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C O U T U M E S

Cour de Parlement, qui sont intervenus en conséquence. OU ON A JOINT ... voir établir de plus loin cette qualité , mais l'histoire de ces tems est un .... Marche, il est certain que les Habitans de cette premiere. Province ..... que la licence leur soit refusée. ..... d'une transaction passée à Paris en la même année I7I4 , entre le ...




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Eric Boyron, Pontault-Combault le 26 Mars 2001.

C O U T U M E S DE LA PROVINCEET COMTÉ PAIRIEDE LA MARCHE,RESSORT DU PARLEMENT DE PARIS,AVEC DES OBSERVATIONS ESSENTIELLEMENT UTILES, pour les entendre, dans le sens & l’énergie où elles doivent l’être selon les usages à present reçûs en ladite Province & l’autorité des Sentences du Présidial & Senéchaussée Royale de la Ville de Gueret, capitale de la même Province, & des Arrêts de ladite Cour de Parlement, qui sont intervenus en conséquence.OU ON A JOINT TOUTES LES ORDONNANCES, EDITS, Declarations & Arrêts de LOUIS XV, concernant la Jurisprudence nouvelle.PAR M. COUTURIER DE FOURNOUE, ECUYER, CONSEILLER, Secretaire du Roy, Maison-Couronne de France, & ancien Conseiller & Procureur du Roy au Présidial & Senéchaussée de la Marche.LE PRIX EST DE SIX LIVRES.A CLERMONT-FERRAND,
Chez PIERRE VIALLANES, Imprimeur-Libraire,
près les RR. PP. Jesuites.

M. D C C. X L I V.

AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY

iijP R É F A C E
e toutes les choses de la vie civile, il n’en paroît aucunes plus recommandables, que celles qui tendent à former & maintenir la paix & l’u- nion entre les hommes & à écarter les differens & con- testations qui peuvent les troubler. Et comme les diverses interprétations, ou explications, qu’on a voulu donner aux Loix municipales de la Province, ont souvent fourni les occasions de divers procès, toujours ruineux pour les familles, on a crû que ce seroit rendre un service très- utile au public, de lui mettre sous les yeux, & lui faire part d’observations recüeillies avec soin, & dans la pré- cision & exactitude des faits, absolument necessaires en semblable cas, afin que si on veut bien déferer à ces ob- servations, on puisse en tirer le fruit & l’avantage qu’on doit s’en promettre.
Ce qui m’a excité dans l’ouvrage que je presente au public , a été la connoissance que j’ai que feu Mr. Coutu- rier de la Prugne mon pere , ayant exercé pendant plus de 55 ans la Magistrature, n’a cessé durant ce tems , de
ivPREFACE.donner une application continuelle aux affaires, & que l’estime & la confiance dont il étoit honoré par ce qu’il y avoit de plus distingué dans la Province, lui avoient don- né lieu d’aprofondir les questions les plus considerables ; principalement sur les matieres de la Coutume , dont il s’étoit fait une étude particuliere ; dans l’intervale d’une longue experience , il avoit fait des nottes , qu’il a souvent pris la peine de m’expliquer avec un talent , ( j’ose le dire ) de solidité & de pénétration qui lui étoient naturel- les. C’est en cet état, que j’ai été sollicité de communiquer ces nottes au public, & je n’ai fait qu’y donner une espe- ce d’arrangement pour en former un corps d’ouvrage ; & d’y ajouter ce que mes connoissances particulieres ont pû m’apprendre depuis la mort de ce cher pere, décedé à l’âge de 8 I an, avec la méme maturité de jugement , & les grands sentimens de religion que le Seigneur lui avoit fait la grace de lui conserver jusqu’aux derniers momens & qui lui ont attiré l’amitié & les regrets de ses compa- triotes.
J’ai crû aussi qu’il convenoit à un devoir autant de bienséance que d’inclination, de profiter de cette occasion pour informer le public de ce que j’ai trouvé de plus cer- tain, concernant le Comté de la Marche , qui dès le neu- viéme siécle a eu ses Seigneurs particuliers , avec le titre & dignité de Comté ; quelques Auteurs ont pretendu pou- voir établir de plus loin cette qualité , mais l’histoire de ces tems est un peu obscure , & la prudence exige une cir- conspection scrupuleuse à ne rien hazarder sur des faits publics , qu’avec une certitude & précaution qui sont tou- jours honneur à celui qui les avance.

PREFACEvL’époque la plus assurée est qu’Audebert de Charroux, possedoit cette Comté , & ne laissa qu’une fille unique qui fut mariée avec Hugues de Lusignan , fils de Hugues le Brun.
Par ce mariage la Comté de la Marche entra dans la maison de Lusignan, où elle a resté jusques en I307, que Guy de Lusignan alors Comte, étant malade à Poitiers, fit un testament, par lequel il legua la Comté de la Mar- che à Philippe le Bel, Roy de France, qui en disposa ensuite en faveur de Charles de France, qui obtint du Roy Philippe le Long son frere des Lettres Patentes, par lesquelles cette Comté fut érigée en Pairie, avec tous les honneurs & pre- rogatives dûs aux Pairs de France.
Charles devenu Roy, par la mort de Philippe, fit un échange de sa Comté Pairie de la Marche, avec la Comté de Clermont , appartenante à Louis de Bourbon, par acte du 27 Decembre I327.
Depuis cet échange, la maison de Bourbon a possedé cette Comté, jusqu’à Eleonore de Bourbon, fille & unique heritiere de Jacques , qui par son mariage , avec Bernard d’Armagnac, lui en transfera le titre & la possession, & ensuite à Jacques d’Armagnac leur fils.
Jacques d’Armagnac, Comte Pair de la Marche, fit plusieurs dons & concessions aux Habitans de la Ville de Gueret , & à quelques autres Villes & lieux de sa depen- dance ; mais ayant été accusé de crime de lèze-Majesté, il fut condamné par des Commissaires du Parlement , as- semblez à Noyon , par commission du Roy Louis XI , à avoir la tête tranchée , avec confiscation de sa Comté de
vjPREFACE.la Marche, qui par ce moyen revint une seconde fois à la Couronne.
Le Roy Louis XI. disposa de cette Comté Pairie en fa- veur d’Anne de France sa fille, mariée à Pierre de Bour- bon, Seigneur de Beaujeu , dont il vint une fille nommée Susanne, qui épousa Charles de Bourbon, lequel ayant les titres de Duc de Bourbonnois & d’Auvergne ; ce fut du tems de ladite Anne de France, Comtesse de la Marche, & dudit Charles de Bourbon son gendre, qu’en vertu de Lettres Patentes , par eux obtenuës du Roy François I. les nouvelles Coutumes du Bourbonnais & de la Marche fu- rent redigées telles qu’elles se trouvent à present, par des Commissaires du Parlement de Paris, nommez & autori- sez à cet effet par lesdites Lettres Patentes.
Anne de France, Comtesse de la Marche, ayant sur- vêcu Susanne sa fille, elle fit des dispositions, par lesquel- les elle fit passer ladite Comté Pairie de la Marche, en la personne dudit Charles de Bourbon son gendre; mais celui- ci s’étant mal comporté, & ayant pris les armes contre le Roy, il fut poursuivi comme criminel de lèze-Majesté, & par Arrêt de l’an I527 ses biens furent confisquez au profit du Roy, qui par sa déclaration du 22 Septembre I53I reünit à perpetuité à sa couronne, la Comté Pairie de la Marche, & elle n’en a plus été désunie
La Coutume de la Province de la Marche, a été redi- gée, à la requisition, & par le consentement des Trois- Etats , convoqués & assemblés en la Ville de Gueret, ca- pitale de ladite Province, au mois d’Avril I52I, en vertu de Lettres Patentes du Roy François I. & redigée par les
PREFACEvijCommissaires de la Cour du Parlement sur ce autorisés par lesdites Lettres Patentes , le tout ensuite porté & re- gistre en ladite cour , pour être ladite Coutume gardée & observée en tous ses points & articles , avec dérogations expresse à toutes maximes , Loix , Ordonnances & autres choses à ce contraires.
Il y a eu cinq éditions differentes de cette Coutume.
La premiere est en lettre gottique imprimée à Paris, par Regnaud Chaudiere, environ cinq ans après la redac- tion & publication de ladite Coutume.
Mais il y a deux fautes dans cette édition, l’une en ce qu’on a pas imprimé correctement plusieurs mots ou noms propres, tant dans les Textes des Articles, que dans le Procès-Verbal; & l’autre en ce que l’imprimeur a fait une confusion dans le nombre des articles, dont il a, en quelques endroits, accumulés deux articles ensemble, ce qui a opéré une erreur considerable dans le nombre & l’ordre des Articles; en effet dans cette premiere édition, la Cou- tume n’est composée que de 434 articles, au lieu qu’il doit y en avoir 440 suivant une verification qui en a été exactement faite, tant au Greffe de la Cour, que sur une copie fidelle, collationnée par Messieurs les Commissaires, qui en fut conservée au Greffe de la Senéchaussée de Guéret.
Me. Charles du Moulin, ancien Jurisconlte fameux, & dans la plus grande estime & reputation, sur tout au Parlement de Paris, fut chargé par la Cour de faire un examen des Coutumes de son ressort , principalement de celles qui avoient été redigèes de son tems dans le seizième siecle. Il est certain que ce cèlebre auteur, auquel la Ju-
viijPREFACE.risprudence doit infiniment, n’èpargna ni peines, ni soins, pour repondre à la grande & digne opinion qu’on avoit de son èminent sçavoir, & de sa capacitè & probitè; c’est en consequence qu’il nous a laissè entre autres ouvrages de grande consideration, des Nottes sur differentes Coutumes, & en particulier sur la Coutume de la Marche, qui se trou- vent raportèes dans l’èdition de Moulins dont il sera parlé ci-après; & il ne lui a pas èchapé de voir & connoître les erreurs faites au sujet des cottes des articles des éditions precedentes, & méme son affection & grande attention pour l’éclaircissement de la verité, lui donnerent lieu de voir par lui même la copie de la Coutume conservée à Gue- ret, sur laquelle, & l’avis des Avocats & Praticiens, il a fait ses Nottes remplies d’èrudition & de soliditè ; on le connoîtra parfaitement dans la suite par l’explication qui en sera faite sur les articles de la Coutume dont je me propose de parler.
La preuve de ce qui vient d’être exposè au sujet des erreurs dans les èditions de la Coutume qui ont precedè celle de Moulins, se trouve dans l’édition du Coutumier general imprimè à Paris, par Claude Morel en I604, on y voit au 2 vol. fol. 505 au sujet de l’article 85 de ladite coutume de la Marche, une ètoile & un ren- voi en marge, qui ètablit par l’Editeur même, l’erreur qu’il avoit soupçonnèe dans cette èdition, & en effet au lieu de suivre l’ordre des articles 88 & 89, on les a transportez aux articles 90 & 9I, ce qui a formé une ômission de deux côtez, & a donnè lieu à toutes les erreurs de cottes qui s’en ensuivent, cela fait connoître combien l’attention

PREFACEixl’attention & la fidelité à la lettre, sont inviolablement necessaires dans l’impression des ouvrages, afin de les ren- dre conformes aux originaux, sauf aux Auteurs & Ob- servateurs de faire voir par un examen qu’ils se doivent à eux mêmes & au public, s’il s’y est glissé des choses cor- rigibles & essentielles, & ne rien négliger pour y pourvoir.
La troisiéme édition est un in 49. qui outre les articles du Texte, contient quelques notes de Me. Nicolas Caillet, imprimée à Paris en I573 ; mais il y a quelques fautes dans certains articles du Texte, & d’ailleurs les notes sont courtes & en petit nombre, & versent quasi toutes sur la relation des Loix Romaines , il y a quelques bonnes observations, & cela cependant ne suffit pas, sans le secours indispensable des usages, selon la maxime, optimus legum interpres usus. Il y a aussi un Note flâteuse que Me. Caillet, en se laissant guider par l’affection d’un bon Compatriote, y a mise & dont je me suis permis la douce liberté de faire ici la repetition, en demeurant d’ac- cord cependant que cet Auteur a cedé un peu trop à l’exa- geration en certains points, ce que je n’ai osé rele- ver par la consideration dûë à un ouvrage public, dont l’ancienneté toujours respectable doit faire passer les termes.
C’est au sujet de la publication de la Coutume faite en le Ville de Gueret, principale de la Provine, où lesdits Trois-Etats étoient assemblez; cette Note est en ces termes au fol. 2. de ladite édition.
Ut autem Garactum, est caput omnium urbium & oppidorum Provinciae, ita illis, cum agri uberta-
xPREFACE.te, coeli clementiâ, fontium limpidissimorum amoe- nitate, tectorum magnificentiâ , silvarum faltuum- que latissimorum dominio, tum hominun virtute & honoribus, jam ab antiquo illustrium , togatorum & adolescentum ingenio fœcundo , & litteris exculto præditorum copia , facilè præcellit.
La quatriéme édition de notre Coutume faite par Ver- noy imprimeur à Moulins en I6I8, contient les notes de Me. Charles du Moulin dont on a ci-dessus parlé, & personne ne sçauroit douter que cette édition est non seule- ment la plus propre & la mieux imprimée de toutes celles qui ont été faites, mais encore la plus exacte pour les Chapitres, les Textes & les Côtes des articles, à côté des- quels sont les notes, qui font voir d’un coup d’oeil un ou- vrage complet & très-utile.
J’ai donc crû ne pouvoir rien faire de mieux que de m’attacher à suivre cette édition de Moulins, pour l’ap- plication des observations, dans lesquelles je n’ai de bon- ne foi en vûë, que de former quelques instructions aux lecteurs, sur les usages actuels & l’intelligence de la pra- tique de la Coutume, afin de tâcher de moderer l’ardeur des mauvaises demandes & entreprises, qui pourroient y être contraires, & éviter la rüine des biens & la perte des procès.
Il est vrai qu’en l’année I695, il a paru une cin- quiéme édition de la Coutume donnée au public par Me. Barthelemi Jabely ancien avocat, avec des notes de sa façon, mais on ne peut s’empêcher de faire part au public de quelques fait très-notoires, sur le sujet de cet ouvra-
PREFACExige, & sans vouloir en la moindre maniere, critiquer cet Auteur deffunt , il est absolument important d’avertir le public de ne lire les notes de Me. Jabely, inserées dans cette édition, qu’avec des précautions très-grandes, sans y don- ner trop de confiance, pour ne pas tomber en un grand nombre d’erreurs, qui à la premiere lecture n’ont pas échapé aux Officiers, Avocats, & Praticiens des Juris- dictions de la Province de la Marche.
Tout le monde sçait que Me. Jabely étoit né en la Pro- vince du Limousin, entierement regie par le Droit Ecrit, il y avoit reçû une éducation convenable à la profession de ses parens, qui n’avoit sûrement aucun trait à la Juris- prudence, & nonobstant le voisinage du Limousin avec la Marche, il est certain que les Habitans de cette premiere Province, n’ont d’attention qu’aux regles de leur Droit Ecrit, sans la porter à la connoissance des usages de notre Coutume Marchoise. Me. Jabely étoit dans le cas, il eut l’occasion d’aller à Paris & de s’y établir, & là ayant recouvré, comme on le pretend, une copie de quelques me- moires attribuez à Monsieur Reydier President, Lieutenant- Général au Presidial & Sénéchaussée de Gueret, il lui vint une idée qu’il executa, de faire imprimer les Textes de la Coutume dont les premieres éditions étoient en effet alors devenuës un peu rares, & d’y ajoûter des notes tirées des memoires, & dont la copie étoit aparament remplie de fautes d’écriture, ou non suivie & difigurée, à quoi il ajoûta d’autres notes de sa façon qu’il n’est pas possible en certains cas de rendre excusables. On sçait que Me. Jabely fit impri- mer à ses frais cette derniere èdition de la Coutume, &
xijPREFACE.qu’il en debitoit lui même les exemplaires, dont il n’avoit pas crû devoir tirer qu’un nombre assés mediocre. Lequel ayant diminüé depuis près de cinquante ans, on a crû que ce seroit rendre un vrai service au public, de faire impri- mer une sixième édition du Texte de la Coutume en le copiant dans le pur sens & litteral, qu’il a été revû sur l’original, & ce qu’on trouvera de bon & utile dans mes notes, on pourra l’ajoûter aux articles du Texte, & cor- riger de celles de Me. Jabely, ce qu’on y verra visiblement erroné sur les faits ou sur l’usage.
Mais il faudra aussi reparer un défaut qui a paru très- considerable dans l’édition de Me. Jabely, c’est d’en avoir separé & supprimé le Procès-Verbal, il en resulte deux inconveniens, bien sensibles; l’un d’avoir par là ôté au public la connoissance de certains anciens articles & usages de la Coutume qu’on a crû meriter une reformation, & des motifs apparament justes, qu’ont eût les Trois-Etats de la demander, & Messieurs les Commissaires de l’admettre. Cela est souvent aussi necessaire qu’instructif; le second in- convenient est, que faute de Procès-Verbal dans l’édition de Me. Jabely, il a éloigné la connoissance des anciens noms & principales Familles de la Province qui ont composé les Trois-Etats, pour l’Eglise, la Noblesse & le Tiers-Etat. On voit la consequence d’une pareille ômission qui n’a pas été faite dans l’édition de Moulins: mais aussi comme Ver- noy imprimeur y a estropié divers noms de Familles ou Seigneuries, dont nous connoissons parfaitement l’origine & les veritables noms propres, la nouvelle impression de ce Procès-Verbal étant exactement faite, ne sçauroit man- quer d’être gracieusement & favorablement reçûë.
PREFACExiijIl s’agit pour remplir mon projet de mettre par ordre de Chapitres & d’Articles , ceux dont notre Coutume est composée, & d’y ajoûter mes observations, par rapport à ceux seulement que j’ai crû devoir les meriter, sans m’as- traindre à porter ces notes sur plusieurs matieres triviales & de l’usage ordinaire, non plus que sur divers articles de pratique dont la disposition n’est plus suivie, & se trou- ve corrigée ou abrogée par l’Ordonnance generale du Roy de l’année I667, ou autres depuis rendües. Ce sera le moyen de ne point fatiguer les Lecteurs, ausquels il de- meurera cependant reservé de faire dans les autres éditions les recherches qu’ils croiront convenables.




     :            T A B L ECHAP.I. II.Des Juges & Jurisdictions. page. Des Sergens & autres Ministres de Justice & Ajournemens.2 I8III.Des Renvois.20IV.Des Procureurs.22V.Des Assuremens.idem.VI.Des Notaires & Tabellions.24VII.Des Dilations.28VIII.Des Deffaux, Contuma. & Amendes.29IX.Des Recusations baillées contre les Juges.33X.Des Objets & Reproc. de Témoins.idem.XI.Des Cessions de Biens, & des Respits d’un & cinq ans. 35XII.De Bail de Mineurs entre Nobles, & tu- telle de Roturiers. 36XIII.Des Prescriptions & Usucapions.48XIV.Des Obligations , Exceptions & Compen- sations. 69XV.Des Appellations.70XVI.Des lods , Ventes & Achats.72XVII.Des Hommes Francs , Serfs , ou Mortail- lables , nature & droits d’iceux. 76XVIII.Des Fiefs & Droits d’iceux.II6XIX.Des Testamens, Successions Testamentai- res , & ab intestat , & partage de biens. I27

CHAPIT.TABLE.
XX.De Retrait Lignagier , & Prélation de chose Feodale, Censiv. ou Franche. I56XXI.Des Donations , Dots , Doüaires & Con- venances de mariage. I63XXII.Des Moulins , Fours & Etangs.I85XXIII.Du Ban.I90XXIV.Des Espaves & Biens vacans.I9IXXV.Des Bornes & Limites.I94XXVI.Des Terrages & Reilhages.I96XXVII.Des Crimes & Delits.I99XXVIII.Des Communautez entre Consorts.204XXIX.Des Dommages de Bêtes.206XXX.Des Executions de Meubles , Ventes , Criées , & Subhastat d’Heritages. 2I3XXXI.D’Assiette de Rente.23IProcès verbal de Publication des Coutumes.243Requête pour Committitur.245Lettres Patentes du Roy.246Procès-Verbal de la Redaction des Coutumes.250Edit du Roy, portant création & établissement en la Marche d’un Siege Presidial en la ville de Gueret. 300Edit du Roy, concernant les successions des Meres à leurs Enfans; donné à Versailles ai mois d’Août I729.p.i.Declaration du Roy, servant de Reglement general en- tre les Curez Primitifs & les Curez-Vicaires perpertuels; donné à Marly le I5 Janvier I73I.VOrdonnance de Louis XV, pour fixer la JurisprudenceX

TABLE.
sur la nature, la forme, les charges ou les conditions des Donations; donnée à Versailles au mois de Fe- vrier I73I. xixDeclaration du Roy, concernant les Insinuations ; don- née à Versailles le I7 Fervrier I73I. xxxOrdonnance de Louis XV, concernant les Testamens ; donnée à Versailles au mois d’Août I735. xxxiijDeclaration du Roy, concernant la forme de tenir les Registres de Baptêmes, Mariages, Sepultures, Vê- tures, Noviciats & Professions ; & des Extraits qui en doivent être delivrez ; donnée à Versailles le 9 Avril I736. xlixOrdonnance de Louis XV, concernant le Faux Prin- cipal, & Faux Incident ; & la Reconoissance des Ecritures & Signatures , en matiere criminelle ; don- née à Versailles au mois de Juillet I737. lxTitre du Faux Principal.lxijTitre du Faux Incident.lxxivTitre de la Reconnoissance des Ecritures et Signatures, en matiere criminelle. lxxxiijOrdonnance de Louis XV, concernant les Evocations & les Reglemens de Juges ; donnée à Versailles au mois d’Août I737. lxxxvijTitre premier, des Evocations.lxxxviijTitre second, des Reglemens de Juges en matiere Civile.cTitre troisiéme, des Reglemens de Juges en matiere Criminelle.cxFIN DE LA TABLE.COUTUMES
I
C O U T U M E SDE LA PROVINCEET COMTÉ PAIRIEDE LA MARCHE,RESSORT DU PARLEMENT DE PARIS,AVEC DES OBSERVATIONS ESSENTIELLEMENT utiles pour les entendre, dans le sens & l’énergie où elles doivent l’être selon les usages à present reçûs en ladite Province & l’auto- rité des Sentences du Présidial & Senéchaussée Royale de la Ville de Gueret, capitale de la même Province, & des Arrêts de ladite Cour du Parlement, rendus en consequence.ES Coutumes générales du haut pays du Comté de la Marche , publiées & accordées ès presences de Mrs. Roger Barme President , & Nicole Brachet Conseiller du Roy en sa Cour de Par- lement, Commissaires en cette partie , ladite publica- 
2Coutumes de la Marche ,tion faite en la Ville de Gueret audit Comté de la Marche , presens à ce , en grand nombre , plusieurs des gens d’Eglise , Nobles, Praticiens & Bourgeois , tant de ladite Ville que des autres Villes dudit haut pays d’icelui Comté , le vingt-deux jour du mois d’A- vril I52I après Pâques & autres jours, suivant les Lettres Patentes du Roy à eux envoyées à cette fin.CHAPITRE PREMIER.Des Juges & Jurisdictions.
ARTICLE PREMIER.
CElui qui a Jurisdiction haute & moyenne en un territoire , est fondé d’y avoir la basse , s’il n’apert du contraire.
Article Second.
S’il est debat d’aucune chose entre Madame & son subjet , le juge de madite Dame en connoîtra , & gardera droit à elle & à autruy , & fera provision & justice comme il ap- partiendra.
C’est de Madame Anne de France dont il est parlé en cet article, Fille de Loüis XI, qui avoit épousé Pierre de Bourbon, Duc de Bourbonnois & d’Auvergne , Comtesse de la Marche.
Article Troisiéme.
Si aucun est convenu par devant le juge de son Superieur & l’une des parties veut croire l’autre par son ser- ment , la cause se doit vuider sommairement & de plain , sans en faire aucun renvoy , si elle se peut se vuider par le serment des parties.

des Juges & Jurisdictions.3Article Quatriéme.
Le vassal ou subjet en Justice ne peut prendre complainte, en cas de nouvelleté contre son Seigneur Justicier, ou Feodal , ayant saisi la chose dont le subjet se dit Seigneur utile , ne soy dire troublé de fait à l’occasion de ladite saisie faite par authorité de Justice ; mais se peut opposer , appeller ou avoir recours au Superieur , si bon luy semble : toutesfois si le vassal , aprés qu’il aura été reçu en foy & hommage , ou le subjet aura payé les lods & ventes , est dessaisi de fait de son Fief ou de la chose tenuë en censive par le Seigneur feodal ou censivier , ou autrement troublé en la possession & saisine de ladite chose féodale ou censiviere,il lui est loisible de- dans l’an & jour prendre & intenter sa complainte en ma- tiere de sasine & de nouvelleté , & tout autre remede pos- sessoire.
Article Cinquiéme.
Fief , Ressort & directe Seigneurie n’ont rien de com- mun , & peut être le Fief & foi & hommage à une per- sonne , & la Jurisdiction d’une chose feodale & directe à un autre.

Il faut ici observer sur le mot de Ressort, que la Dame de Castelnau, Dame de la justice du Dognon ayant entrepris d’établir un ressort dans sa justice , & les Officiers de la Senéchaussée de Gueret lui en ayant contesté le droit , ce pretendu ressort fut supprimé , par Arrêt du Parlement contradictoire du mois d’Août I672, & ordonné que ladite justice conti- nueroit de rélever en entier de ladite Senéchaussée , & ladite Dame condamnée aux depens.

4Coutumes de la Marche ,Article Sixiéme
Les Habitants en aucune Justice qui n’ont Corps commun ou Consulat , ne se peuvent assembler pour faire congrega- tion pour les affaires communes ou autres , sans demander licence au Seigneur Justicier , ou à ses Officiers , sur peine d’amende ; mais si la licence leur est refusee , & ils ont déclaré à la Justice la cause de leur assemblée , & elle est licite & honnête , ils se peuvent assembler & parler de leurs affaires , dont ils ont fait déclaration , nonobstant que la licence leur soit refusée.
Article Septiéme
Sequestre ne complainte en cas de nouvelleté n’ont point lieu en choses meubles , mais si a bien exhibition.
Article Huitiéme
Celui à qui est deferé le serment judiciellement par sa partie , n’est tenu l’accepter s’il ne veut , sinon que la par- tie veüille le croire sur ses défences ou repliques peremptoi- res , lesquelles il sera tenu bailler ou déduire promptement , afin que la partie délibere si elle le veut du tout croire ou soy retirer.
Article Neuviéme
Le Juge peut décider la cause d’Hôtelliers , Taver- niers , Regratiers ou Revendeurs publics par leurs ser- mens , jusqu’à la somme de sept sols & au dessous , des vivres & choses prises en leurs maisons , en les demandant dans trois mois , en affirmant aussi par eux que les défen- deurs ont accoûtumé frequenter leurs maisons , & pren-
des Juges & Jurisdictions.5dre vivres , denrées , & autrefois ont été leurs créanciers.
Article Dixiéme
Femme mariée exerçant marchandise publique peut ester en jugement, tant en demandant qu'en defendant , sans authorité de son mari, quand au fait de sa mar- chandise.
Article Onziéme
Le fils de famille majeur de vingt-cinq ans peut ester en jugement en demandant & en defendant , sans authorité de son pere ; mais le jugement ne peut audit pere prejudicier.
Maître Nicolas Caillet dans son commentaire sur cet article onziéme, pose pour maxime que le fils de famille majeur, est reputé taisiblement émanci- pé, & mis hors la puissance paternelle, il étoit ins- truit de l’usage de la Coutume alors observée, & qui a depuis continué.
Cependant Maître Jabely dans son commentaire sur cet article, ose accuser d’erreur Caillet, mais cet lui-même qui est tombé dans l’erreur en admetant une puissance paternelle proscrite & hors d’usage en la Marche , ainsi qu’il sera observé ci-après ; cet éditeur a fondé son opinion sur deux moyens qui n’ont rien de solide : Le premier , est , dit-il , ,, que la Coutume qu’alifiant le fils dont elle parle ,, en cet article, Fils de Famille, quoique majeur de ,, vingt-cinq ans , elle fait assez entendre que même ,, après cet âge , il reste encore en la puissance de ,, son pere; l’autre moyen est , que si le fils majeur
6Coutumes de la Marche ,,, étoit émancipé, lui & son pere seroient deux fa- ,, milles differentes.
A l’égard du premier moyen, Mr. Dargentré sur la Coutume de Bretagne detruit la fausse subtilité du nouvel éditeur , en disant , que celui qui étoit fils de ,, famille avant sa majorité , devient par l’âge de ,, vingt-cinq ans accomplis sui juris , émancipé , & ,, maître de ses droits. Ce qui est conforme à la de- cision de Guy Pape, cité par Caillet, de Mornac, sur la Loi 8. au dig. de adoptionibus & emancipationibus, & Despesses sur les dispositions du Droit écrit à cet égard , tom. I.
Quand au second moyen, quel inconvenient y a- t’il , que le fils émancipé par l’âge de vingt-cinq ans devienne chef de famille, avec des biens & droits dif- ferents de ceux de son pere , qui restera en même tems chef de la sienne? Maître Jabely est contraint de demeurer d’accord , que le fils de famille est émanci- pé par le mariage; pour quoi donc blame t-il Cail- let de vouloir distinguer ce que la Loy ne distingue pas? puisque lui-même aporte des distinctions à la disposition générale du droit Romain par lui cité , en avoüant qu’il se fait une émancipation tacite du fils de famille par son mariage, quoique la Loy ne fasse aucune distinction ; & il ajoute encore, sans y penser, contre son opinion, un autre moyen d’é-mancipation tacite, dont la Loy ne fait point de mention ; sçavoir lorsque le pere consent que son fils âgé de vingt-cinq ans, vive pendant quelques an-
des Juges & Jurisdictions.7nées separé de lui , à quoi il aplique l’Arrêt rendu entre la Dame de Mallesset du Coudray , & la Dame de Malesset de la Roche-Dagout sa soeur, au raport de Mr. Huguet en la premiere Chambre des Enquê- tes , le I6 May I689 , qu’il présupose sans raison , & comme mal informé , avoir été rendu en cette espece ; mais on fera voir ci-après évidemment le contraire , la contestation d’entre les Dames de Mal- lesset ayant été agitée en la Senéchaussée de Gueret, où l’on est encore bien informé de l’espece.
Enfin Mr. Dargentré, auteur illustre & respecta- ble , détruit toutes sortes de restrictions dans la dis- position du présent article XI. de notre Coutu- me , par ces termes, Major factus viginti quinque annorum in totum eximitur à patriâ potestate, non solum ad judicia sed etiam ad contractus , aut alios actus ex usu recepto in Galliâ.
En effet, il est certain qu’en la France coutumiere, la loy cum opportet , n’a aucun usage pour les effets qu’elle attribuë à la puissance paternelle sur le fils : ont vient de voir ce qu’en dit Mr. Dargentré, tous les Auteurs françois disent la même chose.
Loisel en ses Instituts coutumiers, titre premier article 36. établit pour maxime, qu’en France la puissance paternelle n’a lieu.
Baquet des droits de Justice, titre 2I. nombre 58. & 59. dit , que la puissance paternelle n’est ,, reçûë en France ; & qu’à l’égard de l’usufruit qui ,, étoit dans le Droit Romain une suite de cette puis-
8Coutumes de la Marche ,,, sance, il n’en reste que le droit qu’à le pere , de ,, jouïr des fruits des biens appartenans à ses en- ,, fans , pendant que la garde noble dure; c’est-à-dire pendant leur minorité.
Mr. Duvair dans ses Arrêts prononcés en robes rouges, dit , que la puissance que les Romains ,, avoient sur leurs enfans est changée en France de ,, leur part en un véritable amour, & de celle des ,, enfans en une respectueuse obéissance, & par ainsi ,, les effets de la puissance paternelle des Romains ,, ne subsistent plus parmi nous.
Mais il n’y a rien de plus clair , ni de plus précis pour la question présente, que ce que dit Mornac, sur la loi 8. dig. De his qui sunt sui juris , vel alieni: cet Auteur rappellant le sentiment des plus célebres Jurisconltes françois, les prejugés des Arrêts , & les maximes de la jurisprudence françoise, s’explique en ses termes; Ex his omnibus constat apud nos , hodiè nullam esse Paternam potestatem; il ajoûte que cette regle a été déclarée avoir lieu dans le pays de Droit écrit , qui est sous le ressort du Parlement de Paris , suivant un Arrêt solemnel rendu in purpuris en I599, prononcé par Mr. le Président Forget , sur un appel du Siége de Lyon : enfin ce même Auteur dit , que sola patriæ potestatis umbra superest in authoritatibus quas præstant Patres filiis ad actûs legitimos.
La coutume de Berry , chapitre premier, article 3 dit , que les enfans de famille devenus majeurs ,, de vingt-cinq ans, & les enfans mariés dans leurs minoritez
des Juges & Jurisdictions.9,, minoritez sont tous indistinctement émancipez de la ,, puissance paternelle , & peuvent disposer de leurs ,, biens, en ce que néanmoins à l’égard des mineurs ,, mariés, ils ne peuvent pendant leur minorité, alié- ,, ner leurs biens immeubles, qu’en observant les for- ,, mes prescrites pour l’aliénation des biens des mineurs.
La coutume de Bourbonnois aussi voisine , article I66. dit , que ,, les mineurs Prêtres ou mariés , sont ,, reputés émancipés , comme s’ils étoient âgés de ,, vingt-cinq ans ,, d’où il s’ensuit nécessairement que c’est une régle dans cette coutume , que l’âge de vingt-cinq ans établit l’émancipation.
Il seroit inutile d’alléguer la coutume de Paris & les autres qui concourent à établir la même dispo- sition & décision : & il suffit entre plusieurs préjugés d’en citer un, tiré d’une sentence par écrit qui est au Greffe de la Sénéchaussée de Gueret, rendüe con- tradictoirement au mois de Juin I67I, au raport de Mr. Pechant habile Conseiller, par laquelle un fils fut débouté d’une demande en enterinement de lettres de récisions qu’il avoit obtenuës, pour être relevé d’une obligation qu’il s’étoit imposé étant âgé de vingt- cinq ans, de payer à sa soeur la somme de 300. liv. pour suplement de dot, quoi qu’il alléguât que l’au- torité de son pere l’avoit obligé de s’engager , afin de faire une plus grosse dot à cette soeur ; ce moyen n’ayant pas été jugé recevable, parce qu’étant éman- cipé de l’autorité paternelle par sa majorité, rien ne l’avoit contraint , & s’étant volontairement obligé,
I0Coutumes de la Marche ,il ne pouvoit se dispenser de payer, ab initio volunta- tis , ex post facto necessitatis.
Il seroit inutile d’oposer à tout ce qui vient d’être dit , que l’article onze de la coutume , portant que ce qui peut être fait par le fils, ne peut préjudicier au pere , cette exception emporte en faveur du pere une reserve des droits de sa puissance paternelle ; car cette explication établiroit une espece de contradic- tion , & d’ailleurs elle est três-oposée aux regles gé- nérales de notre Droit françois , si clairement ci-des- sus établies, par lesquelles il faudroit se determiner s’il y avoit quelque chose d’ambigu dans l’article ; ainsi la reserve faite par cet article ne peut être en- tenduë que suivant la maxime du Droit, resinter alios acta , alteri obesse non potest , suivant quoi il est juste que les Actes que le fils pourroit faire , ne puissent préjudicier aux droits que le pere peut avoir d’ailleurs , après l’émancipation acquise au fils par l’âge de vingt-cinq ans.
Il seroit pareillement inutile d’alléguer le terme d’usufruit, employé dans la Coutume aux articles 84 & 224 , parce qu’on va faire voir , dans l’ap- plication que Me. Jabelly a faite de la puissance pa- ternelle à l’égard desdits articles , de nouvelles er- reurs qu’il est de la dernière importance de relever , afin d’en eviter l’écuëil ; il sera a ce sujet observé.
Qu’en l’année I7I4, il s’éleva une affaire qui donna lieu à quelques Particuliers de former des doutes sur les effets de la puissance paternelle en la
des Juges & Jurisdictions.IIMarche, & le doute étoit fondé sur les termes du pre- sent article onziéme de la Coutume , qui dit , que ,, le jugement obtenu par le fils de famille majeur ,, de vingt-cinq ans, ne peut préjudicier à son pere ,, d’où l’on vouloit conclure que la coutume avoit en- tendu reserver au pere quelque droit & puissance sur la personne & les biens du fils devenu majeur ; ce fut à ce sujet, en ladite année I7I4, que Dame Mar- guerite Segliere de Cressat étant decedée, & ayant laissé pour unique heritier Mr. le Marquis de Canil- lac du Pont du Château son petit fils , avec des terres & biens considerables, dont il entra en possession ; Mr. le Marquis du Pont du Château pere , Sénéchal d’Auvergne, se laissa flâter & inspirer par un mauvais conseil, qui voulut lui faire croire qu’en vertu de la puissance paternelle sur son fils , quoi qu’alors âgé de vingt-sept ans , il avoit lieu d’exercer un usufruit sur les biens maternels advenus au fils , & sur ce mauvais fondement Mr. le Marquis du Pont du Château pere, forma une pretention et entreprit de troubler Mr. le Marquis du Pont du Château fils dans la jouïssance de ses biens ; mais la chose ayant été mise en un ar- bitrage volontaire , porté devant des Avocats du Par- lement à Paris, & examiné en differentes conferences, dont nous pouvons parler avec certitude, puisque nous trouvans pour lors à Paris , & ayant eû l’hon- neur d’avoir dès longtems une rélation d’estime & de confiance avec Mrs. du Pont du Château , il dé- sirerent notre presence aux conferences ; & enfin sur
I2Coutumes de la Marche ,les raisons ci-dessus citées & bien entenduës, on ne ba- lança pas à condamner la pretention de Mr. le Marquis du Pont du Château pere , & proscrire la fausse idée de la puissance paternelle ; & en effet il fut même à ce sujet cité un usage incontestable, pratiqué dans tout le ressort de la Sénéchaussée de Guéret , suivant lequel, il n’y avoit pas eû d’exemple d’aucun exercice de la pretenduë puissance paternelle de la part des peres sur leurs enfans majeurs , & même pour justi- fier cet usage certain , on raporta des actes de Noto- riété de toutes les Jurisdictions Royales de la Pro- vince de la Marche, faisant foi que la majorité des enfans leur accorde de droit une émancipation cer- taine , par le moyen de laquelle lesdits enfans ma- jeurs se trouvent en droit & faculté de joüir de leurs biens maternels ou aventifs , sans que le pere survi- vant puisse rien pretendre aux fruits & revenus des biens desdits enfans ; ainsi c’est donc mal à propos , & dans le deffaut de connoissance du droit & de l’u- sage, que Me. Jabely a formé à cet égard dans son commentaire, sur led. article onziéme , une opinion differente , & il est tombé dans le même deffaut sur l’espece de l’Arrêt par lui cité sur le même article, rendu le I6 May I689 , au rapport de Mr. Huguet.
L’espece de cet Arrêt qui est parfaitement connuë sur les lieux, étoit que la Dame Françoise de Males- set ayant de son chef des biens maternels dont les revenus étoient considerables, & le Sr. de Malesset, Seigneur de Châtellus son pere , ayant joui desdits
des Juges & Jurisdictions.I3revenus pendant quelques années, depuis la majori- té arrivée à ladite Dame de Mallesset , celle-ci se crût fondée à former une demande en redition de compte desdits revenus contre la Dame Magdelaine de Mal- lesset sa soeur aînée, avant de parvenir au partage de leurs biens communs paternels , mais la soeur aînée opposa à cette pretention , que ladite Françoise Mal- lesset puisnée ayant été nourrie , élevée , & entrete- nuë aux frais du Seigneur de Châtellus son pere en sa maison , durant le même tems qu’il avoit joui des re- venus échûs à sa fille pendant sa majorité , il y avoit lieu à une compensation legitime, du moins jusques à dûë concurrence , d’autant plus qu’il fut établi au procès , que les fruits & revenus maternels apparte- nans à ladite fille puisnée, étoient beaucoup plus que suffisans pour subvenir à sa nourriture & entretiens, & que dès lors le Seigneur de Châtellus pere, qui étoit lors de sa jouissance officier distingué au service du Roy , & chargé en cette qualité de plusieurs depen- ses, n’avoit pas dû être tenu à la rigueur de compter de la totalité desdites jouissances, & que la compen- sation proposée étoit legitime; & en effet l’Arrêt cité de I689 admit la compensation des frais desd. nour- ritures & entretiens , à estimation d’experts , sur les revenus des jouissances faites par ledit Seigneur de Châtellus, sous l’offre que fit la Dame de Mallesset soeur aînée de compter de l’excedent si aucun se trou- voit desd. revenus, après une estimation qui en seroit faite par les mêmes experts.

I4Coutumes de la Marche ,On voit de là de quelle importance il est de ne point citer legerément des arrêts, à moins d’être bien éclairci des faits & circonstances.
On pourroit même dans ce cas particulier faire at- tention que cet Arrêt de I689, est un prejugé formel contre la pretention trop hazardée de Me. Jabely sur la pretenduë puissance paternelle , par lui admise au delà de la majorité des enfans , puisque la Dame de Mallesset soeur aînée ne s’avisa jamais au procès de exciper de ce moyen erroné , & au contraire fit des offres de rendre compte des revenus maternels perçûs par le pere , dès la majorité de sa fille.
A l’égard de l’usufruit accordé au pere sur les biens maternels & aventifs de ses enfans , que Me. Jabely s’est avisé d’adopter pendant tout le vivant du pere , en son commentaire sur ledit article onziéme , page onze , sur le mot préjudicier , fondé sur les articles citez 84 & 224 de la Coutume; c’est encore une grande & nouvelle erreur de la part dudit Me. Jabe- ly , qu’il est très-necessaire de relever.
Il est de consquence d’observer ici que les Redacteurs de la Coutume de la Marche se sont appliquez à re- diger les titres & chapitres de ladite Coutume par matieres differentes & distinguées , & cela dans une bonne vûë, & étude utile, en traitant dans le même titre de ce qui en doit faire la matiere, afin d’éviter autant qu’il se pourroit toute confusion , & par cette observation aisée à verifier sur les articles de la Cou- tume, on voit que dans le titre ou chapitre I2 , dans
des Juges & Jurisdictions.I5lequel est couché l’article 84 ci-dessus cité , ces Re- dacteurs ont eu intention de traiter du bail des Mi- neurs entre Nobles & tutelle des Roturiers , & de renfermer dans le même titre tout ce qui concerne l’administration des biens des enfans Mineurs, & de même, le titre ou chapitre I9 de la meme coutume, sous lequel est couché l’article 224 ci-dessus cité , s’est borné à traiter & à établir des loix municipales sur tout ce qui concerne les matieres de testamens , successions testamentaires, & partage des biens.
Ce sont en effet les deux articles 84 & 224 de no- tre coutume qui parlent de l’usufruit du pere sur les biens maternels & aventifs de ses enfans; il est donc sensible par cette observation importante que l’appli- cation dudit article 84 ne doit avoir son effet, que pour l’administration des biens & personnes des Mi- neurs durant leur minorité , & par consequent que les termes de cet article qui disent , que ,, le pere est ,, legitime administrateur des biens aventifs de ses en- ,, fans & fait les fruits siens,, (sans autre explication) ne peuvent jamais s’étendre au delà du tems de la majorité desdits enfans , & ce qui ne sçauroit à cet égard former aucun doute, est que l’usage certain & toujours pratiqué en la Marche, est,, qu’il n’y a point ,, d’exemple que les peres ayent jamais pretendu por- ,, ter l’usufruit à eux accordé sur lesdits biens de leurs ,, enfans Mineurs au delà de leur majorités , qui fait ,, cesser de droit ledit usufruit.
On a aussi admis dans l’usage de notre Coutume
I6Coutumes de la Marche ,de la Marche, que le mariage des enfans Mineurs fait du vivant & consentement de leur pere , forme une émancipation suffisante au profit desdits enfans , qui les autorise à une jouissance de leur chef de leurs biens maternels & aventifs; cela ne fait plus de difficulté dans la Province , & les Sentences & Jugemens s’ac- cordent à cette maxime , qui est en effet conforme aux coutumes voisines de Berry, Bourbonnois & An- goumois.
C’est dans ces circonstances qu’on ne veut pas échaper de dire à l’égard de la contestation dont on a parlé ci-devant, arrivée entre Mr. le Marquis du Pont du Château pere, & Mr. son fils , que c’est sans raison que quelques particuliers de la Province étant mal informez, ont voulu tirer consequence d’une transaction passée à Paris en la même année I7I4 , entre le pere & le fils, par laquelle celui-ci constitua et promit de payer à son pere sa vie durant , une pension viagere de la somme de trois mille livres , d’où on a voulu inferer que cette pension étoit le prix du desistement fait par le pere de sa pretention; mais on peut assurer hardiment que ce ne fut jamais là le motif de cette pension ; & en effet la veritable cause fut , que feu Mr. le Comte de Canillac, Com- mandant des Mousquetaires, ayant entrepris de faire le mariage d’entre Mr. le Marquis du Pont du Châ- teau fils son neveu, avec Mlle. Ferrand ; qui étoit un parti avantageux & considerable , Mr. le Marquis du Pont du Château qui s’accordoit souvent peu de sentimens
des Juges & Jurisdictions.I7sentimens avec Mr. le Comte de Canillac son frere , refusa constament de donner son consentement à ce mariage , à moins que Mr. son fils ne lui fit quelque part des revenus des biens à lui advenus de la Dame Segliere son ayeule , & ce consentement ayant été ménagé & accordé par le moyen de la pension de trois mille livres , cela fit cesser les differens dans la famille , & le mariage fut fait & accompli.
Il reste à present à dire un mot sur l’article 224 de la Coutume par rapport à la disposition de l’usufruit dont il est parlé en faveur du pere , à l’égard du quel me. Jabely a continué sa même erreur , en le fon- dant sur la puissance paternelle; car outre la remarque ci-dessus faite , que ledit article 224 est couché dans le titre des successions ; il s’agit en effet d’un usufruit de succession arrivé dans un cas casuel, accordé par la coutume, au pere survivant son fils, par forme de dedommagement de la perte de ce fils & in sola- tium luctûs.
Mais ce qui fait voir que c’est là le vrai motif de la Coutume , ce sont les termes précis du même ar- ticle 224, où il est dit que ,, l’usufruit ne se perd par ,, le trépas du fils ,, & en effet il demeure conservé au pere sa vie durant, ce qui fait bien voir la fausse idée de Me. Jabely de tirer cet usufruit de la puissance paternelle, puisque quand même cette puissance au- roit lieu en la Marche, ce qui n’est pas, elle ne pour- roit s’étendre , & être prorogée au delà de la vie de l’enfant, puisque l’usufruit dont il est ici question dure
I8Coutumes de la Marche ,toute la vie du pere , nonobstant qu’il aye convolé ou convole ensuite , sans faire inventaire, en quoi il est fort different de celui dont il est parlé en l’article 84 , qui ne dure qu’autant que dure la juste admi- nistration du pere.


CHAPITRE SECOND. Des Sergens & autres Ministres de Justice & Ajournemens.
Article Douze.
SI Sergent ou Officier d’aucune Justice prend un mal- faicteur , & il s’avoue homme justiciable de Madame sans moyen , le Juge de madite Dame le pourra prendre en sa main & le justicier , si celui qui l’avoit pris ne veut maintenir l’avoir pris en present méfait ou de chaude suite prouvés pardevant le Juge de madite Dame , sera renvoyé le prisonnier pardevant le Juge subalterne qui l’avoit pris , pour étre puni.
Article Treize.
On ne doit ajouter foi aux ajournemens que l’on dit fait par les Sergens , & ne sont crûs de leur exploits , s’ils ne sont temoignés d’un ou deux témoins.
Article Quatorze.
Un ajournement fait le jour ferié à jour ferié ou non ferié est bon & valable.
Article Quinze.
En matière criminelle les ajournemens personnels &
des Sergens & autres Ministres , &c.I9autres sur défaut en cas de ban , doivent être du moins de huitaine sans compter le jour qu’ils sont faits , & de l’as- signation , qui sont huit jours francs , sinon que le Juge pour aucune cause à ce le mouvant les dût abreger ou prolon- ger , sans préjudicier au privilege des Clercs.
Article Seize.
Tous ajournemens simples faits pardevant Châtelains ou Juges inférieurs , se peuvent faire par les Sergens , sans Commission ni mandement de Juges , par écrit ou de bou- che , à la requête de partie ; mais pardevant le Sénéchal & Bailly du païs y faut commission par scel & par écrit , & aussi en tous Exploits formels pardevant tous Juges.
Article Dix-sept.
Lesdits ajournemens en cas de ban seront faits ès do- miciles des absens , si aucuns en ont , en la jurisdiction du Juge qui les décernera ; & outre , à cry public ès lieux accoutumé de faire cris en la jurisdiction du lieu du delit ; & ce fait seront appellés en jugement aux lieux & jours assignés : & s’ils n’ont domicile en la Jurisdiction, suffit faire les ajournemens par cry public au lieu du délit , en la place où les cris ont accoutumé être faits , & en faisant appeller la cause en jugement au jour assigné , tels ajour- nemens seront valables en haine des défaillans.
 

20Coutumes de la Marche ,
CHAPITRE TROIS. Des Renvois.
Article Dix huit.
LE sujet qui fait faux aveu pour avoir son renvoi doit estre condamné en l’amende de soixante sols en- vers son Seigneur Justicier , & en tous les interêts & dommages de Partie.
Article Dix-neuf.
Si le Seigneur demande renvoi de son sujet en matiere criminelle , & est trouvé que faire se doive , il doit payer les frais de Justice faits par-avant ledit renvoi en la Ju- risdiction du premier Juge , & en lui baillant les charges informations.
Article Vingt.
Si en ladite matière criminelle le Défendeur ès cas où il lui est permis de soi demander le renvoi , sans son Sei- gneur , & est trouvé comme dessus , que faire se doive : l’on doit signifier la réquisition au Seigneur Justicier pour requerir son homme , & payer les frais dedans dix jours , & s’il y faut le premier Juge en peut connoître , sinon que le requérant soy veüille faire conduire à ses dépens , & payer.
Article Vingt-un.
Si plusieurs Seigneurs demandent le renvoi d’un cri- minel sans fraude , le Superieur ou celui qui en aura con- nu en peut retenir la connoissance , sans préjudice des droits des Parties.

des Renvois.2IArticle Vingt-deux.
Tout homme d’Eglise ou autre trouvé en la jurisdiction d’aucun Juge peut être ajourné devant le Juge lay , sur vé- rification & reconnoissance de son seing manuel , & ne doit être delaisse ou renvoyé , qu’il ne reconnoisse ou nie , sans préjudice de ses droits , & ladite reconnoissance faite doit être renvoyé pardevant son juge.
Article Vingt-trois.
Le Forain convenu à jour de marché pour la marchan- dise faite ledit jour , ou pour le prix d’icelle , n’a point de renvoi , ni pareillement le délinquant en plein marché s’il est pris en flagrant-délit.
Article Vingt-quatre.
Le Procureur de Madame est reçû sans le consentement du sujet , sans moyen , à demander renvoi ou delaisse- ment dudit sujet , convenu pardevant les Juges inferieurs de la Marche , aussi est ledit sujet sans moyen , sans ledit Procureur.
Article Vingt-cinq.
Celui qui est convenu pardevant les Juges de Madame ou autre Juge subalterne , n’est renvoyé sans aveu de son Seigneur justicier ou de son Procureur.
Article Vingt-six.
Si le Procureur fiscal empêche le renvoi sans cause rai- sonnable , il doit être condamné ès dépens de partie en son privé nom.


22Coutumes de la Marche ,           :       
CHAPITRE QUATRE. Des Procureurs.
Article Vingt-sept.
LE mari pour les biens aventifs de sa femme ni au- tres, posé qu’il soit conjointe personne , n’est reçû com- me Procureur s’il n’a procuration & charge de la partie ; néanmoins le mari pour les meubles , & conquêts & biens dotaux de sa femme peut agir et être convenu sans procuration de sadite femme.
Article Vingt-huit.
Chacun est reçû en matière civile à plaider & compa- roir par Procureur, sinon que par le Juge autrement en fut ordonné.
Article Vingt-neuf.
Le Procureur qui a contesté cause est tenu de passer outre & prendre appointement sur peine d’amende.


CHAPITRE CINQ. Des Assuremens.
Article Trente.
AJournement en matiere d’assurance se peut faire par Sergent sans commission par écrit ni mande- ment de Juge , & suffit qu’il soit fait à la requête de partie.
Article Trente-un.
En matière d’assuremens les parties sont tenües com-
des Assuremens.23paroir en personne ou en lettres de procuration expresse au cas , jusques à ce que la comparoissance personnelle par le Juge autrement en soit ordonné.
Article Trente-deux.
Infraction d’assurement emporte la hart , tellement que celui qui est convaincu l’avoir enfraint en corps doit être puni en peine corporelle , ou autrement à la discretion du Juge ; & s’il est enfraint en biens , la peine est arbitraire.
Article Trente-trois.
En matiere d’assurement le Demandeur au jour de l’assignation sera tenu affirmer par son serment la doutance pardevant le Juge , & le Défendeur est tenu bailler ledit assurement au Demandeur & par serment , & s’il veut jurer doutance de sa part & requiert assure- ment , il l’aura sans autre ajournement.
Article Trente-quatre.
L’assurement est reputé enfraint , si celui qui a fait faire l’ajournement en cas d’assurement a été outragé par l’ajourné depuis ledit ajournement.
Article Trente-cinq.
Pour obvier aux vexations , l’on ne pourra demander assurement qu’une fois en l’an entre même parties , néan- moins s’il ne le demande après l’an l’assurement est per- petuel , sinon que l’on s’en soit départi.
Article Trente-six.
Si la partie ajournée en cas d’assurement fait défaut , le Juge par vertu d’icelui peut ordonner prise de corps ,
24Coutumes de la Marche ,si l’ajournement est fait à personne , & aït délai compe- tant pour comparoir : mais si ledit ajournement est fait seulement à domicile devant que le Juge puisse decreter prise de corps , par vertu dudit défaut , & requis qu’il y aït information suffisante pour montrer que celui qui demandoit l’assurement a été offensé ou menacé , & par ce moyen qu’il a juste cause de demander ledit assurement.

     :            
CHAPITRE SIX. Des Notaires & Tabellions.
Article Trente-sept.
LEttres non perpetuelles , comme obligations , loüages & autres ne se peuvent regrossoyer sans autorité de justice , & Partie qui y a interest appellée.
Article Trente-huit.
Tous Notaires sont tenus , sur peine d’amende arbi- traire , de faire protocole des lettres perpetuelles par eux reçûes.
Quoique la coutume de la Marche dans la forme qu’elle prescrit pour faire un testament , n’aye pas compris celle de le faire pardevant deux Notaires, néanmoins il est sans difficulté que cette forme de tester passe dans l’usage de cette coutume pour une forme solemnelle , parce qu’on présupose qu’un des deux Notaires tient la place de deux temoins.
Le testament de Dame Catherine Bourgeois a été constesté
des Notaires & Tabellions.25contesté par Dame Valerie Bourgeois sa soeur & son heritiere, sur ce que les deux Notaires qu’elle avoit employez pour rediger , l’un d’eux en presence de l’autre, son testament d’elle signé , étoient freres, quoique veritablement Notaires Royaux établis dans la Ville de Gueret, où le testament avoit été fait.
L’Heritiere voulut bien d’abord passer condamna- tion pour les legs pieux portez par le testament ; mais à l’égard des autres legs , notament un de six mille livres fait à des particuliers nommez Dumas parens de la Testatrice, qui ne venoient pas à sa succession, elle les soutint nuls, fondée sur la disposition des Ordonnances , qui declarent nuls les testamens faits par un Curé ou son Vicaire , qui employent pour temoins leurs parens ou alliez au premier degré, ce qui a été étendu aux Notaires, & partant que la pro- ximité de l’un des Notaires qui tenoit lieu des deux temoins avec l’autre Notaire qui instrumentoit en cette qualité , emportoit la nullité de cet acte.
La cause portée pardevant le premier Juge après les deffenses fournies, les Dumas legataires pour ap- puyer le testament , alléguerent que lors de l’inven- taire fait après le decès de la Testatrice, il s’étoit trou- vé parmi ses papiers un testament tout écrit de sa main, non toutes fois signé , qui étoit entierement conforme à celui que les Notaires avoient signé avec la Testatrice, en sorte que par l’inspection il paroissoit que celui-ci avoit été entierement transcrit sur celui là, & ils demenderent que cette piece fut raportée;
26Coutumes de la Marche ,& produire , le Juge l’ordonna , & l’heritiere appella de ce jugement.
Il est vrai-semblable que si sans apeller, ni aquie- scer , elle eut laissé raporter cette piece , le Juge qui ne l’avoit ordonné que pour instruire sa religion , & à telle fin que de raison , n’y auroit pas eu dans la suite grand égard; mais l’Apellante s’étant pourvûë en la Cour , & y ayant fait intimer les Dumas , elle proposa pour moyens d’apel , que de disposition de droit ; Frustrà admittitur probandum , quod probatum non relevat , qu’il étoit constant que la piece dont on avoit ordonné le raport, étoit de soy nulle , inutile , & par consequent incapable de produire aucun effet, que cent pieces qui de soi étoient nulles , ne pour- roient de droit , sur tout en matiere de testamens qui sont de droit étroit, & civil , faire toutes en- semble un acte valable ; elle ajoûta plusieurs autres moyens pour établir la nullité du testament passé par les deux Notaires freres.
Cependant la chose bien discutée de part & d’au- tre , la Cour par un arrêt contradictoire confirma le jugement du premier Juge , devant lequel elle ren- voya les Parties pour son execution , & condamna l’Apellante aux depens.
Ensuite de cet arrêt la piece énoncée en l’inven- taire fut raportée, & verifiée être écrite de la main de la Deffunte , non toutes dois signée, ni d’elle , ni de personne ; l’Heritiere repeta tous les moyens qu’elle avoit deduits en la Cour ; les Dumas repon-
des Notaires & Tabellions.27dirent que la Cour ne les avoit pas jugé bien fondez, & qu’elle avoit préjugé en connoissance de cause, que la piece écrite de la main de la Testatrice, inserée de mot à mot dans le testament signée d’elle , passé pardevant les Notaires devoit être consideré comme un seul & même acte avec le testament , qu’elle ren- doit parfait nonobstant la proximité des Notaires, de même que si c’étoit un testament olographe.
Le Juge quoi qu’à considerer la question dans la these, par raport à la nullité du testament qui resul- toit de la proximité des Notaires freres , fut du sen- timent d’y avoir égard, néanmoins il la regarda dans l’hipothese , & pressé par le préjugé de la Cour, après avoir raisonné sa sentence definitive , il la rendit en faveur des legataires ; & leurs fit délivrance du legs, avec depens.
L’Heritiere apella une seconde fois à la Cour , & par un autre arrêt contradictoire la sentence fut con- firmée , & on ne raporte ici ces arrêts rendus entre les Parties qui se regloient par la coutume de la Mar- che, que pour observer qu’ils ont dependu des cir- constances , & que l’on n’en peut pas induire en ter- mes généraux que la Cour, hors l’hipothese, eut vou- lu autoriser un testament passé pardevant deux No- taires freres, & c’est ainsi qu’il faut souvent conside- rer les arrêts qu’on opose , sur tout quand ils sont sin- guliers : on fera ci-après mention d’autres arrêts ren- dus dans notre coutume , qui ont mis les choses dans l’ordre des maximes générales.

28Coutumes de la Marche ,Au reste la derniere Ordonnance du Roy Louis XV, de l’année I735, ( qu’on trouvera ci-après, ) ayant été faite expressement pour la matiere des tes- tamens, a suffisament pourvu, soit du côté des for- mes, soit du côté du fonds, aux incidens prévûs & à prévoir concernans les dispositions à cause de mort, sans que nous nous arrêtions d’avantage , ni en fassions ici aucune repitition.
Article Trente-neuf.
Lesdits Notaires doivent inserer en leurs Notes & Lettres qu’ils reçoivent le lieu auquel ils les reçoivent , autrement lesdites Lettres sont reputées , écriture pure privées , & auront les Parties interessees par faute de ce que, dit est , leurs recours contre lesdits Notaires , de tous leurs depens , dommages & interests.
Article Quarante.
Lesdits Notaires doivent connoître les témoins qu’ils inserent pour presens en leur Notes ou lettres , sous peine d’amende arbitraire.


CHAPITRE SEPT. Des Dilations.
Article Quarante-un.
JUges peuvent arbitrer tous délais en toutes instances pendantes pardevans eux , selon la qualité des person- nages & matiere dont est question.

des Delitations.29Article Quarante-deux.
En causes d’apel , en surcéance de sequestre , en recréan- ce , en reproche de témoins & autre choses incidentes , en un procès, n’y a qu’un seul delai de faire enquête : en action personnelle non excedant dix livres , n’y a que deux délais de faire enquête : en Procès ordinaires, y a trois delais de faire enquête , & le quart avec connoissan- ce de cause , & non plus ; & sont les delais communs aux Demandeurs & Defendeurs, & à la derniere se doit fai- re production de Titre , & prendre delai de bailler con- tredits.
Article Quarante-trois.
Le delai à déliberer d’être héritier d’aucun est arbi- traire , ayant égard à la qualité des parties & distance des lieux , & en telle instance il n’y a point de renvoi.

                 
CHAPITRE HUIT. Des Deffaux , Contumaces & Amendes.
Article Quarante-quatre.
EN vertu de quatre deffaux bien continués, données con- tre un ajourné en cas d’excès, visis informationibus, l’on peut proceder à la sentence définitive sans recoler l’information.
Article Quarante-cinq.
En matiere d’execution de meubles , adjudication de decret , matieres de nouvelleté & autres pessessoires , en- terinement de Lettres Royaux pour omission de procès ,
30Coutumes de la Marche ,re integrâ, verifications de cedules , cessions de biens, inhibitions & deffenses , plainte de tortionnaire execution ; le deffaut obtenu en vertu d’ajournement bien temoigné emporte re integrâ gain de cause & è contrà.
Article Quarante-six.
En matiere Civile par quatre deffaux dûément conti- nuez le Juge peut proceder à sentence difinitive , & ad- juger au demandeur ses fins & conclusions , s’il lui apert du contenu en la demande par lettres ou temoins ; & si le demandeur ne peut prouver sa demande par lettres ou temoins , en ce cas contre la partie defaillante pourra prendre commission , pour lui déferer ou referer ; & si contre la partie ajournée obtient deffaut , en ce cas sera crû par serment du contenu en sa demande.
Article Quarante-sept.
Après contestation de cause , ou que les parties ont une fois comparu , si l’une tombe en deffaut , le deffaut em- porte tel profit ; c’est à sçavoir , que le defaillant est for- clos de faire ce qu’il devoit faire le jour de l’assignation , & condamné és depens du deffaut.
Article Quarante-huit.
En toutes matieres le demandeur est tenu de montrer de l’assignation precedente , pourtant procedera par ecrit s’il en est requis par le deffendeur, autrement le deffendeur doit avoir depens & la Cour deffaut , qui emporte sept sols ; & neanmoins est tenu le deffendeur comparoir à l’assise en- suivant, & si le demandeur ne compare & fasse aparoir du jour , le deffendeur aura congé , qui emporte absolution de
des Deffaux , Contumaces , &c.3Il’instance , condamnation de depens , & l’amende du prin- cipal à la Cour.
Article Quarante-neuf.
En matiere de reintegration par Lettres Royaux ou autrement , le demandeur par vertu du premier deffaut peut faire aparoir de sa spoliation au Juge , & ce fait sans autre réajournement , le Juge peut proceder à ladite réintegration.
Article Cinquante.
La demande en toutes matieres doit être inserée dedans le premier deffaut , ou attachée à icelui , pour juger ledit deffaut ou les autres subsequens , autrement le Juge n’y doit avoir égard , & ne sont les deffaux reputez bien ob- tenus.
Article Cinquante-un.
Tous deffaux & congez soient obtenus contre le deman- deur ou deffendeur emportent depens , soit avant contes- tation de cause ou après, & sont préjudiciaux contre le de- mandeur, & executoires contre le deffendeur.
Article Cinquante-deux.
Congé ou deffaut en cause d’apel obtenu par l’intimé contre l’apellant où il n’y a anticipation, emporte gain de cause re integrâ ; mais à l’apellant contre l’intimé faut deux deffaux: tellement que si ledit intimé est tombé au premier deffaut & réajourné il veut proceder , il doit être reçû en refondant les depens du premier deffaut s’il est bien obtenu.

32Coutumes de la Marche ,Article Cinquante-trois.
Et à l’intimé contre l’apellant où il y a anticipation , faut deux deffaux pour obtenir gain de cause , soit en as- sise ou dehors.
Article Cinquante-quatre.
Quand les parties relatent d’être d’accord en matiere pure civile ou autre; pour laquelle on a accoutumé avoir amende certaine , qu’on apelle l’amende de la Cour , l’a- mende doit être déclarée par main commune , sauf l’ac- cord ; & si en la matiere de laquelle les parties ont apoin- té l’amende , eût été arbitraire , le Juge doit juger l’a- mende sur celle des parties qu’il appartiendra , vû par lui ledit accord & merite du procès.
Article Cinquante-cinq.
Pour ce qu’en diverses Cours dudit païs y a diversité de taxe d’exploits & émolument de Cour , comme deffaux , amendes de sequestre, amendes en matieres Civiles & au- tres ordinaires, les Juges des Seigneurs Justiciers en useront en leurs consciences comme ils devront ; mais où ils sera question d’amende arbitraire , ils la jugeront & taxeront par même Sentence , afin que la partie condamnée puisse acquiescer ou apeller.


des Recusations baillées contre les Juges.33     :            
CHAPITRE NEUF. Des Recusations baillées contre les Juges.
SJ
Article Cinquante-six.
SI la partie recuse le Juge soit ordinaire ou delegué, & les causes de recusation soient impertinentes ou notoirement fausses , il se peut declarer Juge competant , mais autre- ment il doit superseder & bailler arbitres de droit pour connoître d’icelles , & leur presiger temps pour ce faire : & si dedans ledit tems à eux ordonné elles ne sont jugées , & que la partie recusante soit negligente de les faire vui- der, le Juge recuse peut passer outre;; si les causes de recu- sation sont trouvées non veritables , le recusant doit être condamné par lesdits arbitres en tous les dépens , dom- mages & interêts de partie, pour la retardation du procès, & à l’amende arbitraire envers le Seigneur , pour l’in- jure faite à son Officier.


CHAPITRE DIX. Des Objets & Reproches de Temoins.
Article Cinquante-sept.
OBjets de fait se doivent bailler avant rapport ou publication d’enquête.Article Cinquante-huit.
Juges ne doivent appointer à faire enquête sur repro-
34Coutumes de la Marche ,ches sans premier avoir vû tout le Procès , & jugé si les faits sont recevables.
Article Cinquante-neuf.
Objets concernans crime ou infamie pour debouter du tout le temoin en matiere Civile ne sont recevables , qui ne fait apparoir de condamnation ou composition d’amen- de , ou s’ils ne sont totalemnt notoires.
Article Soixante.
En matieres criminelles tous objets sont arbitraires.
Article Soixante-un.
Roproches de temoins examinez sur reproches ne se doi- vent admettre sans grande connoissance de cause.
Article Soixante-deux.
Objet que le temoin est excommunié n’a point de lieu en Cour Laye ; aussi n’ont lieu objets generaux sans spe- cifier le cas.
Article Soixante-trois.
Combien que par ci-devant les Parties n’eussent publi- cation de leurs enquêtes , ains seulement de celles de leurs Parties adverses , toute fois pour le bien du païs , a été avisé par lesdits Etats , que doresnavant les Parties au- ront publication de leurs enquêtes , comme ils avoient de celles de leurs Parties adverses , & que tant en matieres provisionnelles qu’és matieres de fournissement , surcéance de sequestre, d’alimens, médicamens , de douaires , da- tion de tutelles, matieres criminelles , & aussi en autres incidens qui ne sont decisifs des matieres principales , pu-
des Objets & Reproches de Temoins.35blication d’enquête n’aura lieu , ni aussi reproches de temoins ; mais si l’enquête faite esdites instances & ma- tieres est employée à la matiere principale , les temoins desdites enquêtes pourront être reprochez aud. principal, & seront lesdites enquêtes publiées.

     :            
CHAPITRE ONZE. Des Cessions de biens, & des Respits d’un & cinq ans.
Article Soixante-quatre.
CElui qui veut faire cession des biens doit comparoir judiciellement en personne , & ne la peut faire par Procureur , & doit faire serment solemnel pardevant le Juge qu’il ne fait ladite cession pour frauder ses Créanciers, ne fait aucune aliénation pour les decevoir, indiquera & fera exhibition de ses biens à ses Créanciers , si requis en est , & que s’il vient à meilleure fortune de biens il satis- fera; & ce fait en signe d’abandonnement de ses biens , se doit desceindre et jetter sa ceinture à terre.
Article Soixante-cinq.
Le Juge après la cession ainsi faite doit bailler Curateur aux biens à la requête des Créanciers.
Article Soixante-six.
Respits à un ou cinq ans n’on point de lieu contre les condamnez en Cour Laye , soit par constitution de Procu- reur , ou pleine connoissance de cause. N’ont aussi lieu con- tre le mari poursuivant le dot de sa femme , ni contre la femme poursuivant la restitution de dot & payement
36Coutumes de la Marche ,de douaire , & pareillement n’ont lieu où l’Impetrant auroit denoncé à l’impetration d’iceux.
Article Soixante-sept.
Receveurs , Locateurs , Fermiers ou Accenseurs ne se peuvent aider de respits à un ou cinq ans contre leurs Maî- tres ou Seigneurs, si n’est que depuis leurs obligations pas- sées trois ans fussent échûs.
Article Soixante-huit.
Achetteurs d’aucune marchandise qui encore l’ont en leur puissance , ne se peuvent aider de respit.
Article Soixante-neuf.
Redevables de censive , rente ou perciere , taille fran- che ou serve , ou autres droits Seigneuriaux , ne se peu- vent aider de respits contre ceux à qui le doivent.
Il est aisé de voir par les dispositions des articles qui composent les chapitres ci-dessus , & une partie des precedens , qu’il seroit inutile de s’artêter à y faire des notes & observations , d’autant que presque toutes les matieres qui font l’objet desd. articles, ont été depuis reglez par les Ordonnancee du Roy , ser- vant à cet égard de loy par tout le Royaume.

           :       
CHAPITRE DOUZE. De Bail de Mineurs entre Nobles, & tutelle de Roturiers.
Article Soixante-dix.
ENtre Nobles Bail de Mineurs a lieu en la Marche au pere & la mere seulement, si ladite mere est âgée de 

de Bail de Mineurs entre Nobles & tutelles.37vingt-cinq ans ; & si ledit Mineur n’a pere ou mere au dessous de vingt-cinq ans , lui doit être pourvû du Tuteur ou Curateur par le Juge , appellés les parens , tant du cô- té paternel que maternel.
Article Soixante-onze.
S’il y a frere du côté paternel en âge de vingt-cinq ans, & aussi la mere au temps du trépas de son mari est moin- dre de vingt-cinq ans, le frere sera preferé à avoir le Bail de ses freres Mineurs & en bas âge avant la mere.
Article Soixante-douze.
La mere ayant le Bail de ses enfans Mineurs , s’il y a filles , elle ne les peuvent marier sans appeller des prochains parens du côté paternel , pour le moins jusques au nombre de quatre , autrement est amendable , & si perdra son bail.
Article Soixante-treize.
Bail de mineurs entre Nobles , dure quant aux mâles jusques à quatorze ans , & quand aux filles jus- ques à douze ans , & à semblable temps finit la tutelle des non Nobles.
Article Soixante-quatorze.
Celui ou celle qui prend Bail de mineurs fait tous les fruits des heritages du mineur siens durant ledit Bail. Et s’il y a Estangs , Bois-taillis ou autre revenu , il les peut pêcher , couper & prendre le profit selon les saisons & an- nées que le deffunt les avoit accoutumé ou devoit prendre, & l’usage du païs.

38Coutumes de la Marche ,Article Soixante-quinze.
Celui qui a le Bail doit entretenir les heritages du mi- neur , & à la fin de ladite garde rendra lesdits heritages en bon & suffisant état. Et si le dit Baillistre depopule ou empire lesdits heritages , il doit perdre le Bail , & aud. cas doit être pourvû de tuteur audit mineur; & nean- moins sera ledit Baillistre tenu envers le mineur en tous dommages & interêts , provenus à cause de ladite depo- pulation & empirement.
Article Soixante-seize.
Celui qui prend Bail doit rendre quite la terre du pu- pille , le nourrir & alimenter selon l’état des par- ties , payer ses dettes personnels , restituer les meubles qui seroient trouvez au tems du Bail , dont il est tenu faire inventaire en lui delivrant le Bail.
Article Soixante-dix-sept.
S’il n’y a qui veuille prendre Bail ou à qui il appar- tienne, le Juge doit bailler tutelle.
Article Soixante-dix-huit.
Entre Roturiers & non Nobles n’a point de Bail.
Article Soixante-dix-neuf.
Combien que le Baillistre en qualité de Baillistre ne soit capable soit en demandant, ou en deffendant , agir ou deffendre en matiere petitoire ; toutefois en la qualité de tuteur ou legitime administrateur , pourra agir & deffendre esdites matieres réelles & petitoires.

de Bail de Mineurs entre Nobles & tutelles.39Article Quatre-vingt.
Si Gentilhomme prend en mariage femme roturiere , elle anra après la mort du pere le Bail de ses enfans mi- neurs , & jouira du privilege de Gentile-femme tant qu’elle demeurera veuve.
Article Quatre-vingt-un.
Femme ayant Bail le perd si elle se remarie.
Article Quatre-vingt-deux.
Entre Roturiers francs ou serfs , tutelle de mineurs doit être baillée par Juge competant à mineurs ; c’est à sçavoir à la fille moindre de douze ans , & au mâle moindre de quatorze ans.
Article Quatre-vingt-trois.
La mere âgée de vingt-cinq ans est préferée au frere en la tutelle de ses enfans mineurs , & le frere aîné âgé de ving-cinq à tous autres parens, fors à l’ayeul pa- ternel , s’il est en vie.
Article Quatre-vingt-quatre.
La mere & tous autres tuteurs testamentaires & legi- times se doivent donner & confirmer par Juge competant, & sont tenus tous tuteurs & tuteresses, & legitimes ad- ministrateurs faire inventaire dedans quarante jours , & avant qu’eux entremettre en l’administration , sur peines d’amendes arbitraires , excepté le pere qui est legitime administrateur des biens adventifs de ses enfans , & fait les fruits siens, & n’est tenu faire inventaire s’il ne se re- marie ; mais s’il convole à autres nôces , est tenu avant
40Coutumes de la Marche ,le mariage faire inventaire sur peine d’être privé de l’usu- fruit qu’il a és biens maternels ou adventifs de ses enfans.
Par nos observations ci-dessus sur l’article onze , nous avons crû avoir établi la façon dont se doit en- tendre l’usufruit accordé au pere par le present article 84, qui ne doit durer que pendant la minorité des enfans.
Mais pour le démontrer plus amplement , nous croyons devoir étendre ici un peu plus nos observa- tions faites sur l’article onze, & nous croyons qu’on voudra bien nous pardonner quelques repetitions en faveur de l’importance de la matiere , qui demande de n’oublier rien pour lever les doutes & faire cesser les objections.
Nous avons dit que c’est une regle que les articles qui sont couchez sous un même titre ou chapitre doi- vent être ordinairement entendus , se raporter aux matieres desquelles il est traité dans le titre ; l’article 84 dont il s’agit est compris sous le titre de Bail de Mineurs entre Nobles & tutelles de Roturiers ; le mot Bail , est ici pris pour le mot Garde, ce sont deux synonymes qui ne signifient en cette occasion que le droit qu’on le pere & la mere Nobles en cette coutu- me & le pere , mere , ayeul & ayeule en la coutu- me de Paris de prendre , s’ils le veulent, l’adminis- tration des personnes & biens de leurs enfans mineurs.
La coutume de Paris admet encore une garde bour- geoise pour le pere , & la mere seulement; ces cou- tumes sont conformes au surplus , en ce que notre coutume
de Bail de Mineurs entre Nobles & tutelles.4Icoutume art. 73 , ne fait durer le Bail que pendant la minorité des enfans, & la coutume de Paris ajoute le tout , pourvû que lesdits pere , mere , ayeul ou ayeule ne se remarient , auquel cas la garde est finie.
La conformité s’y trouve aussi en ce que par l’art. 74 de notre coutume , celui qui prend le Bail fait tous les fruits du Mineur siens pendant le Bail, & par l’art. 76 , celui qui prend Bail doit rendre quitte la terre du Pupille , le nourrir & l’entretenir selon l’état des parties , payer ses dettes personnelles , & restituer les meubles , & par l’art. 267 de la coutume de Pa- ris, celui qui prend la Garde à l’administration des meubles , fait siens les fruits des immeubles , doit nourrir & entretenir les Mineurs suivant leur état , payer & acquiter leurs charges & dettes.
Ces observations faites, il s’ensuit naturellement que ces droits établis en faveur des peres , sont plutôt un droit Coutumier & François , qu’un droit émané de la puissance paternelle, suivant le doit Romain, & qu’il faut consequemment regarder de cette maniere ce que notre coutume établit en l’art 84 , en faveur du pere non noble , en le dispensant de la formalité d’une tutelle dative, en lui attribuant les fruits & revenus des biens de ses enfans pendant le tems de son administration , & en l’en privant s’il se remarie sans faire inventaire; c’est pour ce pere une espece d’extension de la garde bourgeoise , puisqu’on lui en donne tous les droits, & qu’on lui en impose les charges ; il est donc évident que le mot Usufruit ,
42Coutumes de la Marche ,dont la coutume se sert en parlant du convol du pere, ne doit point être entendu de l’usufruit que le droit Romain donne au pere , mais seulement du droit que la coutume lui donne de faire siens les revenus de ses enfans pendant son administration.
En effet l’usufruit que le droit Romain faisoit de- pendre de la puissance paternelle, ne finissoit point par un tems limité, comme est celui de la minorité, ni par le convol du pere, comme finit le droit que la coutu- me donne au pere de jouir des revenus de ses enfans, & d’en faire les fruits siens, qui est borné au tems de la minorité , et qui cesse même pendant ce tems , si le pere convole en secondes nôces sans faire inven- taire.
On ne peut pas opposer que cet art. 84 ne dit pas en termes formels, que le droit qu’il attribuë au pere, cesse par la majorité de ses enfans, d’autant que cette objection seroit insoutenable, si l’on fait attention à plusieurs circonstances decisives.
La premiere, que l’arricle dont il s’agit est couché sous le titre de Bail & Tutelle des Mineurs, qui par consequent n’a de raport qu’au tems de la minorité.
La seconde , que l’article regarde précisement les Tutelles des Mineurs, mêmes les Testamentaires, & Legitimes , & ne regarde le pere que comme tu- teur ou administrateur legitime.
La troisiéme , que notre Coutume par raport au Bail ou Garde des Peres Nobles , qui est regardée avec plus d’avantage que la Tutelle, veut en termes
de Bail de Mineurs entre Nobles & tutelles.43exprès qu’elle finisse avec la minorité ; est-ce que le pere noble auroit moins de privilege que le non no- ble ? & si dans la coutume de la Marche il y avoit un usufruit conforme au droit Romain , fondé sur la puissance paternelle , n’apartiendroit-il pas au pere noble , comme au pere non noble ? & pourroient-ils en être privés l’un ni l’autre , que par les seuls moyens que le droit Romain admet pour faire finir l’usufruit qu’il attribuë au pere ?
Il faut donc conclure que le mot Usufruit, inseré dans l’article dont il s’agit , ne doit pas être entendu de l’usufruit du droit Romain, mais qu’il doit l’être suivant l’esprit de la coutume, & suivant la lettre de l’article même, & du titre sous lequel il est couché , du droit de jouir des biens des enfans, & de s’en aproprier les revenus sans en rendre compte ; ce qui ayant quelque convenance à l’usufruit, a donné lieu à ce servir de ce mot.
Et ce qui doit faire admettre cette conclusion sans difficulté , est que personne ne revoque en doute que l’usufruit dependant de la puissance paternelle admi- se par le droit Romain, n’a point de lieu dans notre droit François après la minorité des enfans ; on l’a démontré sur l’article onze de notre coutume , où l’on a établi par les regles , que suivant cet article , les enfans devenus majeurs étoient tacitement éman- cipez , & que le sentiment de Caillet , ancien com- mentateur conforme à cette maxime , a été mal à propos contesté par le dernier éditeur , quoiqu’il ait
44Coutumes de la Marche ,été forcé d’admettre deux manieres de faire finir le droit du pere de jouir des revenus du bien de ses en- fans , lesquelles ne sont pas admises par le droit Ro- main ; l’une est le mariage des enfans, l’autre est la separation d’habitation après leur majorité d’avec leur pere pendant quelques années, en quoi il contre- dit la regle par lui adoptée , que la loy étant généra- le, on ne pouvoit y faire d’exceprion : mais c’est trop s’arrêter sur le sentiment de cet auteur moderne qui combat les regles générales.
Article Quatre-vingt-cinq.
La mere est tenuë rendre compte & reliqua de l’ad- ministration de la tutelle de ses enfans ; aussi sont tous autres tuteurs.
Article Quatre-vingt-six.
Si la mère veut convoler à secondes nôces elle perd la tutelle si tôt qu’elle est fiancée , & le Juge du lieu inconti- nent les fiançailles faites fera pourvoir aux mineurs de tuteurs ou curateurs.
Article Quatre-vingtsept.
Inventaire de biens de mineurs se doit faire par le Ju- ge ou aucuns par lui commis Officier ou autre , à moindre frais que faire se pourra.
Mr. Louet & son Commentateur sur la lettre C. nomb. 30. ont très-amplement traîté de l’inventaire necessaire pour faire cesser la communauté conjugale établie dans plusieurs Coutumes , qui se continuë en-
de Bail de Mineurs entre Nobles & tutelles.45tre le survivant des conjoints , & les enfans du prede- cedé; ils ont prouvé par le sentiment des Auteurs, & par la Jurisprudence des Arrêts, la necessité & la for- me de cet inventaire , le tems qu’il y a pour le faire; il seroit inutile de repeter ici ce qu’ils ont dit ; on peut le voir dans les livres.
Ce que nous croyons devoir dire ici pour l’usage de notre Coutume, qui n’établit pas la communauté conjugale si elle n’est pas contractée , & sur l’obliga- tion qu’elle impose au pere en l’art. 84, de faire in- ventaire avant de convoler en secondes nôces, est en premier lieu , que pour rendre cet inventaire vala- ble & suffisant, il faut que les enfans soient pour- vûs d’un curateur en justice par avis des parens , & dans les formes ordinaires , à l’effet d’assister par lui comme legitime contradicteur , à l’inventaire que fera le pere, pardevant un Notaire commis par le Juge ordinaire ; en second lieu , que soit que le pere ait contracté avec sa deffunte femme une commu- nauté ou non , l’inventaire doit comprendre les effets mobiliers qu’il a , aussi bien que les titres de ses biens immeubles, & il ne satisfait pas à cette seconde obligation , lorsque dans l’inventaire qu’il fait , mê- me avec un curateur décerné en justice à ses enfans , il se contente sous pretexte qu’il n’a point de com- munauté contractée avec sa femme , de comprendre dans l’inventaire les effets mobiliers qui apartenoient à sa femme, & les titres qui regardent sa dot & biens dotaux.
46Coutumes de la Marche ,Parceque l’obligation que notre Coutume lui impose de faire un inventaire avant de se remarier , est une peine des secondes nôces, et une précaution que la loi prend pour les mineurs du premier lit , afin d’empêcher qu’ils ne soient lezés par des disposi- tions indirectes que le pere, transiens ad secunda vota, pourroit faire à leur préjudice de ses biens non in- ventoriés au profit d’une seconde femme , ou des enfans qu’elle avoit d’un premier lit , contre l’Edit des secondes nôces qui ,, défend au pere qui convole ,, de faire des dons ou avantages en quelque maniere ,, que ce soit en faveur des personne prohibées , qui ,, puissent exceder la portion que doit avoir dans ses ,, biens celui de ses enfans du premier lit qui en sera ,, le moins partagé ,, à quoi un inventaire entier & fi- déle, qui fait connoître l’état de ses biens, lorsqu’il se remarie , peut servir de précaution principale contre les fraudes , & les dispositions indirectes, quoiqu’on convienne que cette précaution n’y peut souvent en- tierement obvier , mais il suffit du moins que cet inventaire soit un frein qui arrête au dehors les ar- tifices que la mauvaise foi peut employer d’une ma- niere indirecte & cachée.
Au surplus il est certain qu’il n’y a que les enfans du premier lit , qui puissent opposer au pere les obli- gations où il est de faire l’inventaire en forme & en- tier , dont on vient de faire mention , à peine d’ê- tre privé du droit que la coutume lui donne en lart. 84, de faire siens les revenus de leurs biens maternels
de Bail de Mineurs entre Nobles & tutelles.47pendant leur minorité ; car si le pere survit à ses enfans, les parens collateraux habiles à leurs succeder de l’estoc maternel , ne peuvent pas faire au pere la même objection , parce qu’en premier lieu les pei- nes des secondes nôces n’ont pas été établies en faveur des parens collateraux ; & en effet on voit qu’un pere ou une mere qui en passant à de secondes nôces avoit perdu suivant l’Edit la propriété des dons & avantages que le conjoint prédecedé lui avoit fait par leur contrat de mariage ou autrement , & qui n’en avoit plus que la joüissance , ou usufruit , rentre de plein droit contre la maxime de Philosophie , à pri- vatione ad habitum non datur regressus , dans cette propriété perduë dès le moment qu’il survit à ses en- fans du premier lit.
Et en second lieu, il faut faire reflexion sur la peine que la coutume impose au pere qui convole sans in- ventaire bon & valable, c’est de rendre compte à ses enfans du premier lit de leurs fruits & revenus qu’il a perçûs depuis le tems de son convol. Or comme le droit qu’ont les enfans en cette occasion de se faire rendre compte de leurs fruits & revenus , est une action pure mobiliere , le pere, quoi qu’ayant con- volé, leurs succedant par sa survivance , en tous leurs meubles & droits mobiliers, à l’exclusion des collate- raux , suivant la disposition de l’art. 223 de notre coutume , il s’ensuit qu’il confond en sa personne l’action mobiliere que ses enfans avoient contre lui pour la redition du compte de leurs revenus.

48Coutumes de la Marche ,Ainsi quand les enfans du premier lit viennent à prédeceder leur pere qui a convolé,il est dispensé par raport aux collateraux de l’obligation qu’elle lui impose de faire inventaire avant son convol , & soit qu’il ayt fait un inventaire informe & non entier , soit qu’il n’en ait point fait du tout , il reste à l’égard des héritiers collateraux dans les droits que lui don- noit la coutume comme s’il n’avoit pas convolé.


CHAPITRE TREIZE. Des prescriptions & Usucapions.
Article Quatre-vingt-huit.
POur acquerir par prescription chose immeuble , il suffit avoir joüi par dix ans entre presens, & vingt ans entre absens avec titre et bonne foy selon le droit commun, auquel s’accorde la coutume.
Il s’étoit autre fois élevé une opinion dans la Pro- vince , que dans les cas où les coutumes du ressort du parlement de Paris, ne s’expliquoient pas disertément & n’avoient pas de disposition absolument précises, il faloit s’en tenir à celle de Paris; mais on est reve- nu de cette idée , & comme dans les loix municipa- les aussi bien que dans les Ordonnances Royaux , on s’attache aux termes , littera ad litteram , on a fait attention , sur ceux qui se trouvent au present art. qui dit, que la coutume s’accorde au droit commun; en effet c’est sur ce fondement que nous suivons la disposition du doit civil , pour le reglemens de la legitime ,
des Prescriptions & Usucapions.49legitime, dont notre Coutume ne parle pas , de même que pour l’âge necessaire pour faire un testa- ment valable ; il y a à cet égard un préjugé certain, tiré d’un Arrêt du Parlement , rendu en l’année I696 , entre la Dame de Chabannes de la Dauge , mere de Joseph de Chabannes, sieur du Boislamy, & le sieur de Chabannes de Mariol, heritier colate- ral dudit Joseph de Chabannes; celui-ci âgé seule- ment de dix-sept ans , avoit fait un testament conte- nant un leg du tiers , au profit de ladite Dame sa mere , & sur la demande en délivrance qui en fut par elle formée, l’héritier colateral soutint le testa- ment nul , fondé sur ce que le testateur n’avoit pas l’âge suffisant pour tester , conformément à la dispo- sition de la coutume de Paris , laquelle on devoit suivre dans ce cas particulier, où celle de la Marche ne s’expliquoit pas ; ajoutant que c’étoit un usage qui avoit reçû souvent son application en ce cas, & autres cas particuliers & semblables : mais la Dame de la Dauge mere , repliqua au contraire , & fit bien valoir les termes de notre present art. 88 , qui deci- de pour le droit commun & civil , auquel s’accorde la coutume , & soutint que dans cette circonstance , l’âge de puberté suffisoit pour faire un testament va- lable ; elle ne manqua pas aussi de faire valoir no- tre usage pour le reglement de la legitime qui s’ac- corde au droit commun.
En cet état , le procès porté au parlement , & ayant été bien examiné , & vû de Commissaires par
50Coutumes de la Marche ,M. le Premier President de Harlay , & autres de Mrs. de la Grand’Chambre , il intervint un premier arrêt interlocutoire , portant que ,, les Officiers de la Sené- ,, chaussée de Gueret donneroient un acte de notorie- ,, té , sur l’usage pratiqué en la Province de la Mar- ,, che pour l’âge necessaire , afin de faire un testa- ,, ment valable de la part des testateurs ou testatrisses : & en consequence Mrs. les Officiers de lad. Senéchaus- sée s’étant trouvez obligez de certifier que l’âge de quatorze ans accomplis pour les mâles , & de douze ans accomplis pour les filles , étoit suffisant pour faire de leur part un testament valable , la Cour rendit un second arrêt , par lequel elle declara le testament dud. Joseph de Chabannes valable , & ordonna la délivrance du legs au profit de sa mere , sans s’arrê- ter à l’idée & disposition de la coutume de Paris ; & en effet , nous avons toujours vû pratiquer une diffe- rence qu’il faut entendre , qui est , que dans les choses qui nous viennent du droit civil , il faut en suivre la disposition, quand notre coutume est muet- te, & que dans les choses qui regardent le droit fran- çois , à l’égard desquelles la coutume est dans le si- lence , il convient de suivre la coutume de Paris: on peut voir à ce sujet un des playdoiers de Mr. le Maî- tre , qui a traité & adopté cette difference avec son érudition & éloquence ordinaire , étant dans son tems regardé comme l’oracle du Palais.
Article Quatre-vingt-neuf.
La prescription de trente ans etiam sans titre est suf-
des Prescriptions & Usucapions.5Ifiante pour acquerir la Seigneurie directe & utile , action & exception à l’encontre de celui contre qui on a prescrit & tous autres; tellement que par lad. coutume tous droits, actions, & autres choses corporelles & incorporelles, cens, rentes & devoirs quelconques prescriptibles, se prescrivent, acquierent, & perdent, etiam sans titre, par l’espace de trente ans continuels contre les laïs , & de quarante ans contre l’Eglise; & à lad. prescription lieu seulement contre ceux qui ont faculté de poursuivre leurs droits & actions en jugement contradictoire ; & tient lieu ladite prescription de titre & droit constitué , & a vigueur de tems immemorial.
Le dernier Editeur de notre coutume s’est voulu distinguer par une opinion particuliere qu’il recon- noît être contraire au sentiment des consultans , & Praticiens de la Ville de Gueret , capitale de notre Province , au sujet des droits de servitude sur les he- ritages de ses voisins, pour l’établissement desquels il ne veut d’autre titre que la possession de trente ans , ce qu’il dit être conforme à l’esprit de la coutume , à la disposition de cet article , & à l’autorité des choses jugées ; & pour le persuader , il cite deux arrêts, l’un du I. Mars I637, & l’autre de 30 Juillet I685 , & y ajoûtant son raisonnement ; il dit ,, que par le pre- ,, sent art. 89 , la coutume admet la prescription de ,, trente ans pour tous droits , & actions, & autres ,, choses corporelles , & incorporelles, & que qui dit ,, tout, n’excepte rien. ,,
Mais assurement il s’est beaucoup mécompté , car
52Coutumes de la Marche ,pour faire valoir d’abord la foiblesse de son raisonne- ment, il n’y a qu’à lire l’article qu’il avoit sous les yeux , où il paroît que la coutume declarant en gé- néral que la prescription a lieu, y ajoute ces mots, en toutes choses prescriptibles , autrement elle se contredi- roit grossierement , car elle établit en termes exprès dans plusieurs articles , même dans l’article suivant, qu’il y a plusieurs choses qui ne sont pas prescriptibles, & parmi ces choses sont sans doute les droits de ser- vitude dont il est question.
A l’égard desquels l’usage de la Province a été de se conformer au sentiment de Me. Charles du Moulin, & des autres Auteurs, & à l’autorité des Arrêts bien entendus & bien apliquez, & par consequent de les regarder comme non sujets à la prescription, s’il n’y a un titre ; la notte de Me. Charles du Moulin au ra- port de Me. Charles l’Abbé , sur l’article I86 de la coutume de Paris , porte que sa disposition doit être regardée comme un droit général en France ; en effet, il a été entendu dans plusieurs autres coutumes par l’au- torité des choses jugées : Imbert dans ses Instituts en raporte deux arrêts rendus dans la coutume de la Ro- chelle , qui admet généralement la prescription , & Mornac un du 27 Juillet I6I2, sur la Loy 32 d. de servitibus urbanorum prædiorum.
Et pour faire connoître que cette Jurisprudence n’a rien d’oposé à l’esprit de notre coutume de la Marche , il n’y a qu’à voir l’art. 360, où elle dit, que le droit de pâturage dans les heritages aparte-
des Prescriptions & Usucapions.53nant à autrui ne s’acquiert point sans titre par la seule possession , quelque longue qu’elle puisse être ; ainsi à cet égard notre coutume & celle de Paris ont le même esprit.
Mais ce qui paroît surprenant , est la notte que le dernier Editeur de notre coutume a fait sur cet art. 360 , où il dit ,, que la raison de l’insuffisance de ,, cette possession quelque longue qu’elle soit, est fon- ,, dée sur ce qu’il s’agit d’une servitude réelle ; ,, donc selon lui même, pour l’établissement d’une telle servitu- de, la possession quelque longue qu’elle soit, doit être accompagnée d’un titre, & on voit que cet Auteur aprouve ici ce qu’il avoit combatu sur l’article 89.
A l’égard des arrêts qu’il raporte , ou il est mal informé, ou il en fait mauvaise application : voici l’espece de celui du premier Mars I637.
Le sieur Simonnaud possedoit le village & do- maine du Cher-du-Prat , qui étoit en partie compo- sé de plusieurs heritages, situés dans le territoire du village de Vernet, lesquels entouroient presque de toutes parts un champ commun & pacage appellé le communal de Vernet ; il pretendoit avoir droit de continuer l’ancienne possession où il étoit de faire paître dans le communal les Bestiaux qu’il tenoit dans le hameau du Cher-du-Prat : les Habitans de Vernet au contraire alléguoient que le communal en question leur apartenoit à l’exclusion des autres Villages circonvoisins , que la seule dénomination suffisoit pour le prouver ; que , cela suposé , le sieur
54Coutumes de la Marche ,Simonnaud alléguoit inutilement, suivant l’article 360 de la Coutume la possession d’y avoir fait paître ses bestiaux de Cher-du-Prat, puisque telle possession telle longue qu’elle fut , ne pouvoit lui acquerir ce droit ; qu’il lui étoit pareillement inutile d’alléguer qu’il avoit la proprieté de plusieurs heritages particu- liers , situés dans le territoire de Vernet , parce que les communaux d’un village étoient affectés aux usages des seuls Habitans de ce village, à l’exclusion de tous ceux qui n’en étoient pas habitans, & de tous autres voisins, suivant l’expresse disposition de l’art. 358 de la Coutume ; voilà le fonds de la principale contestation qui fut jugée par l’Arrêt du premier Mars I637, par lequel nonobstant la lon- gue possession alléguée par le sieur Simmonaud, & sa qualité de proprietaire d’heritages particuliers situés dans le territoire du Village de Vernet, il fut débou- té du droit par lui pretendu dans le communal en question , tandis que ses Fermiers ou Métayers ne seroient point d’habitation & résidence dans ledit Village ou territoire de Vernet ; c’est ce qui obligea dans la suite le sieur Simonnaud , ou plûtôt le sieur Drüillettes son gendre & successeur, de faire bâtir dans le territoire du village de Vernet une maison & grange pour ses gens & bestiaux de Cher-du-Prat, afin de leur donner comme habitans de Vernet , droit dans le communal de ce village.
Le dernier Editeur de la coutume a ignoré ou vou- lu taire cette principale contestation ainsi decidée
des Prescriptions & Usucapions.55par l’Arrêt du premier Mars I637 qu’il a cité ; en effet, cette décision bien loin d’autoriser le sentiment qu’il avance, que la seule possession suffit sans titre, pour établir un droit de servitude , elle decide le contraire en autorisant la disposition de l’art. 360, & l’usage observé dans la Province.
Il est vrai qu’il employe une partie de cet Arrêt, pour apuyer ce qu’il a osé alleguer contre cet usage ; en ce que, dit-il,, le Sr. Simonnaud quoi qu’il n’eût ,, pas de titre fut maintenu dans la possession où il étoit ,, de puiser de l’eau dans une fontaine qui étoit à la ,, tête de ce communal ,, mais en cela même il n’est pas à écouter ; car il est constant que cette fontaine qui subsiste encore, située à la verité auprès du communal de Vernet , mais dans la partie la plus éloignée du village de Vernet , dans lequel il y a des fontaines, est véritablement une fontaine publique très-proche du Hameau de Cher-du-Prat ; & dès- lors qu’elle étoit publique , le chemin pour l’aborder étoit public , & d’ailleurs la possession ou étoit les gens de cet hameau étoit encore établie sur cette sorte de titres muëts dont il sera parlé dans la suite, c’est-à-dire, sur l’entrée du chemin battu & frayé, qui conduit à cette fontaine marquée par de grosses pierres & bornes subsistantes d’ancienneté : & partant il est évident que ce que l’arrêt a prononcé au sujet de cette fontaine , n’a point decidé que le droit de ser- vitude peut être acquis par la seule possession.
On voit par là & par ce qui a été observé sur l’art.
56Coutumes de la Marche ,84 , qu’il faut user de précaution sur le sujet des Arrêts raportés par le nouvel Editeur , car il en est de même de la citation qu’il fait de celui du 30 Juillet I685 , qui n’a point été rendu sur la thése ; il ne s’agissoit entre les parties que du fait, & non du droit.
Mais il y a des Arrêts autres que ceux du premier Mars I637, qui ont nettement jugé que la seule pos- session ne suffit pas en l’espece présente , & qui ont précisement confirmé les articles 358 & 360 , de notre coutume ci-dessus cités.
L’un est du 6 Septembre I664 , rendu au profit du Sr. Cilet, contte le Sr. Segliere , confirmatif d’une sentence de la Châtellenie de Gueret du 28 Mai I659.
Celui qui a été rendu le 23 Mars I67I en fa- veur des habitans de la Renardiere, contre ceux de la Chassagne.
Et nous trouvons dans une ancienne notte sur la Coutume , mention d’un autre Arrêt du premier Mars I622 , qui a précisement jugé la necessité d’un titre outre la possession , pour acquerir à un par- ticulier la servitude d’un droit de passage dans l’heritage d’autrui, lui reservant seulement , au cas qu’il ne pût passer par ailleurs que chez son voisin , de lui demander passage en payant , à égard d’ex- perts , suivant la Loy siquis sepulcrum , de religio- sis, & sumptibus funerum, et le titre de glande legendâ.
Au surplus nous admettons dans notre usage pour titres
des Prescriptions & Usucapions.57titres suffisants avec la possession , afin d’établir le droit de servitude, non seulement des actes & con- trats exprès à cet effet , mais encore quand il paroît que les heritages de celui qui demande le passage , & de celui à qui il est demandé , ont été autrefois d’une même famille, ou d’une même communauté , parce qu’on présume de droit que dans le partage , ou division qu’il en a été fait, qui est un acte d’équité, les droits d’entrée & issuë, & ce qui peut servir pour leur usage & exploitation leurs ont été conservés. L. quod si nolit ff. quia dig. de ædilitio edicto. L. duorum ff. communium prædiorum tam urbanorum , quam rusticorum.
C’est ce qui a été observé par le judicieux Coquille en sa quest. 74, & ce fait d’ancienne indivision & de partage peut être établi par la tradition prouvée par la deposition des temoins.
Il y a encore une aute maniere de titre à l’égard du droit de passage sur l’heritage d’autrui, duquel on a déjà touché quelque chose ci-dessus ; pour l’ex- pliquer il faut observer que dans cette Province les heritages de la campagne qui apartienent aux par- ticuliers , & ne sont pas ordinairement fort étendus , sont clos & renfermez separement par des hayes, buissons ou murailles, & s’il se trouve que de deux de ces heritages voisins , il y en ait un qui joigne le che- min public , & que l’autre en soit éloigné, & que dans la muraille , buisson & clôture , qui est entre ces deux heritages , il y ait une ouverture ancienne,
58Coutumes de la Marche ,marquée par des bornes de pierre, par une barrièere, ou par quelqu’autre marque semblable d’antiquité, cela joint avec la possession paisible de trente ans est une maniere de titre qui paroît devoir suffire pour aquerir le droit.
Il faut encore ici observer au sujet du present art. 89, qu’il s’étoit élevé dans la Province une fausse idée au sujet d’un arrêt rendu en la Cour , au raport de Mr. Quentin de Richebourg , entre le sieur de Chamboran de la Claviere , & le sieur Rebiere , en pretendant que cet arrêt avoit jugé , que pour pres- crire en notre Coutume une obligation à cause de prêt il faloit quarante ans ; sçavoir trente ans pour l’action personnelle, & dix ans pour l’hypotequaire ; mais cet arrêt n’a point derogé à la prescription de trente ans, qui suffit suivant cet article pour prescrire pareilles obligations sans distinction de l’action per- sonnelle & de l’action hypotequaire ; il a uniquement jugé que le sieur de la Claviere étant mineur, la pres- cription n’avoit point couru pendant sa minorité , comme le pretendoit le sieur Rebiere , fondé sur une idée qu’on avoit voulu lui inspirer, que quand il s’a- gissoit d’une chose & créance mobiliere , la prescrip- tion pouvoit courir contre le mineur, lorsqu’il avoit un tuteur solvable , qui pouvoit repondre de sa negli- gence , & sauf le recours dudit mineur contre son tu- teur , faute d’avoir fait des poursuites dans le tems ; mais la Cour en pleine connoissance de cause reprou- va cette distinction , & s’en tint aux regles , qui sont
des Prescriptions & Usucapions.59que la prescription n’a point de lieu indefiniment pendant le tems de la minorité, suivant les termes précis de notre article , qui dit ,, & a ladite prescrip- ,, tion lieu seulement contre ceux qui ont faculté de ,, poursuivre leurs droits & actions en jugement con- ,, tradictoire : ,, nous sommes bien certains de l’espece sur laquelle cet arrêt a été rendu , & des faits qui en ont fait la matiere , puisque nous avons entre nos mains les factums imprimez et respectifs des par- ties ; enfin la chose depuis cet arrêt ne fait plus de difficulté dans la Province, & on a toujours depuis jugé que la minorité d’un créancier, demandeur bien établie , interrompt valablement le cours de la pres- cription.
Article Quatre-vingt-dix.
Celui qui tient heritage en condition de servitude ou de main morte , peut bien prescrire contre le Seigneur de qui il tient les devoirs de rente ordinaire , mais non pas les corvées , vinades , double d’Août & autres droits de servitudes , sinon depuis le tems de contradiction ; aussi ne peut le Seigneur prescrire l’heritage , que son homme tenant en l’une ou l’autre desdites conditions a delaissé sans faire gurpine en quelques tems que l’homme retourne , s’il veut payer les arrerages encourus , deduction faite des fruits , sinon que depuis que l’homme s’est départi le Seigneur ait fait faire, à son profit par Sentence , adjudi- cation de tel heritage.
Article Quatre-vingt-onze.
Deniers & biens dotaux , dont le mari est negligent
60Coutumes de la Marche ,d’en faire poursuite pendant son mariage , se peuvent prescrire contre le mari; & la femme pour la negligence , peut avoir recours sur les heritiers de son mari ou ses biens: mais si les biens dudit mari ne sont trouvez a l’heure du trépas suffisans pour soi recompenser , elle ou ses hoirs peuvent dedans trois ans après le trépas de son mari avoir recours contre ceux qui tiennent ses biens pour leur deman- der sesdits deniers & biens , nonobstant le laps de tems encouru durant son Mariage.
La prescription dont il s’agit en cet article est cel- le de trente ans, & nous n’avons pas admis l’autenti- que quod locum de dote cauta non numeratâ pecuniâ, ni le préjugé de l’arrêt raporté par Mr. Loüet pour la Tresoriere du Lac, qui a été rendu sur des circonstan- ces particulieres.
Mais il y a beaucoup de reflexions à faire sur ce que les deniers & biens dotaux étant prescrits par la negligence du mari, le recours qu’on donne à la fem- me est de se pourvoir sur les heritiers de son mari, ou sur ses biens ; que si les biens du mari ne sont pas à l’heure du trepas suffisants pour la recompenser, elle ou ses hoirs peuvent dedans trois ans aprés le trepas du mari, dit la coutume, avoir recours contre ceux qui tiennent ses biens, pour leur demander sesd. de- niers & biens , nonobstant le laps de tems encouru durant son mariage.
Le dernier Editeur de la coutume se recrie avec quelque justice contre la limitation qu’elle semble faire au tems de trois années après le decès du mari
des Prescriptions & Usucapions.6Icelui qu’elle donne à la femme pour repeter ses de- niers & biens dotaux, d’autant que regulierement cette action ne devroit se prescrire contre elle que par trente ans, à compter depuis le decès du mari , & il cite là dessus tous les Docteurs dont le sentiment est conforme à celui d’Alexandre en son conseil I72. nombre 29.
En effet l’action de la femme pour la repetition de ses biens, n’est ouverte à son égard que dès le jour du decès du mari , & c’est une regle en droit que la prescription ne commence à courir que dès le jour de l’ouverture de l’action ; d’ailleurs la prescrip- tion de trois ans n’est établie nulle autre part dans notre coutume ; celle des arrerages de rentes ne l’é- tant que par quatre ans, & la prescription de l’instan- ce suivant la Loi Properandum de judiciis, admise par- mi nous par l’ordonnance de Roussillon, étant toute differente de ce dont il s’agit dans cet article.
Nous avons crû d’abord qu’il y avoit eu de l’er- reur, soit des copistes, soit des imprimeurs, & que dans l’orthographe de la coutume, le tems qu’elle don- ne à la femme pour la repetition de ses biens avoit été limité veritablement à trente ans, qu’on avoit mis ce nombre en chiffre arabique, & que par la fau- te des copistes ou imprimeurs , le zero ayant été ob- mis & negligé, il étoit resté le nombre de trois qui ne marque que trois ans.
Mais ayant examiné toutes les éditions imprimées de la coutume que nous avons entre les mains, sça-
62Coutumes de la Marche ,voir une en lettre gotique imprimée à Paris par Chaudiere en I526, celle de Caillet en I573, celle du grand Coutumier en I604, celle de Vernois im- primée à Moulins en I6I8 , & la derniere de I695, nous avons trouvé que le nombre de trois ans se trou- ve dans toutes également marqué, ainsi que dire à cet égard, si ce n’est, Dura lex sed scripta.
Article Quatre-vingt-douze.
Faculté de racheter toties quoties baillée à aucun expire & se prescrit par le laps & espace de trente ans.
Il faut observer sur cet article que la faculté de ra- chat stipulée par un contrat de vente translatif de propriété pendant deux, trois ans, cinq ans, ou plus ne laisse pas après l’expiration du delais d’avoir lieu durant trente ans du jour du contrat de vente ; néanmoins dans l’usage & la Jurisprudence observée à ce sujet, l’acquereur après le delais de la faculté de rachat expirée , à la liberté de faire signifier le con- trat au vendeur, ou à ses heritiers & autres ayant de lui droit & cause, avec assignation devant juge com- petant, pour venir voir dire & ordonner que dans tel nouveau delais qui sera prescrit par ledit juge, le- dit vendeur ou ses ayant droit, seront tenus d’exercer & faire valoir à leur profit la faculté de rachat stipu- lée audit contrat de vente, & satisfaire aux condi- tions dudit contrat, autrement & à faute de ce ledit tems passé, ils en demeureront déchûs purement & simplement ; & en effet, s’il intervient sur ce une sen-
des Prescriptions & Usucapions.63tence conforme aux conclusions de la demande du demandeur, le contrat après le nouveau delai accor- dé par le juge devient pur & simple, & l’acquereur proprietaire incommutable de la chose venduë ; cela s’appelle dans les termes de la procedure une action pour purger la faculté de rachat.
Cette Jurisprudence est confirmée & autorisée par plusieurs sentences & prejugez qui ne laissent plus à cet égard de difficulté ; il est surprenant que Me. Jabely qui devoit être informé de cette Jurispruden- ce aye formé dans ces nottes sur cet article une opi- nion contraire, en soutenant avec rigueur , qu’après le tems de la faculté de rachat expiré , il n’y a plus d’action à exercer.
Article Quatre-vingt-treize.
Droit de Fief ne se peut prescrire contre le Seigneur par le vassal , ni pareillement par le Seigneur contre le vassal , mais un Seigneur peut bien prescrire droit de Fief sur un autre Seigneur.
Article Quatre-vingt-quatorze.
La façon & maniere de payer & lever dixmes , & aussi la quotité d’icelles se peut prescrire par le laps & espace de trente ans , de lay à lay, & contre l’Eglise par l’espace de quarante ans , sans que le Curé ou autre dix- mier puisse autre chose en demander ou quereller.
Il y a en effet en la Province de la Marche diffe- rens usages de lever & payer les dixmes ausquels on se tient suivant la possession qui en a été exercée ,
64Coutumes de la Marche ,l’usage le plus commun est de lever la dîme dans les champs en gerbes ; il y a des paroisses où le deci- mateur dime dans la grange du laboureur, c’est-à-di- re qu’après que le laboureur a conduit & ramassé dans sa grange toutes les gerbes de sa récolte, le decima- teur s’y transporte, on compte alors les gerbes, & le decimateur perçoit alors la onziéme du total ; il y a encore d’autres paroisses où l’on dîme au boisseau, le labou- reur prend à lors le soin de battre ou faire battre les gerbes par lui recüeillies sujettes à la dîme , il fait un tas des grains dans un coin de sa grange ou ailleurs , & le décimateur prend la onziéme au boisseau , le tout se passant de bonne foi entre les laboureurs & les decimateurs. On peut ici rapporter sur l’usage touchant la maniere de lever la dîme deux arrêts intervenus , l’un pour la paroisse d’Issoudun près Chenerailles, & l’autre pour celle de Saint Fiel près Gueret.
On a pratiqué de tems immemorial dans cette Province de la Marche que les laboureurs sont char- gez de couper & lier à leur frais les gerbes sujettes à dîmes, à l’effet de quoi le decimateur sou on fermier les compte dans le champ & en leve la onziéme ger- be, moyennant quoi le decimateur est tenu de payer au laboureur douze sols six deniers pour chaque éten- duë de terres qui composent les heritages d’une paire de bœufs, & lorsqu’il y a moins d’heritages la retri- bution est moindre, & est proportionnée à l’étenduë ; en effet , il ne seroit pas juste que le laboureur fit uniquement à ses frais la recolte & coupures des grains, fournit
des Prescriptions & Usucapions.65fournit les liens pour les gerbes & les rendit prêtes à être dimées par le decimateur : il est d’usage en la Pro- vince du Bourbonnois que les laboureurs laissent sur pied le onziéme sillon destiné pour le decimateur , qui est obligé de le faire couper , javeler et lier à ses frais ; & en la Marche led. decimateur se trouve dis- pensé de pareils frais , moyennant la retribution susd. dont on voit dans ce cas la legitimité.
Il étoit arrivé dans la suite des années en plusieurs endroits des abus , en ce que les laboureurs conver- tissoient leurs retributions de douze sols six deniers en un repas que les decimateurs leurs donnoient au ca- baret , où les decimateurs mangeoient souvent avec eux, même les Curés ou Ecclesiastiques , & cela ar- riva si frequemment que ce droit du laboureur, en acquit la denomination de diner de dîmes ; cepan- dant dans les contestations qui se trouverent quel- ques-fois à cet égard entre les laboureurs sages & ménagers, & les decimateurs, lesdites contestations portées en justice, les juges s’éleverent contre l’abus , et il y eut plusieurs jugemens rendus en la Châtelle- nie Royale de Gueret , & en la Senéchaussée de la Marche, qui deffendirent de convertir le droit du la- boureur en un repas , & cependant par une corrup- tion & mauvaise façon de parler , on ne laissa pas de continüer de donner à ce droit le nom de diner de dîme.
C’est ce nom , qui servit de pretexte au Curé de ladite Paroisse d’Issoudun, de faire procès à ses parois-
66Coutumes de la Marche ,siens pour les priver de ce droit, voulant cependant les laisser sujets à la charge, mais parce qu’il craignoit de s’adresser aux Juges de la Province , bien instruits de la nature & origine de ce droit, il crût devoir dé- païser ses paroissiens ; & pour cet effet, se servant du nom de Mr. de Montagnac d’Estanssannes, ancien Conseiller au Parlement, qui étoit en partie decima- teur de sa paroisse , il les fit en vertu de committi- mus assigner aux requêtes du Palais en premiere ins- tance, où il intervint, & ne manqua pas de traiter cet usage de buvettes & d’autres mauvaises voyes condam- nées par les Ordonnances par raport aux payemens des dîmes, & sur cette couleur il obtint sentence à son avantage , & ensuite arrêt confirmatif en la cinquié- me Chambre des Enquêtes au mois d’Août I696.
A la faveur de cet arrêt rendu contre gens qui s’étoient visiblement peu ou mal deffendus , le Curé de Saint Fiel fit procès à ses Paroissiens pour la de- charge du droit en question , & porta l’instance en la Senéchaussée de la Marche ; mais les Paroissiens ayant éclairci & dévelopé la mauvaise denomination de diner de dîmes , & fait connoître par une juste tradition que le droit de laboureur que le Curé leur vouloit contester , étoit fondé & avoit son origine d’une cause très-legitime , qui n’avoit rien d’odieux ni de repréhensible en elle-même, qu’elle se trouvoit au contraire avantageuse aux decimateurs, qui pour un prix & retribution de douze sols six deniers, se trouvoient degagez d’une charge considerable , qu’il
des Prescriptions & Usucapions.67n’y avoit aucune équité de vouloir leur continuer a charge dans le tems qu’on vouloit les frustrer de cet- te foible recompense , & qu’enfin l’arrêt obtenu par le decimateur de la paroisse d’Issoudun, sous la fausse idée de buvettes qu’on avoit donnée de la question , pouvoit bien avoir son effet contre les Paroissiens d’Issoudun ; mais que cet arrêt particulier donné en un Chambre des Enquêtes ne pouvoit être consideré comme un reglement , ni par consequent être vala- blement opposé aux Habitans de la paroisse de Saint Fiel.
La cause en cet état portée en l’audiance de ladite Senéchaussée , entre Me. Jean Brissaud , Curé de lad. paroisse de Saint Fiel, demandeur, & Leonard Lurty, Sindic de la même paroisse , deffendeur , il intervint sentence contradictoire qui condamna le Curé à con- tinuer le payement du droit du laboureur sur le pied de la retribution ci-dessus expliquée , à la charge par le laboureur de continuer à ses frais de couper , jave- ler & lier les gerbes de dîmes ; & sur ce que les Ha- bitans de cette paroisse pour fournir aux reparations & ornemens de l’Eglise , & autres depenses de cette espece , dont ils étoient tenus en commun, s’étoient mis en usage d’y employer l’argent qui pouvoit pro- venir du droit des laboureurs en question , qu’il leur étoit deffendu d’employer en buvettes, lesd. Habi- tans firent des offres qui furent homologuées par la sentence, suivant lesquelles il fut ordonné, que ledit droit seroit annuellement levé par un des paroissiens
68Coutumes de la Marche ,nommé à cet effet , qui en rendroit compte parde- vant le Curé, & quatr principaux Habitans , pour être employé de leurs avis aux besoins de l’Eglise dont les Paroissiens pouvoient être tenus.
Le sieur Brissaud Curé , appella de cette sentence en la Cour , & ne manqua pas de produire l’arrêt de la cinquiéme Chambre des Enquêtes rendu en I696. en se recriant sur la pretenduë temerité des Juges d’a- voir decidé contre le prejugé de cet arrêt, mais le procès ayant été appointé en la grand’Chambre , distribué à Monsieur Bruneau Conseiller , ample- ment instruit , & vû de Petits Commissaires , parde- vant Monsieur de Harlay Premier President , il in- tervint arrêt contradictoire, par lequel la sentence de la Sénéchaussée de Gueret fut confirmée , & le Curé condamné en l’amande & aux dépens : ce Curé fût même blâmé par Monsieur le Premier President de la surprise qu’il avoit voulu tenter , en voulant faire abroger un droit légitime , sous un motif apparent de réformation , qui n’avoit de veritable cause qu’un interêt mauvais & reprehensible ; & dès cet arrêt le droit du laboureur dont il s’agit a été continué à être perçû sans difficulté dans la Province ; il y a même plusieurs paroisses , dont les Habitans à l’imitation de ceux de la paroisse de Saint Fiel , ont fait des de- liberations , qui ont été dûëment autorisées , suivant lesquelles , les deniers provenans dudit droit , ont été recüeillis & employez à des usages pieux pour les Eglises , lesquelles au moyen de ce , se trouvent de-
des Obligations , Exceptions , Compensations.69cemment ornées , & par ce moyen on a proscrit l’idée des buvettes , dont on ne voit plus ou rarement aucun usage au sujet des dîmes , d’autant plus qu’il est certain qu’un pareil usage seroit en tous tems con- damné.

     :            
CHAPITRE QUATORZE. Des Obligations , Exceptions & Compensations.
Article Quatre-vingt-quinze.
FEmme étant en puissance de mari ne se peut obliger pour le fait de son mari, ne renoncer à son profit, ne de ceux à qui sont mari peut succeder , sinon ès cas contenus au chapitre des donnations , dots & mariages.
Article Quatre-vingt-seize.
Exception de pecune non nombrée n’a lieu , soit contre une cedule ou obligation autentique pour charger de preuve le demandeur : mais si celui qui est défendeur le veut prouver il y sera reçû.
Article Quatre-vingt-dix-sept.
Exception que le demandeur est excommunié pour le repeller , de son action , n’est reçûe en Cour Laye.
Article Quatre-vingt-dix-huit.
Compensation a lieu liquidi ad liquidum en faisant aparoir promptement par celuy qui demande compensation de son dette.
Article Quatre-vingt-dix-neuf.
Reconvention n’a point de lieu sinon que les parties
70Coutumes de la Marche ,soient ejusdem fori , où elle a lieu sans nouvel adjournement.


CHAPITRE QUINZE. Des Appellations.
Article Cent.
QUi n’apelle illicò, il n’est recevable comme apellant.
Article Cent-un.
L’appellant peut renoncer dedans huit jours, & n’est le jour de l’apel en rien compté.
Article Cent-deux.
L’appelant est tenu de relever son appellation dedans dix jours , soit qu’on appelle du Châtelain, Baily , ou d’un Sergent, quand on veut relever pardevant le Séné- chal de la Marche ou autre Juge du Païs ayant ressort en cas d’apel , autrement l’appellation qu’il a interjettée sera déclarée déserte.
Article Cent-trois.
L’amende du fol apel interjetté tant des Sergens, que des Juges ou autres , est de soixante sols contre l’appel- lant & contre l’intimé, s’il est dit mal jugé ou exploité , ou contre l’apellé , s’il n’y a personne qui prenne sa cau- se , & pareillement en désertion d’apel , mais à tout ce faut declaration de Juge.
Article Cent-quatre.
Qui est appellant d’une cause de son Juge ordinaire ,
des Appellations.7Iest tenu de repondre en autres causes desquelles il est pour- suivi , sinon qu’elles fussent connexes ou dépendans de sa cause d’apel.
Article Cent-cinq.
Si aucun est appelant d’aucun Seigneur Justicier , comme pour dénegation formelle de Droit , il est exempt pendant ladite cause d’appel en toutes ses causes & ma- tieres : & s’il est dit bien appellé par l’appellant à déne- gation de Droit , l’appellant sera exempt de la Jurisdic- tion du Seigneur dont a êté appellé & demeure homme du Seigneuer suzerain immediat à la vie de celui qui a denié Justic , & de celui à qui elle a été deniée.
Article Cent-six.
Et au contraire si ladite appellation n’est trouvée bonne ne valable , l’appellant doit être condamné en l’amende du fol appel , & en tous les dépens , dommages & inte- rests envers le Seigneur.
Article Cent-sept.
L’homme n’est recû comme appellant à denegation de Droit , sans préalablement avoir sommé par écrit le Seigneur ou ses Officiers par trois diverses fois & inter- vales de temps , & à chacune d’icelles de trois en trois jours pour le moins, de lui faire & administrer Justice , & qu’il aparoisse desdites sommations par instrument autentiqne ; & en ce cas faut intimer le Seigneur que l’on a sommé pour soutenir son refus.
Article Cent-huit.
L’appellation ne peut être deserte sans déclaration du Juge Superieur, & que l’appellant ne soit adjourné pour ce
72Coutumes de la Marche ,voir faire, posé que le temps de relever soit passé : toute- fois le Juge qui a donné la Sentence la pourra, à la requeste de partie , mettre a execution après le temps de rele- ver passé.
Article Cent-neuf.
Si l’intimé se départ du profit de la Sentence aupa- ravant l’execution & reliefvement en cas d’apel ou après, il est néanmoins condamné ès dépens de l’appellant tels que de raison.


CHAPITRE SEIZE. Des Lods , Ventes & Achats.
Article Cent-dix.
REcision d’outre moitié de juste prix n’a point de lieu en vente de chose mobiliaire , ne en vente ou loüage de fruits faits à neuf ans & au dessous.
Article Cent-onze.
Noms, dettes & actions à chose mobiliaire sont reputez meubles.
Article Cent-douze.
Quand l’heritage est vendu à faculté de rachat & depuis est racheté dedans le temps de ladite Faculté ou prorogation d’icelle n’y a que unes lods & ventes , & ne les peut-on demander ès lieux où ventes sont duës à l’occasion dudit rachat , sinon que l’adite faculté eust esté baillée par intervale de temps après ladite acquisition.
Article Cent-treize.
Es lieux où ventes sont deuës, si en faisant contract de permutation
des Lots , Ventes & Achats.73permutation on baille pour contre-échange réaument & de fait fond ou rente certaine , sous faculté de rachat pour un prix contenu , & on rachete ladite chose , entre- contre échangée dedans trois ans, lods & ventes sont dûs de la premiere premutation au prix dudit rachat. Ainsi sont dûs lesdits lods & ventes quand on baille en contre- échange rentes incertaines à icelles asséoir & assigner à l’estimation d’icelles , & seront dûs dès le commence- ment audit cas , & seront pris les lods & ventes selon l’estimation de l’assiete , dont cy-après est faite mention.
Ces termes de la coutume ès lieux où ventes sont dûës , font entendre qu’en la Marche les lots & ven- tes ne sont pas dûs indistinctement à tous les Seigneurs de Fiefs ; ces droits sont à la verité une attribution & dependance de la directe , mais afin qu’un Seigneur puisse percevoir les droits de lots & ventes , il faut qu’il soit fondé en droit constitué & en une recon- noissance expresse à lui faite de la part du sujet des biens & heritages qu’il tient dudit Seigneur sous cette condition de lots & ventes , lesquels sont reglez par la coutume à vingt deniers pour livres, ce qui s’entend pour les heritages en directe franche & franche con- dition ; mais à l’égard des heritages de condition mortaillable , dans le cas où l’homme mortaillable peut vendre , suivant la faculté à lui accordée par l’article I48 ci après , en faisant la vente à homme de même condition & Seigneurie , le droit est reglé au tiers denier du prix du contrat de vente.


74Coutumes de la Marche ,Article Cent-quatorze.
En toutes Fermes baîllées au plus offrant , le dernier encherisseur à faute d’entretenir sa mise , est tenu de payer & soy mettre à la folle enchere, & ainsi des autres encherisseurs par ordre s’ils ne veulent entretenir leur mises , & sont tenu icelle folle enchere signifier à l’autre metteur precedent dedans vingt-quatre heures, & payer sadite folle mise , autrement sont tenus icelle entretenir.
Article Cent-quinze.
Es Fermes de Madame & des Seigneurs Justiciers en leurs Justices , y a outre l’estrousse droit de tiercer , qui est du tiers en montant de la premiere mise dedans huitaine de l’estrousse , & à l’autre huitaine ensuivant droit de doubler : mais ès autres Fermes n’en y a point s’il n’est reservé par les bailleurs ; & après le delay de quinzaine à compter du jour de ladite estrousse , aucun n’est receu soit metteur ou autre.
Article Cent-seize.
Si aucun alienne heritage à faculté de rachat , & en faisant l’alienation y a deception d’outre moitié de juste prix, ou que le contrat soit rescindable pour quelque autre cause , & que l’acquereur se demette à autre per- sonnes de la chose ainsi acquise, le bailleur pourra adresser ses remedes de Droit non seulement contre le premier acquereur , mais contre les derniers detempteurs , & chacun d’eux, ainsi font les Seigneurs ou lignagers quand à demander aucune chose par retrait ou prélation.

des Lots , Ventes & Achats.75Article Cent-dix-sept.
Si en faisant aucun Contrat par forme de vente y a faculté de rachat donné par même Contrat , ou tentost après & deception d’outre moitié de juste prix , & que le vendeur demeure detenteur de la chose par loüage ou autrement , le contrat est reputé nul , & doit l’acquereur compter au fort principal les loüages & fruits qu’il en aura reçûs.
Article Cent-dix-huit.
Si l’heritage duquel est dû lods & vente se baille par forme de loüage à dix ans & au dessus , comme à vingt ou vingt neuf années à une location ou diverses revolu- tions par un même Contrat, montant au temps dessus dit, tel Contrat est reputé Contrat de vente , & en sont dûs lods & ventes , & échet la chose à retrait lignager & à prelation par le Seigneur , & ainsi est si tel Contrat est fait en forme de vendition de fruits à tel & semblable temps & qualité.
Article Cent-dix-neuf.
Si le vendeur d’aucune rente ou heritage qui a faculté de rachat baille ses deniers ou au refus de l’acquereur les consigne par avant que le terme de la rente payer soit écheu , ou que les fruits de l’héritage vendu soient levez, il fait les fruits siens en payant les loyaux cousts & le droit du labourage de l’hritage si aucun en y a.
Article Cent-vingt.
En vendition de chose venduë par criées & interposi- tion de decret , rescision pour deception d’outre moitié de juste prix n’a point de lieu.

76Coutumes de la Marche ,Article Cent-vingt-un.
Qui achette en verd les bleds du laboureur & avant qu’ils soient recueillis, & fait prix d’iceux, à les recevoir après moisson est amendable d’amende arbitraire, & est le contrat nul & de nul valeur.
Article Cent-vingt-deux.
Toutes consignations soit pour rachat ou autre chose à quoy elles peuvent servir se doivent faire en deniers comptans , en or ou argent monnoyé , autrement sont nulles & de nul effet & valeur , & ne sont suffisantes en autre espece d’or ne d’argent non monnoyé.

                 
CHAPITRE DIX-SEPT. Des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables , nature & droits d’iceux.
Article Cent-vingt-trois.
EN la Marche , toutes personnes sont franches , & de franche condition , & ceux qui sont nommez & reputez Serfs & Mortaillables audit païs , c’est à cause des heritages qu’ils tiennent & possedent , quand lesdits heritages sont de ladite condition serfve ou Mortaillable.
Il n’y a point en la Marche de servitudes person- nelles , tous les heritages sont presumez être de fran- che condition, s’il n’apert du contraire ; on peut donc observer sur cet article en premier lieu que les droits de servitude ou de mortaillable condition n’affectent que les heritages & non les personnes , lesquelles en
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.77cette Province de la Marche naissent et vivent libres, & tels que ceux qui par le droit Romain étoient ap- pellez ingenui, sans que les personnes soient sujettes, à ces servitudes d’origine ou d’urine selon la façon de parler, comme il s’en trouve dans les provinces voisi- nes de Berry & de Combrailles , où il y a suite de servitude sur ceux de cette condition, soit qu’ils posse- dent les heritages mouvants du Seigneur , ou qu’ils les ayent abandonnez , & transporté leur domicile dans d’autres Provinces & lieux éloignez : nous avons un exemple de cette sorte de servitude personnelle, en la personne du Sieur Ribere né en Combrailles, dans la directe & mouvance serfve des Sieurs Chanoi- nes Reguliers de S. Augustin de la Ville d’Evaux en Combrailles ; le sieur Ribere ne possedoit lors de son decès aucun des anciens heritages de sa famille , il s’étoit établi dès long-tems en la Ville de Bourges , où il étoit devenu Professeur en Droit dans l’Univer- sité , & y étant mort sans enfans , sa succession fut vendiquée par lesdits sieurs Chanoines Reguliers d’E- vaux , & elle leur fut adjugée après avoir prouvé de leur part que ledit sieur Ribere étoit leur serf d’urine , c’est-à-dire, qu’il avoit pris naissance dans un lieu de- pendant de leur servitude.
Mais en la Marche le sujet ne possedant plus d’he- ritages de serfve ou mortaillable condition , ou l’ayant remi & guerpi dans les regles , il n’est plus tenu envers le Seigneur d’aucuns des droits réels établis par la coutume sur cette sorte d’heritages.

78Coutumes de la Marche ,Article Cent-vingt-quatre.
Par la Coutume de la Marche, quiconque doit à son Seigneur a cause d’aucun heritage, argent à trois Tailles, payable à trois termes , avoine & geline chacun an , il est reputé estre Serf Coutumier. S’il doit tels devoirs à homme lay , & s’il les doit à l’Eglise , il est reputé estre homme Mortaillable.
L’origine ancienne des rentes & redevances fon- cieres vient des conventions faites entre les Seigneurs & certains particuliers, suivant lesquelles les Seigneurs ont donné & delaissé en pure proprieté ausdits par- ticuliers, des fonds & heritages pour en jouïr & disposer par ledits particuliers comme de leur chose propre , à condition néanmoins de la part desdits particuliers de payer chaque année une certaine quantité d’argent , grains & autres choses conve- nuës, & il y a eu deux sortes de delaissemens fait à ce sujet desdits biens & heritages, l’un en directe fran- che, & l’autre en directe serfve ou mortaillable.
La qualité de rente ou redevance en directe fran- che, n’emporte et n’opere le payement que de ce qui a été accordé & convenu entre le Seigneur & le redevable dans les termes de la coutume.
Mais à l’égard de la directe serfve ou mortaillable le sujet conditionné doit outre les devoirs annuels consistant en argent, grains & pareilles autres choses que nous appellons quotité de rente, des devoirs extraordinaires imposés par la coutume , à raison
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.79de la qualité des heritages serfs ou mortaillables , tels que sont l’arbant chaque semaine , la vinade annuelle, par raport à ceux qui ont & tiennent des Bœufs la plus part de l’an , & autres devoirs cou- tumiers.
De ce que dessus il resulte plusieurs differences entre les hommes que nous appellons francs, c’est- à-dire, ceux qui tiennent leurs biens & heritages en directe franche, & ceux qui les tiennent en condi- tion serfve ou mortaillable , & qu’il y a encore des differences à faire , sur la qualité d’homme serf & sur celle d’homme mortaillable ; nous parlerons de ces differences à mesure que nous parcourerons les arti- cles de la coutume qui regardent le titre présent dix- septiéme.
Mais il convient de faire ici une observation par- ticuliere sur l’article I24 , suivant lequel la coutume a établi une servitude particuliere par la nature du devoir & prestation de la rente à l’égard des hommes serfs ou mortaillables qui en sont tenus par la paye- ment d’un argent à trois tailles, payables en trois termes , une certaine quantité d’avoine, & une pou- le ou geline chacun an , ce qui emporte à l’égard des debiteurs d’une pareille redevance , l’arbant , la vinade , & autres droits de servitude : C’est une na- ture de servitude que la coutume a établi au profit du Seigneur dès-lorsqu’il est en état de prouver qu’il lui est dû par le sujet une pareille redevance par titre ou possession valable.

80Coutumes de la Marche ,Article Cent-vingt-cinq.
Audit pays se peuvent faire les heritage serfs & mor- taillables en autres deux manieres ; c’est à sçavoir quand aucun a reconnu estre serf d’aucun homme lay ou mor- taillable d’aucune Eglise jure constituti , en asservant quelque heritage , ou quand aucun Seigneur a possedé & joüi des droits de Servitude sur aucun pour raison de l’heritage par lui tenu par l’espace de trente ans. Esquels deux cas tels reconnoissans ou possesseurs sont reputez serfs ou mortaillables , posé qu’ils ne doivent ou payent les rentes ordinaires de celuy qui est reputé serf coûtumier , & doivent seulement les rentes qu’ils ont reconnu & accoutumé , ensemble les autres droits de servitude.
Voici deux autres manières établies par la coutume de rendre des tenanciers d’heritages serfs ou mortail- lables : la premiere est , Jure constituti , par l’effet de la convention, ce qui ne fait pas de difficulté dès lors que cette convention est libre et volontaire , ne dé- rogeant pas aux bonnes mœurs : Et la seconde , est d’acquerir la servitude par la prescription, c’est-à-dire par une possession paisible & continuelle de la part du Seigneur de la prestation des droits de servitude sur les tenanciers par l’espace de trente ans, mais dans ce cas , cette prescription favorable au Seigneur de- vroit être reciproque de la part du sujet, supposé que celui-ci eut cessé d’acquiter les devoirs de servitudes pendant trente ans continuels & consecutifs , par lequel moyen il pourroit soutenir avoir acquis sa li- berté ,
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.8Iberté ; Nous estimons qu’il y a, à cet égard, indentité de raison ; nous n’avons point sçû qu’il y aye ey au- cun préjugé là-dessus , parce que nous n’avons point encore vû aucun cas où le Seigneur aye pretendu la servitude d’un heritage par la seule prescription.
Article Cent vingt-six.
Tous hommes reputez serfs coutumiers , ou autres à droit de servitude qui doivent taille en Aoust , doivent à leur Seigneur en une année le double d’Aoust , qui est pareille somme que ce qu’ils doivent en deniers de taille ordinaire rendable audit mois d’Aoust. Et en autre année ils doivent la queste courant , laquelle les Seig- neurs peuvent imposer pour icelle faire payer audit mois d’Aoust, selon la faculté des biens de sesdits hommes, pour- vû qu’elle n’excede plus que ledit double d’Aoust dû audit Seigneur par tous lesdits hommes qu’il a en ladite Chas- tellenie , sur lesquels il impose ladite queste ; laquelle doit être imposée également , le fort portant le foible. Comme si le double d’Aoust de tous les hommes que le Seig- neur a en la Chastellenie de Gueret ne peut monter que cent sols , ladite queste courant ne peut être imposée sur tous lesdits hommes que pour cent sols , & ainsi des au- tres Chastellenies : mais il en peut bailler à l’un de sesdits hommes pour ladite année plus qu’il ne doit double d’Aoust si la faculté de ses biens le porte , & à l’autre qui doit d’ordinaire par avanture plus de double d’Aoust , il le peut imposer moins , le fort portant le foible.
Article Cent vingt-sept.
Il est au choix du Seigneur prendre chacun an le double
82Coutumes de la Marche ,d’Aoust , ou ladite queste courant une année & le double d’Aoust en l’autre.
Il n’y a plus d’usage de ces sortes de devoirs de ce double d’Aoust ou queste courant dont il est parlé aux deux articles ci-dessus I26 & I27.
Article Cent vingt-huit.
Tout homme tenant serfvement son heritage , qui est reputé serf selon la Coutume ou par reconnoissance ou pres- cription, est tenu payer à son Seigneur la Taille aux qua- tre cas : c’est à sçavoir quand le Seigneur marie sa fille en premiere nôces , quand il se fait Chevalier , ou qu’il fait voyage outremer pour visiter la Terre-Sainte , ou qu’il est prisonnier de guerre pour le service de son Supe- rieur. Et peut être imposée ladite Taille, sur lesdits hommes tenans serfvement, à volonté raisonnable selon la faculté de leur biens , par le Juge dudit Seigneur s’il est Justicier, sinon par le Seigneur même, en signifiant à ses hommes pardevant leur Juge ordinaire ou autre competent l’impost par lui fait, à ce que, s’ils sont surindicts ou excessivement imposez , ladite Taille soit reduite & moderée arbitrio boni viri , & s’il est prisonnier des ennemis , est le cas rei- terable.
Article Cent vingt-neuf.
L’année que le Seigneur leve ladite Taille aux quatre cas , il ne peut lever queste courant, mais bien le double d’Aoust; aussi peut-il lever en une même année ladite Taille pour plusieurs desdits cas s’ils échéent en une même année, pourvû qu’elles soient imposées sur lesdits hommes raison- nablement & deducto ne egeant.

des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.83Il paroît par les deux articles ci dessus, que la cou- tume laisse à la volonté du Seigneur l’imposition de la taille aux quatre cas sur ses sujets qui tiennent de lui des heritages en serfve condition ; mais comme il est difficile de garder toutes les mesures de l’équité en sa propre cause , elle lui recommande une juste moderation par des paroles latines qu’elle a inceré dans les textes , arbitrio boni viri , deducto ne egeant : il est donc vrai que, si les sujets se plaignoient de l’excès de la taxe, il faut en ce cas avoir recours à la justice ; soit en s’en remetant volontairement de la part du Seigneur & du sujet, à des arbitres gens de bien , qui doivent considerer l’état des biens, des charges, & de la famille du même sujet ; soit en portant la contestation devant le Juge competant pour regler la taxe en connoissance de cause.
Mais il y a bien des difficultés, dans la pratique, à faire des regles certaines sur cette matiere : il convient cependant d’observer que le droit dont il s’agit en cet article est un droit de servitude , lequel consequemment n’a son raport qu’aux heritages qui sont tenus en directe serfve & serfve condition ; car en la Marche toutes les personnes sont franches , suivant la decision de l’art. I23 ci-dessus , & delà on pouroit induire que la taille serfve aux quatre cas ne doit être imposée que par raport aux fruits & revenus des heritages de serfve condition.
D’ailleurs la coutume desire que, deduction faite de la taille imposée, on l’aisse au sujet de quoi à vivre
84Coutumes de la Marche ,& subsister avec sa famille, par ces mots deducto ne egeant ; ainsi cette taille doit être taxée à propor- tion des revenus & de ce qui produit au sujet , soit de ses héritages , soit de son travail & commerce, & enfin après une distraction de ce qui lui est nécessai- re & à sa famille pour fournir à une subsistance rai- sonnable.
Cela présuposé on peut dire qu’à l’égard des gens de labeur , il y en a peu à qui il reste quelques choses de leurs revenus & profits , deduction faite de leurs subsistances , & que la plûpart n’en n’ont pas suffisament , les charges annuelles payées ; il est no- toire qu’en la Marche les terres y étant legeres, noi- res & maigres, on ne peut y cuëillir chaque année autant de grains qu’il en seroit nécessaire pour la subsistance des habitans , c’est ce qui oblige une grande quantité de Massons, Charpentiers & autres ouvriers, de partir de la Province tous les ans envi- ron le mois de Mars , pour porter leurs travaux dans d’autres Provinces du Royaume, & d’y rester au tra- vail jusques au mois de Decembre en suivant : & de- là ils en tirent deux avantages , l’un en ce que leurs absences donnent lieu à une moindre consommation des grains qui se cuëillent dans la Province , & cela fait qu’il s’en trouve ordinairement assez pour la sub- sistance des habitans qui restent ; & l’autre est, que lesd. ouvriers tirans quelques profits de leurs travaux, ils rapportent à leurs retours dans la province quel- ques moyens de fournir aux payemens de leurs im- positions , rentes & autres charges.

des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.85L’on voit par ces réflexions , la Justice & même la nécessité de n’imposer ladite taille serfve aux qua- tre cas, qu’avec prudence & dans une juste propor- tion ; il est vrai aussi que, quoique les cas arrivent sou- vent en la Marche par raport au grand nombre des Seigneurs & autres qui y possedent des fiefs & des di- rectes en conditions serfves, & qui sont en droit d’im- poser la taille serfve , soit à l’occasion du mariage de leurs filles ou autres cas , il n’est arrivé que peu de procès & contestations à l’occasion de pareilles taxes.
Il y a quelques années que Monsieur le Marêchal Duc de la Feüillade ayant été fait Chevalier des Or- dres du Roy , il imposa une taille sur ses hommes serfs des Châtellenies d’Aubusson, Felletin, Ahun, Chenerailles, Jarnage & Droüilles qu’il possede en la Marche par échange faite avec le Roy.
Un ancien Magistrat eût la principale direction de cette imposition , & les taxes en furent très-mo- derées, on se concilia là-dessus doucement de part & d’autre ; & le recouvrement en fut fait sans procès ; il seroit cependant bien à desirer qu’il y eût à cet é- gard quelque usage certain ou espéce de regle , qui servit à prevenir & éviter les contestations qui peu- vent resulter entre des sujets opiniâtres , & des Sei- gneurs avides , par la necessité d’en venir à des esti- mations par experts des revenus de leurs sujets & de leurs besoins ; il semble que la Coutume aye dicté là-dessus une voye par la disposition de l’art. I30 ci- après , qui veut que la taille aux quatre cas imposée sur l’homme franc , ou tenant des biens en directe
86Coutumes de la Marche ,franche , ne puisse être portée qu’à la même somme de denier & argent de rente, qu’il doit au Seigneur ; & de là on pourroit conclure & arbitrer , que la taille aux quatre cas imposée sur les hommes serfs seroit de la même quantité & valeur des rentes & droits courans de servitude que les possesseurs des biens serfs doivent annuellement au Seigneur ; on a souvent proposé ce temperament que nous croirions raisonnable, & même on prétend qu’il y a eû à cet égard une espece de préjugé par raport au sieur de Mornais, mais l’arrêt n’a pas été rendu public, & il a pû être rendu sur des circonstances particulieres & hors de la thése générale.
Il est absolument nécessaire de relever ici une opi- nion particuliere de Me Jabely en son commen- taire sur cet art. I28 en la page 64 , où il dit , que le Seigneur peut imposer sur les hommes serfs une taille dans le cas que sa fille se fait Religieuse ; d’autant , dit-il, que c’est un mariage spirituel , mais cette opinion est denüée de toute raison & fonde- ment en considérant.
I9. Que la coutume permet au Seigneur d’imposer la taille sur ses hommes serfs à l’occasion du mariage de sa fille en premiere nôces ; ces mots en premiere nôces peuvent-ils s’appliquer à une fille qui se fait Religieuse ?
29. Il n’est pas permis d’étendre la disposition de la coutume d’un cas à l’autre , il faut s’en tenir à la lettre , sur tout lorsqu’il s’agit de charges & de far- deaux odiosa restringenda.

des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.8739. De quel droit le nouvel Editeur veut-il ajoûter un cinquiéme cas à la coutume ?
49. L’esprit de la coutume est de soulager le Sei- gneur dans l’obligation qu’il a de dotter sa fille en la mariant , & de lui faire une dot proportionnée à sa condition ; mais ce qu’il donne pour sa fille qui se fait Religieuse , n’est appellé dot que par une espece d’u- sage & tolerance sans regles certaines, & cela est tou- jours bien au-dessous de ce qu’il seroit obligé de lui donner en l’établissant par le mariage ; en effet les fil- les qui se font Religieuses , déchargent les maisons , aussi n’y a t-il jamais eû d’exemple dans la Province , qu’un Seigneur se soit avisé d’imposer une taille sur ses hommes, sous pretexte que sa fille s’est faite Religieu- se ; & aucun n’a jugé à propos dans ce cas , ainsi qu’en certains autres , d’entrer dans l’opinion de l’E- diteur.
Article Cent trente.
Homme qui est franc ou tenant heritage en franchise à devoir d’argent , est tenu, envers le Seigneur, de qui il tient, payer la Taille aux quatre cas qu’on appelle Taille franche, jusques à telle somme que deniers qu’il doit cha- cun an; & s’il ne doit point d’argent, il ne doit rien de Taille aux quatre cas.
Article Cent trente-un.
Lesdites Tailles sont imprescriptibles par l’homme franc ou tenant serfvement au préjudice des Seigneurs , & pa- reillement la quotité d’icelles , sinon que l’on prouve &
88Coutumes de la Marche ,fasse apparoir du contraire soit par l’exemption , limi- tation , abonnement ou prescription , laquelle ne com- mence sinon du jour de la contradiction.
Article Cent trente-deux.
Le Seigneur Justicier, sujet de la Comté de la Marche à cause de la Justice en la Marche, n’a point de Taille aux quatre cas; ains seulement le Seigneur direct & foncier duquel l’heritage est mouvant.
Nous croyons devoir ici, à l’occasion du present cha- pitre I3 , marquer certaines differences que nous avons observées , d’abord entre les hommes francs & les hommes serfs ou mortaillables, & ensuite entre lesd. Hommes serfs & les hommes mortaillables.
I9. Lorsque l’homme franc vend son heritage de directe franche, il n’est dû au seigneur que des lots & ventes à raison de vingt deniers pour livre du prix de la vente, suivant l’art. I50 ci-après ; & encore faut-il que le droit de lots & ventes soit dû & fondé sur titre , ou droit constitué ; & pareil heritage franc peut être librement vendu , donné & surchargé , sans le consentement du Seigneur ; & celui qui tient pa- reil heritage venant à deceder sans enfans ou parens communs , ses parens collateraux lui succedent libre- ment , ils peuvent partager l’heritage aussi bien que les meubles, se separer & se réünir entre eux comme bon leur semblent sans congé du Seigneur.
29. L’heritage franc est sujet au retrait lignager, qui est même preferé au retrait féodal, en cas de muta- tion.
39.

des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.8939. Les heritiers de la femme qui meurt sans en- fans, succedent librement à la dot qui a été portée & reçûë par son mari, homme de franche condition , & assignée sur les biens de cette qualité.
Il faut observer encore que les heritages de serfve ou mortaillable condition , qui sont distinguez par la qualité des Seigneurs, s’ils sont Laïques ou Ec- clesiastiques , sont sujets à autres charges , que ceux de franche condition ; quoiqu’entre ceux-ci, les mor- taillables le soient moins , comme il paroîtra par la déduction suivante.
Les serfs & mortaillables sont cependant égale- ment sujets à la commise en cas de desaveu formel de la directe de leur Seigneur ; mais il y a peu d’exem- ples de l’execution de l’art. I56 de la coutume à cet égard.
Le bien serf ne peut être vendu ni aliené sans le consentement du Seigneur , sous la peine rigoureuse de la commise art. I46 ; mais à l’égard du bien mor- taillable, l’alienation en est permise à homme de sem- blable condition & de même Seigneurie dont de- pend l’heritage ; & dans ce cas les droits de ventes dûs au Seigneur , sont du tiers deniers du prix, & l’heritage vendu peut être sujet au retrait lignager art. I47 , I48 & 262 : à quoi il faut ajouter pour dif- ference avantageuse , entre l’homme mortaillable & l’homme serf, que l’homme n’est point sujet à la tail- le aux quatre cas comme serf, & que celui-ci n’est point reçû à porter valablement temoignage pour
90Coutumes de la Marche ,son Seigneur , ce qui est permis au mortaillable.
Enfin , quoique le sujet tienne & possede l’herita- ge de serfve ou mortaillable condition , comme les droits & devoirs réels, dont l’heritage est tenu ou au- quel il est assujeti par la coutume, ne regardent que le Seigneur, il y a lieu de dire qu’en toutes occasions où ces droits Seigneuriaux ne sont pas interessez , le sujet qui est personnellement de libre & franche condition , est en droit d’user du droit commun & de pouvoir dire à tout autre qu’au Seigneur , quantum ad te, liberas ædes habeo.
Article Cent trente-trois.
Madame a droit de Taille aux quatre cas sur tous ceux qui sont en sa directe ; car tout est tenu d’elle en franchise directe, servitude, fief ou arriere fief, sinon sur les hommes de ses Justiciables tenans d’eux en franchise , servitude, ou en condition mortaillable.
On voit par la disposition de cet article qu’il n’y a point de biens allodiaux en la Marche ; toute rente reconnuë sur un fonds certain, emporte donc la direc- te Seigneurie , si le tenancier n’est vendiqué par un autre Seigneur qui puisse justifier d’un titre plus an- cien ou plus exprès ; & si un heritage n’est chargé d’aucune rente envers un Seigneur , il est censé être de la directe du Roy , qui est maintenant au lieu de Madame , qui étoit pour lors Anne de France, fille du Roy Loüis XI, Comtesse de la Marche , Duchesse d’Auvergne & de Bourbonnois, comme nous l’avons
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.9Ici-devant marqué dans le préambule des nos observa- tions, à moins que le proprietaire de l’heritage ne fasse voir qu’il le tient en fief ou en arriere fief : mais cette directe présumée se doit toujours entendre de la directe en franche condition car, ainsi que nous l’avons deja dit, tous heritages en la Marche sont pré- sumez de franche condition , s’il n’apert du contraire.
Article Cent trente-quatre.
Tout homme tenant serfvment son héritage, ou mortail- liablement, doit faire par chacune semaine à son Seigneur le Ban ou Arban , c’est à dire , une corvée à bras du me- stier qu’il sçait faire : & s’il fait Arban avec deux boeufs, il en vaut deux : Si avec deux boeufs & charette , il en vaut trois ; & s’il le fait avec quatre boeufs & charette , l’Arban en vaut & est compté pour quatre , sinon qu’il y ait usance ou convenance au contraire , par laquelle il en doive moins.
L’arban est dû , soit qu’on aye un grand ou petit heritage , en serfve ou mortaillable condition, & soit que le sujet reside ou non sur ledit heritage.
Il est dû à differents Seigneurs, si l’homme pos- sede des heritages conditionnés de divers Seigneurs ; mais , si l’un des Seigneurs acquiert & réünit en sa personne les autres seigneuries, le sujet ne doit plus qu’un arban chaque semaine ; que si il arrive une division des heritages conditionnés entre les enfans du tenancier ou autrement , en sorte qu’il y aye plusieurs propriétaires separés chefs de famille , cha- cun d’eux sera tenu à l’arban envers le Seigneur.

92Coutumes de la Marche ,Article Cent trente-cinq.
L’homme tenant serfvement ou en droit de mortailla- ble , n’est tenu faire Arban plus loin qu’il ne puisse retour- ner de jour en sa maison , soit en Châtellenie ou dehors.
Article Cent trente-six.
Outre est tenu tout homme qui tient heritage serf ou mortaillable , s’il a boeufs la pluspart de l’an, à aider à son Seigneur d’une paire de boeufs, ou d’une charette s’il l’a , au choix du Seigneur , pour aller au vin ou vignoble le plus aisé & convenable pour le Seigneur & pour ledit homme, en fournissant par ledit Seigneur ou faisant four- nir par ses autres hommes , ou du sien propre, le surplus qui est necessaire pour vinade entiere & la dépense accou- tumée: & n’est tenu ledit homme aider à conduire ledit vin ailleurs qu’en la Châtellenie ou ledit homme est dé- meurant.
L’homme serf ou mortaillable est tenu de faire la vinade en espece en étant sommé en tems dû , si il a bœufs la plûpart de l’an , quand même il n’au- roit pas un heritage conditionné suffisant pour tenir une paire de bœufs.
Article Cent trente-sept.
Vinade entiere est entenduë de deux paires de boeufs & une charette , & droit de bouade est d’une paire de boeufs ou d’une charette.
Il s’est, sur cet article, glissé une faute dans l’édition de la coutume de I6I8 , sur ce qu’on y a imprimé
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.93le mot de voüade , au lieu de celui de boüade, cette faute a été corrigée par Caillet dans son édition de I573 , & cette faute ne se trouve pas non plus dans les autres éditions, où l’on a mis avec raison le mot de boüade , en effet le terme propre vient à bobus , & d’un travail de bœufs.
Article Cent trente-huit.
Quiconque est tenu faire vinade , soit homme franc ou tenant heritage serf ou mortaillable , il est au choix du Seigneur de le contraindre à faire ladite vinade , pourvû que ledit Seigneur lui somme de tel temps que le sujet puisse étre de retour à la saint Martin d’hyver ; en ce cas le Seigneur a l’option de le contraindre de faire icelle vi- nade , ou prendre pour vinade entiere quinze sols , & du plus plus , & du moins moins : mais si ledit Seigneur n’a sommé sondit sujet de faire ladite vinade devant la saint Martin , en tel temps qu’il puisse être de retour en sa maison à ladite saint Martin , il est à l’option du serf de faire ladite vinade , ou de payer lesdits quinze sols pour vinade entiere, ou du plus plus, ou du moins moins; & ou ledit serf , sommé en temps dû & auparavant la saint Martin, auroit été refusant de faire ladite vinade , en ce cas ledit serf est tenu à la vraie & juste estimation de la- dite vinade , & des dommages & interêts du Seigneur auquel est dûë ladite vinade.
Article Cent trente-neuf.
Homme tenans heritages serfs ou mortaillables, qui n’ont boeufs tout le long de l’an , ne sont tenus aller à la
94Coutumes de la Marche ,vinade: mais sont quittes envers leur Seigneur; c’est à sça- voir, celui qui doit vinade entiere pour quinze sols , & les autres pour plus ou moins au prix dessus dit ; mais si l’hom- me a charette, & le Seigneur la veut, il sera tenu la bail- ler , & sera quitte de cinq sols en déduction de la vinade.
Article Cent quarante.
L’homme franc qui doit vinade de rente par droit re- connu ou constitué , doit satisfaire aux interêts s’il ne l’a fait , ait boeufs ou non.
La vinade qui est dûë par l’homme de franche condition, étant établie par reconnoissance , devient un droit dont le payement se regle comme celui de la quotité ordinaire de la rente, & non comme la vinade coutumiere.
Article Cent quarante-un.
Homme qui tient heritage mortaillable n’est tenu, en- vers l’Eglise dont il tient, à double d’Aoust, queste, courant ne Taille aux quatre cas; & jaçoit ce qu’il fut de nou- vel acquet par l’Eglise d’aucun Seigneur Lay, qui para- vant eût sur lui les droits dessus dits, bien doit pour raison dudit heritage mortaillable faire ban, arban & vinades, comme fait l’homme tenant serfvement : & si tel tenant mortaillablement revient à main laye , il retourne à sa première nature, touchant le double d’Aoust, queste courant, arbans, & taille aux quatre cas, & autres droits de ser- vitude.
Article Cent quarante-deux.
Le Seigneur peut contraindre son homme tenant heri- tage de lui serfvement ou mortaillablement à faire feu vif
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.95& residence sur l’heritage tenu de lui en l’une ou l’autre desdites conditions , si ledit heritage est suffisant pour y entretenir une paire de boeuf : & à faute de ce faire , se peut ledit Seigneur moyennant Justice faire emparer dudit heritage & le faire declarer à lui acquis : & s’il y a plu- sieurs personnes communs audit heritage , l’un pourra fai- re feu vif & payer les droits de servitude pour tous les au- tres ses consorts.
Le Seigneur a interêt que l’homme serf ou mor- taillable qui a heritage suffisant pour y tenir une paire de bœufs, fasse sa demeure & feu vif sur ledit heri- tage ; car outre qu’en ce cas il est plus à portée d’être servi et payé des rentes & devoirs établis sur les biens : Il est certain, I9. que l’heritage étant habité est mieux tenu , 29. cette habitation attire au Seigneur, qui a un moulin dans la banlieuë, le droit de mouture, qu’on appelle monage , 39. cela donne occasion au Sei- gneur de succeder aux meubles de son sujet dans le cas de l’article I52 cy-après.
Le dernier Editeur dans sa note en cet article, cite un arrest du I0 Avril I693, rendu entre le sieur Tournyol Seigneur de la Faye , & Gilberte Clostrier niece de Jean Clostrier, homme serf dudit sieur Tour- nyol ; il s’agissoit de la succession mobiliaire dudit Jean Clostrier, pretenduë par ledit sieur Tournyol , qui consistoit en des meubles, bestiaux & autres effets de quelque consideration : Gilberte Clostrier, disoit pour sa deffense que Jean Clostrier son oncle, étant decedé dans un lieu de franche condition & non au
96Coutumes de la Marche ,lieu des Marlaus, où il possedoit ses biens serfs, elle ne vouloit pas contester la succession au profit dudit sieur Tournyol desdits biens tenus de sa directe serfve , attendu le decès dudit Jean Clostrier sans hoirs ni parens communs ; mais qu’à l’égard des meubles & effets mobiliers delaissez par ledit Clo- strier , n’étant point decedé dans une maison de la directe serfve dudit sieur Tournyol, il n’y pouvoit rien prétendre , & que ladite Gilberte Clostrier étoit en droit de l’avoir & retenir , comme plus proche parente habille à lui succeder, quand à ce , audit Jean Clostrier.
Le sieur Tournyol repliquoit, en insistant en sa de- mande , que si la défense de ladite Gilberte Clostrier avoit lieu, cela donneroit occasion a des fraudes con- tinuelles , en ce que , un homme serf qui se verroit sans enfans , ou parens communs , & qui se trouve- roit aisé & commode par une possession de meubles & effets , ne manqueroit pas pour en priver le Sei- gneur , & aussi-tôt qu’il se verroit en danger ou dans la crainte d’une mort prochaine , de se faire trans- porter de la maison serfve, pour éviter d’y mou- rir, & détourner par-là l’effet de la succession mobi- liere devoluë de droit au Seigneur , suivant ledit art. I52 , qui ne fait point de distinction.
Cependant sur ce qu’il fut prouvé & établi au procès de la part de Gilberte Clostrier, que le domi- cile de son oncle, quoique dans un lieu franc assez proche, avoit été établi de bonne foi , avec residen-
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.97ce continuelle par plus d’an & jour, & que par d’au- tres circonstances on fit cesser apparament la presom- ption de fraude ; la Cour se determina à debouter ledit sieur Tournyol de sa demande , & a adjuger la succession mobiliére à ladite Clostrier, aux charges de la coutume.
Article Cent quarante-trois.
Si l’heritage serf ou mortaillable n’est suffisant pour entretenir une paire de boeufs, l’homme n’est tenu y faire feu vif & residence : toutefois est tenu payer les rentes & tout droit de servitude comme s’il y demeuroit ; mais s’il veut & voit que l’heritage ne vaille les charges, il le peut quitter & delaisser en payant les rentes & droits écheus.
Article Cent quarante-quatre.
Arbans, bans & vinades qui sont dûs par droit de ser- vitude ou mortaillable condition, ne chéent en arrerages, s’ils ne sont requis & commandez , c’est à sçavoir la vina- de dedans l’an , & les arbans dedans la semaine ; & à faute de faire ledit arban , doit le redevable düement som- mé , trois sols à son Seigneur , lesquels il peut demander par Justice ; & de ladite sommation sera crû ledit Seig- neur, son messager ou serviteur en l’affirmant par serment.
Article Cent quarante-cinq.
L’homme tenant heritage serf ou mortaillable , & qui a payé ses droits & devoirs échûs , doit être reçû à gur- pir & délaisser l’héritage qu’il tient en l’une desdites con- ditions ; & après la gurpie ou quittance reçûë par le Seigneur il n’a aucune poursuite sur la personne dudit
98Coutumes de la Marche ,homme , ses enfans , ni ses autres biens.
La raison en est que nos servitudes sont réelles & proinde rem sequntur.
Article Cent quarante-six.
L’homme qui tient heritage de serfve condition ne peut vendre , donner , surcharger , ni autrement aliener , sans le congé de son Seigneur , ledit heritage qu’il tient de lui en droit de servitude par Contrat entre-vifs , ou par dispo- sition ayant trait à mort ; & s’il fait le contraire , ce qu’il en a aliené doit être declaré acquis audit Seigneur.
L’homme serf peut engager ou hypotequer son heritage sans peril de la commise qui n’échoit qu’en cas d’alienation ; mais en cas de decès de l’homme serf sans hoirs , ni parens communs , le Seigneur ne laisse pas de succeder à l’heritage & s’en mettre en possession , sans être tenu d’aucunes charges , dettes & hypoteques contractées par ledit homme serf , à moins que le Seigneur ne se rendit heritier des meu- bles : il y a pourtant une exception admise par notre usage , par raport à la dot de la femme d’un hom- serf , par lui reçûë , ainsi que nous l’expliquerons sur l’art. I68 ci-après.
Cependant le Seigneur est libre de donner son consentement à l’alienation proposée par l’homme serf, & peut en ce cas stipuler une somme ou autres conditions qu’il avisera , ce qu’on appelle droit de composition.
Il y a encore un cas auquel le Seigneur , suivant
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.99l’usage constant de la Province , ne peut éviter l’a- lienation de l’heritage serf ; c’est lorsqu’un créancier legitime d’un homme serf faute de payement de créance , fait saisir réellement & vendre par decret en Justice le bien saisi ; auquel cas , l’usage est que l’acquereur paye au Seigneur le tiers denier du prix de l’adjudication par decret , ce qui a été reglé sur le pied de l’art. I48 ci-après , pour la vente du bien mortaillable à homme de même condition & Seig- neurie ; & cette forme de vente par decret a été in- troduite pour maintenir quelque credit aux hommes serfs , lesquels sans cela ne pourroient trouver rien à emprunter pour leurs besoins les plus pressans , tels que leurs alimens & habillemens pour eux & leurs enfans , ou gens de leurs familles ; & il a paru con- venable de ceder à une pareille raison d’équité, & à ne pas laisser la risque à un legitime créancier de per- dre sa dette , s’il n’avoit pas lieu d’en venir à la pour- suite d’une saisie réelle du bien de son debiteur , & d’être autorisé à le faire vendre par decret.
Au surplus, pour établir le droit de commise, dont il est question au present art. I46, il ne suffit pas que le contrat d’alienation fait sans le consentement du Seigneur soit signé & parfait dans sa forme, il faut de plus que l’acquereur se soit mis en possession réelle de l’heritage serf , avant d’avoir pris & reçû ledit consen- tement.
Et si dans le contrat de vente de la serfve condition de l’heritage est declarée de la part du vendeur , le
I00Coutumes de la Marche ,peril de la commise tombe sur l’acquereur , & non sur le vendeur , qui n’est reputé avoir consenti à la vente qu’à condition que l’acquereur la seroit aprou- ver au Seigneur avant de prendre la réelle possession de l’heritage, d’autant plus qu’on ne doute pas que lorsque le Seigneur agrée la vente moyennant un droit de composition, c’est à l’acquereur à le payer & à y satisfaire.
Article Cent quarante-sept.
L’homme tenant l’heritage mortaillable ne peut ven- dre , permuter , surcharger , ou autrement aliener , par maniere que ce soit l’heritage mortaillable , sans le congé de son Seigneur , si ce n’est à homme de semblable condi- tion , & de même Seigneurie , dont dépend son heritage : & s’il fait le contraire , l’heritage ainsi vendu ou aliené doit être declaré acquis au Seigneur de qui il étoit tenu.
Article Cent quarante-huit.
Si l’homme tenant heritage mortaillable vend icelui heritage à homme de même condition & Seigneurie , il est dû au Seigneur d’Eglise duquel il tient pour droit de lods & ventes le tiers denier du prix qui est de trente sols , dix sols : toutefois si en aucun lieu particulier les Seigneurs des heritages mortaillables en ont accoûtumé prendre plus ou moins , ils en useront comme ils ont fait par cy-devant.
Article Cent quarante-neuf.
Si celui qui a acheté l’heritage mortaillable ne paye les lods & ventes dans quarante jours , les ventes doublent: Et s’il differe de payer lesdits lods & ventes jusques après
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.I0Ian & jour , le Seigneur peut faire saisir par sa Justice ou par la Justice de son Seigneur, l’heritage, & joüira des fruits, & fait lesdits fruits siens jusques à ce qu’il aura payé les- dits lods & ventes ; & ainsi est des hommes francs & des heritages tenus en censive ou franchise, és lieux où lods & ventes sont dûës.
Les lots & ventes dûs par les hommes mortaillables, dont il est parlé en cet article étans fixez au tiers de- nier du prix , la coutume veut qu’ils soient payez au double , si l’acquereur ne presente son contrat au Seigneur dans quarante jours ; mais le droit de com- position dû par les hommes serfs ne doit pas doubler parce qu’il n’est pas fixé par la coutume , & que le Seigneur a le choix de rendre le contrat inutile s’il re- fuse de l’approuver , & que même il peut avoir par commise le total de l’heritage si l’acquereur s’en met en possession réelle sans le consentement dudit Seigneur.
Nous estimerions au reste qu’à l’égard de l’aliena- tion de l’heritage serf par decret en justice, auquel, suivant notre usage , le Seigneur est forcé de consen- tir en recevant pour droit le tiers denier du prix , il y a une vraye raison d’équité , que lorsque l’acquereur par decret de l’heritage serf, neglige de payer ledit tiers denier au Seigneur dans quarante jours , il en- courre la peine d’un double droit , de même qu’il est decidé pour la vente de l’heritage mortaillable.
Article Cent cinquante.
Lots & ventes des heritages francs par la coutume gé-
I02Coutumes de la Marche ,nérale és lieux où elles sont dûës n’excedent vingt deniers pour livre.
Comme ces mots , és lieux , ou lots & ventes sont dûës , donnent à entendre que ce droit n’est dû qu’en certains lieux , & non indefiniment pour raison des heritages dependans de la directe des Seigneurs, ainsi que nous l’avons observé ci-devant sur l’art. II3 , il est certain & d’usage constant , fondé sur des senten- ces & arrêts de la Cour , que les Seigneurs directs ne peuvent demander le droit de lots & ventes dans les cas où ils sont fondez à le pretendre , si ce n’est en vertu d’un titre exprès & constitutif dudit droit de lots & ventes de la part du tenancier , ou de ses au- teurs ; la chose a été ainsi jugée par un arrêt solomnel du Conseil d’Etat du Roy , du premier Juillet I684 , rendu entre les Fermiers du Domaine du Roy & les Habitans de la ville d’Ahun : Il y a un certain canton et territoire aux environs de la ville d’Ahun , & de même aux environs de la ville de Guerret, où les te- nanciers possedent leurs heritages en directe franche, sans toute-fois aucunes charges de lots & ventes dans le cas des ventes & alienations desd. heritages ; cela vient de ce que les anciens Comtes de la Marche ayant accordé volontairement des concessions aux te- nanciers , de posseder les heritages en directe franche, sans aucunes stipulation & reserve expresse du droit de lots & ventes , & Sa Majesté qui se trouve aujour- d’hui aux droits desd. Seigneurs, Comtes de la Marche, ayant accepté la coutume, elle s’est renduë sujette aux
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.I03dispositions qu’elle contient, & ce fut là le motif de l’arrêt du Conseil ci-dessus cité rendu en connoissance de cause.
Article Cent cinquante-un.
Entre hommes tenans heritages serfs ou mortaillables le chanteau part le villain , c’est-à-dire , que quand deux ou plusieurs desdits hommes parens ou autres qui par avant étoient communs , font pain separé par maniere de déclaration de vouloir partir leurs meubles , ils sont tenus & reputez divis & separez quant aux meubles , acquests, conquests , noms , dettes & actions.
Le mot de Villain employé en cet article signifie villageois , derivant de Villâ , ou maison rustique.
Il s’induit dudit article , & il est d’usage que quoiqu’il n’y aye point de communauté expressement contractée entre les hommes serfs ou mortaillables , ils en contractent néanmoins une tacite , & qui est valable , lorsqu’ils habitent ensembles & vivent au même feu & du même pain & chanteau , pour leurs meubles & acquêts possedez en une maison serfve, ou mortaillable ; cela a été ainsi jugé par arrêt pour les nommez du Broüillet de la paroisse de Bonat.
Article Cent cinquante-deux.
Le Seigneur succede à son homme tenant son heritage serf ou mortaillable , qui decede sans hoirs descendans d’icelui ; sinon que ledit homme qui tient ledit heritage serf ou mortaillable ait à l’heure de son decès aucuns pa- rens qui soient communs avec lui en meubles & immeu-
I04Coutumes de la Marche ,bles, lesquels en ce cas sont preferez au Seigneur en ladite succession : mais si par le chanteau les meubles sont reputez partis , le Seigneur succedera aux meubles , acquests & conquests , noms , dettes & actions , & le parent qui étoit commun avec le trespasse succedera aux immeubles , qui n’étoient partis ni divis au temps du decès.
La disposition de l’article precedent I5I , sert à établir le droit du Seigneur de succeder aux meubles & effets mobiliers de l’homme serf ou mortaillable qui decede sans hoirs ou parens communs, attendu la division du feu & de l’habitation.
Article Cent cinquante-trois.
Ceux qui tiennent heritages serfs ou mortaillables , qui une fois ont parti leurs immeubles , ne se peuvent réünir & rassembler quant ausdits immeubles sans le congé de leur Seigneur au préjudice de son droit successif: mais s’ils ont parti seulement leurs meubles, ils les peuvent remetttre ensemble comme paravant , sans congé dudit Seigneur.
La raison en est, que les meubles sont libres , & n’ont point de suite , & qu’il n’y a que les immeu- bles qui soient declarez serfs ou mortaillables.
Article Cent cinquante-quatre.
Homme tenant heritage serf ou mortaillable peut ac- querir & posseder l’heritage franc , & d’icelui disposer sans le congé du Seigneur duquel il tient ledit heritage serf ou mortaillable , sinon que tel heritage franc eût été possedé par ledit homme tenant ledit heritage serf ou mor- taillable , demeurant & faisant feu vif sur l’heritage serf
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.I05ou mortaillable , l’espace de trente ans , après lequel laps de temps l’heritage franc devient de la condition du serf ou mortaillable , & la pire condition attire à soi la meilleure ; toutefois si le Seigneur de qui est tenu l’herita- ge franc continuë la perception de sa rente sur l’homme serf ou mortaillable , il conserve à lui la perception d’icelle par trente ans & perd la directe Seigneurie seulement , & s’il laisse encourir prescription sur lui , c’est au profit de l’homme tenant ledit heritage serf ou mortaillable , & de ceux qui lui doivent succeder ; mais le Seigneur de qui l’heritage est tenu , peut dedans trente ans , si bon lui sem- ble , faire vuider à l’homme tenant ledit heritage serf , ses mains de tel heritage franc pour la conservation de sa directe; & n’a lieu telle prescription entre les hommes du vassal , & ledit Seigneur du Fief , entre les hommes serfs des vassaux , quand acquerront des hommes francs du Seigneur du Fief , ni pareillement entre les hommes serfs.
Article Cent cinquante-cinq.
A faute de payer par l’homme les droits de directe ou fondalité ou de condition de servitude , ou mortaillable n’y a point de commise de fait en la Marche : mais le Seigneur à faute , de payement de trois ans & la presente ou de moins, peut si bon lui semble proceder par execu- tion s’il est en possession , ou par action , ou assûrement pardevant le Juge competant , selon que la coutume l’or- donne : néanmoins peut formellement , s’il est cessé par quatre années continuelles dernieres , conclure à ce que le
I06Coutumes de la Marche ,tenancier soit contraint payer les arrerages ou quitter la terre , & doit à ce obtenir; & si après la sentence donnée, ledit tenancier ne veut payer , le Juge doit delivrer la terre au Seigneur pour les arrerages , & si elle ne vaut les arrerages , reserver son action pour les restes & dé- pens sur le défendeur & ses autres biens.
Article Cent cinquante-six.
Si l’homme tenant l’heritage serf ou mortaillable desa- vouë son Seigneur , l’heritage qu’il desavouë tenir est ac- quis au Seigneur qu’il desavouë , & doit ainsi être déclaré par Justice à l’encontre dudit homme , en montrant par ledit Seigneur l’heritage être tenu de lui en l’une desdites conditions ; & néanmoins peut être convenu pour les arré- rages & droits de servitude encourus , & pour les in- terests si aucuns en y a.
Article Cent cinquante-sept.
Si queste courant n’est imposée & demandée judicielle- ment dans l’an qu’elle doit être imposée , elle est prescrite , & ne se peut plus demander pour celle fois.
Article Cent cinquante-huit.
Les enfans ou neveux en directe ligne demeurans sur l’heritage franc , peuvent succeder à leur pere & ayeul respectivement ès meubles & heritages par lui tenus en serfve ou mortaillable condition, jaçoit qu’ils demeurent separément par feu, chanteau & demeurance de leursdits pere & ayeul; & en defaut d’eux pourroit succeder esdits heritages seulement autre prochain parent dudit homme , s’il êtoit commun, quant audit heritage serf ou mortailla-
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.I07ble, jaçoit qu’icelui parent venant à ladite succession fut demeurant sur l’heritage franc separé dudit deffunt: mais esdits cas ou l’un deux , celui ou ceux qui succederont esdits heritages, seront tenus faire feu vif, & tous autres droits de servitude selon la nature & qualité desdits heri- tages serfs ou mortaillables.
Article Cent cinquante-neuf.
L’homme qui tient heritage serf ou mortaillable peut succeder à son parent commun ou separé ès bien & heri- tages tenu en franche condition ; mais sera permis au Seigneur dudit heritage franc en faire vuider les mains du serf , comme dit a été dessus.
Article Cent soixante.
Quand le Seigneur succede à l’homme qui tient de lui heritage serf ou mortaillable , si ledit Seigneur succede & s’empare des meubles du défunt , il est tenu de payer ses dettes ; mais s’il repudie les meubles , & s’empare de l’heritage , il sera tenu faire faire les obseques du défunt , & n’est tenu payer lesdites dettes.
Article Cent soixante-un.
Le Seigneur ne peut contraindre aucun tenant portion d’heritage tenu en droit de servitude ou condition mor- taillable, à faire residence, ni payer les devoirs de servi- tude , tant qu’il y a autre commun ou personnier audit heritage , qui les fasse & paye.
Article Cent soixante-deux.
Si aucun tient heritage serf ou mortaillable de deux
I08Coutumes de la Marche ,ou plusieurs Seigneurs , & que sa succession adviene aus- dits Seigneurs , chacun d’eux succede en son heritage. Et quant aux meubles , acquests , conquests , noms , dettes & actions , le Seigneur sur l’heritage duquel ledit hom- me faisoit feu vif & residence au tems de son trépas, y succede.
En effet par la coutume generale du Royaume , la disposition des meubles suit la Loy du domicile.
Article Cent soixante-trois.
Femmes tenans heritages serfs ou mortaillables , sont de semblable condition comme les hommes, quant ès droits de servitude & mortaillable condition.
Article Cent soixante-quatre.
Queste courant double d’Août , arbans , vinades , & tous autres droits de servitude , sont dûs par celui qui tient heritage serf ou mortaillable , combien qu’il ne face feu vif ou residence sur ledit heritage , & qu’il demeure en autre Seigneurie.
Article Cent soixante-cinq.
Le Seigneur ne peut demander à l’homme tenant de lui heritage serf ou mortaillable argent pour vinade ni pour arbans , s’il les veut faire dedans le tems sur ce in- troduit ; & ne peut ledit Seigneur vendre ou transporter à autrui la commodité d’iceux vinades & arbans , mais faut qu’il les employe à son usage , & de son hôtel , & non ailleurs.
Article Cent soixante-six.
Si aucun Seigneur baille à ferme sa seigneurie , l’ac-
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.I09censeur se peut aider des arbans pour amander ou recuëillir les fruits des heritages dudit Seigneur , non mie pour les appliquer à lui , ni à son heritage ; & peut faire faire la vinade pour mettre le vin en la maison dudit Seigneur , si lui ou ledit accenseur y font residence.
Article Cent soixante-sept.
En vendition de chose tenuë en serfve condition ou mortaillable , retrait lignager n’a lieu , sinon que entre mortaillables la chose fût venduë à leur parent tenant de même qualité & Seigneurie.
Article Cent soixante-huit.
Si femme tenant serfvement heritages d’aucun Seigneur, est mariée à homme qui tient heritage serf ou mortailla- ble d’autre Seigneur , & meurt sans hoirs descendans d’elle, la peculiere dot & meuble qu’elle a apportée , & payée lui a été , appartient par succession au Seigneur de l’heritage serf de son mari , & non au Seigneur dont elle est partie & quant à ce qui reste à payer , il demeure à celui qui la promise , & à ses hoirs ; & si elle est mariée à homme franc , les heritiers qui lui devoient succeder lui succederont.

Quoique l’article I46 de la presente coutume , contienne une prohibition precise & très-rigoureuse à l’homme serf de donner , surcharger ni autrement aliener son heritage sans le congé de son Seigneur, il a été considéré depuis la redaction de la Coutume , que la condition des hommes serfs deviendroit trop malheureuse , si cette prohibition avoit lieu à la
II0Coutumes de la Marche ,lettre , par raport aux dots des femmes ou filles avec lesquelles ils peuvent se marier , s’ils n’avoient pas la liberté d’assigner , & réaliser les dots sur leurs biens de directe serfve , cela même interessant les bonnes mœurs & l’ordre public ; ainsi il a été introduit en usage que l’homme serf peut valablement recevoir la dot constituée en deniers à la femme ou fille qu’il épouse, & en faire l’assignat sur son bien serf , avec stipulation de restitution de ce qui sera & aura été payé de ladite dot à ladite femme si elle survit son mari , en sorte que s’il arrive que l’homme serf ou mortaillable vienne à deceder sans enfans , & que par là , il y aye ouverture à succeder de la part du Seigneur au bien serf ou mortaillable delaissé par led. homme , le Seigneur duquel depend ledit bien ne peut s’en emparer sans être tenu de payer & restituer à la femme survivante, ce qui a été reçû de la dot & qui se trouve assigné sur le bien serf ou mortaillable : il y a même eû pour cette decision une determina- tion particuliere et d’équité , tirée du present article I68 , qui veut que si la femme mariée a un homme serf ou mortaillable , meurt la premiere sans hoirs decendans d’elle , le Seigneur est en droit d’obliger le mari survivant qui est son homme serf , de lui rendre & raporter ce qu’il a reçû de la dot de ladite femme ; & que dans cette circonstance il ne seroit pas juste que le Seigneur ayant la risque de succeder à ce qui a été payé de la dot de la femme à laquelle le mari survit , il ne courut celle de faire pareille resti-
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.IIItution à la femme survivante.
Mais il faut cependant faire ici une observation bien importante, qui est , que le Seigneur succedant à l’homme serf ou mortaillable decedé dans le cas de l’article I52 ci-dessus , n’est tenu de restituer à la femme survivante ce qui a été payé de sa dot , qu’a- près deduction faire de la valeur des biens francs , si aucuns étoient possedez par ledit homme serf ou mortaillable au jour de son decès, ensemble la val- leur des meubles & effets mobiliers appartenans audit homme & à sa succession , c’est-à-dire, que ledit Seigneur peut obliger la femme de discuter les biens francs & meubles du mari , pour tenir compte de la valeur jusques à concurence de ce qui peut être dû à la femme pour restitution de sa dot , à moins que le Seigneur dans le cas dudit art. I52 n’accepte & pre- tende la succession mobiliere de son homme , au- auquel cas il sera tenu de payer & restituer à la femme ce qui lui est dû de sa dot , suivant l’article I60 , at- tendu que cette dot est reputée une dette de la suc- cession ; il y a à cet égard plusieurs préjugés.
Il a été aussi décidé que la femme devenant par son mariage , de la même condition de son mari , l’homme mortaillable peut valablement disposer par testament du tiers de son bien au profit de sa fem- me , & reciproquement la femme peut faire pareil- le disposition de son bien au profit de son mari ; ce- la a été expressement jugé par sentence de la Sené- chaussée de Gueret , entre les sieurs Celestins des
II2Coutumes de la Marche ,Ternes, & le nommé Pierre Brunet : cela ne fait plus de difficulté.
Article Cent soixante-neuf.
L’homme tenant heritage serf ne peut porter temoi- gnage pour son Seigneur , duquel il tient sond. heritage , mais si fait bien le mortaillable.
Article Cent soixante-dix.
Si l’homme tenant heritage serf ou mortaillable s’en va hors ledit heritage sans le congé de son Seigneur du- quel il tient , s’il revient dedans trente ans , il peut reprendre ledit heritage dedans ledit tems , en payant les arrerages et droits encourus , deduction faite des fruits , & ne le peut le Seigneur refuser.
Article Cent soixante-onze.
Si avoine & geline sont dûs par le tenancier de l’heri- tage serf ou mortaillable , à cause de rente ordinaire , ladite avoine & geline ne croit point par partage fait entre telles manieres de gens ; mais si ladite avoine & geline sont dûs à cause de feu & servitude , ladite geli- ne croît & en sont autant dûs au Seigneur , comme les- dits tenanciers ont fait de portions & feus separez ; aussi croît ladite avoine plus ou moins selon la coutume des lieux ; & ainsi est-il de la seigle dûë en autres lieux à cause des boeufs arans.
Article Cent soixante-douze.
Tenans heritages serfs ou mortaillables ne peuvent en contrat de mariage & faveur d’icelui disposer de leurs biens au proft d’autres que de leurs enfans , qui leur peuvent succeder.

des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.II3La prohibition de disposer est certaine pour les hommes serfs à autres qu’au profit de leurs enfans ; mais à l’égard des mortaillables , comme il leur est li- bre de disposer du tiers de leurs biens par testament au profit d’homme de même condition & Seigneu- rie , l’usage a approuvé que dans les contrats de ma- riage des hommes mortaillables , on puisse stipuler valablement un don reciproque , du futur à la futu- re , qu’on appelle gain nuptial dans les contrats ordi- naires des hommes francs, pourvû que ce don n’ex- cede pas chacun de leur part , le tiers de leurs biens dont ils ont la faculté de disposer, suivant notre ob- servation faite sur l’article I68.
Article Cent soixante-treize.
Si aucun roturier tient deux heritages ou hebergemens de deux Seigneurs fonciers en condition serfve ou mor- taillable , & il se veut remuer de l’heritage où il tenoit feu vif, pour aller à l’autre , & le Seigneur où il demeu- roit ne le veut souffrir , il faut qu’il reside et fasse feu vif , & paye les droits de servitude accoutumés ou qu’il quitte l’heritage : car audit cas homme qui tient heritage d’aucun Seigneur en condition de servitude ou mortailla- ble ne peut faire de nouvel autre feu vif ni residence per- sonnelle s’il ne plaît à son Seigneur où il demeuroit , mais bien peut quitter l’hetitage en payant les droits encourus.
Nos observations faites sur l’article ci-devant I42, établissent les justes raison qu’à le Seigneur d’engager son homme serf ou mortaillable , de faire feu vif &
II4Coutumes de la Marche ,residence sur l’heritage , & le present article impose avec raison une obligation absoluë & fondée de quit- ter & guerpir ledit heritage, s’il veut se dispenser d’y faire residence.
Article Cent soixante-quatorze.
Celui qui a payé à son Seigneur les cens ou devoirs seigneuriaux de la derniere année , & est prest d’affir- mer qu’il a payé les precedentes , doit être quitte , sinon que le Seigneur veüille montrer par lettres ou témoins , qu’en prenant payement de ladite derniere année a pro- testé, ou a été reservée & son action ou poursuite des préce- dentes ; autre chose seroit si le payement dernier a été fait generalement en deduction de ce qui seroit dû des années passées.
Article Cent soixante-quinze.
On ne peut demander arrerages que de quatre années , compris la presente , si l’on ne montre sommation ou dili- gence des precedentes.
Il est certain que la disposition du present article a été faite dans une vraie vuë d’équité , autant pour les Seigneurs , que pour leurs sujets qui leur doivent des rentes foncieres ; en effet, il convient au Seigneur de se faire payer promptement de ses rentes sans laisser accumuler des arrerages de plusieurs an- nées , dont le payement devient toûjours très-diffi- cile & incommode au sujet ; & par la même raison, celui-ci a un interêt sensible de payer chaque an- née, autant qu’il peut à son Seigneur , la rente qu’il
des Hommes Francs , Serfs , ou Mortaillables.II5lui doit : parce que à deffaut de payement, le Seigneur ou son fermier est en droit de poursuivre & de faire faire en justice une évaluation & liquidation, au frais du sujet, des grains faisant partie de la quotité de rente duë par ledit sujet, ce qui lui est toûjours onereux ; dailleurs , dans les cas où il y a differens tenanciers solidaires pour la même rente , si l’un d’entre eux pris & poursuivi comme solidaire, n’a pas payé sa quotité , il s’expose à être tenu des frais des poursuites qui sont souvent considérables ; au lieu que s’il avoit payé sa quotité de rente, il éviteroit les- dits frais, & les pouroient faire supporter au cotenan- ciers en retardement de payer , en leur denonçant la poursuite solidaire.
Article Cent soixante-seize.
Celui qui doit rente fonciere ou autre droit seigneurial pour raison d’aucun heritage est tenu , aux dépens du Seigneur une fois en sa vie , faire montre oculaire à sondit Seigneur de l’heritage qu’il tient de lui ; ou s’il affirme que nonobstant qu’il ait accoutumé payer , il ne sçait sur quel heritage la rente est düe , & le Seigneur ne peut montrer , le redevable est tenu asseoir ladite rente ou devoir sur heritage valable.

C’est avec raison que Me. Charles du Moulin par sa note sur cet article , s’est un peu recrié sur ce qu’il y a de l’injustice d’obliger le Seigneur de faire les frais de la montre oculaire , au lieu d’imposer ces frais au sujet , au moins pour une fois en sa vie , ainsi
II6Coutumes de la Marche ,même qu’il se pratique pour les titres nouvels pour les rentes constituées , qui se font aux depens du de- biteur ; mais la loy se trouvant faite, il n’y a qu’a bais- ser les yeux & s’y soumettre ; cependant les Seigneurs ont un grand & sensible interêt de connoître les he- ritages qui sont dependans de leur directe , surtout ceux qui n’ont que des anciens titres & terriers où les heritages ne sont pas declarés ; car sans cela, en cas de vente & alienation de la part du tenancier , com- ment le Seigneur pourroit-il contraindre l’acquereur de lui payer les droits , lots & ventes dûs , s’il n’étoit pas en état d’établir que l’heritage vendu depend de sa directe , & lui a été expressement reconnu ?

CHAPITRE DIX-HUIT. Des Fiefs & Droits d’iceux.
Article Cent soixante-dix-sept.
LE Seigneur Justicier n’est fondé d’être Seigneur féo- dal de tout ce qui est situé en sa jurisdiction.Article Cent soixante-dix-huit.
Le vassal ou tenant en franchise ou censive peut charger la chose ainsi tenuë de rente annuelle sans le congé du Seigneur , & ne doit être la surcharge declarée acquise au Seigneur dont il tient , mais le Seigneur la peut pren- dre par retenuë si bon lui semble , dedans quarante jours à tempore exhibitionis des contrats ou notification faite à personne ou domicile au Seigneur , son Receveur ou
des Fiefs & Droits d’iceux.II7Procureur en presence de témoins , ou prendre vente de prix au lieu où ventes sont dûës , & si la chose sur la- quelle la rente est venduë vient ès mains du Seigneur , dont elle est tenuë par quittance gurpine ou autrement , c’est au choix du Seigneur de laisser la chose au rentier , & se faire payer de son devoir , duquel il sera toûjours premier payé , & des premiers fruits , ou retenir ledit héritage & payer ladite rente qui sera reputée rente seche.
Par ces derniers mots rente seche , il est entendu une rente qu’on appelle volante constituée à prix d’argent ou autre chose , & qui est toujours racheta- ble , & dont par conséquent on peut faire cesser l’ef- fet moyennant le rachat.
Article Cent soixante-dix-neuf.
La chose tenuë en Fief censive ou franchise se peut ven- dre sans le congé du Seigneur , & pour ce n’échet en commise.
Article Cent quatre-vingt.
Il au choix du Seigneur direct feodal ou foncier ve- nir par action personnelle pour le payement de ses droits Seigneuriaux contre le detenteur de la chose de lui tenuë , ou venir par saisie ou empêchement sur ladite chose , & en faire defendre au detenteur tous uz & exploits : mais toutefois ledit Seigneur direct ne peut proceder par execu- tion sur les meubles du tiers detenteur , sinon que ledit tiers detenteur eût passé titre nouveau & fût obligé , ou que le Seigneur direct fût en possession de recevoir ladite rente dudit tiers detenteur , comme si ledit tiers detenteur
II8Coutumes de la Marche ,eût ja payé une année ou deux ladite directe : car ès cas dessus dits le Seigneur direct peut proceder contre le tiers detenteur par execution sur ses meubles , & si sur la posse- ssion y a debat par devant le Juge , le Seigneur en doit faire apparoir dedans huitaine ou plus brief delay à l’arbi- trage du Juge , autrement le detenteur aura delivrance de ses gages , avec dommage & interêt , & si cependant le delay d’informer le defenseur veut bailler caution il recouvrera ses gages par provision.
Article Cent quatre-vingt-un.
Si le Fief est ouvert du côté du vassal par mort ou au- tre mutation d’homme , le Seigneur peut saisir & mettre en sa main la chose feodale quarante jours après l’ouver- ture , & iceux passez durant la saisie , & depuis icelle dûëment signifiée en personne ou domicile du vassal , son Procureur , entremetteur de ses affaires , ou au Fermier du lieu en presence de temoins, fera les fruits siens jusques à ce qu’il aura homme qui ait fait la foi & hommage.
Article Cent quatre-vingt-deux.
Mais si l’ouverture advient parmutation du Seigneur, le vassal n’est tenu faire foi ni hommage jusques à qua- rante jours après que le Seigneur aura fait crier ses fiefs ou signifier à son vassal qu’il fasse son devoir par saisie dûement signifiée ou autrement.
Article Cent quatre-vingt-trois.
Celui qui achette Terre és lieux ou ventes sont dûës , est tenu de les payer dedans quarante jours & exhiber ses
des Fiefs & Droits d’iceux.II9contrats, autrement les ventes doublent; & s’il cesse d’ex- hiber & payer dedans an & jour , les fruits de la chose sont acquis au Seigneur à qui lesdites ventes étoient dûës, declaration sur ce faite par juge competant, partie appellée.
Article Cent quatre-vingt-quatre.
Si aucun Fief est divisé entre deux freres ou autres personnes , chacun des detenteurs est tenu faire foy & hommage de ce qu’il tient ; & ne peuvent les freres ou autres en faisant tel partage retenir à l’un deux l’hommage de l’autre au préjudice du Seigneur ; mais si après le trépas de pere & de mere à plusieurs enfans sur- vient quelque Fief, & entre iceux y ait quelques mineurs, ou que ledit Fief en attendant partage soit possedé par iceux par indivis , en ce cas l’aîné pourra porter l’hom- mage pour tous : mais la division faite, un chacun fera son hommage pour sa part.
Article Cent quatre-vingt-cinq.
Celui qui pretend aucun tenir de luy en foy & homma- ge , le peut convenir pour avoüer ou desavoüer dedans le terme qui lui sera prefix par le Juge ; & s’il desavoüe & le requerant fait apparoir la chose être tenuë de son Fief, celui qui a desavoüé perd le Fief , car qui Fief denie , Fief perd.
Article Cent quatre-vingt-six.
Le vassal est tenu bailler sa nommée par écrit à son Seigneur féodal dans quarante jours après le serment de fidelité par lui fait , sinon qu’il ait de respit de sondit Seig-
I20Coutumes de la Marche ,neur de plus long terme ; & à faute de bailler ladite nommée , peut le Seigneur saisir les fruits , mais pour ce ne les fait siens ; ains doivent demeurer en main tierce jusques il ait eu sa nommée, & si dedans autres quarante jours de lad nommée baillée , le Seigneur ne la debat , elle sera tenuë pour veritable à son préjudice.
Il est à remarquer que le Seigneur suserain est en droit d’obliger le vassal de lui representer les titres de proprieté & possession de son fief , avant d’être tenu de contredire ou contester la nommée ou denom- brement du fief qui lui aura été fournie par le vassal , afin de le mettre en état de ce faire qu’une contesta- tion valable & dans les regles.
Article Cent quatre vingt-sept.
La façon d’entrer en hommage d’autrui est telle : c’est- à sçavoir que le Seigneur feodal doit être requis humble- ment par son homme qui veut faire foy & hommage d’ê- tre reçu à foy ayant la tête nuë ; & si le Seigneur se veut seoir faire le peut : & le vassal se doit desceindre sa cein- ture s’il en a , ôter son épée & bâton , & soi mettre à un genoüil , tête nuë ; & dire ces paroles , si le vassal n’a autre pour lui qui les dise ,, Monsieur ou Madame ,, j’entre vers vous en foy & hommage, & m’avoüe votre ,, assal pour raison d’un tel lieu que je tiens de vous à cause ,, de votre Seigneurie de tel lieu , & vous promets & jure ,, vous servir dorénavant envers & contre tous, & accom- ,, plir tout le contenu ès Chapitres de fidelité , vieux & nou- ,, veaux ,, & si le Seigneur veut, avant que le recevoir , il
des Fiefs & Droits d’iceux.I2Iles peut faire declarer. Et ce fait , le Seigneur doit dire , je vous reçois à hommage, sauf mon droit & l’autrui , & en signe de ce, le baiser à la joüe, & après la reception , lui peut & doit enjoindre de bailler sa nommée dedans quarante jours.
Article Cent quatre-vingt-huit.
Si le vassal fait la foi & hommage au Prince , il doit être à deux genoux : si c’est à un moindre , suffit d’être à un genoux : & est accoutumé que le vassal doit avoir les mains jointes , & le Seigneur les doit prendre entre les sienes en le recevant & baisant.
Article Cent quatre-vingt-neuf.
Si l’hommage est fait à moindre que du Prince, le vassal en faisant le serment peut dire , je vous jure & promets fidelité & service, fors contre le Roy & le Prince de qui vous tenez, & quand il ne le diroit, le Superieur est toû- jours excepté , & si le serment est fait au Prince , il peut excepter la personne du Roy & son Fils aîné.
Article Cent quatre-vingt-dix.
Si le Seigneur veut, avant la reception le vassal jurera sur les saintes Evangiles.
Article Cent quatre-vingt-onze.
Et pour ce que les Seigneurs qui connoissent leurs vas- saux de bonne volonté , dispensent desdites solemnitez qui sont introduites par usage raisonnable ; si l’hommage est autrement fait que ce que dit est , n’est fait préjudice aux droits du Seigneur du vassal que autrefois ne se face l’hommage en la maniere que dit est.

I22Coutumes de la Marche ,Article Cent quatre-vingt-douze.
Le Seigneur n’est tenu , si bon ne lui semble , recevoir le vassal à foi & hommage par Procureur nec è contrà, fors le Prince.
Les Seigneurs de Fiefs de la Marche qui relevent du Roy , ont obtenu de Sa Majesté une derogation de cet article , par un arrêt du Conseil du mois de Septembre I724 , & sur la representation faite , que devant faire la foy hommage au Bureau de Messieurs les Tresoriers de France de la Ville de Moulins , éloi- gnée d’une grande distance de la Marche , les frais des voyages étoient considerables & incommodes , surtout pour certains vassaux dont l’état & la santé ne permetoient pas de faire des voyages en personnes, & dans ces considerations, Sa Majesté a eu la bonté d’admettre lesdits vassaux à faire leur foi hommage par procuration.
Article Cent quatre-vingt-treize.
Le Seigneur qui par faute d’homme a saisi le Fief de son vassal , si nonobstant la saisie faite par le Seigneur du Fief , le vassal a pris les fruits de son Fief , & requiert aprés à être reçû à foi & hommage , n’est tenu recevoir sondit vassal qu’il ne paye & retablisse les fruits encourus depuis la saisie faite par le Seigneur feodal : mais pour empêcher que tels fruits ne croissent , le vassal les peut consigner en main de Justice.
Par une note faire par Me. Charles du Moulin sur sur cet article , il a remarqué avec raison , une erreur
des Fiefs & Droits d’iceux.I23faite dans les éditions de la coutume , sur ces mots , de la pénultiéme ligne du present article, ne croi- ssent. Il faut dire , n’acroissent , ce qui est le verita- ble sens.
Au surplus il faut remarquer que le Seigneur qui a saisi le Fief de son vassal faute de foi & hommage , a droit aux fruits & revenus du Fief , tant ordinaires que casuels , à proportion du tems que dure la saisie , ledit tems comparé à celui de toute l’année ; c’est-à- dire que si, par exemple , la saisie a duré deux mois , le Seigneur peut demander un sixiéme du revenu an- nuel du Fief , nonobstant même que dans le tems de ces deux mois , il n’aye été recuëilli aucuns fruits.
Article Cent quatre-vingt-quatorze.
Si le vassal est nouvel tenancier , il peut faire foi & hommage à celui qui l’a sommé de ce faire pour sauver les fruits , & protester par ladite fidelité faite qu’il n’entend faire faux aveu si le Fief se trouvoit tenu d’ailleurs ; laquelle protestation faite comme dit est , lui sauvera la commise , si la chose est trouvée être tenuë d’aucun autre Seigneur. Neanmoins sera tenuë la foi & hommage ainsi faits pour pure & simple quant à celui à qui elle avoit été faite , s’il n’appert d’autre Seigneur feodal.
Article Cent quatre-vingt-quinze.
Pour mutation d’homme ou Seigneur , le Seigneur feo- dal n’a aucun droit sur son vassal , fors la bouche & la main s’il n’y a expresse reconnoissance au contraire.

I24Coutumes de la Marche ,La nature des Fiefs de la Province de la Marche est sans doute très-belle & considerable, en ce que les vas- saux ne doivent , lors des mutations , aucune charge en deniers , mais seulement la foi hommage au Seig- neur suserain , ce qui s’appelle la bouche & les mains.
Article Cent quatre-vingt-seize.
Le vassal perd son Fief en trois cas : c’est à sçavoir par felonie & par faux aveu ou desaveu formel.
Nous n’avons pas d’exemple, qu’un vassal aye per- du son Fief par l’évenement de pareil cas , & il fau- droit que la faute du vassal fut bien marquée & com- mise par pure malignité & désobeïssance en connois- sance de cause , pour qu’en justice on imposa la pu- nition à la rigueur ; il est cependant de la prudence autant que du devoir du vassal, de ne pas s’y exposer.
Article Cent quatre-vingt-dix-sept.
Le Seigneur feodal n’est tenu si bon ne lui semble rece- voir son hommage , sinon au lieu d’où dépend le Fief.
Article Cent quatre-vingt-dix-huit.
Le Seigneur doit recevoir le Tuteur de son vassal pupille ou le Curateur de son adulte sous âge de vingt ans , en faisant par lesdits Tuteur ou Curateur diligence suffisante ou leur bailler souffrance : & aussi au vassal malade ou necessaire absent.
Article Cent quatre-vingt-dix-neuf.
Tout ainsi que le vassal peut vendre ou aliener son Fief sans le congé du Seigneur , le Seigneur peut vendre ou aliener son droit de Fief sans consentement du vassal.

des Fiefs & Droits d’iceux.I25Il faut ici remarquer que le seigneur suserain ne peut détacher son droit de suseraineté & en faire l’a- liénation sans en même tems vendre & aliéner les fonds du Fief suserain , auquel il est annexé , d’autant plus qu’il est prescrit par la Coutume , que la presta- tion de la foi & hommage doit se faire au lieu du Fief suserain.
Article Deuxcens.
Quand aucun a fait foi & hommage , & après vend ou aliene partie de son heritage , il demeure chargé pour le tout des services , sauf son recours à l’encontre de ses per- sonniers qui tiennent partie de la chose feodale. Ainsi est-il du fils aîné qui a fait l’hommage pour ses freres qui depuis ont parti ; mais après le partage fait du Fief , chacun pour sa part est tenu faire hommage & service selon la qualité du Fief.
Article Deux cens un.
S’il y a plusieurs Seigneurs féodaux communs par in- divis d’un même Fief , & que les portions soient entre-eux inégales , le vassal peut faire hommage à celui qui a la plus grande portion , tant pour lui que pour les autres Sei- gneurs féodaux.
Article Deux cens deux.
Si les portions sont égales & entre freres ou enfans , le- dit vassal est quitte en faisant l’hommage à l’aîné.
Article Deux cens trois.
Et s’ils sont autres que freres , enfans ou heritiers par
I26Coutumes de la Marche ,commun , il suffit se transporter au lieu ou place dont dé- pend ledit Fief : & illec faire sa foi & hommage à celui desdits Seigneurs féodaux qui se trouvera sur le lieu : & en leur defaut , à la porte dudit Chastel ou place.
Article Deux cens quatre.
Ont lieu les choses susdites quant à la foi & hommage : mais quant ès profits & droits de Fief, comme de commise de la chose féodale ou fruits d’icelle , ou autres profits di- visibles , ils se départent entre les Coseigneurs féodaux pro rata.
Article Deux cens cinq.
Le vassal qui veut faire foi & hommage à son Sei- gneur après requisition ou main mise se doit transporter au lieu dont dépend le Fief : & illec se mettre en devoir selon la nature & qualité du Fief.
Article Deux cens six.
Et s’il ne trouve ledit Seigneur , ou le trouve , & ledit Seigneur le refuse sans cause raisonnable , ledit vassal se peut presenter devant la porte d’icelui lieu & place dont dépend ledit Fief : & illec en presence de Notaire & té- moins , faire ses foi & hommage , comme il feroit s’il trouvoit son Seigneur féodal ou autre pour lui ; toutefois ledit vassal est tenu attendre son Seigneur féodal au lieu & place dont dépend ledit Fief , l’espace de vingt-quatre heures , s’il est requis de ce faire par les gens & Officiers dudit Seigneur féodal : néanmoins ledit vassal est tenu en faisant ledit hommage à la porte dudit lieu & place dont dépend ledit Fief , en l’absence dudit Seigneur féodal ou
des Fiefs & Droits d’iceux.I27de gens de par lui commis, notifier son devoir & diligence à sondit Seigneur féodal dedans les quarante jours qu’il est tenu bailler sa nommée , afin que le Seigneur féodal soit assuré de son Fief ; & de ce en bailler instrument con- tenant le serment de fidelité requis & accoutumé.
Article Deux cens sept.
Et si le vassal veut faire ses foi & hommage de son gré & volonté & sans y être contraint par main mise ou em- pêchement , il est tenu chercher son Seigneur féodal en per- sonne , ou qu’il soit dedans le païs où le Fief est assis & si- tué : & en defaut de ce ledit vassal peut faire sa foi & hommage à la porte dudit Château , comme dit est.
Article Deux cens-huit.
Quand le Seigneur féodal a saisi son Fief & fait assig- ner jour certain à son vassal pour faire son devoir au lieu & place dont dépend son Fief ou ailleurs dedans la Châtel- lenie , le vassal est tenu se trouver audit jour et lieu pour faire ses foi & hommage, autrement à faute de soi y trou- ver , le vassal est tenu faire la foi en la personne de son Seigneur féodal ou qu’il soit dedans le païs.

     :           
CHAPITRE DIX-NEUF. Des Testamens, Successions Testamentaires , & ab intestat , & partage de Biens.
Article Deux cens-neuf.
LE mort saisit le vif son plus prochain heritier habile à lui succeder ab intestat, sans autre apprehension de fait.

I28Coutumes de la Marche ,Article Deux cens-dix.
Aucun soit noble soit roturier ne peut , par testement ou autre disposition ayant trait à mort , disposer de ses biens , sinon de la tierce partie & au dessous ad pias causas ou autrement à son plaisir; en laquelle tierce partie sont compri- ses toutes les funerailles & tous legats : tellement que les deux tier- ces doivent demeurer franchement & quittement à l’heri- tier ab intestat sans charge de funeraille & legats. Et s’il y a don ou legat fait à plusieurs personnes , & le tout ex- cede la tierce partie , sera reduit au tiers , au sol la livre. Et si le pere ou la mere avoient disposé dudit tiers au profit de l’un de ses enfans , telle donation ou disposition est bonne & valable ; toutefois elle demeure chargée de toutes les dettes , obseques funerailles & legs Testamentaires : & joüira ledit donataire par preciput & avantage pardessus ses autres freres & soeurs , sans d’icelle en faire aucun rapport.
En verité la disposition de cet article est bien sin- guliere en chargeant l’enfant legataire du total du pa- yement de toutes les dettes du défunt , outre les legs testamentaires & frais funeraires ; au lieu que si pareil legs du tiers est fait à un étranger , celui-ci ne sera te- nu que de payer le tiers des dettes, & par là la coutu- me rend la condition de l’étranger legataire meilleure que celle de l’enfant , ce qui paroit repugner à la rai- son & à l’équité ; mais apparemment qu’on a eu en vûë de tendre autant qu’on pourroit à une égalité des biens entre les enfans , qui sont tous appelez par le droit

des Testamens & Successions.I29droit du sang & de la nature , à avoir une portion égale dans les biens de la succession , ainsi que cela seroit sans la disposition testamentaire , ce qui a pû former le motif de la restraindre.
On avoit autrefois élevé un doute , pour sçavoir si l’enfant legataire du tiers devoit être tenu de payer & raporter à ses coheritiers, ce qui avoit été reçu par leur pere commun de la dot & biens dotaux de leur mere, & on alléguoit des raisons pour & contre ; mais enfin il a été décidé & mis en usage , que la dot de la femme reçuë par le mari étant une reprise à faire sur sa succession & une dette de ladite succession , l’enfant legataire ne pouvoit éviter d’en faire le rap- port & le payement, attendu que la coutume le char- ge de toutes les dettes personnelles du défunt testa- teur indistinctement, il est vrai qu’ayant une portion de son chef dans la succession , il est en droit de re- tenir la part à lui afferente dans ladite dot & biens de sa mere ; on voit donc par là qu’en cette coutume on peut être heritier & en même tems legataire.
Article Deux cens onze.
Entre filles , soit en ligne directe ou collaterale n’y a point de droit d’aînesse en succession , mais autant em- porte l’une comme l’autre.
Article Deux cens douze.
En succession collaterale advenuë à mâles seulement, ou à femelles seulement, ou à mâles & femelles par ensemble, n’y a point de droit d’aînesse.

I30Coutumes de la Marche ,Dans l’édition de la coutume faite par Vernoy , sur laquelle nous avons fait nos observations , il y a sur le present art. 2I2, une note de Me. du Moulin , qui est fort remarquable en deux points ; l’un en ce qu’il certifie qu’il a été en la Ville de Guéret deux fois : l’une en l’année I562 , & l’autre en I564 , qu’il a eu occasion d’y visiter lui-même le livre en forme de la coutume qui y étoit conservé , & d’avoir differen- tes conferences avec les Officiers & Praticiens du lieu : c’est aparament pour lors qu’il eut aussi lieu de veri- fier les erreurs qui se trouvent dans les trois premieres éditions de la coutume faites en I526 , I573 & I604 , & cette verification ayant été faite sur une copie autentique de la coutume , on ne peut s’em- pêcher d’y defferer : l’autre point est que , suivant l’usage alors observé & depuis continué, la prerogati- ve du double lien, n’a pas lieu en la Marche en ma- tiere de successions, en sorte que les heritiers legiti- mes y sont admis chacuns à leur égard, dans le droit & ordre que la coutume l’a prescrit.
Article Deux cens treize.
En succession directe entre nobles & de chose noble, où il y a mâles & femelles qui succedent par ensemble, le mâle a droit d’aînesse sur les filles , pose qu’il soit moins aîné d’elles , & sur tous les autres freres moins nez , & em- porte l’aîné fils , & si l’aîné étoit trépassé , son fils aîné , le Chastel ou Maison principale tel qu’il voudra choisir & élire , soit paternel ou maternel pour droit d’aînesse : & d’avantage en cette maniere , que s’il y a Chastel ou place
des Testamens & Successions.I3Iforte , & il y a fossé ou fossez , & dedans la clôture desd. fossez il y a granges , étables ou autres choses , ils demeu- reront à l’aîné ou à son fils comme dessus , reservé que s’il y avoit aucun moulins , pressouer ou four bannier , l’aîné pourra si bon lui semble recompenser ses autres heritiers de leurs parts & portions , autrement lesdits moulins, pres- souers & fours se partiront également : & outre l’enclos desd. fossez , quarante toises de terre à prendre au bort desd. fossez par dehors , tant que lesd. quarante toises se peuvent étendre à l’entour desdits fossez ; tellement que si en quelque côté dudit Chastel ou place forte lesdites qua- rantes toises ne se peuvent trouver , il n’aura que ce qui se trouvera à chacun côté , & ne se pourra recompenser aux autres lieux , & s’il n’y a point de Chastel ou place forte, fossé ou fossez , il aura la maison , & outre ce qu’il est enclos , soit mur ou de pal , quarante toises tout entour à prendre de ladite clôture soit mur ou de pal , si n’y a mur ou pal ou autre clôture en ladite maison , le tout comme dessus ; & est ladite toises de six pieds.
Article Deux cens quatorze.
Choses nobles appartenans à roturiers se partent entre eux par égales portions , & n’a lieu droit d’aînesse.
Article Deux cens quinze.
Entre parens qui sont communs en biens & perseverent en communauté jusqu’au trépas de l’un deux , le survi- vant ou survivans succedent au premourant ou premourans, decedez sans hoirs de son corps, és biens communs entre eux, posé qu’il y ait autre en plus prochain ou pareil degré de lignage.

I32Coutumes de la Marche ,Cet arricle selon notre usage doit être executé à la lettre pour les hommes de serfve ou mortaillabe condition , parens & indivis aux termes de l’article I52 ci-dessus ; mais à l’égard des hommes de fran- che condition , il faut pour donner lieu au droit suc- cessif que la communauté soit établie de tous biens , par un contrat formel , & la simple indivision ne sufit point , & comme le present article ne demande pas que dans le contrat de communauté il y aye un pacte successif ; on doit se tenir à cet égard au sens li- teral de la coutume ; cela a été jugé ainsi par une Sentence de la Senéchaussée de Gueret renduë en I692 , à l’occasion de l’ordre du prix des biens du sieur du Moulin-Neuf.
Il a été aussi jugé que la communauté contractée entre deux freres indivis dont l’un étoit mineur , avec pacte de se succeder mutuellement, étoit vala- ble ; il y avoit une sœur du mineur , laquelle avoit été mariée hors de la maison & dotée , avec renon- ciation , & le mineur étant mort , ladite sœur pre- tendit la moitié de la succession , & même obtint pour y parvenir des lettres de recision contre la re- nonciation faite par son contrat de mariage , mais elle fut deboutée de sa demande en enterinement desdites lettres , & le total de la succession fut ad- jugé au frere majeur commun en tous biens avec le deffunt ; c’est l’arrêt rendu au profit du sieur de Sou- volle , contre la Dame du Magilier , qui a fait ma- xime en cette occasion.

des Testamens & Successions.I33Article Deux cens seize.
Les parens succedent les uns aux autres tant que le lignage se peut prouver ; c’est à sçavoir les parens du cô- té paternel és biens de l’estoc paternels, & les maternels és biens provenus du côté maternel.
Cet article ne peut souffrir aucune difficulté à l’é- gard des immeubles , ou propres réels , mais il y a quelques années que quelques particuliers avoient voulu établir en la Province , la doctrine d’une pre- tenduë confusion , en disant que quoi que par le contrat de mariage , contenant une constitution de dot en deniers au profit de la femme , avec stipu- lation que la dot delad. femme demeureroit assignée & réalisée sur les biens du mari , pour sortir nature de propre , fonds & heritages à ladite femme , aux siens & à ceux de son estoc & ligne , le cas de resti- tution arrivant , & de ce mariage étant venu un en- fant heritier de ses pere & mere, est decedé majeur, il s’étoit fait une confusion de biens en la personne dudit enfant , par le moyen de laquelle sa succes- sion passoit en entier à ses heritiers paternels , sans que lesd. parens colateraux de l’estoc & ligne de la femme pussent être reçus à reclamer la dot constituée à ladite femme & reçuë par le mari , comme un propre fictif.
Mais cette doctrine a été condamnée dans notre coutume , aussi bien qu’en celle d’Auvergne , qui a à cet égard la même disposition que la notre ; Bas-
I34Coutumes de la Marche ,maison & Consul qui ont écrit sur la coutume d’Auvergne , sur le titre I2, art. 4 , citent un arrêt de l’année I68I, qui après une enquête par turbes, a jugé la question, en faveur des parens colate- raux maternels ; & dans notre coutume de la Marche il y a eu arrêt du 23 Avril I686, au raport de Monsieur Huguet, au profit de Gabrielle Villards , heritiere maternelle de Louis Rubin , qui a decidé la même chose , contre Annet & François Merlin he- ritiers paternels, & en effet les termes précis de no- tre article 2I6. en admettant la maxime, paterna paternis , materna maternis , y ajoutent tant que le lignage se peut prouver.
Il y a eu depuis une Sentence renduë en la Sené- chaussée de Gueret, au mois de Septembre I708. qui a reçu les heritiers maternels du feu sieur Mar- sellet prêtre , a demander & obtenir la restitution de la dot de la mere du sieur Marsellet, contre le sieur Albert heritier paternel , qui soutenoit la pretenduë confusion en la personne dudit sieur Marsellet, de- cedée à l’âge de soixante-deux ans, & ledit sieur Al- bert s’étant avisé d’interjetter appel au Parlement de cette Sentence, elle a été confirmée avec amende & depens contre ledit sieur Albert.
On peut voir à ce sujet le traité de Duplessis des droits Incorporels , tit. second, page 22. La reponse au quatriéme Doute des Mercuriales, raportées par Ricard, sur l’art. 93. de la coutume de Paris, & le traité des Propres de Dernusson.

des Testamens & Successions.I35Article Deux cens dix-sept.
Representation a lieu en la Marche en ligne directe , in infinitum , & en ligne collaterale jusques aux enfans des freres.
Article Deux cens dix-huit.
Hors les termes de representation le plus prochain en degré succede selon ce que dessus est dit.
Article Deux cens dix-neuf.
Fille appanée, ou doüée & financée, ou mariée, par pere, mere, ou ayeul paternel, ou par un tiers, ou d’elle-même le pere, mere, ou ayeul paternel vivans , ait renoncé ou non , elle & ses descendans sont privez & ne peut venir à succession de pere , mere , ayeul , ayeule , freres , soeurs , ne autres successions directes ou collaterales dedans les ter- mes de representation , tant que desdits pere & ayeul y ait hoirs mâles ou descendans de mâles, soit le descendant mâle ou fumeau heritant esdites successions : mais és suc- cessions collaterales , hors les termes de representation, elle succedera avec lesdits mâles ou descendans d’eux , & n’a lieu ladite privation ; mais si ladite fille étoit mariée en la maison paternelle par lesdits pere & ayeul sans cons- titution de dot , en ce cas elle & ses descendans succede- ront avec les mâles & descendans d’eux.

Il y a eû dans les precedentes éditions de la coutu- me des erreurs très-essentielles sur le texte du present article deux cens dix-neuf , qui viennent sans doute de la faute des Imprimeurs, ou plûtôt de ceux qui
I36Coutumes de la Marche ,leurs ont fournis des copies peu exactes , qui ont ser- vi à repandre des doutes , & nous avons crû très-im- portant de profiter à l’occasion presente pour faire mettre le texte de cet article ainsi qu’il est dit ci-dessus transcrit dans le veritable sens & les termes de l’ori- ginal , conforme à la copie en forme conservée au Greffe de la Senéchaussée de Gueret , vûë & exami- née par Me. du Moulin , suivant qu’il le declare en son commentaire , sur les articles 2I2. & 2I5. de la coutume.
En effet dans les éditions de Chaudiere en l’année I526 , de Caillet en I573, du grand coutumier par Morel en I604 , & de Me. Jabeli en I695 , on y a tronqué le mot de financée , & on a mis le mot de fiancée , cela se trouve reparé dans l’édition de la coutume de I608 faite par Vernoy imprimeur à Moulins, qui a eu soin de mettre dans le texte de cet article le mot de financée qui y est placé avec raison & justesse, d’autant que le mot de fian- cée a été mis sans aucun bon sens, attendu qu’une fille simplement fiancée n’a pas contractée un engage- ment valable qui puisse operer une consequence ab- soluë contre elle, au lieu que le mot de financée veut dire fille doüée de finance.
29. Dans ledit texte des éditions precedentes, il est imprimé fille mariée par pere & mere, ce, & mis entre les mots de pere & mere, semble former une conjonctive , en sorte que la fille ne puisse être sujete à l’exclusion des successions marquées par la coutume,
des Testamens & Successions.I37si elle n’est mariée par le pere & la mere conjointe- ment , & si lorsqu’elle l’est par l’ayeul, il faut neces- sairement , à l’effet de ladite exclusion , que les pe- re & mere , ou ayeul paternel soient vivans.
Mais cette erreur importante a été découverte , & on a reconnu que le terme de , & , placé entre les mots de pere & mere , y avoit été placé mal à pro- pos & par sur abondance , & que dans les veritables termes du texte , après le mot de pere , il faloit met- tre une virgule , & aussi une virgule après le mot de mere , & encore une virgule après le mot ayeul paternel ; car outre une verification exacte qui a été faite à ce sujet , il est certain que suivant la maxime, qui dit , paternum , vel maternum , est, filias dotare , un pere ou une mere par la connoissance qu’ils ont chacun à leur égard de leurs biens & facultés , & par leurs sentimens pour leurs enfans, sont en état de leurs constituer des appanages proportionnés, & qu’aussi tôt qu’en mariant leurs enfans de leur vivant, ils leur constituent des dots , ou appanages , la renonciation faite moyenant ce, par celui desdits enfans qui se marie, est bonne & valable dans les termes dudit article present 2I9. Dans le droit , il y a des exemples que lorsque par erreur, on a mis des conjonctives au lieu de disjonctive l’erreur se peut & même se doit reparer ; ce sentiment est conforme à la loi sæpè ita, 53. au digeste de verborum significatione , qui dit sæpe ita comparatum est, ut conjuncta pro disjunctis occipiantur, & disjuncta pro conjunctis interdum soluta, pro separatis.

I38Coutumes de la Marche ,Il faut ici observer qu’il y à eu a ce sujet un pré- jugé sur un procès porté en la Senéchaussée de Gueret, entre M. Moreau Duris, conseiller d’une part, & le Sr. de Lageau fils, d’autre part , au sujet des premiers ter- mes dudit article ; le sieur de Lageau fils soutenant la conjonctive du & entre les mots de pere mere, ce qui formoit la question & contestation entr’eux ; mais le si- eur Moreau ayant justifié que le, & entre lesdits mots de pere mere avoit été mis par erreur & surabondance, au lieu que dans la coutume il y avoit une virgule après le mot de pere, & une virgule après le mot de mere , ce qui formoit des disjonctives convenables au veri- table esprit & sens de la coutume ; le procès fut deci- dé à l’avantage du sieur Moreau du Ris , & le sieur de Lageau fils souscrivit à sa condamnation.
Enfin l’usage actuellement constant dans la Pro- vince est , qu’il n’est pas cecessaire que le pere & la mere appanent ou doüent de finance conjointement, leur fille en la mariant , ni que l’un & l’autre soient vivans lorsque ladite fille est appanée par l’ayeul pa- ternel , ou par un tiers , ou d’elle même , afin qu’elle soit dans le cas du present article , il suffit que ladite fille soit appanée par son pere , ou son ayeul paternel , ou que si elle est appanée par un tiers, ou dotée par elle même , le pere ou ayeul paternel soient vivans , pour qu’il soit vrai de dire , que soit qu’elle aye renoncé ou non , elle est forclose des successions directes & collaterales échûës & à échoir, dans les termes de representation de l’estoc paternel
des Testamens & Successions.I39en faveur des mâles : & pareillement pour exclure ladite fille des successions de l’estoc maternel , il suf- fit qu’elle soit mariée & dotée par la mere , ou par un tiers , ou d’elle même , la mere étant pour lors vivante.
C’est ce qui ne peut plus souffrir de difficulté après l’arrêt contradictoire rendu en I708, au raport de Monsieur l’Abbé de Lesseville , confirmatif d’une Sentence de notre Senéchaussée de Gueret du 2I Fe- vrier I707 , entre le Seigneur Merigot de sainte Feyre appelant , & les sieurs Sarasin de saint Dionis intimés, au sujet de la succession du sieur Merigot de Clameyrat : Dans l’espece la Dame merigot mere des sieurs de saint Dionis avoit été mariée après la mort de son pere , & avoit été appanée & dotée par sa mere , & lors de son contrat de mariage , on n’a voit point exigé de ladite Merigot fille un renon- ciation expresse des successions de l’estoc paternel , & sur ce fondement ladite Dame Marigot étant dece- dée, & après elle ledit sieur Merigot de Clameyrat son frere, les sieurs de saint Dionis enfans de ladite Dame Merigot, formerent leur demande pour la moitié de la succession dudit sieur Merigot, venant de l’estoc pater- nel , & soutinrent que la renonciation faite par leur mere, ne pouvoit operer contr’eux qu’une exclusion des successions collaterales de l’estoc maternel ; l’instance fut fort agitée de la part des parties en la Senéchaus- sée de Gueret , & le sieur Merigot allegua plusieurs moyens , nonobstant lesquels , la sentence adjugea
I40Coutumes de la Marche ,la demande, fins & conclusions des sieurs de saint Dionis.
Sur l’appel qui fut interjetté par le sieur Merigot de sainte Feyre de cette Sentence , il employa les mêmes moyens qu’il avoit deduit en cause principal- le , & y en ajouta d’autres , tirés du conseil de Me. Jabely alors vivant , mais ces nouvelles raisons n’eu- rent pas grand credit , ni envers Monsieur l’Abbé de Lesseville, Conseiller raporteur très-habile , ainsi qu’on l’a connu pour tel , ni auprès de Messieurs de la seconde Chambre des Enquêtes , en laquelle le Procès fut parfaitement examiné , & l’arrêt confirma la Sentence de Gueret.
Ce préjugé après celui de la decision du Procès d’entre les sieurs Moreau du Ris , & de Lageau fils, a determiné la façon d’entendre la disposition dudit article 2I9 de la coutume.
Article Deux cens vingt.
Bastards ne succedent point à pere ni à mere , néan- moins si la mere pour le nourrir & alimenter luy fait do- nation dedans les termes de la coutume, qui est la tierce partie de tous ses biens par Testament, telle donation est bonne et valable.
Il est certain que les Bâtards ne peuvent succeder, non seulement lorsqu’ils sont incestueux ou adulte- rins, mais encore lorsqu’ils sont simples bâtards, on leurs doit seulement les alimens , & lors qu’un bâtard meurt sans enfans , sa succession appartient
des Testamens & Successions.I4Iau Roy , à moins qu’il ne fut né, demeurant , & decedé dans la Justice d’un Seigneur haut justicier.
La maxime de France est , que les bâtards , habent testamenti factionem , & peuvent disposer de leurs biens en tout ou en partie , soit par donation entre- vifs, soit par testament , liberi vivunt , & liberi mo- riuntur.
C’est la disposition de la coutume de Berry , titre des testamens.
Coutume de Poitou, article 299.
Coutume de Blois , article 20.
Bacquet , traité du droit de bâtardie , chapitre 6.
Coquille, institution du droit françois, chapitre des aubains & bâtards.
Du Moulin en plusieurs endroits de ses œuvres, & particulierement sur la coutume de Paris , article 30, & sur celle du Bourbonnois , article 84, avec une infinité d’autres.
Il faut aussi présuposer que la reduction coutumie- re au tiers des biens du testateur , ne peut être con- siderée ni executée pour les testamens des bâtards qui decedent sans enfans ; la raison en est que, la prohi- bition de disposer des deux tiers a été établie en fa- veur des heritiers, & que les bâtards n’en ayant point, leur succession n’est point dans le cas ; car il est constant que le Roy ou le Seigneur haut justicier , ne succede pas au bâtard mort sans enfans , velut hæres , sed ut successor , à la façon d’un heritier ano- mal ; cette jurisprudence ne souffre plus de difficulté.
I42Coutumes de la Marche ,Nous croyons à ce sujet pouvoir ici raporter l’es- pece d’une cause portée en l’audiance de la Sené- chaussée de Gueret , & jugée en l’année I67I.
Le sieur Bouchet juge de la Borne avoit une fille bâtarde , il l’a maria au nommé Megnioux , & lui constitua en dot la somme de deux cens livres par le contrat de mariage , avec clause & stipulation que cette somme sortira nature de propre & immeubles à la future & à ses enfans descendans du mariage , & à deffaut d’enfans , que ladite somme deviendra re- versible audit Bouchet , au cas que ladite fille dece- de avant lui.
Le sieur Bouchet mourut le premier , & la bâtar- de dedeca ensuite sans enfans , après avoir fait un testament, par lequel elle légua ses biens à son ma- ri ; il se forma là dessus diverses pretentions.
I9. Le fils heritier du sieur Bouchet demanda la restitution de la dot de deux cens livres , en vertu de la clause de reversion.
29. Le fermier du domaine du Roy pretendit la succession.
39. Les Religieuses de Blessat demanderent aussi la succession en qualité de hautes justicieres du lieu où la femme étoit née, avoit toujours demeuré , & étoit decedée.
49. La même demande fut formée par le Seigneur direct en mortaillable condition de la maison où lad. femme étoit decedée.
59. Le mari legataire pretendit la dot comme un
des Testamens & Successions.I43meuble , attendu que la stipulation de propre n’a- voit été faite qu’en faveur du sieur Bouchet , & avoit cessé par son prédecès.
Toutes ces demandes & pretentions ayant été dis- cutées , il fut décidé par sentence contradictoire du I9 Juin I67I , que la stipulation de reversion étant personnelle au sieur du Bouchet, son fils ne pouvoit l’é- tendre en sa faveur , & ne seroit même pas recevable à faire reduire la disposition testamentaire de sa sœur bâtarde, aux termes de l’article 2I0 de la coutume , attendu que la reduction au tiers du bien testa- teur n’avoit lieu qu’entre personnes legitimes, & que les bâtards, nec genus , nec gentem habent.
On jugea aussi que le Roy ni le Seigneur haut jus- ticier, non plus que le Seigneur direct, ne pouvoient rien pretendre és biens d’un bâtard quand il en avoit disposé , même du total par testament ; & enfin le testament étant dans les regles, & s’agissant d’un legs d’une forme mobiliere fait par la testatrice morte sans enfans , après le decès du sieur Bouchet , elle avoit pû en disposer valablement en faveur de son mari , au profit du quel la delivrance du legs fut or- donné.
Article Deux cens vingt-un.
En succession commune que l’on desire partir entre freres, l’aîné doit faire les parts, & les moins nez choisir selon leurs âges , s’ils ne s’en accordent autrement ; c’est à sça- voir quand le plus jeune choisit le premier consecutivement les autres.

I44Coutumes de la Marche ,Il a été jugé par arrêt rendu entre les sieurs Bour- geois, que le fils de l’aîné decedé doit faire le parta- ge des biens communs entre lui & son oncle frere puisné de son pere , & que le choix appartient à ce- lui-ci.
Article Deux cens vingt-deux.
En partage de succession ou communauté de biens uni- verselle ou particuliere entre autres que freres , celui qui provoque & demande partage fera les parts, & les autres choisiront comme en l’article precedent , & si tous par ensemble requierent partage , le Juge y pourvoira.
Nous observons cette disposition de la coutume , que lors qu’il s’agit d’un partage de biens communs , entr’autres que freres , celui qui provoque & de- mande le partage , est obligé de le faire , & à l’égard des mots de cet article , où il est dit , que le Juge y pourvoira , l’usage est qu’il est ordonné que le parta- ge sera fait par des Experts , & que les lots seront ti- rés au sort.
Article Deux cens vingt-trois.
Le pere, & la mere, ayeul, ou ayeule succedent à leurs enfans & neveux en droite ligne decedans sans hoirs naturels & legitimes, quant aux meubles & conquests, & quant à ce, si le pere, mere, ayeul ou ayeulle, leurs avoient fait donation en avancement d’hoirie ou autrement de rente ou de chose immeuble , telle rente ou chose immeuble ainsi donnée sera en ce cas reputée acquest audit enfant ou neveu , telle- ment que en cecy succedera le pere, mere, ayeule ou ayeul, combien
des Testamens & Successions.I45combien que en autre cas sortisse de nature de propre.
Il faut ici remarquer dans l’usage de notre coutume, & dans le cas ou le Pere , la mere , ayeul , ou ayeule succedent aux meubles & conquêts , ils sont tenus de payer leur part & portion des dettes si aucunes ont été contractées par le deffunt jusqu’à son decès , & ce à proportion de la valeur de la succession mobilie- re , de laquelle il se fait une estimation entre le pere , la mere , l’ayeul , ou l’ayeule qui succedent , & les he- ritiers collateraux , qui de leur part succedent aux propres & immeubles dudit deffunt , suivant la ma- xime ubi emolumentum successionis, ibi plerumque est onus.
Article Deux cens vingt-quatre.
Entre personnes franches, le pere est usufruitier des biens maternels advenus à son fils par le decès de sa mere , & aussi des autres biens par lui acquis ou advenus par quel- ques autres moyens que ce soit, & ne se perd par le trépas du fils , sauf toutefois pecule castrente vel quasi.
Il y a à l’égard de cet article une faute bien essentielle dans l’édition du coutumier général , faite par Claude Morel en I604, en ce que l’imprimeur a ômis les deux dernieres lignes de cet article , portant que l’usufruit dévolu au pere , ne se perd par le tré- pas du fils, & cette observation avec toutes celles que nous avons faites , sur les fautes qui se trouvent dans les precedentes éditions de la coutume , font sentir la necessité d’une nouvelle édition pour avoir occasion de les reparer & faire cesser dans le public,
I46Coutumes de la Marche ,par cette édition nouvelle & correcte , les mauvaises impressions que ces fautes ont pu causer.
Au surplus nous avons prévenu par nos observa- tions sur l’article onze de la coutume , la plus grande partie de ce qu’on peut dire sur la disposition du pre- sent article 224 , à quoi nous pouvons ajouter , que cet art. n’a pas de lieu pour les hommes serfs ou mor- taillables, par deux raisons ; la premiere est , que cet art. commence par ce mots , entre personnes franches le pere est usufruitier , &c. ce qui exclud de cette fa- culté les hommes serfs ou mortaillables, suivant le texte litteral : l’autre raison est , que cet article ne pourroit préjudicier aux droits du Seigneur, qui seroit dans le cas de succeder aux biens & heritages mater- nels advenus à un fils qui decederoit sans enfans ou parens communs , ce qui ne pourroit s’accorder avec un usufruit deferé au pere sa vie durant.
Article Deux cens vingt-cinq.
Le mari qui survit gagne le lict , robbes & joyaux de sa femme, & la doit faire enterrer & payer les funerail- les selon son estat : & si la femme survit , elle recouvre ses lict & linge de telle estimation qu’ils étoient à l’heure du con- trat de mariage, ses bagues & joyaux tels qu’ils sont esti- mez par ledit traité , ou qu’ils seront trouvez à l’heure du decès à son choix , & ce qu’elle a apporté en traité de mariage.
Article Deux cens vingt-six.
Quand il est question de succession de pere, ou de mere
des Testamens & Successions.I47entre enfans de divers licts , autant emportent l’un que l’autre & partent en têtes , sinon qu’il y eût communauté entre les aucuns d’eux.
Article Deux cens vingt-sept.
En succession fraternelle ou autre collaterale chacun succede és biens survenus du côté dont il atteint au défunt, & posé qu’il y ait freres consanguins d’une part, & uterins d’autre.
Article Deux cens vingt huit.
Les biens de ceux qui entrent en Religion & y font pro- fession expresse ou taisible retournent aux plus prochains parens ; & ne sont par profession dédiés à l’Eglise s’il n’y a ex- presse dédication; & est le Religieux reputé personne morte & ne fait nombre entre les enfans en computation de legitime : & ne succede le Religieux, ni le monastere pour lui, à ce- lui qui a fait Profession taisible ou expresse , ni à autre de ses parens.
Article Deux cens vingt-neuf.
Testament fait en presence de Notaire & deux témoins ou du Curé ou son Vicaire & deux temoins , ou de quatre témoins sans Notaire ni Prêtre , ou qui est écrit & signé de la main du Testateur est reputé solemnel.
Nous avons déja fait connoître par nos observa- tions , sur le chapitre sixéme , qui concerne les No- taires , qu’il seroit à present inutile de faire d’autres observations sur la forme & validité des testamens , d’autant que cette matiere a été entierement appro- fondie & épuisée par l’Ordonnance du Roy , de l’an- née I735 , à laquelle on doit se conformer.

I48Coutumes de la Marche ,Article Deux cens trente.
Tous biens acquis par le défunt de la succession du quel est question sont reputez biens paternels ; & y succedent les parens paternels , & en sont les maternels forclos.
Article Deux cens trente-un.
Les biens acquis par aucun d’un sien lignagier ne changent pas la nature & estoc ; mais sont reputez être de l’estoc dont ils étoient pardevant ladite acquisition quant à droit successif.
Article Deux cens trente-deux.
Madame comme Comtesse de la Marche succede ab in- testat aux biens meubles & immeubles des bâtards feu- daux ou roturiers s’ils n’ont descendans d’eux naturels & legitimes.
Article Deux cens trente-trois.
Ceux qui succedent du côté paternel payeront les dettes & legats provenans du côté paternel.
Article Deux cens trente-quatre.
Ceux qui succedent du côté maternel payeront les det- tes & legats provenans du côté maternel.
Article Deux cens trente-cinq.
Et si le défunt a fait des dettes de son côté & qu’il dé- laisse aucun meuble & acquests, les parens du côté pater- nel qui succedent esdits meubles & acquests seront tenus pa- yer les dettes faits par ledit défunt ; si lesdits meubles & conquests sont suffisans; alias les heritiers patrimoniaux payeront le reliqua pro rata.
Article Deux cens trente-six.
Les créanciers des dettes provenuës de l’estoc paternel se pourront adresser seulement contre les heritiers paternels
des Testamens & Successions.I49quant à l’action personnelle ; Et des dettes provenus de l’estoc maternel qui sont à la charge des heritiers maternels s’adresseront contre les heritiers maternels.
Article Deux cens trente-sept.
Mais les créanciers des dettes faites par ledit défunt, dirigeront leur action personnelle tant contre les heritiers du côté paternel que maternel , sauf aux heritiers leur recours l’un contre l’autre pour être remboursez de ce que auront payé esdits créanciers , outre ce qu’ils étoient tenus payer par ladite Coutume , & sans préjudice en tous lesdits cas du droit d’hypotheque que pourroient avoir lesd. créanciers sur les biens du défunt.
Article Deux cens trente-huit.
Le pere & autres ascendans en mariant en premiere nôces leur fille & autres descendans en directe ligne , peu- vent reserver à leurdite fille & autres descendans en directe ligne , droit successif de pere , mere , & autres sesdits parens.
Au moyen de cette reserve faite à la fille par son premier contrat de mariage , si dans la suite elle se trouve rappellée par un acte valable, elle sera reçuë à entrer en partage, mais cela s’entend en rapportant audit partage ce qu’elle ou son mari auront reçu en constitution de dot & avancement d’hoirie.
Article Deux cens trente-neuf.
Et si les collateraux la marient vivant le pere ou ayeul pa- ternel, lui peuvent aussi reserver leur successions seulement en tout ou partie.

I50Coutumes de la Marche ,Article Deux cens quarante.
Combien que par ci-devant les Coutumiers dudit pays ayent été en altercation si la fille mariée en premieres nôces , à laquelle n’avoient été fait reservation de succé- der , peut être rappellée à la succession de leurs parens en secondes nôces , ou autre traité de mariage ; A cette cause a été advisé par les Estats du Pays que doresnavant la fille mariée en premieres nôces ne peut par sondit pere , ni autres parens de la succession desquels elle est forclose par ladite Coutume en faveur des mâles , étre rappellée à au- cun espoir de droit successif , au préjudice d’iceux mâles & leurs descendans sans leur consentement , soit par le second traité de mariage ou autrement.
Article Deux cens quarente-un.
Toutefois n’est prohibé esdits pere & mere & parens col- lateraux lui donner , leguer , ou disposer à son profit de leurs biens, autrement que par reservation de l’espoir dudit droit successif selon que la Coutume permet en disposer.
Me. Jabely dans son commentaire sur cet article , & dans l’habitude de donner des decisions de son chef, sans y être autorisé par aucun usage, ou pré- jugé valable, decide qu’un legs du tiers des biens fait par le pere, ou la mere, à une de leurs filles dé- ja mariée, ne peut la charger que du payement du tiers des dettes , attendu , dit-il , qu’elle doit être regardée comme étrangere.
Mais cette opinion ne peut être reçuë : car, I9. La coutume charge un enfant legataire du tiers de payer toutes les dettes sans distinction ; & Me. Jabely n’a pas dû faire une distinction où la coutume n’en fait
des Testamens & Successions.I5Ipas. 29. La coutume étant de droit étroit & chargeant un enfant legataire , ce mot d’enfant generique ne permet pas de difference de l’enfant doté & marié , d’avec un autre. 39. Est-il même à présumer que le pere ou la mere voulut faire un legs de liberalité à un de leurs enfans , déja doté de leurs biens , & qu’il en tirât cet avantage d’être moins chargé qu’un de ses autres freres ou sœurs ?
Article Deux cens quarante-deux.
Et pour la conservation des maisons dudit pays, la por- tion de la fille mariée par le pere , ou du vivant d’icelui , selon l’article commençant , fille appanée est forclose de suc- ceder par les moyens dessusdits , accroîtra ès males seule- ment , s’ils veulent payer la dot à elle constituée ou les restes d’icelle ; en conferant ladite dot & portion comme ladite fille feroit si elle succedoit , sans ce que audit cas filles étant à marier puissent aucune chose prétendre en la portion de ladite fille mariée.
Article Deux cens quarente-trois.
Et combien que ladite fille ainsi mariée ne prenne part ni portion esdites successions comme dit est, si fait elle nom- bre, & part avec les autres enfans pour la quote & com- putation de legitime.
Article Deux cens quarente-quatre.
Laquelle fille mariée par les dessusdits forclose desdites successions ne peut demander legitime ni supplement d’icel- le; toutefois si elle n’a point été doüée selon les autres fil- les de la maison, si aucunes en y a qui ayent été doüées; &
I52Coutumes de la Marche ,s’il n’y a autres filles doüées de ladite maison , elle sera doüée selon l’avis des parens & amis de ladite fille, eu é- gard ès constitutions des mariages du lieu , & voisins de semblable qualité.
Article Deux cens quarante-cinq.
Fille qui se marie sans le sceu, ou outre le gré de ses pere & mere, ou de son pere seulement, ou de sa mere aprés le tré- pas du pere avant l’âge de vingt-cinq ans , peut être par eux ou l’un d’eux exheredée ou appanée de telle chose que bon leurs semble : & audit cas ne peut prétendre ni avoir droit és biens & successions de sesdits pere & mere par le- gitime ou autrement.
Article Deux cens quarante-six.
Linagier qui se veut porter heritier simple est préferé à celui qui se veut porter heritier par benefice d’inventaire, combien qu’il ne soit si prochain du défunt comme celui qui requiert être admis par benefice d’inventaire.
Cet article doit être entendu par rapport à une succession collaterale, & non pas à la succession en ligne directe.
Article Deux cens quarante sept.
L’étranger ne peut être reçu à soy porter heritier simple ni par benefice d’inventaire , & par ce ne de- boute le lignagier qui requiert être rçeu par benefice d’in- ventaire; toutefois l’heritier conventionnel par mariage ou communauté s’il ne veut accepter simplement ladite suc- cession , se pourra porter heritier par benefice d’inventaire, si
des Testamens & Successions.I53si aucun des lignagiers du défunt ne le veut être: car ils seroeint preferez audit heritier conventionnel.
Article Deux cens quarante-huit.
Institution d’heritier testamentaire n’a point de lieu & est reputé icelui institué legataire.
Article Deux cens quarante-neuf.
S’il advient que les heritiers instituez par led. Testament ou disposition de derniere volonté fussent heritiers ab intes- tat ou conventionnels par traité de mariage , ils n’auront que les deux tiers sans prendre autre profit dudit testa- ment sur ledit tiers, qui sera reduit & distribué entre les autres legataires au sol la livre; & ce au cas que les au- tres legats monteront le tiers des biens dudit deffunt ; mais où iceux legats ne monteront le tiers desdits biens, le resi- du d’icelui tiers reviendra au profit dudit legataire, posé qu’il soit heritier ab intestat ou conventionnel.
Article Deux cens cinquante.
Et s’il étoit prelegué aucune chose à un heritier ab in- testat en avantage des autres succedans ab intestat, ledit legat vaudra de la tierce partie des biens du défunt au préjudice des autres heritiers venans ab intestat, compris tous autres legats & reduction faite dudit tiers , comme dessus.
Article Deux cens cinquante-un.
Lesdites ordonnances & dispositions de derniere volonté ainsi reduites audit tiers ne sont invalidées par faute d’in- stitution d’heritiers, caducité, ou préterition, ni aussi par
I54Coutumes de la Marche ,faute de nombre de témoins requis de droit , pourvû qu’il y en ait deux avec le Notaire, Curé ou Vicaire, ou quatre témoins sans le Curé, son Vicaire ou Notaire, ou que ledit Testament ait été écrit & signé par le Testateur.
Article Deux cens cinquante-deux.
Ne pourra ledit Testateur ou disposant donner ni leguer directement ni indirectement aucune chose au Notaire ni Prêtre qui recevra ledit testament & disposition , ni aux témoins à ce presens, ains seront telles donations & legats nuls & de nul effet & valeur.
L’Ordonnance de I539 a suffisament fait enten- dre qu’elles sont les personnes prohibées & incapa- bles de recevoir des dons & legs, d’autant que com- me la disposition doit être libre & entierement vo- lontaire, elle devient nulle & caduque aussi-tôt qu’on peut établir ou vivement présumer que cette liberté du disposant à pû être contrainte par quelque consideration , & n’a pas l’effet mœræ voluntatis.
Article Deux cens cinquante-trois.
Substitution faite en testament ou autre disposition de derniere volonté n’a lieu & ne vaut aucunement audit pays par legat ni autrement en quelque maniere que ce soit.
Il faut excepter de cet article la substitution qui est faite par contrat de mariage , suivant la disposition de l’article 294 de la coutume ci-après, suivant le- quel tous pactes , avantages , donations , institution d’heritier & autres convenances & dispositious quel- conques, sont permises , valent & tiennent au pro-
des Testamens & Successions.I55fit des mariés & de leurs descendans, & les saisissent, les cas advenus ; & en effet il y a eu dès la redaction de la coutume plusieurs substitutions faites en contrats de mariages , lesquelles ont toujours été autorisées , & ont eu leurs force & vertu , dans les regles du droit.
Article Deux cens cinquante-quatre.
Aucun n’est recevable de soy dire n’être heritier d’aucun s’il ne repudie ou renonce expressement à sa succession.
Article Deux cens cinquante-cinq.
Les prochains lignagiers des gens d’Eglise seculiers de franche condition leurs succedent en leurs biens par eux délaissez.
Article Deux cens cinquante-six.
Par ladite Coutume il n’est heritier qui ne veut , soit fils , parent ou lignagier.
Article Deux cens cinquante-sept.
La tierce partie des biens dont le testateur peut disposer se doit prendre par la main de l’heritier ab intestat , & ne saisit le donataire ou legataire , & est revocable telle donation testamentaire ou ayant trait à mort jusques à la mort du disposant par quelques paroles qu’elle soit consti- tuée , & posé qu’il y ait clause de garantage ou serment de ne venir au contraire.


I56Coutumes de la Marche ,
CHAPITRE VINGT. De Retrait Lignagier , & prélation de chose Feodale, Censiviere ou Franche.
Article Deux cens cinquante-huit.
LE lignagier du vendeur d’aucun heritage , rente ou chose immeuble du côté & ligne dont meut & est pro- venuë la chose venduë, peut dedans an & jour avoir par droit de retrait lignagier ladite chose immeuble venduë , en payant le sol principal & loyaux cousts.
Article Deux cens cinquante-neuf.
Qui veut avoir chose venduë par retrait lignagier, doit poser son adjournement & faire sa demande dedans le temps dessus dit, & en cas de refus & delay, presenter treize pieces de monoye du coin du Roy , offrant de par- faire jusqu’au prix : & au refus ou delay de prendre par ledit défendeur ses deniers, doit icelles treize pieces de mo- noye consigner judiciellement dedans ledit temps : & ce- la suffit pour obtenir en principal & dépens en prouvant son lignage & estoc de la chose vendue, sans autre réelle con- signation du prix.
Article Deux cens soixante.
Mais s’il veut gagner les fruits qui écheront depuis la consignation, ou il doit consigner reaument & de fait le prix de la vente , s’il en est certain , ou le prix contenu ès lettres , si le défendeur les veut exhiber , & affirmer le contenu être vray , ou tel pris que le juge arbitrera , avec
du Retrait Lignagier.I57protestation de fournir ou retirer , & dés-lors s’il obtient en principal , il aura les fruits depuis ladite consignation ré- elle & non autrement.
Article Deux cens soixante-un.
Le tems introduit pour avoir par retrait la chose ven- duë se compte & commence du jour que l’acheteur en a pris possession réelle et actuelle , laquelle possession pour faire courir ledit tems l’acheteur est tenu prendre en la presence de deux témoins de la Paroisse en laquelle la chose est assise, & d’un Notaire, & ne suffit quant à ce en avoir faite possession par precaire loüage ou autrement, sinon que l’acquereur le fit sçavoir à jour de Dimanche à Messe de Paroisse ou en Jugement , & en eût acte.
Article Deux cens soixante-deux.
Entre mortaillables aux cas où ils peuvent vendre, re- trait lignagier a lieu, & se doit observer ce que dit est.
Article Deux cens soixante-trois.
Entre gens tenans heritages en servitude n’a droit de retrait lignagier.
Article Deux cens soixante-quatre.
En chose mobiliaire retrait lignagier n’a point de lieu , ne pareillement en vray échange de chose immeuble faite sans fraude.
Article Deux cens soixante-cinq.
Si aucun revend la chose par luy acquise d’un étranger, les parens dudit revendeur du côté paternel sont capables de l’avoir par droit de retrait lignagier, & non les parens
I58Coutumes de la Marche ,du côté maternel ; toutefois si aucun revend la chose par lui acquise d’un sien parent, ceux du côté & ligne dont elle est provenuë la pourront avoir par retrait.
Article Deux cens soixante-six.
Après le droit de retrait confessé par l’acheteur , adjugé par Sentence, le lignagier qui a fait ses diligences à quin- ze jours de terme pour fournir les deniers & loyaux cousts, & s’il ne fournit dedans ledit tems , il est debouté de son droit sans autre déclaration ; toutefois s’il étoit en de- bat des loyaux cousts, en consignant ce que le Juge arbitre- ra & payant le principal dedans ledit tems , il doit joüir de la chose retraite.
Article Deux cens soixante-sept.
Lesdits quinze jours ne courent jusques à ce que l’ache- teur qui requis en est a mis ses lettres en Cour , partie pre- sente ou appellée , & affirme le prix si le lignagier le re- quiert & l’en veut croire : ou s’il n’y a point de lettres , commence à courir du jour de la notification faite par l’ac- quereur , & affirmation faite du prix pardevant le Juge partie appellée.
Article Deux cens soixante-huit.
Si l’acheteur requis d’affirmer le prix, ne le veut faire, il est debouté & doit perdre la chose par lui acquise , & & doit être adjugée au lignagier.
Article Deux cens soixante-neuf.
Lignagier sur lignagier n’a point de retenuë en chose venduë d’un même estoc tant que la chose demeure en la ligne
du Retrait Lignagier.I59mais si elle est revenduë, elle chet en retrait lignagier aux parens dont elle procede ; toutefois si celui qui est commun en tous biens avec un sien parent , vend sa part de la chose commune , le commun & personnier qui est parent, est pre- feré à tous autres lignagiers, & ainsi se garde pareillement entre mortaillables.
Article Deux cens soixante-dix.
Si en échange y a bourse déliée , & le prix monte plus que l’estimation de la chose échangée , retrait lignagier a lieu en rendant ledit prix & l’estimation de ladite chose échangée , & les loyaux cousts.
Article Deux cens soixante onze.
Chose subrogée par échange tient lieu de ce que l’on bail- le en contre-échange , tellement que si aucun baille par é- change heritage à lui advenu du côté paternel contre l’he- ritage du côté maternel à lui baillé par contre échange par aucun sien parent maternel , & il vend après le dit heri- tage , les parens du côté paternel sont capables de l’avoir par retrait, & non ceux du côté maternel & è contrà.
Article Deux cens soixante-douze.
Celui des parens qui premier fait adjourner l’acquereur posé qu’il soit en plus loin degré de lignage du vendeur, est preferé aux autres plus prochains; & s’ils sont deux de di- vers degré, concurrans en même diligence, le plus prochain l’emporte; & s’ls sont en même degré concurrans , il y viendront par moitié , sauf la prérogative des communs en tous biens.

I60Coutumes de la Marche ,Article Deux cens soixante-treize.
Le Seigneur feodal a droit de retenuë ou prelation en la chose feodale tenuë de lui venduë , & peut venir de- dans trois mois à commencer du jour que l’acheteur lui a exhibé ses contrats , & non plûtôt.
Article Deux cens soixante-quatorze.
Si le Seigneur a reçû l’acquereur à hommage ou baillé repit , il est debouté de son droit de retenuë ou prelation.
Article Deux cens soixante-quinze.
Le Seigneur direct , qui a lods & ventes peut avoir par prelation ou retenuë la chose venduë tenuë de lui de- dans trois mois à compter du jour de l’exhibition des con- trats , & s’il a été payé des lods & ventes , il est debouté de son droit de retenuë ou prelation.
Article Deux cens soixante-seize.
Le Seigneur direct qui n’a point de ventes , peut venir dedans l’an & jour , à compter du tems que l’acquereur a pris possession & gardé les solemnitez pour ce faire, telle qu’il est dit du lignagier.
Article Deux cens soixante-dix-sept.
Madame & tout autre Seigneur de qui on tient en Fiefs, Censive ou Franchise , peut avoir la chose venduë dedans le tems , & à compter respectivement , comme dit est.
Article Deux cens soixante-dix-huit.
Droit de retenuë ou prelation peut le Seigneur feodal ou direct donner ou transporter à un tiers , si bon lui sem- ble,
du Retrait Lignagier.I6Ible, mais ne fait le lignagier le droit de retrait, ains est tenu affermer, si requis en est, qu’il veut la chose pour lui & non pour autre, & pour demeurer à sa famille; & s’il est trouvé qu’il en fasse poursuite pour autrui, il est pri- vé de son droit de retrait.
Article deux cens soixante-dix-neuf.
Si le Seigneur feodal ou censivier ont pris la chose ven- duë par droit de retenuë ou prélation, le lignagier la pour- ra reprendre sur eux, en venant dedans le temps introduit en faveur des lignagiers , soit en Fiefs ou Censive , respec- tivement en payant & rendant le fort principal & loyaux coustemens : esquels sont compris les ventes, droits Seigneu- riaux , que le Seigneur en eût pû avoir , s’il n’eût retiré sesdites choses par prelation, selon les coutumes des lieux où ventes & autres droits son dûs.
Article deux cens quatre-vingt.
Si plusieurs heritages tenus en même directe sont vendus par même prix, le Seigneur n’est recevable de demander l’un & laisser l’autre: mais s’il sont de diverses directes , il peut demander ce qui est tenu de luy ; & ainsi est du lignagier quand les choses sont d’un ou de divers estocs.
Article Deux cens quatre-vingt-un.
Mais si l’acheteur de chose tenuë de divers Seigneurs ou provenuë de divers estocs consent à la totalité de la rete- nuë de tout ce qu’est en la vente , le Seigneur & ligna- gier sont tenus de la prendre pour le tout.
Article Deux cens quatre-vingt-deux.
Droit de retrait lignagier , prelation ou retenuë appar-
I62Coutumes de la Marche ,tiennent aux Seigneurs & lignagiers dès l’heure de l’aqui- sition faite par l’acheteur, pose que en icelle faisant il ait dou- né temps & faculté de rachat ; toutefois le tems ne court point contre eux jusques après le tems de rachat passé, & que l’acquereur en aura pris actuelle possession, comme dit est.
Article Deux cens quatre-vingt-trois.
Le tems d’an & jour de trois mois respectivement est continuel & court contre toutes personnes quelconques, mi- neurs, femmes mariées, & autres absens, presens, sçachans, & ignorans.
Article Deuxcens quatre vingt-quatre.
En vendition faite par criées, adjudication de decret , retrait , prelation & retenuë , ont lieu , & court le tems au Seigneur ou lignagier, dès l’heure que le decret est dé- claré.
Article Deux cens quatre-vingt-cinq.
On se peut adresser en matiere de retrait lignagier ou prelation contre l’acquereur , ou contre le detenteur de la chose acquise.
Comme tous les articles du present chapitre qui traitent des retraits lignagiers & autres sont tous assez clairs , & dans l’usage ordinaire selon les termes de la coutume , nous n’avons par crû devoir y rien ajouter si ce n’est , que tous ceux qui veulent former des de- mandes en retrait , doivent garder avec une circons- pection & exactitude les plus parfaites , toutes les formalitez prescriptes pour les procedures & actes qu’ils ont à faire , en sorte qu’il n’y manque pas le
du Retrait Lignagier.I63moindre deffaut , car tout est absolument de rigueur en cette matiere , en sorte que suivant la maxime , qui cadit à sillabâ cadit à toto.

     :           
CHAPITRE VINGT-UN. Des Donations , Dots , Doüaires & Convenances de mariage.
Article Deux cens quatre-vingt-six.
EN la Marche femme n’emporte aucun doüaire , soit Noble ou Roturiere, sinon qu’il soit convenu en traité de mariage.
Article Deux cens quatre-vingt-sept.
Mari peut donner à sa femme en faveur & traité de mariage à tems ou à perpetuel ce que bon lui semblera de son meuble ou heritage , & è contrà sauf la legitime aux enfans , s’aucuns en ont d’autre mariage ou du present.
L’Edit des secondes nôces a modifié les termes de cet article , & on ne peut éviter de se tenir à la dis- position de cet Edit , en restraignant le mari à ne pouvoir donner à sa seconde femme qu’une sembla- ble portion advenante à l’un de ses enfans du premier lict , le moins prenant en sa succession.
Article Deux cens quatre-vingt-huit.
Si après le mariage consommé , mari & femme font donation mutuelle l’un à l’autre , telle donation est vala- ble , pourvû qu’elle soit égale ; & s’il y avoit inéqualité, sera reduite à équalité , sauf toute-fois aux enfans leur
I64Coutumes de la Marche ,legitime : & toute autre donation entre-vifs faite entre eux durant & constant leur mariage est nulle & de nulle valeur.

Il est juste que la donnation soit égale , car s’il y avoit de l’excedant de part ou d’autre , cet excedant seroit reputé une donation pure & simple , qui est interdite par la coutume.
Cependant lorsqu’un mari & femme se trouvent sans enfans , on leur a permis de pouvoir se faire une donation mutuelle & reciproque de l’usufruit de leurs biens , pour en jouir par le survivant sa vie durant , aux charges dont sont tenus les usufruitiers , & com- me une pareille donation n’interesse pas la proprieté des biens , on n’a pas crû devoir la contester , d’au- tant plus qu’elle ne fait que suspendre & retarder le droit des heritiers collateraux de recevoir la succession après qu’elle sera échuë.
Article Deux cens quatre-vingt-neuf.
Le pere , soit Gentilhomme ou roturier , peut donner à sa fille ce que bon lui semblera en la mariant; & ne peut la fille autre chose demander ès biens de sondit pere, que ce que lui a été baillé par sondit pere en traité de mariage.

La fille dans le cas de cet article ne peut pas même demander un suplement de legitime , ainsi qu’il a été jugé par arrêt rendu en la Grand’Chambre , au rapport de Mr. Maunoury Conseiller , du 20 Fe- vrier I693.

des Donations , Dots , Doüaires.I65Article Deux cens quatre-vingt-dix.
La mere, ne le frere aprés la mort du pere, ne peuvent appaner leur fille ou soeur des biens à elle ja advenus par succession de ses predecesseurs ou autrement en la mariant, si bon ne lui semble; Mais si la fille ou soeur d’âge parfait , font donation, quittance ou transportent de leurs biens sans deception énorme & d’outre moitié , telle quittance & re- nonciations sont bonnes & valables.
L’âge parfait de la fille dont il s’agit au present article, est surement l’âge de vingt-cinq ans, qui paroit necessaire pour faire une renonciation valable ; il semble cependant que pour revenir d’une pareille renonciation , la lesion d’outre moitié du juste prix, ne pourroit être un motif suffisant , puisque c’est une regle qu’en vente ou cession de droits successifs , lors que l’acquereur l’accepte sans garantie , & prend sur lui d’acquiter toutes les charges de la succession : La loy 2 , au code de recindendâ venditione , ne peut avoir lieu.
Cependant si avant le contrat de mariage de la fille , la mere ou le frere avoient geré & administré les biens paternels advenus à la fille qu’ils appanent , sans lui avoir rendu un compte dans les regles , cela suffit pour donner lieu à la fille de reclamer ; cela a été ainsi jugé par arrêt de la Cour , rendu entre Mr. de Lafont Conseiller à Guéret , & la Demoiselle sa sœur , épouse du sieur le Jeune ; celle-ci lors de son mariage étoit âgée de vingt-sept ans , & se contenta par son contrat d’un appanage qui lui fut fait par sa
I66Coutumes de la Marche ,mere , moyennant lequel elle renonça , & après la mort de ladite mere , elle obtint des lettres contre sa renonciation , fondées sur ce que sa mere tutrice , & même le sieur son frere comme protuteur, avoient geré & administré ses biens paternels sans lui en avoir rendu compte , qu’ainsi elle avoit traité sans une connoissance suffisante : Non visis tabulis , nec dispunc- tis rationibus, & dans cette circonstance les lettres furent enterinées, & le frere condamné à rendre compte.
Article Deux cens quatre-vingt-onze.
Si la fille a recuëilli la succession de sa mere ou autres biens aventifs , le pere en la mariant ne l’en peut frustrer sinon que moyenant recompense raisonnable elle étant d’âge parfait y ait quitté ou renoncé.
Article Deux cens quatre-vingt-douze.
Age parfait , quant à quitter par la fille qui se marie en contrat de mariage les biens jà à elle advenus, se prend à quatorze ans , & quant au fils, à dix-huit ans, quand le pere par deliberation de trois de ses parens les marie hors de sa maison; Mais quant à autres contrats d’aliénation de biens immeubles , à ce que les contrats sortent effet , âge parfait s’entendra doresnavant & par deliberation des Etats à vingt-cinq ans : jaçoit que par ci-devant en eussent autrement usé.
La limitation de l’âge parfait à renoncer par la fille à quatorze ans , & du fils à dix-huit ans quand ils sont appanez par le pere, en contrat de mariage , des biens maternels à eux advenus , a toujours fait beau-
des Donations , Dots , Doüaires.I67coup de difficulté en notre coutume , & depuis plu- sieurs années il a été d’usage d’exiger que la fille fut pleinement majeure , pour être en état de faire une renonciation valable des biens à elle échus & appar- tenans lors de son mariage ; en effet une pareille re- nonciation est une veritable aliénation , qui est in- terdite aux mineurs durant leur minorité , & contre laquelle ils peuvent reclamer aussi-tôt qu’ils se trouvent en état de prouver une lesion.
On voit par les procès-verbaux des nouvelles cou- tumes de la Province du Bourbonnois , de celle d’Auvergne & de celle de la Marche , qui apparte- noient alors aux mêmes Souverains , que le même esprit y a regné , & qu’on a reformé en connoissan- ce de cause l’âge necessaire pour les renonciations , lequel par deliberation des Etats a été déterminé à vingt-cinq ans ; il est certain d’ailleurs que la renon- ciation faite au profit du pere , est une espece de traité fait avec un tuteur , le pere l’étant en effet , quoique non obligé de se faire confirmer en Justice , & bien qu’un tel traité soit fait de l’avis des Parens , il est toûjours fait sans connoissance de cause, quand il n’est point precedé de la reddition d’un compte , par le moyen duquel le fils ou fille , puissent être va- lablement informez du veritable état & consistance des biens à eux alors acquis , tant en meubles, qu’en immeubles.
Article Deux cens quatre-vingt-treize.
Pere , mere , ayeul , ou ayeule ne peuvent avantager
I68Coutumes de la Marche ,l’un de leurs enfans plus que l’autre par donation ou autre disposition d’entre-vifs , sinon en contrat de mariage & faveur d’icelui.
Le dernier Editeur de la coutume cherchant tou- jours à subtiliser , s’est avisé dans sa note sur cet arti- cle de mettre de son chef une exception , en disant que le pere , mere , ayeul , ou ayeule peuvent fai- re une donation à l’un de leurs enfans ou petits en- fans pour recompense de services ; ce qui est certaine- ment est une vraye idée imaginée par cet Editeur , contre les regles ; puisque la prohibition faite en cet article est générale , & n’excepte aucun cas, que la seule disposition entre-vifs par contrat de mariage ; & cet Editeur auroit été dans l’embarras autant que dans l’impossibilité de citer aucun cas , ou actes , ser- vant à admettre son idée.
D’autant plus que le pere , mere , ayeul , ou ayeule ayant la liberté , suivant l’article 2I0 , de faire une disposition testamentaire au profit de leurs enfans , c’est là l’occasion de placer un motif d’affection ou reconnoissance pour services , servant de fondement au legs du testament ; cette façon de disposer pour- roit convenir à l’idée de l’Editeur , mais non pas une donation particuliere entre-vifs , prohibée absolu- ment , autrement qu’en contrat de mariage par notre article I93.
Article Deux cens quatre-vingt-quatorze.
Entre personnes de franche condition , tous pactes , avantages
des Donations , Dots , Doüaires.I69avantages , donation entre-vifs ou à cause de mort , de quelque estimation qu’ils soient universelles ou particulie- res, convenances de succeder, institution d’heritier & au- tres convenances & dispositions quelconques , pures ou con- ditionnelles , soient mutuelles , égales , ou non , faites & passées en contrat de mariage & par faveur d’icelui par personnes capables à contracter sains ou malades, valent & tiennent au profit des mariez & leurs descendans; & saisissent les mariez & leurs descendans les cas advenus , sauf toutefois la legitime aux enfans d’iceux qui font tel- les donations ou dispositions.
Voici l’article de la coutume qui est dans le plus frequent usage en la Province de la Marche , & il y a lieu de croire que c’est pour cela que Messieurs les Commissaires Redacteurs en ont fort étendu les dis- positions , afin de lever tous doutes ou équivoques dans la matiere dont il s’agit.
Il est vrai aussi que les contrats de mariage ont été toujours regardez comme les actes les plus solemnels & autentiques de la societé civile, & dans lesquels on apporte ordinairement plus de religion et de bonne foi ; cela se pratique même en la Marche, plus qu’ail- leurs, d’autant que les contrats de mariage servent à imposer une loi certaine dans les familles , puisqu’ils sont susceptibles de tous pactes & conventions , & que ce n’est qu’à l’occasion de pareils contrats , que les pere , mere , ou autres peuvent faire des disposi- tions, dont les enfans qu’ils marient reçoivent un vrai avantage ; & il est vrai qu’ils peuvent par testament disposer du tiers de leurs biens au profit de l’un de
I70Coutumes de la Marche ,leurs enfans ; mais ce legs du tiers est chargé du pa- yement de toutes les dettes , même du rapport de la dot de la mere , pour ce qui en a été reçû par le pere testateur ; & ainsi cette charge onereuse à l’enfant le- gataire , donne lieu à ce qu’il ne reçoive souvent que peu , ou point du tout , de profit de son legs , & cela fait connoître toute l’importance qu’il y a dans les dispositions des contrats de mariage, même sur la diction des termes qu’on doit s’attacher à expliquer toujours d’une maniere claire et bien entenduë ; c’est pour cela qu’on ne sçauroit trop recommander aux peres & meres ou autres qui sont dans le cas de faire des mariages, d’avoir recours , pour en dresser les contrats , à des gens habiles , & sur tout versez dans une parfaite connoissance, autant des dispositions des Ordonnances , que de celle de la coutume ; il n’est que trop ordinaire, que principalement les paysans & gens de la campagne, vont faire passer leurs con- trats de mariages par des Notaires presque tous caba- retiers , & la plus grande partie des ignorans ; & là les parties & le Notaire commançent par boire ensem- ble , presque toujours avec excès , le contrat est alors dressé & passé ; & comment en pareille situation peut- on se promettre que les clauses en soient étenduës , dans toutes les regles & la circonspection que deman- de un pareil acte ?
On voit aussi que ces sortes de contrats de maria- ges donnent lieu par les deffauts qu’ils contiennent, à des procès & contestations ; car quoique par la me-
des Donations , Dots , Doüaires.I7Idiocre fortune de ces paysans & gens de campagne , il ne s’agisse que de choses mediocres dans leurs con- trats de mariages , néanmoins l’humeur & l’opinia- trêté se trouvent et dominent en eux , & voilà la source des procès ; on doit cependant considerer que les clauses & dispositions par contrats de mariages étant de droit étroit , doivent être prises à la lettre , sans pouvoir y rien modifier ni changer ; ce qui éta- blit toute la consequence de bien les expliquer dans lesdits contrats.
Au surplus il y a eu des doutes sur la façon d’ac- corder le present article 294 avec l’article 297 ci- après , qui interdit à la femme pendant son mariage toutes aliénations de ses biens dottaux au préjudice d’elle, ce qui semble déroger à la disposition géné- rale de notre article 294 qui ne fait point d’exception, pourvû que les disposans soient de franche condition ; il est vrai que la plus saine & commune opinion a été, & est encore , que la femme en puissance de mari n’est pas libre de faire par contrat de mariage une donation entre-vifs , par le moyen de laquelle elle deviendroit dessaisie du tout ou de partie de ses biens dottaux , ce qui repugne aux termes rigoureux de l’article 297 : mais lorsqu’il ne s’agit que d’une simple institution d’heritier de la part de la femme mariée qui n’a pas d’enfans, on tient que cette insti- tution est permise, n’étant pas regardée comme une aliénation absoluë de ses biens.
Il faut remarquer que le present article souffre une
I72Coutumes de la Marche ,restriction à l’égard des hommes serfs ou mortailla- bles, puisque les premiers mots disent , entre person- nes franches, mais cependant ils peuvent disposer con- formément à cet article , pourvû que ce soit au pro- fit de leurs enfans , suivant l’art. I72 ci-dessus.
On doit aussi faire attention que les dispositions en faveur des mariages sont sujettes à la revocation établie par la loi, dans le cas qu’il survienne des en- fans legitimes , à ceux qui avoient fait telles dispo- sitions, & qui pour lors n’en avoient pas, suivant l’Arrêt fameux rendu au profit de Me. Charles Du Moulin du I2 Avril I55I.
Au reste il suffit que telles dispositions soient con- tenuës au contrat de mariage, passé du vivant des disposans , pour avoir leur effet ; mais il faut aussi que la mariage accordé par le contrat s’accomplisse dans la suite , car par le deffaut d’accomplissement entre les mêmes parties les dispositions ne seroient d’aucune valeur.
Article Deux cens quatre-vingt-quinze.
Le mary a l’administration des biens de sa femme con- stant le mariage, soient lesdits biens dotaux, adventifs , ou paraphernaux , & en fait les fruits siens tant que le mariage dure.
Article Deux cens quatre-vingt-seize.
La femme , ait son pere ou non, est en la puissance de son mary dès qu’elle est mariée par paroles de present , & ne se peut obliger sans le consentement de son mary , si
des Donations , Dots , Doüaires.I73elle n’est marchande publique; & si le mariage est solu par mort, elle ne retourne pas en la puissance de son pere.
Article Deux cens quatre-vingt-dix-sept.
Le mary & la femme conjointement ou separement constant le mariage ne peuvent vendre, aliener, permu- ter ni autrement disposer des biens dotaux de ladite fem- me au préjudice d’icelle; & sont telles dispositions & alie- nations nulles & de nul effet & valeur , & ne sont vali- dées par serment.
Il a été agité une question , dont voici l’espece ; une femme mariée & autorisée par son mari , ayant par contrat de mariage d’une de ses parentes instituée cette parente son heritiere , des biens qu’elle se trou- veroit lui appartenir lors de son decès , & cette fem- me instituante étant morte sans enfants, un cousin son plus proche heritier collateral paternel , pretendit que la disposition étoit nulle, comme étant une alliéna- tion prohibée par l’art. 297.
Mais on soutint au contraire que l’intitution faite par le contrat de mariage ne tomboit point sousla dis- position de cet article , nonobstant lequel on ne con- testoit point que la femme pendant son mariage peut disposer du tiers de ses biens & au dessous par testa- ment, même sans l’autorité de son mari , ajoutant qu’en effet ladite institution devoit être regardée plû- tôt comme une disposition à cause de mort, qu’au- trement, puisque l’instituante avoit toute liberté jus- qu’à son decès de disposer de ses biens, & qu’en cela
I74Coutumes de la Marche ,la déclaration de son intention avoit été de garder & retenir ses biens tant qu’elle seroit vivante , plûtôt que de les laisser à l’instituée, mais aussi qu’elle avoit mieux aimé que lors de son décès , l’intituée profitat des biens qu’elle pouvoit avoir, plûtôt que l’heritier collateral plus prochain de l’instituante, ce qui faisoit la différence d’avec la donation entre-vifs, par la- quelle le donateur aime mieux que la donataire ait la chose donnée , que soi-même.
D’ailleurs, outre qu’une disposition à cause de mort est permise en contrat de mariage, par l’article ci-des- sus 294 l’esprit & veritable sens de la coutume en l’art. 297 étoit que l’alienation des biens dotaux de la femme n’étoit deffenduë , que dans le cas où elle lui feroit un préjudice , & que hors de ce cas là, les choses revenant au droit commun, la disposition étoit bonne, & devoit avoir son effet.
Cela présuposé on soutenoit que l’institution faite par le contrat de mariage, ne faisoit aucun préjudice à la femme mariée instituante , puisqu’elle ne la dés- saissoit de rien , & qu’elle avoit toute liberté d’user de ses biens jusques à son decès , dans les cas à elle permis, qu’enfin un parent heritier collateral ne pouvoit user de la même faculté que feroit un enfant descendant de la femme, si elle en avoit aucun lors de son decès, puisque la coutume par l’article suivant 298 reserve à l’enfant le droit de reprendre ce qui a été aliéné de la dot de sa mere, par ce qu’en effet la disposition a été préjudiciable à la femme , aussitôt
des Donations , Dots , Doüaires.I75que le préjudice a pû influer envers son enfant survi- vant, ce qui ne peut s’étendre à un heiriter collateral qui n’a pas la même faculté on sçait aussi qu’en ma- tiere de restitution d'une dot , les interêts courent au profit de la femme ou de ses enfans, mais cette faveur n’est pas la même pour les heritiers collateraux, qui ne peuvent prétendre les interêts que du jour de leur demande en Justice.
Dans ces circonstances on a crû que la prétention de l’heritier collateral étoit mal fondée.
Article Deux cens quatre-vingt-dix-huit.
Toutefois si la femme est deuëment recompensée de fonds ou chevance certains , en faisant l’alienation de ses biens dotaux , elle étant mariée , elle ou ses descendans dedans l’an & jour du trépas du mary peut retourner à soi, & se te- nir à la chose dotale, ou à ladite recompense, & ledit temps & jour passez ne pourra revenir à sa chose dotale, sinon en cas d’éviction.
Article Deux cens quatre-vingt-dix neuf.
Si la femme recouvre ses biens dotaux alienez durant son mariage , elle n’est tenuë à aucunes impenses , sinon ès necessaires.
Article Trois cens.
La femme pour mariage de ses filles & autres descen- dans par l’autorité de son mary peut disposer par contrat entre-vifs jusques à la moitié de ses biens dotaux , & au dessous par Decret de Juge & connoissance de cause.

I76Coutumes de la Marche ,Il convient d’observer que cet article forme une exception de la prohibition faite à la femme mariée d’aliéner ses biens dotaux, par l’article ci-devant 297. & il y forme une derogation suivant la maxime poste- riores derogant prioribus, sur tout s’agissant d’un cas fa- vorable , qui est de contribuer au mariage de ses filles & autres descendans, ce qui comprend les fils mâles comme les filles, par ce mot de descendans.
En effet la liberté accordée par cet article , à la femme de disposer sou s l’autorité de son mari, de la moitié de ses biens dotaux , est souvent necessaire pour faciliter le mariage , principalement dans le cas où l’on pourroit douter de la solvabilité du consti- tuant pour le payement de la constitution par lui fai- te , s’il en étoit seul tenu, ce qui pourroit éloigner le mariage, mais cette raison cesse, aussitôt que la fem- me est autorisée à s’obliger solidairement avec son mari , pour la dot constituée à leur enfant , & y af- fecte ses biens dotaux, & la même disposition peut encore devenir necessaire pour assigner valablement la dot constituée à la femme que leur fils épouse , il semble même que la coutume a voulu faire sentir l’importance des précautions à prendre , lors desdits mariages , en marquant par le present article 300 , que la disposition de la femme sera faite par decret de Juge & connoissance de cause , mais depuis plu- sieurs années on n’observe plus de prendre en pareil cas un decret de Juge , comme le regardant inutile , d’autant que les mariages se font toujours en con- noissance
des Donations , Dots , Doüaires.I77noissance de cause, que le mari & la femme y donnent des attentions particulieres , selon leurs moyens & leurs facultez, & qu’ils communiquent ordinairement du tout à leur proches parens , & agissent par leurs avis , ce qui équivaut pour le moins à un decret de Juge , qui ne pourroit le donner avec autant de con- noissance de cause.
Article Trois cens un.
Aussi en cas de necessité pour les alimens d’elle , son mary & enfans , ou pour rachetter son mary de prison , peut la femme aliener ses biens dotaux sans aucune recom- pense à faute d’autres biens, & ce par decret de Juge & connoissance de cause.
Il arrive quelques fois des où quoiqu’un hom- me possede quelques heritages ou fonds immeubles , il se trouve cependant hors d’état d’en tirer un revenu suffisant pour fournir à la subsistance de sa famille, & il peut arriver aussi d’autres cas d’une necessité urgen- te , ou d’une mauvaise conduite d’un mari qui par des dissipations , a consommé tout ce qu’il avoit de meilleur , ou s’est attiré des contraintes par corps, en vertu desquelles il a été constitué prisonnier ; c’est dans ces circonstances que la coutume a crû devoir former encore une exception de la disposition de l’ar- ticle ci-devant 297 , en permettant à la femme dans le cas d’une necessité d’allimens à sa famille d’aliéner ses biens dotaux , & de même pour procurer à son mari la liberté , lorsqu’il se trouve detenu prisonnier
I78Coutumes de la Marche ,pour dettes, attendu que ces deux causes sont aussi pressantes que legitimes ; mais il est certain & d’u sage dans les cas de l’un ou de l’autre , que pour par- venir à l’aliénation du bien de la femme , il faut que les faits soient non seulement constans , veritables & sans fraude, mais encore que la sincerité en soit établie par une procedure qu’on est en usage de faire en cette occasion ; cela fondé sur deux raisons , l’une tirée des termes dudit article 30I , qui ne permet l’aliénation des biens dotaux qu’à deffaut d’autres biens ; l’autre qu’il est de l’ordre du public de veiller à la conserva- tion des biens dotaux des femmes, suivant cet axiome interest Reipublicæ dotes mulieribus conservari. C’est pour cela que le ministere du Procureur du Roy , ou du Procureur fiscal se trouve necessaire dans la procedure, qui commence par une requête donnée au Juge par la femme, expositive des faits, & des causes qui la portent à la necessité d’aliéner ses biens dotaux ; cette requête est communiquée au ministere public qui y donne ses conclusions, tendantes à ce qu’il soit fait preuve certaine des faits de la requête par des témoins dignes de foi, & en vertu d’une ordonnance du Juge conforme aux conclusions , on fait une enquête , & s’il y a des preuves par écrit des faits, on les joint à la procedure, sur laquelle , & les conclusions du Pro- cureur du Roy, après une preuve suffisante des faits, le Juge interpose son decret par une sentence , qui permet à la femme d’aliéner ses biens dotaux , pour employer le prix de l’aliénation à faire cesser les causes
des Donations , Dots , Doüaires.I79pour lesquelles elle est permise ; & il est de la prudence du Juge, selon sa connoissance, & un examen avec équité de l’état des choses, de borner cette aliénation jusques à concurrence de la somme qu’il croit necessaire ; & en effet c’est l’esprit de la coutume, qui s’impose & prescrit le cas de la necessité.
Article Trois cens deux.
S’il n’y a de dot particuliere constituée en traitant le ma- riage, tous les biens que la femme a au temps de ses fian- çailles sont censez & reputez biens dotaux.
Il est cependant d’usage dans la Province , que lorsque la femme n’a point par un contrat de dot particuliere à elle constituée , le futur époux prend la prudente précaution lorsqu’il y a des immeubles ap- partenans à la future , de s’en charger par un état, contenant une declaration desdits immeubles , & pareillement des meubles & effets, si aucuns il y a par une forme d’inventaire , afin d’une part, d’assurer à la femme un assignat sur les biens du mari, de la va- leur de ce qu’il aura reçu desd. meubles & effets au de- là de ceux desd. meubles que la coutume lui accorde, & qu’il est en droit de retenir , en cas de survivance à la femme ; & d’autre part , éviter qu’en cas de re- stitution de la dot , le mari n‘en soit tenu que jus- ques à concurrence de ce qu’il aura legitimément reçu des biens dotaux de sa femme.
Article Trois cens trois.
Femme peut disposer de ses biens paraphernaux ou aven- tifs par titre onereux durant son mariage sans autorité de
I80Coutumes de la Marche ,son mari; mais à titre lucratif elle n’en peut disposer en- tre-vifs à personne quelconque, sinon en faveur de mariage ou par donation mutuelle à sondit mari.
Les termes de cet article, par titre onereux, deman- dent une vraye attention , puisque par la disposition generale de la coutume, le mari constant le mariage étant le maître de tous les fruits & revenus des biens de la femme sans distinction des biens pa- raphernaux, ou aventifs, il ne seroit pas juste qu’el- le eusse la liberté de l’en priver par une disposition à titre lucratif, c’est-à-dire profitable à la femme en son particulier, ou à ceux au profit desquels elle pourroit en disposer , sans le consentement de son mari ; la coutume a eu en ce cas une raison & motif d’équité en formant cet article , mais néanmoins elle a laissé la liberté à la femme de disposer de sesdits biens paraphernaux, ou aventifs, pourvû que ce soit à titre onereux , d’autant que le prix qu’elle retire de cette disposition y demeurant subrogé , le mari en a la joüissance , & se trouve par là desinteressé.
Article Trois cens quatre.
Aucun qui a enfans descendans de lui ne peut donner en la Marche ses biens immeubles propres qu’il a audit pays à quelque personne que ce soit , & n’en peut disposer par titre lucratif entre-vifs , si n’est en faveur de mariage : mais bien peut donner entre-vifs tous ses meubles & con- quests immeubles ou partie d’iceux soit à ses parens autres que ses enfans , ou à personnes étranges.
Nous avons déja dit qu’une donation ou disposi- tion entre-vifs , étoit une vraye aliénation , qui étoit
des Donations , Dots , Doüaires.I8Iinterdite hors les cas permis par la coutume , & il a paru à propos de renouveller par cet article cette in- terdiction en faveur des enfans, par raport aux biens propres & de nature d’immeubles , qui doivent à ti- tre legitime leur demeurer reservez, il suffit bien que la disposition en soit permise par testament, jusques à concurrence du tiers, le testament est revocable par le testateur ou la testatrice usque ad extremum vitæ spiritum. Mais il n’en est pas de même de la disposi- tion entre-vifs.
Article Trois cens cinq.
Les biens dotaux retournent à la femme ou à ses heri- tiers le mariage solu , s’il n’est autrement accordé : & est la femme saisie quant aux immeubles ou ses heritiers, sans autre apprehension de fait.
Il faut ici observer que le retour des biens dotaux que la coutume accorde aux heritiers de la femme , n’est pas dans le cas précis de l’article 297, & qu’il y a lieu d’entendre que le mot d’heritier inseré en cet article, regarde les heritiers collateraux de la femme, & non pas ses enfans , puisque par l’article 298 ci- dessus, s’il y a eu lors de l’aliénation des biens dotaux de la femme , marquée audit article 297 , une re- compense en fonds certains & valables tenant lieu de l’aliénation , la femme ou ses descendans , qui sont uniquement ses enfans, ont la liberté dans l’an & jour du trepas du mari, de se contenter de la recompense, ou de reprendre la chose dotale aliénée , & cette fa- culté & privilege ne passe pas aux heritiers collateraux.

I82Coutumes de la Marche ,Article Trois cens six.
Ce qui est donné par forme de gain nuptial , qu’on ap- pelle au pays logres, en traité de mariage , ne gist point en restitution.
Il est en usage dans les contrats de mariages qui se passent en la Marche d’y établir un gain nuptial , c’est-à-dire un don reciproque que le futur & la futu- re épouse se font , le prémourant au survivant , ce qui donne lieu à celui d’entr’eux qui survit l’autre, de reprendre le profit de ce gain nuptial sur les biens du predecedé, avec une hypotheque du jour du con- trat de mariage ; & dans l’usage ordinaire le gain nuptial accordé par le futur à la future est une som- me au double de ce que la future accorde au futur , ce n’est cependant qu’un usage , & la liberté n’est point contrainte , du plus ou moins , d’autant que notre article ci-dessus 294 de la coutume autorise en contrat de mariage les dispositions entre les conjoints, soit égales ou non.
Il est cependant encore d’usage par un sentiment de bienscéance & convenance dans les contrats de mariages, de stipuler une reduction du gain nuptial, ou au tiers , ou à la moitié , plus ou moins , selon qu’on avise , dans le cas où il surviendra des enfans descendans du mariage , traité par le contrat , & ce en faveur desdits enfans , & de stipuler aussi que ledit gain nuptial n’aura aucun effet , en cas de convol de la part du mari ou de la femme , si pour lors ils ont des enfans de leur mariage , par une même raison de
des Donations , Dots , Doüaires.I83faveur envers lesdits enfans , ce qui est bien naturel & legitime , sur tout dans le cas d’un convol, qui est presque toujours onereux aux enfans d’un premier lit.
Article Trois cens sept.
Celui qui est de franche condition qui n’a d’enfans des- cendans de lui , peut donner à aucun de ses parents de quel- que côté qu’il soit tous ses propres heritages ou partie d’i- ceux par donation entre-vifs, posé qu’il ait autres plus prochains parens que ceux à qui il a fait telle donation : pourveu qu’il y ait bail de possession réel & actuel si la do- nation est faite per modum quotæ. Mais si c’est chose particuliere il suffit possession ficte ; et ne peut faire dona- tion à étrangiers quant aux propres : mais bien peut dis- poser de ses meubles & conquests à son plaisir.
Cet article n’est pas si aisé à entendre , & a besoin de quelque interprétation qu’on doit tirer de l’usage observé à cet égard dans la Province.
I9. Il faut que le donateur soit pleinement libre de disposer , qu’il soit majeur , & sui juris , & que les propres heritages dont il dispose lui appartiennent en pure proprieté , sans aucune communauté ou in- division aux autres , d’autant qu’il faut que la chose donnée soit certaine , & bien specifiée.
29. Il faut que la chose donnée soit , lors de la do- nation, en la possession réelle & actuelle du donateur, parceque dans le sens de cet article , le donateur ne pourroit disposer d’une chose à venir , quand même il prevoiroit qu’elle pourroit lui appartenir dans la suite.

I84Coutumes de la Marche ,39. Il n’est pas permis au donateur de stipuler dans la donation des charges & conditions pour l’avenir ; comme par exemple , de payer les dettes dont ledit donateur seroit tenu au jour de son decès, ou de sa- tisfaire aux legs de son testament quand même lesdits legs seroient, ad pias causas, attendu que telles char- ges & conditions étant incertaines & indeterminées , ne peuvent convenir à une donation entre-vifs , & que ce seroit en ce cas , donner & retenir ; ce qui n’est pas permis dans la disposition de droit.
49. Pour faire valoir la donation & en rendre l’effet certain & accompli , il faut que le donataire soit sai- si de la proprieté de la chose donnée par une tradition réelle & actuelle de ladite proprieté.
59. Il suffit que le donataire soit parent du donateur paternel ou maternel.
69. A l’égard de la donation d’une chose particuliere, c’est à dire d’un propre ou fond particulier , bien specifié & declaré , la coutume permet que le dona- taire s’en puisse reserver & retenir l’usage & l’usufruit sa vie durant ; c’est ce qui s’appelle possession feinte ; il y a eu sur ce mot une faute dans les precedentes éditions de la coutume, où l’on a mis possession ficte , mais il faut dire feinte , suivant l’interprétation de nos meilleurs Jurisconsultes , qui signifie retention d’usufruit, ou constitution de precaire.
Cela se trouve confirmé par un arrêt du Parlement de Paris , rendu contradictoirement, il n’y a que peu d’années, au profit du Seigneur de Fricon de la Dau- ge,
des Donations , Dots , Doüaires.I85ge , contre la Dame du Ligondais & le sieur Des- marquets de Ceré son fils ; le procès fut d’abord por- té en la Senéchaussée de Gueret , ou l’instance fut beaucoup contestée , & on jugea que cette dona- tion , de l’execution de laquelle il s’agissoit , étoit bonne & valable , faite dans le cas du present article 307 , nonobstant que la donatrice y eusse stipulé à son profit une retention de l’usufruit sa vie durant de la chose donnée ; l’arrêt confirma la sentence avec depens contre ledit sieur Ceré, qui contestoit ladite donation.

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CHAPITRE VINGT-DEUX. Des Moulins , Fours & Etangs.
Article Trois cens huit.
SI aucun a place riére soy pour faire chaussée & asseoir bonde, il peut après sa chaussée levée contrain- dre ses voisins à prendre récompense des terres & herita- ges que l’eau peut inonder , en les récompensant arbitrio boni viri , & par connoissance de cause; & pareillement s’il a place à faire moulin pourra alonger son écluse après que le moulin sera fait , pourveu que lesdites terres sujet- tes à ladite inondation ou prochaines du lieu où on fait le moulin ne soient du Domaine, & appartiennent au Seig- neur direct ou justicier ; car en ce cas ledit Seigneur ne sera contraint les vendre ni les laisser par récompense.
Quoi que par la disposition du Droit Commun , personne ne soit contraint de vendre ou achetter ,
I86Coutumes de la Marche ,néanmoins la coutume a eu des raisons particulieres pour introduire la faculté & pouvoir portés en cet art. en y imposant la condition d’une recompense bien raisonnable & reglée en connoissance de cause ; mais on doit y ajouter une condition que la coutume n’a pas prevûë , & qui a été cependant dans l’usage im- posée à celui qui a un étang, & qui a la liberté pour le rendre plus long & plus grand , d’occuper les he- ritages de ses voisins & les inonder , en y faisant re- fluer l’eau de son étang , payer à proportion les cens & rentes ordinaires , dont les heritages inondez peu- vent être tenus envers le Seigneur , de la directe du quel dependent lesdits heritages, n’étant pas juste que celui qui s’en trouvera privé , & n’en tirera aucun profit suporte la même charge dont il étoit aupara- vant tenu.
Article Trois cens neuf.
Si aucun a moulin moulant & en état , ses hommes de feudalité soient francs ou tenans en servitude ou condition mortailliable, demeurans dedans la banlieuë dudit moulin, sont tenus y aller moudre, quelque laps de temps qu’ils ayent moulu ailleurs pendant que ledit moulin n’étoit bâti.
Suivant cet article , lorsqu’un Seigneur à un Mou- lin moulant , & en état , ses hommes de feudalité , ce qui veut dire ses Sujets dependans de sa directe , soit en condition franche , soit en condition serfve ou mortaillable , sont tenus y aller faire moudre leurs grains. Mais il faut ici observer deux choses ; l’une , qu’il faut que le sujet fasse son domicile actuel dans
des Moulins, Fours & Etangs.I87la directe du Seigneur ; & l’autre , que ce domicile soit dans la banlieuë du Moulin : notre coutume ne s’est pas expliquée , & a demeuré dans le silence à l’égard de la distance qui doit former la banlieuë ; ce deffaut de reglement excita il y a quelques années un procès entre la Dame de la Chapelle Barioux , & le sieur Commandeur de Pauliat , qui fut porté en la Senéchaussée de Gueret ; & quoique la banlieuë du moulin soit limitée par la coutume de la Province du Poitou , assez voisine de celle de la Marche, & que ces deux coutumes ayent assez de conformité en la matiere presente, cependant les Juges de Gueret per- suadez que les dispositions des coutumes ne doivent avoir effet que dans l’étenduë de leurs territoires , ne crûrent pas devoir adopter dans ce cas la coutume du Poitou , & ils crûrent qu’il convenoit mieux de re- gler la distance de la banlieuë sur le pied de l’étenduë des lieuës communes & ordinaires de la Marche , & dans cette disposition , par sentence interlocutoire de la Senéchaussée de Gueret du mois de Septembre I679, il fut ordonné qu’il seroit fait un arpentement juste de trois lieuës communes , l’une de la distance qu’il y a d’une des portes de la Ville de Gueret , appellée du Chancelier, jusques à la porte de l’Eglise Paroissiale de Ste. Feyre ; l’autre de la porte de la même Ville appellée de S. Pardoux , jusques à la porte de l’Eglise Paroissiale de S. Sulpice le Gueretois ; & l’autre , d’une autre porte encore de la même Ville de Gueret , ap- pellée Françoise, ou de Piquerel, jusques à une grosse
I88Coutumes de la Marche ,pierre vulgairement appellée la pierre de la Lieuë, qui est dans le grand chemin allant de Gueret au pont de Gleny , près le village de Chavanat , & que de ces trois distances calculées ensemble, le tiers seroit cen- sé la juste étenduë de la banlieuë de la Marche.
Les parties acquiescerent à cette sentence , l’arpen- tement fut fait dans les regles, & a servi depuis de reglement pour la banlieuë.
On doit remarquer que par le present article, les sujets au monage, sont tenus de mener & faire con- duire leurs grains au moulin , sans pouvoir contrain- dre le Meûnier d’aller les chercher en leurs domiciles ; & s’il le fait , c’est sans consequence , à moins qu’il y aye titre à cet effet.
Article Trois cens dix.
Et si aucun de ses hommes a moulu ailleurs , & le Seigneur du moulin ou ses gens le peuvent prendre en ra- menant farine dudit moulin, la farine est audit Seigneur où à son Meûnier : & s’il y a bête portant ladite farine, la bête répondra de l’amende à la Justice du lieu.
Article Trois cens onze.
Le Meûnier est tenu rendre la farine de rez à comble outre le droit de moudure, & tenir le lit & cercles de ses moulins à rond.
L’usage de la Marche est, que le droit de mouture dû au meûnier , est une seiziéme d’un setier , ledit setier composé de huit boisseaux ; & il est certain que nonobstant la retention que fait le meûnier de cette seiziéme du setier , lors que le grain est bien moulu,
des Moulins, Fours & Etangs.I89ce qui est de l’obligation du meûnier il reste toujours assez de farine pour la fournir du rez au comble.
Article Trois cens douze.
Si aucun a four bandier, & aucun d’iceux qui sont sujets de la bandie cuisent ailleurs qu’audit four, le Seigneur du four ou ses gens peuvent prendre ou faire prendre par jus- tice le pain cuit ailleurs qu’en son four, & lui sera adjugé le pain & l’amende à la Justice.
Article Trois cens treize.
Si aucun Baron, Châtellain, ou Haut-Justicier avoit moulin & son valvasseur n’en eût point , tous les hommes du valvasseur demeurans en la banlieuë dudit moulin iront moudre audit moulin du Baron , jusques à ce que le val- vasseur ait moulin; & sitôt que le valvasseur aura moulin, lesdits hommes demeurans dedans ladite banlieuë d’icelui seront tenus d’aller moudre au moulin dudit valvasseur , par quelques laps de temps qu’ils ayent moulu au moulin du Baron.
Le mot de valvasseur s’entend ici du Seigneur de fief , & qui a des sujets dependans de sa directe , les- quels, si ledit Seigneur de fief n’a pas de moulin, peu- vent être assujetis à aller faire moudre leurs grains au moulin du Seigneur haut Justicier , pourvû que lesd. Sujets du Seigneur de fief , fassent leurs domiciles dans l’étenduë de la justice & dans la banlieuë du moulin du Seigneur Justicier.
Article Trois cens quatorze.
Si le moulin ou fours bandiers ne sont en état suffisant,
I90Coutumes de la Marche ,l’homme peut aller moudre ailleurs sans amende ni interêt , & n’est reprehensible jusqu’à ce que le Meûnier ou Four- nier auront fait sçavoir au Prône de l’Eglise que les Four & Moulin sont en état suffisant.
Article Trois cens quinze.
Si le Meûnier differe de moudre de vingt-quatre heures le blé qu’on lui apporte, l’homme à qui est le blé peut aller pour cette fois moudre ailleurs sans etre reputé infracteur de la bandie.

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CHAPITRE VINGT-TROIS. Du Ban.
Article Trois cens seize.
LE Seigneur qui a droit de ban en la Marche pour vendre son vin ou autre denrée, ne peut tenir outre quarante jours continuels par chacun an, mais si moins a accoûtu- mé le tenir , il sera tenu soi tenir au moins, & est tenu de bailler sa denrée pour le prix qu’elle vaut le jour prece- dent de la bandie , laquelle il doit faire apprecier par ses Officiers s’il est Justicier , sinon par Officiers de la Justice , appellez trois ou quatre Prud’hommes à ce connoissans.
Article Trois cens dix-sept.
Et ne peut & ne doit tel bandier entrer en cave ou cel- lier d’autruy pour visiter quels vins il y a, ni les mesurer : mais bien se peut enquerir s’il y a personne qui vende au préjudice dudit ban pour en faire poursuite par Justice; & qui vient contre la bandie doit soixante sols d’amende & interêt de partie qui a le droit de ban.

du Ban.I9IArticle Trois cens dix-huit.
Tel Seigneur ne peut empécher que ceux de la bandie ne donnent vin ou autres denrées sujetes audit ban.
La disposition du present chapitre contenant trois articles , est assez inutile en la haute Marche ; il est vrai qu’il y avoit autre fois quelques heritages plantez de vignes , & que certains Seigneurs avoient droit de Ban pour le Vin qu’ils recüilloient de leurs vignes ; mais cela a cessé , & en effet, la mauvaise qualité & la maigreur des terres de la Marche ne les rendent pas propres pour y faire des vignes ; l’usage en a été aboli , tant de la part des Seigneurs qui avoient droit de Ban , que de celle des autres habitans de la Pro- vince, qui font leur provision de vin dans les Pro- vinces voisines.

§§
CHAPITRE VINGT-QUATRE. Des Espaves & Biens vacans.
Article Trois cens dix-neuf.
BEstes menuës , comme chevres, pourceaux & autres semblables prises par espave doivent être gardées trois jours avant qu’être venduës par Justice ; & grosses bêtes comme boeufs, vaches, jumens, ânes, & autres leurs semblables huit jours, afin que leurs maîtres les puissent recouvrer.
Article Trois cens vingt.
Si ledit temps passé n’appert aucun qui poursuite en
I92Coutumes de la Marche ,fasse pourront être venduës & délivrées par l’Officier de la Justice au plus offrant en place publique à l’acheteur & dernier encherisseur.
Article Trois cens vingt-un.
Les deniers doivent demeurer en main tierce autre que du Seigneur ou ses Officiers, & ce fait, par trois prochaines assises sera faite proclamation s’il y a personne requerant sesdites bêtes & qui les puisse & sache avouer, & s’il s’en trouve aucun, les deniers confisquez lui seront rendus en payant les frais raisonnables.
Article Trois cens vingt-deux.
Si personnes n’appert qui puisse prouver lesdites bêtes être siennes dedans lesdites trois assises, les deniers seront adjugez au Seigneur haut Justicier ou autre ayant droit d’espave en la Jurisdictiun duquel lesdites bêtes auront été prises.
Article Trois cens vingt-trois.
Si aucun trouve bourgnon à miel d’espave en son heri- tage, il sera tenu le rendre au Seigneur Justicier , en la Justice duquel est trouvé ledit bourgnon , dans huit jours; & en ce faisant il aura la moitié dudit bourgnon , & l’autre moitié appartiendra au Seigneur Justicier, ou au- tre ayant droit d’espave.

Le mot de bourgnon à miel , est ici entendu par un essaim d’abeilles, qui fuit quelques fois d’un lieu à un autre ; mais si ledit essaim est reclamé par un particu- lier qui puisse prouver legitimement que ledit essaim d’abeilles a été formé dans son fonds & heritage par- ticulier,

des Espaves & Biens Vacans.I93ticulier , alors il doit lui être rendu , n’étant plus présumé une espave.
Article Trois cens vingt-quatre.
Et s’il le recelle & il soit convaincu, il restituera ledit bourgnon espave , & sera condamné en l’amende de soi- xante sols; & s’il le prend en autrui fonds , il sera puni d’amende arbitraire, & condamné à rendre led. bourgnon.
Article Trois cens vingt-cinq.
Biens vacans sont & appartiennent au Seigneur haut Justicier en la Jurisdiction duquel ils sont assis, sur lesquels se doivent payer les funerailles & les creanciers tant que les biens durent, & se doivent crier publiquement par qua- tre assises, & à la derniere s’il n’y a opposant doivent être adjugez, & cependant doivent être saisis & mis en main de Justice.
Comme il n’y a point de biens allodiaux en la Marche , & qu’il n’y a point de terres sans Seigneur , il se trouve toujours des possesseurs ou ayant droit de posseder , & on ne connoit point de ces sortes de biens vacans en la Marche.
Article Trois cens vingt-six.
Les biens des aubains étrangiers qui n’ont heritiers ca- pables , appartiennent à Madame en la Marche.



I94Coutumes de la Marche ,
CHAPITRE VINGT-CINQ. Des Bornes & Limites.
Article Trois cens vingt-sept.
ENtre privées personnes chacun peut mettre bornes & limites avec son voisin en ses heritages particuliers sans autorité de justice, pourveu que les terres ne fassent li- mites de diverses Justices ou Paroisses, auquel cas faudroit appeller les Officiers des lieux sur peine de l’amende.
Les termes de cet articles , qui disent entre privées personnes , & pour heritages particuliers , font connoî- tre qu’il ne s’agit point ici de l’interêt public , dont l’exception est veritablement faite en cet article , & la disposition est faite pour la commodité & conve- nance des particuliers qui ont des heritages contigus les uns aux autres.
Article Trois cens vingt-huit.
Tertre & gorsse étant entre un pré & une terre appar- tient au Seigneur du pré s’il n’appert du contraire.
Il y a eu une faute sur cet article dans les éditions precedentes , où l’on a mis mal à propos le mot de terre , au lieu de celui de tertre , c’est-à-dire un petit terrain élevé au dessus de la terre qui y est , néan- moins contigu , & fait une dependance de la terre ; c’est la signification propre de ce terme en la Marche : Et dans l’édition de la coutume de Caillet , quoique deffectueuse d’ailleurs en plusieurs termes, il y a néan-
des Bornes & Limites.I95moins employé le mot de tertre , pour signifier la chose dont il s’agit : & quant au mot suivant appel- lé gorsse , c’est un terme vulgaire pratiqué en la Marche , qui signifie une haye vive , dont l’usage est commun en la Marche , pour diviser les heritages particuliers , aussi bien que les chemins publics.
Suivant la decision de cet article , la haye vive étant entre un pré & une terre , appartient au Seig- neur du pré , comme possesseur d’un heritage plus noble , & qui demande plus de conservation ; mais la coutume ajoute , s’il n’appert du contraire , c’est- à-dire, que si le possesseur de la terre contiguë au pré, a un titre formel ou une possession paisible de trente ans de la gorsse ou haye vive , en la faisant couper & retailler , retirant le bois à son profit , & cüeillant le fruit des arbres fruitiers , si aucun s’y trouvent , il a dès-lors prescrit à son profit la proprieté de la haye , suivant l’article 89 de la coutume , qui n’a rien d’op- posé à cela , c’est-à-dire qu’il continuera la jouissance de ladite haye , en ce que néanmoins il ne peut la détruire ni deterriorer au préjudice du proprietaire du pré , auquel la haye doit toujours servir de clôture , attendu que ledit proprietaire de la terre doit conser- ver ladite haye sur le pied qu’il l’a acquise par la pres- cription d’une jouissance paisible pendant trente ans ; mais ce cas est fort rare , attendu que le proprietaire du pré étant informé du droit à lui acquis sur la haye par la coutume , ne souffre pas ordinairement inter- ruption de ce droit , sur tout par un usage contraire pendant trente ans.

I96Coutumes de la Marche ,Nous pouvons observer au sujet de cet article , que le titre du droit de glande legendâ est executé dans quelques endroits de la Province, & particulierement en la paroisse de Ste. Feyre où les arbres fruitiers sont plus abondans & en plus grand nombre qu’ailleurs ; car le fruit qui tombe dans l’heritage d’autrui se par- tage également entre le propriétaire de cet heritage , & le proprietaire de l’arbre.
On est aussi en usage d’executer le titre du droit de arboribus cædendis, qui est, que lorsqu’un arbre se trou- ve planté dans un heritage qui joint le champ d’au- trui , & qui par son élevation & garniture abondante en feüillages peut y cacher le soleil , & par là en di- minuer le produit , le proprietaire du champ sur le- quel les ramages de l’arbre portent , peut obliger le proprietaire de l’arbre à le couper & retailler par le bas , jusqu’à quinze pieds du rez de chaussée.


CHAPITRE VINGT-SIX. Des Terrages & Reilhages.
Article Trois cens vingt-neuf.
SI aucun a baillé aucune terre a droit de terrage , ou agrier à perpetuel, & celui à qui elle est baillée laisse lad. terre en friche sans la labourer par trois cuillettes, tel- les que les semblables terres ont accoûtumé porter, celui qui a baillé ladite terre peut la reprendre & la mettre en son domaine, ou bailler à autre, déclaration sur ce faite par Juge competant; & neanmoins pourra conclure les domma-
des Terrages & Reilhages.I97ges & interêts pour les années passées; & semblablement des Metairies perpetuelles.
Il y a quelques endroits dans la Province de la Ma- che où le droit de dîme de Terrage est en usage ; ce droit n’a point d’autre fondement qu’une convention volontaire, qui se fait lorsqu’un particulier proprietaire & possesseur d’un champ de terre propre au labourage , en delaisse & trasmer la proprieté à un autre, pour en jouir dès-lors par celui-ci, comme de sa chose propre, sous la condition que chaque année que la terre sera ensemencée de grains, il sera payé à l’ancien proprie- taire de la terre une certaine quantité de grains plus ou moins , selon la convention & dans les termes qu’elle a été faite ; cela s’appelle dîme de Terrage.
Article Trois cens trente.
Si la terre qui doit dîme est en une dîmerie où villa- ge separé en pâturage , & les boeufs qui la labourent cou- chent & paissent en une autre dîmerie ou village, le dî- me se part par moitié entre les deux dîmeries, soient gens d’Eglise ou autres , à cause de la suite de reilhage.
Les personnes qui ne demeurent pas en la Provin- ce de la Marche , & n’en connoissent pas trop les droits & usages , ont besoin qu’on leur fasse entendre ce que c’est que la suite de Reilhage, dont il est parlé en cet article , qui étant assez court en sa disposition, a besoin d’une explication particuliere , d’autant plus que nous ne connoissons guére que notre Province de la Marche , & celles de Nivernois & Berry , où ce
I98Coutumes de la Marche ,droit particulier soit en usage, ainsi que l’a observé Coquille sur la coutume du Nivernois, quest. 77.
Cependant ce droit de Reilhage est fondé sur une équité entiere ; & voici comment la chose se pratique : il y a en la Marche, comme ailleurs, differentes dîmeries , lesquelles ont toutes leurs limites & separa- tions , soit par paroisses, villages, cantons ou champs de terre , selon les titres & possessions de ceux à qui lesdites dîmeries appartienent ; il arrive souvent que des laboureurs demeurans dans une dîmerie , où ils tiennent leurs bœufs qui y couchent & paissent la plus grande partie de l’année , vont dans une autre dîme- rie & y transportent leur travail & celui de leurs bœufs qu’ils y conduisent , & là ils y labourent & cultivent des champs de terres , qu’on ensemen- ce de grains ; il est certain que dès-lors que lesdits laboureurs sortent de leur demeure & de la dîmerie ordinaire avec leurs bœufs , & portent leur travail en une autre dîmerie , le Seigneur decimateur de la pre- miere dîmerie se trouve privé du profit qu’il auroit pû retirer du travail des bœufs de sa dîmerie , s’ils y avoient resté pour y cultiver des terres ; & il n’est pas moins certain que le Seigneur decimateur de l’autre dîmerie , dans laquelle le laboureur de la premiere transporte son travail avec ses bœufs , retire un pro- fit particulier du labourage & culture des terres sujet- tes à sa dîme , lequel il n’auroit pas eu sans ce travail casuel.
Dans ces circonstances, la coutume a disposé que
des Terrages & Reilhages.I99la dîme se partageroit par moitié , entre les decima- teurs des deux differentes dîmeries , ce qui paroît fort raisonnable, attendu que cette moitié est accor- dée au premier decimateur par forme de dedomma- gement du travail que les bœufs de sa dîmerie ont cessé d’y faire pendant qu’ils ont transporté leur tra- vail dans l’autre dîmerie, pour raison de quoi la cou- tume lui accorde l’autre moitié de la dîme.
On pretend que le terme de suite de reilhage emplo- yé dans notre article, vient du mot de regle, ainsi dit vulgairement entre les laboureurs, ce qui signifie le soc de la charruë.


CHAPITRE VINGT-SEPT. Des Crimes & Delits.
Article Trois cens trente-un.
SI aucun est appellé en jugement pour une simple injure, & l’accusateur ou accusé ne veulent persister , il n’y a amende pour la Justice que de sept sols; mais si l’injure est attroce portant diffamation, l’amende est arbitraire.
C’est article a pour principe la charité chrêtienne qui porte à mépriser les injures , sur tout lors qu’elle ne sont que verbales & non atroces ; en effet nous voyons dans les histoires que les plus grands Princes & Personnages , même les Payens par principe de vertu , ont méprisé pareilles contumelies & injures , & en ont rendu raison en disant , si ex levitate proces- sit contemnendum est ; si ex insaniâ, miseratione dignis- simum ; Si ab injuriâ, remittendum.

200Coutumes de la Marche ,Cependant lorsque les injures sont attroces , pro- ferées avec malignité & perseverance , & qu’elles peu- vent interresser l’honneur & la reputation de la per- sonne à qui elles sont faites , il convient autant à la dignité & qualité de cette personne, qu’au bon exem- ple, d’en demander & obtenir une juste & legitime satisfaction.
Article Trois cens trente-deux.
Action d’injures verbales est éteinte par an & jour, si- non que la cause & action fut dedans l’an intentée.
Article Trois cens trente trois.
En cas privilgié comme de assurement ou main mise enfrainte & brandon enfraint, ou autre semblable, le Pro- cureur d’office n’est recevable sans qu’il y ait plaintif ou dénonciateur; mais en cas d’excés où il y a sang & playe ouverture ou batture outrageuse, il est recevable de son office sans plaintif ou dénonciateur, pourvû qu’il y ait informa- tions precedentes.
Article Trois cens trente-quatre.
Plaintifs ou dénonciateurs, qui ont faussement dénoncé, sont tenu envers Justice en l’amende arbitraire & envers partie en tous interêts & dommages : & s’ils ne poursuivent leur dénonciation ou plainte, quand ils ont fait partie au procés, & dedans les delais à eux donnez, ils doivent être con- damnez en la folle plainte qui est arbitraire envers Justice, & és dépens, dommages & interêts de la partie accusée. Et combien que le dénonciateur ou plaintif ne soit au pro- cès, l’accusé aprés absolution doit sur eux avoir depens, dommages & interêts , & la Justice l’amende.

des Crimes & Delits.20IArticle Trois cens trente-cinq.
Le bas & moyen Justicier s’ils ont un prisonier dont il ne doivent avoir connoissance, le doivent signifier à leur Supe- rieur dedans vingt-quatre heures, pour le venir querir en payant les frais raisonnables; & si le Superieur est delayant dedans deux jours aprés ladite notification faite, lesdits Seigneurs bas & moyen Justicier ne sont plus tenus de la garde. Et l’on pourra avoir recours au Superieur dudit haut Justicier pour ledit reffus.
Article Trois cens trente-six.
Si aucun est mis à mort par Justice par son méfait , ses biens ne sont pour ce confisquez, mais appartiendront aux heritiers si aucun en a , sinon qu’il eût commis crime de leze- Majesté divine ou humaine; toutefois pourra le Juge ordon- ner sur lesdits biens les frais raisonnables être pris & les interêts & dommages des parties interessées.
Article Trois cens trente-sept.
Le banni ou relegué à certain temps, s’il revient dedans le temps de sa relegation ou banissement, tout le temps est redoublé; & si ce nonobstant il revient ou est trouvé au lieu dedans ledit temps redoublé, il sera banni à perpetuel : & si après il retourne,il sera fustigé & aura les oreilles coupées; & si néanmoins il revient, il sera puni de plus grande peine.
Article Trois cens trente-huit.
Si aucun Marchand meine faux draps ou autre mar- chandise fausse, & il est prouvé, ladite marchandise doit être arse & brûlée ou autrement distribuée à l’Ordonnance
202Coutumes de la Marche ,du Juge, & le Marchand condamné en amende arbitraire.
Article Trois cens trente-neuf.
Si aucun malfacteur a forfait en la terre d’aucun Justi- cier , s’en va en la terre d’un autre Justicier , le Seigneur où il auroit forfait ou ses gens le peuvent prendre en autre Justice : mais ne le peuvent mettre hors de ladite Justice , où il sera pris sans autorité d’icelle ; & le doit avoir le Justicier où il aura delinqué, puisqu’il la le premier pris pour le punir ou renvoyer si la matiere y est sujette, posé que le delinquant ne fut poursuivi de chaude suite; mais si le Seigneur en la Jurisdiction duquel il seroit trouvé la pris le premier, l’autre Justicier en la Ju- risdiction duquel il a délinqué ne l’aura point s’il ne l’avoit poursuivi de chaude suite; & en ce dernier cas fera droit le Justicier où il sera pris sur le renvoy s’il y échet.
Article Trois cens quarante.
Si aucun tient fausse mesure publiquement & use d’i- celle, l’amende est arbitraire à Madame des Chastelenies ou Seigneuries de la Marche à elle appartenantes & aux au- tres esquelles elle a droit de mesurer; mais és Chastelenies & Seigneuries depandans dudit Comté de la Marche appar- tenans aux vassaux ou arriere vassaux, elle est arbitraire au Seigneur en la Jurisdiction duquel ladite mesure fausse sera trouvée.
Article Trois cens quarante-un.
Si aucun tenu à péage payer, passe par la péagerie d’au- cun Seigneur sans payer son péage, & il soit convenu du péage brisé, il sera quitte en payant, pourveu qu’il jure & affirme qu’l ne sçavoit qu’il y eût illec péage , sinon qu’il y
des Crimes & Delits.203eût enseigne notoire de péage, ou qu’il eût été interpellé de le payer : auquel cas le dit passant sera amandable de soixante sols, moitié au Seigneur Justicier , & moitié au Seigneur dudit péage.
Article Trois cens quarante-deux.
En infraction de main mise, l’amende est de soixante sols tournois , outre la restitution des choses prises & emportées : & assurement enfraint emporte amende arbi- traire.
Article Trois cens quarante-trois.
En cas d’injures & excés, la femme étant en puissance du mari , ou le fils de famille étant en puissance de pere , peuvent être en jugement en demendant & defendant sans autorisation.
Article Trois cens quarante-quatre.
Celui qui envoye gensdarmes ou mauvais garçons en la maison d’autrui pour le piller & outrager en sa personne ou biens, & en est convaincu, doit être condamné en tous dommages, interêts souffers & soûtenus par icelui ou ceux en la maison desquels lesdits gensdarmes ont été en- voyez, & en amende envers le Seigneur & envers les par- ties interessées ; & si par ledits gensdarmes y a meurtre ou autre crime public commis , celui qui les aura envoyez comme dessus en repondra de sa personne.
Il seroit assez inutile de s’arrêter à aucune explica- tion de la plûpart des articles du present chapitre , d’autant que depuis la redaction de la coutume , nos Roys ont jugé à propos, pour le bien & utilité de leurs sujets & du Royaume, de faire plusieurs Ordon-
204Coutumes de la Marche ,nances, Edits & Declarations qui ont reglé tout ce qui doit être fait pour la poursuite & punition des crimes & delits ; comme aussi la Police qui doit être observée dans le commerce entre les sujets ou autre- ment. Le Roy LOUIS XIV , s’est principalement at- taché par son Ordonnance Criminelle de I670, & par plusieurs Edits & Déclarations , qui ont suivi cet- te Ordonnance, à prescrire aux Juges la conduite qu’ils doivent tenir dans ces sortes de cas ; & le Roy heureusement regnant en a ajouté d’autres ; & comme toutes les Loix & Ordonnances , soit pour matieres Civiles, Criminelles , ou de Police , ont été dûëment registrées dans les Cours , pour être executées selon leur forme & teneur , on doit s’y conformer & en executer les dispositions, d’autant plus qu’elles con- tiennent des derogations à toutes loix, coutumes & usages à ce contraires.

*
CHAPITRE VINGT-HIUT. Des Communautez entre Consorts.
Article Trois cens quarante-cinq.
CE que l’un des communs en biens & consors acquiert des biens de la Communauté, est acquis à tous ceux d’icelle; & toutes choses qu’il fait au profit d’icelle Com- munauté revienent au profit commun à quelque nom qu’elles soient faites; & s’il fait aucunes dettes necessaires & utiles elles se doivent payer des biens communs.
Il paroît par les termes de cet article, qu’il s’agit
des Communautez entre Consorts.205ici d’une Communauté expressement contractée par un contrat , par des particuliers nommez Consorts , & dont la condition & les biens soient en directe franche ; car s’il s’agissoit de gens serfs ou mortailla- bles , ils ne pourroient contracter pareille Commu- nauté en biens sans distinction, hors le consentement du Seigneur , ainsi que nous l’avons observé ci de- vent sur les articles I5I , I52 & I53 de notre cou- tume : & comme le present article 345 n’impose au- cune condition qui gêne la liberté des hommes dans les contrats de Communauté qu’ils contractent & les rends consorts , il ne faut pas s’attacher à la lettre de cet article , par raport aux dettes , d’autant que dans plusieurs contrats de pareille Communauté il y a une stipulation expresse de la volonté des contractans, qui porte ,, qu’ils ne demeureront chargez les uns envers ,, les autres des dettes par eux contractées durant ,, la Communauté , que jusques à concurance d’une ,, somme qui y est marquée : & cela en vûë d’établir & conserver entre les Consorts une bonne conduite & œconomie ; & néanmoins il y a toujours une exception de droit , conforme aux derniers termes du present article , qui est ,, que si la dette a été con ,, tractée pour causes necessaires & utiles à la Com- ,, munauté en général , qui en aye tiré du profit , ,, tous les communs & consorts sont tenus d’y con- ,, tribuer chacun pour la part & portion qu’ils pren- ,, nent à la Communauté dans les termes du contrat.

206Coutumes de la Marche ,     :           
CHAPITRE VINGT-NEUF. de Dommages de Bestes.
Article Trois cens quarante-six.
POur bêtes pâturans en autrui dommage soit en blez prez, bois tallis, aprés les trois années & un may , garennes ou autres heritages, n’y a point d’amende à la Jus- tice, s’il n’y a main mise, brandons, precedens ou garde faite; mais celui à qui a été fait le dommage, a le choix d’avoir l’estimation d’icelui en le prouvant ou la mé faite coutumiere, qui est quant aux pourceaux deux deniers, pour la brebis un deniers, pour vache ou boeuf ou autre grosse bê- te à corne quatre deniers, pour chevre trois sols, cheval ou jument ferrez seize deniers, s’il ne sont ferrez huit deniers: & s’il y a main mise de brandon ou garde faite, il y a soi- xante sols envers Justice & l’interêt de partie, comme dit est.
Article Trois cens quarante-sept.
Il est permis à un chacun de prendre bêtes d’autrui trouvées en son fond & heritage lui donnant dommage, & les gar- der vingt-quatre heures pour être payés de sa méfaite cou- tumiere, ou du dommage donné, à son choix & élection; & est celui qui prend lesdites bêtes crû par son serment de les avoir trouvées & prises en son dommage, & du tems de la prise quant à recouvrer l’estimation du dommage , ou la méfaite coutumiere : lequel serment il doit faire ès mains de Justice à ce present & appellé celui à qui seront lesdites bêtes : & se peut faire ladite prise sans témoins,
de Dommage de Bêtes.207mais ès lieux & causes où il y a amende en prise de bêtes, il y faut un témoin.
Lors de la redaction de la coutume, l’argent étant alors plus rare & beaucoup moins commun qu’il n’est à présent , il n’est pas extraordinaire que la coutume aye fixé la méfaite causée par les bêtes dans les hérita- ges d’autrui , à une somme tout à fait mediocre , la- quelle pouvoit avoir cependant alors quelque pro- portion du prix de l’argent, & à celui des denrées ; mais dans l’état present des monnoyes, il y auroit en verité une justice de retoucher à cet article , aussi bien qu’à ceux des cens, rentes & devoirs Seigneuriaux prescrits en deniers payables par ceux qui en sont te- nus , specialement pour les arbans & corvées à bras, pour lesquels ceux qui en sont tenus sont libres de les faire , ou de payer au Seigneur trois sols pour cha- que arban ; car , est-il naturel de croire qu’une som- me actuelle de trois sols , soit suffisante pour remplir la valeur d’une journée à bras , dûë par l’homme serf ou mortaillable à son Seigneur , & de même qu’une méfaite & dégat causé par un pourceau dans un pré , & d’un bœuf dans un champ ensemencé de blé , n’aye d’estimation que de deux deniers en espe- ce presente pour le pourceau , & quatre deiners pour le bœuf ?
Il paroit par le même article que la vûë & l’esprit de la coutume ont été de dédommager raisonnable- ment le proprietaire de l’heritage, sur lequel le dom- mage a été causé, & cela se prouve par l’estimation
208Coutumes de la Marche ,que fait la coutume du dommage causé par une che- vre prescrit à trois sols ; en effet, on tient que la mor- sure d’une chevre est en quelque façon venimeuse, & que cette morsure, principalement sur les arbres frui- tiers, les desséche , en détruit le produit, & les fait enfin mourir ; ne doit-on pas dans ces circonstances convenir de la justice qu’il y auroit d’augmenter à present les anciennes redevances dûës & stipulées pa- yables en argent, selon la proportion actuelle du prix de l’argent ? & il n’y auroit pas lieu d’alléguer au con traire, que les droits de redevances sont censez odieux , & doivent être restraints plûtôt que d’être augmentez, en considerant qu’en la Marche les redevances n’ont pas été établies sur les personnes, mais seulement pour raison des biens & heritages dont les Seigneurs qui en étoient proprietaires , ont fait un délaissement gra- tuit , à des particuliers pour en joüir & disposer selon les clauses & conventions sur ce faites , & reciproque- ment acceptées ; & ce qui fait connoître que loin qu’il y aye rien d’odieux en ce délaissement & con- ventions , au contraire tout est favorable pour le sujet & redevable ; c’est qu’outre l’acquisition gra- tuite qu’il fait de l’heritage, la coutume lui permet de le guerpir & remettre au Seigneur toutes fois & quantes , en payant les droits échus , moyenant laquelle remise dudit heritage , ledit sujet redevable est plainement quitte pour l’avenir de la redevance , & dès-lors il fait cesser sa condition de sujet & rede- vable.
Article

de Dommage de Bêtes.209Article Trois cens quarante-huit.
Si celui a qui sont lesdites bêtes les vient requerir dedans les vingt-quatre heures, celui qui les a prises est tenu les ren- dre en lui baillant gage ou caution de payer ladite méfaite au dommage donné; & ne les peut le preneur bailler à Jus- tice devant lesdites vingt-quatre heures sur peine d’amende, sinon qu’il y eût main mise ou garde faite ; & si celui à qui sont lesdites bêtes ne vient les querir dedans ledit tems de vingt-quatre heures, celui qui les a prises les doit bailler à Justice le plûtôt qu’il pourra, & pour le plus tard dedans six heures, & dudit tems sera cru par serment; & si les- dites bêtes sont advoüées par celui sur qui elles sont prises il y a soixante sols d’amende outre la méfaite & dom- mage, & les pâtures & frais raisonnablement; & s’il n’y a adveu, lesdites bêtes sont au Seigneur Justicier, comme espar- ves sur lesquels sera prise la méfaite & interêt du preneur, & frais de pâtures.
Article Trois cens quarante-neuf.
Si celui qui a trouvé lesdites bêtes en son méfait ne les a pû prendre & qu’il s’en soit mis en son devoir, il peut dénon- cer à Justice pour avoir sadite méfaite coûtumiere ou dommage donné; et est crû par son serment d’avoir trouvé lesdites bêtes, & ne les avoir pû amener, lequel serment fait partie presente ou appellée, il doit avoir sadite méfaite ou dommage.
Article Trois cens cinquante.
Mais s’il s’arrête avoir dommage donné ne doit être crû de l’estimation d’icelui, ains le doit faire voir & estimer
2I0Coutumes de la Marche ,dedans quatre jour aprés la prise, comme si fait tout autre qui demande dommage donné par gens à ce connoissans, par- ties presentes ou appellées pour en faire leur rapport à Jus- tice, contre lequel ladite partie sera ouïe à dire ce que de raison; & si le dommage n’est donné dedans quatre jours, il ne pourra demander que la méfaite coûtumiere.
Article Trois cens cinquante-un.
Si aucun fait recours de bêtes prises en méfait d’autrui il est amendable de soixante sols tournois envers Justice outre la méfaite ou dommage donné, dont le prenur des- dites bêtes aura recours contre celui à qui lesdites bêtes ap- partiennent.
Article Trois cens cinquante-deux.
Tous prez clos sont défensables en tous tems tant & si lon- guement que l’on les tient clos: mais quand ils ne sont clos, ne sont défensables depuis la saint Martin d’hiver jusques à my Mars en suivant ; toutefois pour ce que en plusieurs lieux on a accoûtumé faire paître les prez incontinent que le foin en est hors , l’on usera comme l’on a accoûtumé.
Article Trois cens cinquante-trois.
Chacun peut prendre en son bois bêtes d’autrui pâturans, posé qu’il n’y ait fruits en quelques tems & saison de l’an pour en avoir seulement la méfaite coûtumiere; mais si esdits bois y a fruits, ou si ce sont taillifs, dedans trois ans & un may ou garennes on peut demander méfaite coû- tumiere ou dommage donné selon que dessus.
Article Trois cens cinquante-quatre.
Et si lesdites bêtes sont prises au bois taillif coupé depuis
de Dommage de Bêtes.2IItrois ans , et le mois de may aprés ensuivant lesdits trois ans , à compter du tems de ladite coupe , y a pour chacune bête à corne , mouton ou brebis pour chacune prise la pre- mière année trois sols de méfaite coûtumiere , pour la se- conde deux sols,& pour la tierce année douze deniers;& aussi se garde en garenne ancienne en tout tems; & la chevre prise en tout tems & saison de l’an doit trois sols de méfaite.
Article Trois cens cinquante-cinq.
Es lieux & champs non cultivés , jaçoit qu’ils soient propres à aucun , comme chaumes , bruyeres , restoubles & autres semblables qui ne sont clos , n’y eschet prises de bêtes entre ceux d’un même village & marchage ; mais si fait bien és plants & buisson vifs servans à clôture de prez & terres quand les chevres , boeufs ou vaches y sont trouvez pour en avoir la méfaite coûtumiere où le dommage donné.
Article Trois cens cinquante-six.
Si on garde bêtail en dommage d’autrui à garde faite , l’amande est de soixante sols tournois à Justice , & l’interét & domage de la partie à l’estimation du Juge vûë & rapport faits comme dessus; & si aucune bête est prise de nuit don- nant dommage sans garde , il y a soixante sols ou confisca- tion de la bête outre l’intêt de partie; en ce cas il faut témoins.
Article Trois cens cinquante-sept.
Les champs communs , pâturages & marchages tant de champs que de bois és lieux où il y a bois communs ou vergiers destinés à pâturages se limitent par villages.
Article Trois cens cinquante-huit.
Et ne peuvent les habitans d’un village mener paître
2I2Coutumes de la Marche ,& pâcager leur bêtail és pâturages de l’autre village ; & si ledit bêtail y est trouvé , y eschet méfaite coûtumiere ou dommage donné , si non que les habitans desdits vil- lages ayent par commun entre-eux aucun droit de mar- chage.
La disposition de ces deux articles fait connoitre qu’il n’y a que ceux sui sont demeurans actuellement dans un village , qui ayent droit de mener pâcager leurs bestiaux dans les communaux & pâturages com- muns du même village, & qu’il ne suffit pas d’en être tenancier en partie , il faut y avoir une habitation par feu & residence ; il est aussi établi par ces articles, que les communaux sont ordinairement divisés par villages, & c’est un titre favorable quand un communal porte le nom d’un village , pour le faire présumer appartenir aux Habitants de ce village, à l’exclusion de ceux des villages voisins, à moins qu’il n’y eûut un titre exprès au contraire ; cela a été ainsi jugé par divers arrêts en nôtre coutume , & speciale- ment par trois arrêts ci-devant cités, l’un en faveur des Habitans du village de Vernet du I Mars I637, l’autre pour les Habitans du village de Cherbaliot du 6 Septembre I664, & l’autre pour les Habitans du vil- lage de la Renardiere du 23 Mars I67I.
Article Trois cens cinquante-neuf.
Aucun ne peut estiver ou tenir en aucun village & pâ- turages communs d’icelui plus de bêtail qu’il n’en a hyver- né ou qu’il en eût pû hyverner des foins & pailles qu’il à
des Executions de Meubles.2I3recueilli des heritages qu’il tient de son propre ou par loüage audit village, ladite année sur peine d’amende arbitraire.
Article Trois cens soixante.
Pâturage seul sans autre titre n’attribuë droit de posses- sion ou proprieté és terres vacans appartenans à autrui par quelque laps de tems que ce soit, sinon qu’il y eût joüissance aprés le temps de contradiction par l’espace de trente ans.

     :           
CHAPITRE TRENTE. Des execution de Meubles , Ventes , Criées , & subhastations d’Heritages.
Article Trois cens soixante-un.
LE créancier qui a obligation ou condamnation sous scel Royal, ou de la Comté de la Marche ou d’aucun sujet qui a scel à Contrats ou d’autres scel autentique de cour laye ou pour la cause de ses rentes , s’ils est en possession, comme dit est dessus , pour soy faire payer de son dû ou après confession faire par le debteur en la presence d’un Sergent & témoins de dette non excedant la somme de cent sols tournois , peut par commission suffisante avec ledit obligé ou condamnation ou sans commission après ladite confession, par un Sergent faire prendre les meubles de son debteur ou de son heritier , declaration préalablement faite d’être heritier, pourvû que préalablement il ait sommé son debteur en personne ou domicile de lui faire payement , si en l’obli- gation n’y a point de terme.

2I4Coutumes de la Marche ,Article Trois cens soixante-deux.
Le meuble ainsi pris par l’executeur doit être vendu à la huitaine en suivant, & la vente en faisant la prise être signifiée au debteur; & se doit faire ladite vente en la place publique du lieu où est faite ladite execution.
Article Trois cens soixante-trois.
S’il y a opposition à ladite prise ou vente , les biens pris doivent demeurer en main tierce par forme de garnison jusques à ce que par le juge autrement en soit ordonné, & doit l’éxecuteur donner assignation pardevant le Juge par commission duquel il a procedé à la huitaine en suivant ou à la prochaine assise ès lieux où l’on ne tient que d’assise en assise.
Article Trois cens soixante-quatre.
Si le debteur laisse passer la vente sans soi opposer , il ne doit plus être reçu par le Sergent à opposition , & doit vendre les gages à ladite huitaine après la prise à l’ache- teur plus offrant & dernier encherisseur; & à faute d’au- tre metteur , le créancier est reçu à y mettre , & ce fait doit donner assignation à la huitaine ensuivant à l’acheteur pour apporter le prix , & au debteur pour voir confirmer la vente.
Article Trois cens soixante-cinq.
Au jour assigné le Juge, si le défenseur ne compare, doit par vertu de defaut sans autre réadjournement con- firmer la vente & adjuger le prix selon qu’il verra ; & si le debteur compare il ne doit de rigeur être plus reçu à opposition , mais doit être la vente confirmée à sa presence :
des Executions de Meubles.2I5toutefois le Juge selon la qualité des parties en pourra ar- bitrer , & néanmoins peut de huitaine ou autre tems sus- pendre l’adjudication selon la matiere.
Article Trois cens soixante-six.
En toutes lesdites executions l’exploit du Sergent doit être témoigné d’un ou deux témoins.
Article Trois cens soixante-sept.
Le créancier si bon lui semble en vertu que dessus peut commencer son execution sur le debteur de son debteur , & le faire adjourner pour affirmer & déposer ce qu’il doit à son debteur, & au debteur pour ce voir faire ; & cepen- dant peut faire arrêter la dette dûë à son debteur en signi- fiant l’arrêt à icelui debteur ; & en ce cas n’est besoin que l’arrêt demeure fait l’espace de huit jours , mais suffit qu’- après l’arrêt & signification faite on donne jour competant aux parties pour comparoir pardevant le Juge , lequel au defaut du debteur pourra proceder à l’execution de ce que sera affirmé par son debteur ; & si le debteur assigné pour affirmer ne compare, pourra être réadjourné à double peine ou contraint par prise de sa personne à venir affirmer, selon que le Juge arbitrera.
Article Trois cens soixante-huit.
Peut aussi le créancier si bon lui semble commencer son execution sur les biens immeubles & heritages de son deb- teur ou de son heritier tel declaré; ou à l’encontre de tiers possesseurs , & detenteurs des choses immeubles , & alié- nées par son debteur & sujetes à son hipotheque, & chacune partie d’iceux soient premiers ou derniers vendus & sans
2I6Coutumes de la Marche ,garder ordre de discution, ne commencer premierement , si bon ne lui semble, ès biens detenus par son debteur ou par ledit heritier , mais suffit seulement faire par le Sergent inquisition sommaire de ne trouver meubles suffisans pour payer la dette.
Article Trois cens soixante-neuf.
Toutefois si le debteur veut garnir de biens meubles jus- ques au dette, & au tiers plus les frais il sera reçu & doivent surseoir lesdites criées.
Article Trois cens soixante-dix.
Le créancier peut faire saisir l’heritage à lui obligé & hipothequé, & les fruits pendans en icelui, & qui écheront pendant le procès des criees, soit contre le debteur ou son he- ritier declaré heritier, ou contre le tiers detenteur des herit- tages hipothequez ; mais si le debteur ou son heritier veulent bailler caution suffisante de rendre les fruits ou le prix que lui seront accensez par l’executeur pendant lesdites criées , ils seront reçus à les recuëillir; aussi sera le tiers detenteur en baillant caution juratoire de ce faire.
La main levée de fruits accordée en cet article , a été abrogée par l’article 77 de l’Ordonnance de François I. en I539. qui deroge aux coutumes.
Article Trois cens soixante-onze.
Lesdites criées faites & parfaites & l’heritage adjugé au créancier , lesdits fruits ainsi saisis & arrêtez sont ra- batus sur la dette & sur les frais & depens desdites criées & procès au profit du debteur si le créancier les peut recou- vrer;
des Executions de Meubles.2I7vrer ; & seront contraints ceux qui les auront reçus par prise de leurs personnes comme gardiens de Justice.
Article Trois cens soixante-douze.
S’il y a opposant possesseur d’aucuns biens criez, preten- dant lesdits biens criez n’être hipothequez, il joüira desdits fruits saisis en baillant caution juratoire de les rendre s’il est dit en fin de cause , comme dessus est dit au tiers posses- seur de l’heritage hipothequé.
Article Trois cens soixante-treize.
S’il y a débat sur la suffisance de la caution , l’execu- teur renvoira les parties pardevant le Juge , de l’autorité duquel il use sans interruption de ses criées.
Article Trois cens soixante-quatorze.
En matieres de criées le premier defaut emporte gain de cause tant contre le proprietaire qui est adjourné pour voir adjuger le decret , que contre les opposans ; & peut en en- cherir l’heritage en quelque état que soit la cause jusques à ce que le decret soit expedié & delivré.
Article Trois cens soixante-quinze.
L’on peut faire criées en tous jours de l’an, fors les Di- manches & le jour de Noël , le jour de Pâques , le jour de la Pentecôte , le jour de la Fête-Dieu , le jour de Toussaints & les jours & Fêtes de Notre-Dame tant seulement ; & en tous autres jours feriez & non feriez au païs en doit para- chever les criées selon les assignations , & ne peuvent les- dites assignations être diminuées ou prorogées.

2I8Coutumes de la Marche ,Article Trois cens soixante-seize.
Toutefois si par fortune l’une des assignations ensuit à un desdits jours feriez dessus declarez , l’assignation de ce cas est transportée au plus prochain jour non ferié.
Article Trois cens soixante-dix-sept.
En matiere de criées l’on garde l’ordre & solemnité qui s’ensuite , & qui faut à l’un des points seulement , il faut recommencer , & sont les criées nulles : & pour quelque appellation ou opposition qui survienne le Sergent executeur ne doit differer, mais doit continuer ses criées, & reserver toutes oppositions à la derniere criée quand il donne assig- nation pour voir interposer le decret ; & doit commencer comme s’ensuit.
Article Trois cens soixante-dix-huit.
Premierement en vertu de commission du Juge & d’o- bligation ou condamnation sous scel Royal s’il procede par autorité du Juge Royal ou d’un Juge de Madame , ou par vertu d’obligation faite sous le scel d’aucun qui est audit païs garde de scel à contrats; s’il procede par autorité du Baillif ou Juge dudit scel ou d’autre scel authentique , il doit sommer la partie qui est debteur ou celui qui s’est dé- claré son heritier ou le tiers détenteur de biens hypothequez, desquels il voudra saisir , de payer la somme prétenduë par le créancier.
Article Trois cens soixante-dix-neuf.
Et doit être faite ladite sommation en personne ou do- micile parlant à qulqu’un de ceux qui y demeurent si ledit
des Executions de Meubles.2I9domicile est en la Marche : & si le debteur heritier ou créan- cier n’ont domicile au païs , ladite sommation se doit faire audevant de la porte de l’Eglise du lieu où sont assis les biens que l’on veut saisir, & ce à haute voix & en presence de témoins : & peut prendre tout delai par refus, & ce fait faire inquisition sommaire de trouver meubles suffisans , & de tout faire mention en son procés verbal de la diligen- ce qu’il en a fait , ensemble de ladite sommation.
Article Trois cens quatre-vingt.
Et ce fait doit signifier à la partie comme dessus , qu’à faute de payement il prend, saisit & met en main de Jus- tice l’heritage ou heritages qu’il veut prendre & saisir pour venir au payement du dû, & en signe de ce pourra mettre au lieu principal un brandon ou autre signe de main mise ainsi faite.
Article Trois cens quatre-vingt-un.
Icelle prise & main mise faite ledit Sergent doit sig- nifier au détenteur des heritages, soit le debteur heritier ou tiers possesseur, la prise desdits heritages, & que la vente se fait à tel jour, & que les quatre criées ensuivant se feront par lui; c’est à sçavoir la premiere tel jour, la secon- de tel jour, la tierce tel jour, & la quatrieme tel jour, par même signification , adjournement & notification sans faire notification particuliere à ladite vente n’y esdites quatre criées , si bon ne lui semble , & suffit faire ladite notification à la personne du debteur ou de son heri- tier s’aucun en y a apparent au païs , & au tiers possesseur des heritages criez en personne au domicile.

220Coutumes de la Marche ,Article Trois cens quatre-vingt-deux.
Les delais des ventes et criées sont tels: c’est à sçavoir, que du jour de la prise ou la vente y a quinze jours, & du jour de la vente jusques au premier peremptoire autres quinze jours , du second au tiers quinze jours , du tiers au quart quinze jours , sans en ce comprendre le jour de la prise n’y de la vente ni desdits peremptoires: & faut que les quinze jours soient francs, & si comme dit est l’une des assigna- tions échoit à quelque jour qui fût ferié des feries obser- vées , l’assignation sera remise au plus prochain jour non ferié, & sera icelle assignation notifiée par ledit Sergent en faisant la notification generale des jours desdites assig- nations , lequel il sera tenu compter par nombre de mois , ensembles les jours de toutes les autres assignations.
Article Trois cens quatre-vingt-trois.
C’est à sçavoir que s’il a fait la prise le dernier jour de Juillet , il doit signifier qu’il procedera à faire la vente le seiziéme jour d’Aoust, & si par fortune le seiziéme jour d’Aoust est ferié , il doit signifier qu’il procedera à faire la vente le dix-septiéme jour dudit mois à cause de la ferie, & d’icelui dix-septiéme doit signifier le premier peremptoi- re au deuzieme jour de Septembre s’il n’est ferié ou autre jour ensuivant s’il est ferié comme dit est , & ainsi d’un chacun desdits peremptoires.
Article Trois cens quatre-vingt-quatre.
Ausdites prise, vente, criées & notifications , le Ser- gent s’il sçait écrire peut proceder sans Notaire avec deux temoins : sinon doit avoir avec lui un Notaire & deux
des Executions de Meubles.22Itémoins qui signe son procès verbal pour y adjoûter foi; & si le Sergent êtoit empêché qu’il ne pût parachever par maladie ou autrement, ou le premier Notaire & les témoins ne peuvent assister à toutes les assignations, autres Sergens, Notaires & témoins pourront être subrogez & parachever ce que les premiers ont commencé, & si par fortune au lieu où lesdites criées sont commencées y auroit peste ou autre inconvenient que l’on ne pût parachever lesdites criées , pourront être continuées & parachevées au plus prochain lieu notable, en signifiant ce que dit est par l’executeur aux appellez en particulier.
Article Trois cens quatre-vingt-cinq.
Aprés lesdites significations particulieres faites au deb- teur & tiers détenteur, le Sergent se transportera en la place publique du principal lieu de la Justice où les herita- ges criez sont situez & assis, & illec à cri public & à hau- te voix aux lieux accoûtumez à faire criées & procla- mations, & en la presence desdits Notaires & témoins signifiera ladite prise assignation de vente, & assignation des autres criées en general à tous ceux qui peuvent préten- dre interêt à icelles criées, & que s’il y a aucun qui se veüille opposer esdites criées pretendre droit és heritages , qu’ils viennent , autrement n’y aura plus de recours , & à chacune desdites assignations & criées repetera ce que dit est en effet & substance, & en fera ou fera faire audit No- taire mention en son procès-verbal.
Article Trois cens quatre-vingt-six.
Au jour que ladite vente sera assignée l’executeur étant
222Coutumes de la Marche ,en la place publique passera icelle vente desdits heritages criées en la presence ou absence des appellez en particulier, & aussi des appellez en general, & étroussera verbale- ment les heritages vendus au plus offrant & dernier enche- risseur : sauf que cependant lesdites criées aucun offre greig- neur pris il sera reçu, & y peut mettre le créancier ou son Procureur à la requête duquel lesdites crées sont faites.
Article Trois cens quatre-vingt-sept.
Aprés laquelle vente ainsi faite en ladite place publi- que , faudra assigner deslors à cri public journée tant és appellez en general qu’en particulier à comparoir sur ladite place: & pour le premier peremptoire au jour après la quin- zaine ensuivant à compter comme dessus.
Article Trois cens quatre-vingt-huit.
Et ledit jour advenu faire en ladite place en l’absence ou presence des appellez en general ou particulier semblables intimations que dessus , & déclarera ledit executeur qu’il passe le premier peremptoire , & donnera assignation pour le second peremptoire après l’autre quinzaine ensuivant : & ainsi de peremptoire en peremptoire jusques au quart.
Article Trois cens quatre-vingt-neuf.
Et après ledit quart & dernier peremptoire parfait & parachevé, ledit Sergent executeur doit de rechef se trans- porter en ladite place & donner jour à tous appellez en general pour venir voir interposer le décret ; & aussi se transporter à personnes ou domiciles du debteur ou son heritier & des tiers détenteurs , & leur donner assigna- tion à jour certain & competant pardevant le Juge ou au-
des Executions de Meubles.223torité du quel lesdites criées sont faites & conduites , pour voir confirmer la vente, interposer le décret, proceder sur l’adjudication du prix, déduire leurs causes d’oppositions, & proceder comme de raison.
Article Trois cens quatre-vingt-dix.
Ledit Officier du Roy notre Sire, dit Sergent, doit sus- pendre toutes oppositions jusques au dernier peremptoire in- clusivement, desquelles oppositions suivant qu’elles sont fai- tes durant lesdites criées il doit faire mention en son procès verbal; & ledit quart peremptoire passé doit en particulier à tous lesdits opposans , parlant à leurs personnes ou en leurs domiciles si aucuns en ont au païs, ou s’ils n’ont domi- cile au païs , lui êtant en ladite place publique assigner jours ausdits opposans après ledit peremptoire , & à tel jour qu’il donne assignation au détenteur, ou debteur, pour voir interposer le décret ; & ne doit sursoir par appel ou opposition jusques au quart peremptoire inclusivement s’il ne lui est inhibé ou défendu par son Superieur parties oüies.
Article Trois cens quatre-vingt-onze.
Par vertu du defaut obtenu contre les appellez en gene- ral & particulier, les criées si elles sont solemnellement fai- tes comme dit est , lesquelles à cette fin doivent être vûës par le Juge , elles doivent être confirmées à la charge des droits & devoirs Seigneuriaux anciens : posé hors que le Seigneur direct ou censier ne se fut opposé , mais s’il lui est dû arrerages, il les perd s’il ne les déduit par opposition.
Article Trois cens quatre-vingt-douze.
Et doit être preferé celui qui a fait les frais & dépens
224Coutumes de la Marche ,desdites criées & de l’interposition du décret: pour lesquels frais, celui qui a fait faire les criées est preferé à tous autres créanciers , posé qu’il soit subsequent en date ; & après est preferé le Seigneur foncier pour les arrerages pour lesquels s’est opposé, & doit le Juge proceder à la distribution du prix entre le opposans selon leur ordre de priorité & posteriorité & privilege des opposans, soit que le décret soit interposé par defaut ou parties oüies par connoissance de cause.
Article Trois cens quatre-vingt-treize.
Le dernier encherisseur est tenu & peut-être contraint parprise de sa personne de consigner en deniers comptens le prix auquel il aura mis & encheri les heritages criez, soit créancier ou autre : sinon que le créancier soit preferé aux autres par la sentence de l’adjudication : & que les herita- ges ne valent ou soient mis outre son dû : autrement est tenu consigner, avant qu’en avoir délivrance, ce que se mon- tera ledit prix outre le dû pour lequel il est preferé sans faire aucun rabat pour l’éviction ou autre chose : car l’achetteur est sur après l’interposition de décret, et n’y a en ce cas aucune éviction.
Article Trois cens quatre-vingt-quatorze.
Si pendant les criées encommencées , & auparavant l’assignation baillée aux parties pour voir confirmer, ad- vient mutation de personnes par le decès des créanciers deb- teur ou tiers détenteur , ou de l’executeur , l’on peut par même pouvoir & Sergent ou par autre sans autre adjour- nement nouvel parachever lesdites criées & donner assigna- tion aux parties, & ne sont pour ce reputées interrompuës.

des Executions de Meubles.225Article Trois cens quatre-vingt-quinze.
Si l’executeur de biens meubles ne parfait son execution dedans le mois, le Seigneur Justicier en la Jurisdiction duquel les gages auront été commendez, les pourra delivrer à la partie sans préjudice du droit de créancier.
Article Trois cens quatre-vingt-seize.
L’executeur ne peut donner en vente ou delivrance de meubles, sans permission du créancier & du debteur sur peine d’amende artbitraire, plus long délai que d’un mois, ni moindre que d’huitaine ; & ne doit mettre les gages en taverne ni se faire payer de son execution par le debteur, si ce n’est du consentement des parties, ni proceder à ac- tuelle délivrance sans autorité de Justice.
Article Trois cens quatre-vingt-dix-sept.
S’il y a appel interjeté par celui qui est obligé ou con- damné ou son heritier, l’executeur ne doit differer qu’il ne garnisse la main de Justice de meubles s’il en trouve, sinon qu’il lui soit inhibé par sentence parties oüies.
Article Trois cens quatre-vingt-dix-huit.
Meuble n’a point de suite, quant au droit d’hypothéque, tellement que celui a qui on a obligé biens meubles ou im- meubles perd son hypothéque sur le meuble , si le debteur ou son heritier l’a vendu & mis en main tierce.
Article Trois cens quatre-vingt-dix-neuf.
Si aucun fait adjourner autre, comme debteur de son debteur , pour venir affirmer & déposer , & le debteur pour ce voir faire ; & ledit debteur principal s’oppose à
226Coutumes de la Marche ,l’arrest, le créancier doit payer les dépens au debteur adjour- né pour affirmer, sauf à les recouvrer sur son debteur : le créancier peut proceder par prise de corps sur la personne qui à celui est obligée sans premièrement commencer sur ses autres meubles, mais en garnissant de gages exploitables le debteur sera élargi.
Article Quatre cens.
Allans et venans à foire & marchez ou en cour & as- sise pour expedition de leur causes, dont ils seront tenus faire affirmation & par serment, ne peuvent pour dettes civiles ledit jour être arrêtés ou emprisonnés ni pareille- ment leur marchandise.
Article Quatre cens un.
En matiere de criées quant au debteur ou son heritier ni pareillement contre autre détenteur, contre lequel per-sonnage aura été donnée Sentence de déclaration d’hypothe- que, délai de garent formel n’a point de lieu, mais seu- lement sommation: & où le tiers détenteur n’auroit Sen- tence de déclaration donnée avec lui ou son predecesseur universel, il peut avoir son garent.
Article Quatre cens deux.
Si pendant le procés de criées entre plusieurs opposans , le debteur appointe à celui qui a fait conduire lesdites criées, les autres pourront reprendre lesdits procès , & sera tenu le debteur leur repondre , nonobstant ledit appointe- ment : & en ce cas le Juge arbitrera des dépens des criées.
Article Quatre cens trois.
Celui qui est obligé par prise de corps & de biens avec la
des Executions de Meubles.227clause qu’il ne soit reçû à dire contre l’obligation sans préalablement consigner n’est reçû à aucune exception n’y alleguer payemens, sans consigner en deniers comptans ; sinon qu’il justifia promptement par scel ou par écrit desdits payemens ou de vice visible contre la teneur de l’obligation, ou que de la teneur d’icelle, ou que de ses payemens, il vou- lut croire le créancier par serment.
Article Quatre cens quatre.
Faute de biens meubles trouvez en la puissance du sujet en Justice, le Seigneur Justicier peut proceder par arrest de la personne de sondit sujet pour les amendes & défauts procedans des matieres d’excés: aussi faut-il contre les forains trouvez en sa terre pour les choses dessus dites , jusques ils y ayent baillé gage ou caution sujette dudit Seigneur pour être droit à l’Ordonnance de Justice.
Article Quatre cens cinq.
Esdits cas où le Seigneur peut proceder par arrest de per- sonnes, le sujet ne doit payer aucuns frais, fors pour entrée deux deniers & autant pour issuë , & les dépens raisonna- bles, si le concierge le nourrit; & néanmoins se peut nourrir du sien sans autre dépens.
Les saisies réelles & criées qui sont la principale matiere des articles du present chapitre , demandent une application entiere, pour y garder & observer un grand nombre de formalités prescrites ; ce qui est d’autant plus essentiel , que suivant l’ordre & la dé- cision de la plus grande partie des Reglemens , faits pour les saisies réelles & criées , si l’un des articles
228Coutumes de la Marche ,prescrits n’a pas été observé selon la formalité requise, ce deffaut emporte nullité du surplus de la procedure des criées, & il faut le tout recommencer ; ce qui a lieu en notre coutume, suivant la disposition expresse de l’article 377 ci-dessus écrit.
Les formalités prescrites en matiere de saisie réelle & criées, sont marquées & établies de deux sortes ; l’u- ne par les differentes coutumes des lieux où les biens & heritages saisis réellement sont situés ; & les autres formalités sont établies par les ordonnances Royaux , qui ont lieu dans tout le Royaume. Monsieur le Maître dont le merite & la reputation sont connus , a fait un traité exprès pour toutes les matieres & forma- lités des criées, dans lequel les dispositions des ordon- nances Royaux sont raportées , & bien deduites ; & & après lui Me. Bruneau a fait un traité sur pareilles matieres ; & en dernier lieu, Me. d’Hericourt a don- né au public un fort bon traité de la vente des im- meubles ; c’est pourquoi comme il ne nous auroit pas été possible de rien dire & observer de mieux, sur le present chapitre trentiéme , que tout ce qui est re- marqué & établi dans les traités faits par ces Auteurs, nous nous sommes crus dispensez de faire sur ce point des observations particulieres ; attendu que d’une part , il n’y a que certains praticiens versez dans le stile & la connoissance des criées , qui par une capa- cité acquise de l’étude & de l’habitude , soient en état de dresser à propos les procedures des saisies réel- les & criées, pour les rendre valables & incontestables
des Executions de Meubles.229sur les formalités , & ceux là doivent se munir des susdits traités : & quant aux autres personnes, les obser- vations leurs auroient pu être ennuyeuses, par la pro- lixité qui en auroit été inséparable.
Nous croyons cependant devoir ici raporter le pré- jugé moderne d’un arrêt contradictoire de notre Par- lement de Paris rendu en l’année entre Me. Pichon de Bury, Conseiller au Presidial & Senéchaus- sée de la Marche, intimé d’une part ; & Anne Robert veuve Niort, d’autre part, dont voici l’espece. Le sieur Pichon de Bury en vertu de titres de créances cer- tains & legitimes à lui acquis envers ladite Robert , fit proceder avec les formalités requises à la saisie réelle d’un domaine appartenant à ladite Robert , & après que l’huissier executeur du decret eut fait les premiers actes des criées , tels qu’ils sont prescrits par la coutume , ladite Robert se pourvût au Parlement, & obtint sur requête un arrêt qui la reçût appellante de ladite saisie réelle , & cependant fit deffenses de passer outre & de faire poursuites ailleurs qu’en la Cour à peine de nullité , mille livres d’amende , & de tous depens, dommages & interêts. Cet arrêt fut signifié audit sieur Pichon de Bury , avec intimation en la Cour de Parlement pour proceder sur l’appel ; mais ledit sieur Pichon de Bury fut conseillé de ne point deferer aux deffenses de passer outre , portées par ledit arrêt ; & en effet , il fit continuer la pour- suite des criées dans les formes ordinaires ; cela don-
230Coutumes de la Marche ,na lieu à ladite Robert de donner une seconde re- quête au Parlement pour être reçûë appellante en ad- herant à son premier appel , des nouvelles poursuites de criées faites par ledit Pichon de Bury , qu’elle sou- tint nulles , comme faites depuis, & au préjudice de l’arrêt de deffenses de la Cour , & par attentat à icelui , & en consequence voir declarer l’amende de mille livres encouruë avec tous depens , dommages & interêts.
Le Sr. Pichon de Bury ayant comparu en la Cour, & la cause ayant été mise au rôle & appointée , le procès fut distribué à Monsieur Pinon de Quincy , Conseiller en la Grand’Chambre. La veuve Niort proposa pour causes d’appel divers moyens , mais qui n’alloient point au fait , & le sieur Pichon de Bury se retrancha à employer pour reponses la disposition précise de l’article 377 ci-dessus transcrit , & ajouta que la coutume étant de droit étroit , doit être prise & executée à la lettre , & qu’elle faisoit loi , tant pour la Cour de Parlement que pour les autres Jurisdictions ; la raison en est , que cette coutume ayant été redi- gée en vertu de Lettres Patentes du Roy , par des Commissaires de la Cour , & ensuite ayant été rap- portée en la Cour, & y ayant été dûément enregis- trée , pour servir à l’avenir de maximes & regles cer- taines , avec derogation à tous Edits , Declarations , Arrêts & Reglemens contraires ; la Cour de Parle- ment s’étoit dès-lors assujetie à se conformer à toutes les dispositions de ladite coutume , sans pouvoir les
des Executions de Meubles.23Ivioler en aucun cas ; & qu’en cet état , l’huissier executeur des criées n’avoit fait que son devoir de continuer les criées , sans deferer à l’arrêt de la Cour, dont les deffenses avoient été visiblement surprises : Et la chose ayant été dans ce sens là bien entenduë , il intervint arrêt contradictoire qui leva les deffenses, mit l’appellation au néant , ordonna la continuation de la saisie réelle & criées , & condamna ladite veu- ve Niort en l’amende & aux dépens.

§§
CHAPITRE TRENTE-UN. D’Assiete de Rente.
Article Quatre cens six.
TOus cens & rente dûs & assis sur fond & heritages certains francs & quittes d’autre charge, empor- tent directe Seigneurie , s’il n’apert du contraire.
Cet article contient une dispositiou très-sensée & justement établie , puisqu’il n’est que trop commun que la plûpart des Seigneurs ou leurs auteurs , n’ont pas eu le soin de conserver les titres primordiaux con- situtifs des Cens , Rentes & Devoirs à eux dûs ; & d’ailleurs ces titres ont pu par les malheurs des tems, leur être enlevés par des pillages, vols, ou accidens d’incendies , desquels faits n’étant pas coupables il ne conviendroit pas que cela leur causa une privation de leurs droits : amis comme il y a tou- jours certains titres anciens en faveur des Seig- neurs , suivis de la possession , par lesquels la consis-
232Coutumes de la Marche ,tance, nature & qualité des Rentes & Devoirs se trouvent exprimés, le tout accompagné de la bonne foi , c’est avec raison que la coutume a voulu que le plus ancien titre servit à établir la directe Seigneurie sur les fonds & heritages , par un équivalent du titre primordial présumé adhiré ; & cependant si par l’é- venement le titre primordial constitutif de la rente , venoit à se trouver , il faudroit s’y tenir & y revenir , suivant l’axiome perpetuò clamat titulus , sans qu’en ce cas la possession pût prévaloir , attendu que s’il se trouvoit de la part du Seigneur qu’il eut percû une plus grande quantité de rente , que celle portée par le titre primordial , sa possession ne pourroit pas- ser que pour une usurpation de l’excedent , dont il devroit faire raison au sujet redevable ; comme aussi si celui-ci , avoit moins payé de rente , que celle porté au titre primordial , la raison d’identité , de- mande qu’il fit raison de ce moins au Seigneur.
Article Quatre cens sept.
Celui qui doit faire assiete en la Marche doit fournir les deux parts en deniers , & le tiers en blé.
Article Quatre cens huit.
Qui vend rente annuelle ou est tenu de la bailler sans specifier que soit rente en directe Seigneurie ou fondalité, il est quitte en fournissant rente ou revenu rendables sans droit de directe Seigneurie , que l’on appelle rente seiche, sur heritage qui la puisse porter, mais qu’il baille les deux parts deniers & le tiers blé.
Article

d'Assiette de Rente.233Article Quatre cens neuf.
Qui commence à faire assiette en un lieu soit rente ren- dable ou en directe , il doit parfournir audit lieu toute l’assiette qu’il doit faire sans y rien retenir, & si ce qu’il y a ne suffit, il doit parfaire de prochain en prochain sans rien retenir , au lieu qu’il baille par assiette jusqu’à per- fection d’icelle.
Article Quatre cens dix.
On peut bailler pour son acquit toutes choses immeu- bles en assiette de rente coutumiere ou rendable selon les estimations que ci-après seront écrites ; & qui n’a de blé de rente pour faire le tiers qu’il faut payer en blé , on peut fournir argent pour blé à l’estimation ci-après declarée , & è contra.
Article Quatre cens onze.
Si aucun doit faire assiette portant directe Seigneurie, & il n’a que rente rendable seiche , il peut bailler sa ren- te rendable en deniers pour le tiers moins : tellement que les douze sols de rente rendable ne vaudront que huit sols de rente d’assiette coutumiere : & au contraire qui doit rente rendable & n’a que rente seiche ne peut payer , il la peut bailler pour le tiers plus ; c’est à sçavoir que celui qui doit trente sols de rente rendable ou seiche , est quitte en payant vingt sols de rente fonciere portant lods & ventes, s’ils sont dûs au lieu ou autres droits de directe.
Article Quatre cens douze.
Si la rente portant directe ou fondalité n’emporte droit
234Coutumes de la Marche ,de lods & ventes par la coutume des lieux, elle n’est point moins estimée que si lods & ventes étoient dûs ; car la directe emporte taille aux quatre cas ; droit de retenuë ou prélation speciale, & premiere hipothéque sur l’heritage qui la doit , & autres droits.
Article Quatre cens treize.
Les bleds qui se doivent bailler par le tiers de l’assiette coutumiere se doivent bailler à la meseure du Chef de la Châtellenie en laquelle est assise la rente que l’on doit bail- ler, & où elle est ressortissante.
Article Quatre cens quatorze.
Le commun prix de valuë de rente rendable & seiche, c’est au sol la livre ; c’est à sçavoir , vingt sols de rente rendable pour vingt livres, & la rente en directe Seigneu- rie le tiers plus ; c’est à sçavoir , vingt sols de rente sone bien reputez achettez trente livres.
Article Quatre cens quinze.
Qui a fours ou moulins bandiers, étangs ou dîmes, & les veut bailler en assiette, l’on doit faire l’estimation de ce que lesdites choses ont valu ou pu valoir les trois dernieres années, & perception de fruits tous frais faits, & d’icelles trois années prendre la commune , de laquelle année com- mune sera rabattu un tiers, tant pour les cas fortuits que pour les droits de directe ; & les deux tiers seront pris en assiette de rente , & vaudront rente assise pour ce qu’il peurront monter : car les deux parties desdits deux tiers seront convertis en argent , & sera ledit bled quant aux deux tiers baillé pour le tiers plus, & le tiers demeurera
d'Assiette de Rente.235en sa nature pour bled de rente: & ceci a lieu quand les fermes se baillent en bled; comme si une dîme , four ou moulin s’accensent en bled , & une année ont valu six se- tiers , l’autre année quatre , & une autre année deux, qui sont douze setiers pour les trois années , ils seront pris pour la commune année pour quatre setiers de bled par an; desquels quatre setiers de bled sera rabattu un tiers , com- me dit est , pour les cas fortuits & directe , & les deux seront prises en assiette : c’est à sçavoir , le tiers pour bled, & les deux tiers pour argent, à la valuë du tiers plus que ne vaut le bled en assiette ; c’est à sçavoir , que lesd. deux parts seront baillées pour le tiers plus que ne vaut le bled en assiette.
Article Quatre cens seize.
Et si le revenu de telle fermes consiste en deniers , les deux tiers dudit tiers viendront en assiette ; & en telle maniere que le tiers d’iceux deux tiers sera encore diminué d’un tiers , comme si les deux tiers de l’année commune reviennent à neuf livres , lesdits deux tiers ne vaudront que huit livres, dont y aura six livres en deniers, & quarante sols pour bled ; & ainsi sera d’un colombier dé- duction faite , comme dessus , & rabattus les frais que pigeons coutent à nourrir; & pareillement sera faite sem- blable estimation d’une garenne à trois années pour reve- nir à la somme, en faisant déduction comme dessus, selon la qualité & quantité d’une garenne franche & quitte de tous cens & rentes.
Article Quatre cens dix-sept.
Seterée de terre de froment étant en labour capable de
236Coutumes de la Marche ,porter bled chacun an , se baille pour un setier froment de la mesure du chef de la Châtellenie où elle est assie ; & se prendra ladite terre à la dite mesure ; & si ladite terre est en friche ou en use , elle se prendra pour une emine.
Article Quatre cens dix-huit.
Seterée de terre à seigle portant un an , & autre non ouverte, & étant en nature de labour à la mesure du chef où elle est assise, se prend pour emine seigle de ladite me- sure; & si elle est en friche , elle se prend pour une quarte.
Article Quatre cens dix-neuf.
Un journal de pré quand il se baille pour bled, se baille pour cinq sols; & quand il se baille pour argent, se baille pour sept sols & demi.
Article Quatre cens vingt.
Un feu de Justice en tout droit de Jurisdiction , haute , moyenne & basse residant & tenant feu, se baille pour cinq sols de rente assise, baillant les deux tiers en deniers, & le tiers en bled.
Article Quatre cens vingt-un.
Toutes autres choses fors les dessusdites se mettent en assiette pour estimation d’argent en la maniere qui s’en- suit : c’est à sçavoir , arpent ou seterée de bois de haute futaye qui a passé trente ans , où il a chaînes, faux, châtaigniers , l’on estimera que le bois qui est sur terre peut valoir, à vendre pour une fois , & de ladite estima- tion sera pris le tiers ; & icelui tiers pris pour autant de rente en deniers , qui vaut à l’estimation de trente sols ,
d'Assiette de Rente.237le sol comme si le tiers vaut soixante sols , sera pris pour trois sols en deniers ; & outre ce , la seterée pour quatre deniers pour la terre ; & ainsi des bois de haute futaye qui sont moindres de trente ans.
Article Quatre cens vingt-deux.
Seterée de terre herme , qu’on appelle chaulmes & paschiers de bêtes , se baille en assiette pour quatre deniers.
Article Quatre cens vingt-trois.
Arpent de bois revenant de chêne pour la plupart , qui est bien peuplé , se baille pour cinq sols en deniers , & est à dire , arpent autant qu’une seterée; & sera prise à la mesure du chef de la Châtellenie où elle est assise.
Article Quatre cens vingt-quatre.
Arpent ou seterée de pâtural étant en nature & pais- sant , deux sols six deniers ; & s’il n’est en nature , mais embuissonné , dix-huit deniers.
Article Quatre cens vingt-cinq
Toute rente ordinaire , soit en blé ou en argent , dûë en droit de servitude ou mortaillable , se prend en assiette au choix de celui qui la baille , ou pour le double plus que rente en franchise, ou fonciere simple, deniers pour deniers, bled pour bled, geline pour geline.
Article Quatre cens vingt-six.
En telle maniere que le sol vaut deux sols de rente , le setier de bled deux , la geline deux en toute directe : & en ce faisant les arbans , bians & vinades & autres droits de servitude ne sont pour rien comptez; & s’en vont avec
238Coutumes de la Marche ,ledit double ou celui qui doit bailler ladite assiette pourra bailler ladite rente tenuë en droit de servitude , pour le prix de rente ou autre directe non tenuë en droit de servi- tude, & outre pourra icelle bailler pour un quart davan- tage pour le double d’Août , & droit successif : & outre pourra bailler chacun arban pour six deniers , vinade pour cinq sols tournois.
Article Quatre cens vingt-sept.
Mais vinade & arbans qui sont dûs par rente ordinai- re sont baillez ; c’est à sçavoir , vinade entiere pour quinze sols de rente en deniers.
Article Quatre cens vingt-huit.
Corvée ou manoeuvre de rente ,vj. den.Un faucheur ou mestiveur pour journée ,xij. den.Corvée à bête à bats ,xij. den.Charges de bon vin & de bon terroir ,xxxv. sols.Tonneau de miel ,xxxv. sols.Tonneau de verjus de pommes ,xij. sols vj den.Tonneau de verjus de grains ,xx. sols.Connil ,xij. den.Perdrix ,xij. den.Oye ,xij den.Oyson ,vj. den.Livre de cire ,xviij. den.Geline ,vj. den.Poulet ,iij. den.Chapon ,xij. den.Chaponneau ,vj. den.

d'Assiette de Rente.239Mouton avec laine ,v. sols.Veau ,v. sols.Chevreau ,xviij. den.Agneau ,xviij. den.Cochon ,viij. den.Livre de fromage ,iv. den.Livre de beure ,iv. den.Livre de suif ,iv. den.La toison d’une brebis ou mouton ,xij. den.La chair du mouton ,ij. sols vj. den.Pigeon ,j. den.Livre de plume ,viij. den.La trousse de foin pesant trois quintaux ,ij. sols vij. den.Somme de rave ou navauxxij. den.La charretée de foin pesant I5 quint.xj. sols vj. den.Charretée de paille ,ij. sols.Charretée de bois à deux boeufs ,xij. den.Quatre oeufs ,j. den.Livre d’huile de noix ,iv. den.Quarte de scel à quatre coupes mesure de Gueret ,ij sols.Charrois en deux paires de boeufs & char. pour jour ,ij sols.En tems d’hyver ,xij. den.Article Quatre cens vingt-neuf.
Et s’entend quand les choses susdites sont assises sur heritages frans & quittes suffisans pour les porter.
Article Quatre cens trente.
Qui doit faire assiette de rente ou revenu sans autre adjection , combien qu’il ne soit tenu bailler rente en di-
240Coutumes de la Marche ,recte , si est-il tenu asseoir rente seiche les deux tiers en deniers , & le tiers en grains.
Article Quatre cens trente-un.
Le setier froment de rente portant directe à la mesure de Gueret , d’Aubusson ou Felletin se baille en assiette
pour ,vj. sols.Le setier seigle ,iv. sols.Avoine ,ij. sols viij. den.Article Quatre cens trente-deux.
Le setier froment à la mesure d’Ahun se baille en assiette
pouriv. sols vj. den.Le setier seigle pouriij. sols.Le setier d’avoine pourij. sols.Article Quatre cens trente-trois.
Le setier froment mesure de Crosant se baille en assiette
pourv. solsLe setier seigle pouriij. sols.Le setier d’avoine pourij. sols vj. den.Article Quatre cens trente-quatre.
Et le setier de poix & feves au pris du setier froment; Le setier d’orge au prix du setier seigle.
Article Quatre cens trente-cinq.
Et le setier de rente en directe qui se baille pour rente seiche , se baille pour un tiers plus ; c’est à sçavoir , ce qui vaut six se baille pour neuf: & de plus plus, & de moins moins.


Article

d'Assiette de Rente.24IArticle Quatre cens trente-six.
Quand aucun doit faire assiette en toute Justice & directe, la Justice est comprise & comptée en ladite assiette à cinq sols pour feu , l’homme resseant en toute Justice haute, moyenne & basse comme dit est, & en Justice basse jusques à soixante sols pour trois sols , en Justice haute ou moyenne seulement pour deux sols, & en Justice basse ou moyenne pour quatre sols.
Article Quatre cens trente-sept.
Mais si tels hommes sont sujets en ressort , le ressort ne sera pour rien compté combien que celui qui baille l’as- siette ne le pourra retenir.
Article Quarte cens trente-huit.
Droit de Fief Noble ne se baille en assiette que pour la centième partie de ce qu’il vaut , en telle maniere que si celui qui fait l’assiette à un Fief tenu de lui qui vaille cent livres de rente, il le pourra bailler pour vingt sols un de- nier de rente, & non plus, sinon que le Fief fût chargé d’aucune rente ordinaire , laquelle se prendra à l’estima- tion des autres selon sa qualité.
Article Quatre cens trente-neuf.
Bâtimens ou édifices separez de rente ou heritages bail- lés en assiette ne se baillent pour rien, & n’est-on tenu de les prendre pour rien ; mais si lesdits bâtimens ou édifices sont compris dans les domaines ou heritages baillés en as- siette, ils pourront être baillés pour l’estimation de la dixiè- me partie de rente , pour laquelle ont été baillés en assiette les heritages & rentes dépendans desdits édifices.

242Coutumes de la Marche , d'Assiette de RenteArticle Quatre cens quarante , & dernier.
Et tous autres drois & devoirs , tailles , revenus & pennages & choses franches qui ne sont ci-dessus appre- ciez, sont baillées & prises en assiette de rente à l’estima- tion de gens à ce experts, selon que peuvent porter de cens & rente annüelle, au regard és autres dessus dites estimeés & appreciées, en faisant rabat tel que dessus dit des cho- ses muables & des ordinaires immuables, en rabatant le tiers pour l’interest de la directe.
On n’a pas crû inutile en finissant de marquer ici que les pieces de terre se mesurent en la Marche par seterées, éminées, quartellées & boissellées ; la se- terée à deux éminées ; l’éminée , à deux quartellées, & la quartellée à deux boissellées : il n’y a cepen- dant aucune mesure précise qui puisse d’éterminer la contenance certaine d’une seterée , cela se fait par estimation , ou sur le rapport de ceux qui ensemen- cent la terre; l’une & l’autre de ces manières peuvent être défectueuses.
Mais comme la coutume par les articles ci-dessus 423 & 424 , compare la seterée à un arpent, il pa- roît de là un moyen de se déterminer avec quelque regularité , par la connoissance qu’on a de la consis- tance d’un arpent estimé cent perches carrées.


FIN DES CHAPITRES.


243     :           
PROCES-VERBAL DE PUBLICATION
des Coutumes.

LEs Coutumes & Articles ci-dessus écrits ont été lûs & publiez en la Ville de Gueret, par Me. Jean Bonnet, Licencié és Loix, Avocat de Madame & Monseigneur les Duchesse & Duc du Bourbonnois & d’Auvergne, Comtesse & Comte de la Marche : par ordonnance & és presences de nous Roger Barme, President, & Nicole Brachet , Conseiller du Roy notre Sire en sa Cour de Parlement, commis & dé- putez par ledit Seigneur pour faire ladite publication; lesquelles coutumes & articles autres que ceux desquels est faite mention en notre procès-verbal, qu’elles soient nova ; avons déclaré être les coutumes du haut pays du Comté de la Marche, selon lesquelles avons commandé au Senéchal de la Marche , illec present, à son Lieutenant , & à tous Juges dudit haut pays du Comté de la Marche, qu’ils ayent à juger, décider & terminer tous les procès mûs , autres que ceux es- quels est ja faite enquête sur les coutumes, & sembla- blement les autres procès à mouvoir , en défendant par exprès à tous Avocats qu’ils n’ayent d’oresnavant alléguer, poser, ou articuler aucunes coutumes con- traires , ou dérogeantes à icelles : & à tous Juges dud. haut pays d’icelui Comté , que pour la preuve des coutumes & articles dessusdits , ils n’ayent à rece- voir aucuns temoins en turbes , ains pour la verifica-
244Procès-Verbal.tion d’icelles, ils ayent à prendre extraits par le Gref- fier de la Senéchaussée , ou par le Greffier de la Cour de Parlement , sans préjudice des oppositions particu- lieres, des opposans desquelles est faite mention en notre procès-verbal, pour lesquelles décider les avons renvoyées en la Cour de Parlement à deux mois; & cependant pourront mettre & produire pardevers nous, tout ce que bon leur semblera; & ce, sans préjudice des droits du Roy, lesquels par exprès avons reservé au Procureur Général dudit Seigneur , ainsi plus à plein est contenu en notre procès-verbal : & en tant que touchent les coutumes nouvelles , avons ordonné que lesdites coutumes demeureront écrites, comme accordées par les Trois-Etats, ou la plus grande partie d’iceux; mais l’autorisation & decret d’icelles avons reservée au Roy notre Sire, en lui suppliant très-humblement que si son bon plaisir est icelle au- toriser, son plaisir soit reserver la décision des oppo- sitions d’aucuns particuliers opposans en petit nombre à la Cour de Parlement : & est nonobstant cette pre- sente publication reservée aux Seigneurs Justiciers qui pretendent droit particulier sur leurs Sujets plus ample, que par ces presentes coutumes de user de leurs droits si bon leur semble; & à leurs Sujets leurs deffenses au con- traire : & aussi avons reservé aux Sujets d’user des privileges, libertez & franchises qu’ils pretendent leur competer & appartenir comme de raison ; & aux Seig- neurs leurs deffenses au contraire. En témoin de ce, nous avons ci mis nos seings manuels, & fait signer
de publication des Coutumes.245par noble homme François de Maulvoysin, Ecuyer, Seigneur de la Forest Maulvoysin & Bostpeche, Se- néchal de la Marche ; Me. Jacques Menron, Licen- cié és Loix, Garde & Lieutenant Général de ladite Senéchaussée; & Me. Pierre Magistri , Greffier d’i- celle Senéchaussée, le vingt-septiéme jour d’Avril, mil cinq cens vingt-un. Ainsi signé , A. LE VISTE, F. DE MAULVOYSIN, N. BRACHET, JA. MENRON, P. MAGISTRI.
§§
REQUETE POUR COMMITTITUR.
A MESSEIGNEURS DE PARLEMENT.
SUPPLIE humblement le Procureur du pays & Comté de la Marche, comme feu Monseigneur Me. Roger Barme en son vivant, Conseiller & Presi- dent en la Cour de céans, & Monseigneur Me. Nico- le Brachet, aussi Conseiller en ladite Cour , eussent été commis et députez à reformer & rediger par écrit les coutumes dudit pays & Comté de la Marche , en ensuivant laquelle commission , ils se seroient trans- porrés sur les lieux, & auroient besoigné à ladite re- formation & reduction par écrit desdites coutumes, dont auroit été laissé audit Pays & Comté de la Mar- che un Livre, ou Registre desdites coutumes, signé par mesdits Seigneurs les Commissaires, & en auroit été apporté un autre pour mettre & laisser devers le Greffe de ladite Cour ; mais mondit Seigneur Barme seroit allé de vie à trépas , sans avoir signé ledit cou- tumier, qui doit demourer devers ladite Cour.

246Requête pour Committitur.Ce consideré, il vous plaise ordonner & commettre tel de vous nosdits Seigneurs , qu’il vous plaira pour collationner & signer led. coutumier au lieu de mon- dit Seigneur Barme , avec mondit Seigneur Brachet, & vous ferez bien : & au dessous est écrit Loco dicti Barme committitur Magister Antonius le Viste Presidens. Actum in Parlamento octava Augusti millesimo quingen- tesimo vigesimo quarto. Ainsi signé , visa requesta. A. LE VISTE.


LETTRES PATENTES DU ROY.

FRANÇOIS, par la grace de Dieu, Roy de France; sçavoir faisons, à tous presens & avenir, notre très-chere cousine & tente la Duchesse du Bour- bonnois & d’Auvergne, Comtesse de la Marche, & notre très-cher & très-amé cousin Charles Duc & Comte desdites Duchez & Comté, Connêtable de France, nous ont fait exposer à leur requisition, & pour le bien de justice & soulagement des Habi- tans de leur pays, Duché du Bourbonnois & Comté de la Marche ; avons commis & député nos amez & feaux Maîtres Roger Barme , & Nicole Brachet, Conseillers en notre Cour de Parlement, pour redi- ger par écrit les Coutumes d’iceux pays de Bourbon- nois & la Haute-Marche , icelles publier pardevant eux , pour autoriser & interpreter celles esquelles les gens des Trois-Etats d’iceux pays de Bourbonnois & la haute Marche consentiroient; en quoi faisant a été
Lettres Patentes du Roy.247trouvé que aucunes coutumes anciennes d’iceux pays étoient grandement préjudiciables à la chose publi- que d’iceux pays, pour ce quant à celles qui étoient préjudiciable, les gens des Trois-Etats desdits pays du Bourbonnois & de la haute Marche étoient grande- ment préjudiciables à la chose publique d’iceux pays, & que en autres y avoit diversité d’opinions sur l’inter- pretation & observance d’icelles entre les Praticiens d’iceux pays : pour ce qu’en à celles qui étoient pré- judiciables les gens des Trois-Etats desdits pays du Bourbonnois & de la haute Marche , ont les ancien- nes reduites à la disposition du droit commun , & les autres modifiées; & à celles sur lesquelles gisoit in- terpretation & diversité d’opinions; celles qui étoient plus raisonnable ainsi qu’il appert par les coutu- mes qui faits en ont été , & si ont pour le bien du- dit pays introduit aucunes nouvelles coutumes, qui sont comme nouvelles couchées ausd. coutumiers, ou és procès-verbaux desdits Commissaires , quoi faisant lesdits Commissaires en suivant leur pouvoir à eux donné , ont autorisé les anciennes par eux redigiées par écrit, esquelles les gens des Trois-Etats desd. pays avoient consenti : & pareillement l’interpretation & modification desdites anciennes coutumes en suivant leur dite commission; mais quand és nouvelles coutu- mes nous ont reservé l’autorisation pour ce que leur dite Commission à ce ne s’étendoit; & par ainsi lesd. coutumes ne sont entierement autorisées ; aussi dou- tent nos dits Tente & Cousin , que par cavillation
248Lettres Patentes du Roy.ou autrement, on s’évertuë de faire interpretations nouvelles de fait sur icelles coutumes; & pareillement que les Praticiens desd. pays veuillent alléguer autres coutumes que celles qui ont été par nosdits Commis- saires redigées par écrit , qui seroit par laps de tems advichiller leur effet, & revenir à la confusion, en laquelle étoient lesdits pays pour l’execution de notre commission, requerant sur ce nos dits Tente & Cou- sin notre Provision. Pour ce est il, que nous ces cho- ses considerées, desirant le bien profit de nosdits Ten- te & Cousin , & de leurs dits sujets, Terres & Seig- neuries, & que notre vouloir & intention sur la re- daction des coutumes de notre Royaume sorte son plein & entier effet. De notre pleine puissance & au- torité Royale , avons par ces presentes autorisé & au- torisons lesdites coutumes nouvelles, interpretations & modifications des anciennes. Voulons & nous plaît, que pour l’avenir & aux cas qui par-ci-après écheront, les procès se vuident & jugent par lesdites nouvelles coutumes; & quant aux anciennes que les gens desd. Trois-Etats ont abrogées, nous voulons que d’oréna- vant ne portent aucun effet, ains que les procès pour les faits qui sont à échoir se vuident ou jugent, ou par disposition de droit és cas esquels ils ont voulu disposition de droit devoir & avoir lieu, ou par lesd. nouvelles coutumes qui auroient été faites & subro- gées esdits livres coutumiers en lieu desdites abrogées: & aussi par lesdites interpretations & modifications desdites coutumes anciennes, sans ce qu’il soit requis ou

Lettres Patentes du Roy.249ou necessaire , faire autre preuve sur icelles , ains seulement lever l’extrait qui sera pris & levé desdits Sieges & Cours , où elles seront enregistrées, ou du Greffe de notre dite Cour : & avec ce avons voulu & nous plaît, que d’orénavant ne soit loisible ne per- mis aux habitans & Praticiens desdits pays ne autres, alléguer , user , ne mettre en fait aucunes nouvelles coutumes , autres que celles qui sont faites & redi- gées par écrit esdits livres coutumiers, & selon la qua- lité en iceux écrite, ne sur icelles faire aucune inter- pretation de fait, dérogeant à icelles, & à tous Ju- ges de les admettre sur peine d’amende. Si donnons en mandement par ces presentes à nos amez & feaux les gens tenans notre dite Cour de Parlement, & à tous autres Justiciers & Officiers, que de nos presen- tes autorisations , fassent, souffrent & laissent jouir & user nos dits Tente & Cousin , & Habitans desdits pays de Bourbonnois & la Marche , pleinement & paisiblement, vuident & jugent leurs procès en la forme & maniere ci-dessus declarée : Car ainsi nous plaît-il, & voulons être fait nonobstant oppositions ou appellations quelconques, & que lesdites coutu- mes ne soient ici specifiées de mot à mot, & sans pré- judice de nos droits, & des droits que à nous & à Madame notre Mere peuvent competer & appartenir pour raison , & à cause de la hoirie & succession de fuë Madame Susanne de Bourbon , & aussi sans pré- judice des oppositions qui pardevant nosdits Commis- saires auroient été faites , & quelconques lettres su-
250Procès-Verbal.breptices à ce contraires : & afin que ce soit chose ferme & stable à toujours, nous avons fait mettre notre Scel à ces presentes. DONNE à Fontainebleau le treiziéme jour de Mars l’an de grace I52I, & de notre regne le huitiéme. Ainsi signé, par le Roy, DE NEUVILLE, & scellé de cire verte en lacs de soye.
Lesdites Lettres Patentes ont été dûëment enregistrées en ladite Cour de Parlement , pour être executées selon leur forme & teneur , par Arrêt du 20 Mars I52I.
Signé , DE VIGNOLES.


PROCES-VERBAL DE LA REDACTION
des Coutumes & Conferences sur les Articles anciens
& nouveaux.
ROGER BARME, President , & Nicole Brachet, Conseiller du Roy notre Sire , en sa cour de Parlement & Commissaire en cette partie , au pre- mier Huissier de ladite Cour ou autre Sergent Royal sur ce requis ; SALUT. Vû par nous les Lettres Paten- tes du Roy notredit Seigneur , impetrées de la par- tie de Madame & Monseigneur les Duchesse & Duc de Bourbonnois & d’Auvergne, Comtesse & Comte & la Marche, par lesquelles le Roy notredit Seigneur nous a commis, appeller les Trois-Etats desdits Du- ché de Bourbonnois & Comté de la Marche exemps & non exemps, proceder & rediger par écrit, & faire publier les Coutumes , Stiles & Usages desdits pays &
de la redaction des Coutumes.25IDuché de Bourbonnois & Comté de la Marche, mo- difications & limitations, intelligences utiles & neces- saires sur icelles pour le bien de la chose publique desd. pays nonobstant oppositions ou appellations quel- conques. Pour ce est-il que nous vous mandons qu’à la requête desd. Dame & Seigneur , vous adjourniez les gens desd. Trois-Etats desd. Pays & Comté de la Marche & autres , qui pour ce seront à adjourner , à être & comparoir pardevant nous en la Ville de Gue- ret, principale Ville du Comté de la Marche, exemps & non exemps , ayant terres , possessions, & autres droits quelconques, en & au dedans dud. Comté de la Marche, au dix-huitiéme, ou autre jour du present mois d’Avril, pour voir par nous proceder à rediger, recueillir , arrêter & publier lesd. Coutumes, Stiles & Usages, & y assister ; le tout selon les Lettres Paten- tes du Roy notredit Seigneur , comme de raison ; en faisant par vous les adjournemens & exploits par tou- tes voyes & manieres dûës & raisonnables , cris pu- blics , attache si metier est , intimations qu’en leur absence & nonobstant icelle il sera procedé comme de raison, de ce faire vous donnons pouvoir ; & man- dons & commandons à tous les Sujets du Roy notre dit Seigneur qu’à vous en ce faisant soit obéi. DONNE à Moulins sous nos scels & seings le septiéme jour d’Avril l’an I52I après Pâques. Ainsi signé , BARME, BRACHET, & scellé des deux scels à simple queuë.
Et le lundi vingt-septiéme jour du mois d’Avril , qui étoit le jour de l’assignation baillée aux gens
252Procès-Verbal.d’Eglise, Nobles , Praticiens & autres du Tiers-Etat , pour ête presens & assister à ladite publication , Nous transportames en lad. Ville de Gueret , en la maison de noble homme Pierre Barton , Ecuyer , Seigneur de Montbas , lieu ordonné à faire lad. publication, auquel lieu, après lecture faite des Lettres Patentes du Roy notredit Seigneur à nous adressantes par Jacques de Mailly, huissier en ladite Cour, fimes appeller par Me. Pierre Aigrun , Greffier de ladite Senéchaussée, les Prélat, Colleges, Chapitres, & autres gens d’Egli- ses, les Nobles, Praticiens , & autres Personnes du Tiers-Etat, qui par vertu de nosdites Lettres de Com- mission avoient été adjournés pour être & assister à ladite publication , en suivant laquelle ordonnance, & furent appellez & comparu pour Reverend Pere en Dieu l’Evêque de Limoges , Me. Guillaume Que- roy, Assesseur de l’Official Forain , pour ledit Evêque, au lieu de Gueret, & Me. Jean Lelaboureur son Pro- cureur.
Pour les Religieux , Abbé & Couvent du Moustier d’Ahun , Frere Odille Mesnin Religieux, Vicaire Gé- néral de ladite Abbaye.
Pour les Religieux , Prieur & Couvent Desternes, les Prieur & Procureur dudit lieu, en personnes.
Pour les Religieux, Abbé & Couvent de Bonlieu , Frere Gabriel Delord, Procureur & Sindic dudit lieu, en personne.
Pour les Doyen, Chanoines & Chapitre de la Cha- pelle Taille-Fert, par Me. Jean Bonniardon , Procu- reur & Sindic.

de la redaction des Coutumes.253Pour l’Abbé & Couvent de Benevant, Me. Jean de Costes pour lesdits Doyen & Chapitre en person- ne ; & pour les Religieux par procuration expresse.
Pour Me. François Barton , Prieur de Gueret , no- ble homme Pierre Barton , Vicomte de Montbas son frere, par procuration.
Frere Antoine de Laville , Prieur de la Tour Saint Austrille , en personne.
Pour Me. Jean de Perpirolles, Prieur de Chene- railles , Me. François de Perpirolles son frere , par procuration expresse.
Pour Me. Christophe Tacquenet , Prieur de Saint Leger , Me. Etienne Tacquenet, par procuration.
Pour Pierre Clutat , Prieur de Chantosme , Me. Pierre Bernardon prêtre , par procuration expresse.
Pour Frere Jean Dassier , Prieur de Chambon Ste. Croix , Me. Antoine Roger, par procuration.
Pour Me. Jacques Esmoyn , Prieur commendatai- re de Naillat, Me. Pierre de Lacour, par charge ex- presse , sans procuration.
Pour Frere Martin Ebret , Prieur de Maisonfeyce & de Sagnat , ledit Me. Pierre de Lacour , par pro- curation expresse.
Me. Etienne de Leceron , Curé de Saint Victor , en personne.
Pour le Prieur de Magnat, Me. Gilles Pasnevinon , par charge expresse , sans procuration.
Frere Pierre de Lacroix, Prieur de Vennes , par procuration expresse.

254Procès-Verbal.Pour le Commandeur du Nabeyron à cause de ses membres de Malleret , de Salesses & du Vast , Me. Pierre Filliasse , son receveur.
Pour Mesdames & Seigneurs Duchesse & Duc du Bourbonnois & d’Auvergne , Comtesse & Comte de la Marche , Me. Jean Bonnet & Jean Segliere, bache- lier és droits , avocat & procureur pour lesd. Dame & Seigneur.
François de Maulvoysin , Seigneur de Bostpeche , Senéchal de la Marche , en personne.
Charles d’Aubusson, Seigneur , Baron de la Borne & du Dougnon en personne, avec Me. Leonard Mer- thellade , son procureur.
Pour Dame Philiberte de Sçavoye , dame de Mal- leval & de Cheniers , Me. Jean de Costes , par pro- curation expresse.
Pour les Seigneurs de Dun de Vouchet & de Mu- rat , Me. Pierre de Lacour & François Angot , par procuration.
Pour Guillaume de Rochefort , Seigneur & Baron de Châteauvert , Me. Jean de Costes & Gilles Pasne- vinon , par procuration.
Pour Leonard de Saint Julien , Seigneur & Baron dudit lieu & de la Rochette, Me. Jean de la Viergne, par procuration expresse.
Pour Jean Dupuy, Seigneur de Barmont & de la Poyade , Pierre de Luce, par procuration expresse.
Pour Louis d’Aubusson , Seigneur , Baron de Ban- son & de Poux, Me. Jean de Costes, par procuration expresse.

de la redaction des Coutumes.255Pour Anne de Maulmont , Dame de Saint Quan- tin , Me. Jean Segliere, par procuration.
Pierre Barton , Vicomte de Monbas , Seigneur de Lubignac & des Grands-Fayolles , en personne.
Pour René d’Arpajon , Seigneur du Monteil au Vicomte , Jean Brun capitaine dud. lieu du Monteil.
Pierre d’Aubusson , Seigneur proprietaire de la Seigneurie de la Feüillade , en personne , avec Me. Leonard Marthellade , son procureur.
Pour le Seigneur de Château-Cloup , Me. Pierre de Lacour.
Pour Jean de Chabannes, Seigneur du Boislamy, Me. Jean de Costes , par procuration.
Pour François de Saint Julien , Seigneur de Saint Marc , Me. Leonard Marthellade , par procuration.
Pierre de Malesset , Seigneur de Chatelus , en personne.
Pierre de Saint Maur , Seigneur de Lourdoüe St. Pierre , en personne.
Bernard Ajasson, Ecuyer, Seigneur de Vost , en personne.
Gabriel de la Celle, Seigneur de Boëry, en personne.
Pour Jacques de la Celle , Seigneur de Souvolle , par procuration expresse Me. Jean Segliere , par procuration.
Pour Damoiselle Philippe de Bessey, veuve de feu Jean Dupuy , au nom & comme tutrice des enfans dud. Dupuy & d’elle, Seigneurs du Coudray & de la Tour S. Austrille, Me. Jean Bonnet, par procuration.

256Procès-Verbal.Antoine de Montaignac , Seigneur d’Estansannes, en personne.
Gilbert de Murat, Seigneur de Puy-grenier , en personne.
Gabriel de Chamborant , Seigneur de Champvil- lain , en personne.
Pour Jacques Foucault , Seigneur de S. Germain, Me. Pierre de Lacour, par procuration expresse.
Pour Antoine de la Marche, Seigneur de Boisfranc, Jean le Clert , son receveur, par procuration.
Pierre de Saint Affeyre , Seigneur dudit lieu & de la Brousse & de Fourmenier, en personne.
Pour Pierre de Chamborant , Seigneur du Terrail Desportes & de Jouillac, Me. Jean de Costes, par procuration.
Louis de la Sousmagne , Seigneur d’Aubepeyre du Rateau & de la Chassagne , en personne.
Marc Esmoyn, Seigneur du Moustier-Mallecart & de Naillat en partie, en personne, & pour ses freres, Seigneurs avec lui dudit lieu de Naillat.
Jean Faucon , Seigneur du Breüil , en personne.
Guillemin de Gueret , Seigneur de Bosnat , en per- sonne.
Jean d’Estigneres , Seigneur de la Guierche , en personne.
Me. Jean Barton , Seigneur de la Roche Nozil & de Massenon , tant pour lui que comme tuteur des enfans mineurs de feu Me. Christophle Barton , en son vivant Chevalier, son frere en personne.
Pour

de la redaction des Coutumes.257Pour Antoine de S. Julien, Seigneur du Vimere & du Plaix-Jolliet, Me. Jean de Costes, par procuration.
Pour Jacques de Bridiers , Chevalier , Seigneur de Fournoüe , Me. Pierre de Lacour, par procuration.
Pour Jacques de S. Hyrier , Ecuyer , Seigneur de Lasnaux le Vieux , Me. Pierre de Lacour , par procu- ration expresse.
Pour Jean Dupuy-Vinant, Seigneur Desviergnes, ledit de Lacour , par procuration expresse.
François de la Marche , Seigneur de Puiguillon , en personne.
Leonard Cujas , Seigneur de Pierre-Folles , en personne.
Louis Bouchard, Seigneur du Liege, en personne.
Pour François de la Marche, Seigneur de Vervy, Me. François Angot.
Pour Pierre de Perpirolles, Seigneur d’Hautefaye , Me. Jean de la Viergne , par procuration expresse.
Pour Anne Richard, Dame de Champ-Roy , Me. François Angot , par procuration.
Pour Olivier Dubois , Chevalier , Seigneur de Richemont, Pierre de S. Maur, Ecuyer , par procu- ration expresse.
Pour Hector de Sauzet , Ecuyer, Seigneur d’Estig- neres, Me. Jean de Costes, par procuration expresse.
Pour Gabriel de Chamborant, Chevalier, Seigneur de Laneau de Measnes, ledit de Costes, par procura- tion expresse.
Pour Louis de Maumont, Seigneur de la Ligne,
258Procès-Verbal.ledit Me. Pierre de Lacour , par procuration expresse.
Pour Guillaume de Villart , Seigneur de la Barde, Me. Pierre de Lacour, par procuration expresse.
Le Seigneur Dubois, en personne.
Pour Jean du Breüil, Seigneur de la Villatte , ledit Me. Pierre de Lacour par procuration.
Eurard Faucon , Seigneur de Villelot & des Baries de Gleny , en personne.
Julien de Baston , Chevalier , Seigneur de Neu- ville , en personne.
Pierre de Fauveau, Seigneur de S. Sebastien, en pers.
Pour la Dame de Nouzerolles, Me. François An- got, par procuration.
Pierre de Lacour , Seigneur du Pescher , des Portes & du Bouchatet , en personne.
François Morin , Seigneur des Chatres , en per- sonne.
Jean de Villemonne, Seigneur de la Nouziere, en personne.
Philippe Cleret, Seigneur du Bouchet, en personne.
Jean de Rance , Seigneur de la Chapelle-Barioux & d’Aiguzon , en personne.
Le Seigneur d’Aceron , en personne.
Jean Dubois , Seigneur de Villemonteix, en per- sonne.
Pour le Seigneur de la Vaureille , François Bran- don, Ecuyer, par procuration.
Pour Claude de S. Avis , Seigneur dudit lieu & de S. Dommet , Leonard Molles , par procuration.

de la redaction des Coutumes.259Pour les Consuls de Gueret , Philippe Albert , Me. Martial Rougier & Jean Garron, trois desdits Consuls, en leurs personnes.
Pour les Consuls d’Aubusson, Etienne Segliere, l’un desdits Consuls, en personne , Michel Vallenet, Jean Paris & Michel Meindigou, ses confreres.
Pour les Consuls d’Ahun , Jean de Villard & Leo- nard Reynaud Consuls de ladite Ville , en leurs per- sonnes.
Pour les Consuls de Chenerailles , Me. François Richon , par procuration.
Pour les Consuls de Morteroux , Antoine Coindat & Louis Brissonnet , Consuls dudit lieu , en leurs personnes.
Pour les Habitans du Bourg & Paroisse de Lada- peyre , Pierre Biarnois & Jean Picard.
Pour les Habitans de la Paroisse de S. Fiel , Me. Martial de la Ruë, Prêtre.
Pour les Habitans de la Paroisse de Gleny , Me. Vincent de Meauques, Prêtre.
Pour les Habitans de la Paroisse du Moustier-Mal- lecard & du Boislamy , Jean de la Vanre.
Pour les feux particuliers de Mouziers & de la Cel- lette en la Marche , Pierre Fonteilles & Pasquet de Grospeaux.
Pour les Habitans de la Paroisse de S. Leger , Le- ger Embail & Pierre Gaumard de Murat, Fabriqueurs.
Les Habitans du Bourg & Paroisse de Châtelus , Antoine Renjard.

260Procès-Verbal.Pour les Habitans de la Paroisse de Roches , Jean Basseville.
Pour les Habitans de la Paroisse de S. Dezier , Pierre Chaponnet.
Pour les Habitans de la Paroisse de Bazelard & la Chapelle-Barioux, Leonard Allely.
Pour les Habitans de la Paroisse de Chantosme , Michel Thomas.
Puis après pour les Habitans de la Paroisse de Fres- selines , Louis Peny.
Pour les Habitans de la Paroisse de S. Sebastien , Louis Chabret.
Pour les Habitans de la Paroisse de Laffat , Pierre Augros.
Pour les Habitans de la Paroisse d’Aiguzon, Simon Malesset.
Pour les Habitans de la paroisse de Naillat & la Salesse, Louis de Peneüil.
Pour les Habitans de la Paroisse de Fleurat , Leo- nard Olivier, fabriqueur.
Pour les Habitans de la Paroisse de S. Germain , Pierre Jardinier.
Pour les Habitans de l’Age-Dumont , Mathelin David le Vieux.
Pour les Habitans de la Paroisse de S. Plantaire , Barthelemy Desmagnes.
Pour les Habitans de la Paroisse de Villard , Leo- nard Sadouze.
Pour les Habitans de la Paroisse de Collondannes, Louis Jacquet.

de la redaction des Coutumes.26IPour les Habitans de la Paroisse de S. Sulpice le Dunois , Pierre Pericaud.
Pour les Habitans de la Paroisse de Maison-Feyne Jean de Gest.
Pour les Habitans de la Paroisse de Sagnat, Pierre Vaillant, fabriqueur.
Pour les Habitans de la Paroisse de Buxiere-Dunoise, Jean Conraud & Martial de Doulat , fabriqueur de ladite Eglise.
Pour les Habitans de la paroisse de Champs-An glard , Pierre le Picard.
Pour les habitans de la paroisse de Lourdoüé Saint Michel , Michel Audoux.
Pour les habitans de la paroisse d’Hem, Pierre de la Vallade & Jean Beaupiere , Sindics.
Pour les habitans de Nouzerolles , Jacques de La- grange.
Pour les habitans de la paroisse de Jouillat , Jean Alabelle.
Pour les habitans de la paroisse de Linard , Michel Pautrat.
Pour les habitans de la paroisse de Lourdoüé Saint Pierre , François Couraud , fabriqueur.
Pour les habitans de la paroisse de Bosnat , An- toine Conraut.
Pour les habitans du Moustier d’Ahun , Guillau- me Chairgne.
Pour les habitans de la ville & paroisse de Jarnage, Me. Jean Laboureur.

262Procès-Verbal.Comparurent aussi honorable personnage Me. Jean de Collonges , Licencié és Loix , Seigneur de la Mothe , Lieutenant Général de la Senéchaussée de Riom.
Jacques Menron , Ecuyer , Licentié és Loix, Gar- de & Lieutenant Général pour Madame au pays & Comté de la Marche.
Jean de Costes, Licentié és Loix , Châtelain pour mad. Dame és Châtellenies de Gueret & de Droüilles.
Gilles Panevynon, Licentié és Loix , Châtellain de mad. Dame és Châtellenies d’Ahun & Chenerailles.
Jean Monamy, bachellier és droits , Châtelain de Jarnage.
Antoine Faure , bachellier és droits , procureur pour mad. Dame en lad. Châtellenie de Jarnage.
Thomas Bonnet , élû pour le Roy en la Marche.
Etienne Tacquenet , aussi élû pour le Roy en la Marche.
Jean Autort , procureur esdites Châtellenies de Gueret & Droüilles.
Leonard Marthellade , bachellier és Loix , procu- reur és Châllenies de Felletin & d’Aubusson , & Lieu- tenant du Châtelain de la Borne.
Jean de la Viergne, bachellier és Loix, procureur en la Châtellenie de Chenerailles.
Guillaume Collin , bachellier és droits , Juge de Dun le Palleteau , pour les Seigneurs dudit lieu.
François Angot , bachellier és Loix, procureur en ladite Justice de Dun.

de la redaction des Coutumes.263Pierre le Cour , Licentié és droits.
François Richon.
Antoine Rougier, bachellier és Loix.
Martial de Mareillat, greffier des élûs audit pays & Comté de la Marche , tous praticiens audit Comté de la Marche.
Aussi pareillement ont été appellez les Religieux, Abbé & Couvent de Bonnesagne.
Guichard de Malleret , Seigneur de Flayat.
Jacques Dumurot , Seigneur de Lapouge.
Et outre plus après ce que contre les deffaillans non exoinez , avons donné deffaut au Procureur de mad. Dame la Comtesse , sauf le lendemain & sans plus les appeller : Nous aux dessusdits gens d’Eglise , avons fait mettre la main au pic , & aux Nobles, Praticiens & autres le Tiers-Etat , avons fait mettre le serment de bien & loyaument deposer du fait desdites Coutu- tumes ; & leur avons commandé de nous avertir sur icelles des choses qu’ils verront être utiles , profitables ou dommageables , le tout au bien profit & utilité de la chose publique du pays : & aussi de nous decla- rer qu’elles coutumes sont anciennes , modificatives , interpretatives & nouvelles ; ce qu’ils ont juré & promis de faire ; & avons ordonné ausdits comparans par procu- reurs, de mettre par devers le Greffe de ladite Senéchaus- sée les procurations speciales pour comparoir en ladite publication , & ceux qui avoient seulement procura- tion ad lites de fournir de procurations speciales dans la fin de la publication de ces presentes ; & ce fait à
264Procès-Verbal.ladite publication fimes faire lecture par led. Me. Jean Bonnet , avocat fiscal de mad. Dame des Coutumes de ladite Senéchaussée , lesquelles avoient été mises pardevers nous par ceux du conseil de ladite Dame , & qu’ils disoient avoir été accordées par les gens des Trois-Etats dudit pays. Et en lisant le premier chapi- tre dudit Coutumier , qui est des Juges & Jurisdic- tions y avoit un article contenant , Toute personne peut être adjournée & convenuë en quelque maniere que ce soit réelle, personnelle, mixte, en la Comté & Seigneurie de la Marche, pardevant le Sénéchal Juge suserain de la Comté de la Marche ; mais si le renvoi en est requis & la matie- re y est subie & non privilegiée, il doit être fait depens res- tituez en definitive , si non que le renvoi fut empêché , & que sur le debat d’icelui les parties fussent mises en frais ou délai auquel cas y échoit , depens au profit de celui qui obtiendra ; après les remontrances par nous faites de l’incommodité & dommage qui pourroient provenir à ladite coutume qui étoit couchée comme nouvelle ; avons par l’avis & déliberation de tous les assistans à ladite assemblée , ordonné que ledit article seroit ra- yé & mis hors dudit Coutumier , & qu’ils en joui- roient & demeureroient en l’état qu’ils étoient selon raison.
Sur le quatriéme article qui est audit chapitre est des Juges & Jurisdictions, contenant Le vassal ou sujet en Justice ne peut prendre complainte en cas de nouvelleté contre son Seigneur justicier ou feodal ayant saisi la chose dont le sujet se dit Seigneur utile , ni se dire troublé de
de la redaction des Coutumes.265fait de l’occasion de ladite saisie faite par autorité de jus- tice , mais se peut opposer , appeller ou avoir recours au superieur si bon lui semble , toutes fois s’il se maintient dessaisi de fait , puis an & jour de la chose immeuble dont il étoit saisi , il peut intenter sa complainte & aussi tout autre remede possessoire ; par l’avis & déliberation de gens qui sont desdits Etats susnommez, ont dudit articlé été rayez & ôtez ces mots , toutes fois s’il se maintient dessaisi, &c. vers la fin ; & au lieu d’iceux a été ajouté ce qui s’ensuit, toutes fois si le vassal , après ce qu’il aura été reçû en foi & hommage ou le sujet aura payé les lods & ventes & dessaisi de fait de son fief ou de la chose tenuë en censive par le Seigneur feodal ou censivier , ou autrement troublé en possession & saisi de ladite chose feodale ou censiviere, il lui est loisible dedans an & jour prendre & intenter sa complainte en matiere saisie & de nouvelleté , & tout autre remede possessoire.
Sur le sixième article dudit chapitre commençant, les habitans en aucune Justice qui n’ont corps commun ou consulat , ne se peuvent assembler pour faire congregation pour les affaires communes ou autres sans demander licence au Seigneur justicier ou ses Officiers sur peine d’amende ; mais si la licence leur est refusée , ils ont declaré à la Jus- tice la cause de leur assemblée , & elle est licite & honnéte , ils se peuvent assembler & parler de leurs affaires dont ils ont fait declaration nonobstant la licence leur soit refusée:
leurs avons remontré que sans licence de Juge ou congé du Princeil ne leur étoit loisible de ce faire, & sur ce ont tous persisté en ladite Coutume, & que de
266Procès-Verbal.tout tems ils en avoient usé ; à cette cause a été ledit article accordé pour coutume, toutes fois avons reservé au Procureur Général du Roy de dire contre icelui ce que bon lui semblera.
Sur le neuviéme article commençant , le Juge &c. audit chapitre ont accordé qu’au lieu de ces mots cinq sols, y auroit sept sols.
Sur le douziéme article, qui est au chapitre des Sergens & autres Ministres de Justice & Adjourne- mens, commençant, si Sergent ou Officier d’aucune Justi- ce prend un mal-facteur , & il s’avouë homme justiciable de Madame, sans moyen , le juge de mad. Dame le pourra prendre en sa maison & le justicier , si celui qui l’auroit pris ne veut maintenir l’avoir pris en present méfait ou de chaude suite , auquel cas le présent méfait ou chaude suite prouvez pardevant le Juge de mad. Dame , sera renvoyé le prisonnier pardevant le Juge subalterne qui l’avoit pris , pour être puni, nous ont requis les gens desdits Trois-Etats ledit article couché pour coutume nouvelle.
Sur le quinziéme article , qui audit chapitre des Sergens & autres Ministres &c. contenant , en matiere criminelle les adjournemens personnels & autres sur deffauts en cas de ban doivent être du moins à huitaine sans com- pter le jour qu’ils sont faits & de l’assignation , qui sont huit jours fancs , si non le Juge pour aucune cause à ce le mouvant le dût abreger ou prolonger ; avons par l’avis & declaration de l’assistance ordinaire, qu’en la fin dud. article seroit ajouté ces mots sans préjudicier au privi- lege des Clers.

de la redaction des Coutumes.267Sur le vingtiéme , commencant si en ladite matiere criminelle audit chapitre , au lieu de ces mots dedans certain tems , ont été mis ces mots dedans dix jours.
Sur le vingt-deuxiéme article qui est au chapitre des Renvois, commençant , tout homme d’Eglise ou au- tre trouvé en la Jurisdiction d’aucun Juge, peut être ad- journé devant le Juge Layc , sur verification & reconnois- sance de seing manuel , & ne doit être délaissé ou renvoyé qu’il ne connoisse ou nie ; mais la connoissance n’emportera pas main-garnie sur le meuble de l’homme d’Eglise ; par l’avis & déliberation de l’assistance & assemblée desd. Trois-Etats , ont été rayez & ôtez ces mots , mais la reconnoissance n’emportera pas main-garnie sur le meuble de l’homme d’Eglise , & au lieu d’iceux a été ajouté ce qui s’ensuit , sans préjudice, & ladite reconnoissance faite doit être renvoyé pardevant son Juge.
Et audit chapitre des Renvois , le vingt-sixiéme article , commençant , si le Procureur fiscal empêche le renvoi sans cause raisonnable , il doit étre condamné és propres dépens de partie en son privé nom ; du consente- ment desdits Trois-Etats a été ledit article accordé pour coutume nouvelle.
Sur le vingt-septiéme article , qui est au chapitre des Procureurs, commençant, le mari n’autre posé qu’il soit conjointe personne n’est reçû comme Procureur s’il n’a procuration & charge de la partie , avons par l’avis & déliberation desdits Trois-Etats, ordonné que ledit article seroit corrigé en la forme & maniere qui s’en- suit , le mari pour les biens adventifs de sa femme n'au-
268Procès-Verbal.tre, posé qu’il soit conjointe personne , n’est reçû comme Pro- cureur s’il n’a procuration & charge de la partie ; néan- moins le mari pour les meubles , & conquests és biens dot- aux de sa femme peut agir et être convenu sans procura- tion de sadite femme.
Sur le trente-sixiéme article qui est au chapitre des Assuremens, commençant , si la partie adjournée en cas d’assurement fait deffaut , le Juge par vertu d’icelui peut & doit ordonner qu’il sera pris au corps pour voir bailler ledit assurement. Leur a été remontré que ledit article étoit trop dur & fort pernicieux : à cette cause par l’a- vis & déliberation desdits Trois-Etat a été ledit arti- cle corrigé & modifié en la forme & maniere qui s’ensuit ; si la partie adjournée en cas d’assurement fait deffaut , le Juge par vertu d’icelui peut ordonner prise de corps , si l’ajournement est fait à personne , & aye délai competant pour comparoir; mais si l’adjournement est fait seulement à domicile devant que le Juge puisse decerner prise de corps , par vertu dudit deffaut , est requis qu’il y aye information suffisante pour montrer que celui qui de- mandoit l’assurement a été offensé ou menacé , & par ce moyen qu’il a juste cause pour demander ledit assurement. Et au chapitre des Notaires & Tabellions , nous ont re- quis les gens des Trois-Etats être ajouté pour coutume nouvelle , & comme utile & necessaire pour le bien & utilité dudit pays. Les 39 & 40 articles qui s’en- suivent , Lesdits Notaires doivent inserer en leurs notes & lettres qu’ils reçoiveut , le lieu auquel ils les reçoi- vent ; autrement lesdites lettres sont reputées écriture pure
de la redaction des Coutumes.269privée , & auroient les parties interessées par faute de ce que dit est , leur recours contre lesdits Notaires de tous leurs depens, dommages & interêts. Llesdits Notaires doivent connoître les témoins qu’ils inserent pour presens en leurs nottes ou lettres , sur peine d’amende arbitraire , que leur avons accordé attendu le consentement des Etats.
Sur le quarante-deuxiéme article , qui est au cha- pitre des Dilations, commençant, en matiere des petites importances pures personnelles qui n’excedent la somme de dix livres , le Juge peut bailler & presiger moins que de trois délais à faire enquête ; mais en matiere qui sont d’importance soient réelles , personnelles & mixtes , y a trois délais ordinaires à faire enquête à la discretion du Juge ; & le quart se baille d’abondant par connoissance de cause & non plus, & sont les délais communs au deman- deur & au deffendeur, & à la derniere se doit faire pro- duction de titres & prendre délai de bailler contredits & reproches s’il y échet ; a été ledit article comme nouvelle coutume par les gens desdits Trois-Etats accordé en la maniere qui s’ensuit ; en cause d’appel , en surcéance de sequestre en recréance , reproches de témoins & autres choses incidentes à un procès, n’y a qu’un seul délai à faire enquête : en procès ordinaire, y a trois délais de faire en- quête , & le quatrième avec connoissance de cause & non plus , & sont les délais communs aux demandeurs & def- fendeurs, & à la derniere se doit faire production de ti- tre , & prendre délai de bailler contredits.
Sur le quarante-sixiéme article, qui est au chapi- tre des Deffauts, Contumace & Amendes, commençant,
270Procès-Verbal.en matiere civile par 4 deffauts continuels le Juge ne peut proceder à sentence definitive , & adjuger au demandeur ses fins & conclusions s’il ne lui appert du contenu en l’a- mende par lettres ou témoins ou affirmation de partie : aud. art. à la fin, par l’avis desd. Trois-Etats, ont été rayez ce mots , ou affirmation de partie ; & au lieu d’iceux ajoutez ces mots ; & si ledit demandeur ne peut prouver sa demande par lettres ou témoins en ce cas contre la par- tie deffaillante pourra prendre commission pour lui defferer ou referer , & si contre la partie adjournée obtient deffaut en ce cas sera crû par serment du contenu en sa demande semblablement. Au chapitre des Recusations baillées con- tre les Juges, y a un seul article, commençant , si la partie recuse le Juge &c. qui est le cinquante-sixiéme dudit Coutumier , lequel par l’avis & déliberation desdits Trois-Etats , a été accordé pour coutume nouvelle.
Sur le soixante-deuxiéme article , qui est au cha- pitre des Objets & Reproches des témoins, commençant, objet que le témoin est excommunié n’a point de lieu en cour laye , aussi n’ont lieu objets generaux sans specifier le cas : ceux de l’Eglise se sont opposez audit article, disans icelui être inductif depêché ; & après ce, qu’avons interrogé les Praticiens si ledit article étoit coutume ancienne ou non, lesquels nous ont affirmé ladite coutume être ancienne, & que les Nobles & ceux du Tiers-Etat nous ont requis ledit article demeurer ; avons ordonné que ledit article demeureroit sans pré- judice de l’opposition de ceux de l’Eglise , & que
de la redaction des Coutumes.27Id’icelle en ferions mention en notre Porcès-Verbal.
Sur le soixante-troisiéme article , qui est audit cha- pitre , commençant , par le rapport des enquêtes elles seront tenuës pour publiées ; & les veront les parties , si bon leur semble, si non en matiere de provision ou d’excès, ou que le Juge pour quelque cause declare qu’il ne fera point de publication ; a été avisé par l’avis desdits Etats, ledit article être couché comme il s’ensuit , combien que par ci-devant les parties n’eussent publication de leurs enquêtes , ains seulement de celle de leurs parties adverse ; toutes fois pour le bien du pays a été avisé par lesdits Etats , que d'oresnavant les parties auront publication de leurs enquêtes, comme ils avoient de celles de leurs parties adverses, & tant ès matieres provisionnelles que és ma- tieres de fournissemens , surcéance de sequestres, d’alimens, medicamens , de douaire , donation de tutelles, matieres criminelles , & aussi en autres incidens qui ne sont decisifs de matiere principale , publication d’enquête n’aura lieu , n’aussi reproches de témoins ; mais si l’enquête faite esdites instances & matieres est employée à la matiere principale, les témoins desdites enquêtes pourront être reprochez audit principal, & seront lesdites enquêtes publiées.
Sur le soixante-dixiéme art. qui est au chapitre de Bail de Mineurs , commençant , entre Nobles bail des mineurs a lieu en la Marche , au pere & à la mere seu- lement, si ladite mere est âgée de vingt-cinq ans, & si ledit mineur n’a pere ou mere au dessous de vingt-cinq ans, lui doit être pourvu de tuteur ou curateur par le Juge, appellez les parens, tant du côté paternel que maternel ; a
272Procès-Verbal.été du consentement desdits Trois-Etats, accordé pour nouvelle.
Sur le soixante-douziéme article , audit chapi- tre, commençant , la mere ayant le bail de ses enfans mineurs, s’il y a fille, elle ne les peut marier sans appeller les prochains parens du côté paternel pour le moins jusqu’ au nombre de quatre autrement est amendable, & si perdra son bail, a été du consentement que dessus, accordé pour nouvelle.
Sur le soixante-quinziéme article, qui est audit chapitre de Bail de Mineurs, commençant, celui qui a le bail doit entretenir les heritages du mineur en bon & suffisant état ; & si le depopule ou empire notoirement, il doit perdre le bail, & le pourra poursuivre le plus prochain, & si sera tenu envers le mineur venu en âge, en tous dommages & interêts : après qu'avons remontré à lad. assemblée ledit article être trop general, & à cause de ce, se pourroient engendrer & y être plusieurs pro- cès, ont accordé l’article être corrigé en la forme & maniere qui s’ensuit.
Celui qui a le bail doit entretenir les heritages du mi- neur, & à la fin de ladite garde rendre lesdits heritages en bon & suffisant état; & si ledit balistre depopule ou empire lesdits heritages, il doit perdre le bail, & audit cas doit être pourvu de tuteur audit mineur; & néan- moins sera ledit balistre tenu envers le mineur en tous dommages interêts, provenus à cause de la depopulation & empirement.
Sur le soixante-dix-neuviéme article, aud. chapitre de Bail

de la redaction des Coutumes.273Bail de Mineurs, commençant , celui qui tient en bail n’est tenu repondre en demande proprietaire ou nom du pupile de l’heritage dont le deffunt est mort saisi & vêtu, si non que procès en fut commencé du tems & avec le def- funt ; a été du consentement desdits Trois-Etats cor- rigé en la forme qui s’ensuit ; combien que le balistre en la qualité de balistre ne soit capable, soit en demandant ou en deffendant , agir ou deffendre en matiere petitoire , toutes fois en la qualité de tuteur & legitime administra- teur pourra agir & deffendre esdites matieres réelles & petitoires.
Sur le quatre-vingt-troisiéme article , qui est aud. chapitre de Bail & Mineurs, commençant, l’aîné fils âgé de vingt-cinq ans est préféré à la mere en la tutelle des autres enfans mineurs ; & la mere âgée de vingt-cinq ans est préferée à tous autres parens , fors à l’ayeul paternel s’il est en vie , & si durant la tutelle l’aîné vient en âge parfait , la mere qui l’a acceptée ne la perd point : ont lesdits gens des Trois-Etats accordé la correction dud. article en la forme et maniere qui s’ensuit , la mere âgée de vingt-cinq ans est préferée au frere en la tutelle de ses enfans mineurs ; & le frere aîné âgé de vingt- cinq ans à tous autres parens, fors l’ayeul paternel , s’il est en vie.
Sur le quatre-vingt-sixiéme article , audit chapitre du Bail des mieurs , commençant , si la mere veut con- voler en secondes nôces elle perd la tutelle si tôt qu’elle est fiancée ; du consentement desdits Trois-Etats en la fin dudit article , a été ajouté ces mots , & le Juge
274Procès-Verbal.du lieu incontinent lesdites fiançailles faites , fera pour- voir aux mineurs de tuteurs & curateurs.
Sur le quatre-vingt-neuviéme article , qui est au chapitre des Prescriptions , commençant , la prescrip- tion de trente ans etiam sans titre est suffisante &c. du consentement que dessus , après ces mots , se prescri- vent, acquierent & perdent etiam sans titre, par l’espace de trente ans , a été ajouté ce qui s’ensuit , continuels & accomplis contre les lays , & de quarante ans contre l’Eglise.
Sur le quatre-vingt-douziéme article, aud. chapitre des prescriptions, commençant, faculté de rachetter toties quoties baillée à aucuns expire & se prescrit par le laps & espace de trente ans accordé pour nouvelle.
Sur le quatre-vingt-quatorziéme, qui est aud. cha- pitre des Prescriptions , commençant, la façon & ma- niere de payer & lever dîmes, & aussi la quottité d’icel- les se peut prescrire par le laps & espace de trente ans de lay à lay, & contre l’Eglise par l’espace de quarante ans, sans que le Curé ou autre dîmeur puisse autre chose en de- mander ou quereler : Ceux de l’Eglise se sont opposez audit article, maintenant que des dispositions de droit commun, la cottité de la dîme, laquelle de droit Divin ne se peut prescrire ; aussi ne peuvent les gens lays introduire coutume sur la prescription de lad. cottité contre les gens d’Eglise ; & avons interrogé lesdits Praticiens, lesquels nous ont dit que l’usance & commune observance est telle , & les Nobles & ceux du Tiers-Etat ont requis ledit article être couché
de la redaction des Coutumes.275pour coutume ancienne : si avons ordonné que ledit article demeureroit comme coutume ancienne : & ordonnons que lesdits gens d’Eglise bailleroient pre- sentement leurs causes d’opposition , & pour ce faire les renvoyames en ladite Cour , pour lesdites parties ouiës être ordonné comme de raison.
Sur le quatre-vingt-dix-septiéme article , qui est au chapitre des Obligations , Exceptions & Compensations, commençant, exceptions que le demandeur est excom- munié pour le repeller de son action, n’est reçû en cour laye: Ceux de l’Eglise se sont opposez audit article pour les raisons par eux alléguées dessus au soixante-douziéme article ; & après ce qu’avons interrogé les Praticiens, si ladite coutume étoit vieille ou nouvelle , lesquels nous ont dit qu’elle étoit ancienne ; & aussi que les Nobles & ceux du Tiers-Etat ont requis que ladite coutume demeurâ pour ancienne : avons ordonné que ledit article demeureroit pour ancienne , sans préjudice de l’opposition de ceux de l’Eglise , & que de leurdite opposition en ferions mention en notre Procès-Verbal.
Sur le quatre-vingt-dix-huitiéme article, qui est aud. chapitre des Obligations &c. commençant, compensa- tion n’a point de lieu, soit la dette liquide ou non , ont accordé lesdits gens des Etats ledit article être corri- gé en la maniere qui s’ensuit ; compensation a lieu li- quidi ad liquidum, en faisant apparoir promptement par celui qui demande compensation de son dette.
Sur le cent uniéme article , au chapitre des Appel-
276Procès-Verbal.lations, commençant , il est necessaire relever ou renon- cer dans dix jours , soit que l’on appelle d’un Châtelain ou Baillif , ou d’un Sergent quand l’on veut relever parde- vant le Senéchal de la Marche ou autre Juge du pays, ayant ressort en cas d’appel, autrement l’appellation sera declarée deserte ; a été du consentement des Trois- Etats ledit article accordé & corrigé & mis en deux articles en la forme qui s’ensuit , l’Appellant peut renon- cer dedans huit jours, & n’est ledit jour de l’appel en rien compté ; l’appellant est tenu de relever son appellation de- dans dix jours , soit que l’on appelle du Châtellain , Baillif ou Sergent quand on veut relever pardevant le Senéchal de la Marche ou autre Juge dudit Pays ayant ressort en cas d’appel , ou autrement l’appellation qu’il a interjettée sera declarée deserte.
Sur le cent cinquiéme article, qui est audit chapi- tre des Appellations , commençant , si aucun est appel- lant d’aucun Seigneur Justicier , comme pour dénegation formelle de droit , il est exempt pendant ladite cause d’ap- pel en toutes ses causes & matieres : & s’il est dit bien appellé par l’appellant par dénegation de droit , l’appel- lant , sa posterité & bien quelconque sont à perpetuité exempt de la jurisdiction du Seigneur dont elle a été ap- pellée & demeure homme du Seigneur suserain immediat ; après qu’avons remontré ausdits Etats que ledit article étoit trop rigoureux & pernicieux pour la chose pu- blique ; ont de leur consentement accordé que ces mots, sa posterité & biens quelconques sont à perpetuité exempt , fussent rayez & ôtez , & qu’en la fin dudit
de la redaction des Coutumes.277article seroit ajouté de nouvel , à la vie d’icelui qui a denié justicier , & de celui à qui elle a été deniée.
Sur le cent dixiéme article, qui est au chapitre des Lods, Ventes & Achats, commençant , recision d’outre moitié de juste prix n’a point de lieu en vente de chose mobilaire , ne en vente ou louage de fruits faits à trois ans & au dessous ; du consentement desdits Trois- Etats n’est accordé qu’au lieu de trois ans, seront mis neuf ans, & en ces mots accordé pour nouvelle.
Sur le cent treiziéme article , qui est aud. chapitre de Lods &c. commençant és lieux ou ventes sont dûës, &c. sont du consentement desdits Trois-Etats été à la fin dudit article ajouté de nouvel ces mots , & se- ront pris les lods & ventes selon l’estimation de l’assiette , dont ci-après sera fait mention.
Sur le cent vingt-uniéme article, commençant, qui achette en verd les bleds du laboureur & avant qu’ils soient recueillis , & fait prix d’iceux à les recevoir après moissons est amendable d’amende arbitraire ; est le contrat nul & de nulle valeur , a été accordé pour nouvelle du consentement desdits Trois-Etats.
Sur le vingt-quatriéme article, qui est au chapitre des Hommes francs, serfs, mortaillables, nature & droits d’iceux, commençant , par la coutume de la Marche , quiconque doit à son Seigneur à cause d’aucun heritage argent à trois tailles payables à trois termes , dont l’un en Août , avoine & geline ; du consentement desd. Trois- Etats ont été rayez ces mots , dont l’un est en Août , ni étoient point , à quoi s’est opposé Me. Leonard
278Procès-Verbal.Marthellade, pour le Seigneur de la Borne, à ce qu’il ne fut compris pour sa terre & seigneurie Dougnon , en lad. coutume générale, maintenant que combien que ces sujets ne payent qu’à deux termes avoine & geline, néanmoins sont-ils serfs coutumiers ; surquoi lui avons reservé qu’il pourra coucher ledit droit pour coutume locale.
Sur le cent vingt-huitiéme article, qui est au cha- pitre des Hommes francs &c. commençant, tout homme tenant serfvement son heritage qui est reputé serf selon la coutume , ou par reconnoissance ou présomption, est tenu payer à son Seigneur la taille aux quatre cas ; c’est à sça- voir quand led. Seigneur marie aucune de ses filles &c. du consentement desdits Trois-Etats ont mis ces mots , en mariant sa fille en première nôces ; & audit chapitre y avoit un article contenant , les deux desdits quatre cas sont réïterables ; c’est à sçavoir, prison d’ennemis tant de fois qu’il advient & mariage de fille, pour chacune fille en premieres nôces, pour les differens si ladite taille aux quatre cas est réïterable au mariage de toutes les filles du Seigneur en premieres nôces ; a été accordé qu’il seroit rayé , & que les Seigneurs en jouiront comme ils en doivent jouir , & sauf aux sujets leurs deffenses au contraire.
Sur le trente-uniéme article, qui est audit chapitre commençant , lesdites tailles sont imprescriptibles par homme franc &c. ont du consentement que dessus en la fin dudit article été ajouté ces mots, ou prescription, laquelle ne commence si non du jour de la contradiction.

de la redaction des Coutumes.279Sur le cent trente-quatriéme article, commençant, tout homme tenant serfvement ; & I36 article audit chapitre des Hommes francs &c. commençant, outre est tenu tout homme franc qui tient heritage serf ou mor- taillable &c. Ceux du Tiers-Etat ont requis qu’ausdits articles fussent ajoutez, pourvu qu’il eut heritage suf- fisant pour tenir bœufs ; car il sembleroit être déraison- nable que le sujet fut contraint aller faire la vinade s’il n’avoit heritage suffisant pour nourrir bœufs ; & avons interrogé les Praticiens si lesdites coutumes étoient telles eut heritage suffisant ou non pour tenir bœufs, qui nous ont dit que la coutume ancienne ne fait distinc- tion aux heritages suffisans ou non pour tenir bœufs ; & nous ont requis les gens d’Eglise & Nobles , que ledit article demeura : surquoi nous parties ouiës, avons ordonné que lesdits articles demeureront pour coutume ancienne ; & que du dire de ceux du Tiers- Etat ferions mention en notre Procès-Verbal : & par ce que lesdits Marthellade, pour ledit Seigneur Dou- gnon, & Me. Michel Beringue , pour le Seigneur de Châteauvert ont maintenu avoir plus grands droits que ce qui est contenu audit article ; avons reservé si aucun Seigneur ont droit de prendre & avoir plus grand droit d’en jouir comme ils en doivent jouir ; aussi si les sujets ont accoutumé de payer un droit moindre, ils useront comme ils ont accoutumé, & sauf au Seig- neur & Sujets respectivement leur deffenses au con- traire.
Sur le cent quarantiéme article , qui est audit cha-
280Procès-Verbal.pitre des Hommes Serfs &c. commençant , quiconque est tenu de faire vinade , est quitte pour quinze sols , pour vinade entiere & de plus plus & de moins , si non qu’il aye été sommé paravant la saint Martin d’hyver faire , soit dûë à ladite vinade par homme franc tenant l’herita- ge ou mortaillable bien peut faire ladite vinade si bon lui semble après la saint Martin selon qu’il la doit ; après qu’avons remontré led. article être obscur & rigou- reux ; nous ont lesdits gens des Trois-Etats accordé ledit article être corrigé & notifié ainsi qu’il s’ensuit ; quiconque est tenu faire vinade , soit homme franc ou te- nant heritage, serf ou mortaillable, il est au choix du Seig- neur de le contraindre à faire ladite vinade , pourvu que ledit Seigneur lui somme de tel tems que le sujet puisse être de retour à la saint Martin d’hyver , & en ce cas le Seigneur à l’option de le contraindre de faire icelle vinade , ou prendre pour vinade entiere quinze sols , & du plus plus & du moins moins ; mais si ledit Seigneur n’a sommé sondit sujet de lui faire ladite vinade devant la S. Mar- tin en tel tems qu’il puisse être de retour en sa maison à ladite saint Martin , il est à l’option du serf de faire lad. vinade ou de payer lesdits quinze sols pour vinade entiere, ou de plus plus, & du moins moins, & où ledit serf som- mé en tems dû auparavant la saint Martin aura été re- fusant de faire vinade , en ce cas ledit serf est tenu à la vraye & juste estimation de ladite vinade , & és domma- ges interêts dudit Seigneur auquel est dûë ladite vinade.
Sur le cent trente-neuviéme article , qui est audit chapitre , commençant , hommes tenans heritages serfs ou

de la redaction des Coutumes.28Iou mortaillables qui n’ont boeufs tout du long de l’an ne sont tenu d'aller à la vinade ; mais sont quittes envers leurdit Seigneur , c’est à sçavoir celui qui doit vinade entiere pour quinze sols tournois, & les autres pour plus ou moins au prix dessusdits : mais si l’homme a charrette & le Seigneur la veut , il sera tenu la bailler , & sera quitte de cinq sols en deduction de la vinade ; après que leur avons fait les remontrances telles que contenuës ci- dessus au I26 article , ont accordé que ces mots , qui n’ont bœufs tout le long de l’an, fussent ajoutez.
Sur le cent quarante-neuviéme art. commençant, si celui qui a achetté heritage mortaillable ne paye les Lods & Ventes dedans quarante jours , les ventes doubles ; & s’il differe de payer lesd. lods & ventes jusqu’après an & jour , le Seigneur peut faire saisir par Justice ou par la Justice de son Seigneur, l’heritage, & jouira des fruits, & fait lesdits fruits siens jusqu’à ce qu’il aura payé lesdits lods & ventes ; & ainsi est des hommes francs & des he- ritages tenus en censive ou franchise, és lieux où lods & ventes sont dûs ; a été accordé pour coutume nouvelle.
Sur le cent quarante-quartiéme article , qui est audit chapitre , commençant , homme tenant heritage serf ou mortaillable peut acquerir & posseder &c. Com- bien que la coutume soit ancienne , néanmoins pour le soulagement du pauvre peuple, a été accordé qu’elle aura seulement lieu pour l’avenir & qu’elle sera mise comme nouvelle : ceux d’Aubusson ont maintenu avoir coutume locale au contraire ; surquoi avons or- donné que de leur dire en ferions mention en notre
282Procès-Verbal.Procès-Verbal ; & leurs avons reservé leurs droits, qu’avons reservé généralement à la publication de ces presentes coutumes.
Sur le cent soixante-dixiéme article dudit chapitre des Hommes serfs &c. commençant , si l’homme tenant heritage serf ou mortaillable s’en va hors ledit heritage &c. après les remontrances par nous faites, que ledit article étoit trop rigoureux & pernicieux pour la cho- se publique ; ont lesdits gens des Trois-Etats accordé que si l’homme tenant revient dedans trente ans, il peut prendre ledit heritage dedans ledit tems, en pa- yant leurs arrerages & droits encourus ; aussi a été ac- cordé que combien ladite coutume soit ancienne, toutes fois pour le soulagement du peuple demeurera écrite comme nouvelle , & aura son effet seulement comme coutume nouvelle.
Sur le cent soixante-treiziéme article, audit chap. commençant, si aucun roturier tient deux heritages ou hebergemens &c. Ceux du Tiers-Etat nous ont requis que ces mots fussent mis , pourvu qu’il y aye heritage suffisant pour nourrir deux beoufs ; & après ce, qu’avons interrogé lesdits Praticiens , si la dite coutume étoit nouvelle ou ancienne ; lesquels nous ont dit ladite coutume être ancienne : nous lesdites parties ouies, avons ordonné que ledit article demeureroit ; mais que de l’oposition desd. gens du Tiers-Etat en ferions mention en notre Procès-Verbal.
Sur le cent quatre-vingtiéme article, aud. chapitre des Fiefs & Droits d’iceux, commençant, il est au choix
de la redaction des Coutumes.283du Seigneur direct , feodal ou foncier &c. Lesdits gens des Trois-Etats, ont accordé qu’audit article fussent ajoutez ces mots ; mais toutes fois ledit Seigneur direct ne peut proceder par execution sur les meubles du tiers dé- tenteur ; sinon que ledit détenteur eut passé titre nou- veau & fut obligé , ou que le Seigneur direct fût en pos- session de recevoir ladite rente dudit tiers détenteur deja payée une année ou deux ladite directe ; car ès cas dessus- dits le Seigneur direct peut proceder contre le tiers déten- teur par l’execution sur ses meubles.
Sur le cent quatre-vingt-quatriéme aricle, qui est aud. chap. des Fiefs & droits d’iceux, et commençant , si aucun Fief est divisé entre deux freres ou autres personnes, chacun des détenteurs est tenu faire foy & hommage de ce qu’il tient ; & ne peuvent les freres ou autres en faisant tel partage retenir à l’un deux l’hommage de l’autre au préjudice du Superieur ; du consentement des gens desd. Trois-Etats ont été ajoutez en la fin dudit article ces mots ; mais si après le trépas de pere & mere, à plu- sieurs enfans survient quelque Fief, & entre iceux y aye quelques mineurs, ou que ledit Fief en attendant partage soit possedé par iceux par indivis , en ce cas l’aîné pourra porter l’hommage pour sa part : & audit chapitre des Fiefs & Droits d’iceux, y avoit un article, contenant, le Seigneur de Fief peut dedans trente ans contraindre le roturier à remettre en main Noble le Fief par lui de nou- vel acquis , si non qu’il aye reçû en hommage , ou baillé respis ou souffrance : après les remontrances par nous faites ausdits gens des Trois-Etats, & comme il étoit
284Procès-Verbal.pernicieux à la chose publique , de leur consentement avons ordonné que ledit article seroit rayé & ôté dud. coutumier ; mais toutes fois que d’icelui ferions men- tion en notre Procès-Verbal.
Sur le Deux cens dixiéme article , qui est au chapitre des Testamens, Successions testamentaires & ab intestat , & partage de biens , commençant , aucun soit noble ou roturier ne peut par testament ou autre disposition , &c. Les gens desdits Trois-Etats nous ont dit ladite cou- tume être nouvelle depuis ces mots ou autrement , & du consentement desdits Trois-Etats, à la fin dudit article ont été ajouté ces mots ; et si le pere ou mere avoient disposé dud. tiers au profit de l’un de ses enfans, telle donation ou disposition est bonne & valable ; toutes fois elle demeure chargée de toutes les dettes , obseques & funerailles & legs testamentaires, & en jouira ledit dona- taire par preciput & avantage pardessus ses autres freres & sœurs , sans d’icelle en faire aucun rapport.
Sur le deux cens treiziéme article , audit chapitre des Testamens &c. commençant , en succession directe en- tre Noble & de chose noble où il y a mâles & femmelles qui succedent par ensemble, le mâle a droit d’aînesse sur les filles , posé qu’il soit moins aîné d’elles , & sur tous ses autres freres moins nez , & emporte l’aîné fils , & si l’aîné étoit trépassé, son fils aîné aura le chastel ou maison principa- le tel qu’il voudra choisir & élire , soit paternel ou mater- nel pour droit d’aînesse : & d’avantage en cette maniere, que s’il y a Chastel ou place forte , où il y a fosse ou fossez, & dedans la clôture desdits fossez il y a granges , étables
de la redaction des Coutumes.285ou autres choses , ils demeureront à l’aîné ou à son fils com- me dessus , reservé que s’il y avoit aucuns moulins , pres- souer ou four bannier , l’aîné pourra, si bon lui semble, recompenser ses autres heritiers de leurs parts & portions, autrement lesdits moulins, pressouers & fours se partiront également : & outre l’enclos desdits fossez, quarante toi- ses de terre à prendre du bort desdits fossez par dehors, tant que lesd. quarante toises se peuvent étendre à l’entour desdits fossez; tellement que si en quelque côté dudit Cha- tel ou place forte lesd. quarante toises ne se peuvent trou- ver, il n’aura que ce qui se trouvera à chacun côté , & ne se pourra recompenser aux autres lieux, & s’il n’y a point de Chastel ou place forte, fosse ou fossez; il aura la maison, & outre ce qu’il est enclos , soit mur ou de pal, quarante toises tout entour à prendre de ladite clôture soit mur ou de pal, & si n’y a mur ou pal ou autre clôture en ladite maison, le tout comme dessus; & est lad. toise de six pieds ; du consentement desdits Trois-Ttats a été couchée pour coutume nouvelle.
Sur le deux cens dix-septiéme article, audit chapi- tre des Testamens, commençant, representation a lieu en la Marche en ligne directe in infinitum, & en ligne collaterale jusqu’au tiers dégré inclusivement, & non plus, à compter selon le droit civil ; du consentement desd. Trois-Etats on été en la fin dudit article, au lieu desd. mots , jusqu’à au tiers dégré, mis ces mots jusqu’aux enfans des freres.
Sur le deux cens dix-neuviéme article , audit cha- pitre des Testamens, commençant, fille appanée ou dou-
286Procès-Verbal.ée & fiancée &c. a été du consentement desdits Etats en ce mot, & fiancée, accordé pour coutume nouvelle.
Sur le deux cens vingtiéme article , qui est audit chapitre des Testamens , commençant , Bâtards succe- dent à leurs peres en quelque maniere qu’ils soient bâtards ; mais ils peuvent bien succeder à leurs meres , si elles n’ont point d’enfans naturels & legitimes , pourvû ques lesdits bâtards ne soient adoultres ou autrement nez ex dam- nato coïtu : car tels adoultres ou ainsi nez ne succedent à pere , mere , ou autres parens ; après la lecture dudit ar- ticle ; nous ont dit ceux d’Eglise que ladite coutume erat inductiva peccati , & par ce, devoit être rayé : & avons interrogé les Praticiens, si ladite coutume étoit nouvelle ou ancienne ; lesquels nous ont dit qu’elle étoit ancienne : avons ordonné que ladite coutume demeureroit pour ancienne ; & que des remontran- ces faites par ceux de l’Eglise ferions mention en notre Procès-Verbal ; & les remontrances faites par nous aux gens desdits Trois-Etats , que ledit article étoit trop rigoureux : de leur consentement avons ac- cordé & modifié ledit article comme s’ensuit, Bâtards ne succedent point à pere ni à mere ; néanmoins si la mere pour le nourrir & alimenter, lui fait donation dedans les termes de la coutume, qui est la tierce partie de tous ses biens par Testament, telle donation & valable.
Sur le deux cens vingt-troisiéme article , qui est audit chapite des Testamens , commençant , le pere & la mere, ayeul, ou ayeule succedent à leurs enfans, & ne- veux en directe ligne decedans sans hoirs naturels & le-
de la redaction des Coutumes.287gitimes, quant aux meubles & conquests advenus ausdits enfans & neveux , autrement que par la succession de leurs predecesseurs , toutes fois si ledit pere ou predecesseur à qui seroient advenuës lesdites successions se remarioient, lesd.biens retourneroient après le trépas du pere à ceux de l’es- toc du côté paternel plus prochain d’icelui à qui ils avoient succedé ;leur avons remontré que led. art. étoit trop obs- cur ; à cette cause on a accordé led. art. en la forme & maniere qu’il est ecrit aud. coutumier ; c’est à sçavoir, le pere, la mere, ayeul au ayeule, succedent à leurs enfans & neveux en directe ligne decedans sans hoirs naturels & legitimes, quant aux meubles & conquests ; & quant à ce, si le pere, mere, ayeul, ou ayeule, leurs avoient fait donation en avancement d’hoirie ou autrement de rente ou de chose immeuble , telle rente ou chose immeuble ainsi don- née sera en ce cas reputée acquest audit enfant ou neveu, tellement que en ceci succedera le pere, mere, ayeul ou ayeule, combien qu’en autre cas sortisse de nature de propre.
Sur le deux cens vingt-quatriéme article , dudit chapitre , commençant, entre personnes franches, le pere est usufruitier &c. Nous ont dit les gens desdits Trois- Etats ladite coutume être nouvelle seulement en ces mots, sauf toutes fois pecule castrense vel quasi.
Sur le deux cens vingt-septiéme article , audit cha- pitre , commençant , en succession fraternelle ; du con- sentement desdits Trois-Etats , a été accordé qu’elle demeureroit comme nouvelle coutume.
Sur le deux cens vingt-huitiéme article, qui est aud. chapitre des Testamens, commençant , les biens de ceux
288Procès-Verbal.qui entrent en Religion & y font profession expresse ou tai- sible retournent aux plus prochains parens ; & ne sont par profession dédiées à l’Eglise s’il n’y a expresse dédication; & est le Religieux reputé personne morte & ne fait nom- bre entre les enfans en computation de legitime : & ne succede le Religieux, ni le monastere pour lui, à celui qui afait Profession taisible ou expresse,ni à autre de ses parens ; audit article se sont opposez ceux de l’Eglise , en tant que touche ces mots ; que les biens de ceux qui entrent en Religion & y font profession expresse ou taisible, retor- nent au plus proche parent ; & ne sont par Profession dédiéz à l’Eglise, s’il n’y a expresse dédication; disans que led. article est contre toute disposition de droit commun ; & les Nobles & ceux du Tiers-Etat on dit ladite cou- tume être ancienne : & avons interrogé les Praticiens si ladite coutume étoit ancienne ou nouvelle ; lesquels nous ont dit icelle être écrite en leur ancien coutumier ; mais n’en virent jamais procès , bien ont vû plusieurs personnes que quand ils se rendoient Religieux , les biens qu’ils avoient le Monastere ne les prenoit ; ains venoient à leurs freres ou autres heritiers : surquoi a- vons ordonné que led. art. demeureroit, & que de l’o- position faite par ceux de l’Eglise, aussi des remontran- ces par nous faites, en ferions mention en notre Procès- Verbal, pour la Cour être ordonné comme de raison.
Sur le deux cens vingt-neuviéme article, aud. cha- pitre des Tetamens, commençant, testament fait en presence de Notaire & deux témoins &c. du consente- ment des gens desdits Trois-Etats ont été ajouté ces mots

de la redaction des Coutumes.289mots de nouvel , où s’il est écrit et signé de la main du Testateur est reputé solemnel.
Sur le deux censtrente-deuxiéme article, audit cha- pitre des Testamens &c. commençant , Madame comme Comtesse de la Marche succede ab intestat aux biens meu- bles & immeubles des bâtards feodaux ou roturiers s’ils n’ont descendans d’eux naturels & legitimes : après qu’- avons interrogé les Praticiens si ladite coutume étoit ancienne ou nouvelle , qui nous ont dit qu’elle étoit ancienne : surquoi nous avons ordonné que ledit article demeureroit écrit, sans préjudice au Procureur Géné- ral du Roy de pouvoir debatre lesd. biens des Aubains ; & aussi sans préjudice des procès qu’on dit être pen- dans pardevant le Sénéchal de la Marche , & des pri- vileges ou coutumes que Vassaux ont prétendu avoir au contraire.
Sur le deux cens trente-cinquiéme article , com- mençant , & si le deffunt &c. du consentement desdits Trois-Etats ont été ajouté ces mots , si lesdits meubles & conquêts sont suffisans ; alias les heritiers patrimoniaux payeront le reliqua pro rata.
Sur le deux cens quarantiéme article, audit chapitre des Testamens, commençant, combien que par ci-devant les coutumiers dudit pays ayent été en alteration si la fille mariée en premieres nôces, à laquelle n’avoit été fait reservation de succeder , peut être rappellée à la succession de leurs parens en secondes nôces, ou autre traité de ma- riage ; à cette cause a été advisé par les Etats du Pays que d’oresnavant la fille mariée en premieres nôces ne peut
290Procès-Verbal.par sondit pere , ni autres parens de la succession desquels elle est forclose par ladite Coutume en faveur des mâles , être rappellée à aucun espoir de droit successif , au préju- dice d’iceux mâles ou leurs descendans sans leur consente- ment , soit le second traité de mariage ou autrement ; a été dit, du consentement desdits Trois-Etats , qu’elle demeureroit écrite comme nouvelle coutume.
Sur le deux cens quarante-cinquiéme article, aud. chapitre des Testamens , commençant, Fille qui se ma- rie sans le sçeû, ou outre le gré de ses pere & mere, ou de son pere seulement, ou de sa mere, aprés le trépas du pere avant l’âge de vingt-cinq ans , peut être par eux ou l’un d’eux exheredée ou appanée de telle chose que bon leur sem- ble ; & audit cas ne peut pretendre ni avoir droit és biens & successions de sesdits pere & mere par legitime ou au- trement ; a été dit qu’elle seroit écrite comme nou- velle coutume.
Sur le deux cens cinquante-uniéme article , com- mançant , lesdites ordonnances &c. du consentement desdits Trois-Etats, ont été ajouté de nouvel ces mots, Curé ou Vicaire, & ces mots , sans le Curé ou Vicaire usque in finem.
Sur le deux cens cinquante-cinquiéme article , qui est audit chapitre des Testamens &c. commençant , les prochains linagiers des gens d’Eglise seculiers de franche condition leurs succedent en leurs biens par eux délaissez. Me. Jean Laboureur , comme soit disant Procureur de l’Evêque de Limoges , s’est opposé audit article maintenant ledit Evêque de Limoges être en posse-
de la redaction des Coutumes.29Ision de succeder és meubles des Clers decedans ab in- testat en son Diocese : sur ce , avons ordonné que lad. coutume demeurera écrite comme ancienne , & que de son oposition en ferions mention en notre Procès- Verbal , & l’avons renvoyé en la Cour pour deduire ses causes d’oppositions.
Sur le deux cens cinquante-huitiéme article , qui est au chapitre de Retrait Linagier, & prélation de cho- se Feodale, Censiviere ou Franche , commençant , le li- nagier du vendeur d’aucun heritage ou chose immeuble &c. a été ladite coutume, du consentement desdits Trois- Etats , accordé pour nouvelle seulement en ces mots, dedans an & jour , & auparavant n’y avoit que qua- rante jours.
Sur le deux cens soixante-uniéme article , audit chapitre de Retrait lignagier &c. commençant , le tems introduit pour avoir par retrait la chose venduë se com- pte &c. nous ont dit les Trois-Etats que ledit tems passé , le tems ne courroit contre un linagier , si non depuis qu’il avoit connoissance de la possession réelle & actuelle prise , ou qu’il avoit peu sçavoir.
Sur le deux cens soixante-huitiéme article , qui est audit chapitre de Retrait lignagier , commençant , si l’achetteur requis d’affirmer le prix , ne le veut faire , il est debouté, & doit perdre la chose par lui acquise ; & doit être adjugée au linagier , a été ladite coutume accor- dée pour nouvelle.
Sur le deux cens soixante-neuviéme article , audit chapitre de Retrait Lignagier, commençant, lignagier
292Procès-Verbal.sur lignagier n’a point de retenuë en chose venduë du mê- me estoc &c. a été ladite coutume , du consentement desdits Trois-Etats , accordée pour nouvelle, depuis ces mots , toutes fois si celui qui est commun en tous biens &c. jusqu’à la fin dudit article.
Sur le deux cens soixante-treiziéme , aud chap. de Retrait lignagier , commençant , le Seigneur feodal a droit de retenuë ou prélation en la chose feodale &c. 275 , commençant , le Seigneur direct qui a lods & ventes peut avoir &c. & 243 article, commençant , le tems d’an & jour , & trois mois respectivement, est con- tinuel , & court contre toutes personnes quelconques , mi- neurs , femmes mariées, & autres , absens , presens , sça- chans , & ignorans ; ont été lesdits articles accordez pour coutume nouvelle , seulement en ces mots, de- dans trois mois ; car auparavant n’y avoir que quarante jours.
Sur le deux cens quatre-vingt-huitiéme article, commençant , si après le Mariage consommé &c. du consentement desd. Trois-Etats a été ajouté après ces mots, & toute autre donation, ce mots, entre vifs.
Sur le deux cens quatre-vingt-douziéme article, aud. chapitre des Donations , Dots , Doüaires , & Convenan- ces de mariage, commençant, âge parfait , quant à quitter par la fille qui se marie en contrat de mariage les biens jà à elle advenus, se prend à quatorze ans, & quant au fils, à dix-huit ans, quand le pere par deliberation de trois de ses parens les marie hors de sa maison; mais quant aux autres contrats d’aliénation de biens immeubles , à ce
de la redaction des Coutumes.293que les contrats sortent effet , âge parfait s’entendra d’ores- navant & par deliberation des Etats à vingt-cinq ans : jaçoit que par ci-devant en eussent autrement usés ; a été du consentement desdits Trois-Etats accordée pour nouvelle coutume.
Sur le deux censquatre-vingt-quatorziéme , article audit chapitre des Donations &c. commençant , entre personnes de franche condition &c. du consentement desd. Trois-Etats , a été ledit article accordé pour coutume nouvelle , en ces mots seulement , & saisissent le ma- riez & les descendans les cas advenus.
Sur le deux cens quatre-vingt-dix-septiéme article, commençant , la mari & la femme conjointement &c. 300 article , commençant , la femme pour mariage, aud. chapitre des Donations &c. ont été du consente- met desd. Trois-Etats accordez pour coutume nouvelle.
Sur le trois cens huitiéme article , qui est au chap. des Moulins , Fours & Etangs , commençant, si aucun a placé riere soi pour faire chaussée &c. du consentement desdits Trois-Etats a été la fin dudit article accordé pour coutume nouvelle , depuis ces mots , pourvû que lesdites terres sujettes à ladite inondation ou prochaine du lieu où on fait le moulin ne soient du domai- ne, & appartienent au Seigneur direct ou Justicier : car en ce cas le Seigneur ne sera contraint les vendre ni les laisser par recompense.
Sur le trois cens treiziéme article , qui est aud. ch. des Moulins &c. commençant , si aucun Baron, Châtel- lain , ou Haut-Justicier avoit moulin & son valvasseur
294Procès-Verbal.n’en eut point , tous les hommes du valvasseur demeurant en la banlieuë dudit moulin iront moudre audit moulin du Baron, jusques à ce que le valvasseur ait moulin; & sitôt que le valvasseur aura moulin, lesdits hommes demeurans dedans ladite banlieuë dudit moulin, iront moudre au- dit moulin dudit valvasseur , par quelques laps de tems qu’ils ayent moulu au moulin du Baron. Me Leonard Marthellade , pour & au nom dudit Seigneur de la Borne, s’est opposé audit article ; & après ce , que nous avons interrogé les Praticiens , & aussi les gens desdits Trois-Etats, nous ont dit ladite coutume être ancienne ; avons ordonne qu’elle demeureroit pour ancienne ; & que de l’opposition dudit Seigneur de la Borne ferions mention en notre Procès-Verbal.
Sur les trois cens vingt-deuxiéme article, commen- çant, si personne n’appert qu’il puisse prouvert &c. 323, si aucun trouve bourgnon &c. qui sont au chapitre des Espaves & biens vacans, du consentement desd. Trois- Etats, ont été ajoutez ces mots, ou autre ayant droit d’Espave.
Sur le trois cens vingt-sixiéme article, qui est aud. chap. des Espaves &c. commençant, les biens des aubins & étrangers qui n’ont d’heritiers capables, appartiennent à Madame en la Marche ; avons interrogé les Praticiens, aussi les gens desd. Trois-Etats, lesquels nous ont dit ladite coutume être ancienne, à cette cause avons or- donné qu’elle demeureroit comme ancienne , sans prejudice au Procureur General du Roy de pouvoir dire ce que bon lui semblera, & à mad. Dame la Du-
de la redaction des Coutumes.295chesse ses deffenses au contraire , & aussi à requis Me. Jean de Costes pour la Dame d’Arfeuille comme tutrice de ses enfans , il fut mis , sans prejudice des procès pen- dant pardevant le Sénéchal de la Marche , entre ladite Dame audit nom & sa partie adverse ; avons ordonné que ce seroit sans prejudice des procès pendant parde- vant le Sénéchal de la Marche.
Sur le trois cens trente-troisiéme article qui est au chapitre des Crimes , commençant , en cas privilegié comme de sauvegarde ou main mise enfrainte ou autre semblable , le Procureur d’office est recevable sans partie , pourvû qu’il y ait plaintif ou dénonciateur; & en cas d’excès où il y a sang, ou playe ouverte, ou bature outrageuse, il est recevable de son office sans plaintif ou dénonciateur, pourvû qu’il y est en tous cas informations precedentes, après qu’avons remontré que led. article étoit trop obscur, a été led. aiticle accordé du consentemens desd. Trois-Etats en la forme & maniere qu’il est écrit aud. coutumier : c’est à sçavoir, en cas privilegié comme d’assurement &c.
Sur le trois cens trente-cinquiéme article audit chapitre des Crimes & Delits, contenant, nul valvasseur ayant seulement basse Justice , ne peut relâcher larron ni autre criminel sans le congé du Chef Seigneur ou son com- mandement , & s’il le relâchoit & pouvoit être prouvé , il perdroit sa Justice. Après qu’avons remontré ausdites gens des Trois-Etats que ledit article étoit trop rigou- reux, ont accordé ledit article être corrigé & modifié ainsi qu’il est écrit audit coutumier : c’est-à-sçavoir,
296Procès-Verbal.le bas & moyen Justicier s’ils ont un prisonnier dont ils ne doivent avoir connoissance, le doivent signifier à leur Su- perieur dedans vingt-quatre heures pour le venir querir, en payant les frais raisonnables; & si le Superieur est de- layant dedans deux jours après ladite notification faite, lesdits Seigneurs bas & moyen Justiciers ne sont plus tenus de la garde. Et l’on pourra-t-on avoir recours au Superieur dudit haut Justicier pour ledit refus.
Sur le trois cens quarantiéme art. audit chap. com- mençant , si aucun tient fausse mesure publiquement, ou use d’icelle, l’amende est arbitraire au Seigneur en la Ju- risdiction duquel ladite mesure fausse sera trouvée , ou en laquelle il en usera ; & si le Souverain previent, l’amen- de est sienne , & doit être la mesure arce & brulée publi- quement en la presence de celui qui la tenoit, a été modi- fié & corrigé du consentement desdits Trois-Etats comme ils s’ensuit, si aucun tient fausse mesure publique- ment ou use d’icelle, l’amende est arbitraire à Madame ès Châtellenies & Seigneuries de la Marche à elle apparte- nans , & aux autres esquelles elle a droit de mesures , mais ès Châtellenies & Seigneuries dependantes dudit Comté de la Marche, appartenantes aux vassaux ou ar- riere vassaux, elle est arbitraire au Seigneur en la Juris- diction duquel ladite mesure fausse sera trouvée.
Sur le trois cens quarante-quatriéme, audit chapitre de crimes, commençant, celui qui envoye gensdarmes ou mauvais garçons en la maison d’autrui pour le piller & ou- trager en sa personne ou biens, & en est convaincu, doit être déclaré avoir commis à son Seigneur la moitié de ses biens & heritages

de la redaction des Coutumes.297& heritages , & s’il y a meurtre , ou ravissement ou au- tre cas énorme commis par lesdits gens de guerre , il en doit repondre de sa personne ; a été accordé du consen- tement desdits Trois-Etats ; Celui qui envoye gens- darmes ou mauvais garçons en la maison d’autrui pour le piller & outrager en sa personne ou biens, & en est con- vaincu, doit être condamné en tous les dommages interêts soufferts & soutenus par celui ou ceux en la maison des- quels les gensdarmes ont été envoyez, & en amende en- vers le Seigneur & envers les parties interessées; & si par ledits gensdarmes y a meurtre ou autre crime public com- mis , celui qui les y aura envoyés comme dessus, en repon- dra de sa personne.
Sur le trois cens soixante-dixième article , audit chapitre des Executions, &c. commençant, le créancier peut faire saisir l’heritage à lui obligé & hipothequé, & les fruits dependans en icelui, & qui écheront pendant le procès de criées, soit contre le debteur ou son heritier dé- claré heritier, ou contre le tiers détenteur des heritages hipothequés : mais si le debteur ou son heritier veulent bailler caution suffisante de rendre les fruits ou le prix qui lui se- ront accensez par l’executeur pendant lesdites criées, ils seront reçûs à les recuëillir; aussi sera le tiers détenteur en baillant caution juratoire de ce faire , lesdites criées faites & parfaites & l’heritage adjugé au créancier , lesdits fruits ainsi saisis & arrêtez sont rabatus sur la dette & sur les frais & depens desdites criées; & procès au profit du debteur, si le créancier les peut recouvrer , & seront contraints ceux qui les auront reçûs par prise de leurs per-
298Procès-Verbal.sonnes comme gardiens de Justice, ont été accordés par lesdits Trois-Etats pour nouvelle coutume.
Sur le trois cens soixante-quatorziéme article , audit chapitre d’Executions , commençant , en Matieres de Criées , ont été ajouté du consentement desd. Trois- Etats ces mots, tant entre le proprietaire qui est adjourné pour voir adjuger le décret , que contre les opposans.
Sur le quatre cens quatriéme article, commençant, Faute de Biens, & 405 article, Esdis cas aud. chapitre des Executions ; ont été corigés & ajoutés ces mots, pour les amandes & deffauts procedans des matieres d’excés.

               
CONCLUSION DE L’OUVRAGE.

POur terminer cet ouvrage dans les mêmes dis- positions que je l’ai entrepris , je supplie les lecteurs d’y donner une attention favorable, & si mes Notes à l’egard de certains articles de la coutume ne se trouvent pas plus étenduës , mon motif en cette partié a été d’éviter de les trop charger , sur tout pour les matieres qui ne sont plus en usage , & pour le reglement certain dont nos Roys y ont pourvû par leurs Ordonnances : Mais par raport aux choses dont la pratique est plus ordinaire & journaliere en la Province , je me suis attaché à éclaircir le plus disertément & clairement qu’il a été possible le veritable sens de la coutume, & à en étayer les raisons sur les préjugés & usages certains actuellement reçûs
de la redaction des Coutumes.299qui en sont le fondement ; & si dans le reste de la vie qu’il plaira à la providence de me continuer, il se trouve quelques uns de nos chers Compatriotes , ou autres , ausquels il survienne quelques doutes ou diffi- cultés, & qu’ils croyent mon ministere utile pour les lever , je ne sçaurois avoir plus de plaisir que de l’employer, avec ce cœur & empressement qu’on me connoît pour le bien public & particulier, & meriter en tout la conservation de leur estime & bien- veillance.







300Edit du Roy ,           :       
EDIT DU ROY , PORTANT CRE’ATION & établissement en la Province de la Marche d’un Siége Présidial en la Ville de Gueret.
VERIFIE’ AU GRAND CONSEIL ET CHAMBRE des comptes les I6 May & 25 Septembre I635.
LOUIS, par la grace de Dieu, Roy de France & de Navarre ; à tous presens à venir : Salut , les Consuls , Habitans & Officiers de notre Ville de Gue- ret, nous ayant representé que la negligence & peu d’affection qu’ont apporté leurs predecesseurs au bien & soulagement des peuples de notre Province de la haute & basse Marche , lors de l’établissement des Présidiaux, est cause que lad. Province est demeu- rée jusqu’à present sans le benefice d’un Présidial, encore que par l’Edit de création desd. Présidiaux de l’an I55I , il fut dit qu’il seroit institué un Présidial en chacune Province qui le pourroit commodement porter : ce que pouvoit dès-lors supporter notre pro- vince de la Marche en lad. ville de Gueret, capitale d’icelle, si lesd. Consuls, Habitans & Officiers l’eussent demandé, ainsi qu’ils font de present, pour avoir toutes les marques d’une grande Province , vû son étenduë, & qu’elle a Gouverneur, Sénéchal de Robbe- courte, sa coutume particuliere dans ladite ville de Gueret, capitale de lad. Province, où il y a châtellenie, Vissenchaussée , Election en chef, Maîtrise des Eaux & Forêts, même Officialité & néanmoins , contre l’intention dud. Edit, elle est sans Présidial, ce qui est
portant création d'un Siége Présidial à Gueret.30Icause que nosd. Habitans souffrent journellement de grandes pertes, pour les frais & depenses qu’ils sont en la poursuite & sollicitationn de leurs affaires, dévolus par appels au Présidial de Moulins pour la Senéchaus- sée dudit Gueret, éloignée de plus de 25 lieuës : & de Poitiers, pour la Senéchaussée de Bourganeuf & & Châtellenies de la basse Marche de plus 40 lieuës, & de la Châtellenie de Bellegarde & Franc-alleu, au Présidial de Riom de 25 lieuës, si bien que ces grands frais sont cause de la ruine de partie desd. Habitans , pour lesquels soulager, voyant les grandes & immen- ses depenses qu’ils sont contraints de faire à cause de la distance des lieux où les appels resortissent, & qu’ils se consoment journellement en frais, excedant la valeur des choses contestées : dont nous ayant été fait plainte par lesd. Consuls, Habitans & Officiers de notredite ville de Gueret, & voulant aussi gratifier icelle. Sçavoir Faisons, qu’ayant mis cette affaire en deliberation en notre Conseil, où étoient aucuns Princes de notre sang, & autres notables Personnages de notredit Con- seil : de l’avis d’icelui & de notre certaine science, plaine puissance & autorité Royale, en consequence de notredit Edit : & voulant autant que faire se pourra soulager lesdits Consuls, Habitans & Officiers de notredite ville de Gueret, nous avons par le present Edit perpetuel & irrevocable, créé & établi, créons & établissons en ladite ville de Gueret, un Siége Présidial, qui sera composé des Officiers qui sont ja pourvus en la Senéchaussée de ladite ville ; Sçavoir du Lieu-
302Edit du Roy ,tenant General , du Lieutenant Criminel , du Lieu- tenant Particulier , Assesseur , des quatre Con- seillers , de nos Avocat & Procureur, d’Enquêteur , d’Adjoint , Substitut de notre Procureur , Greffier , Criminel & place de Clercs audit Greffe , de deux Huissiers, vingt Procureurs & deux Certificateurs : lesquels anciens Officiers ne seront tenus , à cause de l’érection dudit Siége Présidial , de prendre nou- velles lettres de provision, dont nous les avons dispen- sés , outre lesquels Officiers, nous y avons créé & éri- gé, créons & érigeons en titre d’Office formé , pour parfaire led. Siége Présidial, un Président, un Conseil- ler Clerc, cinq Conseillers Laiz, un Conseiller, Garde- scel, un second notre Avocat & Conseiller, 3 Receveurs & Payeurs, & 3 Controlleurs des gages desd. Officiers, un clerc d’audiance, un Receveur des espices, un Gref- fier de presentation hereditaire, un Greffier du Présidial d’appeaux hereditaire, deux places de Clercs hereditaires six Procureurs postulans aussi hereditaires, & deux Huis- siers audienciers, avec pouvoir & faculté ausd. Huissiers d’exploiter par tout notre Royaume, païs, terres & seig- neuries de notre obeïssance, les sentences & jugemens dud. Présidial, ensemble tous arrêts, jugemens & autres actes de justice qui leur seront delivrez & mis és mains, excepté le scellé du Châtellet de Paris, pour par tous les Officiers de judicature, connoitre, juger & decider en dernier ressort des matieres civiles & criminelles de lad. ville de Gueret, & des Senéchaussées, Bailliages, Châtellenies, & autres justices & lieux ressortissans qui
portant création d'un Siége Présidial à Gueret.303seront ci-après declarés , pour les cas Présidiaux seulement ; & afin que lesd. Officiers presentement créés, ayent moyen de s’entretenir ausd. charges avec honneur, Nous leur avons attribué & attribuons par chacun an les gages qui en suivent : Sçavoir aud. Pré- sident, six cens livres : au Conseiller Clerc, deux cens livres : aux cinq Conseillers Laiz, chacun deux cens livres : au Conseiller Garde-scel , trois cens livres ; au second notre Avocat & Conseiller , pareille somme de trois cens livres : aux Receveurs & Payeurs desd. gages, chacun deux cens livres : aux trois Controlleurs, cha- cun cent livres : aux Clercs d’audiance, cent livres : au Receveur des espices dudit Présidial, deux cens livres, & deux sols pour livre desdites espices, & aux deux Huissiers audienciers , chacun trente livres : & d’au- tant que nosd. Officiers ja pourvus en lad. Senéchaussée de Gueret, ci-devant nommez, jouïront du benefice dud. Présidial, Nous leurs avons par celui notredit Edit, augmenté leurs gages : sçavoir aud. Lieutenant General , outre & par dessus ses anciens gages , de la somme de cent cinquante livres : aux Lieutenans Cri- minel & Particulier, chacun cent livres : à l’Assesseur, cinquante livres : aux quatre Conseillers, chacun cent livres, à nos Avocat & Procureur , aussi chacun cent livres. Tous lesquels gages & augmentations revenans ensemble à la somme de 4660 livres, nous voulons être imposez & levez par chacun an sur led. païs de la haute & basse Marche, reçus par les Receveurs des Tailles, & par eux mises és mains desd. Receveurs &
304Edit du Roy ,Payeurs pour les payer ausd. Officiers sur leurs simples quittances, de quartier en quar. en la maniere accoûtu- mée : & à cette fin ils seront employez par chacun an en nos états ; pour être dès à present par nous pourvû à tous lesd. Officiers nouvellement créez , de personnes suf- fisantes & capables , & ci-après , quand vacation y échera , par mort , forfaiture , resignation ou autre- ment ; & en jouïr par les pourvus, aux mêmes hoñeurs, autoritez , prerogatives, préeminences , franchises, libertez, gages susd. pouvoirs, profits, revenus, émo- lumens, espices & droits tels & semblables qu’en jouïs- sent les Officiers de même qualité, des autres Bailliages, Senéchaussées & Siéges Présidiaux, qui leur auroient été attribuez tant par leur établissement, que par Edits, Declarations & Reglemens sur ce faits , encore qu’ils ne soyent cy particulierement exprimez ; en payant toutefois tant par les susd. anciens Officiers de lad. Se- néchaussée , que par ceux qui leveront en nos Parties casuelles ceux créez par le present Edit , les sommes ausquelles il seront moderement taxés par les Rolles qui en seront arrêtez en notre Conseil , & d’autant qu’au moyen de l’augmentation du nombre d’Officiers, il est necessaire d’augmenter la jurisdiction dudit Siége Présidial en notre ville de Gueret , pour le soulage- ment de nos peuples. Voulons & nous plait que ledit Siége Présidial soit composé des Senéchaussées, Vi- comté, Bailliages , Vissenéchaussées , Châtellenies & Justices de Gueret, Bourganeuf, Dorat, Bellat, Bel- legarde & Franc-alleu, & de toutes les autres Justices de

portant création d'un Siége Présidial à Gueret.305de ladite Province de la haute & basse Marche , pour n’être toutes lesd. Senéchaussées, Vicomté, Bailliages, Châtellenies & autres Justices ci-dessus , éloignées que de sept, huit & dix lieuës au plus de lad. ville de Gueret ; & desd. Présidiaux de Moulins, Poitiers & Riom, de vingt-cinq, trente & quarãte lieuës au moins ; ce qui étoit à la foule & incommodité de nosd. sujets. Toutes lesquelles Senéchaussées, Bailliages, Vicomté, Vissenéchausée, Châtellenies & Justices subalternes, nous avons distraites , separées & eclipsées des susdits Bailliages & Siéges Présidiaux de Moulins , Poitiers & Riom, ausquelles elles ressortissoient par appels : pour doresnavant & à toujours , demeurer & ressortir aud. Siége Présidial de Gueret , où nous voulons que tous nos Sujets des lieux susdits, soient Ecclesiastiques , Gentil-hommes ou autres , ayent à se pourvoir pour toutes causes, matieres civiles que criminelles, en pre- miere instance ou par appel , ainsi qu’il est accoûtu- mé faire és autres Bailliages, Senéchaussées, Châtelle- nies & Siéges Présidiaux de ce Royaume ; sans que nos Juges & Officiers desd. Bailliages & Siéges Présidiaux de Moulins , Poitiers , Riom & autres , puissent ci- après prendre aucune connoissance , cour ni jurisdic- tion de toutes les causes & matieres susd. attribuées audit Siége présidial de Gueret : ce que nous leurs dé- fendons très-expressement, & à nos Sujets desd. lieux, de subir Jurisdiction ailleurs qu’audit Gueret, sur peine de nullité, & d’en répondre en leur propre & privé nom.
Si donnons en mandement à nos amés & féaux les
306Edit du Roy ,Gens tenans notre grand Conseil, Chambre des Com- ptes, Présidens, Tresoriers Generaux de France , que les presentes ils facent lire , publier & enregistrer, & le contenu en icelles garder & observer inviolable- ment, de point en point, selon leur norme & teneur ; cessant & faisant cesser tous troubles & empéchemens au contraire , nonobstant oppositions ou appellations quelconques , dont si aucunes interviennent , nous nous en reservons la connoissance & à notredit Con- seil , & icelle interdisons & défendons à toutes nos Cours & autres Juges. Car tel est notre plaisir, nonobs- tant tous Edits , Ordonnances , Arrêts , Reglemens , Défenses , Lettres & choses à ce contraires, ausquelles & aux dérogatoires des dérogatoires y contenües, nous avons expressement dérogé & dérogons par cesdites presentes , & afin qu’elles soient fermes & stables à toujours, nous y avons fait mettre & apposer notre Scel. DONNE´ à Paris au mois de Janvier, l’an de grace I635. & de notre regne le 25. Signé , LOUIS, à côté visa : & plus bas , par le Roy , DE LOMENIE , & scellées du grand sceau de cire verte sur lacs de soye rouge & verte , & encore est écrit.
Enregistré és Registres du Grand Conseil du Roy, suivant & aux char- ges portées par l’Arrêt donné en icelui. A Paris le 20 Septembre I635.
Signé , COLLIER.
Lû , publié & registré en la Chambre des Comptes , oüi le Procureur General du Roy, par le commandement de Sa Majesté, porté par Mr. le comte de Soissons, Grand Maître de France, Gouverneur & Lieutenant General pour le Roy en Dauphiné, venu exprès en ladite Chambre , assis- té du Sr. Duc de Montbazon , & de Sieurs de Leon & d’Ormesson, Conseillers de sadite Majesté en ses Conseils d’Etat & Privé le I6 jour de May I635. Signé , BOURLON.

portant création d'un Siége Présidial à Gueret.307
EXTRAIT DES REGISTRES DU GRAND
Conseil du Roy.
SUr la requête presentée au Conseil le 9 Août I635. par le Procureur-Général du Roy , tendante afin que les lettres d’érection des Sieges Présidiaux de Gue- ret & Millau, & erection d’Officiers pour lesd. Sieges, foient lûës, publiées & enregistrées és Registres dud. Conseil, gardez & observez selon leur forme & teneur. Vû par ledit Conseil ladite requête, lesdites Lettres d’érection desdits Sieges, des mois de Janvier & Mars I635 , pour être verifiées nonobstant oppositions ou appellations quelconques, desquelles le Roy se seroit reservé la connoissance : Arrêt du Privé Conseil du Roy I4 Août audit an , par lequel auroit été ordonné , qu’il seroit passé outre à la verification desd. Lettres , & érection des Sieges Présidiaux en la ville de Gueret, & en la ville de Rodez , en laquelle ledit Siege Pré- sidial destiné à Millau auroit été transferé, nonobs- tant les oppositions formées à ladite verification , desquelles le Roy auroit retenu la connoissance , & icelle évoquée en son Conseil : Arrêt du Conseil du 4 Septembre audit an , par lequel auroit été ordonné qu’il seroit procedé à la verification & enregistrement desdites Lettres ; après que lesdites oppositions auroient été jugées au Conseil du Roy ; Autre Arrêt dud. Privé Conseil du 4 Septembre audit an , par lequel tous lesd. opposans auroient été deboutez de leurs oppositions,
308Edit du Roy, port. créat. d'un Siége Présid. à Gueret.ordonné que lesd. Edits seroient registrez purement & simplement , sauf à faire droit ausdits opposans sur le dédommagement qui pourra être par eux pretendu, ainsi que de raison ; duquel le Roy se seroit reservé la connoissance & à sondit Conseil : Lettres de transac- tion dud. Siege Présidial de Millau , & érection dudit Siege Présidial en la ville de Rodez, du mois de Juilliet I635, conclusion du Procureur-Général du Roy : Le Conseil a ordonné & ordonne, que lesdites Lettres d’é- rection & création desd. Sieges Présidiaux esdites villes de Gueret & Rodez, & les Officiers pour exercer la Justice esdits Sieges , seront enregistrées és Registres dudit Conseil , gardées & observées selon leur forme & teneur, à la charge que les pourvus des Offices desd. Sieges Présidiaux seront reçûs, & prêteront le serment au Conseil ; & que les differens qui surviendront pour la fonction des Charges desdits Officiers, ne pourront être traitez ailleurs qu’audit Conseil. Ce present Ar- rêt a été mis au Greffe dudit Conseil, montré au Pro- cureur-Général du Roy , & prononcé à Paris le vingt Septembre I635. Signé, COLLIER.
EXTRAIT DES REGISTRES DU CONSEIL D’ETAT.
LE ROY desirant gratifier les Officiers nouvellement pourvus des Offi- ces créez par son Edit du mois de Janvier dernier , portant création d’un Siege Présidial en la ville de Gueret ; a ordonné & ordonne , que les pourvus desdits nouveaux Offices créez par le susdit Edit, jouiront de la dispense des quarante jours, & que les resignations qu’ils feront de leursd. Offices , seront admises sans payer aucune finance pendant deux années , après lesquelles ils serone reçus à payer le droit Annuel , sans qu’ils soient tenus du quart & cinquiéme denier porté par Lettres de De- claration du 27 Janvier I630. Fait au Conseil d’Etat du Roy , tenu à Paris le dernier jour de Mars I635. Signé, BORDIER.
Collationné aux Originaux par moi Conseiller Secretaire du Roy & de ses Finances.

SUPPLEMENT
AU NOUVEAU COMMENTAIRE
DE LA COUTUME
DE LA COMTÉ PAIRIE
DE LA MARCHE,

PAR MR. COUTURIER DE FOURNOUË, ECUYER, Conseiller, Secretaire du Roy, Maison-Couronne de France, & ancien Procureur du Roy au Présidial & Sénéchaussée de la Marche , auteur du nouveau Commentaire, édition de I744, imprimé à Clermont- Ferrand , chez Viallanes, avec Privilege du Roy.



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A CLERMONT-FERRAND,

Chez PIERRE VIALLANES, Imprimeur-Libraire,
près les RR. PP. Jesuites.

M. D C C. X L V I I I. AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY
< Décor avec blasonnement floral de la famille Couturier de Fournouë; écu: D’Azur, au chevron d’or, surmonté d’une étoile de même, accompagné de 3 branches de lauriers d’or, posées 2 en chef, l’autre à la pointe de l’écu; au chef de gueules, soutenu d’un divisé d’or, une croisette de même posée au canton gauche. Support: 2 lions, I couronne.>
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P R É F A C E

E Supplément a paru absolument necessaire, & j’ai été sollicité de le donner au Public , au sujet d’une autre édition de la même Cou- tume de la Marche faite par le sieur de Nully Libraire à Paris , en la même année I744, qui est une nouvelle édition de celle donnée en I695 , par Me. Barthelemi Jabely, ancien Avocat au Parlement ; revuë, corrigée & conferée avec la Coutume de Paris , avec de nouvelles observations ; par Me. Germain-An- toine Guyot , Avocat au Parlement , où on a remarqué que le Privilege pour l’impression de ce livre est du I5 Fevrier I743 , ainsi cette nouvelle édition n’a pas été promptement executée , puisqu’elle n’a paru que près de dix-huit mois après l’obtention du Privilege accordé au sieur de Nully.
Il est à croire que le motif de cette seconde édition de Jabely a été que les exemplaires des precedentes éditions de la Coutume de la Marche étant devenuës rares , & 
ivP R E F A C E.même celle du Coutumier général étant chargée de fautes assez considerables , on pouvoit se promettre un avan- tage de cette nouvelle édition de Jabely.
Mais il est surprenant qu’on n’aye pas fait attention , que pour parvenir à cette fin d’une façon utile , il auroit falu s’en tenir à réimprimer uniquement les Textes des Articles de la Coutume, les Lettres Patentes , le Procès-Verbal , & autres Actes Publics , concernant seu- lement l’authenticité , & en suprimer les notes & obser- vations de Me. Jabely , d’autant qu’il est de notorieté publique, que depuis l’année I695, que son édition premiere a paru, tous les Officiers , Avocats & Praticiens de la Province de la Marche, ont été saisis & pénétrés du grand nombre d’erreurs, fausses idées & mauvaises citations & applications répanduës dans les notes & ob- servations de Me. Jabely, en sorte que chacun s’est réduit dans la Province à ne faire usage des exemplaires de cette édition de Me. Jabely, que par rapport aux Textes des Articles , quoiqu’il y en ait encore, comme on l’ob- servera ci-après, qui contiennent des fautes de consequence.
Mais la nouvelle édition dont il s’agit n’est qu’une copie , mot à mot , des notes & observations de Me. Ja- bely où sont & restent les mêmes dictions & erreurs par lui faites dans toute leur étenduë.
Il est vrai que dans le Titre de cette nouvelle édition on y a marqué qu’elle a été revuë & corrigée , mais il y a lieu de penser que ce sont des termes purement de stile employez de la part de l’Imprimeur plutôt qu’une réalité de correction , puisque les nouvelles notes marquées par
P R E F A C E.vune * & renfermées par un [] , sont très courtes , & roulent sur une comparaison de certaines dispositions de la Coutume de la Marche à celle de Paris : on respecte infiniment la doctrine & force de solidité de celle-ci, mais on doit convenir du principe, que les Coutumes ne font Loi que dans leurs territoires , & doivent s’y borner ; enfin quant au surplus du Commentaire de Me. Jabely le silence qu’on a gardé sur les erreurs sensibles qui s’y trouvent, est une marque, que ou on n’a pas voulu se donner la peine de les penetrer, ou que l’on les a passées pour la ma- jeure partie sans les connoître faute d’instructions justes & suffisantes des usages de la Province , par le secours des- quels & par les differentes discutions qui ont été agitées sur les Textes & termes de la Coutume, & sur divers préjugez , on s’est porté à les entendre & pratiquer dans l’esprit que Messieurs les Commissaires Redacteurs ont voulu & estimé à propos de les admettre.
C’est dans cet êtat , qu’ayant êtè excité de faire usage de plusieurs memoires recueillis avec grand soin & fide- lité par feu mon Pere & moi , & une experience suivie depuis un siecle : j’ai donné au public une édition nouvelle de la même Coutume de la Marche , imprimée chez Vial- lanes à Clermont en I744.
Il est certain & de bonne foi que lors que j’eus l’honneur de faire presenter mon ouvrage à M. le Chancelier à l’effet d’obtenir le Privilege , j’ignorois absolument l’entreprise de la nouvelle édition donnèe par le sieur de Nully, & outre que le fait est positif, cela paroît par la preface de mon Commentaire qui roule principalement sur la necessité
viP R E F A C E.& utilité d’une nouvelle édition de la Coutume , pour re- parer les défauts essentiels des cinq precedentes éditions qui en avoient été faites , l’une par Chaudiere en I526 , l’autre par Caillet en I573 , l’autre dans le Coutumier general en I604 , l’autre par Vernoy , à Moulins en I6I8, & enfin celle de Me. Jabely en I695, & il n’est fait dans cette preface aucune mention de la seconde édi- tion du sieur de Nully , dont en effet il est bien certain que je n’avois alors aucune connoissance.
Mais comme les personnes qui ont pu se pourvoir de quelqu’un des exemplaires de cette seconde édition de Me. Jabely , & celles qui en ont deja de la premiere ont mar- qué desirer avec empressement , que outre les remarques faites à ce sujet en mon Commentaire , je voulus bien y ajouter quelques additions qui ont paru de consequence, pour servir à relever les mêmes erreurs ou incongruitez de Me. Jabely, laissées dans cette seconde édition, attendu le besoin & l’importance d’en éviter l’ècueil ; on va y satisfaire par des Notes sommaires , en forme de supple- ment , & c’est là l’objet du present ouvrage.
Il ne s’agit point ici des notes faites par Me. Guyot , Avocat en la Cour , à l’ègard desquelles je declare que j’entends conserver avec plaisir tous les sentimens de con- sideration & d’estime dûs à la personne de Me. Guyot & à sa reputation.
On croit d’abord que c’est à tort que Me. Jabely dans le titre de son Commentaire annonce qu’il a formé ses notes sur les meilleurs Auteurs & les Arrêts intervenus , puis- que d’une part les Auteurs citez sont très-anciens & assez
P R E F A C E.vijhors d’usage pour les matieres presentes des Coutumes ; & que de l’autre, il est connu que Me. Jabely a trop hazar- dé sur des citations d’arrêts , & n’a agi à cet égard que sur des notions non-seulement incertaines, mais encore differentes des especes qu’on a sur les lieux ; dès-lors on doit juger de la consequence essentielle qu’il y a de se tenir en garde sur l’allegation de pareil pretendus preju- gez , avec un Auteur qui hazarde sans scrupule pareilles citations, & sans une assurance même morale des faits.
Me. Jabely dans sa preface cherche dès l’introduction à captiver la bienveillance du lecteur , qu’il qualifie son ami , & il hazarde un fait par lui imaginé , en disant que plusieurs personnes de la Province de la Marche , in- telligentes dans leur Coutume , ont écrit dessus, terme gracieux & intelligible, si on suppose que la Coutume a servi de pupitre pour écrire ; mais soit dessus ou a côté de la Coutume , il n’avoit paru aucune production de cette espece dès l’édition de Moulins faite en I6I8, & il ajoute qu’il n’y a eu que le seul Caillet, qui aye , dit-il , laissé quelque chose , autre terme singulier, mais il se contredit à l’instant , en citant Me. Dumoulin , qui en effet , a fait des notes excellentes sur l’édition de I6I8 , & ces notes sont d’autant plus sures que Me. Dumoulin s’étant trans- porté deux fois , comme il le marque, en la Ville de Gueret, dans les années I562 & I564, il y vit & examina le livre de la Coutume de le Marche , deposé par Messieurs les Commissaires , ès mains de Me. Etienne Lemoine , Greffier de la Senechaussée, ainsi le temoigna- ge de cet Auteur illustre , ne peut souffir aucune replique.
I
< Décor >

SUPPLEMENT
AU NOUVEAU COMMENTAIRE
DE LA COUTUME
DE LA COMTÉ PAIRIE
DE LA MARCHE,

CHAPITRE PREMIER
Des Juges & Jurisdictions.
L n’y a rien de considerable dans ce titre que la disposition de l’article II , touchant la prétenduë puissance pater- nelle admise par Me. Jabely , & tolerée en sa nouvelle édition , mais comme il me semble que j’ai assés au long traité cette question dans mon commentaire sur cet article , & qu’on y a relevé authentiquement les erreurs de Me. Jabely , 
2Supplement au nouveau Commentaireil convient d’y renvoyer , & ne point ici employer une inutile repetition.
ARTICLE 84.
ON trouve en la page 43 de la nouvelle édition de Me. Jabely deux erreurs considerables.
La premiere en ce qu’il dit, que l’usufruit du Pere est établi sur sa puissance paternelle ; & il se contre- dit aussi-tôt en admettant qu’il perd cet usufruit à défaut de faire inventaire s’il se remarie : car si la puissance paternelle étoit de droit est-ce que le Pere en pourroit perdre l’effet en un pareil cas ? d’ailleurs n’est-il pas sensible que l’usufruit accordé au Pere dont il est parlé en cet article est restraint à sa qualité d’administrateur, & par consequent ne dure que pen- dant le temps de l’administration qui cesse par la majorité des enfans ?
La seconde erreur est d’avoir ajouté que le Pere perd cet usufruit pour toujours, car I°. l’obligation de faire inventaire n’est établie qu’en faveur des en- fans , & ceux-ci venant à mourir elle n’est plus re- gardée comme une peine des secondes nôces, & les choses reviennent à cet égard au droit commun  ; & 2°. l’article 224 de notre Coutume deffere purement & simplement au Pere sa vie durant l’usufruit des biens de ses enfans decedés avant lui sans condition ni restriction.

de la Coutume de la Marche.3ARTICLE 89.
L’Arrêt du premier Mars cité par Me. Jabely con- cernant le sieur Simonneau , est tout à fait con- traire à l’induction qu’il en a voulu tirer , & ce qui le fait connoître demonstrativement , est que l’es- pece sur laquelle cet Arrêt a été rendu est très-connuë sur les lieux, & se trouve bien differente de la notion qu’en avoit Me. Jabely ; elle a été fidellement rap- portée dans mon Commentaire sur cet article , où il est établi la necessité d’un titre avec la possession & les préjugés conformes par deux Arrêts rendus entre des Habitans de la Marche, des années I664 & I67I , & enfin l’authorité même de notre Coutume en l’article 360, qui porte formellement ,, que droit ,, de pâturage dans les heritages d’autrui n’en peut ac- ,, querir la propriété par la possession , si non qu’elle ,, fut de trente ans après un temps de contradiction ,, valable , ce qui est bien different du cas dont il s’agit.
Et on doit sentir à ce sujet la grande consequence qu’il y a de bien verifier les citations des Auteurs avant d’y donner sa confiance ; car Me. Guyot nou- vel éditeur , en improuvant avec raison , l’opinion de Jabely sur la prescriptibilité par lui admise mal à propos des Cens & des Directes , s’est laisser aller à penser qu’elle pouvoit avoir lieu par rapport aux Servitudes Rurales, sur le fondement de l’Arrêt de Simmonneau de I637 , dont il a crû l’espece juste & fidelle, tandis qu’il est sensible & certain que cet Arrêt a jugé le contraire.

4Supplement au nouveau CommentaireARTICLE 98.
ON ne croit pas devoir admettre l’opinion de Me. Jabely , que la compensation des depens ou dommages interêts adjugés & non encore taxés , puisse être valablement proposée en notre Coutume, d’autant que la disposition du present Article est de Droit étroit , elle n’admet de compensation que de liquide à liquide , on ne peut forcer ces termes, & on ne doit pas dire qu’une créance soit liquide aussi- tôt qu’elle n’a pas de prix certain ni déterminé.
ARTICLE 99.
CEt Article concerne la réconvention , & Me. Jabely a chargé cet Article de quelques obser- vations , & même d’une opinion contraire sur la difference du Haut Justicier , d’avec le moyen ou ou bas Justicier , mais tout cela devient inutile , par un fait certain & public ; qui est, qu’il n’y a en la Marche aucun moyen ou bas Justicier, & que toutes les Justices des Seigneurs comprennent ensemble & individûement la Haute, Moyenne & Basse Justice.
ARTICLE II2.
IL y a sur cet Article une note de Me. Jabely , qui dit qu’on peut stipuler un réméré d’un heritage vendu par un contrat de vente, par un acte separé du contrat, pourvu qu’il soit passé à l’instant & avant
de la Coutume de la Marche.5que les parties ad alios actus transeant ; on peut ad- mettre absolument cet avis à raison de ce mot à l’instant , qui signifie l’acte separé être du même jour.
Mais il faut, & il est essentiel, que cette faculté de réméré soit stipulée entre le vendeur & l’acquereur par un acte fait devant Notaire & authentique , afin d’éviter & prevenir la fraude qui pourroit se prati- quer en un acte sous signature privée.
ARTICLE II8.
La disposition de cet Article est précise en ma- tiere de vente de fruits pour dix ans & au dessus, & en ce cas la Coutume veut qu’une pareille vente donne lieu au retrait lignager ou droit de Prelation, & au droit de Lots & Ventes dans les lieux où elles sont dûës. Me Jabely a admis cette disposition, même pour un Bail à vie d’un heritage en faveur du preneur ; & le nouvel Editeur réprouve cette opinion , & allegue des raisons contraires à celles de Me. Jabely.
Mais on estime qu’en entrant dans le texte précis de la Coutume, on ne doit pas adopter l’opinion de l’un ni de l’autre pour un Bail à vie , dont en effet le temps est incertain , ainsi dans cette circonstance d’un Bail à vie , ni le Retrait Lignager ni la Prela- tion , & les Droits de Lots & Ventes ne peuvent s’exercer à l’instant du contrat quoique revêtu des formalités requises , il faut attendre que le preneur
6Supplement au nouveau Commentaireaye exercé une jouissance libre pendant dix ans en- tiers & révolus, après quoi , soit le Seigneur , soit le Lignager, pourront faire valoir leurs droits, c’est là notre usage dans le sens & l’esprit de cet Article, auquel il paroît convenable de se tenir.
ARTICLE I26.
IL paroît extraordinaire que le nouvel Editeur de Me. Jabely ne se soit pas recrié sur une opinion de celui-ci sur cet Article : il dit qu’en matiere de Rente solidaire dûë & reconnuë par divers Tenan- tiers sur heritages certains, si le Seigneur acquiert quelque partie des heritages, il doit defalquer sur la Rente & Devoirs solidaires à lui dûs , la portion dont l’heritage par lui acquis doit être tenuë , cela est juste & dans l’usage, il doit en pareil cas être pro- cedé par des Experts raisonnables à un également de la Rente entre le Seigneur & les Tenantiers , afin de fixer cette portion de Rente dont le Seigneur est tenu de souffrir la diminution, voilà la regle ; mais Me. Jabely ajoute fecus , si l’heritage étoit advenu au Seigneur faute de payement de ses Devoirs , ou par Commise , attendu que ce seroit alors la faute de l’Homme conditionné.
Mais cette opinion est reprehensible & non fon- dée dès-lors qu’on fera attention que c’est un princi- pe en la Marche que les Rentes & Devoirs n’affectent que les heritages sur lesquels ils sont établis & non les personnes , ainsi lorsqu’un heritage sujet à une Rente
de la Coutume de la Marche.7change de proprietaire, il emporte sa charge avec lui res transit cum onere , & quoique dans le cas d’une Commise ou adjudication de l’heritage du Tenancier au profit du Seigneur ; celui-ci consolide le domaine utile avec le domaine direct , quelle peut être la raison de Droit de Justice de le dispenser de souffrir en sa personne une diminution de la portion de Rente dont cet heritage à lui advenu étoit tenu ? & y auroit-il de la justice de faire refluer & supporter cette portion par les autres Tenantiers solidaires de la Rente ? car en remontant à l’obligation primitive des Tenantiers, qui est la reconnoissance par eux faite au Terrier du Seigneur , ils y ont dénommé specifi- quement tous les heritages sur lesquels la Rente a été assise & établie in solidum, & sans division en ont affecté pour le payement les fruits & revenus desd. heritages qui sont en effet un gage privilegié aux Seigneurs ; mais aussi-tôt que celui-ci opere en sa faveur , une distraction de la propriété & revenus d’une partie desdits heritages, soit par acquisition ou adjudication, peut-il se dispenser de supporter une diminution de la Rente & Devoirs au prorata, & de la faire fixer par un également en la forme ci-dessus declarée ?
On a crû necessaire de s’élever ici contre l’opinion de Me. Jabely pour éviter que quelque Seigneur ne s’y laissât induire en erreur, sous une mauvaise ga- rantie contre cet auteur.

8Supplement au nouveau CommentaireARTICLE I28.
PAr mon Commentaire sur cet Article, qui con- cerne le droit d’un Seigneur de Fief d’imposer sur ses sujets une taille au quatre cas ; je me suis assez disertement expliqué sur l’usage & les façons de l’entendre & le pratiquer , & j’y ai relevé une erreur énorme de Me. Jabely , qui de son chef & par une suite d’idées bizarres , a admis un cinquiéme cas à la Coutume, en voulant authoriser le Seigneur a impo- ser cette Taille dans le cas que sa fille se fait Reli- gieuse , puisque la Coutume parle du Mariage de la Fille du Seigneur en premieres nôces , le texte est précis, & ce mots , en premieres nôces, peuvent-ils convenir à une Fille qui se fait Religieuse.
En effet il n’y a point eu d’exemples dans la Pro- vince qu’aucun Seigneur ait osé introduire & mettre en œuvre cette idée dès l’année I695 , que l’ouvra- ge de Me. Jabely a paru.
Au surplus pourquoi Me. Jabely dans sa note sur les mots, sa Fille, s’avise t-il de son chef de dire que c’est la Fille aînée, & dès-lors il exclud le Seigneur d’user de son droit pour une Fille cadete, ce qui est une erreur sensible. On convient que le Seigneur ne peut appliquer le cas qu’une seule fois, pour le Mariage de sa Fille ; mais la Coutume ne se borne pas à la Fille aînée à l’exclusion d’une cadette , s’il n’a pas usé de ce droit pour une Fille aînée.

de la Coutume de la Marche.9Par exemple, le Seigneur a deux Filles , il marie l’aînée & l’instituë par le contrat de son mariage simplement son heritiere des biens de sa succession, se reservant de constituer une dot à la Fille cadette ainsi qu’il avisera ; il marie quelque temps après cette cadette & lui constituë une dot convenable ; qu’est-ce qui empêche le Seigneur d’imposer une Taille sur ces cas sur ses sujets , à raison de ce ma- riage, suivant l’esprit de la Coutume ; qui est de lui accorder une espece de dédommagement de la char- ge de cette dot, pourvu qu’il n’en use qu’une seule fois ? c’est donc une liberté réprehensible que Me. Jabely s’est donné de borner l’application du droit du Seigneur à une Fille aînée.
Mais il est encore necessaire de faire attention sur deux autres erreurs du même Me. Jabely sur cet ar- ticle ; il dit qu’il faut que le Seigneur impose la Taille avant le mariage de sa Fille , & qu’il n’est plus à temps de le faire après le mariage ; cette opinion déraison- nable est absolument contre l’usage de la Province ; en effet multa proponuntur quæ non adimplentur ; & si si le Seigneur étoit authorisé à imposer & lever tout de suite la Taille sur ses sujets à l’occasion d’un ma- riage proposé de sa Fille , & que ce mariage vint à ne pas s’accomplir , il se trouveroit avoir tiré un benefice d’une chose dont il n’auroit pas supporté la charge ; en un mot, l’esprit de la Coutume est ab- solument contraire, & il n’y a point d’exemple qu’un Seigneur se soit avisé de faire un Rôle de la Taille,
I0Supplement au nouveau Commentaire& de le presenter au Juge pour le rendre exécutoire par son Ordonnance , qu’après le mariage de sa Fille est fait & accompli selon les formalitez ordinaires.
L’autre erreur est d’avancer que le Seigneur n’est pas en droit d’imposer la Taille quand il est fait Chevalier, qui est un des quatre cas de la Coutume, à moins, dit Me. Jabely, que ce ne fut de l’ordre de l’Accolade, qui est cependant un ordre proscrit & hors d’usage, & il rebute de son autorité l’ordre du Saint-Esprit, tandis quil ne pouvoit ignorer que feu M. le Marêchal Duc de la Feuillade ayant été fait par le Roy , il y a quelques années Chevalier de l’ordre du Saint-Esprit , il imposa une Taille sur les sujets de ses terres en la Province de la Marche , & que cette Taille fut authorisée & payée sans aucune contra- diction.
ARTICLE I42.
L’Espece de l’Arrêt de I693, rendu entre le sieur Tournyol & Gilberte Clotrier, cité par Me. Ja- bely sur cet article, est un peu differente de ce qu’il avance, ainsi que je l’ai fait voir dans mon Commentaire sur cet article.
ARTICLE I46.
LE Commentaire de Me. Jabely sur l’Article est trop long pour qu’il ne contienne pas differentes erreurs , & en effet on y remarque trois prin- cipales.

de la Coutume de la Marche.IILa premiere est, est que comme la Coutume deffend à l’Homme serf de vendre & aliener l’heritage serf sans le congé ou consentement du Seigneur , & veut en ce cas, que ce qu’il a aliené, soit déclaré acquis au Seigneur ; il faut necessairement une Sentence en Justice , qui declare l’heritage aliené acquis au Seig- neur , au lieu que Me. Jabely en son Commentaire admet le Seigneur à entrer de plein droit en posses- sion de l’heritage serf aliené, sans qu’il soit besoin , dit-il d’appeller le vendeur ni l’acheteur ; ce qui n’est pas raisonnable , attendu qu’on ne peut priver ceux-ci des moyens valables, si aucuns ils ont à pro- poser pour authoriser la vente , & qu’enfin dans l’es- pece de cet article, il est d’usage dans la Province qu’il faut que le Seigneur obtienne une Senten- ce, qui dans le cas d’une Commise legitime la de- clare valablement acquise au profit du Seigneur.
La seconde erreur est de soutenir qu’un créancier d’un Homme serf ne peut faire saisir réellement l’he- ritage serf & en poursuivre la vente par decret & ad- judication en Justice , car l’usage certain & actuel de la Province est contraire à cette opinion, autre- ment les Hommes serfs seroient sans le moindre crédit dans le commerce ordinaire ; Il est cependant vrai dans ce cas , que si l’homme serf possedoit des heritages en franche condition soit du même Seig- neur ou d’un autre , le Seigneur de l’heritage serf pourroit valablement s’opposer à la saisie réelle du bien serf , & soutenir que le créancier doit préala-
I2Supplement au nouveau Commentaireblement faire une discussion du bien franc & des meubles & effets appartenans à l’Homme serf debi- teur ; car si par le moyen de cette discussion le créan- cier pouvoit être payé de sa dette , il n’auroit plus d’interêt à se venger sur le bien serf, & le Seigneur dans cette circonstance seroit recevable à demander la main-levée de la saisie-réelle du bien serf ; mais hors ce cas , elle doit avoir lieu , d’autant que l’usa- ge de la Province impose à un acquereur par decret d’un bien serf , l’obligation de payer au Seigneur le tiers deniers du prix par forme de dédommagement de la vente & de la mutation du proprietaire, outre le droit de Prélation qui est encore en pareil cas ouvert au profit du Seigneur.
La troisiéme erreur de Me. Jabely est de dire que le Seigneur perd sa directe par les mauvais traite- mens qu’il feroit au conditionné qui demeurera, dit-il ; lui & son heritage affranchi de tout droit de servitu- de , ce sont ses propres termes ; voilà encore une des idées bizarres de Me. Jabely ; mais il cite à faux q’il y aye quelque exemple de la chose dans la Province, puisqu’on est bien informé du contraire ; & en effet , si pour de simples mauvais traitemens tels que quelques coups de bâtons ou boutades , assez ordinairement en usage aux Gentils-hommes ou prin- cipaux Bourgeois de campagne envers leurs Hommes serfs, qu’on traite souvent comme des especes de do- mestiques, ceux-ci se trouvoient authorisez à secouer le joug de la servitude, le cas seroit fréquent & il seroit
de la Coutume de la Marche.I3dangereux d’introduire une pareille Jurisprudence sur le sentiment particulier d’un auteur aussi combatu dans les faits que dans le droit que l’est celui-ci.
ARTICLE I48.
Me. Jabely en son Commentaire cherchant à sub- tiliser à son ordinaire , dit que si l’Homme mortail- lable donne son heritage en payement à Homme de même condition & Seigneurie, il n’est dû aucuns droits au Seigneur ; mais cette idée est contre l’es- prit & le texte de cet article , & d’ailleurs contre la maxime de droit , qui veut que , datio in solutum est emptio & venditio, & il suffit qu’il y ait translation de proprieté d’une Homme à l’autre ; enfin cette opinion pourroit donner une ouverture à des fraudes, d’autant plus qu’un Homme mortaillable se voyant sans enfans ou parens communs, & son heritage devant advenir au Seigneur par droit successif, pourroit le faire passer de concert à un autre mortaillable qui auroit des enfans ou parens communs, & par cette fraude, exclure le Seigneur d’un droit legi- time que la Coutume lui défere ; en un mot , il faut s’en tenir à la disposition prohibitive de l’article I47. qui ne doit pas souffir de mauvaise interprétation.
ARTICLE I50.
IL est vrai que le droit des Lots & ventes est natu- rellement un attribut de la directe, mais en la Mar- che ce droit ne se présume pas en faveur des Seigneurs
I4Supplement au nouveau Commentairede fief & de directe : Il faut un titre spécifique & particulier portant reconnoissance de la part du sujet tenancier au profit du Seigneur de fief ; suivant cet article qui distingue, ainsi que le précédent, les lieux où ce droit est dû, c’est-à-dire établi par un titre & reconnoissance formelle.
ARTICLE I65.
VOici une opinion particuliere de Me. Jabely, en ce qu’il dit que si le Seigneur se trouvoit dans la nécessité, il pourroit convertir en argent les devoirs d’arban & vinade , & les vendre à un étranger , car outre que c’est contre le texte précis de cet article, cette opinion repugne absolument à la disposition de l’article I44. qui laisse la liberté & faculté aux sujets serfs ou mortaillables de faire les arbans & vinades, ou d’en payer la valeur à défaut d’y satisfaire.
ARTICLE I69.
L’Exception proposée par le Commentateur en faveur de l’homme serf, qui seroit, dit-il, de bonnes mœurs & réputation ne peut être reçuë , en considerant que la Coutume est de droit étroit , qu’elle doit être prise à la lettre, & qu’il s’agit ici d’une négative prohibitive qu’on ne peut changer sous aucun pretexte.
ARTICLE 2I5.
C’Est mal à propos que Me. Jabely con- damne l’apostille de Me. Dumoulin sur cet art. puisque l’usage certain & actuel de la Province
de la Coutume de la Marche.I5est , que si deux Freres ou Parens communs font entre eux un contrat de communauté avec pacte de se succeder l’un à l’autre en cas de décès sans enfans, ce pacte est bon & valable entre majeurs & hom- mes francs , & en effet un pareil contrat n’a rien qui repugne aux bonnes mœurs & à une juste liberté des contractans.
ARTICLE 22I.
CEt article regarde un partage de biens à faire entre deux freres communs & indivis , & Me. Jabely prétend que l’aîné étant décédé, on ne peut contraindre son fils & heritier à faire le partage , mais cette opinion est réprouvée par l’usage & par différents préjugés, & enfin le fils de l’aîné succedant par l’autorité de la loi , aux prérogatives & droits à lui acquis par le decès de son pere , doit par la même raison être tenu des charges suivant cette maxime : Ubi emolumentum successionis , ibi plerumque est onus.
ARTICLE 222.
VOici une occasion de justifier combien l’imagi- nation de Me. Jabely étoit fertile en erreurs & idées bizarres , car contre les termes précis de cet article qui prescrit indistinctement qu’entreautres que freres , celui qui provoque le partage , fasse les parts & les autres choisissent ; il pense & décide que si l’Eglise , dit-il , est du nombre des copartageants , & obligée en certains cas de provoquer le partage , &
I6Supplement au nouveau Commentairepar conséquent de le faire , elle ait en même temps la faculté de choisir, ce qui est de droit incompatible.
ARTICLE 228.
ON peut sur cet article faire une attention par- ticuliere , qu’un Religieux vivant ayant quatre freres ou sœurs aussi vivans , ils forment un nombre suffisant pour établir une excuse de tutelle en la per- sonne du Pere, suivant les sentimens de Henrys & de Brétonnier, tom. 2. quest. 87. & celui de Depeis- ses, tom. I. pag. 500. & 50I.
ARTICLE 293.
VOici le texte précis de cet article de la Cou- tume.
Pere , Mere , Ayeul ni Ayeule ne peuvent avantager l’un de leurs enfans plus que l’autre par donation ou autre disposition d’entre vifs , sinon en contrat de Ma- riage & faveur d’icelui.
Me. Jabely forme de son chef & authorité , une exception , en soutenant qu’une donation faite à un enfant, hors le cas de son Mariage, est bonne & valable , pourvu qu’elle soit faite pour recompense de services.
Il y a lieu en verité d’être infiniment surpris que Me. Jabely se soit ingeré à vouloir introduire & faire admettre dans le Public une pareille exception si visiblement contraire ai texte exprès de la Cou- tume , d’autant qu’il est de principe certain que
de la Coutume de la Marche.I7dans les articles d’une Coutume & lui municipale, on a toujours fait une distinction essentielle entre ceux qui contiennent une disposition purement né- gative d’avec ceux qui contiennent une loi néga- tive prohibitive : on convient au premier cas que la disposition de l’homme peut faire cesser la dispo- sition de la loi, lorsque le pacte n’a rien de contraire aux bonnes mœurs, comme il a déja été observé, mais il n’est pas moins certain qu’on ne peut déro- ger a un statut qui est négatif prohibitif , parce qu’il est de droit public, & ne peut être enfreint ou violé pour des interêts particuliers ; enfin lorsque Messieurs les Commissaires de la Cour ont rédigé la Coutume, de l’avis & consentement des trois Etats du Pays assemblés devant eux , n’a-t-on pas dans un examen exact & profond pesé le merite & la jus- tice des dispositions des articles pour les rendre con- formes à l’usage & à l’interêt des familles, & Me. Ja- bely y a-t-il pensé dans son exception, sur tout dans la circonstance que si la cause d’une récompense de services de la part d’un enfant envers son pere ou sa mere , donnoit lieu à violer la loi prohibitive , l’occasion en seroit facile, & arriveroit tous les jours par des effets d’un sentiment particulier , peut-être par caprice ou affection peu refléchie , en un mot nous devons nous en tenir à la loi écrite sans nous permettre la licence d’y ajouter hors de propos.

I8Supplement au nouveau CommentaireARTICLE 296.
AUtre opinion particuliere de Me. Jabely qui de- cide qu’un mari mineur peut valablement au- thoriser sa femme dans les actes judiciaires , même sans faire distinction des causes réelles qui peuvent concerner la femme d’avec les mobiliaires , ce qui est contre la pratique ordinaire du droit & de la jurisprudence.
ARTICLE 297. & 298.
ME. Jabely forme sur ces articles des décisions toujours à lui particulieres & contre l’usage , en disant que la femme ne peut revenir durant son mariage contre un contrat consenti par elle & son mari , contenant l’aliénation de son bien dotal : mais c’est aller trop vîte , il faut faire ici deux distinctions, l’une sur ces mots de notre article , au préjudice d’i- celle , ainsi un acquereur d’un bien dotal ne pour- roit-il pas soutenir le contrat d’aliénation valable, en faisant voir que la femme n’en a reçu ou reçoit aucun préjudice ; par exemple , un pere a deux filles, il marie la premiere & l’instituë heritiere de tous ses biens , à la charge de payer à sa sœur une somme en deniers qu’il lui constituë pour dot ; le pere meurt, la fille dotée veut être payée de sa constitution do- tale dans les termes qu’elle lui a été promise , & si la sœur heritiere instituée, & son mari ne trou- vant dans les biens de la succession aucuns deniers ou effets suffisans pour y satisfaire , & dans ce cas
de la Coutume de la Marche.I9aliénant un fonds du bien dotal de la femme , avec charge à l’acquereur d’acquitter sans delai la dot de la fille dotée, en principal & interêts , doit-on croire aussi legerement que Me. Jabely veut l’imposer , que la femme pourra en vertu de l’article 298 en survivant son mari , & dans l’an du decès re- prendre le bien dotal aliéné & y être valablement reçuë, sur tout aussi-tôt qu’elle ne pourra alleguer ni vilite de prix dans la vente du bien dotal ni fraude dans le contract ou exception semblable , d’autant que dans cette circonstance le prix du bien aliéne tient lieu d’une portion héréditaire , & fait cesser l’occasion des poursuites & frais considérables que la sœur dotée auroit pu faire même par la voye d’une saisie réélle des biens , & dans toutes ces conditions l’acquereur soutenant que la femme, loin de recevoir du préjudice de l’aliénation , en a tiré de l’avantage & de la faveur , ne seroit-il pas en état de faire dechoir la femme de l’éviction par elle prétenduë contre un acquereur qui de bonne foi a bien rempli son contrat , & se trouve autho- risé dans une legitime possession du bien , car en- fin la Coutume est de droit étroit , & il n’y a pas un mot dans le texte qui ne doive opérer, cela étant, ces mots , au préjudice d’icelle, ne font-ils pas cesser l’effet de la prohibition d’aliéner , aussi-tôt qu’on peut établir qu’elle n’a reçu aucun préjudice de l’aliénation ; en effet il y a eu Sentence en la Sénéchaussée de Guéret en l’année I724. qui en
20Supplement au nouveau Commentaireconnoissance de cause a debouté une femme d’une demande à rentrer dans la proprieté d’un patural à elle appartenant, vendu durant son mariage, l’ac- quereur ayant justifié que l’emploi du prix avoit tourné à l’avantage de la femme , loin de lui avoir causé du préjudice.
L’autre distinction est que Me. Jabely n’a pas dû mettre en maxime que la femme ne peut jamais revenir du vivant de son mari contre une aliéna- tion de son bien dotal faite durant le mariage, car outre que la Coutume ne le dit pas , s’il ar- rivoit que la femme ayant sujet de se plaindre de la conduite de son mari , & se trouva fondée à poursuivre & obtenir en justice une séparation de biens d’avec son mari pour cause legitime , ne seroit- elle pas en droit de former une demande en évic- tion contre l’acquereur du bien dotal pour lui en laisser la proprieté & jouïssance aussi-tôt que celui ci ne seroit pas en état de faire voir un legitime emploi du prix à l’avantage de la femme : on voit donc par ces réflexions la continuation des idées de Me. Jabely toujours hazardées & induisantes en erreurs , sur lesquelles il ne paroît pas permis d’i- miter le silence qu’on a gardé à ce sujet dans la nouvelle édition.
On peut ajoûter que le mot de chevance em- ployé audit article 298. signifie heritage, ainsi que s’en explique la Coutume locale de Cusset , l’ar- ticle premier du tit. I5. de la Coutume du Nivernois.
de la Coutume de la Marche.2IAu surplus il y a encore deux petites observations à faire sur cet article 298. il y est dit que la femme peut recouvrer ses biens dotaux dans l’an & le jour du trépas du mari , il est bien certain que ce mot de trépas signifie la mort naturelle , mais Me. Ja- bely nous a voulu apprendre , par son Commentaire sur le même article , que la même chose seroit si le mari étoit mort civilement par condamnation aux Galeres perpetuelles, ou banni pour jamais, ce sont ses termes, il faut donc passer à Me. Jabely une li- berté entiere de changer les termes à son gré & d’admettre selon ses idées des extensions d’un cas à l’autre , ce qui est absolument contraire à nos maixmes.
D’ailleurs ne pourroit-il pas arriver que ce mari condamné obtint de sa Majesté des lettres de rappel de ban ou de galeres , au moyen desquelles il pour- roit être rappellé en la société civile , & dès lors ne seroit-il pas en droit de reprendre la jouïssance des biens dotaux de sa femme , ce qu’il ne pourroit faire si elle avoit eu la liberté d’en disposer & les aliéner.
ARTICLE 333.
CEt article qui est compris dans le titre qui traite des matieres criminelles marque les cas ausquels un Procureur fiscal est reçu à faire de son chef une poursuite contre un accusé , en cas d’excès , où il y a sang & playe ouverte ou batture outrageuse , dit
22Supp. au nouv. Comm. de la Cout. de la Marche.qu’il faut que l’excès aye été commis par l’accusé avec armes offensives comme batons, pierres, coups de poing ou de pieds & autres instrumens contondans, car s’il mordoit à belles dents (ce sont ses termes) comme ce n’est pas , dit-il , le propre de l’homme de mordre de ses dents qui lui sont données à d’autres usages , on ne pourroit étendre l’article à un homme qui auroit mordu.
Voilà une distinction de Me. Jabely assez ingé- nieuse & imaginée à son ordinaire , mais on laisse à juger si elle est applicable au cas présent.
ARTICLE 336.
PAr cet article de la Coutume il est établi que dans les condamnations à mort naturelle ou ci- vile qui seront prononcées contre les justiciables de la Marche , la peine de confiscation n’aura pas de lieu , laquelle disposition ayant été acceptée par le Roi par des lettres patentes régistrées en la Cour , on a toujours dès ce temps-là observé la maxime.



FIN