous êtes bien brave, me dit-il encore le père et il me serra la main. »
Dans Voyage au bout de la nuit, cette itérativité est parfois mimée par la répétition du mot donnant ainsi un effet dinsistance :
(67) « Et la vieille me raconta encore et encore comment les choses sétaient déroulées. »
(68) « chaque matin, nous le revîmes, et le revîmes encore le médecin chef, suivi de ses infirmières. »
Le parallélisme de déjà et encore permet aussi de souligner leur valeur itérative dans cet extrait, déjà situant le procès connaître en début de série, et encore situant le procès apprendre en milieu de série :
(69) « Des trucs jen connaissais déjà et des fameux pour être malade, jen appris encore des nouveaux, spéciaux pour les colonies. »
La mise en relation de ladverbe encore et de ladverbe déjà avec des verbes à limparfait ou au passé simple permet de mettre en relief lopposition imparfait/passé simple et recoupe les conclusions de notre analyse du précédent chapitre : le fait que les limites du procès dit au passé simple soient définies implique quon ne puisse faire abstraction de ces limites en désignant un procès « en cours de déroulement », ce qui justifie lanalyse aspectuelle perfective du passé simple et sa valeur explicative de linterprétation contrainte de déjà et encore. Cependant, le fait que les limites du procès dit à limparfait soient indéfinies nimplique pas des contraintes symétriques de linterprétation : déjà et encore peuvent désigner la totalité du procès ou un stade de déroulement du procès. Ce procès peut donc être perfectif ou imperfectif selon le contexte, ce trait nétant pas pertinent pour décrire lopposition de limparfait au passé simple. Cest pourquoi nous verrons plus loin que la perfectivité du passé simple nest quun simple effet de sens du passé simple, lopposition avec limparfait se jouant en biais par rapport à ce concept dans labsence de définition du procès que véhicule limparfait.
« comme si tout cela (ces cris, cette violence, cette incompréhensible et incontrôlable explosion de fureur, de passion) ne se passait pas à l' époque des fusils, des bottes de caoutchouc, des rustines et des costumes de confection mais très loin dans le temps, ou de tous les temps, ou en dehors du temps, la pluie tombant toujours et peut-être depuis toujours, les noyers les arbres du verger s'égouttant sans fin » C. Simon, La Route des Flandres.
2-2-2-2-1-3 Mise en relation dun verbe au passé simple et dun verbe à limparfait - le schéma dincidence :
Nous nous arrêterons enfin sur lanalyse que propose la thèse aspectuelle de la mise en relation dun verbe au passé simple et dun verbe à limparfait.
Lopposition aspectuelle imparfait / passé simple est particulièrement intéressante, ici, car elle a permis de mettre au jour lexistence dun schéma de fonctionnement que Pollak a intitulé « schéma dincidence » qui permet de rendre compte de cette mise en relation. Ce schéma, tel que Pollak la défini, correspond à un énoncé où un verbe au passé simple désigne « une action qui surgit alors quune autre action est en cours », cette dernière étant désignée par un verbe à limparfait.
La définition quen donne Maingueneau à partir des analyses de Pollak met dailleurs en valeur la pertinence de lanalyse aspectuelle:
« La forme à limparfait représente le procès en cours daccomplissement et offre la base sur laquelle tombe le « point » dincidence que constitue le verbe à la forme perfective. »
Il faut tout dabord remarquer que le terme « schéma » relève, ici, davantage de lanalyse sémantique que de lanalyse syntaxique car il nimplique pas un seul schème syntaxique comme le montrent ces exemples :
(70) Pierre se promenait en ville quand il aperçut un vieux camarade.
(71) Quand il commençait à savoir son rôle, une amnésie totale le frappa.
(72) Marie marchait dans la rue. Soudain un motocycliste la bouscula.
(73) Le chanteur entra sur scène. Le public applaudissait son prédécesseur.
(74) Le général attaqua lennemi qui se retirait.(Pollak, 1976)
Il faut remarquer, tout particulièrement, que les deux verbes peuvent apparaître dans un ordre ou dans lautre, selon les formes syntaxiques, - cest le cas, par exemple, des énoncés (72) et (73) - et que la conjonction de coordination quand peut tout aussi bien introduire le verbe au passé simple comme dans lénoncé (70)- que le verbe à limparfait comme dans lénoncé (71).
Même sil emploie le terme de « syntaxe », il ne sagit pas dailleurs, pour Pollak, de réduire lopposition imparfait / passé simple au schéma dincidence. Ce schéma a seulement, pour lui, une valeur heuristique :
« Le « schéma dincidence » est un modèle syntagmatique. Son utilité est de nous permettre de projeter à un niveau syntaxique des « significations fondamentales » formulées plus intuitivement, donc de les objectiver par intégration dans une structure formelle définie [et en particulier, de] définir laspect comme une catégorie grammaticale dont les paires en corrélation forment une unité tout en sopposant. »
Il sagit donc, à travers ce schéma dincidence, de repérer « la saisie globale du procès » quopère le passé simple, ce qui permet au verbe de se comporter comme un repère temporel ponctuel et « la saisie interne du procès » rendue possible par lindéfinition de limparfait. Le procès dit au passé simple peut alors, tout comme un repère temporel ponctuel, sinsérer à lintérieur du procès dit à limparfait.
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Le schéma dincidence a aussi pour avantage de pouvoir exemplifier lanalyse guillaumienne de limparfait en terme de « visée sécante ». Confais montre que le schéma dincidence de Pollak sous-tend cet aspect sécant :
« un événement à lIMP est toujours coupé en un point de son déroulement par un moment-repère ou un événement au PS. »
Le procès à limparfait peut être « segmenté en un avant et un après ». Et cette segmentation de limparfait correspond à son « aspect sécant » tel que le définissent, par exemple, Riegel et al.:
« Avec laspect sécant, lintervalle de référence du procès est envisagé sans limites ; il est perçu de lintérieur et découpé en deux parties : une partie réelle nette et une partie virtuelle, floue, à cause de leffacement de la limite finale. »
Selon Leeman-Bouix, les procès à limparfait « sont simplement présentés comme une continuité que lon perçoit à un moment donné, en sachant quils ont déjà commencé (mais on ne sait pas quand) et- ce nest quune possibilité ouverte- quils peuvent se continuer (mais si oui, on ne sait pas jusquà quand. »
Rien nest dit, en effet, par le schéma dincidence, de la prolongation du procès à limparfait qui peut se poursuivre ou se suspendre après lirruption du passé simple. Par exemple, dans lénoncé (70) Pierre se promenait en ville quand il aperçut un vieux camarade, le procès apercevoir peut navoir aucune incidence sur la promenade de Pierre qui se continue. Mais il peut aussi marquer un terme à cette promenade, comme marque très probablement un terme au procès à limparfait, les procès frapper, bousculer et attaquer des énoncés (71), (72) et (74).
On conçoit donc que, dans le schéma dincidence, le verbe au passé simple peut non seulement sinsérer à lintérieur du procès dit à limparfait mais aussi en désigner la limite finale.
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Cest bien ce que disent Riegel et al., dailleurs :
« Le passé simple vient interrompre le procès à limparfait en dissociant ses deux parties : la partie initiale est réalisée, la partie virtuelle est annihilée. »
Là encore, seul le contexte ou la logique que nous confère notre connaissance du monde nous permettra de choisir entre deux interprétations de la mise en relation dun verbe au passé simple avec un verbe à limparfait : soit le procès dit au passé simple est englobé par le procès dit à limparfait, soit il désigne son terme.
Lindéfinition de la limite finale de limparfait nempêche pas de la désigner par un procès dit au passé simple qui fonctionne, ici, comme un repère temporel :
(75) Marie se promenait jusquà huit heures.
(76) Marie se promenait jusquà ce quelle rencontre son agresseur.
(77) Marie se promenait quand elle rencontra son agresseur.
Il nous paraît important de souligner surtout que lanalyse du passé simple faite à propos de sa mise en relation avec un repère temporel ponctuel vaut aussi pour le schéma dincidence. A savoir que linterprétation du verbe au passé simple est contrainte. Comme le souligne Pollak, le verbe au passé simple ne peut, en aucun cas, désigner un procès qui engloberait un autre procès :
« « Le général attaqua lennemi qui se retira » : si un acte au passé simple a une incidence se rapportant à lacte précédent, alors cela saccomplit dans une succession dactions qui se déroulent et jamais de telle sorte quun acte au passé simple fournisse la base sur laquelle un autre acte au passé simple pourrait se produire. Lévénement au passé simple peut être caractérisé en ce sens comme « totalité ». Cela signifie en termes de la structure formelle syntaxique : ne présentant aucune tendance aux phrases permettant une incidence. Lévénement représenté par un passé simple est fermé sur lui-même, il ne peut être segmenté en un avant et un après par aucun acte dincidence. »
Impossible, autrement dit de désigner la partie interne dun procès dit au passé simple. Il est dit « non-sécant », cest-à-dire quil est « saisi globalement, de lextérieur. » Cet effet de sens est dû au trait sémantique « défini » qui affecte les limites du procès. Il est intéressant, à cet égard, dexaminer les implications de lanalyse de limparfait que propose, parmi dautres, Confais :
« Si le procès est vu dans et à un certain moment de son déroulement, cest que lon fait abstraction des phases initiales et terminales. »
Il suffit de reformuler de façon négative cette définition pour définir le passé simple : le passé simple, du fait de sa valeur « défini » ne peut faire abstraction des limites initiales et terminales du procès, cest pourquoi il ne peut désigner le procès dans son déroulement et ne peut insérer en son sein, un autre procès ou un repère temporel.
Inversement, le fait que les limites du procès dit à limparfait ne soient pas définies autorise quon ne les prenne pas en compte dans la désignation du procès, quon en fasse abstraction, désignant ainsi le déroulement interne du procès mais il ninterdit pas que ces limites soient désignées dans des mises en relation. Cest pourquoi dans la mise en relation dun procès au passé simple avec un procès dit à limparfait, le premier peut être englobé par le second (énoncé (70)) ou il peut désigner la limite du procès à limparfait (énoncé (71)).
(70) ----(( (((--- Pierre se promenait en ville quand il aperçut un vieux camarade.
(71) ----(((--(-( Quand il commençait à savoir son rôle, une amnésie totale le
frappa.
On le voit aussi avec le schéma dincidence, la valeur « non-définie » de limparfait nimplique pas les contraintes symétriques dinterprétation du passé simple, elle implique labsence de contrainte.
2-2-2-1- 4 Bilan
Au total, on constate que si lanalyse aspectuelle est précieuse pour définir les contraintes du passé simple, elle permet mal de rendre compte de limparfait qui ne présente pas des contraintes symétriques. Sil est vrai que le passé simple présente le procès selon un aspect perfectif, il nest pas vrai que limparfait le présente toujours de façon imperfective. Nous avons montré comment linscription de laspect perfectif comme effet de sens de la valeur « défini » véhiculée par le passé simple permettait de résoudre lapparente contradiction. Mais le paradoxe de lanalyse aspectuelle est très certainement à la source dune autre piste dexplication quexplorent les travaux les plus récents : lanalyse textuelle du passé simple et de limparfait.
2-2-2-2-2 Analyses textuelles de limparfait et du passé simple
Nous venons de le voir, lanalyse aspectuelle aboutit à une forme de paradoxe : pertinente pour expliquer les énoncés au passé simple, opérationnelle pour de nombreux énoncés à limparfait, elle se heurte à lirréductibilité de certains énoncés à limparfait.
Les études les plus récentes tentent de résoudre cette contradiction en emmenant lanalyse sur un nouveau terrain : celui du texte. Molendjik, le premier, relie ouvertement les recherches textuelles au rejet de la théorie aspectuelle.
Vetters rejoint Molendjik dans son analyse de limparfait mais dans son article « Passé simple et imparfait : un couple mal assorti », il témoigne de la difficulté à abandonner lanalyse aspectuelle pour le passé simple. Il propose de séparer sur deux plans danalyse différents imparfait et passé simple :
« Mon hypothèse est que le sens fondamental du PS est aspectuel : tout PS est perfectif. Celui de lIMP, par contre, est temporel : tout IMP reprend un point (ou une période) de référence R accessible Cette hypothèse combine deux niveaux : la phrase pour le PS et le texte pour lIMP. »
Pour notre part, plutôt que de séparer en deux plans danalyse les explications de limparfait et du passé simple, nous pensons quil faut englober lanalyse aspectuelle du passé simple dans une autre analyse susceptible de rendre compte de tous les énoncés à limparfait.
Le grand mérite de ce courant danalyse est davoir sorti des oubliettes méthodologiques des énoncés courants comme « limparfait de narration » ou « limparfait de rupture » qui y avait été précipités par commodité danalyse, au titre de leur incorrection ou de leur valeur stylistique, et de sattacher à leur analyse sans craindre de remettre en cause une explication établie et qui semble, par ailleurs, très pertinente.
Nous allons nous attacher à examiner les liens qui peuvent être établis entre ces analyses textuelles et le trait sémantique ( défini à travers la comparaison des effets de sens induits par la juxtaposition de verbes au passé simple et de verbes à limparfait.
2-2-2-2-2-1 Premier plan /arrière-plan du récit
Lanalyse textuelle sest dabord intéressée à la manière dont les procès au passé simple et les procès à limparfait sorganisaient à lintérieur dun texte pour mettre laccent sur des faits de « premier plan » et des faits d « arrière-plan », pour reprendre la nomenclature de Weinrich.
Selon cet auteur, la fonction de limparfait et du passé simple :
« nest autre que de donner du relief au récit en larticulant par une alternance récurrente entre premier plan et arrière plan. »
Il exclut donc toute validité dune analyse phrastique de limparfait et du passé simple. Pour lui, leur fonction est textuelle.
Il précise que le narrateur garde toute liberté dans la distribution de ces temps même si certaines constantes dominent :
« Au début dune histoire, on ne peut se passer totalement dexposition ; aussi le récit a-t-il normalement une introduction, où le temps est le plus souvent de larrière-plan. De plus, dans de nombreux récits, la fin est explicitement marquée par une conclusion, et elle aussi a un penchant pour le temps de larrière-plan. [
] Dans le noyau narratif, Imparfait et Plus-que-parfait sont destinés aux circonstances secondaires, aux descriptions, réflexions, et à tout ce que lauteur désire repousser à larrière-plan. »
Weinrich définit aussi larrière-plan de la sorte :
« cest ce qui à lui seul néveillerait pas lintérêt, mais qui aide lauditeur à sorienter à travers le monde raconté et lui en rend lécoute plus aisée. »
Cest ce qui peut expliquer quavec limparfait, il ny ait pas de progression du récit mais une mise en attente, une suspension qui doit obligatoirement prendre fin par la reprise du récit proprement dit et lirruption dun passé simple.
Pollak, a fait de lanalyse textuelle de Weinrich en premier-plan / arrière-plan un simple avatar de la théorie aspectuelle, en insistant sur la possibilité délargir au texte lanalyse du schéma dincidence :
« Le schéma dincidence peut très bien être interprété comme un microtexte qui montre lopposition aspectuelle dans sa fonction de façon exemplaire. »
et en montrant que Weinrich fait une critique caricaturale de lopposition aspectuelle.
Mais les analyses linguistiques les plus récentes, parce quelles prennent en compte certaines limites de lanalyse aspectuelle, ont réhabilité lanalyse textuelle en se focalisant sur dautres aspects du fonctionnement textuel du passé simple et de limparfait, sintéressant à la question de mise en ordre des procès ou aux liens anaphoriques qui peuvent apparaître entre un verbe et un autre élément du texte. Nous allons donc interroger les effets de sens qui peuvent apparaître dans la succession de deux passés simples ou de deux imparfaits.
« C'est triste les raclures du temps... c'est infect, c'est moche. » L-F. Céline, Mort à Crédit.
2-2-2-2-2-2 Mise en relation de deux passés simples
Un verbe au passé simple désigne un procès défini, un univers dont les contours sont identifiés. Touratier compare dailleurs un procès présenté au passé simple à « une sorte dévénement historique. » Et il rattache cet effet de sens à la limitation désignée par le passé simple : il présente, en effet, le procès « comme un événement isolé et délimité dans sa globalité de fait objectif, ainsi que peut lêtre une date dans un livre dhistoire. » Cest ce qui explique un effet de sens très fréquent au passé simple : celui de succession de deux procès que donne la juxtaposition de deux procès au passé simple. En effet, la limite entre deux procès désignés par un verbe au passé simple est doublement définie en tant que limite finale du premier procès et limite initiale du second. Il ne peut donc y avoir ambiguïté sur la délimitation entre les deux procès ; il ne peut y avoir, entre deux procès au passé simple, de chevauchement selon le terme de Laurendeau qui le définit comme une forme de simultanéité partielle. On peut opposer à cet égard un exemple emprunté à Laurendeau et son pendant, obtenu par substitution dun passé simple par un imparfait :
(78) Le public fit silence. Le conférencier commença à parler.
(79) Le public faisait silence. Le conférencier commença à parler.
Le remplacement dun imparfait par un passé simple conduit à un changement dinterprétation dans la façon dont sont agencés les deux procès : on passe dun chevauchement des procès à leur succession : dans lexemple (78), la salle fait silence avant que le conférencier ne commence à parler. Les deux procès se succèdent. Inversement, le verbe faire à limparfait dans lexemple (79) ne trouve pas sa limite finale dans celle initiale du verbe commencer au passé simple. Un verbe au passé simple désignant des limites définies, il est logique que lon cherche à définir ces limites les unes par rapport aux autres quand on a deux verbes au passé simple, le cas le plus fréquent étant didentifier la limite finale du premier procès à la borne initiale du second procès.
(78) [ ][ ] Le public fit silence. Le conférencier commença à parler.
(79) ---((--[-]- Le public faisait silence. Le conférencier commença à parler.
Doù lidée dune succession qui simpose presque automatiquement lorsquun énoncé présente deux verbes au passé simple. Cest cette idée de succession nécessaire qui explique lincongruïté de cet extrait des Exercices de style de Queneau selon lanalyse quen fait Le Goffic :
« Ce fut midi. Les voyageurs montèrent dans lautobus. On fut serré. Un jeune monsieur porta sur sa tête un chapeau entouré dune tresse, non dun ruban. Il eut un long cou. Il se plaignit auprès de son voisin des heurts que celui-ci lui infligea. Dès quil aperçut une place libre, il se précipita vers elle et sy assit.
Je laperçus plus tard devant la gare Saint-Lazare. Il se vêtit dun pardessus et un camarade qui se trouva là lui fit cette remarque : il fallut mettre un bouton supplémentaire.»
Le Goffic commente cette version de la sorte :
« Les passés simples induisent une lecture où tous les procès sont présentés comme les phases successives du déroulement de laction, ce qui manifestement ne convient quà une partie des procès relatés ; doù des cocasseries absurdes (il eut un long nez), des incohérences (lui infligea), des perplexités (il fallut) : vision éclatée, de pure successivité, sans lien intelligible, -vision schizophrénique. »
On peut penser, en effet, que, quand les procès dans leur rapport entre eux ne renvoient à rien de connu, cest la notion de succession, statistiquement la plus probable des interprétations de la succession de deux passés simples, qui simpose au lecteur. Mais Le Goffic parle aussi de « vision éclatée ». En effet, léchec dune interprétation successive conduit à ne plus prendre en compte les procès que un par un, dans une individualisation des procès quinduit également lemploi de passé simple.
Cest la tendance à interpréter de préférence une juxtaposition de verbes au passé simple par lidée de succession des procès qui fait aussi que le passé simple a été parfois défini par la valeur de « progression du récit ». « Succession des procès » ou « Progression du récit » sont des notions très proches, si ce nest que la deuxième réinterprète la première en réfutant lanalyse aspectuelle de limparfait et du passé simple et en construisant un modèle textuel à partir du concept de point de référence de Reichenbach. Ainsi, les travaux de Molendjik, Vetters, Saussure, Vet, et Moeschler partent de lhypothèse de la valeur définitoire de la notion de « progression » pour le passé simple en utilisant les instructions de fonctionnement du passé simple établies par Kamp et Rohrer :
« -Introduisez un nouvel événement e dans la Structure de Représentation Discursive.
- cet événement est antérieur au moment de lénonciation et il a lieu à lintérieur du point de référence en vigueur à ce stade de la SRD.
- le point de référence est subséquemment transféré pour servir dattache au prochain événement au moment de son introduction. »
Cette capacité du passé simple dintroduire son propre point de référence est opposable à limparfait qui, selon la thèse de limparfait anaphorique, aurait besoin de se rattacher à un point de référence extérieur.
Pour autant, deux verbes au passé simple peuvent aussi se suivre dans un énoncé sans que soit désignée une succession des procès. Cest le cas de lexemple maintes fois glosé de Kamp-Rhorer :
(80) Marie chanta et Pierre laccompagna au piano.
Bres en fait son cheval de bataille dans un article au titre explicite « Non, le passé simple ne contient pas linstruction [+progression] ». Il souligne que le trait de « succession » nest pas définitoire en soi du passé simple mais que cest notre connaissance du monde qui nous permet de dire dans :
« Le dîner dura peu, et chacun monta se coucher. » (Maupassant, Boule de Suif)
quen général le fait daller se coucher succède à celui de dîner alors que la même connaissance du monde nous apprend que laccompagnement au piano est forcément simultané au chant ou que laudition dune histoire est généralement simultanée à sa narration ce qui permet dinterpréter de façon satisfaisante cette citation :
« Le poète irrité raconta ses angoisses, en versant dans ces curs amis les flots de pensées qui lassaillaient. Eve et David écoutèrent Lucien en silence. »(Balzac, Les Illusions perdues)
Une remarque sur le passé simple de Tasmowski-De Ryck rejoint cette analyse de Bres quand elle souligne :
« Quon puisse avoir [+gobalité] [-progression] est exemplifié chaque fois quun événement est décomposé en phases e1, e2, e3
, dont lordre ou le désordre dépendra des connaissances factuelles :
« Lété de cette année-là vit plusieurs changements dans la vie de nos héros. François épousa Adèle, Jean-Louis partit pour le Brésil et Paul sacheta une maison à la campagne. » »
Bres reconnaît cependant que ce type dénoncé est moins courant que ceux où les deux procès dits au passé simple présentent une progression mais il juge que si lemploi de deux verbes au passé simple va très souvent de pair avec lidée de progression cela ne tient pas à la forme verbale en elle-même mais à une affinité des valeurs aspectuo-temporelles du passé simple avec lordre progressif.
Il apparaît, en effet, que la succession dite par le sens des événements en contexte prend un effet denchaînement logique quand les verbes sont au passé simple du fait de la définition des limites de chaque procès, comme nous lavons vu mais laccent mis par le passé simple sur la définition des limites du procès peut conduire à une seconde interprétation de deux verbes qui se succèdent dans un énoncé. Au lieu didentifier la borne finale du premier et la borne initiale du second, cas le plus fréquent, on peut identifier les deux bornes initiales, dune part et les deux bornes finales, de lautre.
(80) [[ ]] Marie chanta et Pierre laccompagna au piano.
Ce cas de figure correspond à la catégorie du « recouvrement strict » parmi les cas de simultanéité définis par Laurendeau. Cest ce qui permet dexpliquer que deux verbes au passé simple ne désignent pas forcément deux procès qui se succèdent.
En somme, nous nous rallions à lidée de Bres et de Tasmosky selon laquelle la notion de progression est indépendante de lemploi du passé simple. Leffet de sens, qui, par contre, nous semble propre au passé simple est celui de « globalité », effet de sens qui découle de la définition du procès par le passé simple. Ainsi, nous lavons déjà souligné, un procès désigné par un verbe au passé simple ne pourra pas inclure un autre procès au passé simple, de même quil ne peut inclure un repère temporel. Le verbe au passé simple définit les limites du procès, dès lors on ne peut en faire abstraction, ce qui explique leffet de sens « global » et les possibilités de coïncidence des limites de procès dits au passé simple.
« traînant comme dironiques stigmates leurs dérisoires débris duniformes qui les faisaient ressembler à un peuple de fantômes, dâmes laissées pour compte, cest-à-dire oubliés, ou repoussés, ou refusés, ou vomis, à la fois par la mort et par la vie, comme si ni l'une ni l'autre n'avait voulu d'eux, de sorte qu'ils paraissaient maintenant se mouvoir non dans le temps mais dans une sorte de formol grisâtre, sans dimensions, de néant, d'incertaine durée sporadiquement trouée par la répétition nostalgique, pimpante et obstinée de la même rengaine, des mêmes mots vides de sens, sautillants, mélancoliques» (C. Simon, La Route des Flandres)
2-2-2-2-2-3 Mise en relation de deux imparfaits
Contrairement au passé simple, la clôture du procès dit à limparfait nest pas définie, ce qui implique que le passage dun procès à limparfait à un autre procès à limparfait est lui aussi indéfini : y-a-t-il simultanéité des procès ou succession ? Laccent, il est vrai, a souvent été mis sur leffet de sens simultané. Riegel et alii, par exemple, insistent sur cet effet de sens dans leur définition de limparfait :
« Limparfait est apte à présenter des faits simultanés, à les juxtaposer, sans marquer la succession chronologique, à la différence du passé simple. Les procès sont envisagés à partir du même point référentiel. Limparfait est ainsi employé dans des passages descriptifs. »
Le lien entre les effets de sens de simultanéité des procès et la description est fait par Pollak dans son article de 1976. Il part dun extrait de Thérèse Raquin de Zola :
« Il y a quelques années, en face de cette marchande, se trouvait une boutique dont les boiseries dun vert bouteille suaient lhumidité par toutes leurs fentes. Lenseigne, faite dune planche étroite et longue, portait, en lettres noires le mot : Mercerie, et sur les vitres de la porte écrit un nom de femme : Thérèse Raquin, en caractères rouges. A droite et à gauche senfonçaient des vitrines profondes
»
Et compare son analyse de cet extrait :
« La séquence de la production linguistique, de même que celle, toute semblable, de la réception produit en même temps une dimension espace-temps de relations simultanées. En dautres termes, la simultanéité de ces relations se développe à partir de la succession dans lutilisation des prédicats. »
à la définition de luvre picturale par Scharlau :
« un système de communication pluridimensionnel
il se distingue par la communication simultanée de toutes les données. Ce qui signifie que dans un tableau on ne peut fixer lordre dans lequel les informations sont émises ou reçues ; tout au moins celui-ci nest pas pertinent pour lensemble des informations que donne le tableau.»
Pollack conclut :
« Lanalogie avec la peinture va de soi. Malgré toutes les différences importantes dans le mode de communication, elle réside dans la production de relations simultanées. »
Leffet de sens descriptif lié à la simultanéité des procès peut dailleurs concerner des procès moins statiques que ceux choisis par Pollack. Cest le cas dans ces extraits de Voyage au bout de la nuit, par exemple :
(81) « De sa maison nous dominions le port fluvial qui miroitait en bas à travers une poussière si dense, si compacte quon entendait les sons de son activité cahotique mieux quon nen discernait les détails. Des files de nègres, sur la rive trimaient à la chicotte, en train de décharger, cale après cale, les bateaux jamais vides, grimpant au long des passerelles tremblotantes et grêles, avec leur gros panier plein sur la tête en équilibre, parmi les injures, sortes de fourmis verticales.
Cela allait et venait par chapelets saccadés à travers une buée écarlate. Parmi ces formes en travail, quelques-unes portaient en plus un petit point noir sur le dos, cétaient les mères qui venaient trimarder elles aussi les sacs de palmistes avec leur enfant en fardeau supplémentaire. »
(82) « Et la rue me reprit. Ce nétait plus la même foule que tout à lheure. Celle-ci manifestait un peu plus daudace tout en moutonnant au long des trottoirs, comme si elle était parvenue cette foule dans un pays moins aride, celui de la distraction, le pays du soir.
Ils avançaient les gens vers les lumières suspendues dans la nuit au loin, serpents agités et multicolores. De toutes les rues dalentour ils affluaient. ça faisait bien des dollars, pensais-je, une foule comme ça. »
Les procès exprimés par les verbes à limparfait dans le premier passage, dominions, miroitait, entendait, discernait, trimaient, allait, venait, portaient, étaient, venaient sont dans un rapport de simultanéité mais une simultanéité approximative dans la mesure où ces procès dits à limparfait ne sont pas définis. Le travail des dockers a commencé bien avant le regard porté sur eux et se poursuit ensuite, par exemple. On nen saisit quune partie, sans début ni fin, proprement indéfinie puisque le regard qui pourrait les définir, métaphorisé par nous dominions est lui-même indéfini car dit par un imparfait.
De même, les verbes à limparfait du second passage désignent-ils des procès, être, manifester, avancer, affluer, penser, qui sont simultanés et simultanés aussi au regard du personnage-narrateur qui les saisit en cours. Il sagit de décrire un tableau, tableau africain ou tableau américain et de décrire également, par le biais de la focalisation interne, létat desprit du personnage. En somme, ces passages à limparfait motivés par un regard peuvent être comparés à des tableaux vivants.
Cependant, leffet de sens de simultanéité ne rend pas compte de tous les énoncés faisant se succéder plusieurs verbes à limparfait et notamment, comme nous lavons déjà ébauché, de limparfait de narration. En labsence de contexte, en effet, comment dire dans cet extrait de Voyage au bout de la nuit où Bardamu se mêle aux voyeurs qui se sont amassés autour dun cochon en devanture, si la juxtaposition de ces imparfaits désigne un arrière-plan à visée globalement descriptive, soit la simultanéité des procès ou une succession de procès :
(83) « Les gens lui tortillaient les oreilles histoire de lentendre crier. Il se tordait et se retournait les pattes le cochon à force de vouloir senfuir à tirer sur sa corde, dautres lasticotaient et il hurlait. »
En effet, les procès dits par les verbes tortiller, se tordre, se retourner, asticoter, hurler peuvent être compris comme globalement simultanés et correspondre ainsi à une description statique. Ce qui permet de justifier que ce nest pas le cas, cest que le verbe hurlait est suivi dans le texte, si lon sabstient de le tronquer, par encore plus fort. Ce terme de comparaison ainsi que dautres qui lui succèdent dans le texte : davantage, toujours plus, pas encore assez permettent détablir une gradation dans les souffrances du cochon et ce faisant, un minimum de progression du récit :
(83bis) « Un cochon cétait, un gros, un énorme. Il geignait aussi lui, au milieu du cercle, comme un homme quon dérange, mais alors énormément. Et puis, on arrêtait pas de lui faire des misères. Les gens lui tortillaient les oreilles histoire de lentendre crier. Il se tordait et se retournait les pattes le cochon à force de vouloir senfuir à tirer sur sa corde, dautres lasticotaient et il hurlait encore plus fort à cause de la douleur. Et on riait davantage.
Il ne savait pas comment se cacher le gros cochon dans le si peu de paille quon lui avait laissée et qui senvolait quand il grognait et soufflait dedans. Il ne savait pas comment échapper aux hommes. Il le comprenait. Il urinait en même temps autant quil pouvait, mais ça ne servait à rien non plus. Grogner, hurler non plus. Rien à faire. On rigolait. Le charcutier, par-derrière sa boutique, échangeait des signes et des plaisanteries avec les clients et faisait des gestes avec un grand couteau.
Il était content lui aussi. Il avait acheté le cochon, et attaché pour la réclame. Au mariage de sa fille il ne samuserait pas davantage.
Il arrivait toujours plus de monde devant la boutique pour voir le cochon crouler dans ses gros plis roses après chaque effort pour senfuir. Ce nétait cependant pas encore assez. On fit grimper dessus un tout petit chien hargneux quon excitait à sauter et à le mordre à même dans sa grosse chair dilatée. On samusait alors tellement quon ne pouvait plus avancer. Les agents sont venus pour disperser les groupes. »
Les verbes listés au départ tortiller, se tordre, se retourner, asticoter, hurler indiquent donc des procès qui se succèdent. Mais, les procès du second et du troisième paragraphe ne sont pas ordonnés par rapport aux procès des autres paragraphes et rien ne permet de résoudre cette ambiguïté.
Ainsi, deux interprétations de la mise en relation de verbes à limparfait sont possibles selon le contexte: simultanéité - et on a affaire à une description- ou succession et on a affaire à un récit.
Cette possibilité dutiliser des verbes à limparfait pour désigner une succession de procès nest ni exceptionnelle ni nouvelle. Saussure et Sthioul rappellent que l « imparfait de narration » ou « imparfait pittoresque »- est attesté dès le 18ème siècle, chez Rousseau. Ils en donnent, par ailleurs, deux exemples typiques :
« La clef tourna dans la serrure. Monsieur Chabot retirait son pardessus quil accrochait à la porte dentrée, pénétrait dans la cuisine et sinstallait dans son fauteuil dosier. »
« A 18h42, Soper regagnait son stand. La voiture était poussée à lintérieur de son box et toute léquipe sempressait denlever les éléments arrière de la carrosserie. »
Pour eux, il ne sagit pas demplois déviants ou appauvrissants de la langue française, mais dune possibilité offerte par la langue.
« Selon ce point de vue, les écrivains novateurs, bien loin de corrompre la langue en déviant une forme de signification, chercheraient plutôt à tirer parti dun potentiel jusqualors sous-exploité. »
Les travaux récents, accordent, de la même façon, beaucoup dintérêt à l« imparfait de rupture » qui a en commun avec l « imparfait de narration » dêtre substituable par un passé simple. On peut en donner pour exemple, cet extrait de La Nausée de Sartre, proposé par Ducrot :
« Je me secouai, outré de colère contre lui, je répondis sèchement : « Je vous remercie, mais je crois que jai assez voyagé : il faut maintenant que je rentre en France. » Le lendemain, je prenais le bateau pour Marseille. »
Ducrot commente ainsi le phénomène :
« Après avoir raconté une suite dévénements au passé simple, on indique, à limparfait, un événement isolé qui se situe après eux et en constitue la conclusion, ou plus exactement la clôture (en entendant par là, non seulement leur résultat final, mais aussi bien une péripétie indépendante deux et qui les empêche davoir des conséquences directes, qui les prive de toute efficacité : cf. « deux ans après il mourait. » ). »
Là aussi, il sagit tout dabord de légitimer la grammaticalité de cet emploi de limparfait pour justifier la recherche dune analyse autre que lanalyse aspectuelle qui ne permet pas de lexpliquer. Ainsi, lenquête de Tasmowski-De Ryck, reprend les statistiques de Klum et en confirme le résultat, à savoir que limparfait est à peine moins fréquent que le passé simple après une expression type x temps plus tard, une date précise ou le lendemain. Il ne sagit donc pas dun phénomène à la marge mais plutôt dun fait décriture quasiment ritualisé.
Et lon peut, en effet, mettre à lactif des théoriciens de lanalyse textuelle de ne pas rejeter dans le « hors-norme » des emplois de limparfait qui contredisent une théorie bien établie, de reconnaître que le fait que limparfait nest pas toujours imperfectif nest pas un phénomène à la marge, purement stylistique, que lon peut se permettre de négliger. Cest dailleurs parce quils reconnaissent à limparfait des emplois non-imperfectifs quils recherchent une autre piste danalyse que celle de lopposition aspectuelle: celle quon peut qualifier globalement d « imparfait anaphorique ».
Il semble bien que ce soit Ducrot qui ait ouvert cette voie, sous un autre terme : celui de thème temporel. En partant de l « imparfait narratif », il aboutit aux mêmes conclusions que Bres sur la successivité des procès à savoir que cest notre connaissance du monde qui nous permet de déterminer si deux procès se succèdent ou sont simultanés et non pas la forme verbale, elle-même.
Cependant, il cherche à établir ce qui fait la différence entre un récit au passé simple et un récit à limparfait de narration. Selon Ducrot, l « imparfait narratif » ne peut pas être perçu comme un récit proprement dit, même si les propos quil énonce « représentent des événements dont on sait par ailleurs quils se succèdent [car] ce nest pas la succession des propos dans le discours qui amène à penser les événements comme successifs. » En effet, pour Ducrot, raconter, cest « mettre en rapport la succession des propos p1, p2,
dont est fait le discours avec la succession t1, t2
, éléments dont le thème est constitué. Si le temps dont parle le locuteur est vu comme un bloc, la succession des propos livrés à lauditeur ne pourra pas être rapportée à une succession intérieure aux choses. » Or, selon lui, « le thème temporel [de limparfait] nest pas présenté comme une succession dinstants, mais comme un bloc inanalysable. » Il en conclut quil est « inévitable, même si lénoncé comporte la succession de propos p1, p2
que ces propos soient vus comme caractérisations successives du même objet : ils napparaissent pas comme reproduisant un développement interne de cet objet (ce qui nempêche pas que ces propos puissent être constitués par des événements objectivement successifs). »
Ducrot estime que la simultanéité exprimée par limparfait ne joue pas entre les procès, quand on a affaire à un imparfait de narration, mais entre une série de procès et un « thème temporel » :
« La situation est la même lorsquil y a un seul verbe désignant une action qui se déroule dans le temps. Au passé simple, il est possible que les différents moments de cette activité soient, dans limage même quen donne lénoncé, rapportés aux différents moments successifs constituant le thème. A limparfait au contraire, cest au même objet temporel quils sont tous rapportés, puisque cet objet (i.e. le thème), tout en étant temporel nest pas temporellement analysé. Lobjet reste pour ainsi dire identique à lui-même, il ne vieillit pas, le temps na pas de prise sur lui. Ce nest pas lobjet-en-t1 qui est dans létat E1, puis lobjet-en-t2 qui est dans létat E2
etc. Cest pourquoi lauditeur ne peut pas identifier son temps (cest-à-dire la succession des attributions détat) et celui des choses (cest-à-dire la période qui est le thème du discours). Il na pas limpression dassister à un déroulement qui lui serait extérieur. On lui dépeint ce qui se passe, on ne le lui raconte pas. »
On peut sans doute, dailleurs, rattacher à cette analyse et donc à celle de la description dun tableau vivant, celle que fait Molendijk de ce passage dramatique :
(84) « Ce que je vis alors (P1) est indescriptible (P2). Ayant complètement perdu la raison, un jeune homme se jetait par la fenêtre (P3). Une jeune femme, préférant une mort subite à des souffrances terribles, se poignardait (P4). Un vieillard, essayant de fuir, trébuchait (P5) et tombait inanimé sur le sol (P6)
»
Faisant la remarque que « cest plutôt lensemble des faits racontés par P3-P6 [
] qui est présenté comme étant en train de se dérouler et non pas chacun des événements », il aboutit à une conclusion similaire à celle de Ducrot:
« La perspective interne dont relève lIMP du français peut concerner, non seulement le fait rapporté par une phrase où figure ce temps, ou ce qui est présupposé par ce fait, mais aussi lensemble que constitue toute une série de faits racontés à lIMP. »
Selon cette thèse, limparfait narratif serait alors très proche de limparfait itératif qui fonctionne comme une série de procès dont lensemble est indéfini.
(84) [ ] [ ] [ ] se jetait, se poignardait, trébuchait et tombait
[ ] je vis
(37) ---- [ ] [ ] [ ] ---- A cette époque-là, il courait de sept heures à huit heures,
tous les jours.
Mais on peut aussi considérer que la notion de simultanéité nest pas inhérente à limparfait pas plus que la notion de progression ne lest au passé simple. Nous pensons, pour notre part que le caractère non défini de limparfait autorise, en effet, à linverse du passé simple, toutes les interprétations. A la différence du passé simple, un verbe à limparfait ne désigne pas les limites du procès. Ainsi, quand deux verbes à limparfait sont juxtaposés, il ny a pas coïncidence entre les limites des deux procès- alors que cette coïncidence est obligatoire quand les verbes sont au passé simple - dès lors, il peut y avoir simultanéité forcément approximative du fait de lindéfinition du procès (Fig.1) ou succession des procès (Fig.2). Les contours du procès étant indéfinis, cest au contexte ou à la logique liée à notre connaissance du monde de justifier du positionnement de deux procès à limparfait. Limparfait lui-même, tout comme le passé simple, ne dit rien de lordre des procès.
(Fig.1) ----((----
----((----
(Fig.1) ----((--------((----
Cette analyse conduit alors à considérer quun texte écrit à limparfait narratif constitue une série de tableaux, dinstantanés photographiques, dont chacun est mis en valeur tour à tour, la succession des procès nétant établie que par la logique des événements racontés. Dans le cas de limparfait narratif, leffet de sens de la succession des procès est sensiblement différent de celle dite par des verbes au passé simple. En effet, comme les contours des procès désignés par des verbes à limparfait sont indéfinis, la succession (dite par la logique du texte) donne un effet de juxtaposition dévénements dont on repère mal le passage de lun à lautre. On a comme une succession de prises de vue, détats successifs, de descriptions juxtaposées. En somme, passé simple et imparfait renvoient, de façon imagée, à la différence entre un dessin animé et à une projection image par image. On retrouve alors leffet de sens descriptif de limparfait.
(85) ---(-----(-----((-----(--- Monsieur Chabot retirait son pardessus quil accrochait
à la porte dentrée, pénétrait dans la cuisine et
sinstallait dans son fauteuil dosier.
La succession des procès est assurée par la logique issue de notre connaissance du monde. Si leffet de sens peut être appelé « stylistique », cest que ce passage pourrait être dit au passé simple. Le choix de limparfait fait contraste avec le choix également possible du passé simple, contraste qui tient aussi, selon nous, au fait que larticulation entre chaque procès est mal défini et quainsi chaque procès semble sétaler dans le temps, comme dans un arrêt sur image. Cest linterprétation que proposent aussi Riegel et alii :
« Limparfait prend ici la place du passé simple, pour exprimer un événement important, dont il modifie la perception : le fait est envisagé de lintérieur et limparfait efface ses limites, pourtant bien réelles. Ce procédé sert paradoxalement à mettre en relief le fait évoqué, qui acquiert de limportance par le temps ouvertement consacré à le considérer dans son déroulement. »
Leeman-Bouix comprend de la même façon, me semble-t-il, cet effet de style :
« Leffet sémantique de « durée » vient de ce que laction est présentée cest la valeur même de limparfait - comme momentanément arrêtée, laissant la suite de laccomplissement dans une perspective ouverte, indéfinie, en suspens.
Doù leffet de
suspense dans les récits, en particulier journalistiques, où toutes les actions sont à limparfait ; si lon me dit Cest alors que Papin passait la balle à Cantona, je ne sais pas si Cantona a bien reçu le ballon et jattends la suite avec limpatience fébrile que vous devinez. »
Quant à l« imparfait de rupture », nous renvoyons, pour notre part, à la possibilité examinée au premier chapitre sur les effets de sens de lopposition imparfait / passé simple, qua un repère temporel ponctuel de désigner une limite dun procès dit à limparfait.
Cest le choix de faire succéder un imparfait à une suite de passé simple, le marqueur temporel ponctuel faisant la transition avec les passés simples qui précèdent :
(86) [ ][ ][ ] -%--%%--- « Je me secouai, outré de colère contre lui, je répondis sèchement :
« Je vous remercie, mais je crois que j ai assez voyagé : il faut
maintenant que je rentre en France. » Le lendemain, je prenais le bateau pour Marseille. »
Leffet de sens stylistique découle alors du choix dun imparfait à la place du passé simple, choix qui fait effectivement rupture après une série de passés simples, et qui donne une « ampleur » au procès dit à limparfait. Labsence de limite peut lui conférer, par ailleurs, un effet de sens correspondant à un « arrêt sur image ».
On peut y voir aussi un effet de sens suspensif comme le propose Riegel :
« Limparfait doit sappuyer sur une indication précise (phrase-tremplin chez Klum), généralement placée en tête de phrase, qui met en place un repère important. Quand laccent est mis sur limportance de la datation (notre exemple), on parle dimparfait « historique » ; quand il sagit plutôt de dépeindre un procès comme dans un tableau, on parle dimparfait « pittoresque ». Cette valeur de limparfait est souvent employée pour clore un récit passé. Limparfait évite au récit une fin nette et brutale, mais lui confère une fin ouverte, « comme le dernier écho dune symphonie qui séloigne »(Flaubert). [
] La partie virtuelle inhérente à limparfait, donnant limpression de linachevé, laisse attendre une suite. »
Nous avons vu que la succession de procès peut être dite aussi bien par des verbes à limparfait que par des verbes au passé simple. Pour autant, limparfait peut-il remplacer le passé simple dans tous les cas de figure ? Lanalyse de Goffic de la version à limparfait du texte de Queneau souligne que tel nest pas le cas :
« Cétait midi. Les voyageurs montaient dans lautobus. On était serré. Un jeune monsieur portait sur sa tête un chapeau qui était entouré dune tresse et non dun ruban. Il avait un long cou. Il se plaignait auprès de son voisin des heurts que ce dernier lui infligeait. Dès quil apercevait une place libre, il se précipitait vers elle et sy asseyait.
Je lapercevais plus tard, devant la gare Saint-Lazare. Il se vêtait dun pardessus et un camarade qui se trouvait là lui faisait cette remarque : il fallait mettre un bouton supplémentaire. »
Le Goffic montre, en effet, que le fait demployer un seul temps quel que soit lancrage référentiel ou temporel créé un sentiment danomalie. On ne sait, en définitive, sil faut interpréter ces procès comme simultanés ou successifs :
« Au total les ancrages référentiels et temporels du texte dans son ensemble sont inexistants ou contradictoires, la temporalité vacille, le tout penche du côté dune sorte de vision irréelle où les choses sont floues, avec des contours estompés, sans commencement ni fin, sans frontière de contradiction, - comme dans un rêve. »
La vision floue, estompée que décrit Le Goffic recoupe, sur le plan de lanalyse stylistique, la notion de valeur indéterminée de limparfait, que lanomalie fait ressortir peut-être avec plus de force.
Le Goffic remarque enfin quil manque à ce texte des frontières de contradiction, autrement dit une mise en relief, dont, selon les termes de Weinrich, on ne saurait se passer. En effet, si limparfait peut permettre dexprimer une simultanéité des procès ou une succession de procès, comme le passé simple, il ne peut sinsérer à lintérieur dun autre procès comme peut le faire le passé simple dans le schéma dincidence ; cest ce qui explique lécrasement des perspectives dans le texte à limparfait de Queneau.
La thèse anaphorique
A la suite ou parallèlement aux analyses de Ducrot, de nombreux théoriciens, tels que Labelle, Anscombre, Kamp et Rohrer, Tasmoswski, Houweling, Moeschler, Vet et Molendijk, Molendijk, Vet explorent une piste de recherche quon peut globalement qualifier d « imparfait anaphorique. » Ils estiment que lopposition entre imparfait et passé simple est basée sur le fait quun énoncé à limparfait nécessite un repère extérieur à lui alors que le passé simple pose lui-même son repérage. Cette notion de repère extérieur prend sa source dans la théorie de Reichenbach selon laquelle les formes temporelles localisent les situations dont on parle au moyen de trois coordonnées : le moment dénonciation, lintervalle de temps pris par le procès décrit et un point de référence. Pour Kamp et Rohrer, par exemple, une phrase qui se trouve à limparfait ne permet pas détablir un nouveau point de référence alors quune phrase au passé simple peut introduire par elle-même un nouveau point de référence. Vetters, dans son article « Passé simple et imparfait : un couple mal assorti », estime quil sagit là du sens fondamental de limparfait :
« Une phrase à limparfait a besoin de se rapporter à un moment spécifique, un point de référence, que le contexte doit permettre détablir. »
Berthonneau et Kleiber résument ainsi les travaux sur la thèse anaphorique :
« Référant à un moment quil nidentifie pas lui-même, [limparfait] renvoie à une entité temporelle du passé déjà introduite dans le contexte ou accessible dans la situation extra-linguistique. [
]
(i) leur description de limparfait en fait, explicitement ou implicitement, un temps anaphorique,
(ii) la relation anaphorique est une relation de simultanéité globale ou, si lon veut, de coréférence temporelle, similaire à la relation anaphorique nominale des pronoms. »
Toutefois, on constate parmi les tenants dune analyse anaphorique de limparfait une certaine hétérogénéité des interprétations du point de référence de limparfait. En effet, selon les analyses, le point de référence pourra être donné par un repère temporel en position frontale :
(87) Lannée dernière à Paris, il faisait chaud.
(88) Le surlendemain, je prenais le bateau pour Marseille. (Sartre, La Nausée)
Mais dautres, tels que celles de Berthonneau et Riegel, estiment que ces adverbes de temps ne constituent pas lantécédent de lénoncé à limparfait qui reste « bizarre out of the blue [et que] de tels énoncés appellent clairement un autre antécédent justificateur que le moment du passé indiqué par hier » .
Dautres auteurs désignent un énoncé au passé simple immédiatement antécédent de lénoncé à limparfait comme son point de référence :
(89) Quand elle arriva enfin, il partait.
(90) Paul entra. Louise faisait la vaisselle.
Il peut aussi être non plus un point temporel mais un intervalle temporel, comme chez Klein (1984) et Gosselin(1996 a). Gosselin estime que ce nest pas limparfait lui-même qui est anaphorique mais lintervalle de référence.
Dautres encore estiment que le point de référence nest pas forcément explicite, il peut aussi être explicite. Ils proposent alors de récupérer par inférence un intervalle temporel soit dans le texte soit dans la situation.
Ainsi, dans lexemple :
(91) Jean alluma une cigarette. La fièvre donnait au tabac un goût de miel.
Vet postule que cest limplication la cigarette être allumée, provenant de Jean alluma une cigarette, qui joue le rôle dintervalle de référence.
Lanalyse de Tasmowski-De Ryck, vise, quant à elle, à établir que le point de référence nécessaire à limparfait est sinon explicite, toujours reconstructible, y compris pour limparfait dit « de rupture ».
Par exemple, pour Tasmowski, limparfait de :
Oh rien, il fermait la porte.
répondrait au sursaut de linterlocuteur pour lui expliquer la cause dun bruit qui vient de se produire. Lintervalle de référence de limparfait serait alors le moment de production de bruit.
Enfin, pour certains linguistes, la référence de limparfait nest pas dordre temporel. Kleiber, par exemple, en postulant que la désignation du procès passe aussi par la désignation de sa situation, met en question la définition de la référence anaphorique :
« Puisque le référent est la situation elle-même, dune certaine façon cest aussi celle-ci qui, dans le cas dun temps anaphorique, est anaphorique, cest-à-dire quelle est en relation avec un état de choses déjà mentionné ou manifeste dune autre façon. Il est alors normal que cette relation danaphoricité ne se limite plus seulement au temps, puisquil sagit de situations ayant leurs caractéristiques propres qui sont en rapport, mais quil faille encore un autre type de continuité référentielle. »
Avec Berthonneau, il remet en cause lanalyse anaphorique de limparfait en termes de simultanéité temporelle avec un antécédent. Cest en reprenant le modèle de lanaphore associative que ces auteurs développent leur thèse dun « imparfait anaphorique méronomique » :
« Limparfait est un temps anaphorique, mais lantécédent nest pas un « moment » dans le passé, mais une situation dans le passé. La relation qui unit limparfait à son antécédent nest pas une relation de coréférence globale (et donc de simultanéité temporelle), sur le modèle de lanaphore pronominale, mais une relation méronomique : limparfait présente le procès auquel il sapplique comme une partie, un ingrédient dune situation passée saillante. »
Mais ce type danalyse et la possibilité ouverte dune référence explicite ouvre la piste à tous les faits de cohérence textuelle et peut aboutir à interpréter une focalisation interne comme un trait de limparfait à exiger de limparfait une pertinence causale ou à expliquer un imparfait de début de texte par le hors-texte.
Le débat autour de la valeur anaphorique de limparfait reste ouvert, semble-t-il, mais sa prise en compte dans une analyse de la valeur indéfinie de limparfait mérite dêtre approfondie ; il est possible, en tout cas, de remarquer un point commun avec notre analyse, à savoir la transgression des catégories grammaticales que semblent vouloir opérer aussi bien la question de lanaphore que celle de lopposition « ( défini » que nous avons posée et qui est traditionnellement rapportée aux déterminants du nom.
En effet, les recherches sur limparfait en tant que temps anaphorique tournent autour de la question dune analogie avec dautres catégories grammaticales : le pronom personnel, généralement admis, mais que Berthonneau et Kleiber rejettent car il implique une référence commune à un seul objet, lanaphore associative qui associe une partie à un tout chez Berthonneau et Kleiber. Dun autre côté, comparer la valeur opposant imparfait et passé simple à celle opposant larticle défini et larticle indéfini ou plus généralement, les déterminants identifiants aux déterminants quantifiants, comme nous lavons fait, nest pas sans rapport avec la thèse sur la valeur anaphorique de limparfait.
Dailleurs, la valeur anaphorique de larticle défini a été comparée avec celle de limparfait dans un article de Vet intitulé : « Lanaphore temporelle et lopposition « défini/indéfini ». Il propose de faire « une analogie entre le PS et larticle indéfini et entre lIMP et larticle défini ». Pour notre part, nous ne pensons pas que le concept « ± défini » recouvre la valeur anaphorique de la détermination nominale. En effet, lanaphore nest quun des moyens de construire la référence à laquelle correspond le nom déterminé par un article défini et non le sens fondamental de la détermination définie. En effet, larticle défini permet de dire quun objet est identifié mais cette identification peut se faire sans passer par une anaphore, du fait du caractère unique de lobjet (le soleil brille), de la généricité de la désignation (lêtre humain est faillible) ou par une désignation déictique (Passe-moi le sel!). La relation anaphorique qui consiste à faire coïncider la référence dun objet avec celle dun objet précédemment cité nest quun des moyens de le désigner comme un objet identifié. Il nous semble donc que si lon peut rechercher une analogie entre ces formes verbales et les déterminants définis et indéfinis, cest en prenant en compte le sens fondamental de larticle défini, à savoir le fait quil désigne un objet identifié et ce faisant un objet unique plutôt que les moyens qui permettent didentifier lobjet.
Il sagit donc, selon nous, de chercher une réponse à la question que pose Bres, à propos des approches textuelles et référentielles :
« Si elles décrivent un (ou le) fonctionnement des tiroirs verbaux (ce qui est déjà beaucoup), elles ne lexpliquent en rien. Si lI est un temps « anaphorique méronomique » (Berthonneau et Kleiber 1993) ou qui permet de référer « globalement à des situations présupposées ou impliquées » (Molendijk 1996) mais pas le PS, quest-ce qui, dans sa « formule », rend compte de cela ? »
Ainsi, larticulation entre le concept danaphore et la valeur « (définie » de limparfait ne nous semble pas correspondre à la nécessité pragmatique quinduit larticle défini.
On peut aussi se faire la remarque que Confais, reprenant lanalyse de Zemb qui qualifie limparfait de « temps vide » lexplique, inversement à Vet, comme « un temps indéterminé ou indéfini dans le même sens où lon parle de pronom indéfini pour Quelquun ou qui de qui vivra verra. ». Il précise :
« Dire de lIMP quil est un « temps vide » signifie que la référence temporelle est présente (présupposée), mais que le référent (linstant-repère) reste indéterminé, aussi indéterminé que la personne bien réelle désignée dans Qui a bu dans mon verre ? Cette analogie entre temps indéterminé et pronom indéfini nest peut-être pas adéquate, mais il y a entre le PRES et lIMP le même genre de rapport et de décalage ou démarquage quentre il/elle et qui ».
Il analyse labsence dautonomie de limparfait, comme un « besoin dêtre décodée par rapport à ce quelque chose qui lui manque pour être une séquence au PRES. »
« Ces concepts de dassertion incomplète ou relative rendent compte de la performance de lIMP comme opérateur dintégration dun « texte » dans un autre « texte » ou dans une autre situation. A ce titre, la séquence à lIMP est toujours dune certaine manière un « discours indirect », et lIMP le « marquant dune vision indirecte »
Le caractère « non-défini » de limparfait peut sans doute motiver les analyses anaphoriques dans leur diversité. En effet, la situation à laquelle doit se relier limparfait varie selon les contextes, comme autant deffets de sens qui peuvent expliquer la difficulté des linguistes à saccorder sur ce fonctionnement anaphorique de limparfait. Mais, en définitive, la définition de lanaphore demanderait à être mieux établie pour quon puisse véritablement y confronter notre analyse.
« nous nétions pas dans la boue de l'automne nous n'étions nulle part mille ans ou deux mille ans plus tôt ou plus tard en plein dans la folie le meurtre les Atrides, chevauchant à travers le temps la nuit ruisselante de pluie sur nos bêtes fourbues pour parvenir jusqu'à elle la découvrir la trouver tiède demi nue et laiteuse dans cette écurie à la lueur de cette lanterne » C. Simon, La Route des Flandres.
2-2-2-2-3 Les emplois dits « modaux » de limparfait
Pour nous, les concepts « avéré » et « (défini » peuvent se combiner non seulement avec la temporalité désignée en creux par le maintenant de lénonciation, mais aussi à dautres paramètres de la situation dénoncé et cest ce qui pourrait expliquer des emplois dits « particuliers » ou « modaux » de limparfait.
Si lon sintéresse aux cinq énoncés suivants :
(92) Je voulais prendre rendez-vous.
(93) Il était joli, mon bébé.
(94) Tu étais le papa et j'étais la maman.
(95) Demain, elle était pourrie.
(96) Un pas de plus et elle tombait.
Les trois premiers énoncés ont en commun de pouvoir être employés dans un contexte où laccomplissement du procès est en coïncidence avec le moment de la situation dénoncé. Lénoncé (92) sil est employé dans un cadre de sociabilité sera glosé comme un imparfait de politesse qui atténue la brutalité de :
(92bis) Je veux prendre rendez-vous.
Lénoncé (93), sil est employé dans une situation dans laquelle le bébé est linterlocuteur, sera glosé comme un imparfait hypocoristique correspondant dans un mode oratoire plus classique à :
(93bis) Tu es joli, mon bébé.
Lénoncé (94), employé dans un contexte de mise en place dun jeu entre deux enfants, sera glosé comme un imparfait préludique et pourra être paraphrasé par :
(94bis) Dans notre jeu, tu es le papa et je suis la maman.
Ce nest donc pas au moment de lénoncé que soppose limparfait mais à un autre paramètre de la situation dénoncé. Dans lénoncé (92), on peut postuler que cest le paramètre du locuteur, le je qui est concerné. En effet, le locuteur fait comme sil nassumait pas son énoncé, comme si cétait un « autre je » qui demandait rendez-vous. On peut alors penser que, dans cet énoncé, le locuteur désigne laccomplissement dun procès attesté indéfini en référence à une situation de non-coïncidence avec la situation dénoncé, la non-coïncidence touchant le paramètre je de la situation dénoncé.
Dans lénoncé (93), Il était joli, mon bébé, ce qui fait sens, c'est un cumul de deux distorsions par rapport à la situation désignée (la mère s'adresse à son bébé). Le locuteur choisit la non-personne pour désigner son interlocuteur, il au lieu de tu et l'imparfait au lieu du présent. Dans ce cas, ce qui est nié, cest la relation d'interlocution. Il s'agit pour l'adulte de prendre des distances avec son propre "dit" qu'il juge déplacé, et qu'il n'assume pas. On peut postuler que cest à nouveau le paramètre je qui assume le trait de « non-coïncidence avec la situation dénoncé ». Le locuteur réfère le procès à une situation dénoncé où cest un « autre je » qui parle, un je qui nest pas partie prenante de la relation dinterlocution. Cette référence à un je autre que celui qui est partie prenante de la situation dénoncé est relayée par le recours à la non-personne qui signifie une négation du statut d'interlocuteur pour le bébé. Le locuteur nassume donc ni son statut de locuteur, ni le statut dinterlocuteur de son bébé. Les raisons pour lesquelles il opère ainsi relève plutôt de la psychologie que de la linguistique mais on peut penser que lune dentre elles peut être la peur du ridicule.
Dans lénoncé (94), tu étais le papa et j'étais la maman., lenfant signale à son partenaire de jeu que les procès désignés ne réfèrent pas à une situation coïncidente à la situation dénoncé. Il nest pas dupe du jeu quil instaure et le signale. Nous postulons que cest le monde dans lequel sinsère la situation dénoncé auquel la situation désignée nest pas coïncidente. Lenfant réfère son énoncé à un « monde autre », un monde fictif. Il réfute lunivers de lénoncé et crée un autre univers.
On ninscrit pas laccomplissement du procès dans la situation dénoncé de référence. Le locuteur fait référence à une situation qui ici est en contradiction avec ce qui est énoncé.
Les deux autres énoncés peuvent bénéficier de la même explication. Lénoncé (95) parce que sa mise en relation avec demain contredit la combinaison des traits sémantiques « non-coïncident avec le moment de lénoncé » et « avéré » (combinaison dont nous pensons quelle renvoie à la notion dantériorité par rapport à la situation dénoncé). Cet énoncé, prononcé dans un contexte de dégustation dun melon très mûr, peut-être paraphrasé par :
(95bis) Demain, il aurait été trop mûr, si on ne lavait pas mangé aujourdhui.
On peut postuler que le locuteur désigne un procès quil réfère à une situation autre que celle de lénoncé, une situation fictive, dans la mesure où demain, il ny aura plus de melon.
Lénoncé (96), sil est prononcé dans un contexte où le pas de plus a été évité, peut être paraphrasé par :
(96bis) Un pas de plus et elle serait tombée.
Il ne désigne alors pas un procès qui se serait produit antérieurement au moment de lénoncé mais un procès qui prend sa référence dans une situation autre que la situation dénoncé, une situation fictive où elle aurait fait un pas de trop.
Selon le contexte, cest lun ou lautre ou tous les paramètres de la situation dénoncé qui sont niés.
Il reste que le passé simple, qui présente, lui aussi, un trait sémantique « non-coïncident à la situation dénoncé » et pourrait donc voir varier lui aussi les paramètres niés de la situation dénoncé, ne présente pas demplois dits « modaux » comme le conditionnel. Ce serait donc la valeur « non-défini » qui autoriserait cette variation de la référence. Nous postulons que le trait sémantique « défini » qui opère, nous lavons vu, un découpage du réel, est attaché à la notion de temporalité dans la mesure où lobjet quil découpe est un objet intrinsèquement temporel. Inversement, limparfait ne découpe pas dobjet temporel, il désigne un continuum, ce qui laisserait plus de latitude dans la référence.
2-2-2-3 Un emploi célinien de limparfait et du passé simple ?
Si nous avons choisi de faire appel à une uvre littéraire, cest, dune part, parce quil nous semble que lanalyse des effets de sens nécessite un contexte suffisamment riche et dautre part parce quelle offre un ensemble homogène qui permet une véritable observation.
Faire se rejoindre une analyse théorique linguistique et une analyse linguistique permet de comprendre comment un écrivain sest emparé dun possible offert par la langage pour en faire « sa langue » dans le but, souvent obsédant, de parvenir à désigner ce quil construit comme son « réel ». Si lanalyse linguistique peut servir lanalyse stylistique daucuns diraient dailleurs quil nexiste pas danalyse stylistique sans analyse linguistique- nous pensons que lanalyse stylistique peut aussi servir lanalyse linguistique dans la mesure où lécrivain poursuit un but quon pourrait qualifier de parallèle à celui du linguiste et où sa sensibilité exacerbée parfois à la langue, le conduit à exploiter de façon originale et de ce fait lumineuse, les possibilités offertes par la langue.
Cest dans ce cadre que nous nous interrogerons, à titre dexemple, sur lusage que fait Céline du trait sémantique « ± défini » et des effets de sens qui en découlent dans son roman Voyage au bout de la nuit. Dans la mesure où nos observations ne prennent de sens que dans lanalyse textuelle du roman, nous devrons faire appel à des extraits conséquents pour en examiner la cohérence.
2-2-2-3-1 Le brouillage du récit par limparfait
Voyage au bout de la nuit présente, certes, de nombreux énoncés où un verbe à limparfait et un verbe au passé simple sorganise autour du schéma dincidence. Pourtant, on peut postuler que la relation quétablit Céline entre passé simple et imparfait dans Voyage au bout de la nuit est un élément de loriginalité de son style à part entière.
On peut, en effet, trouver de nombreux exemples où la succession passé simple imparfait échappe, au niveau phrastique, au schéma dincidence, échappe surtout, au niveau textuel, à la classique mise en relief entre un arrière-plan et un premier plan.
Nous donnerons seulement deux exemples, au niveau phrastique, qui témoignent de cet usage original de la langue :
(97) « Au moment de payer elles séparpillaient encore en politesses et puis prétendirent soffrir mutuellement des petits feuilletés à croquer « tout de suite ».
Lajout de ladverbe puis interdit de considérer que le procès prétendre sinsère au sein du procès séparpiller alors que prétendre soffrir mutuellement des petits feuilletés pourrait être compris comme une des politesses désignées précédemment. Il sagit, ici, de montrer une « reprise des politesses » au moment où lon pourrait penser que les clientes en ont fini avec leur parole « tourbillonnante », fondamentalement distrayante. Effectivement, le dialogue repart sur les ennuis digestifs
De même, dans lénoncé suivant, cest bien le fait de perdre moins qui déclenche le désir de ne plus perdre du tout. Il y a donc bien succession du procès dit à limparfait et du procès dit au passé simple :
(98) « Comme il jouait mieux, grâce à ses lunettes, il perdait moins quavant et il se mit en tête de ne plus perdre du tout. »
Ces exemples de Voyage au bout de la nuit le montrent : linsertion du procès dit au passé simple au sein du procès dit à limparfait nest pas automatique. Limparfait présentant une situation non-définie autorise toutes sortes de délimitations du procès et il semble que Céline cherche en en usant, à casser le schéma classique de la phrase narrative.
Cela est vrai aussi du niveau textuel où les imparfaits, bien loin de « faire de la figuration » pour un récit au passé simple en prennent le relais et le supplantent systématiquement :
On peut en donner divers exemples significatifs. Lun, très net, correspond à un épisode où Bardamu est en train déchanger sur la situation à Bikomimbo avec Robinson, son prédécesseur dans lenfer africain :
« Il mapprit encore ce ténébreux comment on projetait dun seul coup bref au loin, pour se distraire, de la pointe du pied preste, les lourdes chenilles caparaçonnées qui montaient sans cesse nouvelles, frémissantes et baveuses à lassaut de notre case forestière. Si on les écrase, maladroit, gare à soi ! On en est puni par huit jours consécutifs de puanteur extrême, qui se dégage lentement de leur bouillie inoubliable. Il avait lu dans les recueils que ces lourdes horreurs représentaient en fait de bêtes ce quil y avait de plus vieux au monde. Elles dataient, prétendaient-il, de la seconde période géologique ! « Quand nous viendrons nous autres daussi loin quelles mon ami que ne puerons-nous pas ? » Tel quel.
Cest alors que survient le coucher de soleil. Ce coucher de soleil grandiose est dramatisé de façon à en montrer le grotesque apparat dans la solitude africaine mais il est décrit surtout de façon itérative, cette présentation itérative conférant à la scène décrite un comique de répétition:
(99) Les crépuscules dans cet enfer africain se révélaient fameux. On ny coupait pas. Tragiques chaque fois comme dénormes assassinats du soleil. Un immense chiqué. Seulement cétait beaucoup dadmiration pour un seul homme. Le ciel pendant une heure paradait tout giclé dun bout à lautre décarlate en délire, et puis le vert éclatait au milieu des arbres et montait du sol en traînées tremblantes jusquaux premières étoiles. Après ça le gris reprenait tout lhorizon et puis le rouge encore, mais alors fatigué le rouge et pas pour longtemps. ça se terminait ainsi. Toutes les couleurs retombaient en lambeaux, avachies sur la forêt comme des oripeaux après la centième. Chaque jour sur les six heures exactement que ça se passait. »
Nous ne nous attarderons pas sur le mélange de tons mais sur le fait que cet événement est présenté comme se produisant chaque jour sur une période indéfinie correspondant à la période (encore tout à fait indéfinie puisquelle ne fait que débuter) où Bardamu en est spectateur mais pouvant tout aussi bien dépasser sa seule présence, spectacle vain de toute éternité. Si bien que le lecteur pense que le narrateur a fini de retranscrire le dialogue avec Robinson et quil est passé à un moment ultérieur de sa narration, à un récit de la situation de Bardamu, seul colon à Bikomimbo, la description itérative servant de passage entre les deux moments.
Pourtant, le récit reprend après une notation des bruits nocturnes de la forêt :
« On en finissait par ne plus sentendre entre nous dans la case. Il me fallait gueuler à mon tour par-dessus la table comme un chat-huant pour que le compagnon me comprît. Jétais servi, moi qui naimais pas la campagne.
Comment vous appelez-vous ? Nest-ce pas Robinson que vous venez de me dire ? lui demandai-je . »
Le coucher du soleil nest donc quun intermède dans le dialogue des personnages, mais cet intermède qui ne peut être que singulatif est traité de façon à en dilater la dimension et à linscrire dans une autre temporalité, celle-ci indéfinie. Il en résulte un effet de brouillage de la narration. Construite tout dabord du point de vue du personnage-narrateur, cest-à-dire avec les limites quimpose son savoir à chaque moment de lhistoire, la narration est souvent détournée par le point de vue du narrateur ultérieur qui peut généraliser chaque expérience, la replacer dans un cadre plus large, sans pour autant, et cest à souligner, en donner les limites - on ne sait combien de fois Bardamu « admirera » le coucher du soleil. De la même façon, chacune des situations dans laquelle il se trouve sallonge, se dilue dans une temporalité indéterminée.
Le récit est, en effet, sans cesse, replacé dans un cadre plus large, passé simple et passé composé étant rapidement supplantés par un imparfait qui peut prendre une valeur itérative. Les passages narratifs sont, de ce fait, très souvent transformés en passages itératifs et cet imparfait itératif nétant, on la déjà vu, pas autre chose que la désignation dune série indéfinie de procès, leur temporalité se noie dans une autre, plus vaste, aux contours indéfinis et dont le centre de conscience est souvent lui-même indéfini.
On peut citer aussi cette visite de Bardamu au tenancier dun comptoir de Bambola-Bragamance, visite dont le récit débute au passé simple mais dont les informations données à limparfait dépassent bien vite le récit singulatif de la rencontre :
(100) « Ces jeunes négriers mes amis memmenèrent rendre visite à un autre collègue de la Compagnie Pordurière qui vaut dêtre évoqué spécialement dans ce récit. Tenancier dun comptoir au centre du quartier des Européens, moisi de fatigue, croulant, huileux, il redoutait toute lumière à cause de ses yeux, que deux ans de cuisson ininterrompue sous les tôles ondulées avaient rendus atrocement secs. Il mettait, disait-il, une bonne demi-heure le matin à les ouvrir et encore une autre demi-heure avant dy voir un peu clair avec. Tout rayon lumineux le blessait. Une énorme taupe bien galeuse.
étouffer et souffrir était devenu pour lui comme un état second, voler aussi. On laurait bien désemparé si on lavait rendu bien portant et scrupuleux dun seul coup. Sa haine pour lAgent général Directeur me semble encore aujourdhui, à tant de distance, une des passions les plus vivaces quil mait été donné dobserver jamais chez un homme. Une rage étonnante le secouait à son égard, à travers sa douleur et à la moindre occasion il enrageait énormément tout en se grattant dailleurs de haut en bas. [
]
Cette maladie qui lui rongeait la peau, il lui donnait un nom local, « Corocoro ». « Cette vache de « Corocoro » ! Quand je pense que ce saligaud de Directeur ne la pas encore attrapé le « Corocoro », semportait-il. ça me fait bien mal au ventre encore davantage !
Il prendra pas sur lui le Corocoro !
Il est bien trop pourri. Cest pas un homme ce maquereau-là, cest une infection !
Cest une vraie merde !
»
Du coup toute lassemblée éclatait de rigolade et les nègres-clients aussi par émulation. Il nous épouvantait un peu ce copain. Il avait un ami quand même cétait ce petit être poussif et grissonnant qui conduisait un camion pour la Compagnie Pordurière. Il nous apportait toujours de la glace lui, volée évidemment par-ci, par-là, sur les bateaux à quai. »
« Pendant ce temps, nous buvions indéfiniment entre hommes sous linutile mais abrutissant ventilateur, qui se perdait à moudre depuis les Canaries le coton tiède atmosphérique. »
Lhistoire de Bardamu est replacée dans un cadre plus large dont on ne saisit pas les limites du fait de limparfait. Ce procédé décriture contribue fortement au sentiment derrance, dun personnage noyé dans un monde absurde qui le dépasse.
Ce sentiment est particulièrement net dans la description de la guerre où labsence de limites quinduit limparfait, généralement itératif, noie le personnage, mais aussi le lecteur, dans le flou de lerrance dune nuit sans repère :
(101) « Tout de même on se mettait en route. Le boulot cétait pour les faire passer au trot les canards. Ils avaient peur de bouger à cause des plaies dabord et puis ils avaient peur de nous et de la nuit aussi, ils avaient peur de tout, quoi ! Nous aussi ! Dix fois on sen retournait pour lui redemander la route au commandant. Dix fois quil nous traitait de fainéants et de tire-au-cul dégueulasses. A coups déperon enfin on franchissait le dernier poste de garde, on leur passait le mot aux plantons et puis on plongeait dun coup dans la sale aventure, dans les ténèbres de ces pays à personne.
A force de déambuler dun bord de lombre à lautre, on finissait par sy reconnaître un petit peu, quon croyait du moins
Dès quun nuage semblait plus clair quun autre on se disait quon avait vu quelque chose
Mais devant soi, il ny avait de sûr que lécho allant et venant, lécho du bruit qui vous étouffe, énorme, tellement quon nen veut pas. Ils avaient lair de trotter jusquau ciel, dappeler tout ce quil y avait sur la terre de chevaux, pour nous faire massacrer. On aurait pu faire ça dailleurs dune seule main, avec une carabine, il suffisait de lappuyer en nous attendant, le long dun arbre. Je me disais toujours que la première lumière quon verrait ce serait celle du coup de fusil de la fin. »
Grâce à limparfait, le texte mime ce quil décrit : une scène absurde dans sa répétition sans fin. Cest ce qui rend la détresse des soldats noyés dans labsurdité de la guerre presque palpable. Le narrateur ultérieur qui devrait pouvoir poser les limites des procès semble se dissoudre lui-même dans ces passages, abandonnant le personnage-narrateur à son sort ou incapable, lui aussi de sabstraire de ce point de vue.
Le procédé qui consiste à faire basculer une scène singulative dans litératif grâce au passage du passé simple ou du présent à limparfait - est particulièrement flagrant dans les passages de dialogues rapportés au style direct, cest-à-dire, en théorie du moins, avec lexactitude de la mimesis, en rapportant fidèlement chaque mot dit. Or, il est peu probable que ces dialogues aient été répétés plusieurs fois, au mot près, et le procédé de Céline qui consiste à faire dune scène singulative une scène itérative peut sembler alors abusif. Pourtant, ce cas de figure se répétant souvent dans le roman, le procédé est certainement délibérément abusif. Il participe à perdre le héros-narrateur dans une temporalité quil ne peut maîtriser, comme les autres passages du narratif à litératif, mais peut aussi servir à dessiner le portrait de marionnettes-perroquets qui récitent toujours les mêmes rengaines. Il est notable, en effet, que les paroles visées par la répétition mécanique soient celles, particulièrement absurdes de personnages « hauts-placés », qui occupent une position supérieure à Bardamu, mais dont la position est définie comme celle de fantoches. On peut citer, par exemple, les paroles du commandant Pinçon qui renvoie inexorablement Bardamu à lerrance dans la nuit :
(102) « Il nous réunissait chaque soir les hommes de la liaison et puis alors il nous engueulait un bon coup pour nous remettre dans la ligne et pour essayer de réveiller nos ardeurs. Il nous envoyait à tous les diables, nous qui avions traîné toute la journée derrière le général. Pied à terre ! A cheval ! Repied à terre ! Comme ça à lui porter ses ordres, de-ci, de-là. On aurait aussi bien fait de nous noyer quand cétait fini. Ceut été plus pratique pour tout le monde.
Allez-vous-en tous ! Allez rejoindre vos régiments ! Et vivement ! quil gueulait.
Où quil est le régiment, mon commandant ? quon demandait nous
Il est à Barbagny.
Où que cest Barbagny ?
Cest par là !
Par là, où il montrait, il ny avait rien que la nuit, comme partout dailleurs, une nuit énorme qui bouffait la route à deux pas de nous et même quil nen sortait du noir quun petit bout de route grand comme la langue.
Allez donc le chercher son Barbagny dans la fin dun monde ! Il aurait fallu quon sacrifiât pour le retrouver son Barbagny au moins un escadron tout entier ! Et encore un escadron de braves ! Et moi qui nétais point brave et qui ne voyais pas du tout pourquoi je laurais été brave, javais évidemment encore moins envie que personne de retrouver son Barbagny, dont il nous parlait dailleurs lui-même absolument au hasard. »
Même si cette scène se produit chaque soir, il sagit bien dune scène singulative dans les détails que nous retrace le narrateur. Du coup, le commandant Pinçon semble répéter, tous les soirs, les mêmes propos auxquels répondent tous les soirs les mêmes questions. Le dialogue vire à labsurde dans sa répétition à limage de lordre du commandant délivré lui-même absolument au hasard.
Cest le cas aussi de cette scène où Bardamu et Voireuse se rendent chez leur ancien employeur, le bijoutier Puta, pour tâcher de lui soutirer un peu dargent. Le dialogue est dabord introduit par un verbe de parole au passé simple pour, rapidement, laisser place à un imparfait :
« - Tiens ! Ah ! vous voilà vous autres ! sétonna un peu de nous voir M. Puta. Je suis bien content quand même ! Entrez ! Vous, Voireuse, vous avez bonne mine ! ça va bien ! Mais vous, Bardamu, vous avez lair malade, mon garçon ! Enfin ! vous êtes jeune ! ça reviendra ! Vous en avez de la veine, malgré tout, vous autres ! on peut dire ce que lon voudra, vous vivez des heures magnifiques, hein ? là-haut ? Et à lair ! Cest de lHistoire ça mes amis, ou je my connais pas ! Et quelle Histoire !
On ne répondait rien à M. Puta, on le laissait dire tout ce quil voulait avant de le taper
Alors il continuait :
- Ah ! cest dur, jen conviens, les tranchées !
Cest vrai ! Mais cest joliment dur ici aussi, vous savez !
Vous avez été blessés, hein, vous autres ? Moi, je suis éreinté ! Jen ai fait du service de nuit en ville depuis deux ans ! Vous vous rendez compte ? Pensez donc ! Absolument éreinté ! Crevé ! Ah ! les rues de Paris pendant la nuit ! Sans lumière, mes petits amis
Y conduire une auto et souvent avec le ministre dedans ! Et en vitesse encore ! Vous pouvez pas vous imaginer !
Cest à se tuer dix fois par nuit !
- Oui, ponctua madame Puta, et quelquefois il conduit la femme du ministre aussi. »
Dans ces passages, limparfait contribue à décrédibiliser la parole en la présentant comme une logorrhée sans fin. Cest encore le même procédé qui disqualifie les propos du Directeur de la Compagnie Pordurière du Petit Congo :
(103) « - Nest-ce pas, quon se dirait toujours un dimanche ici ?
reprit en plaisantant le Directeur. Cest gai ! Cest clair ! Les femelles toujours à poil. Vous remarquez ? Et des belles femelles, hein ? ça fait drôle quand on arrive de Paris, nest-ce pas ? Et nous autres donc ! Toujours en coutil blanc ! Comme aux bains de mer voyez-vous ! On nest pas beau comme ça ? Des communiants, quoi ! Cest toujours la fête ici, je vous le dis ! Un vrai Quinze Août ! Et cest comme ça jusquau Sahara ! Vous pensez !
Et puis il sarrêtait de parler, il soupirait, grognait, répétait encore deux, trois fois « Merde ! », sépongeait et reprenait la conversation.
- Là, où vous allez pour la Compagnie, cest la pleine forêt, cest humide
»
Dans ce dernier passage, le lecteur hésite à interpréter les imparfaits comme des imparfaits itératifs ou narratifs cest encore deux, trois fois qui force linterprétation. Ce brouillage entre un imparfait narratif et un imparfait itératif apparaît très souvent. Ainsi, la dernière rencontre de Bardamu avec la tante de Bébert commence par un dialogue classique ici au présent à la place du passé simple- mais rapidement il laisse place à la description dun monologue à limparfait :
(104) « Elle se lève alors et se met en trébuchant par-ci, par-là, à nous faire un grog, et tout de suite à parler de tout en même temps, et des Henrouille et de Bébert forcément.
Pour lempêcher den parler de Bébert, il y avait rien à faire, et pourtant cela lui faisait du chagrin et du mal et elle le savait aussi. Je lécoutais sans jamais plus linterrompre, jétais comme engourdi. Elle essayait de me faire rappeler de toutes les gentilles qualités quil avait eues Bébert et quelle en faisait comme un étalage avec bien de la peine parce quil ne fallait rien oublier de ses qualités à Bébert et quelle recommençait, et puis quand tout y était bien et quelle mavait bien raconté toutes les circonstances de son élevage au biberon, elle retrouvait encore une petite qualité à Bébert quil fallait tout de même mettre à côté des autres, alors elle reprenait toute lhistoire par le commencement et cependant elle en oubliait quand même et elle était forcée finalement de pleurnicher un peu, dimpuissance. Elle ségarait de fatigue. Elle sendormait à coups de petits sanglots. Déjà elle navait plus la force de reprendre longtemps à lombre le petit souvenir du petit Bébert quelle avait bien aimé. Le néant était toujours près delle et sur elle-même un peu déjà. Un rien de grog et de fatigue et ça y était, elle sendormait en ronflant comme un petit avion lointain que les nuages emportent. Il ny avait plus personne à elle sur terre. »
Certains imparfaits (avait, écoutais
) désignent la répétition dun discours donné pour un leitmotiv, dautres sont des imparfaits narratifs qui font progresser le récit. Cest le cas de elle sendormait à la fin du texte. A certains moments, le lecteur ne sait plus comment ordonner les procès les uns par rapport aux autres. Par exemple, elle ségarait de fatigue succède-t-il au discours précédent comme pourrait le faire croire le terme finalement qui, le précédant de peu semble introduire une conclusion et donc une succession dans les procès ou désigne-t-il lensemble de la scène dans une relation de simultanéité ? Limparfait, dans son absence de définition, autorise tous les cas de figure, nous lavons vu et Céline en use pour noyer son lecteur dans une scène décrivant elle-même un enlisement de la parole. Il sagit dune forme de mimesis. A terme, le lecteur a le sentiment dêtre étourdi par les leitmotivs décrits pourtant en peu de mots.
Le procédé est le même dans le texte de la torture publicitaire que nous avons utilisé plus haut. Ce texte pose lui aussi des difficultés danalyse de la temporalité.
Sil est certains termes de comparaison encore plus fort, davantage, toujours plus, pas encore assez établissent un minimum de progression du récit, pour autant, il est difficile de délimiter des situations différentes, des étapes dans le récit, du fait de lemploi de limparfait. Ainsi dans ce passage :
(105) « Je vois du monde tout le long de la rue Lepic, encore plus que dhabitude. Je monte donc aussi pour voir. Au coin dun boucher cétait la foule. Fallait sécraser pour voir ce qui se passait, en cercle. Un cochon cétait, un gros, un énorme. Il geignait aussi lui, au milieu du cercle, comme un homme quon dérange, mais alors énormément. Et puis, on arrêtait pas de lui faire des misères. Les gens lui tortillaient les oreilles histoire de lentendre crier. Il se tordait et se retournait les pattes le cochon à force de vouloir senfuir à tirer sur sa corde, dautres lasticotaient et il hurlait encore plus fort à cause de la douleur. Et on riait davantage.
Il ne savait pas comment se cacher le gros cochon dans le si peu de paille quon lui avait laissée et qui senvolait quand il grognait et soufflait dedans. Il ne savait pas comment échapper aux hommes. Il le comprenait. Il urinait en même temps autant quil pouvait, mais ça ne servait à rien non plus. Grogner, hurler non plus. Rien à faire. On rigolait. Le charcutier, par-derrière sa boutique, échangeait des signes et des plaisanteries avec les clients et faisait des gestes avec un grand couteau. »
Si le procès asticotaient succède à tortillaient, il est difficile de savoir si les efforts du cochon pour se cacher ou les signes de connivence du charcutier succèdent aux tourments décrits ou lui sont concomitants. Du fait de limparfait, chaque situation est indéfinie par rapport aux autres, lensemble formant un tableau global de la torture infligée au cochon, scène qui renvoie symboliquement au sadisme déjà décrit de lenfant maltraitée. Cette incapacité à situer les événements les uns par rapport aux autres correspond à un brouillage de la narration, brouillage qui se retrouve sur le point du vue du narrateur, on ne sait où le situer idéologiquement parlant, voyeur comme les autres ou jugeant que la simple exposition des faits suffit à les rendre scandaleux.
Chez Céline, le traitement de litérativité de limparfait en concurrence avec ses emplois narratifs est remarquable. On ne sait plus sil y a ou non répétition des procès, tous sont fondus dans un imparfait qui gomme toutes les frontières.
Un peu plus loin, lenlisement du passé simple dans un imparfait itératif se reproduit encore :
(106) « Jeffectuai une dernière fois le tour de mes petits camarades de la Pordurière pour tenter de me renseigner sur le compte de cet employé infidèle, celui que je devais aller, coûte que coûte, selon les ordres, remplacer dans sa forêt. Vains bavardages.
Le café Faidherbe, au bout de lavenue Fachoda bruissant vers lheure du crépuscule de cent médisances, ragots et calomnies, ne mapportait rien non plus de substantiel. Des impressions seulement. On en fracassait des pleines poubelles dimpressions dans cette pénombre incrustée de lampions multicolores.[
]
Toutes les automobiles de Fort-Gono, une dizaine au total, passaient et repassaient à ce moment devant la terrasse. Elles ne semblaient jamais aller bien loin les automobiles. [
]
Ils passaient ainsi pendant des semaines et des années les uns devant les autres, les colons, jusquau moment où ils ne se regardaient même plus [
]
Il ne suffit pas davoir un képi pour commander, il faut encore avoir des troupes. Sous le climat de Fort-Gono, les cadres européens fondaient pire que du beurre. [
] »
Dans lhébétude des longues siestes paludéennes il fait si chaud que les mouches aussi se reposent. [
]
Tout lugubre quétait lhôpital, cétait cependant lendroit de la colonie, le seul où lon pouvait se sentir un peu à labri des hommes du dehors, des chefs.[
]
Je menquérais des conditions dentrée, des habitudes des médecins, de leurs manies. [
]
Je mapprêtais à vaincre mille difficultés, car ni les Directeurs de la Compagnie Pordurière, ni les chefs de bataillon ne se fatiguent aisément de traquer leurs proies maigres, transies à beloter entre les lits pisseux.
Ils me trouveraient résolu à pourrir de tout ce quil fallait. [
]
Ainsi sen vont les hommes qui décidément ont bien du mal à faire tout ce quon exige deux : le papillon pendant la jeunesse et lasticot pour en finir.
Jessayais encore dobtenir, par-ci par-là, quelques renseignements pour me faire une idée. Ce que mavait dépeint de Bikomimbo le Directeur me semblait tout de même incroyable. En somme, il sagissait dune factorie dessai, dune tentative de pénétration loin de la côte, à dix jours au moins, isolée au milieu des indigènes, de leur forêt, quon me représentait, elle, comme une immense réserve pullulante de bêtes et de maladies.
Je me demandais sils nétaient pas tout simplement jaloux de mon sort, les autres, ces petits copains de la Pordurière qui passaient par des alternatives danéantissement et dagressivité. [
]
Lapéritif nous durait trois bonnes heures. [
]
Efin, le petit cargo sur lequel je devais longer la côte, jusquà proximité de mon poste, mouilla en vue de Fort-Gono »
Ce qui pourrait être un compte-rendu de toutes les étapes du « dernier tour des camarades de la Pordurière » - mais pour cela, il eût fallu des passés simples- et de ce fait, embrayer rapidement sur le départ de Bardamu, senlise dans un imparfait entrecoupé de considérations au présent sur lAfrique- imparfait qui, ne dessinant pas les contours des procès, peut être interprété parfois aussi bien comme un imparfait narratif que comme un imparfait itératif. Le lecteur senlise également sur plusieurs pages, comme si le narrateur le conduisait à participer à la « déliquescence de lenfer africain ». Et quand le départ de Bardamu intervient dans lhistoire, il a presque oublié quil devait intervenir. Lapparition brutale dun passé simple comme mouilla en fin de chapitre, venant mettre fin à lerrance du lecteur comme à celle du personnage, est un procédé récurrent de la structuration du récit de Voyage au bout de la nuit. Le passé simple met fin à un continuum exprimé par limparfait de façon à pouvoir effectivement changer de sujet, de façon à constituer des épisodes du récit.
Au total, limparfait va de pair, dans le récit de Céline, avec un sentiment de dissolution généralisée auquel participe personnage et lecteur. Leffet est double ou triple : le narrateur nous montre un personnage englué dans des situations qui nen finissent pas, ce qui est le propre de Bardamu, personnage candide noyé dans des situations qui le dépassent, errant dans la guerre, à larrière, en Afrique, dans les rues de New York ou de Rancy. Mais cet effet de sens qui correspond si bien aux aventures de Bardamu ne se limite pas à le qualifier, il atteint aussi le narrateur ultérieur qui est montré comme incapable de préciser la temporalité des aventures de Bardamu, comme une conscience se noyant avec son personnage, incapable de vérité en somme, nen sachant pas plus que son personnage si ce nest généraliser.
« J'ai beaucoup reconstruit : c'est collaborer avec le temps sous son aspect de passé, en saisir ou en modifier l'esprit, lui servir de relais vers un plus long avenir » M. Yourcenar, Mémoires dHadrien.
2-2-3 Comment futur et conditionnel combinent-ils le réinvestissement sémantique de lopposition ±R avec celui de lopposition ai/a ?
A ce stade de notre étude, nous avons défini déjà tous les traits sémantiques qui, se combinant, permettent de rendre compte du futur et du conditionnel. Le tableau morphologique auquel la première partie nous a permis daboutir :
PrésentImparfaitPassé simpleConditionnelFutur +R/-RØ- -++ai/aØaiaaia
Pouvant se réécrire selon les traits sémantiques réinvestissant les oppositions :
PrésentImparfaitPassé simpleConditionnelFuturCoïncidentNon-coïncidentNon-coïncidentNon-coïncidentNon-coïncident +R/-RNeutreAvéréAvéréPotentielPotentielai/aNeutreNon-définiDéfiniNon-définiDéfini
Ou si lon préfère : procès « ± coïncident » « ± potentiel » « ± défini »
Il sagit donc den faire le bilan pour le futur et le conditionnel et den rechercher les effets de sens.
« avant même que Blum le lui ait demandé il songea Quelle heure peut-il bien être, et avant même d'avoir commencé à lui répondre Qu'est-ce que ça peut faire, il se l'était déjà répondu, pensant que de toute façon le temps ne pouvait plus leur être maintenant d'aucun usage, puisqu'ils ne se sortiraient pas de ce wagon avant qu'il ait parcouru une certaine distance, ce qui n'était pas une question de temps pour ceux qui réglaient sa marche, mais dorganisation ferroviaire» (C. Simon, La route des Flandres)
2-2-3-1 Analyse du futur et du conditionnel
Comme le passé simple et limparfait, le futur et le conditionnel sopposent au présent par le trait de non-coïncidence avec la situation dénoncé. En général, les procès dits par des futurs ou des conditionnels ne se déroulent pas au moment de lénoncé. Leffet de sens « ultérieur au moment de lénoncé » du futur, dont témoigne le fait quil se combine de préférence avec des repères temporels comme demain ou lannée prochaine et quil ne peut être mis en relation avec hier, est le fruit de la combinaison des trois traits sémantiques répertoriés : non-coïncidence avec la situation dénoncé, potentiel et défini. Un procès possible et non-coïncident avec le moment de lénoncé est situé ultérieurement à la situation dénoncé sil est posé comme défini cest-à-dire certain, nous y reviendrons. Par contre, le conditionnel peut désigner autre chose quun ultérieur par rapport au moment de lénoncé. En effet, un procès non-coïncident par rapport à la situation dénoncé, potentiel mais posé comme indéfini- donc incertain- peut renvoyer à une situation autre que celle de lénoncé, un « autre monde » plutôt quun « monde ultérieur ». Lopposition à la situation de lénoncé ne se fait pas alors sur le plan temporel, ne convoquant que le paramètre maintenant de la situation dénoncé mais peut convoquer tous les autres paramètres.
Futur et conditionnel se définissent aussi, par opposition avec limparfait et le passé simple, par le fait que tous deux présentent un morphème +R, cest-à-dire que les procès que désignent les verbes au futur et au conditionnel sont des procès potentiels seulement possibles et non avérés. Il faut remarquer que si futur et conditionnel partagent avec linfinitif, le même trait sémantique, linfinitif ne permet pas détablir une référence à une situation dénoncé alors que futur et conditionnel désignent un procès potentiel par référence à une situation dénoncé.
Ainsi, lénoncé tu partiras désigne un actant en relation avec le locuteur, et un moment du procès en relation avec la situation dénoncé. Alors, que lénoncé minimaliste mais ô combien évocateur Partir ! laisse libre ces deux paramètres. Le procès à linfinitif est potentiel : son actant et son moment participent à cette potentialité, ce qui nest pas le cas pour le futur et le conditionnel.
Enfin, futur et conditionnel se définissent aussi par opposition lun par rapport à lautre et partagent avec limparfait et le passé simple le trait sémantique les opposant, le ± défini. Ainsi, le futur désigne un procès potentiel défini alors que le conditionnel désigne un procès potentiel indéfini.
Que signifie le trait sémantique « défini » ? Il signifie que le procès est identifié et, si lon se réfère à lanalogie possible avec le trait « défini » des déterminants, lidentification va de paire avec lunicité du procès : il ny a quun seul procès qui corresponde à la « définition ».
Le futur est donc le lieu dun certain paradoxe. Dire un futur, cest dire un procès potentiel, cest-à-dire seulement possible. Mais, cest dire, en même temps que ce procès est défini, identifié, unique, quil ne peut en avoir dautre(s) possible(s) doù leffet de sens catégorique produit par le futur. Dire un futur, cest faire coïncider léventuel et la certitude. En ce sens, nous sommes tous plusieurs fois par jour, des « diseurs de bonne aventure ».
Inversement, dire un conditionnel, cest dire un procès potentiel non-défini, non-identifié. Le procès désigné nest pas le seul possible mais « un » parmi dautres doù lincertitude propre au conditionnel.
La différence dinterprétation du trait « ± défini » dans le cadre de lanalyse du futur et du conditionnel par rapport à lanalyse de limparfait et du passé simple est à mettre au compte de la combinaison de ce trait avec celui que nous avons défini par lopposition avéré / potentiel. En effet, définir un procès avéré, cest découper une unité dans le réel, identifier un élément du réel, alors que définir un procès possible, lidentifier, cest désigner lunicité de ce procès possible. De même, dire quun procès avéré est non-défini par le biais de limparfait, cest le désigner comme un continuum de temps passé, alors que désigner un procès possible non-défini, cest désigner un procès parmi dautres possibles.
On comprend alors mieux que lanalyse sémantique de Guillaume, telle que la transcrit, ici, Leeman-Bouix note une réduction de la part dincertitude du futur :
« On pourrait donc marquer le point commun et la différence entre les deux temps en parlant de futur catégorique (pour ce que la grammaire appelle traditionnellement le futur) et de futur hypothétique (pour ce que la grammaire appelle traditionnellement le conditionnel). [
] Le futur catégorique réduit presque complètement la part dincertitude liée à tout projet davenir, du fait quil peut se prévaloir dune réalité présente ; en revanche, le futur hypothétique comporte le maximum dincertitude, du fait quil ne sappuie sur aucune réalité présente mais sur un passé qui séloigne et sur lequel on na plus aucun contrôle (ni aucune chance den avoir jamais un) : la possibilité de réalisation est rendue incertaine par le fait que le passé est du temps qui sen va et séloigne toujours davantage (tandis quau contraire le futur vient vers le présent). »
On peut dailleurs penser que cest le paradoxe du futur qui explique certaines divergences dans lanalyse de cette forme temporelle, selon que les linguistes privilégient le trait potentiel ou le trait défini du futur. Cest ce qui nous paraît pertinent, en tout cas, dans cette critique élaborée par Nef du terme d« hypothèse » dans la théorie de Guillaume :
« Lopposition catégorique/hypothétique nest donc pas pertinente pour le futur : le terme hypothétique ne peut être employé à ce propos que de manière impropre. Le futur est, comme lont souligné Damourette et Pichon, catégorique, même si la certitude subjective quil exprime naboutit que rarement à la certitude objective. »
Cest aussi ce paradoxe qui peut expliquer que le futur, en tant que tel, a rarement déquivalent dans les langues étrangères, comme le remarque Maingueneau :
« La linguistique générale enseigne un fait révélateur à ce sujet : si, en règle générale, les différentes langues possèdent un passé, il est en revanche très fréquent que le futur soit marqué par des combinaisons du type (Présent + adverbe de temps) ou (vouloir, devoir,
+ verbe à linfinitif) et non par des « temps » spécifiques. » Cette dissymétrie est significative : les faits révolus ne sauraient posséder le même statut pour un énonciateur que ceux à venir, lesquels nexistent en fait que comme le terme dune tension de lénonciateur à partir de son présent. Si le passé est par définition coupé du présent de lénonciateur, le futur nest supporté que par lui. Pour les événements passés, limportant cest de déterminer comment ils ont eu lieu,(problème daspect) alors que pour les faits futurs lessentiel est de savoir sils auront lieu ou non, de quelle manière lénonciateur les pose (problème de modalité). »
Alors que tu partiras et tu partirais désignent tous deux des procès possibles, dire tu partiras implique une assurance du locuteur à propos de laccomplissement du procès possible partir alors que dire tu partirais dénote lincertitude du locuteur quand à laccomplissement du procès partir. A quoi tiennent lassurance ou lincertitude du locuteur, nous postulons, pour notre part, que futur et conditionnel nen disent rien et que cest lanalyse du contexte quil soit verbal ou non, qui peut permettre de comprendre que lassurance du locuteur prend sa source dans son vouloir (et il sagit alors dune injonction), dans une information extérieure, dans lexpérience du monde qui a appris au locuteur que ses interlocuteurs finissent toujours par partir, dans
; de même, cest lanalyse du contexte qui permet de dire que lincertitude du locuteur provient dun doute sur la source de son information, ce doute pouvant porter aussi bien sur la fiabilité dun locuteur qui lui a communiqué linformation du départ que sur la fiabilité du mode de transmission du message ou même sur lexistence-même dune source ou dun message, mais le manque dassurance du locuteur peut aussi être lié au fait que laccomplissement du procès dépend de paramètres annexes qui ne sont pas fiables.
Tous les cas de figure sont envisageables -et à envisager- et aboutissent à autant deffets de sens du futur et du conditionnel. Nous nous proposons den répertorier certains à laide dun classement des énoncés issus de notre corpus. Notre démarche danalyse ne visera pas lexhaustivité mais pointera quelques types dénoncés reconnus comme problématiques. Nous envisagerons donc lanalyse dénoncés peu complexes, les énoncés hypothétiques en si, les énoncés pris en charge en discours indirect au futur et au conditionnel.
2-2-3-2 Analyse des effets de sens du futur et du conditionnel
2-2-3-2-1 Enoncés non complexes
Le ciel se reflète dans leau du lac,
Les poissons sont dans larbre.
Citation bouddhiste
2-2-3-2-1-1 Au futur :
Le futur, par son trait « défini », désigne un procès potentiel identifié cest-à-dire une affirmation catégorique de laccomplissement du procès possible, une assurance du locuteur quant à cet accomplissement. Selon le contexte, cette assurance peut être interprétée de façon différente et même à lintérieur dun même contexte comme nous allons le voir.
Par exemple, lénoncé :
(107) Ferdinand réussira.
peut être lobjet dune interrogation quant à lassurance du locuteur. Prend-elle sa source dans une foi sans limite dans les compétences de Ferdinand ou sagit-il plutôt dune incantation visant à faire réussir celui qui, en toute bonne foi, a fort peu de chances de réussir ? La foi, elle-même, est-elle superstition ou est-elle basée sur un savoir du locuteur, celui du haut niveau de compétence de Ferdinand ? On ne peut être sûr que de la représentation de la certitude que lénoncé véhicule et non des sources de cette certitude. Peu importe que le procès soit inéluctable ou très peu probable, ce qui compte, cest la représentation définie cest-à-dire catégorique- dun procès possible.
Cest ainsi quon peut comprendre que le futur semploie aussi bien pour dire un procès possible inéluctable :
(108) A minuit, la pendule sonnera douze coups.
Ou encore :
(109) « Les treuils ici, les palissades aux chantiers là-bas et loin dessus la route voici que reviennent de plus loin encore les hommes. Ils sinfiltrent dans le jour sale par petits paquets transis. Ils se mettent du jour plein la figure pour commencer en passant devant laurore. Ils vont plus loin. On ne voit bien deux que leurs figures pâles et simples ; le reste est encore à la nuit. Il faudra bien quils crèvent tous un jour aussi. Comment quils feront ? »
une vérité générale :
(110) A légard des voleurs on ne sera jamais assez prudent.
(111) « Une femme qui passe son temps à redouter les grossesses n'est qu'une espèce d'impotente et n'ira jamais bien loin dans la réussite. »
quun procès possible beaucoup plus improbable mais présenté sous lapparence de la certitude par le locuteur. Ce peut-être une promesse qui, comme chacun le sait, nengage que celui qui lécoute :
(112) « Jamais plus je ne serai méchante avec toi ! Je te le jure ! Je veux expier Léon ! Tout de suite ! Ne mempêche pas dexpier, dis ?
Je te rendrai ton bonheur ! Je te soignerai bien, va ! A partir daujourdhui ! Je serai bien patiente pour toujours avec toi ! Je serai si douce ! Tu verras Léon ! Je te comprendrai si bien que tu ne pourras plus te passer de moi ! »
On sait par exemple que lavalanche de promesses de Madelon, bien loin daboutir à leur réalisation conduira Madelon, dans son « amour » exacerbé, à assassiner Robinson à la fin du roman Voyage au bout de la nuit. Ce qui importe dans lemploi du futur, ce nest pas le degré de probabilité que le procès se réalise, cest la manière dont il est présenté comme inéluctable, bien que seulement possible, grâce au trait sémantique « défini ».
On peut dire certainement la même chose du futur de prédiction employé par les cartomanciennes ou les horoscopes :
(113) Dimanche, le carré de Vénus dans votre signe vous fera vivre de bons moments en famille.
les pronostics politiques :
(114) Au second tour, le score sera serré entre Jospin et Chirac.
ou encore la météo :
(115) Demain, il fera beau sur toute la façade Atlantique.
Limportant, cest dy croire ! Plus exactement, limportant nest pas la probabilité de réalisation du procès désignée qui peut varier de zéro à cent pour cent, mais cest là traiter du réel et non de sa représentation- limportant, cest la représentation de linéluctable que désigne la combinaison des traits « possible » et « défini », et sur le plan de lanalyse de linterlocution, la force argumentative dune telle représentation.
On peut classer parmi les futurs de prédiction certains énoncés moins flatteurs, visant plutôt à décourager linterlocuteur, mais le principe est le même. Ainsi, quand les compagnons de galère de Bardamu essaient de le dissuader de tenter laventure à New York :
(116) « Va ! quils mont dit. Va ! Mais on te prévient encore : Tas pas des bons goûts pour un pouilleux ! Cest ta fièvre qui te rend dingo ! Ten reviendras de ton Amérique et dans un état pire que nous ! Cest tes goûts qui te perdront ! Tu veux apprendre ? Ten sais déjà bien trop pour ta condition ! »
leurs jugements alternent avec des prédictions au futur : ten reviendras, tes goûts te perdront, ce qui donne pour effet de sens la certitude de la réalisation de ces procès. En effet, le futur désignant un procès potentiel défini, il ne laisse aucune place à la contestation.
Cest le cas aussi de cette prédiction, dailleurs immédiatement confirmée par le narrateur, de lobligeante concierge de Bardamu quand il sinstalle à son compte :
(117) « « Y gagnera pas son bifteck! a prédit tout de suite ma concierge. Il y en a déjà bien trop des médecins par ici ! » Et cétait exactement observé. »
Cest justement lassurance de la réalisation du procès possible que véhicule le trait « défini » du futur qui fait la portée satirique de lordre du Capitaine Ortogan dans cet énoncé :
(118) « - Et quand ils vous tireront dessus, eh bien tâchez de les repérer et venez me dire tout de suite où ils sont ! »
La cruauté du futur est involontaire. Il sagit de souligner la désinvolture des gradés à légard de la vie des soldats sous leurs ordres.
Sans doute, est-ce aussi le trait « défini » qui fait du futur une valeur sûre pour des sociétés comme la SNCF. Ainsi, cet énoncé diffusé dans le TER Rennes-Quimper :
(119) « Ce train est à destination de Quimper. Il desservira les gares de Redon, Vannes, Auray, Lorient, Quimperlé. »
Le futur est propre, en effet, par lassurance de la réalisation du procès possible quil véhicule, à rassurer les voyageurs craignant que leur gare ne soit oubliée - ce qui, pourtant, arrive, de temps en temps.
Lassurance véhiculée par le futur nest donc pas toujours ou seulement- expliquable par la fiabilité des informations que possède le locuteur : position des planètes, informations scientifiques du centre de la météorologie nationale, expérience du monde, planification des chemins de fer, statistiques économiques, mais elle est liée aussi à leffet que lon veut produire sur son interlocuteur. Que lon cherche à le séduire, à le rassurer, à le convaincre, à le menacer ou à lamener à agir, cette assurance affichée de la réalisation du procès possible que lon désigne est un argument de poids.
Cest ainsi que cette assurance peut être reliée non seulement à un savoir mais, parfois à un vouloir du locuteur dans des énoncés qui cherchent à établir un rapport de force avec linterlocuteur :
(120) Tu viendras à huit heures demain matin.
La certitude affichée par le locuteur ne laisse pas déchappatoire possible si ce nest la rébellion !
« On verra bien, eh navet ! »
Mais il sagit toujours de représentation de la certitude de la réalisation du procès. En soi, lénoncé ne contraint que linterlocuteur, qui pour des raisons annexes position sociale, timidité, sens de la hiérarchie- veut bien se laisser convaincre de sa venue au petit matin.
Cest ainsi que le futur est un substitut très employé de limpératif. On le trouve dans des prescriptions grammaticales :
(121) « Au pluriel, on tolérera indifféremment le genre masculin et le genre féminin. » (Liste annexée à larrêté du 26 février 1901)
culinaires :
(122) Puis, vous mettrez à feu doux jusquà ce que la sauce épaississe.
Cest le temps également des dix commandements bibliques comme le soulignent Riegel et al. :
(123) « Tu ne tueras point. »
dont on sait, par ailleurs, que la force incantatoire nest pas toujours suffisante.
Le « futur conjectural » est sensiblement différent, il porte non pas sur le procès lui-même mais sur la prise en charge du procès :
(124) « Pour qui a-t-on sonné la cloche des morts ? Ah mon Dieu ! Ce sera pour Mme Rousseau » (Proust)
(125) « Jai trouvé ce beau livre sur le bureau. Ce sera le cadeau dune admiratrice. »
Ces exemples sont généralement compris comme des énoncés désignant des procès coïncidents avec la situation dénoncé mais attendant une confirmation dans lavenir. Doù le sens de « supposition » qui est attribué à de tels énoncés. La syntaxe toujours identique de cet énoncé au futur [ce + sera + supposition] met en valeur que ce nest pas un procès lui-même qui est désigné mais sa prise en charge, sa confirmation. Et cette confirmation est, elle, dite de façon catégorique : Françoise est sûre que lon confirmera son dire. De même, la fanfaronnade est liée à lassurance liée à la confirmation du dire. Pour autant, il y a médiatisation par le biais de cette confirmation qui affaiblit la portée catégorique du futur.
« et elle (pouvant toujours se voir avec ce recul que donne l'éloignement dans le temps, c'est-à-dire libérée de la sujétion du présent, se regardant agir avec cette sorte de condescendance un peu méprisante, un peu agacée, un peu envieuse aussi, que nous éprouvons à notre propre égard lorsque nous nous voyons après coup, comme nous regarderions agir un enfant, un mineur, ignorant ce que nous savons, avons appris à la lumière de ce qui est arrivé ensuite, comme si de savoir nous conférait une supériorité, alors que tout ce que nous avons gagné, cest peut-être davoir un peu moins dillusions, dinnocence, de sorte que cela na pas été un gain mais une perte » (SIMON, LHerbe)
2-2-3-2-1-2 Au conditionnel :
Le conditionnel combinant les traits sémantiques « non-coïncident », « potentiel » et « non-défini » sert à représenter des procès possibles incertains non-coïncidents avec la situation de lénoncé. Cette absence de coïncidence avec la situation de lénoncé ne désigne pas forcément une absence de coïncidence avec le moment de lénoncé mais peut désigner une disjonction avec dautres paramètres de la situation dénoncé, cest-à-dire que le conditionnel ne désigne pas forcément un « futur » comme on la souvent dit. A preuve, le fait que certains énoncés au conditionnel, qui pourraient être compris tout aussi bien comme coïncidents avec la situation dénoncé que comme ultérieurs à la situation dénoncé, sont compris préférentiellement comme coïncidents à la situation dénoncé.
Si lon prend pour exemple cet énoncé :
(126)« Selon ces témoignages, le nombre des victimes se situerait entre cinq mille et sept mille personnes. »
On comprend que « le nombre de victimes se situe sans doute entre 5000 et 7000 personnes. » et non que « le nombre de victimes se situera sans doute entre 5000 et 7000 personnes » interprétation pourtant possible dans la mesure où lon peut considérer que le décompte ne sera achevé quaprès la situation dénoncé. De même, Vetters présente des paraphrases dénoncés au conditionnel réalisées par différents linguistes. Ainsi, Korzen et Nolke paraphrasent :
(127) « Selon lAFP le ministre accepterait de parler à la télévision.
par :
(127bis) Si on écoute lAFP, on apprend que le ministre accepte de parler à la télévision.
Pourquoi ces linguistes paraphrasent-ils systématiquement le conditionnel par un présent ? Nest-il pas possible dimaginer un procès qui se paraphraserait par un futur :
(127ter) Si on écoute lAFP, on apprend que le ministre acceptera de parler à la télévision.
Et encore, un énoncé comme :
(128) Il serait malade
est compris comme :
(128bis) Il est sans doute malade
alors quaucun élément contextuel nindique une coïncidence avec le moment de lénoncé. Inversement, ne faut-il pas une mise en relation du procès avec un élément contextuel indiquant lultériorité par rapport à la situation dénonciation pour que le procès désigne la non-coïncidence avec le moment de lénonciation, comme dans ces exemples :
(129) Le premier ministre arriverait à Rennes demain à dix heures.
(130) Les impôts baisseraient lannée prochaine ?
Dans ces conditions, les analyses qui considèrent que le conditionnel désigne lavenir et que sa valeur hypothétique est due à ce décalage dans lavenir achoppent sur les emplois du conditionnel qui désignent manifestement une coïncidence avec le moment de lénoncé ou alors elles sont amenées à trouver des solutions originales.
Cest ainsi que Gosselin met en parallèle futur et conditionnel qui désignent le moment de lénoncé. A propos de cet exemple :
(131) Au vu des premiers résultats, Monsieur X serait réélu
il développe une analyse quon pourrait qualifier, à la manière du « futur de conjecture », de « conditionnel de conjoncture » :
« Ce que le conditionnel met en cause dune certaine manière, cest le principe de la nécessité du factuel : même sil a (eu) lieu, le procès reste dans le domaine du possible. Cette contradiction est évidemment résolue au plan épistémique : le procès nest considéré comme simplement possible que parce quil nest pas connu avec certitude ; et ce nest pas son actualisation elle-même qui se trouve retardée, mais sa confirmation. »
Si cette phrase signifie :
(131bis) Au vu des premiers résultats, Monsieur X est sans doute réélu,
nous pensons que lexplication de la désignation dun autre paramètre que le temps « non-coïncident avec la situation dénoncé » par un élément du contexte linguistique ou extra-linguistique aboutissant finalement à la même explication :
« le procès nest considéré comme simplement possible que parce quil nest pas connu avec certitude »
est préférable parce quon peut avec le même système explicatif rendre compte de nombreux emplois dun conditionnel désignant le moment de lénoncé. Cet énoncé qualifié de « conditionnel journalistique », présente le procès possible comme incertain, autrement dit le procès présenté nest quun possible parmi dautres possibles. Ce procès est présenté en référence avec une situation « non-coïncidente avec la situation dénoncé », cest-à-dire quun, au moins, des paramètres de la situation nest pas coïncident avec celui déterminant la situation dénoncé. Dans la mesure où ce nest pas le moment de lénoncé, ce peut être le locuteur, le lieu, la situation dans son ensemble. Pour lénoncé (131), le procès possible indéfini est dit en référence avec un locuteur non-coïncident avec le je de lénoncé. Le verbe désigne un autre locuteur (ou un locuteur qui se dédouble en ne sassumant pas).
Cette remarque dune source autre que celle du locuteur est généralement analysée sous des termes polyphoniques : à travers lénoncé du locuteur, il faut entendre le point de vue dun tiers, point de vue auquel le locuteur peut ou non adhérer. Au locuteur se substituent donc des « énonciateurs » qui peuvent être distingués selon ladhésion du locuteur au point de vue quils représentent. Cette analyse est particulièrement pertinente pour les conditionnels journalistiques dans la mesure où les journalistes médiatisent des informations qui proviennent dune source que le journaliste peut considérer fiable ou non. On comprend leur prédilection pour le conditionnel qui permet de dire que le procès se réfère à un autre je que celui de la situation dénoncé. Cet « autre je » peut être désigné ailleurs dans lénoncé et cest fréquent :
(132) Selon lAFP, le premier Ministre serait à Rennes aujourdhui.
Mais ce nest pas toujours le cas, lénoncé indiquant alors seulement quil ne coïncide pas avec le je de la situation dénoncé :
(133) Le premier Ministre serait à Rennes aujourdhui.
Le fait quun verbe au conditionnel ne désigne pas forcément un procès ultérieur au moment de lénoncé mais très souvent un procès qui lui est coïncident explique que certains linguistes préfèrent éviter la notion d« incertitude » - que pour notre part nous dérivons du trait non-défini- qui est généralement rapportée à lultériorité du conditionnel- et lui préfèrent un trait de « mise à distance » ou de « non-prise en charge » du propos.
Si lanalyse ne déconstruit pas la notion dincertitude de celle davenir, il est certain quelle ne peut expliquer les énoncés de ce type qui ne peuvent être réduits, alors, à létat dexception. On comprend quelle convoque ainsi dautres notions susceptibles dexpliquer les procès au conditionnel coïncidents au moment de lénoncé.
(134) Un accident a eu lieu à Vannes, samedi soir: il y aurait deux morts et plusieurs blessés.
Certes, lincertitude nest pas déductible ici de laccomplissement forcément incertain (et présenté comme tel) dun procès à venir puisquon désigne laccomplissement dun procès coïncident avec le moment de lénoncé. Pour notre part, et dans la mesure où nous déconstruisons dune part, la valeur « non-coïncident avec la situation de lénoncé » et de lautre la valeur « non-défini », nous ne lions pas, dune part, la valeur incertaine du conditionnel au fait que le procès est désigné dans lavenir mais bien au sème « non-défini », et nous postulons dautre part que le trait sémantique « non-coïncident avec la situation dénoncé » peut désigner autre chose que « non-coïncident avec le moment de lénoncé », le procès possible incertain étant désigné en référence à une situation autre que la situation dénoncé, autre par lun ou lautre des paramètres de la situation dénoncé ou par lensemble de la situation dénoncé.
Le procès peut alors, par exemple, ne pas être en référence avec le locuteur, et leffet de sens sera celui dun procès non-pris en charge par le locuteur, effet étrange que lénoncé prend sa source dans une autre situation dénoncé. Cest ce qui explique la recherche dénonciateurs autres que le locuteur désignés par le conditionnel et même du dédoublement du locuteur, parfois nécessaire, pour corroborer la notion de « polyphonie » ou d« évidentiel demprunt » ou de « conditionnel épistémique ». Faut-il, pour autant, y voir « le sens fondamental » du conditionnel ? Abouta le réfute, du moins pour le conditionnel journalistique, arguant quil sagit dune conséquence de la non-prise en charge du locuteur.
Il montre, en particulier, que la thèse de Dendale selon laquelle le conditionnel peut prendre non seulement la valeur aléthique de non-prise en charge mais aussi la valeur aléthique de fausseté et la valeur aléthique de vérité, sur laquelle il sappuie pour rejeter la valeur basique de non-prise en charge peut être battue en brèche par des énoncés comme :
« a. Il est vrai quil viendrait.
b. Cest sûr quil viendrait
[pour lesquels]on cherche immédiatement dans le contexte lexpression dune hypothèse et on na plus affaire à un conditionnel journalistique. »
Pour notre part, nous pensons que lanalyse polyphonique du conditionnel a pour avantage dêtre plus précise que la seule « absence de prise en charge de lénoncé par le locuteur » mais quelle ne correspond quà une des analyses possibles dans la mesure où le locuteur nest quun des paramètres de la situation dénoncé. Le locuteur désignant une opération de référence à une situation autre que la situation dénoncé, il peut désigner soit un autre locuteur soit dautres paramètres de la situation dénoncé, soit lensemble de la situation. La polyphonie du conditionnel ne correspond quà certains emplois et la notion de « non-prise en charge de son énoncé par le locuteur » si elle est plus générale ne peut englober lensemble des interprétations possibles.
Cest ainsi, quemployé dans la sphère privée, un « conditionnel journalistique » peut être analysé de différentes manières. Après avoir passé un coup de téléphone à des amis, un homme déclare à sa famille :
(135) « Finalement, ils viendraient plutôt laprès-midi. »
Le verbe viendraient désigne un procès possible dont laccomplissement est présenté comme incertain par le locuteur. Difficile de savoir si ce procès possible incertain prend sa référence par rapport à un « autre je » et dans ce cas, on interprète le doute du locuteur comme portant sur la fiabilité de son interlocuteur téléphonique « cest eux qui le disent, pas moi » ou si ce procès possible incertain se réfère à un moment autre que le moment de lénoncé. Le locuteur a alors conscience quun procès futur nest jamais sûr : « on ne sait jamais ce qui peut arriver », dautant que la décision a déjà varié et variera peut-être encore. Peut-être faut-il linterpréter comme un cumul des deux : un procès possible incertain se fait en référence avec un « autre je » et un « autre moment » que ceux de lénoncé.
Dautres conditionnels peuvent difficilement être glosés par la notion de « polyphonie », ce sont les conditionnels qualifiés de « préludiques » ou encore ceux qui apparaissent dans des scènes imaginaires, quils sont dailleurs parfois seuls à désigner comme imaginaires.
On peut prendre pour exemple ce discours intérieur de Bardamu quand celui-ci pense que la guerre est peut-être finie, faute de combattants :
(136) « Ils sont peut-être tous morts à lheure actuelle ? que je me demandais. Puisquils ne veulent rien comprendre à rien, cest ça qui serait avantageux et pratique quils soient tous tués très vite
. Comme ça on en finirait tout de suite
On rentrerait chez soi
On repasserait peut-être place Clichy en triomphe
Un ou deux seulement qui survivraient. Dans mon désir
Des gars gentils et bien balancés, derrière le général, tous les autres seraient morts comme le colon
comme Barousse
comme Vanaille (une autre vache)
etc. On nous couvrirait de décorations, de fleurs, on passerait sous lArc de Triomphe. On entrerait au restaurant, on vous servirait sans payer, on payerait plus rien, jamais plus de la vie ! On est les héros ! quon dirait au moment de la note
Des défenseurs de la Patrie ! Et ça suffirait !
On payerait avec de petits drapeaux français !
La caissière refuserait même largent des héros et même elle vous en donnerait, avec des baisers quand on passerait devant sa caisse. ça vaudrait la peine de vivre. » »
Le discours intérieur du personnage dérive peu à peu vers des procès de plus en plus utopiques. Or, lanalyse peut difficilement se faire selon une référence à un « autre je » que celui de la situation dénoncé.. Bardamu ne sous-entend pas que ces idées viendraient dune autre source (ou alors il faudrait pousser lanalyse jusquà dire quil se dédouble en un je fou et un je lucide). Il ne sagit pas non plus dune référence à un autre moment que celui de lénoncé, car cela signifierait que Bardamu pense que ces procès sont éventuellement possibles, que on payerait avec de petits drapeaux français, par exemple, est un possible parmi dautres. Or, le personnage ny croit pas. Il joue pour oublier la guerre et nenvisage pas comme éventuellement possibles ces procès. On peut opposer, par comparaison, avec un énoncé précédent : « Finalement, ils viendraient laprès-midi »pour mesurer la charge dutopie que portent les procès du scénario imaginaire de Bardamu. Nous postulons que dans ce cas, la non-coïncidence avec la situation dénoncé porte sur le monde dans lequel sinscrit la situation dénoncé. Le locuteur désigne un procès possible incertain qui prend sa référence dans un autre monde que celui dans lequel sinscrit la situation dénoncé, un monde imaginaire. Le conditionnel, par opposition avec le futur, signale explicitement la distance prise avec les propos énoncés, ici, distance prise avec ses propres rêves, par le trait « non-défini » qui le caractérise.
De la même façon, le conditionnel apparaît dans certaines comparaisons qui utilisent la création dimages présentées comme des procès possibles non-définis, cest-à-dire non crédibles, peu susceptibles de se produire car référé à un monde autre que celui de la situation dénoncé, un monde imaginaire. Proche des scénarios imaginaires, ce conditionnel de fiction introduit par comme est bien représenté dans Voyage au bout de la nuit, ainsi dans cette description de la détonation qui met fin à lattente (et à la vie) du colonel :
(137) « Mais alors un de ces bruits comme on ne croirait jamais quil en existe. »
ou comme cette comparaison qui décrit la décrépitude de la maison des Henrouille :
(138) « On se sentait chez eux comme dans un bateau, un espèce de bateau qui irait dune crainte à lautre. »
Robinson, devenu aveugle, passe son temps à se visionner ses souvenirs denfance qui ouvrent sur une comparaison tout aussi surprenante :
(139) « à part le coup de la cliente, il ny trouvait rien dont il ne puisse désespérer jusquà en vomir jusque dans les coins comme dans une maison où il ny aurait rien que des choses répugnantes qui sentent, des balais, des baquets, des ménagères, des gifles
»
A la suite de lagonie de Robinson, apparaît également ce type de description :
(140) « Dans la chambre ça faisait comme un étranger à présent Robinson, qui viendrait dun pays atroce et quon noserait plus lui parler. »
Quand Bardamu décide de quitter Rançy, après la mort de Bébert, il emploie une allégorie à laquelle il associe ce type de conditionnel :
(141) « Cest comme une femme qui serait affreuse la Peine, et quon aurait épousée. »
Ces conditionnels de fiction, qui font fusionner expression populaire et expression poétique chez Céline, culminent dans les moments de détresse dont ils témoignent de lindicible. Il sagit à chaque fois du même procédé : le monde « réel » noffrant pas matière à comparaison assez juste ou assez forte pour désigner le sentiment ressenti, lécrivain désigne un objet quil représente comme imaginaire par le biais dun procès au conditionnel mis en relation avec la conjonction de comparaison comme. Le trait sémantique de « non-coïncidence avec la situation dénoncé » combiné au « potentiel » ne renvoie pas à un avenir hypothétique quand le contexte linguistique lindique ici, par la mise en relation avec comme - mais à un « autre monde », un monde imaginaire.
Le conditionnel préludique sinscrit directement dans cette analyse :
(142) Tu serais le papa et je serais la maman.
Les enfants ne sont pas dupes de leur jeu et ils signalent le passage de ce quil est convenu dappeler « la réalité » à la fiction. Lemploi du conditionnel sert à désigner que les procès se déroulent dans un autre ordre que celui de lénoncé, celui dun monde imaginaire.
Cette variable de lanalyse quautorise la référence à une situation qui comporte différents paramètres, permet de gloser également le conditionnel de politesse ou conditionnel datténuation :
(143) Je voudrais prendre rendez-vous.
(144) Tu devrais partir maintenant.
Dans ces énoncés, les procès prennent leur référence dans le moment dénoncé. Quand on les oppose à des présents :
(143bis) Je veux prendre rendez-vous.
(144bis) Tu dois partir maintenant.
ce nest pas une opposition temporelle qui se fait jour mais bien une différence de « politesse » ou « datténuation ». On jugera, par convention sans doute, je veux et tu dois trop brutaux.
On peut postuler, à linstar dailleurs dAbouda qui classe les conditionnels datténuation avec les conditionnels journalistiques, quil sagit de cas de « non-prise en charge de son énoncé par le locuteur.
« Ducrot a [
] remis en cause ce quil appelle la thèse de lunicité du sujet parlant, cest-à-dire ce postulat, souvent implicite, qui veut quil y ait, pour chaque énoncé, un être unique qui est à la fois lauteur empirique de lénoncé, que nous noterons ici par P, le responsable du contenu de cet énoncé, que nous appellerons ici lEnonciateur (noté E), et la personne désignée par je, le Locuteur, que nous notons L.
« En exploitant les distinctions opérées dans le cadre théorique [de la polyphonie de Ducrot], nous pouvons formuler notre hypothèse de la manière suivante. Le Locuteur, en énonçant :
Je dirais p
ne prend pas en charge le contenu de p. Or, nous lavons déjà dit, en refusant de prendre en charge p, le Locuteur en attribue automatiquement le contenu à un Autre Enonciateur (AE), comme dans la configuration suivante :
L(AE(p))
Sauf que, dans lemploi atténuatif, lAutre Enonciateur (AE) et le Locuteur (L) renvoient tous les deux à la même personne physique, i.e. le producteur réel (P) de lénoncé. Doù, nous semble-t-il, cet effet de sens très particulier quasiment schizophrénique- où le producteur du message se présente comme nassumant pas le contenu dune proposition quil prend finalement en charge par le simple fait de lénoncer. »
Le conditionnel dindignation est analysable de la même manière que le conditionnel journalistique :
(145) Quoi ? Je te mentirais ?
Le locuteur désigne un procès possible incertain en le référant à un autre je que le je de lénoncé. Doù, leffet de dédoublement de la voix, le locuteur faisant la réponse avec la question.
Cest pourquoi on peut interpréter ainsi également les conditionnels qui apparaissent dans les interrogations rhétoriques :
(146) « Pourquoi sarrêteraient-ils ? »
On analyse souvent cette forme par une question qui comporte déjà sa réponse. En effet, la question porte sur un procès improbable et prend sa référence dans un autre je que celui de la situation dénoncé. Le conditionnel désigne alors un dédoublement du locuteur qui permet cette mise en abîme du dialogue. Ce procédé conduit à la clôture de la question sur elle-même.
Pourquoi le conditionnel inscrit-il si peu le procès quil désigne dans une référence à la temporalité ? Pourquoi à linverse, le passé simple inscrit-il systématiquement le procès quil désigne dans une référence temporelle ? Nous pensons que cela est dû aux traits sémantiques qui les composent. Le verbe désignant, à notre sens, un « objet temporel » dans la mesure où un procès sinscrit dans une durée, sa référence à un moment paraît logique. Ainsi, le passé simple qui découpe dans le réel des objets avérés, des « morceaux de temps » doit logiquement les référer au moment de lénoncé. Inversement, le conditionnel qui désigne un procès potentiel indéfini, désigne un objet très éthéré par rapport à la réalité. Logiquement, son ancrage dans le temps est beaucoup moins nécessaire.
2-2-3-2-2 Les énoncés hypothétiques en si
Il nest que dobserver la diversité des analyses consacrées à la nature de la relation si p, q dans les articles qui lui sont consacrés dans le recueil « Le Conditionnel en français » de Dendale et de Tasmowski pour mesurer la difficulté de lanalyse en syntaxe du conditionnel.
Nous nous proposons de partir de ces deux énoncés :
(147) Sil fait beau, il viendra
(148) Sil faisait beau, il viendrait
Les deux énoncés (147) et (148) présentent un procès éventuel ; sils assertent tous deux la corrélation entre deux propositions, pour autant, ils ne sont pas équivalents : alors que le premier procès sera interprété comme probable, le second sera qualifié dimprobable, voire dirréel. Il sagit, dans chaque énoncé, dun système corrélatif qui met en relation un premier procès au futur ou au conditionnel avec un second procès introduit par la conjonction si, second procès respectivement au présent ou à limparfait. La mise en relation des deux procès aboutit à leur perte dautonomie et à un blocage des temps. Ainsi, le futur ne peut être mis en relation quavec un présent et le conditionnel quavec limparfait.
Les valeurs du futur et du conditionnel ne sexpliquent que dans le cadre de cette corrélation.
Les deux énoncés paraissent symétriques, ils nous le paraîtraient encore davantage si la protase de lhypothèse au futur était au passé simple :
(147bis) * Sil fit beau, il viendra.
Ce nest pas le cas, aussi pensons-nous que lanalyse des deux énoncés ne doit pas forcément rechercher la symétrie.
2-2-3-2-2-1 Le conditionnel
Nous postulons que la corrélation entre protase et apodose dans lhypothèse au conditionnel va de pair avec une mise en facteur du +R, du trait sémantique « potentiel ». Cette hypothèse permettrait dexpliquer pourquoi les enfants disent systématiquement :
(148bis) *Sil ferait beau, il viendrait.
au point quon a été obligé dinventer des règles mnémotechniques « les si naiment pas les rais » ou « les si mangent les rais », selon différentes variantes. Peut-on se fier à la parole des enfants vaste débat !- peut-on se fier à leur conscience linguistique ? Il nous semble que les étapes de lacquisition du langage témoignent dune construction progressive du système. On peut penser que lénoncé fautif *Sil ferait beau, il viendrait traduit correctement la signification de la conditionnelle hypothétique et que cest le principe déconomie un R pour deux verbes- qui nest pas encore assimilé à un stade de lapprentissage.
Dailleurs, le principe de la factorisation nopère pas que dans ce type dénoncé et apparaît dans de nombreuses mises en relation : dans Paul viendra à la conférence et parlera à 17H, Paul est mis en facteur. Dans Les belles élégantes, Les est mis en facteur dans la relation adjectivale, cest les belles et les élégantes qui sont mis en relation.
Un autre argument vient en faveur de cette hypothèse, cest la remarque quont faite certains linguistes, comme Gosselin, que « limparfait [ne peut pas porter] sur le procès exprimé par la subordonnée hypothétique »
Dans ce cadre explicatif, lénoncé (148) fait dépendre la réalisation du procès il viendrait de léventualité du procès à limparfait il faisait -quil faut comprendre comme il ferait. On aurait alors un équivalent de :
(149) Il ferait beau, il viendrait.
Le si est alors marqueur de la corrélation hypothétique. Par rapport à lénoncé (149), son introduction limite lambiguïté de lénoncé on peut, en effet, comprendre lénoncé (149) comme la succession de deux procès désignant une succession chronologique- et il autorise linversion des deux procès :
(148) Sil faisait beau, il viendrait.
(148 ter) Il viendrait, sil faisait beau.
Un procès est dit possible parmi dautres, son éventualité est corrélée à un autre procès possible incertain. Il a souvent été rapporté dans la littérature linguistique, que, selon les cas, ce procès était compris comme « potentiel » ou « irréel ». Cette graduation dans la probabilité de laccomplissement des procès est à rattacher à la variabilité des paramètres de la situation dénoncé niés par lopposition au présent. De même quun procès au conditionnel peut désigner un scénario fictif, qui nest pas réalisé et qui ne se réalisera pas, de même un conditionnel enchâssé dans une syntaxe hypothétique peut-il désigner un procès irréalisable.
A cet égard, on peut opposer :
(150) Si javais de largent aujourdhui, je machèterais un bateau.
(151) Si javais de largent demain, je machèterais un bateau.
Lénoncé (150) présente des procès possibles indéfinis corrélés en référence avec un moment coïncident avec le moment de lénoncé, cest donc un autre paramètre de la situation dénoncé qui est nié. Une autre situation est désignée, celle dun monde fictif où jaurais de largent. Doù linterprétation en terme dirréel ou de contrefactuel.
Par contre, lénoncé (151) peut être compris comme un couple de procès possibles parmi dautres, référé à un autre moment que le moment de lénoncé, du fait de sa mise en relation avec demain. Cette interprétation laisse alors une chance au locuteur davoir de largent et, conséquemment, de sacheter un bateau. Mais on peut aussi comprendre que le locuteur réfère les procès à une situation quil inscrit dans un monde autre que celui où sinscrit la situation dénoncé, un monde imaginaire où lon serait riche et lon sachèterait un bateau. Autrement dit, que le locuteur ne considère pas la possibilité dêtre riche comme plus probable demain quaujourdhui. Dans ce cas, le locuteur réfère la possibilité incertaine de sacheter un bateau à une inscription du procès et de sa référence dans un monde fictif.
2-2-3-2-2-2 Le futur
Lanalyse de lénoncé (147) sil fait beau, il viendra est plus problématique à poser ici, dans la mesure où nous navons pas abordé la valeur du présent. Nous nous contenterons donc de proposer une piste éventuelle danalyse.
Si lon reprend les remarques qui nous ont guidée précédemment pour envisager leur transposition au futur, on constate quelques différences. Tout dabord, si lerreur relevée pour le conditionnel peut se retrouver au futur, sous la forme :
(147bis) *Sil fera beau, il viendra.
et est attestée dailleurs dans le corpus célinien, dans la bouche de Robinson:
(152) « - Tu me croiras, si tu voudras, me rappelait-il, en ravaudant des bouts de souvenirs le soir comme ça après dîner [
] »
elle ne relève pas de la catégorie des erreurs systématisées chez les enfants. Il convient donc dêtre plus prudent dans lidée que dune équivalence sémantique entre cette forme erronée et la forme correcte.
Par ailleurs, lénoncé :
(153) Il fera beau, il viendra
sil est attesté na pas une valeur hypothétique mais une valeur de succession des procès. Alors quon peut trouver :
(154) Il fait beau, il vient
interprétable comme un équivalent de lénoncé (147).
Mais on peut également trouver :
Sil fait beau, il vient
Enfin, un énoncé hypothétique a attiré notre attention dans une lettre manuscrite, dans la mesure où cette lettre manuscrite gardait trace dune remédiation. Lénoncé :
(155) Jaurai un bureau en haut du bâtiment E
était suivi dun point transformé en virgule et suivi de :
si tout se passe bien.
Ainsi, un énoncé simple au futur désignant un procès possible de façon catégorique pouvait être, suite à une révision de son locuteur, transformé en un énoncé hypothétique :
(155bis) Jaurai un bureau en haut du bâtiment E si tout se passe bien.
Autrement dit, la protase de lhypothétique au futur pouvait servir à atténuer laspect catégorique de lapodose, au même titre quun peut-être.
(155ter) Jaurai peut-être un bureau en haut du bâtiment E .
Ainsi, lhypothèse est introduite par la protase et non par la proposition au futur qui ne perd son sens catégorique ou qui ne latténue - que dans le cadre de la relation.
A partir de cette remarque, et de celle que le présent peut remplacer le futur dans de nombreux énoncés, nous postulons que le présent de ce système corrélatif est interprétable par un futur. Cette thèse permettrait dexpliquer que les enfants naient pas besoin de remplacer le présent par un futur puisquils interprètent cette valeur dans lapodose au présent. Cela expliquerait aussi lénoncé équivalent au présent Il fait beau, il vient. On aboutit alors à un énoncé symétrique à lénoncé [si imparfait, conditionnel] sans passer par la même analyse de factorisation dun morphème, rendue inutile par la possibilité dinterpréter le présent par un futur.
On peut, selon cette analyse déduire que, de même que la corrélative au conditionnel signifie la forme erronée : si + cond, cond , la corrélative au futur signifie si + futur, futur.
Un procès est dit possible de façon certaine mais la possibilité est corrélée à léventualité dun autre procès possible certain. Cest donc si qui porte toute la charge dincertitude, dhypothèse et qui la transmet par des mises en relation aux deux procès de lénoncé. Doù un sens « probable » atténuant la certitude véhiculée par les procès au futur.
2-2-3-2-3 Futur et conditionnel dans le discours indirect.
Il reste à examiner le conditionnel dans le discours indirect (et indirect libre) introduit par un verbe au passé, le fameux « futur dans le passé » dont la présence a justifié très souvent le classement du conditionnel dans lindicatif comme un équivalent sémantique du futur et qui est donc à la base de la « bataille du conditionnel temps ou mode ».
Le corpus célinien nous offre plusieurs exemples de ces conditionnels de discours indirect. Si on sarrête à lexemple suivant :
(156) « Une fois dans la rue, nous réfléchîmes quon irait pas très loin avec nos vingt francs chacun. »
on peut se demander si la valeur de irait est une valeur de futur purement transposée et si lénoncé équivaut à :
(156bis) « Une fois dans la rue, nous réfléchîmes : « On ira pas très loin avec nos vingt francs chacun ! » »
ou sil faut comprendre un conditionnel :
(156ter) « Une fois dans la rue, nous réfléchîmes : « On irait pas très loin avec nos vingt francs chacun. » »
à laquelle il faudrait ajouter une protase éventuellement sous-entendue :
« Une fois dans la rue, nous réfléchîmes : « On irait pas très loin avec nos vingt francs chacun, si on ne trouvait pas rapidement une solution. » »
Les deux analyses coexistent dans la littérature linguistique. Tassie estime, par exemple, que même dans le discours indirect, le conditionnel véhicule toujours une part de modalité :
« le conditionnel réduit la réalité future exprimée dans la phrase primitive en la chargeant dun élément considérable déventualité. Cest cet élément capital du conditionnel qui trouble et anéantit presque son contenu de futurité. En dautres termes cet emploi, réputé temporel parmi tous ceux du conditionnel, na aucune signification nettement temporelle, nindique que les rapports séquentiels entre les événements. Henri Sensine a pressenti cette nuance en remarquant que si on veut insister sur lidée de futurité on laisse de côté la marque de la subordination et on dit simplement : « Jai dit que je le verrai demain. » »
Le discours indirect est un discours pris en charge par un autre discours. Ainsi, la situation dénoncé de ce discours indirect est rapportée à celle du discours qui prend en charge. Quand un discours est pris en charge par un discours au passé, il est englobé dans une notion de non-coïncidence par rapport à la situation dénonciation. Il faudrait pouvoir expliquer comment cette disjonction de la situation dénonciation implique une notion de non-définition du procès du discours pris en charge. Mais, dans cette analyse, on se heurte alors au fait quun verbe introducteur au futur ou au conditionnel nimplique pas de concordance du discours rapporté. Cet énoncé, par exemple, est tout à fait correct :
Il dira quil viendra plus tard
Aussi pensons-nous que la concordance entre un verbe de parole au passé et un conditionnel en place dun futur (dans lénoncé au discours direct) est un fait purement mécanique et non pas sémantique. Il sagit de signaler que le procès dit au futur ne prend pas sa référence dans le moment de lénoncé mais dans un moment antérieur. Contrairement à ce quindique un de ses traits sémantiques, il peut, par exemple, être coïncident avec le moment de lénoncé englobant mais pas avec le moment de lénoncé englobé.
Ainsi, lénoncé (156) est léquivalent de :
(156bis) « Nous réfléchîmes : « On ira pas très loin avec nos vingt francs chacun ». »
Le procès irait ne met pas en doute laccomplissement (ici négatif) du procès. Le constat est catégorique.
Cependant, la remarque de Tassie nest pas tout à fait fausse car il est toujours possible dinterpréter le conditionnel du discours rapporté comme prenant en charge un conditionnel et non un futur ou si lon préfère damalgamer les deux interprétations du conditionnel dans un seul énoncé. En effet, rien ninterdit dintroduire une corrélative hypothétique dans un discours indirect. Par exemple :
(157) Ferdinand disait que Robinson viendrait sil faisait beau.
Comment interpréter un tel énoncé ? Correspond-il à :
(157bis) Ferdinand disait : « Robinson viendrait sil faisait beau.. »
et dans ce cas le discours indirect cumule dans viendrait les valeurs du conditionnel et la marque du discours indirect introduit par un verbe au passé.
A moins de ne comprendre :
(157) Ferdinand disait : « Il viendra sil fait beau. »
Le passage au discours indirect faisant passer le futur au conditionnel et le présent à limparfait, il aplanit la différence entre les deux énoncés en discours direct. Cette analyse revient à la paraphrase (156ter) quil est toujours possible de postuler, en définitive :
(156ter) « Une fois dans la rue, nous réfléchîmes : « On irait pas très loin avec nos vingt francs chacun (si on ne trouvait pas rapidement une solution.) » »
En fait, les risques dambiguïté sont très nombreux quand on a affaire à un conditionnel dans un discours rapporté. Lanalyse que conduit Gosselin, en définitive, montre un exemple de ces ambiguïtés possibles :
« Le futur situe (linguistiquement) le procès dans lirrévocable, alors que le conditionnel le montre comme simplement possible. [
Dans]
Jean ma dit quil sera là demain
Jean ma dit quil serait là demain
bien quil sagisse dans les deux cas de discours rapporté, bien que les événements décrits soient situés, lun dans le passé, lautre dans le futur (et donc temporellement, dans le possible) une différence modale est perceptible, qui oppose le conditionnel, lequel, présentant le procès comme simple possible, va être compatible avec diverses formes de mises en cause de linformation (Je tai dit quil serait là demain, mais je me suis trompé. Il a prétendu quil viendrait la semaine prochaine mais, en fait, il restera chez lui), au futur qui marque laffirmation catégorique de la proposition, qui situe au plan linguistique (aspectuel) le procès dans le nécessaire, linéluctable ( ?* Je tai dit quil sera là demain mais je me suis trompé *il a prétendu quil viendra la semaine prochaine mais, en fait, il restera chez lui) »
Il ajoute, à propos du conditionnel passé :
« Le caractère nécessaire du procès nest que (plus ou moins probable), non quil soit encore évitable au moment considéré, mais simplement parce quil nest pas connu de façon suffisamment sûre (en dautres termes, il est simplement possible quil ait eu lieu). »
En fait, ces exemples de Gosselin, comme celui de Sensine cité par Tassié, plus haut, ne permettent pas de trancher sur la valeur du conditionnel pris en charge par un discours rapporté au passé car le passé composé peut situer le verbe de parole introducteur dans la sphère de lénoncé. Dès lors, le conditionnel peut répondre à une interprétation passée du passé composé dans certains énoncés cest-à-dire un passé composé substitut du passé simple- mais lalternance conditionnel / futur nest alors pas possible :
*Il prétendit quil viendra la semaine prochaine
Seule, une interprétation « accompli du présent » du passé composé autorise cette alternance. Dans ce dernier cas, il ne sagit plus de discours indirect introduit par un verbe au passé, ce qui explique que lopposition futur / conditionnel soit productive de sens.
Ajoutons à cela que le discours indirect peut être difficile à détecter quand il sagit de « style indirect libre » et que lhypothèse peut être désignée par une syntaxe beaucoup plus discrète que lhypothétique en si et lon peut atteindre des sommets dans la confusion. Nous en donnerons quelques exemples chez Céline.
En définitive, si le futur en discours direct doit être traduit, par simple concordance, par un conditionnel sil est pris en charge par discours indirect au passé simple ou à limparfait, linverse nest pas vrai car un conditionnel pris en charge dans un discours indirect au passé peut tout aussi bien renvoyer à un conditionnel quà un futur. Doù un effet de sens polysémique du conditionnel pris en charge par un discours indirect au passé.
Nous classerons aussi ici nos analyses du futur des historiens et du conditionnel des historiens. Les énoncés au futur comme le suivant :
(158) « Cependant, le 30 août 1777, Marie-Antoinette confie un grand secret à sa mère. « Je suis dans le bonheur le plus essentiel pour toute ma vie
» A la fin de lannée suivante, elle accouchera dune fille. »
représentent des cas de déplacement du point de référence. Comme le dit Imbs, quil fasse suite à un présent de narration ou à un passé simple, ce futur désigne un procès « entièrement passé au moment où lhistorien écrit ; mais il est futur par rapport au fait précédemment évoqué .» Dès lors, il sinterprète comme un procès non-coïncident, possible et défini au moment de repère désigné par le récit. On peut penser cependant que la certitude véhiculée par le trait défini du futur désigne également le savoir a-posteriori détenu par le locuteur. Si laccomplissement du procès peut être présenté comme inéluctable, cest quil est, en réalité, accompli. Il y a là un jeu de point de vue qui souligne lomniscience de lhistorien, nous semble-t-il. En faisant comme sil se situait au moment de lhistoire, lhistorien exhibe son discours il sagit dun effet de style qui se crée par contraste avec la norme du discours historique posée par Benveniste. Cette monstration du discours correspond à un discours indirect : Je dis que je dis
.
Doù la possibilité de trouver ce procédé aussi bien au conditionnel quau futur avec une valeur équivalente :
(159) « Cétait presque, dans le cas de conflit entre les pouvoirs, annoncer à lancien héros, à lancien maître de la France, le sort bien ignoré encore alors, que subirait lancien roi de Naples, Murat, quatre mois après. »
« Oui, je sais, ça ne va pas ensemble : une jeune fille, les effluves de jasmin, et ce corps prêt à tomber en poussière, si familier du temps qu'il semble le temps lui-même, et ces mains jeunes et décharnées - et par endroit polies comme de l'ivoire - luttant contre leur propre maladresse et la rouille de la boîte (comme si la rouille et la maladresse n'étaient qu'une seule chose, toujours la même : les années, le temps) jusqu'à ce qu'elle ait enfin réussi à l'ouvrir, fouillant alors dans son contenu non de bonbons gluants mais de boutons dépareillés, de chaînettes d'or » C. Simon, LHerbe.
2-2-3-2-4 Bilan :
Dans cette dernière partie, nous avons montré la pertinence du trait sémantique « (défini » pour rendre compte du futur et du conditionnel : le locuteur, en employant un verbe au futur, désigne LE procès possible non-coïncident avec la situation dénoncé . On peut donc dire quil représente de façon catégorique un procès à venir cest tout le paradoxe du futur. Inversement, le locuteur qui emploie un conditionnel désigne UN procès possible (parmi dautres) non-coïncident avec la situation dénoncé. Nous avons vu que ce dernier trait permettait une variation de la référence, dans la mesure où la situation dénoncé présente différents paramètres et que la référence temporelle nétait quune possibilité parmi dautres, expliquant que linterprétation du conditionnel puisse varier du « potentiel » à l« irréel » en syntaxe, dont nous navons fait quesquisser lanalyse, comme dans les énoncés simples.
Quest-ce qui sépare, alors, notre analyse de celles qui font du morphème de limparfait et du conditionnel un « inactuel » dont il est possible de tirer tous les effets de sens, y compris leffet de sens temporel, théorie que ces définitions de Burger résument ainsi :
« Le suffixe r- [renvoie] à une conjecture basée sur un indice actuel, c est-à-dire faisant partie de l actualité du parleur au moment de la parole. »
« Pour le conditionnel, il combine le suffixe r- avec le suffixe - d inactuel ; il s agit d une conjecture fondée sur un indice inactuel : ainsi il viendrait n est pas donné comme une conjecture du parleur mais d un tiers : on m avait dit ; de même pour l ennemi aurait battu en retraite. Dans s il faisait beau, il viendrait, la conjecture se base sur une pure hypothèse. »
« On pourrait donner au suffixe - l étiquette d inactuel, au sens de « qui ne réfère pas à l actualité du parleur au moment de la parole. »
« La valeur du suffixe - est l « inactuel » ; il indique que l événement signifié par le radical verbal est en dehors de l actualité du parleur au moment de la parole. De là découlent les diverses significations de limparfait. Il se combine soit avec le radical de lauxiliaire, qui indique l« accompli », soit avec le suffixe r- qui indique le « pronostiqué », soit avec tous les deux ; de là, les significations du plus-que-parfait et des deux conditionnels.
Il ressort de là que le système du verbe français nest pas construit sur lidée logique ou psychologique de temps. Les diverses notions temporelles que les syntagmes verbaux sont aptes à indiquer relèvent des significations et non des valeurs. »
Manifestement, le concept d« inactuel » [qui] indique que lévénement signifié par le radical verbal est en dehors de lactualité du parleur au moment de la parole » rejoint lanalyse de la non-coïncidence à la situation dénoncé dans laquelle les paramètres peuvent varier en fonction du contexte. Ce qui diffère, cest que, pour nous, cette valeur nest pas à rattacher à lopposition ai/a mais à lopposition [Ø/(ai/a)], cest-à-dire à lopposition du présent aux quatre autres temps de lindicatif. Ce qui signifie que lanalyse nest pas propre au conditionnel et à limparfait mais également au futur et au passé simple qui disposent aussi du trait non-coïncident avec la situation dénoncé.
Ici encore, la différence quapporte notre analyse est la déconstruction dun trait sémantique supplémentaire : le R du conditionnel ne renvoie pas à du « projeté » qui combine la temporalité à lidée de possible mais à du possible par opposition à limparfait. Le ai du conditionnel ne renvoie pas à de l « inactuel » qui combinerait temporalité plus ou moins activable et modalité. Il renvoie à de lindéfini par opposition au futur. Tous deux sopposant au zéro du présent désignent un procès qui est en référence négative avec à la situation dénoncé. Cest cette référence qui peut varier du fait de la multiplicité de ses paramètres. On comprend mieux alors le jeu du contexte dans le rapport à cette référence.
Mais, alors, pourquoi le passé simple semble-t-il sinscrire toujours dans la temporalité si peut également lui être appliqué le trait de non-coïncidence à une situation dénoncé dont les paramètres peuvent varier ?
Nous pensons que le concept « défini » qui désigne, nous lavons vu, le découpage dun objet du réel, en loccurrence un « objet temporel » ancre dans la référence à la temporalité les procès quil contribue à désigner. La définition du procès ne peut sétablir en dehors dune référence, fût-elle négative au moment de lénoncé. On comprend que labsence de définition offre plus de latitudes à la référence qui peut se faire par rapport aux autres paramètres de la situation dénoncé : locuteur monde dans lequel sinscrit la situation lieu
2-2-3-3 Un emploi célinien du futur et du conditionnel ?
2-2-3-3-1 Le brouillage de lénonciation par le conditionnel
On ne sétonnera pas de trouver de multiples exemples ambigus dans la prose de Voyage au bout de la nuit dans la mesure où, on la déjà vu, le narrateur cherche à brouiller les frontières. Nous donnons donc la parole à Céline pour évoquer de façon plus précise que nous ne lavons faite les possibilités de brouillage quoffre le conditionnel :
(160)« Elle me racontait les choses menues de son commerce, ce quon disait autour delle de la guerre, en ville, que cétait triste, la guerre, « épouvantable » même, mais quavec beaucoup de courage, nous finirions tous par en sortir. »
Bardamu cite les propos de sa mère. Il sagit dun discours indirect clairement repérable par les conjonctions que introductrices du propos rapporté. Le conditionnel finirions peut donc être compris comme un futur pris en charge par un discours au passé. Cependant, lexpression avec beaucoup de courage peut constituer la condition nécessaire au conditionnel. De sorte que le lecteur ne peut savoir sil doit interpréter que la rue dit avec assurance que tous les soldats finiront par sen sortir ou si elle ne leur accorde cette chance quà condition quils fassent preuve de beaucoup de courage. Quoiquil en soit, les deux versions sont porteuses de sens.
Le même genre dambiguïté peut apparaître dans un discours indirect libre qui demande, lui-même à être authentifié :
(161) « Jamais plus, même si je vivais encore cent ans, je ne me promènerais à la campagne. Cétait juré. »
Cétait juré permet dinterpréter rétrospectivement lénoncé précédent comme un discours indirect libre attribuable au personnage-narrateur. Sans quoi, il pouvait, à la limite car on doute que le narrateur ultérieur ait dépassé cent ans- sagir dun commentaire du narrateur qui déplace son moment de référence au cur de la narration en utilisant ce quil est convenu dappeler un conditionnel historique. Mais le conditionnel peut encore être lié à lhypothèse même si je vivais encore cent ans, et dans ce cas, traduire la valeur « indéfinie » du conditionnel et non plus la valeur « définie » du futur. Deux versions initiales restent toutefois possibles, dans la mesure où limparfait de vivais peut également provenir de linsertion en discours indirect au passé :
(161bis) « Jamais plus, même si je vis encore cent ans, je ne me promènerai à la campagne. Cest juré. »
(161ter) « Jamais plus, même si je vivais encore cent ans, je ne me promènerais à la campagne. Cest juré. »
On trouve, bien sûr, bien dautres exemples identiques dans les discours au style indirect des personnages de Voyage au bout de la nuit, où lon serait bien en peine de transcrire un conditionnel en discours direct :
(162) « Je lassurai de ma bien vive reconnaissance si elle voulait bien me recommander à quelque employeur éventuel
parmi ses relations
mais cela au plus tôt
un très modeste salaire me contenterait parfaitement
et encore bien dautres bénignités et fadaises que je lui débitais. »
Faut-il comprendre :
« Si tu veux bien me recommander, un très modeste salaire me contentera »
ou :
« Si tu voulais bien me recommander, un très modeste salaire me contenterait »
Au lecteur danalyser si la position de Bardamu lui permet de représenter comme probable car défini- son très modeste emploi ou comme hypothétique car indéfini.
Limpossibilité de discerner entre un discours intérieur libre désignant un futur attribuable soit au personnage-narrateur soit à un autre personnage- et un commentaire du narrateur ultérieur déplaçant la focale de sa narration à lintérieur de son récit participe pleinement au brouillage des points de vue dans Voyage au bout de la nuit. Quelques exemples permettront de montrer le parti quen tire Céline :
(163) « Quand il avait cessé de rendre sa loi, Grappa se tournait plutôt vers la mer et contemplait cet horizon doù certain jour il était apparu et par où certain jour il sen irait, si tout se passait bien. »
La valeur de irait est contradictoire. Il est peut probable que lénoncé précédent où certain jour il était apparu auquel il est lié par la logique soit le fait dun discours intérieur de Grappa en style indirect libre : « ? cet horizon où un certain jour, je suis apparu ». A vrai dire, la focalisation conviendrait mieux pour les indigènes qui lont vu apparaître. Est-ce alors le narrateur ultérieur qui prédit lavenir de Grappa à partir du moment de la narration ? Cette interprétation nest pas davantage cohérente du fait de lajout dune protase hypothétique si tout se passait bien qui renvoie obligatoirement aux doutes du personnage. Céline organise donc un flottement entre deux points de vue susceptible de remettre en cause la prédominance du point de vue ultérieur.
De nombreux passages de Voyage au bout de la nuit sont de la sorte impossibles à interpréter, car on ne peut distinguer le discours intérieur en style indirect libre du personnage-narrateur du commentaire ultérieur du narrateur. Ce qui fait que le lecteur ne sait pas sil sagit de prédictions énoncées par Bardamu ou dune anticipation sur la suite du récit. De sorte que le sens fluctue entre lassurance illégitime du personnage-narrateur véhiculée par le trait défini du futur et lassurance légitime du narrateur ultérieur liée au décalage de la focale. Nous nous contenterons den donner quelques exemples supplémentaires qui peuvent être analysés de la même manière :
(164) « Le directeur là-haut sur la falaise rouge, qui sagitait, diabolique, avec sa négresse, sous le toit de tôle aux dix mille kilos de soleil néchapperait pas lui non plus à léchéance. »
(165) « On y passerait tous, le colonel comme les autres, tout mariole quil semblait être, et sa carne ne ferait pas plus de rôti que la mienne quand le courant den face lui passerait entre les deux épaules. »
Belle ambiguïté également dans ce passage où Bardamu accueille labbé Protiste parmi les conjurés, qui fait craindre que le narrateur lui-même ne sache pas où mène le voyage au bout de la nuit :
(166) « On était maintenant du même voyage. Il apprendrait à marcher dans la nuit le curé, comme nous, comme les autres. Il butait encore. Il me demandait comment il devait sy prendre pour ne pas tomber. Il navait quà pas venir sil avait peur ! On arriverait au bout ensemble et alors on saurait ce quon était venu chercher dans laventure. La vie cest ça, un bout de lumière qui finit dans la nuit.
Et puis peut-être quon saurait jamais, quon trouverait rien. Cest ça la mort. »
« Je ne croirai plus jamais à ce quils disent, à ce quils pensent. Cest des hommes et deux seulement quil faut avoir peur, toujours.» L-F. Céline, Voyage au bout de la nuit.
2-2-3-3-2 Le futur comme moyen - parmi dautres - de dénonciation de la parole
Le futur dans la bouche des personnages de Voyage au bout de la nuit semble fait pour être démenti. Par exemple, la litanie de futurs employés par Madelon est comique, parce quils portent à faux :
(167) « Jamais plus je ne serai méchante avec toi ! Je te le jure ! Je veux expier Léon ! Tout de suite ! Ne mempêche pas dexpier, dis ?
Je te rendrai ton bonheur ! Je te soignerai bien, va ! A partir daujourdhui ! Je serai bien patiente pour toujours avec toi ! Je serai si douce ! Tu verras Léon ! Je te comprendrai si bien que tu ne pourras plus te passer de moi ! »
Face à Robinson qui cherche à fuir lasphyxie de son attachement et qui nest pas dupe de la pose damoureuse choisie par Madelon, lassurance véhiculée par le futur que les procès énumérés se réaliseront ne peut être quangoissante et le pousser à persévérer dans son désir de fuite. En soi, ces paroles conduisent donc, irrévocablement, à lopposé de ce quelles affirment comme une certitude. Dans la mesure où ce discours est transmis après coup par Robinson lui-même qui a fui Madelon, le lecteur ne peut être dupe de la parole piégée et la lecture de ces verbes au futur prend un double sens : certitude affichée lors du discours-source et certitude dénoncée lors de leur reprise. On peut déjà y lire de lironie.
On sait, par ailleurs, que la posture damoureuse tragique de Madelon aboutit à lassassinat de Léon qui clôt le roman. Les faits racontés viennent donc apporter un démenti aux paroles prononcées qui prennent rétrospectivement une valeur ironique je te soignerai bien, en particulier.
La même analyse vaut pour la fanfaronnade dArthur Ganate en début de roman :
(168) « Et dailleurs le jour où la patrie me demandera de verser mon sang pour elle, elle me trouvera moi bien sûr, et pas fainéant, prêt à le donner. »
Les procès demandera, trouvera sont présentés comme inéluctables et trouvent écho avec bien sûr de sorte que le martyre dArthur est présenté comme certain, ouvrant droit, dès à présent, à ladmiration des spectateurs éventuels de la scène. Mais cet élan patriotique ne trouve pas sa conclusion logique dans laction. En effet, quelques pages plus loin, ce nest pas Arthur qui sengage, mais son interlocuteur, Bardamu, qui venait justement de convaincre Arthur de labsurdité de la guerre en en dressant un tableau très négatif :
(169) « On est en bas dans les cales à souffler de la gueule, puants, suintants des rouspignolles, et puis voilà ! En haut sur le pont, au frais, il y a les maîtres et qui sen font pas, avec des belles femmes roses et gonflées de parfums sur les genoux. On nous fait monter sur le pont. Alors, ils mettent leurs chapeaux haut de forme et puis ils nous en mettent un bon coup de la gueule comme ça : « Bandes de charognes, cest la guerre ! quils font. On va les aborder, les saligauds qui sont sur la patrie n°2, et on va leur faire sauter la caisse ! Allez ! Allez ! Y a de tout ce quil faut à bord ! Tous en chur ! Gueulez voir dabord un bon coup et que ça tremble : « Vive la Patrie n°1 ! » Quon vous entende de loin ! Celui qui gueulera le plus fort, il aura la médaille et la dragée du bon Jésus ! Nom de Dieu ! Et puis ceux qui ne voudront pas crever sur mer, ils pourront toujours aller crever sur terre où cest fait bien plus vite encore quici ! »
La décision de Bardamu de rejoindre larmée nest pas un véritable revirement mais plutôt un pied de nez tout aussi fanfaron que la tirade patriotique dArthur Ganate. A la connivence enfin acquise dArthur : « - Cest tout-à-fait comme ça ! que mapprouva Arthur, décidément devenu facile à convaincre. » répond sur le mode absurde « J vais voir si cest ainsi ! » de Bardamu. Comment après une telle diatribe contre la guerre, peut-il sengager ? Son acte est bien une dénégation de sa parole car cest manifestement subjugué par lapparat militaire quil fait le pas : « et même quil avait lair bien gentil et richement gaillard, le colonel ! Moi je ne fis quun bond denthousiasme. » Pourquoi Arthur na-il pas bougé ? Pourquoi Bardamu ne respecte-t-il pas ses propres idées, si violemment énoncées ? Probablement parce que ces idées ne sont que « vérités utiles à faire sonner » ou ne servent quà « montrer quon est bien documenté, à parler du tac au tac, à tenir ferme
» Les paroles, de part et dautres, ne sont que paroles au vent. Dailleurs, pour lui, lacte dengagement est aussi inoffensif que ses paroles antimilitaristes et les deux sont réversibles à tout moment : « Jallais men aller » explique le narrateur quand « les encouragements disparaissent : « Nous nétions donc plus rien quentre nous ? Les uns derrière les autres ? Jallais men aller. Mais trop tard ! Ils avaient refermé la porte en douce derrière nous les civils. On étaient faits comme des rats. » Il faut lire en fait tout ce chapitre comme une dénonciation satirique des propos de lépoque où les paroles peuvent se retourner aussitôt que prononcées car elles ne sappuient que sur du « on-dit », des représentations fausses, des clichés comme verser son sang pour sa patrie et confinent à labsurde. Le futur employé participe pleinement à la dérision de Céline, il sagit de dénoncer la pure représentation de la certitude véhiculée par cette forme verbale.
On peut noter à cet égard la prépondérance du futur dans les slogans patriotiques du temps de guerre quépingle à plusieurs reprises Céline dans son roman.:
(170) « Nous aurons la victoire ! »
(171) « Ils tiendront nos petits poilus ! »
(172) « On les aura ! » p.69
La certitude affichée par les futurs de prédiction relève de lincantation comme si la parole pouvait faire advenir le désir mais ici le désir est de façade, quand il sagit de se conformer à lidéologie ambiante et de compenser par la parole son absence daction chez les embusqués de larrière qui seuls, sont présentés comme usant de tels slogans. La dénonciation du conformisme apparaît nettement dans le contexte de ces slogans patriotiques :
(170bis) « Alors entre deux étouffements sil y avait un médecin ou une infirmière à passer par là : « Victoire ! Victoire ! Nous aurons la Victoire ! » criait Branledore, ou le murmurait du bout ou de la totalité de ses poumons selon le cas. Ainsi rendu conforme à lardente littérature agressive, par un effet dopportune mise en scène, il jouissait de la plus haute cote morale. Il le possédait, le truc, lui. »
(171bis) « « Ils tiendront nos petits poilus ! Ils tiennent ! »
Il faisait si chaud dans le hangar et cela se passait si loin de nous, la France, quon dispensait le général Tombar den pronostiquer davantage. Enfin, on répéta tout de même en chur par courtoisie, et le Directeur avec nous : « Ils sont admirables ! »
(172bis) « La petite Lola ne connaissait du français que quelques phrases mais elles étaient patriotiques : « On les aura ! »
La dénonciation de la parole trompeuse au futur peut même apparaître dans la bouche du personnage quand cette démystification peut servir sa cause personnelle :
(173) « -d'un cancer au foie... je la fais soigner par les premiers spécialistes de la ville... leur traitement me coûte très cher, mais ils la sauveront.
-et vous, Ferdinand, vous pensez aussi qu'ils la guériront n'est-ce pas ma mère ?
-pour le pognon, Lola, il y aura heureusement toujours de très grands médecins... je vous en ferais autant moi si j'étais à leur place... et vous aussi Lola vous en feriez autant... ce que je lui disais lui parut brusquement si indéniable, si évident, qu'elle n'osait plus se débattre. »
La cruauté peut tenir tout autant dans la négation de la certitude véhiculée par la prédiction au futur quand la prédiction est rassurante que dans laffirmation de la prédiction quand le procès possible est une menace. Ainsi, lemploi du futur est-il volontairement cruel dans la réponse que fait Bardamu à la famille cachée, pendant un épisode de la guerre :
(174) -« Leur dîtes pas que nous sommes encore là au moins ! La fille était ressortie pour me crier cela.
-Ils le verront bien, demain, répondis-je, si vous êtes là ! »
La cruauté tient toute entière dans la certitude assénée que les soldats allemands les trouveraient le lendemain.
Cette dénonciation de la parole est un axe fort de ce roman et ces exemples suffisent à montrer les enjeux vitaux cest généralement une question de vie ou de mort quengagent ou que solutionnent ces futurs- que véhicule la parole trompeuse dans Voyage au bout de la Nuit.
Il est dailleurs intéressant quun des rares personnages idéalisés du roman, Molly ne soit pas dupe des promesses au futur, ni de celles de Bardamu :
(175) « -oui, je vais finir mes études en France, et puis je reviendrai, lui assurais-je avec culot.
-non, Ferdinand, vous ne reviendrez plus... et puis je ne serai plus ici non plus... elle n'était pas dupe. »
ni des siennes :
(176) « On ne sera pas malheureux ensemble... on placera nos économies... on s'achètera une maison de commerce...on sera comme tout le monde... » elle disait cela pour calmer mes scrupules. »
Et ces futurs sont à mettre en lien avec certains passages où le plagiat de la parole de lautre permet au narrateur-personnage de sauver sa vie ou sa liberté car la dénonciation de la parole passe par beaucoup dautres procédés dans le roman. Elle est montrée comme fondamentalement fausse mais aussi dangereuse, dans la mesure où les discours du narrateur témoignent dune porosité à légard du discours des autres, comme si la parole pouvait contaminer et aliéner le héros.
Dès lors, faut-il opter pour le silence comme le personnage Parapine devenu muet ?
(177) « Je leur raconterai plus rien à lavenir ! » que je me disais, vexé. »
Cest évidemment paradoxal de dénoncer la parole par le biais dune parole romanesque et le narrateur se heurte à cette contradiction interne. Ainsi, se pose le problème de la véracité de la parole, y compris celle du narrateur contaminé. Il devient, par exemple, difficile demployer le futur sans quil ne soit suspect. Comment dès lors le narrateur peut-il désigner un propos sincère avec ce futur quil a si bien démystifié ? Cest ce qui explique le lyrisme patent de nombreux passages traduisant le discours intérieur du personnage ou de commentaires du narrateur -les deux types dénonciation étant impossibles à distinguer dans certains cas- lyrisme dont le contraste tonal permet de souligner lauthenticité du propos :
(178) « Bonne, admirable Molly, je veux si elle peut encore me lire, dun endroit que je ne connais pas, quelle sache bien que je nai pas changé pour elle, que je laime encore et toujours à ma manière, quelle peut venir ici quand elle voudra partager mon pain et ma furtive destinée. Si elle nest plus belle, eh bien tant pis ! Nous nous arrangerons ! Jai gardé tant de beauté delle en moi, si vivace, si chaude que jen ai bien pour tous les deux et pour au moins vingt ans encore, le temps den finir. »
La composante émotionnelle prend une dimension particulièrement poussée dans ces passages au futur pour en souligner lauthenticité :
(179) « Quand on sera au bord du trou faudra pas faire les malins nous autres, mais faudra pas oublier non plus, faudra raconter tout sans changer un mot, de ce qu'on a vu de plus vicieux chez les hommes et puis poser sa chique et puis descendre. »
(180) « Il faudra endormir pour de vrai un soir, les gens heureux, pendant qu'ils dormiront, je vous le dis et en finir avec eux et avec leur bonheur une fois pour toutes. Le lendemain on en parlera plus de leur bonheur et on sera devenu libres d'être malheureux tant qu'on voudra en même temps que la "bonne ". »
Le désenchantement du personnage Bardamu est ponctué par ces promesses que le narrateur-personnage se fait à lui-même, promesses très fortes car au futur catégorique font écho un vocabulaire tout aussi catégorique : toujours, jamais, rien, et il semble que lanalyse des futurs dans Voyage au bout de la nuit conduise à opposer la parole des personnages- y compris celle de Bardamu personnage-, -pure représentation orale à destination des autres personnages et dont lassertion définitive par un futur est vite démentie par les faits et donc vouée à la dérision- et celle du narrateur qui, accédant à la lucidité, sadresse des promesses pathétiques. Cette alternance participe pleinement au jeu sur les tonalités du roman.
Retour à linfinitif :
Au terme de cette analyse, il apparaît nécessaire de revenir sur les hypothèses du départ sur lesquelles nous avons construit notre combinatoire de valeurs pour examiner, rétrospectivement leur validité. Cest ainsi que lanalyse de linfinitif que nous avons posée au départ de notre analyse sémantique est un peu différente des préalables que nous avions posés. Cest un fait, il nest plus question danalyser le zéro de lopposition [Ø/(ai/a)] comme un zéro qui sopposerait à une marque de temps. En effet, dune part, ce morphème désigne une opposition non à une désignation de la temporalité mais à une opposition défini/indéfini qui se rapporte davantage à la notion de détermination quà une notion temporelle. Le Ø désignerait alors une « indétermination » opposable à la « détermination » de limparfait, du passé simple, du futur et du conditionnel, « détermination » que lon peut subdiviser en (défini. Dautre part, cest à lopposition [Ø/((R)], au trait sémantique « ( coïncident à la situation dénoncé » que nous rattachons le paramètre « moment de lénoncé » éventuellement convoqué dans la désignation du procès. Labsence de référence à un locuteur est fondamentale dans lanalyse de linfinitif. Il est bien évident quen absence de désignation du locuteur de lénoncé, il y a aussi absence de désignation de la situation dénoncé. Ainsi, le trait « non-coïncident à la situation dénoncé » dénoté par le R renvoie-t-il à une situation dénoncé non désignée en se combinant avec le Ø de la personne, ce qui se combine avec le réinvestissement sémantique du [Ø/(ai/a)] où le zéro de linfinitif désigne une neutralité sur la manière de représenter le découpage dans le temps ce qui est logique, puisquon ne désigne plus de temporalité- ou de référer à la non-coïncidence à la personne, à la situation ce qui est logique puisquil ny a ni personne ni situation désignée.
Conclusion
Lanalyse morphologique que nous proposons et qui ne diffère des autres analyses que dans la mesure où elle pose des zéros qui prennent sens par rapport à la matérialité dune marque, a permis de mettre en évidence la combinaison de deux morphèmes Ø/((R) et Ø /(ai/a) et délaborer lhypothèse que le futur et le conditionnel sopposeraient au passé simple et à limparfait par le morphème ( R - quils partageraient avec linfinitif -, alors que passé simple et futur sopposeraient à limparfait et au conditionnel par le morphème a/ai, le présent sopposant à ces quatre formes par sa distribution de deux Ø.
Explorer le réinvestissement sémantique de ces oppositions nous a conduite à élaborer un système de combinaisons de valeurs dont la cohérence pourrait sembler purement théorique sil ne nous avait permis de rendre compte de la multiplicité des effets de sens de ces quatre temps. Ils combineraient ainsi deux valeurs : le « ( potentiel » qui sous-catégorise le trait sémantique «non-coïncident à la situation dénoncé » par leur opposition avec le présent et le « ( défini » qui sous catégorise le trait sémantique « déterminé » qui loppose avec le présent.
Ces oppositions peuvent se résumer sous la forme de ce tableau :
CoïncidentNon coïncidentPotentielnon potentielDéterminéDéfinifutur passé simpleIndéfiniconditionnelimparfaitIndéterminé PrésentInfinitif
En effet, le concept de potentiel, appliqué à linfinitif, permet de rendre compte de la latitude de réinvestissement sémantique de la forme figée de linfinitif, mais aussi du fait que les procès au futur et au conditionnel ne sont que des procès « possibles » et non pas avérés au contraire du passé simple et de limparfait.
Le concept de « défini » désigne un procès identifié. Comme il se combine avec le (potentiel, il peut désigner un procès délimité dans sa temporalité antérieure au moment de lénoncé ou LE procès possible non-coïncident au moment de lénoncé.
Nous avons émis lhypothèse que le concept « défini » était commun à la détermination nominale et quil désignait notre appréhension du réel selon quon le découpe en objets ou quon le restitue sous la forme dun continuum.
Cette analyse ne pose pas comme prioritaire la notion de temporalité qui napparaît que comme un paramètre parmi dautres de la situation dénoncé servant de référence à laccomplissement du procès désigné. Nous avons vu dailleurs que la prise en compte de ces paramètres pouvaient être aléatoire. Ainsi, combiné au concept « non-défini », le paramètre nié par le trait « non-coïncident » avec la situation dénoncé peut être autre que celui du moment dénoncé, ce qui permet alors de désigner un autre je que celui de la situation dénoncé ou un monde fictif, autre que celui où sinscrit la situation dénoncé.
Considérer la temporalité comme un des éléments de la situation dénoncé qui sert de référence au procès désigné, la met à égalité avec des phénomènes qui sont traditionnellement rattachés aux modalités « non-prise en charge de son énoncé par le locuteur», inscription du procès dans un « monde fictif », par exemple. Dès lors, ces notions entrent en concurrence à un même niveau celui de la référence à la situation dénoncé- et non plus en relations hiérarchisées.
En définitive, cette thèse nous a menée en-deçà de certaines ambitions affichées au départ et au-delà dautres ambitions.
Au-delà de ce que nous pensions trouver mais un au-delà curieusement tourné vers le centre du sujet, vers son noyau dur qui nous a demandé un approfondissement des concepts convoqués pour espérer résoudre les contradictions de lanalyse de linfinitif, de limparfait et du conditionnel, contradictions quil a fallu lever une à une et qui nous ont amenée à nous interroger sur le concept de « (défini » que ne permettait de le postuler les quelques exemples du départ.
Nous frotter aux analyses existantes a pu être un jeu dangereux à certains moments, mais rétrospectivement cette démarche nous apparaît comme incontournable. Que ce soit parce quelles apportaient des éléments de solution ou parce quelles pointaient des difficultés que nous aurions peut-être esquivées, ces analyses nous ont, en définitive, permis dapprofondir notre recherche.
Considérant quil était possible de faire dun écrivain parmi dautres- le partenaire privilégié de notre recherche, nous avons aussi exploité la langue de Céline dans Voyage au bout de la nuit, cherchant à repérer, dans un va-et-vient entre la linguistique et la stylistique, le parti quil a tiré de la polysémie des valeurs des « temps ».
Le concept « (défini » a maille à partir avec notre saisie du monde. Il est clair que ce concept mériterait dêtre affiné encore, à la lumière de la détermination nominale. Lhomme structure non seulement son langage mais aussi le réel qui, sans cette faculté rationnelle, serait perçu par nous comme un continuum. Lhomme y découpe des « tranches de réel » et les oppose les unes aux autres pour les appréhender. Dire, cest aussi découper, opposer du matériau phonique pour désigner un réel lui-même construit par lhomme de la même manière. Dès lors, il nest pas surprenant que le langage signifie ces opérations elles-mêmes, que certaines formes, comme le passé simple et le futur, désignent lopération de découpage alors que dautres, comme limparfait et le conditionnel désignent labsence de découpage. Que les variantes verbales soient non seulement des structures rationnelles mais quelles puissent, par leur réinvestissement sémantique, désigner notre mode rationnel dappréhension du réel, voilà qui nous conduit très loin du système temporel et modal généralement adopté.
En définitive, notre recherche sest centrée sur le système doublement symétrique de la combinaison des valeurs « ( défini » et « ( potentiel », en examinant quels pouvaient être les paramètres convoqués dans labsence de coïncidence à la situation de lénoncé. Si nous avons pu montrer la pertinence de lexploitation sémantique de ce « carré logique », lanalyse du présent reste à mener. Elle permettrait sans doute, du moins nous lespérons, de confirmer le bien-fondé des analyses sur la référence à la situation dénoncé que nous avons menées.
Mais notre analyse laisse bien dautres pistes inexplorées et est bien en-deçà de lambition (sans doute trop prétentieuse) de rendre compte de lensemble du système verbal. Elle aboutit pourtant déjà à une mise en cause du système hiérarchisé des modes et des temps. Dune part, parce quelle met la notion temporelle à la marge des valeurs et dautre part, parce que, sur le plan morphologique, le fait de reconnaître que suffixe R de linfinitif peut être le même morphème qui oppose le futur et le conditionnel au passé simple et à limparfait fait également éclater larchitecture classique. En effet, dun côté, linfinitif, en raison de sa forme impersonnelle, ne peut prétendre à une place dans lindicatif. De lautre, le futur et le conditionnel ne peuvent se dissocier du passé simple et de limparfait avec lesquels ils partagent des morphèmes communs. Dès lors, faut-il comprendre le système verbal comme une combinatoire de morphèmes qui formerait des constellations incomplètes ?
Cette voie nest encore quune perspective à lissue de cette recherche. Et elle ne pourra être explorée sans prendre en compte lensemble du système verbal. On le voit, le voyage est encore long qui mène au bout de la nuit.
Difficile de mettre un point final à cette recherche imbriquée au cur dun réseau de relations foisonnantes
et dailleurs nous nen mettrons pas, ayant trop conscience du fait que certaines de nos analyses pourraient être approfondies encore et que certaines de nos conclusions pourraient fort bien nêtre que des étapes provisoires.
« On ne sera tranquille que lorsque tout aura été dit, une bonne fois pour toutes, alors enfin on fera silence et on aura plus peur de se taire. » L-F. Céline, Voyage au bout de la nuit.
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Synopsis : A formal and conceptual analysis of the verbal system of Contemporary French.
At the intersection of the past historic and the imperfect tense, the future and the conditional, the concepts of potential and definite.
A formal analysis of the verbal endings in the indicative mode draws special attention to the combination of two morphemes, [Ø/(±R)] and [Ø/(ai/a)]. Thus, the conditional and future tenses differ from the other indicative tenses in that they share the +R morpheme and it can be postulated that it is also shared by the infinitive. Furthermore, they differ from one another in the opposition between ai and a, which also differentiates the imperfect tense from the past historic when it is combined with the morpheme R. This statement sheds light on the relationship between the various indicative tenses. Indeed, taking into account a further opposition allows the predominance of temporality in analyses of tenses in the indicative to be questioned while focusing on the deconstruction of the value combinations. Thus, the analysis allows the diversity of meanings to be accounted for and at the same time avoids a too large panel of temporal, modal or aspectual explanations according to the context.
The first part of the doctoral thesis turns on the relationship between the morphological analysis and the various formal studies that have been undertaken on the future and the conditional tenses.
In a second part, in a confrontation with the already existing conceptual studies on the infinitive, the past historic, the imperfect tense, the future and the conditional, we will explore the semantic side of the hypothesis that states that there is a combination of a ±R morpheme with an ai/a morpheme. Such a hypothesis compels us to characterize the semantic value of the ±R morpheme on the one hand the ± potential concept will be associated with it and on the other hand, to redefine the opposition between the imperfect tense and the past historic, since it is this very opposition that can be found in the future/conditional pair the ± definite concept will then be suggested.
Taking into account the combination of the two semantic features enables us to undermine complexity in utterances whose richness is only equalled by their diversity.
Titre : Analyse formelle et conceptuelle du système verbal du français contemporain. A la croisée du passé simple et de limparfait, du futur et du conditionnel, les concepts de « potentiel » et de « défini ».
L'analyse formelle des variantes fléchies du verbe à lindicatif aboutit à la mise en évidence de la combinaison de deux morphèmes [Ø/(±R)] et [Ø/ai/a]. Cest ainsi que le conditionnel et le futur se différencient des autres temps de lindicatif par la présence du (+R)- dont on peut postuler quil est commun également à linfinitif- mais se distinguent lun de lautre par lopposition ai/a, opposition qui différencie également limparfait du passé simple en se combinant au (R).
Ce constat éclaire de façon nouvelle la relation qui se construit entre les différents « temps » du mode indicatif. En effet, la prise en compte dune opposition supplémentaire conduit à réinterroger la prédominance de la temporalité dans les analyses des « temps » de lindicatif au profit dune déconstruction de la combinaison des valeurs. Cette analyse permet alors de rendre compte de la diversité des effets de sens tout en évitant latomisation des explications temporelles, modales, aspectuelles au gré des occurrences.
La première partie de la thèse sarticule autour de la relation entre cette analyse morphologique et les différentes analyses formelles du futur et du conditionnel qui ont pu être menées auparavant.
Dans un second temps, se nourrissant de la confrontation avec les analyses conceptuelles existantes de linfinitif, du passé simple, de limparfait, du futur et du conditionnel, elle explore le versant sémantique de lhypothèse de lexistence dun morphème ±R qui se combine avec un autre morphème a/ai. Hypothèse qui oblige, dune part, à caractériser la valeur sémantique du morphème dénoté par ±R et cest le concept ±potentiel qui lui sera associé, dautre part, à redéfinir lopposition imparfait/passé simple puisque cest cette même opposition qui se retrouve dans le couple futur/conditionnel. Cest le trait ± défini qui sera proposé.
La prise en compte de la combinaison de ces deux traits sémantiques permet de déjouer la complexité dénoncés dont la richesse na dégal que la variété.
Mots-clés : imparfait, passé simple, futur, conditionnel, infinitif, temps verbaux, morphologie, sémantique, défini.
Discipline : Linguistique française
Laboratoire de rattachement : LIDILE- Analyse, ingénierie et didactique des langues et langages spécialisés (EA 3874)- Université Rennes 2, place du Recteur Henri-Le Moal, 35200 RENNES.
ADDIN EN.CITE NOREIKO19803280328NOREIKO, Stephen F.1980Un modèle des temps verbaux du françaisRevue de linguistique romane44108-120NOREIKO, Stephen F. 1980. Un modèle des temps verbaux du français. Revue de linguistique romane 44:108-120., p.108.
Précisons demblée que nous limitons volontairement notre analyse à la forme simple de ces temps de lindicatif.
ADDIN EN.CITE URIEN19842190219URIEN, Jean-Yves1984Marque et immanence dans la théorie du signeTétralogiques1PUR7-32URIEN, Jean-Yves. 1984. Marque et immanence dans la théorie du signe. Tétralogiques 1:7-32, p.31.
Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE DENDALE20012377237DENDALE, Patrick2001Les problèmes linguistiques du conditionnel françaisDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisParisKlincksieck7-16DENDALE, Patrick. 2001. Les problèmes linguistiques du conditionnel français. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 7-16. Paris: Klincksieck, p.10.
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ADDIN EN.CITE ZINK2291229ZINK, GérardMorphologie du français médiévalIbid, p.179.
Le dernier mouvement en date étant la montée en puissance dune nouvelle périphrase « aller + infinitif » pour désigner le futur.
Ainsi de cette définition à laquelle aboutissent, en définitive, Blanche-Benveniste et Van Den Eynde : « Si lon opte pour une analyse selon laquelle le futur est composé de radical + morphème infinitif + verbe avwar au présent, on peut opter pour une analyse analogue du conditionnel, sans devoir faire appel à une seule nouvelle règle : radical + morphème infinitif + verbe avwar à limparfait. » ADDIN EN.CITE VAN DEN EYNDE19702140214VAN DEN EYNDE, KarelBLANCHE-BENVENISTE, Claire1970Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail.Orbis404-429VAN DEN EYNDE, Karel et BLANCHE-BENVENISTE, Claire. 1970. Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail. Orbis:404-429, p.418.
On peut noter aussi que lanalyse du futur par Gross qui sappuie sur la grande similarité entre les désinences du verbe avoir et du verbe aller au présent pour poser une équivalence entre futur simple et futur périphrastique, rejoint en définitive lanalyse sous-tendue par létymologie, puisquelle aboutit à léquation : futur = présent + infinitif. ADDIN EN.CITE GROSS19682111211GROSS, Maurice1968Grammaire transformationnelle du français. Syntaxe du verbeParisLarousseGROSS, Maurice. 1968. Grammaire transformationnelle du français. Syntaxe du verbe. Paris: Larousse.
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La remarque qui suit pourrait être élargie :
« Léquation [radical 2 + -r- = infinitif] est, dans le cas des verbes monoradicaux, une tautologie puisque ces verbes par définition posent [radical 1 = radical 2]. »
Elle peut être étendue à la tradition de lensemble de la conjugaison française : si cette tradition des conjugaisons en trois groupes est si pérenne, cest bien parce que 90% des verbes français appartiennent au premier groupe de la conjugaison, la simplicité de conjugaison de la plupart de ces verbes (généralement à une base) très largement majoritaires est telle que nimporte quelle méthode de classement peut donner lillusion de sa pertinence.
ADDIN EN.CITE CURAT1991717CURAT, Hervé1991Morphologie verbale et référence temporelle en français moderne essai de sémantique grammaticaleLangue et cultures 24Genève ParisDroz337REF RENNES 2 : XD 445/20BU Sciences Lettres 44 500 CUR 000145TempsVerbesIbid, p. 188.
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck, p. 5.
ADDIN EN.CITE YVON195230030YVON, Henri1952Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français?Le Français moderne4 (20è année)ParisYVON, Henri. 1952. Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français? Le Français moderne 4 (20è année), p. 263.
ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur, p.101. Notons que cette analyse rejoint celle de Gross.
ADDIN EN.CITE GUILLAUME1929111GUILLAUME, Gustave1929Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des tempsParisChampion1984GUILLAUME, Gustave. 1929. Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des temps. Paris: Champion, p.54.
ADDIN EN.CITE YVON195230030YVON, Henri1952Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français?Le Français moderne4 (20è année)ParisYVON, Henri. 1952. Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français? Le Français moderne 4 (20è année), p. 263-264.
Voir le compte-rendu d ADDIN EN.CITE ARNAVIELLE19953540354ARNAVIELLE, Teddy1995André Lanly, retour au conditionnelRevue des langues romanes99-1186-188ARNAVIELLE, Teddy. 1995. André Lanly, retour au conditionnel. Revue des langues romanes 99-1:186-188.
ADDIN EN.CITE LANLY19581710171LANLY, André1958Nous avons à parler maintenant du futurLe Français moderne26p.16-46LANLY, André. 1958. Nous avons à parler maintenant du futur. Le Français moderne 26:p.16-46, p.17.
Tous les imparfaits du subjonctif devenaient morphologiquement déficients surtout à la première personne du singulier après la chute du m final (irem > ire).
ADDIN EN.CITE LANLY19571700170LANLY, André1957Proposition hypothétique et conditionnelLe Français moderne25, 2p. 101-120LANLY, André. 1957. Proposition hypothétique et conditionnel. Le Français moderne 25, 2:p. 101-120, p.110.
ADDIN EN.CITE LANLY19571700170LANLY, André1957Proposition hypothétique et conditionnelLe Français moderne25, 2p. 101-120Ibid, p.111-112.
ADDIN EN.CITE LANLY20022210221LANLY, André2002Plaidoyer pour le conditionnel en -raisL'information grammaticale9520-22LANLY, André. 2002. Plaidoyer pour le conditionnel en -rais. L'information grammaticale 95:20-22, p.21.
ADDIN EN.CITE LANLY19581710171LANLY, André1958Nous avons à parler maintenant du futurLe Français moderne26p.16-46LANLY, André. 1958. Nous avons à parler maintenant du futur. Le Français moderne 26:p.16-46, p.38-39.
Louis Chaffurin, Nouvelle Grammaire anglaise, § 182. Cité par Lanly, ADDIN EN.CITE LANLY19581710171LANLY, André1958Nous avons à parler maintenant du futurLe Français moderne26p.16-46Ibid, p. 20.
ADDIN EN.CITE LANLY19731720172LANLY, André1973Sur le conditionnel français et roman : à propos d'une remarque de Paul ImbsTravaux de linguistique et de littératureMélanges P. Imbs, 11, 1391-399LANLY, André. 1973. Sur le conditionnel français et roman : à propos d'une remarque de Paul Imbs. Travaux de linguistique et de littérature Mélanges P. Imbs, 11, 1:391-399, p.398-399.
ADDIN EN.CITE LANLY19581710171LANLY, André1958Nous avons à parler maintenant du futurLe Français moderne26p.16-46LANLY, André. 1958. Nous avons à parler maintenant du futur. Le Français moderne 26:p.16-46, p.24-25.
ADDIN EN.CITE WAGNER19392221222WAGNER, R.-L.1939Les Phrases hypothétiques introduites par si dans la langue française des origines à la fin du XVIe siècleParisDrozWAGNER, R.-L. 1939. Les Phrases hypothétiques introduites par si dans la langue française des origines à la fin du XVIe siècle. Paris: Droz, p.81-82.
ADDIN EN.CITE WAGNER19392221222WAGNER, R.-L.1939Les Phrases hypothétiques introduites par si dans la langue française des origines à la fin du XVIe siècleParisDrozIbid, p.524.
ADDIN EN.CITE LANLY19581710171LANLY, André1958Nous avons à parler maintenant du futurLe Français moderne26p.16-46LANLY, André. 1958. Nous avons à parler maintenant du futur. Le Français moderne 26:p.16-46, p.33.
ADDIN EN.CITE Pinchon198137137PINCHON, JacquelineCOUTE, Bernard1981Le système verbal du françaisParisNathanPINCHON, Jacqueline et COUTE, Bernard. 1981. Le système verbal du français. Paris: Nathan.p.11.
On peut nous reprocher une telle insistance mais ce retour aux fondements de lanalyse nous semble incontournable pour appuyer notre démarche.
ADDIN EN.CITE MARTINET19852171217MARTINET, André1985Syntaxe généraleCollection UParisArmand ColinMARTINET, André. 1985. Syntaxe générale. Paris: Armand Colin.p.33.
ADDIN EN.CITE HJELMSLEV19712201220HJELMSLEV, Louis1971La structure fondamentale du langageParisLes éditions de MinuitHJELMSLEV, Louis. 1971. La structure fondamentale du langage. Paris: Les éditions de Minuit.p.223.
ADDIN EN.CITE MARTINET19582120212MARTINET, André1958De l'économie des formes du verbe en français parléStudia philologica et litteraria in honorem L. Spitzer. repris dans Le français sans fard, PUF (1969)ParisPUF (1969)MARTINET19582120212MARTINET, André1958De l'économie des formes du verbe en français parléStudia philologica et litteraria in honorem L. Spitzer. repris dans Le français sans fard, PUF (1969)ParisPUF (1969)MARTINET, André. 1958. De l'économie des formes du verbe en français parlé. Studia philologica et litteraria in honorem L. Spitzer. repris dans Le français sans fard, PUF (1969).,p.99.
ADDIN EN.CITE MARTINET19792161216MARTINET, André1979Grammaire fonctionnelle du françaisParisCrédif-DidierMARTINET, André. 1979. Grammaire fonctionnelle du français. Paris: Crédif-Didier.p. 98.
Cet ouvrage reprend larticle « Essai danalyse distributionnelle du verbe » paru en 1966 dans Le Français Moderne.
ADDIN EN.CITE DUBOIS19671901190DUBOIS, Jean1967Grammaire structurale du français. Le verbe.ParisLarousseDUBOIS, Jean. 1967. Grammaire structurale du français. Le verbe. Paris: Larousse.
ADDIN EN.CITE DUBOIS19662640264DUBOIS, Jean1966Essai d'analyse distributionnelle du verbeLe Français moderne34185-209DUBOIS, Jean. 1966. Essai d'analyse distributionnelle du verbe. Le Français moderne 34:185-209., p. 186.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin.p.38. Voir aussi le chapitre intitulé « Faut-il poser un morphème zéro ? » de notre partie morphologique, p.50.
Voir, à ce propos, le chapitre sur labsence significative II-1-1-5.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin.p.38-39.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinIbid.p.39-40.
ADDIN EN.CITE WILMET20012017201WILMET, Marc2001L'architectonique du "conditionnel"Dendale P. et Tasmowski L.Le conditionnel en françaisParisKlincksieckRecherches Linguistiques n°25WILMET, Marc. 2001. L'architectonique du "conditionnel". In Le conditionnel en français, ed. Dendale P. et Tasmowski L. Paris: Klincksieck., p. 26.
ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur. p.59.
ADDIN EN.CITE Pinchon198137137PINCHON, JacquelineCOUTE, Bernard1981Le système verbal du françaisParisNathanPINCHON, Jacqueline et COUTE, Bernard. 1981. Le système verbal du français. Paris: Nathan., p.50.
ADDIN EN.CITE PINCHON198137137PINCHON, JacquelineCOUTE, Bernard1981Le système verbal du françaisParisNathanIbid. p.58.
Cest nous qui soulignons ce ou et le suivant dans la glose de Pinchon et Couté.
ADDIN EN.CITE PINCHON198137137PINCHON, JacquelineCOUTE, Bernard1981Le système verbal du françaisParisNathanPINCHON, Jacqueline et COUTE, Bernard. 1981. Le système verbal du français. Paris: Nathan.,p.37.
ADDIN EN.CITE PINCHON198137137PINCHON, JacquelineCOUTE, Bernard1981Le système verbal du françaisParisNathanIbid.p. 38.
ADDIN EN.CITE VAN DEN EYNDE19702140214VAN DEN EYNDE, KarelBLANCHE-BENVENISTE, Claire1970Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail.Orbis404-429VAN DEN EYNDE, Karel et BLANCHE-BENVENISTE, Claire. 1970. Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail. Orbis:404-429., p. 418.
ADDIN EN.CITE VAN DEN EYNDE19702140214VAN DEN EYNDE, KarelBLANCHE-BENVENISTE, Claire1970Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail.Orbis404-429Ibid. p. 417.
ADDIN EN.CITE VAN DEN EYNDE19702140214VAN DEN EYNDE, KarelBLANCHE-BENVENISTE, Claire1970Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail.Orbis404-429Ibid. p.417-418.
ADDIN EN.CITE LE GOFFIC19972131213LE GOFFIC, Pierre1997Les formes conjuguées du verbe français. Oral et écrit.ParisOphrysLE GOFFIC, Pierre. 1997a. Les formes conjuguées du verbe français. Oral et écrit. Paris: Ophrys. p. 9.
ADDIN EN.CITE LE GOFFIC19972131213LE GOFFIC, Pierre1997Les formes conjuguées du verbe français. Oral et écrit.ParisOphrysLE GOFFIC19972131213LE GOFFIC, Pierre1997Les formes conjuguées du verbe français. Oral et écrit.ParisOphrysIbid.p.9-10
Il faudrait encore ajouter des présentations mixtes qui correspondent essentiellement à un souci pédagogique comme, par exemple celle de Csécsy : « On constate, en français, deux principes de formation du futur, selon que les suffixes /re, ra, r((/, valables pour tous les verbes, sajoutent à la forme trouvée au singulier du présent de lindicatif (thème court) ou quils se greffent avec une coupure syllabique cependant différente- sur linfinitif. » ADDIN EN.CITE CSECSY19682181218CSECSY, Madeleine1968De la linguistique à la pédagogie. Le verbe français.ParisLe Français dans le Monde- Belc. Hachette/LarousseCSECSY, Madeleine. 1968. De la linguistique à la pédagogie. Le verbe français. Paris: Le Français dans le Monde- Belc. Hachette/Larousse., p.102.
Lallomorphisme qui pose des difficultés de découpage peut aboutir à des thèses qui nient toute possibilité danalyse structurale des temps. Voir à ce sujet :
ADDIN EN.CITE BONAMI20032580258BONAMI, OlivierBOYE, Gilles2003Supplétion et classes flexionnelles dans la conjugaison du françaisLangages152102-126BONAMI, Olivier et BOYE, Gilles. 2003. Supplétion et classes flexionnelles dans la conjugaison du français. Langages 152:102-126.
ADDIN EN.CITE BONAMIA paraître5527552BONAMI, OlivierBOYE, GillesA paraîtreRemarques sur les bases des conjugaisonsE. DELAIS-ROUSSARIE et L.LABRUNEDonnées et Modèles en PhonologieBONAMI, Olivier et BOYE, Gilles. A paraître. Remarques sur les bases des conjugaisons. In Données et Modèles en Phonologie, ed. E. DELAIS-ROUSSARIE et L.LABRUNE.
ADDIN EN.CITE YVON195230030YVON, Henri1952Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français?Le Français moderne4 (20è année)ParisYVON, Henri. 1952. Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français? Le Français moderne 4 (20è année)., p. 264.
ci-dessus, p. 22.
ADDIN EN.CITE SUNDELL19911391139SUNDELL, Lars.-Göran1991Le temps futur en français moderneAlmqvist & Wiksell International, Acta Universitatis UpsaliensisStockholmStudia Romanica Upsaliensia49SUNDELL, Lars.-Göran. 1991. Le temps futur en français moderne.vol. 49: Almqvist & Wiksell International, Acta Universitatis Upsaliensis. Stockholm: Studia Romanica Upsaliensia. , p.10.
ADDIN EN.CITE PLENAT19812330233PLENAT, Marc1981L'"autre" conjugaison, ou De la régularité des verbes irréguliersCahiers de grammairen° 3PLENAT, Marc. 1981. L'"autre" conjugaison, ou De la régularité des verbes irréguliers. Cahiers de grammaire n° 3., p. 38.
ADDIN EN.CITE PLENAT19812330233PLENAT, Marc1981L'"autre" conjugaison, ou De la régularité des verbes irréguliersCahiers de grammairen° 3Ibid., p.41.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p. 40-41.
ADDIN EN.CITE MARTINET19792161216MARTINET, André1979Grammaire fonctionnelle du françaisParisCrédif-DidierMARTINET, André. 1979. Grammaire fonctionnelle du français. Paris: Crédif-Didier.p. 98.
Cest nous qui soulignons la présence dun découpage dans le découpage.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p. 62-63. Il ne prend pas en compte ces remarques par la suite.
Voir aussi louvrage de Lemaréchal entièrement consacré au zéro paru en 1997 : ADDIN EN.CITE LEMARECHAL19975511551LEMARECHAL, Alain1997Zéro(s)ParisPresses Universitaires de FranceLEMARECHAL, Alain. 1997. Zéro(s). Paris: Presses Universitaires de France et les articles récents consacrés au déterminant-zéro ou encore le colloque du Cerlico « Absence de marques et représentation de labsence » qui lui a été dédié en 1995.
ADDIN EN.CITE MARTINET19852171217MARTINET, André1985Syntaxe généraleCollection UParisArmand ColinMARTINET, André. 1985. Syntaxe générale. Paris: Armand Colin.p.60-61.
ADDIN EN.CITE MARTINET19852171217MARTINET, André1985Syntaxe généraleCollection UParisArmand ColinIbid., p.60-61.
ADDIN EN.CITE MARTINET19852171217MARTINET, André1985Syntaxe généraleCollection UParisArmand ColinIbid., p. 61.
ADDIN EN.CITE MARTINET19792161216MARTINET, André1979Grammaire fonctionnelle du françaisParisCrédif-DidierMARTINET, André. 1979. Grammaire fonctionnelle du français. Paris: Crédif-Didier.p.11-12.
Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE MARTINET19852171217MARTINET, André1985Syntaxe généraleCollection UParisArmand ColinMARTINET, André. 1985. Syntaxe générale. Paris: Armand Colin.p.61-62. Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE PINCHON198137137PINCHON, JacquelineCOUTE, Bernard1981Le système verbal du françaisParisNathanPINCHON, Jacqueline et COUTE, Bernard. 1981. Le système verbal du français. Paris: Nathan.,p.40-41.
Cest nous qui soulignons ce ou et le suivant dans la glose de Pinchon et Couté.
ADDIN EN.CITE Pinchon198137137PINCHON, JacquelineCOUTE, Bernard1981Le système verbal du françaisParisNathanPINCHON, Jacqueline et COUTE, Bernard. 1981. Le système verbal du français. Paris: Nathan. ,p.37.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p. 72-73.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinIbid.,p.73.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinIbid.p. 73.
ADDIN EN.CITE URIEN19842190219URIEN, Jean-Yves1984Marque et immanence dans la théorie du signeTétralogiques1PUR7-32URIEN, Jean-Yves. 1984. Marque et immanence dans la théorie du signe. Tétralogiques 1:7-32.p.20-21.
Voir également la remarque de Martinet, déjà citée plus haut : « Seules peuvent intervenir les considérations sémantiques ». ADDIN EN.CITE MARTINET19852171217MARTINET, André1985Syntaxe généraleCollection UParisArmand ColinMARTINET, André. 1985. Syntaxe générale. Paris: Armand Colin., p.61.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin. p.73
Ou comme le dit Urien : « La marque nest pas le matériau, cest-à-dire la séquence de phonèmes considérée en elle-même, mais de la variation de matériau, de la différence entre séquences, qui atteste le franchissement dune frontière sémiologique, quelle que soit la modalité de cette frontière structurale : valeur lexicale, textuelle, paradigmatique ou syntaxique, qui sont les composantes dune même capacité de grammaticalité. » ADDIN EN.CITE URIEN19842190219URIEN, Jean-Yves1984Marque et immanence dans la théorie du signeTétralogiques1PUR7-32URIEN, Jean-Yves. 1984. Marque et immanence dans la théorie du signe. Tétralogiques 1:7-32., p.13.
ADDIN EN.CITE URIEN19842190219URIEN, Jean-Yves1984Marque et immanence dans la théorie du signeTétralogiques1PUR7-32Ibid.p.27-28.
Je dor-s, nous dorm-ons. Il prend, nous pren-ons, ils prenn-ent. Je veu-x, nous voul-ons, ils veul-ent. Il di-t, nous dis-ons.
Il est évident que ce qu'on appelle "terminaisons des verbes" est pour nous une suite ordonnée de morphèmes. On reconnaîtra donc dans "e, es, e, ons, ez, ent" ou "s, s, t, ons, ez, ent" les morphèmes allomorphes de personne à lécrit.
Nous la noterons ainsi, au moins provisoirement.
Nous courrions/ nous courions mais nous prendrions/ nous prenions, nous irions/ nous allions, nous viendrions/ nous venions, etc.
Je renvoie à cet égard à la présentation que fait Urien de cette notion de métrique de lunité: « Si lon admet que ni le bruit ni le silence en eux-mêmes ne sont informatifs, mais seulement leur rapport, rendant le bruit exclusif du silence et le silence exclusif du bruit, alors il y a lieu de faire reposer labsence significative sur de la variation quantitative, appelée parfois juxtaposition ou agglutination. Reprenons le commode exemple turc [
] :
evØØ-Ø « la maison »
evler-Ø-Ø « les maisons »
evleri-Ø « leurs maisons »
evleri-m « mes maisons »
Tous ces mots ont « la même longueur » abstraite : celle de leur programme formel. En effet, le fragment ler- nindique pas en soi le pluriel, et le silence le singulier ; cest leur rapport qui marque la valeur de nombre. En conséquence ler- nest pas un morphème : cest la différence constante ler- `" -Ø- qui est morphématique, et témoigne de la capacité de lexique. [& ] Même si matériellement il y a moins, il y a structuralement le compte. L agglutination est inséparable du « zéro » qui est au cSur de toute grammaire, y compris des flexions dès lors quil y a des « cas-zéro » tels que limpératif, le vocatif ou linfinitif. » ADDIN EN.CITE URIEN19842190219URIEN, Jean-Yves1984Marque et immanence dans la théorie du signeTétralogiques1PUR7-32URIEN, Jean-Yves. 1984. Marque et immanence dans la théorie du signe. Tétralogiques 1:7-32.,p. 27-28.
Notons que cette analyse, si elle nest pas celle de Martinet, nentre pas en contradiction avec ses principes de pertinence du morphème zéro : « Lorsquune forme zéro nest que la variante dun signifiant représenté ailleurs positivement, la question de lexistence du monème en cause ne se pose pas : il y a, en français, un monème « subjonctif » parce que, dans certains contextes, le choix de certaines formes, comme /don-i-((/, /don-i-e/, distinctes de celles de lindicatif, correspond à un effet de sens particulier. Dans dautres contextes, avec la majorité des monèmes verbaux, en combinaison avec sg. 1 2 3 et pl.3, aucune marque formelle napparaît : le subjonctif de donner à ces personnes est /don/ cest-à-dire quil est identique au signifiant du monème verbal. On a intérêt, dans ce cas, à parler de variante zéro du signifiant. » ( ADDIN EN.CITE MARTINET19852171217MARTINET, André1985Syntaxe généraleCollection UParisArmand ColinMARTINET, André. 1985. Syntaxe générale. Paris: Armand Colin.,p.62.) Ici, le paradigme du suffixe de temps du futur comporte, comme pour le subjonctif , une alternance entre un matériau et un zéro.
Lamalgame du (( conduit à proposer deux découpages aléatoires.
Ce découpage qui contredit loral nest quune proposition pour solutionner la difficulté à présenter un amalgame dans le cadre dun découpage. Le ont amalgame le suffixe de temps et le suffixe de personne.
Et, précisons-le, au passé simple de la première conjugaison pour les trois premières personnes. Si lon admet (voir plus loin) que futur et passé simple partagent les mêmes suffixes de temps, on pourra alors parler de variantes combinatoires de ces suffixes de personnes.
ADDIN EN.CITE GUILLAUME1929111GUILLAUME, Gustave1929Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des tempsParisChampion1984GUILLAUME, Gustave. 1929. Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des temps. Paris: Champion. [Reprinted in 1984].p.54
Comme le font Blanche-Benveniste et Van den Eynde dans ADDIN EN.CITE VAN DEN EYNDE19702140214VAN DEN EYNDE, KarelBLANCHE-BENVENISTE, Claire1970Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail.Orbis404-429VAN DEN EYNDE, Karel et BLANCHE-BENVENISTE, Claire. 1970. Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail. Orbis:404-429., p. 417-418.
Nous aurions pu dailleurs, comme nous lavons vu, limiter ces listes de suffixes en faisant jouer lallomorphisme au niveau des bases pour le futur et le conditionnel mais aussi pour linfinitif. Cela aurait eu pour effet daugmenter la coïncidence entre les deux séries sans pour autant parvenir à une coïncidence totale.
Il sagit là dune hypothèse de travail dans laquelle nous rejoignons un résultat provisoire de ADDIN EN.CITE VAN DEN EYNDE19702140214VAN DEN EYNDE, KarelBLANCHE-BENVENISTE, Claire1970Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail.Orbis404-429VAN DEN EYNDE, Karel et BLANCHE-BENVENISTE, Claire. 1970. Essai d'analyse de la morphologie du verbe français. Présentation d'hypothèses de travail. Orbis:404-429.
Cette hypothèse de travail sappuie uniquement sur lanalogie formelle mais ne peut être confirmée par une analyse morphologique, linfinitif sopposant aux temps de lindicatif par son absence de suffixe de personne.
Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE DENDALE20012377237DENDALE, Patrick2001Les problèmes linguistiques du conditionnel françaisDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisParisKlincksieck7-16DENDALE, Patrick. 2001. Les problèmes linguistiques du conditionnel français. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 7-16. Paris: Klincksieck.p.10.
Nous renvoyons à notre introduction, p. 14-15.
Cf. Guillaume « Temps et verbe » p. 3.
ADDIN EN.CITE WILMET20012017201WILMET, Marc2001L'architectonique du "conditionnel"Dendale P. et Tasmowski L.Le conditionnel en françaisParisKlincksieckRecherches Linguistiques n°25WILMET, Marc. 2001. L'architectonique du "conditionnel". In Le conditionnel en français, ed. Dendale P. et Tasmowski L. Paris: Klincksieck., p.33.
ADDIN EN.CITE WILMET20012017201WILMET, Marc2001L'architectonique du "conditionnel"Dendale P. et Tasmowski L.Le conditionnel en françaisParisKlincksieckRecherches Linguistiques n°25Ibid., p.33.
qui sajoutent à celui de la personne.
« La question serait grandement éclairée si lon réussissait à élucider la valeur exacte de r-. » ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck., p.41.
ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p.59-60.
ADDIN EN.CITE TASSIE19633570357TASSIE, James1963Le conditionnel, tiroir uniquement modalRevue canadienne de linguistique920-30TASSIE, James. 1963. Le conditionnel, tiroir uniquement modal. Revue canadienne de linguistique 9:20-30.
Nous y reviendrons.
ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p.101.
Guillaume, G. « De la double action séparative du présent » qui figure dans les Mélanges offerts à M.A. Dauzat, p. 142, cité par ADDIN EN.CITE YVON195230030YVON, Henri1952Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français?Le Français moderne4 (20è année)ParisYVON, Henri. 1952. Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français? Le Français moderne 4 (20è année)., p. 262.
ADDIN EN.CITE YVON195230030YVON, Henri1952Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français?Le Français moderne4 (20è année)ParisIbid., p.265.
ADDIN EN.CITE MOIGNET19573180318MOIGNET, Gérard1957Pitié pour l'indicatif, ou nomenclature grammaticale et linguistique structuraleLe Français moderne25161-169MOIGNET, Gérard. 1957. Pitié pour l'indicatif, ou nomenclature grammaticale et linguistique structurale. Ibid. 25:161-169.
ADDIN EN.CITE MOIGNET19573180318MOIGNET, Gérard1957Pitié pour l'indicatif, ou nomenclature grammaticale et linguistique structuraleLe Français moderne25161-169Ibid., p.164. Si Guillaume fait la même remarque que nous sur la symétrie des 4 formes verbales (imparfait, passé simple, conditionnel, futur) sans aboutir aux mêmes conclusions sémantiques, nest-ce pas parce quil place le présent au milieu des autres formes verbales, milieu quil investit effectivement de sens en reliant tous les temps au présent.
ADDIN EN.CITE MOIGNET19573180318MOIGNET, Gérard1957Pitié pour l'indicatif, ou nomenclature grammaticale et linguistique structuraleLe Français moderne25161-169Ibid., p. 167.
ADDIN EN.CITE DAMOURETTE1936474DAMOURETTE, JeanPICHON, Emile1936Auxiliaires - Temps - Modes - VoixDes mots à la pensée - Essai de grammaire de la langue françaiseParisD'ArtreyVDAMOURETTE, Jean et PICHON, Emile. 1936a. Auxiliaires - Temps - Modes - Voix. In Des mots à la pensée - Essai de grammaire de la langue française. Paris: D'Artrey.
Et selon Gagnepain, il ne faut voir aucune hiérarchie entre lobjet et les paramètres de la situation dénoncé : « Lobjet nommé nest quun des éléments de la situation à laquelle le rhétoricien que nous sommes tente sans y parvenir de rendre globalement son message adéquat. Les facteurs, en effet, sont nombreux qui de lextérieur le motivent ; en même temps que celui que nous venons de mentionner et sur lequel laccord est unanime, il est clair que son émetteur peu ou prou sy exprime, que le récepteur en tant que destinataire, intervenant ou non, sy profile, que le vecteur, enfin, ainsi que les circonstances de son élaboration le conditionnent, ne fût-ce quen lui mesurant et lespace et le temps. Entre eux, aucune hiérarchie. Chacun à sa façon précipite lintégralité du dit. Stables ou transitoires, les cristallisations qui en résultent interfèrent sans se confondre et cest à leur somme, ou plutôt à leur syncrasie, que sapplique le terme, gratuitement restreint, de « contenu » ». ADDIN EN.CITE GAGNEPAIN19824851485GAGNEPAIN, Jean1982Du vouloir direParisLivre et communicationGAGNEPAIN, Jean. 1982. Du vouloir dire. Paris: Livre et communication., p.70.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93ALLAIRE, Suzanne. 1984. L'infinitif a-t-il un sujet? Tétralogiques 1:49-93., p.86.
ADDIN EN.CITE GUILLAUME1929111GUILLAUME, Gustave1929Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des tempsParisChampion1984GUILLAUME, Gustave. 1929. Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des temps. Paris: Champion, p.7.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1BENVENISTE, Emile. 1966a. Problèmes de linguistique générale.vol. 1. Paris: Gallimard., p.225.
« Lacte individuel dappropriation de la langue introduit celui qui parle dans sa parole. Cest là une donnée constitutive de lénonciation. La présence du locuteur à son énonciation fait que chaque instance de discours constitue un centre de référence interne. » ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664811481BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard2Ibid.vol. 2., p.82.
ADDIN EN.CITE REMI-GIRAUD19884837483REMI-GIRAUD, Sylviane1988Les grilles de Procuste. Description comparée de l'infinitif en français, grec ancien, allemand, anglais et arabeREMI-GIRAUD, SylvianeL'infinitifLyonPresses Universitaires de Lyon11-68REMI-GIRAUD, Sylviane. 1988a. Les grilles de Procuste. Description comparée de l'infinitif en français, grec ancien, allemand, anglais et arabe. In L'infinitif, ed. Sylviane REMI-GIRAUD, 11-68. Lyon: Presses Universitaires de Lyon., p .14.
Comme on le sait, les exemples sont très nombreux :
je sucre le sucre
je table la table
je crie le cri criard-
je mure le mur mural-
je lampe la lampe
je course- la course courant- couramment
je brise- la brise
je brasse le bras
je raisonne- la raison raisonnable - raisonnablement
je faute la faute fautif-
je réveille le réveil
je travaille le travail
Ces exemples ne se veulent pas exhaustifs de lanalyse du verbe et du nom.
Par un marquage discontinu, je
s (ou je
.e), tu
s (ou tu
es), il
t (ou il
e), nous
ons, vous
ez, ils
ent.
Bien que ces propos puissent paraître élémentaires, il nous a semblé nécessaire de les rappeler dans la mesure où ils nous permettent de poser les bases de lanalyse.
« causer » dans les deux sens du terme car le locuteur dit un monde quil construit par le langage.
Les temps simples inscrivent laccomplissement du procès dans un rapport à la situation dénoncé ; les temps composés inscrivent laccompli du procès.
Nulle hiérarchie dans ces paramètres de la situation dénoncé. Cest lanalyse individuelle de lénoncé qui permettra de déterminer un pôle privilégié. Cest pourquoi il ne sagit pas de tout centrer sur le « temps » comme le fait Guillaume, ni sur le locuteur comme le fait Benveniste :
« Lacte individuel dappropriation de la langue introduit celui qui parle dans sa parole. Cest là une donnée constitutive de lénonciation. La présence du locuteur à son énonciation fait que chaque instance de discours constitue un centre de référence interne. » ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664811481BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard2BENVENISTE, Emile. 1966b. Problèmes de linguistique générale.vol. 2. Paris: Gallimard., p.82
« Une troisième série de termes afférents à lénonciation est constituée par le paradigme entier souvent vaste et complexe- des formes temporelles, qui se déterminent par rapport à lEGO, centre de lénonciation. Les « temps » verbaux dont la forme axiale, le « présent », coïncide avec le moment de lénonciation, font partie de cet appareil nécessaire.
Cette relation au temps mérite quon sy arrête, quon médite la nécessité, et quon sinterroge sur ce qui la fonde. On pourrait croire que la temporalité est un cadre inné de la pensée. Elle est produite en réalité dans et par lénonciation. De lénonciation procède linstauration de la catégorie du présent, et de la catégorie du présent naît la catégorie du temps. Le présent est proprement la source du temps. Il est cette présence au monde que lacte dénonciation rend seul possible, car, quon veuille bien y réfléchir, lhomme ne dispose daucun autre moyen de faire vivre le « maintenant » et de le faire actuel que de la réaliser par linsertion du discours dans le monde. » ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664811481BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard2BENVENISTE, Emile. 1966b. Problèmes de linguistique générale.vol. 2. Paris: Gallimard., p.83.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93ALLAIRE, Suzanne. 1984. L'infinitif a-t-il un sujet? Tétralogiques 1:49-93.
Qui correspond chez certains linguistes à laspect. Cf. ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p.47 : « Du fait de sa définition : « exprimer un procès, cest-à-dire un état ou une action », le verbe comporte une image du temps puisque létat ou laction supposent un commencement, un déroulement et une fin. »
en particulier chez les guillaumiens.
CORNEILLE, Le Cid, 1263-1266.
Ibid, 1271-1274.
ADDIN EN.CITE TOURATIER19891810181TOURATIER, Christian1989Récit et temps verbauxL'information grammaticale413-5TOURATIER, Christian. 1989. Récit et temps verbaux. L'information grammaticale 41:3-5., p. 5. On peut comparer aussi les rapprochements entre présent et imparfait aux confusions qui sont faites entre les prétérits anglosaxons et les temps passé simple et imparfait du français, sous prétexte que la traduction du français dans ces langues ne pose pas de problème.
Nous verrons, en effet, plus loin que lopposition (R ne se limite pas à une question de temporalité, voir p.
ADDIN EN.CITE NOREIKO19803280328NOREIKO, Stephen F.1980Un modèle des temps verbaux du françaisRevue de linguistique romane44108-120NOREIKO, Stephen F. 1980. Un modèle des temps verbaux du français. Revue de linguistique romane 44:108-120., p.112. Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE MINKOWSKI1995 [1933]5401540MINKOWSKI, E;1995 [1933]Le temps vécuParisPUFMINKOWSKI, E;. 1995 [1933]. Le temps vécu. Paris: PUF., p.156. Cité par ADDIN EN.CITE LE GOFFIC19973770377LE GOFFIC, Pierre1997Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski.Cahiers de praxématique29135-155LE GOFFIC, Pierre. 1997b. Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski. Cahiers de praxématique 29:135-155., p.150.
ADDIN EN.CITE LE GOFFIC19973770377LE GOFFIC, Pierre1997Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski.Cahiers de praxématique29135-155LE GOFFIC, Pierre. 1997b. Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski. Cahiers de praxématique 29:135-155., p. 153.
ADDIN EN.CITE LEEMAN20015477547LEEMAN, Danielle2001Pourquoi ne peut-on pas combiner si et le conditionnel?DENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe Conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz211-230LEEMAN, Danielle. 2001. Pourquoi ne peut-on pas combiner si et le conditionnel? In Le Conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 211-230. Metz: Université de Metz., p. 215-217.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p.70-71
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck.p.41.
Soulignons encore quil sagit dune hypothèse que nous avons choisi dexplorer. En effet, la distribution de morphèmes originale de linfinitif nautorise pas à poser une équivalence avec le R futur et conditionnel mais elle ne linterdit pas non plus.
Quitte à revenir sur cette question. Nous verrons, en effet, que cette analyse conventionnelle nest pas satisfaisante et quil faut analyser autrement la combinaison de morphèmes de linfinitif. Voir p. 288.
Cest ainsi que Maingueneau comprend, lui aussi, linfinitif, lui qui fait de la relation à la situation dénoncé le critère classificateur des modes : « Seul lindicatif peut situer lénoncé par rapport au moment de lénonciation ; de ce point de vue il est le mode de lactualisation maximale, si lon entend par là mise en relation de lénoncé et de son énonciation (et non laffirmation de lexistence, de la réalité dun fait). Le subjonctif, qui connaît personne et aspect, savère plus actualisant que le participe et linfinitif, qui ne véhiculent que laspect. Dailleurs, dans nombre de ses emplois le subjonctif ne sert pas à autre chose quà conférer une personne à linfinitif (cf. je veux partir/que tu partes
). Cette incapacité dactualiser est à lier à labsence dautonomie syntaxique du subjonctif ; les formes de ce mode (sauf tours figés ou archaïsmes) ne suffisent pas à asserter un énoncé, cest-à-dire à le poser comme vrai ou faux : dans Quil parte ! (comme dans Fermer la porte) on a affaire à un ordre, et non à une assertion. Pour retrouver une assertion il faudrait rétablir une forme à lindicatif telle Jordonne
Cest pourquoi le verbe dune phrase indépendante ne peut être à linfinitif que si cet énoncé nest pas assertif : *Paul fumer mais Fermer la porte !
Au-delà des informations de temps, personne et aspect quil véhicule, le verbe, en français, est donc lélément qui marque lassertion de lénoncé par le locuteur. Cette assertion ne peut être supportée que par les formes de lindicatif, seules susceptibles dun emploi indépendant, fondé sur un repérage par rapport à la situation dénonciation. A des degrés différents, le subjonctif et le participe ou linfinitif ne sarticulent sur cette situation dénonciation que grâce aux verbes à lindicatif qui les accompagnent. » ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p.56-57.
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck., p.151-152.
ADDIN EN.CITE CELINE19365041504CELINE, Ferdinand1936Mort à créditParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1936. Mort à crédit. Paris: Gallimard., p. 92.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 31.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93ALLAIRE, Suzanne. 1984. L'infinitif a-t-il un sujet? Tétralogiques 1:49-93.p. 88.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93Ibid., p.66. Cest lauteur qui souligne.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93Ibid., p.87-88.
ADDIN EN.CITE REMI-GIRAUD19884847484REMI-GIRAUD, Sylviane1988Essai sur la notion de sujetREMI-GIRAUD, SylvianeL'infinitifLyonPresses Universitaires de Lyon95-109REMI-GIRAUD, Sylviane. 1988b. Essai sur la notion de sujet. In L'infinitif, ed. Sylviane REMI-GIRAUD, 95-109. Lyon: Presses Universitaires de Lyon., p. 104. Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE RIEGEL20055347534RIEGEL, Martin2005A propos du statut verbal de l'infinitif et des formes de son auxiliationLa syntaxe au coeur de la grammaire. Recueil offert en hommage au 60ème anniversaire de Cl. Muller.RennesPresses Universitaires de Rennes287-295RIEGEL, Martin. 2005. A propos du statut verbal de l'infinitif et des formes de son auxiliation. In La syntaxe au coeur de la grammaire. Recueil offert en hommage au 60ème anniversaire de Cl. Muller., 287-295. Rennes: Presses Universitaires de Rennes., p. 289.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93ALLAIRE, Suzanne. 1984. L'infinitif a-t-il un sujet? Tétralogiques 1:49-93., p.70.
Cest lauteur qui souligne. ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93Ibid., p.91.
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck., p. 153.
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIbid., p. 152.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 422. Il sagit des patients du dispensaire qui espèrent obtenir une pension pour tuberculose.
ADDIN EN.CITE REMI-GIRAUD19884847484REMI-GIRAUD, Sylviane1988Essai sur la notion de sujetREMI-GIRAUD, SylvianeL'infinitifLyonPresses Universitaires de Lyon95-109REMI-GIRAUD, Sylviane. 1988b. Essai sur la notion de sujet. In L'infinitif, ed. Sylviane REMI-GIRAUD, 95-109. Lyon: Presses Universitaires de Lyon., p. 103-104.
On peut aussi lire à ce sujet larticle récent de Martin Riegel qui critique le classement que fait sa propre grammaire (parmi dautres) des emplois de linfinitif selon les fonctions nominales quil occupe. ADDIN EN.CITE RIEGEL20055347534RIEGEL, Martin2005A propos du statut verbal de l'infinitif et des formes de son auxiliationLa syntaxe au coeur de la grammaire. Recueil offert en hommage au 60ème anniversaire de Cl. Muller.RennesPresses Universitaires de Rennes287-295RIEGEL, Martin. 2005. A propos du statut verbal de l'infinitif et des formes de son auxiliation. In La syntaxe au coeur de la grammaire. Recueil offert en hommage au 60ème anniversaire de Cl. Muller., 287-295. Rennes: Presses Universitaires de Rennes., p. 288.
Ex : un avocat Ø /une avocate. une avocate Ø /des avocates.
Guillaume qui classe linfinitif avec les participes dans un mode « in posse » et spécifie linfinitif en parlant de la « tension complète » dun verbe « in posse » dont toute la réalisation est devant lui.
ADDIN EN.CITE GUILLAUME1929111GUILLAUME, Gustave1929Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des tempsParisChampion1984GUILLAUME, Gustave. 1929. Temps et Verbe. Théorie des aspects, des modes et des temps. Paris: Champion. [Reprinted in 1984]., p.9-10.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93ALLAIRE, Suzanne. 1984. L'infinitif a-t-il un sujet? Tétralogiques 1:49-93., p. 88.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93Ibid., p.78.
ADDIN EN.CITE REMI-GIRAUD19884837483REMI-GIRAUD, Sylviane1988Les grilles de Procuste. Description comparée de l'infinitif en français, grec ancien, allemand, anglais et arabeREMI-GIRAUD, SylvianeL'infinitifLyonPresses Universitaires de Lyon11-68REMI-GIRAUD, Sylviane. 1988a. Les grilles de Procuste. Description comparée de l'infinitif en français, grec ancien, allemand, anglais et arabe. In L'infinitif, ed. Sylviane REMI-GIRAUD, 11-68. Lyon: Presses Universitaires de Lyon., p.49.
« Le morphème /-INF/ semble nêtre, par opposition aux autres désinences de la conjugaison, quun flexif marquant à la fois la valeur Ø de la catégorie du temps, et la valeur Ø de la catégorie de la personne. ADDIN EN.CITE BERRENDONNER19985017501BERRENDONNER, Alain1998Variations sur l'infinitifREMI-GIRAUD, SylvianeL'infinitifLyonPresses Universitaires de LyonBERRENDONNER, Alain. 1998. Variations sur l'infinitif, p. 162.
Notons que limpossibilité dutiliser un infinitif en remplacement dun impératif en toute situation découle de labsence de relation avec la situation dénoncé inhérente à linfinitif. Si la recette de cuisine, le mode demploi ou la consigne affichée peuvent faire croire à une interchangeabilité de linfinitif et de limpératif, comme dans ces exemples :
(1) Faire un puits, ajouter 12,5 cl deau tiède et mélanger à la cuillère en bois / (1bis) Faites un puits, ajoutez 12,5 cl deau tiède et mélangez à la cuillère en bois.
(2) Sassurer du voltage avant de brancher/ (2bis) Assurez-vous du voltage avant de brancher !
(3) Eteindre son portable./ (3bis) Eteignez votre portable !
Il nen est pas de même dans une situation concrète dinjonction où lui désigne un jeune enfant et vous ses frères aînés:
(4) *Lui mettre son manteau./ (4bis) Mettez-lui son manteau !
(5) *Le prendre avec vous./ (5bis) Prenez-le avec vous !
En effet, dans les trois premiers exemples, linfinitif se justifie en tant que procès potentiel, cest-à-dire reliable à toute sorte de situation dénoncé alors que ce nest pas le cas des deux derniers énoncés, la situation dénoncé est donnée et non pas potentielle donc il est contradictoire de ne pas désigner les éléments de la situation dénoncé qui sont évidents.
Nous nous contenterons de réfléchir au sujet logique potentiel de linfinitif en considérant que les autres paramètres de la situation dénoncé ont partie liée avec labsence de désignation de la référence au je. On peut donc remarquer que cest parfois toute une situation quon convoque pour la relier à la latitude, au potentiel ouvert par linfinitif.
On ne peut substituer : *Jaime que je parte en voyage. Cest justement la distribution complémentaire de la forme infinitive et de la forme subjonctive qui fait la contrainte.
ADDIN EN.CITE ALLAIRE19842410241ALLAIRE, Suzanne1984L'infinitif a-t-il un sujet?Tétralogiques149-93ALLAIRE, Suzanne. 1984. L'infinitif a-t-il un sujet? Tétralogiques 1:49-93., p. 90.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 31.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 31.
ADDIN EN.CITE REMI-GIRAUD19884847484REMI-GIRAUD, Sylviane1988Essai sur la notion de sujetREMI-GIRAUD, SylvianeL'infinitifLyonPresses Universitaires de Lyon95-109REMI-GIRAUD, Sylviane. 1988b. Essai sur la notion de sujet. In L'infinitif, ed. Sylviane REMI-GIRAUD, 95-109. Lyon: Presses Universitaires de Lyon., p. 105.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 408.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 627.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 30.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 30.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 31.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 26.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 35.
Voir lanalyse de Curat, plus haut.
ADDIN EN.CITE CURAT1991717CURAT, Hervé1991Morphologie verbale et référence temporelle en français moderne essai de sémantique grammaticaleLangue et cultures 24Genève ParisDroz337REF RENNES 2 : XD 445/20BU Sciences Lettres 44 500 CUR 000145TempsVerbesCURAT, Hervé. 1991. Morphologie verbale et référence temporelle en français moderne essai de sémantique grammaticale: Langue et cultures 24. Genève Paris: Droz., p. 188.
Au terme dattesté ou davéré peut être substitué le terme de factuel dans lanalyse logique et que G.H. von Wright définit ainsi : « Si p est le cas à un moment t, alors, à tout moment ultérieur, il est nécessaire que p ait été le cas à t. » ADDIN EN.CITE VON WRIGHT19845411541VON WRIGHT, G.H.1984Truth, Knowledge and Modality, Philosophical PapersOxfordBasil BlackwellIIIVON WRIGHT, G.H. 1984. Truth, Knowledge and Modality, Philosophical Papers.vol. III. Oxford: Basil Blackwell., p. 76. Cité et traduit par ADDIN EN.CITE GOSSELIN20014827482GOSSELIN, Laurent2001Relations temporelles et modales dans le "conditionnel journalistique"DENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzRecherches linguistiquesGOSSELIN, Laurent. 2001. Relations temporelles et modales dans le "conditionnel journalistique". In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI. Metz: Université de Metz., p. 52.
ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur. p.59-60. Maingueneau fonde ses remarques sur une analyse énonciativiste des « temps verbaux » :« Les locuteurs ont facilement lillusion que les divers « temps » linguistiques sont un décalque exact dun temps réel extralinguistique. [
] En réalité, le temps linguistique est différent du temps extralinguistique en ce sens quil sordonne uniquement par rapport à lactivité dénonciation.» ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p. 58.
ADDIN EN.CITE GOSSELIN20014827482GOSSELIN, Laurent2001Relations temporelles et modales dans le "conditionnel journalistique"DENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzRecherches linguistiquesGOSSELIN, Laurent. 2001. Relations temporelles et modales dans le "conditionnel journalistique". In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI. Metz: Université de Metz., p. 51-52. Cependant, Gosselin se refuse à reprendre telle quelle lanalyse jugeant que les « énoncés au futur ne présentent nullement les propositions quils expriment comme simplement possibles ».
ADDIN EN.CITE GOSSELIN20014827482GOSSELIN, Laurent2001Relations temporelles et modales dans le "conditionnel journalistique"DENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzRecherches linguistiquesIbid., p. 52-53.
ADDIN EN.CITE DAMOURETTE19364941494DAMOURETTE, JeanPICHON, Emile1936Des mots à la penséeParisd'ArtreyT.VDAMOURETTE, Jean et PICHON, Emile. 1936b. Des mots à la pensée.vol. T.V. Paris: d'Artrey., § 1810.
ADDIN EN.CITE CHARAUDEAU19924951495CHARAUDEAU, Patrick1992Grammaire du sens et de l'expressionParisHachetteCHARAUDEAU, Patrick. 1992. Grammaire du sens et de l'expression. Paris: Hachette., p. 460.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1BENVENISTE, Emile. 1966a. Problèmes de linguistique générale.vol. 1. Paris: Gallimard., p.248-249. Cest nous qui soulignons.
Même si des remarques sur la particularité qua le passé simple dintroduire une rupture entre le procès désigné et le moment de lénoncé apparaissent dès le XVIIème siècle. Fournier cite Oudin « une action tout à fait passée et dont il ne reste rien à parachever » et Buffier : « il ne reste plus rien du temps où elle [la chose passée] se faisait ». Mais elle précise que lemploi du passé simple était différent de lemploi actuel puisquil pouvait être utilisé avec des repères temporels déictiques du moment quils nincluaient pas le moment dénonciation : hier, lan passé, ce qui laisse penser que la valeur du passé simple a évolué. ADDIN EN.CITE FOURNIER19984961496FOURNIER, Nathalie1998Grammaire du français classiqueParisBelin supFOURNIER, Nathalie. 1998. Grammaire du français classique. Paris: Belin sup., p.396-403.
Par ailleurs, Damourette et Pichon qui qualifient le passé simple de « passé pur » ont fait des remarques importantes à ce sujet, également. ADDIN EN.CITE DAMOURETTE19364941494DAMOURETTE, JeanPICHON, Emile1936Des mots à la penséeParisd'ArtreyT.VDAMOURETTE, Jean et PICHON, Emile. 1936b. Des mots à la pensée.vol. T.V. Paris: d'Artrey., § 1808.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1BENVENISTE, Emile. 1966a. Problèmes de linguistique générale.vol. 1. Paris: Gallimard., p. 241.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1Ibid., p.242.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1Ibid., p.241.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1Ibid., p.243.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p. 198.
En excluant, bien entendu, les cas où un verbe au passé simple introduit une parole rapportée.
DUVIGNAUD, J., Lor de la République, 1957, p. 30.
BLONDIN, A., Ma vie entre les lignes, 1982, p. 356.
GENEVOIX, M., Ceux de 14, 1950, p. 154.
Ibid, p. 383.
GRECE. M DE, La nuit du sérail, 1982, p.477
GAULLE, Charles de, Mémoires de Guerre : lunité, 1956, p.311.
SABATIER R., Trois sucettes à la Menthe, 1972, p.299.
DURAS,M., Moderato Cantabile, 1958, p.127.
CLAUDEL P, Poésies diverses, p.19.
ARAGON, L., Le Roman inachevé, 1956, p.170.
CLAUDEL, P., Poésies diverses, 1952, p.13.
Il est intéressant, à tout le moins, que plusieurs citations reviennent au même auteur : Duvignaud, Claudel, Genevoix, Aragon, ce qui pourrait relever dun mode dexpression personnel.
DUVIGNAUD, J., Lor de la République, 1957, p. 141.
PEREC, G., La vie mode demploi, p. 96.
ARAGON, L., uvre Poétique, livre I (1917-1920), 1982, p. 206.
RHEIMS, M., Les greniers de Sienne, 1987, p. 243.
Voir ADDIN EN.CITE FOURNIER19984961496FOURNIER, Nathalie1998Grammaire du français classiqueParisBelin supFOURNIER, Nathalie. 1998. Grammaire du français classique. Paris: Belin sup., § 594.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p. 199.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellIbid., p. 199. Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1BENVENISTE, Emile. 1966a. Problèmes de linguistique générale.vol. 1. Paris: Gallimard., p. 241.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1Ibid., p.245. Il faut noter le terme « historiciser » qui montre bien que Benveniste nemploie pas le terme histoire comme synonyme de récit contrairement à lusage de sa théorie qui en a été faite (et critiquée) par la suite. Il sagit bien dun type de récit très particulier, celui fait par un historien. Adam et alii soulignent, dailleurs, la confusion qui a pu être faite à ce propos dans leur article « Pour en finir avec le couple récit/discours. » ADDIN EN.CITE ADAM19982390239ADAM, Jean-MichelLUGRIN, GillesREVAZ, Françoise1998Pour en finir avec le couple récit/discoursPratiques10081-981998ADAM, Jean-Michel, LUGRIN, Gilles et REVAZ, Françoise. 1998. Pour en finir avec le couple récit/discours [1998]. Pratiques 100:81-98.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 305.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1BENVENISTE, Emile. 1966a. Problèmes de linguistique générale.vol. 1. Paris: Gallimard., p.244.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1Ibid., p.244.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p.53.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.44.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p. 199.
ADDIN EN.CITE LE GUERN19861577157LE GUERN, M1986Notes sur le verbe françaisRémi-Giraud S.& Le Guern M.Sur le verbeLyonPresses Universitaires de Lyonpp.9-60LE GUERN, M. 1986. Notes sur le verbe français. In Sur le verbe, ed. Rémi-Giraud S.& Le Guern M., pp.9-60. Lyon: Presses Universitaires de Lyon., p. 20.
ADDIN EN.CITE JOLY19745390539JOLY, André1974Personne et temps dans le récit romanesqueRecherches anglaises et américaines7JOLY, André. 1974. Personne et temps dans le récit romanesque. Recherches anglaises et américaines 7., p. 103.
Voir aussi à ce sujet : ADDIN EN.CITE TOURATIER19891810181TOURATIER, Christian1989Récit et temps verbauxL'information grammaticale413-5TOURATIER, Christian. 1989. Récit et temps verbaux. L'information grammaticale 41:3-5.
Ce qui ne remet pas en cause lanalyse de Benveniste, répétons-le, qui traite du récit historique et non du récit.
ADDIN EN.CITE STAROBINSKI19704970497STAROBINSKI, Jean1970Le style de l'autobiographiePoétique3STAROBINSKI, Jean. 1970. Le style de l'autobiographie. Poétique 3., p.262. Cest lauteur qui souligne.
ADDIN EN.CITE STAROBINSKI19704970497STAROBINSKI, Jean1970Le style de l'autobiographiePoétique3Ibid., p. 264.
On pense à La Modification de Michel Butor.
ADDIN EN.CITE WEINRICH198926126WEINRICH, Harald1989Grammaire textuelle du françaisParisDidier-Hatiertrad. fr. 1989WEINRICH, Harald. 1989. Grammaire textuelle du français. Paris: Didier-Hatier., p.146-147.
Un bon exemple de cet accent de pédanterie ridicule apparaît dans les propos exagérément policés du blanchisseur chinois dun Lucky Luke : « Vous fûtes mon delnier honolable client, Mistel Luke. » Achdé & Gerra daprès Morris, La belle Province, Lucky Comics, 2004, p. 15.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p.168. Cest nous qui soulignons les termes « psychologiques » dans cette citation et les deux suivantes.
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck., p.84.
ADDIN EN.CITE DAMOURETTE19364941494DAMOURETTE, JeanPICHON, Emile1936Des mots à la penséeParisd'ArtreyT.VDAMOURETTE, Jean et PICHON, Emile. 1936b. Des mots à la pensée.vol. T.V. Paris: d'Artrey. 35 : 405.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p.178.
ADDIN EN.CITE BENVENISTE19664801480BENVENISTE, Emile1966Problèmes de linguistique généraleParisGallimard1BENVENISTE, Emile. 1966a. Problèmes de linguistique générale.vol. 1. Paris: Gallimard., p. 243.
ADDIN EN.CITE LE GOFFIC19973770377LE GOFFIC, Pierre1997Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski.Cahiers de praxématique29135-155LE GOFFIC, Pierre. 1997b. Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski. Cahiers de praxématique 29:135-155., p.152. Des énoncés comme celui-ci confirment également lopposition entre présent et passé :
« Il sappelait Pinçon ce salaud-là, le commandant Pinçon. Jespère quà lheure actuelle il est bien crevé (et pas dune mort pèpère). Mais à ce moment-là, dont je parle, il était encore salement vivant le Pinçon. »
ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77., p. 60.
Ce sont dailleurs les termes choisis par Wagner et Pinchon. ADDIN EN.CITE WAGNER19625381538WAGNER, René-Léon.PINCHON, Jacqueline1962Grammaire du français classique et moderneParisHachetteWAGNER, René-Léon. et PINCHON, Jacqueline. 1962. Grammaire du français classique et moderne. Paris: Hachette., p. 349-353.
Même si bien sûr, cest le réinvestissement en sens de lopposition qui compte et non la positivation dun pôle. Cest pourquoi on peut imaginer que le sens donné à « défini » nest pas tout à fait identique puisquil ne renvoie pas à la même opposition.
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck., p. 80. Cest nous qui soulignons ainsi que dans les deux citations suivantes.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 304.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFIbid., p. 306.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p.105.
ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p. 158.
Les énoncés Cela faisait deux ans quil vivait à Paris et Il vivait à Paris depuis deux ans sont synonymes mais il faut remarquer que le premier énoncé met en relation deux verbes au même temps, le premier entrant dans une expression présentant la durée qui prend en charge le deuxième verbe. Cette mise en relation, comme celle qui se fait entre depuis deux ans et il vivait permet de désigner la durée du procès vivait.
Il faut donc remarquer aussi que *Cela fit deux ans quil vécut à Paris nest pas davantage acceptable.
Une recherche sur les uvres des cinquante dernières années de Frantext (487 textes) relativise un peu cette affirmation. On trouve, en effet, trois occurrences sous la plume de De Gaulle : « Mais toute la France comprend que le destin lui ouvre ainsi la chance daccéder de nouveau, par un effort de guerre grandissant, à cette place qui fut la sienne depuis tant de siècles. » De Gaulle, Ch, Mémoires de Guerre : le salut, 1959, p.419. On peut penser que le ton solennel va de paire avec une hypercorrection et que le passé composé eût été plus approprié. Dailleurs, le fait quon ait déjà signalé un emploi du passé simple avec hier chez De Gaulle et que Frantext relève deux autres emplois de passés simples avec depuis, tend à prouver un fait de langue individuel. Voici les deux autres occurrences de De Gaulle : « Depuis lors, jéprouvai pour Sidi-lamine une estime et une amitié qui ne se sont pas altérés. » De Gaulle, Ch, Mémoires de Guerre : lunité, 1956, p.124. et « mais, soudain, le chant dun oiseau, le soleil sur le feuillage ou les bourgeons dun taillis me rappellent que la vie, depuis quelle parut sur la terre, livre un combat quelle na jamais perdu. » De Gaulle, Ch, Mémoires de Guerre :le salut, 1959, p.289. Une seule occurrence apparaît par ailleurs, il sagit dune citation de Réverdy : « Depuis que naquit la critique
» Réverdy, P., Note éternelle du présent, 1958, p.131. Ces occurrences très rares me semblent devoir être classées à la marge.
Cest bien le trait sémantique « indéfini » qui est en cause ici car un verbe au passé simple peut fort bien être relié à une expression qui désigne la durée et renvoie par la mise en relation à la durée du procès. Par exemple : « Il vécut à Paris de 1975 à 1985 ». On peut cependant aussi sinterroger sur la sémantique lexicale du verbe que nous avons employé pour notre démonstration, le verbe vivre présente-t-il en lui-même une limitation de combinaison avec des repères de durée ce qui impliquerait alors de mettre à son actif nos résultats et non plus à celui de lopposition imparfait-passé simple ?
Le verbe vivre, en particulier quand il est mis en relation avec un lieu, ici à Paris, a une valeur imperfective. Cette valeur imperfective ne limite pas, en elle-même, la mise en relation avec des expressions de durée en pendant et depuis, comme nous avons pu le voir dans nos exemples puisquil se combine avec les deux. On peut le confirmer avec des exemples au présent : Il vit à Paris depuis deux ans, Il vit à Paris pendant deux ans. Elle limite par contre lemploi dune durée en en comme la montré Leeman-Bouix. Elle montre aussi quon ne peut pas combiner des verbes perfectifs comme trouver avec des expressions de durée en pendant et depuis :
*Il trouve (trouvait) (trouva) une bague pendant deux heures.
*Il trouve (trouvait) (trouva) une bague depuis deux heures.
Seules les formes verbales composées peuvent être mises en relation avec une expression de durée en depuis :
Il a trouvé une bague depuis deux heures,
car, dans ce cas, lexpression de durée nest pas mise en relation avec le procès mais avec laccompli désigné par la forme composée. Elle calcule donc la durée écoulée après le procès et non la durée du procès.
Toujours est-il, on le voit bien, que ce nest pas la valeur perfective ou imperfective qui joue un rôle dans nos oppositions. ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p. 52.
Compléments dobjets : « Il parlait de Pierre à Paul », compléments de lieu : « Il allait de Paris à Vienne. », pour ne parler que des plus courants.
Ce test peut être élargi en remplaçant 19 par tous les chiffres. Cette expression « de (chiffre) à » nest jamais mise en relation avec un verbe à limparfait dans le corpus de Frantext de 1950 à 2000. Inversement, on trouve sept occurrences de cette expression mise en relation avec un verbe au passé simple. Même si ces occurrences sont peu nombreuses, lopposition avec limparfait nous semble significative parce que les énoncés au passé simple ne posent pas de problème de grammaticalité mais aussi et surtout, parce que limparfait étant une forme temporelle très employée, labsence doccurrence risque peu dêtre accidentelle sur un corpus aussi vaste (489 uvres de 1950 à 2000).
GRACQ, J., En lisant en écrivant, 1980, p. 217.
BOUDARD, A., La cerise, 1963, p. 260.
FALLET, R., Carnets de jeunesse, 1947, p. 70.
ABELLIO, R., Heureux les pacifiques, 1946, p. 223.
MICHELET J, Histoire romaine, 1831, p. 120.
Une analyse complémentaire en syntaxe serait nécessaire pour rendre compte des types de contrainte.
Nous verrons pourtant dans le chapitre II-2-2-2-2-3 sur les effets de sens de limparfait que cette expression peut accompagner un « imparfait de narration ». Sans doute, lanalyse des effets de sens permet-elle daffiner cette opposition : postposé, le repère de durée désignerait une durée définie du procès et contredirait le sens de limparfait ; alors que préposé, il désignerait les bornes de façon extérieure, ce que rend possible le trait « indéfini » de limparfait.
ADDIN EN.CITE VETTERS19931230123VETTERS, Carl1993Passé simple et imparfait : un couple mal assortiLangue française100p.14-30décembre 1993VETTERS, Carl. 1993. Passé simple et imparfait : un couple mal assorti [décembre 1993]. Langue française 100:p.14-30., p.27.
Gracq Julien, Le Rivage des Syrtes, 1951, p. 445.
BEAUVOIR Simone de, Les Mandarins, 1954, p. 157.
Au chapitre intitulé «Définition et indéfinition dune suite de procès ».
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44DUCROT, Oswald. 1983. L'imparfait en français. In Studies in Descriptive Linguistics, ed. F. HAUSMANN, 25-44. Heidelberg: Julius Groos., p.41-42.
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44Ibid., p.41. Précisons cependant que si Ducrot ne met pas dastérisque, cest parce quon peut trouver un contexte qui annule cette incompatibilité « Je ne comprends pas Jean : le mois dernier il allait cinq fois au cinéma, et, ce mois-ci, il nest sorti quune fois. » Ducrot précise qualors limparfait nest plus itératif mais sert à désigner un contraste.
Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44DUCROT, Oswald. 1983. L'imparfait en français. In Studies in Descriptive Linguistics, ed. F. HAUSMANN, 25-44. Heidelberg: Julius Groos., p.42. Par ailleurs, Ducrot montre bien la différence entre plusieurs et quelques, plusieurs renvoyant à une quantité numérique (ou discontinue), même si ce nombre nest pas indiqué alors que quelques renvoie à une pluralité indénombrable, globale (Ducrot le fait commuter avec du)
Ducrot ne formule pas, cependant, de la sorte, sa conclusion. Il rattache ce fait à une notion de globalité de la période temporelle, globalité quil fait correspondre, sémantiquement, à celle dhabitude, qui devient un attribut de lactant.
On pourrait nous reprocher, du moins à cette étape de notre recherche, de ne pas recourir à la notion daspect. Nous verrons plus loin les rapports que notre analyse entretient avec cette notion daspect.
Il peut y avoir cependant contradiction entre limparfait et un repère temporel qui mettrait en cause la désignation indéfinie de limparfait. Sans doute, faut-il comprendre ainsi lopposition entre repère temporel préposé et repère temporel postposé, leur portée se différenciant par la précision complémentaire des limites non définies (préposition) et la désignation de la durée indiquée par le procès à limparfait (postposition). Cela reste à approfondir, peut-être dans le cadre dune approche syntaxique thème-prédicat.
ADDIN EN.CITE JACQUARD19975501550JACQUARD, Albert1997Petite philosophie à l'usage des non-philosophesParisCalman-LévyJACQUARD, Albert. 1997. Petite philosophie à l'usage des non-philosophes. Paris: Calman-Lévy., p. 33.
ADDIN EN.CITE MINKOWSKI1995 [1933]5401540MINKOWSKI, E;1995 [1933]Le temps vécuParisPUFMINKOWSKI, E;. 1995 [1933]. Le temps vécu. Paris: PUF., p. 150, le lien entre la description de cette « figure temporelle » et le passé simple est fait par ADDIN EN.CITE LE GOFFIC19973770377LE GOFFIC, Pierre1997Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski.Cahiers de praxématique29135-155LE GOFFIC, Pierre. 1997b. Temps, temps vécu, temps linguistique. A propos des conceptions de G. Guillaume et de E. Minkowski. Cahiers de praxématique 29:135-155., p. 151.
Nous reviendrons plus loin à lanalyse aspectuelle.
ADDIN EN.CITE CONFAIS199563163CONFAIS, Jean-Paul1995Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemandToulousePresse Universitaire du Mirail355CONFAIS, Jean-Paul. 1995. Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemand. Toulouse: Presse Universitaire du Mirail., p. 210.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 154.
Cette remarque nous sera utile plus loin.
ADDIN EN.CITE PHILLIPE-COATEVAL 19965432543PHILLIPE-COATEVAL, Annick. 1996 Le statut du démonstratif en français. Analyse formelle et analyse conceptuelleSciences du langageRennesUniversité Rennes 2382S. AllairePHILLIPE-COATEVAL 19965432543PHILLIPE-COATEVAL, Annick. 1996 Le statut du démonstratif en français. Analyse formelle et analyse conceptuelleSciences du langageRennesUniversité Rennes 2382S. AllairePHILLIPE-COATEVAL, Annick. 1996. Le statut du démonstratif en français. Analyse formelle et analyse conceptuelle, Sciences du langage, Université Rennes 2., p.45-46.
ADDIN EN.CITE DE MULDER19942700270DE MULDER, Walter1994La "création du monde" par l'article défini - Le, marqueur évidentielLangue française102108-119DE MULDER, Walter. 1994. La "création du monde" par l'article défini - Le, marqueur évidentiel. Langue française 102:108-119., p.109.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 159.
Notons aussi que, dans la détermination nominale, lopposition article défini/article indéfini soppose en bloc à lindétermination, labsence de déterminant devant le nom. Il faudrait voir quel sens ce concept dindétermination pourrait, peut-être, prendre pour le présent (et linfinitif) qui opposent un zéro à lopposition défini/indéfini.
ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan. , p. 169. Cest nous qui soulignons.
ADDIN EN.CITE WILMET19871760176WILMET, Marc1987L'éternel imparfait : à propos de Points de vue sur l'imparfait, P. LE GOFFIC et aliiModèles linguistiques9,2pp. 169-177WILMET, Marc. 1987. L'éternel imparfait : à propos de Points de vue sur l'imparfait, P. LE GOFFIC et alii. Modèles linguistiques 9,2:pp. 169-177.
Mais aussi « accompli / inaccompli » qui pose problème car il crée une confusion avec lopposition temps simples/ temps composés.
ADDIN EN.CITE MARTIN19714771477MARTIN, Robert1971Temps et aspect. Essai sur l'emploi des temps narratifs en moyen français.ParisKlincksieckMARTIN, Robert. 1971. Temps et aspect. Essai sur l'emploi des temps narratifs en moyen français. Paris: Klincksieck.
ADDIN EN.CITE WILMET19761121112WILMET, Marc1976Etudes de morpho-syntaxe verbaleBibliothèque française et romane. Série A, Manuels et études linguistiquesParisKlincksieckREF RENNES 2 : XD 9257WILMET, Marc. 1976. Etudes de morpho-syntaxe verbale. Paris: Klincksieck.
ADDIN EN.CITE ROHRER19815137513ROHRER, Christian1981Quelques remarques sur les différences entre depuis / à partir de et dans une heure / une heure plus tardSCHWARZE, CristophAnalyse des prépositionsTubingenNiemeyer158-170ROHRER, Christian. 1981. Quelques remarques sur les différences entre depuis / à partir de et dans une heure / une heure plus tard. In Analyse des prépositions, ed. Cristoph SCHWARZE, 158-170. Tubingen: Niemeyer.
ADDIN EN.CITE VET19801501150VET, Co1980Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporainGenèveDrozVET, Co. 1980. Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporain. Genève: Droz.
ADDIN EN.CITE CULIOLI19782627262CULIOLI, Antoine1978Valeurs aspectuelles et opérations énonciatives : l'aoristiqueDAVID, JeanMARTIN, RobertLa notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz- 18-20 mai 1978ParisKlincksieckCULIOLI, Antoine. 1978. Valeurs aspectuelles et opérations énonciatives : l'aoristique. In La notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz- 18-20 mai 1978, eds. Jean DAVID et Robert MARTIN. Paris: Klincksieck.
ADDIN EN.CITE DESCLES19782737273DESCLES, Jean-PierreGUENTCHEVA, Z.1978Construction formelle de la catégorie grammaticale de l'aspectDAVID, JeanMARTIN, RobertLa notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz - 18-20 mai 1978.ParisKlincksieck195-237DESCLES, Jean-Pierre et GUENTCHEVA, Z. 1978. Construction formelle de la catégorie grammaticale de l'aspect. In La notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz - 18-20 mai 1978., eds. Jean DAVID et Robert MARTIN, 195-237. Paris: Klincksieck.
ADDIN EN.CITE BERTHONNEAU19931850185BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges1993Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomiqueLangages11255-77BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 1993. Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomique. Langages 112:55-77., p. 55.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 306.
ADDIN EN.CITE MARTIN19714771477MARTIN, Robert1971Temps et aspect. Essai sur l'emploi des temps narratifs en moyen français.ParisKlincksieckMARTIN, Robert. 1971. Temps et aspect. Essai sur l'emploi des temps narratifs en moyen français. Paris: Klincksieck., p. 70.
ADDIN EN.CITE MARTIN19714771477MARTIN, Robert1971Temps et aspect. Essai sur l'emploi des temps narratifs en moyen français.ParisKlincksieckIbid., p.95.
« Le schéma dincidence peut très bien être interprété comme un microtexte qui montre lopposition aspectuelle de façon exemplaire. » ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 302.
Le choix des verbes emprunté à Leeman-Bouix est dû au fait que ces exemples noffrent pas de contre-exemples liés à leur polysémie. ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p. 51-52.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 293. On trouve également cette notion, entre autres, dans les descriptions proposées par :
Wilmet qui parle de « verbes à terme intérieur ». ADDIN EN.CITE WILMET19971141114WILMET, Marc1997Grammaire critique du françaisLouvain-la-NeuveDuculotp300 et suivantes sur imp/passé simpleREF RENNES 2 : 445/136WILMET, Marc. 1997. Grammaire critique du français. Louvain-la-Neuve: Duculot., § 392.
Leeman-Bouix, pour qui, un verbe perfectif « indique par lui-même quun résultat est atteint [
], comporte limplication dune fin. » ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p. 52.
Klum distingue, quant à lui, les modes daction et emploie lexpression « verbes à/sans terme fixe » pour éviter la confusion entre aspect lexical et aspect des temps à laquelle peut conduire lappellation perfectif / imperfectif . ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p. 105.
Molendijk, à propos de lexemple « A sept heures, Jean se leva. Il était content » parle d « englobement » du point de repère par le procès à limparfait et le relie à lanalyse aspectuelle : «il être content est déjà vrai avant le moment désigné par à 7 heures et continue (selon toute vraisemblance) dêtre vrai après ce moment. [
] Le fait rapporté par une phrase à lIMP englobe temporellement le moment qui lui sert de référence [cest-à-dire, par exemple, à 8 heures]. Cette analyse saccorde parfaitement avec lopinion traditionnellement reçue selon laquelle lIMP nous présente ce qui est rapporté comme vu de lintérieur. Cette perspective interne implique que le récepteur se place en pensée à un moment de laxe temporel qui se situe après la limite initiale du fait rapporté et avant sa limite finale. » ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19853200320MOLENDIJK, Arie1985Point référentiel et imparfaitLangue française6778-93MOLENDIJK, Arie. 1985. Point référentiel et imparfait. Langue française 67:78-93., p. 80-81.
De même, lexpression de X à Y , dont nous avons remarqué quelle napparaissait pas avec limparfait, pourrait être employée avec un imparfait de narration : Il nous quittait illico. Il préparait ses bagages,de onze heures à midi. A midi, il avait filé
Vetters (1988, 1989, 1992a, 1992b), Molendjik (1990). Nous y revenons au chapitre suivant.
ADDIN EN.CITE MULLER19755230523MULLER, Claude1975Remarques syntactico-sémantiques sur certains adverbes de tempsLe Français moderne4312-38MULLER, Claude. 1975. Remarques syntactico-sémantiques sur certains adverbes de temps. Le Français moderne 43:12-38.
ADDIN EN.CITE MARTIN19783167316MARTIN, Robert1978"Déjà" et "encore" : de la présupposition à l'aspectDAVID, JeanMartin, RobertLa notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz, 18-20 maiParisKlincksieck167-179MARTIN, Robert. 1978. "Déjà" et "encore" : de la présupposition à l'aspect. In La notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz, 18-20 mai, eds. Jean DAVID et Robert Martin, 167-179. Paris: Klincksieck.
ADDIN EN.CITE FUCHS19785320532FUCHS, Catherine1978Quelques phénomènes syntaxiques et lexicaux d'aspectRecherches linguistiques5-693-102FUCHS, Catherine. 1978. Quelques phénomènes syntaxiques et lexicaux d'aspect. Recherches linguistiques 5-6:93-102.
ADDIN EN.CITE AUDIBERT-GIBIER20005172517AUDIBERT-GIBIER, Monique2000Examen du fonctionnement de quelques adverbes argumentatifs et aspectuels en français écrit et parlé contemporainAix-MarseilleUniversité de Provence507BLANCHE-BENVENISTE, Claire. Directeur de thèseThèse de doctoratdéjàAUDIBERT-GIBIER, Monique. 2000. Examen du fonctionnement de quelques adverbes argumentatifs et aspectuels en français écrit et parlé contemporain, Université de Provence: Thèse de doctorat.
ADDIN EN.CITE HOEPELMAN19852930293HOEPELMAN, J.ROHRER, C.1985"Déjà" et "encore" et les temps du passé du françaisLangue française67119-143HOEPELMAN, J. et ROHRER, C. 1985. "Déjà" et "encore" et les temps du passé du français. Langue française 67:119-143.
ADDIN EN.CITE VET19801501150VET, Co1980Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporainGenèveDrozVET, Co. 1980. Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporain. Genève: Droz.
ADDIN EN.CITE VET19885087508VET, Co1988Temps verbaux et compléments adverbiaux de temps : leur contribution à la cohésion du texte narratifNOLKE, HenningOpérateurs syntaxiques et cohésion discursiveCopenhagueNyt Nordisk Forlag Arnold BusckVET, Co. 1988. Temps verbaux et compléments adverbiaux de temps : leur contribution à la cohésion du texte narratif. In Opérateurs syntaxiques et cohésion discursive, ed. Henning NOLKE. Copenhague: Nyt Nordisk Forlag Arnold Busck.
Mais aussi HANSEN qui a fait paraître deux articles où elle substitue encore à déjà dans le titre :
ADDIN EN.CITE HANSEN20005197519HANSEN, Maj-Britt Mosegaard2000La polysémie de l'adverbe déjàLETH HanneNOLKE, HenningLe Français parlé : corpus et résultatKobenhavnMuseum Tusculanum157-177HANSEN, Maj-Britt Mosegaard. 2000. La polysémie de l'adverbe déjà. In Le Français parlé : corpus et résultat, eds. LETH Hanne et Henning NOLKE, 157-177. Kobenhavn: Museum Tusculanum.
ADDIN EN.CITE HANSEN20025180518HANSEN, Maj-Britt Mosegaard2002La polysémie de l'adverbe encoreTravaux de linguistique44143-166HANSEN, Maj-Britt Mosegaard. 2002. La polysémie de l'adverbe encore. Travaux de linguistique 44:143-166.
ADDIN EN.CITE MULLER19755230523MULLER, Claude1975Remarques syntactico-sémantiques sur certains adverbes de tempsLe Français moderne4312-38MULLER, Claude. 1975. Remarques syntactico-sémantiques sur certains adverbes de temps. Le Français moderne 43:12-38., p. 12.
Tels que ces exemples : « les petites gens
ils avaient dû faire des sottises, sans sen rendre compte, bien sûr, mais tout de même ils étaient coupables et cétait déjà bien gentil quon leur donne ainsi en souffrant loccasion dexpier leurs indignités
» ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 120.
« Non seulement cette jeunesse parlait le français en zézayant, mais elle savait encore présenter la quinine dans la confiture et vous traquer les puces « chiques » dans la profondeur des pieds. » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p.196.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 53.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 59.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 148.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 182.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.240. Dans cet exemple, déjà est ambigü, il peut aussi bien porter sur le verbe cheminer que sur la notion de quantité tellement.
ADDIN EN.CITE MULLER19755230523MULLER, Claude1975Remarques syntactico-sémantiques sur certains adverbes de tempsLe Français moderne4312-38MULLER, Claude. 1975. Remarques syntactico-sémantiques sur certains adverbes de temps. Le Français moderne 43:12-38., p. 32.
Vet exprime ainsi cette notion de précocité : « la fonction de déjà y consiste à indiquer que lintervalle pendant lequel [le procès] est vrai se situe plus tôt dans le temps quon ne lavait cru. » ADDIN EN.CITE VET19801501150VET, Co1980Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporainGenèveDrozVET, Co. 1980. Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporain. Genève: Droz., p. 151. Il y a pour lui contradiction entre lassertion et la présupposition de même que pour encore.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 185.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 185.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 300.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 300.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 220.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 360.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 79.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 102.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 182.
ADDIN EN.CITE MARTIN19783167316MARTIN, Robert1978"Déjà" et "encore" : de la présupposition à l'aspectDAVID, JeanMartin, RobertLa notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz, 18-20 maiParisKlincksieck167-179MARTIN, Robert. 1978. "Déjà" et "encore" : de la présupposition à l'aspect. In La notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz, 18-20 mai, eds. Jean DAVID et Robert Martin, 167-179. Paris: Klincksieck., p. 174.
Sur déjà, voir aussi :
ADDIN EN.CITE PAILLARD19925260526PAILLARD, Denis1992A propos de déjàL'information grammaticale55PAILLARD, Denis. 1992. A propos de déjà. L'information grammaticale 55.
ADDIN EN.CITE VET19801501150VET, Co1980Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporainGenèveDrozVET, Co. 1980. Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporain. Genève: Droz., p. 154.
ADDIN EN.CITE CELINE19365041504CELINE, Ferdinand1936Mort à créditParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1936. Mort à crédit. Paris: Gallimard., p. 604.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 228.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 26.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 256.
Voir la définition de litérativité en encore par Hansen : « La présupposition logique sur la validité de p avant m0 reste, avec la modification importante quau moins une transition en ~p se soit déjà effectuée avant m0, moment pour lequel la vérité de p est de nouveau assertable. » ADDIN EN.CITE HANSEN20025180518HANSEN, Maj-Britt Mosegaard2002La polysémie de l'adverbe encoreTravaux de linguistique44143-166HANSEN, Maj-Britt Mosegaard. 2002. La polysémie de l'adverbe encore. Travaux de linguistique 44:143-166., p. 150.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 15.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 316.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 89.
Sur encore, on peut consulter également :
ADDIN EN.CITE VITTORI19925200520VITTORI, BFUCHS, Catherine1992Construire un espace sémantique pour représenter la polysémie d'un marqueur lexical : l'exemple de encoreLinguisticae Investigationes16-1125-153VITTORI, B et FUCHS, Catherine. 1992. Construire un espace sémantique pour représenter la polysémie d'un marqueur lexical : l'exemple de encore. Linguisticae Investigationes 16-1:125-153.
ADDIN EN.CITE FUCHS19935247524FUCHS, Catherine1993Position, portée et interprétation des circonstants. Encore et les circonstants de localisation temporelleGUIMIER, C.1001 circonstantsCaenPresses universitaires de Caen253-283NOLKE19945211521NOLKE, Henning1994Les adverbes paradigmatisants : Fonction et analyse.CopenhagueAkademisk ForlagFUCHS, Catherine. 1993. Position, portée et interprétation des circonstants. Encore et les circonstants de localisation temporelle. In 1001 circonstants, ed. C. GUIMIER, 253-283. Caen: Presses universitaires de Caen, NOLKE, Henning. 1994. Les adverbes paradigmatisants : Fonction et analyse. Copenhague: Akademisk Forlag.
ADDIN EN.CITE MULLER19995227522MULLER, Claude1999Encore et toujours les modifieurs aspectuels : de encore à toujoursPLENAT, MarcAURNAGUE, M.CONDAMINES, A.MAUREL, J.P.MOLINIER, Ch.MULLER, ClaudeL'emprise du sens. Structures linguistiques et interprétationsAmsterdamRodopi217-237MULLER, Claude. 1999. Encore et toujours les modifieurs aspectuels : de encore à toujours. In L'emprise du sens. Structures linguistiques et interprétations, eds. Marc PLENAT et al., 217-237. Amsterdam: Rodopi.
ADDIN EN.CITE FRANCKEL19885251525FRANCKEL, Jean-Jacques1988Etudes de quelques marqueurs aspectuels du françaisParisDrozFRANCKEL, Jean-Jacques. 1988. Etudes de quelques marqueurs aspectuels du français. Paris: Droz.
Même en tenant compte du fait que limparfait est abondamment employé par Céline. Quoique Céline soit réputé pour son emploi du passé composé en place du passé simple, le passé simple est loin doccuper une place secondaire dans ses deux premiers récits.
Guillaume argue de limpossibilité commune au passé simple et au futur de se combiner avec déjà pour justifier de leur parenté. Voir à ce sujet ADDIN EN.CITE MOIGNET19573180318MOIGNET, Gérard1957Pitié pour l'indicatif, ou nomenclature grammaticale et linguistique structuraleLe Français moderne25161-169MOIGNET, Gérard. 1957. Pitié pour l'indicatif, ou nomenclature grammaticale et linguistique structurale. Le Français moderne 25:161-169., ADDIN EN.CITE BONDY19581630163BONDY, Léon1958En marge des discussions sur les modes et les tempsLe Français moderne26, 2pp.93-100BONDY, Léon. 1958. En marge des discussions sur les modes et les temps. Le Français moderne 26, 2:pp.93-100. ADDIN EN.CITE BONDY19595360536BONDY, Léon1959Principes et méthodesLe français moderne27173-198BONDY, Léon. 1959. Principes et méthodes. Le français moderne 27:173-198.
Servan-Schreiber, LExpress, 15-9-1960.
LExpress, 14-5-59.
GIDE A., Journal I, p. 815. Ces trois exemples sont cités par ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p. 201.
ADDIN EN.CITE MARTIN19783167316MARTIN, Robert1978"Déjà" et "encore" : de la présupposition à l'aspectDAVID, JeanMartin, RobertLa notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz, 18-20 maiParisKlincksieck167-179MARTIN, Robert. 1978. "Déjà" et "encore" : de la présupposition à l'aspect. In La notion d'aspect, colloque organisé par le centre d'analyse syntaxique de l'Université de Metz, 18-20 mai, eds. Jean DAVID et Robert Martin, 167-179. Paris: Klincksieck., p. 176.
de STAEL, G, Corinne, t. 3, p. 180.
MICHELET, J., Introduction à lhistoire universelle, p. 408.
de BEAUVOIR, Simone, Mémoire dune jeune fille rangée, p. 191.
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p. 201.
ADDIN EN.CITE VET19801501150VET, Co1980Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporainGenèveDrozVET, Co. 1980. Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporain. Genève: Droz., p. 154.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p.49.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 51.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 397.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 111.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 182.
ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 293.
« Laffirmation que laspect imperfectif exprime un événement dans sa dynamique évolutive ou un état de choses dans sa persistance [
] devient formellement compréhensible sur le plan syntaxique du fait que le membre imperfectif peut fournir la base dun acte dincidence. » ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311Ibid., p. 295.
ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p. 88.
Cest vrai aussi de lorsque. Nous renvoyons à ce sujet au logiciel réalisé par Elsie Riou, Anne-Sophie Blaise et Maryse Métayer sur lenseignement du schéma dincidence en FLE. ADDIN EN.CITE RIOU20065352535RIOU, Elsie2006Analyse d'une séquence d'enseignement de l'imparfait et du passé simpleRennesUniversité Rennes 2102 p.Mémoire de master 2RIOU, Elsie. 2006. Analyse d'une séquence d'enseignement de l'imparfait et du passé simple, Université Rennes 2: Mémoire de master 2.
ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 294.
Touratier la bien remarqué qui dit que le passé simple présente le procès « comme un événement isolé et délimité dans sa globalité de fait objectif, ainsi que peut lêtre une date dans un livre dhistoire. » ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p. 105.
ADDIN EN.CITE CONFAIS199563163CONFAIS, Jean-Paul1995Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemandToulousePresse Universitaire du Mirail355CONFAIS, Jean-Paul. 1995. Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemand. Toulouse: Presse Universitaire du Mirail., p. 210.
ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 295.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 294.
ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p. 150.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 306
ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 295.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 294.
ADDIN EN.CITE CONFAIS199563163CONFAIS, Jean-Paul1995Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemandToulousePresse Universitaire du Mirail355CONFAIS, Jean-Paul. 1995. Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemand. Toulouse: Presse Universitaire du Mirail., p. 210.
ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19901461146MOLENDIJK, Arie1990Le passé simple et l'imparfait : une approche reichenbachienneAmsterdamRodopiMOLENDIJK, Arie. 1990. Le passé simple et l'imparfait : une approche reichenbachienne. Amsterdam: Rodopi.
ADDIN EN.CITE VETTERS19931230123VETTERS, Carl1993Passé simple et imparfait : un couple mal assortiLangue française100p.14-30décembre 1993VETTERS, Carl. 1993. Passé simple et imparfait : un couple mal assorti [décembre 1993]. Langue française 100:p.14-30., p. 21.
Sur la théorie de Weinrich et ses liens avec les théories de Hamburger et de Benveniste, voir aussi : ADDIN EN.CITE LUSCHER19983047304LUSCHER, Jean-Marc1998Les approches textuellesMoeschler, JacquesLe temps des événements. Pragmatique de la référence temporelle.ParisKimé87-100LUSCHER, Jean-Marc. 1998. Les approches textuelles. In Le temps des événements. Pragmatique de la référence temporelle., ed. Jacques Moeschler, 87-100. Paris: Kimé.
ADDIN EN.CITE WEINRICH197325125WEINRICH, Harald1973Le TempsLe Seuiltrad.fr. 1973WEINRICH, Harald. 1973. Le Temps: Le Seuil., p. 114.
ADDIN EN.CITE WEINRICH197325125WEINRICH, Harald1973Le TempsLe Seuiltrad.fr. 1973Ibid., p.114-115.
ADDIN EN.CITE WEINRICH197325125WEINRICH, Harald1973Le TempsLe Seuiltrad.fr. 1973Ibid., p. 115.
ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 302.
Maingueneau lexplicite bien par ailleurs : « Ce schéma dincidence ne se limite cependant pas aux frontières de la phrase, il fonctionne tout aussi bien dans le cadre dunités transphrastiques et joue alors un rôle capital dans lorganisation textuelle, dépassant ainsi la stricte perspective aspectuelle perfectif/imperfectif. Les formes imperfectives sy groupent autour de formes perfectives pour leur servir de base dincidence, et chaque ensemble [forme(s) perfectives(s) + forme(s) imperfective(s) associée(s)] constitue une unité textuelle cohérente à lintérieure dune totalité narrative plus vaste. » ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p. 88.
Sur ce sujet, voir aussi :
ADDIN EN.CITE ADAM19761520152ADAM, Jean-Michel1976Langue et texte : Imparfait/Passé simplePratiques10ADAM, Jean-Michel. 1976. Langue et texte : Imparfait/Passé simple. Pratiques 10.
ADDIN EN.CITE ADAM19941177117ADAM, Jean-Michel1994Le passé simple : Pierre d'angle du récit?Le texte narratifParisNathan-Université223-254ADAM, Jean-Michel. 1994. Le passé simple : Pierre d'angle du récit? In Le texte narratif, 223-254. Paris: Nathan-Université.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p.105.
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinIbid., p.104.
ADDIN EN.CITE LAURENDEAU19983100310LAURENDEAU, Paul1998Moment de l'énonciation, temps de l'énoncé et ordre de procèsCahiers Chronos3177-198LAURENDEAU, Paul. 1998. Moment de l'énonciation, temps de l'énoncé et ordre de procès. Cahiers Chronos 3:177-198., p. 188.
ADDIN EN.CITE LE GOFFIC198622722LE GOFFIC, Pierre1986Que l'imparfait n'est pas un temps du passéLE GOFFIC, PierrePoints du vue sur l'ImparfaitCaenCentre de publications de l'université de Caen55-69LE GOFFIC, Pierre. 1986. Que l'imparfait n'est pas un temps du passé. In Points du vue sur l'Imparfait, ed. Pierre LE GOFFIC, 55-69. Caen: Centre de publications de l'université de Caen., p.60.
ADDIN EN.CITE LE GOFFIC198622722LE GOFFIC, Pierre1986Que l'imparfait n'est pas un temps du passéLE GOFFIC, PierrePoints du vue sur l'ImparfaitCaenCentre de publications de l'université de Caen55-69Ibid., p.61.
Cest un terme employé par ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 304 : « La nette délimitation du procès explique le fonctionnement du passé simple dans un texte. Il est apte à introduire un repère temporel nouveau dans un récit au passé, sans sappuyer nécessairement sur une indication chronologique explicite. Et, comme il individualise le procès, il est le plus approprié pour représenter les événements importants, les faits de premier plan. »
ADDIN EN.CITE REICHENBACH19474341434REICHENBACH, H.1947Elements of symbolic logicNew-York. LondresThe Free PressREICHENBACH, H. 1947. Elements of symbolic logic. New-York. Londres: The Free Press.
ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19853200320MOLENDIJK, Arie1985Point référentiel et imparfaitLangue française6778-93MOLENDIJK, Arie. 1985. Point référentiel et imparfait. Langue française 67:78-93.
ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19901461146MOLENDIJK, Arie1990Le passé simple et l'imparfait : une approche reichenbachienneAmsterdamRodopiMOLENDIJK, Arie. 1990. Le passé simple et l'imparfait : une approche reichenbachienne. Amsterdam: Rodopi.
ADDIN EN.CITE VETTERS199634134VETTERS, Carl1996Temps, aspect et narrationFaux titreAmsterdam, AtlantaRodopi216ISSN 0167-9392AspectGrammaire comparée et généraleTemps linguistiqueTemps (philosophie)Temps dans la littératureVETTERS, Carl. 1996. Temps, aspect et narration. Amsterdam, Atlanta: Rodopi.
ADDIN EN.CITE DE SAUSSURE19975150515DE SAUSSURE, Louis1997Passé simple et encapsulation d'événementsCahiers de linguistique française19323-344DE SAUSSURE, Louis. 1997. Passé simple et encapsulation d'événements. Cahiers de linguistique française 19:323-344.
ADDIN EN.CITE DE SAUSSURE19985167516DE SAUSSURE, Louis1998L'encapsulation d'événements. L'exemple du passé simpleMoeschler, JacquesLe temps des événementsParisKimé245-270DE SAUSSURE, Louis. 1998. L'encapsulation d'événements. L'exemple du passé simple. In Le temps des événements, ed. Jacques Moeschler. Paris: Kimé.
ADDIN EN.CITE VET19915107510VET, Co1991The Temporal Structure of Discourse : Setting, Change and PerspectiveFLEISCHMAN, S.WAUGH, Linda R.Discourse Pragmatics and the Verb. The Evidence from RomanceLondon/New YorkRoutledge7-25VET, Co. 1991. The Temporal Structure of Discourse : Setting, Change and Perspective. In Discourse Pragmatics and the Verb. The Evidence from Romance, eds. S. FLEISCHMAN et Linda R. WAUGH, 7-25. London/New York: Routledge.
ADDIN EN.CITE MOESCHLER199835135MOESCHLER, JacquesJAYEZ, JacquesKOZLOWSKA, MonikaLUSCHER, Jean-Marc1998Le temps des événements : pragmatique de la référence temporelleArgumentation-sciences du langageParisKimé348pragmatiqueAspectTemps linguistiqueTemps logiqueLangage et langues - philosophieréférence (linguistique)Grammaire comparée et généraleespace et temps dans le langageMOESCHLER, Jacques, JAYEZ, Jacques, KOZLOWSKA, Monika et LUSCHER, Jean-Marc. 1998. Le temps des événements : pragmatique de la référence temporelle. Paris: Kimé.
ADDIN EN.CITE KAMP19835027502KAMP, HROHRER, C.1983Tense in textsBAUERLE, R.SCHWARZE, C.VON STECHOW, A.Meaning, use and interpretation of languageBerlinDe Gruyter250-269KAMP, H et ROHRER, C. 1983. Tense in texts. In Meaning, use and interpretation of language, eds. R. BAUERLE, C. SCHWARZE et A. VON STECHOW, 250-269. Berlin: De Gruyter. cités par ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77., p. 64.
ADDIN EN.CITE KAMP19835027502KAMP, HROHRER, C.1983Tense in textsBAUERLE, R.SCHWARZE, C.VON STECHOW, A.Meaning, use and interpretation of languageBerlinDe Gruyter250-269KAMP, H et ROHRER, C. 1983. Tense in texts. In Meaning, use and interpretation of language, eds. R. BAUERLE, C. SCHWARZE et A. VON STECHOW, 250-269. Berlin: De Gruyter., p. 260.
ADDIN EN.CITE BRES20032457245BRES, Jacques2003Non, le passé simple ne contient pas l'instruction [+progression]Cahiers ChronosKlincksieck1199-112BRES, Jacques. 2003. Non, le passé simple ne contient pas l'instruction [+progression]. In Cahiers Chronos, 99-112: Klincksieck.
Tous ces exemples et leur analyse sont extraites de larticle de Bres (2003).
ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77., p.62. Lexemple quelle cite est emprunté à ADDIN EN.CITE KAMP19835027502KAMP, HROHRER, C.1983Tense in textsBAUERLE, R.SCHWARZE, C.VON STECHOW, A.Meaning, use and interpretation of languageBerlinDe Gruyter250-269KAMP, H et ROHRER, C. 1983. Tense in texts. In Meaning, use and interpretation of language, eds. R. BAUERLE, C. SCHWARZE et A. VON STECHOW, 250-269. Berlin: De Gruyter., p. 261.
ADDIN EN.CITE LAURENDEAU19983100310LAURENDEAU, Paul1998Moment de l'énonciation, temps de l'énoncé et ordre de procèsCahiers Chronos3177-198LAURENDEAU, Paul. 1998. Moment de l'énonciation, temps de l'énoncé et ordre de procès. Cahiers Chronos 3:177-198., p.188.
Autre exemple de Kamp-Rohrer 1983 cité par Tasmoski-De Ryck 1985 et repris par Vetters 1993 : « Lannée dernière, Jean escalada le Cervin. Le premier jour, il monta jusquà la cabane H. Il y passa la nuit. Ensuite il attaqua la face nord. Douze heures plus tard il arriva au sommet. »
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 307.
ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 290.
ADDIN EN.CITE SCHARLAU19695331533SCHARLAU, B.1969Eine Darstellung der Anaphorik im SpanischenFranckfortMainSCHARLAU, B. 1969. Eine Darstellung der Anaphorik im Spanischen. Franckfort: Main., p. 18. Cité par ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311., p. 289.
ADDIN EN.CITE POLLAK19761480148POLLAK, Wolfgang1976Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidenceLe Français moderne44pp. 289-311POLLAK, Wolfgang. 1976. Un modèle explicatif de l'opposition aspectuelle : le schéma d'incidence. Le Français moderne 44:pp. 289-311.
Probable néologisme de la part de Céline, homophone de chaotique.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 170.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.257.
Nous renvoyons pour cette notion à Genette : il sagit dune « restriction de champ » sur un personnage impliquant que « le narrateur ne dit que ce que sait [ce] personnage. »
ADDIN EN.CITE GENETTE19725531553GENETTE, Gérard1972Figures IIIParisSeuilGENETTE, Gérard. 1972. Figures III. Paris: Seuil., p. 206-211.
A moins de ne considérer que la description consiste à figer chaque attitude comme le propose Ducrot à propos de cet extrait de Diderot : « A midi M. de Villeneuve entra. Nous étions dans le salon et y formions un tableau très agréable. M. Crimp se faisait peindre. M. de Lambert lisait dans un coin. Je jouais aux échecs avec Mme dHoudetot. »
Ducrot commente :
« Bien que certains [énoncés] soient constitués avec des verbes exprimant des procès, on a limpression, en les lisant, dune description statique du salon à un moment précis. On ne raconte pas que Crimp sest fait peindre ou que Diderot a joué aux échecs, on les montre dans lattitude, lun, de lhomme qui pose, lautre de lhomme qui joue aux échecs. » ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44DUCROT, Oswald. 1983. L'imparfait en français. In Studies in Descriptive Linguistics, ed. F. HAUSMANN, 25-44. Heidelberg: Julius Groos., p.35.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 368-369.
Le passé simple fit auquel sassocie, deux lignes plus loin, le passé composé sont venus, permet de clôturer un récit qui menaçait de ne pas trouver ses limites.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 368-369.
SIMENON, La danseuse du Gai-Moulin, cité par ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77., p. 75.
Auto-Hebdo, 18.6.1997, cité par ADDIN EN.CITE SAUSSURE20055310531SAUSSURE, Louis deSTHIOUL, Bertrand2005Imparfait et enrichissement pragmatiqueCahiers Chronos14103-120SAUSSURE, Louis de et STHIOUL, Bertrand. 2005. Imparfait et enrichissement pragmatique. Cahiers Chronos 14:103-120.
ADDIN EN.CITE SAUSSURE20055310531SAUSSURE, Louis deSTHIOUL, Bertrand2005Imparfait et enrichissement pragmatiqueCahiers Chronos14103-120Ibid., p. 104.
Par exemple : ADDIN EN.CITE DUCROT19791450145DUCROT, Oswald1979L'imparfait en françaisLinguistische Berichte601-23DUCROT, Oswald. 1979. L'imparfait en français. Linguistische Berichte 60:1-23.
ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77.
Sur lhistoire de limparfait de limparfait de rupture voir ADDIN EN.CITE MULLER19661477147MULLER, Charles1966Pour une étude diachronique de l'imparfait narratifMélanges de grammaire française offerts à M. GrévisseGemblouxDuculotpp.253-269MULLER, Charles. 1966. Pour une étude diachronique de l'imparfait narratif. In Mélanges de grammaire française offerts à M. Grévisse, pp.253-269. Gembloux: Duculot.
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44DUCROT, Oswald. 1983. L'imparfait en français. In Studies in Descriptive Linguistics, ed. F. HAUSMANN, 25-44. Heidelberg: Julius Groos., p.34.
ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77., p. 63. : « Une petite enquête sur corpus (récits de fiction du XXème siècle) nous a non seulement convaincue du bien-fondé des observations de Klum, mais nous a de plus révélé combien lIMP sest imposé dans ce contexte. Ainsi ny trouve-t-on pas un seul PS dans La madone des sleepings (M. Dekobra), Poker denfer (St. A. Steeman) ou A lil (A.Allais). »
ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p.187.
Ainsi, Vetters, à la suite de Molendjik, sattache à souligner linadéquation du terme imperfectif pour limparfait. Il postule que « limparfait est neutre pour laspect, [cest-à-dire non seulement
] quil peut être imperfectif et perfectif mais aussi que sa valeur peut être indéterminée, se situant dans la zone grise entre perfectivité et imperfectivité. » ADDIN EN.CITE VETTERS19931230123VETTERS, Carl1993Passé simple et imparfait : un couple mal assortiLangue française100p.14-30décembre 1993VETTERS, Carl. 1993. Passé simple et imparfait : un couple mal assorti [décembre 1993]. Langue française 100:p.14-30., p.22.
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44DUCROT, Oswald. 1983. L'imparfait en français. In Studies in Descriptive Linguistics, ed. F. HAUSMANN, 25-44. Heidelberg: Julius Groos., p.33.
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44Ibid., p.33.
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44Ibid., p.33-34.
ADDIN EN.CITE DUCROT19833407340DUCROT, Oswald1983L'imparfait en françaisHAUSMANN, F.Studies in Descriptive LinguisticsHeidelbergJulius Groos25-44Ibid., p.34.
ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19853200320MOLENDIJK, Arie1985Point référentiel et imparfaitLangue française6778-93MOLENDIJK, Arie. 1985. Point référentiel et imparfait. Langue française 67:78-93., p. 91.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 308.
ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p. 152.
A la suite de Granville-Hatcher, il utilise le terme de phrase-tremplin. «Il lui paraît passablement évident, pour des motifs psychologiques et dramatiques, quun auteur soit tenté de nous plonger en pleine activité verbale après des phrases-tremplins comme le jour suivant. La notion même de phrase-tremplin indique que cest lordre [adverbe-verbe] quelle envisage surtout, ce qui donne à ladverbe la véritable fonction de sujet psychologique. Par la phrase-tremplin, qui nous mène à une hauteur phraséologique, on peut donc « tomber » en pleine activité du verbe, fût-il dun caractère instantané au point de vue logique. » ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p.191.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 308.
cité par ADDIN EN.CITE LE GOFFIC198622722LE GOFFIC, Pierre1986Que l'imparfait n'est pas un temps du passéLE GOFFIC, PierrePoints du vue sur l'ImparfaitCaenCentre de publications de l'université de Caen55-69LE GOFFIC, Pierre. 1986. Que l'imparfait n'est pas un temps du passé. In Points du vue sur l'Imparfait, ed. Pierre LE GOFFIC, 55-69. Caen: Centre de publications de l'université de Caen., p.60.
ADDIN EN.CITE LE GOFFIC198622722LE GOFFIC, Pierre1986Que l'imparfait n'est pas un temps du passéLE GOFFIC, PierrePoints du vue sur l'ImparfaitCaenCentre de publications de l'université de Caen55-69Ibid., p.60-61.
ADDIN EN.CITE LABELLE19874680468LABELLE, M1987L'utilisation des temps du passé dans les narrations françaises, le passé composé, l'imparfait et le présent historiqueRevue romane22/13-29LABELLE, M. 1987. L'utilisation des temps du passé dans les narrations françaises, le passé composé, l'imparfait et le présent historique. Revue romane 22/1:3-29.
ADDIN EN.CITE ANSCOMBRE19922420242ANSCOMBRE, Jean-Claude1992Imparfait et passé composé : des forts en thème/proposL'information grammaticale5543-53ANSCOMBRE, Jean-Claude. 1992. Imparfait et passé composé : des forts en thème/propos. L'information grammaticale 55:43-53.
ADDIN EN.CITE KAMP19835027502KAMP, HROHRER, C.1983Tense in textsBAUERLE, R.SCHWARZE, C.VON STECHOW, A.Meaning, use and interpretation of languageBerlinDe Gruyter250-269KAMP, H et ROHRER, C. 1983. Tense in texts. In Meaning, use and interpretation of language, eds. R. BAUERLE, C. SCHWARZE et A. VON STECHOW, 250-269. Berlin: De Gruyter.
ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK19855050505TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985Temps du passé : logique et apprentissageRevue internationale de philosophie155375-387TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77, TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985b. Temps du passé : logique et apprentissage. Revue internationale de philosophie 155:375-387.
ADDIN EN.CITE HOUWELING19825030503HOUWELING, F.1982Deictic and Anaphoric Tense MorphemesJournal of Italian Linguistics71-30HOUWELING, F. 1982. Deictic and Anaphoric Tense Morphemes. Journal of Italian Linguistics 7:1-30.
ADDIN EN.CITE MOESCHLER19925067506MOESCHLER, Jacques1992Référence temporelle et deixisKLEIBER, GeorgesWILMET, MarcActes du XXè Congrès International de Linguistique et Philologie RomanesTubingenG. Narr VerlagMOESCHLER, Jacques. 1992. Référence temporelle et deixis. In Actes du XXè Congrès International de Linguistique et Philologie Romanes, eds. Georges KLEIBER et Marc WILMET. Tubingen: G. Narr Verlag.
ADDIN EN.CITE VET19865077507VET, CoMOLENDIJK, Arie1986The Discourse Functions of Past Tenses of FrenchLO CASCIO, V.VET, CoTemporal Structure in Sentence and DiscourseDordrechtForis133-159VET, Co et MOLENDIJK, Arie. 1986. The Discourse Functions of Past Tenses of French. In Temporal Structure in Sentence and Discourse, eds. V. LO CASCIO et Co VET, 133-159. Dordrecht: Foris.
ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19901461146MOLENDIJK, Arie1990Le passé simple et l'imparfait : une approche reichenbachienneAmsterdamRodopiMOLENDIJK, Arie. 1990. Le passé simple et l'imparfait : une approche reichenbachienne. Amsterdam: Rodopi.
ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19935117511MOLENDIJK, Arie1993Présuppositions, implications, structure temporelleVETTERS, CarlLe temps, de la phrase au texteVilleneuve d'AscqPresses Universitaires de Lille167-191MOLENDIJK, Arie. 1993. Présuppositions, implications, structure temporelle. In Le temps, de la phrase au texte, ed. Carl VETTERS, 167-191. Villeneuve d'Ascq: Presses Universitaires de Lille.
ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19945127512MOLENDIJK, Arie1994Tense Use and Temporal Orientation : the "passé simple" and "imparfait" of FrenchVET, CoVETTERS, CarlTense and Aspect in Sentence and DiscourseAmsterdam/BerlinMouton/ De GruyterMOLENDIJK, Arie. 1994. Tense Use and Temporal Orientation : the "passé simple" and "imparfait" of French. In Tense and Aspect in Sentence and Discourse, eds. Co VET et Carl VETTERS. Amsterdam/Berlin: Mouton/ De Gruyter.
ADDIN EN.CITE VET19885087508VET, Co1988Temps verbaux et compléments adverbiaux de temps : leur contribution à la cohésion du texte narratifNOLKE, HenningOpérateurs syntaxiques et cohésion discursiveCopenhagueNyt Nordisk Forlag Arnold BusckVET19915107510VET, Co1991The Temporal Structure of Discourse : Setting, Change and PerspectiveFLEISCHMAN, S.WAUGH, Linda R.Discourse Pragmatics and the Verb. The Evidence from RomanceLondon/New YorkRoutledge7-25VET, Co. 1988. Temps verbaux et compléments adverbiaux de temps : leur contribution à la cohésion du texte narratif. In Opérateurs syntaxiques et cohésion discursive, ed. Henning NOLKE. Copenhague: Nyt Nordisk Forlag Arnold Busck, VET, Co. 1991. The Temporal Structure of Discourse : Setting, Change and Perspective. In Discourse Pragmatics and the Verb. The Evidence from Romance, eds. S. FLEISCHMAN et Linda R. WAUGH, 7-25. London/New York: Routledge.
ADDIN EN.CITE REICHENBACH19474341434REICHENBACH, H.1947Elements of symbolic logicNew-York. LondresThe Free PressREICHENBACH, H. 1947. Elements of symbolic logic. New-York. Londres: The Free Press.
ADDIN EN.CITE KAMP19835027502KAMP, HROHRER, C.1983Tense in textsBAUERLE, R.SCHWARZE, C.VON STECHOW, A.Meaning, use and interpretation of languageBerlinDe Gruyter250-269KAMP, H et ROHRER, C. 1983. Tense in texts. In Meaning, use and interpretation of language, eds. R. BAUERLE, C. SCHWARZE et A. VON STECHOW, 250-269. Berlin: De Gruyter.
ADDIN EN.CITE VETTERS19931230123VETTERS, Carl1993Passé simple et imparfait : un couple mal assortiLangue française100p.14-30décembre 1993VETTERS, Carl. 1993. Passé simple et imparfait : un couple mal assorti [décembre 1993]. Langue française 100:p.14-30., p.22. Sa définition est reprise à ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77. p.76.
ADDIN EN.CITE BERTHONNEAU19931850185BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges1993Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomiqueLangages11255-77BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 1993. Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomique. Langages 112:55-77., p. 56.
Exemple de ADDIN EN.CITE DUCROT19791450145DUCROT, Oswald1979L'imparfait en françaisLinguistische Berichte601-23DUCROT, Oswald. 1979. L'imparfait en français. Linguistische Berichte 60:1-23., p. 29.
ADDIN EN.CITE DUCROT19791450145DUCROT, Oswald1979L'imparfait en françaisLinguistische Berichte601-23Ibid., p.34
ADDIN EN.CITE BERTHONNEAU19931850185BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges1993Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomiqueLangages11255-77BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 1993. Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomique. Langages 112:55-77.
ADDIN EN.CITE KLEIN19845421542KLEIN, W.1984Time in LanguageLondresRoutledgeKLEIN, W. 1984. Time in Language. Londres: Routledge.
ADDIN EN.CITE GOSSELIN19961971197GOSSELIN, Laurent1996Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspectLouvain-la-NeuveDuculotGOSSELIN, Laurent. 1996. Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspect. Louvain-la-Neuve: Duculot.
Voir ADDIN EN.CITE GOSSELIN19961971197GOSSELIN, Laurent1996Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspectLouvain-la-NeuveDuculotIbid., p. 107-159.
Exemple de ADDIN EN.CITE VET19915107510VET, Co1991The Temporal Structure of Discourse : Setting, Change and PerspectiveFLEISCHMAN, S.WAUGH, Linda R.Discourse Pragmatics and the Verb. The Evidence from RomanceLondon/New YorkRoutledge7-25VET, Co. 1991. The Temporal Structure of Discourse : Setting, Change and Perspective. In Discourse Pragmatics and the Verb. The Evidence from Romance, eds. S. FLEISCHMAN et Linda R. WAUGH, 7-25. London/New York: Routledge.
ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane. 1985a. L'imparfait avec et sans rupture. Langue française 67:pp. 59-77.
ADDIN EN.CITE TASMOWSKI-DE RYCK19851490149TASMOWSKI-DE RYCK, Liliane1985L'imparfait avec et sans ruptureLangue française67pp. 59-77Ibid., p. 70.
ADDIN EN.CITE KLEIBER19931847184KLEIBER, Georges1993Lorsque l'anaphore se lie aux temps grammaticauxVetters, Carl117-166KLEIBER, Georges. 1993. Lorsque l'anaphore se lie aux temps grammaticaux, ed. Carl Vetters, 117-166.
ADDIN EN.CITE BERTHONNEAU20032467246BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges2003Un imparfait de plus ... et le train déraillaitCahiers ChronosKlincksieck111-24BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 2003. Un imparfait de plus ... et le train déraillait. In Cahiers Chronos, 1-24: Klincksieck., p. 21. Voir aussi : ADDIN EN.CITE BERTHONNEAU19931850185BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges1993Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomiqueLangages11255-77BERTHONNEAU19982970297BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges1998Imparfait, anaphore et inférencesChronos335-65BERTHONNEAU19991620162BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges1999Pour une réanalyse de l'imparfait de rupture dans le cadre de l'hypothèse anaphorique méronomiqueCahiers de praxématique32pp.119-166BERTHONNEAU20032467246BERTHONNEAU, Anne-MarieKLEIBER, Georges2003Un imparfait de plus ... et le train déraillaitCahiers ChronosKlincksieck111-24BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 1993. Pour une nouvelle approche de l'imparfait : l'imparfait, un temps anaphorique méronomique. Langages 112:55-77, BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 1998. Imparfait, anaphore et inférences. Chronos 3:35-65, BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 1999. Pour une réanalyse de l'imparfait de rupture dans le cadre de l'hypothèse anaphorique méronomique. Cahiers de praxématique 32:pp.119-166, BERTHONNEAU, Anne-Marie et KLEIBER, Georges. 2003. Un imparfait de plus ... et le train déraillait. In Cahiers Chronos, 1-24: Klincksieck.
Voir ADDIN EN.CITE MOLENDIJK19853200320MOLENDIJK, Arie1985Point référentiel et imparfaitLangue française6778-93MOLENDIJK, Arie. 1985. Point référentiel et imparfait. Langue française 67:78-93.
Comme chez ADDIN EN.CITE IRANDOUST19982940294IRANDOUST, Hengameh1998Episodes, cadres de référence et interprétation temporelle : Application à l'ImparfaitChronos367-89IRANDOUST, Hengameh. 1998. Episodes, cadres de référence et interprétation temporelle : Application à l'Imparfait. Chronos 3:67-89. qui critique, à son tour, la thèse de Berthonneau et Kleiber. Il apparaît, en somme, une sorte dinflation dans les pouvoirs explicatifs de limparfait qui prend en charge toute la cohérence textuelle.
Comme le souligne Vetters : « Quant au postulat de la déicticité fondamentale des temps verbaux, il est de toute façon concurrencé par le postulat de leur anaphoricité fondamentale. » ADDIN EN.CITE VETTERS20015457545VETTERS, Carl2001Le conditionnel : ultérieur du non-actuelDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzVETTERS, Carl. 2001. Le conditionnel : ultérieur du non-actuel. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI. Metz: Université de Metz., p. 171. On serait tenté dajouter « et vice-versa ».
ADDIN EN.CITE VET19925097509VET, Co1992L'anaphore temporelle et l'opposition "défini"/"indéfini"BANYS, Wieslaw.BENARDCZUCK, Leszek.BOGACKI, Krzysztof.Etudes de linguistique romane et slaveCracovieEcole Normale Supérieure de Cracovie641-651VET, Co. 1992. L'anaphore temporelle et l'opposition "défini"/"indéfini". In Etudes de linguistique romane et slave, eds. Wieslaw. BANYS, Leszek. BENARDCZUCK et Krzysztof. BOGACKI, 641-651. Cracovie: Ecole Normale Supérieure de Cracovie.
« Larticle défini présuppose lexistence et lunicité : il ny a pas dautre(s) référent(s) accessible(s) qui vérifie(nt) la description de la réalité désignée par le GN. » ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p. 154.
ADDIN EN.CITE BRES19972470247BRES, Jacques1997Habiter le temps : le couple imparfait/passé simple en françaisLangages12777-95BRES19972470247BRES, Jacques1997Habiter le temps : le couple imparfait/passé simple en françaisLangages12777-95BRES, Jacques. 1997. Habiter le temps : le couple imparfait/passé simple en français. Langages 127:77-95., p.94.
ADDIN EN.CITE CONFAIS199563163CONFAIS, Jean-Paul1995Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemandToulousePresse Universitaire du Mirail355CONFAIS, Jean-Paul. 1995. Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemand. Toulouse: Presse Universitaire du Mirail.
ADDIN EN.CITE CONFAIS199563163CONFAIS, Jean-Paul1995Temps, mode, aspect : les approches des morphèmes verbaux et leurs problèmes à l'exemple du français et de l'allemandToulousePresse Universitaire du Mirail355Ibid., p. 412.
Les recherches se poursuivant dans ce domaine, elles nous donneront peut-être loccasion dy revenir.
Cette analyse prend sans doute toute sa force quand on la compare à lanalyse du conditionnel effectuée ultérieurement.
Citons, au hasard, ces deux énoncés où le verbe au passé simple inscrit le procès quil désigne à lintérieur du procès désigné par un verbe à limparfait :
« Ils étaient autour du vin de table et des marrons chez ma concierge quand je passai devant leur loge, pour la dernière fois. »
Le procès « passer » sinsère classiquement à lintérieur du procès à limparfait qui présente le repas des concierges comme un continuum susceptible dêtre découpé à tout moment. La famille de la concierge est à table avant et le reste après le départ furtif de Bardamu.
« Quand nous arrivâmes au bout de lavenue de Clichy, à la Porte, la nuit était bien tombée déjà. »
La situation nocturne sert de décor englobant larrivée du taxi. Le procès au passé simple arrivâmes désignant, du fait de sa définition, un découpage du réel, peut sinscrire à lintérieur du procès au plus-que-parfait, décrivant laccompli indéfini du procès, cest-à-dire une situation résultative non délimitée.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 483.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 584.
Ou au passé composé, nous ne nous y intéressons pas ici.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 216-217.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.217-218.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.177-179.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 160.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 40.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 36-37. Cest nous qui soulignons les verbes dans cet extrait et les suivants.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 139.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 170.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 440-441.
Voir ci-dessus, p.201-202.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 368-369.
Si on prend en compte les notations humanisant le cochon comme un homme quon dérange, il le comprenait. Et surtout la remarque implicite de début de description il geignait aussi lui dont le aussi ne renvoie à rien dans le passage et doit donc être interprété comme une comparaison du narrateur avec une image quil a en tête, celle de Bébert qui agonise, face à quoi le médecin est impuissant, celle de sa tante, celle de la fillette régulièrement suppliciée par ses parents
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 188-193.
Nous nen retranscrivons que le début de chaque paragraphe afin de souligner les méandres de la narration. Lensemble du passage fait cinq pages.
« On avait à peine le temps de les voir disparaître les hommes, les jours et les choses dans cette verdure, ce climat, la chaleur et les moustiques. Tout y passait, cétait dégoûtant, par bouts, par phrases, par membres, par regrets, par globules, ils se perdaient au soleil, fondaient dans le torrent de la lumière et des couleurs, et le goût et le temps avec, tout y passait. Il ny avait que langoisse étincelante dans lair. » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 193.
Par exemple, à la fin du troisième chapitre : « Après ce temps-là, les convois dartillerie prirent toutes les routes dans un sens et les civils dans lautre. » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 44.
On pourrait multiplier les exemples sur le thème de la dissolution. Celui-ci, cependant, où Bardamu, sur le point de fuir Rancy, se regarde se dissoudre parmi les passants : « Le long doigt du gaz dans lentrée, cru et sifflant, sappuyait sur les passants au bord du trottoir et les tournait en fantômes hagards et pleins, dun seul coup, dans le cadre noir de la porte. Ils allaient ensuite se chercher un peu de couleur, les passants, ici et là, devant les autres fenêtres et les lampadaires et se perdaient finalement comme moi dans la nuit, noirs et mous. » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 439.
Voir ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell.
Cette difficulté à classer le conditionnel dans une temporalité a déjà été relevée. Vetters, par exemple, remarque que « le conditionnel présent se distingue du futur simple dans la mesure où sans laide de compléments de temps ou dautres indices contextuels il nest pas capable de spécifier la relation entre E et S. » Il emploie alors le terme d « opacité temporelle ». ADDIN EN.CITE VETTERS20015457545VETTERS, Carl2001Le conditionnel : ultérieur du non-actuelDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzVETTERS, Carl. 2001. Le conditionnel : ultérieur du non-actuel. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI. Metz: Université de Metz., p. 170-171.
Voir aussi Wilmet : « Le COND recrée à lindicatif lindiscrimination des époques inhérente au subjonctif. » ADDIN EN.CITE WILMET20012017201WILMET, Marc2001L'architectonique du "conditionnel"Dendale P. et Tasmowski L.Le conditionnel en françaisParisKlincksieckRecherches Linguistiques n°25WILMET, Marc. 2001. L'architectonique du "conditionnel". In Le conditionnel en français, ed. Dendale P. et Tasmowski L. Paris: Klincksieck., p. 33.
Cette analyse de Maingeneau témoigne des difficultés à appréhender le futur : « La morphologie montre bien que le futur est le résultat de visées de lénonciateur à partir de son présent. Dans ces conditions, il nest pas possible dadopter la démarche de beaucoup de grammaires traditionnelles qui, après avoir défini la valeur déictique du FS, ajoutent quelques paragraphes consacrés à ses « valeurs modales ». En réalité, on ne doit pas considérer ces valeurs modales comme des emplois périphériques mais poser dès le départ quelles relèvent de plein droit du fonctionnement du futur et que ce sont plutôt les emplois non-modaux, « neutres » qui sont périphériques. Enoncer au futur, ce nest pas situer un événement dans lavenir, cest désirer, ordonner, craindre, etc. Seule une vision réductrice du langage qui en fait un simple véhicule dinformations permet de rejeter dans les marges ce qui est en réalité lessence même du futur : la tension modale. » ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p.101.
Voir aussi ce commentaire de Curat : « Pour Guillaume, la sémiologie r- est une marque de non-actualisation, et, a la charge dincertitude inhérente à tout procès non factuel, cest-à-dire dont la réalisation nest ni achevée, ni actuelle en L, incertitude dordre temporel donc, le conditionnel ajoute ou substitue une seconde charge dincertitude, dordre extra-temporel celle-là, exprimée par la condition. »
« En situant la coïncidence R=L dans le temps éventuel, le conditionnel déclare en fait une non-coïncidence R ( L dans le temps factuel auquel appartient linstant actuel L. Cette opposition entre temps factuel et temps éventuel explique comment le point L peut être vu tantôt appartenir au temps factuel, dont il est le dernier instant, linstant actuel, présent, et donc rester extérieur au temps éventuel (futur), et tantôt appartenir au temps éventuel, dont il est alors le premier instant (conditionnel). [
] La différence entre les deux futurs du français est que R atteint ne laisse aucune incertitude au futur catégorique qui devient alors factuel, tandis que le conditionnel garde, même une fois R atteint, lincertitude de sa condition extra-temporelle. » ADDIN EN.CITE CURAT1991717CURAT, Hervé1991Morphologie verbale et référence temporelle en français moderne essai de sémantique grammaticaleLangue et cultures 24Genève ParisDroz337REF RENNES 2 : XD 445/20BU Sciences Lettres 44 500 CUR 000145TempsVerbesCURAT, Hervé. 1991. Morphologie verbale et référence temporelle en français moderne essai de sémantique grammaticale: Langue et cultures 24. Genève Paris: Droz., p. 191-192. « L » est le symbole de linstant de lénonciation, R est linstant de référence du procès au temps.
ADDIN EN.CITE LEEMAN-BOUIX199433133LEEMAN-BOUIX, Danielle1994Grammaire du verbe français; des formes au sensLinguistiqueParisNathanLEEMAN-BOUIX, Danielle. 1994. Grammaire du verbe français; des formes au sens: Linguistique. Paris: Nathan., p. 39.
ADDIN EN.CITE NEF198651051NEF, Frédéric1986Sémantique de la référence temporelle en français moderneNEF, Frédéric. 1986. Sémantique de la référence temporelle en français moderne., p. 150.
ADDIN EN.CITE MAINGUENEAU199436136MAINGUENEAU, Dominique1994L'énonciation en linguistique françaiseParisHachette SupérieurMAINGUENEAU, Dominique. 1994. L'énonciation en linguistique française. Paris: Hachette Supérieur., p.59-60.
En effet, ce nest pas à laune du réel que lon peut juger ce qui est désigné par un énoncé renvoyant à cette réalité. Nous partageons les principes de Ducrot à ce sujet même si elles ne concernent pas le futur :
« Dire que X a fait une promesse, par exemple, cest dire quil a présenté son énonciation comme étant pour lui lorigine dune obligation nouvelle. Cest dire quil sest donné comme assumant une obligation du fait de sa présente énonciation. Doù une première conclusion : laspect illocutoire de lactivité de parole lui confère une nécessaire référence à elle-même et permet déjà de lui reconnaître le « primat » indispensable à son étude structurale [
] Présenter son énonciation comme une promesse, cest se présenter soi-même comme obligé ce qui nimplique pas quon le soit. » ADDIN EN.CITE DUCROT19842101210DUCROT, Oswald1984Le dire et le ditParisMinuitDUCROT, Oswald. 1984. Le dire et le dit. Paris: Minuit., p.78-79.
A propos du destinataire dun ordre :
« le Y qui reste libre nest pas le destinataire en tant quil est lobjet de lacte, cest-à-dire le personnage de lacte de parole, mais la personne, extérieure à cet acte, qui en a été lobjet. Ici encore, lénonciation possède un sens définissable à lintérieur du monde « idéal » dont elle est lorigine, et non pas dans la réalité historique où elle est insérée. » Et encore :
« il ne sagit pas de décrire la parole de X par les conclusions que Y en a, en fait tirées, mais par le type de conclusions quil devait en tirer, en tant quil était le destinataire choisi par X. Beaucoup de difficultés de la sémantique linguistique tiennent à ce quon distingue mal le destinataire personnage de la comédie illocutoire- et le récepteur réel du message. [
] la variante structuraliste que je développe ne considère que le premier cet autre par rapport auquel le discours prend son sens, mais qui est en même temps une projection, à la fois constitutif et constitué. » ADDIN EN.CITE DUCROT19842101210DUCROT, Oswald1984Le dire et le ditParisMinuitDUCROT, Oswald. 1984. Le dire et le dit. Paris: Minuit., p.79-81.
sauf si la pendule sarrête avant !
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 630.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.91
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 572-573.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 240.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 304.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.48.
Linjonction est une des interprétations possibles de cet énoncé. Le contexte, le ton permettrait de valider ou dinfirmer cette interprétation. Le contexte peut par exemple, consister en une précision sur le statut du futur ou en une alternance futur/impératif comme dans ces exemples donnés par Touratier :
Allons, en voilà assez. Vous quitterez cette femme. Tout-à-lheure je vous en priais, maintenant je vous lordonne. (A. Dumas fils)
Ah ça, ôterez-vous votre pied ? Otez donc votre pied, voyons. (V.Hugo)
ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p.178.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 18.
Dailleurs, face à lindolence de Robinson, Madelon multiplie ces futurs, en vain :
« Si jamais vous relevez une seule fois la main sur moi, elle vous apprendra Madelon, comment il faut vous conduire dans la vie. »
« Ou bien que tu viens tout de suite avec moi ou bien que jirai le voir demain matin !
»
« Jirai autant quon voudra, en prison moi ! Mais tiras aussi alors toi dis ma vache ?
Tu te foutras pas de moi plus longtemps dis au moins ! » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 615-616.
Exemple de ADDIN EN.CITE NOREIKO19803280328NOREIKO, Stephen F.1980Un modèle des temps verbaux du françaisRevue de linguistique romane44108-120NOREIKO, Stephen F. 1980. Un modèle des temps verbaux du français. Revue de linguistique romane 44:108-120., p.116.
ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFRIEGEL, Martin, PELLAT, Jean-Christophe et RIOUL, René. 1994. Grammaire méthodique du français. Paris: PUF., p.304.
Exemple de ADDIN EN.CITE RIEGEL199440140RIEGEL, MartinPELLAT, Jean-ChristopheRIOUL, René1994Grammaire méthodique du françaisParisPUFIbid., p..315.
ADDIN EN.CITE ABOUDA20012087208ABOUDA, Lofti2001Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire.P. Dendale & L. TasmowskiLe conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz, coll. Recherches Linguistiques25277-294ABOUDA, Lofti. 2001. Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire. In Le conditionnel en français, ed. P. Dendale & L. Tasmowski, 277-294. Metz: Université de Metz, coll. Recherches Linguistiques., p. 278. ADDIN EN.CITE ABOUDA20012087208ABOUDA, Lofti2001Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire.P. Dendale & L. TasmowskiLe conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz, coll. Recherches Linguistiques25277-294ABOUDA, Lofti. 2001. Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire. In Le conditionnel en français, ed. P. Dendale & L. Tasmowski, 277-294. Metz: Université de Metz, coll. Recherches Linguistiques.
ADDIN EN.CITE VETTERS20015457545VETTERS, Carl2001Le conditionnel : ultérieur du non-actuelDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzVETTERS, Carl. 2001. Le conditionnel : ultérieur du non-actuel. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI. Metz: Université de Metz., p. 171-172.
Il faut remarquer la convergence de lanalyse du syntagme hypothétique à ce sujet même si elle porte sur si + imparfait que nous traduisons pour notre part, par un conditionnel, nous le verrons plus loin. En effet, selon Gosselin, la valeur par défaut de si + imparfait est lirréel, cest un élément contextuel qui déclenche une valeur potentielle. ADDIN EN.CITE GOSSELIN19991787178GOSSELIN, Laurent1999Les valeurs de l'imparfait et du conditionnel dans les systèmes hypothétiquesVogeleer S., Borillo A., Vuillaume M. & Vetters C.La modalité sous tous ses aspects. Cahiers Chronos 4Amsterdam - Atlanta.Rodopi29-51GOSSELIN, Laurent. 1999. Les valeurs de l'imparfait et du conditionnel dans les systèmes hypothétiques. In La modalité sous tous ses aspects. Cahiers Chronos 4, ed. Borillo A. Vogeleer S., Vuillaume M. & Vetters C., 29-51. Amsterdam - Atlanta.: Rodopi., p. 40. Cela signifie que le sens « potentiel » -à opposer, ici à irréel- est lié à une interprétation temporelle de la non-coïncidence de la situation dénoncé et dépend de lintroduction dun élément contextuel, alors que son interprétation « irréelle » évacue la temporalité dans son analyse et cest, effectivement, linterprétation par défaut.
ADDIN EN.CITE GOSSELIN19961971197GOSSELIN, Laurent1996Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspectLouvain-la-NeuveDuculotGOSSELIN, Laurent. 1996. Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspect. Louvain-la-Neuve: Duculot. Cest nous qui soulignons.
Là encore, à priori, rien ninterdirait de paraphraser par « Au vu des premiers résultats, Monsieur X sera sans doute réélu », bien au contraire.
Pour plus de détails sur la théorie polyphonique du conditionnel, on peut consulter :
ADDIN EN.CITE DONAIRE19982780278DONAIRE, Maria Luisa1998La mise en scène du conditionnel ou quand le locuteur reste en coulissesLe français moderne66204-227DONAIRE, Maria Luisa. 1998. La mise en scène du conditionnel ou quand le locuteur reste en coulisses. Le français moderne 66:204-227.
ADDIN EN.CITE HAILLET20022021202HAILLET, Pierre Patrick2002le conditionnel en français : une approche polyphoniqueParisOphrysHAILLET, Pierre Patrick. 2002. le conditionnel en français : une approche polyphonique. Paris: Ophrys.
ADDIN EN.CITE HAILLET19952031203HAILLET, Pierre Patrick1995Le conditionnel dans le discours journalistique : essai de linguistique descriptiveNeuvilleBrefHAILLET, Pierre Patrick. 1995. Le conditionnel dans le discours journalistique : essai de linguistique descriptive. Neuville: Bref.
ADDIN EN.CITE HAILLET19982040204HAILLET, Pierre Patrick1998Le conditionnel d'altérité énonciative et les formes du discours rapporté dans la presse écritePratiques100Metz, CRESEF63-79HAILLET, Pierre Patrick. 1998a. Le conditionnel d'altérité énonciative et les formes du discours rapporté dans la presse écrite. Pratiques 100:63-79.
ADDIN EN.CITE HAILLET19982057205HAILLET, Pierre Patrick1998Quand un énoncé en cache un autre : le conditionnel et les relatives appositivesJ. Bres, R. Delamotte-Legrand, F.Madray-Lesigne & P. SiblotL'autre en discoursMontpellierMontpellier III213-238HAILLET, Pierre Patrick. 1998b. Quand un énoncé en cache un autre : le conditionnel et les relatives appositives. In L'autre en discours, ed. R. Delamotte-Legrand J. Bres, F.Madray-Lesigne & P. Siblot, 213-238. Montpellier: Montpellier III.
qui sinspirent de la théorie de Ducrot.
Mais aussi ses détracteurs, comme ADDIN EN.CITE SAUSSURE20065447544SAUSSURE, Louis de2006Quelle réalité derrière l'hypothèse polyphonique?Les mélanges André RousseauSAUSSURE, Louis de. 2006. Quelle réalité derrière l'hypothèse polyphonique? In Les mélanges André Rousseau.
« On considère que la valeur basique du conditionnel journalistique nest autre que lexpression dune non-prise en charge [
] de son Locuteur. ADDIN EN.CITE ABOUDA20012087208ABOUDA, Lofti2001Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire.P. Dendale & L. TasmowskiLe conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz, coll. Recherches Linguistiques25277-294ABOUDA, Lofti. 2001. Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire. In Le conditionnel en français, ed. P. Dendale & L. Tasmowski, 277-294. Metz: Université de Metz, coll. Recherches Linguistiques., p. 279.
Voir aussi : ADDIN EN.CITE KORZEN19903267326KORZEN, HanneNOLKE, Henning1990Projet pour une théorie des emplois du conditionnelHalmoy, O.Halvorsen, A.Lorentzen, L.Actes du 11ème Congrès des Romanistes Scandinaves, Trondheim, 13-17 août 1990Université de Trondheim273-300KORZEN, Hanne et NOLKE, Henning. 1990. Projet pour une théorie des emplois du conditionnel. In Actes du 11ème Congrès des Romanistes Scandinaves, Trondheim, 13-17 août 1990, eds. O. Halmoy, A. Halvorsen et L. Lorentzen, 273-300: Université de Trondheim.
Il sagit de reconnaître un énonciateur dans tout énoncé dont le locuteur peut se distinguer ou avec lequel il peut se confondre. La non-prise en charge par le locuteur de son énoncé, éventuellement en usant du conditionnel, serait le propre dune distinction du locuteur avec lautre-énonciateur.
« le conditionnel épistémique [
] a pour fonction première dempêcher que le locuteur soit grammaticalement contraint de prendre en charge à son compte linformation à cause du mode présuppositionnel sur lequel cette information est présentée. Sa fonction est donc en premier lieu de signaler la non-prise en charge de linformation par le locuteur. » ADDIN EN.CITE DENDALE19931223122DENDALE, Patrick1993Le conditionnel de l'information incertaine : marqueur modal ou marqueur évidentiel?Actes du XXè congrès international de linguistique et de philologie romaneUniversité de ZurichTübingen, Francke165-176DENDALE, Patrick. 1993. Le conditionnel de l'information incertaine : marqueur modal ou marqueur évidentiel? Communication présentée à Actes du XXè congrès international de linguistique et de philologie romane, Université de Zurich., p. 167-168.
Abouda a consacré une thèse au conditionnel : ADDIN EN.CITE ABOUDA19972072207ABOUDA, Lofti1997Recherches sur la syntaxe et la sémantique du conditionnel en français moderneUniversité de Paris VIIABOUDA, Lofti. 1997a. Recherches sur la syntaxe et la sémantique du conditionnel en français moderne, Université de Paris VII. Voir aussi :
ADDIN EN.CITE ABOUDA19972400240ABOUDA, Lofti1997Le conditionnel : temps ou mode? Arguments syntaxiquesRevue romane32-2179-198ABOUDA, Lofti. 1997b. Le conditionnel : temps ou mode? Arguments syntaxiques. Revue romane 32-2:179-198.
ADDIN EN.CITE ABOUDA19982360236ABOUDA, Lofti1998Vers une localisation syntaxique des modes verbaux. Cas de la phrase indépendanteCahiers Chronos3293-322ABOUDA, Lofti. 1998. Vers une localisation syntaxique des modes verbaux. Cas de la phrase indépendante. Cahiers Chronos 3:293-322.
ADDIN EN.CITE ABOUDA20012087208ABOUDA, Lofti2001Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire.P. Dendale & L. TasmowskiLe conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz, coll. Recherches Linguistiques25277-294ABOUDA, Lofti. 2001. Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire. In Le conditionnel en français, ed. P. Dendale & L. Tasmowski, 277-294. Metz: Université de Metz, coll. Recherches Linguistiques., p. 281.
Dailleurs, Abouda ny prétend pas quand il restreint son analyse aux conditionnels journalistique, polémique et datténuation.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 29.
Il serait intéressant de comparer cette remarque à celle des logiciens qui séparent « mondes possibles » et « mondes de croyance ». Nous renvoyons à ce propos à la distinction de Martin entre un ConditionnelU et un conditionnel m. ADDIN EN.CITE MARTIN198324124MARTIN, Robert1983Pour une logique du sensParisPUFMARTIN, Robert. 1983. Pour une logique du sens. Paris: PUF.,p. 148-158.
On peut comparer avec le texte substitué au futur « On nous couvrira de décorations, de fleurs, on passera sous lArc de Triomphe. On entrera au restaurant, on vous servira sans payer, on payera plus rien, jamais plus de la vie ! On est les héros ! quon dira au moment de la note
Des défenseurs de la Patrie ! Et ça suffira !
On payera avec de petits drapeaux français !
La caissière refusera même largent des héros et même elle vous en donnera, avec des baisers quand on passera devant sa caisse. ça vaudra la peine de vivre. » Il sagit alors de procès potentiels définis, le futur représente ladhésion du locuteur à son dire, même si cette adhésion peut être manifestement jouée.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p.28.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 414.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid. p. 409.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 624.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 439.
ADDIN EN.CITE ABOUDA20012087208ABOUDA, Lofti2001Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire.P. Dendale & L. TasmowskiLe conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz, coll. Recherches Linguistiques25277-294ABOUDA, Lofti. 2001. Les emplois journalistiques, polémique, et atténuatif du conditionnel. Un traitement unitaire. In Le conditionnel en français, ed. P. Dendale & L. Tasmowski, 277-294. Metz: Université de Metz, coll. Recherches Linguistiques., p. 291.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 24.
Lanalyse dun corpus montre que ce type de syntaxe considérée parfois comme à la base de lexplication du conditionnel est loin dêtre la seule forme syntaxique méritant dêtre étudiée. Des énoncés comme :
« Je ne pouvais pas le guérir moi, tant quil travaillerait dans les acides
» ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.375.
« Des gens solides en deviendraient bizarres, à plus forte raison ces abrutis chimériques. » p. 148.
« Pour un billet en resquille, elles feraient stopper toute la ligne. » p. 298.
« Qui ne ferait pas sa poussière dans ces endroits-là, sur les sept heures, passerait pour un fameux cochon dans sa propre rue. » p. 302,
montrent la diversité et la richesse des emplois du conditionnel en syntaxe. Nous nous arrêterons pourtant ici à ce seul schéma syntaxique dans la mesure où notre recherche nenglobe pas tous les faits syntaxiques. Nous renvoyons également à larticle de ADDIN EN.CITE BORILLO20015467546BORILLO, Andrée2001Le conditionnel dans la corrélation hypothétique en françaisDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz231-250BORILLO, Andrée. 2001. Le conditionnel dans la corrélation hypothétique en français. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 231-250. Metz: Université de Metz. qui traite de différents cas de syntaxe du conditionnel dans les hypothétiques.
ADDIN EN.CITE BORILLO20015467546BORILLO, Andrée2001Le conditionnel dans la corrélation hypothétique en françaisDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz231-250BORILLO, Andrée. 2001. Le conditionnel dans la corrélation hypothétique en français. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 231-250. Metz: Université de Metz.
ADDIN EN.CITE LEEMAN20015477547LEEMAN, Danielle2001Pourquoi ne peut-on pas combiner si et le conditionnel?DENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe Conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz211-230LEEMAN, Danielle. 2001. Pourquoi ne peut-on pas combiner si et le conditionnel? In Le Conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 211-230. Metz: Université de Metz.
ADDIN EN.CITE MOESCHLER20015487548MOESCHLER, JacquesREBOUL, Anne2001Conditionnel et assertion conditionnelleDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe Conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz147-167MOESCHLER, Jacques et REBOUL, Anne. 2001. Conditionnel et assertion conditionnelle. In Le Conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 147-167. Metz: Université de Metz.
ADDIN EN.CITE KREUTZ20015497549KREUTZ, Philippe2001"Une chatte n'y retrouverait pas ses jeunes". Polyphonie, scalarité et dispositionsDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe Conditionnel en françaisMetzUniversité de Metz345-362KREUTZ, Philippe. 2001. "Une chatte n'y retrouverait pas ses jeunes". Polyphonie, scalarité et dispositions. In Le Conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI, 345-362. Metz: Université de Metz.
ADDIN EN.CITE VETTERS20015457545VETTERS, Carl2001Le conditionnel : ultérieur du non-actuelDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzVETTERS, Carl. 2001. Le conditionnel : ultérieur du non-actuel. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI. Metz: Université de Metz.
ADDIN EN.CITE GOSSELIN19991787178GOSSELIN, Laurent1999Les valeurs de l'imparfait et du conditionnel dans les systèmes hypothétiquesVogeleer S., Borillo A., Vuillaume M. & Vetters C.La modalité sous tous ses aspects. Cahiers Chronos 4Amsterdam - Atlanta.Rodopi29-51GOSSELIN, Laurent. 1999. Les valeurs de l'imparfait et du conditionnel dans les systèmes hypothétiques. In La modalité sous tous ses aspects. Cahiers Chronos 4, ed. Borillo A. Vogeleer S., Vuillaume M. & Vetters C., 29-51. Amsterdam - Atlanta.: Rodopi., p. 36. Vetters confirme cette remarque par la présence de deux phénomènes concordants :
« Si limparfait portait sur p, on aurait du mal à expliquer la présence dans la protase de compléments de temps futurs :
Si Luc était malade lundi prochain, ça serait ennuyeux
et de compléments perfectifs qui bornent le procès, incompatibles avec limperfectivité de limparfait :
a. Si je travaillais de 5h à 7h, on pourrait aller au cinéma à 8H.
b. Si ce documentaire durait 45, on pourrait le mettre en le journal et le match de foot. » ADDIN EN.CITE VETTERS20015457545VETTERS, Carl2001Le conditionnel : ultérieur du non-actuelDENDALE, PatrickTASMOWSKI, LilianeLe conditionnel en françaisMetzUniversité de MetzVETTERS, Carl. 2001. Le conditionnel : ultérieur du non-actuel. In Le conditionnel en français, eds. Patrick DENDALE et Liliane TASMOWSKI. Metz: Université de Metz., p. 188.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 417.
On aurait léquivalent prosodique à loral avec une clôture phrastique suivie dune reprise éventuellement précédée dun enfin.
Nous ne développons pas cette remarque, laissant ouverte la recherche sur le présent pour un autre travail complémentaire. Il est bien évident que cette partie danalyse demanderait à sappuyer sur une analyse approfondie du présent.
Touratier signale dailleurs expressément cette valeur : « Cest moins une valeur de futur proche quune valeur pure et simple de futur quil faut attribuer aux présents qui apparaissent normalement dans une subordonnée conditionnelle comme Sil pleut (demain), je ne sortirai pas. ADDIN EN.CITE TOURATIER199638138TOURATIER, Christian1996Le système verbal françaisParisA. ColinTOURATIER, Christian. 1996. Le système verbal français. Paris: A. Colin., p. 76.
Cette analyse nexplique pas pourquoi « les si naiment pas non plus les rai ». On peut penser quil sagit dune analogie avec la syntaxe du conditionnel, dautant que lhomophonie de la première personne des deux formes verbales peut expliquer bien des rapprochements. En effet, la mise en facteur du R dans lhypothétique au conditionnel débouche logiquement sur la contrainte dabsence de répétition de la même manière quon ne peut pas dire *les belles les élégantes pour les belles élégantes. Le futur aurait reproduit cette contrainte par simple analogie avec le conditionnel.
Wilmet en résume très bien lhistorique dans ADDIN EN.CITE WILMET20012017201WILMET, Marc2001L'architectonique du "conditionnel"Dendale P. et Tasmowski L.Le conditionnel en françaisParisKlincksieckRecherches Linguistiques n°25WILMET, Marc. 2001. L'architectonique du "conditionnel". In Le conditionnel en français, ed. Dendale P. et Tasmowski L. Paris: Klincksieck., p. 25.
Pour plus de détails, on peut aussi consulter ADDIN EN.CITE YVON195230030YVON, Henri1952Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français?Le Français moderne4 (20è année)ParisYVON, Henri. 1952. Faut-il distinguer deux conditionnels dans le verbe français? Le Français moderne 4 (20è année).
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 134.
ADDIN EN.CITE TASSIE19633570357TASSIE, James1963Le conditionnel, tiroir uniquement modalRevue canadienne de linguistique920-30TASSIE, James. 1963. Le conditionnel, tiroir uniquement modal. Revue canadienne de linguistique 9:20-30.
Ce type dénoncé qui cumule prise en charge par un discours indirect passé et valeurs du conditionnel, peut être à la base du sentiment linguistique dun sens toujours modal du conditionnel. En effet, si un futur en discours direct est obligatoirement transformé en conditionnel quand on le prend en charge dans un discours indirect passé, linverse nest pas vrai. A un conditionnel dans un discours indirect introduit par un verbe au passé peut correspondre soit un futur, soit un conditionnel en discours direct.
ADDIN EN.CITE GOSSELIN19961971197GOSSELIN, Laurent1996Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspectLouvain-la-NeuveDuculotGOSSELIN, Laurent. 1996. Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspect. Louvain-la-Neuve: Duculot., p. 46-47.
ADDIN EN.CITE GOSSELIN19961971197GOSSELIN, Laurent1996Sémantique de la temporalité en français. Un modèle calculatoire et cognitif du temps et de l'aspectLouvain-la-NeuveDuculotIbid., p. 63.
On peut joindre à ce futur des historiens ce type dénoncé :« Pierre Scize, qui a entendu comme moi, comme tous, demandera le lendemain dans son article : « Le Président est-il sourd ? ». Giono, Dominici, 75. Cité par ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell., p. 263.
Vallotton, Fersen, 95. Cité par ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellIbid.
ADDIN EN.CITE IMBS1960616IMBS, Paul1960L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptiveParisKlincksieckIMBS, Paul. 1960. L'emploi des temps verbaux en français moderne; essai de grammaire descriptive. Paris: Klincksieck., p.46.
Exemple cité par ADDIN EN.CITE KLUM19614491449KLUM, Arne1961Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporainUppsalaAlmquist et WiksellKLUM, Arne. 1961. Verbe et adverbe. Etude sur le système verbal de l'indicatif et sur le système de certains adverbes de temps à la lumière des relations verbo-adverbiales dans la prose du français contemporain. Uppsala: Almquist et Wiksell.
Notre analyse du futur demande à être complétée encore car le futur simple est à mettre en opposition avec le futur périphrastique et le subjonctif (jespère quil viendra, je souhaite quil vienne). Cela ne peut se faire sans analyser en profondeur présent et subjonctif. Nous nous sommes arrêtée au seuil de lanalyse du présent, mis hors-jeu de notre analyse par la distribution, mais dont la neutralité vis à vis des traits sémantiques « potentiel » et « défini » permet peut-être de comprendre les multiples effets de sens. Quant au subjonctif, il requiert une analyse que nous navons pas même ébauchée ici mais qui devrait nous permettre dappréhender le système verbal en français, ce à quoi notre recherche, forcément partielle, ne nous permet pas encore daboutir.
ADDIN EN.CITE BURGER19622500250BURGER, André1962Essai d'analyse d'un système de valeursCahiers Ferdinand de Saussure1967-76BURGER, André. 1962. Essai d'analyse d'un système de valeurs. Cahiers Ferdinand de Saussure 19:67-76., p. 69.
ADDIN EN.CITE BURGER19622500250BURGER, André1962Essai d'analyse d'un système de valeursCahiers Ferdinand de Saussure1967-76Ibid., p. 69.
ADDIN EN.CITE BURGER19612510251BURGER, André1961Significations et valeur du suffixe verbal français -è-Cahiers Ferdinand de Saussure185-15BURGER, André. 1961. Significations et valeur du suffixe verbal français -è-. Cahiers Ferdinand de Saussure 18:5-15., p.13
ADDIN EN.CITE BURGER19612510251BURGER, André1961Significations et valeur du suffixe verbal français -è-Cahiers Ferdinand de Saussure185-15Ibid., p.15.
Linactuel, au sens de « qui ne réfère pas à lactualité du parleur au moment de la parole » est une définition encore trop temporelle à notre goût, car elle se réfère au moment de la parole pour construire une actualité. Pour nous, le moment de la parole nest quun des paramètres de la situation dénoncé, paramètres parmi lesquels on ne peut établir nulle hiérarchie.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 120.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.30.
Voir à ce sujet notre analyse du conditionnel.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 266.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 198.
Notons que ce brouillage entre deux points de vue utilise dautres procédés que celui quautorise le conditionnel dans Voyage au bout de la nuit. Un exemple, pour montrer quil sagit bien dune volonté délibérée de créer un brouillage de lénonciation :
« Comme si javais su où jallais, jai eu lair de choisir encore et jai changé de route, jai pris sur ma droite une autre rue, mieux éclairée, « Broadway » quelle sappelait. » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 247.
Les expressions comme si javais su où jallais et surtout « jai eu lair » désignent un regard extérieur sur le personnage, ce qui en soi, est incompatible avec le je. On a alors limpression que le narrateur se replongeant dans ses souvenirs nadopte pas le point de vue du personnage mais celui dun observateur de cette arrivée, point de vue dédoublé par la connaissance acquise par le narrateur, puisque le comme si implique que ce nest là quune apparence.
Sans compter que lattribution du conditionnel au discours indirect libre du personnage peut correspondre aussi à un conditionnel et non à un futur. Cest le cas dans cet exemple où Bardamu simagine essayer de convaincre son colonel de labsurdité de la guerre. On ne peut savoir si le conditionnel sert un scénario imaginaire ou si le narrateur anticipe sur la suite du récit :
« « Quest-ce que vous voulez ? » me demanderait-il, jimaginais, très surpris bien sûr par mon audacieuse interruption. Je lui expliquerais alors les choses telles que je les concevais. On verrait ce quil en pensait, lui. » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 26.
Bardamu simagine essayer de convaincre son colonel de labsurdité de la guerre. Ce que dit lemploi du conditionnel, par le trait non-défini qui loppose au futur, cest le peu de crédibilité que le narrateur accorde à la réalisation du procès possible. Mais est-ce le narrateur-personnage conscient du peu de chances daboutir de sa démarche qui choisit le conditionnel pour décrire un scénario imaginaire dans un discours indirect libre ou est-ce le point de vue du narrateur-rétrospectif qui opère ?
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 196.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 25.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 430.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 572-573.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 17.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 18.
Il faudra en effet au héros voir la guerre de près pour sextraire de cette naïveté. En ce sens, le dialogue du départ est véritablement fondateur du roman, du moins dans son acception picaresque.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardCELINE, Ferdinand. 1932. Voyage au bout de la nuit. Paris: Gallimard., p. 17.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 15, 16.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 19.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.119.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.185
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.119.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.185.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.69.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.275-276.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p.57. Le narrateur justifie dailleurs immédiatement cette cruauté : « Jétais pas content davoir donné mes cent sous. Il y avait ces cent sous entre nous. ça suffit pour haïr, cent sous, et désirer quils crèvent tous. Pas damour à perdre dans ce monde, tant quil y aura cent sous. »
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 215.
ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 202.
Deux passages sont particulièrement marquants, celui où Bardamu devenu bouc-émissaire de lAmiral Bragueton est menacé de mort et improvise un discours en parodiant ses bourreaux pour leur interdire tout recours :
«
De quelle abominable médisance messieurs, êtes-vous devenus les victimes ? Aller jusquà penser que moi, votre frère en somme, je mentêtais à répandre dimmondes calomnies sur votre compte dhéroïques officiers ! Cest trop ! vraiment cest trop ! Et cela au moment même où ils sapprêtent ces braves, ces incomparables braves à reprendre, avec quel courage, la garde sacrée de notre immortel empire colonial ! poursuivis-je. Là où les plus magnifiques soldats de notre race se sont couverts dune gloire éternelle
. » ADDIN EN.CITE CELINE19324921492CELINE, Ferdinand1932Voyage au bout de la nuitParisGallimardIbid., p. 158.
Lautre est le discours inventé par Bardamu pour convaincre le commandant de la station de quarantaine aux Etats-Unis de lintérêt de ses compétences :
« Jy crois au dénombrement des puces ! Cest un facteur de civilisation parce que le dénombrement est la base dun matériel de statistique des plus précieux !
Un pays progressiste doit connaître le nombre de ses puces, divisées par sexe, groupe dâges, années et saisons
»
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