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Les lectures théologiques de Claude Hopil - HAL

6, st. 4, p. 11). Dans les Divins eslancemens et les Doux vols, le modèle de l' énoncé ... L'incompétence de la raison humaine au sujet de Dieu fait encourir le risque de ..... Deux hypothèses, en particulier, ont été faites et méritent un examen : il ...... nopces spirituelles, Toulouse, Vve Colomies, 1606 ; pseudo- Denys, ?uvres, ...




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iel et des anges ».
Orthodoxie théologique et hétérodoxie mystique du poète Claude Hopil (entre 1603 et 1633)


Audrey Duru (Université de Picardie)


L’œuvre signée par Claude Hopil résiste à l’établissement d’un savoir positif. Notre discours critique doit déjouer une ruse : le poète écrit en effet à travers la mise en déroute des savoirs et pour mettre en déroute les savoirs. Ses poèmes enregistrent la défaillance de la raison. Toute interprétation, si elle ne glisse pas dans l’écriture mystique, doit donc ruser avec les paradoxes et les contradictions de l’œuvre.
Notre hypothèse de lecture rend compte de l’équivoque constitutive des écrits de C. Hopil. Dans son œuvre, nous assistons à une contestation mutuelle de la poésie et de la théologie : critique de la poésie par la théologie et critique de la théologie par la poésie. Toutefois, suivant le principe mystique de la coïncidence des contraires, il faut également affirmer la proposition inverse. Dans le mouvement de critique même, nous assistons à une célébration réciproque de la poésie et de la théologie : sublimation de la théologie par la poésie et sublimation de la poésie par la théologie. Toute lecture des poèmes de C. Hopil doit tenir compte de ce principe de contradiction à l’œuvre dans l’énoncé. Les poèmes sont à double entente : au plan critique, en toute rigueur, chaque hypothèse d’interprétation devrait donc contenir une correction par son antithèse. Cette énonciation équivoque caractérise la théologie mystique de Claude Hopil ; nous la situons globalement dans la spiritualité du pur amour ou « école abstraite » caractéristique du début du XVIIe siècle à Paris.
L’importante étude en poétique et stylistique d’Anne Mantero, La Muse théologienne, offre de fines analyses sur l’équivoque dans les Divins eslancemens (1628-1629). L’auteur résume ainsi le projet de théologie mystique de ce recueil :
Hopil ne s’attache pas à la description des états ou des sentiments de l’âme ravie (…( mais il pratique une contemplation du mystère en laquelle l’entendement, sachant ses limites, se dépassant lui-même pour entrer en excès, est comme relayé par la volonté amoureuse.
L’étude souligne les vertus de l’allusion, de l’équivoque, de l’impertinence sémantique, qui redéfinissent ce qu’est la poésie selon C. Hopil :
Il suffit au poète de découvrir dans l’imperfection même de l’emploi équivoque des mots la vertu d’une impertinence, en tant que celle-ci est déjà le signe d’une extension du dicible, donc du pensable.
Ces résultats en poétique prennent place dans une histoire de l’étude du style mystique. En les présupposant, nous pouvons questionner l’intertextualité de la théologie mystique de Claude Hopil avec la théologie scolastique : nous relevons notamment un emploi critique de la terminologie aristotélico-thomiste. L’œuvre accomplit ainsi la vulgarisation problématique d’une discipline savante ; elle la met en pièces dans un énoncé spirituel de laïc, en langue vernaculaire. L’ensemble participe du mouvement de sécularisation du discours chrétien.
En considérant les neuf recueils signés par C. Hopil, rendus plus accessibles depuis la publication de la Muse théologienne par des reproductions numériques et deux éditions critiques, nous visons, au prix d’un grossissement du trait, à mettre en évidence la teneur polémique de certains poèmes, dans une perspective d’histoire des idées. Les textes en prose et en vers signés par C. Hopil semblent avoir eu une bonne diffusion imprimée mais une audience confidentielle. Que la difficulté de ces textes réserve leur lecture à une élite cultivée et spirituelle ne rend pas tout à fait raison de l’indifférence qui entoure leur réception. À défaut de pouvoir inscrire pleinement l’écriture des poèmes dans la biographie de leur rédacteur ou bien dans l’histoire littéraire, nous cherchons plutôt à évaluer leur charge subversive en leur temps.
À cette fin, nous verrons d’abord comment un langage poétique s’élabore à travers la relecture critique de la théologie scolastique, aristotélico-thomiste. Nous examinerons ensuite ces poèmes en censeur, en dégageant les motifs de suspicion mais aussi les ruses avec la censure. Nous pourrons enfin replacer le conflit entre théologie scolastique et théologie mystique dans le contexte des procès anti-mystiques de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle.

Signifier l’impropriété des signes

L’activité éditoriale de C. Hopil est discontinue : d’après les recueils dont nous avons connaissance depuis une dizaine d’années, il signe une première série de poèmes moraux et spirituels entre 1603 et 1605, puis une seconde série de textes, davantage marqués par l’écriture mystique, entre 1618 (environ) et 1633. Entre la première et la seconde série de publications, la transformation n’affecte pas principalement la doctrine spirituelle : l’essentiel d’une spiritualité dionysienne, dans la mouvance de l’« école abstraite », est en effet en place dès 1604. D’un pôle à l’autre de l’œuvre, la rupture est en réalité d’ordre linguistique et concerne l’emploi du signe verbal.
La théorie linguistique qui sous-tend l’écriture demeure infra-théorique ou énoncée de manière fragmentaire et dispersée ; nous pouvons toutefois la déduire des poèmes. Les trois premiers recueils (1603-1604) sont nettement marqués par le modèle de Ronsard. Le poète est à la fois artisan et artiste : sa parole résulte d’une capacité à manier les signes verbaux en virtuose. Parmi maints exemples significatifs, citons cette invocation à la Muse, qui se mue progressivement en un cantique de louange, qui médite les puissances de Dieu :
Muse fille de Dieu, qui celebres la gloire De ce grand Appollon , sur l’Olimpe sacré, De tes conceptions vien combler ma memoire, Car sur tous les sujects, son los me vient à gré.
Si tu m’as allaicté dés ma fresle naissance, Si de ton favory te reste un souvenir, Vien, des œuvres de Dieu, m’ouvrir la cognoissance, De ses perfections & vien m’entretenir.
Vien Muse, je te veux servir de Secretaire, Ce que tu dicteras, soudain je traceray, Tu seras ententive à quelque beau mystere, Et ne le concevant, je le mediteray.
Ma Plume de ta main, (ô Muse) estant guidée, Ne pourra pas errer : Esleve donc ta voix, Et me chante celuy qui d’une simple Idée, Tout-puissant, a creé tout cela que tu vois.
Marie tes accents aux accords de ma Lyre, Pour loüer ce grand Dieu, qui ce tout a faict voir, Il a fondé la terre, & le ciel, qui l’admire, Mariant sa puissance avecques son vouloir. (…( (OC, 1604, stance (sic), fo 85vo-86vo)
À travers la figure de la Muse, le poème magnifie la puissance verbale et la met au service de la seule valeur qui puisse faire valoir la poésie, Dieu. Ainsi, le poète quête la gloire poétique et la met en scène dans le recueil de 1604 : un portrait gravé, dû à Thomas de Leu, le représente en poète lauré. Dans la seconde série de publications, la puissance verbale ne se distingue plus de Dieu ; elle est Dieu même.
Le recueil des Œuvres chrestiennes de 1604 peut être tenu pour une impasse poétique. Le projet paraît du moins se solder par un échec, à cause d’un conflit entre la conception linguistique implicitement adoptée et le projet d’énonciation théologique. Dès 1604, les poèmes portent la marque du discours dionysien. À partir du modèle spirituel qu’offrent les écrits du pseudo-Denys, l’écriture se fait poétique de l’extase. Elle se combine avec une linguistique marquée par le néo-stoïcisme : l’ordre du langage correspond à l’ordre du monde ; l’architecture des vers, la géométrie de la strophe, ont pour tâche de signifier l’ordre du cosmos. Les hiérarchies dionysiennes sont ainsi redécouvertes dans la géométrie du vers. Aussi, en raison de cette rencontre avec le néo-stoïcisme, la spiritualité du pseudo-Denys se formule-t-elle non pas dans un usage dionysien du lexique (apophatique et cataphatique) mais en des énoncés didactiques :
(…( Le los de Dieu, où nostre ame est dressée, Passe le vol de l’humaine pensée Jamais l’esprit n’y pourroit arriver : C’est un suject si profond, et si ample Que l’on s’y perd : qui s’y veut eslever, En l’admirant, il faut qu’il le contemple.
Vagues pensers, indignes de paroistre Devant celuy qui vous a donné l’estre, Pour mediter ses ouvrages imparfaicts : Advoüez tous, qu’il vous est impossible De concevoir ses merveilleux effects : L’œuvre et l’Autheur est incomprehensible.
Pensers ravis à cest object supresme, Qui hors de vous, ne vivez qu’en luy-mesme : Ne contemplez en ceste infinité, L’alme grandeur, qui comble ma mémoire, Ains admirez ceste immense bonté, Qui vous permet de penser en sa gloire. (stances, OC, 1604, fo 66ro)
Le poème est construit par l’alternance de maximes au présent gnomique et d’adresses à soi-même. Comme dans le thomisme, il est possible de prédiquer certaines qualités du mot Dieu : « alme grandeur », « immense bonté ». Les mots sont employés de façon non équivoque : c’est le préfixe privatif, récurrent, qui « rappelle la thématique de la transcendance ». Le poème énonce pourtant un rejet du savoir au profit de la contemplation. Un second extrait de 1604 prend pour thème l’oraison mentale. Au contraire de l’oraison verbale, l’oraison mentale se résout non pas en mots mais dans l’admiration :
Alors que mon esprit, qui ne peut concevoir Un seul de ses effects, medite en son pouvoir, Le silence est depeint sur mes deux levres closes, Les forces de l’esprit, recueillies en soy, J’admire, et ne puis voir ses loüanges escloses, Mais au lieu de la voix, je fais agir la foy. (stances, OC, 1604, fo 92ro)
L’admiration débouche sur le silence de la foi ; c’est la fin du poème. C’est aussi une impasse énonciative : comment dire poétiquement le silence ?, ainsi qu’une contradiction langagière : comment concilier l’équivalence de la raison du monde et de la raison du langage, avec l’échappée verbale par-delà les facultés de l’âme ? En ce sens, le recueil de 1604 est sans doute autant un échec qu’un accomplissement de la poétique de la voyance. Cette aporie s’accompagne d’un silence littéraire tout rimbaldien, pendant les quinze à vingt ans qui suivent, qui scelle autant l’accomplissement que la défaite poétiques.
Dans la seconde série de textes (1618 environ-1633) l’énoncé poétique mime l’abstraction du verbe mental, la contemplation sans image. Un intéressant développement de Michel de Marillac, en tête de sa traduction du psautier, offre à la même époque une approche rhétorique de l’oraison mentale. Il souligne précisément le caractère anti-rhétorique, à la fois du psaume hébreu et de l’oraison mentale dont le psaume est, selon lui, l’équivalent :
Quant à la derniere des raisons de l’obscurité, c’est celle qui en apporte le plus : d’autant, comme j’ay dit, que les Psaumes sont prieres & meditations d’un esprit contemplatif & eslevé, qui exprime ordinairement ses conceptions en telle manière qu’elles luy sont claires & intelligibles, mais ne le sont qu’à luy ; & ont beaucoup d’interruptions qui ne sont pas discernées par l’esprit occupé, lequel dans une parole voit les clauses toutes entieres, & ne se peut pas mesme s’asservir à exprimer par le menu toute l’estenduë de sa conception, d’autant que son occupation ne peut porter ce divertissement, & comme dit Genebrard, L’esprit est ravy & enlevé par l’abondance & fecondité de ses pensées. Cela fait que par necessité ce qu’il nous represente est plein de discontinuité, qui fait paroistre les choses n’avoir point de sens ny de rapport, lesquelles toutesfois en ont un tres-parfait en l’esprit de leur Autheur.
Les « obscurités » du psaume dépendent d’« interruptions », de « discontinuités » : asyndètes, ellipses, voire antanaclases. La rhétorique et la poétique du verbe mental reposent sur l’association de l’abondance et de la brièveté, en somme, sur l’emphase. C. Hopil ne donne pas de description stylistique de l’oraison mentale ; en revanche, il la nomme, dans son traité La Couronne de la Vierge. Le silence de la Vierge manifeste l’oraison mentale, que C. Hopil qualifie ainsi :
Je pretends specialement parler du silence de la voix, par lequel elle evitoit les vices et defauts du frequent parler, et au lieu de parler aux hommes, et le langage des hommes, elle parloit aux Anges et à Dieu (le( langage du Ciel et des Anges.
Le traité ne caractérise pas ce « langage du ciel et des anges ». La doctrine de C. Hopil contient en fait plusieurs virtualités. Pour C. Hopil, en disciple du pseudo-Denys, le sens le plus spirituel est l’odorat : en conséquence, le langage que parle Dieu est fait de parfums. C’est toutefois par l’ouïe que les recueils de poèmes tentent d’accomplir l’utopie d’un langage des anges et de Dieu. L’énoncé tend à rejoindre l’abstraction de la musique :
Les Anges pourroient mieux vous dire ses loüanges, Il est vray, mais tousjours ils parleroient en Anges Comme ils font au sainct lieu. Pour chanter sa loüange on l’adore et l’admire, Mais il faudroit avoir, pour dignement la dire Une langue de Dieu. (DVols, ct. 6, st. 4, p. 11)
Dans les Divins eslancemens et les Doux vols, le modèle de l’énoncé est le chant des anges : le poème idéal serait une mélodie pure. Dans le style simple du Parnasse des odes, les noms d’oiseaux sont omniprésents, de l’alouette à l’oiseau de paradis, et c’est le chant de l’oiseau qui accomplit l’abstraction mélodique. Cet idéal de transparence énonciative met en évidence par contraste, l’opacité du discours théologique, lorsqu’il fait l’objet de citations. La poéticité – ainsi redéfinie par le modèle de l’abstraction musicale – procède d’un rapport polémique à la théologie scolastique. C’est au travers de la récusation systématique des concepts que la parole poétique s’épure de la signification rationnelle et se délie de la propriété des termes.
Ainsi que nous allons le montrer, ce langage musical ne s’arrache à la langue qu’en procédant à un violent concassage des énoncés scolastiques, issus des traités métaphysiques et dialectiques d’Aristote. La contemplation n’est pas seulement sans image, elle est aussi sans concept.

La poésie spirituelle contre le concept théologique

Dans le second Hopil, c’est le jeu libre des signes qui caractérise ses poèmes. Les signes tendent à devenir de purs signifiants, impropres à désigner leur référent et susceptibles d’une brutale désémantisation. C’est ce revers de la langue et de la littérature qui énonce l’état d’anéantissement.
Les poèmes parus en 1628 et 1629 indiquent une modification du rapport à toute doctrine théologique. Les poèmes des Divins eslancemens et des Doux vols présupposent en effet une critique radicale de la raison dans le domaine spirituel :
L’Ange n’est pas créé pour comprendre en effet L’être immense de Dieu le parfait du parfait, Comme aussi n’est pas l’âme ; Étant ravis en Dieu, ne le comprenant pas Ils voient tant de Dieu qu’un chacun d’eux se pâme Dans l’amoureux trespas. (DEl, ct. 63, st. 7)
Je ne veux plus parler de cette Trinité De peur de blasphémer, mais sa belle unité Admirer en silence ; Les Anges ne font rien que l’adorer toujours, Heureux l’admirateur qui tombe en défaillance En ces saintes amours ! (DEl, ct. 1, st. 6)
L’incompétence de la raison humaine au sujet de Dieu fait encourir le risque de blasphème : la théologie scolastique frôlerait-elle donc le blasphème ? En revanche, les Divins eslancemens reprennent le projet de 1604 : « J’écris en admirant afin de n’en médire » mais la poétique de l’admiration défait alors le projet didactique. Cette critique de la raison s’accompagne bien entendu de la critique du produit de la raison, le savoir. C’est bien une poésie de la nescience rhéno-flamande ou de la docte ignorance, dans la tradition de Nicolas de Cues :
Toujours cette science on commence d’apprendre Sans jamais au mystère un grand Maître se rendre, Il est trop glorieux. (…( (DEl, ct. 3, st. 9, p. 75)
L’énonciateur refuse d’être un savant, de faire état d’une mémoire livresque :
J’ayme mieux aymer Dieu dans la simple ignorance Que d’estre homme d’esprit, La science des Saincts (qu’on nomme Sapience) Est d’aymer Jesus Christ. (DVols, ct. 5, st. 8, p. 10)
Une ame apprend de Dieu en maint glorieux mystere Non dans les livres morts, mais dans la croix austere Vivant livre d’amour. (DVols, ct. 18, p. 35)
L’énonciateur n’est pas un érudit de bibliothèque, penché sur des « livres morts ». Les poèmes le confirment, puisqu’ils ne donnent pas à lire une mémoire littéraire. Dans les poèmes de 1626-1633, les traces de citations ou de modèles poétiques antérieurs sont effacées. Le je revendique la seule « science des Saincts » ou « sapience », qu’il apprend à l’« eschole du ciel ». L’expérience spirituelle dont font état les poèmes de C. Hopil, présuppose l’échec de toutes les facultés inférieures comme supérieures de l’âme. On note la défaillance des sens intérieurs ou de l’imagination devant l’essence de Dieu ; elle double la défaillance de la raison.
À partir de ce point, les poèmes énoncent une violente critique anti-scolastique. Plutôt dominée par l’intérêt pour la suggestion de l’ineffable et de l’indicible, la critique n’a peut-être pas assez dégagé cette dimension polémique des poèmes. Pourtant, les deux questions ne se confondent pas. Ce n’est pas la seule faillite de la raison qui se joue dans le chant poétique ; c’est bien aussi l’insignifiance du langage de la théologie scolastique. L’union à Dieu ne saurait donc avoir lieu à travers la volonté et la raison, comme le théorise la tradition aristotélico-thomiste. Les cantiques sont des poèmes anti-doctrinaux qui systématisent l’usage de la récusation. La critique découle de l’usage en mention d’un lexique contesté, par opposition avec l’usage en référence. En d’autres termes, le mécanisme de signification et de référence des termes scolastiques est désamorcé par l’usage de la citation, par le discours rapporté :
Nous ne pouvons avoir une assez haute estime De son Être excellent, glorieux et sublime Sur tout temps et tout lieu ; Certes ! nous disons moins de la cause des causes Disant que le Seigneur est en soi toutes choses Qu’en disant qu’il est Dieu. (DEl, ct 82, st. 2)
Dans la recherche de transparence langagière, dans le refus de la réflexivité, c’est une étape où l’énoncé se désigne comme énoncé, où le poème fait retour sur lui-même : c’est un moment d’opacité. Par l’usage des mots en mention, les mécanismes de référence et de signification des mots sont suspendus. Le discours scolastique est voué à l’échec. L’énoncé musical récuse le dire théologique et la puissance de compréhension de la méthode dialectique. Par exemple, Anne Mantero a déjà attiré l’attention sur la récusation de la pertinence ou propriété des noms trinitaires dans les Divins eslancemens :
Mais ayant plusieurs noms il n’en a point encore Exprimant proprement cet Être que j’adore ; Le Père, Esprit et Fils Sont des noms qui n’étant dignes de sa substance Déclarent aux mortels ces trois qui dans l’essence Règnent en Paradis. (DEl, ct. 79, st. 2)
La strophe des Divins eslancemens fait de la formule trinitaire un pis-aller, de l’ordre de la coutume, adapté aux facultés humaines ; la poésie a pour charge de rappeler l’impropriété des termes théologiques et de viser une signification par-delà la pertinence du langage. Les Doux vols contestent de même la formulation la plus conventionnelle de la Trinité, avec un surcroît d’audace, nous semble-t-il :
Il ne faut mesurer aux paroles vocales Ce mystere infiny qu’on ne peut estimer, Car nous n’avons au monde aucuns termes capables L’infiny d’exprimer, Pere, Fils, S. Esprit (n’estant pas un blaspheme) Ce n’est dire Dieu mesme. (DVols, ct. 48, p. 95)
La strophe des Doux vols multiplie les assertions négatives (« il ne faut », « on ne peut », « nous n’avons », « aucuns termes », « n’estant », « ce n’est dire ») suivant une énonciation apophatique ; elle livre une dénonciation en bonne forme : à la formulation trinitaire, la poésie ne concède pas même le bénéfice de l’équivoque ; elle critique son échec. Une incise introduit toutefois une précaution : « n’estant pas un blasphème ». Le lecteur ne sait cependant sur quelle proposition porte la défense : est-ce sur la pointe de la strophe, c’est-à-dire l’attaque anti-scolastique, ou bien sur l’usage de la formule trinitaire elle-même ? La syntaxe promeut ainsi une autre équivoque, non plus l’équivoque de la théologie scolastique, frappée négativement, mais l’équivoque de la poésie, toute positive. La syntaxe autorise une double lecture, l’une consensuelle, l’autre scandaleuse.
L’équivoque mystique peut être comprise comme une écriture du défi. Le poète use des possibilités rythmiques du vers et de la strophe pour aller jusqu’à suspendre provisoirement le sens sur un énoncé athée :
Il est celui qui est, la même infinité, C’est-à-dire il est Dieu, de toute éternité Régnant dans son essence : Et c’est beaucoup pour nous, de penser qu’il n’est pas Tout ce qui peut tomber sous notre intelligence Qui le voit au brouillas. (DEl, ct. 63, st. 5)
La discordance entre le vers et la syntaxique permet deux lectures : la première suspend le vers sur l’emploi absolu du verbe « être » (« penser qu’il n’est pas »), la seconde prolonge la phrase par un enjambement et permet un emploi prédicatif du verbe « être » : « il n’est pas / Tout ce qui peut tomber sous notre intelligence. » Dans la strophe suivante, le vers 5 s’interrompt sur une proposition provocatrice, qui démolit la raison scolastique au profit d’un discours affectif :
Dans ce divin baiser qui me brûle en ces feux Je ressens plus d’amour que non pas de lumière, Mon esprit est rendu moins savant qu’amoureux, Voyant en son Midi cette Essence première : Il vaut mieux ignorer cette cause des causes Et goûter toutes choses. (DEl, ct. 73, st. 2)
La caution dionysienne permet de contester la propriété des termes. Ainsi, aucun mot ne s’applique à Dieu ; tous les mots deviennent donc équivalents :
Être qui mouvant tout, immobile demeure, Sans temps, sans mouvement, sans siècles et sans heure, À soi-même pareil, Il est tout et n’est rien comme on estime encore, Le beau monde du monde et Soleil sans aurore Et Soleil du Soleil. (DEl, ct. 90, st. 2)
Le poème peut ainsi énoncer de manière équivoque : « Dieu n’est rien » (v. 4). Les poèmes reposent sur un double usage du langage : en même temps, il signifie et ne signifie pas. Les poèmes contiennent donc deux théologies : les formules d’une théologie athée ne sont ni plus ni moins impropres que celles de la théologie spéculative.
Ce que met en œuvre la poésie de Claude Hopil, c’est un acte de création à travers une entreprise de destruction. De l’énonciation mystique telle qu’Eckart en fixe le modèle, celle de Claude Hopil conserve le principe de « transfert culturel » : la langue des clercs, celle du magistère, passe dans une pratique vernaculaire et l’écriture d’un laïc. Elle donne cependant moins naissance à une activité de forge verbale, qu’à la manifestation de l’épuisement de la signification. Dans ses poèmes, la puissance de nomination s’abolit dans l’acte d’énonciation. Le poème repose sur des scories verbales, des désignations usagées, inefficaces. Le cantique 34 des Doux vols offre ainsi l’exemple d’un poème suspect. Après un prologue amplifiant le motif du Dieu caché (st. 1-3), la définition capitale de Dieu comme « essence tressimple (…( sur essentielle » (st. 4) est donnée comme une révélation ; elle suscite dès lors une logorrhée apophatique :
XXXIV Cantique de Loüanges
1. J’adore ceste essence, et cet Estre de l’estre, Il est trop glorieux pour le pouvoir cognoistre, Trop caché pour le voir, C’est un acte tres-pur, abstraict de la nature, C’est un tres-doux secret, les ombres d’entrevoir De l’essence tres pure.
2. L’esprit illuminé peut chanter ses loüanges, Il voit beaucoup de Dieu, mais bien moins que les Anges, Qui le voyent tousjours : Que son visage est beau ! puisque l’ame ravie A son ombre dormant, se pasme en ses amours Dans le sein de la vie !
3. Ange qui le voyez, revelez moy son estre, Non faictes, je mourois s’il venoit m’apparoistre, Il veut estre admiré, Si mon estre creé je ne sçaurois entendre Comment le Createur (dans le Ciel adoré) Pourrois-je donc comprendre ?
4. Ceste essence tressimple est sur-essentielle, Sur tous sens, tout esprit, sur-intellectuelle, La mesme esternité ; L’esprit estant borné ne comprend la nature, Au Ternaire parfaict, contenant l’Unité, Sans aucune closture.
5. Disant, « Le Seigneur est », je ne peux rien entendre, Le nommant « Eternel », je ne puis rien comprendre, Sur tous temps et tout lieu ; L’appellant « Infiny », sans fin mon cœur l’adore, Je ne le puis comprendre, en le disant mon Dieu, Son estre me devore.
6. Le nommant « Glorieux », je ne voy sa lumiere, L’appellant « Mon principe et ma cause premiere » J’aspire à l’Unité Mais je ne conçois pas ceste essence eternelle, L’entendement finy ne voit l’infinité Si Dieu ne la revelle.
7. Quand on me dit qu’il est amour et sapience, Gloire, vie et bonté, de ceste simple essence J’admire les grandeurs : De ses suavitez mon ame est embaulmée Suivant les doux attraicts de ses sainctes odeurs De joye elle est pasmée.
8. Ne pouvant entrevoir ce grand Estre de l’estre Des yeux de son esprit, elle veut le cognoistre Pour ses fidelles yeux ; Elle a des sentimens de sa beauté parfaicte Et de son pur amour, si doux et glorieux Qu’elle en demeure abstraicte. (…( (DVols, p. 66-68)
Dans l’acte locutoire (dire, nommer, appeler), les mots perdent à la fois leur pouvoir de désignation et leur pouvoir de signification (st. 5, 6, 7). Par la mise en évidence du cliché théologique, le poème glisse vers la répétition lexicale et le ressassement. Les énoncés de la théologie scolastique sont extraits de toute architecture logique ; ils sont mis en pièces et subsistent en association avec une isotopie issue de la contemplation et de l’affectivité. La poésie imprime une torsion au sens métaphysique et sert une désémantisation du lexique d’Aristote :
Mon cœur est amoureux de la cause des causes. (DVols, ct. 29, p. 59)
J’adore cette essence, et cet Estre de l’estre. (DVols, ct. 34, p. 66)
Le lexique aristotélicien et le lexique de la contemplation se heurtent, se contredisent mais aussi se portent et se réhabilitent mutuellement :
(…( J’entend(s( bien qu’on ne peut ce mystere cognoistre S’il ne vient à l’esprit dans le Verbe apparoistre En l’un et l’autre lieu : Je voy qu’ils sont trois Noms, mais dans l’Estre une chose, Et ne sachant que c’est, je croy que c’est mon Dieu, Mon principe et ma cause. De cet Estre caché, je ne puis rien entendre Sinon qu’il est tres-Un, ne pouvant le comprendre Je l’adore en esprit, En disant « Trinité », l’entendement adore, En disant « Unité », j’admire en Jesus Christ L’Estre qui me dévore. (DVols, ct. 41, p. 80-81)
(…( Mais disant : « L’Unité subsiste en ce ternaire ! » L’esprit se pasme et meurt sans que ce grand mystere S’aille à luy revelant. (DVols, ct. 46, p. 90-91)
Les verbes relatifs à un acte d’intellection sont hors jeu, soit par leur négation soit par leur mise en contradiction (si l’on paraphrase : « je comprends que je ne comprends pas », au vers 1). Ce sont alors les verbes de contemplation qui prennent le relais (« je voy », v. 4) et surtout le verbe d’énonciation : « dire ». C’est avec ces verbes que sont utilisés les clichés théologiques. L’acte de parole est celui de l’oraison brève, prisée des tenants du pur amour. Ainsi, les mots « Trinité » et « Unité » ne sont pas utilisés comme des concepts et ne sont pas mis en œuvre dans un traité. Détachés de la proposition logique et de la période rhétorique, ils deviennent une exclamation. Le concept est transformé en expression pathétique. L’oraison brève est le « moyen court » par lequel le fidèle entre en extase.
C’est lorsque le poème prend pour modèle la vision prophétique que l’énoncé scolastique retrouve son pouvoir de signification et de référence. Les Divins eslancemens comprennent ainsi un renversement de l’assertion déjà mentionnée, mettant en doute la pertinence de la formule trinitaire :
Au point que je quittais ce mont voisin des cieux J’ouïs une autre voix qui d’un air gracieux Chantais ce doux Cantique : « Bienheureux est celui qui croit en Jésus-Christ Un Dieu sous ces trois noms, Père, Fils, S. Esprit, Notre Roi magnifique ». (DEl, ct. 72, st. 11)
Les poèmes peuvent également comporter des emprunts à la théologie scolastique, sous la forme de collages ; le discours théologique est alors délégué au chant d’un ange, dans une vision de type prophétique :
Apres que le grand vent et le tonnerre encore Eurent cessé leur bruit, Un ange deputé de celuy que j’adore Dans la mystique nuict Chantois divinement : « Ces Trois sont une essence Amour et sapience. Toujours avec le Verbe, et cest Esprit supresme Le Pere est glorieux, Une Puissance et Gloire, une Majesté mesme ; Ce ne sont pas trois Dieux, Trois personnes un Dieu, trois Noms une Substance Est la divine essence. » (…( C’est le vray Paradis de voir ce grand mystere Au Verbe salutaire. On l’entrevoit icy dans un mystique ombrage En contemplation, Dans nostre esprit humain nous en avons l’image, Et non la vision. L’ame ravie au Ciel verra d’un œil supresme Dieu trinun en Dieu mesme. (DVols, ct. 38, p. 57-76)
Au terme de la mise à l’épreuve du discours scolastique par l’énoncé poétique, la théologie est finalement réintroduite, comme forme possible du langage angélique. On assiste à une recharge sacrale mutuelle, de l’énoncé poétique par la théologie aristotélico-thomiste, de la théologie par la poésie.

Le pur amour, des manières de parler hétérodoxes

Pour clarifier la situation de ces écrits dans un contexte de surveillance des « manières de parler », il nous serait utile d’identifier au préalable si Claude Hopil est proche d’un groupe dont les manières de parler sont authentifiées ou bien soupçonnées. L’enquête intertextuelle paraît être un moyen d’approcher le milieu spirituel dont relèvent ses écrits, puisque l’enquête en archives n’a pas permis d’éclairer la vie de Claude Hopil. Quelles sont ses lectures en théologie tant spéculative que mystique ? Permettent-elles de discerner une appartenance institutionnelle, telle que l’écriture de C. Hopil aurait été promue et protégée ? Deux hypothèses, en particulier, ont été faites et méritent un examen : il convient notamment de voir si l’on peut argumenter en faveur d’une proximité avec les textes de Bérulle ou bien avec ceux de François de Sales.
À l’issue de l’enquête, un premier constat s’impose. Comme il est d’usage dans la mystique, l’énoncé de C. Hopil conserve la mémoire de textes et d’autorités antérieures : il emprunte le lexique du pseudo-Denys, celui de la spiritualité essentielle, celui du Carmel thérésien, des énoncés augustiniens, de Bérulle. Toutefois, C. Hopil propose une synthèse qui paraît personnelle : elle n’est pas le décalque d’un seul et unique énoncé existant. Dans leur singularité, ses poèmes sont exemplaires de la « rencontre du Carmel thérésien avec les mystiques du nord », suivant l’expression de Jean Orcibal. Nous identifions une pratique d’écriture courante chez les mystiques : une circulation d’énoncés, de tours, d’un lexique, mais la reprise se fait sans fidélité, avec des distorsions de sens. Le lecteur un peu averti identifie des tatouages spirituels, mais ils sont bien insuffisants pour discerner une adhésion à une seule école spirituelle ou une intertextualité dominante. Les énoncés brouillent rapidement toutes les pistes intertextuelles. Le premier résultat, c’est donc que l’énoncé de Claude Hopil est une création originale. De propos délibéré, l’énonciation poétique s’émancipe de l’esprit de système ; elle conteste pratique ascétique et doctrine théologique en les affaiblissant.
La terminologie spirituelle, qui concerne les opérations de l’âme, invalide le rapprochement avec l’école salésienne : l’écriture équivoque situe l’énoncé dans la tradition dionysienne et rhéno-flamande de la mystique de la suressence. Il est juste néanmoins que tant les écrits de François de Sales que ceux de l’école abstraite utilisent une spiritualité affective issue du Cantique des cantiques et de Bernard de Clairvaux. Par différence avec le courant salésien, dans les Divins eslancemens et les Doux vols, la révélation se fait au « sommet de l’esprit », également nommé « sommet de l’âme » ou « poincte » :
Quel est cet œil divin ? est-ce point la prunelle De la celeste foy ? Ou le sommet de l’ame où mon Dieu se revelle Pour me tirer à soy ? (DVols, ct. 22, st. 43)
Au sommet de l’esprit, l’âme est frappée par un rayon divin. Ni le terme de sommet ni celui de pointe ne semble attesté dans le traité en prose des Douces extases. En revanche, il recourt à la notion de fonds ou fond : « fond des âmes » (p. 140), « fonds de l’âme » (p. 198), « fonds de l’esprit » (p. 199). De même dans les Meditations : fonds intime de l’essence (p. 30), fonds intime de l’âme (p. 86). On relève également dans les Doux vols la mention du « fond de la pensée » ; le Parnasse mentionne le « fonds de l’ame ». Enfin, Dieu est également dit « centre de l’âme » : « mon âme est dans son centre ». La Couronne de la Vierge rappelle différents synonymes : « le centre de son ame, appellée de quelques-uns le sommet de l’ame, et par les autres, portion virginale ». Les Meditations, les Douces extases et le Parnasse offrent aussi un terme moins technique, aux connotations augustiniennes : « l’intime de l’ame » : c’est également le lieu où le je est touché par la voix de Dieu ; mais aussi « l’intime du cœur », « l’intime de l’esprit », « l’intime de l’essence ». Cette instabilité terminologique manifeste que l’équivoque frappe même le lexique de la théologie mystique.
Ce sont toutefois les poèmes du second Hopil qui paraissent les plus litigieux. Le terme de « suressence » est attesté une fois sous la plume de C. Hopil, en 1629, dans les Doux vols, à travers l’adjectif dérivé « sur-essentiel ». Ce terme clé de la mystique nordique induit une anthropologie qui fait de l’union à Dieu un au-delà des facultés de l’âme ; il est associé à l’extase permanente de l’âme. On relève également une périphrase qui amplifie la notion de « suressence » dans les Divins élancements : « C’est un Être sur l’être, essence sur l’essence ». En règle générale, ce tour suspect semble écarté. Il est remplacé par des synonymes équivoques. Nous ne relevons le substitut retenu par Benoît de Canfield (après Denys le Chartreux), « suréminent », que dans la seule Couronne de la Vierge, en association avec un mot préfixé par sur- : la Vierge est ravie d’une manière « sur-eminente (…( remplie et sur-remplie de sa grâce ». En revanche, « suprême » est présent en masse et semble être un synonyme à double entente, comme dans les écrits de Bérulle : « Il y a sur l’essence une suprême essence », lit-on. Comme chez Bérulle, Dieu est nommé « Être suprême ». « Excellent » ainsi que le superlatif absolu semblent aussi être des équivalents possibles, sous forme d’euphémismes anodins : l’essence est dite « tres excellente », par exemple. Dieu essence peut également être dit « pure essence » ou « essence nue ». En outre, si le substantif « sur-essence » est prudemment mis de côté, le poète multiplie cependant les mots et les périphrases construits à l’aide du préfixe sur-. Ainsi, Dieu est désigné par périphrases comme un « Estre sur-estant » ou un « étant sur tout étant » ; « un Estre sur tout estre » ; un « Estre sur l’estre ». Plusieurs adjectifs sont renforcés par le préfixe sur- : « eaux sur-celestes »; « estre sur-celeste » « (essence, vie( sur-intellectuelle ». Formé selon le même principe de composition, l’adjectif « sur-divin » est également attesté. Il est toutefois employé en négation ; la négation introduit une réserve ou une précaution, qui sert à corriger l’interprétation du tour « Être sur l’être » au sens de « sur-essence » :
Dans un Être sur l’être (où s’anéantit l’homme), Qui n’est pas sur-divin, mais sur tout ce qu’on nomme En ce langage humain, Je ne puis entrevoir au Ternaire l’essence, Dans ce trois personnel la tres pure substance De mon roi souverain. (Divins eslancemens, ct. 15, st. 1)
Enfin, l’âme est ravie en « un lieu sur tout lieu ». En 1628-1629, C. Hopil emploie des manières de parler issues de la mystique nordique, condamnées et interdites de manière répétée depuis le concile de Trente dans l’ordre des capucins et du Carmel.
Nous pouvons résumer les enjeux aux plans spéculatif, moral et dévot. Si Dieu est sur-essence, l’expérience spirituelle induit un au-delà de l’expérience humaine – nommé excès, extase, défaillance, ravissement. Au plan intellectuel, comme nous l’avons vu, la conception de Dieu comme « suressence » entraîne ainsi une critique violente de la théologie scolastique, c’est-à-dire du discours aristotélico-thomiste : la théologie spéculative ne dit rien de Dieu et elle fait obstacle à l’union. Au plan moral, si Dieu est sur-essence, l’expérience outrepasse également les formes d’exercice de soi, telles que l’ascèse et l’exercice de la vertu. Dans les poèmes de 1603-1604, la contemplation a des vertus purgatives ; les recueils comportent quelques poèmes relatifs à la justification, sur le modèle des psaumes de pénitence. En revanche, à partir de 1626, le lexique juridique, propre aux poèmes de pénitence, est écarté. L’expérience est celle d’un état de grâce, d’une union immédiate, par un moyen court, de l’âme à Dieu. L’âme est « ravie en un lieu sur tout lieu ». L’âme est dite « faite ange » ou même déifiée, faite « un petit Dieu » ou « est Dieu » :
Vous vous estes faict homme afin de faire Dieu Celuy qui par peché s’estoit fait beste au lieu D’imiter les bons Anges : Par amour vous pouvez mon ame Angeliser C’est trop peu, vous voulez l’homme diviniser Pour chanter vos loüanges. Cet Homme estant faict Dieu par grace et par amour Qu’il aymera bien Dieu ! qu’il loüra bien un jour Le grand Dieu de la vie. (…( (DVols, ct. 42, p. 84)
Sainte Catherine de Sienne est ainsi dite « un petit Dieu ». L’audace est souvent tempérée par la mention « faite Dieu non par nature mais par grâce », empruntée à Maxime le Confesseur, mais pas toujours. Certaines strophes lèvent l’équivoque sur ce qu’est la divinisation ou encore la déification :
Dieu lui-même est amour, le cœur pareillement Est Dieu s’il est amant, D’amour et non d’essence ; N’étant divinisé par son objet divin Il est rendu si beau dedans son excellence Qu’il semble un Séraphin. (DEl, ct. 69, st. 11)
L’« excellence » est alors attribuée à l’âme ; le cœur devient Dieu « d’amour et non d’essence » (v. 2). C’est bien entendu la place de la méditation sur l’humanité du Christ qui est en jeu, la méditation de la crucifixion et la rédemption par le Christ.
Dans le courant de la dévotion civile, la méditation de l’incarnation permet de définir une anthropologie fondée sur la justification et de rappeler l’importance des pratiques ascétiques et des œuvres. Dans la seconde série de publications, C. Hopil accorde une place très restreinte à la dévotion à l’humanité du Christ. Dans les Doux vols, la « Contemplation de Jesus en Croix » (cantique 13) fait entrer en extase :
L’Estre va defaillant, helas morte est la vie, Le Soleil obscurcy. (…(
L’amour donne la mort à l’autheur de la vie Sa mort me la donna, l’amour me la ravit Pour un temps seulement ; La mort de Jesus Christ tout l’homme renouvelle, La vie prend naissance en l’ame qui par elle Vit eternellement. (DVols, ct. 13, p. 26)
Il se sépare de l’école thomiste sur la question de la cause de l’Incarnation ; il est en ce sens proche de la théologie bérullienne de l’Incarnation. Dans l’œuvre de Bérulle, l’Incarnation n’est pas provoquée par la transgression qu’est le péché et la nécessité de l’expiation. Elle n’est pas contingente mais elle a pour cause la gloire de Dieu. L’incarnation est donc à la fois imitation et adoration de Dieu, ce que l’on relève chez Hopil :
O Jesus, vous chantez vous mesme A vostre pere, Verbe incarné, Luy chantant un Hymne supresme Aussitost que vous fustes né. Il faut que tout vous rende homage, Grand Roy tout bon, puissant et sage. (Parnasse, p. 34, st. 5)
De même, pour le spirituel qu’est C. Hopil, c’est non par la pénitence mais par l’adoration, que l’énonciateur se conforme au Christ. L’adoration contemple à la fois l’humanité et la divinité, ainsi que l’indique le mot composé : « l’homme-Dieu ». Toutefois, à la différence de l’œuvre de Bérulle, les poèmes énoncent peu l’adoration des deux états du Christ : les poèmes se concentrent sur la subsistance de la nature humaine dans la nature divine, à travers le motif des plaies de l’Amant. Voici un exemple, tiré du Parnasse des odes :
Helas ! ne verray-je doncques plus Mon Jesus, L’Espoux et le Roy des bien-heureux Esleuz ? Je meurs pour luy d’amour Dans son costé mon vray sejour. (« De la mystique mort d’Amour », p. 12-13)
En ce sens, la place accordée au ressassement sur l’unité et la Trinité dans les Divins eslancemens peut en partie être interprétée comme une forme de précaution contre certaines défiances théologiques, la représentation de Dieu dans l’union risquant de glisser vers une forme de monisme.
Les recueils offrent ponctuellement quelques garanties d’orthodoxie doctrinale : rappel de l’importance des œuvres associée à l’oraison mentale ; mention de l’eucharistie et de la doctrine de la présence réelle. Enfin, l’énonciation dionysienne de C. Hopil s’adosse à une représentation hiérarchisée du corps spirituel, dans laquelle Dieu est au centre et le roi de France son lieutenant : les poèmes de C. Hopil et le rapport à soi qu’ils indiquent participent de l’affirmation d’un pouvoir monarchique absolu.

Les procès anti-mystiques que l’œuvre n’a pas subis

En théorie, les écrits des années 1627 à 1629 publiés sous le nom d’Hopil sont susceptibles de déclencher des polémiques tant sur le fond que sur la forme. Ils prêtent le flanc à une mise en procès à la fois par les institutions littéraires et par les instances religieuses. Dans les faits, les archives ne gardent nulle trace de controverses publiques auxquelles les poèmes de C. Hopil auraient pu donner lieu. Seule la diffusion des Doux vols de l’âme, par ses étrangetés, indique que le recueil a sans doute fait l’objet de suspicions et de réserves préalables à sa mise en vente : ce recueil n’est en effet pas vendu par le libraire habituel de C. Hopil et le livre est diffusé sans l’approbation des théologiens ni le privilège du roi. Reste que le recueil est malgré tout imprimé et mis en vente sans susciter davantage de critiques connues. D’après nos recherches, c’est même de ce recueil qu’est extrait le seul poème de C. Hopil, le « cantique de l’indifférence » (cantique 47), republié dans un recueil collectif de cantiques, en 1657. Il demeure donc intéressant de mettre en parallèle la chronologie des procès anti-mystiques, d’une part, et la chronologie de l’activité éditoriale de C. Hopil, d’autre part, et de signaler l’absence de controverse.
Écartons d’emblée les débats d’ordre littéraire que pourraient soulever l’énoncé. Les choix lexicaux ont peut-être encouru la condamnation des disciples de Malherbe ; le poète use de termes techniques empruntés à la théologie et forge des néologismes, surtout par la composition préfixale ; nous avons également vu combien la syntaxe peut accroître l’équivoque sémantique. Les poèmes de Claude Hopil ne font pas l’objet de publication en anthologies et autres recueils collectifs ; les textes d’escorte, quasi inexistants, manifestent le retrait du poète à l’égard de la sociabilité lettrée de son temps, parisienne ou non. Par conséquent, cette diffusion discrète, à l’écart du milieu littéraire, paraît avoir soustrait le texte à la polémique possible. Quoiqu’il en soit du jugement littéraire, encourir le désaveu du cercle malherbien demeure un risque bien anodin par rapport aux persécutions qui visent certains mystiques à la même période.
L’histoire des procès anti-mystiques au début du XVIIe siècle et ses jalons sont bien connus. En rappelant brièvement les motifs de condamnation ou de blâme formulés à cette date, nous voulons situer les écrits de C. Hopil dans une histoire possible de leur réception. En 1593, à l’intérieur de l’ordre des capucins, le chapitre général de Rome interdit que les capucins flamands utilisent un lexique hérité des rhéno-flamands. Il condamne l’usage des notions d’introversion, de vie suressentielle, c’est-à-dire de termes empruntés à Herp, mais aussi à Ruusbroec, Tauler, Suso. Il interdit également l’oraison mentale. Il recommande la prière vocale et la méditation de la vie du Christ et de la Vierge. Cette condamnation n’endigue pas de telles pratiques au début du XVIIe siècle, notamment au couvent des capucins de Paris, avec Benoît de Canfield, auteur de la Reigle de perfection, qui circule en manuscrit avant 1593, et Laurent de Paris, auteur du Palais d’amour divin, imprimé pour la première fois en 1602. En 1611, le procès est relancé à l’intérieur de l’ordre du Carmel avec les condamnations de Jérôme Gratien. Elles visent la permanence de telles manières de parler en Flandres. Les énoncés de C. Hopil pourraient tomber sous le coup des condamnations théologiques formulées par J. Gratien dans la cinquième lamentation. J. Gratien attaque la définition suivante de la vie parfaite :
Perficion es Union, Essencial, Immediata, Passiva, Momentanea, Caliginosa, y Oculta, con total Aniquilacion, Suspension, Revelaciones y Gustos espirituales del alma, en el Amor fruitivo. Esta manera de declarar la perficion, es obscura, porque estos terminos dificultosamente se entienden. (p. 313)
En parallèle, Benoît de Canfield est inquiété pour la publication de la troisième partie de sa Reigle de perfection, qu’il n’a d’ailleurs ni autorisée ni contrôlée. Il renonce à l’emploi du terme « suressentiel » et lui substitue le terme de « suréminent ». Il fait seulement imprimer les deux premières parties de son traité, qui se tiennent dans la limite d’un exercice des facultés naturelles de l’âme et ne l’outrepassent pas dans les formes de l’introversion ou de l’anéantissement. En 1623, Le Mercure françoys publie les articles de l’édit de Séville qui ont déclenché des persécutions en Espagne. Les articles sont indéfiniment repris au cours du XVIIe siècle et fixent les critères de discernement d’une vraie et d’une fausse mystique, à l’origine des différents procès. À partir de 1624, les attaques se multiplient également contre le lexique dionysien : celles du jésuite Étienne Binet accompagnent une apologie de saint Denis et débouchent sur des propositions de traduction des termes mystiques qui en lèvent l’équivoque.
L’œuvre de C. Hopil dans son ensemble est caractéristique de l’« invasion mystique » du début du XVIIe siècle. Dans les années qui suivent l’édit de Nantes, la publication des Œuvres chrestiennes en 1604 coïncide avec une effervescence éditoriale, qui multiplie les traductions et l’impression de traités dévots et mystiques. C. Hopil cesse toutefois de publier (après 1604) au moment où se constitue un véritable marché, donc un public, pour ce type d’écrits. La chronologie ultérieure des livres de C. Hopil est donc relativement distincte des tendances de l’édition en matière de spiritualité, et des controverses concomitantes. En particulier, il n’est pas possible d’expliquer le silence éditorial de C. Hopil entre 1605 et 1627 comme une forme de précaution contre de possibles attaques : en ce sens, la mise en circulation d’un manuscrit entre 1618 et 1626 relève certainement davantage d’une nécessité propre au poète et à son œuvre, que d’un souci de soustraire un texte aux contrôles et aux censeurs. Les inflexions spirituelles de l’œuvre ne paraissent pas davantage orientées par les nuances du goût ou des condamnations contemporaines. Au contraire, pour les années 1627 à 1629, les Douces extases, les Divins eslancemens et les Doux vols reprennent des manières de parler mystiques à un moment de contestation forte : C. Hopil signe des écrits nettement dionysiens au moment où ce type d’énoncé commence à être condamné. En 1628, que l’approbation des théologiens soit demandée et obtenue en même temps pour deux textes aussi dissemblables que les Divins eslancemens et la Couronne de la Vierge autorise à penser que le traité convenu sur les vertus de la Vierge pouvait faire admettre l’orthodoxie des Divins eslancemens. Rappelons qu’au moment où ces deux derniers textes sont mis en vente (1629), les Doux vols sont publiés en dehors de tout contrôle juridique, sans approbation théologique, sans privilège d’imprimeur et vendus par un autre marchand que le libraire habituel de C. Hopil. En 1633, le Parnasse des odes revient à une expression plus convenue : le choix du style simple se prête mal à la description technique de l’anéantissement et de l’union à Dieu sans image. La représentation de l’expérience spirituelle est moins fine et davantage dévote ; il est toutefois difficile de trancher si c’est par repli prudent, sous l’effet de la suspicion, ou par essai de renouvellement des moyens poétiques.
Que la chronologie des publications de C. Hopil obéisse à une temporalité propre à l’égard des développements contemporains de la mystique n’est qu’un des aspects de l’énigme de cette œuvre.



L’œuvre de Claude Hopil est variée ; dans la mouvance du pur amour, ses ouvrages offrent différents degrés d’audace. Les deux textes les plus litigieux nous paraissent être les Divins eslancemens et les Doux vols, publiés en 1628-1629. Ces énoncés chrétiens ne retiennent à peu près du modèle biblique que le livre du Cantique des cantiques et la force performative de la parole. Du magistère chrétien, ils retiennent un modèle rhétorique tiré de la méditation augustinienne, ainsi que la tradition énonciative du pseudo-Denys. En pratique, l’écriture de l’équivoque lexicale et syntaxique aboutit, sous la plume de C. Hopil, à un affaiblissement de tout système de pensée ; sa parole poétique manifeste l’usure des discours doctrinaux. Le poète a effectivement lu la bibliothèque spirituelle et mystique de son temps : ses options poétiques signifient que cette mémoire elle-même doit être surmontée pour dire l’anéantissement.
Dans le courant abstrait, les énoncés dus à des laïcs paraissent bénéficier d’une autorité comparable à celle des traités écrits par des clercs. À la même époque, ce type d’énoncé mystique divise les ordres religieux qui tendent plutôt à suspecter leur hétérodoxie et à le faire interdire. En revanche, il demeure plus ou moins toléré parmi les laïcs : l’approbation des théologiens, délivrée pour tous les recueils excepté les Doux vols, l’indique. Nous connaissions le succès de la mystique dionysienne parmi les parlementaires parisiens et le milieu de la finance ; l’œuvre de Claude Hopil confirme aussi l’importance de la promotion par le milieu du livre. C’est son libraire, Sébastien Huré, qui paraît être en définitive le principal soutien et garant de ses écrits. Toutefois, les poèmes de Claude Hopil ne sont pas prescriptifs : aussi ont-ils peut-être échappé aux poursuites et à la censure parce qu’ils relèvent d’une parole gratuite, la louange.
Enfin, pourquoi ne pas interpréter le silence qui entoure la vie littéraire de C. Hopil, l’impression de ses livres exceptée, comme une extension de l’éthique propre à l’anéantissement permanent ? L’emphase, qui combine une rhétorique de l’abondance et de la brièveté, caractérise le surgissement du verbe mental. Cette trace de divinisation utilise la figure singulière de l’artiste construite à la Renaissance ; l’anéantissement, au contraire, ôte les traits individuels et historiques de cette figure subjective.
 Recueils de poèmes : Les Œuvres chrestiennes. Avec un Meslange de poésie, Paris, M. Guillemot et F. Julliot, 1603 (références : OC 1603) ; Les Œuvres chrestiennes, Lyon, Th. Ancelin, 1604 (OC 1604) ; Les Douces extases de l’âme spirituelle, ravie en la consideration des perfections de son divin Espoux. Ou exposition mystique et morale du Cantique des Cantiques de Salomon, Paris, S. Huré, 1627 (traité en prose suivi de quinze cantiques ; références : DEx, citations tirées de l’édition critique due à G. Peyroche d’Arnaud, Genève, Droz, 2000) ; Les Divins eslancemens d’amour exprimez en cent Cantiques faits en l’honneur de la Tres-saincte Trinité. Avec les celestes flammes de l’Espouse Saincte. Et Cantiques de la vie admirable de Saincte Catherine de Sienne de l’Ordre de S. Dominique, Paris, S. Huré, 1628 et 1629 (références : DEl, citations tirées de l’édition critique de J. Plantié, Paris, Champion, 1999, sauf pour les Cantiques de la vie admirable de Saincte Catherine, non reproduits dans l’édition J. Plantié et cités d’après l’édition originale de 1629 chez S. Huré) ; Les Doux vols de l’ame amoureuse de Jesus, Paris, J. Jost, 1629 (DVols) ; Le Parnasse des odes, ou chansons spirituelles, Paris, S. Huré, 1633 (Parnasse).
Traités en prose : Méditations sur le Cantique des cantiques, manuscrit diffusé entre 1618 et 1625, cité d’après l’édition procurée par G. Peyroche d’Arnaud, Genève, Droz, 2000 ; Les Douces extases, op. cit. ; La Couronne de la Vierge, Paris, S. Huré, 1629.
 L’étude d’ensemble la plus récente sur l’œuvre de Claude Hopil est celle de Catherine Déglise, Au vol de la plume. Poétique de Claude Hopil, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2008 (voir la bibliographie critique p. 487-488). Les poèmes de C. Hopil ont été redécouverts par Jean Rousset : « Un poète théologien et mystique du xviie siècle », dans : Nova et vetera, 1957, t. 32, p. 265-278. Signalons les études les plus récentes : Christian Belin, La Conversation intérieure. La méditation en France au XVIIe siècle, Paris, Champion, 2002, chap. IX « Le prisme trinitaire dans les Divins élancements de Claude Hopil », p. 173-185 ; Christophe Bourgeois, Théologies poétiques de l’âge baroque. La Muse chrétienne (1570-1630), Paris, Champion, 2006, « Hopil, ou les excès du silence », p. 521-553; Michèle Clément, « Claude Hopil, "Au mystique tombeau du rien" », Trévoux, La Compagnie de Trévoux, 1996 ; Anne Mantero, La Muse théologienne. Poésie et théologie en France de 1629 à 1680, Berlin, Duncker & Humblot, 1995, passim ; A. Mantero, « Les chants de la « pauvre ame simplette » ou Le Parnasse des Odes de Claude Hopil », dans : Devis d’amitié. Mélanges en l’honneur de Nicole Cazauran, études réunies par J. Lecointe, C. Magnien, I. Pantin, MC. Thomine, Paris, Champion, 2002, p. 655-675 ; A. Mantero, « "Au secret du silence", les Doux vols de Claude Hopil », dans : Limites du langage. Indicible ou Silence, articles réunis par Aline Mura-Brunel et Karl Cogard, L’Harmattan, 2002, p. 181-189.
 L’adjectif « abstrait » est fréquent dans les poèmes de C. Hopil. Le nom d’« école abstraite » est dû à Louis Cognet, Histoire de la spiritualité chrétienne, La Spiritualité moderne I. L’essor (1500-1650), Paris, Aubier, 1966, p. 233 et suiv. ; voir aussi les « invasions mystiques » selon Louis Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux en France depuis la fin des guerres de religion jusqu’à nos jours (11 t. en 5 vol., nouvelle édition sous la dir. F. Trémolières, Grenoble, J. Millon, 2006 ; édition originale : 1916-1936) ; Jean Orcibal, La Rencontre du Carmel thérésien avec les mystiques du nord, Paris, p.u.f., 1959 ; l’édition critique du traité de Benoît de Canfield, La Règle de perfection, par Jean Orcibal, Paris, p.u.f., 1982 ; la notice d’Optat de Veghel « Spiritualité franciscaine : 16e-17e siècles, 4. En France », Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique : doctrine et histoire, Paris, Beauchesne, 1932-1995, t. 5, col. 1367-1376 ; Kent Emery (Jr), « Mysticism and the coincidence of opposites in sixteenth and seventeenth century France », dans : Journal of the History of Ideas, Philadelphia, 1984, vol. 45, no 1, p. 3-23.
 A. Mantero, La Muse théologienne, ibidem, développement sur les Divins eslancemens p. 227-241 et passim.
 A. Mantero, id., p. 151.
 A. Mantero, id., p. 264.
 Sur la recherche d’un style mystique, voir Carlo Ossola (dir.), Pour un vocabulaire mystique au XVIIe siècle. Séminaire du professeur Carlo Ossola, textes réunis par François Trémolières, Turin, N. Aragno – Collège de France, 2005. C’est une méthode d’approche de la mystique bien établie : voir les travaux de Jean Baruzi, Jean Orcibal, Michel de Certeau, Jacques Le Brun, Joseph Beaude, Michèle Clément, Sophie Houdard.
 Claude Hopil, Les Divins élancements d’amour, éd. J. Plantié, Paris, Champion, 1999 ; Claude Hopil, Méditations sur le Cantique des cantiques et Les Douces extases de l’âme spirituelle, éd. G. Peyroche d’Arnaud, Genève, Droz, 2000.
 Nous ne savons pratiquement rien de la vie de Claude Hopil, en dehors du geste éditorial, ni de ses réseaux littéraires ou spirituels. Voir les deux études fondées sur quelques découvertes en archives qui éclairent surtout son milieu familial : l’introduction de G. Peyroche d’Arnaud à l’édition des Douces extases, op. cit., p. XII-XVII ; Catherine Déglise, Au vol de la plume, op. cit., chap. 1 « Itinéraire d’un homme insaisissable », p. 21-34. Nous avons examiné la problématique carrière littéraire de C. Hopil, du moins la diffusion imprimée de ses œuvres, les soutiens institutionnels qu’elle suppose, les contrôles qui s’exercent sur ses livres, dans notre article « L’équivoque mystique chez Claude Hopil : être autorisé sans faire autorité (entre 1603 et 1633) », Revue d’histoire littéraire de la France, Paris, p.u.f, n° 1, janvier-mars 2013, p. 15-44.
 C’est-à-dire sous réserve d’autres trouvailles éditoriales ou de compléments d’information sur la vie littéraire de C. Hopil, toujours possibles.
 Sur les deux recueils d’Œuvres chrétiennes, voir Catherine Déglise, « Conversion du cœur, conversion des modèles poétiques dans les œuvres de jeunesse de Claude Hopil », dans : Réforme, Humanisme, Renaissance, Association d’études sur la Renaissance, l’humanisme et la réforme, no 65, décembre 2007, p. 43-64 ; pour la mise en évidence du néo-stoïcisme augustinien de ces premières œuvres, voir notre thèse : Essais de soi. La poésie spirituelle entre Montaigne et Descartes (1580-1641), Genève, Droz, 2012, chap. « L’union à Dieu chez C. Hopil (1603 et 1604), p. 339-383.
 A. Mantero, op. cit., p. 176 ; voir aussi p. 179.
 Michèle Clément, « L’impossible représentation : l’image chez quelques poètes baroques », Studi francesi, no 107, anno XXXVI, fasc. II, mai-août 1992, p. 297-300.
 Michel de Marillac, Les CL Pseaumes de David et les X. Cantiques inserés en l'office de l'Eglise traduits en vers françois, Paris, Edme Martin, 1625. Michel de Marillac fréquentait le salon de Barbe Acarie, centre de diffusion de la spiritualité abstraite.
 M. de Marillac, ibid., « Advis sur la presente traduction ».
 M. Levesque et O. Pédeflous (dir.), L'emphase : copia ou brevitas ? XVIe – XVIIe siècle, Paris, Presses Universitaires de Paris Sorbonne, « Bibliothèque des styles », 2010.
 C. Hopil, La Couronne de la Vierge, chap. 8, p. 89. Nous corrigeons le texte original qui porte : « … au langage du Ciel et des Anges. »
 « Il faut noter icy que l’Espouse use de (ce( mot d’odeur plustost que de celuy de goust, ou de quelque autre semblable, pource que l’odorat semble moins terrestre en son action, et plus approchant de la nature de l’esprit que les autres sens. Aussi que l’odeur ne dégouste et ne lasse point le sentiment, au lieu que les autres dégoustent fort, et que les autres sens se lassent bien tost en leurs opérations. (…( Or, comme il n’y a point de plus excellente odeur que celle de la miséricorde, ainsi l’âme dévote court de grande violence après ce parfum plus délicieux, parfum et tymiame sacré, qui s’exhale du précieux sang de l’Agneau sans macule, sang très odorant qui, estant jetté dans le feu du divin amour, embaume le cœur, et ravit l’âme dévote et religieuse. » (DEx, p. 133-134)
 Ces analyses prennent appui sur l’étude d’A. Mantero pour les Divins eslancemens, La Muse théologienne, op. cit., notamment la section « Le vocabulaire théologique », p. 155-241.
 Pour une présentation de la notion d’anéantissement (ou annihilation, abnégation) dans les traités et une approche du courant spirituel abstrait, voir Frédéric Gabriel, « Contemplation, anéantissement, récit : les stratégies du sujet spirituel à l’âge moderne », dans : Dire le néant, numéro spécial des Cahiers de Philosophie de l’université de Caen, n° 43, p. 179-209 ; Jean Orcibal, « La divinisation selon Benoît de Canfield (1562-1610), dans : Études d’histoire et de littérature religieuses. XVIe-XVIIIe siècles, Paris, Klincksieck, 1997, p. 409-418.
 DEl, ct. 2, st. 10.
 Voir l’articulation de l’étude d’Anne Mantero en deux parties : « Le didactisme » puis « Au-delà du didactisme : la théologie présupposée » (La Muse théologienne, op. cit.).
 DEl, ct. 52, st. 8, v. 3.
 La Muse théologienne, op. cit., note 14, p. 51. A. Mantero suggère un rapprochement avec la Docte ignorance de Nicolas de Cues (I, 24).
 Voir Alain de Libera, « Sermo mysticus. La transposition du vocabulaire scolastique dans la mystique allemande du XIVe siècle », dans : Rue Descartes, numéro « De l’intraduisible en philosophie », Paris, Albin Michel, novembre 1995, n° 14, p. 41-73.
 Alain de Libera, ibidem : « Avec la prédication d’Eckhart (…(, le langage scolastique et la version scolastique du spirituel passent à leur tour en vernaculaire. Du même coup, c’est tout le système de références conceptuelles des maîtres universitaires, leur culture, leur univers de lecture qui se trouvent traduits. C’est là ce qui fait la spécificité de la mystique rhénane : avec elle, dans un mouvement souvent tâtonnant, toujours saturé, l’ensemble profondément hétérogène des sources qui forment le champ d’énoncés disponibles à la pratique discursives des maîtres, l’aristotélisme scolastique (dans toute sa diversité et ses multiples niveaux de langue, où se heurtent sémantiquement deux corpus d’Aristote, le gréco-latin et l’arabo-latin), mais aussi le corpus dionysien livré en plusieurs traductions discordantes (Hilduin, Érigène, Jean Sarrazain, Robert de Lincoln) élaborées par plusieurs générations de commentateurs et de lecteurs professionnels de Denys – bref, la philosophie péripatéticienne et la théologie chrétienne néoplatonicienne – sortent de l’université. C’est donc un véritable transfert culturel qui s’opère dans la prédication allemande d’Eckhart. » (p. 49)
 En raison de l’intérêt du poème et des difficultés d’accès au recueil, nous transcrivons un large extrait. Pour faciliter la lecture, nous introduisons des guillemets autour des fragments au style direct. Ces guillemets n’appartiennent pas aux normes typographiques de l’édition originale.
 Sur l’usage de la répétition, voir l’analyse de J. Plantié en introduction à son édition des Divins eslancemens, op. cit., « §1. Vague sur vague, redite sur redite » (p. 40-45). Elle met en évidence la répétition d’un matériau lexical, d’hémistiches, d’alexandrins, de rimes. Ses conclusions nous paraissent pouvoir être étendues au recueil des Doux vols : ce dernier partage le trait stylistique du ressassement avec le précédent recueil.
 C’est une lecture que Christophe Bourgeois propose pour l’ensemble du corpus de la « Muse chrétienne » dévote (La Muse chrétienne, op. cit.).
 Hypothèse de J. Plantié dans l’introduction à son édition des Divins élancements, éd. cit., p. 26.
 À partir de l’intertextualité avérée du Traité de l’amour de Dieu dans les Douces extases de l’âme (voir l’édition de G. Peyroche d’Arnaud, éd. cit.), Catherine Déglise argumente en faveur d’un modèle salésien dans les poèmes (Au vol de la plume, op. cit., p. 351-363).
 Pour la bibliothèque de Claude Hopil, un aperçu des lectures que l’on décèle dans ses écrits, voir en priorité l’introduction et l’annotation des deux éditions critiques disponibles par J. Plantié et G. Peyroche d’Arnaud. Voir aussi la bibliographie générale des études sur C. Hopil, notamment Catherine Déglise (op. cit, p. 274-390), Michèle Clément (« Claude Hopil, "Au mystique tombeau du rien" », art. cit.).
 Signalons les variations sur le thème de la caliginosité : « Broüillats », « divin nuage », « ombres mystiques » (expressions tirées de DVols) ; Dieu est dit par oxymore « abysme de lumière » (DVols, ct. 41, p. 81), « lumieres sombres (DVols, ct. 9, st. 2) ; « rayon tenebreux », « lumineux abysme » (DVols, ct. 5, st. 3, p. 6). Sur ce point, voir l’étude de Werner Indermühle, Essai sur l’œuvre de Claude Hopil, Thèse de Lettres présentée à l’université de Zurich, Zurich, Juris Druck-Verlag, 1970 ; voir aussi l’étude de Michèle Clément, « Claude Hopil, "Au mystique tombeau du rien" », art. cit., p. 2-4 ; Catherine Déglise, ibidem, p. 309-327.
 Dieu désigné sous le terme d’« essence » et d’acte pur. Voir Paul Mommaers, « Benoît de Canfeld : sa terminologie "essentielle" », Revue d’histoire de la spiritualité, t. 47, 1971, no 188, p. 421-454.
 Le motif du « vol de l’esprit », en titre de cantique dans les DEl (voir la note d’André Derville, « Vol de l’esprit », dans : Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique, t. XVI, 2e partie, Paris, Beauchesne, 1993, col. 1216) ; le motif récurrent de la « playe d’amour » (DVols, ct. 1, p. 3 ; ct. 5, p. 10 ; Parnasse, « Cantique de la playe d’amour », p. 65-67).
 Pour le relevé des citations des Méditations, Manuel, Soliloque du pseudo-Augustin dans les Œuvres chrestiennes de 1603 et 1604, nous renvoyons à notre thèse publiée Essais de soi, op. cit.
 Termes de « subsistance », de la « grandeur » ou des « grandeurs » (Doux vols, ct. 6, p. 12 : « Dans le sein de Jesus annoncez la premiere / Les grandeurs d’un tel fils. ». Dans les DEl, une quarantaine d’occurrences au pluriel et une vingtaine au singulier), l’adjectif « suprême » (dont « Être suprême »), probablement le substantif « excès » (DVols, ct. 6, p. 14 : « Ha ! qu’aymable est l’excez où l’ame n’agissant / Souffre le tout-Puissant ! » ; ct. 8, p. 15 « mon ame en cet exces » ; ct. 19, p. 39 : « exces amoureux ») qui est partagé avec Bérulle et les capucins.
 Jean Orcibal, La Rencontre du Carmel thérésien avec les mystiques du nord, Paris, p.u.f., 1959 ; voir aussi du même auteur, Saint Jean de la Croix et les mystiques rhéno-flamands, Bruges, Desclée de Brouwer, 1966.
 Voir les DEl, ct. 3, st. 1, v. 4 ; ct. 28, st. 6, v. 2 ; ct. 95, st. 2, v. 3.
 Voir les DEl, ct. 74, st. 3, v. 4 ; DVols, ct. 22, p. 43.
 Voir les DEl, ibid., occurrence unique.
 DVols, ct. 19, p. 36.
 Parnasse, st. 6, v. 6, p. 54.
 Voir les DEl, ct. 40, st. 6 : « Mon âme est dans son centre, à l’instant qu’elle est toute / Absorbée en son Dieu, comme au tout est le rien. » (v. 5-6)
 Couronne de la Vierge, op. cit., chap. XI « De la devotion de la Vierge », p. 141.
 Parnasse des odes, « De la beauté de Jesus », st. 7, p. 30.
 DEx, chap. 1, p. 120.
 DEx, chap. 5, p. 289.
 DEx, chap. 2, p. 196 ; chap. 8, p. 384.
 Sur cette notion spirituelle, voir l’article d’Albert Deblaert, « Essentiel (Superessentiel, Suressentiel) », Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique, t. IV, 2e partie, Paris, Beauchesne, 1961, col. 1346-1366.
 Large extrait du poème cité supra (DVols, ct. 34, st. 4, p. 66-68).
 Voir les DEl, ct. 76, st. 9, v. 1.
 Couronne de la Vierge, chap. VI, p. 71 ; « devotion sur-eminente » p. 138.
 Voir les DEl, ct. 57, st. 1, v. 2.
 Nombreuses occurrences. Voir par exemples les DVols, ct. 6, v. 10.
 Parnasse des odes, st. 6, v. 2, p. 45, etc.
 DEl, ct. 57, st.1, v. 5. « Essence nue » apparaît comme une reformulation des tours «Être sur-étant » et « sur l’essence une suprême essence » dans les vers précédents de la même strophe. Occurrences multiples : DEl, ct. 74, st. 4, v. 2 ; etc.
 On le relève fréquemment dans les Divins élancements : ct. 34, st. 7 ; ct. 52, st. 8 ; ct. 54, st. 4, v. 2 ; ct. 57, st. 1, v. 1 ; ct. 65, st. 2, v. 1.
 Voir les Divins élancements : « Suprême être de l’être, étant sur tout étant » (ct. 29, st. 4, v. 1) ; ct. 60, st. 7, v. 2 ; ct. 64, st. 7, v. 6. Dans le même ct. 64, st. 9, v. 1 : « un nombre sur tout nombre ».
 Voir DVols, ct. 32, p. 62.
 Voir DEl, ct. 15, st. 1, ct. 99, st. 12, v. 1.
 Voir DVols, ct. 45, p. 88 ; « main surceleste », ct. 37, v. 11, p. 72.
 Voir DEl, ct. 13, st. 6, v. 4.
 Voir DVols, ct. 3, p. 6.
 Syntagme courant : voir les Divins élancements, ct. 1, st. 11, v. 1 ; ct. 16, st. 10, v. 1 ; ct. 24, st. 2, v. 3 ; ct. 30, st. 12, v. 2 ; etc. Doux vols, ct. 4, p. 9 ; ct. 15, p. 30 ; etc.
 Voir DVols, ct. 4, p. 9.
 Cantiques de la vie admirable de Saincte Catherine de Sienne (S. Huré, 1628-1629), ct. 1, st. 4, v. 4, p. 348.
 « L’identité selon la grâce », formule de Maxime le Confesseur, Ad Thalassium, q. 25, PG 90, 333a.
 Jean Dagens, Bérulle et les origines de la restauration catholique : 1575-1611, Paris, Desclée de Brouwer, 1952.
 DVols, ct. 13 ; DEl, ct. 12.
 « Ô trop heureux qui sert la Trinité parfaite, / Et non qui la contemple en l’oraison abstraite / Sans la vouloir servir : / À l’aimer et servir, bienheureux qui s’embrase ! / Je voudrais bien toujours en elle me ravir / D’une pareille extase ! » (DEl, ct. 48, st. 11)
 « Ainsi ne pouvant voir celuy que mon cœur aime / En ce monde ennuyeux, / J’espère le trouver par un amour extresme / Non pas dedans les Cieux : / Mais dans le Sacrement où sa bonté feconde / Se laisse à nous au monde. » (DVols, ct. 9, p. 18) ; voir aussi à la suite des Divins eslancemens, dans la section consacrée à Catherine de Sienne, le cantique « De la grande devotion qu’elle avoit au S. Sacrement, et de ses merveilles » (éd. 1629, p. 359-363).
 Voir « Du Prince et de sa Republique. Discours », OC 1604, fos 30ro-31vo. Les capucins de Paris, dans la mouvance de Benoît de Canfield ou de Laurent de Paris, ont pu appartenir au plus proche entourage du roi  : on connaît le rôle politique et diplomatique du capucin Joseph Du Tremblay, connu aussi sous le nom de Joseph de Paris ou l’« Éminence grise ». Il fut le conseiller officieux de Richelieu, à partir de 1616, puis de manière officielle à partir de 1624. Voir Raoul de Sceaux et André Rayel, «  Joseph de Paris », dans : Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique, Paris, Beauchesne, t. 8, col. 1372-1388 ; Secondo Pastore, Le Resserré et l’étendu. Introduction à Joseph du Tremblay L’Éminence grise, I. Herméneutique et logique, dans : Études franciscaines, Paris, t. XIX, supplément annuel 1969, p. 26.
 Nous développons cet aspect de la diffusion et de la réception des œuvres de C. Hopil dans l’article : « Être autorisé sans faire autorité : l’équivoque mystique dans l’œuvre de Claude Hopil (1603-1633) », art. cit.
 Ferdinand Brunot, La Doctrine de Malherbe d’après son « Commentaire » sur Desportes, Paris, G. Masson, 1891.
 Voir une étude historique du lexique des Divins élancements par Wolker Mecking, « Le vocabulaire de Claude Hopil (environ 1580-vers 1633) et son potentiel lexical pour le français préclassique (1500-1650) », dans : La Langue, la linguistique et le texte religieux, Paris, L’Harmattan, 2008, p. 131-151.
 Voir Henri Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux, rééd. sous la dir. F. Trémolières, Grenoble, Jérôme Millon, 2006, vol. 11 ; Sophie Houdard, Les Invasions mystiques, op. cit., 1re partie ; Jean Orcibal, op. cit.
 Voir Hildebrand de Hooglede, « Les premiers capucins belges et la mystique », Revue d’ascétique et de mystique, t. XIX, 1938, p. 254-294.
 Laurent de Paris, Le Palais d’amour divin entre Jesus et l’ame chrestienne, auquel toute personne tant seculiere que Religieuse peut apprendre à aymer Dieu en verité, seconde édition reveuë et augmentée, Paris, Vve La Nouë, 1602 (rééd. 1603, 1614, 1622, 1626).
 Voir Jean Orcibal, La Rencontre du Carmel thérésien avec les mystiques du nord, Paris, p.u.f., 1959, chap. 2 « Les premières polémiques aux Pays-Bas (1594-1611) et le rôle de Jérôme Gratien », p. 18-45.
 Jeronimo Gracian de la Madre de Dios (Jérôme Gratien(, Diez lamentaciones del miserabile estado de los ateistas de nuestros tiempos, dans Beatus vir : carne de hoguera, éd. Emilia Navarro de Kelley, Madrid, Editora nacional, p. 263-361. Après la première édition en 1611, une deuxième édition paraît à Bruxelles en 1616.
 Ibidem, p. 306-317 : « Atheistas spirituales, o perfectistas ».
 Traduction de travail : « La perfection, c’est l’union essentielle, immédiate, passive, temporaire, caligineuse et cachée, accompagnée de l’anéantissement complet, suspension, révélations et goûts spirituels de l’âme, dans l’amour de fruition. Cette manière de parler pour dire la perfection est obscure, parce que les termes sont difficilement compréhensibles. »
 Estienne Binet, La Vie apostolique de Sainct Denis areopagite, patron et Apostre de la France, seconde édition, Paris, Sébastien Chappelet, 1624. Pour un relevé d’autres critiques de l’énonciation mystique, qui proposent de lever l’équivoque langagière, voir Jean Orcibal, Le Cardinal de Bérulle. Évolution d’une spiritualité, Paris, Cerf, 1965, p. 130-131.
 Les œuvres ont pu être connues antérieurement en langue latine ou originale ; les différentes impressions de traductions n’en sont pas moins l’indication qu’il existe une demande et un public pour ce type d’écrit. Citons quelques lectures de C. Hopil : les trois principales œuvres de Thérèse d’Avila paraissent à Paris chez G. La Noüe en 1601 ; La Perle évangélique, Paris, La Noüe, 1602 ; Jean Rusbroche (Ruusbroec(, L’Ornement des nopces spirituelles, Toulouse, Vve Colomies, 1606 ; pseudo-Denys, Œuvres, Paris, J. de Heuqueville, 1608 ; pseudo-Denys, Œuvres, seconde traduction, Paris, Vve Nicolas Buon, 1629 ; etc. Voir Jean Dagens, Bibliographie chronologique de la littérature de spiritualité et de ses sources (1501-1610), Paris, Desclée de Brouwer, 1952.
 Les approbations sont signées des deux mêmes noms, S. Pestel et Fr(ère ?( M. Chrestien, et délivrées le même jour (20 octobre 1628).
 Sur ce recueil, la seule étude est celle d’A. Mantero, « Les chants de la "pauvre ame simplette" ou Le Parnasse des Odes de Claude Hopil », art. cit.
 Daniel Vidal, Critique de la raison mystique. Benoît de Canfield : possession et dépossession au XVIIe siècle, Grenoble, J. Millon, 1990.
 Cet article a bénéficié de la lecture et des conseils de Michèle Clément et d’Anne Mantero. Que toutes deux lisent ici l’expression de ma reconnaissance et mes remerciements. Ce qu’il reste d’imparfait ou de contestable demeure néanmoins de ma seule responsabilité.





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