Université de Nantes - Daniel Calin
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		Université de Nantes 					Master 2 Sciences de léducation UFR Lettres & langage 					et de la formation
					
A lécole des AVS 
Accompagner les processus dinclusion des élèves handicapés ?
Année universitaire 2009-2010
Mémoire dirigé par Yves Dutercq					Guillaume Bourget
Au terme dun tel investissement (car sil ny a pas occupation dun emploi, quel travail !), il y a beaucoup de personnes que je souhaite remercier chaleureusement. Toutes ont contribué dune manière ou dune autre à ce que ce travail soit possible. 
Je remercie ainsi dabord Mélanie et Gabriel. Egalement mon papa Guy, ma maman Elisabeth et Alain et Maryvonne pour leur présence durant ces deux années, qui ont été à plusieurs égards bien difficiles  mais elles sont derrière nous désormais. Je ne peux pas non plus ne pas dédier ce travail à Julien et Marguerite, desquels je pense je tiens une disposition fortement ancrée qui est de toujours porter attention ailleurs que là où on nous somme de regarder  qui que soit ce « on »  et qui relève aussi dune forme de conscience de classe.   
	Je remercie ensuite vivement toutes les personnes, AVS et EVS et anciens AVS et EVS de lUNAISSE : sans cette aventure collective ce travail naurait jamais existé. Toute ma démarche de recherche sinscrit en plein dans le cadre du travail que nous avons fourni (et fournissons encore) ensemble, qui est littéralement la condition de son existence, et qui fait que ce mémoire est largement collectif. Je le dédie ainsi également à mes copines( Mona, Mimi, Renée, Justine, Séverine, Véronique, Marianne, Cyril, Eudeline, Dominique, Françoise, Anne, Cécile, Suzy, Frédéric, Marie-Christine et Nicole, et tous les adhérents qui soutiennent et participent à lexistence et au quotidien de cette association, née pour parer à lindividualisation forcée du rapport au poste dAVS. Au-delà des collègues et amies, jenvoie un franc salut à tous les AVS, enfants/élèves, parents et enseignants  et en particulier ceux avec lesquels jai travaillé. Je noublie notamment pas (et noublierai pas) Sylvie, Sylvie, Sophie, Anne et Jordan, Armelle et Audric  et toute lécole de la Ronde à Plessé où jai beaucoup appris, et où nous avons tous ensemble vraiment bien bossé. Il y a aussi Laurence et Anna, Nathaëlle, Laurence, Stéphanie, Maryvonne et Nolwenn  et lécole Jacques Prévert à Saffré ; Patricia et Augustin, Isabelle et Alexis, Nathalie et Pauline, Martin et Marie-Odile, Dominique et Valentin. Jai beaucoup appris au contact de ces enseignantes et élèves  et des parents de ces derniers. 
	Rien naurait été possible sans Olivier, Céline, Isabelle, Laetitia, Nathalie et Sandrine : à tous jenvoie un clin dil amical. Tout aurait été plus difficile sans Gilles Paumier, Marie-Christine Philbert, Benoît Hauray et Patrice Fondain (que je salue chaleureusement). Merci également à Madame Jeannine Mage, Madame Nicole Hornung et Monsieur Patrice Lagisquet. 
	Je remercie aussi vivement Yves Dutercq pour les conseils quil a su me prodiguer  et sa patience face à certaines de mes dispositions qui ne lui ont pas rendu sa tâche de directeur de mémoire toujours très facile. Je souhaite aussi remercier particulièrement Francine Muel-Dreyfus, Eric Plaisance, Charles Gardou, Philippe Mazereau, Henri Jacques Stiker, Daniel Calin et Pascal Ourghanlian  et si je nai pas échangé avec chacun dentre eux de manière égale, tous ont contribué et contribuent à diffuser dune belle manière ce bien commun quest le savoir. 
	Je remercie pour finir ceux qui dans le passé ont lutté pour que soit permis le fait que je puisse être indemnisé par la collectivité lors de ma reprise détude. Sans eux, pas de formation pour moi, ni de mémoire, et rien de ce travail nexisterait. Je reste aux côtés de ceux qui travaillent à leur suite, face à la violence inouïe de lactuel exercice du pouvoir envers tous ceux quil ne reconnaît pas. 
« Les livres devraient toujours être lus avec le même soin qui a été mis pour les écrire ». 
Henri-David Thoreau, Walden or life in the woods, 1859. 
« En sattachant à reconstruire les traits structurels que les institutions  et les postes  doivent à leur histoire, on fait de lhistoire un instrument de défense contre leffet dimposition idéologique exercé par les institutions qui tendent toujours à imposer leur version de lhistoire ». 
Francine Muel-Dreyfus (1983) Le métier déducateur Paris : éditions de Minuit. 
« Le problème du passage de la connaissance à laction est probablement celui sur lequel Bourdieu et moi avons eu les discussions les plus fréquentes et les plus longues au cours des vingts dernières années. Dans les Méditations pascaliennes, il parle du fait que « les obstacles à la compréhension, surtout peut-être quand il sagit de choses sociales, se situent moins, comme lobserve Wittgenstein, du côté de lentendement que du côté de la volonté » [MP, p.17]. Il avait sûrement raison de penser que, en matière sociale, la volonté de ne pas savoir est une chose plus réelle que jamais [
]. Mais il ne faut pas seulement vouloir savoir, il faut aussi vouloir tirer des conclusions de ce que lon sait et, quand les conclusions à tirer sont des conclusions pratiques, on entre dans un domaine sur lequel lintellect na malheureusement plus guère de prise et quon ne maîtrise pas mieux aujourdhui quautrefois. » 
Jacques Bouveresse (2003) Bourdieu, savant et politique. Marseille : Agone. p. 36
« Ma sur Patschi me fixa exactement de la même manière que mes frères et surs et moi lavions fixée des centaines et des centaines de fois, comme on fixe quelquun qui a un petit vélo dans la tête. Je me demandai pour la première fois si la lecture, lécriture et la connaissance des auteurs classiques comptaient vraiment parmi les choses essentielles de la vie ».
 Peter Berger (1988), La maison rouge, Paris : Lécole des loisirs, p.94. Première édition : 1966.
Sommaire
Introduction
Présentation............................................................................................................	p.4
Méthodologie
.	p.10
 Des lectures herméneutiques.....................................................................	p.11
 Des entretiens avec six AVS-i...................................................................	p.11
2.3  La question de la réflexivité.
.	p.16
2.4  Décrire les origines : lentrée sociohistorique...........................................	p.25
2.5  Les AVS-i et le cadre de leur existence : de lhistoire aux notions...........	p.29
Présentation des AVS-i interrogés : texte et contexte............................................	p.30
3.1 Territoires et pratiques éducatives..............................................................	p.30
3.2 Milieu rural ?.............................................................................................  p.33
	3.3 Les AVS-i interrogés : situation dans lespace social des positions..........	p.36
Les mots et notions autour du handicap.................................................................	p.55
Chapitre 1 : 	Un siècle déducation séparée. Une histoire des relations entre éducations scolaire et spéciale 1880-2005
Genèse et constitution du champ du spécial : 1880-1940...............................	p.62
La genèse de léducation et de lenseignement 
 spécial, 1880-1909 ....................................................................................	p.62
	1.1.2	Ecole et anormalité......................................................................................	p.71
			
Laffermissement des contours du champ : 1940-1975..................................	p.75	
1.2.1 	Les fondements unifiants de linadaptation...............................................	p.75 
1.2.2 	Lâge dor de linadaptation : 1945-1975...................................................	p.79 	
1.2.3 	Linadaptation et lécole : le temps de 
  		ladaptation scolaire.....................................................................................	p.88 
Les lois du 30 juin 1975 et ladoption du handicap.........................................	p.92
1.3.1 	Origines.......................................................................................................	p.92 
				
1.3.2  	Le contenu de la loi.....................................................................................	p.95 
Ecole et handicap après 1975 : 
	la dynamique formelle de lintégration scolaire..........................................	p.99 
La loi du 11 février 2005...................................................................................	p.103 
	
1.4.1 	Une loi consacrant linclusion....................................................................  p.103 
	1.4.2 	Une définition du handicap.........................................................................	p.104 
	1.4.3 	Handicap et difficultés scolaires.................................................................	p.105 
		
	1.4.4 	Le projet consacré et reçu par
un nouvel appareillage institutionnel...........................................................	p.107 
Chapitre 2 : Les mondes des inclusions : origines, circulation, utilisation
De lintégration à linclusion : éléments historiques......................................	p.112
Les inclusions.............................................................................................	p.112
Origines historiques du principe de linclusion scolaire.............................	p.117
La circulation internationale de linclusion................................................	p.133
Linclusion dans son versant scolaire..............................................................	p.147
Intellectuels et profession enseignante face à linclusion scolaire.............	p.147
Linclusion : proposition de définition........................................................	p.168
Les AVS-i dans le processus inclusif
..................	p.179
Chapitre 3 :		Position et propriétés du poste dAVS-i
Linconscient social du poste dAVS-i
.  p.184
			
Léducation spéciale contre léducation scolaire ?.................................... 	p.184				
3.1.2 	De la ségrégation à lémergence de
laccompagnement scolaire.........................................................................	p.187 
					
Accompagnants scolaires : une histoire institutionnelle................................	p.195
3.2.1 	 Lémergence de laccompagnement scolaire
des enfants handicapés................................................................................	p.195 
	3.2.2	Du local au fédératif national.....................................................................	p.199 
	3.2.3 	La politique du flou : 2003-2009................................................................	p.209 
			
Laccompagnement scolaire dans lespace des positions des 
	agents/acteurs intéressés par lenfance handicapée........................................	p.222					
3.3.1 	Les propriétés du poste................................................................................	p.224
	3.3.2 	Le poste dAVS-i AED et ses principales relations : 
		éléments délucidation
	p.230 
Chapitre 4 : 	(Comment) Accompagner (qui ?) selon les besoins (de qui ?) ?
La vogue et la vague de laccompagnement........................................................	p.266
4.1.1	Un lieu commun
.
....	p.266 
4.1.2  	Délitement et professionnalisation du lien social
...	p.267 
4.1.3	Définir laccompagnement : une notion en tension
	p.270 
Les cordes de linstrument accompagnement....................................................	p.273
Les pratiques et postures de laccompagnement
.
	p.273
Les registres de laccompagnement
.
..	p.278 
Mandat et demande : 
entre souci de lautre et instance de pouvoir
..
..
.....	p.281
Un mandat unique ?.
.
..
	p.281
Priorité au mandat, priorité à la demande
..
.	p.284 
La domination de « lintervention » ?.........................................................	p.288
Accompagner quoi, accompagner qui ?.............................................................	p.290
Répondre aux besoins
....	p.291 
Autonomie, dépendance, socialisation
..
.
. p.293 
Ecoute et violence symbolique
..	p.296 
Conclusion générale.........................................................................................................	 p.299
Table des matières...........................................................................................................	p.306 
Bibliographie....................................................................................................................	p.314 
Bibliographie électronique
..	p. 322
(Les annexes présentant les entretiens sont dans un document à part. )
Introduction	
Présentation
1.1 	 Le contexte du choix du sujet
	Une recherche sur le handicap et lécole et sur les AVS sest imposée à moi, tout dabord suite à une expérience professionnelle. Jai en effet repris des études universitaires après notamment cinq années passées à travailler en qualité d'auxiliaire de vie scolaire individuel (AVS-i), employé par l'inspection académique de Loire-Atlantique. Ce travail consiste en l'accompagnement dans le milieu scolaire dit « ordinaire » d'élèves reconnus comme étant handicapés. Il existe au sein de l'Education Nationale depuis la rentrée de 2003, sous le statut d'assistant d'éducation (AED) et depuis 2005 (et financé seulement à 25% par lEducation Nationale) en contrait aidés par lEtat (successivement CAE et CAV puis CUI)
	J'ai ainsi travaillé, entre septembre 2003 et septembre 2008, dans deux circonscriptions rurales du nord du département de Loire Atlantique, au sein de sept établissements scolaires dont six écoles primaires, à l'accompagnement de neuf enfants, principalement en cycle 1 : ceci constitue lossature de ce que je nomme ici mon « parcours daccompagnement » - nous  reviendrons un plus loin sur ce terme et ce quil recouvre.  
	Dès la première année d'exercice en qualité dAVS-i, je me suis engagé dans une organisation syndicale afin de tenter d'initier une réflexion collective sur notre condition d'AVS, ayant vite pris acte des précarités qui l'organisent, qu'elles soient de salaire, de statut, de formation ou de conditions de travail (dont l'isolement, notamment) (Concialdi, 2007). Avec d'autres collègues AVS, nous avons fondé l'année suivante un collectif AVS de Loire-Atlantique soutenu matériellement et juridiquement par un syndicat de l'éducation, le SNUipp. Ce collectif était animé par six à dix collègues. Nous avons produit un document en janvier 2007 qui se proposait de contribuer à la réflexion sur l'organisation des services d'accompagnants (aimablement publié sur le site personnel de Daniel Calin, « Psychologie, éducation et enseignement spécialisé » dans la rubrique « Tribune de l'Education », supprimée depuis lors). Nous avons travaillé à six sur ce texte, avec comme matière notre seule jeune expérience d'AVS et constatant notre condition telle que décrite ci avant.
	La même année s'est opérée une recherche de jonction entre les diverses initiatives locales de regroupement d'AVS (au sein des départements). Un réseau de collectifs s'est ainsi progressivement tissé et des initiatives communes ont été prises (rencontre entre une délégation interdépartementale et le délégué interministériel des personnes handicapées, qui était alors Patrick Gohet, directeur pendant quinze ans de lunion nationale des associations de parents denfants inadaptés  HYPERLINK "http://www.unapei.org/"UNAPEI, une des plus importantes fédération nationale  passage du privé associatif au haut fonctionnariat qui est révélateur de la structure et de lhistoire du champ de lenfance handicapée et de ses relations à lEtat, nous y reviendrons).
Elles ont abouti en juillet 2007 à la création de l' HYPERLINK "http://www.unaisse.free.fr/"UNAISSE, l'union nationale pour l'avenir de l'inclusion scolaire, sociale et éducative. L'objet statutaire de l'association est d'uvrer à la reconnaissance professionnelle de l'auxiliaire de vie scolaire. Membre fondateur de cette organisation, jen ai été un des administrateurs entre sa création et février 2010. Elle regroupe environ 200 adhérents de toute la France, des personnels accompagnants scolaires mais aussi des parents, des professionnels de l'éducation spécialisée et de l'enseignement. En marge de cette association  mais administré par la même équipe (et la même webmestre)  existe un forum déchange entre AVS. 
L'UNAISSE a très vite adhéré à la fédération nationale des associations au service des élèves présentant un handicap ( HYPERLINK "http://www.fnaseph.org/"FNASEPH), fédération qui regroupe une grande partie des collectifs associatifs qui employaient les anciens AVS alors dénommés auxiliaires d'intégration scolaire (AIS), sous contrat emploi jeune, avant qu'ils ne soient intégrés à l'EN. 
	Apprenant que mon employeur supprimait tous les temps pleins d'AVS pour les réduire, et refusant de me voir imposer un temps partiel que notre statut de contractuel de droit public m'empêchait de refuser, j'ai fait une demande de validation d'acquis pour une inscription en master de sciences de léducation qui a été acceptée  malgré que je ne sois pas titulaire dune licence. Le travail d'AVS est très intéressant, il peut être même tout à fait passionnant, mais pour moins de 600 euros je préférais encore m'investir dans une formation universitaire propre à me permettre une mise à distance et une historicisation de ma précédente condition.
	C'est dans ce contexte que je suis entré à l'Université en septembre 2008.
	A ce stade, il est notable de mentionner le fait que je suis moi-même porteur dune déficience : ce fait constitue un élément qui a constitué un point important dans le processus dobjectivation de ma démarche scientifique  jy reviendrai un peu plus loin.
	1.2 	Thématique
	Le sujet de ce mémoire est la question de la scolarisation des enfants en situation de handicap. A l'origine de mon travail de recherche, ma question de départ masque mal une attitude militante : 
« Laction des auxiliaires de vie scolaire (accompagnants scolaires des enfants en situation de handicaps) a t-elle une spécificité qui puisse justifier de la construction d'une nouvelle profession ? »
	La question de départ est, de manière générale, faite pour être insuffisante, pour que tout ce qu'elle dit sans le vouloir et tout ce qu'elle ne dit pas sans le savoir puisse être mis en relief afin d'avancer vers la problématique. Ainsi, nous pouvons constater que la question telle que jai pu la formuler au début de ces deux années de travail n'aborde pas celle des conditions de production de l'émergence de ce poste (on dira AVS malgré la diversité des statuts et des types de contrats engendrant une diversité des appellations pour la même fonction), qui existe depuis le début des années 1980, ni les conditions de production de son maintien depuis plus de 25 ans sous statut précaire (l'émergence de ce personnel coïncide d'ailleurs, à quelques années près, avec la création des premiers contrats précaires publics en 1983 : les TUC, travaux d'utilité collective, contrat sous lequel des AVS ont travaillé). 
Du fait qu'elle soit centrée sur les AVS, elle omet également de questionner la notion éminemment marquée socialement et historiquement d'enfance handicapée et laisse supposer que le seul objet de recherche serait leur « action ». 
Ces premières constatations quant à la question de départ mont conduit à cerner une première nécessité : mettre au jour le point aveugle que constitue la généalogie des AVS, les conditions dans lesquelles ils ont émergé, les conditions dans lesquelles ils ont traversé les quelques 25 ans de leur existence, les périodes de leur histoire institutionnelle que lon peut mettre en évidence, le sens de ce qu'on peut identifier comme des ruptures, marquant ces mêmes périodes. 
En effet, la forme objective des conditions demploi et de recrutement caractérisant un poste, les parts dautonomie et dhétéronomie qui sont propres à ceux qui loccupent en matière de définition du contenu, de la forme et des objectifs déclarés de ses interventions (qui sont autant de produits de son histoire), déterminent très largement à la fois la façon la nature des dispositions et propriétés sociales de ceux qui sont amenés à loccuper et la façon dont ces derniers construisent et sapproprient leurs pratiques. 
Ainsi, faire léconomie dune étude historique de ce personnel revient à consacrer sa naturalisation et à participer à une déshistoricisation qui ne peut être que très dommageable pour lensemble des sciences et de lhistoire de léducation  qui a déjà une tendance toute « naturelle » à ne sintéresser, en terme de professions, quà celles qui conditionnent leur exercice à une formation qui leur permet de ne pas être considérées comme des fonctions dévaluées et déqualifiées. De ce point de vue, les AVS sont beaucoup plus proches des fonctions daide maternelle ou même des personnels sous contrats municipaux intervenant sur les temps périscolaires : elles et ils sont là au quotidien dans les écoles mais nintéressent que fort peu les chercheurs, lessentiel étant ailleurs, hors de ce point aveugle qui, a priori, ne rentre pas dans les comptes des objectifs rentabilistes à luvre dans le système scolaire français, historiquement construit par et pour la performance scolaire entendue dans un strict sens de maîtrise de savoirs disciplinaires nécessaires pour le bon fonctionnement de lemploi et de son marché. Mentionner le fait quau sein des métiers de lécole les cloisonnements professionnels sont redoublés de cloisonnements sociaux nest pas quénoncer une évidence, cest aussi rappeler, en terme de position sociale, le caractère éminemment reproducteur du système scolaire français  que masque mal la fiction de légalité des chances, pur produit idéologique répondant au principe conservateur du « tout changer [les termes, en loccurrence] pour que rien ne change ».  
Elargir le recrutement social des élites prime en effet aujourdhui sur une réelle démocratisation de lenseignement  et ces deux objectifs, fort différents, sont même souvent confondus par ceux qui, tout en invoquant le second, ne font en fait que travailler au premier. Lélucidation méthodique de ce qui fonde à considérer quil sagit là de deux objectifs de politique publique qui sont tout à fait différent semble nécessaire. 
	Sur le sujet de ces processus de naturalisation qui permettent que certaines professions non enseignantes présentes à lécole soient langle mort des pratiques de recherche en sciences de léducation (et de nombreuses formes de pratiques professionnelles enseignantes également), il est d'ores et déjà possible de signaler que, lors de la reconnaissance administrative qu'a constituée l'intégration des AVS à l'EN en 2003 (intégration qui avait suscité beaucoup d'espoir chez les personnels et chez les militants associatifs  des parents, la plupart du temps, souvent enseignants), les textes définissant l'organisation de la fonction la présentaient comme un passage (forcément temporaire) vers les métiers de l'enseignement et du travail social, ce qui constitue un indice éminemment révélateur de l'embarras généré par la position inédite des AVS dans le champ éducatif français, entre éducations scolaire et spéciale et même, dans une certaine mesure, comme nous le verrons, entre éducations familiale et populaire. 
	Nombreuses sont les personnes, y compris parmi les acteurs même de la politique de scolarisation des enfants handicapés, (parents, enseignants, professionnels socio-éducatifs ou du médico-social, AVS, etc.) qui voient dans cette date l'acte de naissance des AVS, et confondent ainsi un changement demployeur et de cadre juridique (de lassociatif privé à lemploi public sous contrat de droit public, puis de droit privé avec les EVS) avec lémergence dun nouveau type de personnel. Nous verrons que cette émergence prend racine dans une période antérieure qui connaît des évolutions terminologiques et paradigmatiques importantes produisant un nouveau référentiel daction publique pour le secteur de lenfance handicapée, selon une des propriétés spécifiques du champ quil est dores et déjà utile de mentionner tant sa résonance semble aujourdhui grande, en particulier avec le sujet qui nous concerne : 
« Les temps forts de linnovation classificatoire correspondent à des périodes où se combinent des oppositions et des luttes politiques et des entreprises de conquête de marchés professionnels nouveaux ». (Muel-Dreyfus, 1984)
	1.3	Problématique
	Le personnel accompagnant scolaire des enfants en situation de handicap semble avoir émergé dans le champ scolaire français au début des années 1980. 
	Dans un contexte de segmentation importante des territoires professionnels et administratifs organisant l'action auprès des enfants en situation de handicap, de bipolarisation historiquement très marquée du champ éducatif français (Chauvière 2000, 2001), et au sein duquel les sciences humaines et médicales jouent un rôle décisif dans le caractère dynamique des modes de définition du  problème  (Muel 1975, Pinell & Zafiropoulos 1978, Gateaux-Mennecier 2000, Stiker 1996) induisant eux-mêmes des modes différenciés de traitement, comment s'est organisée l'émergence de ce nouveau type de personnel ne relevant exclusivement ni de l'éducation scolaire ni de l'éducation spéciale ? 
	Que doit ce dernier à l'histoire des phénomènes concurrentiels organisés autour de l'objet  enfance arriérée / déficiente / inadaptée / anormale / handicapée mettant en jeu des acteurs scientifiques, institutionnels et professionnels luttant pour la légitimité de la définition et du traitement du problème ? 
	Quels sont les intérêts qui gouvernent au maintien des AVS, depuis 25 ans, dans des statuts successivement précaires dont la professionnalité n'a nul autre reconnaissance que symbolique - moteur du dévouement ? En d'autres termes : quelle est la nature de son histoire institutionnelle ? Quelle position occupent-ils dans le champ éducatif ? Autour de quelle spécificité sorganise formellement leur pratique ?	
Laction des AVS semble s'articuler autour de ce qui a contribué à faire vaciller la structuration « dos-à-dos » de l'éducation spéciale et de l'éducation scolaire (Chauvière & Fablet, 2001), à savoir l'émergence de la politique d'intégration scolaire avec la loi du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées (surtout avec les circulaires de 1982 et 1983) puis sa consécration avec la loi n°2005-102 du 11 février 2005, se prolongeant par le nouveau paradigme de l'action publique en matière de scolarisation des enfants en situation de handicap : l'inclusion scolaire. (Gossot, 2006) La nature de cette fissure entre les deux pôles, qui se nourrissent chacun des rejets de l'autre  et qui n'existent donc que grâce aux insuffisances de l'autre  peut-elle permettre la construction d'une fonction originale ou bien, contribuant à rajouter à la segmentation professionnelle par la création d'un nouveau métier, desservirait-il « la cause de l'enfance » ? (Chauvière & Fablet, 2001). 
Au-delà de ses origine et histoire spécifiques, comment peut-on caractériser le poste dAVS-i ainsi que sa position dans lespace des positions des autres postes intéressés par lenfance handicapée ? Quelle y est la nature de la position du poste ? Quelles sont les exigences réellement ou potentiellement inscrites dans la position des AVS-i à lintérieur du champ de lenfance handicapée ? En dautres termes, quelles sont ses propriétés ?  (Muel-Dreyfus, 1983, Bourdieu, 1992)
Lhistoire des origines du poste, lhistoire du poste et de sa position ainsi que ses caractéristiques objectives sont encadrés par deux notions sans lesquelles lensemble de léconomie du poste nexisterait pas : elles en constituent en effet les soubassements symbolique et pratique (pour la notion daccompagnement) et sociopolitique (pour celle dinclusion). Quelles sont les origines historiques de ces deux notions ? Dans quel contexte sorganise leur consécration ? Quel « monde » et quelle « vision du monde » sy trouvent inscrits (Paul, 2004, Akrich, 2006, Demailly 2009) ? Quels liens peut-on tisser entre les charges idéologiques, les implications pratiques et symbolique qui caractérisent de manière spécifique les notions dinclusion et daccompagnement, et le poste dAVS-i ? 
Méthodologie
« La méthodologie nest pas le précepteur ou le tuteur du savant mais toujours son élève. (
) Le fétichisme méthodologique se condamne à habiller des objets préconstruits des atours de la science. » (Loïc Wacquant, 1992)
2.1	Des lectures herméneutiques
Une partie importante de mon travail a consisté en la lecture herméneutique de nombreuses productions scientifiques, articles ou ouvrages, sur le principe de la charité herméneutique, qui attribue aux auteurs le crédit davoir fait choix de la meilleure manière de se faire comprendre  notre problématique nétant pas centrée sur létude du traitement scientifique de notre objet de recherche. 
 La constitution de la bibliographie sest effectuée selon plusieurs modalités, qui sinterpénètrent tout au long de ces deux années de travail. Une première a été une recherche génétique des travaux socio-historiques effectués sur le champ de l'éducation spéciale, de l'enseignement spécial ou de l'enfance handicapée, des travaux quoi renvoient le plus souvent les uns aux autres, par des problématiques voisines, un vocabulaire communs, et, le plus souvent, un cadre théorique partagé. La seconde modalité a été de recenser l'ensemble des textes de lois, décrets, circulaires, rapports techniques, produits sur le sujet de la scolarisation des enfants handicapés depuis les lois de 1975, puis de recenser un certain nombre de productions écrites (compte-rendu d'assemblée, statistiques, projet, déclarations, etc..) d'associations locales ou nationales ayant eu à administrer l'emploi des AVS-i pendant les années 1980 et 1990 (autant de documents essentiels que le temps imparti au présent travail ainsi que la problématique dégagée nont pas permis dexploiter dans leur ensemble). Enfin, une autre modalité de constitution de ma bibliographie a été daffiner mes recherches sur des points précis dévoilés par la constitution progressive de notre problématique, sur le thème de l'histoire de l'éducation ou de l'enseignement spécial, de la déficience, des traditions de classement et de catégorisation autour du « handicap », de celles, notionnelles, se succédant pour caractériser les politiques éducatives publiques en la matière, du cadre théorique habité, et enfin sur des points plus précis tel la constitution historique de la psychologie scolaire ou les origines de la loi de 1909 sur les classes de perfectionnement (ce sont alors de nombreuses thèses de troisième cycle nous avons pu trouver, souvent dirigées par des chercheurs occupant déjà des positions éminentes dans notre corpus bibliographique).  
Par suite, la lecture et la constitution de fiches de lecture ont servi à sélectionner des éléments historiques factuels, des éléments danalyse proprement sociologique et des éléments danalyse sortant du strict champ de mon option théorique  mais se révélant néanmoins très opératoires, telle la notion de liminalité. Ces éléments ont été ordonnés dans lesquisse dun plan construit pour répondre aux éléments constitutifs de ma problématique. A mesure que sest développé le processus de formalisation (décriture, en somme), ce plan sest trouvé affiné, modifié, amélioré, avant dacquérir finalement sa forme définitive. 
Mais les éléments issus de lectures ne sont pas les seuls qui ont servi à la constitution du présent travail : nous avons également effectué des entretiens avec des AVS-i. 
	2.2	Des entretiens 
Le choix de lanalyse sest porté sur le poste dAVS individuel (AVS-i), qui accompagne des enfants dans des classes « ordinaires » (non spéciales)  bien que celui dAVS collectif (AVS-co) soit mentionné également, qui lui travaille au sein de classes spéciales (CLIS 1, 2, 3, 4 ou UPI  dorénavant ULIS   dans le secondaire). En effet, le sigle « AVS » quils partagent ne doit pas laisser croire que ce sont les mêmes personnels : sils peuvent avoir en commun un type de contrat et des conditions de recrutement, leur poste a une généalogie et des missions tout à fait différentes. 
Le choix de léchantillon des six interviewés à été fait à partir dune attention particulière à lhistoire du poste dAVS, qui met en relief une parenthèse historique tout à fait singulière aux vues de ses trente-cinq années dexistence. Il sagit de la période 2003-2009, ou 2004-2010. Cette période est en effet caractérisée par le fait que les AVS-i recrutés sous contrat assistant déducation (AED) cumulent deux propriétés :
une les concernant : ils ont fréquenté lenseignement supérieur et, dans leur grande majorité, y ont obtenu un diplôme ; 
et lautre concernant le poste : le poste dAVS-i sous contrat dAED peut potentiellement être occupé pendant six années, ce qui est unique dans lhistoire du poste en terme de durée. 
La borne « 2009 » ou « 2010 » se justifie par le fait que, progressivement, le poste dAVS-i/AED a été pensé de plus en plus comme temporaire, ce qui nétait pas forcément le cas avant 2009. 
Ces conditions fondent les AED ayant exercé ou exerçant entre 2003 et 2010 comme des exceptions historiques. A partir du postulat selon lequel cette double propriété de durée sans précédent doccupation potentielle du poste et de fréquentation de lenseignement supérieur est propre à constituer un élément décisif dans la construction de conditions dappropriation du poste (et dactivation de la surface des potentialités qui y sont inscrites) qui est rendue impossible par les types de contrats précédant et suivant ceux dassistant déducation AED, nous formulons ainsi volontiers lhypothèse que les AVS de cette période ont eu la possibilité de développer des processus dincorporation des logiques propres à leur environnement de travail (logiques institutionnelles et professionnelles) qui fait deux la catégorie de personnel qui a le plus exploré (et incorporé) ce qua pu produire la rencontre entre les propriétés du poste dAVS-i et leurs propres dispositions sociales. En dautres termes, nous faisons ici lhypothèse que ces AVS-i, à mesure quils occupent longtemps le poste, développent des compétences et une pratique qui sont elles aussi des exceptions historiques, et que nous souhaitons contribuer à mettre en lumière afin de comprendre ce qui se joue de lhistoire du traitement social du handicap au travers de ce poste. 
Les entretiens et la question de la réflexivité
Entretenir des AVS-i tout étant moi-même un ancien AVS-i comportait des risques importants en termes dinvestissement projectif. Entamer un processus dobjectivation de cet investissement subjectif sest révélé essentiel pour contrer le danger de fausser la parole recueillie. Seulement, un choix sest imposé à moi, du fait de la double contrainte du cadre temporel imposé par le master et de la prégnance très puissante me concernant dun sentiment de demeurer lun des leurs, un de ceux que jallais entretenir. Ce choix, explicité plus loin, repose sur un double postulat : 
Le travail dobjectivation de mon rapport à lobjet détude est transposable à la manière que jai eu moi-même doccuper le poste dAVS-i, et suffit pour me permettre dhabiter correctement  sans pour autant éviter des erreurs  la fonction dinterviewer, spécifique à la pratique de la recherche en sciences sociales ; 
ne pas avoir cherché à me débarrasser absolument de la posture dancien occupant du poste sur lequel je questionnais les personnes entretenues, en somme le fait de simplement accepter de parler dune pratique dont nous partagions une connaissance intime sans tentative de mise à distance de ma part autre que celles résultant du double effort que constitue le travail dobjectivation mentionné plus haut, et le fait que je menais lentretien sur la base dune grille construite par mes soins, ne constitue pas un danger pour un positionnement réflexif ni pour la qualité de la parole recueillie  bien au contraire. 
Partant, il me faut ici mentionner le choix de conduite dentretien que jai décidé dhabiter, centré sur une perspective clinique de « co-construction » et délucidation in situ des termes de léchange (une partie de ce travail délucidation souvent entièrement renvoyé aux espaces solitaire du chercheur est ainsi ramené à lespace de partage et déchange que représente lentretien, qui acquiert ainsi pour linterviewé une dimension formatrice). Ce travail commun délucidation permet, de mon point de vue, de contribuer à combler ce que pointe Bernard Lahire quand il écrit que : 
« Oui, les acteurs font ce qu'ils font et savent ce qu'ils savent mieux que quiconque. Oui, ils sont sans doute les mieux placés pour dire ce qu'ils font et savent. Mais, non, ils ne disposent pas immédiatement des moyens de perception et d'expression qui leur permettraient de livrer cette expérience spontanément. » (Lahire, 1998) 
Ces « moyens de perception et dexpression » qui, selon Lahire, sont masqués par le « principe deffacement » et la « contrainte de la narrativité », et qui peuvent savérer faire défaut aux acteurs/agents pour quils délivrent leur expérience à lenquêteur, trouvent de mon point de vue une possibilité démergence dans lentretien clinique tel que je le décris plus haut  ceci relativement à ma position dapprenti chercheur ainsi que relativement à la nature de mon champ de recherche (« on ne saurait dissocier la construction de lobjet des instruments de construction de lobjet et de leur critique », comme lécrit Loïc Wacquant).  
Les instruments de construction de lobjet sont ici, outre les lectures et le travail nécessaire dobjectivation, la méthode utilisée pour mener à bien les entretiens. 
Méthode de recueil du matériau des entretiens
	
Jai construit un guide dentretien basé sur une des propriétés du poste dAVS-i et qui veut quil soit potentiellement en relation professionnelle avec une multiplicité d « acteurs/agents » du processus de scolarisation des enfants handicapés (Mazereau, 1998) : 
lenseignant (qui peuvent être jusquà 4 pour les AVS-i selon le nombre possible daccompagnement sur une année scolaire) 
les élèves des classes (jusquà 4 classes, donc)
les parents (de lélève accompagné et des élèves de la classe)
lélève accompagné (jusquà 4)
léquipe pédagogique (idem)
les ATSEM et personnels de mairie pour les temps périscolaires (idem)
lenseignant référent (poste créé par la loi de 2005 et prenant suite des secrétaires de CCPE)
les professionnels du médico-social et du socio-éducatif (beaucoup denfants handicapés scolarisés ont un suivi annexe à lécole assuré par des structures ou des services de léducation spéciale  dans ce dernier cas, il nest pas rare quil y ait une intervention à lécole également, comme avec les SESSAD par exemple)
les autres AVS 
ladministration employeur, lInspection Académique
Les organismes associatifs ou autres qui assurent les 60 heures de formation dite « adaptation à lemploi » - délivrées en cours doccupation du poste, jamais de manière préalable. 
Les AVS-i sont également en contact avec des éléments non humains : 
les dispositifs didactiques et les pratiques pédagogiques (formant le système denseignement  et pouvant être différenciés selon les choix des potentiellement quatre enseignants avec lesquels lAVS-i peut travailler)
-   les pratiques éducatives  jentends par-là tout ce qui a trait, au-delà des objectifs didactiques et pédagogiques (et bien quelles en constituent un corollaire) les postures dadultes vis-à-vis denfants dans lobjectif de contribuer à la socialisation et une dynamique positive des groupes 
- 	la déficience, le handicap, linfirmité. 
Les six AVS-i entretenus ont ainsi été interrogés, selon les principes cliniques décrits plus haut, sur la base de « leur relation à » chacun des éléments ci avant décrits, humains et non humains. 
Une question a été également posée, en guise de témoin dune préoccupation qui ne me quitte pas depuis la première année dexercice de cette fonction en 2003 : quen est-il de la prévalence des familles appartenant aux catégories populaires au sein de la population des enfants accompagnés par des AVS-i ? Afin daborder cette question (mais de manière limitée), et contre la doxa des classes dirigeantes qui a tendance à assimiler classe populaire, déficience mentale, délinquance, chômage et incapacités personnelles, jai souhaité menquérir auprès des AVS-i interrogés de leur représentation en la matière. Cest ainsi que jai frontalement demandé à chacun si de leur point de vue ils percevaient un lien de causalité entre la situation familiale et la situation des enfants  cest à dire entre handicap et famille, entre handicap et milieu social. Le cadre de ce travail (et la faible profondeur de ma préparation et de mes questions sur le sujet) ne me permette pas dentrer plus avant dans cette question, cependant je formule ici volontiers lhypothèse selon laquelle il y a une surreprésentation des familles de catégories populaires au sein des enfants spécifiés comme handicapés, et que ces enfants nont pour autant aucune déficience dordre physique, mentale ou sensorielle. Seulement, pour des raisons historiques, le territoire du handicap a tendance à annexer celui de la difficulté sociale et de la grande difficulté scolaire  et de mon point de vue, cela constitue quelque chose à combattre ardemment. 
      2.3  La question de la réflexivité 
	2.3.1	Du vécu dune condition à son historicisation et du militantisme à 			lapprentissage de la recherche
	Dès le départ de la réflexion autour du mémoire, j'ai pris conscience de la distance qui sépare un travail de recherche à vocation scientifique et une posture de syndicaliste ou d'associatif. Également du fait que l'invocation d'une nécessaire réflexivité par l'ancien militant devenu apprenti chercheur ne pouvait pas suffire pour désamorcer complètement le danger d'une instrumentalisation du discours à caractère scientifique à des fins politiques. Sans pour autant prétendre à éviter entièrement les effets de processus sans doute en partie inconscients, et par là même difficilement maîtrisables  a fortiori quand ma situation d'apprenti limite les possibilités d'efforts et le cadre collectif de la mise en uvre d'une réflexivité « objectivant le sujet de l'objectivation » (Bourdieu, 1997)  il s'avère incontournable de procéder a minima à une mise en écriture des nécessités qu'il convient de mobiliser pour les atténuer.
	C'est en tentant d'insérer mon travail en cours dans une généalogie de travaux ayant pour sujet de recherche des objets voisins voire similaires au mien qu'elles apparaissent le plus clairement. C'est donc en définissant la perspective, les travaux antérieurs dans laquelle il s'enracine et l'horizon spécifique qu'il dégage que mon travail peut se donner des conditions de réflexivité. 
	Il ne s'agit pas de refouler ou tenter d'annuler l'expérience professionnelle et militante à la base de mon intérêt pour le sujet, mais ou contraire de lui conférer son véritable statut qui est celui d'initiation à une réalité sociale (le handicap à l'école, le handicap et l'école) que j'aborde aujourd'hui à travers mon travail de mémoire sous un jour nouveau, celui de la recherche en sciences sociales. Cette perspective invite à considérer les connaissances empiriques et contextuelles, les convictions politiques, les expériences militantes construites pendant ces cinq années (auxquelles il faudrait sans doute rajouter les trois années de formation d'assistant de service social  métier que j'ai refusé d'exercer  précédant mon entrée dans la fonction d'AVS) non comme des entraves mais comme des ressources qui, au travers de la démarche consistant à les mettre à distance et à les interroger, à les déplacer d'un rôle de moteur de l'action à celui de témoins de la construction d'une nouvelle forme d'action, peuvent permettre, grâce à l'effet d'objectivation qu'entraîne la lecture de travaux sociologiques dévoilant des réalités propres aux positions que j'ai occupées mais qui m'étaient jusque là inaccessibles, de contribuer positivement à l'élaboration de mon travail de recherche. 
	Sur le site du laboratoire d'études sociologiques des transformations et acculturations des milieux populaires (LESTAMP), association de recherche nantaise, la sociologue Joëlle Deniaud écrit :
«  (
) On en vient non plus à confondre maladroitement sociologie et travail social, mais à jouer de leur confusion, dans un dispositif idéologique où une sociologie fermée, unique est dès lors posée comme savoir régulateur et théorie pensante des missions du travail social. Cet horizon dune sociologie en prolongement des services sociaux, on le retrouve dans les sujets détudes des étudiants de maîtrise, dans un idéal de calque de la recherche, en manque de sponsoring, sur une supposée demande sociale, désormais envisagée, ici et maintenant, mais forcément ailleurs également, plutôt du côté de lhumus associatif, celui des structures municipales, territoriales que du côté des entreprises privées. En effet, cest bien le monde de la non insertion, cet envers de la mondialisation en marche, qui offre aux sociologues une véritable planche de salut, si lon en croit la litanie bien appréciée des sujets consacrés aux exclus, aux immigrés, aux précaires et autres victimes prêtes à être digérés par la bonne parole sociologique. (
) »
	Je ne suis pas sociologue, bien quadoptant une posture socio-historique dans lappréhension de mon objet de recherche, mais mon travail semble bel et bien concerné par ce que Deniaud nomme la « supposée demande sociale » se situant du côté de « lhumus associatif ». Etant bien considéré que ce quelle pointe me semble correspondre à une réalité quil convient de ne pas nier (et qui est même peut-être encore plus forte dans les sciences de léducation, sur un autre modèle), un soin particulier sera pris à ne pas glisser dans la tentation normative que ses propos décrivent. 
Ce quexprime Joëlle Deniaud questionne le pouvoir de réfraction du champ de la sociologie, mais aussi celui des sciences de l'éducation, c'est à dire leur capacité à retraduire de manière interne, selon la logique qui leur est propre, des « contraintes ou des demandes externes », notamment politique ou relevant dune « demande sociale » dont on est légitimement en droit de questionner le mode de production et de définition (Bourdieu, 1997). Il ne s'agit pas seulement en disant cela d'aborder le problème des parts dautonomie et dhétéronomie des sciences de l'éducation en tant que champ scientifique, mais de constater que ma position d'apprenti chercheur également « validé des acquis », est le produit d'une logique systémique propre au champ des sciences de l'éducation, et que la manière dont je vais aborder et réaliser mon travail ne dépend pas que de moi mais de la structure même du champ qui m'accueille, de la position que j'y occupe et des relations que j'entretiens avec ce que j'ai perçu des positions d'autres agents/acteurs. 
	Ma propre position est caractérisée par la place dans le cursus universitaire, passage obligé pour obtenir un droit d'entrée dans le champ, place dont les produits dits scientifiques (mémoires de master) n'ont pas a priori autant de gage de scientificité que ceux du troisième cycle, selon le niveau de formation à la recherche qui les caractérise, et évidemment que ceux des chercheurs dont c'est le métier, et qui fait que je me situe dans une zone très périphérique du champ des sciences de l'éducation, cumulant le statut d'apprenti (étudiant) de second cycle, de « validé des acquis » (donc, pour nombre d'universitaire, d'étudiant trop peu formé), et enfin prenant pour objet d'étude une question apparaissant comme marginale dans le champ des sciences de l'éducation, située à l'intersection de deux sous champs scientifiques relativement cloisonnés : celui de l'éducation scolaire ordinaire et celui de l'éducation spéciale, ou spécialisée. 
La position sociale de ma déficience 
« La force du regard est accentuée par la physionomie du visage stigmatisé par les traces dun vécu sédimenté. Chacune de ses expressions trahit avec plus ou moins de transparence la vie intérieure, lintentionnalité, le mouvement et laction. Regards et visages jouent en effet de pair, comme capteurs et émetteurs démotions, mais aussi en tant que principe dorientation et donc de projection. Lorientation du regard et la posture sont en effet des signes avant-coureurs du mouvement anticipé. Le sens de la vue exerce une place essentielle dans le fondement de toute relation intersubjective à la base de la vie sociétale, de même quun outil de prédilection dans les modes de la connaissance. » (Sauvageot A. (2003) Lépreuve des sens, de laction sociale à la réalité virtuelle, Paris : PUF ; cité par Alain Blanc, 2006). 
La démarche de recherche à laquelle je minitie dans ce travail prétend modestement, car non professionnellement, tenter de contribuer au « programme danthropologie cognitive réflexive » défini par Pierre Bourdieu, qui mêle indissociablement le développement des connaissances sur le monde social et celui de la connaissance de ceux qui les produisent, dans un modèle principiel de pratique de la recherche qui pose comme fondateur une « objectivation participante » (Bourdieu, 2003). De ce point de vue, le cadre théorique ici habité oblige à une clarification des éléments proprement sociaux qui se trouvent actualisés dans ma propre position dapprenti chercheur ne nourrissant pas dambition de concrétisation professionnelle de la pratique de la recherche  ce qui me place dans une position particulière, quil convient délucider. Sans sacrifier à une réflexivité narcissique qui se donne les atours dun processus dobjectivation, il est notable de mentionner quelques éléments simultanément indissociables de mon intérêt pour le sujet (la scolarisation des enfants handicapés, le handicap et le personnel AVS-i), de celui pour mon cadre théorique (la sociologie de Pierre Bourdieu) et de la manière dont jai pu problématiser mon sujet (la position du poste dAVS-i entre éducation scolaire et éducation spéciale). 
	
	En effet, et comme le suggère lexergue de la présente partie, je suis moi-même porteur dune déficience et ai occupé la fonction dAVS-i pendant cinq années scolaires ; mon père est éducateur spécialisé et ma mère enseignante. Autant dire que la position du poste dAVS-i semble faite pour moi : en effet, comme lécrit Francine Muel-Dreyfus (1983) :
 « Sil y a « harmonie » entre les hommes et les postes, cest que lhistoire du poste est susceptible dintégrer harmonieusement lhistoire sociale familiale de ceux qui occupent le poste » 
 	Cette double propriété dêtre déficient et issu de personnes occupant un poste dans des corps professionnels intermédiaires a contribué à ce que je trouve dans loccupation du poste dAVS-i un intérêt qui a tous les atours dune vocation et à ce que jintègre rapidement une structure syndicale afin de le défendre et de le valoriser. 
	Cette double propriété a également contribué à la construction de dispositions particulièrement bien faites pour constituer des éléments dune réception favorable et favorisée (bien quautodidacte) de la sociologie de Pierre Bourdieu  vers laquelle je me suis tourné alors que, étudiant dans un école dassistant de service social, un double questionnement portant à la fois sur mes origines paysannes et sur le caractère de contrôle social du métier que jétais en train dapprendre, et que je ressentais alors dune manière très forte dans mes stages, mavaient poussé vers le travail quil a produit sur le célibat paysan (« le bal des célibataires », ouvrage posthume de 2002) et vers ses ouvrages moins scientifiques des dernières années de sa vie (les « contre feux », 1 et 2, 1998 et 2001), puis vers « Ce que parler veut dire » (1982), etc. Il apparaît, et il mapparaît, que le présent travail, sil ne déroge pas (en tout cas autant que le permet ma position) aux conditions de scientificité et ne peut être réduit à ce que je vais énoncer, est le produit de nécessités proprement sociales qui se trouvent incarnées dans ma position sociale de personne déficiente, fils déducateur et denseignante, petit-fils déleveurs anciens paysans travailleurs, formé au travail social mais souhaitant devenir enseignant du premier degré, occupant une position sociale spécifique empruntant des éléments de pré-socialisation aux deux systèmes complémentaires mais opposés symboliquement que sont léducation scolaire et léducation spéciale, ancien brillant élève du scolaire mais avec une caractéristique objective, ma déficience, qui maurait placé probablement dans le spécial si la chirurgie navait pas atteint ses objectifs, ou si mes parents navaient pas eu les dispositions sociales (et lopportunité historique) qui leur a permis de sengager (et de mengager) dans la voie de la réparation chirurgicale, ou encore si la réussite scolaire navait pas été permise par ces mêmes dispositions, qui ne dépendaient pas de moi. 
	Je nai ainsi pas de mérite à produire ce travail, ni à le produire de la façon dont je le produis, affirmation qui ne procède en rien dune négation des conditions de possibilités dune individualité ou dune liberté, mais qui est au contraire au principe dune meilleure connaissance de leur nature, elles si fortement revendiquées par les professions intellectuelles, dont les occupants aiment à se penser entièrement libres et (surtout) uniques sans voir quils le sont dautant moins quils refusent les analyses portant au jour lillusion sociale qui peut les pousser à nier toute surdétermination proprement sociale de leur trajectoire et de leurs choix, y compris professionnels. (Bourdieu 1984, Bouveresse 2003). 
	
	Cest une fois dégagées les conditions sociales de production de mon propre travail, et le travail réflexif de mise au jour de tout ce qui détermine mon implication et les relations préexistantes que je suis susceptible dy investir au risque de le fausser, que je peux délaisser le « je » pour entrer de plein pied dans le « nous » de la communauté scientifique, de la communauté des chercheurs en sciences de léducation et plus particulièrement encore le « nous » de la communauté des (apprentis) sociologues  sans pour autant délaisser le « nous » de quiconque est intéressé par les thèmes ici abordés : le poste dAVS, lenfance handicapé, la politique de lemploi et cette partition historique, toujours active malgré les évolutions législatives, entre éducation scolaire et éducation spéciale.
	Au sein de ce dernier « nous », nous pensons fortement aux collègues AVS, aux anciens AVS, aux parents et aux familles, aux enseignants et évidemment aux élèves handicapés. 
Le champ des sciences de l'éducation et l'objet de recherche « éducation spéciale « 
	Il est fructueux de s'intéresser à ce qui caractérise ce cloisonnement disciplinaire. On peut le faire brièvement, sans prendre d'avance sur le développement du sujet, et à des fins méthodologiques, en s'appuyant sur un article de Gisela Chatelanat intitulé « Education et enseignement spécialisés : un champ fragmenté en sciences de l'éducation ? » paru dans un ouvrage collectif qu'elle a co-dirigé avec Greta Pelgrims et qui est titré « Education et enseignement spécialisé : ruptures et intégrations ». (2003).
	Elle y décrit les trois modes d'insertion académique de l'éducation et de l'enseignement spécialisés en Europe. 
Le premier est centré sur des approches médicales (psychiatriques notamment) et/ou psychologiques donnant une place écrasante aux « diagnostic et [aux] études des déficits, des symptômes et des lacunes du sujet apprenant » ; 
le second se base sur la complémentarité des approches disciplinaires, prenant comme postulat que : 
« (
) les difficultés rencontrées par le sujet apprenant résultent d'un manque de coordination et de complémentarité des professionnels ». 
Le troisième, minoritaire, professe, à la suite de Moore (1974, cité par Chatelanat), que « la pédagogie spécialisée n'est que de la pédagogie, et rien d'autre. », celle qui appréhende « l'enfant tel qu'il est » (Lemoine, 1978, cité par Chatelanat). 
	Ce dernier mode d'insertion scientifique de la question du spécialisé (que l'épithète concerne indistinctement l'enseignement ou l'éducation) est le seul à remettre en cause la validité et la fonction de cet adjectif, la partition historiquement construite entre soin, éducation et enseignement, et le seul à (implicitement) considérer que le champ de l'éducation et de l'enseignement spécial fait partie intégrante des sciences de l'éducation. 
	Dans le sous champ de la recherche en éducation non ordinaire, pourrait-on dire, 
« (
) le mot-clé, l'invariant autour duquel les chercheurs se rassemblent est toujours spécialisé », 
 fait remarquer Chatelanat. Elle s'interroge sur la fonction que remplit cette « mise à part d'un champ scientifique », questionne le fait de savoir si les recherches spécifiques de ces deux sous champs, qui entretiennent si peu de rapport entre eux, font naître des acquis scientifiques différenciés qui justifieraient un tel cloisonnement (« rupture »), ou si les produits de recherche ont vocation à se rencontrer et à converger (« intégration »). Nous pouvons nous interroger avec elle sur ces points, en remarquant également au passage que la bipolarisation académique entre l'ordinaire et le spécialisé reproduit de manière tout à fait fidèle (et saisissante) les réalités administratives et professionnelles propres aux deux champs. 
	C'est dans le troisième mode d'insertion académique de la question du spécialisé que nous nous situons ici très clairement, et dans les perspectives ouvertes par les questions posées par Gisela Chatelanat. 
	« Notre sujet en effet na pas la place ni lintérêt quil mérite parce quon a pas encore aperçu son ampleur et sa profondeur. On le pense comme un lieu de militance et dactions, alors quil constitue tout autant un sujet théorique », affirme Henri Jacques Stiker  (2000b).  
	Se situer au sein de ce courant, dans la volonté de dépasser les segmentations et les territoires de recherches, est une prise de position qui sopère dans la conscience de la dialectique entre la recherche universitaire en sciences de léducation et les pratiques professionnelles et dont témoigne lhomologie des divisions dans les structures des champs administratif, professionnel et universitaires en matière déducation. 
	Il ne s'agit pas du tout d'instruire un procès contre le milieu spécialisé et contre la recherche en éducation et enseignement spécialisés mais de s'interroger avec Chatelanat sur la fonction de cette partition dans le champ académique, sur son histoire et, au-delà, ainsi qu'esquissé par Stiker, sur la partition idoine qu'on constate dans les pratiques professionnelles, qui déterminent dans une large mesure le destin social de nombre de personnes handicapées et également le destin des « ordinaires moyens » d'être peu ou prou préservés de les côtoyer. 
	Un risque, parmi dautres, est à pointer ici, puisque inhérent au courant dans lequel prétend sinsérer notre travail : celui que Monique Vial évoque quand elle revient sur « le grand remue-ménage daprès 68 », au sein duquel, écrit-elle :
 « (
) professionnels de léducation spéciale ou chercheurs, forts de conviction marxistes, [ont] projeté sur le passé les débats où [ils étaient] alors engagés ». 
Ce risque concerne le « voisinage problématique de lhistoire et de la sociologie » (Mazereau, 1998), quand des schémas explicatifs idéologiques, par manque dobjectivation, prennent le pas sur la démarche scientifique pour appréhender le passé, rendant ainsi difficile « une approche historique qui ne se trouve pas réduite à une tentative implicite dexplicitation de la réalité actuelle » (Vial, 1990). Nous tenterons de garder en mémoire cet avertissement, et de le constituer en guide de la formalisation de notre réponse apportée à la problématique que nous avons définie  mais non sans avoir ajouté que le marxisme et les différentes formes de néo-marxismes nont pas le monopole du risque de linvestissement idéologique travesti en scientifique. 
		2.3.4  Les sciences de léducation et léducation spéciale
	Le département de sciences de l'éducation de Nantes offre une bonne illustration de la partition académique entre recherches sur le milieu ordinaire et spécialisé. Y étant inscrit, et layant découvert il y a peu (et ayant ainsi un regard naïf de novice), il est intéressant den tenter une brève analyse. 
Sur son site, l'Université de Nantes décrit le département comme dispensant des enseignements qui présentent « l'état actuel des savoirs » et posent « les problématiques dans le champ de la recherche en Sciences de l'Education ». Celles-ci, constituées de plusieurs disciplines, permettent « une lecture plurielle des faits éducatifs, des pratiques et des situations d'éducation ».  
	Cet « état actuel des savoirs », ces « problématiques » et ces « lectures plurielles » sont à entendre comme ne relevant exclusivement que de l'éducation dite ordinaire. Car à prendre connaissance des maquettes pédagogiques, on s'aperçoit que les enseignements consacrés à l'éducation spéciale, ou aux relations entre éducation scolaire et éducation spéciale, tout comme des enseignements sur les notions historiquement et socialement marquées dinadaptation ou de handicap sont quasiment inexistants. Il n'est donc pas dit explicitement que les faits éducatifs, les pratiques et les situations d'éducation lues de manière plurielle ne concernent pas les enfants handicapés ; c'est l'absence même de l'épithète spéciale qui nous dit sans nous dire que l'éducation en question est normale ou, pour le moins, non spéciale, c'est à dire destinées aux normaux. 
A prendre ce constat au premier degré, on comprend donc que léducation tout court, sans le terme spéciale, ne concerne que les enfants qui se situent en deçà de cette ligne qui les sépare des handicapés, de ceux relevant du pathologique, eux dévolus à une éducation qui n'en est pas une si elle n'est pas spéciale. 
	Toutes les espèces denfants ne sont ainsi pas concernées tant par les recherches que par les enseignements qui sont sans épithète ni attribut : seuls les « moyens et bien portants » le sont : ce dont ces faits témoignent, cest ni plus ni moins de la naturalisation, y compris dans le champ de la recherche, de léducation séparée et, maintenant que cette dernière est, formellement en tout cas, remise en cause, du désintérêt pour les enfants quelle concerne  sorte de point aveugle de la population scolaire (de manière homologue aux ATSEM, AVS, etc., dans les professions éducatives), réservé à ceux qui ont la « vocation », forcément spéciale. 
Bien évidemment la situation nantaise nest pas sur ce point singulière mais seulement révélatrice de lensemble du champ de recherche en sciences de léducation.
	Sur cette prégnance du spécial et sur sa fonction de rassemblement des exclus de lordinaire, il est notable de rajouter deux éléments importants, signes dune évolution des niveaux législatif et académique. La loi du 11 févier 2005 ne mentionne pas le mot spécial et, ainsi quen témoigne les travaux référencés dans ce mémoire, la notion commence à susciter des discussions tant sur ses vertus mystifiantes (Plaisance, 1999) que sur les fonctions que son non questionnement permet de dissimuler.
2.3.5 	Conclusion
	Ainsi les conditions objectives propre à ma position dans le champ, à ma position sociale et au fait que je suis porteur dune déficience, les caractéristiques du département de sciences de l'éducation de l'université de Nantes, celles du champ plus large des sciences de l'éducation et la spécificité du capital accumulé le long de ces huit années d'interruption d'études universitaires, déterminent très largement la nature de mon travail. 
	Celui-ci sinscrit également au terme dune décennie au sein de laquelle le nombre de équivalent temps plein (ETP) de personnel accompagnant scolaire a été multiplié par 40 (entre 1998 et 2008-2009, de 670 à près de 25 000), où a été votée la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 « pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », qui dans son volet scolarisation affirme le droit de tout enfant handicapé à être inscrit « dans l'école de son quartier », et qui vient rénover entièrement la loi du 30 juin 1975 dite « en faveur des personnes handicapées » (une des « dernière loi de l'Etat providence », selon Henri Jacques Stiker (2000)).
Dans une période également où le traitement médiatique de la question du handicap à l'école s'est considérablement accrue, suite à la loi de 2005 notamment, sous des formes qui mériteraient une analyse spécifique  qui viendrait sans doute mettre en exergue parmi d'autres choses les soubassements anthropologiques de nos sociétés industrielles vis-à-vis du handicap (Stiker, 1982, 2000) et, probablement, une propension du champ médiatique à accentuer fortement les traits de ce que ses gestionnaires projettent sur le sens commun en la matière, en dautres termes ce quils pensent que les gens pensent et quil convient de leur fournir et de leur dire. 
Visibilité médiatique et législation récente : la question de la scolarisation des enfants handicapés semble donc profiter d'une période paraissant propice à une réflexion collective sur la forme qui lui est donnée. Sans être absolument convaincu que ce soit le cas (mais en étant convaincu à la suite de Bourdieu que le contexte social, tout générateur de « modes » qu'il est, y compris sans doute dans la recherche  degrés de « réfraction » témoignant de l'autonomie des champs concernés , ne devrait pas dans un monde de la recherche idéale constituer une matrice directe d'intérêt scientifique sans retraduction rigoureuse selon les lois internes au champ), nous désirons par ce travail contribuer à éclairer la logique spécifique gouvernant l'existence de cet accompagnement scolaire en la re-situant dans le cadre plus général de l'histoire du handicap à l'école. 
	2.4 	 Décrire les origines : l'entrée socio-historique
	Vouloir faire l'histoire de l'émergence du poste dAVS tout autant que son histoire institutionnelle, préalable indispensable selon nous à toute recherche sur ses pratiques, et vouloir caractériser la nature de sa position, c'est tenter de décrire l'évolution des relations entretenues par l'Ecole républicaine et l'enfance anormale, irrégulière, déficiente, inadaptées, handicapée (selon l'époque). C'est faire l'histoire également des relations entre l'éducation spéciale et l'éducation scolaire, ce qui revient à faire l'histoire de l'éducation spéciale, puisqu'elle s'est constituée dans une logique de « défiance réciproque » « dos-à-dos » avec l'Ecole (Chauvière 2000). Ceci bien entendu non pour faire une « Histoire générale du handicap à l'école » mais bien une sociohistoire des relations entre l'enfance handicapée, les éducations scolaire et spécialisée selon l'entrée spécifique visant à décrire les conditions de production de l'émergence du poste. Cela implique que seuls seront retenus les éléments explicatifs déterminants pour répondre de manière satisfaisante à notre problématique de mémoire de master. 
« L'histoire de l'éducation spéciale est à l'origine une sociohistoire », nous explique Martine Ruchat (2003), « c'est à dire une histoire des acteurs et des mécanismes sociaux, étudiés le plus souvent à travers la question du pouvoir et des conflits d'intérêts. C'est une histoire qui met en exergue les processus de construction sociale des problèmes débouchant sur une histoire des institutions sociales, des pratiques et des discours dominants et dissidents ». 
C'est dans ce cadre ''traditionnel'' de la sociologie conflictualiste que nous situons notre analyse. La « relativité des objets de l'histoire de l'éducation spéciale », ajoute Martine Ruchat, « se prête particulièrement bien à l'approche socio-historique ». Pour s'en convaincre, il suffit de mentionner ici le fait que les différentes terminologies se succédant pour catégoriser l'ensemble de cette enfance si difficilement nommable (dans l'histoire des tentatives destinées à la nommer) n'ont pas toujours désigné le même ensemble de populations catégorisées selon les taxinomies nosographiques en vigueur : l'enfance délinquante, partie intégrante de l'enfance anormale depuis la fin du XIXème siècle et englobée dans la notion générale d'enfance inadaptée codifiée en 1943 sous Vichy (Chauvière 1982), est exclue du périmètre de l'enfance handicapée, nouvelle catégorie administrative apparue avec la loi du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées. 
	Cette sociohistoire a évidemment elle-même une histoire, marquée en France par des travaux fondateurs publiés dans les années 1970. Nous avons fait le choix daborder au long de notre développement quelques aspects épistémologiques relatifs à lhistoire des recherches autour du handicap et de lécole, et de léducation spéciale, et ce plutôt que den faire ici, au sein de lintroduction, une présentation condensée. Ce choix sexplique par le fait que le temps consacré à ce travail nous semble insuffisant pour produire une vision densemble de lhistoire de cette sociohistoire apte à être la base dune critique scientifique et dun positionnement suffisamment rigoureusement argumenté. Cest pourquoi les différents courants de recherche, les interprétations quils suscitent et les oppositions quils font naître sont dispersés dans ce mémoire au gré de la situation quoccupent dans notre plan objet de divergences et origines de conflits entre chercheurs.
La théorie des champs (Bourdieu, 1997) est à la base de nombreux travaux, et à leur suite sera le cadre théorique dans lequel sinsérera la partie socio-historique de ce mémoire. Cette théorie, construite tout au long de la carrière scientifique de Pierre Bourdieu, est articulée autour de plusieurs concepts, dont celui de champ, qui constitue la pierre angulaire du présent travail. 
2.4.1 	La théorie des champs
Elaboré pour sortir de lopposition entre internalisme et externalisme en matière dinterprétation scientifique des productions de discours (de quelque type que ce soit : artistique, juridique, scientifique, etc.), le concept de champ est central dans luvre théorique de Pierre Bourdieu. Il désigne un « univers dans lequel sont insérés les agents et les institutions qui produisent, reproduisent ou diffusent les discours » artistiques, juridiques ou scientifiques, pour poursuivre avec nos exemples. « Espace intermédiaire » entre ceux revendiqués par les deux courants (idéal typiques) dont il est censé favoriser le dépassement (le texte seul, dun côté, et lensemble de la société et son contexte historique de lautre), il est doté de lois spécifiques aux objets spécifiques qui le fondent, et, « sil néchappe jamais complètement au contrainte du macrocosme [la société en générale], il dispose à son égard dune autonomie partielle, plus ou moins marquée ». 
Cette autonomie a comme indicateur principal ce que Pierre Bourdieu appelle le « degré de réfraction », c'est-à-dire la capacité du champ à retraduire selon les logiques qui lui sont propres les « contraintes externes ». Plus le degré de réfraction est important, plus le champ est autonome. « Inversement », ajoute Bourdieu, « lhétéronomie dun champ se manifeste essentiellement dans le fait que les problèmes extérieurs, notamment les problèmes politiques, sy manifestent directement ». 
Une des propriétés objectives dun champ est quil est le lieu de luttes pour limposition de la définition légitime des lois spécifiques qui le régissent, luttes organisée autour de deux axes : le changement ou la conservation. Les structures et les dynamiques du champ sont produites par les luttes qui sy déroulent, tout autant quelles les produisent. En dautres termes, la « structure des relations objectives » entre les agents du champ détermine (« ou oriente », ajoute Pierre Bourdieu) les discours et prises de position des agents au sein du champ, aussi bien quelle est orientée et est déterminée par eux. 
Ce qui caractérise également ces prises de position est lié à la nature du capital symbolique détenu par lagent, capital « dont on sait quil est toujours fondé sur des actes de connaissances et de reconnaissance ». Ce capital symbolique (Pierre Bourdieu prend lexemple dune des ses formes spécifiques, le capital scientifique dans le champ académique), qui détermine le rapport aux règles du jeu propre au champ, est corrélé à lorigine sociale de lagent : par exemple, « ceux qui sont nés dans le jeu ont le privilège de linnéité», et ont moins besoin que dautres, du fait de lincorporation des lois spécifiques du champ, de retraduire sans cesse ce qui est perçu pour sassurer la « maîtrise des lois immanentes du champ ». Le concept de capital symbolique, ainsi que la notion dhabitus, (ensemble de « dispositions acquises » dun agent contribuant à déterminer le rapport quil entretient avec le champ dans lequel il se trouve) sont des outils également utilisés. 
Lorsque la première partie, portant sur lhistoire du champ de lenfance inadaptée, la place de lécole en son sein et lhistoire institutionnelle du poste dAVS, fait mention dagents ayant occupé des positions historiquement reconnues dans lhistoire du champ, et bien que le cadre (et lambition « cartographique ») de ce travail ne permettent pas de situer précisément les personnes citées dans les structures objectives du champ qui les accueille, nous tenons à préciser que le lecteur  ou un éventuel futur chercheur  éventuellement intéressé par ces points pourra les trouver, pour certains dentre eux, dans certains des travaux référencés.
Pour résumer, « les agents sociaux sont insérés dans la structure [du champ] en des positions qui dépendent de leur capital et ils développent des stratégies qui dépendent elles-mêmes, en grande partie, de ces positions, dans la limite de leurs dispositions ». « Les personnes dans ce quelles ont de plus personnel sont, pour lessentiel, la personnification des exigences réellement ou potentiellement inscrites dans la structure du champ ou, plus précisément, dans la position occupée à lintérieur du champ » (Bourdieu, 1997, 1992)
Nous tentons dans la première partie de ce travail, en référence à cette théorie des champs qui est elle-même à lorigine, sous des formes plus ou moins différentes, de la majorité des travaux auxquels nous nous référons, de mettre en exergue à travers létude de son histoire la structure du champ de lenfance inadaptée ainsi que ses propriétés propres (terme dont le sens est ici homologue à la propriété des matériaux en physique, c'est-à-dire quil désigne des phénomènes directement liés à la structure objective propre à chaque champ et qui lui sont donc spécifiques). La seconde partie est directement centrée sur les accompagnants scolaires : les logiques qui gouvernent à leur apparition dans le champ éducatif (que lon peut considérer comme englobant les sous champs de lenfance inadaptée et de léducation scolaire), la nature de leur position et de leur pratique et les conditions qui déterminent cette dernière. 
		2.4.2 	Le cadre historique choisi
	Lhistoire du rapport des sociétés avec linfirmité et la déficience, explique Pierre Bonjour (2006), montre quil y a des particularités pour chaque culture dans la façon « de [les] intégrer dans [sa] représentation du monde », de « rationaliser [son] rapport à lanormalité ». Il en résulte, consécutivement  au travail de construction de modèle dintelligibilité des chercheurs, des paradigmes à laune desquels les cultures appréhendent les populations concernées. Pierre Bonjour parle par exemple des paradigmes du maléfice, de la malédiction, de la victime, qui ont pu prédominer dans les temps anciens, ceux de lantiquité et du moyen-âge. La révolution française, en affirmant « le secours gratuit » pour les citoyens « hors détat de travailler » inaugure le paradigme des droits de lhomme. Chacun dentre eux, on peut le supposer, na pas complètement disparu et a contribué à une sédimentation complexe du rapport de nos sociétés à la-normal. 
Pour Pierre Bonjour, le 19ème siècle est le siècle de lémergence de paradigme de la normalisation, du retour au normal, autant que possible, par le biais dactions déducation, de moralisation, dassistance. Sur cette base se construit la triple logique à luvre durant le 20ème siècle : réadaptation, euphémisation, accessibilité, qui inaugurent le paradigme de la citoyenneté. Cest cette émergence de la normalisation et de la citoyenneté qui nous intéresse.              
Notre propos est centré, dans le cadre national de la France, sur lEcole et ses rapports  avec le champ de léducation spéciale. Or lEcole de la République, telle quelle a évolué et que nous la connaissons aujourdhui, senracine dans lidéologie républicaine de la troisième république, tout comme la genèse du champ de léducation spéciale en France. Pour toutes ces raisons, le cadre historique retenu pour développer notre travail commence dans les années 1880, et ce quil est désormais admis de nommer les lois scolaires. Il se prolonge jusquà la récente loi n° 2005-102 du 11 février 2005 « pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ». Il est notable dajouter que lensemble des recherches sociohistoriques dont nous faisons mention à plusieurs reprises dans ce mémoire et qui forme notre matière première, adoptent souvent ce même cadre historique, en tout cas en ce qui concerne sa première borne ; nous verrons pourquoi dans la première partie du présent travail. 
	Ce cadre est tout dabord abordé de manière chronologique, dans une optique de « réinsérer les moments critiques dans les séries où réside le lieu de leur intelligibilité » (Bourdieu, 1984). Les « moments critiques » sont en effet nombreux dans lhistoire dun champ dont une des propriétés est justement le renouvellement et linnovation institutionnelle. Se centrer sur eux pourrait faire oublier que « les évènements historiques naissent au carrefour des histoires relativement autonomes » ; en loccurrence au carrefour de lhistoire de plusieurs champs administratifs, professionnels et institutionnels, ce qui est une des structures fondamentales du champ de lenfance inadaptée.
Les AVS-i et le cadre de leur existence : de lhistoire aux notions
Chapitre 1 : Nous présentons dans ce chapitre lhistoire,  la structure et les propriétés du champ de lenfance handicapée (ou de léducation spéciale), c'est-à-dire lhistoire des rapports entretenus par lécole avec ces enfants et leurs familles. Nous rappelons les logiques (professionnelles et administratives notamment) à luvre dans sa dynamique. 
Chapitre 2 : Nous proposons dans cette partie une analyse du soubassement notionnel traduit dans la politique publique quest la notion dinclusion : son histoire et sa circulation (qui savère internationale) Nous en proposons une définition et une ébauche de modèle dappréhension pour la recherche. Nous présentons également quelques esquisses danalyses centrées sur sa réception dans le milieu académique français, et dans la profession enseignante. 
Chapitre 3 : Ce chapitre est consacré à lanalyse du poste dAVS-i, à son histoire institutionnelle, à la présentation de ses propriétés, à la rencontre de ces dernières avec celles des AVS-i interrogés. Il fournit des éléments de compréhension qui nous semble essentiels pour quiconque souhaite comprendre de quoi relève laction des AVS-i dans les classes et/ou entamer une recherche sur ce sujet. 
Chapitre 4 : Ce dernier chapitre se propose de considérer le premier référent notionnel du poste dAVS-i, nouveau paradigme des métiers de la relation : laccompagnement. Au travers de lanalyse sont présentées des pistes pour la recherche et des éléments explicatifs permettant de mieux cerner la pratique des AVS-i et la fonction sociale dévolue au poste. 
	Chaque chapitre est illustré (à des degrés différents) par des extraits dentretien que nous avons effectué avec six AVS-i. Leurs paroles viennent ainsi tantôt à lappui tantôt initier des analyses qui ont toutes pour double objectif de contribuer à intéresser les chercheurs aux questions abordées et de fournir aux individus qui vivent les politiques de scolarisation des enfants handicapés (quelle quy soit leur position) des éléments de compréhension et daction. 
	Abordons dès à présent la présentation de ces AVS-i.
Présentation des AVS-i interrogés : texte et contexte
La parole des AVS-i concernant loccupation de leur poste a été recueillie par le biais dun enregistreur, puis saisie sur un fichier informatique. Elle est ainsi rapportée sous la forme de texte. Or, en accord avec notre option théorique, nous affirmons ici quun texte nest rien sans contexte  plus précisément, un discours ne peut être intelligible sans que soit resitué à la fois les propriétés du champ qui le voit émerger tout autant que celles de lindividu qui lénonce. Lémergence de la parole des AVS-i interrogés se doit ainsi dêtre située dans un triple mouvement : 
tout dabord par rapport au champ dans lequel elle est produite  et sur lequel elle sexprime. Cest le rôle de la première partie de ce travail que de caractériser le champ de lenfance inadaptée ;
ensuite par rapport à la position sociale des AVS-i qui la produise ;
et enfin par rapport au cadre naturel et social dans lequel ils vivent.
Ce sont ces deux derniers points que la présente partie sattache à élucider. 
Toutes les personnes interrogées dans le cadre de cette recherche travaillent en milieu rural. Il nous semble important de sarrêter un instant sur cette expression tant elle est imprécise tout en étant, trop souvent, reçue comme suffisante  ce qui est le propre dun terme naturalisé, « dimension indiscutée des discussions », selon lexpression de Pierre Bourdieu. Nous allons tenter ici de fournir des éléments généraux de compréhension de ce quest le milieu rural, cadre de travail dans lequel les six AVS-i interrogés évoluent ; en dautres termes, la partie qui suit sattache à esquisser un modèle dintelligibilité de ce quest une école dans un milieu rural, et plus précisément ce que sont les écoles du secteur où travaillent les AVS-i interrogés dans les spécificités du territoire où elles sont inscrites. 
Territoires et pratiques éducatives
Lactivité économique, les formes et les possibilités de la mobilité géographique, les traditions culturelles autochtones ou nouvellement ancrées, la pyramide des âges de la population, le renouvellement des populations, les formes de la vie naturelle, la géographie et les spécificités du climat
etc. sont autant déléments qui, en vertu du processus que Pierre Bourdieu modélise comme une « intériorisation de lextériorité et extériorisation de lintériorité », fournissent un cadre contextuel au déroulement de la vie dun établissement scolaire. Entre les dynamiques internes au cadre symbolique de la classe et de lécole et celles des cadres national, européen et transnational qui déterminent les orientations des politiques éducatives, le cadre territorial (qui se décompose lui-même du canton à la région, selon la force des dynamiques qui les traversent) est un espace intermédiaire, un méso espace, qui correspond à ce que Nicole Ramognino nomme « lhabitat naturel et social ». De notre point de vue, il est difficile dhabiter un métier tel que celui denseignant  ou une fonction telle que celle dAVS-i  sans, un moment ou un autre, ressentir la nécessité de sattacher à connaître le territoire dans lequel il ou elle sinscrit, puisque ce même territoire, selon des modalités différenciées propres aux logiques et aux forces sociales dans lesquelles les individus sinscrivent, se trouve lui-même inscrit dans les corps et les esprits des enfants (et dans ceux de leurs parents) qui doivent apprendre à devenir élève. 
La formation professionnelle des enseignants, restreinte à la connaissance des théories et des pratiques didactiques et pédagogiques (absolument nécessaires par ailleurs), semble prendre bien peu en compte tout ce qui lie lexercice de ce métier avec les logiques de territoires.
Bertrand Geay et Jean-Pierre Lécureuil (2008) ont travaillé sur cet aspect, mais sur sa déclinaison spécifiquement primaire et rurale, c'est-à-dire sur la façon dont les enseignants du premier degré sinsèrent professionnellement en milieu rural. En gardant à lesprit que cette analyse est centrée sur le métier denseignant, nous allons, dans loptique de clarifier le cadre de travail des AVS-i interrogés, nous appuyer ici sur leurs travaux. Pour Geay et Lécureuil, poser la question de linsertion professionnelle des enseignants en milieu rural revient à 
 « Interroger les rapports qui se sont historiquement construits entre lécole et le territoire, entre ce qui est attendu socialement et politiquement des maîtres et ce à quoi ils sont eux-mêmes disposés ». 
Ce qui est « attendu socialement et politiquement » des AVS est une partie importante de la problématique du présent travail, tout autant que ce qui caractérise les évolutions « des rapports entre lécole et le territoire », notamment avec ce quinduit la loi n°2005-102 du 11 février 2005, postulant que tous les enfants en situation de handicap ont désormais le droit dêtre scolarisé « dans lécole de leur quartier ». Le travail de Geay et Lécureuil tend à montrer que : 
 « Cest dune certaine façon contre les représentations les plus anciennes dun engagement total du maître dans lespace local, mais aussi contre le rejet de ces représentations et le primat donné à lurbain et à tout ce qui sy rattache que se construisent [les] pratiques et représentations professionnelle [des maîtres en milieu rural] » 
Mention est faite de ce passage afin de ne pas faire léconomie dune analyse qui contribue à esquisser un éclairage important dune propriété générale de lexercice du métier denseignant en milieu rural  étant bien considéré cette analyse éclaire également le discours des AVS-i interrogés dans la mesure où enseignants et AVS-i partagent le cadre spatial et symbolique de la classe dans leur travail quotidien. 
De la même manière, il est pertinent de mentionner ce que Yves Alpes Jean-Luc Fauguet (2008) notent à propos des « enseignants des classes rurales » :
« (
) plus quailleurs, [ils] convoquent souvent dans la classe lenvironnement immédiat  dans sa complexité et sa diversité , font appel bien volontiers aux connaissances pratiques et quotidiennes es enfants et de leurs parents pour illustrer les séquences dapprentissage, et entretiennent eux-mêmes bien plus de relations sociales avec les gens et les paysages alentours. Nous sommes convaincus que cette intensité des liens sociaux a des effets positifs pour les conditions de létude ». 
Pour toutes ces raisons, il est pertinent de poser le cadre rural de travail des AVS-i interrogés comme en premier lieu différent dun cadre de travail qui serait spécifiquement citadin. Cette remarque est bien faite pour pointer la vigilance nécessaire quant à une tendance à une forme dessentialisation des pratiques professionnelles (quil sagisse du métier denseignant ou de la fonction dAVS-i) qui peut caractériser certaines recherches en éducation : parmi les facteurs essentiels à prendre en compte pour construire des modèles rigoureux dintelligibilité des pratiques, les rapports du professionnel avec le territoire dans lequel il travaille et ceux des élèves et familles avec le territoire dans lequel se situe létablissement quils fréquentent, occupent de notre point de vue une position essentielle. 
Cette brève incise nous oblige à faire porter le regard sur les processus de différenciation à luvre au sein de lensemble de territoires désignés par le sens commun comme relevant de la catégorie « milieu rural ». Pour élucider cet aspect, nous nous sommes basés sur la lecture et lexploitation de deux ouvrages titrés « sociologie de lécole rurale », écrit par Yves Alpe & Jean-Luc Fauguet et publié en 2008 chez lHarmattan, et « Géographie de lécole rurale », ouvrage collectif coordonné par Yves Jean et édité par Ophrys éditions : les éléments dégagés sont ainsi mis systématiquement en rapport avec les caractéristiques du territoire rural où résident et travaillent les AVS-i interrogés. 
3.2 	Milieu rural ?
« Depuis le début des années 1970, les espaces ruraux connaissent dimportantes mutations démographiques, économiques et culturelles qui brouillent les représentations traditionnelles des campagnes » (Jean, 2008)
	Définir le milieu rural est une gageure pour les géographes et les statisticiens. Ces dernières années ont connu des évolutions décisives en la matière. Pendant longtemps, pour lINSEE, ce qui a prévalu cest le seuil de 2000 habitants en dessous duquel une commune était considérée comme rurale. En 1996, cest le zonage en aire urbaine (ZAU) qui prend la suite de ce principe sommaire, en instituant des espaces à dominante urbaine ou rural. Dès 1998, un groupe de travail réunissant des membres de lINSEE et de lINRA « constate linadéquation de ce zonage pour une analyse fine de lespace rural » (Alpe et Fauguet, 2008). Il propose alors de mettre en place un découpage qui sorganise autour du principe dattraction économique et sur la « polarisation de lespace par la relation lieu demploi/lieu de résidence ». Cette nouvelle approche produit quatre catégories, qui se définissent en fonction du degré dinfluence urbaine : 
le rural sous faible influence urbaine (20% des actifs travaillent dans le milieu urbain) ;
les pôles ruraux (offrant de 2000 à 5000 emplois) ; 
les périphéries de pôles (20% des actifs travaillent dans les pôles) ;
et enfin, par défaut, une catégorie nommée « rural isolé ». 
Mais en 2002, ce redécoupage connaît une nouvelle évolution, pour se transformer en zonage en aire urbaine et en aire demploi de lespace rural (ZAUER), qui réduit le découpage en trois catégories : 
les pôles demploi de lespace rural ;
les couronnes des pôles demploi ; 
les autres communes (toujours définies par défaut)
Le territoire dans lequel travaillent les AVS-i interrogés relève, selon la classification de 1998, des catégories « pôles ruraux » et des « périphéries de pôles », ou, selon celle de 2002,  des « pôles demploi » et des « couronnes de pôle demploi ». Il sagit dun territoire économiquement prospère, caractérisé par une activité agricole marquée par lélevage (dominé par la production laitière) et par une activité industrielle dynamique. Il se situe entre deux grandes villes à vocation de capitale régionale qui exercent sur lui une attraction importante en terme demploi  et qui fait que les zones dattraction les plus importantes sont caractérisées par des prix de vente ou de location de lhabitat très élevés (« la ville à la campagne »), reléguant ainsi les populations à faible revenus dans la périphérie de ces deux villes ou dans les zones rurales qui en sont le plus éloignées. A titre illustratif, nous pouvons par exemple évoquer le fait quune des communes périphériques à une des deux grandes villes constituant les pôles urbains du territoire ici évoqué a (en 2003) 3% dhabitat social et 80 allocataires du revenu minimum dinsertion pour environ 15 000 habitants.  
	« La société aujourdhui, cest la ville ». Voici ce qua déclaré un responsable régional de la « politique de la ville » lors de louverture dun cours sur ce thème lors dune formation dassistant de service social en 2002. Cette affirmation, que jai pu recevoir comme une provocation mais qui nen était pas forcément une de la part de celui qui la prononcée, et qui en dit long sur la doxa qui gouverne les politiques territoriales menée par les élites politiques et administratives, est utile pour introduire le fait que le milieu rural se définit aujourdhui par rapport à la norme quest devenu lespace urbain, c'est-à-dire le plus souvent par défaut  ainsi quon peut le constater pour les catégories visées plus haut. 
	Jusquau milieu du 20ème siècle, lactivité agricole représente la majeure partie de lactivité économique à la campagne ; en 1950, cest encore 50% de la population rurale qui est paysanne. Aujourdhui, cette proportion est de 15%. La population ouvrière (je ne parlerai pas ici d« opérateur », d « agent de production » ou de « maintenance », termes dont certains économistes et sociologues  sans parler des médias  se complaisent à utiliser, actant dans leur usage linguistique de la volonté plus ou moins consciente den finir avec le mot « ouvrier ») est aujourdhui largement plus représentée dans le milieu rural que la population agricole, et également proportionnellement plus importante que dans la plupart des zones urbaines : elle représente 36% des actifs ruraux en 2008. Le territoire dans lequel travaillent les AVS-i interrogés ne fait pas exception : il se caractérise par limplantation, dans les « pôles demploi », de nombre dusines (dont beaucoup dagro-alimentaire), et par une faible proportion dagriculteurs  ceci bien que le paysage soit évidemment marqué par lactivité agricole. 
	Cette mutation importante saccompagne dun phénomène de migration croisée qui tend à homogénéiser « la population qualifiée de rurale (
) du point de vue de ses caractéristiques économiques, sociales et culturelles » (Alpe & Fauguet, 2008). En effet, si, entre 1990 et 1999, 2,4 millions de personnes (dont 63% de moins de trente ans) ont quitté les zones rurales, cest 3,5 millions qui sy sont installés. Alpe et Fauguet dégagent trois grands types parmi ces nouveaux ruraux : 
tout dabord des ménages instruits, aisés, qui arrivent à la campagne pour le lieu de vie mais qui ne sintègrent que peu dans les sociabilités traditionnelles existantes ;
ensuite des ménages dinactifs, généralement âgés (à ce titre, Alpe et Fauguet rappellent que cest 30% des habitants des communes rurales qui ont plus de 55 ans) ; 
et enfin des familles en difficulté sociale et/ou financière. 	
Tout ceci concoure, écrivent Alpe et Fauguet, à un « contexte général douverture (
) qui renforce les mutations culturelles (
) et constitue de nouvelles sources de tensions ». En effet, le voisinage de ces populations de migrants entre elles et celui avec les autochtones ancrés territorialement depuis plusieurs générations, font naître des situations de tensions (au sens sociologique du terme) qui trouve des formes de répercussions dans le périmètre de lécole. 
Parmi les familles fréquentant les écoles où travaillent les AVS-i interrogés, on retrouve des représentants de trois des quatre catégories de population rurale dégagées par Alpe & Fauguet, soit : 
les historiques (installées sur le territoire depuis plusieurs générations, groupe qui se décompose selon lorigine communale plus ou moins proche de la commune dimplantation de létablissement) :
les migrants « instruits et aisés »
  
et les migrants « familles en difficulté ». 
Dans les façons dont les enseignants évoqués dans les entretiens, ou les AVS-i entretenus, ont de se positionner face à tel ou tel enfant, on peut retrouver des clefs de compréhension (qui ne se suffisent pas à elles-mêmes, mais  qui sont très importantes de notre point de vue) à la fois dans le rapport quentretient la famille de lélève en question avec le territoire et dans celui quentretient lenseignant lui-même, ainsi que dans la mise en rapport de ces deux rapports
Quen est-il par ailleurs des caractéristiques scolaires du milieu rural ? Au niveau national, 30 % des communes françaises nont pas décole (en 2008), notent Alpe & Fauguet ; ce pourcentage est de 50% en ce qui concerne « les 12 départements les plus ruraux ». Ils mentionnent également le fait que ces départements connaissent une « décroissance continue du nombre des élèves, deux fois plus vite que la moyenne nationale » : plus de 2000 écoles à classes uniques ont disparu en dix ans. Elles formaient le quart des écoles en 1960, et le neuvième en 2000. Ce mouvement se traduit, à lopposé, par un nombre croissant de « regroupements pédagogiques intercommunaux » (RPI) : 40% des écoles du milieu rural en dépendent, et « ce pourcentage ne cesse de croître ». Ces évolutions sont des conséquences directes des mutations des formes de la mobilité, qui sont indissociables de celles du marché du travail et, corrélativement, de celles du droit du travail.  
Enfin, esquissons pour finir quelques traits de comparaison entre scolarisabilité rurale et urbaine : Alpe et Fauguet notent que les recherches en la matière ont montré quil ny avait pas décart significatif en matière de résultats scolaires entre élève rural et élève urbain. Néanmoins, les représentations et les trajectoires scolaires afférentes sont clairement différenciées : si 68% des élèves du centre ville ont comme projet un diplôme de lenseignement supérieur, ils ne sont que 38% parmi les élèves de milieu rural. De la même manière, là où 40% des élèves de centre ville expriment le désir de partir et daller travailler ailleurs que sur leur territoire, ils sont seulement 17% à formuler ce souhait en milieu rural. 
Tous ces éléments forment un contexte général de travail des AVS-i qui doit constituer 
un guide important chez le lecteur dans son appréhension de la parole des personnes interrogées  et de leur profil sociologique, que nous détaillons ci-dessous. 
3.3 	Les AVS-i interrogés : situation dans lespace social des positions. 
Les cinq femmes et le seul homme en fonction dAVS-i interrogés pour mener à bien ce travail sont donc tous, au moment de lenquête, des résidents du milieu rural où ils travaillent. Au-delà de cette réalité, et afin de les situer dans lespace social des positions, nous avons recueilli auprès deux quelques éléments dinformations susceptibles desquisser un éclairage des logiques sociales à luvre dans la production de leur point de vue que constitue la rencontre de leur position sociale avec celle du poste dAVS-i. Nous avons notamment recueilli : 
leur niveau scolaire et leur parcours de formation ;
des fragments de leur histoire sociale familiale : la profession des grands parents, celles des parents, ainsi que lévolution de leurs situations géographique et territoriale. Ceci nous permet davoir une vision (certes limitée, mais ici suffisante) de la trajectoire familiale relativement à lappartenance sociale  bref du rapport à la mobilité, indissociablement sociale et géographique ;
leur statut dinitié au handicap (ou non), c'est-à-dire, selon Erving Goffman (1975), le fait quils soient ou non des personnes qui, du fait dune position familiale ou professionnelle, connaissent les effets dans le temps et dans lespace dune déficience sur le quotidien de la personne qui la porte et sur son entourage ;
leur projet professionnel
Lensemble de ces informations est présenté dans le tableau 1 (ci-dessous), puis développé ensuite de manière synthétique au sein dune brève présentation de chaque AVS-i interrogé. 
Age
Niveau scolaireProfessions des grands-parentsProfessions des parentsRapport au territoire rural considéréInitié (familial, professionnel)Projet professionnelNiveau de formationFormationCécile31IIIBTSMécanicien, ambassadrice de produit de beauté, facteur, mère au foyer
Secrétaire, chauffeur mécanicien poids lourds
Autochtone
Oui (prof.)
SophrologuePascal35IIIDUTCordonnier, militaire puis électricienProfesseur(e) danglais, comptableMigrant 
(- de 10 ans)   Oui (fam. & prof.)Prof des écoles (--)Noémie38IIMaîtrisePêcheur, vendeur Chauffeur routier, femme de ménageMigrante 
(-de 20 ans)NonProf des écoles (--)Age moyen34,7Sylvie24IILicence 
+ année de PE1agriculteursagriculteursautochtoneNonProf des écoles
(++)Lalie24II
Master 1Ouvrier, femme de ménage et nourrice ; agriculteurs  
Ouvrier, ouvrièreMigrante
 (- de 5 ans)NonProf des écoles
(-)Julie31IIILicenceForgeron, maréchal-ferrant ; menuisier Forgeron puis serrurier en usine, secrétaireautochtoneNonProf des écoles
(+)Age moyen26,4Moyenne30,5 ans
Tableau 1 : Caractéristiques des AVS-i interrogés : anciens et nouveaux recrutés
	Cécile a 31 ans au moment de lentretien. Il se trouve que, bien quhabitant actuellement à une trentaine de kilomètres de Julie, elle est originaire de la même commune quelle. Ses quatre grands-parents également. Ces derniers étaient, nous explique Cécile, « mécanicien et ambassadrice de produit de beauté, facteur et mère au foyer ». Ses parents sont devenus « secrétaire dune agence dassurance et chauffeur mécanicien poids lourds ». Cécile, elle, a obtenu un BTS force de vente. Elle a par suite exercé en tant quattachée commerciale, puis est devenue agent territorial spécialisé en école maternelle (ATSEM), avant dentrer dans la fonction dAVS-i : 
Cécile : [lentrée dans la fonction dAVS-i cest] arrivé (...) quand jétais ATSEM à O., enfin moi avant jétais attachée commerciale, hein, banques assurances, donc euh
 jen voulais plus hein
 (
) et lécole donc recherchait une ATSEM
 en CES-CEC, à lépoque
 je me dis bah jy vais, je postule quoi... forcément jai croisé [le directeur de lécole primaire], qui mavait déjà vu, donc cest passé impeccable
 et jai fais deux ans ATSEM
 ça me convenait pas, (
)
jai envoyé une candidature et ça sest fait comme ça, quoi
 ni plus ni moins
Guillaume : (
) tu as postulé pour être assistante déducation
 Pas forcément AVS-i ?
Cécile : non, pas forcément AVS-i
 on ma proposé ça en fait
 ouais
 sachant quen plus moi javais mentionné que je métais occupé [dune petite fille pluri handicapée, NDR], si tu veux, ça sest fait quand même relativement naturellement
 (Page 23-24)
	Cécile est recrutée en 2003. Cette année-là, ça fait déjà quatre ans quelle a entamé une formation de sophrologue. Elle a obtenu un « diplôme de praticien en sophrologie spécialisations enfance, adolescence, apprentissages, parentalité, et sophrologie appliquée au monde du travail (accompagnement des métiers médicaux et socio-éducatifs) ». Au terme de son contrat dAVS-i, en septembre 2010, elle souhaite sinstaller en qualité de sophrologue, « en libéral ou en structure ». Cécile et Noémie sont les seuls AVS-i interrogés à être parents. Cécile a également la particularité dêtre la seule des six personnes entretenues à ne pas souhaiter être enseignante. Cependant, si elle nourrit un projet professionnel, Cécile nen exprime pas moins les éléments suivants :
Cécile : (
) je ressors du contrat, tu vois, assez euh
 je suis contente de ce que jai fait, tu vois, je pense que cest pas anodin, dans la vie, davoir fait ce job pendant six ans
 (
)
 quand tu es pas armée, que tu arrives et que cest la première année que tu fais ça, que tu te fais plomber, que
 je sais pas
 ça mest pas arrivé mais
 ça fait six ans que je fais
 tu vois, tu tarmes de trucs, tu développes un sens de ladaptation absolument efficace, cest
 mais jen sors avec « quelles sont les perspectives derrière »
  vraiment, vraiment je minterroge
. (Page 42)
	Par ailleurs, elle a eu une expérience professionnelle (deux mois et demi) qui a précédé loccupation du poste dATSEM, qui contribue à lui donner une (grande) partie des propriétés dune initiée professionnelle : 
Cécile : [jai fait] 
 un remplacement avec lassociation E., à O. 
 voilà je voulais bosser avec les gosses, et en fait yavait une petite fille (...), polyhandicap, super lourd enfin je sais même pas si elle est encore en vie à lheure actuelle, tu vois
  et cette gosse je laccompagnais
 et chez elle, tu vois je faisais assistante de vie
 auxiliaire de vie sociale
 et en même temps à lécole (
) (page 23)
	Recrutée en 2003, Cécile fait partie du groupe des « anciens AVS-i ».
Pascal est le seul homme de léchantillon  ce qui est vraisemblablement assez représentatif de la part masculine des occupants du poste, et même sans doute encore surestimé. Il a 35 ans au moment de lentretien. Ses grands-pères étaient cordonnier du côté paternel, et militaire (puis électricien) du côté maternel. Son père est devenu comptable et sa mère professeur danglais. Ses deux parents viennent de départements ou régions voisines, et se sont installés dans la capitale régionale du territoire ici considéré. Pascal y a effectué toute sa scolarité : il a obtenu en 1996 un DUT en informatique. Ensuite, il a travaillé pendant cinq ans en tant quemploi-jeune (de 1997 à 2002) au sein de lEducation Nationale en école primaire), puis a été recruté en 2003 en tant quAVS-i. Sa position daide éducateur (avec le réseau de connaissance afférent) lui a en effet permis dêtre informé du basculement de cette fonction de lassociatif vers léducation nationale. Pascal a tenté deux fois le CRPE en candidat libre (en 2008 et en 2009), mais malgré une présence à loral en 2009, il na pas été reçu. Il est en passe dabandonner ce projet du fait de la réforme de la formation des enseignants. Il est un habitant du « milieu rural » depuis peu dannée. Cest à ce titre un nouvel arrivant. Outre le fait quil est le seul représentant masculin des six personnes entretenues dans le cadre de ce travail, Pascal est aussi le seul à occuper une position dinitié familial : il a une sur qui est en effet porteuse dun autisme. En nous en parlant, il livre lui aussi, mais de manière distanciée, une partie du sens commun vis-à-vis du handicap, la majorité des gens (et des AVS-i) étant, dit-il, « plus à laise avec le handicap moteur quavec le handicap mental »  ce dernier étant souvent plus difficilement socialisable que le premier :
Guillaume : (
) est-ce que le fait quil y ait une prévalence assez nette dans tes accompagnements, de troubles autistiques et dautisme, est-ce que cest un choix de ta part ou est-ce que cest quelque chose que tu as signalé, ta connaissance plus spécifique de lautisme, à 
 à ton employeur, ou est-ce que cest le hasard ?
Pascal : 
 cest
 jen ai jamais parlé
 donc au début cétait du hasard et puis je pense que
 je pense quon sest rendu compte aussi que euh
(
) en fait jai pu constater en parlant avec les autres AVS-i quil y en avait pas mal qui étaient plus à laise avec le handicap moteur quavec le handicap mental 
 et je pense que comme
 comme lInspection Académique a remarqué que moi cétait plutôt linverse, ils ont plutôt eu tendance à me mettre sur
 sur des troubles mentaux, je pense
Guillaume : ils lont remarqué
 mais qui ?
Pascal : euh
 bah C., enseignante référente euh
 du secteur du privé, qui est là depuis trois ans
et qui sait que je suis à laise avec les troubles autistiques
 qui sait que je suis assez à laise avec ce type de handicap (
) (Page 38)
Cette posture dinitié familial est redoublée dune position dinitié professionnel (les deux ne sont évidemment pas sans lien) : 
Pascal : jai fait un stage de formation BAFA pour les CEMEA sur le thème du handicap
 donc jétais un peu aussi dans
 dans le côté réflexion sur euh
 sur tout ce qui est intégration via les groupes de réflexions aux CEMEA (
) [Jai été] formateur aux CEMEA, [du coup on me] proposait régulièrement des week-end ou des mini semaines de formation sur différents thèmes
(
) je faisais pas que pour le handicap mais jai
 jai fait plusieurs stages sur le thème du handicap
 (Page 10-11)
	Pascal fait partie du groupe des anciens AVS-i puisquil a été recruté en 2003. Son contrat prend fin en décembre 2010. Ensuite, il ne sait pas quoi faire  et ne cache pas être plutôt désespéré (et en colère). 
Noémie a 38 ans au moment de lentretien. Tout comme Pascal et Julie, elle na pas déléments de connaissance sur les éventuels emplois exercés par ses grands-mères (qui, quoiquil arrive, travaillaient au bon fonctionnement de léconomie domestique), mais seulement sur ses grands-pères. En loccurrence, cest même seulement la profession du grand-père paternel que Noémie connaît : il était pêcheur vendeur dans une ville portuaire. Leur fils, le père de Noémie, a émigré vers une des deux capitales régionales (voisines) encadrant le territoire où elle vit actuellement, et il y a rencontré la mère de Noémie, qui en était issue. Noémie a grandi dans cette ville et y a fait toute sa scolarité : relativement au « milieu rural », cest donc une nouvelle arrivante, même si elle y est installée depuis une quinzaine dannée. Elle est titulaire dune maîtrise de chimie biologique et a exercé lemploi de caissière en supermarché puis technicienne de laboratoire. Son entrée dans la fonction dAVS-i est consécutive à la perte de cet emploi et à la réactivation dun ancien projet professionnel : 
Noémie : donc en fait jai perdu mon travail. (
) [Comme] jai été licenciée (
) du coup jai décidé de refaire mon projet de devenir enseignante, donc je me suis lancée dans ce projet-là. (
) Jai fait par le CNED et on nous proposait de pouvoir avoir droit à des stages donc je lai fait, et lun des stages que jai fait était avec une enseignante que je connais très bien, cétait la femme du patron de mon mari. (
) La première année (
) malheureusement je nai pas eu le concours ; lannée daprès jai entendu parler de ce poste dAVS-i (
) par le biais [de cette] enseignante (
) donc jai postulé et jai été prise (
). (Page 1)
	Noémie cumule donc deux propriétés caractérisant nombre des occupants du poste dAVS-i (AED) : elle est une aspirante enseignante ainsi quune mère avec une expérience professionnelle antérieure qui souhaite travailler auprès denfants et qui trouve dans la fonction dAVS-i un emploi au droit dentrée très faible et qui correspond à ces souhaits. Elle a pris connaissance de la réforme de la formation professionnelle des enseignants. Elle est en passe dabandonner le projet de devenir professeur des écoles, jugeant trop difficile et trop long de devoir reprendre des études pour obtenir un master. Son contrat dAVS-i se termine en août 2011 : elle ne sait pas ce quelle va faire par la suite. Tout comme Sylvie, Noémie nest pas une initiée par rapport à la déficience ou au handicap. Elle traduit même une frange du sens commun par rapport aux représentations de ces derniers chez les non-initiés quest la frayeur, associée à la déploration :
Guillaume : (
) il y a une question que je voulais te poser aussi, cest si tu avais (
) découvert le handicap ou la déficience avec le travail dAVS ou si tu en avais eu des contacts avant par le biais familial ou professionnel ou autre ?
Noémie : bah cest un milieu que je connaissais un petit peu malheureusement ayant eu un parent (
) interné à une époque
 mais juste pour dépression
 il avait été interné [dans un hôpital psychiatrique] (
) là si tu veux je côtoyais des gens qui venaient là uniquement pour se faire soigner au niveau des nerfs et des gens qui étaient présents mais qui étaient avec des (
) retards mentaux et tout ça donc
 surtout retard mental de toute façon
 donc des gens qui voilà pouvaient un peu effrayer une petite fille
 moi à lépoque javais à peine dix ans donc euh
 ils pouvaient effrayer une petite fille
 (Page 14)
	Noémie a commencé son travail dAVS-i en 2004 et relève donc du groupe des « anciens AVS-i ». 
Sylvie est née en 1986, elle a 24 ans au moment de lentretien. Comme ses quatre grands-parents, ses parents sont agriculteurs, et habitent à la limite de la zone de forte influence urbaine du « milieu rural » considéré. Son père a quitté un département voisin pour sinstaller avec la mère de Sylvie dans la ferme des parents de cette dernière. Considérant à la fois le phénomène de concentration des terres agricoles et la situation géographique de la ferme de ses parents, il est possible daffirmer que ce sont des agriculteurs qui sen sortent plutôt bien économiquement parlant. Sylvie a le projet de devenir professeur des écoles. Elle na pas connu de mobilité géographique importante : elle réside toujours en 2010 dans la maison où vivait ses grands-parents, et a effectué sa scolarité primaire dans sa commune dorigine (environ 5 000 habitants en 2010) et le secondaire dans une commune voisine : il sagit donc dune famille « historique » de la zone rurale considérée. Sylvie a par suite fréquenté lenseignement supérieur, entre 2005 et 2009 : elle a obtenu une licence de sciences de la vie et de la terre en 2008 et lannée suivante a été professeur des écoles 1 (PE1) à lIUFM de la ville de ses études. Elle na pas réussi le concours de recrutement de professeur des écoles (CRPE), et est devenu AVS-i lannée suivante. 
Par rapport au handicap, Sylvie nest pas une initiée. Sa motivation pour entrer dans la fonction est basée sur le caractère utilitaire de son exercice, dans la perspective de son projet professionnel :  
Sylvie : euh donc en fait moi jai voulu être AVS parce que je passe le concours de professeur des écoles, donc jai connu ce métier
 enfin, ce métier, cen est pas un mais je lai connu grâce à 
 aux études que jai faites [IUFM], finalement, et puis euh en attendant de repasser le concours euh
 je me suis dit que ce serait le job idéal pour à la fois être
 avoir de lexpérience, être dans une école et en même temps avoir du temps libre pour travailler
 mon concours
 (p 1)
	Sylvie semble bien ne pas être la seule à entrer dans la fonction dAVS-i après un échec au CRPE : 
Sylvie : (
) 
 dans toutes les personnes qui nont pas eu leur concours, jen ai retrouvé plusieurs après, avec moi, aux réunions dAVS
 ouais, ouais
il y en a quand même pas mal, ouais
 parce que cétait vraiment euh
 bah le job idéal pour rebosser le concours à côté et 
 et surtout ce qui nous manquait en PE1 cétait lexpérience, quoi
on avait fait que deux petits stages dune semaines, alors que ça a rien à voir avec le fait dêtre sur une année entière dans des écoles, quoi
(p.2)
	Pour se donner le maximum de chance de réussir son concours de professeur des écoles, et du fait de la réforme de la formation professionnelle des enseignants en cours de mise en place et induisant la nécessité dêtre titulaire dun master pour entrer dans le métier, Sylvie sest inscrite pour la session 2009-2010 dans lAcadémie de Créteil. Elle souhaite donc commencer à travailler en région parisienne, avant de tenter, dès que possible, de revenir sur son territoire. 
	Sylvie a été recrutée en 2009, et fait donc partie du groupe des « néo-recrutés » de notre échantillon. 
Lalie est née, comme Sylvie, en 1984, et a donc également 26 ans dans lannée de lentretien. Ses grands parents sont espagnols, et arrivés en France vers 1950. Ils étaient ouvrier et femme de ménage (et nourrice) dun côté, et agriculteurs de lautre. Ses deux parents sont ouvriers, mais également espagnols : contrairement aux quatre grands-parents ils sont restés en Espagne, et ne sont arrivés en France quen 1978, installés en région parisienne, quils nont pas quitté depuis. Lalie a fréquenté lenseignement supérieur en île de France et nest présente sur le territoire considéré que depuis deux ans : elle a suivi son ami venu sinstaller ici pour occuper un emploi. Elle poursuit en ville ses études en sciences de léducation (après avoir suivi la filière de psychologie), en master 1, et réside (et travaille) « à la campagne », à quelques dizaines de kilomètres de lUniversité. 
Elle explique ainsi son entrée dans la fonction : 
Lalie: alors cest un peu par hasard
 donc lannée dernière en fait jétais
 euh
 je faisais pas détude, je voulais préparer des concours, et euh
 donc à côté de ça je voulais travailler, jtravaillais depuis cinq ans dans lanimation donc je voulais faire un peu autre chose qui était en rapport avec les enfants, et je connaissais un maître E qui travaillait dans une école et cest lui qui ma proposé euh
 de faire ça quoi
 (Page 1)
	Lalie souhaite elle aussi devenir professeur des écoles : cest, outre celui de psychomotricienne, ce concours quelle évoque dans lextrait ci-dessus. Mais elle nest aujourd'hui « plus sûre », du fait de la réforme de la formation professionnelle impliquant de détenir un master. Elle a travaillé cinq années dans lanimation, et cest dans ce cadre professionnel quelle a pu croiser des enfants en situation de handicap  mais là encore, et comme pour Noémie, sa position de non-initiée la conduit à intégrer à la géographie du « handicap » des territoires qui nen relèvent pas vraiment : 
Guillaume : 
 par rapport à la déficience ou au handicap, en général
 est-ce que toi euh
 tu avais un contact, un rapport avec la déficience ou le handicap, préalable à ton travail dAVS-i
 ?
Lalie : euh
 je dirais non et je dirais oui quand même (court rire) 
 parce que
 en même temps, en ayant fait des études de psycho, ça ma
(
) après, le fait davoir été euh
 enfin je suis animatrice depuis six ans, donc jai ... Voilà jai vu euh
 des enfants défiler
 et des enfants voilà cest
 enfin ils sont pas tous pareils quoi, et
 si ça ma permis aussi dapprendre euh
 davoir un autre regard et dapprendre pas mal de choses euh
 sur des difficultés ou des déficiences
(
) je dirais pas quun hyperactif cest un handicap
 mais bon maintenant voilà
 euh jai eu le droit à ça, un enfant hyperactif et euh
 bah faut savoir se positionner quoi
. (Page 30-31)
	Ainsi, même si Lalie explicite le fait que être « hyperactif » nest pas un handicap ou une déficience, elle les associe quand même. Ce quelle opère ici en fait cest une réception de la question qui se caractérise par la survalorisation dun élément tout à fait implicite de la notion de « handicap » rapportée à lespace scolaire, à savoir le handicap entendu comme non-conformité scolaire et, plus largement, comme non-conformité de la dynamique socialisatrice : « jai eu le droit à ça, un enfant hyperactif et euh
 bah faut savoir se positionner quoi
. ». 
	Lalie a été recrutée à son arrivée sur le territoire, soit en 2008. Elle est dans sa deuxième année dexercice, et fait partie du groupe des néo-recrutés. 
Julie a 31 ans au moment de lentretien. Deux de ses grands-parents (les parents de sa mère) viennent de la Réunion ; son grand-père y était menuisier. Ses deux autres grands-parents sont originaires de la commune où elle et son mari sont installés, ainsi que ses parents. Son grand-père y était forgeron, puis maréchal-ferrant. Son fils (le père de Julie) est devenu à son tour forgeron, puis « serrurier en entreprise ». La mère de Julie était « couturière en usine ». De fait, Julie a un ancrage familial sur le territoire qui fait delle, avec Sylvie et Cécile, les seules AVS-i interrogés qui peuvent être considérées comme des « enfants du pays », entretenant avec le milieu rural un lien qui les dépasse en tant que simples individus, et qui active également des propriétés dordre social. Elle a occupé les postes d « aide-comptable », d « hôtesse daccueil - standardiste » dans une agence immobilière, puis est devenue AVS-i. Julie explique ainsi son entrée dans la fonction : 
Julie : comment ça sest passé, on va dire cest un peu le hasard des choses quoi, parce que jai arrêté donc mon travail (
) en tant quhôtesse daccueil en cabinet immobilier, jen avais assez quoi euh
 au bout de six ans je voulais voir autre chose
 disons que ça se passait pas tellement très bien, et ça faisait deux ans et demie que je cherchais du travail et que bah, étant en poste on trouve pas facilement, faut être disponible de suite, donc jai démissionné en fait et jai repris mes études
 à partir de là euh
 jai fait donc une licence en sciences de léducation, et comme il me manquait de lexpérience pour prétendre (
)
 à lentrée en fait au diocèse, [pour devenir enseignante dans le privé] (
) il me manquait
 enfin ce que javais vu qui péchait un peu cétait euh
 le
le contact avec un groupe, lexpérience avec un groupe
donc du coup je me suis dit il faut que jessaie de trouver quelque chose en rapport avec ça
 et puis après jai
 bon javais un peu cherché sur Internet, javais commencé à 
 voir un peu euh
 ce dont il sagissait, et puis cest par euh
 cest tout bizarre en fait
 cest par lintermédiaire de mon mari, qui lui travaillait avec quelquun, et dont sa copine faisait ça
 donc il ma transmis directement les coordonnées de [lenseignant référent], en fait euh
et puis donc jai pris contact comme ça, jai eu lentretien donc avec lui et puis [une autre enseignante référente] (
) et puis du coup euh
. Ça sest fait comme ça en fait, jai fait mon entretien, et puis ça sest bien passé, et puis voilà quoi
 (Page 1)
Julie a donc de commun avec Sylvie de considérer le travail dAVS-i comme une expérience permettant doptimiser les chances daboutissement de son projet de devenir enseignante dans le premier degré, et avec Sylvie, Noémie, Pascal et Lalie de nourrir ou davoir nourri ce projet professionnel. A défaut dune réussite dans le métier denseignant, Julie souhaite travailler « dans un domaine lié aux enfants, à léducation, à lencadrement, au soutien ». Par ailleurs, elle nest pas une initiée aux mondes et réalités du handicap. La mention faite par nous durant lentretien dune question autour de lusage des termes « déficience », « handicap » ou « troubles » fait apparaître quelle est soumise à la représentation dominante en matière de handicap, directement lié avec le coup de force symbolique de lAPF davoir su imposer son logo comme une représentation idéal typique de celui-ci, réduit dans limaginaire social, et loin de ce que montre la prévalence du handicap dans la population, à son seul segment « déficience motrice » : 
Guillaume : (
) troubles, handicap, déficience
 ? Quel mot tu dis toi ? (
)
Julie : (
) moi je dis plutôt déficience, euh
 parce que en même temps
 enfin cest un peu bête à dire mais tant que cest pas vraiment un handicap moteur et tout, jai du mal à placer le mot handicap pour (
) juste une déficience (
) autre quoi
 mais bon après cest
 (Page 2)
	Julie, recrutée en 2009, fait partie du groupe des néo-recrutés.
	Anciens et néo-recrutés
Avant de prendre connaissance, tout au long du présent travail, de la parole de ces agents sociaux occupant le poste dAVS-i, il est utile, outre de simprégner des éléments ci avant présentés, de garder à lesprit une des caractéristiques les plus importantes de leur position, à savoir la durée doccupation du poste dAVS-i. Ainsi que nous lavons déjà évoqué, nous avons classé les six agents en deux groupes : 
les anciens recrutés, dont font partie : Cécile (2004), Pascal (2004) et Noémie (2005). Ces AVS-i ont donc au moins cinq ans doccupation du poste derrière eux.
les néo-recrutés, groupe composé de : Sylvie (2008), Lalie (2008) et Julie (2008). Ces trois AVS-i sont toutes dans leur seconde année doccupation du poste. 
Afin de clarifier ce que peuvent représenter la différence de trois ou quatre années doccupation du poste, nous avons construit des tableaux synoptiques représentant, pour chaque AVS-i, un parcours daccompagnement. Ces tableaux permettent de visualiser lensemble des accompagnements qua habité lAVS-i ; ils sont construits à partir des éléments suivants : 
le genre des élèves accompagnés ;
lannée scolaire à partir de laquelle laccompagnement a commencé ;
le nombre hebdomadaire dheures daccompagnement à lannée 1 de ce dernier (dune année sur lautre, la CDAPH peut en effet modifier le volume horaire de laccompagnement) ;
le handicap (ou trouble ou déficience) de lélève accompagné tel quil est exposé par lAVS-i ;
le niveau scolaire des élèves accompagnés, c'est-à-dire le niveau de la classe dans laquelle ils sont scolarisés ;
le niveau dans le cursus-type, c'est-à-dire le niveau de la classe où ils devraient être par rapport à leur âge ;
la durée de laccompagnement, c'est-à-dire le nombre dannées scolaires où lAVS-i a accompagné un même élève ;
le fait quil y ait un temps partagé ou pas, en dautres termes si lélève partage son temps scolaire entre lécole et une structure spécialisée ;
le fait quil y ait un suivi médico-social et/ou RASED (on remarquera quun temps partagé induit obligatoirement un suivi médico-social, mais que la réciproque nest pas vrai : le suivi peut se faire en dehors du temps scolaire)
lorientation au terme de laccompagnement, soit vers une structure spécialisée, soit dans la classe supérieure  et dans ce dernier cas, avec ou sans AVS-i. 
Genre / année de début dacc.Nombre dheures (année 1)Handicap / déficience / troubleNiveau scolaireNiveau dans le cursus-typeDurée de lacc.Temps partagé ?Médico-social à lextérieur de lécole ? / RASED ?Orientation au terme de laccompagnementFille04-0512Déficience motriceGSCP2 ansOuiIEM (institut déducation motrice)IEMFille04-059Trisomie 21GSGS1 anOuiHDJIMEGarçon04-056Retard généralGSGS1 an et demiOuiorthophoniste-Garçon05-063Ultra violentGSCE11 an---Fille05-0612EpilepsiePSMS6 moisOuiHDJ-Fille06-079Troubles psychologiquesCE1CE11 anOuiASECE2 (avec AVS-i)Garçon06-079Trouble du langageCPCP1 anOuiOui (?)
+ RASEDCE1Garçon06-0712AutismeMSMS6 moisOuiOui ?GS (avec AVS-i)Garçon06-079Retard généralGSCP2 ans et demiOuiCMPCE2 (avec AVS-i)Fille07-086Trouble de lauditionCPCE11 anOuiOui (?)CE1 (avec AVS-i)Garçon07-089Ultra violentCPCP1 anOuiHDJITEP ?Garçon07-083PsychotiqueCE1CE12 ansOuiHDJCM1Garçon08-096TurbulentGSCP1 anOuiASEITEP ?Garçon09-1012DyslexiqueCE2CM11 anOuiOui (?)-Fille09-1012Trouble autistiqueGSCP1 anOuiHDJ-15Parcours daccompagnement de Cécile, 2004  2010
Groupe des anciens recrutés
Genre / année de début dacc.Nombre dheures (année 1)Handicap / déficience / troublesNiveau scolaireNiveau dans le cursus-typeDurée de lacc.Temps partagé ?Médico-social à lextérieur de lécole ? / RASED ?Orientation au
terme de laccompagnementGarçon04-0512AutismeMSMS2 ansOuiOui (?)CP (avec AVS-i)Fille04-053IndéfiniGSCP1 anOuiOui (?)IMEGarçon04-0512Trisomie 21PSPS2 ansOuiOui (?)-Garçon05-069Troubles autistiquesCPCP5 ansOuiOui (?)6ème (avec AVS-i)Garçon06-079Troubles autistiquesCPCP4 ansOuiOui (?)CM2 (avec AVS-i)Fille07-0812Pas définiCPCE11 anOuiOui (?)-Garçon08-093dyslexique4ème4ème1 anNonNon-7Parcours daccompagnement de Pascal, 2004-2010
Groupe des anciens recrutés
Genre / année(s) de début dacc.Nombre dheures (année 1)Handicap / déficience / troubleNiveau scolaireNiveau dans le cursus-typeDurée de lacc.Temps partagé ?Médico-social à lextérieur de lécole ? / RASED ?Orientation
au terme de laccompagnementFille05-069hTrouble du comportementCE1CE21 anOui HDJITEPFille05-066hMaladie orphelineMSMS1 anNonNonGS (avec AVS-i)Garçon05-069hautismeGSCE11 anOuiHDJIMEGarçon05-063hautismePSPS2 moisOuiOui (?)MS (avec AVS-i)Fille05-063hRetard dappr. PSPS2 moisOuiOui (?)MS (avec AVS-i)Garçon06-079hEn CLIS 1--1 anOuiCMPCLIS / IME en temps partagéGarçon06-076hTroubles autistiquesCE16ème1 anNonorthophoniste
+ RASEDUPIFille07-089hTroubles du comportementCPCP1 anOuiCMPCPFille07-089hGros retard scolaire ; pas de nomCPCE21 annonorthophonisteCLISGarçon07-089hmaladie orphelineMSMS3 ansOuiHDJ, ortho-Fille08-099hTrouble de la lectureCPCE12 ans--CE2Garçon08-099hTroubles du comportementCPCP2 ansOuiCMP, SESSAS, orthophonisteCE2 (avec AVS-i)Garçon08-096hTrès grosses difficultés dapprentissageCM16ème1 anOuiOui : SEFFIS orthophoniste6ème SEGPA13Parcours daccompagnement de Noémie, 2004-2010
Groupe des anciens recrutés
Genre / année     du début de lacc.Nombre dheures
(année 1)Handicap / déficience / troubleNiveau scolaireNiveau cursus-typeDurée de lacc.Temps partagé ?Médico-social à lextérieur/intérieur de lécole ? / RASED ?Orientation
au terme de laccompagnementGarçon08-099hTroubles du comportement, retard scolaireGSGS1 anOuiOui (?)CP (avec AVS-i)Garçon08-099hTrouble du langageCPCE11 anOuiOrthophonisteCE1Garçon08-096hTrouble du comportementCM1CM21 anOuiOui (?)CM2 (avec AVS-i)Garçon09-1012hAutismeCPCE11 an (en cours)OuiOrthophoniste-Garçon09-1012hMaladie ? EpilepsieCM1CM21 an (en cours)OuiCMP-5Parcours daccompagnement de Sylvie, 2008-2010
Groupe des néo-recrutés
Genre / année du début de lacc.Nombre dheures (année 1)Handicap / déficience / troubleNiveau scolaireNiveau dans le cursus-typeDurée de lacc.Temps partagé ?Médico-social à lextérieur/intérieur de lécole ? / RASED ?Orientation
au terme de laccompagnementFille08-099hMaladie génétique, troubles autistiquesPPS PSCP1 anouiSESSADPS MS (avec 
AVS-i)Garçon08-099hTrouble de lapprentissageCPCE11 an---Garçon08-099hConséquences dopérations chirurgicalesCPCE11 an--CE1 (avec AVS-i)Garçon09-109hDyslexie5ème 5ème 1 an (en cours)---4Parcours daccompagnement de Lalie, 2008-2010
Groupe des néo-recrutés
Genre / année         de début dacc.Nombre dheures (année 1)Handicap / déficience / troubleNiveau scolaireNiveau dans le cursus-typeDurée de lacc.Temps partagé ?Médico-social à lextérieur/intérieur de lécole ? / RASED ?Orientation
au terme de laccompagnementFille 08-09-Troubles autistiquesPSGS1 an--PS (avec AVS-i)Garçon08-09-Troubles des apprentissagesCPCE22 ans--Garçon08-09-Trouble de lapprentissageCPCE1 1 an--Changement décoleGarçon  09-10-Dysphasie2nde1ère1 an (en cours)--Garçon09-10-Maladie génétiqueCPCE11 an (en cours)--5Parcours daccompagnement de Julie, 2008-2010
Groupe des néo-recrutés
Trisomie 21
Troubles des apprentissages, du comportement, du langage, dys-, indéfini
Autismes, troubles autistiques
Retard général, maladie mentale (psychose)
Déficience motrice ou sensorielle
Maladies, épilepsiesNombre total délèves accompagnés Nbre %Nbre    %Cécile17640213320213171530
35 
71Pascal114343343000000714.5Noémie00861,53230000215,51326Sylvie003601200000120510
14
28
Lalie0025000000025048,5Julie003601200000120510Total2425511020362471449100
Tableau 2 : 	Répartition des accompagnements des anciens et néo-recrutés selon une typologie du handicap construite à partir de leurs classifications spontanées recueillies lors des entretiens
Genre masculin (féminin)
Nombre moyen dheures par accompagnement (à lannée 1)Retard sur le cursus-typeMoyenne de la durée daccompagnementElèves avec suivi extérieur à lécoleElèves avec temps partagé
Nbre% Cécile9 (6)60 8,6 h8531,2 an1410014100Pascal5 (2)718,6 h2282,3 ans686686Noémie7 (6)547,4 h6461,4 - 1,2 an1185970Nombre et part délèves accompagnés par les anciens recrutés qui sont en retard dans le cursus-type 
16
46
Moyenne pour les anciens recrutés
1,6 anSylvie5 (0)1009,6 h4801 an51005100Lalie3 (1)759 h3751 anJulie4 (1)80 -51001,2 anNombre et part délèves accompagnés par les néos-recrutés qui sont en retard dans le cursus-type
12
86
Moyenne pour les néo-recrutés
1,05 anTotal / moyenne32 (17)658,6 h28571,3 an
Tableau 3 : Anciens et néo-recrutés face aux caractéristiques scolaires des élèves accompagnés
	Quelques remarques sur les 49 élèves accompagnés par ces 6 AVS-i
Malgré le fait que le tableau n°2 ne soit pas construit à partir des catégorisations quon dira ici « officielles », il est notable dy constater la surreprésentation très nette des « troubles de lapprentissage, du comportement » et des « dys-» (dyslexie notamment) : ils représentent plus de 50 % de lensemble des 49 enfants accompagnés. De plus, 10 % des 49 enfants accompagnés par ces 6 AVS-i sont des enfants qui ont été retirés de leur famille et placés dans une famille daccueil. Sil est possible dêtre handicapé et placé en famille daccueil, la surreprésentation des enfants qui vivent une telle situation dans notre échantillon par rapport à la population générale ne nous semble pas anodine. Sans prétendre dégager ici des éléments suffisants pour tirer des conclusions hâtives, ces remarques appellent deux questions : 
	
nassiste t-on pas à une forme de glissement de la grande difficulté scolaire vers les territoires du handicap, et donc dun déplacement de la « clientèle » traditionnelle de lenseignement spécialisé des RASED vers les AVS-i ?
Nassisterait-on pas à un glissement afférent en ce qui concerne les enfants avec des « troubles du comportement » dues à des problématiques sociales et familiales ?
Nous estimons quil y a ici matière à recherche. 
	Un impératif inquestionné : nommer et classer le handicap 
Tous les termes utilisés (à cette fin de dénomination) dans les tableaux précédents sont ceux qui sont issus des classifications spontanées des AVS-i à propos des enfants quils accompagnent. La prise en compte de ce point de méthode est très importante : si en effet parfois les termes utilisés pour décrire le handicap de lélève sont ceux qui leur ont été transmis par leur employeur lInspection académique, par les parents ou par les enseignants, le plus souvent les AVS-i entretenus nont pas de catégorie « officielle » à attribuer à lélève quils accompagnent. Ils produisent alors malgré tout une classification, une étiquette pour cet enfant, qui se rapproche plus ou moins des classifications qui sont à leurs yeux légitimes  que ces dernières soient de tradition médicale, pédagogique ou rattachées à une frange du sens commun. 
Par exemple Noémie, Sylvie et Julie, dont les occupations du poste sont caractérisées par une forte hétéronomie vis-à-vis de lenseignant, utilisent souvent le terme de troubles dont lusage est fortement ancré dans les milieux pédagogiques (les troublés de la lecture, de lapprentissage, du comportement, de lattention, etc.). Cécile, de son côté, utilise plutôt des termes qui décrivent ce quelle a vécu avec les élèves quelle a accompagnés  (elle parle ainsi de deux enfants qui sont « ultra violents ») ou ce quelle a ressenti à leur contact (« retard général »), sans que ces classifications ne présument dune étiologie quelconque  à lexception de « psychotique », quelle est la seule à utiliser. De fait, lusage tel quel que nous faisons de ces termes ne doit pas tromper les lecteurs et lectrices.  
Le présent travail nest pas centré sur lanalyse des termes utilisés par les AVS-i pour répondre à cet impératif de catégorisation des enfants quils accompagnent (« mais quest-ce quil a, au fait ? »). Néanmoins, la mention de sa nécessité nous paraît tout à fait essentielle au regard de lambition cartographique de cette recherche. En outre, elle ouvre sur une autre nécessité qui est celle daborder la question générale des classifications du handicap  et de ce quimplique lusage de ce dernier terme. 
Les mots et notions autour du handicap. Dire pour classer, classer pour traiter.
« Bariolés de tous les noms, comme Arlequin de ses couleurs, du fond des âges et des cultures, du fond des âmes et des systèmes, nous nous avançons désignés et ignorés, repérés et cachés, mis en scène et tenus en coulisse. (
) Qui sommes-nous ? Le dictionnaire de nos maux ressemble à certaines encyclopédies chinoises dont la logique échappe. » « Létiquette, la catégorisation, proviennent des structurations sociales, bien davantage que du fait brut de latteinte physique ou psychique (
) Cest lobligation dans laquelle se trouve la société dattribuer le qualificatif de handicapé qui crée, socialement, le handicap »
Henri Jacques Stiker, 2000, 1982. 
	La « vigilance théorique » évoquée par Philippe Mazereau (1998), nécessaire pour « éviter de prendre comme instrument de connaissance ce qui devrait en être lobjet » est à lorigine de cette partie. En effet, se pencher sur lhistoire du traitement social du handicap ou, plus précisément en ce qui nous concerne, sur ce que lhistoire des relations entre institution scolaire et enfance handicapée dévoile des logiques à luvre dans lémergence des accompagnants scolaires AVS-i et dans la nature de la position du poste de ces derniers, rend incontournable la mention de la démarche danalyse des mots et notions, et de leurs usages (à défaut de lanalyse elle-même). Le champ de léducation spéciale néchappe pas à une propriété essentielle des champs, énoncée par Pierre Bourdieu, et qui se définit de la manière suivante : 
« La compétition pour lenjeu y dissimule la collusion à propos des règles du jeu », c'est-à-dire que « la participation aux intérêts constitutifs de lensemble du champ (qui les présuppose, et les produit par ses fonctions mêmes) implique lacceptation dun ensemble de présupposés et de postulats qui, étant la dimension indiscutée des discussions, sont, par définition, tenus à labri des discussions. ». 
En loccurrence, il est question des règles du jeu de langage, et de présupposés et de postulats notionnels. En ce qui concerne en effet, pour notre sujet, le champ de lenfance handicapée, un mot tel que handicap participe de ces « impositions arbitraires de significations dune telle force quelles passent pour évidentes » (Plaisance, 1999). Il est sans conteste du devoir dun producteur de discours à vocation scientifique den tenir compte, et de le prendre à son compte. 
	Les intérêts en jeu dans le champ de léducation spéciale sont dordre disciplinaires (du fait du rôle prééminent des sciences médicales et humaines dans sa constitution et son histoire), institutionnels (plusieurs ministères se sont partagés et se partagent les tutelles dun grand nombre de créations institutionnelles) et techniques (un ensemble de corps professionnels se sont soit constitués spécifiquement au sein de ce champ, soit ont constitué ce champ comme un de ceux au sein desquels ils ont un rôle à jouer). Les diverses taxinomies, classifications et catégories nosographiques qui se sont succédées pour nommer lenfance handicapée sont nées et ont évoluées au gré de la confrontation de ces intérêts, présents dès la genèse du champ. Elles mériteraient une analyse spécifique. Certains chercheurs, comme Philippe Mazereau qui y a consacré sa thèse de doctorat en sociologie, se sont déjà attachées à ce travail tout à fait essentiel pour la compréhension générale du champ, dont la dynamique ne peut être saisie sans « une analyse de sa structure et, simultanément, (
), [sans] une analyse génétique de sa constitution et des tensions entre les positions qui la constituent ». 
	
	Charles Gardou et Eric Plaisance (2001) se positionnent dans cette même perspective danalyse quand ils écrivent que de tels raffinements classificatoires, dont lhistoire du champ est parsemée, sont, bien que construits sur : 
« (
) des bases scientifiques pourtant bien incertaines (
), en réalité orientés par la demande administrative de partage des diverses compétences ministérielles en compétition et, en fin de compte, de rationalisation des dépenses à engager pour financer des établissements ou des classes de toutes sortes ». 
Ils tissent là un lien entre intérêt institutionnel et productions disciplinaires qui a déjà été abordé par dautres. On observe un consensus assez large entre chercheurs sur cette question précise. Comme le résume Jeannine Verdès-Leroux (1978) : 
« La fréquence des changements de terminologie (
) et la prolifération des classifications (
) manifestent clairement larbitraire de ces étiquetages et de la diversité des interventions quils autorisent ». 
Cette fréquence des modifications dappellations, constitutive de la dynamique du champ, nous semble très bien résumée dans le titre dun article dont lobjet est tout autre, mais qui a le mérite dêtre opérant pour le sujet qui nous concerne : « Classement, déclassement, reclassement ». 
	Lexemple donné par Jacqueline Gateaux-Mennecier (1999) de la modification des normes de diagnostic de la débilité légère induite par la classification de lOMS en 1980 est à ce titre tout à fait frappant : le résultat minimum aux tests psychométriques permettant déviter dêtre diagnostiqué dans la catégorie débilité légère est en effet passé à cette époque de 80 à 60. Combien de personnes ont, avant 1980, reçu ce diagnostic, et se sont ainsi vues apposé le sceau dun destin social marqué par léducation ou lenseignement spécial, que ce soit en institution médico-social ou en classes de perfectionnement ? 
« Combien de gens débiles sont devenus depuis lors des gens ordinaires ? » se demande Gateaux-Mennecier. 
	 
	Par ailleurs, on peut citer deux autres faits, très éclairants : 
sur le plan national (dans le contexte français), les classifications du handicap restent marquées par les traditions propres à chaque territoire administratif, scientifique et professionnel. Ainsi, la DGESCO utilise, pour produire des statistiques concernant la scolarisation des enfants handicapés, des catégories qui lui sont propres, et qui se retrouvent ensuite dans lensemble des administrations relevant de léducation nationale. 
sur le plan international on observe les efforts des instances supranationales (notamment lOMS et lOCDE) pour organiser une systématisation des classifications, en tentant détudier et de classer les classements nationaux, qui tous diffèrent en fonction des caractéristiques sociohistoriques de chaque pays en matière dinfirmité et de déficience. 
LOCDE a ainsi produit au début des années 1990 une tripartition de lensemble des territoires du handicap (disability, en langue anglaise) qui reste aujourdhui encore une référence : 
« A/déficience », « origine organique attribuable à une pathologie organique ») ;
 « B/difficultés », « troubles du comportement ou troubles affectifs, ou difficultés dapprentissage spécifiques »
 « C/désavantages », « qui proviennent principalement de facteurs socio-économiques, culturels et/ou linguistique ». (OCDE, 2008)
Dans la publication de lOCDE (2008) doù sont tirés les éléments ci-dessus, on trouve également une tentative de classement de classement : la visée unificatrice du travail effectué a en effet obligé les auteurs à tenter de faire correspondre les classements nationaux avec le classement international. Pour chaque pays membre participant à létude qui est présentée dans louvrage sont ainsi méthodiquement rangés, dans les trois catégories A, B et C, les produits historiques que représentent leur propre système de classement du handicap. 
Pour clore cette (trop rapide) mention déléments dordre statistiques, nous souhaitons citer cette phrase de Francine Muel-Dreyfus, qui appelle à un usage raisonné (et distancié) des éléments statistiques : 
« Les catégories (
) telles quelles sont dégagées par les statistiques conduisent à constituer des groupes homogènes là où existe une hiérarchie saisie intuitivement par les intéressés eux-mêmes. [Les] chiffres ne donnent que des indications et ne sauraient faire effet de  preuve statistique.» (Muel-Dreyfus, 1983)
Il y a donc un caractère mouvant, très historiquement marqué, des mots et notions ayant servi à désigner ce quon nomme aujourdhui handicap, et ayant servi, tout comme sert handicap, à marquer par lusage du terme le droit dentrée dans les filières spéciales, elles-mêmes très différenciées. Les modes de génération de ces deux logiques (terminologies et filières institutionnelles) sont étroitement liés. 
« Cette perspective invite à appréhender les critères de classement (
) à laune des institutions qui se sont développées, et non de la déficience », conclut Serge Ebersold (1996). 
Il est utile de rappeler à sa suite que ce mot unique de handicap, aujourdhui dominant, fonctionne mal seul, cest à dire sans les épithètes de mental, physique, sensoriel ou moteur qui lui sont habituellement accolés - mais qui ne permettent pas non plus de créer autre chose quune catégorie certes plus précise, mais toujours insuffisante. Le handicap, que Henri Jacques Stiker définit très justement comme une « infinie bigarrure », est un mot qui se trouve aujourdhui présent dans des usages terminologiques professionnels, politiques, académiques, institutionnels et dans le langage courant. Sil est employé dans ce mémoire cest avec une police en italique, (comme pour toutes les autres désignations, danormal à inadapté en passant par les vocables comme traitement, trouble ou spécial) pour marquer la nécessaire vigilance et rappeler au lecteur les mentions ici faites. 
Une telle vigilance est de notre point de vue tout à fait nécessaire pour un chercheur ou un apprenti chercheur, mais constitue aussi une posture extrêmement bénéfique pour toute autre lecteur ou lectrice intéressé(e) dune manière ou dune autre par ces problématiques. 
Tout au long du développement du chapitre premier (historique), au fur et à mesure des périodes abordées, nous aurons loccasion de mentionner les différentes évolutions terminologiques ainsi que certaines analyses sur les implications, les origines ou les fonctions sociales de ces changements. Passons néanmoins en revue les grandes phases de ces évolutions telles quelles se dévoilent dans le cadre historique choisi pour cette étude. 
Les enfants handicapés nacquièrent la possibilité de se faire nommer par un seul mot générique quavec le milieu du 20ème siècle, et lémergence de la notion dinadaptation. La fin du 19ème siècle et le début du 20ème sont marqués par un foisonnement de mots et de termes à caractère savant et plus ou moins passés, par suite, dans le langage courant : on parle denfance irrégulière, anormale, arriérée, caractérielle, déficiente, instable, on distingue les idiots des imbéciles, les débiles profonds des légers, les éducables des inéducables, les coupables des victimes et de ceux qui sont en danger moral, etc. La médecine et la psychologie naissante jouent un rôle déterminant dans la production des ces taxinomies. 
Après ladoption de la notion unique dinadaptation se met en place progressivement celle de handicap, consacrée législativement par la loi du 30 juin 1975 dite « en faveur des personnes handicapées ». Inadaptation et handicap coexistent depuis, avec une force plus importante pour handicap, dont lusage a dépassé le strict champ de léducation spéciale, non sans conserver (et vraisemblablement acquérir) des propriétés magiques et mystifiantes, à linstar du mot spécial (Plaisance, 1999), et sur le modèle des mots dont lévidence nest que trop rarement questionnée. 
Les AVS, qui sont visés par le présent travail, apparus dans le champ éducatif français selon des circonstances quil sattache à éclairer, sont également inscrits dans cette problématique. Sans rentrer dans les détails dune analyse qui serait pourtant tout à fait nécessaire, comment ne pas sinterroger sur les termes utilisés pour définir les pratiques de ces personnels, ou pour les désigner eux-mêmes comme auxiliaires ou assistants ? Nous avons fait le choix dans ce mémoire dutiliser le terme générique de personnel accompagnant scolaire, réduit circonstanciellement dans lacronyme PAS, et ce quel que soit le moment de leur histoire abordé au cours du développement (seconde partie). Le choix du mot dérivé du substantif accompagnement nest pas neutre : il renvoie à une conception de la nature du travail des AVS qui soppose à celles véhiculées par les termes précédemment cités dauxiliaire ou dassistant. Il trouve également dans ce travail un cadre danalyse qui permet desquisser une élucidation de ce quil recouvre. 
Le personnel AVS, dont nous détaillons les origines, lémergence et les logiques de position, avant de nous intéresser aux notions dinclusion et daccompagnement qui sont au principe de son existence, a émergé au sein dun champ dont :
 « (
) on ne peut saisir les ressorts de lexistence » quen le resituant dans le cadre du « lent processus historique, institutionnalisé et fragile » dont il est le produit, et « non en prenant le handicap naturalisé comme point de départ de lanalyse » (Stiker, 2001). 
Chapitre 1 : 	Un siècle déducation séparée. Une histoire des relations entre éducations scolaire et spéciale 1880-2005
Genèse et constitution du champ du spécial : 1880-1940
La genèse de léducation et de lenseignement 
 spécial, 1880-1909 
« On fera de non-valeurs sociales souvent nuisibles, des êtres capables de rentrer dans la vie des normaux ou au moins des entités pouvant fournir un travail utile et diminuer ainsi leurs frais dentretien. » 
Docteur Jacquin, 1903, cité par Francine Muel (1975) 
1.1.1.1 Trente ans dactivité législative fondatrice
La période des années 1880 à 1909 est marquée par une « cascades de faits significatifs » dune évolution générale importante en matière déducation, qui sont constitutifs de la nature de la jeune 3ème république, et à partir desquels nous allons pouvoir mentionner quelques analyses de la constitution génétique du champ de lenfance handicapée (Stiker, 1999).
Cest dabord la naissance de la question sociale (Donzelot, 1984), formulée en des termes qui ont depuis lors évolué, mais qui est constitutive encore aujourdhui, et peut-être davantage dans sa nature originelle, dune question centrale sur la nature des démocraties industrielles. Cest ensuite « lintense activité législative et réglementaire » (Chauvière, 1999) que suscite cette question sociale, et qui caractérise ces trois décennies, notamment, pour ce qui concerne lenfance : 1882, loi sur lobligation scolaire ; 1889, loi sur la protection de lenfance ; 1898, loi sur lenfance maltraitée ; 1904, loi sur lassistance à lenfance ; 1909, loi sur les classes de perfectionnement ; 1912, loi sur le droit des mineurs. Ces lois concernent différents domaines de laction publique et leurs ministères de tutelle, à savoir le judiciaire (Justice), le médical et le social (Santé, affaires sociales  assistance, à lépoque) et le scolaire (Instruction publique), qui sont précisément les trois secteurs administratifs à linterface desquels va se construire le champ de léducation spéciale. 
Cette série de production législative est aujourdhui soumise à des analyses divergentes. Lune se réfère à lintérêt de lenfant et affirme que ce qui caractérise ces lois est avant tout le progrès de la place accordée à ce critère dans le Droit ; lautre, tirant ses analyses des travaux de Michel Foucault ou de la sociologie critique développée à partir des années 1970, y voit davantage des mesures de prévoyance sociale, selon lexpression (non euphémisée) de lépoque, consistant en des mesures de « discrimination et de relégation sociale » (Gateaux-Mennecier, 1999) des non-valeurs que constituent lensemble hétéroclite des anormaux, composés alors, comme encore aujourdhui, dune majorité denfants des classes populaires. (Plaisance, 2000). 
Au-delà des analyses, sur lesquelles nous reviendrons plus spécifiquement à propos de la loi de 1909, ces faits sont des signes dune évolution de la société qui se décline jusque dans les logiques structurant ses constructions sociales, entendues comme « les façons dont [elle] élabore et traite un domaine de vie, une population, un type de rapport sociaux, en fonction des représentations quelle sen fait et des catégories quelle y applique ». (Stiker, 1999). La construction sociale du handicap senracine dans ce terreau. 
Dans le chapitre dun ouvrage collectif paru en 2000, et titré « Dire et gérer lanormalité », Olivier Faure rappelle lorigine des ces évolutions qui sexpliquent selon lui par la « prégnance de plusieurs hantises sociales » dont témoignent débats et publications de lépoque, et développées à partir de 1870. On y trouve le souci de la dépopulation consécutif à la défaite contre la Prusse, et la crainte dune dégénérescence de lespèce humaine (Faure rappelle dailleurs à juste titre que cest en France que naît et se développe ce concept). Francine Muel (1975) parle également du poids du siècle des révolutions, et les traces que ces dernières ont laissées chez les classes dirigeantes. Ces thèmes, nous dit Faure, ainsi que « lapogée de lutilitarisme » qui caractérise une période dintense développement industriel, créent un état de tension au sein des institutions sociales que sont lécole, lindustrie et la médecine, « écartelées entre deux tentations : mettre à lécart les irrécupérables ou les intégrer à tout prix » ; tension traduite, dans le contexte de pénurie démographique, par la prééminence de la seconde option. Cette dernière va en partie fonder les raisons qui portent « le vocabulaire de linfirmité, de lincapacité, de limpotence » à laisser progressivement la place, au cours du 20ème siècle, à un autre, « exprimant la philosophie du risque, de la responsabilité, de lassurance, de la compensation et de la réparation », en un mot, du « rattrapage ». (Stiker, 1999). Il faut voir dans ce glissement, très bien analysée par Stiker, une des origines du thème très puissant aujourdhui du retour au milieu ordinaire (ou normalisation) quimplique le rattrapage, qui va trouver une matérialisation inouïe avec ladoption de la notion de handicap, dans les années 1960 (à la fin dun temps que Stiker qualifie « de latence »), terme issu du turf, et qui désigne les mesures de compensation prises pour égaliser les chances des chevaux dans une course. 
Lindustrialisation constitue également un vecteur important du passage dune « responsabilité liée à la faute » individuelle à une « responsabilité sociale » que décrit Henri Jacques Stiker, et qui est inséparable de lémergence, sur cette période, de lensemble des théories se donnant comme vocation de contribuer à une définition de laction publique confrontée aux problématique diverses soulevée par la question sociale (comme le solidarisme de Léon Bourgeois, par exemple). Ses effets sur la main duvre ouvrière, notamment les accidents du travail, aboutiront à la loi du 9 avril 1898 inaugurant la perspective assurantielle en la matière, jalon essentiel dans cette évolution, et qui se déroule sur lensemble du 20ème siècle (les effets de la masse des accidentés du travail sont dailleurs redoublés avec le million dinvalides qui suit la guerre 1914-1918). 
Ces éléments, non exhaustifs, sont parties prenantes du contexte dans lequel sinscrit la genèse du champ de léducation spécial.  
Un autre aspect, tout à fait essentiel à la compréhension du champ, repose sur la nature de la dialectique entre privé et public qui sinstaure pendant cette période. Les 18ème et 19ème  siècles sont caractérisés par la création dinstitutions privées, le plus souvent dobédience religieuse (congréganiste), destinées à léducation des jeunes déjà nommés anormaux. Quand une loi de 1850 vient légiférer sur les colonies pénitentiaires destinées aux enfants, elles-mêmes issues de linitiative privée, elle constitue le monopole privé de fait en monopole de droit en précisant que lEtat ne créera de colonies que si linitiative privée fait défaut. Par suite, le caractère laïc et républicain de la 3ème république, sil fait naître une politique de lutte contre les institutions congréganistes et en faveur dune laïcisation de la société (aboutissant à la loi de séparation de lEglise et de lEtat de 1905), ne fait pas pour autant émerger des créations institutionnelles publiques pour pallier à la baisse de celles relevant du privé, résultant de cette lutte. Cet apparent paradoxe sexplique par le fait, nous dit Francine Muel, que : 
« Lintérêt des uvres privées, contraintes à inventer de nouveaux cadres institutionnels pour poursuivre leur action, rencontre celui des magistrats qui tentent de constituer au même moment la justice des mineurs en spécialité juridique afin de créer de nouveaux postes dans un contexte de surproduction détudiants en droit ». 
La rencontre de ces intérêts va participer de lémergence de la loi de 1912 inaugurant un droit des mineurs. Le champ de léducation spécial, ou de lenfance handicapée, est ainsi « constamment marqué par une relation dialectique entre les innovations et la législation », conclut-elle. 
Maintenant que sont posées, dans les grandes lignes, les balises historiques de cette période, fondatrice à plus dun titre, et que nous avons pu éclairer quelques traits constitutifs du champ de léducation spécial, intéressons-nous à cet évènement qui suscite pour notre sujet un intérêt tout particulier : la loi du 15 avril 1909 sur les classes de perfectionnement, traduction au sein de lécole des logiques évoquées rapidement ci-dessus. 
1.1.1.2 La loi du 14 avril 1909 
La loi de 1909 est considérée comme lacte de naissance de lenseignement spécial. Elle ouvre la possibilité, sans obligation, de création de classes et décoles de perfectionnement dans lenseignement primaire, destiné à des enfants nommés anormaux décole, opposés aux anormaux dasile, selon la terminologie des psychologues Binet et Simon, et quune commission visée à larticle 12 de la loi est censée identifier. A plusieurs reprises dans le processus qui a aboutit à la formalisation et au vote de ce texte de loi, de 1904 (date de la création dune commission missionnée à cet effet) jusquà 1909, lensemble de lenfance anormale fut directement visée  c'est-à-dire tout à la fois les arriérés moraux (ou instables), les anormaux physiques, les arriérés de lintelligence et les enfants aveugles, sourds ou sourds-muets. A plusieurs reprises également, le périmètre fut réduit aux seuls arriérés, avant de réintégrer les enfants sourds et aveugles, pour finalement les exclure définitivement du texte. Les « problèmes politiques (rapports privé/public, laïcité et congréganiste) » déjà rapidement évoqués, « expliquent les vicissitudes particulières aux projets concernant les sourds et les aveugles ». (Vial, 1990). Aujourdhui encore, les institutions dispensant une éducation scolaire des jeunes sourds et aveugles relèvent du ministère des affaires sociales, et non de léducation nationale. Le segment de lenfance inadaptée concerné par la loi de 1909 et les classes de perfectionnement est donc composé des arriérés de lintelligence  dont le concept de débilité prendra suite (Gateaux-Mennecier, 1990)  et arriérés moraux (ou instables et caractériels). La même année est créé le certificat daptitude à lenseignement des arriérés (CAEA), par un décret du 14 août. 
Si les anormaux décole sont opposés aux anormaux dasile dans la terminologie de psychologues très attachés à lhistoire de ce projet de loi, cest pour une raison qui renvoie à lhistoire de la psychologie et de lannexion par cette discipline du terrain dexpérimentation de lenfance handicapée (Chauvière, 2000), choix dans lequel prend racine lhistoire de la psychologie scolaire. La psychologie naissante est partie prenante dans des débats scientifiques de cette époque, avec dautres disciplines comme la médecine et avec dautres professions comme les instituteurs ou les magistrats (chacun étant positionné sur la définition de ce quil considère comme devant ou ne devant pas être son segment de lanormalité).
Cette question de la segmentation de lenfance anormale renvoie à celle des origines de la loi de 1909, qui ont suscités des débats qui sont toujours actifs aujourdhui, même si plusieurs travaux sont venus les éclairer de manière décisive. Doù, de lécole ou de lasile, a donc émergé ce texte créant une filière scolaire différenciée pour les enfants anormaux ? Pour répondre à cette question il convient de faire un détour par lhistoire de la recherche socio-historique en France sur le sujet de lenseignement spécialisé. 
1.1.1.3 Aux origines de la loi de 1909 
Les recherches françaises sur les filières de lenseignement spécial et sur le champ qui les accueille, encore peu nombreuses et marquées par une prééminence féminine (ce qui, en vertu des lois sociales régissant le prestige dun objet quel quil soit et donnant mesure de lintérêt social dun domaine, est révélateur de lintérêt académique que le sujet suscite), a été inaugurée par la publication en 1975, dans le tout premier numéro dactes de la recherche en sciences sociales, dun article de Francine Muel titré « Lobligation scolaire et linvention de lenfance anormale », qui ouvrait la place à un questionnement jusque là quasiment inexistant. (Vial, 1990). Cet article posait notamment comme hypothèse, ainsi que le laisse suggérer son titre, que la loi dobligation scolaire de 1882, en drainant à lécole toute une partie de lenfance jusque là privée de scolarisation, avait fait naître au sein du corps professionnel des maîtres et de linstitution scolaire en général un souci inédit né de la confrontation avec une partie de ce nouveau et trop large public, partie composée des « plus pauvres dentre les pauvres », qui ne pouvait faire face aux exigences de la scolarisation telle quelle existait sous la 3ème république : 
« Il a fallu une quinzaine dannées pour que lécole primaire produise des déchets dont lexclusion sera constitutive de lélaboration dun nouvel appareil idéologique : le médico-pédagogique ». 
Une nouvelle frange de lanormalité serait née de ce processus : les arriérés et les instables, nouvelles catégories produites par lécole, en sus des idiots et des imbéciles, relevant eux de lasile ; « les futurs psychologues deviendront les spécialistes du tracé de cette frontière » en se taillant un « marché distinct de celui des aliénistes comme de celui des pédagogues ». 
Ces analyses constituent un premier courant des analyses socio-historiques des logiques daction autour de lenfance anormale qui sont restées largement acceptées pendant plusieurs années. Le second porte une autre interprétation des origines des filières de lenseignement spécial, et se trouve principalement référencé au travail de Monique Vial à la fin des années 1980. Il insiste sur le fait que la demande initiale ayant abouti à la création des classes de perfectionnement nest pas dorigine interne à lécole mais provient de lasile, en la personne de laliéniste Désiré Magloire Bourneville, médecin-chef du service des idiots et épileptique de Bicêtre à partir de 1879. Limportance de son action réformatrice dans de nombreux domaines est attestée par de nombreuses recherches. Il dénonce auprès de lassistance publique de Paris les conditions de vie des enfants à lasile, et formule des demandes précises damélioration de ces conditions. Face à la « quasi-indifférence des autorités (
), il se tourne alors vers lécole, suggérant la création de classes spéciales destinées aux enfants les plus adaptables ». (Plaisance, 1996). Cest à son initiative quest en effet menée dès 1891 la première enquête sur les enfants anormaux, à Paris, qui conclut à la nécessité de classes spéciales. 
Lenjeu principal de ces divergences dinterprétation semble bien se situer sur la validité, ou non, de lanalyse selon laquelle lobligation scolaire puis la loi de 1909 entraînent lémergence de nouvelles catégories nosographiques telles que les mentionnent F. Muel,  des catégories dont lalibi scientifique masquerait mal la volonté de ségrégation sociale. En effet, la perspective inaugurée par M. Vial « laisse supposer que les anormaux qui peuplaient lasile pouvaient se rencontrer à lécole et réciproquement » (Gateaux-Mennecier, 1990). Un autre enjeu est la place accordée à la nature intrinsèque de cette loi (et, indirectement, aux intentions de ceux qui lont porté à partir de 1904), enjeu dont la nature est homologue à celui, plus large  et qui le contient , de déterminer si lensemble de la production législative autour de la protection de lenfance participe plus dun progrès ou dun appareil idéologique de contrôle social prenant sa source dans le 19ème siècle.  
Depuis les travaux de Monique Vial, presque aucune recherche ou produit de recherche tel quarticle ou ouvrage nomet de faire mention de cette controverse, dont nous limiterons ici lévocation. Nous conclurons sur ce point avec un résumé du consensus qui semble sêtre construit, qui transparaît dans de nombreuses publications depuis les années 1990, complétée dune prise de position quant à ce que nous considérons comme des connaissances dont nous devons faire la mention ici. 
1.1.1.4 Lenseignement spécial : une genèse non linéaire, 
une logique ségrégative 
« [La notion de] perfectionnement masque la préservation morale » (Gateaux-Mennecier, 2000).
Entre les positions internaliste et externaliste évoquées ci-dessus se dessine lappréhension dune dynamique « non univoque, (
) mais interactionnelle ». (Gateaux-Mennecier, 1999). Les influences de lasile et de lécole se conjuguent pour aboutir à la loi de 1909. Jacqueline Gateaux-Mennecier fait remarquer que les discours produits par le milieu hospitalier sont révélateurs de « tentative de nosologie précise », avec des « tableaux cliniques complexes » là où la notion de danger moral, « véritable leitmotiv des principales revues pédagogiques » de cette période, démontre la prégnance dans les milieux pédagogiques de notions fortement connotées moralement. Laction initiale de Bourneville, dont il est reconnu que les positions novatrices (« on pourrait dire quil préconisait lintégration des enfants handicapés mentaux dans les structures scolaires ordinaires », écrit Eric Plaisance en 1996) « ne furent pas relayées comme telles par ceux qui, au sein de la commission interministérielle des anormaux à partir de 1904, travaillèrent à lélaboration de la loi de 1909 », a été dévoyée dans le sens dun projet dont la prévoyance sociale et le rentabilisme constituèrent les arguments principaux auprès dun parlement certainement enclin à y être sensible. 
De la même manière, nous pouvons caractériser la création des classes de perfectionnement par la loi de 1909 comme répondant à deux orientations, non exclusives lune de lautre : tout à la fois un souci égalitaire et démocratique et un objectif de « maintien de lordre et du rendement économique ». Prenant comme postulat le fait que co-existent ces deux réalités, nous pouvons dès lors affirmer quune analyse sur la façon dont elles peuvent être toutes les deux opérantes malgré le fait quelles paraissent contradictoires nous semble indispensable.
A notre sens, la réduction, présente dans les travaux fondateurs de Francine Muel, des conditions démergence de la loi de 1909 à des causes internes à lInstruction Publique (et dont on peut dire, comme le souligne Mazereau (1998), quelle est révélatrice dune analyse qui « ne tire pas assez parti de la dimension interrelationnelle de la notion de champ »), ne doivent pas masquer les apports fondamentaux que représentent ces travaux, qui ont été par la suite développés par dautres chercheurs. Ainsi que lénonce Gateaux-Mennecier, « lélaboration des concepts est inséparable des conditions sociopolitiques qui donnent naissance à lenseignement spécial ». Ces conditions, déjà rapidement évoquées, sont caractérisées aussi par le fait quelles produisent une forte « préoccupation du pouvoir politique de cette époque relativement aux mouvements sociaux. ». Francine Muel rappelle la proximité de la commune de Paris (1870). Les inquiétudes des classes dominantes (relativement aux classes populaires, ferment des révolutions) constituant la bourgeoisie républicaine sont exprimées de manière non euphémisée dans nombre de revues, elles-mêmes produites par un cortège impressionnant dinstitutions que Muel nomme « organes du devoir social » (associations, comités, ligues, sociétés de patronage, etc.), dont la vocation principale explicite est la prévoyance / lassurance sociale. Muel cite Léon Bourgeois intervenant à la tribune du 14ème congrès de la ligue française de lenseignement (1894) : « Les esprits ont besoin, hélas, dhygiénistes et de médecins comme les corps ». On retrouve ici lhomologie entre lappréhension des préoccupations organiques et celles de lesprit, avatar rapporté à lindividu de la tradition ancienne de comparaisons entre corps humain et corps social. Cette même homologie se retrouve dans la trajectoire scientifique dAlfred Binet, passé de lorthophrénologie (étude de la conformation des crânes et de leur lien avec lintelligence) à lorthopédie mentale (souci de la « conformation des pensées ») (Gateaux-Mennecier, 2000). Cette orthopédie mentale se donne comme objectif le perfectionnement, c'est-à-dire la possibilité denvisager une entrée dans la production, en préparant les anormaux décole à latelier et à lusine, ou aux champs. Cest ce qui fonde à qualifier les promoteurs de la loi de 1909, en tout cas ceux qui, à linstar de Binet et Simon, le devinrent à partir de 1904, de « rentabilistes » : ceux qui ne parviennent pas à devenir de possibles travailleurs deviennent dans cette perspective des « non-valeurs sociales », expression utilisée telle quelle par de nombreux contemporains. 
Ce soubassement philosophique, et ses productions à vocation scientifique, contribuent à masquer le lien entre réussite scolaire et origine sociale des enfants ; la classe dirigeante de lépoque ne questionne pas et ne pense pas ce lien. « Il est tout naturel de juger lintelligence dun enfant daprès ses résultats scolaires », écrit Binet en 1909. (Cité par Gateaux-Mennecier, 2000, p.43). 
Tous ces aspects fondent en partie la légitimité à décrire le corps naissant des enseignants spécialisés comme des répliques du colon à la mission civilisatrice, envoyée en terre étrangère ; ce qui est étranger, on le devine, ne sappréhendant quen fonction dun sentiment dappartenance qui constitue, déjà, le fondement de la formation professionnelle des enseignants, « petite noblesse dEtat » formée à transmettre les valeurs de lidéal qui constitue le socle du mythe de lécole républicaine. 
Avec la loi de 1905, lécole laïque entre en compétition avec lécole religieuse ; face aux peurs des parents de la « promiscuité » et de la « contagion » (que relaient Victor Duruy pour expliquer les échecs de réforme de lécole primaire, cité par F. Muel, 1975), le mythe de légalité doit sincliner face à la puissance de cette concurrence, qui pousse lécole publique à soigner limage quelle veut donner delle, une image qui se doit dêtre « propre et saine ». La mission originelle du spécial trouve ici un éclairage tout à fait fondamental. 
« La concurrence sexerce à travers la morale et lidéal professionnel. Comme les religieuses consacrées aux anormaux, les maîtres de perfectionnement, sorte de saint laïques, apôtres aux vertus évangéliques, seront marqués par la vocation ». (Vial, 1990). 
Pour autant, ainsi que le souligne Mazereau (1998), « ce nest pas en caractérisant la fonction sociale dune institution à son origine que lon peut être assuré de la permanence de cette fonction ». La période abordée ici, si elle est fondatrice de ce point de vue, comporte aussi dautres points saillants. Elle est le moment où se constitue la première division du travail et des « concurrences de compétences » entre la justice (droits des mineurs en 1912), la médecine aliéniste (les asiles gardent vocation à accueillir ceux des anormaux qui ne trouvent place nulle part, nommés inéducables ou incurables), les uvres privées (sur le segment à la fois de redressement moral  judiciaire  et relatif aux déficiences sensorielles, du « marché de lenfance ») et, à partir de 1905, lécole publique, avec les anormaux décole éducables, destinés au perfectionnement (Chauvière & Plaisance, 2003, 2008) que la psychométrie (qui est « plus une sociométrie », écrit Jacqueline Gateaux-Mennecier en 2000) créée à cette époque par Binet et Simon se verra chargée, surtout après 1945, didentifier. 
 Penchons nous dès à présent, au-delà du texte de la loi de 1909 et de ses origines, sur les applications quil va recevoir dans la pratique, ainsi que sur lensemble des relations quentretiennent, jusquau mitan du siècle, lenfance anormale et lécole. 
	1.1.2	Ecole et anormalité
			
« En 1936, on compte 36 classes de perfectionnement. (
) Les rares [qui sont] créées [dans lentre deux guerre] restent des lieux de relégation pour les élèves les plus indisciplinés ». 
Pinell & Zafiropoulos, 1978.
			1.1.2.1 Lapplication de la loi du 14 avril 1909 
		
La création des écoles et classes de perfectionnement reste très limitée jusquen 1945, et ce pour plusieurs raisons. Tout dabord, lobligation nest pas mentionnée dans le texte ; cest donc aux mairies que revient linitiative de création. Ensuite, les moyens financiers ne sont pas assurés par lEtat et restent ainsi à la charge des communes et des départements, ce qui évidemment nest pas fait pour les inciter à ouvrir de telles filières. Patrice Pinell et Marcos Zafiropoulos (1978) mentionnent également le fait que la secondarisation de lenseignement, c'est-à-dire louverture du secondaire à la majorité de la population scolaire na pas encore eu lieu. En effet, avant 1959 et lobligation scolaire jusquà 16 ans, lenseignement primaire na pas encore le caractère de préparation au secondaire quil acquiert par la suite ; il est relativement autonome dans ses objectifs, qui reste limités à « lentrée dans la production » dune part, à lobtention du certificat détude primaire (que seule une minorité délèves parvient à décrocher) dautre part, et, enfin, cas exceptionnel (bon pour permettre le maintien de la légitimité du mythe égalitaire de lécole républicaine), à laccession au lycée, qui reste réservé majoritairement à la bourgeoisie. Dans ces primes conditions, spécifiques à lunivers du premier degré, les anormaux décole, ou ceux qui étaient susceptibles dêtre identifiés comme tels, et dès lors quils ne perturbent pas la classe, se fondent dans la masse de lensemble des élèves. 
Michel Chauvière et Dominique Fablet ajoutent (2001) que « rien nest fait pour inciter les instituteurs à se spécialiser », ce qui contribue à linsuffisance des moyens, tant financiers quhumains. Mais le plus important semble bien résider dans le fait que la masse des maîtres « ne semble guère avoir été touchée par les nouvelles théorisations » qui ont émergé au début du siècle (Vial, 1990) : la loi de 1909 a été portée par des spécialistes et les débats nont guère dépassé leur cercle. Bien sûr, les autorités scolaires, les maîtres et militants de linstruction publique « continuent à parler des élèves qui ne tirent pas profit de lécole ou ne se plient pas à sa discipline », mais ceci en terme de « pédagogie courante, (
), générale » (Vial, 1990) et non pas en reprenant les notions danormalité ou darriération scolaire. « Ils ne semblent pas sêtre appropriés les représentations nosographiques de la débilité légère », écrivent Pinell et Zafiropoulos en 1978. 
Ceci a un effet direct sur les orientations que connaissent les quelques rares classes et écoles de perfectionnement ouvertes durant cette période : à lorigine destinées aux seuls arriérés perfectibles, nommés ensuite débiles légers, elles se trouvent finalement utilisées comme des « lieux de fixation des fauteurs de troubles », les instables et caractériels, ce qui « compromet la réputation et le bon fonctionnement des établissements ». Il semble que cette situation perdure jusque dans limmédiat après-guerre (39-45)  cest en tout cas dans cette période que linstitution réagit à cet état de fait : une circulaire du 10/02/1944 fait entrer au sein des commissions dorientation (jusquici composées, selon larticle 12 de la loi de 1909, dun inspecteur de lenseignement primaire, dun instituteur de lécole et dun membre de la famille de lélève) les nouveaux spécialistes de la psychiatrie infanto juvénile. Puis, en 1951, une circulaire recadre le problème en énonçant que « ce sont uniquement les débiles mentaux qui doivent avoir leur place en classe de perfectionnement ». 
			1.1.2.2 Un « grand sommeil » ? 
La guerre de 1914-1918 joue également un rôle important en ce quelle polarise et mobilise, dans son déroulement et dans ses effets à court et moyen terme, bien des énergies. Dans lentre deux guerres, lenseignement spécial napparaît pas comme une priorité du ministère de lInstruction Publique devenu ministère de lEducation Nationale en 1932. Il est dailleurs frappant de constater dans lensemble des produits de recherches socio-historiques sur le sujet de lenfance handicapée à quel point cette période se trouve absente, et cette absence ne trouve pas toujours la faveur dune explication circonstanciée. Monique Vial note cependant que les rares créations de classes ou décoles de perfectionnement sont « dues à des initiatives locales, liées à laction de personnalités médicales et dassociations militant en faveur des anomaux ». 
Cette période est nommée par Pinell et Zafiropoulos « grand sommeil ». Pour autant, même si la loi de 1909 reste dans les grandes lignes inopérante, certaines évolutions, notamment institutionnelles, sont à prendre en compte, sur dautres segments territoriaux de la division du travail administratif ou professionnel. Nous lavons vu, lInstruction Publique devient Education Nationale en 1932, évolution terminologique qui nest pas sans faire montre dune volonté daction élargie et qui est dailleurs reçu avec défiance par nombre dacteurs du privé associatif, confessionnel le plus souvent, car ressenti comme une volonté hégémonique (Chauvière, 2000, Chauvière et Fablet, 2001). Mais linstruction publique nest pas le seul ministère concerné par la division originelle du travail autour de lenfance anormale à évoluer durant cette période. Une dizaine dannées avant lui est créé le ministère de la santé (1920), du rapprochement entre les trois compétences que sont lhygiène sociale, lassistance publique et la prévoyance sociale, détachés des ministères de lintérieur et du travail. En 1929, à la faveur dune loi le chargeant du « contrôle des uvres dassistance ou de bienfaisance privée », le ministère de la santé « intègre subrepticement le domaine socio-éducatif ». En 1933, 34 et 35, dautres dispositions viennent consolider cette intervention. Et en 1935, la dépénalisation des jeunes vagabonds (qui participe du passage de lenfance coupable à lenfance victime) et, dans le cadre dun décret de la loi de 1889 sur la protection de lenfance, linstitution de lassistance éducative, ne sont guère suivi deffet en ce qui concerne laction publique  mais beaucoup plus relayées par les initiatives privées. 
Ainsi, ajoute Michel Chauvière, et malgré des tentatives de coordinations interministérielles sous le front populaire, « jusquà la fin des années 30, la référence [de laction publique en matière denfance déficiente] reste lEducation Nationale », dans le cadre dune réalité de son appréhension où il apparaît un fossé entre promoteurs des classifications savantes et enseignants présents dans les écoles. 
La fin du 19ème siècle et la première moitié du 20ème constituent donc le moment de la genèse du champ de lenfance handicapée, qui sorganise sur la base dune prime segmentation de territoires qui restent dans une large mesure, en tout cas en ce qui concerne lécole, administratifs, et peu professionnels (« créant la fonction sans créer lorgane », comme lécrit Michel Chauvière en 1999 à propos de la loi de 1912). Léducation nationale, la santé et la justice sont ainsi, originellement, en lutte permanente pour la définition des lieux, des formes et des objectifs dintervention en direction de (ou sur) lenfance anormale. Cette lutte a un lien direct avec celle des spécialistes pour limposition de la légitimité des classifications, qui, « se donnant pour de pures controverses scientifiques, masquent le fait quelles sont aussi des luttes pour des enjeux non scientifiques, notamment institutionnels, entre différents spécialistes qui défendent les intérêts propres de leur corps » (Pinell & Zafiropoulos, 1978). Parmi ces nouvelles spécialités se donnant pour terrain daction spécial cette « espèce denfant » (Gateaux-Mennecier, 1999), on trouve le médico-pédagogique et la psychologie, dont les promoteurs et premiers représentants affermissent leur légitimité jusquaux années 1940-1950. Ces éléments conduisent à pointer la « permanence structurelle des enjeux sociaux, institutionnels et disciplinaires » qui caractérise le champ de lenfance handicapée. 
Cette division originelle du travail, où filières institutionnelles entretiennent un lien étroit avec les dénominations utilisées, ainsi que la nature particulière du rapport dialectique privé/public qui donne une place de subsidiarité à ce dernier et, tout autant, la fonction sociale originelle du champ, caractérisée par le thème de la préservation morale et des réalités de « stratégies normatives au détriment des familles populaires » (Chauvière, 2000), constituent des dynamiques centrales du champ de lenfance inadaptée, et autant de conditions de compréhension de ses évolutions ultérieures, notamment en ce qui concerne lécole. 
Enfin, les années 1880-1909 sont aussi celles où se met en place une opposition toujours très active aujourdhui, même si elle a changé de forme, ainsi que nous le verrons. Un « schéma comme couche profonde des représentations dominantes de la question des enfants difficiles » (Chauvière & Plaisance, 2003) à savoir : les éducables à lécole, les inéducables à lasile (ou, plus tard, dans les institutions spécialisées). Ceci même si, du fait notamment de laction, durant le 19ème siècle, de personnalités comme le Docteur Itard, Edouard Seguin ou Désiré Magloire Bourneville, le débat éducable/inéducable (ou curable/incurable) semble se prolonger, contre lincurabilité, en faveur de léducabilité.
Laffermissement des contours du champ : 1940-1975	
1.2.1 	Les fondements unifiants de linadaptation	
« Le renouvellement des énoncés [et] la redistribution des compétences savantes et administratives [sont] autant de lignes de recomposition de lensemble du dispositif institutionnel qu[est] le secteur de lenfance inadaptée. » 
Jean-Paul Tricard, 1981.
1.2.1.1 Vichy, le conseil technique et lécole 
Le ministère de la Santé a vu à partir des années 1930 sa légitimité accentuée, en particulier parce quil se retrouve responsable de lapplication des normes administratives qui simposent à toutes les uvres privées. Le régime de Vichy va consacrer cette tendance, instituant le secteur de la santé comme principal référent administratif du champ. Dans un contexte très anti-laïc et clérical, tout à linverse des valeurs de la 3ème république, (et du Front Populaire), lEducation Nationale ne se trouve pas dans une position très favorable pour continuer à rester le ministère référent en matière denfance anormale. Ainsi, en 1943, « le pouvoir de coordination interministérielle est transféré, à sa demande, au ministère de la santé ». La même année est créé un conseil de lenfance déficiente et en danger moral, inspiré par ce même ministère, et composé de psychiatres à orientation médico-sociale, de quelques magistrats et de personnalités reconnues en matière éducative (prêtres et laïcs). 
A la fin des années 30, « le tableau des appellations en usage pour désigner de manière savante les enfants irréguliers, inassimilables, ou simplement difficiles, est des plus hétérogène ». Il est en effet le produit de lhistoire de trois systèmes (Justice, Santé, Education Nationale) ayant chacun son propre tableau de classifications qui, pour la plupart, loin de se succéder, se sont rajoutées les unes aux autres, créant un effet de sédimentation. Au sein de la Justice, les dénominations renvoient à lhistoire de linternat, des maisons de correction, du récent droit des mineurs, etc. Du côté de la Santé, il sagit de lhistoire de lasile, des premiers établissements à vocation médico-pédagogique et bien évidemment des « grands noms » des médecins réformateurs. Enfin, lEducation Nationale est, elle, marquée par lempreinte de la loi de 1909, qui implique la nécessité de distinguer les anormaux éducables, qui relèvent de son action, et les autres. Chauvière écrit que pour ce faire elle a construit deux réponses : léchelle métrique de lintelligence (basée sur les travaux de Binet et Simon) et lidée dune instance administrative dorientation, telle la commission prévue dans la loi de 1909  mais bien quaucune nait jamais été créée avant 1944. 
Le conseil technique de lenfance déficiente et en danger moral va ainsi sattacher, dune part, à la codification notionnelle de linadaptation et dautre part à la création de structures institutionnelles, les agences régionales de sauvegarde de lenfance et de ladolescence (ARSEA). « Cas juridiques dexception » (Muel, 1980) (associations de loi 1901 au sein desquelles lEtat impose des membres de droit dans le conseil dadministration ainsi que des statuts-types), les ARSEA se voient confier le premier ensemble de  missions suivant :
ouverture de centres régionaux dobservation et de triage
création détablissements manquants
création décoles de cadres rééducateurs
Et, le second, « attributs du service public » : 
intégration de tous les établissements, privés comme publics 
Laffiliation aux ARSEA permet un financement public des initiatives privées, en ouvrant droit à ce financement, avec la technique des prix de journées. Il sagit donc, pour reprendre la formule de Jean-Paul Tricard (1981), dune véritable « étatisation parallèle », qui permet un contrôle administratif (de la répartition des équipements, du financement) sans créer dadministration nouvelle ni de corps de fonctionnaires. « La rééducation de lenfance inadaptée prend ainsi les apparences pratiques de linitiative privée, mais enchâssées dans une dispositif semi-public qui réalise en partie laction publique de lEtat », écrit Michel Chauvière. (1999)
La volonté dinscrire la gestion de lensemble du secteur dans un ensemble national sopère dans le cadre déjà en place, dans les structures du champ, de la dialectique privé/public, en se déclinant selon le caractère spécifique du contexte du régime de Vichy, selon les évolutions institutionnelles qui ont eu lieu dans la période de lentre deux guerres.  
Autre observation relative à lactivation dune dynamique du champ déjà mentionnée : le remaniement notionnel saccompagne de créations administrative et législative. 
Sur cette base, au-delà de la volonté dunification notionnelle, un nouveau consensus se construit autour de deux axes : « améliorer le contrôle social des enfants et de leur famille » et reconnaître « lutilité sociale et économique » des actions à destination de ces familles. Le second axe implique deux caractères nouveaux de la définition des actions à mettre en oeuvre: « un projet de discrimination positive à des fins curatives » et une « perspective de prévention ». Autant de principes qui  ne correspondent pas à la philosophie de lidéal de lécole républicaine, où la notion dégalité des chances empêche toute idée de discrimination positive, et où le « traitement résiduel de léchec scolaire » ne laisse guère de place à la prévention. Est-ce aussi pour cette raison que, en plus de linadéquation du régime en place avec les fondements publics et laïc de lécole républicaine, dans la composition du conseil pour lenfance déficiente et en danger moral, aux côtés des neuropsychiatres, magistrats, prêtres et divers laïcs, on ne trouve nul inspecteur de lenseignement, et encore moins dinstituteur ? 
Cest contre lécole, et dans un contexte de « forte délégitimation de [ses] valeurs républicaines »  mais aussi et surtout contre les limites dun périmètre dintervention que les fondements idéologiques de lécole française ne lui permettent pas de franchir, que se met en place cette nouvelle redistribution des compétences en matière dinadaptation. Il est notable dajouter que cette notion, si elle va servir de référence pour lensemble du secteur de léducation spéciale, va aussi en constituer une pour lensemble des professionnels du travail social, pour lesquels la thématique de lexclusion va peu à peu, dans les années 1970, se substituer à inadaptation. 
A lopposé de ce grand recul du secteur de lécole en la matière, on observe lémergence au sein du secteur de la Santé dune spécialité qui va jouer un rôle essentiel dans le développement ultérieur du champ : la psychopédagogie médico-sociale.  
1.2.1.2  Pédopsychiatres, neuropsychiatres 
  infanto juvénile 
La participation du corps des neuropsychiatres au conseil technique leur confère une double efficacité. Elle est à la fois institutionnelle et experte (Chauvière, 2000). Lunification notionnelle de linadaptation, matrice des pratiques mises en uvre dans les centres régionaux dobservation et de triage, sest faite au sein dun conseil présidé par un psychiatre, Georges Heuyer. En dautres termes, le corps des psychiatres est à la fois présent dans le moment décisif de « fixation de la doctrine » (Chauvière, 1999) et dans sa mise en pratique au travers des organes uniques dentrée dans les filières institutionnelles de traitement que constituent les ARSEA. 
Comme indice révélateur de limportance de cette nouvelle spécialité médicale, partie des « savoirs psychiatriques, psychologiques, psychotechniques et psychopédagogiques sur lenfant » qui ont beaucoup progressé durant la première moitié du 20ème siècle (Chauvière 1999), et partie du cadre plus général de la « médecine sociale moderne (
) qui refuse lalternative curable/incurable » (Pinell & Zafiropoulos, 1978), on peut également citer le fait que nombre de pédopsychiatres deviennent présidents dARSEA, directeurs dinstitutions privées ou conseillers scientifiques de ces dernières. Dans léducation nationale aussi ils consolident leur position : à partir de 1944 ils participent aux commissions médico-pédagogiques, porte dentrée des classes de perfectionnement ; ils participent aussi à la formation des enseignants spécialisés. 
Rappelons également le fait suivant : en 1950 se déroule la première enquête nationale de dépistage systématique des enfants déficients mentaux, sous légide de lINED et à linitiative de Georges Heuyer, qui présidait en 1943 le conseil technique, et en 1952 est créée la première revue française de neuropsychiatrie infantile. Autant déléments qui marquent lémergence dun nouveau corps professionnel et, concomitamment, du territoire professionnel quil commence à conquérir dans limmédiat après-guerre, début dune période décisive pour le champ dans lequel ils sinscrivent.  
1.2.2 	Lâge dor de linadaptation : 1945-1975	
« La permanence dun rapport conflictuel public/privé dont les termes se renouvellent sans cesse contribue à favoriser le caractère expansionniste de ce secteur ». 
Francine Muel-Dreyfus, 1980.
1.2.2.1 Une recomposition politique après la libération 
La primauté de linitiative privée, la structure institutionnelle des ARSEA, la primauté donnée au ministère de la Santé, autant déléments qui ne sont pas remis en cause lors de la Libération. Lenfance inadaptée constitue pourtant à cette période un enjeu important de réorganisation de lEtat. 
Malgré les velléités dannexion de la Santé de lensemble du secteur de lenfance inadaptée (certains responsables caressent en effet lidée dune seule et unique tutelle qui serait ce ministère), la Justice assure son indépendance et est consacrée législativement sur le segment des « instables » et des « caractériels » par la création de lEducation surveillée avec les ordonnances de février 1945. LEducation Nationale reste elle en marge, occupée à la réorganisation de lappareil scolaire, et connaissant une « perméabilité plus grande de collaboration avec la psychologie quavec la pédopsychiatrie », dont limportance dans la reconstitution du champ se trouve elle aussi confirmée. (Tricard, 1981). Les réformes engagées sous Vichy ont ainsi mis en place un cadre daction qui se trouve « partiellement légitimé » à la chute du régime (Chauvière, 1999, 2000). Mais il sagit « moins dune reconduction des orientations amorcées sous Vichy quune consécration des positions de pouvoir conquises au cours de cette période », écrit Jean-Paul Tricard. 
En 1958 est proclamée la 5ème république. LEtat se trouve renforcé, par le biais dun passage dun régime parlementaire, que constituait la 4ème république, à un régime quon dit semi-présidentiel. La période dite des trente glorieuses achève alors sa première décennie dune croissance démographique et économique sans précédent. La planification acquiert dans ce contexte une importance toute particulière. 
En 1964 est mise en place une grande réforme administrative issue des travaux de la DATAR, qui traduit les premiers objectifs de la planification, centrés sur laménagement du territoire et la reconstruction, et qui a des conséquences directes sur le champ de lenfance inadaptée : redécoupage des 21 circonscriptions dévolues au ARSEA, création des DRASS (fusion des directions de la population, de laction sociale et de la santé). Pour Jacqueline Roca (2001), les effets de cette réforme « annoncent la reprise en main par le ministère de la santé et le renforcement du contrôle des pouvoirs publics » sur les structures administratives et institutionnelles du champ. Les CREAI, centres régionaux pour lenfance et ladolescence inadaptée, succèdent aux ARSEA. Quant à lUNAR, elle disparaît au profit de deux structures : lassociation française de sauvegarde de lenfance et de ladolescence (AFSEA) et le centre technique nationale de lenfance et de ladolescence inadaptées, le CTNEAI, a qui est dévolu la fonction de recherche et détude. (Roca, 2001). 
Mais cest dans les décennies 1950 et 1960, et dans le contexte ci avant rappelé, que se déroule plusieurs évènements tout à fait majeurs pour la structuration du champ de lenfance inadaptée ; évènements dont on perçoit largement encore aujourdhui les effets. 
1.2.2.2  La création des grandes associations : 
  APAJH et UNAPEI 
En 1994, lUNAPEI compte 65 000 adhérents, lAPAJH 25 000. Aujourdhui encore, ce sont les premières associations du champ en terme de nombre dadhérents, de structures gérées, de nombre de salariés et de nombre de places offertes aux enfants. Il nous semble utile ici de rappeler les origines de ces deux associations et den faire une analyse qui vaut comme idéal-type quant à limportance des associations dans la dynamique du champ tel quil se recompose à partir des années 1940. 
Le troisième plan déquipement sanitaire et social (1958-1961) « nest réalisé quà 60% pour lenfance inadaptée », note Eric Plaisance (2000). Le reste est laissé à linitiative privée, et cest dans ce contexte que naissent UNAPEI et APAJH, et quémergent leurs premières créations institutionnelles qui viennent pallier les insuffisances de linitiative publique.
LUNAPEI
Lassociation lyonnaise de parents denfants retardés et inadaptés (ALPERI) est la première structure associative recensée dans les années 1940. Elle devient lALAPEI en 1953. En 1949, une autre structure associative est créée à Paris : les papillons blancs. Il sagit dune « uvre de défense et de protection de lenfance déficiente ». Léonce Malecot, un avocat, en est le président. Il transforme les papillons blancs en structure fédérative en 1958, destinée à rassembler lensemble des initiatives déjà existantes sur le territoire. Les papillons blancs deviennent lunion nationale de défense et de protection de lenfance déficiente. Malecot décède la même année. En 1960, lunion est transformée en UNAPEI, sous titré « les papillons blancs et groupements similaires ». Elle est reconnue dutilité publique en 1963. 
Les premiers responsables des associations fédérées sont issus de la bourgeoisie (magistrats, médecins, notaires, cadres supérieurs du privé ou du public, industriels, gros commerçants.) (Pinell & Zafiropoulos, 1978) La structure fédérative ne dépareille pas : la composition du premier conseil dadministration de lUNAPEI voit 14 membres sur 24 être des  « cadres ou des professions intellectuelles supérieures », ce qui « confirme lanalyse de Pinell & Zafiropoulos selon laquelle la force des premières associations de parents réside dans la position sociale des premiers militants et responsables ». (Plaisance, 2001)
Le cadre initial est « laction familiale », c'est-à-dire le conseil, laide, et le guidage des familles. En 1962-63, lUNAPEI met par exemple en place des « rente survie », primes versées par les parents pour assurer le devenir des enfants déficients mentaux orphelins. Elle mène également des actions revendicatives auprès des pouvoirs publics. Rapidement, et selon la logique qui prédispose les associations du champ à semparer de telles initiatives, elle se donne comme objectif de suppléer aux carences des équipements publics en promouvant la création détablissements spécialisés. Pour ce faire,  les associations de lUNAPEI ont recours à des personnels techniques, surtout médecins et pédopsychiatres. Ces derniers insistent pour que les associations se dotent déquipe de techniciens, surtout neuropsychiatres, psychologues, pédiatres, psychiatres. Se constitue ainsi une alliance de fait entre les corps de neuropsychiatres et pédopsychiatres et ces regroupements, originellement socialement marqués, de familles denfants inadaptés mentaux. Les raisons de cette alliance trouvent leur origine dans la synchronisation dintérêt convergents : les pédopsychiatres luttent en effet durant cette période contre lhôpital psychiatrique, tentant dautonomiser leur nouvelle spécialité, centrée sur lenfance, de lensemble de la psychiatrie (alliés au pédiatres, qui mènent alors une lutte analogue). Les parents militants cherchent de leur côté à rompre avec lalternative unique qui se pose pour le destin institutionnel de leurs enfants, soit : la maison ou lhôpital. Outre les créations institutionnelles, cette alliance a aussi pour effet, concomitant, de voir les créations dassociations de parents encouragées par les spécialistes. 
Laction familiale, objectif initial de lUNAPEI, amène dès lorigine lorganisation a nouer des lien avec lunion nationale des associations familiale (UNAF). Ainsi, en 1959, le congrès de lUNAF est consacré à lenfance déficiente. Le professeur Lafon, président de lUNAR, est très présent à ce congrès, et sy exprime longuement. Une commission de lenfance inadaptée est créée au sein de lUNAF, à laquelle participe des membres de lUNAPEI. Néanmoins, fait remarquer Eric Plaisance, on nassiste pas à une fusion UNAF/UNAPEI, à laquelle pourtant on aurait pu sattendre, « comme si les problèmes que [les parents denfants inadaptés] soulevaient ne pouvaient être abordés et traités dans toute leur ampleur que dans des associations qui leur soient spécifiquement consacrées ». Ceci est révélateur du fait que les « représentations anthropologiques », évoquées par Henri Jacques Stiker en 2000, guident, écrit-il, toute politique envers les personnes handicapées ; en loccurrence, on remarque que le terme politique est à appréhender au sens large, puisquil concerne ici une politique associative. 
Les rapports entre lUNAPEI et les pouvoirs publics, nous lavons évoqué à la suite de Patrice Pinel et Marcos Zafiropoulos, ont eu rapidement une certaine efficacité, en partie grâce à la proximité sociale entre les premiers responsables associatifs et les membres de la classe politique. Les rapports entre eux se déclinent à plusieurs niveaux. Avec les parlementaires, tout dabord : un groupe parlementaire « les amis de lenfance inadaptée » est créé, à linstigation de lUNAPEI, et composé essentiellement de médecins députés. Avec les ministères, ensuite : lUNAPEI obtient très vite plusieurs audiences avec le ministère de la Santé, avec celui de lEducation Nationale. Le directeur de la population (avant 1964) est accueilli dans plusieurs de ses congrès
Ces rapports sont mus par une volonté de mesures concrètes et rapides, qui trouveraient une application par de simples réformes de la législation en vigueur. Il ne sagit pas pour les responsables de lUNAPEI de contribuer à un grand débat national qui pourrait aboutir à une nouvelle loi, et faire naître de nouvelles conceptions. On peut tisser un lien de cause à effet entre la nature de cette volonté et ces deux éléments dimportance que sont lalliance objective avec des spécialistes de la psychiatrie infanto juvénile qui sont dans une période de consécration de positions de pouvoir déjà largement acquises et le fait de la prédominance de membres de la bourgeoisie parmi les responsables associatifs, part de la population qui ne se caractérise pas, pourrait on dire en usant dun euphémisme, par un désir de transformation sociale. 
LUNAPEI a ainsi une vision de la répartition des compétences administratives qui est adossée à cette volonté militante daméliorer ce qui existe déjà : « elle exprime non seulement sa vocation spécifique vis-à-vis des enfants déficients mentaux moyens ou profonds, mais considère aussi que ce type denfant relève du ministère de la Santé, laissant  à lEN la responsabilité des classes dites de perfectionnement pour déficients légers. » (Plaisance, 2001). 
LAPAJH
Lassociation daide et de placement des adolescents handicapés (AAPAJH) est créée quant à elle en 1962, à linitiative de deux enseignants du premier degré travaillant en région parisienne, tous deux adhérents au SNI, plus précisément à sa section de la seine. Un de ces deux enseignants est une enseignante, Lucie Nouet, qui est à la fois secrétaire de la commission enfance inadaptée dans cette même section syndicale et institutrice en classe de perfectionnement. 
Les objectifs dorigine de cette association sont issus du constat des faibles possibilités dinsertion professionnelle des enfants des classes de perfectionnement. Dans cet perspective, lAAPAJH se donne comme mission détablir des liaisons entre les adolescents handicapés clientèles des ces classes et écoles, employeur, et service public 
LAAPAJH va vite élargir son champ daction. Du côté du public, ses compétences passent au-delà des seuls déficients mentaux, clientèle des classes de perfectionnement, et sétendent aux déficients physiques. Elle met en place, comme lUNAPEI, un système de rente-survie et engage également, assez rapidement, des actions de créations détablissements et de services.
	
Mais contrairement à la fédération dassociations de parents, lAAPAJH des origines défend lidée dune responsabilité complète de lEducation nationale dans léducation des enfants inadaptés en général. Les caractéristiques sociales et idéologiques des premiers responsables, très différents de celles de ceux de lUNAPEI, constituent une explication : dans le premier conseil dadministration, 8 membres sur 24 travaillent au sein de lEducation Nationale. Par suite, plusieurs évolutions vont marquer lhistoire de lAAPAJH, à la fois dans le public concerné par ses actions et dans les missions : en 1981, elle devient lassociation pour adulte et jeunes handicapés (APAJH). Les statuts adoptés en 1990, date à laquelle elle devient lassociation des parents et amis de jeunes handicapés, en font une fédération, avec des comités juridiquement, administrativement et financièrement autonomes.
« Loption très nettement affirmée par les promoteurs de lAAPAJH en faveur dun service public et laïc déducation peut-elle se concilier avec les initiatives favorables à la création détablissements relevant du secteur de lassociatif privé ? » note Eric Plaisance (2000).
Cet apparent paradoxe se trouve résolu par plusieurs prises de position le long des années 1960 : tout dabord, lAPAJH décide de maintenir lobjectif à long terme dun « grand service national déducation » concernant tous les enfants, y compris les inadaptés, mais dacter de façon pragmatique la nécessité de pallier au déficit de linitiative public en matière de création d'établissements. Ensuite, elle recherche activement la collaboration avec le ministère de lEducation Nationale et les services publics, et sinscrit dans un réseau de soutien, quelle sollicite, comprenant notamment des syndicats de léducation, dont le SNI bien entendu, mais aussi la MGEN et des associations proches de lEducation Nationale. 
On le voit, les origines des deux associations que sont lAPAJH et lUNAPEI sont marquées par des relations de concurrence, et des positionnements généraux en matière de vision politique sur le sujet de lenfance inadaptée qui diffèrent assez largement. LAPAJH se donne rapidement vocation de travailler pour lensemble de lenfance inadaptée, là où lUNAPEI restreint son champ daction aux seuls déficients mentaux. Lune est une association familiale, initiée par des parents dont on a vu quils représentaient une frange plutôt aisée de la population, et qui sinscrit dans une logique de militantisme familiale, dont témoigne ses liens avec lUNAF. Lautre est une association créée par des professionnels enseignants, et qui trouve sa cohérence dans un militantisme de type syndical. Le jeu des alliances que déploient les premiers militants dépend directement de ces caractéristiques. Les rapports quentretiennent ces deux associations avec lEtat convergent ainsi vers une présentation delles-mêmes centrée sur la notion de substitut des carences
La place prise par les associations, alliées aux psychiatres infanto juvéniles, contribue à la disparition dans les années 1960 de toute une « alternative idéologique (
) et institutionnelle », comme « laisser lenfant dans son milieu comme le défendait Deligny (
), [et construire] une collaboration étroite avec lEducation Nationale », qui était défendue par des psychiatres et psychologues proche du Parti Communiste. (Muel Dreyfus, 1980). 
	En 1961, en effet, 60% du secteur public est géré par des associations affiliées à lUNAPEI. Les années 1950 et 1960 constituent, en terme de création institutionnelle mais aussi en terme de formalisation des professions éducatives, le cur de « lâge dor » de linadaptation. 
En terme de financement, et pour avoir un éclairage plus contemporain, voici ce quen dit Tchernonog en 2000 :  
 « Alors quelles ne représentent que 1/5 des associations du secteur sanitaire et social, [les associations de prise en charge des personnes handicapées] détiennent à elles seules un peu plus du tiers du budget total de ce secteur. (
) Elles représentent 8,5% des organisations du secteur associatif et se partagent 18,7% du budget total. (
) 80% [de ce] budget est tenu par 10% des associations ».  Par ailleurs, « Entre 1985 et 2001, les moyens publics consacrés au handicap sont passés de 2,1 à 1,7 points du PIB, ce relâchement étant dû pour lessentiel à lEtat. »
1.2.2.3  Institutions de léducation spéciale : 1950, 1960
« Les raffinements de la nosographie allant de pair avec le renouvellement des équipements anciens ou la création de nouveaux équipements », selon une propriété du champ que nous avons déjà abordé, il napparaît pas surprenant que lémergence de la notion dinadaptation, et les recompositions administratives quelle engage, aboutisse à la création de structures institutionnelles nouvelles. (Muel-Dreyfus, 1980). 
Le cadre réglementaire de 1956 qui légalise les conditions dagréments des établissements se destinant à laccueil de différents types dinadaptation permet la création dinstitutions financées selon la technique du prix de journée, par la sécurité sociale. Il participe de « laccentuation des activités gestionnaires » (Plaisance, 2000) qui entre en conflit, particulièrement pour lAPAJH, avec le militantisme initial. Il offre en effet un cadre favorisant pour linitiative de création détablissements, notamment en ce qui concerne le financement. 
Les institutions médico-pédagogiques (IMP), leur prolongement (en terme dâge de leur clientèle) les instituts médico-professionnels (IMPro), les centres daide par le travail (CAT) sont créés durant les années 1960. Après eux émergent les centres daction médico-sociale précoce (CAMSP), les instituts de rééducation psychothérapeutiques (IRP) et les instituts médico-éducatifs (IME). Parmi ces institutions, les instituts médico-pédagogiques méritent, du fait quils émergent en premier et sont ainsi symptomatiques du début de cette dynamique qui se caractérise par un foisonnement de créations institutionnelles, dêtre lobjet dune analyse spécifique. 
Lalliance entre les neuropsychiatres infanto juvéniles et les premières associations de famille fédérées au sein de lUNAPEI aboutit à la création des IMP, « réinvention du passé », selon Jacqueline Gateaux-Mennecier (2000) (elle fait allusion aux projets de Bourneville de lier les deux savoir-faire professionnels). 
Selon Pinell et Zafiropoulos (1978), la prévoyance sociale est un thème toujours présent dans limmédiat après-guerre mais qui se manifeste sur un mode euphémisé ; « euphémisation qui saccompagne et se soutient de la production dun discours médicalisant (
). [En effet], tous les neuropsychiatres des années 1940 et 1950 saccordent à signaler le danger social que représente linadaptation des arriérés ». Une conception émerge de ce terreau, qui, si elle reste marginale, nen constitue pas moins un héritage patent de la fonction sociale originelle du champ, et qui est caractérisée par un « processus de naturalisation de lacte délinquant », qui devient un « produit de déficience intellectuelle ». 
	Les premiers IMP naissent, nous lavons vu, de la rencontre des intérêts des premières associations de parents, cherchant, contre lhôpital, de nouvelles solutions pour leurs enfants déficients intellectuels, et ceux des neuro et pédopsychiatres qui, eux aussi conte les psychiatres de hôpitaux, cherchent, à faire reconnaître leur spécificité professionnelle. Ces intérêts convergents rencontrent également ceux de lEtat, qui cherche à réduire les coûts très importants des « hospitalisations à vie », ce dautant plus que le thème de la « maîtrise des coûts » des dépenses publiques commence à devenir très présent, à la faveur dune technicisation et dune conception « rationalisante » de laction publique en France, dont témoigne limportance prise par la planification. 
La rencontre de ces intérêts et les alliances qui en découlent sont une des principales raisons pour lesquelles lUNAPEI « donne aux pédopsychiatres une place privilégiée dans les établissements quelle construit et qui lui appartiennent » (Pinell & Zafiropoulos, 1978). 
Parmi les autres effets de ces alliances, et de lefficacité de laction de lUNAPEI vers les pouvoirs publics, on peut noter linterdiction des IMP dans les hôpitaux en 1957. Le surgissement de ces instituts dans le champ de linadaptation constitue une nouvelle segmentation institutionnelle. Dans les premiers temps de leur existence, cette filière va accueillir une population socialement très différenciée de celle qui peuple les classes de perfectionnement, les centres pour caractériels ou les institutions privées situées sur le créneau de lenfance délinquante ou en « danger moral ». Pinell et Zafiropoulos affirment que la clientèle des IMP est même, dans les premières années, caractérisée par une surreprésentation des enfants des classes supérieures. « Dans ce cadre », poursuivent-ils, « le discours de lUNAPEI va prendre une tonalité particulière ». En effet, se posant comme représentant lensemble des déficiences mentales, elle soutient les créations institutionnelles dans le champ de lenfance inadaptée « au nom de la protection de lenfance », et contribue ainsi, à linstar du discours savant, à « la dissimulation des relations existants entre les diverses formes de débilité et lorigine sociale des sujets ».
Il apparaît nécessaire de poursuivre ces analyses aujourdhui, puisquelles portent sur des temps déjà anciens si on considère la très forte plasticité quimpliquent les propriétés du champ de lenfance inadaptée au sein duquel, « la nécessité dinnover pour conserver est à lorigine de création institutionnelles incessantes » (Muel-Dreyfus, 1980).
Parallèlement à ces créations institutionnelles se dessinent plus précisément les contours des professions qui y interviennent, en particulier celle déducateur spécialisé, qui, en parallèle de lunité de la notion dinadaptation, se construit sur lunité de la fonction éducative. 
Professions de léducation spéciale
« A la fin des années 1940 », écrit Jean-Paul Tricard en 1981, « les pratiques rééducatives restent frustes et rudimentaires, sous-tendues par des idéaux charismatiques et moralisateurs plutôt que par des techniques qui ne sont encore que très approximatives ». 
Le rôle des pédopsychiatres et neuropsychiatres va être décisif dans la formalisation des formations professionnelles des métiers de léducation spéciale, à linstar de celui quils jouent dans les nouvelles institutions. A mesure que croit leur légitimité pour nommer, classer et, dans le même temps, proposer des solutions techniques pour le travail en institution spécialisé auprès des enfants qui sy trouvent accueillis, les corps des neuropsychiatres et pédopsychiatres affermissent leur place de spécialistes et incidemment se trouvent naturellement les mieux placés pour participer au premier plan à la définition des contours des professions et des contenus des formations professionnelles. Les années 1950 vont ainsi être déterminantes pour la constitution des professions de léducation spéciale. Ainsi que le résume Jean Paul Tricard, « aux tâtonnements de la philanthropie succèdent les ambitions unifiantes des techniciens ».  
Ce qui semble demeurer un invariant dans les conceptions tous à la fois des « socio clercs », des « socio techniciens » et des « socio praticiens » (Tricard, 1981), les seconds contribuant donc à définir la formation des derniers, est que leur pratique et leur idéologie  « tournent résolument le dos à lécole et à ses valeurs ». (Verdès-Leroux, 1978)
En effet, le corps nouveau des éducateurs spécialisés trouve des racines idéologiques et pratiques à la fois dans le catholicisme social, le scoutisme et, pour une petite part, dans des mouvements pédagogiques alternatifs ; autant de courants qui ont en commun davoir constitué lEducation Nationale et lécole publique comme une figure repoussoir, et même comme un anti-modèle, lui attribuant, malgré leur différence, toutes les caractéristiques antagonistes de celles dont ils se réclament. Jeannine Verdès-Leroux cite, pour lexemple, lauteur dun livre sur le scoutisme, qui évoque le mépris voué par le milieu à :
« (
) ces bons élèves chez lesquels lintelligence a desséché le cur, paralysé lénergie morale et affecté la loyauté »
Mais la formalisation des professions de léducatif « hors lécole » ne se résume pas à la mention de linfluence des neuropsychiatres et à celle des racines historiques de léducation spéciale. Parmi les neuro et pédopsychiatres on trouve évidemment un intérêt important pour des travaux de chercheurs comme Jean Piaget et Henri Wallon. Les mouvements pédagogiques alternatifs sont également vecteurs de référence aux « grands pédagogues » et autres « pionniers », dont les figures charismatiques deviennent rapidement centrales dans limaginaire collectif des métiers du social, et ce dautant plus quelles nont pas été reconnues par lEcole, ou sur un mode plus indirect.  
De 1958 à 1968 on assiste ainsi à la structuration des professions de lenfance inadaptée : en 1958, des accords de travail sont signés entre lUNAR et lassociation nationale déducateurs de jeunes inadaptés, lANEJI, qui initient une codification de lexercice du métier. En 1966 est créé la convention collective du secteur, qui est toujours active aujourdhui. Enfin, en 1967 apparaît le DEES, le diplôme dEtat déducateur spécialisé. 
Le secteur privé, qui se pose comme un secteur « ouvert », « dynamique », « progressiste », à lopposé de la « routine » et de « limmobilisme » de la bureaucratie (dont lEducation Nationale), organise la professionnalisation de ses agents sur le modèle de sa résistance idéologique au secteur public (Muel Dreyfus, 1980). Les écoles créées pour former les éducateurs et les moniteurs éducateurs sont ainsi des écoles privées, « différentes les unes des autres », qui sinscrivent dans une politique de formation qui « échappe à la tutelle de lEducation Nationale et [qui] est reconnue par lEtat ». Entre 1950 et 1975, on passe de 14 écoles déducateurs (dont 9 confessionnelles) à 40, « qui continuent à revendiquer leur personnalité malgré luniformité des programmes effectuée en 1967 ». Ce souci dindépendance de la politique de formation des professionnels vis-à-vis de lEducation Nationale, note Francine Muel Dreyfus, « aboutit le plus souvent à soumettre lenseignement aux exigences des futurs employeurs », et constitue un marqueur important de la nature de « marché ouvert » dont se revendique le secteur. 
	La formalisation des professions de léducation spéciale est corrélative dune évolution de la conception de ses interventions. Cest dans les années 1960 quémerge la logique de « prévention des inadaptations », considérant que le travail éducatif est plus efficace à se porter sur le versant des conditions qui favorisent lémergence des comportements justifiant des mesures, plutôt que seulement sur ces comportements eux-mêmes. La prévention spécialisée émerge en 1972, et les mesures dite AEMO, aide éducative en milieu ouvert, sont créées en 1970, la même année que les GAPP, groupes dadaptation psychopédagogique à lécole : en effet, la constitution « dos-à-dos » de léducation scolaire et léducation spéciale, et les oppositions qui les fondent, impliquent également un certain parallélisme dans leur évolution paradigmatique. 
Cest ainsi que la logique de prévention de léducation spéciale est redoublée par lémergence de la logique de prévention de léchec scolaire que met alors en place lEcole. 
	
		
1.2.3 	Linadaptation et lécole : le temps de 
  		ladaptation scolaire 
« Lambition de linstitution scolaire à légard des inadaptés se limite à ladaptation des enseignements à leur destinée sociale et, corrélativement, à lacquisition des propriétés sociales et comportementales requises pour le marché du travail ». 
Serge Ebersold & J-J Detraux (2003) 
Alors que les neuro et pédopsychiatres se trouvent impliqués dune manière très importante dans les créations institutionnelles et la structuration des métiers de léducation spéciale, la psychologie se tourne de son côté vers lEcole. Laprès-guerre est lépoque de la genèse de la psychologie scolaire en France, genèse qui trouve une de ses matrices dans la reprise des travaux de Binet et de ses suivants par des psychologues comme Henri Wallon et René Zazzo. 
Cest donc dans une période de recomposition que caractérisent à la fois le renouvellement notionnel de linadaptation, une croissance sans précédent du secteur de lassociatif privé en la matière, permise par des dispositions légales combinant financement et contrôle public à linitiative privée, et par un intérêt de la psychologie à la problématique de linadaptation scolaire, que lEcole sattache à travailler au segment de lenfance déficiente qui lui est dévolu : la clientèle des classes et écoles de perfectionnement, les débiles légers. 
En 1951, 20% des enfants de lélémentaire ont plus de deux ans de retard, tandis quen 1960, 60% des élèves ont au moins un redoublement entre le CP et le CM2 (Pinell & Zafiropoulos, 1978). Le contexte dexplosion démographique de la population et, incidemment, de la population scolaire, joue vraisemblablement un rôle éminent dans ces faits : en 1951-52, on compte 3 917 000 élèves et en 1959-60, 5 716 000. « Dès lors », écrivent Pinell et Zafiropoulos, « se pose avec acuité la question de lorientation vers une autre filière de ceux qui accumulent le plus de retard, et plus encore celle du dépistage de ceux qui sont voués à en accumuler ». 
Après la libération, le nombre de classes de perfectionnement est ainsi multiplié par cinq en cinq ans, et à partir de 1950, il ne cesse de croître, jusque dans les années 1960. Outre la forte croissance démographique, qui nexplique pas à elle seule le phénomène, les transformations internes au système scolaire jouent également un rôle déterminant.  En 1959, la scolarité obligatoire instituée jusquà 16 ans inaugure la secondarisation du système scolaire. On assiste à la suppression de lexamen dentrée en 6ème et à une modification du rôle de lécole primaire, qui se meut progressivement en antichambre du secondaire pour une partie sans cesse croissante de la population scolaire. La secondarisation de lenseignement entraîne logiquement la nécessité de création de structures spécialisées dans lenseignement secondaire, prolongement des classes de perfectionnement du primaire. Les sections denseignement spécialisé sont ainsi créées en mai 1967, trois ans après quaient été instituées les classes de transition par un arrêté daoût 1964. 
Lentrée dans ces structures spécialisées seffectue par lintermédiaire dun dépistage, qui se pratique avec des outils de la psychologie scolaire naissante, et notamment le « Binet et Simon », cest à dire le test psychométrique. La première moitié du 20ème siècle est en effet caractérisée par le développement de la psychométrie au sein de laquelle plusieurs évolutions sont à noter depuis les travaux inauguraux de Binet et Simon : réajustement de léchelle métrique de lintelligence, diversification des approches de la mesure expérimentale, introduction de la notion de QI. A la nomenclature initiale « idiot / imbécile / arriéré », se substitue celle de « débile profond / moyen / léger » ; elle conserve une triple catégorisation qui semble à plus dun titre être un simple changement de notions pour décrire les mêmes groupes, avec les mêmes difficultés, si ce nest que les frontières sont maintenant chiffrées grâce au QI. Larrêt de la prise en compte de la débilité en fonction du seul retard scolaire, sous limpulsion notamment de René Zazzo, et lintroduction de la notion de dynamique de développement par Piaget, contre les conceptions dites « fixistes » (qui concerne également la débilité), ouvrent la voie aux premières enquêtes de dépistage systématique. (Pinell et Zafiropoulos 1978). Une circulaire du 29 septembre 1965 instaure ainsi un ficher départemental et préconise un « dépistage méthodique » de la clientèle des classes de perfectionnement. En effet, la plupart des membres des commissions médico-pédagogiques « sont recrutés à partir de procédures empiriques, non codifiées », qui induisent des modes de recrutement variables selon les territoires (Vial, 1990). On observe ainsi une accentuation du contrôle de ces commissions par ladministration de lEducation Nationale, sur la base dune volonté dhomogénéisation des procédures de recrutement par le biais dune homogénéisation des outils de la psychométrie, et, ainsi, de la clientèle des classes spécialisées. 
Laugmentation exponentielle du nombre de classes de perfectionnement induit un besoin croissant denseignants spécialisés, dont la profession connaît des évolutions décisives, encadrée notamment réglementairement par des circulaires en 1959 et 1963, des arrêtés en août et mars 1964. Concomitamment à la formalisation du métier déducateur, celui denseignant spécialisé connaît des évolutions importantes. Leur point de convergence est la reconnaissance acquise par la légitimité du discours psychiatrique. Cette dernière prédispose les responsables des formations des maîtres spécialisés à « [présenter] la pédagogie spécialisée comme une pratique en partie psychothérapeutique » (Pinell & Zafiropoulos). En 1963 le certificat daptitude à lenseignement des inadaptés (CAEI) remplace le CAEA de 1909, consacrant dans les titres la nouvelle notion dinadaptation, vingt ans après sa codification par le conseil technique de lenfance déficiente et en danger moral ; temps de latence qui témoigne tout à la fois de la durée dimprégnation notionnelle et de la situation périphérique de lécole dans le champ, et qui fait nous rappeler que le conseil technique ne comptait aucun représentant de lEducation Nationale. 
Une circulaire ministérielle de 1970 affirme que lintérêt de lenfant est le plus souvent de ne pas quitter sa classe et dy pouvoir bénéficier dactions de soutien selon des modalités dapproches pédagogiques différentes. Elle inaugure, à linstar de ce qui se passe dans la même période pour léducation spéciale, lavènement de la logique de la prévention de léchec scolaire, et institue les groupes daide psychopédagogique (GAPP), composés denseignants spécialisés et de psychologues scolaires qui interviennent auprès délèves en difficulté sans orientation vers des filières spéciales. 
La mise en place des GAPP est indissociable du mouvement dunification notionnelle des catégories de pensée de laction sociale  qui, sous limpulsion dune frange de responsables politiques et de hauts fonctionnaires, se veut et se donne comme globale (Confère partie 1-3-, notamment page 62) :
« A lenseignement spécialisé des années 50 et 60 se substitue durant les années 1970 un enseignement dadaptation se fondant sur le langage de lexclusion en lieu et place du langage de linadaptation » écrivent Serge Ebersold & Jean-Jacques Detraux en 2003. 
La relégation des élèves trop indisciplinés hors des classes normales, produit dune fréquente forte pression des maîtres ou directeurs qui ne rencontre pas de grande opposition des commissions médico-pédagogiques, a contribué à lémergence de la logique préventive et des GAPP, puisquelle na cessé de poser des problèmes de décalage entre les frontières établies par les tests psychométriques (reprises par le législateur et imposées par lEducation Nationale) et la réalité du recrutement des classes et des quelques écoles nationales de perfectionnement. Lusage même de la psychométrie y a également fortement contribué. « Le débile standard, que la psychométrie a construit et que le législateur tente dimposer par décrets et circulaires, échappe constamment à la réalité », écrit Monique Vial en 1990, qui ajoute que « jusquà une période récente, les maîtres de perfectionnement formés à attendre le débile conforme, ne cessent de se plaindre que leurs classes sont mal recrutées ». 
« La réalité du recrutement des classes de perfectionnement ne confirme pas lhypothèse du simple travestissement de léchec scolaire en diagnostic de débilité mentale », note Eric Plaisance en 1996, hypothèse qui a souvent été posée dans les années 1970, dans lensemble des courants critiques vis-à-vis des institutions, et quon a pu retrouver chez des chercheurs de la sociologie critique. Il ajoute que « létendu du retard scolaire a toujours débordé le recrutement des classes de perfectionnement », et que « différents types de handicap ont fait partie du public de ces classes », bien au-delà du débile standard. Ainsi, pour comprendre la logique guidant le recrutement des commissions médico-pédagogique, peut-on dire que cest « le critère de la non-conformité scolaire » qui préside. 
Après la guerre de 1939-1945, la division du travail rééducatif sorganise autour de ces principes, liés à lémergence de nouvelles catégories nosographiques, sous le vernis unifiant de linadaptation : à lEducation Nationale les débiles légers, au médico-social les débiles moyens et les caractériels, ces derniers dépendant à partir de 1945 de la Justice (« 85% dentre eux sont en régime dinternat (
) dans des établissements autonomes publics ou privés », selon Pinel & Zafiropoulos, 1978) et les débiles profonds à lhôpital ou dans les IMP. Pendant les trente glorieuses, cette segmentation va évoluer au gré des mutations structurelles du champ, notamment en matière de création dinstitutions nouvelles et dun élargissement de conception de la nature des prises en charge, qui souvre vers un nouveau pan dintervention : la prévention, qui sapplique aussi bien dans le sous-champ du spécial que dans celui du scolaire. 
Les positions acquises depuis le 19ème siècle par linitiative privée, devenue le plus souvent associative avec la troisième république, et qui ont trouvé une forme de consécration originale sous le régime de Vichy avec le dispositif des ARSEA qui permet à lEtat de laisser faire le privé tout en lui imposant un contrôle, sont une des raisons principales qui conduit le gouvernement provisoire, lors de la Libération, à reconduire en grande partie les dispositions prises par le conseil technique de lenfance déficiente et en danger moral, y compris en matière de codification notionnelle. Linadaptation se meut progressivement en unique référence englobante, en lieu et place des multiples tableaux nosographiques quavaient construit, pour nommer leurs anormaux, lEducation Nationale, la Santé ou la Justice. 
Cette notion, dont la construction a été réalisée sans aucune participation de représentants de lEcole, légitime lémergence dun éducateur non scolaire et constitue un puissant référentiel daction publique qui mobilise les trois ministères (Chauvière, 1987). Les enfants concernés par cette nouvelle dénomination voient ainsi, hors lécole, se construire une multitude dinstitutions au sein desquelles la profession émergente déducateur spécialisé est vouée à intervenir. La neuropsychiatrie infanto juvénile également, qui consolide sa position de spécialiste, et dont les compétences sont appelées tout à la fois à encadrer les professionnels de léducation spéciale et à les former. 
Les associations, dont deux très importantes dans lhistoire du champ de lenfance inadaptée, lUNAPEI et lAPAJH, émergent à la fin des années 1950, et assoient progressivement, dans les deux décennies suivantes, leur rôle de gestionnaire partenaire de lEtat. De son côté, lEducation Nationale, parallèlement à la structuration du métier déducateur, fait évoluer le métier denseignant spécialisé, qui se trouve pouvoir travailler à partir de 1970 dans les GAPP, et non seulement dans les classes de perfectionnement, dont le nombre à explosé, donnant, presque un demi siècle plus tard, une vie à la loi de 1909. 
Mais lémergence en 1958 de la 5ème république, avec la place centrale quelle accorde à la planification, ainsi que lextraordinaire expansion des limites du champ, que les créations institutionnelles qui émergent selon la logique « une inadaptation, une institution » ne cessent de repousser, vont contribuer à ébranler les structures institutionnelles de contrôle (ARSEA et UNAR notamment) et les principes idéologiques (inadaptation), pour laisser place à une réorganisation formelle des structures du champ, qui prend racine dans la décennie 1960 et qui trouve une traduction avec les lois du 30 juin 1975. 
Les lois du 30 juin 1975 et ladoption du handicap
La loi du 30 juin 1975 dite en faveur des personnes handicapées est inséparable de sa jumelle, votée le même jour, portant sur les institutions sociales et médico-sociales. Ayant rappelé ce fait, nous nous intéresserons ici particulièrement à la loi dite « en faveur des personnes handicapées ». 
1.3.1 	Origines 
« La quasi unanimité parlementaire, laction relativement consensuelle des grandes  associations, liée en partie aux travaux du plan, la politique daction sociale à son zénith, ont fait oublié les controverses des huit années de gestation (
). » 
Michel Chauvière, 2000. 
			
1.3.1.1 Les indices de la volonté dencadrement 
réglementaire du champ
Le développement incessant du nombre et des types dinstitution, permis par l « extensibilité infinie de la notion dinadaptation » que porte efficacement lencadrement institutionnel des ARSEA, commence à menacer lunité du champ de linadaptation. Au même moment se produit « lintroduction de la question de lenfance inadaptée dans les hauts lieux de la production de lidéologie dominante » (Tricard, 1981, Bourdieu & Boltanski, 1976). Dans cet espace, et dans le cadre dune augmentation très sensible de lusage dune préoccupation qui va devenir inflationniste, la « maîtrise des coûts ». Jean-Paul Tricard note, suite à lanalyse détudes commandées par les pouvoirs publics à la suite du rapport Bloch-Laîné, (en 1970, 1972 notamment), que sy détache une « vigoureuse dénonciation de la hausse incontrôlée des dépenses ». 
Les 1er et 2ème plans quinquennaux sont dédiés à la reconstruction et à la relance économique. Le 3ème plan, 1958-1961, premier de la cinquième république, élargi ses préoccupations au social et à laménagement du territoire ; il comporte un plan déquipement sanitaire et social. Cest le premier à prendre en compte lenfance inadaptée. Le 4ème plan (1961-1965) poursuit également dans cette voie. En décembre 1966, François Bloch-Laîné, ancien directeur du Trésor au ministère des Finances, directeur de la Caisse des dépôts et consignations et de la Banque européenne d'investissement depuis 1952, est chargé par le premier ministre de rédiger un rapport sur le secteur de linadaptation. Confier une telle mission à un personnage spécialiste des finances publiques traduit bien le souci posé à lEtat par le dynamisme du champ. Le rapport de ce haut fonctionnaire, présenté au premier ministre en 1967, introduit une rupture dans la définition de linadaptation, en faisant évoluer son contenu des « caractéristiques quasi-naturelles des individus aux raisons diverses supposées internes et externes » (Stiker, 2000). Pour la première fois dans un document officiel, le groupe des handicapés apparaît comme un groupe particulier au sein des inadaptés, eux-mêmes redéfinis. 
Tout ceci inaugure lavènement du handicap comme objet de politique publique, ceci bien que la notion dinadaptation soit toujours dominante ; inaugure également le processus qui va aboutir à la loi de 1975 dite en faveur des personnes handicapées. 
Le rapport Bloch-Laîné va avoir pour effets plusieurs créations institutionnelles au niveau gouvernemental, créées pour coordonner le champ : un secrétariat détat à laction sanitaire est créé en 1968, rattaché au ministère des affaires sociales, qui devient en 1969 le secrétariat dEtat à laction sociale et à la réadaptation, rattaché au ministère de la Santé. Le 13 novembre 1969 émerge un groupe de travail au sein du commissariat général au plan, dénommé « intergroupe handicapés / inadaptés » ; une commission daction sociale est créée et y est rattachée. En septembre 1970 est créé par décret un comité interministériel des personnes handicapées, composé de 13 départements ministériels et 20 associations. Enfin, un autre décret du 21 novembre 1971 crée la direction des affaires sociales, qui dépend du ministère de la santé.
Ces faits témoignent de la volonté de ceux que Guyot (2000) nomme « lélite politico administrative » dinscrire le handicap et linadaptation dans le référentiel plus large de laction sociale, dune action sociale globale planifiée qui « soppose point par point au modèle traditionnel » de lassistance. Cest dans ce mouvement de refondation de la conception de laction sociale, sous limpulsion dun petit groupe de responsables administratifs et politiques, et dans la suite de celui initié par le rapport de François Bloch-Laîné, que sinscrit lémergence de la loi « en faveur des personnes handicapées » de 1975. 
1.3.1.2  Le partenariat état / association
Lavant-projet de loi est présenté au conseil des ministres en février 1973. Il est communiqué aux associations en juin de la même année, officieusement, « afin quelles puissent présenter leurs observations ». Cet avant projet est retravaillé trois fois, à chaque fois le même circuit est développé : du gouvernement aux associations, auxquelles est demandé un avis selon des conditions très précises : « il [leur] est demandé dexaminer ce texte au sein dinstances les plus restreintes possibles, en veillant à ce quaucune publicité ne soit donné avant son adoption par le conseil des ministres. ». (Guyot, 2000) 
Le projet de loi est adopté au conseil des ministres en avril 1974, et déposé puis enregistré à lassemblée nationale en mai. Sept mois passent avant que les débats ne commencent, en novembre 1974. (Georges Pompidou est décédé en avril, et les élections présidentielles organisées en mai voient Valéry Giscard dEstaing être élu). Durant cette période de latence, lactivité des associations se structure, et se renforce : à linitiative de lAPAJH est créé le « groupe des 21 », représenté par lAPF, lAPAJH et lUNAPEI. Il est formé pour présenter au gouvernement des propositions damendement au projet de loi dorientation. Il multiplie les réunions de travail avec les membres du gouvernement, réunions produisant des amendements qui sont le plus souvent adoptés. Patrick Guyot, sappuyant sur le travail théorique de Wilson, sattache à démontrer que laction du groupe des 21 pendant cette période se situe plus du côté du modèle néo-corporatiste, qui se caractérise par des contacts institutionnels directs, souvent même personnels, avec les membres du gouvernement et de la haute administration. 
La position de ces associations dans le champ de lenfance inadaptée, qui se caractérise par un  rôle central du fait de leur activité gestionnaire et de leur poids économique qui les positionne comme principal employeur du champ, contribue à ce que cette position, qui est celle de partenaire des pouvoirs publics (fruit de la construction historique du champ et dune de ses principales propriétés qui est celle de la dialectique particulière privé/public), soit redoublée par leur rôle de partenaire dans le processus délaboration de la loi. 
Ce rôle de partenaire politique est permis par (et permet aussi la construction) des dispositions à se positionner dans le jeu politique dune manière très fine, presque politicienne (professionnelle ?), à lopposé par exemple dassociation de type contestataire. Ainsi, note Patrick Guyot, si le groupe des 21, et en particulier ses trois représentants, sont conscients de limportance de la loi de 1975, ils savent quelle nest quune étape faite en partie pour consacrer lexistant, et que lessentiel se joue dans les textes dapplication qui suivront le vote de la loi. Ils adoptent ainsi une stratégie à long terme, « renforçant les contacts institutionnels avec le gouvernement par lintermédiaire de certains de ses membres ». 
1.3.2  	Le contenu de la loi 
« La notion (
) de handicap est en fait le signe dun changement fondamental de perception de la déficience dans la société et de son mode de traitement. » 
Patrick Guyot, 2000.
Le handicap et les personnes handicapées 
La loi du 30 juin 1975 est la première loi à mentionner le terme handicap, en associant son traitement à une « obligation nationale ». Son émergence en France est évidemment plus ancienne que son utilisation dans un texte législatif. Il faut suite à son passage du monde de lhippisme à un sens étendu aux humains, dans les pays anglo-saxons, en particulier les Etats-Unis, au début du 20ème siècle. Il désigne alors surtout les accidentés du travail, ceux qui ont du fait dun accident hérité dun handicap qui grève leur participation à la course commune, celle du travail. Lintroduction du terme en France témoigne de ce prime usage : la loi du 23/11/57  ne parle que des travailleurs handicapés. 
Le soubassement anthropologique de cette notion prend racine dans la période de genèse du champ, ainsi que nous lavons évoqué précédemment. (Confère 1.1.1). Il se caractérise par lidée de retour à une normalité qui se trouve référée quasi exclusivement à loccupation dun emploi, en ce qui concerne les adultes, et à la capacité dêtre scolarisé dans le milieu ordinaire, en ce qui concerne les enfants.  Cette idée de retour après un détour par des mesures spécialisées censées permettre une égalisation des chances, se caractérise, au terme dune période de latence de plusieurs décennies, par lémergence dune multiplication des termes qui limplique (réinsertion, réadaptation, reclassement, rééducation, etc.), et par la consécration du terme handicap (Stiker, 1980, 1996). 
« Pour une participation à part égale dans la compétition commune », note Henri Jacques Stiker, les chevaux des courses de handicap se voient confrontés à un triple mouvement : « extraction catégorielle », qui induit un classement ; puis pour chaque catégorie on prévoit « des formes et des techniques dentraînement », c'est-à-dire une spécialisation très accentuée ; enfin, une « mise à lépreuve » est organisée, cest à dire un reclassement, une réinsertion. En ce qui concerne la notion de handicap, le passage de lhippisme à la désignation de linfirmité humaine se caractérise donc par un déplacement dobjet mais pas par un déplacement de sens, dont la structure reste la même. Il y a ainsi un « lien étroit entre le langage du handicap et la pensée dominante de notre société, lidée de performance ». 
Lémergence de cette logique est favorisée par les luttes des accidentés du travail de la fin du 19ème siècle et du début du 20ème siècle, par celles des blessés de la guerre de 14-18 et également par les revendications des tuberculeux, qui, à partir des années 1930, survivent en grande majorité à la maladie. Leur point commun est la volonté commune de se trouver réintégrés dans le monde du travail, de retrouver le poste perdu ou de sen voir attribuer un autre. Lécole participe également au premier chef de lémergence de la notion de handicap et de la logique qui la sous-tend, ainsi que lécrit Henri Jacques Stiker : 
« La normalisation progressive de lécole, de ses stades et de ses niveaux (
), met en relief tous ceux qui pour une raison ou pour une autre ne sadaptent pas à ses standards. Là encore, la préoccupation de réintégrer un jour ou lautre, ou du moins de normaliser, va devenir grandissante ». 
Lémergence du handicap va également permettre le passage dune logique de prise en charge à une logique de prise en compte  et le glissement nest pas que sémantique, puisque, au-delà du (et contre le) modèle médical, cest progressivement un modèle social du handicap qui va faire référence dans les législations et les dispositifs qui en découlent. 
Il y ainsi, pour la France et relativement à la loi de 1975, deux enjeux dans lémergence du terme handicap : le premier est dordre cognitif (redéfinition de linadaptation suite au rapport Bloch-Laîné) et le second dordre politique. (« par qui et comment va sopérer la mise en uvre de « lobligation nationale » » ?) 
La redéfinition de linadaptation témoigne à la fois dune restriction et dun élargissement de la notion : le handicap exclut les instables et caractériels devenus des délinquants mais souvre, au-delà du seul périmètre de lenfance, aux adultes. La distribution des compétences propres à la mise en uvre de lensemble du circuit de prise en charge, qui implique dépistage et repérage, soins, éducation ou rééducation spéciales, est explicite dans la loi, et présente « lobligation nationale » comme étant assurée par des institutions selon un ordre « qui nest pas indifférent », constate Henri Jacques Stiker : « Famille, Etat, collectivités locales, établissements publics, organismes de sécurité sociale, associations, groupements, organismes et entreprises publiques et privés. »
 
 La mention de ce double enjeu ne doit pas dissimuler le fait que dune part, la loi ne propose pas de définition de la notion de handicap : les personnes qui sont concernées sont explicitées par les dispositions légales, mais le handicap reste imprécis en tant que concept. « Il y a un statut de handicapé, mais pas de définition précise », note Ebersold (1996). Handicap devient une catégorie administrative mais, au contraire de linadaptation, ne se trouve pas codifié. Pour autant, « le principe dune entité englobante et aux frontières toujours incertaine est fidèlement reconduit ». (Tricard, 1981). Officiellement, cette absence de définition sexplique par le souci de « laisser la place à des évolutions ultérieures » ; dans la réalité, le choix opéré se porte sur une solution empirique, qui laisse la responsabilité aux commissions créées par la loi de définir qui est handicapé et qui ne lest pas. 
Dautre part, ladoption de la notion de handicap a suscité beaucoup doppositions, en particulier celle dune frange de la psychiatrie, et celle de lensemble des psychanalystes, qui lont critiqué au nom du rejet dune conception de fixité de la déficience. 
1.3.2.2  Raison et nature des oppositions à la loi 
Le corps des médecins spécialistes (pour qui les responsables de la DAS nourrissent une certaine hostilité, selon Liberman, cité par Guyot), celui des travailleurs sociaux (dont le fondement de lidentité professionnelle, basée sur lunité de la fonction éducative, empêche tout autant que labsence dorganisations représentatives de considérer le handicap, secteur limité, comme support daction collective), et quelques associations (dont le mouvement de lutte des handicapés, MDH, ou le comité de lutte des handicapés, CLH), ont tout à la fois été écartés des travaux préparatoires à cette loi, puis lont vivement critiqué, pour des raisons diverses. Parmi ces critiques, on peut rapporter celle qui pointe la volonté de « distribuer léducation en fonction des situations des uns et des autres », ce qui induit la nécessité de catégoriser les élèves de manière précoce, et daccentuer les phénomènes de ségrégation. (Chauvière, 2000). Ayant travaillé sur ces questions à la fin de la décennie 1970, Michel Chauvière ajoute que : 
« [Sa] recherche à lépoque na pas permis de trouver pour la période autour de juin 1975 de handicapés ou dassociations regroupant des handicapés, en accord avec lesprit et les applications pratiques de cette loi (
) pourtant dite en leur faveur ». 
Au contraire bien évidemment des associations historiques gestionnaires dune majorité détablissements. 
Nous avons abordé lesprit de la loi au travers de notre analyse de la terminologie du handicap et de ce qui la sous-tend. Penchons maintenant sur les applications pratiques de cette loi. 
1.3.2.3  Principes généraux 
Les commissions dorientation et de dépistage créées se doivent de répondre à louverture du champ aux adultes. Ainsi outre la commission départementale déducation spéciale (CDES), qui se décompose pour le primaire en commission de circonscription préscolaire et élémentaire (CCPE), et pour le secondaire en commission de circonscription du second degré (CCSD), un décret ultérieur de 1983 créé la commission technique dorientation et de reclassement professionnel (COTOREP). Dans la perspective de notre présent travail, nous nous limitons à lanalyse des CDES, directement créées par la loi (confère partie suivante).  
Les interventions de lensemble des acteurs, dont font partie les commissions, sont coordonnées par lEtat, par le biais dun comité interministériel de coordination en matière dadaptation et de réadaptation. Il est assisté dun comité national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Ces deux créations répondent aux mentions faites par lintergroupe « handicapés inadaptés » du commissariat général au plan, notamment à ses préconisations de 1971 sur la « nécessité dune coordination permanente ». Cette dernière représente pour lEtat la seconde face de l « obligation nationale » : au-delà des missions de prévention, de dépistage et de réadaptation, assurées en grande partie par linitiative privée, se pose la nécessité pour lui dinstaurer un mode de contrôle public, sorte de « garantie républicaine ». (Stiker, 2000b)
La loi crée des droits, et un ensemble de mesures pour les concrétiser, bien quelle « innove marginalement », selon Guyot (2000), en accord avec la dialectique innovation législation qui constitue une des propriétés du champ. Elle entérine plutôt une évolution de la société et, de la même façon que le dispositif daprès-guerre avait légitimé les ARSEA puis créé lUNAR, consacre législativement des positions déjà acquises. Néanmoins, les créations institutionnelles quelle met en place sont décisives quant à la structure du champ de léducation spéciale, en particulier la commission départementale déducation spéciale. La première raison en est que la notion de handicap ne se trouve pas définie dans la loi, et quil revient aux CDES de déterminer qui lest et qui ne lest pas  et ainsi qui peut bénéficier des droits afférents. 
1.3.2.4  Les CDES, porte dentrée vers les institutions 
A lopposé, cest lensemble des orientations vers les institutions de léducation spéciale qui sont à mettre sur le compte de lactivité des CDES. En effet, avec elles disparaît le recrutement direct des établissements, la possibilité pour les professionnels de sélectionner leur clientèle et pour les parents de choisir linstitution dans laquelle ils souhaitent voir inscrits leurs enfants. Présidée alternativement par le directeur de la DDASS et par lInspecteur dAcadémie, la CDES est composée de représentants du corps médical, de la caisse  dallocations familiales, de lEducation Nationale, dassociations de familles denfants handicapés et dassociations de parents délèves. 
La généalogie des CDES sétablit avec les anciennes commissions médico-pédagogiques, qui assuraient jusque là « le recrutement des classes de perfectionnement, des SES et des écoles nationales de perfectionnement ». Avec la loi de 1975, elles vont désormais assurer le recrutement des IMP et IMPro. « Cest donc directement de lécole que va sorganiser le recrutement de la clientèle pour ces établissement », écrivent avec raison Pinell & Zafiropoulos en 1978. 
 	Les CDES ont une « influence dans le maintien des formules de scolarisation spécialisée dans le secteur socio-éducatif. », écrit de son côté Eric Plaisance (1996). En effet, des recherches effectuées sur ces commissions au début des années 1990 ont montré que  « [leur] volume dactivité a un rapport direct avec loffre déquipement du département », en dautre terme, plus il y a dinstitutions spécialisées dans le département, plus les CDES oriente vers elles. Ainsi, résume Plaisance, lactivité des CDES dans lorientation des enfants handicapés est lexpression dune « double logique institutionnelle : lexclusion du milieu ordinaire (lécole est à lorigine de la demande, le plus souvent), et le clientélisme du secteur privé ». 
Cette commission commande ainsi laccès au statut de handicapé, avec les droits afférents qui sexpriment en aides financières mais qui se traduisent aussi par des « carrières institutionnelles », selon lexpression de Jean-Paul Tricard (1981), qui se résume aussi par celle de « destin social ». Laccès à ces filières spéciales hors lécole, ou aux classes et écoles de perfectionnement, dépend donc entièrement des CDES, qui en deviennent le « sas » (Triomphe, 1999), et de son travail dexamen des dossiers des enfants. Ainsi, en milieu ordinaire ou en milieu spécialisé, se trouve assurée « lobligation éducative » dont la loi « en faveur des personnes handicapées » fait mention 
1.3.2.5  Lobligation éducative 
Dans la période de préparation de la loi se déroule de fréquents affrontements entre lEducation Nationale et le ministère de la Santé, sur le sujet des compétences administratives et de leur attribution, en particulier autour de la composition des commissions et sur le sujet de lobligation scolaire ou de lobligation éducative. Ce débat mobilise, en la faveur de lobligation scolaire, une bonne partie de la gauche, mais se trouve clôt par la mention dans larticle 4 de la loi du terme « obligation éducative », qui est définie comme se déroulant soit en milieu ordinaire, soit en milieu spécialisé, lorientation étant laissée aux CDES. 
Cette controverse précédant la loi est intéressante en ceci quelle est révélatrice du glissement du cur du débat autour de lenfance anormale, ou handicapée : on passe de lopposition éducables/inéducables au début du 20ème siècle à celle dobligation éducative/obligation scolaire. Ceci consacre en fait la victoire du principe déducabilité de tous les enfants. Ainsi proclamée par la loi, et sinscrivant des structures du champ de lenfance inadaptée devenant handicapée
Ecole et handicap après 1975 : 
	la dynamique formelle de lintégration scolaire 
Si on peut voir dans la formulation de larticle quatre de la loi « en faveur des personnes handicapées » de 1975 la préconisation dune éducation qui devrait seffectuer de préférence dans le milieu ordinaire, on peut également, et peut-être surtout, y retrouver une manifestation dune des dynamiques fondamentales du champ, à savoir que lentrée dans léducation spéciale seffectue par rapport à la mesure de non-conformité scolaire. Larticle dit en effet que tous les enfants reçoivent « soit une éducation ordinaire soit, à défaut, une éducation spéciale ». 
On ne trouve pas de rappel ou de précisions réglementaires sur le sujet de léducation scolaire pour les enfants handicapés avant les circulaires de 1982 et 1983, produites conjointement par les ministères des affaires sociales et de léducation nationale. Ce sont les deux premiers textes officiels qui font mention de lintégration scolaire. A leur suite, la loi dorientation du 10 juillet 1989 précise que « lintégration des jeunes handicapés est favorisée. Les établissements et services de soins et de santé y participent. ». Cette mention est complétée par une circulaires de 1991. 
Ainsi réglementairement encadrée, lintégration scolaire prend une forme qui correspond à ce que pouvait produire lhistoire des relations entre lécole et léducation spéciale et sa force dans le champ éducatif, une forme « à la française » qui se distingue de celle dautres pays européens. 
Dans ce modèle, l« intégration [est] entendue comme le passage dun enfant dune structure éducative à une autre structure, moins spécialisée [au travers dun] processus continuellement révisable », axé sur la « mise en pratique dun projet intégratif » qui se doit darticuler trois dimensions : le scolaire, léducatif et le thérapeutique, et que mentionne déjà les circulaires de 1982 et de 1983. (Plaisance, 1996) 
Ainsi définie, lintégration scolaire sappréhende non comme un processus radical mais comme basé sur une multiplicité de modalités dynamiques : elle peut être individuelle (au sein dune classe ordinaire), collective (dans une structure spécialisée de lEducation Nationale, classe annexée de perfectionnement ou, à partir de 1991, classes dintégration scolaire (CLIS) ou unités pédagogiques dintégration (UPI)), à temps plein ou temps partagé avec une présence dans une institution spécialisée
etc. 
Le choix de ce modèle dintégration ne fait donc que sajouter aux modalités existantes de scolarisation au sein des filières spécialisées, sans sy substituer. Il soppose à la situation italienne, où le spécial a été aboli au profit dune intégration radicale et complète de lenfance handicapée dans le milieu scolaire ordinaire, ou aux situations allemandes ou néerlandaises au sein desquelles les filières entre milieu ordinaire et milieu spécialisé sont très cloisonnées et très différenciées. Entre les deux pôles italien et allemand ou néerlandais, tout se passe comme si la France avait fait le choix dun entre-deux que dans une perspective danalogie avec le politique on peut qualifier de « réformiste », face au choix « révolutionnaire » de lItalie, par exemple. Les caractéristiques du « modèle français » ne sont pas sans avoir des conséquences pratiques et matérielles sur le champ de léducation spéciale. 
Dans un article de 1999 titré « les structures de léducation spéciale », Annie Triomphe écrit ainsi que ce champ présente de très nombreuses structures (cest à dire un « parc très important détablissements ») et très peu de services (destinés à « soutenir et aider les jeunes et les parents » dans leur milieu de vie). Parmi ces derniers, nombreux sont ceux qui émergent après les circulaires de 1982 et de 1983, dans la voie ouverte par la nouvelle politique que constitue lintégration scolaire, et qui contribuent à commencer de faire augmenter la part des services, au détriment de celle des établissements.  Parmi les créations, on trouve : les services déducation spéciale et de soins à domicile  (SESSAD), les services daccompagnement familial et déducation précoce (SAFEP), les services de soutien à léducation familiale et à lintégration scolaire (SSEFIS), les services daide à lacquisition de lautonomie et à lintégration scolaire (SAAAIS).  Il est notable de constater que lémergence du paradigme de lintégration active également la propriété du champ selon  laquelle tout changement dans les énoncés implique des créations institutionnelles ; la différence avec ce que lanalyse de lhistoire du champ nous a montré jusquà présent est que les énoncés qui évoluent ici sont certes dordre notionnel, avec lémergence du handicap et des handicapés, mais aussi politique, par le truchement dun nouveau paradigme de laction publique.  
En 1999 le plan dit « handiscol » se donne pour vocation de relancer la politique dintégration, dont les effets tardent à se concrétiser. Enfin, la loi du 11 février 2005 dite « pour légalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » abroge les dispositions prises par celle du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées en créant une nouvelle armature institutionnelle et en proclamant le droit à la scolarisation en milieu ordinaire pour tous les enfants. 
La période 1945-1975 voit le handicap à la fois sopposer et sajouter à la notion dinadaptation comme référentiel dominant en matière daction publique et privée, et permet au champ de lenfance inadaptée, qui concernait alors seulement les enfants et adolescents, de sélargir aux adultes. Mais la mention de cet élargissement ne suffit pas pour rendre compte du mouvement de globalisation de lensemble du secteur naissant de laction sociale, tel quil est voulu par les dirigeants de lépoque, et qui se propose alors dabsorber le champ du handicap. Ajouter ainsi à lanalyse lémergence, au début des années 1970, de la notion dexclusion, qui va simposer progressivement comme le nouveau référentiel global de laction publique en matière daction sociale à la faveur de la crise économique des années 1980 et 1990, englobant tout à la fois les restes de linadaptation, du handicap, du chômage, de linsertion et de la réinsertion, etc., semble tout à fait indispensable. 
« La loi de 1975, pensée et préparée à lépoque de lexpansion économique, du quasi plein-emploi (
), sest appliquée dans une période de dépression », note Stiker en 2000, provoquant ainsi une double contrainte, un double-bind : « entre un Etat-providence et un Etat qui dit ce nest pas mon affaire ». Elle constitue également une « formalisation des rapports entre les associations spécifiques du handicap et lEtat » qui sorganisaient déjà, comme le montre le rôle des associations gestionnaire dans la préparation du contenu de la loi, selon les principes dun « partenariat au plus haut niveau » doublé dune « régulation mixte ». Limportance politique progressivement prise par les associations est marquée par le nombre détablissements gérés, le nombre de place offertes et denfants accueillis, le nombre de salariés ; autant déléments qui les amène à jouer un rôle de partenaire vis-à-vis des pouvoirs publics et non plus seulement de substitut. (Plaisance, 2000). Les associations APAJH et UNAPEI vont ainsi voir leurs intérêts converger et, de fait, leurs positions initialement antagoniques sur un certain nombre de points vont déboucher sur des prises de positions beaucoup plus proches.
 
Les « échecs de toutes les tentatives pour imposer un cadre national public de coordination du secteur de lenfance inadaptée ne se comprennent que sur le fond de lalliance stratégique entre les « uvres » et la médecine contre toutes les menaces de nationalisation », écrit Francine Muel-Dreyfus en 1980. En effet, si la loi de 1975 est construite contre lavis dune frange de la psychiatrie, elle noublie cependant pas de réserver à lexpertise médicale une place de choix, quelle na de toute façon jamais perdue au sein des établissements privés. 
	Enfin, la loi de 1975 inaugure une bipolarisation du sous champ de lenfance inadaptée, entre rééducation et réadaptation dun côté (Santé et Education Nationale, les handicapés), et protection de lenfance de lautre (Justice, les délinquants). 
La loi du 11 février 2005 
	
« Le seul fait de devoir, trente ans après, réaffirmer légalité des droits des personnes handicapées avec celles qui ne le sont pas, ou leur citoyenneté pleine et entière, indique assez que les objectifs de la loi du 30 juin 1975 nont pas toujours été atteints. Il en va ainsi du principe de laccès de droit des personnes handicapées aux institutions ouvertes à tous. » 
Marie-Claude Mège-Courteix (2007) 
1.4.1 	Une loi consacrant linclusion 
Nous lavons évoqué : les termes dinclusion ou déducation inclusive ne sont pas mentionnés dans le corps du texte de la loi de 2005. Mais plusieurs indices, qui forment ce quon peut appeler une part de l « esprit » de la loi, nous montre que leur absence matérielle se double dune présence dans les principes, au contraire de la notion dintégration. La notion déducation spéciale et lépithète spéciale ne sont ainsi pas citées, dune part, et la notion de scolarisation est abordée par le prisme du thème de laccessibilité généralisée, dautre part.
Un des principes de cette loi est de consacrer comme un droit linscription de tout enfant handicapé ou avec un problème de santé invalidant dans létablissement scolaire le plus proche de son domicile, « létablissement de référence ». Ce droit nexclut ni le fait que linscription peut être dite « inactive », selon les termes du Ministère, ni que la scolarisation sorganise selon des modalités de temps partagé entre établissement de référence et institutions spécialisées. 
	1.4.2 	Une définition du handicap 
Une différence fondamentale avec la loi de 1975 est que la loi de 2005 propose une définition du handicap. Larticle 2 de la loi du 11 février 2005 crée un article L.114 du code de laction sociale et des familles, qui est ainsi rédigé :
« Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation dactivité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison dune altération substantielle, durable ou définitive dune ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, dun polyhandicap ou dun trouble de la santé invalidant. »
	Voici ce quune inspectrice dAcadémie et ancienne responsable du bureau adaptation et intégration scolaire à la direction générale de lenseignement scolaire, Marie-Claude Mège-Courteix, écrit à son propos, en 2007 :	
« [Elle] entend sinscrire dans une approche « interactive » du handicap puisque cest bien au contact de lenvironnement que sapprécient les désavantages subis par la personne, et selon que cet environnement sera restrictif ou facilitateur, la capacité dautonomie sen trouvera substantiellement réduite ou élargie, doù limportance accordée à laccessibilité de la cité. Mais, simultanément, est retenue lexigence dun lien à établir entre cette limitation et laltération dune fonction ou un trouble de la santé dont est affectée la personne, justifiant la mise en uvre dun processus de compensation. Cest dire que, pour être bénéficiaire de la loi, il faut apporter la preuve que le préjudice subi est la conséquence de cette altération ou de ce trouble. »
	Nous pouvons constater, au-delà de lanalyse fournie sur la question de lévolution de la perception du handicap, que sa définition se trouve directement mis en relation avec les catégories daccessibilité et de compensation. La construction de la définition juridique dune notion comme le handicap semble donc seffectuer en fonction de la structure du corpus juridique qui laccueille et en particulier en fonction des notions et concepts qui le dominent à ce moment précis, qui induisent un mode de pensée et daction (relatif à déventuels territoire professionnels) et un périmètre de mise en uvre (relatif à la segmentation de tutelles administratives) qui leur sont directement référés. La dialectique accessibilité/compensation se trouve ainsi consacrée à la fois comme élément central de réflexion sur les principes devant guider laction publique, comme cadre quasi exclusif de cette dernière et comme nouveaux mots magiques présidant à laction cloisonnée de futurs et vraisemblables nouvelles partitions professionnelles. 
Marie-Claude Mège-Courteix insiste dans la suite de son texte, et dans le sillage de ce quelle évoque dans lanalyse précitée, sur ce que cette définition, et le texte de loi qui la contient, permettent à la France « de se trouver en adéquation avec les classifications internationales ». En effet, tout comme la CIFH de 2001 a cessé de considérer le handicap comme devant relever dun classement propre en lincluant dans une approche globale qui met en exergue les liens qui unissent handicaps et situations de handicap dune part, la personne handicapée et son environnement dautre part, la définition de la loi de 2005 implique de considérer la nature du handicap non plus comme spécifiante et relative à une vision défectologique, mais comme le résultat dune interaction dynamique entre des troubles de la santé et des situations environnementales propres à la vie sociale. Ainsi, à linstar de la loi de 1975, et conformément à une dynamique du champ selon laquelle toute initiative législative, loin dinnover, vient consacrer des évolutions antérieures, la loi de 2005 vient acter dans le Droit des orientations préexistantes. 
En ce qui concerne léducation, et en particulier la scolarisation, nous pouvons noter que la loi, qui comprend 101 articles, en modifie une dizaine au sein du code de léducation. A linstar de lappréciation portée par Charles Gardou sur linclusion, Marie-Claude Mège-Courteix écrit que « limpact de la loi excède  et de beaucoup  le seul champ de la scolarisation des élèves handicapés ». Son volet « scolarisation » comporte quelques ruptures dans les ambitions et les orientations proposées. 
	1.4.3 	Handicap et difficultés scolaires 
Lhistoire de lenfance handicapée telle que nous lavons abordée montre que lécole sest constituée comme linstitution étalon de la mesure de la non-conformité. De fait, toutes les situations déchec scolaire, ou presque toutes, étaient assimilées à un handicap ; et si ça nétait pas systématiquement le cas au niveau institutionnel ou administratif (que lon songe aux orientations par défaut, plus ou moins automatiques, des élèves les moins bons vers les filières dites de relégation), ça létait tout à la fois très souvent pour les familles, les professionnels et le sens commun. La loi de 2005 rompt (formellement)  de manière tranchée avec ce modèle et invite, du fait des dispositions légales quelle institue, à faire la différence entre les échecs ou difficultés scolaires dus à des causes relevant de la définition du handicap et ceux dus à des causes qui en sont extérieures :
« Pour quun dossier denfant ou dadolescent soit reconnu par la MDPH comme relevant de sa compétence, il devra, dune part, être constitué à la demande exclusive de ses parents ou de son représentant légal (et non plus de lécole), dautre part, être étayé par des éléments médicaux retenant a minima la présomption forte dune corrélation entre les difficultés observées en milieu scolaire et « une altération substantielle, durable ou définitive dune ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, dun polyhandicap ou dun trouble de la santé invalidant. » (Mège-Courteix, 2007)
	Cette perspective ouvre bien des pistes danalyse. Entre autre chose, elle pousse à interroger les origines de la volonté politique aboutissant à ces dispositions. Elle invite à interroger les pratiques pédagogiques pensées à destination des élèves qui se retrouvent en difficulté face aux exigences scolaires, et qui ne rentrent plus dans le périmètre du handicap. Elle invite également à penser celles destinées aux élèves qui y voient leurs difficultés référées. Surtout, elle commande une analyse des modalités de travail des commissions statuant sur la conformité ou non au champ des droits ouverts par la reconnaissance dun handicap. 
	Cette dernière piste nous semble particulièrement importante : en effet,  parmi les 49 enfants accompagnés par les 6 auxiliaires de vie scolaire individuels que nous avons interrogés, il est frappant de constater (dans le tableau 2, page...) quils sont 51% à être concerné par des catégories pour lesquelles on peut soupçonner quelles ne recouvrent pas (ou pas systématiquement) de déficience avérée (« Troubles des apprentissages, du comportement, du langage, dys-, indéfini »). 
Par contre, sur notre échantillon, les 10 % des enfants qui ont été retirés de leur famille et placés dans une famille daccueil (5 sur 49) font partie de cette catégorie assez vague. Ce qui, en prenant en compte tous les éléments dordre méthodologique exposés en introduction, et sans tirer de conclusions hâtives, invite pour le moins à considérer quil nest pas impossible que les CDAPH soient parfois soumises à la représentation selon laquelle les enfants issus de familles en grande difficulté sociale sont intrinsèquement handicapées, ou à tout le moins que ces commissions utilisent le dispositif AVS pour soutenir des enfants dont les difficultés (les mises en échec) nont rien à voir avec les territoires du handicap. Plus généralement, ces remarques invitent à questionner ce que la géographie du handicap réserve comme région, plus ou moins secrète, plus ou moins liée à une véritable déficience, aux classes populaires  et donc à questionner un éventuel usage des dispositifs légaux autour du handicap pour y reléguer des enfants qui nont a priori rien à y faire et qui nen relèvent pas. 
De fait, elles invitent également à questionner la nature du travail confié aux AVS-i quand celui-ci concerne des enfants dont les situations sont tellement éloignées de limaginaire social du handicap, de ce que les médias en montrent (le plus souvent, un enfant en fauteuil roulant ou un enfant autiste) et mêmes des réalités de la déficience. 
Laissons Cécile, qui a accompagné trois enfants « placés en famille daccueil », nous parler (succinctement) deux :  
Cécile : (...) H. donc cétait une enfant qui était placée en famille daccueil
 euh de très gros troubles psychologiques
 Cétait une enfant qui a été laissée à labandon étant toute petite, tout le reste de la fratrie a été placé (...) (Page 6)
Cécile : alors T., un gamin qui est placé en famille daccueil
 euh là on était plus en contact avec lASE
 euh
cétait un gamin euh
 très euh
 très
.hyper turbulent quoi
 hyper turbulent (...) et il a été déscolarisé en plus, ouais cétait euh
 une vraie catastrophe, lécole ne voulait plus de lui
 (...) ... il y a eu des demandes de faites en ITEP [institut thérapeutique, éducatif et pédagogique, nouvelle dénomination des IR, instituts de rééducation, NDR] aussi, mais là du coup jai pas eu de nouvelles (Page 17-18)
Cécile : ouais
C. alors cest pareil, ça été un truc
 (...) (Les mains font un geste de ramassage)... hyper condensé, C.
 yavait urgence, javais trois heures, [lenseignante référente] ma collé là-bas, un petit bled derrière V., tu sais sur la gauche là, je sais plus comment ça sappelle
 (...) [Cétait un petit garçon] ultra violent, je sais même pas ce que cétait
 un truc euh
 un gamin qui vivait avec sa mère, tout le reste de la famille était placé
 ouais le môme il se mettait en danger, il se barrait de lécole (...) (Page 5)
Au-delà de ces éléments, la perspective ouverte par la distinction posée par la loi entre difficultés scolaires relatives à un handicap et difficultés scolaires qui nen relèvent pas, semble se situer dans le sillage et favoriser les principes de léducation inclusive, et dune volonté politique de déspécialisation ou, pour le moins, dordinarisation du spécialisé. Seulement, nous pouvons aussi noter quen labsence de la mention de « besoins éducatifs particuliers », rejeté par le législateur, le handicap continu dêtre spécifié, même sil lest au sein dun milieu non spécialisé. En outre elle relève, il est de notre point de vue nécessaire de le rappeler, de laffirmation dintentions politique dont le rapport à leurs applications pratiques se doit dêtre interrogé. 
Ces dernières trouvent avec cette loi de nouvelles modalités de mise en uvre.  
	1.4.4 	Le projet consacré et reçu par
un nouvel appareillage institutionnel 
Le point qui nous semble le plus important à présenter ici est la notion de projet, qui trouve dans la loi une place tout à fait éminente. La personne handicapée doit en effet rédiger un projet de vie  sur la base duquel est construit un plan personnalisé de compensation, dit PPC. Quant à la question plus spécifique de notre sujet, la scolarisation des enfants handicapés, elle seffectue au travers du versant scolaire du PPC que constitue la formalisation dun projet personnalisé de scolarisation (PPS), qui consacre les orientations quavaient inaugurées les circulaires de 1982 et de 1983 en la matière. Le PPS doit être lobjet de limplication de toutes les parties intervenant dans sa mise en uvre : la famille, lenfant lui-même, lenseignant, les personnels spécialisés. 
« La scolarisation denfants handicapés est appréhendée comme un acte de création particulier à chaque élève, qui repose sur la différenciation des pratiques pédagogiques, la présence de professionnels chargés daccompagner le ou les élèves tout au long du processus de scolarisation » écrit Serge Ebersold en 2004. 
Lhistoire de lintégration scolaire, ici brièvement effleurée, et celle de son corollaire laccompagnement, montrent ce que ce fait doit à la définition progressive du travail des accompagnants comme devant être référée au projet personnalisé de scolarisation et comme ne devant sappliquer quau seul élève accompagné, selon un principe considérant que lintégration est pensée sur un mode individualisant qui pose le collectif au second plan. En ce sens, l « omniprésence des notions de projets, réseaux, partenariat » se trouvent justifiée puisque cest la conjonction de lensemble des acteurs travaillant avec lenfant qui est ainsi pensée comme condition de réussite du processus de scolarisation. Les accompagnants, comme les enseignants, sont ainsi invités par les textes parus depuis une dizaine dannée à « sinvestir dans la définition du projet individualisé, impliquer les parents, et se concerter pour articuler leurs pratiques et leur niveau dintervention. »  
La notion de projet nest pas sans poser quelques questions essentielles. Ainsi celle qua exprimée Serge Ebersold lors dune conférence en mars 2009 : les  parents denfants handicapés doivent, relativement à leur volonté de voir leur enfant à lécole ordinaire, formuler un projet et donc se questionner, « là où les autres parents nont pas à se justifier de pourquoi scolariser leur enfant ». Si la loi de 2005 consacre le droit à la scolarisation, il revient aux parents de le faire valoir au travers du projet, condition de la scolarisation. 
Quel sens alors donner au projet ? Qui sert-il, au-delà des affirmations rituelles (extrêmement bien distribuées entre tous les agents) consistant à dire quil sagit de « lintérêt de lenfant » ? Il y a ici, de notre point de vue, matière à recherche. 
La notion de projet appelle également une analyse des notions de collaboration, concertation et coopération, ainsi que le laisse supposer Philippe Mazereau (2009) quand il prône en la matière, à la suite dEdgar Morin, une « reliance éthique », quil définit comme émergeant « loin des binarisations de la pensée disjonctive qui peuplent nos classifications spontanées ». Se positionnant en faveur de la notion de coopération, Mazereau écrit ainsi :
La collaboration ou la concertation « ne permettent aux professionnels que de participer de façon indépendante à une tâche, sans possibilité de réciprocité ou de partage de responsabilité. (
) Avec les meilleures intentions, celles de respecter le travail des autres professionnels, de garantir la confidentialité de certaines données personnelles, nous sommes au mieux restés dans un cloisonnement et une ignorance polie des contraintes de chacun des intervenants. »
Quoi quil en soit, cest un fait que le projet personnalisé de scolarisation constitue un élément incontournable de toute scolarisation denfants en situation de handicap, et quil cristallise, formellement en tout cas, les possibilités daction des uns et des autres acteurs du processus de scolarisation, qui se situent « dans la mise en cohérence [des] interventions ». 
« Formellement » car, à bien lire les entretiens réalisés avec les six AVS-i (soit plus de dix heures), on est frappés de labsence totale de toute mention du PPS  nous avions fait le choix de ne pas questionner les AVS-i sur ce point, sentant intuitivement que la place quil occupe dans les textes était à peu près inversement proportionnel dans le quotidien des AVS-i. En lieu et place dun « projet », totalement absent de la parole des AVS-i interrogés, on observe plutôt un processus de négociation et dajustement réciproque : 
Noémie : [lors de la première rencontre avec lenseignant] voilà donc on parle de lenfant, on explique les difficultés de lenfant et tout ça, euh comment après euh
 fin voilà on parcours tout de lenfant, après par exemple lenseignant des fois ne connaît pas lenfant donc on est juste sur un dossier, toutes les deux on est dans linconnu, donc euh voilà on parle des fois vite fait ou des fois un peu plus de lenfant ça dépend
 ensuite euh bah lenseignante mexplique un petit peu son fonctionnement et cest vrai quaprès moi derrière bon bah moi je lui explique quel est mon rôle et tout ça face à lenfant, comment 
 comment je peux travailler avec donc des fois elle me pose des questions du genre est-ce que je travaillerais que pour lenfant ou est-ce que je travaillerai en groupe aussi avec lenfant dans le groupe, donc ça je lui dit que oui, au contraire, parce que cest vrai que ça passe par justement lintégration de ces enfants
 et euh
 comment
 et après souvent en 
 en .. jdirais en final je viens souvent à leur expliquer voilà que moi de toute façon je ne suis pas là pour
 parce que je sais des fois que les enseignants sont mal à laise
peuvent être mal à laise
 moi je suis pas là pour juger qui que ce soit, moi je viens faire mon travail, je viens aider un enfant, après moi je suis dans la classe et puis après bah voilà moi jestime que je fais partie de la classe cest à dire que si lenseignante a besoin ponctuellement euh de mettre en place un atelier mais quelle ne fait pas intervenir les enfants pour une raison x ou y, je ne vais pas attendre dans mon coin que les choses se fassent, je vais aider lenseignante
 si lenseignante a besoin de sabsenter de la classe pour une raison aussi x ou y comme un enfant malade ou autre, si elle me demande de gérer la classe entre guillemets  pendant son absence je le ferais, parce que euh je suis une adulte donc avant tout jai mon rôle dadulte à faire cest à dire face à ces enfants là qui pourraient (
) faire des bêtises (
) 
 ça je suis tout à fait capable de le faire et euh.. voilà
 donc cest un peu comme ça que je fonctionne (
) (Page 28)
Nous pouvons dès lors le constater : à un moment où le projet personnalisé de scolarisation, censé définir précisément les tâches de lAVS-i (qui est un moyen inscrit lui aussi dans le PPS), devrait occuper une place centrale dans le temps préalable à laccueil de lélève, il est au contraire totalement absent et laisse la place à une improvisation de construction de processus de coopération.  
La loi refond également complètement le paysage institutionnel quavait créé la loi de 1975. Des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) apparaissent qui regroupent à léchelle du territoire du département lensemble des services auparavant répartis dans plusieurs administrations. Deux instances administratives sont créées, qui remplacent les CDES et COTOREP : léquipe pluridisciplinaire dévaluation (EPE), qui a pour mission, après examen du projet de vie, dévaluer les compétences et les besoins de la personnes handicapée et délaborer son plan personnalisé de compensation, et la commission des droits et de lautonomie de la personne handicapée (CDAPH), qui permet douvrir ou pas les droits en matière dattribution de prestations (comme laccompagnement scolaire, en fonction du contenu du PPS) ou dorientation. 
En outre, la loi substitue aux anciens secrétaires de CCPE une nouvelle fonction : lenseignant référent, qui se doit dêtre un « facilitateur de la scolarité » des enfants handicapés (Mège-Courteix, 2007), en faisant le lien entre lEPE et la CDAPH, la famille, lécole et, éventuellement, les accompagnants scolaires. Il doit de plus animer les équipes de suivi de la scolarisation (ESS), qui réunissent lensemble des parties prenantes au projet personnalisé de scolarisation. Ces nouvelles dispositions, censées mettre en uvre une logique de rupture avec les pratiques antérieures, sont relativement récentes et lanalyse ne peut dores et déjà se donner comme contrepoint aux discours ayant porté et expliqué cette loi. Néanmoins, nous pouvons mentionner le fait quainsi que lécrivent Patrice Pinell et Marcos Zafiropoulos (1978) à propos de la loi de 1909 :
« (...) il ne suffit pas de remporter la partie du point de vue des catégories savantes et de leur inscription dans le discours juridique ou officiel pour que soit bouleversé le fonctionnement quotidien des institutions ».
La loi de 2005, constatent Michel Chauvière et Eric Plaisance (2008), possède une forte ambiguïté car elle « énonce à la fois le droit à linscription en milieu ordinaire, mais laisse largement ouvertes les diverses possibilités de scolarisation effectives ». Parallèlement, la judiciarisation du droit à la scolarisation, qui est une des conséquences de laffirmation législative des « droits de la personne handicapée », et qui est présentée par le pouvoir politique comme un progrès pour faire valoir le droit à la scolarisation, néchappe pas à cette ambiguïté puisquelle demande à la fois « la possession dun capital culturel revendicatif, des moyens pécuniaires et une subtile gestion du temps » qui sont autant déléments dont la distribution sociale est très différenciée. Nous pouvons enfin remarquer, à la suite de Marie-Claude Mège-Courteix, que le titre de la loi, qui réaffirme, comme rituellement, les droits égaux des personnes handicapées davec celles qui ne le sont pas, constitue un indice de léchec du dispositif mis en place par la loi de 1975, notamment ce qui concerne le droit daccéder aux espaces sociaux ouverts à tous. 
Les aspects cognitifs du champ de léducation spéciale se sont constitués en référence aux savoirs médicaux et psychologiques, là où ceux de léducation scolaire sont centrés sur des disciplines comme la pédagogie et la didactique. Il y a de nombreuses oppositions entre tous ces savoirs, mais un point commun qui consiste en une « naturalisation des déficits ». Celle-ci sorganise selon une conception des diverses formes de handicap qui occulter leur « rapport avec les situations susceptibles de révéler les troubles, voire de les générer » (Ebersold, 2003), cest à dire selon un « modèle défectologique » qui a structuré la professionnalisation du métier déducateur mais aussi celui de lenseignement spécial. (Gateaux-Mennecier, 2000). Cette vision, qui ne se pense évidemment pas comme telle, sest vue délégitimée par la loi n°2005-102 du 11 février 2005, qui porte en elle également une forme dinjonction de coopération en direction des éducations spéciale et scolaire.
Ces dernières ont constitué des métiers semblant formellement parallèles, et intervenant de plus en plus auprès des mêmes populations. Mais « entre les familles et lEtat », écrivent Michel Chauvière et Eric Plaisance en 2008, « ces deux modèles de professionnalisation (
) ont développé des spécificités techniques et sociales correspondant à la division historique du travail rééducatif ». 
Lémergence de la politique dintégration scolaire des enfants handicapés a permis, parallèlement, celle dun nouveau type de personnel, chargé de laccompagnement scolaire de ces élèves, cest à dire dune mission dont la mise en pratique combine à la fois des éléments relevant de la tradition de léducation scolaire (par exemple le cadre spatial et symbolique de la classe, les objectifs dapprentissage et de socialisation) et dautres inhérents à la nature de léducation spéciale (une intervention personnalisée décidée par une commission de spécialistes, un public accompagné qui relève exclusivement de lenfance handicapée, etc.). 
Le personnel accompagnant scolaire semble donc se trouver à lintersection des relations entre deux « plaques tectoniques » (Bordeau & Bourget, 2009), à linterface entre deux systèmes dont le contact fait naître de nouveaux enjeux autour de la conception que chacun dentre eux a de « la philosophie politique de léducation, [du] statut de lenfant à éduquer, (
) [du] rapport à la famille, à lEtat, à lenvironnement économique, à linsertion et même à lorientation ». (Chauvière, Plaisance, 2008). La notion dinclusion, nouveau paradigme de laction publique, est elle aussi déterminée par des conceptions particulières de tous ces sujets, qui semblent lui être autant de préalables épistémologiques. 
Dun point de vue pratique, les relations entre le scolaire et le spécial (qui ne se nomme plus comme tel) concernent aussi « les modes de compréhension des difficultés de lenfant et les modèles de professionnalité à luvre dans laction éducative ». Il nous apparaît que lexistence de laccompagnement scolaire, en tant quil semble se constituer comme un symptôme des difficultés pour ces deux systèmes à la fois antagoniques et jumeaux de se décloisonner  la « cloison » étant partie intégrante de leur structure , questionne dune manière très forte ces deux thèmes. Sa pratique, en labsence dinstitutionnalisation dune norme légitime pouvant la définir et la circonscrire,  porte également en elle les germes mêlés des traditions et des savoirs propres aux deux systèmes. 
Mais quen est-il du nouveau paradigme daction publique quest linclusion, consacrée par la loi du 11 février 2005 ? Doù vient ce terme et quelles sont les caractéristiques de son histoire, jusquà ce quil vienne représenter une nouvelle façon de nommer la scolarisation des enfants handicapés ? 
Chapitre 2 : Les mondes des inclusions : origines, circulation, utilisation
De lintégration à linclusion : éléments historiques 
Les inclusions
 Etymologie
Nous lavons évoqué, en ce qui concerne lécole la notion dinclusion prend historiquement la succession de celle dintégration : cette succession notionnelle serait aussi celle dune évolution paradigmatique. Mais le terme de « inclusion » ne se limite pas à son usage appliqué à lécole. Afin déclairer ce qui constitue le soubassement de cette notion et ce qui permet à ses promoteurs et détracteurs de lui faire dire quelle désigne quelque chose de différent de lintégration (ou pas), nous allons tenter den faire ici une brève analyse générale  manière dintroduire les suivantes. 
Le premier élément notable concernant ce terme est son étymologie. « Inclusion » est issue du latin claudere qui signifie « fermer » et avec lequel on forme aussi in-claudere, « enfermer ». Le terme inclusio signifie ainsi « emprisonnement ». Il a donné « cloitre », « clore », « conclure ». Il sagit là dun étrange paradoxe des origines puisque ce terme est souvent présenté comme un nouveau paradigme censé dépasser celui, daté et limité, de « intégration », libérant ce faisant les individus concernés par les processus inclusifs du poids écrasant du monopole de la responsabilité de leur réussite, ou de leur échec, en en transférant une partie vers lenvironnement accueillant. 
Si nous nous intéressons, à titre de comparaison, au terme « intégration », nous pouvons noter quil provient du bas latin integralis, « entier », « rattachement à une même unité », et du verbe integrare, « renouveler, rendre entier ». Il semble ainsi, étymologiquement parlant, correspondre de manière presque parfaite à lobjectif qui fonde les volontés de scolariser à lécole dite « ordinaire » les enfants handicapés : rendre entière la population potentiellement scolaire (lenfance), historiquement divisée en « moyens et bien portants » (comme dit Charles Gardou) dun côté, et les anormaux, les non conformes scolairement, de lautre. 
Pour toute éclairante que soit la mention de ces éléments étymologiques, il nous semble important de noter ici que considérer ces deux notions à cette seule source, bien que rendant les prises de position aisées, tend à faire oublier que les conditions sociales de lémergence, de lusage et de la circulation des mots, ainsi que des processus visant à leur promotion ou à leur disqualification, sont des forces qui façonnent le sens qui leur est attribué, et parfois de manière tout à fait surprenante : quon pense par exemple au terme de « paysan », dont lorigine est le latin pagani, désignant après la christianisation de laristocratie romaine les païens et les sédentaires cultivant la terre (de manière indistincte  car la distinction navait pas lieu dêtre : tous les « paysans » étaient païens). Il a ensuite désigné les seuls cultivateurs, avant de devenir après la révolution industrielle une quasi-insulte, puis, à partir des années 1970, est redevenu objet de revendication et daffirmation à vocation identitaire. 
De fait, on ne saurait se suffire, pour construire une analyse, de lérudition savante qui caractérise lattention à létymologie, coupée de toute attention aux forces sociales et historiques qui se sont emparé du mot  mais on ne saurait sen passer non plus tant il permet déclairer les trajectoires puisquil situe une origine. 
	
Le passage du terme intégration à celui dinclusion pourrait constituer lobjet dune recherche spécifique. Lacception des ces deux notions (et leur succession) ne se limite pas, loin de là, au seul versant scolaire : plusieurs siècles après que leurs usages soit attestés en mathématiques, cest au travers des politiques « sociales » quelles trouvent également une consécration, notamment dans léconomie langagière courante des élites politiques et administratives (et malheureusement de certains chercheurs en sciences sociales : ces catégories, qui ont vocation à être des objets danalyse, en constituent pour certains des outils). Il est dailleurs notable de constater que les inclusions sociale et scolaire ont toutes deux succédé, et de manière tout à fait homologue, aux intégrations du même nom.
 Linclusion sociale
Il apparaît que lémergence de la catégorie dinclusion dans les discours politico administratifs français (et internationaux) a un rapport direct avec la consécration de la notion de « exclusion », entamée à partir des années 1970 en France. Elle vient en effet en constituer lopposition parfaite : il y aurait les « inclus », et les « exclus » - ceux du dedans et ceux du dehors (toute la question étant de savoir « dans » et « en dehors » de quoi). Linclusion sociale est devenue un objectif de politique publique, particulièrement dans lespace européen. Chaque état doit par exemple, depuis 2000 et le sommet de Nice, élaborer un : 
« (...) plan national daction [le plan national daction pour linclusion sociale, PNAI en France, NDR] qui couvre une période de deux à trois ans. [Puis,] à lissue de cette période, il soumet à la Commission européenne un rapport évaluant létat davancement de ses politiques sociales de lutte contre lexclusion. Les rapports nationaux des Etats membres sappuient sur des  HYPERLINK "http://www.cnle.gouv.fr/?Les-indicateurs-communs"indicateurs de suivi communs à tous qui permettent dévaluer et de comparer les progrès réalisés en matière dinclusion sociale. »
	
Tout se passe comme si cette opposition binaire, bien faite pour bloquer la pensée (mais également pour fournir une matrice à la conception des dispositifs publics en matière de politiques sociale et éducative), fournissait un cadre propice à la radicalisation de la domination économique et financière sur lensemble des Etats, leurs institutions et les évolutions des économies déchanges qui sinscrivent dans ces dernières, elle-même concomitante à la domination de lidéologie individualiste de lacteur rationnel. 
Dans la perspective politique qua adoptée la commission européenne en matière sociale et économique (et en matière éducative, avec linclusion scolaire), et à prendre au sérieux la terminologie utilisée, les individus ne peuvent être que dans deux situations : soit exclus, soit inclus. Une attention minimale portée aux discours développés autour des plans daction pour linclusion sociale ne peut pas ne pas réaliser que la référence de létat dinclus et dexclus est en premier lieu le système de production (lemploi)  et ce même pour linclusion scolaire, mais en quelque sorte de manière secondaire. 
De ce point de vue il est vertigineux de considérer lécart entre la doxa des élites européennes sur la « cohésion sociale » (qui consiste en une évaluation strictement centrée sur la participation ou non au marché de lemploi, lequel se trouve présenté  en creux  comme une structure naturelle, bienveillante, accueillante, pourvoyeuse dappartenance et pour laquelle il nest nullement question dune quelconque possibilité que les « exclus » le soient pour des raisons inhérentes à son organisation) et ce que permet à la pensée lutilisation des notions daffiliation et de désaffiliation quutilise Robert Castel dans son ouvrage « la montée des incertitudes » (2009). Ces dernières permettent en effet de se dégager de lemprise enfermante de lopposition « exclusion/inclusion » en y substituant une dynamique processuelle basée sur un large empan de degré daffiliation, sur une mise en lumière du fait quon est affilié à quelque chose et que ce quelque chose nest pas inquestionnable (et du point de vue dun chercheur, pas naturalisé), et quà toute dynamique de désaffiliation correspond une dynamique daffiliation  et quon lest pour ainsi dire jamais totalement et définitivement exclus ou inclus. 
La perspective de la commission européenne, inscrite dans son programme politique d « inclusion sociale », rapporte les conditions de possibilités dappartenance à la collectivité (qui fondent la frange « humaniste » du discours qui vient légitimer la pertinence de telles politiques) à la seule adhésion aveugle et soumise aux réalités du marché de lemploi assimilé à un cadre naturel  et non au produit historique de confrontation de forces sociales ne défendant pas les mêmes intérêts. Sil ne saurait ici être question de nier la dimension affiliatrice que représente le fait davoir un emploi, il nous importe de mettre en lumière le fait que la structure du marché de lemploi, ses déterminations historiques, économiques et politiques, ses éventuels effets négatifs sur les individus et sur les liens sociaux que ces derniers animent, constituent un point aveugle des dispositifs  et de léconomie langagière qui les soutient. Tout se passe comme si ces dispositifs succombaient à la tentation réificatrice potentiellement inscrite dans tout programme daction publique et tendant à faire des individus concernés des objets quil importerait de ranger au bon endroit sans se soucier de possible forme de maltraitance quimplique un tel « rangement », considéré comme un processus achevé d « inclusion sociale », de remise en ordre  et de maintien de lordre. 
De ce point de vue, et malgré que la question des fonctions sociales de contrôle des populations soit en passe dêtre appréhendée par un grand nombre de chercheurs en éducation comme passée de mode  résultat dun étonnant mouvement de balancier consistant à considérer que la prééminence de ce thème dans les années 1960 et 1970 permet aujourdhui de le classer parmi ceux qui sont « datés » , il nous semble pertinent de ramener la question de linclusion scolaire aux bénéfices secondaires (pour les classes dirigeantes) potentiellement inscrits dans les programmes politiques qui sen réclament. Plus largement, il est également fructueux de sintéresser au « monde inscrit dans lobjet » quest linclusion (Akrich, 2006), ce qui pousse à questionner le potentiel idéologique quil contient.  
 La conception de lorganisation sociale promue par 
 linclusion 
En 2009, Serge Ebersold écrit, à partir dune analyse « douvrages ou darticles anglo-saxons consacrés à linclusion ou à léducation inclusive » : 
« La notion dinclusion (
) nentrevoit pas la société comme une dialectique mettant en jeu un corps social et des individus, mais comme une « société dindividus » nécessitant limplication de chacun dans le bien-être collectif et lincorporation de tous dans les diverses dimensions qui fondent la société. (
) Cette conception du monde social (
) rapporte la vulnérabilité sociale à labsence de ressources culturelles,  sociales, économiques, identitaires, relationnelles nécessaires à la réalisation de soi et à lengagement social, et non plus aux vulnérabilités liées à la division du travail. »
	On le voit : lobjet que constitue la notion dinclusion contient un monde  et une vision du monde , et cette constatation ne peut que faire redoubler la vigilance quant à la voir, dans la sphère académique et notamment dans les sciences de léducation, acquérir le statut doutil inquestionné. Cette vision du monde, qui constitue au sens strict une idéologie, fait peser sur les individus, au profit de la double invisibilisation tout dabord des déterminations sociales inhérentes aux modalités dorganisation et de fonctionnement des institutions et ensuite des processus de sa propre naturalisation, tout le poids de la responsabilité de la réussite ou de léchec des processus quelle se propose dincarner. Cet état de fait se trouve actualisé de manière différente pour les inclusions sociale et scolaire. 
Par exemple, pour mener à bien ses objectifs dinclusion sociale, nous dit Serge Ebersold, 
« LUnion Européenne préconise (
) le développement de stratégie dites d « inclusion active » permettant aux personnes marginalisées de renforcer leurs compétences, de réaliser leur potentiel, de sintégrer dans les marchés du travail et daugmenter leurs revenus. »
	Cest donc aux « personnes marginalisées », qui le sont du fait du manque de caractéristiques strictement personnelles, de se prendre en main afin de sextirper de leur situation (mouvement auquel on ne saurait soupçonner quils souhaiteraient se dérober) ; le rôle des politiques publiques se limitant dans cette optique à offrir un cadre pour que chacun puisse « réaliser son potentiel »  étant entendu quau terme de ce travail, si le résultat nest pas au rendez-vous, cest à son « potentiel » propre quen revient la responsabilité. Les dispositifs mettant en place cette « inclusion active » peuvent ainsi être appréhendés comme des systèmes correctifs amendant une conception du social mêlant principes fonctionnalistes et individualistes.  
	Quant au versant scolaire de linclusion, si on peut tout dabord noter que les élèves concernés par les processus de scolarisation se voient théoriquement exemptés du monopole de la responsabilité de leur échec ou de leur réussite, il nen est pas de même pour létablissement scolaire  ce dernier étant, ainsi que lexplique Serge Ebersold, lobjet autour duquel « sorganisent (
) les multiples définitions données à la notion dinclusion (
) », selon « une conception atomisée de linstitution scolaire ». Cest ainsi essentiellement sur les professionnels, en tant que contribuant à la concrétisation du droit à la scolarisation au sein dun établissement non spécialisé, que repose la responsabilité de la mise en uvre de linclusion  en dehors de toutes considérations socio-historique impliquant la prise en compte de dynamiques nécessairement collectives, et en accord avec les théories de lacteur rationnel. Ceci contribue à limposition progressive, pour le handicap qui se trouve être une des régions concernées par la géographie des inclusions, dun « modèle managérial » (Ebersold 2003). 
	
« Nous assisterions donc à une nouvelle mise en forme sociale de la déficience dans laquelle lobjectif des politiques publiques serait de limiter les « freins à la participation et à la réalisation de soi quimposent les institutions aux individus ». Tout se passe comme si la discrimination ne résultait que de comportements discriminatoires individuels sans prendre en compte les institutions et les environnements qui les surdéterminent », résume Philippe Mazereau  en 2009 (dans cet extrait il cite Serge Ebersold (2003)). 
Ces éléments danalyse se trouvent être tout à fait opérants pour entrer plus avant dans les spécificités de l « inclusion scolaire » que, dans un mouvement débarrassant la présentation quelle fait delle-même de tous les atours moraux et éthiques on pourrait résumer avant tout autre chose comme un déplacement géographique et symbolique, organisé et systématisé, de toute une frange de lenfance  : « il est dit que ceux-là iront désormais ici »  et ceci sans que leur propre parole soit forcément prise en compte. 
Toute démarche de recherche qui souhaiterait spécifiquement (et plus profondément que dans le présent travail) sintéresser à la notion dinclusion scolaire ne pourrait pas, de notre point de vue, faire léconomie de la replacer dans le mouvement plus large de lémergence et de lutilisation du terme « inclusion » dont elle nest quune des déclinaisons, sous peine de passer à côté déléments essentiels quant aux implications sociopolitiques du mot. 
Mais maintenant qua été esquissée cette nécessité, rentrons plus avant dans ce qui caractérise le versant scolaire de linclusion. 
Origines historiques du principe de linclusion scolaire
« [La] consécration [du mot inclusion] résulte dun mouvement mobilisant acteurs du monde associatif et chercheurs autour dun modèle social du handicap refusant lexclusion des personnes qui présentent une déficience au profit de leur acceptation dans leur différence. »
Serge Ebersold (2009)
 Amérique et Europe du Nord 
  	Le principe de normalisation
	Lorigine géographique et historique de ce que recouvre la notion d « inclusion » scolaire à savoir, avant la consécration (ultérieure) du terme, lidée selon laquelle, en lieu et place dune éducation séparée dans des lieux spécifiques, « les enfants à besoins éducatifs particuliers [puissent] être éduqués dans un dispositif « normal » qui sadapterait à leurs besoins », se situe dans les pays du nord des continents européen et américain. (Thomazet 2008)
Cest en premier lieu dans les pays scandinaves, au début des années 1960, quémerge le « principe de normalisation » (normalization), dans le sillage de laction du danois Neils Erik Bank-Mikkelsen. Ce dernier nest pas un intellectuel, mais un fonctionnaire : il est directeur général de Service pour la déficience mentale, partie du ministère des affaires sociales danois. Il a été déporté pendant la seconde guerre mondiale. Ses fonctions lamènent à visiter des institutions réservées aux imbéciles, et il est amené à considérer quil existe une parenté entre ces institutions et lunivers concentrationnaire quil a connu de lintérieur. 
En 1946, une « association de parents dimbéciles » lui « [demande] de formuler une requête argumentée au ministère en vue de la création dune commission danalyse. (...) En 1954, la commission [est] enfin créée, et Bank-Mikkelsen en devint le secrétaire. Il en [résulte] une loi votée en 1959 par laquelle [est] instituée la prévoyance dEtat pour les imbéciles (Statens Andsvageforsorg). Bank-Mikkelsen en [est] le premier directeur. (...) Il [veut] cependant aller plus loin encore et normaliser les conditions de vie des personnes handicapées mentales. (...) La réalisation de ce projet [suppose] une décentralisation de la Prévoyance, (...) [qui] se [produit] au milieu des années 1970 (...). Il [obtient] le transfert de la Prévoyance aux régions et aux communes [en 1979]. La Statens Andsvageforsorg [est] abolie, les imbéciles n [existent] plus, ils [se sont] transformés en citoyens normaux ayant des handicaps mentaux. » (Kemp, 1994)
Le principe de normalisation est ainsi basé sur lidée de créer des dispositifs éducatifs et des lieux de vie les plus communs possible à lensemble de la population, et contre lidée de spécifier des lieux et des pratiques pour léducation et pour la vie quotidienne des personnes handicapées. Simplement, selon les termes de Bank-Mikkelsen, « permettre à l'individu déficient mental d'avoir une existence aussi normale que possible. »
	Cest tout dabord dans le périmètre scandinave que va essaimer lapproche de la normalisation. Bengt Nirje, directeur général de lAssociation suédoise pour les enfants déficients sur le plan mental, va produire plusieurs articles et communication sur le sujet à la fin des années 1960. En 1969, il écrit par exemple : 
« La façon dont je m'y prends avec les personnes déficientes et les personnes déviantes en général dépend du principe de "normalisation". Ce principe réfère à un ensemble d'idées, de méthodes et d'expériences émises dans le travail pratique auprès des personnes déficientes intellectuelles en Scandinavie aussi bien que dans d'autres parties du monde. Le principe de normalisation est sous-jacent aux revendications des associations de parents scandinaves quant aux critères, équipements et programmes à l'intention des personnes déficientes sur le plan mental. Les exposés par les collaborateurs scandinaves Bank-Mikkelsen et Grunewald dans "Changing Patterns in Residential Services for The Mentally Retarded" fournissaient des descriptions précises des programmes fonctionnels qui incluent les principes de normalisation. » (Nirje, 1969)
	De la normalisation à la VRS
Le principe de normalisation sest vu systématisé et importé sur le continent  nord-américain par Wolf Wolfensberger (au Canada) dans les années 1970. Raymond Vienneau résume ainsi : 
« On assistera donc pendant les deux décennies de 1950 à 1970 aux débuts du mouvement de normalisation, c'est-à-dire à l'intégration sociale des personnes gravement handicapées, et aux premières fermetures des institutions dont certaines assumaient la triple vocation d'hôpital-école-résidence. En 1972, Wolf Wolfensberger publie à Toronto un livre qui accélérera ce mouvement et qui aura une répercussion internationale : Principle of Normalization in Human Services. Dans cet ouvrage et dans ceux qui suivront, Wolfensberger défend le principe de normalisation et valorise la contribution sociale des personnes handicapées. » 
 A partir du travail de Wolfensberger se développe une théorie nommée « valorisation des rôles sociaux » (VRS, SVR en anglais), qui est une des origines de lempowerment  autant déléments qui mériteraient une analyse spécifique. Robert Doré (1995) écrit ainsi : 
« Dans l'univers de l'"intégration - inclusion ", le concept de valorisation des rôles sociaux tend à se substituer à celui de normalisation, qui était l'idée charnière au cur de l'"intégration - mainstreaming ". Wolfensberger et Thomas ont bien mis en lumière l'importance accrue accordée à la valorisation des rôles sociaux : La valorisation des rôles sociaux est l'utilisation de moyens culturellement valorisés pour permettre aux personnes (socialement dévalorisées) d'obtenir et de conserver des rôles socialement valorisés (1988 : 34). La valorisation des rôles sociaux n'est évidemment pas exclusive au monde scolaire. Elle dépend d'un mouvement plus global d'intégration qui s'étend à toutes les sphères de la vie en société. L'intégration scolaire est à la fois distincte et partie prenante d'autres réalités d'intégration. »
La VRS, dont la généalogie, comme celle de linclusion, débouche sur le principe de normalisation, a ainsi étendu le territoire de ce dernier, initialement centré sur la seule déficience mentale, aux « personnes socialement dévalorisées »  et est ainsi bien fait pour rencontrer le versant « social » de linclusion. 
	Lémergence du terme inclusion scolaire
La réception et les échos importants de louvrage de Wolfensberger en 1972 vont même participer, avec le sillage de la lutte pour les droits civiques, à lémergence dune nouvelle loi sur léducation aux Etats-Unis : 
	
« (...) jusque dans les années 1970, le gouvernement fédéral nétait pas impliqué dans léducation des enfants et adolescents à besoins particuliers. Ainsi, en 1973, plus dun million délèves ne fréquentaient pas lécole publique du fait de leur handicap (
). Cette situation de ségrégation a totalement changé en 1975, avec le vote dune loi fédérale en faveur de « léducation de tous les enfants handicapés » (the education for all handicapped children act, Public Law 94-142, dite EHA). Cette loi mentionnait que chaque enfant ou adolescent, indépendamment de son handicap, devait avoir droit à une éducation gratuite, adaptée et dans un environnement aussi normal que possible (least restrictive environnement) ». (Thomazet, 2008)
Aux Etats-Unis, on parle alors de mainstreaming pour évoquer ce courant de pensée défendant la présence des enfants avec des disabilities dans le « courant ordinaire », c'est-à-dire hors spécialisé. Selon Serge Thomazet, cette forme dintégration scolaire, quil nomme, afin détablir une typologie historique des « courants » différents en matière dintégration/inclusion scolaire, « mainstream-integration », na pas opéré le changement paradigmatique qui caractérise selon lui la notion ultérieure dinclusion, puisquelle présuppose encore que les élèves soient scolarisés à lunique condition quils soient capables de suivre les programmes  c'est-à-dire que tout repose sur ladaptabilité de lélève vis-à-vis de lécole, quand linverse nest pas ou trop peu questionné. Ce modèle de « mainstream-integration » serait resté dominant aux Etats-Unis de la loi dite EHA (qui se fonde sur ses principes) jusquau milieu des années 1980. Au cours de cette dernière décennie, Thomazet note que : 
« (
) the absence of noticeable progress in the development of integration gave rise to a demand for more radical changes. » (Thomazet, 2009)
Cest dans ce cadre quest publié le rapport de Madeleine Will (qui est alors la US assistant secretary of special education and rehabilitative services), en 1986. Le débat qui sensuit va favoriser lémergence de cette « demande en faveur dun changement plus radical ». Ce rapport évoque de manière prudente le fait que les progrès consécutifs à lEHA sont loin dêtre à la hauteur des espérances. Malgré cette la formulation réservée, la réception du rapport dans le milieu de léducation et de la recherche en éducation provoque un débat intense autour du thème de lefficacité et de la légitimité de léducation spéciale. Serge Thomazet, dans un article paru dans linternational journal of inclusive education en 2009 écrit : 
« Within this debate (
), an increasing number of researchers and educators denounced the lack of progress on integration and the negative results of pull-out practices. » 
A lissu de ce débat naît le Regular Education Initiative (REI), « (
) mouvement qui préconise la fusion des éducations spéciales et ordinaires ». 
Cest sur le terreau de ce mouvement, à la fin des années 1980, quapparaît pour la première fois en éducation lusage du terme inclusion, désignant « lintégration dans les écoles ordinaires de tous les enfants avec des besoins éducatifs particuliers ». Nous lavons évoqué, le terme inclusion est ancien, pas spécifique à son versant scolaire et utilisé dans dautres domaines. Il apparaît de fait comme tout à fait essentiel pour la recherche délucider les conditions sociales qui ont présidé à ce que ce soit précisément ce terme dinclusion qui soit choisi pour représenter ce mouvement, et délucider le processus qui a permis sa consécration, aujourdhui telle quaux Etats-Unis, au Canada et au Québec, le terme est en voie dêtre complètement naturalisé dans les milieux éducatifs  ce qui est encore loin dêtre le cas en France, où il ne rencontre guère décho au-delà des cercles des spécialistes ou des militants. 
Au sein du REI, certains défendent ce quils appellent la « full-inclusion », (par exemple Lipsky et Gartner, 1992, ou York et all., 1989, cités par Thomazet), c'est-à-dire la non-existence de toute extraction, même temporaire, des élèves avec besoins éducatifs spéciaux hors de leur classe de rattachement, et, de fait, la suppression accomplie de toute éducation spécialisée. 
A la suite de Serge Thomazet, il est donc possible de résumer la typologie  qui constitue de notre point de vue une introduction à la problématique de linclusion, et qui peut de ce fait être prolongée et affinée  de la manière suivante : 
 
la « mainstrean-integration », issu du principe de la normalisation (elle en constitue son versant scolaire). Elle fait peser la responsabilité de la réussite ou de léchec du processus de scolarisation sur lélève, et qui organise un maintien important des institutions spécialisées en marge de lécole pour tous ceux qui ne sont pas capables de sadapter à lécole. Elle correspond à ce que recouvre la notion légale dintégration en France, avant la loi de 2005, encore largement basée sur une approche médicale et déficitaire du handicap. 
linclusion, qui postule que lécole doit accueillir tous les enfants quels que soient leurs « besoins éducatifs particuliers ». Linclusion est basée sur une perspective environnementale issue du modèle social du handicap et a des affinités avec lexpression « situation de handicap ». Au sein de ce courant existe un mouvement plus radical qui professe
 la full-inclusion, c'est-à-dire la logique de linclusion poussée à son terme avec la suppression du secteur spécialisé. 
	Pour résumer
Ce sont donc des intellectuels, et parmi eux des chercheurs, qui ont joué un rôle prédominant dans la conception et la promotion de la notion dinclusion scolaire et, avant elle, de la normalisation. Il est tout à fait intéressant de relever que le rôle joué par ces intellectuels se trouve concentré sur le segment du handicap que constitue la déficience mentale  ceci même si les théories et visions développées se sont par la suite étendues au-delà de ce périmètre. A leur côté, et de manière indissociable, le travail effectué par les associations de personnes déficientes motrice ou sensoriel a joué également un rôle tout à fait décisif. 
 Le rôle des associations et le modèle social 
 du handicap
Durant les années 1970 aux Etats-Unis, de nombreuses associations de pairs sont créées  principalement autour des segments du handicap que sont les déficiences motrices et sensorielles. Ces associations se sont donnée comme mission de :
« (
) amplifier laccès à lautonomie et lindépendance en milieu ordinaire des personnes handicapées, considérées comme premiers experts définissant et construisant les modalités et contenus des interventions collectives et les prestations leur étant destinées. » (Blanc 2006)
Elles contribuent alors largement, par leur actions, à définir ce qui a été par suite nommé « modèle social du handicap » en opposition au « modèle médical », ou « réadaptatif », centré sur une vision défectologique et basé sur le processus invariant, à caractère fixiste et linéaire, « évaluation-diagnostic-soins », dans un processus de « cycles daffiliation » (Goffman, 1975) centrés sur le réseau des institutions spécialisées.
 
Ainsi que lexplique Alain Blanc (2006), le modèle social du handicap met laccent sur :
lopposition au modèle médical
linteraction handicap/environnement. 
la nécessaire amélioration de laccessibilité et légalisation des   chances.
Une des matrices de la construction du MSH a donc été lexpertise que les personnes déficientes pouvaient fournir sur elles-mêmes  en tout cas celles qui parmi elles cumulaient les deux propriétés consistant en une conscience de leur déficience et la mobilisation potentielle des capacités sociales, économiques et cognitives de sengager dans un mouvement de revendication et de militantisme national et international, c'est-à-dire essentiellement les personnes porteuses dune déficience motrice ou sensorielle. 
Par suite, la mise en réseau dune partie de ces associations aboutit à la création, de l« independant living movement » (ILM, MVA en France pour Mouvement pour une Vie autonome), fondé selon une triple logique : 
une lutte pour les droits civils 
la revendication dun contrôle des biens et prestations offertes
la logique nord-américaine du « self help »
Laction de ce mouvement fédératif se base sur les caractéristiques du MSH, dont il constitue une des matrices : la nécessité de connaître et daffirmer :
« (
) les besoins spécifiques et particuliers des personnes déficientes, la critique de lexpertise des professionnels médicaux et sociaux et laffirmation de lintégration en milieu ordinaire ». 
Les actions de lILM, toutes entières tournées vers ces objectifs vont aboutir à la création des centres de ressources pour une vie autonome, conçus comme des services (et non des structures), autogérées par les personnes handicapées, et se donnant pour objectif : 
- linformation et lorientation
- le soutien entre pairs 
- la défense des intérêts individuels
- laide à la création de service. 
Dans les années 1980, lILM se développe internationalement, en particulier en Europe et en Amérique du Nord. Cette même décennie voit la création dune association internationale baptisée « Disabled People International ». Selon Alain Blanc, cette association, dans le droit fil du MSH émergeant :
« (
) critique les conditions socio-économiques et culturelles car elles entravent laccès à la citoyenneté des personnes handicapées, limitent leur intégration à la vie collective et tendent à les confiner dans une vision  centrée sur les déficits de la personne ». Mais elle met également laccent sur « la reconnaissance de droits civiques et sociaux, intervient dans les débats conduits par les organisations internationales et pèse sur les décisions prises dans les cadres nationaux. »
Le modèle social du handicap, produit en grande partie par le mouvement associatif nord-américain de personnes porteuses dune déficience (rapidement internationalisé), commence ainsi à peser sur les instances supra nationales comme lOMS ou le BIT, comme lUNESCO et lOCDE, mais aussi sur « des programmes dactions tels que ceux conçus par les instances européennes (Hélios, Horizon, Handynet
) » et, par contrecoup, va commencer également à se voir traduit dans les législations nationales. 
« Ce mouvement de pairs organisés sest fait entendre des décideurs planétaires en moins de trois décennies », écrit ainsi Alain Blanc (2006). 
Ce mouvement associatif nexplique bien évidemment pas à lui seul lémergence transversale du nouveau paradigme que constitue cette nouvelle exigence de la présence des personnes handicapées dans lensemble des espaces sociaux, concomitante dune remise en cause des filières éducatives séparées et des processus daffiliation différenciés qui y sont associés, mais il en constitue une des matrices majeures. Son action rencontre les conséquences pratiques dune des propriétés de léconomie politique des années 1960 et 1970 consécutive notamment des effets consécutifs aux courants de travaux universitaires explicitement ou implicitement critiques à lendroit des institutions  pénitentiaires, scolaires, médicales , des processus de ségrégation sociale et scolaire, et qui se trouve être une recomposition importante des configurations idéologiques des économie politiques des pays industriels. Elle rencontre également, et très directement puisque lILM émerge aux Etats-Unis, lempreinte profonde qua laissé dans ce pays le mouvement de lutte contre la ségrégation et pour les droits civiques des afro-américains dans les années 1950 et 1960. 
	Une autre propriété des modes de gouvernement des pays industriels dans cette période historique est également limportance croissante prise par les logiques économiques et financières, qui se voient acquérir un poids sans cesse grandissant dans la définition de ce que doit être et de ce à quoi doit répondre laction publique  notamment en matière déducation.  
 Linclusion entre discours humanistes et 
 intérêts économiques
« Bank-Mikkelsen visait très haut, son projet était admirable, mais il semble que personne navait prévu le coût de lopération. »	
(Kemp, 1994) 	
	Un invariant historique 
	
Le rôle historique des préoccupations économiques dans les choix opérés en matière éducative sur la question du handicap constitue un élément dont lanalyse ne peut faire léconomie  et dont elle ne peut se contenter non plus. Il est possible, sans crainte de se voir opposer des arguments sérieux, daffirmer quelles ont joué un rôle majeur dans les évolutions successives qui ont caractérisé le sort fait aux enfants concernés par les dénominations autour de lanormalité, de linadaptation ou du handicap. 
Tout se passe en effet comme si ces considérations économiques constituaient lélément sans lequel rien nétait possible ; comme si, en dehors dune rencontre avec les intérêts qui leur sont spécifiques; aucun dispositif ne pouvait voir le jour ; comme si également, dès lors quune orientation était entérinée (par exemple léducation inclusive, au plan international et notamment européen), généralement parée de toutes les vertus humanistes et progressistes, elle se heurtait dans son application à ce point aveugle qui a pourtant permis son émergence : la croyance absolue selon laquelle loption choisie est moins coûteuse économiquement que la ou les précédentes  un rapport de lOCDE de 1994 (page 47) sous-entend ainsi sans preuve (ainsi que le note Eric Plaisance (2004)) que loption ségrégative est plus coûteuse que linclusive : 
Dans cette étude, « il est suggéré, mais sans démonstration véritable, que les solutions les plus ségrégatives sont les plus coûteuses ». (Plaisance, 2004)
De ce dernier point de vue, on peut affirmer quon a là tous les atours dune prophétie auto réalisatrice : puisque les choix « inclusifs » sont réputés et annoncés être moins coûteux que ceux auxquels ils succèdent (loption ségrégative notamment), et puisque cest en partie pour cette raison que les orientations inclusives ont trouvé une consécration internationale et européenne, alors la question de savoir sil est pertinent daugmenter les financements de ces politiques ne se pose même pas : il a été dit que cétait moins coûteux, donc ça va lêtre  lorganisation qui laffirme (lOCDE en 1994) jouant par ailleurs un rôle important dincitation et de prescription dans les mises en uvre de politiques économiques des plus orthodoxes. 
On constate la prégnance des considérations économiques dans de multiples textes de loi  pour la France, la première partie du présent travail en donne plusieurs exemples. Nous pouvons mentionner un autre exemple européen : comme lexplique Sally Tomlinson (1982), la section 10 de la loi sur léducation de 1976 en Grande-Bretagne indique que : 
« Pupils should be educated in special schools only if they cannot be given efficient instruction in ordinary schools, or if the cost of instruction in ordinary schools would cause unreasonable public expenditures. » 
« En réalité, écrit encore Felicity Armstrong (2000), la planification de lintégration des enfants des écoles spéciales dans les écoles ordinaires au cours des années 1980 et 1990 par plusieurs autorités locales déducation a été davantage guidée par la question des ressources et par celles des capacités ou des incapacités des élèves, que par la question de savoir comment les écoles devaient changer pour offrir une éducation équitable et efficace à tous les élèves. »
	Il serait aisé de multiplier ainsi les exemples, quils soient extraits directement des textes, des déclarations de parlementaires lors des débats préparatoires, ou extraits danalyses de chercheurs. Largument centré sur les excès de dépense publique en matière déducation des enfants anormaux, inadaptés ou handicapés, sur les frais trop importants consacrés aux dispositifs qui leur sont destinés, ou, comme il était affirmé à lorigine des premiers dispositifs publics déducation des anormaux à la fin du 19ème siècle, sur les économies (en terme de coûts sociaux mais également en terme de coûts financiers) à long terme réalisées en investissant dans leur éducation, sont ainsi des invariants historiques de toutes les politiques publiques des pays industriels à lencontre du handicap, qui se caractérisent ainsi par un très fort degré dhétéronomie. L « inclusion » et les dispositifs qui sen réclament néchappent pas à la règle qui veut que les motivations éthiques, morales et progressistes invoquées pour la construction et la mise en place de dispositifs légaux en matière déducation de lenfance handicapée sont toujours le versant (le plus) visible des discours justifiant la validité de ces dispositifs, alors queux-mêmes sont surdéterminés par des motivations directement issues des conceptions socio historiquement dominantes en matière de politique économique. 
	En guise dillustration, prenons connaissance de ces deux extraits dentretiens, décrivant la situation de deux des six AVS-i interrogées dans le cadre de ce travail. Tout dabord, Sylvie, qui travaille 24 heures en tant quAVS-i pour léducation nationale et 6 heures par semaines pour sa commune, sur le temps périscolaire :
Sylvie : (...) je vois ses parents régulièrement vu que le soir je fais létude
 D. est en étude
  en fait cest pendant une heure ils font leur devoir et je surveille
. après le temps scolaire, cest du périscolaire, [je suis] payée  par la mairie, cest pas léducation nationale 
G : finalement tas deux contrats
 
Sylvie : oui, oui oui
G : Donc tu as 24 heures Education Nationale
 et combien de temps mairie ?
Sylvie : bah six heures par semaine
G : six heures
 ok
 donc ça te fait
 
Sylvie : une heure et demie tous les soirs
G : ça te fait un salaire un peu plus correct
Sylvie : un peu plus correct, oui (en riant)
G : six heures, ça fait quoi, si cest pas indiscret, si ça tembête
 tes pas obligée mais
Sylvie : (
) ça doit tourner aux alentours de 150 euros par mois
 (
) [soit 750 euros environs pour 30 heures cumulées par semaines NDR.] (Page 24)
	Puis Lalie, qui na cette année quun contrat de 9 heures par semaines : 
[Lalie a un contrat de neuf heures]
G : et tes neuf heures sont réparties comment dans ce collège ?
Lalie : bah euh
 je
 travaille
 le lundi après-midi
mercredi matin et maintenant jeudi matin (...) jai pas une journée complète (Page 27-28)
	Ces deux exemples mettent en avant des situations de salariées employées à laccompagnement denfants en situation de handicap scolarisés dans « lécole de leur quartier ». La nature de leur contrat, la formation quelles ont reçue et le salaire qui leur est versé sont des conséquences directes de choix politiques déterminés par des orientations économiques. 
	Linternationalisation des politiques économiques
Il est également notable de constater que linternationalisation des politiques éducatives (et en particulier au sein de celles-ci linternationalisation des principes dits intégratifs ou inclusifs) est concomitante au mouvement dinternationalisation de la sphère économique et financière. Comme lécrit Philippe Mazereau en 2009 :
« La diffusion des principes de lécole inclusive tend à se généraliser dans le même mouvement de globalisation qui affecte la sphère économique. » (Mazereau, 2009)
Nous pouvons ajouter que les politiques éducatives se trouvent entièrement référées aux critères de classement et d (exigence d) évaluation construits par lorthodoxie économique, cest à dire les conceptions dominantes en matière économique. Ces critères de classement sont dailleurs largement naturalisés : il « va de soi » (pour le sens commun politico administratif, et parfois savant) que les politiques éducatives doivent avant tout autre chose répondre aux attentes « naturelles » du système économique internationalisé, aussi bien en termes de coûts de fonctionnement, de niveau dinvestissement que de résultats à plus long terme. 
Les considérations éthiques se présentant comme purement humanistes viennent ainsi toujours se présenter comme source des conceptions et constructions des dispositions légales en matière déducation de lenfance handicapée, et se substituent dans les discours aux considérations économiques portant sur le coût financier des choix éducatifs  et ce dautant plus que ces dernières ont dimportance, cest à dire dautant plus que se déroule lhistoire du champ de léducation spéciale. On assiste ainsi, en matière de politique publique autour de lenfance handicapée, à une visibilité des arguments économiques qui est inversement proportionnelle de leur importance pris dans leurs conceptions et mise en construction  étant considéré que leur importance na cessé de croître depuis la fin du 19ème siècle.
Parler dune dialectique « discours éthique / intérêt économique », ou dune convergence dintérêts moraux (socio historiquement marqués) et économiques pour esquisser un modèle explicatif des politiques publiques en matière de handicap, ne nous paraît pas satisfaisant  même si tout à fait opérant pour ce qui concerne le récent passé. En effet, cela reviendrait à consacrer le fait que linvariant historique quest la prévalence indiscutable de lintérêt économique dans la conception et la construction des dispositifs ne peut que le rester, cest à dire à contribuer à naturaliser la domination de lorthodoxie économique sur les choix politiques. 
	Une prise de position
	Ces derniers propos se justifient par le fait que, comme lécrit Noam Chomsky en 2010 : 
« ...l'action politique et sociale doit être animée par une vision de la société future et par des jugements de valeur explicites, qui doivent découler d'une conception de la nature humaine. Si l'esprit humain était dépourvu de structures innées, nous serions des êtres indéfiniment malléables, et nous serions alors parfaitement appropries au formatage de notre comportement par l'Etat autoritaire, le chef d'entreprise, le technocrate et le comite central.Ceux qui ont une certaine confiance dans l'espèce humaine espéreront qu'il n'en est pas ainsi. »
	Or, il est notable pour nous que le présent travail de sciences de léducation est une action qui, si elle nest pas directement politique selon lacception du sens commun de ce mot, (et bien quelle le soit dans son sens originel des « affaires de la cité »), est éminemment sociale. De fait, prendre au mot limpératif dexplicitation de la « vision de la société future » quexprime Noam Chomsky nous oblige à faire apparaître que nous ne souhaitons pas faire comme si la prégnance des intérêts des milieux économiques dans la conception et la construction des politiques éducatives  et notamment dans les politiques relatives à la scolarisation des enfants en situation de handicap, était une réalité indépassable. 
	
	Elargir le recrutement social des élites ou démocratiser le savoir : voilà les deux conceptions opposées (malgré le fait que la première, pour se réaliser, tend à se déguiser en se parant des atours de la seconde) qui sous-tendent nombre de polémiques et de luttes autour de la question éducative (Dorison, 2009)  et qui sont des avatars de conceptions orthodoxes ou hétérodoxes en matière économique. 
Christophe Barbier, normalien, journaliste et éditorialiste en vue (il est en 2010 - et depuis 2007 - directeur de la rédaction de lExpress et intervient régulièrement dans nombre démissions à vocation « politique » à la télévision et à la radio), écrit ainsi dans son éditorial le 3 septembre 2009 (titré : « Priorité aux élites pour la rentrée ») : 
« La vraie priorité de lEducation » (
) devrait consister à « former une élite toujours plus puissante afin que le pays tienne son rang dans la concurrence mondiale. Il faut que le grand emprunt à venir finance dabord lenseignement supérieur, pour renforcer lexcellence française, aider les meilleurs à être plus forts encore, éviter la fuite des cerveaux. Le débat public, accaparé par le sort des exclus du système, oublie que lessentiel est, sans cynisme, la performance. Ce nest pas le moral en queue de peloton qui permet de gagner des courses, cest la qualité des sprinters. »
	Le problème ici (et au-delà de laspect illustratif du document ci-dessus) est, de notre point de vue, quen matière de politique éducative générale, la progression scolaire est envisagée et évaluée à laune exclusif du savoir, de la performance en termes de savoir et de maîtrise des connaissances. La progression envisagée en terme de relationnel, de création de liens sociaux (et de liens avec le cadre naturel) qui dans une école décentrée de ses obsessions rentabilistes, dégagée de ladoration de lidole du Savoir savant et de lhyper correction syntaxique, peut être une conséquence très probable du côtoiement de la différence et de la diversité humaine, nest pas envisagée  et comment pourrait-elle être évaluée ? Elle ne compte pas, dans le sens où elle ne rentre pas dans les comptes, tout entier destinés à pourvoir la nation des forces productives, en accord avec le fondement anthropologique de notre société industrielle quest le travail  mais servant ce faisant essentiellement des intérêts qui sont consécutifs à la concentration des moyens de production et des richesses produites dans les mains dune frange très réduite de la population et ayant largement contribuer à réduire le travail à la conception étriquée de loccupation dun emploi. 
	
	Cette tension entre, dun côté, prédominance de la performance (en terme de maîtrise de savoir) et de son évaluation (qui induit une conception de linstitution scolaire centrée sur le strict objectif de pourvoir les enfants de ce qui est nécessaire pour sadapter au marché du travail, leur destination « naturelle ») et de lautre les conceptions diverses (largement dominées mais existantes) centrées sur un projet déducation à vocation émancipatrice et, de fait, potentiellement génératrice dethos socialement créatif et transformateur (et qui ne rentre pas dans le cadre stérile des analyses opérant une réduction de ces questions à une opposition enfermante entre « savoir et pédagogie »), se retrouve concrètement traduite par la crainte (légitime) quont nombre denseignants face à lhétérogénéité de niveau de leur classe  ce qui montre également à quel point est naturalisé le fait que lécole doit avant tout (si ce nest seulement) produire des élèves performants au niveau du seul savoir  crainte qui est parfois purement et simplement traduite par un refus denseigner à des élèves qui nont « pas le niveau » (refus concomitant à une vision politique caractérisée par la défense de lexistence dinstitutions spéciales pour ces élèves non conformes). De ce point de vue, linclusion scolaire est investie par certains de ses défenseurs comme une possibilité de dépasser un « dilemme » de la profession enseignante (dilemme dont lexistence est liée à lincorporation des logiques ci-dessus présentées) : 
« By developing inclusive practice, one might hope to overcome the dilemma which confronts many teachers facing a diverse public: teaching the best pupils at the risk of neglecting the weaker ones, or teaching the weaker ones at the risk of lowering academic standard (
). »  Serge Thomazet (2009)
	Pour conclure
	Cest ainsi, entre discours éthique et intérêts économiques, que se sont construits les dispositifs légaux déducation de lenfance handicapée. Il est important ici dajouter le fait quà lorigine même de la construction des systèmes modernes déducation « ordinaire » (ou non spéciale) se trouve, au-delà de lobjectif humaniste affiché détendre linstruction et laccès au savoir au plus grand nombre, lintérêt économique que représente pour les industries alors florissantes la possibilité pour de nouvelles populations « éduquées » à entrer dans la production. De ce point de vue, la séparation originelle des « moyens et biens portants » davec les « anormaux » est aussi, en sus danalyses anthropologiques qui fournissent des cadres explicatifs tout à fait essentiels (et en sus des analyses mettant en avant également la forte capacité de survie que la République soctroie en investissant ainsi léducation), à rapporter au fait que les « arriérés » ou les « sous normaux » étaient bien faits pour grever le fonctionnement attendu de linstitution scolaire, qui était de produire à un rythme homogène des ouvriers et des paysans « éduqués » et a minima « instruits »  en dautres termes plus dociles et plus « stables », aussi bien géographiquement que moralement : 
« By the early 19th century, education for the mass of the people was becoming regarded as a necessary discipline for controlling potential unrest amongst the working classes and also to produce a literate to further commercial interest »,  écrit Sally Tomlinson en 1982. 
	Cest dans le cadre ouest-européen des sociétés industrielles que se sont développés, sur un fond anthropologique commun, les systèmes déducation nationaux, tous organisés en deux pôles (ou avec un « sous-système », comme le dit Sally Tomlinson (1982)) : lordinaire et le spécialisé. Cest également dans ce cadre que, un siècle après les origines, on assiste à une valorisation par les élites politico administratives communautaires de la notion dinclusion scolaire, transposition régionale de sa promotion dans lespace international. 
		
  Le cadre européen 
LEurope est ainsi, pour Philippe Mazereau (2009), lespace pertinent (relativement aux cadres réglementaires) pour penser le changement des relations entre spécial et ordinaire. Il existe en effet une série de documents ou déclarations qui encadre et organise progressivement lobjectif politique de scolarisation des enfants en situation de handicap  qui sinscrit, nous lavons évoqué, dans un mouvement beaucoup plus large symbolisé par le succès de la notion dinclusion. Parmi ces évènements, on peut relever, avec Philippe Mazereau : 
en 1996, la charte du Luxembourg promulguée par lUnion Européenne (UE) qui :
« Stipule que lécole doit garantir un enseignement de qualité et un accès égal de tous » (Mazereau 2009)
la charte des droits fondamentaux 
larticle 13 du traité dAmsterdam de 1997, qui instituent le principe juridique de non-discrimination en énonçant que lUnion Européenne : 
« (
) combat toute discrimination fondée sur le sexe, la race, lorigine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, lâge ou lorientation sexuelle. » 
La conférence mondiale sur léducation et les besoins éducatifs spéciaux, qui sest déroulé à Salamanque, 7-10 juin 1994, suivie dune déclaration du même nom, qui institue linclusion comme un objectif ;
Les directives européennes faisant suite au traité dAmsterdam
Année 2003 : année des personnes handicapées en Europe
Serge Ebersold (2009) ajoute que la notion dinclusion (entendue dans sa plus large acception) est devenue : 
« (
) un des indicateurs retenu par lUE dans le cadre de lagenda de Lisbonne pour évaluer les politiques publiques ». 
	Adossée aux principes de non-discrimination et de droit, linclusion scolaire trouve dans le cadre européen une inscription légale forte et pérenne. La notion de « besoins éducatifs particuliers », sans laquelle la notion dinclusion scolaire ne peut sexpliquer, trouve elle aussi une concrétisation et une consécration dans le cadre de lEurope : en 1996 (deux ans après la déclaration de Salamanque) est créée une « Agence européenne pour le développement de léducation des personnes présentant des besoins particuliers ». La France y est représentée depuis cette date par lINSHEA (ancien CNEFEI). 
On a ainsi assisté à une « unification graduelle des réformes autour du paradigme de la non-discrimination des élèves handicapés qui sest opérée au cours de la [décennie 1990] au niveau de lUE » écrit ainsi Philippe Mazereau. « A bien des égards, ajoute t-il, ladoption par la France de (
) [la loi n° 2005-102 du 11 février 2005] marque la fin du cycle initié par la déclaration de Salamanque en 1994 » (Mazereau 2009). 
Cette déclaration aurait ainsi constitué lorigine dun cycle de traduction européenne des principes internationalement promus par les instances supranationales, elles-mêmes ayant traduit, dans loptique de sa promotion, le produit intellectuel et notionnel de la rencontre entre le lobbying important dassociations nord-américaines de personnes déficientes motrices et sensoriels et le courant de la normalisation porté par des intellectuels nord-américains pour améliorer la vie des personnes porteuses dune déficience ou dune maladie mentale. Cette esquisse de ce que peut représenter la circulation internationale de la notion dinclusion mérite que nous nous y arrêtions plus avant. 
La circulation internationale de linclusion
« Le fait que les textes circulent sans leur contexte, qu'ils n'emportent pas avec eux le champ de production (...) dont ils sont le produit et que les récepteurs, étant eux-mêmes insérés dans un champ de production différent, les réinterprètent en fonction de la structure du champ de réception, est générateur de formidables malentendus. »
Pierre Bourdieu (2002  texte original de 1989) 
Lhistoire du mouvement intégratif des enfants handicapés dans le système scolaire dit ordinaire, évoqué dans la première partie du présent travail, a montré, malgré le processus européen en cours dunification ci avant évoqué, quil était caractérisé par un spectre sociopolitique assez large, allant de la position radicale de labolition du secteur spécialisé au profit dune scolarisation entière et complète de tous les enfants qui en étaient auparavant dépendants (comme en Italie) à un maintien et même un développement des structures spécialisées en marge de lécole ordinaire couplé à une construction stricte et limitée des passages éventuels de certains enfants des institutions vers lécole (comme en Allemagne). La France se situe dans un milieu entre ces deux pôles, ayant adapté, par le biais dune législation votée en 1975, un système intermédiaire caractérisé par un maintien du secteur spécialisé sorientant progressivement dune logique de structure à une logique de service, ces derniers étant de plus en plus destinés à accompagner les processus de scolarisation et les familles. Chacun des ces dispositifs législatifs, antérieurs à la consécration de linclusion dans les années 1990, en connaît aujourdhui encore linfluence, et ne sont pas stabilisés. 
 
« Le paradigme unificateur de linclusion scolaire connaît des actualisations variées selon les contextes nationaux », écrit Philippe Mazereau en 2009. 
Dans cette partie nous nous intéressons à la trajectoire de la notion dinclusion, depuis son émergence dans son (ses) contexte(s) dorigine jusquaux processus qui ont guidé à sa consécration par des instances supranationales et in fine à son utilisation dans des cadres législatifs nationaux. Pour ce faire, nous nous basons tout dabord sur le constat énoncé par Pierre Bourdieu en 1989 lors dune conférence prononcée le 30 octobre 1989 pour linauguration du Frankreich-Zentrum de luniversité de Fribourg et reporté ci-dessus en exergue. Cette remarque (et le texte dont il est issu), riche douverture pour quiconque souhaiterait produire une recherche spécifique sur le sujet de la « circulation internationale » de lidée dinclusion, va constituer le garde-fou de la présente partie. Nous empruntons également à la sociologie de la traduction un cadre danalyse initialement centré sur la circulation de lobjet technique  que nous proposons ici dutiliser dans le cadre de la circulation de ce qui apparaît être plutôt un objet notionnel. Ce glissement nous oblige, avant dentrer plus avant dans lanalyse, à quelques clarifications. 
De lobjet technique à lobjet notionnel : 
concepteur et utilisateur 
	Des concepteurs de linclusion ? 
Il est notable de constater que le terme de « inclusion », ainsi que ce quil prétend désigner, a été initié, construit, formalisé et promu par des intellectuels (représentant initialement la déficience intellectuelle)  et, comme nous lavons vu, également par des associations (de personnes déficiente motrices et sensorielles). Il serait tout à fait intéressant dengager une recherche en sociologie sur cette frange dintellectuels qui a conçu, construit et promu aux côtés des associations ce qui a fini par aboutir au concept dinclusion scolaire, et à son succès, dû en grande partie au travail réussi de lobbying auprès dinstances supranationales. 
De ce fait, une des difficultés méthodologiques à laquelle il est indispensable de répondre quand on veut, comme nous le souhaitons, utiliser les analyses de la sociologie de la traduction concernant la circulation des objets techniques en les transposant vers un objet notionnel, est de bien cerner le fait que le « concepteur », sil est le plus souvent clairement identifiable et identifié dans le processus de circulation dun objet technique, ne peut pas lêtre aussi clairement pour ce qui concerne un objet notionnel. Seulement, à des fins de méthode, pour pouvoir habiter la pertinence des analyses utilisées dans toute leur épaisseur et afin dapprécier leur plein potentiel heuristique, nous proposons au lecteur didentifier quand même un « concepteur ».  
Lhistoire de la circulation de la notion dinclusion est en effet caractérisée par trois périodes : 
la première (années 1960-1980) est celle quon pourrait dire « de proto-inclusion », celle où le terme inclusion na pas encore été consacré pour désigner les processus quil prétend désigner. Cest la période où on rencontre les termes de « normalization » (concernant à lorigine les déficiences mentales), de « mainstreaming », d« intégration », autant de termes sinscrivant dans la généalogie de linclusion ;
la seconde (fin 1980-début 1990) est la période au sein de laquelle, pour lécole, sest progressivement imposé le terme de inclusion (dans le sillon creusé par la notion de special education needs) pour désigner la prise en compte des différences et des particularités des enfants à besoins éducatifs particuliers à lécole ordinaire  et non pas seulement des enfants handicapés. Cette période se clôt avec les adoptions par lONU, lUNESCO et lOCDE de linclusion comme catégorie légitime pour penser, mettre en oeuvre et promouvoir à un niveau international la scolarisation des enfants à besoins éducatifs particuliers ;
la troisième (depuis la décennie 1990) est la période que nous connaissons encore, et qui commence avec linternationalisation de la notion et des politiques afférentes par le biais des instances supranationales précitées, se poursuivant par des processus dactualisation différenciée de ces principes en fonction des différents contextes socio historiques nationaux.  
Il est important de souligner ici que dans la période 2, dans le moment où sorganise la réussite du lobbying des associations auprès des organisations internationales, ces dernières diligentent et mandatent à leur service des forces intellectuelles pour sapproprier et mettre en forme cette catégorie, avant den proposer la promotion par le biais de publications informatives et incitatives (mais pas comminatoires)  appropriation et mise en forme qui constitue un phénomène de traduction. De fait, nous proposons ici de considérer les organisations assurant la promotion des politiques inclusives après en avoir assuré une formalisation spécifique, comme les concepteurs de la notion. Il sagit certes dun raccourci et dune réduction, mais qui fait plus gagner que perdre en termes de portée heuristique. 
Si nous avons ainsi cerné des concepteurs, il est nécessaire de nous atteler à définir quels sont les utilisateurs de cet objet notionnel quest « linclusion ». En effet, comme lécrit Madeleine Akrich en 2006 : 
« Nous ne pouvons méthodologiquement nous contenter du seul point de vue du concepteur ou de celui de lutilisateur : il faut sans arrêt effectuer laller-retour entre le concepteur et lutilisateur, entre lutilisateur projet du concepteur et lutilisateur réel, entre le monde inscrit dans lobjet et le monde décrit par son déplacement. Ce sont les réactions des utilisateurs qui donnent un contenu au projet du concepteur. » 
(Madeleine Akrich, 2006)
	Des utilisateurs
 concepteurs
Pour ce faire, il nous faut admettre que la transposition de lanalyse de la circulation dun objet technique à celle dun objet notionnel comporte un autre point de méthode quil nous fait éclaircir, et qui est directement en lien avec ce couple conceptuel « concepteur-utilisateur ». 
En effet, lobjet notionnel quest linclusion nest pas un objet matériel. Sa fabrication nen a rien de commun, dans le sens où il nexiste nul cahier des charges comparable à celui qui présente la façon de fabriquer un objet technique selon des normes fixées, réglées et standardisées. Lobjet notionnel répond à des normes de principes, de mise en forme, de formalisation langagière, détayage intellectuel  autant déléments qui sont, plus que tout processus standardisé de fabrication dun objet technique, soumis aux aléas de la différenciation des langues et des nécessités de leur traduction (au sens linguistique du terme), des contextes sociaux et historiques et des traditions nationales en matière de politique publique déducation qui en découlent. 
Une des conséquences de cet état de fait est que la circulation internationale de la notion dinclusion peut être appréhendée de la façon suivante : depuis son champ dorigine et à chaque fois quun utilisateur  qui est une organisation (association, instance supranationale, Etat national, organisation communautaire comme lUE, etc.) , inscrit dans un champ différent, sapproprie lusage de lobjet notionnel quest linclusion (y compris avant que ce terme ne soit consacré), il en devient ce faisant un nouveau concepteur. La trajectoire de circulation de linclusion reste donc, à son niveau international, une trajectoire marquée par de multiples formes de traduction et par le fait que les organisations qui sen emparent acquièrent le double statut dutilisateur et de concepteur. Cette règle sarrête cependant aux portes des Etats puisque cest la définition nationale, mise législativement en forme, qui prévaut théoriquement dans les pratiques administratives et éducatives responsables de la mise en uvre des politiques inclusives. 
  Trajectoires, circulation et controverses
La promotion internationale du modèle inclusif relève pour lessentiel, ainsi que nous lavons déjà mentionné, des actions à caractère incitatif dinstances supranationales comme lUNESCO, lONU et lOCDE. En reprenant à notre compte lanalyse de Pierre Bourdieu (1998) des fonctions de lEtat national, quil divise et classe dans ce quil nomme en premier lieu la « main gauche » de lEtat (culture, social, éducatif, soin, soutien, accompagnement, enseignement) et second lieu sa « main droite » (économie, police, justice, armée), mais rapporté à lespace des instances supranationales, il est possible darriver à une conclusion homologue, à savoir que « la main droite ignore ce que fait la main gauche et ne veut pas le savoir ». 
En effet, dans lespace des organisations transnationales, on trouve deux types de structures qui saccordent avec la partition que propose Pierre Bourdieu : comme relevant de « la main gauche » des pouvoirs supranationaux, on trouve lUNESCO, lOMS, lONU et lOCDE ; comme relevant de la main droite, on trouve le FMI, la Banque Mondiale, lOMC (et également lOCDE et lONU). De fait, nous pouvons constater que les organisations relevant de la main gauche se trouve produire des politiques à caractère essentiellement incitatif (dont font partie les politiques inclusives) et de lautre, les organisations faisant partie de la main droite produisent des politiques à caractère majoritairement prescriptif  et qui peuvent se trouver en contradiction avec la bonne application des politiques promues par la « main gauche ». Ainsi en est-il du poste dAVS-i, censé accompagner la scolarisation des enfants en situation de handicap à lécole ordinaire en France, et qui, pour des raisons essentiellement consécutives aux critères économiques prescrits par lorthodoxie économique (notamment lOCDE), se trouve cantonné depuis ses origines à un adossement permanent à des politiques dinsertion sociale et/ou professionnelle.  
	Au-delà de cette analyse, bien faite pour comprendre que le champ politique des instances supranationales est aussi un champ de lutte et dintérêts contradictoires et que les luttes qui sy déroulent ont des conséquences directes sur les politiques nationales et locales, une des questions importantes à se poser concernant la circulation internationale de linclusion est précisément les processus de traduction à luvre quand cet objet notionnel se trouve actualisé dans les législations nationales. Serge Ebersold, lors dun colloque intitulé « Ecole et Handicap » qui sest déroulé à lINRP à Lyon les 23 et 24 mars 2010, a présenté les conditions de ce processus de la manière suivantes : 
« Les conceptions idéal-typiques de linclusion dépendent : 
1- des motifs qui animent lambition participative (citoyenneté, financière
)
de la conception de la diversité (inadaptation, enrichissement
)
de larticulation entre conceptions diagnostique et écologique du handicap
de lexistence ou non dune législation non discriminatoire et son caractère comminatoire
des modes de financement adoptés par les pays (incitatifs ou non)
de la place du handicap dans les appareils statistiques (absence ou non)
du mode de responsabilisation des établissements (ethos inclusif ou non : la responsabilité quentend assurer létablissement nest pas seulement dordre pédagogique mais également citoyen.) » (Ebersold, 2010)
Ces éléments forment ainsi les variables qui entrent en jeu dans le processus de transposition des principes inclusifs dans les législations nationales. Par ailleurs, elles ne sont pas des données naturelles qui seraient caractérisées par un ordre fixe et immuable : elles sont bien au contraire soumises à des processus (historiques) de controverse et de lutte pour la légitimité de limposition de leur définition légitime. De ce point de vue, il est utile de reprendre à notre compte une typologie établie par Michel Callon à propos du véhicule électrique (VEL)  auquel nous avons ici substitué la notion dinclusion et les éléments listés ci-dessus. Il y a selon cet auteur quatre caractéristiques des controverses autour du VEL qui se trouvent tout à fait opérantes rapportées à lobjet notionnel quest linclusion. Ainsi, les controverses :
	 
Portent sur les moyens de mise en uvre de lobjectif de politique publique que constitue la présence de droit des enfants à besoins éducatifs particuliers, dans les espaces sociaux de droit commun, nommée inclusion  et ceci bien que le terme inclusion puisse ne pas être lobjet des controverses ;
Les solutions envisagées sont « multiples selon les pays, périodes, groupes dintérêt » et traditions socio-historiques nationales relatives aux politiques du handicap (région particulière des « besoins éducatifs particuliers »). 
« Les groupes sociaux impliqués et leurs intérêts sont aussi nombreux et variés que possible (
), chacun défend des intérêts spécifiques, sujets à négociations ». En France, on trouve en effet : 		
les parents des enfants concernés, 
les parents des autres enfants, 
les enseignants et leurs syndicats,
les professionnels travaillant dans le champ de léducation spéciale, 
les associations gestionnaires du champ
les professionnels travaillant dans ladministration, 
les représentants politiques et leurs partis
les professionnels émergents comme peuvent être considérés les AVS ou ceux proposant des méthodes et orientations éducatives centrés sur des segments émergeants du handicap car nouvellement identifiés, 
les scientifiques défendant lautonomie de nouvelles formes de « handicap » quils se font fort dexpliquer étiologiquement 
etc.
« Les forces qui sopposent tout au long des controverses séquilibrent en permanence (
) [et cet équilibre] rend peu efficace les arguments dautorité et permet à la controverse de demeurer ouverte mélangeant sans cesse des considérations scientifiques, techniques, politiques et économique », écrit enfin Michel Callon. Rapporté à la situation des controverses (très vives) autour de lobjet notionnel quest linclusion, ce quatrième point est encore à justifier  ce que nous navons pas pu faire dans le présent travail. 
Au terme de la circulation internationale : 
les utilisateurs de linclusion dans le cadre 
national français 
Une trajectoire ascendante (résultant de laction conjointe dassociations et dintellectuels vers des instances supranationales), une mise en forme spécifique au sein de ces structures, puis une trajectoire descendante (des instances en question jusque vers les Etats) : voilà comment il est possible de présenter schématiquement la circulation de la notion dinclusion scolaire. Une fois engagés les processus de traduction nécessaire pour consacrer la notion législativement, elle commence à se retrouvé actualisée dans les cadres légaux des Etats (et, pour lEurope, dans le cadre intermédiaire des textes communautaires). 
Quel regard peut-on alors porter sur les « utilisateurs » du produit de la traduction spécifique des principes inclusifs que connaît le pays dans lequel ils vivent ? Qui sont ces utilisateurs se trouvant en aval du processus de mise en forme légale du mouvement porté par la notion dinclusion scolaire ?
Nous lavons vu, la loi n°2005-102 du 11 février 2005 est le produit français de la traduction spécifique à ce pays de la circulation internationale des principes inclusifs. Malgré le fait quelle ne mentionne pas le terme « inclusion », elle est empreinte des logiques que ce dernier se propose de représenter : 
1-  une approche environnementaliste du handicap ;
la notion de « droit à la scolarisation dans lécole de son quartier », adossée au principe de non-discrimination,
la non mention du terme « spécial » ou « spécialisé »,
laffirmation de lambition dune société qui travaille à dépasser le clivage spatial et symbolique entre mondes de « lordinaire » et du handicap
La particularité de la traduction française des principes de linclusion au travers de cette loi est davoir renoncé au couple « inclusion / besoins éducatifs particuliers (BEP) » : là où cette association (mise en avant par exemple par la déclaration de Salamanque) impliquait de ne considérer le handicap que comme une région particulière des BEP, le législateur français a préféré conserver la spécificité de la notion de handicap, de fait seule concernée par la notion dinclusion. 
En premier lieu, il apparaît que les utilisateurs de lobjet notionnel inclusion le sont sans forcément le savoir, puisque la connaissance des origines en partie internationales de « lesprit » de la loi nest pas parmi les connaissances les mieux distribuées, et quelle est méconnue de nombreux agents/acteurs. Cest là une des différences fondamentales entre la circulation dun objet notionnel et celle dun objet technique, dont la matérialité implique nécessairement une conscience dutilisation. Limmatérialité de lobjet notionnel fonde la légitimité à affirmer quil est possible (et même fréquemment possible) den être un utilisateur sans le savoir  ainsi de linclusion, entendue comme le produit des processus de traduction ici évoqués. Mais il est un élément danalyse qui reste commun aux objets techniques et notionnels : les processus de reconfiguration quimpliquent leur introduction dans le monde social. Ainsi, écrit Madeleine Akrich : 
« Lobjet technique [ou notionnel NDR] contient et produit une certaine géographie des responsabilités ou plus généralement des causes. Ceci implique que non seulement lintroduction dune nouvelle technologie est susceptible de construire un nouvel arrangement des choses et des gens, mais de plus, quau travers de limposition conjointe de certaines formes de causalité, il se produit une stabilisation et une naturalisation [définie plus loin comme un processus de « fixation des liens de causalités » NDR] de ce nouvel ordre, qui peuvent aller jusquà la production de nouvelles connaissances sur tel ou tel aspect de notre monde. » (Akrich, 2006)
	La « géographie des responsabilités » contenue dans la notion dinclusion (et ses traductions) se caractérise par son caractère individualiste, ainsi que nous lavons évoqué plus haut : sont en premier lieu (voire exclusivement) responsables de la bonne mise en uvre des processus inclusifs les individus qui font partie de lenvironnement institutionnel accueillant. Ainsi, Joël Zaffran dresse en 2007 une liste de ceux qui peuvent être tenus pour responsable dun « échec » du processus de scolarisation dun élève handicapé : 
« Léchec du processus peut conduire à la recherche trop hâtive des causes : 
incompétence de lenseignant
duplicité de lélève ordinaire
mauvaise foi des directeurs
pathos des parents. » 
Il est tout à fait notable de constater que les politiques et leurs dispositifs, et les classes dirigeantes qui pèsent pour déterminer la façon dont doit être organisé le système éducatif, sont singulièrement absent de cette « géographie des responsabilités », qui ne concerne que les agents/acteurs quotidiens gravitant autour de létablissement. 
Lintroduction des principes inclusifs en France par la loi de 2005 a provoqué à lécole un « nouvel arrangement des choses et des gens » concernés par cette loi. La consécration en un droit de la scolarisation pour tout enfant en situation de handicap « dans lécole de son quartier » a eu, pour le système scolaire français, de nombreuses conséquences (non exhaustives) : 
larrivée en masse dans les établissements denfants qui ne les fréquentaient auparavant jamais
une multiplication exponentielle du nombre de personnel en poste dAVS (denviron 6000 équivalent temps plein (ETP) en 2003 à environ 27 000 en 2010)
une accentuation de lhétéronomie du champ scolaire en France induite par larrivée dans les établissements de personnels non formés et temporaires. Les conditions de recrutement de la frange de ce personnel employé en contrats aidés par lEtat (les EVS) impliquent aussi lintroduction de la logique de linsertion dans lécole (et pour des postes intervenant dans les classes) : les personnels en contrat dEVS sont recrutés dabord par pôle emploi.
Ces recompositions ont contribué à provoquer des situations de tension parfois très vives dans de nombreux établissements, tensions concernant tout autant les parents, les enfants que les enseignants et les personnels en poste dAVS-i  et il serait dailleurs tout à fait intéressant que de sattacher spécifiquement à lanalyse des situations conflictuelles en matière de scolarisation des enfants handicapés, dont on trouve de multiples témoignages sur les forums Internet, que ce soit au sein de forums de parents, dAVS ou denseignants. 
A titre dillustration, nous pouvons citer ici lévocation que fait Noémie de sa relation avec les parents des élèves quelle accompagne, relation basée sur une première expérience catastrophique pour elle : 
Noémie : (
) la première année (
) jai eu des gros problèmes [avec des parents], sans pour autant mêtre investie du tout
 (Page 11) (...) [La maman] ne pouvait plus supporter sa fille, mais bon cétait une famille qui était aussi très instable, je veux dire (...) bon cest un jugement, je le sais mais euh
. (...) et en fait elle était très très violente dans tous ses propos et tout ça, parce que moi elle ma agressé ouvertement et moi jai eu très peur à une époque de toute façon cétait un dossier que jaurais arrêté de suivre à la fin de lannée parce que
 javais eu les menaces de mort de la propre gamine en me disant que sa mère me tuerait donc euh
 voilà (Page 9)
La « géographie des responsabilités » quil est possible dobserver au travers dune attention aux échanges centrés sur les situations déchec ou de tension est assez homogène. Lenseignant (par les parents ou/et lAVS-i), lAVS- i (par lenseignant ou/et les parents) ou les parents (par lenseignant et/ou lAVS-i) sont souvent désignés comme responsables des difficultés  car « incompétents », car « pas à laise avec le handicap », car « agressifs et irréalistes », car « incapable de travailler en collaboration », car « méprisant et désagréable », etc. Lorganisation générale de la politique qui organise la mise en uvre de ce droit, son caractère international, les dynamiques collectives qui configurent son application, lhistoire qui en constitue les soubassements, sont autant déléments qui ne se trouvent pas sur la carte des responsabilités : seul prévaut le déchirement interpersonnel, lindividualisation des causalités et la personnalisation des affects. On le voit : le monde et la vision du monde intrinsèquement contenus dans la notion dinclusion se trouvent fort bien actualisés au travers de la traduction quen a opéré le législateur français. Il nest ainsi pas question de dire, ainsi que lexplique Madeleine Akrich à propos des kits (techniques) : 
« Lhistoire des kits pourrait se lire comme une longue série daccusations réciproques entre les différents intervenants : dun côté les [concepteurs] soutiennent que « si ça ne marche pas (sous-entendu techniquement), cest que cest mal utilisé (socialement) », de lautre, les utilisateurs ou plutôt ceux qui se veulent leurs représentants répliquent que « si ça ne marche pas (socialement), cest que cest mal conçu (techniquement). » ». (Akrich, 2006). 
	La conception des dispositifs censés contribuer à mettre en uvre linclusion (notamment le dispositif demploi des AVS-i, ou le dispositif de formation des enseignants, par exemple) nest pas, ou peu, remise en cause, du fait de sa quasi invisibilité. Nous trouvons peu dacteurs ordinaires des processus de scolarisation des enfants handicapés pour dire « si ça ne marche pas, cest que cest mal conçu ». Non, en lieu et place de cette adresse des utilisateurs aux concepteurs, on voit plutôt les utilisateurs se déchirer entre eux et souhaiter enfin « tomber » sur quelquun qui ait les capacités individuelles pour sacquitter correctement des ses missions. 
	Cécile exprime cette réalité très bien, du côté de lAVS-i, tout dabord en exprimant, pragmatiquement, ce qui fonde une des caractéristiques de la position de lAVS-i : la dépendance à la relation avec lenseignant : 
Cécile : (...) après ça dépend aussi de la relation avec linstit, (
) ça dépend un peu de la personne avec qui tu bosses, on est vraiment nous, on est vraiment tributaires de ça (...) (Page 22)
	Puis en déroulant une typologie sommaire des enseignants avec lesquels elle a travaillé (sommaire mais néanmoins construire sur quatre degrés) : 
Cécile : (...) ça sest bien passé avec les enseignants qui ont un peu plus la fibre (...) après il y a des enseignants avec qui ça se passe bien, tessaies de faire ta place (...) et puis il y a des enseignants qui ont vraiment besoin de bosser en solo, qui ont pas envie du regard de lAVS-i
 sur son travail (...) et puis voilà
 et puis yen a avec qui ça se passe pas bien du tout
ah ouais, yen a eu aussi
 (Page 26)
	Ainsi, si nous pouvons dire, à la suite de Madeleine Akrich, et aux vues du peu de cas fait par le législateur (c'est-à-dire le concepteur) de la qualité des dispositifs demploi des AVS-i, de la formation professionnelle des enseignants en matière de scolarisation des enfants handicapés, de laccueil et de lorientation des parents dans les MDPH (parties des utilisateurs), que « lutilisateur nintéresse pas le concepteur », nous pouvons également affirmer que le concepteur (de la loi) intéresse bien peu les utilisateurs  à lexception des exemples de quelques démarches judiciaires entamées par des parents pour faire reconnaître le droit à la scolarisation de leurs enfants, et à lexception de quelques positions militantes et politiques (mais ceci ne concerne également que des démarches dordre individuelles, malgré les jurisprudences quelles peuvent occasionner).
	Une dernière remarque simpose avant de clore ici cette partie. Lintroduction dans les législations des principes organisant (et organisés par) la notion dinclusion est un processus récent qui est comparable au « processus dinnovation » que décrit Madeleine Akrich (2006) à propos de la mise en circulation dun objet technique. A propos de ce processus, elle écrit : 
« [Il] sachève quand la circulation du dispositif technique ne génère plus de revendications susceptibles de défaire le réseau ainsi constitué et de remettre en cause le partage stabilisé des compétences entre lobjet et son environnement. ». (Akrich 2006, « Les objets techniques et leurs utilisateurs. De la conception à laction »)
	Nous ne pouvons que constater le fait que le processus dinnovation que constitue la mise en circulation de lobjet notionnel quest linclusion (et que constitue surtout sa traduction dans les législations nationales) nest pas stabilisé du tout  et ne semble pas prêt de le devenir. Nous avons déjà abordé une des propriétés du champ français de léducation spécialisée qui consiste en une grande variabilité sociohistorique des termes utilisés pour classer (et penser) le non conforme scolaire mais aussi une grande variabilité de la nature des institutions et des dispositifs légaux qui les encadre. 
La notion dinclusion, en tant quelle constitue au sein de ce champ une des manières nouvelles de penser le lien entre la population concernée par les processus de dénominations du handicap et de linfirmité et celle qui ne lest pas  instituant ainsi, vraisemblablement, un nouveau paradigme dans lhistoire du traitement social du handicap, na pas vocation à contribuer à une forme d « achèvement du processus dinnovation », à lexception du moment où, semblable à celui que connaît maintenant la notion de handicap, sétabliront autour de son usage toutes les caractéristiques dun processus de naturalisation, c'est-à-dire, pour paraphraser Madeleine Akrich, dune « fixation des liens de causalité ». 
Linclusion apparaît au travers des éléments développés dans cette partie comme une notion véritablement internationale : elle puise ses racines dans le principe de normalisation développé après-guerre en Scandinavie autour des conditions de vie des personnes déficientes mentales, elle en développe dautres dans sa reprise et le développement de ce dernier par des intellectuels canadiens, puise une partie de ses origines au sein du mouvement associatif états-uniens de personnes déficientes motrices et sensorielles promouvant lémergence du modèle social du handicap, pour finalement aboutir à ce que des instances supranationales se saisissent de linclusion pour la promouvoir en direction des Etats, imitant ainsi les phénomènes liés à linternationalisation des politiques économiques qui se développe de manière concomitante. 
	Par ailleurs, elle est le lieu dune jonction, du fait du caractère unifiant du terme de handicap (ou de disability, qui possède la même propriété), de déficiences différentes (intellectuelles, à lorigine, pour le principe de normalisation, et sensorielle et motrice pour les associatifs à lorigine du MSH). 
Linclusion consacre également, dans le territoire quelle inaugure, dans les mondes quelle se propose dinvestir et donc de rapprocher, la réunion de champs jusquici entretenant peu ou pas dinterrelation : le champ de linsertion sociale et professionnelle rejoint celui de lintégration scolaire (par le double truchement des publics visés par les politiques catégorielles et par les personnels recrutés pour les appliquer), les territoires du handicap ceux du chômage et de la vieillesse. Elle subsume ainsi linsertion et lintégration, le social et le scolaire, le social et le professionnel, et constitue pour chacun des champs relevant de ces termes et notions une sorte de point de passage obligé, une synapse, qui relie et rassemble autour de lidéologie quelle transporte au travers de la vision du monde quelle contient. 
	A lorigine du succès de cette notion il y a donc tout le travail social, au sens durkheimien du terme, qui a été réalisé par, en partie (et en sus de personnes déficientes motrices ou sensorielles), des intellectuels. 
Quelle réception une notion forgée par des intellectuels, dans lobjectif explicite de changer de mot pour changer de pratique, connaît-elle aujourdhui dans les milieux académiques  et dans les milieux des professions éducatives censés lappliquer ? Sans prétendre répondre de manière tout à fait complète à cette question, qui mériterait une recherche spécifique, tentons dès à présent dy apporter quelques éléments de réponses, au sein dune partie qui va sattacher à décrire linclusion dans son versant spécifiquement scolaire, qui est celui qui nous intéresse plus particulièrement dans ce travail. 
Linclusion dans son versant scolaire
« 25 années dappels réitérés en faveur de lintégration, relayés par un imposant dispositif législatif, se sont avérées incapables dopérer les changements attendus. » 
Fardeau Michel (2001) 
Intellectuels et profession enseignante face à linclusion scolaire
	Quelle est la communis doctorum opinio, le sens commun savant, concernant le handicap et les processus de scolarisation dintégration scolaire ? Dans certains espaces du milieu académique où le handicap nest, comme le dit Henri Jacques Stiker, pensé que comme un « lieu de militance et daction » et pas du tout comme un sujet théorique digne dintérêt pour la recherche (y compris  surtout ?  dans le champ des sciences de léducation), le sens commun savant se trouve ne pas prendre une forme très différente du sens commun communément partagé. Cependant, dans les quelques espaces académiques où handicap, déficience et infirmité sont objets et champs de recherche, lopinion commune savante se trouve caractérisée par des actualisations différenciées à propos de linclusion scolaire que nous souhaitons ici contribuer à éclairer. 
	Quil apparaisse évident pour le savant que les enfants handicapés ne puissent pas être éduqués et enseignés dans un espace commun ou au contraire quil apparaisse pour un autre quil va de soi que tous les enfants, quelle que soit leur situation, doivent partager les mêmes espaces déducation, et cest toute lépaisseur du caractère anthropologique des appréhensions socialement différenciées des infirmités, déficiences et handicap qui apparaît : tout comme dans les autres champs, il nexiste pas en France de consensus savant autour de la place que la société des humains doivent accorder aux personnes porteuses dune déficience. Les recherches menées (ou pas) en matière de modalités déducation séparée ou déducation commune (cette dernière étant aujourdhui favorisée par la loi) restent de toute façon marquées par ces soubassements épistémologiques  et, quand elles existent, la façon dont elles sont menées et conclues le sont également.  
		2.1.2.1 Le champ académique et linclusion 
				Linclusion scolaire et la pensée de laltérité 
				radicale : une « réponse idéologique » 
«  Si (
) la scolarisation des enfants déficients ne se fait pas selon lampleur souhaitée par les associations de parents et idéologues de linclusion, cest notamment parce que les instituteurs, soutenus par les parents délèves, savent expérience et corporatisme mêlés, quils ne peuvent former ensemble des enfants dont les rythmes dapprentissage, de déplacement, sont différents de la moyenne. Pour leur bien et leur sécurité respectifs, déficients et collectivités sont contraints de se séparer car leur rythmes ne sont pas identiques, ni conciliables à moins que les valides acceptent de prendre une part de la charge constituée par la déficience : si nous le voulons, le pouvons-nous, au fil des longs jours, dans le temps et dans lespace ? » (Blanc 2006)
	Louvrage dont est extrait lexergue ci-dessus va constituer pour cette partie la référence unique qui va nous permettre dappréhender en quoi se caractérise la pensée de laltérité radicale des personnes handicapées (Alain Blanc parle uniquement de « déficience » et de « personnes déficientes ») et quel est le regard quelle pose sur la scolarisation des enfants handicapés et sur la notion dinclusion  pour ce dernier objectif, il semble bien que quelques éléments soient demblée ici fournis. 
	Alain Blanc se donne dans cet ouvrage lobjectif de décrire et danalyser les conséquences de la déficience dans la construction, la structuration et le déroulement des relations sociales  jusquà convoquer la notion de liminalité pour offrir un modèle intégrateur  à forte portée heuristique pour appréhender la position des personnes déficientes dans les échanges sociaux. A partir danalyses sociologiques comme celles de Norbert Elias, Albert Memmi, Erving Goffman ou de Marcel Mauss, Alain Blanc construit un étayage théorique solide pour servir son analyse. Dans ce cadre, il écrit par exemple : 
« Dans la mesure où la déficience focalise linteraction, elle empêche les interactants de se rapporter librement à autre chose quelle : véritable prison, elle enferme linteraction qui donc cesse davoir ce caractère de « sécurité » au fondement de la vie relationnelle. Lévitement est cohérent. En même temps quil traduit une expérience, il participe à la compréhension du monde : avec les déficients, on ne peut pas se comprendre. (
) [Lévitement] est une réponse adaptée à linsécurité provoquée par la déficience : souhaiter donc que nos concitoyens se rapprochent des déficients devient un discours idéologique plaqué sur le bouleversement interne de linteraction induit par la déficience. » (Alain Blanc, 2006)
	Pour Alain Blanc, la déficience sinstaure également en « fait social total », selon lexpression de Mauss : 
« Cest une initiatrice de la vie sociale. En nous faisant rencontrer un autrui particulièrement décalé, elle nous amène à toucher du doigt la précarité des relations sociales. Elle rend perceptibles les aménagements devant être réalisés pour que la circulation des échanges reste possible. » 
La déficience permettrait ainsi, quand elle fait irruption dans les relations sociales, de mettre au jour, dapporter à la conscience tout ce qui les fondent et les rend possibles  étant entendu que ces éléments ne sont par ailleurs ni perçus ni connus par les non déficients tant ils sont quotidiens et proprement incorporés.
Cette perspective analytique mettant en avant une « socialisation impossible », ou « introuvable », une « altérité radicale et inconvenante » de ces personnes déficientes qui, en tant que « figures de la limitation », trouvent leur « lot [dans] (...) l'inconfort, la douleur, l'isolement, (...) [et] une certaine et variable inadéquation au monde », est néanmoins basée, de notre point de vue, sur un point aveugle qui se décline en deux axes : 
aucun des auteurs convoqués na spécifiquement travaillé sur le sujet de la déficience, et aucun dentre eux nest porteur dune déficience
par contre chacun dentre eux a travaillé dans un contexte sociohistorique où le processus de naturalisation de la culture de la séparation était acté, et donc dans un contexte où, de fait, les relations sociales analysées ne concernaient que les individus non porteurs de déficience. 
Ainsi, les analyses produites par Alain Blanc pour justifier de la « socialisation introuvable » sont basées sur un outillage théorique issu de périodes historique où elle létait effectivement  car institutionnellement organisée. Même sil écrit que « en létat des sociétés analysées, linsertion des personnes handicapées reste une fiction démentie par les faits », il opère une sorte de fixation des liens de causalité (de naturalisation) des origines de cet échec, oubliant de situer historiquement les (récentes) mesures législatives en faveur du principe de la fin de la séparation, oubliant de rapporter ces principes aux moyens politiquement définis pour les mettre en uvre, et amalgamant en un seul tout, grossier et vaporeux, léchec de ce quil appelle « linsertion des personnes handicapées » et les positions consistant à défendre cette « insertion », en rapportant la dernière au premier. Il y aurait donc échec du fait non pas des politiques menées depuis un siècle (qui sont complètement invisibles dans son analyse) mais du fait de la seule inadéquation fondamentale entre les processus de socialisation propres aux non déficients et ce que provoque dans ces processus lirruption de la déficience  en clair, léchec serait dû à un fond anthropologique qui trouve une inscription dans chaque individu et face auquel laction collective ne pourrait rien. 
 De fait, lauteur, et malgré quil sen défende, nous semble opérer une « naturalisation mécanique » de la déficience et, surtout, de sa place et de ses effets dans léconomie des échanges symboliques. Une des matrices de cette naturalisation est le fait que la pensée de laltérité radicale est (délibérément) valido-centrée, et basée sur des appareils théoriques qui le sont tout autant : en témoigne la récurrence des « nous » (entendre : « nous, non déficients »), qui parsèment louvrage : 
« Nous fuyons les déficients car labsence de société sofficialise en eux. Le développement séparé est la réponse favorable, leugénisme est la réponse défavorable. »
 « Dans le monde de la légèreté et de lédulcoration, la déficience impose sa lourdeur et nous confronte à la tragédie. »
 « Le corps déficient résiste à la socialisation (...) : les postures et dispositions corporelles trouvent un terrain peu propice comme si la nature corporelle était rétive à l'imposition de normes. On peut donc concevoir que si la déficience nous reste étrangère, c'est qu'en elle se signifie un défaut d'incorporation ».
« La personne déficiente est étrangère en notre monde, car il est en inadéquation avec elle ; organisé sans elle, il ne lui réserve quun accueil mitigé, et lérige donc en étrangère (
). Lexpérience de la déficience est celle de « lextraterritorialité » ».
	Ce quAlain Blanc avalise (en creux) au travers de cet usage (à notre sens très problématique, a fortiori pour un sociologue) du « nous », cest la pertinence des « disability studies » dans leur version nord-américaine, c'est-à-dire le fait de poser comme préalable épistémologique à toute recherche sur le handicap et/ou la déficience dêtre soit même une personne handicapée et/ou porteuse dune déficience, et le fait de penser la pratique de la recherche comme devant répondre avant tout à une visée politique démancipation  par le savoir et sa diffusion. 
En effet que signifie la production dune analyse telle quAlain Blanc la délivre, postulant que les personnes déficientes « entrent dans un processus de disqualification personnelle et sociale difficilement compensable » du fait dune « inadéquation au monde » (et surtout pas pour des raisons politiques), quand elle est produite par une personne non déficiente qui convoque uniquement des intellectuels non déficients pour asseoir théoriquement ses analyses ? 
Pour sen faire une idée, il suffit dimaginer la même chose concernant les femmes, ou les noirs, ou les homosexuels  et il apparaît alors à quel point la dimension proprement politique de la situation des personnes déficientes se trouve évacuée derrière un discours qui se pense comme scientifique mais qui procède dune naturalisation de la place qui leur est accordée dans les espaces sociaux et les échanges, et à quel point les processus de domination sociale (et les théories qui se proposent de les analyser, dans une visée émancipatrice) constituent un élément central qui est quasiment absent chez Alain Blanc. 
	Ceci étant posé, que dire des exceptions, quAlain Blanc traite (rapidement), à la manière classique du sens commun, cest à dire affirmant quelles ne font que « confirmer la règle »  ce qui, dun point de vue scientifique, ne nous semble pas dune rigueur à toute épreuve ? Que dire des expériences propres aux situations déchanges entre personnes déficientes et initiés familiaux ou professionnels ? Que dire des socialisations « possibles » et « trouvées »  et de leurs conditions sociales de possibilité ? Que dire des processus de construction dune position dinitié (au sens de Goffman, 1975) ? Que dire, plus spécifiquement, des conséquences du côtoiement dès la maternelle entre enfants non déficients et enfants déficients, chez les uns et chez les autres, tous faisant partie de la première génération dans lhistoire de lécole républicaine qui ait la possibilité de grandir ensemble à lécole ? Enfin, que dire des conditions sociales (et sociopolitiques) de lorganisation et du déroulement de cette expérience inédite ? 
« Une des réponses idéologiques [à cette sorte de présence et dabsence au monde que connaissent les personnes handicapées que Blanc caractérise comme une situation liminale] consiste à élaborer un discours à vocation centripète mais plaqué sur une réalité aux tendances centrifuges. » 
Expliquer (et dénoncer) le caractère idéologique (et son échec presque « génétiquement » programmé) des discours défendant léducation commune au sein dune seule école pour mettre fin à un siècle déducation séparée, en invoquant le produit historique de cette séparation nous semble procéder dune posture qui relève dune idéologie  ou, à tout le moins, dune posture qui tend à attribuer aux processus de socialisation organisant les échanges et leurs économies un caractère fixiste  tout comme ce fut historiquement (et est encore) le cas pour une frange du milieu médical au sujet des personnes déficientes mentales. En prétendant décrire, mais en décrivant sans précautions, on contribue à prescrire, à produire du performatif, et de fait à renforcer le caractère faussement « naturel » (mais véritablement historiquement construit) de ce quon prétend décrire. On habite une tendance à la prophétie auto réalisatrice  celles qui signorent étant probablement les plus puissantes. 
La « tragédie », « linconfort », la « douleur », « lisolement » des personnes déficientes, répondent ainsi dune réalité quil est difficile de contester  mais quil est impossible de généraliser pour autant. En décrivant ces états, ces ressentis, comme résultant uniquement du caractère dinadéquation des caractéristiques de la déficience avec léconomie générale des échanges sociaux telle quelle sest historiquement construite, Alain Blanc contribue à invisibiliser tout ce qui, en sus, participe du caractère dynamique de cette économie, et notamment toute la dimension politique et sociale. Car sil évoque, en passant, quelques exceptions, jamais il ne tisse de liens entre la déficience et les conditions sociales et économiques des personnes qui en sont porteuses. Or au lieu de limiter lanalyse à la place du corps dans les processus de socialisation, au lieu de restreindre le périmètre des raisons de léchec des processus « dinsertion » (selon les termes de lauteur) à quelques prétendus invariants anthropologiques que le modèle de la « liminalité » embrasserait dans son ensemble, il est nécessaire de notre point de vue détendre lanalyse à la dimension politique et véritablement sociologique  dans le sens dune étude des conditions sociales de possibilité des processus de socialisation « trouvée » et « possible » - et linverse. 
A lopposé du travail théorique dAlain Blanc, à lautre bout du spectre en quelque sorte, on trouve les travaux de Charles Gardou, notamment, qui est inscrit dans un mouvement intellectuel qui fonde ses approches sur des prémisses opposées à celles de la pensée de laltérité radicale : léducation et lenseignement communs sont possibles, et souhaitables. 
 
				Linclusion scolaire et ses promoteurs : 
				la matrice dune 
				mutation anthropologique 
« Jean Cocteau se plaisait à dire que « lavenir nappartient à personne ; il ny a pas de précurseurs, il ny a que des retardataires. » Et nous sommes retardataires quand prévaut la logique de la séparation et de la relégation ; lorsque nous considérons les situations de handicap avec une conception protectionniste ; quand nous demeurons pris dans une culture de la standardisation ; tant que laccès à lenseignement des enfants affectés par un handicap reste entravé et que nombre dentre eux continuent à subir des formes de discrimination et de ségrégation. Ainsi, comment, dans le contexte actuel, dynamiser le mouvement inclusif ? Comment revitaliser les structures ? Comment éveiller la conscience de chacun ? (
) Peut-on croire aux effets de moyens nouveaux sans agir en profondeur sur la culture ? » (Gardou, 2006)
	Sortir de la culture de la séparation, ne plus considérer les situations de handicap avec une conception protectionniste, se déprendre dune culture de la standardisation, éveiller les consciences, bref « agir en profondeur sur la culture ». A prendre connaissance de ce texte, titré « Mettre en uvre linclusion scolaire : les voies de la mutation », et qui présente neuf voies à initier pour « rentrer dans cette mutation fondamentale », on comprend à quel point lapproche de Charles Gardou se trouve être en quasi symétrie avec celle de Alain Blanc  le premier faisant vraisemblablement partie de ceux que le second nomme « les idéologues de linclusion ». 
	Tout se passe comme si Charles Gardou, face aux soubassements anthropologiques fondant les effets de la déficience dans les relations sociales (tels que les décrits bien Alain Blanc) avait, en lieu et place du seul caractère constatif du travail dAlain Blanc (et, nous lavons évoqué, également, de notre point de vue, performatif, du fait de la naturalisation qui caractérise son analyse), sétait plutôt résolu à centrer son analyse sur les mesures politiques pouvant contribuer à initier un travail collectif visant à « muter » le rapport que la société entretient avec la déficience et le handicap et les personnes qui en sont porteuses (et victimes). Tout se passe comme si Alain Blanc considérait toute évolution des soubassements anthropologiques comme ne relevant que dune prise de conscience illusoire et vouée à léchec là où Charles Gardou postulait une mutation anthropologique initiée par des mesures dordre politique. Tout se passe comme si cette dernière, pour Alain Blanc, ne pouvait rien, et comme si, chez Charles Gardou, elle pouvait, non pas tout, mais quelque chose. 
Charles Gardou, en France, est une figure centrale de la promotion de léducation inclusive  et ses travaux (anthropologiques) témoigne par ailleurs de préoccupations plus larges, centrées sur le rapport à la déficience, au handicap, à la fragilité, à la « vulnérabilité », entièrement inscrites dans un programme général visant à contribuer à cette mutation. Il est perçu par certains acteurs/agents comme un « idéologue », cependant, une simple lecture de ses écrits montrent rapidement que ça nest pas le cas et que la nuance, nécessaire quand on distingue les principes de leur application au travers dune nécessaire immanence prenant en compte la réalité et lhéritage historique qui la traverse, est bel et bien présente :
« Aussi convient-il de se garder de deux excès : le fanatisme intégratif et le refus d'intégration. Le premier est une façon de nier le handicap : en ignorant la lourdeur des difficultés, on risque de créer des situations physiquement intenables ou psychologiquement traumatisantes, de façon parfois irréversible. Certains enfants, trop marqués par leur handicap, sont justiciables d'aides et d'interventions que l'école ne peut assurer. Des progrès ne sont alors possibles que dans un milieu très organisé et finalisé à la fois sur le plan technique, thérapeutique et pédagogique. Les structures spécialisées n'ont pas pour mission d'organiser une ségrégation, mais de contribuer, par d'autres voies, à l'insertion sociale des enfants et adolescents qu'ils reçoivent. L'autre excès, le refus d'intégration, est une manière de délivrer l'école de ceux qui sont sensés entraver sa bonne marche et de fuir en même temps, sous couvert de motifs pédagogiques fallacieux, ses propres responsabilités face aux plus démunis. » 
 
Mais en dehors du cadre national français, où, nous lavons évoqué, la notion dinclusion est encore très méconnue au-delà des spécialistes et des professionnels, elle sest inscrite de manière beaucoup plus importante dans certains milieux académiques. Cest le cas notamment au Québec, du fait de lancrage canadien des travaux fondateurs de Wolf Wolfensberger autour du principe de normalisation. Dans ce pays, et notamment dans les départements de sciences de léducation, le sens commun savant de linclusion sarticule autour dune affirmation des « valeurs déquité, de respect, dentraide » (Rousseau, Bélanger, 2004), fondant ainsi linclusion scolaire comme une évidence, un allant de soi. Nadia Rousseau (2004) oppose néanmoins la notion dinclusion entendue comme « lapplication de lois et de politiques obligeant à léducation dans un contexte « régulier » » et la notion dinclusion « comme la résultante dune préoccupation humaniste » ; en dautres termes, il y aurait dun côté lévidence morale du principe inclusif « pur » et de lautre la traduction législative de ces principes, quil ne faudrait (à juste titre) pas confondre. 
	A expliciter le « pourquoi  lécole inclusive », les Québécoises Nadia Rousseau et Stéphanie Bélanger pose les éléments suivants, quil apparaît difficile de contester tant ils forment un ensemble consensuel (traduisant bien la position consacrée de la notion dinclusion scolaire au Québec) : 
1- « développer le plein potentiel de tous les membres de la communauté »
2- « pour développer les compétences et attitudes nécessaires au « mieux-vivre ensemble » »
3- « pour miser sur les forces de la collectivité plutôt que sur ses limites » (Rousseau, Bélanger, 2004)
« Cest ce désir profondément humain de voir son enfant grandir avec ses camarades dans des conditions normales qui a mené à la création de lois et de politiques favorisant laccès à lécole pour tous », écrivent-elles encore. 
De notre point de vue nous assistons, dans cette dernière phrase, à une déshistoricisation, outre des véritables ressorts historiques de la consécration de la notion, de ce « désir » parental « profondément humain » : en effet, ce dernier est également un produit dune construction socialement et historiquement marquée  et il nous paraît important de ne pas invisibiliser ce fait. Par exemple il pouvait être, en France dans les années 1950, et dans une frange seulement de lensemble des parents denfants déficients intellectuels, « profondément humain » de souhaiter voir grandir son enfant dans une institution spécialisée (plutôt quà lasile, ou à domicile). Nous avons là, grâce à ces auteurs québécois, la possibilité de formuler la constatation suivante : les parents des années 2000 considèrent comme un droit, prolongement « normal » dun « désir profondément humain », que leur enfant handicapé aille à lécole  seulement, une grande partie ignore lhistoire des luttes parentales qui les ont précédées et considèrent comme des acquis « naturels » des droits dont lorigine historique est masquée. Il est permis de regretter que des chercheurs ne prennent pas acte, même pour un rappel historique bref, de tout ce quimpliquent ces manquements à la rigueur historique. 
Ainsi, pour caractériser les promoteurs francophones de linclusion scolaire, il est possible détablir la typologie (sommaire) suivante :
dans les pays où lancrage notionnel est ancien, on rencontre un sens commun savant qui a une tendance à lunification et à la déshistoricisation. Pour reprendre, appliquée à la notion dinclusion, lanalyse de Francine Muel-Dreyfus concernant le poste dinstituteur, la période d « invention » est close, et tout ce qui la caractérisait a été relégué dans une « boîte noire » (comme disent les sociologues de la traduction). Linclusion scolaire se trouve ainsi travaillée dans un double aspect : ses traductions légales et ses fondements éthiques  mais se trouve de fait très peu remise en cause et globalement acceptée. 
Dans les pays comme la France, où la notion est encore en période « dinvention » et de traduction, le milieu académique se trouve caractérisé par des divergences assez franches : pour les uns linclusion est une idéologie formant une réponse vaine et inadaptée au problème que pose la déficience dans la société, pour les autres elle représente un prétexte historique à une transformation profonde du rapport de la société avec le handicap et la déficience et, dans ce cadre, du système éducatif. 
Il est notable de constater quentre les pôles personnifiés par Alain Blanc et Charles Gardou, le premier rejetant le terme et ce que recouvre linclusion, le second le prenant à son compte et sy appuyant pour penser les évolutions quil juge historiquement nécessaires, il y a des espaces intermédiaires. Notamment celui pris par un sociologue comme Joël Zaffran, qui écrit en 2007 : 
« Finalement, lutilisation du terme dintégration ou de celui dinclusion importe peu. Ce qui compte, cest la capacité de saisir puis de gérer les implications sociales dune demande dinscription dun enfants handicapé à lécole ordinaire ».  
Cette posture (intermédiaire à celle préalablement rapidement décrites) selon laquelle le choix des mots importe peu, est, de notre point de vue, intéressante dans le sens où elle se concentre sur les pratiques et « les implications sociales » des mesures politiques, mais elle semble, en refusant de se positionner, sous estimer la force dimposition des mots et, de plus, imposer une frontière trop nette entre enjeux théoriques (et notionnels) et enjeux pratiques, frontière qui peut devenir tout à fait préjudiciable pour les uns comme pour les autres. Par ailleurs, refuser de prendre position est bien évidemment une prise de position.  
Il y a une tradition théorique qui produit un autre positionnement sur la question de linclusion (et de lintégration scolaire)  ceci sans se positionner à un niveau normatif (pour ou contre), et sans entrer dans les querelles théoriques parfois byzantines sur le sujet de linclusion, mais en restant centré sur les usages sociaux qui sy réfèrent, positivement ou négativement : il sagit de la sociologie conflictualiste. 
				Linclusion scolaire et la sociologie 
				conflictualiste : un processus raffiné
				deuphémisation 
La sociologie conflictualiste est, avec les théories fonctionnalistes et les théories individualistes (de lacteur rationnel), une des trois grandes branches théoriques qui fonde le paysage de la sociologie contemporaine. Le postulat conflictualiste sur les systèmes éducatifs se trouve résumé par Sally Tomlinson (1982)  (elle fait référence aux travaux de Archer, 1979) : 
« Education systems (...) develop their characteristics because of the goals pursued by the people who control them and who have vested interests in their development. (...) [Education systems] change because of debates, arguments and power struggles. (...) Change happens because certain people want it to happen and can impose their views and goals on others. » 
	Partant, le rôle de la sociologie dans les courants théoriques se rattachant à la tradition conflictualiste est de « demystify social processes and social situations ». Néanmoins, en matière de démystification, un point aveugle de la sociologie de la tradition conflictualiste telle que la pratique Sally Tomlinson se trouve particulièrement identifiable à partir de lextrait suivant : 
« Some groups concerned with special education actually have vested interests in structuring debates in particular ways rather than clarifying issues. » (Page 58)
 En effet, à partir du moment où les sociologues semparent de cet objet détude, ils deviennent eux aussi un groupe qui se caractérise par des intérêts spécifiques concernant lenfance handicapée, et un groupe qui a lui aussi des intérêts spécifiques à « structurer les débats dans un sens particulier » plutôt quun autre. Cette critique dévoile un intérêt important de la théorie de Pierre Bourdieu (elle aussi de tradition conflictualiste) qui est linsistance quelle pose en matière de processus dobjectivation  qui manque ici au travail de lauteure. 
Au-delà de ce point, si on ne peut réduire la genèse du champ de léducation spéciale dans les sociétés industrielles aux seules préoccupations humanistes et progressistes (en éludant le caractère de contrôle et de « prévoyance sociale » couplé à lintérêt économique que représentait lapport démographique au sein de la production dune catégorie de la population jusquici non-concernée par lexpansion du salariat moderne), il en est de même pour lémergence du débat autour de lintégration scolaire : 
« Egalitarian distaste for segregating certain groups of children, plus the expend in providing for a growing number of handicapped in special school, had led to an intensified debate on integration, or provision in ordinary school for children formerly categorised out of the school. » 
Sally Tomlinson pose sur cette base une analyse très intéressante, et en quelque sorte en prélude à la reprise par Eric Plaisance dans les années 2000 de la formule de Pierre Bourdieu et Patrick Champagne, les « exclus de lintérieur », rapportée à la situation des enfants handicapés scolarisés en milieu dit ordinaire : 
« The state education system developed over the past hundred years with a safely-valve that of the exclusion of certain children, particularly those from the social problem class, into a separate sub-system. This was originally legitimated by careful categorisation, but now will be legitimated by the rhetoric of special need, even if the exclusion only amounts to the room next door. » 
		Ainsi, les processus dintégration (ou dinclusion), au-delà des principes et des subtilités théoriques fondant telle notion comme nouveau paradigme (daction publique, sans sintéresser outre mesure aux pratiques), peuvent ne faire que perpétuer linvariant de la mise à lécart en lui faisant prendre des formes sans cesse nouvelles. 
	De plus, les politiques autour du handicap, si elles se formalisent différemment et invoquent des justifications différentes, seraient en fait mues par un soubassement politiquement intangible qui se trouve actualisé dans les discours et les dispositifs par le biais de procédés deuphémisation, ce dernier terme signifiant, étymologiquement, « positiver du négatif ». Le centre de gravité commun à ce soubassement anthropologique est, pour Sally Tomlinson, le travail  ou plutôt son accaparement par la classe dominante qui a contribué à le réduire au cadre rétréci et contraignant de lemploi : 
« Until recently, the profit motive in such a society dictated that as many members as possible should be productive and even the defective or handicapped must work if possible. Ainsi, conclut-elle, « the underlying functions and purposes remains. ». 
	Francine Muel-Dreyfus ne dit pas autre chose quand elle écrit en 1983 :  
« La situation de concurrence pratique et idéologique [du champ de léducation spéciale], indéfiniment reproduite au cours du temps, invite les agents à penser les aménagements ou les rénovations comme des innovations fondamentales introduisant des ruptures radicales, alors que lhistoire des institutions conduit au contraire à mettre en évidence une extraordinaire continuité ». (Muel-Dreyfus, 1983)
	En France, ce qui caractérise lusage fait par le législateur de la notion dinclusion nous semble confirmer le caractère opératoire de lanalyse de Francine Muel-Dreyfus  et de la sociologie conflictualiste. Cet usage se trouve en effet inscrit dans un programme politique global organisant le retrait de lEtat de ses fonctions sociales et relevant dune véritable utopie issue dun 
« (
) programme scientifique de connaissance converti en programme politique daction (
) qui vise à créer les conditions de réalisation et de fonctionnement de la « théorie » [au travers dun] programme de destruction méthodique des collectifs ». (Bourdieu, 1998)
	Quand le « discours fort » du néo-libéralisme imprègne jusquaux territoires des politiques scolaires, il apparaît de notre point de vue comme impossible de penser les systèmes éducatifs indépendamment des forces qui tentent de les contrôler et qui les influencent, sauf à souhaiter faire comme si elles nexistaient pas, ou à souhaiter conserver une neutralité qui napparaît comme rien dautre, en létat actuel des rapports de force, que comme une avalisation et un soutien de fait de lidéologie dominante. Ainsi, en matière des pratiques et effets sociaux du traitement social du non conforme scolaire (dont font partie les enfants handicapés, et dont on a vu par ailleurs quils ne se réduisaient pas aux enfants déficients), qui trouvent aujourdhui des conditions de rencontre et de réunion avec le non conforme social au travers de lopposition inclusion / exclusion largement investie et promue par les discours des forces intellectuelles vouées à servir le pouvoir politique, la permanence domine largement le changement, comme le pointe ici Francine Muel Dreyfus. 
	Ceci étant posé, quel regard pouvons-nous maintenant porter, au-delà du milieu académique, sur la réception de linclusion scolaire ? Quen est-il dans les milieux enseignants ?
		2.1.2.2  Les professions enseignantes et linclusion
	Linconscient social du métier dinstituteur
« Linstituteur est donc fortement intéressé à contracter de bonne heure lhabitude dun maintien convenable. Il doit être modeste sans timidité, grave sans affectation, et rien ne disposera mieux en sa faveur quune simplicité affable dans toutes ses manières. (
) Cest principalement en observant et en imitant les personnes dont léducation a été soignée que lon parviendra à éviter les gaucheries qui rendent souvent ridicules ». 
M. Richard, inspecteur de lenseignement primaire : « conseils pratiques aux instituteurs », revue pédagogique, n°4, avril 1881 (Cité par Francine Muel-Dreyfus, 1983)
Dans son ouvrage « Le métier déducateur » (1983), Francine Muel-Dreyfus produit un travail extrêmement intéressant sur les origines sociales du métier dinstituteur et dinstitutrice, esquissant des traits de ce quelle nomme « linconscient social de la profession ». A lépoque de la formalisation du métier, indissociable de la construction de lEcole de la troisième république à la fin du 19ème siècle, elle montre, à partir dun travail remarquable sur des archives dépoque, que les instituteurs et institutrices sont recrutés en majorité parmi les membres de « la petite bourgeoisie, des fractions inférieures des classes moyennes et des fractions supérieures des classes populaires ». 
 Plus vraiment partie de leur catégorie sociale dorigine dont les représentants les voient comme désormais appartenant à un milieu qui leur est extérieur et comme des exemples de mobilité sociale ascendante, mais pas non plus partie de ceux qui ont encore le monopole de laccès à la « haute culture », à la culture légitime consacrée par laccès à lenseignement secondaire (alors queux restent des « primaires »), les instituteurs et institutrices de la fin du 19ème siècle et du début du 20ème  sont dans une position de corps intermédiaire, pris entre ceux qui les ont mandatés pour instruire le peuple et les représentants de ce peuple dont ils sont issus mais dont il ne font plus partie. 
Cette position est proprement incarnée, incorporée, dans ces temps de fondation du poste, par le biais dun « apprentissage dune attitude respectueuse à légard de la culture dominante », dun « juste rapport à la culture », dune « dévotion culturelle », dun apprentissage à « bien utiliser leur temps libre », qui leur permettent de « se soustraire ainsi aux manifestations les plus directes et les plus corrosives du mépris de classe ». Cette nature de corps intermédiaire fonde une propriété de la position ultérieure du poste denseignant primaire qui reste tout à fait opérante aujourdhui.  
Francine Muel-Dreyfus évoque ainsi le « double isolement », social et moral, des instituteurs et institutrices, qui se trouvent « investis dune action civilisatrice quasi-missionnaire par les fractions républicaines de la bourgeoisie pour lassimilation du monde paysan ». Pour ce faire, ils reçoivent une « formation professionnelle qui, à linstar de celle qui marque les prêtres comme des hommes différents, les sépare des parents délèves ». 
« Des lois Ferry à la guerre de 1914, lenseignement primaire est pris dans un système de classement hiérarchisé qui est celui de lécole (le concret opposé à labstrait, les Lettres opposées à la dictée, limposition dune définition péjorative du « scolaire » comme mode crispée de rapport au savoir opposé à laisance culturelle) et qui le rappelle sans cesse à son indignité culturelle ; cest dans ce contexte quil va se doter de sa spécificité définitive, c'est-à-dire dune légitimité culturelle propre, le monopole de la pédagogie. Tout se passe comme si, pour remplir au mieux sa mission, le futur instituteur devait à la fois reconnaître la culture dominante  et les classements quelle impose  comme la « vraie » culture et avoir intériorisé très fortement, dans le processus dinculcation de léthique professionnelle au cours des trois années passées à lécole normale, lidée que la culture quil a acquise est une culture primaire ». 
Nous avons là une des matrices historiques de lhabitus professionnel des enseignants du premier degré : ces propriétés ont fondé le poste et sa position, et favorisé son occupation par ceux qui se retrouvaient en « harmonie » avec lui, c'est-à-dire avec ceux dont les dispositions sociales correspondaient aux caractéristiques objectives du poste naissant dinstituteur. Pour expliquer cette concordance, Francine Muel-Dreyfus évoque :
« Le travail proprement social qui fait que les individus sont amenés à occuper les postes dune façon telle que lidentité sociale imposée par le poste devienne comme une « seconde nature » ». 
Malgré toutes les évolutions, la permanence de ces propriétés dans les caractéristiques objectives de la position du poste denseignant du primaire constitue de notre point de vue une des raisons de la permanence du fait que lintérêt à enseigner à des enfants qui ont historiquement presque toujours été soustraits à leur action est resté et reste encore relativement faible, et que le sens commun du métier consiste à invoquer pour ces élèves non conformes des professionnalités qui leur sont extérieures, étant bien entendu quenseigner à ces enfants ne fait pas partie de leur métier, et quils nont « pas été formés pour ça ». 
Ses conséquences relatives au mouvement inclusif
La culture et le savoir des instituteurs et institutrices, pour « primaires » quils soient, semble ne pouvoir trouver de résonances ni de consécration dans un agir professionnel tourné vers des enfants anormaux ou handicapés.  La dévotion à légard de la culture dominante  notion qui relève également, ainsi que le montre lexergue ci-dessus, de lacception sociologique du terme ,  est incompatible avec labsence de place ou de considération que celle-ci réserve au non conforme, à lanormal, à lirrégulier. 
Il y a là aussi une des raisons qui rend la coopération avec un autre professionnel non enseignant, dans le cadre de sa classe ou de son école, si difficilement pensable et praticable  et ce dautant plus que cette histoire des origines, qui fonde la nature intermédiaire de la position du corps des instituteurs et institutrices dans lespace social, constitue le « refoulé social de la profession », selon le terme de Francine Muel-Dreyfus. Linstituteur est maître de sa classe, et maître dans sa classe. Il na de compte à rendre à personne à lexception de sa hiérarchie, et la mission de lEcole de la République est toute entière incarnée par lui, incorporée lors de sa formation, et ne saurait être divisée : elle reste, tout comme la République, une et indivisible, et fonde ainsi une des caractéristiques du processus de naturalisation de la division du travail éducatif : enseigner nest pas soigner ni éduquer. On ne transmet lethos républicain et les valeurs mythiques qui le sous-tendent (accompagnées dune posture de valorisation du travail et de la docilité face aux exigences du marché de lemploi  puisque les deux sont aujourdhui largement confondus) quà ceux qui peuvent le recevoir ; on ne transmet du savoir que dans le cadre naturalisé du « cursus-type » (enseignement simultané, progression par classe dâge) : à quoi bon les autres, qui sont rétifs (« caractériels », ou « instables », dit-on à lépoque) ou simplement incapables de rentrer dans le rang ?
Un enseignant explique ainsi : « Je ne suis pas si sûr que le mélange de population et donc de problématiques multiples et variées d'apprentissage soit vraiment efficace. (
) L'écart dans les apprentissages, les compétences, le délai d'exécution d'une tâche entre certains de ces élèves et les élèves normaux risque de perdurer ou carrément d'augmenter et devenir franchement insupportable au fil du temps (
) »
	Par ailleurs, la nature de la circulation (politique) de linclusion (qui vient nommer dune nouvelle manière lintégration scolaire des enfants handicapés tout en faisant évoluer léconomie générale des politiques qui se donnent pour tâche de la mettre en uvre), dabord montante, puis descendante, fait que les enseignants français ressentent cette notion, qui plus est très peu utilisée par ailleurs, comme imposée par leur institution  ce qui correspond dailleurs aussi à la réalité. De fait, une partie dentre eux réceptionnent lirruption de la notion dinclusion dans lécole comme un témoignage de plus dune déconnection des « décideurs » davec le « terrain », ce qui permet à Joël Zaffran (2007) décrire :
« Les réactions suscitées par une demande dintégration scolaire indiquent que la loi na pas toujours autorité sur les acteurs et que les valeurs ne suffisent pas à entraîner ladhésion des acteurs. » 
Lauteur de ces lignes sous-estime ici, de notre point de vue, deux éléments, entièrement enracinés dans le fait de refuser de parler d « agents » sociaux. Dune part les processus dincorporation de lhistoire de lenfance anormale par ces agents (qui ne sont pas que des acteurs), partie constitutive de la construction du sens commun à ce sujet, et linconscient social de la profession enseignante ici rapidement balisé, quand les acteurs/agents sont des enseignants. Dautre part, la différenciation très nette dans « les réactions suscitées par une demande dintégration scolaire » selon que le handicap de lélève concerné est dordre physique, sensoriel, mental ou comportemental : il ny a pas de généralisation possible autour du terme « handicap », nous lavons vu, et les prises de position des enseignants à lencontre de linclusion doivent en tenir compte. 
	Et lenseignement spécialisé ?
	Au-delà de ces éléments, il nous semble important de mentionner la situation particulière des enseignants spécialisés (ou en poste denseignant spécialisé) au sein de la profession enseignante. En effet ils sont, parmi la profession denseignant du premier degré, enclins à recevoir la notion dinclusion (telle quelle est utilisée par le législateur) dune manière différente que leur collègues en charge dune classe « banale ». 
Parmi eux, ceux qui ont travaillé ou travaillent dans les classes spécialisées (classe de perfectionnement, CLAD, CLIS, UPI
) le sont encore davantage. Ils sont déjà marqués par une position marginale dans lespace des positions de la profession enseignante, ainsi que le montre ce quexprime cet enseignant en poste en CLIS : 
« Dès que je parle un peu trop de mes élèves à mes collègues, je prends toujours la même phrase dans la figure: "de toute façon s'ils sont en CLIS c'est pas pour rien!" En fait ils ne s'attendent pas à des progrès, ils n'ont pas la même vision de mes élèves que moi. Le pire élève, qui montre un visage angélique, ils le trouvent "mignon, attachant"... Ils changeraient d'avis s'ils l'avaient en intégration ! Et ne parlons pas en inclusion ! Ils ne l'ont qu'en cas d'absence de ma part, et la dernière fois il a trouvé des allumettes et s'est enfermé dans les toilettes pour les allumer; Forcément, surveiller un gamin pareil quand on est seule avec 25 élèves, c'est plus dur qu'à 2 avec 12 élèves... »
	Ces enseignants semblent donc, parfois, au sein même de leur équipe et de leur profession, relégués dans des espaces homologues à ceux que connaissent les enfants avec lesquels ils travaillent. La division historique du travail au sein de linstitution scolaire semble ainsi intériorisée à un point tel que léchange professionnel entre enseignant banal et spécial, ainsi que le montre lextrait ci-dessus, peut prendre rapidement la forme dune fin de non-recevoir : « Sils sont en CLIS ça nest pas pour rien ». Que peut signifier socialement, au-delà dune analyse psychologisante, une telle remarque ? De notre point de vue, elle nest que la sanction logique dun siècle de division du travail au sein de lécole : « les saints laïcs sont là pour les non conformes, ça nest pas mon affaire ». Seulement, ça lest précisément devenu, et tout se passe comme si cette mutation nexistait que formellement, tant les structures mentales dappréciation qui constituent la grille dappréhension des enseignants quant au spécial navaient pas bougé dun iota  voire même sétaient renforcées, tant, pour de nombreux enseignants, la façon dont est menée cette politique (qui permet que des expériences catastrophiques, tant pour les élèves que pour les enseignants, existent, que plusieurs enseignants, sur les forums Internet, appellent des « inclusion sauvages ») les conforte dans lidée que, décidemment, « il y a des spécialistes pour cela ».
Pour ces enseignants en poste dans des classes spécialisées, linclusion est ainsi dabord rapportée à lévolution de la situation institutionnelle de leur propre classe (et poste) et référée aux récentes réformes qui les concerne (CLIS, UPI transformées en Ulis). Cest la division historique du travail auprès des enfants « spéciaux » qui est brutalement remise en cause. De la même manière, ce sont leur « clientèle » (selon le terme de lenseignant spécialisé qui sexprime ci-dessous) qui semble (légitimement) constituer leur préoccupation première  c'est-à-dire un segment du handicap précis, lorganisation des CLIS étant construite sur une classification par type de déficience, ou de handicap.
 « Voici le point de vue d'un obscur instit de base qui a toujours "fait" avec les moyens et les "clients" qu'on lui a refilé. (30 ans de perf, puis maintenant de CLAD (
)). L'enseignement spé a été par certains côté un "laboratoire d'essai" pour des élèves avec qui rien ne "marchait". Ces classes n'ont jamais fonctionné avec les objectifs qui leur avaient été assignés. La réintégration dans des classes normales était le but avoué pour les CLAD, séjour d'un an maxi. Je me suis retrouvé avec une clientèle un peu plus triée qu'en perf après transformation des perfs en CLAD, mais certains élèves avaient des retards de 2 à 3 ans par rapport à la classe d'âge, des "réputations" de pénibles caractérisées... Mission impossible d'un point de vue scolaire et si l'on ajoute les refus de prise en charge psy, ortho etc., des conditions de vie familiales désastreuses... Une vraie catastrophe... Donc ils restent chez moi, 20 à 30% de réintégration avec des résultats honorables. Pour les autres,Je ne suis pas sûr que l'inclusion ou même l'ancienne intégration ne soit pas synonyme d'un bon vieux "vernissage pédagogique" où l'élève est certes là physiquement, mais n'y comprend rien, fait semblant et attend l'heure de la sortie. Pour ces élèves qui ont leur propre rythme de travail, des difficultés de langage, obnubilés par leurs problèmes perso qu'on ne peut pas imaginer qu'ils trouvent leur compte, noyés dans la masse d'une "classe normale". Je ne suis pas sûr que matériellement on puisse les faire travailler "à leur niveau" (individualisation à 25/classe) et je doute de l'efficacité des "aménagements" qui peuvent véritablement masquer (si l'on sait y faire) la réalité du travail des élèves... »
	
Pour conclure : la place centrale de la formation (collective)
	Les enseignants ont ainsi une réaction à lencontre de la notion dinclusion et de ce quelle se propose de désigner qui dépend de plusieurs éléments : 
De linconscient social des postes denseignants (et de la division du travail qui en est constitutive)  et probablement de la connaissance quils en ont ; 
De lexistence ou non dallégeances intellectuelles envers des producteurs académiques ayant travaillé sur le sujet  et, si elles existent, du type dallégeance et du type de production intellectuelle (être lecteur de Charles Gardou ou dAlain Blanc). ;
De leur formation (enseignant spécialisé ou enseignant en classe dite « banale »).
De fait, face aux enjeux (de notre point de vue indissociablement pratiques et théoriques), face aux effets de lhistoire cristallisée masqués par des processus de naturalisation, face aux mutations que la notion dinclusion impose au législateur (ou plutôt face aux mutations que le législateur impose opportunément au nom de linclusion), il apparaît tout à fait nécessaire de ne pas limiter la formation des enseignants aux aspects nécessairement didactiques et pédagogiques mais de létendre à la sociologie et à lhistoire, et notamment de léducation spécialisée. Comme lécrit Sally Tomlinson en 1982 : 
« Teachers have been more concerned with the practical immediate  what to do  than with thinking of the wider goals of special education. » (Tomlinson, 1982).
	Les wider goals of special education ont au moins autant dintérêt pour la construction de pratiques professionnelles que le  practical immediate  et seules lhistoire et la sociologie sont en mesure de fournir des connaissances et des clefs de compréhension en la matière. Néanmoins, si le mouvement (collectif, au sein de la formation) consistant à mettre laccent sur les aspects historiques et sociologiques propres à amener dans le champ de la conscience tout ce qui a fondé le « refoulé social de la profession », selon lexpression de Francine Muel-Dreyfus, apparaît comme tout à fait essentiel,  il est indissociable dune réflexion sur le « what to do » (et « avec qui »), sur les pratiques didactiques et pédagogiques. En effet, ainsi que lexprime bien Laurent Lescouarch (2007) : 
« Si lidée [dinclusion] est séduisante et constitue un indéniable progrès dans lévolution des mentalités, elle est problématique dans le champ des pratiques réelles car la dimension pédagogique concrète de cette évolution reste pour linstant peu explorée. En effet, si des réflexions très riches et intéressantes sur les finalités de linclusion, ses enjeux sociétaux, sont développées (notamment dans le milieu de la formation des enseignants spécialisés), la réflexion strictement pédagogique fait encore figure de parent pauvre dans ce domaine. »
	Tout se passe en effet comme si les responsables des formations professionnelles des enseignants navaient (globalement) pas réellement pris la mesure des transformations quimpliquent les processus inclusifs, comme si les didacticiens (très présents à la fois dans le champ académique des sciences de léducation et dans les IUFM) continuaient à considérer la recherche sur ce sujet comme exclusive du spécial, et poursuivaient leurs travaux sur des segments relativement homogènes du spectre de capacités scolaires des enfants. Tout se passe encore comme si la nouvelle division du travail qui se concrétise au sein des écoles (dans lesquelles le souci des « espèces » denfants anciennement dévolus au « spécial » se trouve dorénavant concerner potentiellement chaque enseignant « banal ») navait, dune part, pas été anticipée et, dautre part, nétait pas encore considérée à sa juste importance. 
	A partir de là, il semble ainsi nécessaire de tenter de clarifier la définition et lusage de la notion dinclusion tant son utilisation est caractérisée par une volubilité importante : pour certains intellectuels, nous lavons vu, elle est synonyme didéologie (forcément) aveuglée, pour dautres elle est potentiellement porteuse dune évolution anthropologique majeure, et pour les gouvernements et les élites dirigeantes, elle sert de caution, derrière des discours avantageusement humanistes et progressistes, à limposition de fonctionnements procéduraux et rigides couplés à une réduction des provisions consacrées à léducation. Parallèlement, en ce qui concerne les enseignants, elle se trouve souvent mutilée dans sa réception du fait des difficultés (dont les expressions sont on-ne-peut-plus légitimes) que font naître les obligations en terme d'évolutions très importantes du fonctionnement quotidien quimposent lusage de linclusion par le législateur. Linclusion se trouve dans ce mouvement ainsi souvent réduite au produit dun unique souci déconomie budgétaire et de casse de lensemble des équipements spécialisés  analyse qui, nonobstant le fait que « réduire » est de notre point de vue très souvent problématique, peut trouver matière à justification. 
Linclusion : proposition de définition
	Ainsi, aborder la question de linclusion scolaire nécessité de distinguer trois niveaux : 
l'espace de sa formalisation intellectuelle, celui des luttes scientifiques (et celles qui se donnent pour scientifiques) pour tenter d'imposer la vision légitime de ce qu'est l'inclusion  y compris la vision selon laquelle cette notion ne constitue quun repaire didéologues.  
l'espace des politiques publiques qui utilisent cette notion. Il est bon de s'intéresser à ce que doit formellement la notion d'inclusion utilisée dans les textes de loi par le législateur à ses définitions académiques, et à quel courant elle fait le plus allégeance, quels intérêts elle sert (intérêts qui peuvent être contradictoires avec les objectifs fondant les processus inclusifs). 
l'espace des pratiques, celui du quotidien des acteurs/agents, qui se trouvent au bout de la chaîne que créé le processus de création législative (lui-même issu de la relation entre les deux espaces précédents), et qui doivent se coltiner les effets de l'histoire riche et épaisse du traitement social (et scolaire) du handicap, sans forcément s'en rendre compte, et qui doivent également appliquer et respecter les procédures produites par les politiques publiques en matière éducative tout en les adaptant à leurs propres conceptions en la matière, à leurs propres inclinations idéologiques ainsi que, surtout, à leur propre tradition professionnelle  pour les enseignants, nous lavons vu, linclusion semble exiger une mutation et un travail importants (pédagogiquement et didactiquement parlant notamment). 
	
	L'inclusion ne prend sens, selon nous, qu'au travers de ces trois entrées, avec lesquelles on doit construire une pensée relationnelle. Nous allons tenter ici de produire une définition de linclusion qui sappuie sur cette nécessité de relation, en évitant raccourcis et amalgames, omissions et réductions.  
		2.2.2.1  Inclusion et besoins éducatifs particuliers : 
			 un couple puissant 
	On ne peut comprendre la notion dinclusion si on fait léconomie dappréhender celle de besoins éducatifs particuliers (on dira ici BEP) ou, en langue anglaise, les « special educational needs » (on dira SEN). La notion de SEN est réputée être apparue pour la première fois dans un rapport (publié en Grande Bretagne en 1978) écrit par Mary Warnock, et qui a servi de base à lEducation Act de 1981, lequel a consacré législativement cette notion. Ce terme a la particularité de conserver le mot « spécial » tout en se posant lobjectif dinstaurer une « continuité entre les élèves avec besoins spéciaux et les autres » : les SEN désigneraient ainsi des besoins situationnels, relevant incidemment dune conception non fixiste et seraient loin dêtre cantonnés à la déficience ou au handicap : 
« Le rapport britannique estimait quenviron 20 % des élèves présentaient, dans le déroulement de leur scolarité, à un moment ou à un autre, de manière durable ou non, des « besoins spéciaux ». » (Plaisance). 
	De fait, le handicap ne constitue quune région des BEP, ces derniers actant une reprise en main de conceptions éducatives au détriment de conceptions médicalisantes historiquement dominantes : 
« Passer du « handicap » au « besoin éducatif spécial (ou particulier) » est conçu comme une « démédicalisation » des questions éducatives, comme une manière de porter spécifiquement attention aux difficultés dapprentissage, quelles que soient leurs causes possibles (déficience, maladie, milieu social etc.), » écrit ainsi Eric Plaisance. 
	Au-delà des enfants handicapés, on trouve donc également, dans la population (scolaire mais pas seulement) concernée par lusage de la notion de BEP ou de SEN, tous ceux qui ne relèvent pas des territoires du handicap mais qui rencontrent des difficultés à rester dans le périmètre des « moyens et biens portants » (notamment en matière scolaire) : 
« Les termes special educational needs ou special needs sont très répandus et sutilisent dans le système déducation et dans la communauté plus large pour parler, dune façon vague, des individus ou des groupes qui sont considérés comme ayant des difficultés dapprentissage ou des problèmes dadaptation aux structures ordinaires. Quand on dit de quelquun quil a des special educational needs on laisse entendre que cette personne a des difficultés dapprentissage ou dadaptation, ou quelle se trouve dans une situation déchec scolaire pour des raisons diverses telles que, par exemple, une incapacité intellectuelle ou psychologique, où des problèmes sociaux ou familiaux. » (Felicity Armstrong, 2009)
	Felicity Armstrong, une chercheuse britannique, nexplicite pas ici où le terme de SEN est « très répandu » ni dans quel « système déducation [il sutilise] ». Nous pouvons néanmoins affirmer ici que cette description, à la différence du monde anglo-saxon, ne recouvre pas la réalité française où la notion de BEP ne connaît pas de consécration législative  même si elle a une certaine faveur dans la frange des milieux académiques qui sintéressent à léducation spéciale et à la scolarisation des enfants handicapés. 
	Constater, sous la plume de Felicity Armstrong, que lusage de la notion de SEN ne se limite pas au cadre scolaire (« 
 dans le système déducation et dans la communauté plus large ») ni, incidemment, à sa population (« 
 des individus ou des groupes (
) [ayant] une incapacité intellectuelle ou psychologique, où des problèmes sociaux ou familiaux »),  nous montre à quel point cette notion, désormais vraisemblablement naturalisée dans les pays anglo-saxons qui lont adopté, était bien faite pour rencontrer celle dinclusion  qui étend elle aussi ses territoires, nous lavons abordé, du scolairement au socialement non conforme. 
Sally Tomlinson affirme en 1982 (soit à peine un an après lEducation Act, et trois ans après le rapport du « Warnock committee ») que cette nouvelle catégorie, qui prétend englober tout à la fois les enfants statutairement reconnus comme handicapés et ceux qui rencontrent des difficultés dapprentissage à lécole (pour de toute autre raison quune déficience ou un handicap) est propice à entretenir la confusion faisant des enfants en difficulté scolaire des enfants potentiellement handicapés et, par extension, que les enfants des groupes sociaux les plus dominés soient considérés par essence comme handicapés (mentaux, sentend). 
« There is no educational argument for the continued conflation of normative [Blind, deaf, epileptic, physical handicap, severe types of mental handicap, NDR] and non-normative categories [feeble-minded, educationally subnormal (ESN), maladjusted, disruptive]. (...) Notion of special needs is likely to intensify the confusion. » (Tomlinson, 1982)
De notre point de vue, ce risque est dautant plus grand que la catégorie quelle nomme non-normative se trouve composée, au moment où elle écrit (1982), et comme le montre plusieurs enquêtes quelle mentionne (dont une des siennes datant de 1981), dune majorité denfants issus de la working class et de limmigration danciens pays du Commonwealth. 
De manière plus prosaïque, et relativement à une perspective moins centrée sur les problématiques de la domination sociale, Eric Plaisance écrit en 2010 : 
« Si des politiques et des pratiques déducation inclusive peuvent avoir un sens, elles ne peuvent se limiter à une population ciblée comme spécifique, au risque dinstaurer de nouveaux clivages. Elles ne peuvent sétablir sur une nouvelle dichotomie entre les « normaux » et ceux qui présenteraient des « besoins éducatifs particuliers ». La diversité du public scolaire est la réalité quotidienne et la formation pédagogique à cette diversité devrait devenir la règle. De ce point de vue, il demeure plus que jamais nécessaire de demeurer vigilant contre les paresses de la pensée, contre les tentations des « bonnes pratiques » qui peuvent instaurer de fallacieuses nouvelles normes et empêcher la recherche assidue de linventivité. » 
	En France, le concept de besoins éducatifs particuliers na pas trouvé décho tel quil a pu en trouver dans les pays de langue anglaise. La consultation du site du gouvernement  lecture qui est une occasion et une manière de senquérir de lhistoire officielle que se donne linstitution scolaire  en donne quelques arguments, notamment le suivant, 
	
« Cette notion est aujourdhui retenue par plusieurs pays (Grande-Bretagne - Canada (Nouveau Brunswick)- Italie). Mais volontiers extensive et globalisante, elle couvre généralement une large échelle de  handicaps  (ou de difficultés dapprentissage - Learning disabilities) dont lorigine tient autant à des critères socioculturels quà des critères sanitaires. Cette notion, en labsence de définition précise, constitue une catégorie aux contours très flous, ayant pour conséquence de faciliter une gestion globale de léchec scolaire, quelle quen soit la cause, au risque majeur de diluer les problèmes liés spécifiquement au handicap. » 
	Cette crainte de voir se « diluer les problèmes liés spécifiquement au handicap » est vraisemblablement bien réel, et notamment lié au poids économique (et symbolique) du champ associatif du handicap. 
	Au-delà de cet aspect, il est possible de constater, notamment au travers de la lecture dun débat parlementaire sur le bilan de la loi n°2005-102 du 11 février 2005, un attachement fort à la notion de handicap, résumé par exemple par cette intervention (marquée dune conception fixiste et anti-environnementaliste du handicap) du sénateur Paul Blanc (qui est médecin) : 
« Je regrette que l'on reprenne le débat sur la définition du handicap, qui est avant tout un état. Améliorer l'environnement ne change rien à celui-ci : conservons donc la définition réaliste et complète élaborée en 2005. Notre société doit faire face à la réalité. »
	Le caractère de fixité attribué ici au handicap et le rejet de toute approche environnementale pour lappréhender (c'est-à-dire le refus de considérer quil puisse sagir également de matrices autre que seulement internes et spécifique à lindividu concerné) permet, une fois déplacés et appliqués aux catégories sociales dominées, un gain très net pour les classes dominantes : comme les handicapés, les pauvres (et les très pauvres) le sont par nature et pas pour des raisons politiques (environnementales) ; de plus, il ny a rien à attendre en matière dévolution de ce qui est « avant tout un état ». De fait, en matière de handicap comme en matière de pauvreté (et de souffrance sociale), « notre société doit faire face à la réalité ». 
	Autant déléments qui forment, de notre point de vue, une partie tout à fait majeure de linconscient social de ceux et celles qui occupent des positions de pouvoir, notamment ceux concentrant des capitaux symboliques et économiques  « lélite politico administrative » selon le terme de Patrick Guyot (2000).
	Si nous revenons sur la question spécifique de sujet, à savoir lespace scolaire, nous pouvons nous rendre compte que le couple inclusion / besoins éducatifs particuliers (que lon rencontre majoritairement dans la plupart des publications et/ou communications savantes sur le sujet) impose de ne pas réduire la politique inclusive et les pratiques qui sen déduisent (ou sen réclament, ou qui sy inscrivent) à la seule question de la scolarisation des enfants handicapés. Le pays de linclusion concerne de fait lensemble des régions de la non-conformité scolaire, ainsi que nous allons dès à présent pouvoir le constater. 
La question de lhétérogénéité
« In school, pupils should be able to meet and respect the diversity of population which they will meet and respect in society. » (Thomazet, 2010)
Cette incise, qui est un postulat éthique, est bien faite pour introduire la notion qui est un corollaire à tout ce quinduit le couplage « inclusion / BEP », à savoir la question de lhétérogénéité. En effet, si nous voulons définir les points communs des enfants concernés par la notion dinclusion, nous nous rendons assez vite compte quil ny a guère moyen de dépasser les deux critères suivants : 
la variabilité inter et intra individuelle, y compris à lintérieur de catégorie commune (comme celle de handicap  et les autres qui la composent , ou de difficulté dapprentissage  et ses déclinaisons). 
la non-conformité face au « cursus-type », produit historique contemporain constitutif de lécole républicaine, et caractérisée par les deux éléments que sont la progression frontale et lorganisation par classe dâge (Daniel Calin) 
Pour faire comprendre ce que recouvre la notion dinclusion, et pour bien acter du fait quelle subsume le handicap et les difficultés scolaires de tout ordre que ce soit,  intéressons-nous à ce que Maria Kron (2010) définit à propos de la notion dhétérogénéité. Elle expose ainsi les « aspects de lhétérogénéité » :
la langue
lorigine ethnique
la religion
le niveau socio-économique de la famille
la culture des familles
le sexe
le handicap 
Elle ajoute, pour se départir dune position, qui pourrait lui être prêtée, relative à la full inclusion, que « le concept de la diversité chez les enfants ne veut pas dire (
) nier des théories de développement ou de socialisation qui se réfèrent au concept de « développement normal » ayant une validité universelle. »
Elèves handicapés mais aussi élèves dits intellectuellement précoces (usuellement désignés par lacronyme EIP), élèves avec des troubles dapprentissage divers avec des origines divers (culturelle ou linguistique comme les primo arrivants ou les enfants tziganes, sociales comme les enfants « héritant » de la relation distante et problématique de leurs parents avec linstitution scolaire, etc.), sont autant délèves qui sont concernés tout à la fois par la notion de besoins éducatifs particuliers et qui relèvent, selon les chercheurs qui travaillent et promeuvent cette notion, de pratiques inclusives destinées à construire une école inclusive. 
Derrière cette notion dhétérogénéité des classes  et de sa prise en compte  émerge également celle qui veut que les principes de lécole inclusive puissent être bénéfiques pour des élèves a priori non concernés par linclusion :
« Although these issues most often concern pupils with significant or severe disabilities, they present an opportunity to help those who experience ordinary difficulties (
), and those for whom resources are often limited. » (Thomazet, 2009)
En clair, les éléments des réponses éducatives fournies peuvent correspondre à des besoins éducatifs pour des enfants qui nont pas besoin dêtre catégorisés médicalement ou socialement pour en bénéficier. Des recherches ont ainsi montré que certains dispositifs différenciés pouvaient tout aussi bien être utiles pour des élèves pour lesquels ils nétaient pas destinés, comme par exemple ici avec la lecture :
« With regards to reading, the support will be different for pupils assessed as having difficulties of a dyslexic nature even though certain resources can be useful for other pupils whose reading difficulties as cultural or social in origin. »(Thomazet, 2009)
Ces dispositifs, ou situations, sont caractérisés par les didacticiens comme étant « robustes », c'est-à-dire que bien quelles proviennent de réflexion visant à répondre à des besoins spécifiques, elles savèrent être opérantes avec lensemble des élèves, constituant même parfois un progrès général (ou une façon de plus ayant prouvé son efficacité dans certaines conditions) dans la façon de construire des dispositifs didactiques. La robustesse de certaines situations didactiques peut ainsi constituer une des réponses aux difficultés (bien réelles) nées des nécessités de prise en compte de lhétérogénéité  et notamment des besoins propres aux enfants catégorisés comme handicapés. 
		2.2.2.3  Une lutte pour les droits
Un des fondements du mouvement porté par linclusion (et, au-delà des notions qui se proposent ou sont proposées pour incarner les principes, de lopposition fondamentale à lidée selon laquelle « ségréguer [est incontournable] pour maximiser l'efficacité du processus enseignement-apprentissage ») se trouve dans la notion de droit. En effet, malgré tous les problèmes que pose lintégration et a fortiori linclusion en termes de fonctionnement des classes, de pratiques pédagogique, de recherche en didactique, de remise en question des missions que se donne linstitution scolaire (et notamment vis-à-vis de ses relations avec les exigences dun marché du travail dont la nature, soumise à lidéologie néo-libérale, se trouve naturalisée), il existe bien peu voire pas dacteurs/agents pour contester le fait que « lidée est belle », et juste. 
Cest quil est éclairant de reporter le mouvement consistant à « banaliser » la population scolaire jusquici spécifiée (et ségréguée) à celui qui a caractérisé le mouvement pour les droits civiques des noirs américains aux Etats-Unis  et ce dautant plus que ce dernier a ouvert une brèche dans laquelle se sont engouffré chercheurs et militants.  Ainsi que lécrit Raymond Vienneau : 	
« [Aux Etats-Unis dans les années 1960], certains parents et certains professionnels de l'éducation s'opposeront à cette ségrégation institutionnalisée [les classes et institutions spéciales]. Parmi les arguments avancés, on fera remarquer qu'un très haut pourcentage d'élèves fréquentant les classes spéciales pour élèves affichant une déficience intellectuelle légère (Educable Mentally Retarded ou EMR) proviennent de milieux socio-économiques défavorisés ou de groupes ethniques minoritaires. Aux États-Unis, Dunn (1968) estime qu'environ 60 % à 80 % des élèves placés en classes spéciales proviennent de milieux sociaux défavorisés et sont pour une bonne part des enfants noirs, mexicains et portoricains. Bien que tel ne soit pas leur objectif, les classes spéciales entraînent une ségrégation sociale et raciale qui constitue une violation du cinquième amendement de la Constitution américaine. »  
	
	Ainsi, dans les segments du handicap que Sally Tomlinson définit comme les catégories « non-normative », et notamment au sein de la catégorie française de « débilité » (correspondant peu ou prou aux « feeble-minded » anglais et aux « educable mentally retarded » états-uniens) que Jacqueline Gateaux-Mennecier (1990a) a défini comme une « construction idéologique », on retrouverait une majorité denfants issus de catégories sociales dominées (enfants de migrants, enfants des classes populaires). Mais nous pouvons ajouter que, de la même manière que pour les noirs américains des Etats-Unis, les processus de ségrégation sont patents pour toutes les personnes relevant de la catégorie « normative », c'est-à-dire atteints dune déficience (physique, sensoriel ou mentale sévère). 
	Nous pouvons ainsi lire le mouvement inclusif et la consécration du « droit » à la scolarisation des enfants reconnus comme handicapés comme un mouvement homologue à celui de la lutte pour les droits civiques des afro-américains. Une grande partie de la population blanche américaine des états du sud des Etats-Unis vivait dans l'évidence de la nécessité de la ségrégation, l'essentiel de leurs représentations étaient impensées car fondées sur une socialisation ségréguée. Malgré les différences, cette lecture est, nonobstant le caractère inaliénable du stigmate que constitue la déficience, de notre point de vue bonne pour faire comprendre ce qui se joue actuellement  et bonne également pour faire prendre conscience aux parents denfants handicapés et aux personnes handicapées de ce qui se joue dhomologue en terme de lutte proprement politique entre leur situation actuelle et celle dautres groupes sociaux en proie à des processus de domination sociale. 
Seulement, nous pouvons le constater, il y a là un sujet étonnamment laissé en friche dans le travail des sociologues de l'éducation : les travaux sur la ségrégation et la reproduction sociale de l'école (phénomènes actuellement encore incontestables) ont été et sont encore nombreux, mais les travaux sur la ségrégation (et sa reproduction) des enfants handicapés (et sur l'objet dans l'objet que constitue les processus de dénomination des ces enfants) n'existent quasiment pas. 
« Despite claims of objectivity, sociologists are often as much influenced in their choice of studies by prevailing ideologies as anyone else, and accept the treatment of certain social groups as natural, and therefore unworthy of study.  » (Tomlinson, 1982) 
	Ce que pointe ici Sally Tomlinson, cest le fait que les sociologues ne sont pas épargnés par les processus de naturalisation de lordre social ou, en loccurrence, de lordre scolaire : en 1982 en effet, très peu voire pas de travaux sociologiques portent sur la partition des systèmes éducatifs industriels entre « normal » et « spécial ». Il semble que cette critique soit encore très largement valide aujourdhui, en particulier dans le contexte français de la sociologie de léducation, ou des sciences du même nom. 
Et il est facile (car consistant en une position qui sapprête de toute la force de lévidence) de dire aujourd'hui, comme semble le faire Alain Blanc par exemple, considérant le produit historique qu'est notre école, construit contre (car sans) les enfants qu'elle tente aujourd'hui de réintroduire dans ses filières « ordinaires », que l'intérêt de ces élèves est de recevoir une éducation à part, puisque l'école n'est « pas faite pour eux ». 
	
	Lémergence de linclusion est ainsi potentiellement une occasion historique à saisir pour historiciser les luttes sociales autour de lécole, ce qui les relie entre elle, et également pour historiciser lécole au travers dune approche qui intègre à lapproche historique les éléments de la sociologie. 
		2.2.2.4  Une occasion dhistoriciser lécole 
« Face à limportance du nombre de retard scolaire », écrit Catherine Dorison en 2008 à propos des années 1950 en France, « quelle est la responsabilité de lécole ? Comment lécole peut-elle se réformer ? » 
Sans répondre directement à ces questions, elle donne deux conditions sociales de possibilité pour que de telles interrogations puissent seulement exister : 
« que la réussite du plus grand nombre soit un enjeu fondamental » (ce qui renvoi à une conception de la démocratisation qui nest pas la plus partagée dans les années 50)
« que cette réussite soit possible, ce qui relève dune conception éthique sur léducabilité et dune conception psychologique donnant une définition dynamique de la catégorie daptitude ». 
Nous pensons que les problématiques actuelles autour de linclusion scolaire (en tant que notion dépassant le simple cadre de la scolarisation des enfants en situation de handicap) ont une parenté directe avec ce que dégage ici Catherine Dorison à propos des conditions de possibilité de questionnement relativement à léchec scolaire dans le contexte français de « démocratisation » de lenseignement. Son analyse renvoie directement à celles de Foucault et la notion dépistémè : les conditions de possibilité de lémergence tout à la fois de notions, didées et de questionnements politiques afférents sont directement conditionnées par la contexte général des connaissances et représentations des connaissances dune société donnée à un moment de son histoire. 
A propos de Wolfgang Amadeus Mozart, Alain Blanc écrit : « Il meurt pour deux raisons : son individualisme musical le détourne de la musique et des relations de cours ; ses uvres ne peuvent se déployer au sein dune autre configuration, le marché, qui nen est quà ses balbutiements. Il meurt car les conditions sociales de sa reconnaissance nexistent pas. Les personnes handicapées sont dans la même situation que Mozart car les configurations existantes ne leur sont pas favorables. » (Blanc 2006)
	La pertinence de cette analyse ne doit masquer les critiques précédemment formulées à lencontre du positionnement dAlain Blanc : trop centré sur les conditions sociales non favorables de la reconnaissance des personnes handicapées, Blanc tend de notre point de vue à essentialiser la « configuration sociale » contemporaine à leur encontre, en occultant notamment les conditions sociales de socialisation « trouvable » ou « réussies », ou de reconnaissance accomplie  dont la négation, ou laffirmation de non-existence, signifierait pour celui ou celle qui laffirmerait une posture ni plus ni moins à caractère raciste. Au-delà de ce manquement au travail dAlain Blanc (par ailleurs remarquable), cest également a minima un questionnement autour des processus de transmission, de diffusion, dapprentissage (socialement permises) dune posture dinitié (donc de personne potentiellement participante à une socialisation possible et accomplie avec des personnes handicapées ou déficientes) qui également absente. 
Nous pouvons conclure en disant donc quil y a une histoire des conditions sociales de possibilité d'émergence du progrès social, que ce dernier est (très) loin dêtre accompli, et que la présence de toutes les personnes handicapées (et déficientes) dans l'ensemble des espaces sociaux de droit commun est un objectif politique noble, partie intégrante dun progrès social, mais qui devient clairement une idéologie quand lhistoire est (volontairement ou non) ignorée et que cet objectif se trouve brandi comme une nécessité impérieuse quil est nécessaire dappliquer de gré ou de force. De ce point de vue, la full inclusion est ni plus ni moins quune utopie, dans le sens où elle postule la mise en place dune réalité déshistoricisée basée sur lillusion de la table rase et sur le refus de composer avec les héritages historiques. 
Il apparaît ainsi nécessaire deffectuer un travail d'identification des conditions sociales de reconnaissance et daccomplissement du droit à la scolarisation des enfants concernés par cette unification du public scolaire, et des possibilités de son application. Il sagit là dun véritable positionnement épistémologique que nous affirmons ici avec force : travailler, au contraire, dans loptique (plus ou moins consciente) de prouver, à laide de la science et avec sa caution, linanité du principe de scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire revient à accepter la naturalisation de lordre scolaire tel quil sest constitué au cours de la (jeune) histoire de lécole républicaine en France, ce qui constitue de notre point de vue une erreur scientifique majeure. 
Les AVS-i dans le processus inclusif
	Sans prendre de lavance sur un sujet (la position et la nature du poste dAVS-i) qui va être développé dans le chapitre 3 suivant, et sans prétendre fournir un cadre explicatif fini, il est possible de développer ici, concernant le poste dAVS-i, quelques remarques relatives aux éléments ci avant développés sur le sujet de linclusion
	En effet, aux vues notamment de lanalyse proposée sur le sujet du « refoulé » et de « linconscient social de la profession » dinstituteur et dinstitutrice, il est possible de considérer le poste daccompagnant scolaire des enfants handicapés comme une sorte dexternalisation des mutations (plus ou moins consciemment) refusées par la profession enseignante en matière de scolarisation des élèves handicapés dans des classes « ordinaires » ou « banales ».  De ce point de vue, les AVS-i, ainsi que la forte demande enseignante à leur propos, seraient en quelque sorte le symptôme du retranchement de la profession sur un périmètre limité de leur potentiel professionnalité  limitation qui est encore plus grande pour les enseignants du secondaire, qui seraient encore plus concernés que ceux du premier degré par le refus de voir leur métier évoluer (du fait notamment des effets de la « secondarisation » de lenseignement secondaire). Cette analyse accréditerait la vision selon laquelle les processus inclusifs législativement traduits buteraient sur les difficultés nées dune mise en application trop rapide et brutale, dune quasi absence de prise en compte des héritages historiques en matière de division du travail au sein de lécole et dune tradition de formation des enseignants qui, rappelons-le ici, nautorise pas dautres personnes que celles titulaires du CRPE à participer à la formation. Néanmoins, pour éclairante que puisse être cette interprétation, nous refusons ici de nous en contenter et dy réduire les explications se proposant de rendre intelligible le poste dAVS-i. 
	Il est possible par exemple de lire la situation des AVS-i dun point de vue plus anthropologique, en sintéressant notamment à la notion de « « entrepreneur de moral », développée par Alain Blanc en 2006 :
« Véritables gardiens du temple de linteraction quand celle-ci vient à faillir, ces professionnels, garants assermentés et légitimes de lordre social, disposent de multiples compétences pour aider le stigmatisé à se ré-inclure dans le flot qui la exclu. »
	Au-delà du fait que les AVS-i ne sont officiellement pas de professionnels et que les occupants du poste de loccupent généralement pas assez longtemps pour prétendre avoir construit « de multiples compétences », la notion d « entrepreneur de moral » apparaît comme tout à fait opérante pour lire un certain nombre de situations professionnelles des AVS-i. Mais étant donné que lanalyse dAlain Blanc est centrée non sur les territoires entiers du handicap mais sur les déficiences, cette notion ne peut, elle non plus, se prévaloir dune portée heuristique très grande. En effet, parmi les 49 élèves accompagnés par nos six AVS-i, seuls 11 enfants (soit 28%) peuvent avec certitude être présentés comme ayant une déficience (motrice, sensorielle, intellectuelle ou une maladie invalidante)  la part de ceux qui ont potentiellement une déficience intellectuelle constituant une inconnue de notre échantillon, et qui lest dautant plus que nous souscrivons entièrement aux réticences à caractériser fermement la frontière mouvante des « débilités » ou « déficience mentale légère » comme étant réellement, et toujours, de véritables déficiences. 
Par ailleurs, si nous nous reportons à la sociologie de la traduction (et à lanalyse quelle nous a permis de faire de linclusion en tant quobjet notionnel), il est intéressant dobserver que Madeleine Akrich a développé la notion de « délégation morale » pour décrire un : 
« (
) dispositif mis en place par le concepteur afin de lui permettre de garder à distance le contrôle sur le comportement moral de ses utilisateurs ». (Akrich, 2006).
	Les utilisateurs de linclusion (entendue comme la traduction spécifique quen a fait le législateur français), à savoir en premier lieu (et dans le cadre de la classe) les enseignants et les enfants, seraient ainsi soutenus dans le quotidien par les AVS qui seraient les récipiendaires de cette « délégation morale » bien faite pour permettre, outre un « comportement moral » adéquat a minima des utilisateurs, que lélève accompagné ne souffre pas trop du processus de scolarisation au sein dune école qui na guère modifié son fonctionnement (historiquement construit sans et contre lui) pour laccueillir. Le « contrôle » du concepteur (de la traduction des principes inclusifs, c'est-à-dire le gouvernement, dont la majorité dont il est issu tient le crayon du législateur), trouverait une forme accomplie au travers de la célébration du « dévouement » des personnels AVS-i qui ne pourraient faire autrement que de sacquitter aussi bien que possible de leur travail  c'est-à-dire, dans les conditions actuelles, forcément en ne faisant quéviter le pire, c'est-à-dire en contribuant à reproduire des formes sophistiquées de ségrégation, marquée tant sur le plan relationnel que sur le plan pédagogique. Ici, encore une fois, les limites de lanalyse apparaissent rapidement, au-delà de lintérêt que recèle lusage de la notion : les difficultés posées par la transposition de lobjet technique (sur lequel est initialement centrée lanalyse de la sociologue) à lobjet notionnel, ne permettent pas de construire un modèle satisfaisant dappréhension. 
	Par ailleurs, il apparaît important de signaler que les AVS-i, au regard de ce qui définit le public concerné par linclusion, ninterviennent a priori que sur le segment de celui-ci qui regroupe les enfants concernés par la notion de handicap. « A priori », écrivons-nous ici, car nous souhaitons formuler des réserves sur le fait que lensemble des élèves concernés par la catégorie handicap (et relativement à la définition quen donne la loi de 2005) soient réellement des enfants handicapés  ce qui, si ceci savérait fondé, obligerait à reconnaître que le poste dAVS-i est plus lié aux processus inclusif que ce quil semble formellement. 
	Ce point de vue pousse à questionner la pertinence de la restriction du périmètre dintervention des AVS-i aux seuls élèves reconnus comme handicapés. En effet, ainsi que lexprime Pascal ci-dessous, certains de ces élèves peuvent tout à fait bien présenter, en dépit de leur handicap, moins de difficultés proprement scolaires que dautres, qui eux ne bénéficient de rien : 
Pascal : (
) il faudrait du personnel qui soit plus globalisé sur une école
 aider globalement sur une école, et pas forcément
 le problème dAVS-i cest que si un enfant est catalogué comme handicapé il peut avoir un AVS-i, il peut avoir de laide
 et le nombre de fois où jai vu, dans des classes, des enfants qui étaient beaucoup plus en difficulté que lenfant que jaccompagnais, mais lenfant beaucoup plus en difficulté nétait pas catalogué comme handicapé, donc navait pas ces aides-là, à un moment donné on se dit que cest quand même violent quoi
 (Page 42-43)
	Relativement à la question économique développée dans ce chapitre, et limposition aux postes des logiques propres à une politique néo-libérale qui tend à individualiser tout rapport au travail (les AVS nont aucune structure ou organisation collective) et à empêcher au maximum toute émergence de quelque chose de collectif (la faible durée doccupation du poste interdit toute construction allant dans ce sens), nous pouvons noter ce que nous dit ici Cécile et Pascal à propos dun poste pour lequel ses occupants ont rémunérés environ 600 euros en moyenne, et quils ne peuvent occuper, selon les contrats que de quelques mois à six ans maximum. (Notons au passage que les conditions demploi nempêchent pas Cécile daffirmer aimer son travail et le présenter comme « passionnant », ce qui accrédite le fait que le contrôle des occupants du poste passe par autre chose que par des avantages qui seraient liés aux conditions de son occupation) :
Cécile : (...) être AVS-i, c'est euh... c'est pas bien payé [rires]... l'administration est très chiante, c'est des contrats à la noix... [rires] ... faut pas y aller [rires  qui se prolongent]... 
 
  mais si si, c'est un job qui est passionnant, parce que tu es obligé de t'adapter tout le temps, tu te remets en question tout le temps (...) (Page 42)
G : Parce que toi Pascal. tu es devenu AVS après avoir été emploi-jeune
 et combien de temps tu as été emploi-jeune ? 
Pascal : cinq ans
G : donc ça fait plus de dix ans que tu travailles à lécole, quoi
Pascal : ouais, onze ans, ouais
G : ça compte
Pascal : ouais ouais
 enfin ça compte
 pour qui ? Pas pour léducation nationale, hein
vu ce qui va nous arriver à la fin de lannée
 [Arrivé au bout de ses six années de contrat dAVS AED, Pascal. va être remercié. NDR] (Page 29)
Linclusion dans son versant scolaire est une notion qui ne connaît pas de consensus, ainsi quoblige son statut de notion en « période dinvention », et qui na pas encore, du fait de sa très récente introduction dans le corpus juridique français (2009, pour les CLIS, 2010 pour les ULIS, ex-UPI), rencontré beaucoup dintérêt dans les milieux académiques. Pourtant, sa nature particulière en fait un objet de recherche tout à fait intéressant, au sens où elle se retrouve, ainsi que nous lavons montré dans la partie précédente, bien au-delà des murs de lécole. 
Au sein de celle-ci elle concerne, bien au-delà des seuls élèves reconnus comme handicapés, lensemble des élèves présentant, à un moment ou un autre de leur scolarité, des besoins éducatifs particuliers, notion qui a la particularité de former avec linclusion un couple notionnel complémentaire et puissant. Cependant, les BEP ont été en France écartés de toute consécration législative au profit du maintien du terme de handicap qui garde ainsi, malgré le fait que ses territoires ne concernent quune partie de la géographie de linclusion, une prééminence importante dans lappréhension de cette dernière  ce qui tend à ce quen France ces deux notions soient entièrement confondues dans une perspective assimilant linclusion aux seuls processus de scolarisation des enfants handicapés. 
 « Lélève handicapé trouble lordre scolaire » écrit Joël Zaffran en 2007. La présence de lAVS-i peut être lue également comme un trouble  leur conjugaison dépassant les seules considérations didactiques et pédagogiques, par ailleurs sorte de point aveugle (et parents pauvres) des recherches autour de linclusion scolaire. Mais cette présence dun personnel non enseignant dans les classes peut aussi re-légitimer lordre scolaire dans ce quil a de plus conservateur : toutes les situations où lAVS est littéralement aux ordres denseignants qui peuvent profiter de la présence dun personnel dont la mission est entièrement tournée vers lindividualisation de laide (pour un seul élève spécifié) pour se défausser de la nécessité du processus de création et dinnovation didactique et pédagogique en reléguant lAVS à la « garde » unique et strictement personnelle de lélève visé par la mesure daccompagnement, contribuant ainsi à produire des mécanismes sophistiqués de ségrégation à lintérieur même de lespace scolaire, avec tous les atours de « lintégration » ou de « linclusion. ». Cette réalité potentielle vient confirmer les analyses des sociologues conflictualistes pour lesquels les processus inclusifs ont tendance à ne faire que reproduire, sous des formes euphémisées, des phénomènes de ségrégation interne à lespace scolaire. 
Il apparaît ainsi nécessaire de sintéresser plus avant au poste dAVS-i, à partir (notamment) de lhypothèse selon laquelle loccupation du poste par un agent qui habite de manière relativement autonome la définition de la « bonne occupation » de son poste détermine le degré de subversion de lordre scolaire ; et inversement, plus lagent qui occupe le poste est soumis à dautres volontés que la sienne pour définir la « bonne manière » doccuper son poste (et donc sa position dans la classe), moins sa présence risque dêtre problématique à lenseignant, qui est le plus souvent celui ou celle qui va définir et imposer sa vision de ce que cest dêtre « un bon AVS », et parfois au détriment dun processus inclusif, et au profit de formes de relégation spatiale et interactionnelles. 
Cest finalement une tentative desquisse des conditions sociales doccupation du poste et les effets différenciés qui en découlent que nous allons maintenant aborder avec le troisième chapitre. Après avoir caractérisé dans le chapitre 2 linconscient social du poste dun des premiers partenaires () de lAVS quest lenseignant, nous allons tenter au préalable de définir linconscient social inscrit dans le poste dAVS-i, que seule son histoire spécifique peut nous permettre dappréhender. 
Chapitre 3 :		Position et propriétés du poste dAVS-i
Linconscient social du poste dAVS-i
			
Léducation spéciale contre léducation scolaire : un contentieux historique ?
	
« [Dans le milieu de léducation spéciale],  si la confiance dans léducabilité de lenfant est globalement partagée avec le monde scolaire, à lEducation nationale persiste tout de même une forte ambiguïté entre instruction et éducation. » 
Michel Chauvière (1999)
3.1.1.1 Aux origines 
	Les fondements idéologiques de lécole républicaine sont inséparables de leurs conditions démergence, caractérisées notamment par des traductions politiques de théories se pensant comme scientifiques comme leugénisme et comme ce qui a été plus tard défini comme relevant dune forme de « darwinisme social » (Gateaux-Mennecier, 2000) et par la prégnance du positivisme, « composante majeure de la pensée républicaine de lEcole » de lépoque, ainsi que lécrit Pierre Kahn (2000). En ce sens, ils sont habités du même paradoxe qui anime lensemble de luvre législative autour de la question sociale sous la troisième république, en particulier avant 1914 : la volonté affichée par les responsables politiques de permettre à laction de lEtat détendre le principe dégalité, de pourvoir à linstruction de tous les enfants, se trouve doublée des effets du recrutement social homogène des élites politiques : prévoyance sociale et tendance à organiser la société en fonction des intérêts industriels. Nous pouvons peut-être voir dans le couplage « intentions déclarées pour mener une politique / effets de la mise en uvre de cette politique » (modèle auquel il conviendrait dajouter, en guise de trait dunion, la nature matérielle et les moyens donnés à cette politique, rapportés à ses objectifs déclarés), une des origines des divergences, plus ou moins enracinées idéologiquement, des controverses toujours actives que nous avons déjà évoquées, notamment sur le sujet du caractère intrinsèque de progrès ou de volonté de contrôle social des lois sociales des années 1880-1914. 
En outre, ainsi que lexprime François Dubet (2008), en ce qui concerne la genèse de lécole républicaine, les objets changent mais les structures demeurent : les enseignants, « hussards de la république », répondent à une vocation dont lobjectif est de participer à une conversion des esprits, destinés à devenir ceux de bons citoyens ; lEcole en tant quespace physique se voit sacralisée, et devant être protégé des vicissitudes des réalités extérieures ; enfin, la structure bureaucratique de ladministration de lInstruction Publique connaît également une distribution hiérarchique de la parole légitime et de la maîtrise symbolique des dogmes. Forgée contre lEglise, lécole en a ainsi repris léconomie symbolique. On peut de ce point de vue interroger la philanthropie laïque qui fonde en partie le champ de léducation spéciale comme se trouvant en correspondance symétrique avec le principe de charité des uvres congréganistes, dont il serait une sorte davatar sécularisé. En tous les cas, entre le sous champ scolaire et celui de léducation spéciale naissant, les façons dappréhender les anormaux ne diffèrent que sur le plan des missions que se donnent les institutions, mais répondent vraisemblablement dune même logique. 
En 1932, lInstruction Publique devient lEducation Nationale ; glissement qui nest absolument pas anodin (le ministère a déjà commencé à intégrer à sa tutelle la formation professionnelle naissante), et qui démontre une volonté dunifier sous sa bannière non plus ce qui se résume à linstruction,  mais tout ce qui concerne à la fois la formation et léducation au sens large. Mais le secteur naissant de léducation spéciale, qui est pendant les années 1930 encore dans une période dominée par linitiative privée confessionnelle et la philanthropie, ne sest pas constitué seulement « dos-à-dos » avec lécole. Il sest construit tout à la fois « à la périphérie [des] grandes institutions [scolaire, médicale et de Justice] pour gérer leurs dysfonctionnements », écrivent Patrice Pinell et Marcos Zafiropoulos en 1978. Ils ajoutent : « il ne peut donc se développer que si ces derniers se perpétuent ». Lanalyse mériterait un développement, mais nous pouvons dores et déjà constater quen ce qui concerne lécole, elle possède un caractère tout à fait opératoire : cest le plus souvent la possibilité ou non pour un enfant de devenir un écolier ordinaire du milieu ordinaire qui détermine ou pas son orientation vers léducation spéciale
Revient la persistante question, qui anime toutes les publications sur le sujet de la loi de 1909 depuis les travaux fondateurs de Francine Muel, de savoir si lobligation scolaire de 1882 a contribué, en partie ou en tout, à lémergence dune nouvelle catégorie danormaux, à la loi de 1909, et ainsi a contribué à fonder le champ de léducation spéciale. Nous nous sommes déjà positionné sur ce fait, nous rangeant aux côtés de Jacqueline Gateaux-Mennecier et de sa description du phénomène de lémergence de la loi répondant à une « dynamique interactionnelle » combinant les effets de lobligation scolaire et de laction de Bourneville (confère 1.1.1.4). Dans cette perspective, qui ne nie pas linfluence de la scolarisation obligatoire, l« impuissance [de cette dernière] à mener à bien la mission moralisatrice qui lui était confiée » ne peut être que constatée : elle est un fait, puisque linstitution chargée de cette mission (implicite) ne la pas fait toute seule : elle a vu naître dautres institutions chargées de récupérer ceux quelle rejette. (Muel Dreyfus 1980). Ces émergences institutionnelles ont « pratiquement et idéologiquement échappé à lEducation Nationale ». Quelles explications donner à cela ? Francine Muel-Dreyfus en voit une dans le système de relations établi entre la psychologie et lécole primaire, cette dernière sétant organisée selon un « développement spécifique dun univers scolaire et culturel primaire ». Lécole primaire, malgré les évolutions quelle a connues, dont celles induites par la secondarisation de lenseignement, constituerait encore un univers spécifique qui formerait, du fait des relations tissées avec la psychologie scolaire, une des raisons centrales qui fonderaient linstitution scolaire à être intrinsèquement productrice dun public non scolaire qui se trouverait en incapacité de faire partie du périmètre de ses interventions. Il y a ici matière à recherche, de notre point de vue, afin de développer, dinfirmer ou de confirmer cette analyse. 
3.1.1.2 Complémentarité pratique et 
 opposition symbolique 
					
La complémentarité pratique entre éducations scolaire et spéciale, ci avant évoquée, centrée sur la situation des enfants qui soit ne peuvent entrer à lécole soit en sont exclus, se double dune opposition symbolique qui est très puissante. Si ses racines se prêtent à diverses interprétations, sa nature constitue un consensus. Jeannine Verdès-Leroux (1978) cite Régis Lapauw, éducateur et auteur en 1969 dun ouvrage sur sa profession : 
« On comprend évidemment limmense méfiance qui sest développée chez les éducateurs et particulièrement chez les pionniers (
) par rapport à une éducation nationale qui voulait les annexer et dune certaine manière les détruire, pour les intégrer à un système centralisé, tuant ainsi le dynamisme propre à ce secteur. ». 
Elle ajoute : « lentreprise éducative na donc rien à voir avec lécole, et léducateur se définit en permanence contre elle ».  
Cette opposition se décline jusque dans les structures du marché du travail et de la formation professionnelle de léducation spéciale : 
« La tradition veut que le rapport entre le titre et le poste y soit particulièrement lâche et, plus largement, que la valeur des titres attribués par lécole y soit mise en question » (Muel-Dreyfus, 1980). 
Dans une profession au sein de laquelle, jusquà aujourdhui, une conception forte de la vocation guide plus que toute possession de titre lentrée dans le métier, où les qualités humaines se substituent aux qualités scolaires, où les « conformations professionnelles » tirent leur logique productrice dune défiance vis-à-vis du scolaire et de la réussite scolaire (Bodin, 2009), on comprend aisément quau milieu de la période de formalisation des métiers de léducation spéciale, certains membres de lUNAPEI soppose à une formation des enseignants spécialisés quils estiment trop importante, et donc inutile aux vues du travail que ces derniers ont à fournir auprès des enfants des classes de perfectionnement, ou encore que des débats assez vifs aient eu lieu dans cette même période pour savoir si le baccalauréat est vraiment nécessaire pour devenir éducateur. 
Le métier, organisé sur lunité de la fonction éducative calquée sur celle de linadaptation, a ainsi des contours aussi mouvants et flous que cette dernière. Sa nature se trouve ainsi plus déterminée par linstitution qui lemploie que par une réelle unité qui se situerait ailleurs, comme dans la formation. Les postes renvoient à une « infinie diversité des fonctions objectives et une incertitude dans la définition des tâches », à lopposé des postes dont la définition réglementaire est rigoureuse et préalablement définie, comme au sein de lEducation Nationale. Le métier déducateur est donc pensé, et se pense, écrit Muel-Dreyfus, comme un métier « faisant la part belle à linvention et à la découverte ». Lapauw, quand il parle du « dynamisme propre à ce secteur », montre quil pense lensemble du champ de la même manière que son métier, qui lui aussi est pensé comme dynamique, ouvert, fondé sur la créativité, linnovation, le mouvement, à lopposé des tares imputées à la bureaucratie et à ladministration, aux postes délimités et aux missions cadrées, selon un fonctionnement qui concerne, pas seulement mais aussi, lEcole. 
Si les agents/acteurs se pensent et pensent leur secteur de cette façon, il nen reste pas moins que le champ de léducation spéciale possède une propriété qui consiste en une tendance à la « la reconversion, à la rénovation, à la transformation des institutions, des idées, des alliances, des allégeances intellectuelles ». A lopposé, léducation scolaire propose une relative stabilité (qui certes nempêche pas les évolutions, en particulier depuis les années 1980) dans tous ces domaines. 
« Complémentarité pratique et opposition symbolique », conclut Francine Muel-Dreyfus en 1980, empêchent « un dialogue et des alliances de nature politique sur [les formes dencadrement des enfants et adolescents des classes populaires], en enfermant les agents  socialement disposés à se laisser enfermer  dans la défense de positions idéologiques et sociales héritées ». 
Sans prétendre répondre à la question de savoir si la trentaine dannées qui a succédé à lécriture de ces lignes, et en particulier le mouvement dintégration scolaire des enfants handicapés précisément fondé sur une exigence de « dialogue et [d] alliance » entre école et éducation spéciale, a apporté, ou non, confirmation de cette analyse, nous allons tenter de contribuer à esquisser quelques éléments de réponses, quil conviendrait dapprofondir dans un cadre adéquat. 
3.1.2 	De la ségrégation à lémergence de
laccompagnement scolaire 
					
			3.1.2.1  La succession des paradigmes 
Joël Zaffran (2007) expose le déroulement historique des logiques présidant aux actions et orientations du champ de lenfance inadaptée sur le modèle dune triple évolution qui forme un large consensus dans lensemble des travaux sur le sujet, sur lesquels dailleurs il prend appui. On peut ainsi présenter ces paradigmes comme se succédant pour organiser les relations entre éducations scolaire et spéciale depuis la création de lécole de la troisième république. 
					Ségrégation 
A la fin du 19ème siècle, dans lurgence de « poser un contrôle social sur une population pauvre qui risque à tout moment de menacer lordre public », écrit Zaffran, « léducation des jeunes enfants simposent prestement ». La loi de 1909, portée par des spécialistes, émerge en ce sens, et pose la première pierre dune période de ségrégation davec lordinaire. Elle inaugure la distinction entre anormaux dasile et anormaux décole sur la base de leur éducabilité  ou curabilité. La logique de ségrégation est patente pour ceux qui sont déterminés comme incurables, mais existe néanmoins pour ceux des éducables qui se retrouvent en classe ou école de perfectionnement, même si le développement de ces dernières reste faible jusquà la fin de la deuxième guerre mondiale  ainsi que nous lavons déjà évoqué dans le chapitre 1.  
					Adaptation
	Cest la codification unifiante de linadaptation qui va permettre un passage vers une logique adaptative dans laquelle va sinscrire celle de la prévention. Outre la forme étymologique même du mot (lin-adaptation appelle ladaptation), son apparition « permet alors dassigner à chacun deux un même facteur commun et universaliste ce qui, dans une perspective sociopolitique, facilite le diagnostic et le type de soins ». Ladaptation pensée alors est adaptation au travail, et, en ce qui concerne lécole, ladaptation au travail scolaire et ses exigences, dans la perspective dun savoir minimum requis pour une insertion professionnelle. La période adaptative, qui est également celle du rapprochement entre lécole et la psychologie scolaire, voit émerger de nouvelles catégories dinadaptations (ou de dysfonctionnements) scolaires : lensembles des « dys » (dyslexie, dyscalculie, dysorthographie, dysgraphie, dyspraxie, etc.)
					Intégration 
	Cest, nous lavons vu, à la faveur de la loi de 1975 et de ses circulaires dapplication de 1982 et 1983 quémerge la logique intégrative Elle trouve également ses origines en partie dans la critique généralisée des institutions qui a irrigué les années 1970 (lécole, lhôpital psychiatrique, la prison, et également les institutions pour enfants inadaptés). Comme le laisse présager les homologies entre natures et périodes démergence des prévention spécialisée et prévention des inadaptations scolaires, la logique intégrative, qui professe une scolarisation en milieu ordinaire selon des modalités que nous avons déjà évoquées, se redouble au sein du milieu spécialisé dune logique de maintien des liens entre lindividu et son environnement. Les élèves inadaptés étaient auparavant extraits de lécole ordinaire tout comme les enfants ou adolescents objets de mesures éducatives étaient extraits de leur milieu familial ; la logique intégrative vient tout à la fois à lécole et dans les familles imposer un maintien du lien « naturel ». Pour les anormaux scolaires comme pour les spéciaux, on passe ainsi dune « logique de la séparation à une logique de maintien des liens », écrit Jean-Marc Lesain-Delabarre en 2001. 
Cependant, « le concept dintégration », rappelle Jacqueline Gateaux-Mennecier, (1999), « ne peut être pensé indépendamment des processus de marginalisation et de ségrégation qui en ont précédé lémergence ». 
Il convient donc de « relativiser loptimisme » de ceux qui voient dans lémergence de la notion dintégration (avec la loi de 1975 et les circulaires de 1982 et 1983) une « franche rupture avec les éventuelles conséquences ségrégatives dune pathologisation abusive ». A ce propos, elle cite la nomenclature produite par les Ministères de lEducation Nationale et des affaires sociales en 1990, titrée « répartition des enfants et adolescents déducation spécialisée en fonction de leur déficience », au sein de laquelle elle constate lémergence dune nouvelle catégorie, celle de « difficultés scolaires graves liés à des problèmes sociaux ». A la même époque, 86,4% des enfants accueillis par léducation spéciale relèvent soit de la catégorie définie comme « retard mental léger », soit de cette catégorie toute neuve que pointe Jacqueline Gateaux-Mennecier. Selon elle, cette nouvelle dénomination de « difficulté scolaires grave relatif à des problèmes sociaux »  recouvre très probablement « les seuils supérieurs de la déficience intellectuelle légère, [devenue] obsolète ». Ainsi sopère un glissement de notion pour désigner une même frange de population, glissement sopérant sur le modèle des évolutions qui ont fait passer le triptyque idiots/imbéciles/arriérés à celui de débile profond/moyen/léger, et selon une logique qui contribue à « construire des représentations essentialistes » suggérant que « les milieux porteurs de problèmes sociaux sont intrinsèquement handicapés ». Jacqueline Gateaux-Mennecier suggère ainsi que la logique de lintégration telle quelle se présente (« [lutter] contre lexclusion scolaire et les inégalités [est] une priorité nationale », selon les termes de la loi dorientation de 1989) ne correspond pas à sa mise en uvre, qui verse plutôt du côté du maintien de la fonction sociale dorigine de lenseignement spécial, à savoir, à travers un discours à leuphémisation élaborée, « lexpression (
) dune propension à la discrimination et à la relégation sociale ». 
Lémergence de la logique intégrative ne peut donc être perçue seulement comme un progrès, semble bien ne pas se justifier par elle-même et réclame des analyses sur la façon dont sont remplis les objectifs quelle sassigne. Eric Plaisance va en ce sens quand il exprime devoir mettre en doute lopposition « exclusion/intégration » (Plaisance, 1996), qui trouve pourtant nombre dépigones  opposition qui redouble de force, nous lavons vu, quand linclusion remplace lintégration. L « exclusion de lintérieur », selon lexpression de Pierre Bourdieu et Patrick Champagne (1993), désignant initialement les processus de relégation scolaire interne, trouverait aussi une acception pour lintégration scolaire des enfants handicapés.
					Inclusion
Il y a une opposition encore plus forte, plus marquante, que « exclusion / intégration », et cest celle de « exclusion / inclusion ». Linclusion est décrite dans de nombreux travaux comme le paradigme prenant suite de celui dintégration. Basée sur une approche environnementaliste du handicap, la notion dinclusion permettrait déquilibrer les responsabilités des processus de scolarisation des enfants handicapés, jusquici entièrement dévolues aux capacités des enfants à sadapter à lécole telle quelle se présentait à eux. Adossée au principe de non-discrimination, fondée sur celui de droit, linclusion scolaire pose, théoriquement, que cest à lenvironnement accueillant de sadapter également afin doffrir aux élèves et à leurs besoins éducatifs particuliers (notion avec laquelle linclusion forme un couple puissant) tous les aménagements nécessaires, aussi bien en ce qui concerne le matériel que le pédagogique, sur les versants de laccessibilité comme de la compensation. 
La consécration législative de cette notion est le produit dun processus dont nous nous sommes déjà attachés à décrire la logique (chapitre 2). Intéressons-nous ici aux indices les plus récents et les plus visibles de cette évolution dans le cadre législatif français. 
 Une circulaire de 1999 indique par exemple que :
« (
) la scolarisation de tous les enfants et adolescents, quelles que soient les déficiences ou maladies qui perturbent leur développement ou entravent leur autonomie, est une droit fondamental. Tous les jeunes, quels que soient les besoins éducatifs quils présentent, doivent trouver dans le milieu scolaire ordinaire la possibilité dapprendre et de grandir avec les autres pour préparer leur avenir dhommes et de femmes libres et de citoyens ». 
Le rapport dYvan Lachaud (2003) indique quant à lui que : 
« (
) il est temps de cesser de parler dintégration scolaire car il nest pas concevable quun individu ait besoin dintégrer la communauté scolaire, sauf à en être étranger ». 
Les analyses de la CIF, les rapports et débats parlementaires autour de la loi du 2 janvier 2002, les débats ayant précédé le vote de la loi de 2005 et cette loi elle-même, sont caractérisés par la prégnance de la notion dinclusion et de son sillage théorique et pratique, même si le mot lui-même napparaît pas forcément. 
« Les politiques publiques déducation saccordent en apparence sur lintérêt du passage dun système déducation intégrative à un système inclusif », résume Bernard Gossot (2005). 
			3.1.2.2  Les intentions et les effets de leur 
  mise en uvre 
On le voit, les intentions sont clairement définies qui visent à dépasser explicitement à la fois la signification et le terme dintégration scolaire. Mais, ainsi que le suggère Pierre Bonjour en écrivant quen matière de handicap le « droit est la bonne conscience de notre société », et quel que soit le terme utilisé, la scolarisation denfants handicapés prend souvent des allures qui nont rien à voir avec laffirmation des ambitions politiques. Semblant avoir retenu la leçon du « paradoxe entre affirmation politique forte et constats statistiques » (Plaisance, 1996) quétaient nombreux à pointer les analyses des années 1990, la politique de scolarisation peut aujourdhui se prévaloir de constats statistiques très bons. Mais cela nen élimine pas pour autant le paradoxe, qui se contente de changer de forme. Une scolarisation denfant handicapé peut alors être parfois, par exemple, matérialisée par une simple juxtaposition des corps, sans quaucun lien dinterdépendance ou déchange ne soit tissé entre lélève accueilli et ses pairs et lensemble de léquipe éducative de létablissement.
Ainsi de ce que nous rapportent Noémie et Julie, deux des six AVS-i entretenues, quant à certains de leurs accompagnements :
Noémie : (
) cest vrai que là jai été frustrée dans mon travail
 (
) parce que [lenseignante] estimait (
) que [lélève et moi on] devait être scotchés
 par rapport (
) à lobservation, elle estimait quil ne devait pas y avoir observation je devais être scotchée à lenfant quitte à ne plus le rendre autonome (
) voilà
 et cest ce qui sest produit 
 je me suis retrouvé avec un enfant qui était tout le temps collé à moi et en fait je devais jouer à la poupée, je devais jouer (
) à la dînette et tout ça, avec lui, sauf que ben... Pour quil joue avec les autres
 (Page 22)
Julie : (
) pour X. qui est au lycée donc là ça ressemble plus on va dire presque à des cours particuliers, quoi, cest pas ça mais, cest de laide vraiment particulière quoi
(
) On est complètement en dehors, (
) on a une salle exprès pour nous
 (Page 24) 
Autant déléments qui permettent à Serge Ebersold (2003) décrire : 
« Il y a au cur de cette volonté intégrative lesquisse dun grand geste de dénégation, deffacement, de gommage, comme si lon pouvait réduire les handicaps au sens de les diminuer, certes, mais aussi les faire disparaître : on peut aussi ré exclure de manière subtile, par in-différence ». 
Intégrer, ou inclure : ces objectifs affirmés par le pouvoir politique au nom des droits de lhomme et du progrès trouvent un écho, chez les agents du champ de léducation spéciale et ceux de léducation scolaire, dans des structures mentales dappréciation organisées « sous la forme de couples dopposés entre pédagogie et thérapie, école et psychiatrie, intégration et ségrégation, etc. » qui, selon lauteur de ces lignes (Mazereau, 1998), semblent relever de « la radicalisation historique doppositions dintérêts disciplinaires, institutionnels et techniques » qui traversent et constituent les dynamiques fondamentales du champ de lenfance inadaptée depuis ses origines. Les catégories de pensées relatives à chaque segment professionnel, institutionnel et administratif intéressés dans le traitement social du handicap ont une homologie de structure avec celles qui se construisent pour penser toute évolution du champ. 
Il semble que la scolarisation des enfants handicapés et les politiques dintégration puis dinclusion néchappent pas à la règle. En témoigne ce quexprime ici Pascal, qui parle de son expérience quant à un accompagnement avec une petite fille, et se positionne sur sa scolarisabilité, en évoquant la stratégie mise en uvre par lécole pour que les parents « se rendent compte que ça nétait pas possible » : 
Pascal : elle était pas du tout intégrable, dans le sens où elle était en... en grande section elle était complètement déjà larguée par rapport aux autres
 et elle était dans un profond mal-être parce quelle voyait quelle était complètement en décalage
 son seul plaisir et les seules choses quelle voulait faire dans la journée cétait manipuler des cartes
 triturer des cartes, et aller aux toilettes pour pouvoir baragouiner avec les petites sections qui y allaient souvent, donc elle restait
 sur le trône le plus longtemps possible en espérant que des petites sections arrivent
 donc elle était dans une souffrance énorme, euh
 les parents ont
 eux étaient beaucoup dans le refus de
 euh
davoir un enfant handicapé donc voyaient pas le problème, malgré toutes les équipes quil y a eu ils refusaient lenseignement spécialisé
 donc il a été décidé euh
 quelque chose peut-être de pas très habituel mais darrêter clairement les AVS-i pour le passage en CP
 euh pour que les parents se rendent vraiment compte euh en CP
 (
) et donc il y a eu un an de perdu, mais qui a permis effectivement aux parents de se rendre compte que
 que cétait vraiment pas possible et quil fallait
 la placer ailleurs, quoi
 (
) elle a fini par être en IME
 (Page 11)
		
			3.1.2.3  Intégration scolaire et accompagnement 
Pour parvenir à remplir les objectifs dégagés par les modalités de lintégration « à la française », sont apparus, dune manière quasiment synchronique avec cette politique, les personnels accompagnants scolaires. 
« La notion daccompagnement va de pair avec la logique dintégration », écrivent Belmont, Plaisance & Vérillon en 2006 ; en effet, sagissant de répondre aux besoins des enfants dans lordinaire au lieu de les déplacer vers des structures spéciales, lintégration scolaire a créé de nouveaux besoins correspondant aux dynamiques assignées aux processus de scolarisation des enfants handicapés, en particulier celle quimplique la notion de projet intégratif contenue dans les circulaires inaugurales de 1982 et 1983, qui pousse à construire une conception individualisée et personnalisée de la scolarisation. 
Laccompagnement sest trouvé acquérir un statut au niveau du territoire national à partir des années 1990. Selon Brigitte Belmont, Aliette Vérillon et Eric Plaisance (2006), les accompagnants scolaires sont nés de la rencontre entre deux « préoccupations sociales importantes » : dune part favoriser le développement de la scolarisation des enfants en situation de handicap en milieu ordinaire, et dautre part proposer des dispositifs qui facilitent linsertion professionnelle des jeunes.
Favoriser lintégration scolaire ?
Les effets attendus de la mise en place de dispositifs censés favoriser la scolarisation des enfants handicapés ne sont pas vraiment au rendez-vous des années 1990 : lintégration scolaire, bien que promue et revendiquée, reste relativement marginale. Les statistiques de 1993 montrent même que le nombre dintégrations individuelles a diminué depuis 1982. Parmi les origines des lacunes, nous pouvons citer le rôle de larmature institutionnelle résultant de la loi de 1975. Les CDES, écrit Eric Plaisance en 1996, ont un « rôle partiel [dans lintégration scolaire] : en 1989-1990, 40% denfants intégrés le sont sur avis de la CDES, 60% sont admis directement ». Ce qui signifie que, prises dans une logique clientéliste vis-à-vis du parc déquipement du territoire départemental, les CDES ne sont pas des instances qui favorisent lintégration. Le volume déquipement dun territoire apparaît directement corrélé avec limportance des intégrations et nous pouvons affirmer que les places offertes au sein des établissements spécialisés dun département sont toujours pourvues par les CDES, au détriment de la scolarisation en milieu ordinaire. « Leffet pervers de ce vaste dispositif institutionnel [que créé la loi de 1975] est le frein considérable quil constitue pour la mise en place dune véritable politique dintégration des enfants handicapés », résumé Annie Triomphe en 1999. Dautres analyses de la situation « ont été effectuées vers la fin des années 1990 », ajoute Plaisance, qui pointent les lacunes dans la politique dintégration, et qui ont abouti à la décision de relancer cette politique. 
Lutter contre le chômage des jeunes
	
En hausse depuis les années 1980, le chômage a rendu linsertion professionnelle des jeunes (catégorie de politique publique qui nest pas sans charge idéologique, et qui mériterait une analyse spécifique) plus difficile, et abouti à ce que des mesures spécifiques soient prises pour faciliter les premières embauches. Cest dans ce cadre quest votée en 1997 la loi sur les emplois jeunes, qui vise selon ses termes à « répondre à des besoins émergents ou non satisfaits présentant un caractère dutilité sociale ». 
Cest donc cette trame conjuguant nécessité de favoriser la politique dintégration scolaire et volonté de création de dispositifs permettant une meilleure insertion professionnelle des jeunes qui a permis un accroissement des moyens humains travaillant aux actions dintégration scolaire.
Au-delà de lémergence de laccompagnement scolaire à un niveau national, un certain nombre de facteurs ont amorcé à partir des années 1990 des évolutions majeures en matière de scolarisation des enfants handicapés. Tout dabord, en ce qui concerne la France, on peut mentionner la préoccupation croissante dans les milieux académiques et de formation des enseignants de « réformer des pratiques des écoles ordinaires pour quelles accueillent lensemble des différences » (Belmont, Plaisance, Vérillon, 2006). A un niveau international, la nouvelle classification de lOMS (2001) se substituant à la CIH de 1980 apporte des modifications très importantes dans la perception de handicap en tant que phénomène social. Cette CIF est désormais centrée sur « le fonctionnement humain » et non plus seulement sur le handicap : elle en « intègre la question (
) dans le cadre large des interactions de la personne avec son environnement ». La déclaration de Salamanque, sous légide de lUNESCO en 1994 est un autre exemple. Dans le cadre français, cest bien entendu la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 qui actualise législativement les principes généraux de linclusion scolaire. 
Tentons dès à présent de définir la place quoccupe les AVS dans ce mouvement global, et daborder les spécificités de leur histoire particulière. 
Accompagnants scolaires : une histoire institutionnelle
3.2.1 	 Lémergence de laccompagnement scolaire
des enfants handicapés 
			3.2.1 1  Les premiers accompagnants : 
  en marge des associations et des lois 
« A ce moment là, lintégration était bien meilleure parce quil ny avait pas de personne extérieure. [Mais] les AVS, il en faut quand même. Moi je suis partisan que les enfants handicapés aillent tous à lécole, sauf dans les cas limites. » 
Madame N.
« Les premiers AIS apparaissent dans les années 1980 », écrivent Belmont, Plaisance & Vérillon en 2006. « Ils sont recrutés à linitiative de parents ou de militants soucieux de favoriser louverture de lécole à laccueil denfants handicapés », sous le statut dobjecteur de conscience, sous contrat CES ou même « parfois rétribués directement par des parents ». « Dans le prolongement de ces démarches », ajoutent-ils, « des associations de parents denfants handicapés mettent en place des services dAIS ayant pour rôle de gérer les personnels et dassurer un rôle de médiation avec les établissements daccueil ».
Si elle correspond effectivement à la réalité de la mise en place des premiers accompagnants scolaires au niveau associatif, cette perspective semble tenir pour acquis que les accompagnants nont pas existé avant les circulaires de 1982 et 1983 et lémergence de lintégration scolaire en tant quobjectif institutionnel. Or, il semble bien que, dans les années 1970, avant la loi de 1975 et dans une relative ignorance de son émergence, aient commencé à travailler des personnes qui nous paraissent être le premier type daccompagnant scolaire denfant handicapé (inadapté, à lépoque). 
Madame N. mexplique ainsi que, lors de son arrivée en 1972 avec son mari et son fils infirme moteur cérébral, dans la ville où elle habite encore, elle ne trouve pas de solution daccueil pour ce dernier, pendant une durée dun an. Jusquà ce quils apprennent quexiste « un IME [Institut médico-éducatif] dans le département voisin ». « On ne savait pas ce que cétait », explique t-elle., mais limportant était de permettre une « socialisation » à leur fils, qui sy trouve accueilli du lundi au vendredi, à linternat. Progressivement se met en place un système de transport collectif improvisé entre parents denfants accueillis dans cet IME et résidant tous dans la même ville. Madame N. est alors directrice dune école publique. Face au constat désolant de devoir organiser des transports pour quitter une ville relativement grande mais qui noffre aucun équipement, elle décide, après sêtre assurée de laval de sa hiérarchie, daccueillir dans son école plusieurs enfants handicapés moteurs, dont son propre fils. Nous sommes en 1974. 
Madame N. nest pas une militante associative (« lAPAJH, on ne savait même pas ce que cétait »), elle ignore donc le processus qui se déroule dans les sphères du pouvoir politique et associatif de léducation spéciale et qui va aboutir aux lois du 30 juin 1975. Elle est mue par des considérations pratiques et par la volonté tenace de ne pas considérer son enfant comme relevant du pouvoir médical : son fils nest « pas un malade, cest un enfant » ; elle a la volonté de « rester dans le droit commun : il nest écrit nul part quun enfant handicapé ne peut pas aller à lécole ». Pour rassurer ses collègues, et sa hiérarchie, elle fait quand même produire un « certificat médical par lequel [son fils] nest pas contagieux » - ce qui en dit long sur le sens commun de lépoque. Lannée scolaire 1974-1975 se passe donc avec, en grande section de maternelle, la scolarisation de son fils, installé dans une poussette-canne ; et dans la classe dont elle a la responsabilité en CM2 sont également accueillis deux enfants de 14 ans en fauteuil roulant. Ces enfants sont « accompagnés par les autres », nous explique Madame N. « Lintégration était bien meilleure, puisquil ny avait pas de personne extérieure », ajoute t-elle. En effet, Madame N. considère la présence dun accompagnant, par rapport à la problématique spécifique du handicap que vivait son fils, comme une pollution, une gêne qui « casse quelque chose de la relation humaine entre les enfants et lenseignant ». 
Son intérêt pour lentraide entre les enfants, ainsi que les conditions dans lesquelles sont apparus dans cette école les premiers accompagnants expliquent en partie cette vision. En effet, si linspecteur de Madame N. est au courant de la situation et ne pose pas de barrage à la volonté de scolariser des enfants en fauteuil, il nen va pas de même de lhôpital de la ville. Ses médecins (« qui se sont déplacés, hein »), accusent Madame N. de « mettre des malades à lécole », et « cherchent le moyen de faire interdire leur scolarisation ». Ils en viennent ainsi à « poser la question de la sécurité » et à invoquer le risque daccident. 
« A partir du moment de lintrusion de lhôpital », explique Madame N., « les collègues ont commencer à sinquiéter (
), et nous avons fait appel à la mairie [de leur ville] pour avoir des personnes supplémentaires ». 
Employées sous contrat municipal, ces personnes se voient chargées daider les enfants à linstallation dans la classe, de les surveiller lors des récréations. Mais pas question de rester et, a fortiori, de participer à la classe. Madame N. regrette larrivée de ces nouveaux personnels, à qui il a été fait appel seulement pour des questions de sécurité et sous la pression de lhôpital. De son point de vue, ils ont tendance à vouloir faire à la place des enfants, et à empêcher une entraide entre élèves qui existait lannée précédente et qui convenait amplement, selon elle. Ces événements se déroulent  la deuxième année de la scolarisation des enfants accueillis, cest à dire en 1975. 
Ainsi se dévoile, au travers dune expérience qui mériterait une analyse plus approfondie  mais qui nen est pas moins suffisante pour le présent travail  un fait nouveau : ceux qui nous apparaissent comme être parmi les tous premiers accompagnants scolaires, les « ancêtres » en quelques sorte, ont émergé au travers dune expérience de scolarisation denfants en fauteuil roulant initiée par des parents en marge de toute association et militantisme politique ou idéologique, en marge de toute connaissance de lévolution législative alors en cours, et, vraisemblablement, selon des modalités obéissant à une logique de sécurité qui aurait été imposée par des craintes daccident par une institution médicale locale se sentant concurrencée par linitiative de Madame N. et des autres parents, allant dans le sens de la scolarisation de plusieurs de ses « clients » à la fois. Il serait tout à fait utile de savoir si cette expérience, très ambiguë relativement à la notion daccompagnement scolaire et à sa nécessité, a été diffusée ; de chercher également si elle a été diffusée, comment elle la été, et si sa diffusion a servi de modèle pour des militants associatifs eux très au fait des évolutions institutionnelles et soucieux de favoriser la nouvelle politique de lintégration scolaire, dans le début des années 1980. 
Il apparaît que cette hypothèse trouve un élément de validation en ce que le contact de Madame N. ma été fourni justement par un militant associatif en faveur de la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire de la première heure, lui-même rédacteur dun historique qui évoque, sans la nommer, lexpérience de Madame N. comme lorigine de laccompagnement scolaire. Cest cette même personne, Monsieur P., qui a répondu à des questions que nous lui avons posées sur lhistoire institutionnelle du personnel accompagnant scolaire de son département. 
			3.2.1.2  Les années 80-90 et lassociatif
Lémergence des associations départementales spécifiquement dédiées à favoriser la scolarisation des enfants en situation de handicap  et donc à employer des accompagnants semble, dans les quelques départements pionniers en la matière, avoir été précédée par une activité semblable menée en premier lieu par des associations déjà existantes, ayant des objectifs statutaires non spécifiques. Dans le département étudié, celui de Monsieur P., cest le comité APAJH local qui, sous son impulsion, va « prendre en charge la gestion administrative de [
] la première auxiliaire de scolarisation », en janvier 1986. Cette personne a été recrutée sous contrat TUC (travaux dutilité collective, premier contrat précaire public créé en 1983), sur la suggestion dune secrétaire CCPE, pour soccuper dune petite fille porteuse dun « handicap physique sévère », un spina-bifida. 
. 
	Par suite, Monsieur P. apprend que « deux autres associations [du département] se sont lancées sur cette même piste de laide humaine au sein de lécole ». Il sagit dune association initialement centrée sur des problématiques liées à des handicaps spécifiques, en loccurrence la myopathie et linfirmité motrice cérébrale. Emerge alors lidée dune structure rendant possible la convergence de toutes ces initiatives : 
« En 1989, lAPAJH propose à lensemble du mouvement associatif [départemental] de réfléchir à la constitution dun collectif associatif à vocation départementale dont la mission serait de gérer des auxiliaires de scolarisation. Sur la suggestion de lInspecteur dAcadémie [du département], nous créons une « coopérative daccompagnement scolaire », adhérente et section locale de lOffice central de la coopération à lEcole, lOCCE, dont la seule mission sera cette gestion des auxiliaires de scolarisation ». 
En 1997, du fait de laugmentation du nombre dauxiliaires (qui dépasse la dizaine), le statut de coopérative scolaire est abandonné au profit de lassociatif. Une association daccompagnement scolaire et social (AASS) est créée, regroupant six associations, qui se trouvent toutes avoir la caractéristique dêtre situées sur les segments des déficiences sensoriels ou physiques du champ du handicap. 
	Ce dernier aspect se trouve être éminemment important pour comprendre la dynamique qui a présidé à lémergence à la fois de laccompagnement scolaire et de lemploi des personnels qui en sont dévolus et, probablement, pour comprendre également la dynamique générale de lintégration scolaire. En effet, les premières expériences évoquées ici, celles de Madame N. et celle de Monsieur P. sont caractérisées par une prévalence très nette des handicaps physiques et sensoriels, et la quasi-absence des handicaps dits cognitifs ou mentaux. 
Il est ainsi possible de poser lhypothèse selon laquelle le segment dit physique du handicap est celui qui a suscité les premières indignations chez les parents et/ou les militants à lorigine des premières expériences de scolarisation denfants handicapés. Ce serait ainsi un effet du caractère unifiant du terme handicap qui aurait permis détendre progressivement le principe de scolarisation des enfants handicapés à lensemble des enfants concernés par ce terme, et daboutir au droit à la scolarisation quédicte la loi du 11 février 2005. La surreprésentation des associations de personnes ou de parents de personnes handicapés physique et sensoriels par rapport à la prévalence des troubles cognitifs ou mentaux dans lensemble de la population dite handicapée serait ainsi le produit (tout en étant en même temps productrice) de ce militantisme initial centré sur la conviction de la scolarisabilité denfants porteurs de handicap physique ou sensoriel. Lensemble de la population de lenfance handicapée, et au premier chef les enfants ayant un handicap mental, aurait ainsi bénéficié des effets des actions initialement centrées sur les seuls handicaps physiques, ou à tout le moins des actions à lorigine largement centrées sur les handicaps physiques. Limaginaire social du handicap, dominé par la représentation du fauteuil roulant (comme sur le logo utilisé partout) et qui se trouve également en grand décalage avec les constats statistiques en lien avec la prévalence des handicaps,  trouverait également ici une de ses forces productrices. On retrouve dailleurs chez les enseignants des réticences tout à fait variables en fonction du type de handicap que porte lélève scolarisé, et les segments des déficiences motrices et sensorielles ne sont pas ceux qui font naître le plus de défiance. 
	Dans le petit ensemble des départements ayant connu, dès les années 1980, des initiatives ayant permis le recrutement daccompagnants scolaires, un seul se démarque de la règle selon laquelle linitiative associative préside : il sagit du département des Bouches-du-Rhône, où cest lEducation Nationale elle-même, par lintermédiaire dune secrétaire CCPE et dun inspecteur de circonscription, qui a permis lémergence dun tel accompagnement. 
« Linspecteur dAcadémie du département est à cette époque Michel Laurent, ex-directeur du centre de formation CAPSAIS de Beaumont-sur-Oise. Il créé la mission dintégration scolaire et en confie les clés opérationnelles à [la secrétaire CCPE précitée]. (
) Cette expérience marseillaise est fondamentale car elle est le fait de lEducation Nationale et nous naurons dès lors jamais à convaincre ce ministère du bien-fondé de notre action daccompagnement. »
	Lexpérience marseillaise, du fait de son ampleur, va être lorigine du mouvement fédératif qui se déploie dans le milieu des années 1990. 
	3.2.2	Du local au fédératif national 
« En 1995, la lecture dun quotidien national mapprend quil existe sur Marseille un important recours aux auxiliaires dintégration scolaire. Après des entretiens téléphoniques avec (
) la secrétaire de la mission dintégrations scolaire de lEducation Nationale [à linitiative du dispositif dans les bouches du Rhône], une première rencontre entre responsables associatifs venus de sept départements (13, 37, 64, 67, 69, 71, 72) est organisée (
) sur Marseille. » 
Monsieur P., 2009. 
En 1995, après une série de reportages et darticles (sur le principe de la « circulation circulaire de linformation », selon lexpression de Pierre Bourdieu) portant sur la situation dans les bouches du Rhône, un contact est établi entre les responsables de plusieurs initiatives associatives départementales. La fédération nationale des associations pour la scolarisation des enfants porteurs dun handicap (FNASEPH) est créée en 1996, et regroupe des associations le plus souvent créées par des parents. « Lobjectif est de partager [ces] expériences éparses, notamment sur le financement » écrivent Belmont, Plaisance & Vérillon en 2006. A la suite des associations locales, les deux premières associations nationales à rejoindre la fédération sont lUNAPEI et lAPAJH. Ce sont elles qui permettent à la FNASEPH, grâce à leur parrainage, dentrer dans le comité dentente des associations représentatives des personnes handicapées et des parents denfants handicapés. LAPAJH quitte la FNASEPH au début des années 2000, vraisemblablement pour des raisons de relations concurrentes avec la MAIF ; raisons quil conviendrait, dans le cadre dun travail sur le milieu associatif, danalyser. Elle aujourdhui une opposante aux revendications de professionnalisation des AVS. 
			3.2.2.1  Les emplois-jeunes
En 1997, la création des emplois jeunes est loccasion pour la FNASEPH daugmenter le nombre de personnel. Le recours à ces contrats permet en effet un financement à 80% par le ministère de lemploi ; les 20% restants sont pourvus par le biais de subventions diverses, notamment municipales. Pour la fédération et ses responsables (presque tous sont issus dassociations locales), laugmentation du nombre dAIS est la démonstration que leur fonction correspond à un besoin réel dans la politique dintégration à la française. Cela nempêche pas que se pose quelques problèmes, notamment la disparité territoriale induite par la différenciation dimplantation des associations employeurs, qui empêchent un enfant dun département non pourvu de structure associative employant des AIS, mais nécessitant un accompagnement scolaire, den bénéficier. De plus, la permanence des besoins des enfants justifie aux yeux des associations que les emplois soient financés intégralement par lEtat. 
LEducation Nationale a également recours aux emplois jeunes : au sein de cette institution, ils sont employés en tant que « aides-éducateurs ». Parmi les missions de ces derniers, on trouve, avec lencadrement, la surveillance, lanimation des BCD, la formation des élèves à lusage des outils informatiques et laide à lintégration scolaire. Cette dernière mission prend souvent la forme dintervention au sein des classes spéciales, en collaboration avec lenseignant spécialisé qui en a la responsabilité. Les mairies recourent également, selon les dynamiques locales, à ce type de contrat, et sur des missions daccompagnement scolaire. Ainsi dans le département de Monsieur P., à partir de 1995, lAASS na plus le monopole de lemploi des auxiliaires : 
« À la rentrée de septembre 1999, nous dénombrons (
) 27 aides-éducateurs de lEducation Nationale, 12 AIS emplois-jeunes de la ville (
) et 19 auxiliaires dintégration scolaire de notre association »
La logique des emplois jeunes est de permettre de faciliter la prime insertion professionnelle des jeunes en leur fournissant un emploi dune durée limitée (cinq ans, en loccurrence) dont une partie du temps de travail est mobilisable pour se former dans la perspective dun projet professionnel. Au sein de lEducation Nationale, notent Belmont, Plaisance et Vérillon, un dispositif est prévu pour garantir aux emplois jeunes un « parcours de professionnalisation », et comprend laccès à des informations relatives aux offres de formations, des entretiens, des bilans de compétences, des procédures de validation dacquis, etc. 
Dans le cadre associatif, la FNASEPH répond également aux exigences induites par la perspective dassurer aux emplois-jeunes un rebond professionnel. Elle sattache aussi à des tentatives pour mieux structurer les emplois dAIS. Ses membres élaborent des outils de formation, des référentiels demploi et des outils pour la pratique de laccompagnement (grille dévaluation des besoins, protocole daccompagnement). Ces différentes productions sont reprises par les textes officiels de lEducation Nationale en 2003, au moment où est consacré le passage des AIS emplois jeunes aux AVS assistant déducation. Nous pouvons faire lhypothèse que, délaissant aux associations, depuis plusieurs décennies, les multiples niveaux dexpertise en matière déducation spéciale, lEtat se trouve dans une position de dépendance caractérisée par la délégation de fait quil a mis en place progressivement au profit des associations. 
Pour autant, ces dernières, en loccurrence la FNASEPH, si elle voit un certains nombre de ses travaux repris dans les textes de lois, na pas le poids que peuvent avoir lUNAPEI et lAPAJH et ainsi ne trouve pas consacrées ses revendications, qui ne rencontrent pas les intérêts à la fois de ce qui caractérise laction publique dans les années 1990 et 2000 (un retrait de lEtat en matière de financement public dans de nombreux domaines) et les grosses associations historiques (une position de gestionnaire avec un poids politique et économique important). 
			3.2.2.2  Les étapes dune reconnaissance consacrée
 mais fragile 
La circulaire Education Nationale du 17 juillet 1998 énonce, dans son article 5, la première reconnaissance officielle de la possibilité de « mise à disposition des établissement ou des écoles dauxiliaires dintégration scolaire, le cas échéant non titulaires du baccalauréat, pour assister les élèves handicapés ». 
Le 30 avril 1999, une convention nationale pour le développement des services daccompagnement scolaire est signée entre lEducation Nationale, la FNASEPH et IRIS initiative. Par le biais de son article 6, la gestion des services dAIS individuels est confiée à la FNASEPH, tandis que lEN se charge des accompagnements collectifs grâce aux aides éducateurs. Le recours aux contrats emplois jeunes pour lemploi dAIS est consacré par larticle 2, tandis que larticle 5 stipule que la part des 20% du salaire des AIS emplois jeunes non couverte par lEtat se trouve prise en charge par un financement EDF-GDF, par lintermédiaire dIRIS initiative, à hauteur de 500 emplois, et pour une durée de cinq ans. Les associations sengagent de leur côté à ouvrir des formations qualifiantes à leurs employés et créer des services dans au moins 20 départements. (Paumier, Philbert & Lagisquet, 2009)
On le voit, lémergence de la reconnaissance nationale de laccompagnement scolaire seffectue dans un partenariat serré entre lEtat et le maillage associatif existant en la matière, qui lui-même sest construit certes en relation avec les associations historiques du champ de léducation spéciale mais en en inaugurant en quelque sorte une extension, fondée sur des objectifs statutaires qui ne correspondent pas à ceux des associations oeuvrant historiquement pour léducation spéciale. Cette reconnaissance est néanmoins fragile, et repose tout à la fois sur des financements temporaires et des contrats qui relèvent de dispositif demplois publics qui le sont tout autant. 
Le financement des personnels « est totalement hors sécurité sociale et ne peut donc interférer sur les financements du secteur médico-social », écrivent Gilles Paumier, Patrice Lagisquet et Marie-Christine Philbert en 2009. Cette remarque de satisfaction témoigne de la crainte de voir laccompagnement scolaire restreint au périmètre du médico-social. Elle témoigne également (du fait de lutilisation du verbe « interférer », qui implique une gêne) de la conscience de ces agents/acteurs associatifs de ce que pourrait susciter un financement sécurité sociale dans le secteur du privé associatif du médico-social et du socio-éducatif, à savoir vraisemblablement une réaction concurrentielle et hostile qui pourrait nuirait à la finalité de leur action. 
Il semble également quil y ait là une position dont le fondement symbolique consiste en considérer que le financement de tels emplois ne doit pas relever de la branche maladie et du ministère de la Santé ou des Affaires sociales : uvrant en faveur de la scolarisation denfants, ils ne doivent pas, dans cette logique, être financé par un autre moyen que celui du droit commun en matière de scolarisation. Nous pouvons supposer que le financement par la sécurité sociale, qui consacre symboliquement une vision défectologique du handicap, est rejeté pour cette raison par les responsables associatifs de la FNASEPH. La signature de la convention de 1999 ne comporte dailleurs, en matière de représentant de gouvernement, que celle de Ségolène Royal, alors ministre déléguée à lEnseignement scolaire et aux personnes handicapées, et est présentée par lhistoire officielle de la FNASEPH comme un moment très important dans leur lutte. 
Le 28 septembre 2000 se déroule la signature dune autre convention de financement entre la FNASEPH et la fondation de France, pour une durée de quatre ans. Les moyens financiers qui sont alors dégagés vont permettre de développer les services départementaux dune manière très importante : ils passent de 24 en janvier 2000 à 63 en 2002-2003, tandis que le nombre dAIS associatifs employés par des collectifs membres de la fédération passent de 961 à 2107 sur la même période.  
			3.2.2.3  Les effets de ces étapes sur la définition des 
  contours de la pratique de laccompagnement 
Durant les années 1990, à la faveur de la création des emplois jeunes et de la structuration fédérative des employeurs de personnel accompagnant, se dessine aussi une certaine forme de pratique de laccompagnement scolaire, qui est indissociable de ses conditions demploi et démergence. Ainsi, même si certaines associations se prononcent pour le fait que les AIS soient également des ressources pour lécole et non seulement des personnels attachés à un seul enfant, leurs fonctions telles quelles sont définies par la FNASEPH et reprises, en 2003, par lEducation Nationale, consacre une conception de laccompagnement centrée sur lélève accompagné, « essentiellement [attachée] à la mise en uvre du projet individualisé » (Belmont, Plaisance, Vérillon, 2006). Nous pouvons ici voir lorigine du fait quactuellement, la mise en uvre de la professionnalité de laccompagnant scolaire se trouve référée à sa mention dans un PPS. 
« Sa légitimité est assujettie aux formes de reconnaissance instituées lors de lédification du projet personnalisé de scolarisation », et son intervention y est subordonnée, écrit Serge Ebersold en 2009. 
Se trouve ainsi consacrée une problématique particulièrement sensible dabord pour tout accompagnant individuel délève handicapé scolarisé, et ensuite également pour toute réflexion et analyse sur la pratique de cet accompagnement : comment travailler aux apprentissages et à la socialisation de lélève quand laccompagnant est pour lui un « adulte à soi » ? Comment dépasser le stade de « linitié » (dans le sens employé par Erving Goffman (1975)) que devient souvent laccompagnant par rapport aux effets dans le temps et lespace scolaire du handicap de lenfant ? Comment transférer vers adultes et enfants les connaissances relatives au statut dinitié quand les tâches du poste sont centrées sur lélève ? Comment ne pas devenir un nouveau spécialiste (ou un établissement spécial fait corps, à lui tout seul) contribuant à recréer à lécole de nouvelles formes de ségrégation ? 
Lalie : (...) je vois celui du collège, si je restais derrière lui euh
 Je sens pas le progrès (...)
  je suis un peu sa décharge quoi, hop
 je men
 je suis son soutien quoi, « il y a quelquun, il y aura toujours quelquun euh
 je me débrouillerai toujours avec quelquun » mais ça va pas laider quoi... (Page 39)
Nous nous estimons légitimes à formuler lhypothèse selon laquelle la vision de laccompagnement qui émerge dans les années 1990 et qui se trouve consacrée dans les années 2000 est directement liée à ces problématiques aujourdhui très vives, et qui existeraient avec beaucoup moins de force si laccompagnement avait pris la forme dun accompagnement à la classe, ou à létablissement, au lieu de se retrouver ceint dans le périmètre de laide strictement personnalisée  qui permet également de justifier la limitation du niveau de formation et, incidemment, la nature du cadre demploi (confère 3.2.2.4). 
Voici un échange entre deux AVS-i (anciens recrutés) qui évoquent les limites de laide individuelle et les stratégies quils ont développées pour y faire face :
Pascal : (
) [Les moments où] on se sent utile ni pour lenfant quon accompagne ni pour les autres, là cest vrai que cest pénible, je trouve.  (
) des fois sur des demi-journées
 ça mest souvent arrivé hein
(
) ça mest même arrivé de travailler dans dautres classes, ce qui nest pas tout à fait
 ce qui nest pas tout à fait légal
G : ça mest arrivé aussi [rires] (
) ça mest arrivé de prendre trois groupes, des tiers de classe dans une classe de CE1, à la bibliothèque, à des moments où
 où je servais à rien
 [toutes les semaines], sur toute une année (
)
 donc le fait
 ce fait que ce soit pas légal, enfin bon quon trouve des arrangements après dans lécole, puisquon est une ressource, on est un adulte, cest quand même dommage de pas lutiliser quoi. [Jai également beaucoup utilisé les « temps morts » pour observer lélève, la classe, et écrire ces observations, ou pour relire mes écrits précédents afin de travailler mon positionnement]. 
En 2001, un rapport « sur les moyens de consolidation et dextension des services dauxiliaires » est commandé conjointement par les ministères de lEducation Nationale, de la famille, de lenfance et des personnes handicapées à Mireille Malot, qui est délégué générale de lassociation IRIS initiative. Il inaugure une série impressionnante de rapports ou missions détude rendus durant les années 2000 et abordant, soit directement soit indirectement, la question de laccompagnement scolaire ; la différence notable entre les auteurs résidant dans le fait que Mireille Malot est une des membres fondatrices de la FNASEPH, et non une élue ou un haut fonctionnaire comme cest le cas pour presque tous les autres.
Cest le rapport Malot qui introduit le terme dauxiliaire de vie scolaire AVS, afin de mettre un terme à la confusion entre les services associatif dAIS et le service AIS « adaptation et intégration scolaire » qui existe au sein de lEducation Nationale. Il formule également une vingtaine de propositions, dont une qui concerne une gestion associative des services dAVS en collaboration avec lEN et les DDASS, combinant lavantage du savoir-faire associatif, la souci de légalité territorial et un financement public, qui nest pas sans rappeler certains précédents historiques, et qui confirme, sil le fallait, que laction associative en faveur de la scolarisation des enfants handicapés est construite en référence au modèle de léducation spéciale en la matière. Le rapport aborde également les « possibilités de faire de cette fonction un vrai nouveau métier, en laffranchissant définitivement des dispositifs toujours provisoire daide à lemploi » (point 4 de la proposition 13). Ces deux propositions restent lettre morte, mais inaugurent, sur ces deux points, une lutte qui prend la forme dune pression et dun militantisme associatif qui est toujours dactualité en 2008-2009. 
			3.2.2.4  La question dun métier daccompagnant 
Durant cette période de gestion associative du dispositif, sur la question précise de la professionnalisation et de la question des statuts de la fonction dAIS et des personnels qui loccupent, lunanimité nexiste pas, malgré lémergence officielle de la proposition par lintermédiaire du rapport Malot. Certaines associations se positionnent en faveur dun vrai métier, exercé par des personnels stables qui pourraient bénéficier dune formation qualifiante. Dautres, dont nous pouvons faire lhypothèse quelles sont caractérisées par une proximité plus importante (quelle soit sociale et/ou professionnelle) avec le secteur médico-socio-éducatif, manifestent des réticences qui « semblent associées à la crainte que cet emploi ne vienne combler des fonctions défaillantes, comme le soutien des enseignants par des professionnels spécialisés » (Belmont, Plaisance & Vérillon.2006). 
Autrement dit, ces oppositions sont issues de la volonté de préserver des territoires professionnels certes estimés peu assez occupés, mais quil convient de ne pas amputer, sous peine de mettre en danger des métiers déjà existants. Tout se passe comme si cette vision considérait la fonction daccompagnant scolaire comme le symptôme dun mal venant dun dysfonctionnement des relations entre scolaire et spéciale  mal quil conviendrait de soigner, au lieu daccorder à cette fonction une place qui ne ferait quasseoir la maladie. De ce point de vue, le poste dAVS-i viendrait combler une place laissée vacante, pour des raisons diverses, par des professions historiques du travail médico-social et socio-éducatif, mais qui ne serait fait quun supplétif aux lacunes doccupation territoriale de ces professions déjà existantes, qui, si on suit la logique historique qui sous tend un tel discours, devraient être amenées à le réinvestir un moment ou un autre, rendant caduque lexistence même de la fonction daccompagnant scolaire tout autant que le débat sur son éventuel professionnalisation. 
En 2009 se déroulent deux évènements traduisant le fait que la question de la création dun métier dAVS-i soit une question encore vive : 
Une mission, confiée par Jean-François Copé à Marie-Anne Montchamp, vise à réfléchir aux conditions de professionnalisation des AVS avec lensemble du secteur associatif et les ministères concernés. Ce groupe de travail, réuni deux fois au printemps 2009, disparaît comme il est apparu, sans conclusions ni épilogue, malgré les relances de certaines associations. 
Un groupe de travail, cette fois-ci beaucoup plus assidu, et réunissant associations du secteur, ministères et organisations concernées, sest créée suite à la signature dune convention de reprise des AVS AED sortants du dispositif en 2009 par les associations, en septembre 2009. 
Ce groupe de travail (2-) réunit les quatre signataires de la convention, plus trois associations non signataires membres du comité dentente des associations autour du handicap (Trisomie 21 France, APF et APAJH, toutes trois opposées à la création dun métier) ; lUNAISSE, le CNSA, lassociation des départements de France, les organisations syndicales siégeant au CNCPH, la DGAS (devenue entre temps la DGCS), la DGESCO, le cabinet du secrétariat dEtat à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapés (alors occupé par Nadine Morano), qui anime la réunion. Ce groupe se réunit toutes les deux ou trois semaines, de septembre 2009 à janvier 2010, travaillant sur : 1/ les référentiels (de compétences, dactivité, de formation) et 2/ le cadre demploi. Les réunions se divisent alors en plénières et restreintes  ces dernières concernant les travaux spécifiques aux référentiels ou sur le cadre demploi. Les réunions plénières tranchent. 
Cest ce groupe de travail qui va aboutir à la production la plus aboutie  et cest lui également qui permet de saisir a minima la grande tension et les conflits très vifs que font naître dans le champ du handicap la question du statut à accorder au poste dAVS-i. Au sein de ce groupe, réuni pour réfléchir à la question de la création dun métier daccompagnant scolaire et social, on ne trouve quune minorité de participants qui y sont en fait véritablement favorables, selon des modalités différenciées (FNASEPH, FG PEP, Autisme France et UNAISSE). On y trouve surtout des acteurs associatifs et institutionnels qui y sont largement défavorables, et soutenant eux aussi des solutions différenciées (APAJH, APF, Trisomie 21 France, DGAS, DGESCO). 
Cest la raison pour laquelle, bien que lobjet du groupe de travail ait été fixé comme devant être centré sur la forme que devait prendre un métier, et soit basé sur le postulat selon lequel la création dun métier ne se discutait plus, cest justement la question de la nécessité dun métier qui guide une grande partie des échanges  parfois très vifs. Finalement, et contre lavis des associations défendant la création dun métier, cest lidée dune extension du territoire dune profession déjà existante qui est imposé (notamment par la DGAS)  en loccurrence, cest le métier dauxiliaire de vie sociale (AVSociale) qui est le plus mis en avant. Au sein du groupe restreint sur les référentiels, la DGAS impose également un travail à partir des référentiels dAVSociale et daide médico-psychologique (AMP), et refuse de travailler à partir des référentiels spécifiques construits par la FNASEPH ou le collège coopératif de Bretagne (CCB) dans le cadre du programme Respect. 
	Ce groupe de travail, qui devait permettre, selon les objectifs initiaux fixés par le cabinet de Nadine Morano, de mettre en place le nouveau métier à la rentrée 2010, a brutalement cessé de fonctionner au début de lannée 2010. Le gouvernement a par la suite annoncé (en mars 2010) quil ny aurait pas de métier dAVS-i. 
	En 2010, au moment de la mise en écriture du présent travail, diriger le poste dAVS-i vers le secteur des services daide à domicile (SAAD) semble être devenu une option politique majeure. En effet, après que les quatre signataires de la convention de septembre 2009, échaudés par lenterrement du groupe de travail sur le métier, laient dénoncée, deux autres conventions (concurrentes, bien que provenant dun même gouvernement) de reprises des AVS-i/AED arrivant au terme de leurs six années de contrat ont été signées : 
la première entre, dun côté, FNASEPH, FG PEP, Autisme France et un nouveau venu (dans le champ), la ligue de lenseignement, et de lautre lEducation Nationale
la seconde entre les quatre fédérations nationales de SAAD et le secrétariat dEtat à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées. 
A la rentrée 2010, les inspections académiques ont ainsi le choix de conventionner avec les associations signataires de la convention avec Luc Châtel ou avec celles ayant signé avec le cabinet de Nadine Morano - ou les deux. 
Seulement, et cest là un point essentiel, les SAAD, qui forment avec les SAP le secteur de laide à la personne, ne sont pas habilités à travailler avec lenfance (à lexception de certains agréments qui concerne les activités de laide sociale à lenfance, ASE), mais seulement avec les adultes (les vieux et les personnes handicapées). Ainsi, pour pouvoir leur délivrer un agrément leur permettant de recruter des AVS-i sortant du dispositif AED, il est nécessaire de modifier un décret dapplication de la loi n°2002-2 (réformant la loi du 30 juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales). 
Une fois cette modification faite, les SAAD pourront travailler avec lenfance  et le basculement complet de la fonction dAVS-i vers ce secteur sera alors possible ainsi que, potentiellement, tout le secteur de lenfance. 
Avant toutes ces péripéties, dont le bref (et incomplet) recensement montre bien à quel point le poste dAVS-i cristallise, par sa position et sa nature, des clivages et des tensions qui prennent racine dans lhistoire très épaisse du champ de lenfance handicapée, la question est également débattue. Durant la période 2001-2002, elle lest dans deux cadres, celui de la mission confiée à Vincent Assante concernant la réforme de la loi de 1975 et celui dun groupe de travail interministériel réunissant lensemble des partenaires associatifs impliqués dans la gestion des auxiliaires. Cest à lissue des discussions de ce groupe de travail quun nouveau texte apparaît en 2003, définissant un nouveau cadre juridique pour ceux qui ne sont désormais plus nommés auxiliaires dintégration scolaire (AIS) mais auxiliaires de vie scolaire (AVS). 
Ce texte va véritablement rendre visible la fonction dAVS  sans pour autant vraiment léclairer, tant le traitement médiatique autour de ce poste est soumis aux poses traditionnelles qui caractérisent les non-initiés au handicap (soit un pathos vibrant doublé dun angélisme parfois affligeant). Le tableau suivant permet aisément de le constater. 
Fréquence dapparition du terme auxiliaire de vie scolaire
Titre
Titre et premier paragraphe
Ensemble de larticle
200239172003731100200442250200512690200611419520071474288
3.2.3 	La politique du flou : 2003-2009 
					
3.2.3.1  2003 : les AVS AED 
Cécile : (...) les AVS
 bah ouais, parce quon était... je pense, on est toute une génération à entrer dans le système à peu près en même temps, donc cest vrai quon a pu échanger pas mal, ouais jai des bons collègues (...) vraiment dans léchange
 (...) jai bossé avec euh
 D. qui est à B. maintenant, bah du coup cest lui qui a récupéré T., enfin voilà, ça été tout un... on a pu échanger, ça a été euh
 et puis tu te sens moins seule quand tu as un statut comme ça et que tu es devant lécole, tu es quand même euh
 (...) surtout en période difficile où ils te passent à 60% et où toi tu es enceinte et que
 [rires]
 tas besoin de soutien, et là cest tes potes qui sont AVS qui te lapportent
 davantage quoi
 bah de toute façon ça a toujours été de bons contacts avec les autres
 y compris euh
 y compris pendant les formations, alors là tu vois à O., alors il y en a une qui a débarqué [une personne en contrat aidé, NDR], alors elle savait même pas me dire quelle était AVS-i en début dannée, tu sais, bah cétait un peu un truc de fou, quoi, elle a été télescopée là
 (...) Sinon, lors des formations, des fois jy vais tu vois ça me dégage une après-midi, je vais en formation, je vais voir un peu ce qui se passe, et puis
 euh
 et puis voilà, du coup je me retrouve un peu dans le 
 [elle prend une voix enfantine] « oh tes en sixième année, oh jai plein de questions à te poser » [rires] donc voilà, donc ça me permet effectivement de guider, (...) tu sais les petites astuces, les machins, le métier, enfin le
 ouais le job quoi, comment on lhabite, les interrogations, (...) tout quoi, je veux dire, ce que je vis tu te rends compte que bah ouais ils le vivent aussi derrière, donc tu
 ouais, tu témoignes en fait
 voilà
 cest un peu le vétéran des AVS au bout de six ans, tu sais (rires)
 donc voilà, on en est là avec les autres AVS, qui sont tous en demande dune coordination, dun rapprochement avec dautres AVS, ça cest toujours euh
 voilà quoi
 cest toujours le truc qui ressort
(Page 40-41)
	Ce quexprime ici Cécile, cest le sentiment (né très probablement progressivement, au fur et à mesure de loccupation du poste) dune appartenance commune pour les AVS ayant été recrutés en 2003 ou en 2004. En effet, ces personnels, recrutés pour la première fois en nombre aussi important, sont les premiers à « ouvrir » le dispositif AVS au sein de léducation nationale puisque 2003 est lannée du basculement de ces emplois de lassociatif vers ce ministère. Le sentiment daccomplir quelque chose de nouveau et dimportant nest pas tari par la conscience, très bien distribuée, doccuper un emploi précaire non reconnu, sous payé et sans véritable formation, et sera même redoublé par le vote de la loi n°2005-102 du 11 février 2005. Léchec de toute possibilité pour ces personnels de poursuivre leur travail au terme des six premières années (2003-2009) a constitué un événement important difficilement vécu par certains dentre eux qui étaient auparavant AIS (auxiliaire dintégration scolaire) dans lassociatif et qui cumulait ainsi parfois plus de dix ans doccupation du poste. 
Progressivement, et alors que le poste était, pour toutes ces raisons, pensé comme pouvant à tout moment devenir pérenne, les occupants du poste dAVS-i ont peu à peu intégré le fait quil sagissait dun passage et lont pensé comme temporaire  c'est-à-dire également, cest un corollaire, sans linvestir comme ont pu le faire ceux qui le pensaient potentiellement durable. 
Les anciens recrutés arrivant à la fin « de leur temps », sont particulièrement bien placés pour se rendre compte de ce fait : 
Cécile : (...) [mais maintenant], ça cest clair, ils restent un an, deux ans, ouais
  oui et puis de toute façon tu sens dans leur discours que de toute façon, il est clair que 
 « ah oui mais non je fais juste ça comme ça, et puis lannée prochaine je cherche autre chose quoi »
 tu sens que définitivement, les gens ont pas envie du tout de
 de
 de sancrer là-dedans, quoi (...) (Page 41)
Cest le texte de 2003 précité qui organise la création des AVS AED. Il est produit par le ministère de Luc Ferry et semble, pour plus dun participant au groupe de travail de la fin de lannée 2002, en ignorer superbement la production. En janvier 2003, après quatre réunions de ce groupe, et sans tenir compte de ses conclusions, le ministre annonce la création prochaine des auxiliaires de vie scolaire dans le cadre de la réforme du statut des maîtres dinternat et surveillants dexternat (dits MI-SE) : les accompagnants scolaires deviennent partie des assistants déducation (AED), et se substituent aux aides éducateurs, le dispositif des emplois-jeunes ayant été supprimé lannée précédente. 
Les AVS AED réunissent ainsi lensemble des AIS associatifs (qui peuvent être recrutés par lEN) et des aides éducateurs qui remplissent des missions daide à lintégration scolaire. Leur création correspond à une reconnaissance officielle de la fonction daccompagnement scolaire ; on passe en effet dune période de gestion associative avec des financements publics pour une part, privés pour dautres, limités dans le temps, à une autre, à partir de 2003, où lensemble des postes est complètement financé par lEN sans limitation de durée. Ceci créé bien « les conditions de la pérennisation et de la généralisation » demandées par une grande partie des associations. Pour nombre dentre elles, favorables à la création dun nouveau métier, les conditions sont réunies pour la reconnaissance globale et définitive de ce pourquoi elles se sont créées à partir des années 1980
Plusieurs écueils importants demeurent néanmoins : les emplois dAVS AED sont toujours temporaires (avec des contrats de trois ans renouvelables une fois, daprès les textes) ; ils sont toujours destinés à être occupés par des jeunes, en loccurrence étudiants, dans loptique dune première expérience professionnelle qui les conduirait vers les métiers de lenseignement ou du travail social  indice éminemment révélateur de leur position interstitielle dans le champ éducatif français (Bordeau & Bourget 2009). Il leur est proposé, à linstar des emplois jeunes, de suivre une formation en lien avec leur projet professionnel, par le biais de 200 heures par an (pour un temps plein) mobilisables sur leur temps de travail. 
Quant à la formation en lien avec leur pratique daccompagnant, elle est nommée « formation dadaptation à lemploi », et doit correspondre à 60 heures réparties sur les trois premières années dexercice. Ainsi, malgré la reconnaissance symbolique forte quest la prise en charge financière intégrale des AVS par lEN, laccompagnement scolaire nest pas consacré comme un métier à part entière. 
La législation de 2003 définit deux types dAVS AED : les auxiliaires de vie scolaire collectifs (AVS-co) et les auxiliaires de vie scolaire individuels (AVS-i). Si les premiers relèvent des dispositions générales prises pour les AED (ils sont recrutés par les établissements, par exemple), les seconds font lobjet de dispositions qui leur sont spécifiques : ils ninterviennent que sur décision de la CDES (qui est remplacé par la CDA avec la loi de 2005) et sont recrutés par les Inspections Académiques. 
Est ainsi consacrée pour les AVS-i, ainsi que nous lavons déjà évoqué, une vision personnalisée et individualisée de laccompagnement : ne dépendant pas des établissements et nintervenant que si le projet de scolarisation le définit, la pratique des AVS-i se retrouve clôturée dans un périmètre centré sur lélève accompagné, à linstar dune aide technique et matériel, comme un ordinateur par exemple : il est attribué un AVS-i à un élève. Des dispositions originelles, que nous avons déjà citées, comme par exemple certaines volontés associatives de mettre laccompagnant individuel au service de la classe et de létablissement  ce qui correspondrait davantage à une conception environnementaliste du handicap  et pas seulement au strict accompagnement de lélève, sont ainsi abandonnées. Une circulaire, qui comporte en annexe des documents élaborés par la FNASEPH (une fiche dévaluation de lautonomie de lélève et un protocole daccompagnement) aborde les tâches que peuvent réaliser les AVS-i, toutes exclusivement centrées sur lélève, et précise quil importe que « les AVS-i [ne] se consacrent exclusivement [qu]à ce type de fonction ». Belmont, Plaisance & Vérillon concluent en écrivant que la fonction dAVS-i se trouve alors « fondamentalement caractérisée par une approche individualisée de laide à lintégration scolaire ».
La qualité du processus de scolarisation en milieu ordinaire nécessitant un accompagnement scolaire est subordonnée à celle des relations construites et entretenues par laccompagnant avec les parents, lenseignant et, plus largement, avec léquipe pédagogique, comme la fort bien démontré Serge Ebersold (2004). En ce sens, lindividualisation de la pratique de laccompagnement scolaire ainsi que le fait quil soit uniquement référé au projet de scolarisation, ce qui lattache au projet de lélève, cest à dire à lélève, et non à un établissement, pose question, en particulier au regard des ambitions dune éducation inclusive. 
En effet, comment développer des liens de coopération avec une équipe quand on est partagé entre plusieurs établissements ? 
« La façon dont sont définies les fonctions des AVS et (
) la conception du type daccompagnement qui sous-tend leur définition » et, ajoutons-nous, les conditions demploi, induisent donc des conditions dexercice de la pratique daccompagnement qui, loin dêtre négligeables, appellent une analyse spécifique (Belmont, Plaisance & Vérillon 2006). 
Il faudrait ainsi sintéresser à la façon dont cette injonction de lindividualisation et ce partage obligé entre plusieurs écoles, et donc entre plusieurs équipes pédagogiques, sont reçus par les accompagnants scolaires, dans quelle mesure ils sen accommodent et quels effets ils ont sur les conceptions quils construisent de leur pratique daccompagnant, conceptions dont la mise en parallèle avec les définitions officielles serait probablement tout à fait intéressante. Nous pouvons ici néanmoins citer la parole de certains AVS-i interrogés. 
Lalie a en 2009-2010 un contrat de 9 heures, réparties sur trois demi-journées ; Pascal, de son côté, raconte comment, pendant quelques mois, il doit changer décole au moment de la récréation :
Guillaume : et tes neuf heures sont réparties comment dans ce collège ?
Lalie : bah euh
 je
 travaille
 le lundi après-midi
mercredi matin et maintenant jeudi matin (...) jai pas une journée complète (Page 27-28)
Pascal : il y a eu une année, enfin ça a duré que six mois heureusement, où je me retrouvais à faire des
des
 des quarts de journées
 changer, pendant le temps de la récré, décole
 on est tout le temps à se déplacer, à bouger, cest pas très agréable
 (Page 26)
	Pascal explique également les affres des débuts dannée scolaire, quand il sagit de construire, en lien avec deux, trois ou quatre écoles, un emploi du temps qui convienne à chacun  enseignants, professionnels du médico-social, élève , qui prenne a minima en compte les contraintes de chacun, et qui permette surtout de rentabiliser le volume horaire hebdomadaire attribué aux enfants accompagnés, sans les « gâcher » : 
Pascal : après cest des histoires demploi du temps, plus
 cest à dire nous on ne peut pas trop changer nos emplois du temps parce que cest compliqué avec les différents enfants quon accompagne, les changements décole, et on se retrouve des fois à être un peu bloqués parce que (
) dautres enfants ont des accompagnements à lextérieur, dautres jours, donc par exemple trois matinées par semaine, et il y a pas le choix, il y a que G. qui est dans lécole 
 tous les enfants que je suis [sont dans une institution spécialisée dans le cadre dun temps partagé entre elles et lécole, NDR] donc je suis obligé dêtre avec G. ces trois matinées là
 si dans les trois matinées il y a une matinée de piscine, par exemple, où lenfant na pas du tout besoin dêtre accompagné parce quil est à laise dans leau, et une autre séquence pareil où lAVS-i sert pas à grand chose en sport par exemple pour certains élèves, du coup ça fait trois heures ou six heures de perdues dans la semaine (
), jessaie de faire comprendre que bah cest quand même un bon gros gâchis
 mais des fois cest pas simple parce que les horaires de piscine cest pas les enseignants qui choisissent, donc euh
 après cest plus un problème dorganisation demploi du temps où ça fini par devenir très compliqué
 (
) Parce que cest ça, G., son principal problème par exemple cest en maths
  en français il se débrouille plutôt bien
 alors si je lai que dans des séquences où on fait que du français, euh
 bah du coup à quoi ça rime ? Alors quand en plus il faut sarranger au niveau de lemploi du temps pour quil y ait que
 enfin maximum de maths avec G., ouais ça devient très compliqué
 (Page 25)
Belmont, Plaisance & Vérillon écrivent également que « dans le cadre EN, la fonction dAVS-i sest élargie par rapport à la façon dont elle a été déterminée dans le cadre associatif ». Ils appuient cette assertion par lexamen du contenu du cahier des charges élaboré en 2004 pour la formation « dadaptation à lemploi » des AVS dans lequel ils notent lapparition de thèmes nouveaux comme « les méthodes enseignantes dacquisition du savoir sur le plan pédagogique » ou des éléments de formation prenant en compte le fonctionnement global de la classe. Ces thèmes justifient, selon ces auteurs, de conclurent de cette manière : 
« Ainsi peut-on penser que lon attend de tous ceux qui suivent des enfants en individuel ou en collectif quils disposent déléments pour appréhender le fonctionnement pédagogique du milieu daccueil dans une perspective dadaptation des pratiques ». 
Il serait judicieux, une fois de plus, de senquérir de la forme que prennent les éléments à la base de ces constatations (qui sont relatifs aux textes) dans les pratiques quotidiennes.  
La formation proposée est centrée sur de linformation généraliste concernant tant lensemble du système éducatif que les différents types de handicap. La délivrance des ces heures de formation est le plus souvent confiée au milieu associatif du secteur médico-social, auxquelles il est conseillé dutiliser le référentiel demploi élaboré par la FNASEPH comme support de formation. « Ainsi, remarquent Belmont, Plaisance & Vérillon, pour la formation comme pour la définition des fonctions, lEN sest appuyé sur lexpérience acquise par les associations ». Avec un bémol, cependant, ainsi que le fait remarquer Christine Philip (2009) : les référentiels demploi élaborés par la FNASEPH et le Collègue Coopératif de Bretagne nont pas été repris par lEducation Nationale qui « propose un programme minimum, témoignant ainsi du peu de cas quelle fait de cette fonction ». 
	Ces formations ne semblent pas être réceptionnées par les AVS-i interrogés de la meilleure manière qui soit  et ceci quils soient, pour ce qui concerne notre échantillon, anciens ou néo-recrutés. Lisons ce quen disent par exemple Sylvie, néo-recrutée, et Pascal et Cécile, anciens recrutés qui, à sa suite, font des constats de ce qui manque à ces formations : 
Sylvie : les formations ? [Rires]
 euh
 euh
 disons quil y avait certaines euh
 formations qui étaient euh
 pas intéressantes
 non mais vraiment
 vraiment pas intéressantes, et pas assez spécifique du handicap,  ou alors des fois trop générales
 euh
 et lavis des AVS était généralement euh
 unanime par rapport à ça quoi
 (...) cest vrai que nous ce quon veut cest
 Pouvoir écouter des AVS qui ont vraiment exercé ça pendant euh
 plus de temps, et qui vraiment ont lexpérience aussi
 et ça reste toujours beaucoup plus intéressant que euh
 que certaines formations sur lécole en général, et tout ça
 (Page 41-42)
Pascal : il faut absolument à mes yeux un aspect pédagogique dans la formation
chose quil ny a pas du tout pour les AVS-i, hein
 (Page 43) 
Cécile : (...) [lors des formations] (...) il y a pas de rapprochement entre les AVS-i, cest
. Cest, ouais, cest compliqué, (...) il y a pas déchanges de pratiques (...) ou qui que quoi, donc cest vraiment 
  on sarrête pas quoi
 A tous les temps de pauses on est là « pepepepepepepep » [imite des échanges verbaux soutenus] 
 tu sens que vraiment les gens se vident
 (...) (Page 41-42) 
	Au regard de ce quexpriment les AVS-i quant à la formation « adaptation à lemploi » quils reçoivent, il est permis de se demander si le niveau de formation des AVS AED (qui ont majoritairement un diplôme de lenseignement supérieur), a vraiment été pris en compte à la fois par ladministration et les associations participant aux formations, et/ou si les formations, majoritairement reçues par les AVS-i comme insuffisantes ou mal conçues (par les six entretenus mais également par ceux sexprimant sur les forums Internet), ne font pas les frais du décalage entre les représentations (du travail effectué par ces personnels) des responsables associatifs et académiques, et les réalités de leurs pratiques.  
Au-delà de la formation, on remarque également la façon dont le texte de 2003 gère lhéritage de lancien dispositif : les AIS faisant de laccompagnement individuel deviennent des AVS-i, et les aides éducateurs travaillant en classes spécialisées (CLIS ou UPI) deviennent des AVS-co. Cette même dénomination, que viennent seulement distinguer des adjectifs (certes antagonique), semble laisser penser quAVS-i comme AVS-co font le même travail, à quelques nuances près. Seulement, si les textes définissent peu ou prou le champ de la pratique des AVS-i, restreint à un accompagnement individualisé, ils napportent en revanche pas de précision concernant les AVS-co et leur mission. On en trouve vraisemblablement une raison dans le fait que « le cadre de leur travail font quils sont amenés à des préoccupations en terme de fonctionnement de la classe et de place de la classe dans létablissement », notent Belmont, Plaisance & Vérillon. Nous postulons ici quAVS-i et AVS-co, du fait de leur généalogie différente, du fait de leur cadre de travail et de leurs missions également différentes, constituent, malgré le sigle quils partagent, deux types de personnels tout à fait différents, appelant ainsi des recherches différentes et spécifiques. Nous redisons également quau-delà de laspect historique, qui concerne ces deux catégories de personnel, nous nous intéressons spécifiquement au poste dAVS-i. 
Mais quils soient AVS-i ou AVS-co, les AVS AED ne restent pas les seuls représentants du personnel accompagnant scolaire. En 2005 émerge de nouveaux contrats, de nouvelles modalités de recrutement, de nouvelles appellations, qui se superposent au dispositif existant. 
3.2.3.2  2005 : les EVS- ASEH 
					CAE, CAV 
Le « plan Borloo » dit aussi « plan de cohésion sociale », présenté au gouvernement en juin 2004, créé deux nouveaux contrats aidés (c'est-à-dire que la totalité des cotisations patronales sont prises en charge par lEtat) : les contrats davenir (CAV) et les contrats daccompagnements vers lemploi (CAE). Ces deux contrats, de droit privé et de durée variant de 10 à 24 mois, vont servir au sein de lEducation Nationale pour recruter un nouveau type de personnel intervenant dans les écoles primaires : les emplois de vie scolaire (EVS). 
Recrutés directement par les ANPE (puis par Pôle emploi, nouvelle administration issue de la fusion des ASSEDIC et de lANPE, en 2008) sur la base dun niveau BEP ou CAP parmi les allocataires du revenu minimum dinsertion ou des allocations spécifiques de solidarité (ASS), ces nouveaux personnels dépendent administrativement détablissements publics du second degré, et se voient confier (théoriquement de manière exclusive) Zdeux types de missions. 
Dune part, laide administrative à la direction décole (« EVS administratifs ») ;
et dautre part laide à la scolarisation des enfants handicapés (« EVS ASEH », ou « EVS-h »). Ces derniers ninterviennent pas sur notification de la CDAPH et ne dépendent donc pas du projet personnalisé de scolarisation. Ils sont affectés à une école  et parfois se retrouvent à assurer un peu de ces deux tâches, voire plus, devenant en quelque sorte « multifonctions ».  
Les personnels EVS chargés de missions dAVS connaissent rapidement une augmentation spectaculaire de leur nombre : ils sont 7 185 en 2006 et 13 099 en 2009 (Confère tableau ci-dessous). Dès lannée scolaire 2006-2007, ils sont en nombre plus important que les AVS AED. Les EVS-h deviennent ainsi les personnels représentatifs de lensemble des accompagnants scolaires des enfants en situation de handicap  malgré cela, ils en constituent aussi le point aveugle. Ces personnels ne sont pas concernés par la convention de reprise de septembre 2009, ni par les deux qui ont été signées en juin 2010. 
Evolution des AVS mobilisables 
(en ETP)
AED/AVS-i
AED/AVS-co
Total
AED/AVS
EVS/AVS.i
Total EVS et AED
(en ETP)2006/20074 8191 6516 4707 18513 6552007/20087 5171 9029 41913 09922 5182008/2009(+ 2 000)
9 517(+166 UPI)
2 068
11 585
13 09924 684
					2010 : CUI et SAAD 
	Au premier janvier 2010 se met en place un nouveau contrat, prenant suite des CAE et CAV : le contrat unique dinsertion (CUI), issu du dispositif du « revenu de solidarité active » dit RSA. Cet évènement nous rappelle la fonction de la notion dinclusion (abordée dans le chapitre précédent) : subsumer linsertion et lintégration, le social, le professionnel et le scolaire, et permet de remarquer que le CUI mis au standard européen en matière de politique social devrait sappeler le contrat unique dinclusion (« active », cela va de soi). Seulement, adopter cette appellation rendrait largement visible la logique à luvre dans le fait de réserver le poste dAVS-i à des personnes éligibles à des contrats aidés : des personnes censées activement sinvestir dans leur propre inclusion se voient confier la tâche de participer à la même inclusion  mais scolaire cette fois  des enfants handicapés. Une sorte dinclusion au carré, en quelque sorte, avec le double bénéfice pour les classes dirigeantes de mettre au travail les pauvres tout en pourvoyant les enfants handicapés dune présence. En dautres termes, résoudre (statistiquement) le problème de laccompagnement scolaire tout en mettant au travail une partie de la population active au chômage  qui constitue un « stock » dont les élites politico administratives ne savent que faire. 
	Larrivée dans les établissements scolaires, et notamment dans les écoles, de personnel sous contrat EVS (donc de personnes éligibles à un contrat aidé par létat) consacre un mouvement daccentuation de lhétéronomie de lécole, et opère un lien direct entre le champ de linsertion et le champ scolaire  auparavant déjà opéré mais pas pour des postes intervenant dans les classes. 
Une analyse critique 
« Retenir simultanément deux opinions qui sannulent alors quon les sait contradictoires et croire à toutes les deux. Employer la logique contre la logique. Répudier la morale alors quon se réclame delle. Oublier tout ce quil est nécessaire doublier, puis le rappeler à sa mémoire quand on en a besoin, pour loublier plus rapidement encore ». 
Georges Orwell, 1984. (1949)
Le sens commun et le travail avec des enfants handicapés : dévouement, bonne volonté et féminité
Felicity Armstrong, une chercheuse britannique, sinterroge en 2000 sur la nature des liens entre les objectifs de léducation inclusive en Angleterre (contenus par lEducation Reform Act de 1988) et la nature des « orientations politiques générales basées sur le principe du marché ». Elle conclut sur la mise en relief dune contradiction entre politique dinclusion et « pression politique centrée sur laugmentation de la compétition et de la sélection entre écoles et élèves induite par la loi de 1988 ». On le voit, avec linclusion et avec la prééminence accordée au recrutement de contrats aidés pour occuper le poste dAVS-i, cette contradiction entre principes et objectifs affichés et dispositifs construits pour y répondre (directement issu des contraintes imposées par lorthodoxie économique) ne concerne pas que la Grande Bretagne. 
Malgré le fait que le député Guy Geoffroy, dans son rapport, définisse la création des EVS-h comme une « idée juste et généreuse », il est permis de se poser quelques questions sur le fait de favoriser loccupation du poste dAVS-i à une catégorie de la population qui est a priori fragilisée par ses conditions dexistence  et surtout à qui on nenvisage de noffrir aucune formation, en dehors de celle nécessaire pour la position dexécutant qui leur est réservée.
« Lexercice de la fonction dAVS napparaît pas accessible à tout le monde », notent Pierre Bonjour et Michel Lapeyre (2004). « Il ne suffit pas de manifester un intérêt pour le jeune enfant et davoir des capacités découte et de communication pour aider un élève handicapé à sengager dans des apprentissages », relève de son côté Christine Philipp en 2009, précisant que « des savoirs et des techniques » sont également indispensables. Charles Gardou expose également sans ambages que « la scolarisation délèves en situation de handicap nécessite des compétences professionnelles avérées, dépassant le dévouement, la vocation ou luvre de bienfaisance » (2006).
Ainsi, loin dune forme de racisme ou de mépris social à lencontre des personnes occupant un poste dAVS-i en contrat aidé (qui peut pourtant exister au sein des écoles), ces remarques invitent à questionner la priorité qui leur est donné au regard du fait que bonne volonté, dévouement (et accessoirement être une femme) ne peuvent suffirent, contrairement à ce quavance le sens commun, pour travailler avec des enfants handicapés. 
Pourtant, après plus de deux décennies dadossement de lemploi des accompagnants scolaires à des dispositifs relevant de la politique de lemploi et notamment ceux censés favoriser lemploi des jeunes (emploi jeune, assistants déducation), le dispositif des EVS-h ainsi que les projets qui se dessinent actuellement franchissent une nouvelle étape et semblent confirmer que le public concerné par linsertion (ou linclusion) sociale et professionnelle est en passe de se trouver consacré comme prioritaire pour entrer dans ce métier en devenir, consacrant également du même coup ce dernier comme un métier sous qualifié et en position dexécutant. 
Il nous paraît essentiel de rappeler le caractère fondamentalement sexiste qui assoit comme culturellement « naturel » loccupation par des femmes de postes de travail qui sont en relation avec la vieillesse, le handicap et lenfance. Les analyses de genre ont toute leur place, et leur pertinence, pour contribuer à mieux penser les processus éducatifs et les politiques qui les encadrent. Ainsi, parmi la population des AVS-i, que ces derniers (dernières) soient AED ou EVS ou quils ou elles soient des professionnelles du service daide à la personne (et donc probablement bientôt chargées de laccompagnement scolaire), cest une écrasante majorité qui est féminine. Or, répondre aux besoins des enfants passe aussi parfois par la prise en compte des nécessités de confrontation avec des figures masculines (ou féminines), ainsi que le rappellent ici Cécile et Pascal : 
Cécile : (...) [jai stoppé laccompagnement] parce que (...) je pense quil lui fallait plus un mec, vraiment, pour sen sortir je pense quelle avait vraiment besoin de se confronter (...) à une figure masculine (...) donc du coup jai stoppé, ouais, jai voulu stopper laccompagnement pour ça quoi
 (Page 6-7)
Pascal : 
son père était en prison
euh
 donc après la famille daccueil avait énormément de mal à gérer M., donc elle était un peu dans le rejet euh
 dans le rejet de M., je pense que ça, ça a pas beaucoup aidé effectivement
 parce que cétait une enfant qui euh
 bah qui pouvait vraiment mettre le bazar dans une famille parce que elle racontait des cracks énormes
 euh sur la famille daccueil, sur les adultes en règle générale
 qui fait que la famille daccueil, au bout dun moment, ne
 ne supportait plus M. et ce quelle pouvait dire euh
 dans les sorties euh
donc nosait  même plus sortir M. chez leurs amis euh
 de peur quelle raconte
 parce quelle racontait des histoires de 
 de violence, de pédophilie, de
 elle a essayé de le faire avec moi aussi dailleurs
 donc là cétait un peu le prob
 enfin moi cest ça qui ma un peu posé question avec M. cest que connaissant le
 connaissant le vécu de lenfant, je me pose encore la question de comment ça se fait quils ont mis en mec en tant quAVS-i
  (Page 8)
« Le travail de définition ou de redéfinition symbolique du poste a donc ici à faire à des représentations du métier qui renvoient autant à la division sexuelle quà la division sociale du travail », écrit Francine Muel à propos du poste dinstituteur. 
A reprendre à notre compte, et relativement au poste dAVS, ce quexprime ici Francine Muel-Dreyfus, il est possible de formuler plusieurs éléments danalyse. Le choix politique ici évoqué consacre ainsi une définition symbolique du poste orientée vers le « penchant naturel des femmes pour léducation des enfants » (Muel-Dreyfus, 1983), ainsi que la « générosité » censée fonder le geste de réserver le poste aux moins diplômées dentre elles. 
Cest également la quasi-obligation pour lensemble de la population des enfants handicapés de se voir, dans léventualité dun besoin identifié et reconnu par la CDAPH, de se voir accompagné par une femme, qui est consacrée.
Ce qui nest pas sans conséquences dordre sociale, éthique et politique, notamment celle qui consiste en une accentuation des processus de naturalisation de la division sexuelle (et sociale) du travail.
			La liminalité en partage	
« Le modèle de la liminalité (
) possède une grande valeur heuristique, bien au-delà des personnes handicapées. Il peut être mobilisé pour penser de nombreuses situations macro et microsociales dans lesquelles les personnes se trouvent définies et se perçoivent comme des étrangers. [Il] reste un modèle fécond parce qu[il] cerne les phases de latence de lordre social. » (Alain Blanc 2006)
La population concernée par les processus de dénomination de lenfance handicapée est composée encore aujourdhui, tout comme à lépoque à laquelle laction publique a commencé à se préoccuper de la gestion du problème, à la fin du 19ème siècle, dune majorité denfants des catégories populaires. La logique qui semble présider les décisions des personnels politiques et du haut fonctionnariat de restreindre le périmètre dexercice de la fonction aux catégories populaires qui forment également une majorité de la population concernée par les dispositifs dinsertion sociale et professionnelle (et les personnels des SAAD), et ce quil y ait intentionnalité ou pas, est de regrouper entre eux les agents sociaux en position liminale. 
« La maladie », écrit Robert Murphy, « est un très bon exemple dun état liminal non religieux et non cérémonial. Le malade vit dans un état de suspension sociale jusquà ce quil aille mieux. Linvalide, lui, passe sa vie dans un état analogue : il nest ni chair ni poisson ; par rapport à la société, il est dans un isolement partiel en tant quindividu indéfini et ambigu. »
La liminalité concerne en effet un état de seuil, dappartenance à des catégories de non-appartenance. Elle concerne à lorigine, sous la plume de lanthropologue Van Gennep, létat dune personne qui a commencé une initiation (au travers dun rite) mais qui ne la pas encore terminé : elle nest ainsi plus ce quelle était, mais pas encore ce quelle va devenir. Rapportée (par Robert Murphy) à la situation des personnes handicapées dans les sociétés industrielles, cette notion apporte beaucoup pour aborder les soubassements anthropologiques de ces dernières vis-à-vis du handicap et de linfirmité. 
Mais il est aussi possible, ainsi que lexplique Alain Blanc dans lexergue de la présente partie, didentifier différents états de liminalité, bien au-delà des seules personnes déficientes ou handicapées : les étudiants, les chômeurs, les vieux, par exemple. De manière générale, les personnes qui sont dans des processus de désaffiliation (ou de non-affiliation), plus ou moins avancés, par rapport au soubassement anthropologique de notre société industrielle (qui est redoublée dune présence forte dans lidéologie dominante) : le travail (entendu comme part active et régulière prise dans les processus productifs dune économie légale et mondialisée). 
Le degré de liminalité est particulièrement important quand la personne cumule une désaffiliation avec le monde du travail et des caractéristiques objectives qui, potentiellement, lempêche de construire ou de se saisir dun processus daffiliation (comme les personnes déficientes, dont la déficience est quoiquil arrive toujours présente et constitue dans tous les cas un caractère dempêchement à trouver du travail, ou les chômeurs de longue durée de plus de cinquante ans, dont lâge les réduit à des chances statistiques très faibles de retrouver un poste). Cette analyse renvoie à lemploi des EVS sur des postes dAVS  mais elle renvoi aussi aux assistants déducation, même si ces derniers sont dans un état de liminalité moindre et potentiellement plus sûrement renvoyés dans le temps vers des processus daffiliation. 
Lanalyse des caractéristiques demploi du poste dAVS montre le fait que le pouvoir politique opère ainsi un regroupement  qui a toutes les allures du naturel et du spontané (et de « lidée juste et généreuse ») , des personnes connaissant un état caractérisé par un degré plus ou moins grand de liminalité (les étudiants, puis les chômeurs de longue durée, avec les enfants handicapés à lécole ; les femmes peu ou pas diplômées avec les vieux et les adultes handicapés, pour le secteur de laide à domicile ou de laide à la personne, etc. ) De manière générale, la pensée politique dominante, la doxa de lélite politico administrative, semble considérer que des qualifications et une formation dispensant des connaissances dépassant celles propres au CAP ou au BEP, ne sont pas nécessaires pour travailler avec des personnes en situation de désaffiliation et de liminalité ; qui ne se débrouilleraient jamais aussi bien quentre elles. Mieux : les personnes qualifiées sont réservées, pourrait-on dire, au circuit du processus productif de biens, et donc pourvoyeur direct de points de produit intérieur brut et de croissance. Il nest pas pensable que des personnes qualifiées aillent passer du temps, qui serait littéralement perdu (pour le processus productif) à travailler avec des personnes qui, en tant que potentiellement non productives (et appelées à le rester ou à jamais ne le devenir), nont pas de valeur sociale autre que rapportée aux exigences modernes et consensuelles qui fondent le soutien de la nation aux « plus faibles », et qui nimplique rien de plus quune simple préservation de leur survie physiologique, sans aucune prise en compte du caractère social et relationnel de leur situation, réduit à leurs propres capacités individuelles à sen saisir.  
Ainsi la réponse de Nadine Morano (secrétaire détat à la famille, aux personnes âgées et aux personnes handicapées) à une question posée au début de lannée 2010 à lassemblée nationale à propos des difficultés financières des SAAD, illustre bien la doxa des « élites », dans une langue dont la finesse soporifique ne permet pas néanmoins de cacher laffirmation selon laquelle trop dargent est mis dans la formation  et quil ny a pas vraiment besoin de cette dernière :
"Il nous paraît important de souligner également que les motifs des difficultés rencontrées par les associations sont multiples et qu'elles peuvent également, dans certains cas, résulter de problèmes internes de gestion des services ou d'une politique de qualification n'intégrant pas suffisamment la réalité des moyens financiers disponibles localement."
« Qualités scolaires ou qualités humaines », ou lhéritage dune opposition historiquement constituée
La tradition propre à léducation spéciale de considérer que les « qualités humaines » suffisent et prévalent sur tout aspect de formation dite « scolaire » est invoquée pour justifier cet état de fait  et constitue ainsi un puissant allié au principe politique consistant à regrouper dans de mêmes espaces et temps sociaux tous les indésirables ou sans-valeur (les « non-valeurs sociales » de la fin du 19ème siècle) pour le processus productif. Mais cette perspective, qui oppose dune façon binaire, et à linstar du sens commun, « théorie » et « pratique » en conférant à cette dernière des vertus quasi-magiques qui valent plus que tout autre chose, oublie quune théorie se pratique également, et que des savoirs en apparence trop formels pour servir de matrice à une mise en acte directe peuvent constituer des ressources décisives dans une pratique professionnelle. 
Réserver ce poste à une population en état de liminalité, majoritairement féminine et peu ou pas diplômée, revient à consacrer de cette manière la fonction daccompagnement scolaire comme soumise à lensemble des hétéronomies dautres volontés professionnelles, en particulier celle des enseignants (Bordeau & Bourget, 2009). Cela interroge également, pour peu quon prenne le postulat qui consiste à penser cette fonction comme devant répondre à une logique déducation inclusive, ainsi que le suggère la loi de 2005. 
En effet, laccompagnant scolaire se trouve ainsi pris dans une logique de double bind, de double contrainte (au sens psychanalytique du terme) : il ou elle doit travailler à favoriser la prise dautonomie de lélève relativement aux contraintes scolaires telles quelles ont été définies dans le projet personnalisé de scolarisation tout en étant lui-même en situation de dépendance. Il doit contribuer à aider lélève à penser et construire sa position denfant handicapé sans avoir lui-même les conditions de possibilités de penser son propre positionnement (Phillip, 2009). 
Un accompagnement que laccompagnant ne pense pas mais qui se trouve seulement défini par des injonctions de professionnels qui peuvent avoir dautres intérêts que ceux qui fondent cette pratique, ne peut que conduire à la construction sophistiquée de nouvelles formes de ségrégation, internes à lespace physique de lécole, et qui se donne les atours, selon le principe de lopposition binaire « intégration/exclusion » - ou, opposition plus puissante encore, « inclusion/exclusion » - dun meilleur sort fait aux enfants handicapés par une société définitivement en route vers le progrès.
Laccompagnement scolaire dans lespace des positions des 
		 agents/acteurs intéressés par lenfance handicapée				
« « Cest la même histoire qui hante lhabitus et lhabitat », écrit Pierre Bourdieu en 1980, et cette histoire hante aussi la manière dhabiter un poste, qui lui-même contient, du fait du produit historique que sa position dans lespace social des positions des postes du champ constitue, une histoire cristallisée. Cest lanalyse de la rencontre entre lhistoire sociale individuelle et lhistoire sociale du poste qui permet de « reconstruire le sens social de « linvestissement » dans linstitution et du même coup, déclairer les médiations par lesquelles les projets institutionnels prennent corps » (Muel-Dreyfus, 1983)
Les accompagnants scolaires ont émergé dans le champ éducatif français à un moment de lhistoire de ce dernier où la formalisation des différents métiers qui le composent aujourdhui avait déjà eu lieu. La dynamique historique du champ, rappelle Philippe Mazereau (2005), est en effet constituée autour de lignes de tensions entre les trois pôles que sont : la production scientifique, les corps professionnel et « la doctrine et laction politique » : 
« Quil sagisse des anormaux en 1909, des inadaptés en 1944, des handicapés en 1975, sous des modalités diverses (commissions, rapports), lEtat sest tourné vers les spécialistes afin quils fournissent les instruments de distinction des populations éligibles. Dès lors, les débats, voire les polémiques, entre scientifiques et professionnels dhorizon divers se succèdent pour aboutir à une stabilisation validée par une loi. »
	Les productions scientifiques en matière denfance anormale entretiennent ainsi, dans ce processus, un lien direct avec lémergence des différents métiers : 
« Chaque affinement nosographique a donné lieu à une spécialisation, vectrice de techniques et de savoirs-faire nouveaux et qui fonde les processus de professionnalisation. »
Dans loptique daffiner la compréhension et la connaissance générale du champ éducatif, et considérant que les pratiques de coopération entre les différents métiers, au-delà des seules collaboration ou concertation (insuffisantes), vont devenir absolument nécessaires en matière éducative  en particulier dans des objectifs déducation inclusive , il apparaît nécessaire de développer une analyse fournie des différentes modalités de professionnalisation des multiples métiers intervenant dans le champ de léducation (le plus souvent construits selon le schème historique posant la triple division « éducation-apprentissage-soin » comme naturelle) tout en opérant la production de cette analyse à partir dun préalable épistémologique considérant ces cloisonnements comme devant être dépassés, selon des modalités quil conviendrait de travailler. Nous nous contenterons ici de présenter brièvement ces différents métiers, en nous limitant à ceux de léducation scolaire et de léducation spéciale.
	
« On relève, notent Belmont, Plaisance & Vérillon (2006), que les AVS sont placés dans une position stratégique particulière qui leur permet dappréhender la situation particulière dun élève de façon globale, sous des angles à la fois pratique, technique et pédagogique ». 
Cette position les amène à être des interlocuteurs pour différents partenaires professionnels, avec lesquels ils partagent, ajoutent Belmont, Plaisance & Vérillon, « des difficultés similaires, notamment au niveau de la collaboration ». Pierre Bonjour et Michèle Lapeyre (2004) définissent quant à eux la place de lAVS comme « subversive », car porteuse de manière intrinsèque dune « remise en cause de lordre pédagogique », tout comme peut lêtre la présence de lélève quils accompagnent, notamment au regard de la domination des programmes et de la logique de sélection qui sinitie surtout à partir du cours préparatoire. 
Logiques de concurrences de territoires et de légitimités professionnelles sont ainsi, et quelles que soient la nature des discours (souvent réductibles à de pieuses invocations), toujours à luvre, plus ou moins en sous-main, dans le champ de léducation, et en particulier dans les processus de scolarisation des enfants handicapés. Dans la perspective de situer les accompagnants scolaires dans ce champ, nous allons exposer brièvement les différentes professions (et positions) côtoyées. En préalable, mentionnons la fonction de coordinateur du dispositif AVS, qui concerne les AVS AED, qui a pour rôle dorganiser les formations dadaptation à lemploi, de répartir les notifications délivrées par les CDAPH entre les accompagnants, et dêtre une ressource pour ces derniers. 
Mais auparavant, intéressons-nous aux propriétés du poste dAVS-i. 
3.3.1 	Les propriétés du poste
« Sil y a « harmonie » entre les hommes et les postes, cest que lhistoire du poste est susceptible dintégrer harmonieusement lhistoire social familiale de ceux qui occupent le poste » (Muel-Dreyfus, 1983). 
Du fait de son histoire propre, et à linstar de tout poste caractérisé par le fait quil traverse une période d« invention », le poste dAVS entretient un rapport dialectique (ou plutôt dialogique) puissant avec son occupation  et les propriétés du poste avec celles de lagent qui loccupe. En effet, les potentielles activations des dimensions relationnelles du poste telles que nous les décrivons ci-dessous ne connaissent pas la relative régularité qui peut être celle de postes dont les procédures de recrutement sont stables et stabilisées, et qui recrutent ainsi préférentiellement des agents socialement prédisposés à occuper tout « naturellement » le poste  en dautres termes, des postes dont la stabilité du recrutement induit celle, grandissante à mesure que grandit le processus de naturalisation qui transforme le moment dinvention du poste en « boîte noire », de ladéquation entre les dispositions requises pour occuper le poste et les dispositions des agents qui, invoquant la « vocation » ou le fait de « être fait pour », occupent pratiquement le poste. 
	La période « dinvention » dun poste est caractérisée par le fait que « l « identification » au poste se réalise au terme dun travail qui est inséparablement travail sur le poste et travail sur soi-même, et dépend de lhistoire sociale du poste et de lhistoire sociale individuelle » de lagent qui loccupe. Dans ce travail dinvention du poste dAVS-i en cours, rien noblige, contrairement à un poste « naturalisé » et dont la période dinvention est reléguée dans « linconscient social de la profession », à ce que ce soit « lindividu qui sincline » face au poste (Muel-Dreyfus, 1983)  c'est-à-dire à ce que ce soit les propriétés du poste qui simposent face aux propriétés de lagent qui loccupe : linverse peut aussi se produire. Dans le travail dinvention également, cest lactivation potentielle de la surface relationnelle du poste qui est instable. 
 
	3.3.1.1	 Une position relationnelle 
   Les propriétés du poste dAVS-i sont résumées dans les cinq points suivants : 
1- Le poste emprunte et mêle des référents matériels et symboliques empruntés aux deux systèmes historiques sur la frontière desquels il se trouve (éducation spéciale et éducation scolaire). Par exemple, pour le scolaire : le cadre spatial et symbolique de lécole et de la classe dite « ordinaire » ; pour le spécial : des interventions décidées par une commission de spécialistes en direction dune catégorie denfants spécifiée, etc. 
Il est potentiellement en relation professionnelle avec une multiplicité d « acteurs/agents » du processus de scolarisation des enfants handicapés (Mazereau, 1998)  et dacteurs non humains : 
Tout dabord, dans le cadre de la classe : 
lenseignant (dont le nombre peut aller jusqu à 4 pour les AVS individuels, selon le nombre possible daccompagnement sur une année) 
les élèves des classes (jusquà 4 classes, donc)
lélève accompagné (de un à quatre)
les ATSEM (et personnels de mairie pour les temps périscolaires) (idem)
les dispositifs didactiques et
 la pratique pédagogique de lenseignant, formant ensemble
 le système denseignement
les territoires très différenciés du handicap et de la déficience
Puis dans le cadre de létablissement : 
léquipe pédagogique (idem) 
les élèves des autres classes (récréation, décloisonnement, temps du midi, etc.)
les parents de lélève accompagné
les parents des autres élèves
Enfin en dehors de létablissement :
lenseignant référent (poste créé par la loi de 2005 et prenant suite des secrétaires de CCPE)
les professionnels du médico-social et du socio-éducatif (beaucoup denfants handicapés scolarisés ont un suivi annexe à lécole assuré par des structures ou des services de léducation spéciale  dans ce dernier cas, il nest pas rare quil y ait une intervention à lécole également, comme avec les SESSAD par exemple)
les autres AVS 
ladministration employeur, lInspection Académique
Les organismes associatifs ou autres qui assurent les 60 heures de formation dite « adaptation à lemploi » - délivrées en cours doccupation du poste, jamais de manière préalable. 
Lensemble du paysage institutionnel créé par la loi de 2005
Lensemble du paysage institutionnel hérité de lhistoire (riche et épaisse) de léducation spécialisée
Les textes qui mentionnent ses missions énoncent les termes suivants : « aide » et « accompagnement », envisagés de manière strictement individuelle et individualisée (là où lhistoire du poste montre que des lieux et des périodes ont connu des conceptions de laccompagnement scolaire attachées au cadre collectif de la classe ou même de lécole)
Ce poste est dans une position pas du tout stabilisée en terme de procédures de recrutement, types de contrat, durée doccupation du poste, formation, et incidemment en termes de caractéristiques sociales de la population qui loccupe (« linvention »).
Néanmoins, certains invariants se dégagent de sa longue histoire
 : 
peu ou pas de formation
occupation temporaire du poste (de quelques mois à six ans selon les périodes)
faible reconnaissance salariale
adossement constant à des dispositifs dinsertion sociale et/ou professionnelle
Ces cinq points forment les cinq propriétés du poste dAVS. Les points 4 et 5 constituent vraisemblablement des propriétés ayant une forte contingence historique, à lopposé des trois premières, et risquent de se voir transformées à mesure que sachèvera le processus dinvention du poste  et que ses origines et périodes instables seront transformés en boîte noire, et leur produit naturalisé. 
3.1.3.3  Une position réactivée 
« Lorsque les éducateurs spécialisés font, en 68, une critique de lécole caserne, du scolaire et des pédagos, ils se font sans le savoir les nouveaux héritiers dune tradition institutionnelle, produite au cours dune longue histoire, marquée de façon récurrente par des luttes entre le « privé » et le « public », la philanthropie et lassistance publique, la magistrature, la médecine et léducation nationale ». 
En reprenant la structure de la phrase de Francine Muel-Dreyfus, on pourrait écrire, à propos des AVS-i, la chose suivante : 
« Lorsque les AVS (et les défenseurs du poste) font une critique de lécole ségrégative, de lécole qui ne sait pas sadapter aux élèves non conformes au modèle du « moyen et bien portant », ils se font sans le savoir les héritiers dune tradition de proposition de réforme globale du système éducatif, de Désiré Magloire Bourneville à Henri Wallon en passant par Jean Zay. » 
 « Le travail dinvention naît de la rencontre réussie, en certains moments de lhistoire, entre des individus et des positions sociales auxquels ils donnent ou redonnent vie », écrit Francine Muel-Dreyfus  (1983). La question à lorigine de cette partie est ainsi la suivante : la position du poste dAVS-i est-elle une réactivation dune position homologue occupée ou revendiquée dans le passé de lécole républicaine française ? Considérer cette question semble nous permettre dajouter une sixième propriété au poste dAVS, qui serait la suivante : « Sa position est en partie une réactivation dune position spécifique historiquement déjà occupée ou revendiquée ». 
	En effet, à prendre connaissance des éléments suivants apparaît la parenté de position entre celle occupée par les AVS-i et celle, historiquement ancienne et ayant pris plusieurs formes (réelles ou invoquées), dun personnel non enseignant au sein de lécole destiné à aider les enseignants et les élèves à propos de problématiques spécifiques : 
« W.D. Wall (1958) fait remarquer que si la mise en place dun service de psychologie scolaire est relativement récente, les conseils destinés aux parents et maîtres ne datent pas dhier ; on peut selon lauteur, voir dans les conceptions de Platon, Coménius, Rabelais, Montaigne, Locke, Rousseau, Pestalozzi, Itard et Froebel une justification fondamentale à lexistence dune psychologie scolaire. A titre dexemple, on peut constater avec Rabelais (1494-1553) le désir dindividualiser laction pédagogique sur une connaissance approfondie de lenfant. (
) En 1945, la psychologie scolaire est conçue comme une partie nécessaire dun tout cohérent : (
) elle fait partie dun vaste projet de rénovation de lenseignement de la maternelle à luniversité (
). Ce volet particulier rappelle des projets conçus lors de plusieurs autres tentatives de rénovation de lenseignement, entre autre ceux de Zay en 1937, qui visaient à « réunir tous les enfants autrefois prématurément séparés » (Ducoing, 1990, page 2) (
) Wallon nourrissait, rappelons-le, une idée très précise de la psychologie : aider les enfants à sadapter à lécole et lécole à sadapter aux enfants. ». (Bellanger, 2002). 
Il semble bien, pour achever de situer la position du poste dAVS-i, que bien peu dAVS et bien peu dinitiés à une occupation « réussie » de ce poste ne se retrouveraient pas dans cette déclaration dHenri Wallon, extraite de sa leçon douverture au Collège de France :
« Il est indispensable d (
) observer [lenfant] dans les différentes exercices de son activité quotidienne, c'est-à-dire en particulier à lécole (
). Son attitude devient complémentaire des attitudes prises autour de lui (
). Dans sa famille, en classe, vis-à-vis du maître et de chaque maître, avec ses camarades, au travail et dans les jeux son attitude est sujette à se modifier. (
) Cette liaison nécessaire des points de vue, je voudrais pouvoir la réaliser. Elle exige évidemment des collaborations étendues. Cest à ces collaborations que je souhaite faire appel ». (Cité par Bellanger, 2002). 
Cette déclaration, qui semble faite pour défendre le poste dAVS, défend en fait, au-delà de ce quelle défend explicitement (une conception du poste de psychologue scolaire), la validité, la nécessité et la pertinence dun poste non enseignant au sein de lécole, un poste caractérisé par des nécessités temporelles différentes qui permettent dhabiter une pratique rendue impossible par les propriétés de la position du poste denseignant. Les différences existent, bien sûr, entre la nature des postes ici évoqués (notamment le fait que, pour celui dAVS, il ny ait aucun adossement à une discipline particulière). Cependant, cest de leur position dont il sagit ici  et de ce point de vue, les ressemblances sont tout à fait frappantes. 
En suivant Francine Muel-Dreyfus et sa définition du travail dinvention, il semble alors bel et bien que linvention du poste dAVS soit en fait une réinvention actualisée du projet dHenri Wallon et de Renée Zazzo pour la psychologie scolaire qui, nous le savons, na pas été celui qui a été consacré par linstitution. Linvention du poste dAVS redonne vie à une position déjà activée auparavant. 
Cet état de fait appelle une remarque fondamentale, à ladresse des philosophes qui souhaiteraient (et nous considérerions cette initiative comme tout à fait intéressante) constituer une généalogie notionnelle des soubassements éthiques du discours autour de linclusion scolaire, de la scolarisation des enfants handicapés ou autour de la défense du poste daccompagnant scolaire de ces élèves : cest bel et bien les positions sociales, dans lespace social des positions, et, plus finement, la façon dont les positions sociales sactualisent au travers de loccupation dune position sociale dun poste dans lespace social des postes dun champ professionnel donné, qui contiennent (en partie, à tout le moins) en elles-mêmes les principes éthiques et les valeurs morales dont peuvent potentiellement se prévaloir les agents qui occupent ces positions. Ses propriétés les contiennent, et nattendent pour être réactivées quune rencontre avec celles d « histoires sociales familiales » qui leurs sont homologues. 
En dautres termes, et plus précisément, les agents/acteurs qui contribuent à la réinvention du poste dAVS, homologue à celui défendu par le projet Wallonien de psychologue scolaire, nont pas forcément lu Emmanuel Levinas ou Henri Wallon, ignorent probablement lhistoire philosophique de ce quils défendent, mais le défendent pourtant.  Il y a donc un phénomène dinscription et de transmission sociale de valeurs morales et éthique qui dépasse le cadre strict de la pratique professionnel du lector pour embrasser un caractère relationnel propre aux rapport que des positions sociales peuvent entretenir vis-à-vis dautres, dans un espace social partagé ou non. 
	3.3.2 	Le poste dAVS-i AED et ses principales relations : 
		éléments délucidation 
Guillaume : (...) on va parler maintenant dun gros morceau
 à savoir la
 le travail en collaboration avec les enseignants 
Cécile : [petit rire significatif]
Guillaume : quest-ce que tu as envie de dire à ce sujet là, Cécile. ?
Cécile : euh
 les enseignants, euh
 moi AVS-i avec les enseignants
 lAVS-i [sur le ton dénumération dune liste, en utilisant les doigts de ses deux mains NDR] sadapte
  sadapte
 sadapte
 Sadapte
 sadapte à lenfant, sadapte à lécole, sadapte à léquipe et sadapte à lenseignant
 lAVS-i doit faire preuve dadaptation (rires), ça cest clair et net
après tout dépend des enseignants, tout dépend de la manière dont eux abordent le handicap
 puis ça dépend aussi du handicap, je veux dire tu as tellement de paramètres qui
 quil faut prendre en compte que cest vraiment pas évident
(Page 25)
3.3.2.1  La famille
Lélève accompagné 
	Lélève accompagné est la personne qui occupe la position la plus importante vis-à-vis du poste dAVS-i : cest son intérêt qui est censé être servi par lagent qui occupe le poste. Dans la présente partie sur lélève accompagné nous nous limiterons à la recension de quelques grands thèmes qui traversent la relation entre laccompagnant et lélève : en effet, étant donnée la position centrale de lélève dans le réseau de relations de lAVS-i et dans les missions qui lui sont confiées, la relation quils entretiennent tous les deux se retrouve, plus ou moins explicitement, dans la plupart des autres. Cette relation centrale se trouve donc influencer, teinter et simprimer sur lensemble de celles qui caractérisent la propriété relationnelle du poste, et constitue ainsi larrière fond de toutes les analyses qui suivront celle, spécifique, que nous entamons ici. 
Une méthode rigoureuse analysant spécifiquement la parole des AVS-i se devrait de la rapporter systématiquement à la situation de lélève accompagné, tant les modalités daccompagnement peuvent être différentes entre un enfant qui serait, par exemple, autiste, dysphasique ou encore infirme moteur cérébral (IMC). Ici nous précisons parfois la catégorie du handicap dont relève lélève accompagné, mais seulement pour préciser que les positionnements évoqués par les AVS-i dépendent plus dindicateurs que nous souhaitons mettre en question (comme par exemple la durée doccupation du poste) que des situations particulières des enfants quils accompagnent  situations qui peuvent parfois imposer des positionnements paraissant a priori comme contradictoires avec les missions. 
Lanalyse de la parole des AVS-i délivrée à propos de leur relation avec les élèves quils accompagnent montre quil y a des différences très nettes entre néo et anciens recrutés. Cest tout dabord dans les moments du début de laccompagnement quon relève des divergences. Ainsi de ce quexpriment (parcimonieusement) Lalie et Sylvie, à propos délèves ayant des « troubles des apprentissages » : 
Lalie : ouais moi je suis à côté de lui
 (
) je suis toujours à côté de lui
 (
) (Page 20)
Sylvie : alors K., je suis assise juste à côté
 donc lui, en fait, la maîtresse a décidé de le mettre euh
 tout seul à une table, sans voisin, parce que au départ il avait des voisins et puis ça sest pas très bien passé, (
), depuis le début de lannée, je suis tout le temps à côté.. jai pas pris de recul ou quoi que ce soit (
), ouais je suis tout le temps à côté
(p.11-12)
Tandis que de son côté, Cécile (ancienne recrutée) tente dexpliquer la façon dont elle se positionne au début de laccompagnement : 
Cécile : (...) jarrive, je me place en observation
 et là je vais être fondamentalement plus vers le fond de la classe ou dans un coin de la classe ou sur le côté de la classe
 mais euh voilà, je vais être en observation, un petit peu tout le monde, je vais naviguer aussi, je vais voir un petit peu tout le monde, parce que je pense quil faut que je me présente aussi à tout le monde, du coup je fais partie dun groupe, jai beau accompagner un enfant, il y a aussi le regard du groupe sur moi qui va induire aussi le regard quils vont avoir sur lenfant que jaccompagne, après tout dépend du handicap, sil est visible, si il est perturbateur, si etcetera, etcetera
(Page 29-30)
	Ces éléments renvoient également, outre à lentame du processus daccompagnement, à la question plus générale des position et circulation spatiales du corps de lAVS-i dans la classe. Il apparaît que, à la différence des anciens, les néos-recrutés ont tendance à ne pas connaître les conditions de possibilité de penser ce point tout à fait essentiel  puisquil constitue une grande partie du versant non verbal de tout le langage formant les processus de communication avec lélève accompagné, avec la classe et avec lenseignant. Sur ce point, Cécile exprime les éléments suivants :
Cécile : (...) à un moment donné, je vais pas rester plantée au milieu de la classe si lenfant a pas besoin de moi et que, tu vois, ils sont débordés, et voilà
 et je moccupe et puis ça me permet dêtre en contact avec les autres enfants
 Que lenfant avec qui je suis censé travailler (...) voit quil est autonome dans son groupe, et quil y a dautres groupes, aussi, autre que son groupe à lui, qui ont « besoin de », donc
 
Guillaume : et quil te voit
 intervenir avec dautres
Cécile : ouais, avec les autres, etcetera, donc après cest une mesure que tu prends suivant la classe, suivant son évolution, suivant euh
 mais ça je crois que cest au fur et à mesure des années que tu affines ce genre de
 cest clair
 (Page 35)
	Ce rapport à la distance, entendu dans le sens précédent (c'est-à-dire spatiale), mais quon peut étendre également à son versant symbolique, détermine également une possibilité de réaction de lélève accompagné : le rejet.
Sylvie : (
) jétais toujours dans son groupe à lui, forcément, et je masseyais à côté de lui
 même si parfois, il y a eu un passage où il refusait que
 que je massois à côté mais euh
 en fait pour lui il y a eu toute une période où il ma un petit peu repoussé quoi
 parce que... parce que
 bah je sais pas exactement mais euh
G : tu le gênais
S : il y a eu une petite période où il ne voulait plus me voir parce que
. Oui
mais bon bah dans ces cas là, généralement, je restais dans son groupe mais je masseyais pas juste à côté de lui, jallais à lautre bout de la table [29m23], ou
 et puis parfois il revenait de lui-même à côté de moi
 voilà
(p.15)
Du point de vue de lélève (et quel que soit son handicap) avoir « un adulte à soi » peut vite devenir pesant, et difficilement supportable. Cette « conscience des choses », comme le dit Noémie ci-dessous, est de notre point de vue quasiment un invariant pour tous les élèves ayant un accompagnement  même si les modalités de cette « conscience » peuvent savérer différentes. 
Noémie : (
) certains enfants peuvent être en refus de nous parce que
 on a limpression
 certains ont conscience des choses
 ils ont limpression que bah on les montre du doigt
 (Page 32)
	Avoir un « adulte à soi » est un stigmate, et cela néchappe pas aux enfants  quils soient accompagnés ou non. Cécile exprime quelque chose qui traduit quelle a vraiment pris en compte cette réalité ; cest alors en concertation avec lenseignant que sétablit une stratégie destinée à désamorcer cette « pression » : 
Cécile : (...) parfois il y a trop de pression à cause de ma présence
 il y a trop de pression sur lui [lélève accompagné]
 avec linstit tout de suite on va essayer de déterminer sil y a un autre enfant qui aurait éventuellement besoin daide
et euh là du coup je vais me concentrer sur euh
 pour relâcher un petit peu la pression, sur lautre
 quil se dise que bah à la limite il est pas tout seul dans une situation où il peut avoir besoin dune aide particulière (...) (Page 30)
	Seuls les anciens recrutés de notre échantillon adoptent un positionnement qui sapparente à une approche environnementaliste du handicap  qui induit de ne pas se centrer sur lenfant et son handicap (ou sa déficience) et de travailler également sur lenvironnement qui laccueille. 
Pascal explique ainsi ci-dessous que ce positionnement, qui oblige à considérer lélève accompagné non pas comme seul face aux exigences scolaires formellement définies par les textes, mais dans la réalité immanente de son environnement scolaire, peut aussi servir à des fins de protection de lélève quil accompagne  les élèves handicapés, à mesure quaugmente lâge et le niveau scolaire, sont particulièrement soumis aux processus grégaires de moqueries et dinstrumentalisation : 
Pascal : bah il y a
 ya la relation
 je préciserais un petit peu au niveau de la relation de lenfant aux autres enfants
je trouve que ce qui est très intéressant au niveau AVS-i cest quon est beaucoup plus disponible pour écouter ce qui se dit, pour observer ce qui se fait, ce que lenseignant ne peut pas toujours faire puisque ben elle
 elle est occupée à faire euh
 à gérer sa classe, et donc ça permet des fois de
 dobserver certains comportements, certaines choses qui sont dites (
) que lenseignant na pas forcément remarqué mais que nous on peut relever
 et ne pas accepter de la part des autres par exemple
 je pense notamment à G. qui est très naïf donc là il commence à se retrouver en CM2 où la classe commence à être un peu préado
 et comme G. est très naïf et très gentil bah on 
. On se sert un peu de lui dans les jeux de « cap ou pas cap », dans ce genre de chose
 où là cest bien davoir une oreille un peu attentive, de loin, pour entendre un peu ce qui se dit, ce qui est proposé de faire à G.
 et plusieurs fois comme ça, G. sest retrouvé dans une situation où on pouvait penser que cétait lui qui était responsable dune situation, alors quen fait il sest fait complètement manipulé par les autres, ouais
 et là cest bien quil y ait lAVS pour sen rendre compte parce que sinon ça serait passé inaperçu et G. se serait fait enguirlander
	Au-delà de la relation avec lélève accompagné, centrale et fondatrice de la logique même du poste dAVS-i, les occupants du poste connaissent une autre relation qui est extrêmement importante : il sagit de celle quils construisent avec les parents de lélève dont laccompagnement leur est confié. 
Les parents
Les néo-recrutés
Nous trouvons, là encore, des différences tout à fait notables entre néos et anciens recrutés. Par exemple, Lalie répond dune manière assez abrupte (et sérieuse) une question concernant sa relation dAVS-i avec les parents : 
Guillaume : (
) quest-ce que ten dirais toi, de manière générale, (
) des relations avec les parents des enfants que tu accompagnes ?
Lalie : euh
 bah cest mieux de pas les connaître, en fait
 (Page 11)
	Il savère que les services de linspection académique du département où travaillent les six AVS-i donnent en fait des consignes à ce personnel. Cest Sylvie qui nous lexplique : 
Sylvie : (
) Et en fait, je sais que pendant lentretien dAVS au début (
) 
 [au] recrutement
, on mavait dit de ne pas trop trop parler avec les familles
et donc bah au départ ça mavait un peu surpris parce que 
 je me disais que les familles ont le droit de savoir un petit peu, et ça se comprend quils aient envie de savoir comment ça se passe et tout 
 ». (Page 21)
	Ainsi, le groupe des néos recrutés, qui se caractérise par une hétéronomie plus grande que les anciens vis-à-vis, notamment, de lemployeur, habite avec plus de force (mais pas forcément plus de conviction) cette consigne de « ne pas trop trop parler avec les familles ». Par exemple, après Lalie, Julie, qui a intériorisé les consignes de son employeur et les présente comme une évidence liée à la « position » de lAVS-i :
Julie : (
) les parents, nous normalement dans notre position (
) on a pas à avoir de liens directs avec la famille, quoi
et les parents cest tout juste si ils ne mont pas demandé mon numéro de téléphone, mes coordonnées et tout ça, pour voilà
 donc voilà
 donc euh bon jai essayé de recadrer un petit peu les choses gentiment en disant euh
 «  si il y a quelque chose, cest par rapport à létablissement, et puis ensuite euh
 voilà »
 (Page 7)
	Un autre point, relativement à cette injonction de distance avec les parents, est à mentionner, et qui est le poids du rapport avec le territoire au sein duquel travaillent les AVS-i. De ce point de vue, les deux extrêmes que sont Sylvie (enfant du pays depuis plusieurs générations) et Lalie (qui vient de la région parisienne et dont les parents sont espagnols) adoptent des attitudes tout à fait différentes vis-à-vis des parents. Ainsi lit-on dans les propos de Sylvie son ancrage territorial : 
Sylvie : (
) il y a des parents comme ça avec qui jai eu beaucoup plus de lien
 que jai rencontré souvent le soir, et tout
et puis dautres euh
 par exemple la maman de K., elle... Enfin ses parents
 jai été euh
 en fait la maman voulait me rencontrer, et je me suis déplacé chez eux parce que il y avait pas possibilité de faire autrement
 pour se voir
 et puis
 (
) jen ai pas parlé à la hiérarchie, mais lécole était au courant (
)
bah en fait par rapport à
 parce quelle elle travaillait tard, et vu que moi je finissais à six heures aussi, on se serait pas rencontré autrement quoi
 donc javais dit : daccord, je passerais
 je passerai chez vous
 (Page 21)
	
	Contrairement à Sylvie, Lalie, avec sa double propriété de migrante et détudiante en psychologie, aborde la relation avec les parents sous un angle beaucoup plus distancié  et derrière lequel on perçoit aussi un jugement plutôt négatif : 
Lalie : (
) à partir du moment où jai vraiment connu les parents, fin, où jai pu les rencontrer, euh
 bah si ça explique pas mal de choses par rapport au trouble de lenfant
 par exemple la petite fille qui était en maternelle euh
 sa mère nous avait dit : « oui, faut pas faire ci avec elle, ça elle sait pas faire, elle sait pas faire
 », Et finalement euh
 elle savait faire quoi
 cest juste que sa mère euh
 ne voulait pas entre guillemets la mettre en danger, alors quelle létait pas quoi
 (
) cest limite euh
 quand elle nous parlé de son enfant bien avant quelle vienne à lécole, cette petite fille, elle nous a fait un tableau noir de sa fille
(
) poussé à lextrême aussi
par exemple euh
 tout ce qui était nourriture
 donc elle avait pas droit de se nourrir euh vraiment et euh
 et euh
 bizarrement la collation du matin la petite fille elle la prenait
 alors que la mère nous a dit « non, faut pas lui donner »
 la petite fille euh
 même si elle en prenait un petit bout elle en prenait
 donc
 (Page 11)
	On trouve finalement chez Julie un discours tout à fait intéressant dans le sens où il traduit une partie du sens commun quant aux familles de personnes handicapées qui est directement issu des tréfonds de lhistoire de léducation spécialisée  c'est-à-dire cette conception selon laquelle en matière de légitimité à se positionner sur le sujet de léducation de leur enfant déficient ou handicapé, les parents arrivent en dernière position, loin derrière lensemble des corps professionnels dont le statut de « spécialistes » les autorisent, selon Julie, à se sentir « au-dessus » des parents : 
Julie : (
) [en équipe de suivi] jai limpression de pas être à ma place pour dire des choses, en fait
 bon je vais dire des choses, qui vont être prises en compte, certainement, mais... cest moi plus par rapport aux autres en fait
 (
) parce que disons bon [sur le ton dénumération dune liste] quelquun qui est enseignant bah il a sa place, [lenseignant référent] il a sa place, la directrice ou le directeur décole il a sa place, les parents bon
 voilà je dirais il y a les parents [fait un geste avec la main tendue pour figurer le plus bas possible, NDR], moi [un peu plus haut, etc.], et puis après voilà, ça monte
 mais autrement disons quon va dire bah je suis presque au niveau des parents quoi finalement
 (Page 18)
	Julie situe ainsi la « place » de lAVS-i pas loin de celle des parents  mais quand même au-dessus, ces derniers étant tout en bas de léchelle de légitimité de ceux qui peuvent parler de lenfant concerné. Inutile de notre point de vue de crier au scandale  ce pourraient être tentés de faire certains parents denfants handicapés : ce quexprime ici Julie cest non pas un point de vue personnel mais une partie de linconscient collectif vis-à-vis de linfirmité et du handicap, et pour faire évoluer ces conceptions rien nest plus inutile que le reproche individuel  et rien nest plus utile que de former les personnes au point de vue des parents. 
	Mais Julie exprime, sur cette lancée, un élément tout à fait intéressant quant à la position du poste dAVS-i qui nous semble constituer un éclairage très important pour qualifier un peu mieux cette position  et accentuer la pertinence du modèle dintelligibilité que nous construisons ici : 
Julie : disons que nous [les AVS-i] on a peut-être le lien un petit peu entre le familial et un petit peu entre le scolaire, quoi
voilà
cest peut-être plus ça, du coup, on est un petit peu en balancement entre les deux et du coup la position nest pas évidente
 (
) bah ya un petit côté fam
bah oui, cest vraiment un petit côté, (
) mais on a quand même peut-être plus de recul que lenseignant par rapport au côté familial justement, par rapport à la proximité euh
 pis la confiance quoi, les enfants ils nous font confiance, et puis voilà
 (
) parce quil y a une relation de proximité, de confiance, et tout ça, de compréhension quoi, et donc du coup, même sans savoir beaucoup de choses de la personne, le fait de connaître son problème, son handicap, sa déficience et tout ça, je pense que ça a un côté peut être plus personnel que scolaire, donc du coup on essaie de
 de sadapter avec ça au niveau scolaire, donc rien que ça, ça fait un lien entre [le familial et le scolaire] (Page 18-19-20)
	Cette remarque de Julie témoigne de notre point de vue dun caractère important de la position du poste dAVS-i qui, jusquici, nous avait échappé. 
Sally Tomlinson, dans son ouvrage de 1982 titré « Sociology of special education », livre des éléments danalyses fréquemment centrés sur la situation des enfants et des parents « clients » de léducation spéciale  et ceci constitue une différence notable avec les travaux français relevant dorientations théoriques voisines : 
« The clients of special education, children and their parents, have the least say and influence over what happens to them and are subjects to the most pressures, persuasions and coercicion, of any group in the education system. » Elle illustre ce fait par plusieurs exemples provenant des legislations de lensemble du 20ème siècle, dont celui-ci : « 1914 education act contained a clause enabling local authorities to compel parents to send their children into special education » (page 48), et  cet autre : « After 1945 (
) it was firmly recognised that some parents, particularly of the ESN, would need coercing into accepting that their children would be excluded from normal education  a certificate signed by a doctor could be used to coerce unwilling parents. » (Page 51)
Cette analyse précise, et la classification spontanée de Julie exposée ci-dessus, engage à la réflexion. En effet, en reprenant les termes de lextrait de louvrage de Sally Tomlinson reproduit ci-dessus, on peut constater que les AVS-i sont parmi ceux qui, tout comme les parents et enfants « clients de léducation spéciale », ont très peu de conditions de possibilité davoir prise sur ce qui leur arrive, de pouvoir dire et exprimer ce qui leur arrive, et qui sont les sujets de processus dimposition, de persuasion et de coercition  beaucoup plus que « nimporte quel autre groupe dans le système éducatif ». Cest ni plus ni moins ce quexprime Julie quand elle produit son discours sur les parents et leur position par rapport aux autres acteurs des processus de scolarisation. 
Ceci serait à mettre en relation avec ce qui caractérise, du point de vue des parents, le passage de léducation séparée au droit à la scolarisation « dans lécole [du] quartier » pour leur enfant, à savoir (dans de nombreux cas) une attente forte vis-à-vis des personnels le plus directement concernés par le travail avec leur progéniture (les AVS-i) en terme de compréhension de leur situation et de celle de leur enfant, souvent les plus proches, également ; à mettre en relation aussi, dans une perspective plus analytique, avec la notion de liminalité qui permet daffirmer que tout se passe comme si la proximité (quelle quelle soit) avec des positions liminales imposait soit la création de nouvelles positions liminales soit loccupation de cette position par des personnes elles-mêmes initialement en position liminale. 
Cest ainsi que nous nous autorisons à définir la positon du poste non plus comme seulement située entre les éducations scolaire et spéciale mais comme entre les éducations scolaire, spécial et familiale  étant entendu que les référents symboliques empruntés à chaque système mériterait dêtre clairement identifié dans un travail spécifique et que les emprunts à ce quon peut appeler léducation familiale sont moindres que ceux effectués dans les cadres du scolaire (qui accueille, offre le cadre matériel du travail et impose ses objectifs institutionnels spécifiques) et du spécial (qui avait jusquau politique dintégration scolaire le quasi monopole du travail avec lenfance handicapée), et probablement dordre symbolique, consécutif à ce quévoque Julie ci-dessus à savoir, quand elles existent, une proximité spatiale et affective et une relation privilégiée qui peut être une relation de confiance. 
	Penchons-nous maintenant sur les positionnements des anciens recrutés vis-à-vis des familles. 
	Les anciens recrutés
	
Cécile : (...) [ma position avec les familles des élèves accompagnés] a évolué, déjà
 entre la première année, où on te dit « surtout, ne rentrez pas en contact avec les familles, cest pas votre rôle, etc. », et bah voilà quoi
 (...) au début je laissais quand même linstit un petit peu euh
  bah gérer la situation, et puis au fur et à mesure tu prends de lassurance, tu y vas, tu sais, tu as un job aussi hein
 donc euh de toute façon tu finis par
euh... tu finis par y aller, donc euh cétait quand même grosso modo
 jessayais quand même, voilà, de ne pas me faire envahir non plus hein, donc jessayais de mettre un petit peu euh
 de de
 de prendre un petit peu de recul par rapport à ça, mais je dirais cétait grosso modo deux fois par semaine où on pouvait
 où on avait un échange euh
 réel
hein (...) Page 21)
	Cela commence à paraître tout à fait évident : une durée importante doccupation du poste (mise en relation avec le fait que loccupation pratique du poste est très peu formalisée) fait naître des positionnements qui némergent pas dans le cas dune faible durée doccupation. Cécile nous fournit encore une fois la démonstration de la validité de cette assertion quant aux relations avec les parents des élèves accompagnés : 
« Au fur et à mesure tu prends de lassurance, tu y vas, tu sais, tu as un job aussi hein
 ». 
	Au-delà de ce point, ce que nous pouvons remarquer à lanalyse de la parole des anciens recrutés quant à leur relation avec les familles, cest quils sont rentrés dans un processus analytique, compréhensif, de la situation de ces dernières  à lexception notable de Noémie, marquée par une première expérience daccompagnement très conflictuelle avec les parents :  
Guillaume : et comment ça se [passe] avec [les] parents
 les relations avec [les] parents ? (
)
Noémie : (
) jai juste vraiment des relations très
 très
 superficielles (
) avec lensemble des parents puisque cest vrai que cest lenseignante qui doit gérer ça
 cest pas à nous
 après nous euh
 il est sûr quon a eu dautres exemples de personne qui justement avec des parents estimant quon était leur AVS-i [appuie sur le « leur »] donc euh
 pour moi
 jai fait très rapidement une barrière
	Cécile explique ainsi que son travail dAVS-i la amenée à découvrir une des caractéristiques de la position des parents denfants handicapés dans les processus de scolarisation de leur enfant :
Cécile : globalement, jai toujours eu un bon contact avec les familles
 jai toujours quand même recherché un petit peu ce contact là
 euh
 (...) enfin disons que jai pu apporter à certains
 enfin ça dépend vraiment des instits
des équipes aussi dans lesquelles tu tombes
 ça cest très aléatoire
 mais euh globalement, moi les familles je les sens vachement coupables
 Cest vraiment le truc qui ressort euh
 ouais ce ce
 coupable davoir
 davoir un enfant handicapé, de se sentir jugé, en plus de ce fait de devoir se justifier
 tout le temps, de se justifier en plus damener un enfant à lécole euh dont on va devoir se fixer dessus, canaliser, qui va peut-être en plus éventuellement empêcher les autres de travailler, donc voilà, grosso modo ce qui peut définir les familles, cest la culpabilité
 ça cest euh
 ça cest clair
(...) (Page 20)
	Pascal, quant à lui, tire de sa propriété et de son expérience dinitié familial une grille de lecture de la situation des familles qui peut sembler reproduire une forme de violence symbolique quil aurait lui-même subie au sein de sa propre famille  ou qui en est à tout le moins clairement issue. Il évalue ainsi le bon « niveau relationnel » au critère suivant : que les parents soient à lécoute de ce qui dit lécole. Onze années passées en école primaire et plusieurs tentatives pour entrer dans la profession de professeur des écoles ont ainsi très probablement produit chez Pascal une intériorisation puissante des logiques propres à lécole primaire  en dautres termes, linconscient social de la profession. 
Pascal : à part euh
 à part une famille, ça sest très bien passé au niveau relationnel
 jai plutôt eu des parents assez
 euh
 assez à lécoute de ce que disait lécole
 donc ça a permis euh
 et puis qui faisaient confiance à lécole globalement, donc ça a permis euh
 ouais de bien avancer dans ce domaine là, cest à dire quand lécole conseillait quelque chose, à part les parents de O., globalement cétait entendu et
 et écouté
 (
) il y a eu la famille de B. qui nétait pas très présente
 après il y a eu ccc
 P. aussi cétait un peu compliquée, les
 les parents de P et de O. étaient un peu dans
 dans
enfin moi je le vois comme ça, mais dans le... le
 dans le refus davoir un enfant handicapé quoi
 (Pages 6-7)
	Noémie, qui est lAVS-i du groupe des anciens recrutés qui a construit la relation la plus hétéronome avec lenseignant  peut-être sa prime expérience malheureuse avec les parents a-t-elle contribué à ce fait , justifie ainsi sa positon de retrait avec les parents en invoquant la prééminence de lenseignant pour tout ce qui concerne lécole (et en dévalorisant de ce fait toute prétention dAVS-i à produire un positionnement plus autonome, qui pourrait « divulguer » aux parents des éléments internes qui seraient susceptibles de nuire à la classe) :
Noémie : (
) le problème cest que notre travail il est pas dicté par nous-mêmes mais par lenseignant
et que au sein dune classe on peut pas se permettre de divulguer euh
 certaines choses quont pu se passer si lenseignant ne la pas décidé (
) donc ça cest quand même une charte quon nous demande et qui est à mon avis logique parce que des fois les parents ont en peut-être marre aussi dentendre tout le temps que ça na pas été nous on va des fois leur dire la vérité, peut-être pas comme il faut, et les enseignants eux vont peut-être se dire il faut savoir aussi leur dire le posit
 bah non des fois ça a été
 voilà
et je pense que cest vrai que
 non je suis plus en position de retrait mais pas méchamment, cest juste que
(
) notre travail il est au sein de lécole, cest pas comme si jintervenais (
) chez eux, et en plus euh, quelque part à lheure daujourdhui on nous considère comme étant entre guillemets sous la hiérarchie de lenseignant parce que le travail nous est demandé par lenseignant donc euh
sinvestir euh
personnellement euh
 en divulguant des choses de la classe ponctuellement cest un peu délicat
mais ça mest arrivé de croiser des parents qui aient pu me poser des questions donc après jai essayé de faire en sorte de parler, de voir ce qui pouvait être dit ou pas dit
 voilà
 mais euh
 très peu, [27m] très peu
 très peu de fois (Page 12-13)
La géographie du handicap 
Nous lavons vu (introduction, partie 3.3), les six AVS-i interrogés entretiennent des rapports différents aux territoires du handicap. Deux dentre eux seulement, Cécile et Pascal, sont des initiés, la première la été professionnellement et le second au travers de sa famille. En sus des éléments déjà évoqués dans les présentations, nous allons ici aborder certaines facettes des relations que les six AVS-i entretiennent avec cette géographie, qui constitue un élément relationnel central pour tout occupant du poste dAVS-i. 
Lanalyse montre une chose tout à fait intéressante : seuls Cécile et Pascal, les deux AVS-i initiés, produisent véritablement un discours construit, réflexif et argumenté, en intégrant la spécificité du segment du handicap qui concerne lélève quil et elle accompagnent. Tout se passe comme si linitiation (préalable à lentrée dans le poste) aux réalités de moments partagés avec une personne handicapée, aux effets dans le temps et dans lespace quimplique son handicap ou sa déficience, aux formes de sociabilité quelle fait naître, (et quel que soit le type de déficience ou de situation de handicap qui la concerne), permettait dactiver (sur un mode de mise en questionnement, dappréhension bienveillante) la relation étroite quentretient le poste dAVS-i avec toutes les problématiques liées aux vastes et variées territoires du handicap. Pascal est de loin le plus disert sur le sujet. Sa position familiale de frère dune petite fille autiste, son parcours de formation au sein des CEMEA, ont contribué à ce quil construise une vision situationnelle (ou environnementale) du handicap  il est le seul à le formuler aussi explicitement : 
Pascal : bah je
 ça dépend des
 ça dépend de
 pfff autiste cest
 tellement vaste que
 ça peut être un trouble comme un handicap euh
 pour G. ou pour F. par exemple je parlerais plus de trouble que de handicap
 après ça dépend parce que le handicap cest lié à une situation en fait
 donc euh
 au niveau social cest pas forcément un handicap, après pour tous les actes dapprentissages dans une journée décole il y a des moments donnés où lenfant est en situation de handicap quand même
	Nous pouvons également remarquer que Pascal affirme son intérêt pour des accompagnements délèves nayant pas des « problèmes de comportement ». Il pose comme un soulagement de naccompagner que des enfants dont lautisme, grâce à son travail, nimplique pas de « situation de crise » - il a dailleurs refusé dinitier un accompagnement pour un élève avec de « gros troubles du comportement ». Sa maîtrise de lenvironnement et des logiques scolaires, qui font de lui probablement lAVS-i qui a le plus intériorisé et repris  à son compte les nécessités de la profession enseignante (sans pour autant sy soumettre, nous le verrons plus loin), le poussent donc à rechercher, avec le temps, des accompagnements relativement normalisés, centrés sur « des problèmes dapprentissage » avec « plus le côté enseignant » :
Pascal : (
) je suis content aussi de
 de
 depuis deux ou trois ans, jai que des enfants qui ont des problèmes dapprentissages, et ça par rapport aux enfants qui ont des problèmes de comportements, ouah ça fait du bien quoi, cest
 quand même
 ya moins de situations de crise, cest moins stressant, cest moins nerveux
 (
) on a plus le côté enseignant que le côté « je gère les crises, je gère la violence euh
 (
) et moi cest vrai que ça me convient mieux, ouais
 cest moins usant euh
 cest plus enrichissant. (Page 29)
Pascal : (
) On ma proposé cette année un renouvellement (
) mais alors cétait un seul enfant à suivre 24 heures à Q.
 (
) gros trouble du comportement
 (
) et bosser que dans une école avec un enfant, que ça se passe pas bien
 cest euh
 à plein temps toute la semaine avec le môme euh
 je
 je trouvais que cétait un peu risqué
 (
) je sentais que
 que ça allait être un peu laborieux
 [Pascal a refusé cet accompagnement] (Page 42)
	Cécile est quant à elle, nous lavons déjà évoqué, lAVS-i interrogée qui, face au handicap, se positionne le moins en fonction de létiquette posée, du nom « officiel », et qui semble de fait le plus centrée sur les effets du handicap. Pour elle, limmanence, le « ici et maintenant » de la situation de lenfant quelle accompagne semble primer sur toute vision préconstruite relative à la catégorie dans laquelle est classé lélève accompagné :
Cécile: D., quest-ce qui lui arrivait à D. ?
 quest-ce que cétait D. ?
 
 « Dysphasie », a diagnostiqué le centre du langage
 euh
 « Retard général », ont diagnostiqué dautres organismes
 (Rires)
 D. il planait, ouais, effectivement
 cest compliqué
 cétait un gamin quétait vraiment capable de
 quavait les
 quétait lent. Quétait lent, quétait pas du tout concentré, fallait tout le temps répéter, répéter, répéter
 et cétait un gamin, à la limite, une fois que le truc était acquis, tu sais, que ça devenait
 que cétait mécanique, ça roulait, il y avait pas de problème, cétait
 cétait acquis
 par contre euh
 le souci était pour tout  ce qui était les actes de la vie quotidienne, tu vois
 « Atchoum »... ya un truc énorme (elle montre son nez), et il reste à me regarder
 « D., tu veux pas sortir un mouchoir ? »
 tu vois, cétait vraiment plus de cet ordre là, que dordre vraiment euh
 (...) sur les apprentissages (...) scolaires
 donc tu vois
 donc ça cétait D. (Page 10)
	Au-delà de ces éléments concernant Pascal et Cécile, il est notable de constater que certaines situations daccompagnement font naître un scepticisme chez les AVS-i. Cet enfant est-il vraiment handicapé ? A-t-il vraiment besoin dun AVS-i ? Cest le cas notamment pour des troubles de lapprentissage comme les dys-. Ainsi Pascal, considérant que rien nest possible avec lélève de quatrième, dyslexique (en clôturant la réflexion dans le périmètre de la seule position de « AVS-i ») se positionne clairement, et pour lélève, en faveur dune transformation circonstanciée de son poste pour aider scolairement lélève : 
Pascal : donc (
) Javais dis clairement [à lenseignant référent et au collège] ou on arrête [avec un élève de quatrième, dyslexique, qui a trois heures daccompagnement par semaine], ou alors on accepte que je sois en permanence avec lui pour laider à faire ses devoirs et pour le remotiver, pour (
) lui faire du soutien
 au moins dans les matières où il est le plus en difficulté, où je me sens à laise pour laider, et au final cest ce qui sest passé, ce qui est
 pas très légal, hein
 (
) jétais même pas en permanence avec lui, jétais dans
 un petit bureau avec lui, alors cétait un bureau vitré, parce que moi javais demandé à
donc dans la salle des 
 des
des profs,  il y avait des bureaux vitrés donc jétais là-dedans donc comme ça il y avait un vis-à-vis, jétais pas tout seul avec lenfant, yavait sans arrêt du passage, on pouvait voir ce qui sy passait, donc
 jétais tranquille à ce point de vue là, et on bossait tout les deux sur
 essayer de rattraper le retard quil avait (
) cest presque du soutien scolaire, que je faisais, et pas AVS-i, mais euh
 cétait de ça dont avait besoin lenfant
 alors après, cest
 mais moi jai retourné la question du coup quel sens ça avait de mettre un AVS pour un enfant comme ça, que cétait peut-être une.. Un autre poste quil fallait
 (
) cétait un élève qui était découragé, parce que pendant des années être dyslexique, avoir du mal à suivre euh
 ça se comprenait au bout dun moment un gros découragement
 donc cétait un peu redonner confiance et puis euh
 et puis lui montrer quil était capable de
 en rebossant quoi
 (Page 40-41)
	Lalie également se questionne quant à la pertinence de sa présence auprès dun collégien dyslexique. Elle pose cette interrogation à sa manière, marquée par la distanciation forte et psychologisante que produit tout à la fois (de notre point de vue) sa double propriété dêtre une migrante récente sur le territoire où elle travaille et une ancienne étudiante en psychologie : 
Lalie : ouais en fait ce qui se passe cest que 
 il y a toujours eu sa mère derrière lui pour euh
 « Mon pauvre petit garçon, il est dyslexique, machin
 » Donc lui bah
 bon il fait un peu sa petite victime quoi
 donc euh
 du coup il cherche pas à apprendre, il cherche pas à comprendre, et euh
 si je suis là il travaille, si je suis pas là
 fin là pendant les partiels je ne suis pas venue
 [L. est étudiante] jy suis retourné aujourdhui pour lui
 jai vu le résultat, il navait rien fait depuis deux semaines, quoi
il travaillait pas, les devoirs étaient pas faits alors que bon
 moi je suis derrière son dos euh... Ça va un peu quoi
 donc bon, ça a tendance un peu à ménerver (rires) 
 (
) là ça va
 je vois pas la progression, je me demande des fois quest-ce que je fais là, quoi
 (Page 9 et 22))
	Lalie vit dautant plus mal cet accompagnement quil est le seul quelle accomplit cette année-là (9 heures), et que, ainsi quelle lexplique elle-même, la présence de lAVS-i avec ce collégien semble prétexte pour léquipe pédagogique à un retrait total de tout intérêt et investissement à lencontre de lélève accompagné  qui, en plus, se trouve dans une classe dont nous pouvons penser quil sagit dune classe de niveau regroupant tous les élèves en difficulté : 
Lalie : les profs ont démissionné. Vraiment. (
)
 même eux ils le disent ! fin ils sen cachent pas
 cest
 déjà il est dans une classe difficile
cest vraiment euh
 la pire classe de 5ème quil y a eu de
 (
), 5ème F bizarrement
. (Page 12)
	Cécile également formule des réserves quant à un de ses accompagnements, lui aussi centré sur la situation dun élève que, selon sa propension à peu se soucier des dénominations, elle nomme « trouble de lecture de machin » : 
Cécile : 
 trouble du langage, lecture, tu vois, trouble de lecture de machin, enfin vraiment petite bricole, et puis cest un gamin qui sen sortait pas si mal que ça, effectivement, fallait le booster un petit peu mais vraiment euh jai pas compris la nécessité dun accompagnement avec ce gosse quoi
 (Page 7)
	Elève accompagné, parents et géographie du handicap constituent les trois éléments relationnels qui forment un pôle central dans le réseau de relation de lAVS-i. De ce point de vue, et relativement à une vision de ce que pourrait être une analyse sérieuse prenant en compte la position stratégique du poste et les nécessités de formation quon peut en déduire, loccupant(e) du poste dAVS-i devrait pouvoir également nourrir une attention toute particulière aux relations des relations quil ou elle entretient : parents, élève et type de handicap ou de déficience entretiennent entre eux des relations qui sont autant déléments de soubassement de tout ce qui se déroule au sein des processus de scolarisation  et ces relations internes à ce quon pourrait nommer le « pôle familial » sont très vraisemblablement différenciées socialement. 
	Il y a cependant un autre pôle, tout aussi central, dans le réseau de relation quentretient le poste dAVS-i : il sagit de celui de lécole, avec, en premier lieu, lenseignant et les élèves des classes où travaillent lAVS-i et dans lesquelles est scolarisé lélève accompagné. 
3.3.2.3  Du côté de lécole
Nous allons dans cette partie nous limiter à lappréhension des seuls agents/acteurs que sont les élèves des classes et les enseignants avec lesquels travaillent les AVS-i. Néanmoins, il nous semble important de mentionner deux postes tout à fait essentiels dans lenvironnement de travail des AVS-i  et dans les processus de scolarisation des enfants handicapés : celui denseignant référent et celui denseignant spécialisé. 
La fonction denseignant référent a été créée par la loi du 11 février 2005. Elle consiste en un rôle de régulation de linitiation et du déroulement des processus de scolarisation denfants handicapés. De multiples tâches lui sont dévolues, qui caractérisent sa position de médiation se déclinant à de multiples niveaux : entre les familles, lélève scolarisé, les établissements scolaires, les enseignants, la MDPH (et la CDAPH) et les accompagnants scolaires. Les enseignants référents sont recrutés parmi des enseignants spécialisés et le plus souvent, lors de la création de leur fonction, ils lont été également parmi les anciens secrétaires de CCPE, qui, dans larmature institutionnelle de la loi de 1975, étaient responsables de lanimation de ces commissions, qui dépendaient directement des CDES pour le premier degré. Comme ces derniers, ils interviennent sur le territoire dune circonscription de léducation nationale, qui correspondait avant 2005 au territoire des CCPE. 
Dans de nombreux départements, les enseignants référents ont, plus ou moins explicitement, reçu consigne de se constituer en ressources et en encadrement pour les accompagnants scolaires de leur circonscription, quils soient AED ou EVS. Ceci semble susciter dans la pratique des phénomènes de résistance de la part de certains dentre eux, qui refusent de se voir attribuer une charge de travail supplémentaire qui nest pas prévue dans les textes encadrant leur métier ; comportements dévitement qui a pour effet daccentuer lisolement des accompagnants.
Lenseignement spécial, nous lavons vu, ne tire pas son origine dun « processus linéaire provenant dune demande interne de lécole » (Plaisance, 1996), mais des influences à la fois internes et externes à linstitution scolaire, avec le rôle joué par des médecins aliénistes dont la figure majeure demeure Désiré Magloire Bourneville. Le premier diplôme professionnel de lenseignement spécialisé a été créé dans la foulée de la loi davril 1909 créant les classes annexées et les écoles de perfectionnement : il sagit du certificat daptitude à lenseignement des arriérés (CAEA, août 1909). 
« Le cadre dexercice de linstituteur spécialisé cest donc avant tout la classe, dans laquelle les méthodes dinstruction sont à aménager en fonction des aptitudes des élèves accueillis. (
) On devient instituteur spécialisé après avoir exercé en qualité dinstituteur (
). ». (Dominique Fablet, 2000)
	Nous lavons évoqué, la loi de 1909 reste inopérante jusquaux années 1950. Il en va de même pour le métier denseignant spécialisé : lorsque, après que les initiatives de lEducation Nationale aient véritablement repris dans les années 1960, le métier prend de lampleur, cest à un moment où celui déducateur spécialisé sest, dans les grandes lignes, déjà formalisé (Fablet, 2000). 
	La spécialisation dans la spécialisation samorce très tôt dans lhistoire du métier : en 1939 déjà, une option spéciale « enseignement des écoles de plein air » est créé pour ceux dentre les enseignants qui se destinent « à lenseignement des enfants déficients physiques ou malades, infirmes moteurs ». 
	Par suite, la logique dadaptation (avec la création des GAPP et des classes dadaptation) va structurer une partie de la profession comme pouvant intervenir hors cadre de la classe, dans une logique individuelle, ou par petit groupe ; la logique intégrative va confirmer cette tendance. En 1996, 43,8% des élèves handicapés sont scolarisés dans des établissements relevant de lEducation Nationale (classes spécialisés détablissements ordinaires, EREA, écoles spécialisées) et 56,2% dans des établissements relevant des affaires sociales.  Les enseignants spécialisés interviennent dans toutes ces structures. Au sein de léducation nationale se distingue deux filières : dune part, les RASED (Réseaux daides spécialisés aux élèves en difficulté, qui ont succédé aux GAPP en 1990) regroupent des maîtres spécialisés doption E (aide à dominante rééducative) ou G (aide à dominante pédagogique) et des psychologues scolaires ; dautre part les structures daccueil du premier et du second degré (classes de perfectionnement, classes dintégration CLIS pour le primaire et unité pédagogique dintégration UPI  ayant remplacé les SES  et les sections générales denseignement spécialisé SEGPA, pour le second degré). 
	
En ce qui concerne le secteur des affaires sociales, les enseignants spécialisés peuvent intervenir dans les structures suivantes : IME, IMP et IMPro, ITEP, les CMPP (centres médico-psycho-pédagogiques), les CAMSP (centre daction médico-sociale précoce), les SESSAD. 
Un processus de scolarisation denfant handicapé peut prendre de multiples formes, ainsi que le permet la loi de 2005, qui permet encore, malgré laffirmation du droit à la scolarisation « ordinaire », de nombreuses formes de scolarisation dans des structures spécialisées. LAVS-i est en mesure de se trouver à travailler avec un enfant qui peut être accueilli dans une structure relevant du médico-social où intervient un enseignant spécialisé. 
	Maintenant que ces mentions tout à fait essentielles sont faites, intéressons nous aux relations quentretient lAVS-i avec les camarades des élèves quil ou elle accompagne. 
		Les élèves des classes
Pascal : (
) il y a aussi le fait quon intervienne avec dautres enfants que celui quon accompagne aussi dans les classes, à des tas de moments
 (Pages 14-15)
	Lindividualisation et la personnalisation des missions dévolues au poste dAVS-i résultent, nous lavons vu, des effets de son histoire spécifique, et se sont imposées face à des conceptions (minoritaires) demployeurs associatifs départementaux qui préféraient voir dans la position du poste dAVS-i une ressource pour la classe ou lécole. Mais quen est-il alors de loccupation pratique du poste par les six AVS-i avec lesquels nous nous sommes entretenus ? 
	Cinq dentre eux partagent le fait davoir souhaité ou de souhaiter devenir un jour enseignant du premier degré. Cette propriété les prédisposent vraisemblablement à ne pas circonscrire strictement leur action au seul élève quil et elles sont censés accompagner. Ainsi Julie, qui, tout comme Lalie, est entrée dans la fonction pour des raisons stratégiques liées à son projet professionnel : 
Julie : [en ce qui concerne lenseignant et le fait dintervenir auprès des autres élèves] ça dépend, (
) je vois un petit peu à qui jai affaire, (
) donc on voit comment
 Si ils sont réceptifs ou pas, si je vois que bon, il faut pas trop euh
 voilà joserais pas
 Mais là vu que ça se passe bien
enfin
 ils font confiance quoi, donc du coup euh
 bon voilà, ils me laissent faire quoi
 bon après, sans empiéter sur leurs plates-bandes, hein, je vais pas trop loin non plus (
) (Page 25-26)
	
Nous trouvons encore une fois sur ce sujet précis des différences importantes entre les néos et les anciens recrutés. Julie, Lalie et Sylvie, dans leur mouvement vers les autres élèves (quand il y en a, ce qui nest pas toujours le cas, notamment pour Lalie qui est restée souvent installée en permanence à côté de lélève), sont dominées par leur souhait professionnel. En dautres termes, elles vont vers les autres élèves avant tout parce quelles souhaitent profiter de leur position dAVS-i pour sinitier au métier denseignant du premier degré. 
Julie : (
) je suis assez bien intégrée dans la classe, je pense 
 ouais, une bonne relation
 oh on me fait assez confiance aussi, donc euh
 quelque fois on va pas forcément me réserver juste à lenfant, on va me confier un petit groupe, avec lenfant, dont je vais moccuper
 quelque part moi ça me conforte un peu dans mon idée justement de
 comme je voulais être enseignante
 (Page 12)
	A contrario, les anciens recrutés présentent une réflexion beaucoup plus aboutie sur ce sujet, et les motivations quils exposent pour expliquer le mouvement vers les autres élèves sont beaucoup plus centrées sur des raisons liées à lélève ou à la classe, comme par exemple la nécessité de désamorcer la « pression » mise sur lélève, que nous avons déjà abordée plus haut avec Cécile, ou, ce qui y est apparenté, pour moins le « stigmatiser », comme dit Pascal ci-dessous. 
Dans ce passage, il évoque également la nécessité pour lui de « rentabiliser » le temps de sa présence et de faire face à lennui provoqué par le fait que de nombreuses fois, quand est pris au sérieux lobjectif de ne pas se rendre indispensable à lélève accompagné, il y a des temps où lAVS-i est disponible : 
Pascal : jaide aux moments des exercices
 quand les élèves lèvent la main pour avoir de laide de lenseignant
 (
)
 là moi je
 jinterviens si lenfant que jaccompagne est
 est autonome à ce moment là euh
 ça marrive dintervenir sur les autres
(
) toujours en accord avec lenseignant (
) cest indispensable aussi parce que sinon on se retrouve à 
à avoir tendance à sennuyer, sennuyer ça veut dire quon va chercher à soccuper donc on va
 aider lenfant quon suit à des moments donnés où cest pas de ça dont il a besoin donc
 je pense que cest vraiment bien pour tout le monde
que ça se passe comme ça
 (
) Et puis ça marque moins la différence aussi pour G. par exemple cest très important
 il supporte pas lidée davoir un AVS-i, faut être comme les autres
 donc le fait quà des moments donnés je le laisse tranquille et que cest dautres que je vais aider, ça
 ça le stigmatise moins, quoi
 (Pages 19-20-21)
	Cécile, de son côté, explique quelle est « tout le temps en communication avec les autres élèves », dans une sorte de posture de facilitateur de la cohésion et de lattention du groupe. Elle présente ce positionnement comme résultant de la nature spécifique du poste dAVS-i vis-à-vis des autres élèves, c'est-à-dire, ainsi que nous lavons déjà évoqué, une position non enseignante, marginale, interstitielle, répondant dune temporalité, de nécessités et de responsabilités différentes qui permettent dêtre « un adulte un peu plus bienveillant » sans être non plus « la grande sur ou la copine ». De plus, Cécile avance un argument tout à fait opérant de notre point de vue pour répondre dun travail pertinent en matière daccompagnement : elle a conscience que sa présence est, pour le groupe classe, liée à lélève quelle accompagne, et que ainsi la relation quelle va tisser avec les autres élèves aura une répercussion sur celle qui se construira entre eux et lélève quelle accompagne.
Cécile : (...) je suis tout le temps en communication avec [les autres élèves des classes où je travaille], finalement, (...) un petit peu par des petits bruits, des petites onomatopées, c'est-à-dire que 
 enfin tu sais les gamins qui font des petits trucs par derrière, ça me fait super poiler, en fait (...) donc si tu veux il y a pleins de trucs qui me font marrer, je suis pas linstit, en même temps si tu veux, donc je peux me permettre davoir une autre relation avec eux
 euh où je suis pas la copine, je suis pas la grande sur, je suis rien de tout ça, mais je suis un adulte (...) un peu plus bienveillant sur les petites conneries quils peuvent faire, si tu veux
 et euh
 ce qui permet au travers de la relation que je vais créer avec eux de pouvoir éventuellement améliorer limage quils ont de moi et donc de lenfant qui nécessite un suivi de ma part
 euh
 et cest un peu jeu de séduction que jai avec eux un peu finalement quoi
 et en même temps ça me permet, en collaboration avec linstit, puisque je suis énormément dans lobservation, je men rends compte quand il y en a un qui ne va pas bien, que machin, que
 là elle a fait un texte bizarre, elle a fait un dessin bizarre, est-ce quil va bien, comment
  tu vois, ce
 ce
 je vois des choses qui échappent à linstit
 (Page 33)
	La mention faite ici par Cécile de « linstit » constitue une transition toute trouvée pour nous intéresser maintenant à la relation des occupants du poste dAVS-i avec les enseignants. 
		Les enseignants
Les enseignants constituent le groupe professionnel le plus ancien du champ. Il se décompose en deux groupes principaux : ceux du premier degré (nommés longtemps « instituteurs » et « institutrices » et quon appelle depuis la création des IUFM en 1991 « professeurs des écoles »), et ceux du second degré. Les professeurs des écoles sont disciplinairement polyvalents, là où ceux de lenseignement secondaire (ou professionnel) se voient spécialisés dans lenseignement dune matière spécifique. Les premier et second degrés procèdent ainsi dunivers tout à fait différents, pour des raisons de généalogie historique qui recoupent celle précédemment évoquée, mais aussi de multiples autres. 
Lécole primaire est la matrice de lécole républicaine en France, prenant son origine à la fin du 19ème siècle, alors que la secondarisation de lenseignement (et, dans une moindre mesure, la « scolarisation de lenseignement professionnel » selon lexpression dAntoine Prost), est largement ultérieure, avec la réforme Berthoin de 1959 instituant lobligation scolaire jusquà 16 ans. Du point de vue de la majorité de la population, lenseignement secondaire a donc succédé au primaire, plus de 60 ans après. 
Seulement, pour la bourgeoisie, aussi bien lenseignement primaire que secondaire existaient bien avant ce quon peut appeler la démocratisation de lenseignement. Pendant tout le 19ème et le début du 20ème siècle, les collèges et lycées naccueillaient quasi exclusivement que des enfants des classes dominantes  établissements auxquels était souvent annexée une école primaire « réservée » aux mêmes catégories, qui ne se mélangeaient ainsi pas avec le peuple. Linconscient social du poste denseignant du second degré est donc marqué par cette longue période au sein de laquelle enseigner signifiait délivrer un savoir disciplinaire dans des classes dociles et homogènes socialement  modèle que le mouvement dit de « secondarisation » de lenseignement a littéralement fait exploser, mais qui reste un rêve et un souhait pour de nombreux enseignants du secondaire. 
La nature et les évolutions, certes concomitantes, mais souvent parallèles et relativement autonomes, de ces deux univers, rendent la pratique de laccompagnement scolaire très différent selon quil relève de lun ou de lautre. Nous posons ici lhypothèse selon laquelle le premier et le second degré induisent pour les accompagnants scolaires des modalités de travail avec les enseignants qui sont largement différenciées, et quil conviendrait danalyser spécifiquement. Nous allons néanmoins mentionner ci-dessous quelques éléments de cette partition. 
	
	Selon la DGESCO (2009), cest près de 70% des élèves handicapés scolarisés qui le sont dans le premier degré  et plus des deux tiers de ces 70% le sont en maternelle. En guise dexplication à cet état de fait, nous pouvons citer leffet normalisateur quont le cours préparatoire (CP) et le passage au collège. Il est possible dimaginer la possibilité selon laquelle cette répartition puisse (éventuellement) changer à mesure que se trouvent normalisés les processus de scolarisation des enfants handicapés. 
	Ainsi, pour le poste dAVS-i, cest lécole primaire qui constitue le cadre central et dominant de son environnement de travail. Travailler dans lenseignement secondaire est une exception  qui se trouve redoublée de lexception des types de déficience ou de handicap que connaissent les élèves qui y sont accompagnés, puisque par exemple, les déficiences motrices, très minoritaires dans lensemble des situations de scolarisation dans le premier degré, se trouvent surreprésentées au secondaire. Leffet « goulot » du CP et du passage au collège concerne aussi certains types de handicap. 
	Tous les AVS-i interrogés qui ont travaillé dans le secondaire connaissent cette situation dexception par rapport à leur parcours global daccompagnement. Pascal, Lalie et Julie ont ainsi tous quelque chose à exprimer par rapport à leur travail dans le secondaire. De ce point de vue, il ny a pas de différence notable entre anciens et néos-recrutés : tous saccordent à dire que ce cadre de travail est très difficile : 
Pascal : [Dans le secondaire  au collège, en loccurrence] cest beaucoup plus dur de trouver sa place
 enfin moi jai beaucoup plus de mal à trouver ma place au collège, parce que bah justement on ne peut pas forcément intervenir avec les autres élèves quand on a rien à faire avec lélève quon suit
 et puis (
) moi avec B. je servais à rien, dans la classe  (Page 40-41)
	Sil y a une différence entre néos en anciens recrutés, cest dans le degré de difficulté exprimée : les néos recrutés semblent éprouver encore plus de difficultés. La parole de Lalie est à cet égard édifiante  on peut y lire également lisolement social quelle connaît du fait de nêtre arrivée dans la région quil y a à peine deux ans :
Julie : ah [le secondaire] cest complètement impersonnel
 cest complètement autre chose
 (
) disons que on sent que 
 cest pas pour dire mais on se sent un peu isolé dans son coin quoi
 (Page 21-22)
Guillaume : (
) quest-ce tu sens comme différence [entre le secondaire et le primaire] ?
Lalie : (
) (Sourire large) je me sens seule, cette année [dans le secondaire, au collège]! (Rires) Bah je suis arrivée déjà
 je suis arrivée au début je savais même pas que javais le droit daller dans la salle des profs, on me la jamais dit, tu vois
 fin
 je suis un peu bête, non ?  [Rires]
 mais bon
 on me dit pas les choses, je vais pas non plus y aller
 donc un jour on ma dit : mais tu sais, tu peux y aller
 cétait une surveillante qui ma dit, cest même pas un prof
 (
) et euh
euh
. Et en fait même dans la salle des profs, je discute pas (
) comme lannée dernière avec (
) les enseignants
 pas du tout
cest des fois je vois la prof principale
 parce que je la vois jamais en fait la prof principale
 je la vois euh
 à la salle des profs, pendant cinq minutes, on discute de
 de lélève et basta quoi
 (Page 18 et 21) (...) je crois que cest le primaire qui me manque, quoi
 cest pas du tout le même fonctionnement, enfin
 là jai limpression dêtre un pion, je viens, je fais mes neuf heures, je repars euh
 voilà, coucou, je suis venue, (court rire) (...) 
 un truc tout bête, on arrivait le matin, on se fait la bise ou on se dit bonjour, quoi
bon je demande pas à ce quon me fasse la bise mais quon dise bonjour quoi
 tes pas une ombre quoi, tes
 texiste
 (Page 26-27)
Lalie : jose même pas leur demander de laide [aux professeurs du collège] ou
 je dirais pas de laide mais
 comment
 enfin voilà on te dit il a des difficultés à faire ça
 « Oui ben donnez moi des pistes quoi enfin
 je suis pas enseignante moi, je suis
 je suis là pour laider, quoi
 » (...) bah voilà jose même pas aller leur demander « quest-ce que je pourrais faire 
 quest-ce quon pourrait revoir
 »
 ce matin je lai fait parce quil y avait un contrôle en maths et je sais quil a rien compris au chapitre
 bon
 bon bah je suis allé voir le prof quoi
 le prof la vu quil avait des difficultés, il aurait pu me dire, (...) « ya ça que tu pourrais revoir avec lui
 » (Page 30)
	Tous les trois saccordent, avec Lalie ci-dessous, pour poser le cadre du primaire comme plus favorisant pour accueillir des enfants en situation de handicap. A cet égard, au-delà des différences entre primaire et secondaire relatives à leurs histoires respectives, il est possible de poser lhypothèse selon laquelle les enfants, à mesure quils grandissent, intériorisent de plus en plus fortement lordre social et symbolique qui régit, entre autre, les relations entre les personnes handicapées et déficientes et les autres. Ainsi, les enfants du premier degré auraient de fait une propension plus grande à construire des relations avec les élèves handicapés. 
Lalie : (...) en maternelle
 dailleurs
 les enfants sont géniaux hein [rires] (...) un enfant handicapé ça dérange personne quoi, cest génial, je trouve ça merveilleux
 (...)
 je me souviens en récréation quoi elle 
 [lélève accompagné] tout le monde la prenait en charge, quoi, entre guillemets... « Ah viens, on va jouer, là » hop, et elle partait quoi
 ouais, bah fait ça maintenant au collège
bah tu verrais les réactions quoi
 (Page 36-37)
	
Intéressons-nous maintenant à une autre partition, qui est celle, idéal typique pour ce qui concerne notre échantillon dAVS-i vis-à-vis de lenseignant, entre position à tendance autonome et position à tendance hétéronome. 
Hétéronomie
Noémie, malgré son statut dancienne recrutée  et contrairement à ce quon pourrait a priori penser, est lAVS-i interrogée qui exprime le plus une position de dépendance vis-à-vis de lenseignant, qui sen remet le plus à lui ou elle, et qui définit le plus son travail en fonction des nécessités et contraintes enseignantes. Ceci même davantage que les trois néos-recrutées puisque ces dernières se bornent, de manière générale, à se positionner en fonction de lenseignant mais sans avoir eu le temps de réellement interroger et se construire une appropriation du poste. Dans ce cadre, cest, comme le suggère lextrait ci-dessous de lentretien avec Julie, lenseignant qui « forme » lAVS en fonction de ses expériences précédentes. 
Guillaume : daccord
 donc tu interviens parfois avec les autres élèves ?
Sylvie : oui, mmh mmh
 en fait ça cest en fonction des enseignants, on sait pas trop si on peut le faire ou pas
 (
)
 en fait elle ma dit un moment clairement que
 quelle connaissait des AVS qui se déplaçaient, qui aidait un peu les autres élèves, et je sentais que ça
 elle avait un peu envie que jaide un peu aussi de temps en temps (
) (page 12) 
Noémie sest approprié le poste, elle, mais dune manière qui tend à consacrer lenseignant comme le métronome de tous ses positionnements  y compris, nous lavons vu, avec les parents. 
Noémie : (
) on se voit avec lenseignante et dès le départ donc elle, elle me dit ce quelle souhaite et moi (
) je vais travailler en fonction de ce que tu souhaites
 (Page 22)
Ceci nous permet de dire quune longue durée doccupation du poste nest pas une propriété suffisante pour construire un positionnement autonome relativement à loccupation du poste dAVS-i. Pas suffisante donc mais nécessaire, puisque Pascal et Cécile, les deux autres AVS-i formant avec Noémie le groupe des anciens recrutés sont les deux seuls de notre échantillon à occuper le poste de façon relativement autonome, répondant des logiques et des potentialités internes au poste et liées à ses propriétés, et non de celle qui fonde la position du poste denseignant. 
	Autonomie
	Cécile et Pascal ont tous les deux un discours qui semble traduire une bonne maîtrise des enjeux et des invariants de la relation professionnel avec un enseignant  très certainement construits tout au long de loccupation du poste. Ils développent tous les deux des stratégies visant tout dabord à rassurer les enseignants dans les classes desquels il interviennent  et ce dautant plus que les anciens recrutés sont parmi les AVS-i qui ont toutes les chances davoir travaillé avec des enseignants qui navaient aucune expérience dune telle coopération (ou collaboration). 
Pascal : alors il y eu les
 il y a des enseignants qui se retrouvaient un peu angoissés davoir un adulte avec eux dans la classe
oh il a fallu dans ces cas là faire un peu euh
 acte de prudence et de
 euh
 réellement avant de louvrir un peu, dire ce quon pense, vraiment montrer à lenseignant quon avait bien compris que
 cétait eux qui avaient le pouvoir dans la classe et pas moi
 (Page 11) (
) il y a aussi le fait quon intervienne avec dautres enfants que celui quon accompagne aussi dans les classes, à des tas de moments
 donc moi je profite des fois de cette situation-là pour montrer à lenseignant que jai bien compris que cétait lui le maître de la classe, sans forcément lui dire
 cest en parlant aux enfants des fois dire euh
 « Bah non cest pas à moi que tu as à poser cette question-là, euh
 lenseignant il est là, cest lui qui décide de ça, cest pas moi » (
) en me sachant observé, entendu par lenseignant, et bon cest le genre de petites choses qui fait que lenseignant se trouve rassuré, à se dire « bah cet AVS-i il cherchera pas forcément à prendre ma place 
 » (Page 14-15)
	Cécile nous parle ainsi de lévolutivité et de la plasticité des dynamiques propres à laccompagnement quelle dispense tout au long dune année scolaire, et du positionnement afférent quelle adopte  sans aucune mention de lenseignant, ce qui tend à montrer (ainsi que lensemble de son entretien) quelle opère ces choix de manière tout à fait autonome : 
Cécile : (...) au début (...)  jétais un peu à côté de lui
 puis je me suis éloignée
 puis jai pris carrément une table ailleurs
 et jai fini par prendre mes dossiers avec moi, faire dautres trucs
 et puis à la fin jai fini par me mettre à la porte de latelier
et puis à rentrer dans latelier
 et jai fait un truc dans latelier, porte ouverte, jai fini par entrer dans latelier, et par fermer
(...) les enfants étaient dans la classe
c'est-à-dire que jai fini par me soustraire, réellement, (...) de la classe
 [G.] nétait plus du tout dans une nécessité daccompagnement (Page 30-31)
	La situation exceptionnelle de Pascal en termes de continuité daccompagnement (un de cinq ans, lautre de quatre ans, avec des enfants avec des « troubles autistiques ») le mettent dans une situation dexpertise vis-à-vis des enseignants qui, chaque année, découvrent en situation de classe les élèves quil accompagne. Cest ainsi quil dit la chose suivante : 
Pascal : (
) puisque jai beaucoup accompagné les mêmes enfants, euh
 là cest un peu différent parce que euh
 jai plus de connaissance sur lenfant que lenseignant qui débarque
 (Page 14)
	Au-delà de lexceptionnelle continuité, il ne semble pas trop hardi daffirmer que cest également une durée importante doccupation du poste qui contribue à ce que lAVS-i soit perçu par lenseignant comme un expert de sa propre position (ce qui ne peut être le cas pour la majorité des AVS puisquelle est composée de néos recrutés et, a fortiori, dEVS, en poste pour trois ans maximum), contribuant ainsi à créer les conditions de possibilités dun positionnement de plus en plus autonome. 
Il ne faut pas oublier que Pascal a passé onze ans dans léducation nationale, en école primaire, ce qui lui permet de dire, très conscient : 
Pascal : au bout dun moment tu commences à acquérir le langage éducation nationale donc après quand tu parles après à des enseignants tu as leur langage, tes dans leurs normes, tes dans leur monde
 donc ça passe beaucoup mieux que euh
 que quand tas pas le même langage queux, en fait
  (Page 32)
	
« Langage » éducation nationale résultant de plus de dix ans de travail en son sein (et dun projet de devenir enseignant), position dexpertise sur son poste et à propos des enfants : autant déléments qui permettent à Pascal de prendre des positions qui, aux vues des ambitions et des enjeux posés par larrivée à lécole dune partie de lenfance qui en avait jusquici toujours été exclue, nous semblent extrêmement intéressantes, mais qui sont appelées à disparaître en même temps que les conditions sociales qui permettent leur existence. 
Mentionnons tout dabord le positionnement que prend Pascal en face dun enseignant quant à lavis de ce dernier sur un élève accompagné, puis sa démarche, de son propre chef, daller rencontrer les professeurs dun collège pour préparer une rentrée suivante : 
Pascal : (
) G., par exemple, [un petit garçon autiste] jai découvert en CP il parlait quasiment pas ce petit bonhomme, il était dans le mal-être, dans langoisse par rapport à la relation avec les autres, maintenant ça fait six ans quil est dans la même école, toute petite, où il connaît tout le monde par cur, donc voilà lenseignant qui débarque cette année qui voit G., il voit un G. épanoui, qui est à laise au niveau relationnel avec les autres, donc bah « oui le collège, oui pas de souci
 » Et donc faut un peu remettre les points sur les « i », dire « Ah
Oui pas de souci, le collège ?  Il est énorme, il va changer de classe sans arrêt
 ! » (
) donc du coup, faut pas croire que ça va passer comme une lettre à la poste, cest parce quil archi super sécurisé depuis des années, mais
 faut quand même être très vigilant par rapport à ça
 mais là cest intéressant, parce que comme je travaille à C., je mange à la cantine, je rencontre des profs du collège [qui est à côté de lécole primaire, NDR], donc jai pu leur parler du cas de G., donc jai réussi à obtenir quil ait pas mal denfants de [sa commune] qui soient dans sa classe pour quil soit pas trop paumé, quil soit dans une classe où on le change quasiment jamais de lieu de classe à part pour les enseignements spécialisés, les sciences et la technologie
 quil se retrouve dans une classe au rez-de-chaussée pour pas avoir à circuler partout dans létablissement
 donc là je suis assez content 
(Pages 31-32)
	Puis prenons connaissance de ce quil exprime quant à sa contribution à linformation et à la formation in situ des enseignants quand, avec les débuts de lapplication de la loi de 2005, ces derniers « sont un peu perdus là-dedans » ; ou, du fait de la méconnaissance des enseignants relativement au monde du médico-social,  quant à sa démarche dinformer sur ce quest (selon lui) une bonne division du travail éducatif entre école et institutions spécialisées :
Pascal : (
) [les enseignants ne] savaient pas comment ça se passait au niveau de la MDPH. [ils ne] savaient pas dans les réunions qui il allait y avoir, (
) il y avait les directrices aussi, qui il fallait inviter aux équipe des suivi de scolarité, euh
 des choses de ce genre, ou ya des fois les enseignants ils sont un petit peu perdus là dedans, quand cest la première fois quils ont un enfant handicapé dans leur classe, cest euh
 cest le lien entre le CMP et le
 et de dire aussi bah oui on a constaté que tel enfant il avait des problèmes de
de la gestion de son espace
 de lespace et du temps, euh.. bah dire bah ce serait bien de renvoyer ça au niveau du CMP, parce que cest plus à eux de travailler quà lécole, ils ont plus les moyens que nous
 euh des choses comme ça
 alors quil y a certains enseignants qui savent pas forcément au début à quoi sert le CMP, quels sont
 quest-ce quils peuvent faire là-bas
 (Page 33)
	Cest ainsi que la rencontre entre les dispositions sociales de Pascal, issues en partie de son « histoire sociale familiale » selon lexpression de Francine Muel-Dreyfus, et les propriétés du poste dAVS-i font naître dautres formes de prise de position qui caractérisent très clairement une posture de grande autonomie vis-à-vis de lenseignant, allant même jusquà exercer sur ce dernier une influence qui nous semble importante, comme le montre bien lextrait ci-dessous :  
Pascal : (
) en fait quand on pose la question euh
 souvent aux enseignants quand on est pas là, comment ça sest passé ce matin avec G., comment ça sest passé avec F., en fait souvent lenseignant a du mal à répondre parce quil a tout le reste de la classe à gérer, il sait pas forcément comment ça sest passé (
) 
 donc il y a des fois aussi cest de signaler à lenseignant
 « Attends là
 pendant toute la matinée, il a écrit trois lignes quoi
 » 
 donc euh
 moi je veux bien lentendre que tai pas trop le temps mais est-ce quon pourrait pas le mettre à côté dun élève pas trop mauvais qui du coup a un peu le temps de le relancer, lui dire (voix baissée) « allez, hey, F., vas-y
 faut sy mettre
 »
 (Page 16) (
) jai clairement dit « bah F. jaimerais bien quil soit dans la classe de L. plutôt que dans la classe de C. parce que (
) au niveau relation avec les enfants, je pense que pour F. ça passerait mieux
 » (
) et ça en général cest bien entendu par lenseignant
 comme cest lenseignant davant qui choisit dans quelle classe il le met, en général
 en général cest accepté, quoi
 (Page 34)
	Malgré le fait que lautonomie de Pascal et de Cécile soit avérée, et permise notamment par leurs propriétés dinitiés et danciens recrutés, il nen reste pas moins que la position du poste dAVS-i, dont ils ont activé nombre de potentialités, reste soumis au poste denseignant. Cécile le décrit ici, racontant ce quil lui a été demandé un jour dabsence de lélève quelle accompagnait : 
Cécile : 
 donc ça fait six ans que je suis AVS-i, je suis également donc sophrologue, hein, spécialisée enfance, adolescence, apprentissage, gestion du stress etcetera
euh G. a perdu son grand-père
 [il est donc absent NDR] euh je suis arrivée donc dans lécole, donc faire petit dossier, faire du travail, faire des trucs euh
 
 et euh... « oui, bah Cécile. donc là cet après-midi, là en fait jai apporté le compresseur de mon mari, il faut que tu ailles regonfler dans le local à ballons, tu vas aller regonfler les ballons de sport »
 tu vois
 
  je suis gentille
je lui ai dit (...)  « tinquiète pas, lAVS-i est polyvalente » [rires]
 et je me suis tirée quoi
 je me suis dit cest bon, je vais te les gonfler tes ballons
du coup (...) tu sais, je me suis dit : « bah
je vais faire du bruit [en riant], ils vont pas pouvoir se parler là-haut, ça va énerver
 »
 et en fait le compresseur une fois quil est plein tu sais il sarrête tout seul
je savais pas, jétais emmerdée
 [rires partagés]
	Un autre aspect relationnel tout à fait important quant au poste dAVS-i, et très lié à la relation avec lenseignant, concerne les acteurs non humains que sont la didactique, la pédagogie et la conduite de la classe. 
		Pédagogie, didactique et conduite de la classe
	La position très hétéronome des néos recrutées vis-à-vis de leur collègue enseignant  qui est donc vraiment, à ce niveau, et beaucoup plus que pour certains anciens recrutés, leur supérieur (fonctionnel), nempêche pas quelles se voient confiées des responsabilités en matière pédagogique, même si ça reste relativement marginal (et sur la demande et donc à linitiative de lenseignant) :
Sylvie : par exemple, jai évalué les élèves en grande section
 javais le support, et donc cétait à moi de les évaluer, pas seulement N., mais dautres aussi
 (Page 33)
Lalie : [lenseignant] ma demandé
 si je voulais [moccuper de préparer et mener une séance dart visuel]
 parce quil ma dit « tas pas à le faire, ça fait pas partie de tes fonctions », il ma demandé si je voulais le faire, moi jétais complètement daccord, au contraire quoi
 et euh
 donc du coup oui (...) jai travaillé avec un petit groupe pour un projet artistique (...)
ça sest renouvelé
(...) en fait cétait toute la classe quil menvoyait en petit groupe... Ce projet là cétait mon projet, entre guillemet, donc cétait à moi de le faire jusquau bout avec les élèves
 (Page 42)
	Dans le travail individuel avec lélève accompagné, il arrive également que les néos recrutés aient le sentiment de « rentrer un peu sur le pôle de la pédagogie », comme lexprime Sylvie, surtout quand lélève « nécoute pas forcément ce qui était dit de manière collective » : 
Sylvie : jai limpression, oui, parfois de rentrer un peu sur le pôle plus de la pédagogie, de presque devoir leur expliquer moi-même euh
 par exemple comment faire la division
 en CM1, par exemple, qui lont appris il y a pas longtemps
 et de
 oui finalement de moi-même faire le cours, moitié, sur comment est-ce quon fait la division
 et euh
 donc de tout reprendre, reprendre toutes les bases (
) assez régulièrement
 parce que parmi ceux que jai
 enfin parmi les enfants que jai suivi, il y en a quand même plusieurs qui 
 nécoutaient pas forcément ce qui était dit de manière collective
donc vraiment reprendre les choses, et puis euh
 (Page 36-37)
	Cette « impression » recouvre t-elle une réalité, ou Sylvie confond-elle la reformulation et la reprise des consignes et paroles de lenseignant avec de la pédagogie ? Cette confusion sera sans doute invoquée par tous ceux qui souhaitent voir la pédagogie rester labsolue monopole de lenseignant  cependant nous estimons que ça nest pas forcément le cas, et affirmons ici quil y a matière à recherche. Ce qui semble par contre sûr, cest que le projet de devenir professeur des écoles et, pour Sylvie et Lalie, le fait dêtre devenu AVS-i uniquement pour se donner toutes les chances dy parvenir, a un effet sur le rapport à la pédagogie. 
	Pascal, dans le droit fil de son positionnement caractérisé par une importante autonomie dans sa façon doccuper le poste dAVS-i, est celui qui manifeste le plus de contact et dinvestissement avec la pédagogie, mais aussi avec la didactique, puisquil devient parfois second concepteur  mais seulement pour lélève quil accompagne : 
Pascal : (
) souvent, quand je fais une proposition pédagogique, (
) en général on me dit oui avec un grand plaisir, hein
 tout ce qui peut
 tout ce qui peut heu
 parce que souvent cest des enseignants qui sont un peu démunis, qui savent plus comment
 comment faire progresser lenfant au niveau pédagogique
 donc après nous quand on fait des suggestions bah
 il y a pas gros risques à essayer de toute façon, donc en général ils sont plutôt contents
de tester des nouvelles choses, de voir si ça fonctionne ou pas. (Page 17)
Pascal : (
) ça mest arrivé de produire [des dispositifs didactiques]
 notamment pour les problèmes avec G., [qui est autiste et] qui avait de grosses difficultés à
 pour
 en situation de résoudre des problèmes
 euh
 de
 de
 décrire enfin de faire moi-même des problèmes adaptés à G., euh
 alors
 cest toujours avec laval de lenseignant, hein, je montre toujours à lenseignant avant qui me dis oui ou non
 mais ça mest arrivé plusieurs fois bon tellement euh
 bon je fais pas que ça non plus hein parce que cest pas mon boulot, mais quand je vois que lenseignant est un peu débordé, que moi jai un peu de temps et que je sais que je ferais ça en une demi-heure et que je sais que je vois très bien ce quil faut et
 oui ça marrive de le faire, voilà
 (
) après mettre des grilles en place aussi, dévaluation euh
 de lenfant sur euh
 sur ses progrès, sur lattention par exemple, sur la concentration euh
 en général les enseignants on leur demande ça ils disent « ah oui oui ya pas de problème » sur le principe ils sont daccord mais cest toujours une grille en plus à faire, à cogiter sur euh quest-ce quon met ddans
 ou entre le moment où ils disent « ah oui oui, oui cest une bonne idée » et puis le moment où ça peut être mis en place il peut se passer trois mois donc ça marrive de venir avec ma grille, de la proposer, « ça, ça te va ? » «  ah oui oui, très bien »
 bon euh
et puis
 et puis on avance comme ça quoi
  (Page 17-18)
	En matière de choix de système denseignement et, plus précisément en son sein, de conduite de classe, Pascal fait à nouveau montre de prise de position qui lui sont tout à fait exclusives. Par exemple, il explique ici de quelle manière il a parfois pris le prétexte des besoins et de lintérêt de lenfant quil accompagnait pour tenter de faire évoluer les choix de lenseignant en matière de système denseignement ou de conduite de la classe :  
Pascal : ce qui est un petit peu délicat cest
 ya des moments donnés où le fonctionnement dune classe nest pas du tout adapté euh
 à lenfant quon suit
euh donc cest pas toujours facile de remettre en cause face à lenseignant sa manière de fonctionner
 (
) des fois le... euh le
 les mômes que je suis servent un peu de prétexte pour euh
 faire changer le fonctionnement de la classe, même si cest pas forcément pour le môme mais
 cest un peu dur de dire « aaaah cest
. Tu les rends pas très autonomes, fais plutôt comme ça »
 euh donc moi je mappuyais souvent sur lenfant que jaccompagnais : « ce serait bien pour cet enfant là quil accède à plus dautonomie si ça fonctionnait comme ça » euh
 « Lenfant que je suis y trouverait un peu plus son compte alors si tu as moyen de faire un ptit peu plus comme ça, ça pourrait être bien pour ctenfant quoi »
(
) il y a des moments où je pensais un peu à la classe entière mais cest ça qui est un petit peu frustrant dans ce boulot là cest que au bout de
 enfin moi jétais emploi-jeune en plus, cinq ans, avant
 donc à force de voir des dizaines et des dizaines de fonctionnement de classe, il y a des moments donnés où on a
enfin moi javais le sentiment que je savais ce qui nallait pas dans la classe, je savais comment ça pouvait être amélioré mais bon
 voilà après on est un peu obligés de rester à notre place aussi
 donc ya des fois ouais, je bous un peu de ça
 et jessaie quand même de faire passer certains messages en
 prenant un peu le prétexte euh
 de lenfant que je suis, ce qui permet de rester dans mon rôle et 
 et du coup de pas
 que ça passe plutôt bien quoi
 (Page 13)
	Dans dautres circonstances, ce même positionnement a été mis au service de lintérêt de lélève quil accompagne : 
Pascal : cette année là avec G., là cest
 lenseignante fait beaucoup de transmissif à des tas de moments, où il y a quelle qui parle quasiment, et ça dure pendant une heure et demie... Donc, m
 essayer de lui faire comprendre que bah moi quand cest ça pendant toute la matinée avant la récré, après la récré, je sers à quoi dans laffaire, à rien et que
 et que si elle voulait faire du transmissif euh
 voilà que cétait
 que cétait
 qucétait elle qui faisait ce choix là mais que ça serait bien quelle le fasse un petit peu plus quand moi jétais pas dans la classe
 (
) pour que le temps dAVS-i soit efficace, quoi
 cest clairement comme ça que je le dis: « moi ça me gêne dêtre trois heures à servir à rien dans une classe, cest du gâchis
 alors que si tu faisais tes cours transmissifs plutôt à des moments où je suis pas là, bah
 Voilà ça réglerait un peu le problème
 » Parce que là, à part dire juste toutes les deux trois minutes à G. «  chut, écoutes », on sert pas à grand chose
 et puis au bout dun moment, au bout dune heure et demie, même nous ça nous gonfle, tu comprends très bien que G. il suive plus donc tas même plus envie de lui dire quil faut quil écoute quoi, enfin
 (Page 24)
Du côté du médico-social
Les professions intervenant au sein du secteur médico-social sont multiples. Nous lavons vu, leurs émergences et leurs modes de professionnalisation sont étroitement liés aux évolutions des tensions et des rapports entre les trois pôles que constituent recherche scientifique, professionnels existants et modalités daction politique. 
« Les pratiques professionnelles ont accompagné ce mouvement [constitué de lémergence de nouvelles catégories nosographiques et de redéfinition de laction publique], créant à leur tour de nouvelles spécialités. Ainsi, on loublie trop souvent, lorthophonie et la psychomotricité se sont progressivement dégagées de pratiques généralistes et se sont construites à lorigine dans les classes ou les groupes rééducatifs. Il en va de même pour la pratique de la psychologie, née au contact de lécole avant que de devenir clinique sous hégémonie médicale et renvoyer sa pratique scolaire à une version péjorative. » (Mazereau, 2009).
Il conviendrait dapprofondir lanalyse des différents modes de professionnalisation des métiers du médico-social ; dégager leurs modalités démergence, les allégeances techniques, disciplinaires et institutionnelles et les alliances sur lesquelles elles se sont constitués nous paraît la condition de la construction dune vision globale des enjeux qui se sont sédimentés autour des politiques successives se donnant comme objectif de soccuper de lenfance handicapée. Aujourdhui centrée autour de lécole du fait des principes de la loi de 2005, cette vision concerne directement les processus de scolarisation des enfants en situation de handicap et donc les accompagnants scolaires. 
Parmi les métiers qui seraient à même dêtre les objets de cette analyse, nous pouvons citer ceux de : éducateur spécialisé, moniteur éducateur, aide médico-psychologique (AMP), ergothérapeute, psychologue, psychiatre infanto juvénile, psychomotricien, orthophoniste, animateur socioculturel, assistant familial, auxiliaire de vie social, conseillère en économie sociale et familiale, éducateur de jeunes enfants, technicien de lintervention sociale et familiale
etc.
En matière de relation avec cet ensemble de professionnel, on constate de très nettes différences entre les anciens et les néos recrutées, ce qui nous fonde à évoquer deux modalités très distinctes de relation avec les métiers du médico-social. 
La position des trois néos recrutées de notre échantillon se résume à ce que répond Sylvie à une question concernant ce sujet : 
Guillaume : (
) pas de relations particulières avec lorthophoniste, psychologue, etc., ou les gens du CMP, autre que dans les équipes de suivi ?
Sylvie : non... non...  (Page 40)
	Il apparaît ainsi que les deux premières années doccupation du poste ne sont pas celles où se trouve activée la possibilité détablir des relations avec les professionnels du médico-social. 
	Cécile explique de la manière suivante cette évolution vers un plus grand sentiment de légitimité face aux participants des équipes de suivi de la scolarisation (ESS) :	
Cécile : (...) ouais [ma place dans les équipes de suivi de la scolarisation, ESS] a changé avec le temps, ouais ouais, complètement
 bah le temps de prendre de lassurance, hein, quand tu as tous les professionnels qui sont là avec leurs jargons, leurs machines, leurs bidules, leurs trucs, du coup cest 
 bah il faut simprégner de toute façon de 
 de ce milieu là, et puis euh
 ouais ouais, je my sens complètement euh
 complètement à ma place
 (Page 21)
	Elle et Pascal ont également noué des contacts avec certains professionnels du médico-social en dehors des équipes de suivi  vraisemblablement, le plus souvent, sur la base daffinités interpersonnelles, surtout pour Pascal : 
Guillaume : (...) comment ça se passe avec les professionnels du médico-social ? (
) [tu as] des contacts informels en dehors de léquipe de suivi ?
Cécile : ouais
 (...) notamment lorthophoniste (
) javais besoin de savoir moi comment ça se passait
 donc je lai rencontré
 on sest vu aussi sur dautres gamins
 euh [C., lenseignante spécialisée de lhôpital de jour du secteur], cest pareil, surtout que
 bon [elle] soccupe des cas les plus difficiles
 et en loccurrence, il marrivait des fois que (...) je suive des enfants qui soient scolarisés aussi à lhôpital (...) de jour
donc euh
 donc des fois ils revenaient de lhôpital de jour à lécole avec des conflits
et, suivant la nature du conflit, tu vois, moi je savais de qui éventuellement ça pouvait venir, dune autre école, dun enfant que je suivais tu vois (...) bon du coup jappelle C. savoir sil y a pas de problème et si du coup moi je devais gérer aussi la situation à lécole
donc euh
 voilà, cétait plus des petites choses comme ça
 (Page 22-23)
Pascal : bah alors lhôpital de jour dans le secteur heu
cest S. qui soccupe de ça
 (
) cest lenseignante qui gère lhôpital de jour à lécole de C.
 je la connaissais en fait
(
) de quand jétais emploi-jeune, où elle
 travaillait dans lécole, pas à lhôpital de jour, elle avait une classe ordinaire
 donc elle je suis en lien
 elle soccupe de F. et de G. et donc euh
 ça cest bien jai la moindre question, par exemple F. en ce moment je trouve que il est beaucoup moins dans leffort de progresser quavant
(
) lenseignante était pas trop daccord avec moi sur ça, donc du coup jai appelé S. pour avoir son point de vue là-dessus
 parce que je la connais (Page 30)
	Il ny a donc activation de relations interprofessionnelles entre AVS-i et professionnels du médico-social que dans certaines situations danciens recrutés, ce qui fonde, en la matière, à nouveau une occupation longue du poste comme une propriété nécessaire (mais pas suffisante)
	Au sein des ces relations établies par Cécile et Pascal, ce dernier est à nouveau le seul à produire un positionnement marqué par la volonté dinfluencer, de négocier, de prendre une place dacteur. Il explique ainsi de quelle manière il sest positionné sur une problématique qui, a priori, relève exclusivement du secteur spécial : nommer (ou pas) le handicap face à des parents qui en sont demandeurs : 
Pascal : bah en général lInspection Académique ne nous dit pas le handicap, (
) moi jai un petit peu de mal avec le spécialisé là dessus, que ce soit lIA ou les éducateurs des fois de lIME ou du CMP cest à un moment donné « non, non non cest tabou, on na pas le droit de
 »
 ou on fait partie de léquipe éducative ou on en fait pas partie mais il y a des moments donnés où euh
 ça posait un petit peu problème il y a eu le même problème avec G. en fait où euh
 (
) donc dans une réunion avec le CMP moi javais dit clairement « mais on sait ce quil a, G., au moins en partie, on sait quil y a des trouble autistiques, ce serait peut-être important de dire ça aux parents [qui sont très demandeurs]
 » 
 et la réponse du CMP a été « oui mais on dit pas aux parents parce que on considère quils ne sont pas prêts à lentendre
 » 
 donc moi là jai dit clairement que jétais pas du tout daccord avec eux, que au contraire la maman elle attendait que ça de pouvoir mettre un mot sur le handicap, et que ce serait bien quils le disent parce que sinon cest moi qui allait finir par le faire, et queffectivement cest peut-être pas mon rôle mais que
 donc le CMP a fini par dire aux parents
 et un an et demi après quoi donc moi ça cest des choses ouais que javais un petit peu de mal à comprendre
de mon point de vue
 (Page 8)
	Il explique également comment il a pesé pour que les temps de présence de deux enfants quil accompagne (depuis quatre et cinq ans) et qui fréquentent le même CMP soient fixés hors-temps scolaire, le mercredi : 
Pascal : donc là je dirais aussi cette année, comme F. et G. que jaccompagne cette année sont dans le même groupe de CMP jai réussi à faire en sorte cette année quils le fassent le mercredi
 (Page 25)
	Tous ces éléments font de Pascal lAVS-i interrogé qui a clairement activé le plus de potentialités relationnelles parmi celles qui sont inscrites dans les propriétés du poste dAVS-i, que ce soit dans le cadre de la classe, dans celui de lécole ou par rapport aux relations situées en dehors de lécole. De fait, la pratique de Pascal rend compte dune situation où cest très clairement les propriétés de lindividu qui occupe le poste qui dominent celles qui caractérisent le poste lui-même  et laisse également présager ce que pourrait être un poste dAVS-i qui ne serait plus caractérisé par une rotation déternel débutant
	Cependant, ce ne sont pas seulement les caractéristiques objectives du poste dAVS-i qui influent seules sur les possibilités de relation interprofessionnelle : la structure plus générale du champ et de lorganisation des autres postes et institutions qui les emploient, ainsi que lhistoire du champ de léducation spéciale, génèrent elles aussi une tendance au cloisonnement, à la préservation jalouse de son territoire professionnel spécifique et tendent à produire un sentiment de « manque de temps » qui devient la cause « naturelle » du déficit de relations entre acteurs/agents des processus de scolarisation des enfants handicapés : 
Cécile : (
) après on a pas forcément
 pas forcément le temps de se voir, avec C. ou avec dautres hein
des petits temps impersonnels avant ou après la réunion, enfin après tout le monde se barre pour aller au travail hein
donc cest quand même assez speed
 donc cest vrai que ça cest quand même un petit peu regrettable (...) quon ait pas un petit peu de temps quoi
de contact quoi
 (Page 22-23)
Avec Pascal, la parole de Cécile permet de rendre compte dune autre tendance profonde du milieu spécialisé qui est celle de lhyper protection des enfants qui sont concernés par elle. Elle explique ainsi les éléments suivants, liée à la situation dun élève, suivie par une orthophoniste (payée par les parents) que Cécile est allée voir : 
Cécile : (...) Et puis là cette année, pareil, donc avec G., dyslexique, jai aussi vu son orthophoniste, pendant les vacances de, je sais plus, les vacances de la toussaint
 je suis allé voir, ouais, je suis allé voir son orthophoniste, parce que là vraiment, jétais 
 jétais dépourvue quoi
 jétais vraiment dépourvue euh
 cétait un gamin, voilà
 bah à tempérament, voilà, il acceptait pas trop euh
  dans la classe euh
 jai du mal à me faire mon petit trou, à rentrer en communication avec lui
euh
 et puis cest pareil, cest un gamin qui est hyper percutant, très intelligent
une très très grosse mémoire, une grande culture générale, donc il compense avec ça, il a pas à apprendre à lire
 franchement, il sen tape
 il est pas intéressé
pas du tout
 il est flemmard, voilà
 et en fait jai vu son orthophoniste, qui ma dit « ouais, faut compenser, faut compenser, à fond dans la compensation, euh
 » Alors il faut savoir que pour G., en loccurrence, là, cest les parents qui ont fait une demande dAVS-i, cest pas lécole
 donc il y a conflit, tout ça, etc. 
 et puis euh donc lorthophoniste ma fait « ouais, il va avoir un ordinateur, de toute façon il faut tout lui photocopier, à ce gamin
 » jai dit « bah écoutez, jai plutôt limpression quil a pas trop la culture de leffort, donc si on compense à ce point-là euh
 le môme à la limite, il a quà rester chez lui devant son ordi, il a pas trop besoin de venir quoi
 dans ces cas là cest
 donc moi je suis pas partisane »
 voilà, ça a été très clair, donc moi effectivement jen ai parlé à linstit, on a fait quand même
 euh
 voilà, essayer de gérer un petit peu, faire certaines photocopies etc., mais très très peu quoi et le gamin je le fais gratter, je le fais lire, et puis et puis il y prend goût quoi finalement aussi tu vois donc euh
 donc voilà
 donc ça permet aussi de voir le comportement du gamin est aussi lié au comportement de lorthophoniste qui dit elle, « bah de toute façon euh, on va compenser, on va faire à ta place quoi
 » (...) (Page 23)
Léducation populaire
Cette partie se trouve entièrement construite (et justifiée) à partir dun échange électronique que jai pu avoir avec Pascal, consécutivement à notre entretien. En effet, après avoir retranscrit les enregistrements, jai envoyé une copie papier de leur propre entreties aux six AVS-i interrogés, en leur demandant de me renvoyer, sils le souhaitaient, des informations et des remarques complémentaires. Voici ce que Pascal ma répondu : 
Pascal : F., pendant les vacances d'été entre son CE1 et son CE2, a été inscrit au centre de loisirs de son village pour un mois. La directrice était une ATSEM de l'école de F.  Je la connaissait donc et la voyait à l'exterieur.  Elle m'a annoncé à la fin de la première semaine de centre, que F. était très renfermé sur lui-même et que les animateurs ne semblaient pas très à l'aise pour entrer en relation avec lui. J'ai donc été au centtre de loisirs une demie journée pour expliquer à l'équipe comment on pouvait faire sortir F. de sa coquille. Après mon intervention, un animateur à découvert les aspect "fascinants" de la personnalité de F. et l'a pris sous son aile. La fin du centre s'est bien passé pour lui. Bien sûr, tout cela s'est passé de manière officieuse.  
Il est tout à fait étonnant de constater que Pascal, tout à occuper son poste dAVS-i et à en explorer la logique jusquà intervenir en dehors de lécole, réactive une des propriétés du poste tel quil existait dans les années 1990 au moment où il dépendait dassociations, à savoir le travail en centre de loisirs pendant les vacances scolaires  partie du poste qui na pas survécue au passage à léducation nationale en 2003. Il est ainsi allé transmettre son savoir dinitié à lautisme, et plus particulièrement dinitié à lautisme de F., à léquipe danimation travaillant dans le centre de loisirs. Une des antiennes de léducation populaire, « léducation de tous par tous » prend ainsi un relief tout particulier  dautant plus que Pascal na pas ici cherché à se faire embaucher, ou à se rendre indispensable : une demi-journée de présence a suffit pour que F. parvienne à être abordé par des animateurs jusque là dépassés. 
Cest ainsi quen sus des éducations scolaire, spéciale et familiale, nous pouvons ajouter au caractère interstitiel de la position du poste dAVS-i léducation populaire, entendue dans le sens où nous lavons ici préalablement définie. Il conviendrait dexplorer plus avant cette définition qui concerne une position mais aussi, incidemment, des potentialités dont lactivation se trouve dépendre de conditions sociales quil conviendrait didentifier plus avant. 
On le voit, la position de laccompagnant scolaire est tout à fait inédite dans le champ éducatif français, située à mi-chemin entre éducations scolaire et spéciale, et empruntant également aux éducations familiale et populaire. Le travail en cours dinvention du poste, qui sétablit dans une relation dialectique entre les formes de son occupation et les orientations politiques qui pèsent sur sa destinée réglementaire, montre que linconscient social du poste travaille encore de manière puissante ceux qui se trouvent à loccuper. 
Les différents modes de professionnalisation des métiers historiques du champ invitent à penser que les héritages historiques (dont ceux de concurrence et de lutte de légitimité), incorporés et devenus dans de nombreuses pratiques professionnelles des impensés dont on se demande parfois sils peuvent devenir pensables (comme, par exemple, le fait pour un enseignant du premier degré de se retrouver dans le cadre symbolique de sa classe avec un professionnel non subalterne et possédant dautres connaissances, complémentaires des siennes), sont dune telle puissance dans nombre de situations que lémergence dun modèle nouveau de professionnalité tel que celui de laccompagnement scolaire, qui emprunte à plusieurs espaces et temps éducatifs sans être adossé à une discipline spécifique, peut constituer tout à la fois une source stimulante de questionnements apte à ouvrir la possibilité du pensable aux impensés, et un vecteur important dordinarisation du spécialisé. Mais le champ dinvestigation est large, et nous ne nous risquerons pas ici à prétendre répondre entièrement à cette question. 
En tout les cas, rendre le spécialisé ordinaire nest envisageable que dans les conditions réunissant tout à la fois : des possibilités de coopération dépassant les simples routines de concertation ou de collaboration, des possibilités de recherches scientifique travaillant ces questions, et des dispositifs faisant primer les objectifs de léducation inclusive sur les traditions enkystées caractérisant les relations entre ministères concernés. La structure du champ de lenfance handicapée semble être en effet devenue structurante avec une force qui paraît empêcher toute évolution de se frayer un chemin hors des sentiers qui sont déjà arpentés, et dont on ne fait que changer les pancartes qui leur donne leur nom. 
Les sciences de léducation se sont constituées sur un champ de recherche et dans une perspective de transdisciplinarité, et cette émergence semblait défier la tradition académique selon laquelle les disciplines et leurs traditions primaient. Dans un mouvement similaire, il semble bien, comme lécrit Ebersold, que les professions  et pas seulement la profession denseignant  auraient tout intérêt à faire se déplacer leur centre de gravité professionnel de lenfant (selon le précepte de « lenfant au centre du système éducatif » édicté dans la loi Jospin de 1989) au projet (celui de lEcole en général, mais aussi, en ce qui concerne les processus de scolarisation, celui qui est attaché à un élève en situation de handicap). 
« Avec lentrée individuelle de tous dans le droit commun, nous entrons simultanément dans lère de la responsabilité collective des institutions ordinaires quant à laccessibilité. (
). Il faudra bien que la verticalité des administrations laisse et aménage une place reconnue à de nouvelles formes dhorizontalité entre les acteurs de proximité, convoqués par laccompagnement des enfants en situation de handicap. » (Mazereau, 2005).
Chapitre 4 : 	(Comment) Accompagner (qui ?) selon les besoins (de qui ?) ?
« Dans les établissements scolaires ordinaires, différents professionnels spécialisés sont en mesure de contribuer, dune façon ou dune autre, à laccompagnement des enfants en difficulté diverses : enseignants, éducateurs ou rééducateurs de SESSAD, de RASED, de CMPP, etc. ».
Ce rappel de Belmont, Plaisance & Vérillon (2006) est utile pour introduire une analyse de la notion daccompagnement. Cette dernière est certes le soubassement de la pratique des accompagnants scolaires, mais ces derniers nont en pas le monopole. Christine Philip (2009) note que si les AVS sont les seuls à pratiquer seulement laccompagnement, un ensemble hétéroclite de métiers ayant une assise professionnelle existante sest emparé de cette notion en la constituant comme une extension de leur propre activité (confère les métiers cités par Belmont, Plaisance & Vérillon, mais également ceux relevant du coaching dentreprise, ou les pratiques de compagnonnage ressurgissant dans les discours sur la formation des enseignants, par exemple). Laccompagnement connaît ainsi depuis les années 1990 une faveur importante dans de multiples territoires professionnels. Partant de ce constat, et sil est vrai que « ce quune notion gagne en extension, elle le perd en compréhension » (Philip, 2009), comment peut-on sattacher à définir laccompagnement ?
Etymologiquement, accompagner signifie « manger le pain avec ». Il y a donc dans les origines du mot un sens qui induit une proximité à la fois affective (on ne mange pas son pain avec nimporte qui) et physique (« manger avec » implique dêtre côte à côte). Ce sens implique également un début et une fin, et fonde laccompagnement comme un processus. Ces caractères originels sont là pour témoigner de ce que lémergence récente de la notion comporte comme rupture avec des conceptions précédentes du « travail social » qui se trouvaient caractérisées par une technicité froide qui insistaient, ou était reçue et pratiquée comme semblant insister, sur la « juste distance » et une neutralité revendiquée qui se trouvaient vectrices de violence symbolique (évoqués par Jeannine Verdès-Leroux dans son ouvrage « le travail social » (1978)) ; autant déléments qui ont dailleurs sans doute été en partie à lorigine du fait que les pratiques du « travail social » dans les années 1970 ont été critiquées et réduites à la mise en uvre dun contrôle social au bénéfice des classes dominantes. En ce sens, et selon la perspective que lon se donne, le succès de la notion daccompagnement serait là pour démontrer qui un progrès dans les conceptions sous-tendant les pratiques des travailleurs sociaux, qui un nouveau procédé deuphémisation permettant daffiner la dissimulation dun contrôle social toujours présent et sans cesse plus sophistiqué. Entre ces deux pôles idéal-typiques de lanalyse des évolutions  et malgré le fait que nous penchions vers un des deux , il est de notre point de vue possible de construire une vision plus nuancée, avec lobjectif, tel quil a toujours fondé les progrès des sciences sociales, de dépasser les oppositions binaires. 
« Depuis les années 1990, nous sommes graduellement passés dune logique de protection par des droits sociaux spécifiques pour des catégories ciblées à une individualisation du social où domine la notion daccompagnement. (
) La lente mutation du modèle français de protection qui forgeait des réponses institutionnelles pour des groupes sociaux définis connaît aujourdhui une accélération : les besoins de la personne dans son  environnement guident désormais les réponses en terme de compensation et de service. (
) Lécole néchappe pas à ce mouvement. » (Mazereau, 2005)
	Cette perspective invite à considérer la question scolaire comme partie prenante de la question sociale, et non comme un univers entièrement spécifique et autonome ; les conditions et les formes de son hétéronomie doivent être posées et resituées dans un contexte plus large. En effet, ce mouvement général dindividualisation du social est tout à la fois un des produits et une des forces productrices de la logique dintégration scolaire et de son prolongement linclusion ainsi que de laccompagnement scolaire des enfants handicapés. 
La vogue et la vague de laccompagnement
« Avec laccompagnement, on se trouve bien en présence dune réalité qui, non seulement dépasse largement les champs disciplinaires et les acteurs professionnels, mais dont lexpression formelle et les usages donnent limpression quil peut tout désigner. » Maëla Paul, 2004. 
4.1.1	Un lieu commun 
Maëla Paul a produit au début des années 2000 un travail sur laccompagnement qui constitue une des premières tentatives délucidation aussi systématisée des réalités que cette notion recouvre. Son travail est de ce point de vue tout à fait remarquable puisque laccompagnement constitue un objet notionnel et conceptuel qui rencontre depuis une quinzaine dannées un vif  succès dans de multiples espaces sociaux et professionnels  et qui de fait se décline pratiquement et symboliquement de manière très différenciée. 
Quel point commun entre les chômeurs, les malades, la parentalité, la création dentreprise, les enfants et les personnes handicapées, les vieux, les élèves qui entrent en 6ème,  des jeunes qui fréquentent une formation en alternance ? Ils sont tous accompagnés, relèvent dun accompagnement et ont (plus ou moins) à leur côté un accompagnant.  
De fait, sengager dans une démarche de construction dun modèle dintelligibilité de ce que recouvre laccompagnement oblige, nous dit Maëla Paul, à « un double mouvement puisquil faut à la fois embrasser cette diversité et sefforcer deffectuer une démarche unificatrice » :
« [Pour] poser laccompagnement comme objet détude, [il est nécessaire de] lisoler de ses champs spécifiques (où il est devenu accompagnement de ceci ou cela) et douvrir lespace social dans lequel il ne trouverait que justification et non significations. » (Paul 2004)
	Nous allons tenter ici de profiter des fruits du travail unificateur de Maëla Paul (et de lexcellente analyse de Lise Demailly) autour de laccompagnement, c'est-à-dire, ramener une partie du résultat de leurs travaux, au « champ spécifique » de laccompagnement scolaire des enfants en situation de handicap. Il sagit, pour reprendre les termes de Maëla Paul, et malgré le retour au spécifique que constitue lappréhension de laccompagnement scolaire des enfants handicapés à lécole (avec les outils issus des travaux unificateurs), de privilégier la signification à la justification, et de permettre de rentrer encore plus avant dans la compréhension et lintelligibilité de ce quest le poste dAVS-i. 
« Le mot « accompagnement » fleure bon les connotations positives : le pain partagé, la fraternité, la solidarité. Il repousse la solitude, mais aussi le contrôle. Dans notre époque avide de marketing symbolique, il fait fortune. » (Demailly 2009)
	Laccompagnement est ainsi un lieu commun, au double sens du terme : notion naturalisée, elle est aussi une référence commune pour nombre de postures professionnelles  qui va dailleurs croissant. Paraissant tout dire mais ne disant en fait rien du tout, elle semble constituer un paradigme émergeant des métiers du relationnel, c'est-à-dire lensemble des postes qui sont construits sur la nécessité première de relations de celui qui loccupe avec dautres agents sociaux et/ou dautres postes. 
	La question qui se pose à présent, maintenant que nous avons rapidement cerné la mise en question de la référence que constitue le terme daccompagnement, est celle de son origine et, surtout, de lorigine de sa « fortune ». 
4.1.2  	Délitement et professionnalisation du lien social 
« Ce que recouvre sociologiquement ce joli mot, écrit Lise Demailly en 2009, cest à notre avis dabord lexplosion du travail et des métiers relationnels dans la société. » 
	Il sagit en effet dune des caractéristiques de ces trente dernières années que davoir vu les métiers dits « relationnels » se développer. Majoritairement féminins, majoritairement relevant des secteurs publics étant dans la ligne de mire des « politiques de lajustement » économique (le soin, laide, le soutien, léducation, lenseignement), lémergence de ces métiers est concomitante à la dégradation du lien social et constitue, selon les termes de Lise Demailly, une forme de « professionnalisation du lien de soutien ». Cela est permis, daprès elle, par une triple demande sociale, tout à la fois individuelle, collective et institutionnelle. 
	Les transformations des géographies de lemploi et de la mobilité, la consécration (différenciée) dune vision individualiste de la société, les nouvelles formes de technologie de la communication, constituent (parmi dautres) des matrices importantes pour bien comprendre le délitement du lien social (et sa recomposition)  et les nécessités de construction des demandes sociales quévoque Lise Demailly, qui ont bien sûr, selon quelles sont individuelles, collectives ou institutionnelles, des logiques et des économies différentes, mais qui ont toute en commun de souhaiter (voir se) combler (certes différemment) les espaces sociaux laissés vacants par les nouvelles formes de socialisation. 
	Lise Demailly modélise de la manière suivante ce quelle nomme les « conditions sociales de la professionnalisation du travail relationnel » : 
psychologisation des problèmes sociaux
processus de formalisation et dobjectivation de linteraction avec autrui et de la catégorisation des conduites dautrui. 
De notre point de vue, les deux éléments que sont : 
1-	lindividualisation de laccompagnement des enfants en situation de handicap scolarisés « dans lécole de leur quartier », pour reprendre les termes de la loi de 2005, individualisation qui repose sur le postulat selon lequel seul lélève accompagné est susceptible dêtre lobjet des interventions de lAVS  ce qui correspond en tout point à une forme de « psychologisation » ; 
2-	ainsi que les tentatives récurrentes depuis dix ans de formaliser leur pratique dans des documents sur lesquels est pris un appui (militant) pour proposer la création dune véritable profession
forment bien les conditions sociales dune professionnalisation, selon ce quexpose ici Lise Demailly. Ceci confirme bien, sil le fallait, que lexistence et lactivité des AVS-i relève également du mouvement ici décrit  et dont lanalyse ne peut faire léconomie, sous peine de tomber dans une forme aiguë de réductionnisme.  
	Délitement et recomposition du lien social, professionnalisation de liens de soutien auparavant assurés de manière « naturelle » et non professionnelle : ces éléments ne seraient pas suffisants pour esquisser un modèle de compréhension de ce qui se joue dans la consécration de laccompagnement sans la mention de limpératif de performance et de ses corollaires (évaluation, excellence, efficacité, équité, etc.). A linstar de linclusion, et avec elle, ces mots charrient avec leur utilisation un monde et une vision du monde  qui, à défaut dêtre forcément les mêmes, entretiennent à tout le moins une forte parenté. Cet impératif, qui sactualise dans une forme didéologie managériale directement issue dune conception individualiste de la société, rencontre les éléments précités pour former cette réalité quest la consécration de laccompagnement dans toutes ses formes : 
« La conjonction de leffritement du lien social et des injonctions dexcellence et defficacité font le lit du développement du relationnel. Et le besoin deuphémisation de la dureté du monde social fait celui du mot « accompagnement » pour penser le travail relationnel », résume Lise Demailly. 
	Pour autant, une attention minimale à notre sujet montre rapidement que le processus de professionnalisation des liens de soutien préexiste assez largement au succès de la notion daccompagnement : le métier dassistante sociale date du premier quart du 20ème siècle, celui déducateur de 1968,  pour ne citer que ceux-là. Une grande partie de ces professions étaient en fait déjà formalisées avant que ne soit consacré la notion daccompagnement, qui apparaît ainsi venir (ou être saisie) comme une extension à des professionnalités déjà existantes, qui se sont formalisées sans elle (et ce quelle recouvre).   
	
Tout se passe ainsi comme si les postures daccompagnement, tout autant que la faveur qua acquis cette notion ces quinze dernières années, étaient bien faites pour constituer une manière de combler des espaces, des temporalités et des postures laissées en quelque sorte vacantes par les processus de formalisation des professions antérieurement constituées ; comme si le processus historique de technicisation et dinstrumentation des professions historiques de la relation (qui se trouve actualisé juridiquement parlant par la définition des postes comprenant la définition des tâches et des actes professionnels) avait eu comme conséquence un rétrécissement du spectre de laction possible de ces professions, et que ce rétrécissement (pendant de la technicisation des éléments retenus pour définir les postes) avait conduit à laisser en quelque sorte vacants (et manquants) un ensemble de tâches et despaces de relation se trouvant actuellement en état de nécessité historique dactivation et aujourdhui investi par lensemble des pratiques se réclamant de « laccompagnement »  qui serait ainsi un phénomène de résurgence par défaut de postures et de tâches professionnelles négligées par les processus de professionnalisation. 
	Partant, que peut-on dire de ces espaces, temporalités et posture quinvestit aujourdhui laccompagnement ? Comment tenter de définir ce dernier ? 
4.1.3	Définir laccompagnement : une notion en tension 
Si une partie du lien social est en cours de professionnalisation, il nen reste pas moins que cette transformation (processuelle) de formalisation et de mise en procédure du lien de soutien nempêche pas que la nature relationnelle demeure :
 « Ainsi le « lien daccompagnement » est-il cette tension ambivalente entre don et service contractualisé (donner de soi à autrui et être payé pour le faire) », écrit Maëla Paul 2004. 
	Donner de soi dans le lien et être payé pour le faire : voilà le soubassement de la notion, et voilà la matrice de toutes les tensions qui la définissent.  
« De ces nouveaux accouplements émergent des pratiques qui tentent de sajuster à la fois aux injonctions politiques et à la demande particulière ». (Paul 2004) 
	Cette tension première se décline de multiples manières ; on trouve ainsi des tensions entre « le souci de lautre et les instances de pouvoir qui lutilisent à leurs propres fins, ou encore entre une notion qui procède du bénévolat (donc du don de soi) et de la professionnalisation (limplication de soi) », soit entre mandat (donné au professionnel par une instance de pouvoir) et demande (émergeant  ou non  de la catégorie spécifique à laquelle laccompagnement est destiné).
	Maëla Paul, dans son travail sur laccompagnement, a analysé le champ sémantique du verbe accompagner. Elle note que lui sont attribués trois synonymes, chacun attachés à un registre daction qui forment un espace dintelligibilité cristallisé dans laccompagnement : 
	
escorter (registre du soin, de la protection, de laide, de lassistance)
guider (registre du conseil, de lorientation)
conduire (direction (conduite à tenir), registre des fonctions éducatives, instruire, enseigner, élever, éduquer, former, initier.)
« Tout le matériel synonymique recueilli, apparemment disparate, est en fait solidement (mais implicitement) lié par lidée de « veille ». Il y aurait donc au fondement de laccompagnement des figures anthropologiques essentielles, figures associées aux idées de lien, de passage et de passeur, de portage et de veille. »
	Cécile explique ci-dessous la façon dont elle présente aux enseignants (qui, du fait quelle soit une ancienne recrutée (2004), nont que rarement déjà travaillé avec des AVS-i) sa manière de travailler, et la façon dont elle conçoit son travail : 
Cécile : jarrive, jexplique aux enseignants ce que cest le rôle de lAVS-i, je dis « tu vois un
 un maître sauveteur
 un maître-nageur, tu vois, à la piscine ? Et bah moi cest le même principe
je suis là, tu vas avoir limpression des fois que je ne sers strictement à rien, [rires]
 et pourtant je suis là, sil y a un pépin je suis là, et voilà je suis là en observation, je suis là en écoute, je suis là
 pour adapter, mais en même temps pour meffacer au maximum, enfin cest
. » Cest 
 cest compliqué dêtre AVS-i [rires]
 (Page 26)
	Lidée de veille sous-tend de manière très claire lévocation que Cécile fait ici de la comparaison avec le rôle du maître nageur. La veille apparaît ainsi comme le soubassement de la pratique des AVS-i (telle quelle est habitée par Cécile, mais aussi par les autres anciens recrutés, qui tous abondent dans leur explicitation de leur pratique centrée autour de « lobservation »)  ou, plus précisément, une nécessité potentiellement inscrite dans les propriétés du poste. La tension que la veille inaugure se situe entre les moments où cette dernière domine et les moments où « il y a un pépin », comme le dit Cécile ; en dautres termes une tension entre les moments où priment « lobservation » « lécoute » et « leffacement » et ceux où lescorte, le guidage ou la conduite, pour reprendre les termes de Maëla Paul, prennent le relais. 
	Une psychologue scolaire, intervenante sur un forum dédié à la « psychologie, à léducation et à lenseignement spécialisé » parle en ces termes du positionnement de lAVS-i et de sa relation avec lélève quil accompagne : 
« Je vous donne la définition de la foule primaire de S Freud : c' " (....) est une somme d'individus, qui ont mis un seul et même objet à la place de leur idéal du moi et se sont en conséquence, dans leur moi, identifiés les uns aux autres." (p181, édition Payot) (
) Si je développe ce point c'est pour marquer que l'AVS-i vient en rupture avec ce lien identificatoire, ou du moins, qu'il vient colmater la brèche qu'ouvre la confrontation à la norme pour l'enfant en situation de handicap dans ce groupe de 'pairs'. L'enfant accompagné de son AVS n'est pas pair, il est pair et impair, il est différent dans ce groupe qui tend à l'homogénéité et à l'identification des moi. Le travail de l'AVS est alors un travail d'équilibriste : il est là pour permettre cette identification de l'enfant avec un handicap au groupe de la normalité tout en signifiant, ne serait ce que par sa présence, le point même de cette différence. Avoir un handicap ne signifie pas avoir un AVS mais avoir un AVS signifie avoir un handicap. Donc, le travail de l'AVS ne peut fonctionner que si il existe une complicité fine entre l'enfant et l'adulte qui permettra à ce dernier de deviner quand il doit s'effacer pour laisser à l'enfant l'expérience du pair et intervenir quand l'impair est incontournable. Cette complicité ne s'enseigne pas à mon sens, en deux ou trois jours de formations rapides, ça demande un réel travail sur soi et de savoir apprendre de sa propre expérience. On dit souvent en psychanalyse que c'est l'enfant qui nous fait advenir parents, je pense également que c'est l'enfant et la façon dont il s'accommode de son handicap qui fait advenir l'AVS. »
	Cette (rapide mais néanmoins) fructueuse lecture issue de la théorie psychanalytique vient, avec son propre outillage théorique, et donc dune manière spécifique, appuyer ce quexplique Cécile à sa manière, et ce que pointe Maëla Paul : 
« Lenfant accompagné de son AVS nest pas pair, il est pair et impair (
) [lAVS] doit deviner quand il doit seffacer pour laisser à lenfant lexpérience du pair et intervenir quand limpair est incontournable ». 
	
	Le « pépin » dont parle Cécile, et qui fait descendre le maître nageur de sa posture dobservation, peut donc correspondre à ce moment que décrit une approche psychanalytique et qui correspond à une rupture de « lexpérience du pair » et à une lirruption, « incontournable », de limpair. 
	Ces éléments sémantiques et cette courte analyse, fournis ici pour éclairer a minima les lecteur et lectrice quant aux tensions fondatrices (et caractéristiques) des pratiques de laccompagnement, renvoient, à ce quimplique de rendre professionnel une relation humaine, entre mandat et demande : sur quoi doit-on veiller ? A quelle fin doit-on guider ? Qui doit-on escorter  et pour protéger contre quoi ? Qui détermine la direction (et le sens) à prendre ? 
Cest ainsi que Maëla.Paul ajoute très justement, comme pour illustrer la série de questions ici posées, qui renvoient directement aux analyses de la sociologie conflictualiste : 
« Ces figures ne doivent pas faire négliger un possible glissement des fonctions de veille comme dimension éthique et expression de la sollicitude envers autrui  aux usages de la veille comme gestion sociale ou technique. »
	« Veiller », sur le fil dune ambivalence et dune tension jamais résolue entre le souci de la personne accompagnée et linstance de pouvoir qui emploie et encadre lactivité, à parfois guider, parfois conduire, parfois escorter : tel est laccompagnement. Cette brève et condensée définition est la bienvenue pour aborder à présent spécifiquement laccompagnement tel quil concerne les AVS-i, et relativement aux propriétés du poste définies dans le chapitre 3. 
Les cordes de linstrument accompagnement
Les pratiques et postures de laccompagnement
	En suivant les sillons que tracent lanalyse de Maëla Paul sur le champ sémantique du terme accompagnement, on constate donc que parfois laction relève du guidage, parfois de lescorte et dautres fois encore de la conduite : ny a t il donc, pour caractériser laccompagnement, aucune référence unique ? Maëla Paul nous fournit, pour répondre à cette interrogation, un rappel bienvenu dun personnage de la mythologie grecque : Protée. Ce dernier a la faculté de prédire lavenir et de changer de forme ; cest cette dernière capacité qui fonde lauteur à laffilier directement à la posture spécifique de la pratique de laccompagnement  tout comme la postérité à utiliser Protée pour former ladjectif protéiforme . Elle explique que son émergence témoigne du passage dune logique de « prise en charge » à une logique de « prise en compte », puisque les formes successivement prises le sont, théoriquement, en fonction des besoins de la personne accompagnée. Son analyse dévoile que laccompagnant doit : 
« (
) sengager tout en se situant en retrait, simpliquer tout en seffaçant, sans cesse sadapter, sajuster, changer de registres (
) [Il doit en outre] ne rien prescrire, mais ne pas renoncer à faire progresser, proposer mais ne jamais imposer ». 
Prenons connaissance de ce que nous expose Cécile à propos de ladaptation, de lajustement, du changement de registre : 
Cécile : (...) jobserve surtout bah lenfant, les interactions, le comportement, etcetera, etcetera, et puis ensuite bah je 
 me positionne, alors ça va dépendre euh
 je me positionne un petit peu en retrait
 des fois, suivant les besoins, soit je vais aller vers lui, je vais me
 retirer, enfin tu vois
 soit jai besoin de rester dune manière permanente avec lui, ou alors du coup par moment je vais faire des tests, tu sais
 «  Je vais voir ce que tu es capable de faire
 » Enfin voilà, cest toujours (...) hyper modulable, en fait tout ça
 (Page 30)
« Autant dire, écrit Christine Philipp en 2009, quil sagit là dun de ces métiers impossibles où, quoique nous fassions, nous risquons toujours de nous tromper et dêtre à côté de ce quil aurait fallu faire. » Lanalyse de Maëla Paul dévoile également que laccompagnement est une pratique paradoxale, dont témoignent les oppositions précitées qui laniment. Enfin, elle dévoile (et nous souhaitons que la présente contribution y participe) que cette pratique contribue à une recomposition du rapport au savoir, à lexpertise et à la technique ; en ce sens, elle rejoint complètement lanalyse de Philippe Mazereau qui écrit en 2005 :
« Si on sattarde sur cette question du savoir, il nous faut admettre que laccompagnement, en tant que nouvelle posture professionnelle, ne va pas manquer de susciter de nouvelles formes de modélisation des pratiques. (
) [Elle ne va pas manquer également de forcer à] reconsidérer la hiérarchie des savoirs produits. Nul doute que des recompositions sont à venir (
) entre des savoirs construits, pour beaucoup, à partir de vision déficitaires et généralisantes des personnes en situation de handicap et des savoirs construits à partir de lexpérimentation des capacités de ces mêmes personnes. »
Maëla Paul liste dans son ouvrage les quatre postures professionnelles de laccompagnement. Cette typologie pourrait servir de grille danalyse à une recherche spécifique. Nous allons ici seulement tenter dillustrer ces quatre postures, et illustrer du même coup le fait quaucune ne prédomine complètement dans une pratique daccompagnement ainsi que lillustre bien la référence à Protée qui fait comprendre que, selon lévaluation des situations, il y a de manière incessante passage de lune à lautre de ces postures. 
Pourvoyeur. Objectif : fournir. Modèle médical, scientifique. Logique de diagnostic/pronostic. Prescription, remède, recette, logement, subvention, emploi, etc. La personne est « lobjet » de la relation. Rôle dexpert. 
	Ici, Pascal explique fournir une grille dévaluation de lélève autiste quil accompagne  mais il la fournit à lenseignant :
Pascal : (
) lenseignant est un peu débordé, (
) moi jai un peu de temps et que je sais que je ferais ça en une demi-heure et que je sais que je vois très bien ce quil faut
 (
) mettre des grilles en place (
), dévaluation euh
 de lenfant sur euh
 sur ses progrès, sur lattention par exemple, sur la concentration euh
 (
) ça marrive de venir avec ma grille, de la proposer, « ça, ça te va ? » «  ah oui oui, très bien »
 (Page 17-18)
	La posture du pourvoyeur questionne de manière particulièrement frappante le thème de la pédagogie (et de la didactique) : si on considère que le « temps en négatif » de la pédagogie quest la didactique (selon lexpression de Philippe Meirieu), peut être considéré comme un avatar du modèle médical (diagnostic/pronostic, position dexpertise, objectif de « fournir » un support construit au travers de compétences techniques et scientifiques), alors quelle est, dans les pratiques développées entre AVS-i et enseignant, les parts respectivement prises par chacun, et au-delà des crispations induites par des défense de principe de territoire professionnel, sur les deux pôles de la didactique et de la pédagogie ? Il apparaît essentiel de produire des recherches spécifiques sur ces questions. 
	Seulement, la période historique où des AVS-i ont pu occuper le poste pendant plusieurs années semble clairement sachever (certains, AIS associatif puis AVS-i, lont occupé pendant plus de dix ans), et les conditions majoritaires doccupation du poste semble imposer à lanalyste de ne plus se préoccuper de ce qui napparaît plus que comme des phénomènes marginaux. Cependant, aux vues des éclairages apportés par ce présent travail, postuler quil est préférable détudier les pratiques majoritaires issues dune très faible durée doccupation du poste revient à habiter le postulat préalable que le poste dAVS-i na pas vocation à produire des nécessités de positionnement professionnel, voire à souhaiter prouver (en se donnant toutes les chances dy parvenir) que la logique qui sous tend son existence est plutôt néfaste aux objectifs inclusifs. Pour éviter cet écueil (proprement idéologique), nous ne pouvons que souhaiter que les chercheurs se tournent (rapidement) vers les quelques dizaines dAVS-i qui, sur le territoire national, sont passés au travers des mailles du filet de la limitation de durée doccupation du poste, en ayant eu la chance de pouvoir bénéficier des conventions de reprise par les associations au terme de leurs six années dassistant déducation. 
Intercesseur. Objectif : prendre part à une action, à un processus, influer sur son déroulement tout en se situant en extériorité et en position dautorité. M. P. écrit : « entre se constituer comme tiers ou bien nêtre quun relais provisoire dans le rétablissement dun circuit communicationnel, ou commercial, les dérives sont connues : immixtion, intrusion, ingérence, interposition ». 
Cécile : (...) le gamin il est dehors et (...) il veut pas rentrer, bah tu vas le voir et tu vas lui demander, quoi... bah il t'entend... une opportunité, un oiseau qui se pose sur la cour, un chien qui...  tu vois la dernière fois, j'étais là (...), et à un moment donné il y a un chien qui est passé près de lui... il passait pas du tout dans l'école, il était près du grillage quoi... bah j'en profité, j'ai dit « oh attention, là, j'aimerais bien que tu rentres parce que là il y a un chien, tu crois qu'il est gentil ou méchant ? »... tu vois, le gamin bah du coup il était resté comme ça concentré... « Oh bah euh je crois qu'il est gentil... » À aucun moment il a pensé qu'il fallait qu'il se barre parce que je venais le chercher...j'ai été m'asseoir à côté de lui, on a parlé du chien, on a abordé ses trucs, il a fini par rentrer avec moi, quoi... ça fait un quart d'heure, mais fallait saisir le bon créneau, fallait... fallait voilà... donc euh.... mais des fois t'as pas le temps... (Page 47)
	Les moments où la veille et lobservation sinterrompent peuvent, nous lavons évoqué, être consécutifs à lirruption de limpair pour lélève accompagné. Cette forme de désaffiliation (caractérisée par une forte plasticité, une évolutivité et une différenciation inter et intra individuelle) interne aux dynamiques de la classe peut, si elle est dominante, faire souffrir lélève concerné, et ainsi faire naître des comportements exprimant cette souffrance (et/ou ce ras-le-bol). Par exemple, comme ici, refuser purement et simplement de seulement tenter de redevenir pair, refuser toute tentative pour se réinscrire dans le rythme collectif. Cécile habite ici la posture dintercesseur, c'est-à-dire que, avec autorité (et avec ruse), elle « prend part à un processus » consistant en un retour dans le groupe des pairs et dans lespace et le rythme commun. Cependant, elle « prend sa part » seulement, c'est-à-dire quelle conserve une forme dextériorité. Cest le petit garçon qui décide lui-même de revenir. Une autre forme de posture dintercesseur, caractérisée par une « dérive » comme lécrit Maëla Paul, aurait pu consister en une intervention physique musclée destinée à ramener de force lélève dans la classe  et il est tout à fait certain quen labsence de ressources nécessaires pour faire autrement, cest le choix que font nombre dAVS-i dans des cas similaires. 
Interprète. A la fois séparation et jonction, limite commune entre deux éléments (ou états, lieux, etc.) « Traducteur ». « Pas viser le changement, mais la réalisation, dans lici et maintenant de la relation, dun quelque chose qui doit se passer. ». 
Sylvie : il fallait en tout cas que je lui répète les consignes
 en tout cas
 (
) ça dépend des moments, mais en tout cas la consigne en elle-même il lécoutait pas souvent, [ni] la maîtresse
 (p.16)
	La posture dinterprète concerne probablement une des postures les plus habitées par les AVS-i, puisque cest celle qui caractérise tout ce qui relève de la position située entre le système denseignement habité par lenseignant et lélève lui-même  et notamment tout  ce qui relève de la reformulation des consignes. Nous pouvons considérer comme une forme daboutissement de la professionnalité de lAVS que de savoir identifier quand cette « interprétation » est nécessaire et quand elle ne lest pas  étant bien entendu quelle peut ne pas lêtre y compris lors de moments où la position de « veille » sera retenue pour observer les potentialités de lélève et lui permettre de les tester, ainsi que ses propres limites, afin éventuellement didentifier lui-même les moments où il y a réellement un besoin. 
Passeur. Opération de médiation. Comme linterprète, « met en correspondance des mondes séparés ». M. P ajoute : « mais il y a dans cette posture lidée dun point de vue ou dune limite qui ne peut ou ne doit pas dépasser linfluence ou laction, une idée de seuil à ne pas franchir : le gué se franchit seul. Ces passeurs font à la fois fonction de témoins et dopérateurs (au sens littéral du terme) : des « ouvreurs ». Ils ne sappuient pas sur un savoir : leur aide est fondée davantage sur une aide existentielle que sur des techniques, reliée à leur propre expérience des ruptures et des passages, et sur la conscience de ce que ces épreuves ont ouvert. » (Paul 2004)
Pascal : j[ai] rencontre des profs du collège [qui est à côté de lécole primaire, NDR], donc jai pu leur parler du cas de G., donc jai réussi à obtenir quil ait pas mal denfants de [sa commune] qui soient dans sa classe pour quil soit pas trop paumé, quil soit dans une classe où on le change quasiment jamais de lieu de classe à part pour les enseignements spécialisés, les sciences et la technologie
 quil se retrouve dans une classe au rez-de-chaussée pour pas avoir à circuler partout dans létablissement
 donc là je suis assez content 
(Pages 31-32)
	Laction de Pascal, qui constitue de notre point de vue une des potentialités les plus difficiles à activer (ou dont les conditions sociales de possibilité dactivation sont, au regard de la situation actuelle du poste dAVS-i, parmi les plus rares), illustre bien la posture du passeur. « Le gué se franchit seul », Pascal naccompagnera plus G. au collège, mais ce dernier, sil fera ce passage seul, pourra sappuyer sur des éléments concrets qui proviennent directement de laction de Pascal, ce dernier sappuyant bien sur une « aide existentielle » et non pas sur des techniques ; cest son expérience (probablement pas la sienne propre, mais celle qui concerne lexpérience quil a des expériences possibles liées à lautisme de G.) qui fonde son action, et non pas un savoir dégagé dune inscription et dune origine proprement pratique. 
	Ainsi la typologie construite par Maëla Paul nous permet-elle de progresser dans lintelligibilité de la pratique des AVS-i. Il nest pas question néanmoins ici dessentialiser la pratique des AVS-i, qui dépend de toute façon du cadre de leur emploi (définition du poste, recrutement, conditions de formation, doccupation du poste, conditions de travail, etc.), déterminant très largement les conditions sociales de possibilité doccupation du poste, cette dernière étant la matrice de la différenciation importante quon peut constater dans la forme que peut revêtir les pratiques. 
	Dans une autre perspective que celle de Maëla Paul, Lise Demailly (2008, 2009) a également produit une typologie des registres daction de laccompagnement, qui constitue un outil important pour appréhender les formes qui peuvent revêtir ces pratiques. 
Les registres de laccompagnement
Le travail de Lise Demailly pourrait de notre point de vue constituer une ressource tout à fait décisive pour la construction dun travail cherchant spécifiquement à appréhender les différentes occupations possibles du poste en fonction des conditions sociales de son occupation  beaucoup plus, à notre sens, que celui de Maëla Paul. Ces deux chercheuses se rejoignent pourtant dans laffirmation selon laquelle leur typologie présente des catégories qui fondent lensemble des pratiques relevant de laccompagnement  et quainsi aucune dentre elles ne peut être considérée comme une référence unique de ces pratiques :
« La plupart des métiers du relationnel ne relèvent pas dun registre déterminé (
) mais de plusieurs, consubstantiellement. La variabilité concerne aussi les individus, ou les traverse. » (Demailly 2009)
	Une analyse spécifique portant sur les différentes formes dassociation de registres daction qui peuvent émerger de la pratique liée au poste dAVS-i selon les différentes conditions sociales de son occupation pourrait ainsi aboutir à la mise en forme dune typologie fine et élaborée permettant de construire une pensée relationnelle entre, pour paraphraser Francine Muel-Drefus, « lhistoire sociale des individus » et « lhistoire sociale du poste », et ainsi aboutir à déterminer ce que les politiques déterminant les dispositifs de recrutement, de formation et les conditions doccupation du poste induisent comme forme dominante doccupation du poste et, incidemment, comme effets dans le champ concerné.
	Prenons donc connaissance du tableau construit par Lise Demailly :
RegistresBut de laction
Statut dautrui
Priorité
1
Éducatif
Transformer lhabitus de lautre de lextérieur.Une personnalité (un groupe, une population) encore en construction, améliorable.
Mandat
2
Didactique, de linstruction
Adapter, socialiser, insérer, réadapter, resocialiser, réinsérer, former. Transmettre des savoirs et des savoir-faire, agir sur le cognitif dautrui
Autrui est capable dapprendre.
Mandat
3
Analytique
.Faire accéder à la scène de linconscient,
en réponse à une demande.Autrui (un individu, un sujet) exprime la demande quon laide à trouver létranger en soi, pour résoudre divers problèmes existentiels.
Demande
4
Thérapeutique
Réparer, remettre en état, rééquilibrer. Favoriser le retour à un état de non souffrance somatique ou psychique
Autrui (un individu, une population) est en état de défaillance de lauto équilibrage et de lauto soin.
Mandat
5
Commercial/
mercaticien
Promouvoir, visibiliser, séduire et installer de la confiance pour vendre un bien, un service, une idée, soi-même, son expertise.Autrui est solvable et peut être intéressé par le service au point de lacheter. La relation est transactionnelle.
Demande
6Assistanciel (et caritatif).Aider directement ou organiser laide,
fournir des éléments dont autrui a besoin
et quil demande. Secourir.Autrui est dans le besoin, mais il a la liberté de refuser loffre proposée.
Demande
7
Du management
Faire travailler autrui, lencadrer.
Autrui a besoin dun encadrement pour sorganiser, se mobiliser, simpliquer, avoir une vision densemble des contraintes du travail et de sa propre utilité dans les organisations productives.
Mandat
8De la persuasion (influence, suggestion, séduction, propagande)Produire des modifications dans les conduites et représentations dautrui. Créer des désirs. Créer des images. Inventer des mots qui vont tenir les imaginaires et influencer les corps.
Autrui est influençable, manipulable, suggestible.
Mandat
9
Hiérarchique/ bureaucratique
Appliquer à lindividu concerné des règlements définis par une instance supérieure, obtenir lassujettissement, lobéissance, la conformité.
Autrui est censé respecter la loi et la règle ou avoir peur des sanctions.
Mandat
10
Du conseil, du coach,
du soutien, de laccompagnement
Fournir de laide physique ou psychologique selon la demande et les objectifs de transformation exprimés par le destinataire, le conseiller, lui fournir de lexpertise, lécouter, laccompagner, le suivre.
Autrui a une demande daide quil sait formuler, même si elle évolue en cours de travail et si lautonomie dautrui saccroît.
On respecte sa demande.
Demande11
Sécuritaire, punitifExercer la violence légitime.Autrui est un assujetti à surveiller et punir.
Mandat
12
De lintervention
Influencer, persuader et en même temps suppléer (faire pour, faire à la place de, surveiller et passer à laction si nécessaire).
Autrui est quelquun à qui lon veut du bien pour son bien.
Mandat
Nous proposons ici, en guise de prolégomènes à une telle recherche, un tableau, qui ne prend son sens que dans la juxtaposition avec le tableau construit par Lise Demailly. Il est notable dajouter que la différenciation que caractérise lactivation (ou non) de tel ou tel registre dépend également, outre des conditions sociales doccupation du poste et de lhabitus de celui qui loccupe, du type de handicap de lélève. 
RegistresSituations potentiellesRegistresSituations potentielles
1
EducatifOù lAVS-i participe à lapprentissage des règles régissant les processus de socialisation
7
Du managementOù lAVS-i travaille individuellement et régulièrement avec lélève, isolé dun groupe, afin de le faire acquérir une méthode de travail
2
Didactique, de linstruction
Où lAVS-i participe à la conception ou à la mise en uvre de la pédagogie
8De la persuasion (influence, suggestion, séduction, propagande)
Où lAVS-i va utiliser la ruse et le langage pour conduire lélève à prendre lui-même des décisions souhaitées par lAVS-i (ou lenseignant, ou par le(s) mandat(s))
3
Analytique
-
9
Hiérarchique, bureaucratiqueOù lAVS-i va strictement tenter dimposer à lélève les règles telles quelles lui sont à lui-même imposées (par lenseignant) ou bien telles quil se le représente.
4
ThérapeutiqueOù lAVS-i, du fait dune éventuelle formation (ou sensibilité) à la psychologie, habite ce registre volontairement ; où lAVS lhabite de manière involontaire, secondairement.
10
Du conseil, du coach, du soutienOù lélève a acquis suffisamment de connaissance et de maîtrise de sa propre situation pour ajuster ses demandes en fonction de ses potentialités (différenciation en fonction du type de handicap et de lâge)
5
Commercial, mercaticien
-
11
Sécuritaire, punitifOù lAVS-i intervient en contraignant, éventuellement physiquement ; où il surveille au lieu de veiller.
6
Assistanciel (et caritatif)Où lAVS-i répond à une demande claire et explicitement formulée par lélève accompagné ayant trait à autre chose quau pédagogique
12
De linterventionOù lAVS-i passe le plus clair de son temps aux côtés de lélève sans prendre de recul (sans veiller ni observer), et où ses actions consistent en une mise en adéquation des résultats potentiels de la production scolaire de lélève avec ce quil ou elle se représente comme étant « normal ». Fais à la place de, corrige systématiquement, refuse lerreur, lisse. 
Mandat et demande : entre souci de lautre et instance de pouvoir
Un mandat unique ?
	Le mandat donné aux accompagnants scolaires des enfants en situation de handicap est défini dans les textes qui encadrent la fonction. De ce point de vue, il peut apparaître comme relativement clair (au contraire des moyens nécessaires pour sacquitter des missions) : contribuer à favoriser socialisation et apprentissage par le biais de quatre domaines dintervention : 
« 1- Des interventions dans la classe définies en concertation avec l'enseignant (aide pour écrire ou manipuler le matériel dont l'élève a besoin) ou en dehors des temps d'enseignement (interclasses, repas, (...).)
2- (
) Des participations aux sorties de classes occasionnelles ou régulières... (...) 
3- L'accomplissement de gestes techniques (
) Se reporter au décret n° 99-426 du 27 mai 1999 habilitant certaines catégories de personnes à effectuer des aspirations endo-trachéales et à la circulaire DGS /PS3/99/642 du 22 novembre 1999. La circulaire DGAS/DAS n° 99-320 du 4 juin 1999 précise les conditions dans lesquelles l'aide à la prise de médicaments ne relève pas de l'acte médical. 
4- Une collaboration au suivi des projets d'intégration
 (
)
Les auxiliaires de vie scolaire interviennent à titre principal pendant le temps scolaire, mais aussi dans les activités périscolaires (cantine, garderie, etc.) qui sont une condition de possibilité de la scolarité. Ils ne peuvent intervenir au domicile de lélève. » 
.
Nous lavons vu, le poste dAVS-i reste, pour des raisons sociopolitiques, à lécart des formalisations propre à la professionnalisation du lien de soutien : construire des référentiels dactivité, de compétence et de formation, une fiche de poste, un classement et une typologie des procédures à suivre suivant les situations professionnelles, etc., équivaudrait à créer une nouvelle profession spécifique, une nouvelle spécialité  ce qui nest pour le moment pas souhaité. Cest une des raisons pour lesquelles le mandat confié aux AVS-i reste vague et général, mais néanmoins très bien identifié et identifiable (et également étonnamment centré sur la déficience motrice, pourtant très minoritaire). 
Ce mandat général se trouve théoriquement traduit selon les besoins spécifiques de chaque élève accompagné par le biais du projet personnalisé de scolarisation (PPS), déclinaison scolaire du plan personnel de compensation (PPC), lui-même élaboré à partir du projet de vie de lenfant handicapé rédigé par ses parents et déposé à la MDPH. Le mandat général confié à lAVS-i se trouve ainsi doublé dun mandat théoriquement individualisé et personnalisé contenu et explicité dans le PPS, lAVS-i faisant partie des moyens listés dans le projet pour permettre un processus réussi de scolarisation. 
 
Voici donc, sommairement (mais suffisamment) définie (et formellement, nous insistons sur ce point) la notion de mandat rapporté à la situation particulière de lAVS-i. Quen est-il alors de la demande ? 
A priori, nous pourrions nous dire que la demande ne peut concerner que lenfant accompagné  quand il a les dispositions pour lexprimer (dune manière ou dune autre), et quand laccompagnant, lui aussi, se trouve en moyens de (et disposé à) la recevoir. Ce serait oublier linvariant historique (occasionnellement et heureusement annulé, mais toujours potentiellement réactivable) que constitue le statut de lenfant handicapé dans les sociétés industrielles depuis la genèse de léducation spéciale : celui dun objet, au sens psychanalytique du terme, principalement objet des concurrences professionnelles (et administratives) de ceux qui travaillent avec lui, des concurrences entre professionnels et famille et entre famille et administration. Nous lavons déjà noté, le « bien-être » et « lintérêt » de lenfant sont, parmi les acteurs professionnels, familiaux et administratifs, les arguments les mieux distribués : quelles que soient les positions prises par chacun, elles le sont toujours au nom de ces objectifs supérieurs. Seulement, étant donné quelles sont très fréquemment contradictoires, le fait quelles soient toutes justifiées de la même manière nous invite à porter notre attention ailleurs que sur ce qui est invoqué pour expliquer les prises de position. 
Cest ainsi que de la part de ces agents/acteurs que sont les parents, les enseignants ou les professionnels du médico-social et ladministration, peuvent émerger ce qui peut avoir tous les atours dune demande : prétextant de lincapacité (plus ou moins temporaire ou circonstancielle) de lélève à sexprimer clairement sur ce quil ressent, vit et souhaite, ou sur ce qui est le mieux pour lui rapporté à ce qui fonde le cadre institutionnel (scolaire) dans lequel il évolue, ces agents peuvent avancer, au nom de son bien-être et de son intérêt, des positions qui répondent surtout à leur propre bien-être et intérêt  et parfois en toute bonne foi. 
« Tous les atours dune demande », car censée être une traduction de celle, non formulée (et non formulable), de lélève accompagné. Les AVS-i, du fait de la position de leur poste dans lespace des processus de scolarisation, sont potentiellement soumis à recevoir ces fausses demandes (mais vraies traductions et récupérations de mandat) de la part des enseignants avec lesquels ils travaillent, et de la part des parents, se voyant ainsi mis en position de répondre à des mandats contradictoires (le mandat officiel du PPS  quand il existe, le mandat quotidien imposé par lenseignant  qui est plus ou moins éloigné mais toujours apparenté au mandat que lui confie linstitution scolaire  et celui mis en avant par les parents, peuvent même être différents). 
Ainsi de situations que décrit ici Lalie, et qui montrent, quand elles sont récurrentes, que lAVS-i peut servir la volonté de lenseignant de reléguer un élève indésirable dans des espaces symboliquement et spatialement clos et gérés par lAVS-i  qui peut également y trouver son compte, narcissiquement, étant donné quil ou elle a alors la responsabilité dun enfant handicapé. La situation de ce dernier est, pour le sens commun, empreinte de pathos, et sa prise en charge peut savérer socialement valorisante, mais réellement destructrice des objectifs premiers de socialisation et aux principes de léducation inclusive car reconductrice, sous une forme nouvelle, de phénomènes de ségrégation :
Lalie : (
) lenseignante de maternelle ma laissée euh
 toute seule [court rire amer]
 cétait (
) : « voilà il y a telle activité à faire avec elle, vas-y
 tu te mets à une table, toute seule avec elle, vas-y »
 bon daccord, cest parti (Page 19)
Il ne semble pas trop hardi ici daffirmer quil est possible de produire une première typologie de la position du poste dAVS-i au sein des situations de scolarisation denfants handicapés, sorte de classement premier sur lequel reposeraient tous les autres : 
tout dabord les processus de scolarisation au sein desquels il nexiste pas de conflits majeurs entre parents, enseignants et professionnels du médico-social (et AVS-i) sur la scolarisabilité de lélève ; en dautres termes les situations où le mandat confié à lAVS-i nest pas brouillé par des phénomènes de traduction visant, le plus souvent « dans lintérêt de lenfant », à le modifier. 
Les situations où le mandat est brouillé par des positions divergentes sur la question de la scolarisabilité de lélève induisant des tentatives (plus ou moins conscientes) de la part des parents et des enseignants de peser sur ou de modifier le mandat confié à lAVS-i. 
Considérer ainsi la position daccompagnement de lAVS-i avec ce que permet à lanalyse les notions de mandat et de demande nous montre que lhétéronomie qui caractérise la position de laccompagnant scolaire constitue un accélérateur de tous les phénomènes de conflit propre aux situations de scolarisation évoqués au point 2-. 
En effet, occupé par déternels débutants qui, cessant progressivement de lêtre, doivent céder leur place à des nouveaux, ni les uns ni les autres ne connaissant de conditions de possibilité pour penser leurs positionnements de manière collective au travers de la formalisation dune culture professionnelle spécifique (et étant ainsi renvoyés de manière incessante vers duniques compétences individuelles qui sont en fait des compétences sociales qui sont, si elles existent, préexistantes mais toujours insuffisantes), le poste dAVS-i, sorte de dernier rouage de la mécanique complexe des processus de scolarisation des enfants handicapés (dans le sens où lAVS contribue à mettre en uvre, et au plus près de lenfant, le contenu du PPS), se trouve lui aussi devenir un objet des visions potentiellement contradictoires et concurrentielles quentretiennent parents et enseignants vis-à-vis de la scolarisabilité dun enfant ou des formes de sa scolarisation. 
Au milieu de ces situations, la demande réelle, c'est-à-dire celle qui concerne les individus directement et en premier lieu concernés par laccompagnement (cest à dire les enfants-élèves eux-mêmes) apparaît comme négligeable, et relativement négligée. 
Cette remarque nous amène à nous interroger sur les rapports quentretiennent mandat et demande : étant donné quils sont tous les deux présents, et quils sont parfois contradictoires (dautant plus que, nous lavons vu, le mandat se décline potentiellement en des traductions qui peuvent être contradictoires), dans quelles conditions lun prend-il le dessus sur lautre ?
Priorité au mandat, priorité à la demande 
« Le mode principal de différenciation des pratiques [et des registres daction évoqués ci-dessus au point 4.2, NDR] semble leur rapport différent au mandat et à la demande ». 
la priorité au mandat concerne les registres où lon intervient pour le bien dautrui, au nom dune mission qui a été confiée à lagent par une organisation, une institution, la société ;
la priorité à la demande requiert lexistence dune demande (de labstention en cas de non-demande) ». (Demailly, 2009)
Pour la clarté de lanalyse, et relativement au cadre du présent travail, nous allons ici apporter quelques éléments complémentaires aux notions de mandat et demande rapportées à la situation du poste dAVS-i. A partir de ce que propose Lise Demailly et que nous avons reproduit ci-dessus, il apparaît que lactivité daccompagnement des AVS-i se trouve clairement donner la priorité au mandat  lexistence dune demande (dont nous rappelons quelle ne peut de notre point de vue que provenir de lélève accompagné) étant très aléatoire et relativement négligée. 
Cependant, nous posons ici lhypothèse que la priorité du mandat sur la demande, si elle peut constituer une propriété de plus du poste dAVS-i, trouve également des conditions sociales de retournement, conditions permettant une réintroduction de la demande. Ces conditions sociales sont liées à plusieurs facteurs, quune recherche spécifique gagnerait beaucoup à identifier  mais dans notre cadre, nous nous contenterons de mentionner les trois conditions suivantes :
durée importante doccupation du poste (au moins cinq ans) ;
éloignement de la culture professionnelle des enseignants (et donc de linconscient social de leur poste)  ce qui signifie ne pas être prétendant au poste denseignant ;
fréquentation (éventuellement secondaire par le biais dune socialisation avec des personnes proches layant fréquenté ou le fréquentant) de lenseignement supérieur (au sein duquel des compétences cognitives, des connaissances notionnelles et un entraînement à la réflexion et lanalyse sont potentiellement  et pas systématiquement  acquises). 
Nous allons de plus ici constituer une extension au territoire de la demande, en considérant que cette dernière peut être agie, en sus dêtre parlée  et cest probablement cette capacité à entrer dans lanalyse et linterprétation de la demande agie des enfants qui constituerait une nécessité importante pour une pratique professionnelle de laccompagnement scolaire des élèves handicapés. 
Nous allons aussi opérer une extension à la géographie du mandat : outre ce quil explicite, ce dernier comporte aussi en creux des exigences implicites, telle que par exemple la nécessité de respecter les règles globales régissant linstitution scolaire (et les missions quelle se donne)  et notamment, nous allons le voir, la question du temps et des rythmes. 
Voilà deux situations décrites ci-dessous par Cécile  qui est la seule AVS à cumuler les trois propriétés énoncées ci-dessus : une demande a émergé de la part dun élève quelle accompagne, sous la forme de comportements, et a été identifiée par elle. 
Dans la première situation, cest la demande qui sincline face au mandat (incarné par J., lenseignant) : 
Cécile : (...) [ce petit garçon] voilà son père en fait est décédé il y a deux ans, une crise cardiaque... le gamin, il a cinq ans, il est super perturbé, il entre en conflit énorme avec donc les instits hommes, en l'occurrence J. et S., et euh... et puis voilà quoi... donc bah il leur tient tête, il est violent, et puis en plus il veut commencer à castagner, à se planquer tu sais dans la cour, il veut plus rentrer en classe et il se planque pour attendre la récré pour castagner un autre, tu vois, qui... il va le choper à la sortie, enfin c'est un truc... c'est un truc vraiment de fou... et euh... bah ce gamin, ça va ... tout de suite (...) je canalise... (...) sauf que par moment, si tu veux, on est dans le couloir, machin, donc je fais, justement.... et puis hop ! J., qui vient, qui prend le gamin, tu sais ... non ! [Insiste sur le « non », montre sa colère et déception] Il m'a coupé dans quelque chose où justement le gamin lui aurait foutu la paix pour le reste de la journée, tu vois ce que je veux dire... chose qui est encore assez improbable si tu veux dans l'éducation nationale, tout ce... cette manière un petit peu de fonctionner quoi... c'est vraiment... dommage ! (Page 44)
	Dans la seconde, cest le mandat qui sincline face à la demande, au travers dune situation que nous avons déjà évoquée :
Cécile : (...) le gamin il est dehors et (...) il veut pas rentrer, bah tu vas le voir et tu vas lui demander, quoi... bah il t'entend... une opportunité, un oiseau qui se pose sur la cour, un chien qui...  tu vois la dernière fois, j'étais là (...), et à un moment donné il y a un chien qui est passé près de lui... il passait pas du tout dans l'école, il était près du grillage quoi... bah j'en profité, j'ai dit « oh attention, là, j'aimerais bien que tu rentres parce que là il y a un chien, tu crois qu'il est gentil ou méchant ? »... tu vois, le gamin bah du coup il était resté comme ça concentré... « Oh bah euh je crois qu'il est gentil... » À aucun moment il a pensé qu'il fallait qu'il se barre parce que je venais le chercher... j'ai été m'asseoir à côté de lui, on a parlé du chien, on a abordé ses trucs, il a fini par rentrer avec moi, quoi... ça fait un quart d'heure, mais fallait saisir le bon créneau, fallait... fallait voilà... donc euh.... mais des fois t'as pas le temps... (Page 47)
	Cet exemple nous permet de considérer, grâce au dialogue que nous instaurons ici entre mandat et demande, une question tout à fait centrale quant à notre sujet  et quant à lécole en général  qui est celle de la temporalité. Sans entrer plus avant dans cette analyse, il est possible néanmoins de faire mention du fait suivant : une différence importante qui peut potentiellement naître dune occupation du poste par un agent social cumulant les trois propriétés énoncées ci-dessus est la possibilité de quitter ponctuellement limposition des conditions doccupation temporelle du poste importée de (et imposée par) celui denseignant. Ce dernier est en effet soumis à des nécessités (respect et conduite du programme, naturalisation du cursus-type, notamment) qui lobligent à habiter une temporalité spécifique. 
	Ce que nous montre Cécile, dans les exemples exposés plus haut, cest quelle a été capable dhabiter une temporalité différente de celle quimpose lenseignant à sa classe, une temporalité spécifique à la pratique de laccompagnement, et bien entendu circonstancielle  son objectif étant bien de ramener les élèves dans le rythme commun. 
	Reconnaissons donc que le poste dAVS-i, sil donne de manière générale (pour des raisons historiques largement développées ici) priorité au mandat, peut, à loccasion dun certain type doccupation du poste (type dont les conditions répondent à des logiques sociales) et dans certaines situations permises par le déroulement dun quotidien scolaire, permettre à la demande de se voir donner une priorité sur le mandat. 
Cette remarque concorde avec ce quexpose Lise Demailly quand elle explique quaucun des registres quelle met en évidence ne peut être considéré comme unique source daucune pratique daccompagnement puisque, écrit-elle, dans ces dernières « quasiment tous les registres daction sont mobilisés »  ce qui signifie bien quaucune forme daccompagnement ne peut se prévaloir de donner entièrement priorité au mandat ou à la demande. Néanmoins, une réflexion politique (ou éducative  ce qui de notre point de vue revient au même) peut-elle faire léconomie de se demander comment articuler au mieux mandat et demande ? 
	Lise Demailly ajoute, à propos des registres daccompagnement qui donnent priorité à la demande, quils : 
« (
) doivent résister :
aux actuelles tentatives de rationalisations institutionnelles ou économiques, qui tendent à considérer les attentes de lexpression de la demande ou le respect strict de la demande dautrui comme un luxe, une démagogie, une perte de temps, ou un manque defficience et defficacité. 
Aux assauts de lidéologie punitive qui tend également à suspecter les demandes. (Demailly 2009) ». 
Il semble bien que le poste dAVS-i, bien que la priorité à la demande ne lui soit que circonstancielle (et déterminée par des conditions quil faudrait sattacher à mettre en lumière) ne fasse, encore une fois, pas exception à lanalyse ici proposée. 
La domination de « lintervention » ?
RegistresBut de lactionStatut dautruiPriorité
12
Registre de lintervention
Influencer, persuader et en même temps suppléer (faire pour, faire à la place de, surveiller et passer à laction si nécessaire).
Autrui est quelquun à qui lon veut du bien pour son bien.
Mandat
Où lAVS-i passe le plus clair de son temps aux côtés de lélève, au plus près, sans prendre de recul (sans veiller ni observer), et où ses actions consistent en une mise en adéquation des résultats potentiels de la production scolaire (et éventuellement du positionnement social) de lélève, avec ce quil ou elle se représente comme étant « normal » et destiné à être la norme à atteindre par lélève  dusse t-il falloir opérer une césure entre production et produit scolaire. LAVS-i fais à la place de, ou fais pour, corrige systématiquement, refuse lerreur, lisse. Correspond à une hégémonie du registre de la conduite selon Maëla Paul, ou encore de la posture dintercesseur mais complètement dévoyée au profit de tous les mécanismes d « intrusion, dingérence, dimmixtion, dinterposition ». 
 
« Le registre qui devient dominant est celui de lintervention. Pourquoi ?
le travail daccompagnement, comme tout travail, est soumis à un processus de rationalisation. Une différence avec les structures relationnelles en société traditionnelle est la possibilité théorique de brièveté et de non-réciprocité. Cela aboutit à exiger que le travail relationnel soit performant au jour le jour, efficient, efficace, mesurable, évaluable. Et le rendre évaluable implique de le normer, de le standardiser, de linstrumenter. 
Lintervention devient le registre dominant dans le travail professionnel de relation (aux dépens donc de lassistantiel et du soutien) à cause de limportance même du travail relationnel pour la bonne marche de lappareil de production. 
Le registre dominant de lintervention se caractérise par le primat quil donne au mandat sur la demande, et la place quil accorde à laction, à laction effective, de transformation, éventuellement avec une certaine contrainte, du comportement dautrui ou de son environnement. » (Demailly 2009)
	Ce que présente ici Lise Demailly rentre en écho avec lanalyse selon laquelle :
dune part, laction dévolue au poste dAVS-i reste prioritairement centrée sur le mandat  ce qui autorise à saffranchir dune durée significative daccompagnement et dune réciprocité  ;
et, dautre part, que les conditions doccupation du poste sont bien faites pour favoriser le registre de lintervention, ce dernier trouvant des conditions optimales de réalisation dans une économie générale organisée autour dune faible possibilité (voire une impossibilité) de construction (individuelle et collective) des conditions de possibilité de penser les finalités de son poste, desquelles sont déduites les positionnement et les pratiques daccompagnement promues et définies comme légitimes. 
Par ailleurs, nous souhaitons également mentionner ici la courte analyse suivante, avec laquelle nous clôturerons cette partie, avant de nous intéresser aux « qui » et « quoi » qui questionnent de manière fondamentale la notion daccompagnement  et en particulier de laccompagnement scolaire des enfants handicapés. 
« La force du registre de lintervention dans les sociétés occidentales est assurée par sa liaison culturelle, sociétale, à 2 normes puissantes : 
le devoir dagir
Il est lié à la valorisation de la responsabilité individuelle, de lautonomie, de linitiative, de laction, du résultat. Vaut pour les accompagnants accompagnés par lEtat. 
le droit/devoir dingérence 
De plus en plus inscrit dans les droits internationaux et nationaux. Légitime le fait dagir publiquement sur autrui pour son bien (indépendamment de ce que peut penser et désirer cet autrui) et valide comme normale et souhaitable la recherche de visibilité théâtrale des gestes dintervention. » (Demailly 2009)
Accompagner quoi, accompagner qui ?
Cécile : (
) [sur le ton dénumération dune liste, en utilisant les doigts de ses deux mains NDR] lAVS-i sadapte
  sadapte
 sadapte
 Sadapte
 sadapte à lenfant, sadapte à lécole, sadapte à léquipe et sadapte à lenseignant
 lAVS-i doit faire preuve dadaptation [rires]
 (Page 25)
	Cette incise, présentant un passage de lentretien que nous avons effectué avec Cécile, est bien faite pour introduire cette ultime partie, construite sur une question qui peut paraître banale et naïve mais qui, comme cest parfois le cas, ne lest pas du tout. Après nous être en effet demandé à quel mandat répondait laccompagnement dun AVS-i (en 4.3.1), après avoir interrogé la position du poste de ce dernier et de certaines occupations de ce poste par rapport aux notions de mandat et de demande (en 4.3.2) puis après avoir défini le registre de lintervention comme étant une propriété pratique du poste parmi les plus facilement activables (du fait des conditions sociales de son occupation), nous en arrivons en effet à poser les questions suivantes : 
Qui lAVS-i accompagne t-il ? 
Quels sont, en sus du seul élève, les accompagnements potentiellement permis par les propriétés du poste  en fonction de leur activation différenciée selon les conditions sociales de son occupation ? 
Accompagne t-il seulement lélève visé par la notification de la CDAPH à lorigine de sa présence ? 
Partant, à quels besoins la présence de lAVS-i répond-elle  ou peut-elle répondre ? 
	
	Ce passage de lentretien de Cécile tend à suggérer quelle nest pas, et loin de là, centrée sur lélève quelle est censée accompagner, et que pour mener à bien cet accompagnement elle doit composer avec une foule dautres agents/acteurs  et avec leur demandes, et leurs besoins, qui peuvent être contradictoires avec le mandat quon lui donne (et quelle se donne). 
Dans un environnement de travail aussi épais et complexe que celui de lécole, et relativement à ce qui fonde la légitimité de sa présence  c'est-à-dire participer à assurer le droit que constitue la fin de léducation séparée des enfants handicapés , lAVS-i peut-il seulement faire léconomie de transposer sa pratique daccompagnant vers ces autres agents/acteurs  voire se laisser lui-même accompagner ? 
Répondre aux besoins de qui ?
Who should decide the needs?
Sally Tomlinson, (1982)
Sally Tomlinson développe une analyse intéressante autour de la notion de « needs ». Cest avec raison quelle demande, à propos de la notion de special education needs, ou besoins éducatifs particuliers : « qui va décider de la nature des besoins ? ». En acceptant de raisonner avec cette notion de besoins, ce que font limmense majorité des agents/acteurs des processus de scolarisation que sont les parents, enseignants, associations historiques du champ du handicap, AVS-i, personnalités politiques, etc., la principale question qui se trouve être posée est celle de lévaluation et de la définition des besoins en question  et, in fine, aux réponses quon leur donne. 
Corollaire du fameux « intérêt de lenfant » (que tous défendent, mais pour justifier des options presque toujours différentes), la notion de « besoins » est en fait un des fondements du champ entier de léducation spéciale :
« The unproblematic acceptance of special need in education rests upon the acceptance that there are foolproof assessment processes which will correctly diagnose and define the needs of children. » 
De ce point de vue, la rhétorique du « besoin » est pour elle plus appelée à répondre aux besoins du système et des professionnels quà ceux des enfants. Il serait intéressant de chercher à construire un protocole de recherche visant à développer cette intuition, à la confirmer ou à linfirmer, ou plutôt, partant du postulat que certaines situations (socialement différenciées) répondent de ce principe, chercher à cerner dans quelles conditions économiques et sociales le processus de scolarisation inclusive dun enfant handicapé correspond plus aux besoins du système et/ou des professionnels. 
Lusage de la notion de « besoins » appelle donc ainsi une analyse en termes de mobilisation de ressources économiques ; en effet, le financement des processus dévaluation des besoins et dattribution adéquate de mesures appropriées est prédéterminé, et basé sur tout autre chose que des procédés évaluatifs en situation, actualisés et ajustés en fonction de la plasticité révélée par le temps, puisquils sont basés sur des exigences de maîtrise des dépenses publiques posées par la classe dirigeante (très homogène socialement) qui se sont historiquement construits autour de budgets programmés à lavance. Dun strict point de vue organisationnel, budgétaire, il ainsi juste daffirmer que les besoins des enfants sont, comme le dit Sally Tomlinson, prédéterminés  alors même que leurs plasticités et leur variabilité devraient linterdire :
« Most discussion of needs in special education has turned out to be discussion of provision. (...) Needs are relative, historically, socially and politically. The important point is that some groups have the power to define the needs of others, and to decide what provisions shall be made for these predetermined needs. »
	Cette question des besoins apparaît comme tout à fait centrale au regard de la relation quelle entretient avec les notions de performance, defficacité, dévaluation. En effet, si ces notions nont intrinsèquement aucune charge idéologique et si elles désignent des réalités indépassables, la position quelles ont tendance à acquérir dans les politiques publiques et dans les discours afférents est elle, au contraire, extrêmement marquée de lidéologie managériale, avatar du néolibéralisme et de la vision économiciste de la société que ce dernier consacre. De fait, la nature et la position des besoins qui déterminent la construction des dispositifs censés y répondre peuvent être lus, au-delà des affirmations rituelles et des invocations consensuelles, par le prisme de la façon dont sont évalués les performances et lefficacité de leur mise en uvre. De ce strict point de vue, et relativement au pouvoir politique, nature et position des besoins apparaissent assez clairement. 
	Sur la seule année 2009, cest plus de 100 questions écrites au gouvernement qui ont été posées par des députés ou des sénateurs sur le sujet du cadre demploi et du statut des AVS ainsi que sur leur place dans les processus de scolarisation des enfants handicapés. Invariablement, les réponses sont centrées sur des aspects quantitatifs, qui tiennent lieu dindicateurs de performance et defficacité, et nappellent ainsi aucune autre forme dévaluation ; de plus, elles sont parfois, au mot près, exactement les mêmes. Ainsi de celle-ci : 
 « La scolarisation des élèves handicapés principalement en milieu dit « ordinaire » constitue une priorité affichée du Président de la République. Sous cette impulsion et sur la base des dispositions de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, les efforts accomplis par le Gouvernement ont produit des résultats tangibles : plus de 174 000 enfants et jeunes handicapés étaient scolarisés dans les établissements scolaires lors de l'année scolaire écoulée et plus de 180 000 le sont à l'heure actuelle. »
	Au-delà de ces aspects, quen est-il des réels besoins des élèves, et notamment de la question de lautonomie ? 
	
Autonomie, dépendance, socialisation
Etymologiquement, « autonomie » (autosnomos) signifie « qui se donne à soi-même sa loi ». Le sens commun accorde à ce mot un usage très étendu, et selon la règle qui veut que toute extension importante dusage dun vocable contribue à en faire perdre le sens, a acquis une propriété magique puisque son invocation, extrêmement bien distribuée (à peu près tout le monde revendique de lautonomie, en particulier dans le champ des professions éducatives, qui linvoque, pour les publics avec lesquels elles travaillent, comme une sorte dobjectif suprême et ultime), suffit à habiller une rhétorique sans que celle-ci ait forcément à justifier de la signification quelle donne à ce terme. 
Pour éclairer lusage que nous souhaitons donner à cette notion, nous nous situons ici dans une perspective simple posant une relation dialogique entre autonomie et dépendance, et basée sur le fait que, quoiquil arrive, on est toujours dépendant des conditions de son autonomie. Partant, lopposition entre les deux se révèle vaine et enfermante, et interdit de considérer lautonomie, ainsi que peut le faire le sens commun, comme le fait de « se débrouiller tout seul », puisque si on se « débrouille tout seul » dans une situation donnée, et quon peut alors être dit « autonome », cest bien parce que certaines conditions sont réunies pour que ce soit possible, et que ces conditions nont aucun caractère de systématicité et aucune garantie de stabilité dans le temps. Cette perspective invite à distinguer des formes plus ou moins importantes, ou des degrés, de dépendance, et des degrés afférents dautonomie, étant bien entendu que les deux notions constituent les deux pôles extrêmes, jamais complètement accomplis, dun continuum qui défie toute perspective fixiste et tout jugement définitif. Nous pouvons de fait bien reconnaître quil existe des formes de dépendance plus importantes, et de fait plus pesantes, que dautres, dans la mesure où, bien que toujours présente, la dépendance peut acquérir une forme qui permette à lillusion de lautonomie totale et complète de sinstaller. Cette dernière remarque invite à inverser la proposition : bien que toujours présente, lautonomie peut acquérir une forme qui permette à lillusion de la dépendance totale et complète de sinstaller. 
	La dépendance aux conditions de notre autonomie invite à prendre connaissances des travaux de Charles Gardou sur les questions de la fragilité et de la vulnérabilité  travaux qui sont de notre point de vue riches denseignement pour étoffer la pensée sur ces sujets, qui concernent de près celui que nous traitons ici. 
« La dépendance est une relation contraignante, plus ou moins acceptée, avec un être, un objet, un groupe ou une institution, réels ou idéels, et qui relève de la satisfaction dun besoin. » (Albert Memmi (1979), La dépendance, Paris, Gallimard, cité par Alain Blanc, 2006)
	En reprenant la définition quAlbert Memmi donne de la dépendance, et en la considérant à la lumière des jalons posés au sujet de la notion de besoins, il est permis de se demander, puisquil a été dégagé quil nétait pas impossible, même si pas systématique, que la satisfaction de besoins auxquels est censé répondre lAVS-i correspond plus à ceux dautres agents/acteurs que lélève lui-même, où se situe alors la question de la dépendance. Si une autonomie nest permise que grâce à une dépendance à ses conditions de possibilités (plus ou moins invisibilisées et reconnues) est-ce pour conserver leurs « propres lois » en matière de définition du périmètre du pensable pour leur profession que les enseignants acceptent une part de dépendance à lAVS-i  et le revendiquent ainsi aussi souvent (sans pour autant se mobiliser outre mesure concernant son statut et sa formation) ? Est-ce pour accentuer limposition de leurs « propres lois » (issues de lorthodoxie économique et de lutopie quelle transporte) que les élites politico administratives se rendent (et rendent) dépendantes du maintien de dispositifs de ce personnel (et tant dautres) dans des statuts et des postes subalternes et de stricte exécution, destinés à être occupés selon une logique implacable de reproduction des cloisonnements sociaux en cloisonnements professionnels ? Concernant cette dernière question, et pour paraphraser Marx, nous pouvons dire que « le dominant est toujours dominé par sa domination ». En dautres termes, ainsi que lécrit Alain Blanc : 
« La dépendance est un aveu de faiblesse, elle situe le dépendant en position dinfériorité vis-à-vis du pourvoyeur et surtout du tiers intermédiaire, lobjet de pourvoyance, qui les lie. » (Blanc, 2006). 
	Du point de vue des pistes quouvre lensemble de ces questions, cette proposition dAlain Blanc nous paraît passablement restrictive. Pour élargir la portée heuristique de cette phrase, il conviendrait de notre point de vue de lui adjoindre la mention dun élément qui fait considérablement varier le degré de « faiblesse » et « dinfériorité » : il sagit du niveau dinvisibilité (et de conscience afférente) de la dépendance. Si même les dominants sont dépendants des conditions de leur domination, il nen reste pas moins que leur faiblesse et leur infériorité ne sont nullement comparables à celle qui caractérise une personne qui, perdant son emploi pour cause de délocalisation de la production dans un autre pays à moindre coût salarial, doit vendre sa maison, quitter son quartier, quitter ses réseaux de sociabilité, etc. 
Mais du strict point de vue des personnes déficientes, et/ou handicapées, nous pensons aussi quil y a dans cette définition quelque chose de réducteur. En effet, dans des situations de socialisation « possible », réussie et « trouvable » (en opposition aux termes, quAlain Blanc utilise à leur propos, de « socialisation impossible » et « introuvable »), il y a deux éléments qui sont susceptibles de venir potentiellement fortement atténuer ces caractères d « aveu de faiblesse » et de « position dinfériorité ». Il sagit de : 
la réciprocité ;
elle-même dépendante dune durée conséquente de relation.
En effet, et cest là tout le gain dun refus dune coupure absolue entre le « nous, non déficients » et le « eux, déficients » dont use et abuse Alain Blanc, cest dans le temps et la durée dune relation permettant des conditions de réciprocité quest permis le fait de réaliser que tous, à un moment ou à un autre, sommes susceptibles de connaître des « aveux de faiblesse » et des « positions dinfériorité » :
« Ma sur Patschi me fixa exactement de la même manière que mes frères et surs et moi lavions fixée des centaines et des centaines de fois, comme on fixe quelquun qui a un petit vélo dans la tête. Je me demandai pour la première fois si la lecture, lécriture et la connaissance des auteurs classiques comptaient vraiment parmi les choses essentielles de la vie. » (Berger, 1966)
	Il suffit de connaître une fois, une fois seulement, et dans des conditions sociales et psychologiques quil serait certes nécessaire détudier, le renversement symbolique que permet la durée de la relation (en dautres termes : une forme aiguë de réciprocité), pour que soit entamée la construction de dispositions (autant que lintérêt à les développer) aptes à permettre une forme « possible » de socialisation. Dans cet extrait, tiré dun roman autobiographique relatant lenfance de lauteur dans lAllemagne de la montée du nazisme, cest un échange avec sa sur Patschi, dont on dirait aujourdhui probablement quelle est « déficiente légère », qui fait naître chez Manni, le narrateur, ce sentiment : « je me demandai pour la première fois si la lecture, lécriture et la connaissance des auteurs classiques comptaient vraiment parmi les choses essentielles de la vie ». Manni comprend à ce moment cet « autrement capable » qui caractérise sa sur, et qui lui fait défaut. A cet instant, il est, lui aussi, et cest accentué très fortement par le caractère de (vraisemblable) rareté de lévènement, en « position dinfériorité », en plein dans un « aveu de faiblesse » face à « lobjet de pourvoyance » que constitue ce que lui apporte Patschi. Le caractère circonstanciel de cette forme de dépendance a à voir avec celui de systématicité qui peut caractériser des personnes déficientes du fait même quils sont situés sur les deux extrêmes dun continuum : la rareté ne soublie pas, elle frappe et sinscrit, et modifie les structures. Toutes proportions gardées, et toute chose égale par ailleurs, ce qui décrit ici Manni à propos de sa relation avec sa sur cest une forme de « révolution symbolique », selon lexpression de Pierre Bourdieu (1993), mais rapportée à sa situation dagent social, de frère, dindividu : un évènement surgissant dans des conditions sociales précises permet de modifier considérablement les structures. 
	
Certes Manni est déjà un initié, familial qui plus est. Mais nous postulons que les notions dautonomie, de socialisation (et dapprentissage également tant il nous semble évident que socialisation et apprentissage forment un couple indissociable) devraient être appréhendées dans la recherche à partir de ce préalable épistémologique consistant en considérer que des formes de socialisation sont possibles et permises avec les personnes déficientes, dans toutes les situations institutionnelles (dans le quotidien informel, dans les écoles, dans loccupation dun emploi, etc.) et que ce sont précisément à la fois les conditions de possibilité et dapprentissage de la position dinitié qui doivent constituer les objets prioritaires de telles recherches. Ce sont les conditions sociales des petites « révolutions symboliques » relatives à la relation aux personnes déficientes et/ou handicapées qui sont de notre point de vue prioritaires pour la recherche. 
Ecoute et violence symbolique
	Pour revenir plus précisément à notre sujet, nous lavons vu dans la partie précédente, les AVS-i nont que peu de possibilités de connaître des conditions de construction de réciprocité. Ils sont ainsi enclins à occuper de façon dominante ce que Lise Demailly désigne par la brièveté de la relation daccompagnement  et cest là une des matrices de la domination du registre de lintervention. Spécifiquement au sein de ce dernier, où elle est faible, mais également dans lensemble des autres, il semble pertinent de questionner la place de lécoute de lélève accompagné. Un échange sur ce thème avec Sylvie montre que lécoute noccupe pas une place centrale  et confirme ainsi, sil le fallait, que lintervention semble dominante chez les néo recrutés, jusquau moment où sopère potentiellement, graduellement, un basculement qui leur permet de sapproprier les logiques du poste  si ils et elles ont les propriétés et le temps doccupation qui le leur permet : 
Guillaume : et est-ce que vous avez des moments... est-ce que tu as des moments avec eux ou tu peux aborder le pourquoi de ta présence
 est-ce que tu leur a expliqué, toi, « bah voilà écoute, R.
 ou D.
 est-ce que tu peux mexpliquer
 à ton avis, pourquoi je suis là
 ? et moi je vais texpliquer pourquoi je suis là 
 comment est-ce quon peut travailler tous les deux
 » Est-ce quil y a eu une formalisation ? Une mise en parole de ta présence vis-à-vis deux ? 
Sylvie : non
 non, non
 enfin en fait, par exemple S., moi on ma dit euh
 enfin
on ma dit que les parents lui avait expliqué pourquoi je serai là
 et euh
 bah N. il était un petit peu jeune en grande section
 mais là encore, cest pas moi qui leur ai expliqué clairement euh
 enfin pour moi, en fait, jai limpression que ça été fait en amont, quoi
 et jai pas ressenti que les élèves avaient besoin quon leur redisent les choses clairement
 ouais
 (Page 31)
« Les travaux de Fassin (2004) sur les lieux découte, écrit Lise Demailly, mettent en évidence diverses formes de violence symbolique, liées à des a priori culturels et à limposition de normes de conduite et de paroles propres aux classes moyennes. » (Demailly 2009)
	Quand lécoute existe dans des situations professionnelles de personnels dont le poste est caractérisable par une posture daccompagnement, elle est potentiellement vectrice de violence symbolique, ainsi que lévoque ici Lise Demailly en faisant référence aux travaux dEric Fassin (sur des lieux qui sont spécifiquement dédiés à recevoir la parole de personnes pris dans des processus de désaffiliation). 
Que dire alors des situations où cette parole, et donc lécoute, nexistent parfois pas (ou peu), où elles ne sont même pas favorisées ? 
	Nous postulons ici que la domination du registre de lintervention (permise et favorisée par les conditions sociopolitiques guidant à la formalisation du poste telle quelle existe aujourdhui), qui est concomitante dune faible émergence des moments déchange interindividuels entre AVS-i et élève accompagné (et donc dune faible présence de lécoute du second par le premier), est un élément central des conditions démergence dune violence symbolique à lencontre des élèves accompagnés. 
Il serait tout à fait judicieux de travailler plus avant lusage de cette notion rapportée à la situation des enfants handicapés à lécole : en effet, le rapport entre habitus de classe, sil peut exister entre AVS-i et élèves accompagnés (mais lélève pouvant tout à fait bien appartenir à une classe sociale supérieure à celle de lAVS-i qui laccompagne  ce qui inverse le rapport généralement observé dans les pratiques daccompagnements, où laccompagnant se trouve le plus souvent en situation de domination sociale ou de tendance à la domination sociale), se trouve redoublé le plus souvent du rapport entre personne handicapée et non handicapée, et/ou entre personne déficiente et non déficiente, ce qui questionne non la portée heuristique et la validité de la notion de violence symbolique telle que définie par Pierre Bourdieu, mais sa géographie et son économie générale. 
	Chez les AVS-i néo recrutées interrogés (y compris chez Sylvie, précédemment citée), certains éléments montrent néanmoins quil y a clairement échanges et écoute : 
Lalie : moi je lui ai demandé ce quil voulait faire plus tard [élève de quatrième, dyslexique]
 je me suis quand même posé la question, il ma dit : « moi je veux être mécanicien »
 donc on a discuté et je lui ai dit tu sais mécanicien, cest pas parce que tu vas faire un CAP mécanique quil faut pas que tu travailles lorthographe, le français, et tout ça
 et là-dessus il a un peu réagit, il sest dit ah mince euh
 mais bon pour linstant la réaction est pas très
. Très vive quoi
 (Page 13)
Sylvie : alors R. lui en fait cétait euh
 au niveau de ses parents, en fait, il y a une histoire assez compliqué parce que sa mère ne lui a jamais parlé de son père
 son père est parti
.en fait je sais pas si elle sest remariée  mais
 elle a un ami, elle a eu un autre enfant avec
 et on sentait vraiment chez lui le manque dinformations de son père, il faisait souvent des cauchemars sur son père, tout ça
(page 25)
Sylvie : alors par contre je
 je veux juste préciser, S., quand on me la présenté au début, on ma dit que cétait un enfant qui était adopté, et euh
 quil avait un passé assez difficile, et que dernièrement il était retourné dans son pays dorigine et que suite à ça il faisait des cauchemars, il parlait souvent de mort, et tout, et puis finalement moi quand je lai vu la première fois, donc il ma expliqué quil était adopté et tout ça, mais durant toute lannée il ma jamais parlé de mort et il était très bien euh
 on avait limpression quil vivait très bien comme ça
	Sans entrer plus avant dans lanalyse de cette notion découte et de réciprocité, mentionnons néanmoins quil y a là matière à recherche  qui ne devra néanmoins pas faire léconomie de situer à la fois les conditions sociales et historiques de la position et de la nature du poste et celles qui caractérisent la position de lélève (et de son handicap). Dans ce cadre, une approche de clinique en éducation nous semble particulièrement appropriée. 
Conclusion
« Ces métiers où figurent le mot accompagnement sont dévolus aujourdhui à : 
faire fonctionner les liens nécessaires à un appareil productif
faire émerger les compétences et subjectivités « adaptées » : soutien à la flexibilité du travail et de lemploi, parcours dinsertion
maintenir la paix sociale dans les lieux où le vivre ensemble risquerait de voler en éclat
assurer les fonctions sécuritaires, par la stigmatisation des individus irrécupérables classés comme dangereux pour eux-mêmes ou pour autrui. » (Demailly 2009)
	Cette conclusion de Lise Demailly semble simposer également pour qualifier un travail daccompagnement scolaire des enfants handicapés qui, lui aussi, semble tendre à répondre aux besoins de « lappareil productif » (dominé et détenu par une classe sociale très restreinte et consciente delle-même) plutôt quà ceux des élèves et des familles  et répondre plus dune idéologie dun maintien de lordre tant scolaire que social plutôt que dune philosophie à visée émancipatrice. 
Cécile : (...) un apprentissage c'est aussi un apprentissage de la vie, c'est à dire voilà tu apprends à lire, t'apprends etcetera, t'apprends aussi à communiquer, à respecter les autres, à prendre la parole à bon escient, quand il le faut enfin... voilà, tu as aussi plein de règles et de savoir-vivre, à partir du moment où tu vis dans un groupe tu es obligé d'acquérir tout ça... donc euh oui, ça fait partie d'un tout effectivement, donc c'est euh... ouais, apprentissage, socialisation, euh... comment dire ça euh... oui c'est... c'est une manière d'être, c'est de pouvoir amener l'enfant à une manière d'être qui va être la sienne, et qui va lui permettre ensuite de pouvoir s'intégrer dans n'importe quel milieu mais que ce soit à l'école... ce que peut-être je vais pouvoir lui apporter dans une école il va peut-être pouvoir l'appliquer dans un club de sport le mercredi, tu vois ce que je veux dire (...) (Page 43)
	Les conditions sociales de possibilité pour que ce soit « lindividu qui lemporte sur le poste », comme nous semble bien le démontrer ici Cécile au travers de cet extrait dentretien, ne sont pas encore fixées, conformément à ce qui caractérise la « période dinvention » que connaît encore le poste dAVS-i. (Muel-Dreyfus, 1983). Néanmoins, il est possible (et nous le déplorons) de compter sur certaines des dispositions acquises dun grand nombre de personnels enseignants pour assurer un soutien au projet actuel du gouvernement de création dun métier dAVS-i subalterne et en position dexécutant, répondant aux exigences définies ci-dessus par Lise Demailly qui tendent à simposer aux métiers relevant de laccompagnement. 
Ces dispositions apparaissent de manière très claires dans la description ci-dessous dune scène vécue par Cécile. 
Cest le début de lannée scolaire, elle arrive dans lécole et est alors accueillie par lenseignante (enseignante A) avec laquelle elle va travailler à laccompagnement dun petit garçon, G., scolarisé en CE2. Cette enseignante ne connaît pas G., elle décide donc daller chercher, avec Cécile, celle qui lavait dans sa classe lannée précédente (enseignante B). Les deux enseignantes commencent alors à échanger entre elles, en présence de Cécile. Voici comment cette dernière nous rapporte cette discussion :
Enseignante A : « Oui, bah G. il fait ça, il fait ça 
 Oui donc lAVS-i du coup
 » (...) 
Enseignante B : « Et puis où est-ce que je vais la mettre ? » 
Cécile : Tu vois la question, « où est-ce que je vais la mettre ? »
 [Rires]
 « Je suis là, les filles
 »
 cest ha-llu-cinant ! Hallucinant, je trouve que cest vraiment
 et encore, je te dis, je suis rôdée
G : lobjet
Cécile : ouais
 complètement
 (...) vraiment, dans lEducation Nationale, cest ce que jai découvert, cest quil y avait quand même un système de 
 de, de
 de caste, tu sais, où tu as [elle fait des gestes de compartimentage] les instits
 tas les ATSEM
là
tas le personnel de service
tas lAVS-i
 tas le conseiller péda, alors ça mon pote, tarrive tes conseiller péda, tu
[mimiques de dédain et de pose caricaturalement « royales »] [rires] (...)
(Page 28)
Pour mieux encore cerner ce quimplique la position interstitielle des AVS (entre scolaire et spécial), et en plus de cette incorporation achevée des divisions sociales (et sexuelles) du travail éducatif au sein de lécole que nous laisse entrevoir cet échange en apparence anodin, il nous semble important de mentionner la permanence des : 
« (
) lignes doppositions pratiques et idéologiques qui continuent à organiser le champ institutionnel de lenfance inadapté [fondant] (
) son dynamisme et sa propension à consommer et à produire des idées neuves face, notamment, à lEN quil se représente et quil désigne comme un système « inerte » » (Muel-Dreyfus, 1980)
Nous lavons vu, les effets produits par lincorporation de logiques professionnelles historiques propres à chacune des deux traditions des éducations scolaire et spéciale qui structurent le champ éducatif français et qui se manifestent dans la mise en uvre des nouveaux paradigmes de lintégration et de linclusion scolaire, sont là pour démontrer que cette analyse était tout à fait juste au début des années 1980 et quelle le reste aujourdhui, malgré que les dynamiques aient formellement changé. 
« Toute velléité de réforme réveille les rivalités entre les différentes administrations intéressées à lenfance inadaptée », ajoutait-elle : là encore, les principes réglementairement et législativement édictés en faveur de la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire, ainsi quen faveur dune plus grande collaboration entre les deux champs (comme le décret de mars 2009 sur la collaboration entre EN et médico-social), ne suffisent pas à masquer les luttes administratives qui se déroulent autour, notamment, de la question des auxiliaires de vie scolaire. Qui, de lEducation Nationale ou des affaires sociales, via les associations, deviendra donc tutelle de cette profession émergente ? Champ scolaire ou champ du service à la personne ? Métier qualifié ou métier de simple exécution ? 
Il nest pas du ressort de la recherche de formuler des prospectives, mais de développer le champ des connaissances autour dobjets spécifiques, et, particulièrement pour les sciences de léducation, de construire des relations entre des entrées semblant a priori trop différentes pour se voir rapprochées. Notre entrée, qui est de faire de lhistoire avec les outils danalyse de la sociologie, trouve, en sus des quelques jalons posés au fil de notre développement, quelques pistes de futures recherches sous la plume dEric Plaisance (1996) :
« Sous langle sociologique, lanalyse devrait porter sur le fonctionnement des instances de décisions et dorientation, et sur le rôle des associations qui oeuvrent dans le champ du handicap. (
) En France, des associations puissantes sont à lorigine de la création détablissements spécialisés depuis les années 1960 et en sont gestionnaires ; comment se situent-elles, idéologiquement et pratiquement, par rapport à lintégration ? (
) Dautres analyses pourraient être sur les personnels impliqués ». 
Comme en écho à Eric Plaisance, Henri Jacques Stiker écrit (2000a) : 
« Nos associations sont souvent desprit corporatiste : chacune son handicap, chacune ses négociations et ses appuis, chacune sa conscience dêtre la meilleure, chacune son quant-à-soi et sa gestion secrète, et, pour les plus importantes, chacune sa façon de peser sur les orientations. (
) Elles défendent le handicap comme une spécificité quasi absolue, sans comprendre deux aspects essentiels : on ne gagne rien sans risquer, et (
) du fond de lexpérience déchirante de la dimension et de lexpérience de la discrimination compensatoire, elles ont quelque chose à dire à lensemble de la question sociale ». 
Cest ainsi que de futures recherches prolongeant notre sujet pourrait se porter sur les thèmes esquissés par Plaisance et Stiker : les associations gestionnaires et leur rapport à lintégration scolaire, les professionnels impliqués dans les processus de scolarisation  dont évidemment les accompagnants scolaires. Elles pourraient aussi se porter sur la philosophie et les soubassements de la notion dinclusion, qui se propose de dépasser celle dintégration, en dépassant les quelques esquisses danalyse ici dévoilées. A ce propos, citons encore une fois Francine Muel Dreyfus, qui écrit en 1980 : 
« réinventant eux-mêmes sans cesse lhistoire du secteur à la lumière dune exigence dinnovation toujours renouvelée, les agents qui assurent la gestion de lenfance « à problème » le considèrent non seulement comme un terrain toujours neuf mais comme le plus neuf des terrains puisquon peut toujours espérer y inventer quelque chose ». 
Il est pertinent de se demander si linvention de linclusion et celle de la fonction daccompagnant scolaire se situent uniquement dans cette brèche quouvre cette propriété essentielle du champ que constitue la capacité sans cesse renouvelée (et dont témoigne son histoire) à faire évoluer terminologies et classifications, modalités de définition du problème et modes daction. Il nous semble réducteur de vouloir les y circonscrire, dans la mesure où ces évolutions ne sont actuellement pas du tout en voie dêtre consacrées et se construisant plutôt contre les positions des agents en position de « gestion » ; mais il nous semble également quil serait une erreur de vouloir écarter le fait que le point de vue de Francine Muel-Dreyfus a une certaine pertinence, puisque linclusion scolaire tout comme la fonction daccompagnement, même si elles ne sont pas aujourdhui légitimées au-delà de linvocation et du strict registre symbolique, sinscrivent dans la généalogie très fournie des notions et pratiques qui se sont successivement données comme solution au problème : 
« La nouvelle pratique ne répond à aucune nécessité (ou demande) sociale, en dehors de celle dont la déclarent investie ceux-là même qui l'inventent. Le nouveau spécialiste ne détient son pouvoir que de son plaidoyer qui le dit irremplaçable » (Vial, 1990).
De ce point de vue, inclusion et accompagnement scolaire, objets désormais incontournables du futur des politiques éducatives, se voient constitués comme des enjeux importants pour des intérêts divergents, voire opposés. La lutte pour limposition légitime de leur définition et de leur contours trouve plusieurs terrains : celui du scientifique, celui de sa traduction et de son usage politique, et celui des réceptions (et mise en uvre) de ces deux premiers espaces par les professionnels. Ils pourraient tout aussi bien se retrouver dévoyés de leur socle initial (celui de ses promoteurs), fondamentalement caractérisé par une posture quon peut qualifier à la fois de subversive et dhumaniste  disant ceci nous nous positionnons, déjà , pour se retrouver servir des intérêts qui leur seraient contraire, à linstar du projet de Désiré Magloire Bourneville à la fin du 19ème siècle. 
Lévocation que fait Henri Jacques Stiker de la question sociale est également une piste essentielle pour de futurs recherches : en effet, comme le note dès 1978 Jeannine Verdès-Leroux : 
« Les schèmes générateurs qui organisent lancien discours sur les inadaptés (
) se retrouvent dans le nouveau sur les exclus ». 
Il est permis de faire lhypothèse que la notion de handicap na pas pu se débarrasser de cet héritage. De ce point de vue, la fonction dopposition pratique que vient remplir la notion dinclusion vis-à-vis de celle dexclusion, et dont témoigne très fortement leur origine étymologique commune, redouble de notre point de vue la nécessité de la « prendre pour objet [en tant] quopérations sociales de nomination  et [de prendre également pour objet] les rites dinstitution à travers lesquels elles saccomplissent » (Bourdieu, 1991). 
Une autre entrée possible concerne directement le point de vue de Henri Jacques Stiker quand il écrit que : 
« La politique envers les personnes handicapées nest pas que politique, elle est commandée par des représentations anthropologiques ». (Stiker, 2000a) 
De ce point de vue, le fait que les accompagnants scolaires soient les personnels parmi tous ceux qui travaillent avec les enfants qui, en même temps, passent le plus de temps auprès deux, et au plus près, et ceux qui sont le moins qualifiés et reconnus, interroge fortement le soubassement anthropologique des politiques ici évoqués (Bordeau & Bourget, 2009). La notion de liminalité, abordée dans le présent travail, semble une entrée très pertinente pour lanalyse. Dans cette perspective, il est ainsi possible de poser lhypothèse selon laquelle une proximité physique, duelle et dans la durée avec la personne handicapée hors du cadre spécial dune institution spécialisée (lieu qui aurait le pouvoir dannuler ce mécanisme) permet à létat de liminalité dacquérir des propriétés : soit de transmission (quacquiert, en ce qui concerne notre sujet, laccompagnant scolaire) soit daimantation (le sens commun  en loccurrence politique  estimant que les accompagnants doivent être dans un état proche de celui qui caractérise la liminalité, comme des personnes sans emploi). Il est même probable que ces deux mécanismes soient conjoints. 
Ainsi, penser que laccompagnement scolaire puisse être réalisé par des personnes formées à lhistoire du champ éducatif français, aux enjeux que représente la notion dinclusion et à des aspects théoriques indispensables comme la philosophie, la psychologie, la sociologie, le droit ou la pédagogie et la didactique, est tout à fait impossible. A lopposé, leur réserver des conditions contractuelles et dexercice de leur mission tel quelles sont actuellement organisées se justifie tout à fait. 
Philippe Mazereau et Maëla Paul névoquent pas autre chose lorsquils questionnent le nouveau rapport au savoir que produit le paradigme de laccompagnement : dans le champ éducatif, les accompagnants scolaires ne sont pas les seuls à cumuler proximité avec les personnes et sous qualification, et en même temps à être producteur dun savoir qui na pas de reconnaissance puisque senracinant dans de tout autres espaces que ceux, technicistes, généralisants et le plus souvent forgés selon une logique défectologique, qui dominent le champ. Cest le cas pour lensemble des métiers relatifs au care, qui constitue un champ théorique avec lequel des liens pourraient également être tissés.
 Pour Philippe Mazereau, qui adopte ici une position clairement normative, il sagit de : 
« Rompre avec le réflexe spontané des institutions médico-sociales et scolaires qui consiste à confier aux personnels les moins formés les tâches de proximité avec les personnes en difficulté. (
) Cest un des enjeux de la période à venir que douvrir ces professions à la formation et aux modalités réflexives sur la pratique afin que les savoirs issus de ces pratiques acquièrent une pertinence dans les projets des nouvelles structures ». 
	De notre point de vue, toutes ces orientations sont indissociables du fait quil est nécessaire dhabiter le postulat selon lequel toute forme de ségrégation est réductrice dhumanité  y compris et surtout quand cette dernière lui sert de caution , et que les dépassements dhéritages historiques sont possibles, à lopposé des conceptions de ceux qui sen font les gestionnaires, quil soit ici question de lenfance handicapée ou bien du champ des sciences de léducation. 
Table des matières
Introduction
	p.5
Présentation.......................................................................................................................	p.5
Le contexte de choix du sujet...............................................................................	p.5
Thématique...........................................................................................................	p.7
Problématique......................................................................................................	p.9
Méthodologie
	p.10
 Des lectures herméneutiques..................................................................	p.11
 Des entretiens avec six AVS-i................................................................	p.11
Les entretiens et la question de la réflexivité.............................	p.12
A propos du recueil de la parole des AVS.................................	p.13
2.3  La question de la réflexivité
..
.	p.15  
		2.3.1	Du vécu dune condition à son historicisation 
et du militantisme à lapprentissage de la recherche..................	p.15
		2.3.2 	La position sociale de ma déficience..........................................	p.18
2.3.3 	Le champ des sciences de l'éducation et                                            lobjet de recherche « éducation spéciale »................................	p.20
		2.3.4	Les sciences de léducation et léducation spéciale....................	p.22
		2.3.5 	Conclusion..................................................................................	p.24
2.4  Décrire les origines : lentrée sociohistorique........................................	p.25
	
2.4.1    La théorie des champs
.	p.26 
2.4.2    Le cadre historique choisi
	p.28
2.5 Les AVS-i et le cadre de leur existence : 
 de lhistoire aux notions...............................................................	
..	p.29
Chapitre 1 : Histoire et structure du champ
.
	p.29 
Chapitre 2 : Origine de linclusion scolaire
.
	p.29 
Chapitre 3 : Le poste dAVS-i
.
	p.29 
Chapitre 4 : AVS-i et accompagnement
..	p.29 
Présentation des AVS-i interrogés : texte et contexte.......................................................	p.30
3.1 Territoires et pratiques éducatives...........................................................	p.30
3.2 Milieu rural ?...........................................................................................	p.33
	3.3 Les AVS-i interrogés : situation dans lespace social des positons.........	p.36
			3.3.1 Anciens et néo-recrutés..................................................................	p.45
			3.3.2 Quelques remarques sur les 49 élèves accompagnés....................	p.54			3.3.3 Un impératif inquestionné : dire et classer le handicap................	p.54 
Les mots et notions autour du handicap............................................................................	p.55
Chapitre 1 : 	Un siècle déducation séparée. Une histoire des relations entre éducations scolaire et spéciale 1880-2005
1.1 Genèse et constitution du champ du spécial : 1880-1940..................................	p.62
1.1.1 La genèse de léducation et de lenseignement 
 spécial, 1880-1909 ....................................................................................	p.62
	
1.1.1.1 Trente ans dactivité législative fondatrice.........................	p.62 
1.1.1.2 La loi du 14 avril 1909........................................................	p.65 
1.1.1.3 Aux origines de la loi de 1909............................................	p.66 
1.1.1.4 Lenseignement spécial : une genèse non linéaire, 
une logique ségrégative.......................................................	p.68 
	1.1.2	Ecole et anormalité......................................................................................	p.71
			
			1.1.2.1 Lapplication de la loi du 14 avril 1909..............................	p.71 
		
			1.1.2.2 Un « grand sommeil » ?......................................................	p.72 
		Conclusion..................................................................................................	p.74 
1.2 Laffermissement des contours du champ : 1940-1975....................................	p.75	
1.2.1 	Les fondements unifiants de linadaptation...............................................	p.75 	
1.2.1.1 Vichy, le conseil technique et lécole.................................	p.75
1.2.1.2  Pédopsychiatres, neuropsychiatres 
  infanto juvénile..................................................................	p.78 
1.2.2 	Lâge dor de linadaptation : 1945-1975..................................................	p.79 	
1.2.2.1 Une recomposition politique après la libération
.....	p.79 
1.2.2.2  La création des grandes associations : 
  APAJH et UNAPEI...........................................................	p.80 
1.2.2.3  Institutions de léducation spéciale : 1950, 1960...............	p.84
1.2.2.4  Professions de léducation spéciale....................................	p.86 				
1.2.3 	Linadaptation et lécole : le temps de 
  		ladaptation scolaire....................................................................................	p.88 
		Conclusion..................................................................................................	p.91
1.3 Les lois du 30 juin 1975 et ladoption du handicap...........................................	p.92
1.3.1 	Origines.......................................................................................................	p.92 
			
1.3.1.1 Les indices de la volonté dencadrement 
réglementaire du champ......................................................	p.92 	
1.3.1.2  Le partenariat état / association..........................................	p.93 	
1.3.2  	Le contenu de la loi.....................................................................................	p.95 
.
1.3.2.1  Le handicap et les personnes handicapées.........................	p.95 
1.3.2.2  Raison et nature des oppositions à la loi
................	p.97 
1.3.2.3  Principes généraux.............................................................	p.97 
1.3.2.4  Les CDES, porte dentrée vers les institutions...................	p.98 
1.3.2.5  Lobligation éducative........................................................	p.99 
1.3.3 	Ecole et handicap après 1975 : 
	la dynamique formelle de lintégration scolaire.........................................	p.99 
Conclusion..........................................................................	p.102
1.4 La loi du 11 février 2005......................................................................................	p.103 
	
1.4.1 	Une loi consacrant linclusion.....................................................................	p.103 
	1.4.2 	Une définition du handicap.........................................................................	p.104 
	1.4.3 	Handicap et difficultés scolaires.................................................................	p.105 
		
	1.4.4 	Le projet consacré et reçu par
un nouvel appareillage institutionnel..........................................................	p.107 
Conclusion..........................................................................	p.111
Chapitre 2 : Les mondes des inclusions : origines, circulation, utilisation
2.1 De lintégration à linclusion : éléments historiques.........................................	p.112
2.1.1 Les inclusions................................................................................................	p.112
2.1.1.1  Etymologie
.	p.112
2.1.1.2  Linclusion sociale
.	p.113
2.1.1.3	 La conception de lorganisation sociale promue par 
  linclusion
......	p.115 
2.1.2 Origines historiques du principe de linclusion scolaire...............................	p.117
2.1.2.1  Amérique et Europe du Nord
.	p.117 
  	Le principe de normalisation
..	p.117
	De la normalisation à la VRS
.	p.119
	Lémergence du terme inclusion scolaire
	p.120
	Pour résumer
	p.122
2.1.2.2  Le rôle des associations et le modèle social 
 du handicap
	p.122
2.1.2.3  Linclusion entre discours humanistes et intérêts
 économiques
..	p.125
	Un invariant historique
	p.125 
	
	Linternationalisation des politiques économiques.	p.128 
	Une prise de position
..	p.129
	Pour conclure
..	p.131 		
2.1.2.4  Le cadre européen
.	p.132 
2.1.3 La circulation internationale de linclusion..................................................	p.133
2.1.3.1 De lobjet technique à lobjet notionnel : 
concepteur et utilisateur
..	p.134 
	Des concepteurs de linclusion ?.............................	p.134 
	Des utilisateurs
 concepteurs...
..................	p.136 
2.1.3.2 Trajectoires, circulation et controverses
.	p.137
2.1.3.3 Au terme de la circulation internationale : 
les utilisateurs de linclusion dans le cadre 
national français
..	p.140 
Conclusion.........................................................................	p.146
2.2 Linclusion dans son versant scolaire................................................................	p.147
2.2.1 Intellectuels et profession enseignante face à linclusion scolaire..............	p.147
		2.2.1.1 Le champ académique et linclusion
..	p.148 
				Linclusion et la pensée de laltérité 
				radicale : une « réponse idéologique »
	p.148 
				Linclusion et ses promoteurs : la matrice dune 
				« mutation anthropologique »
.....	p.153 
				Linclusion et la sociologie 
				conflictualiste : un processus raffiné
				deuphémisation
..	p.156 
		2.2.1.2  Les professions enseignantes et linclusion
..	p.160
				Linconscient social du métier dinstituteur et
				dinstitutrice
	p.160
				Ses conséquences relatives au mouvement
				Inclusif
.	p.162
				Et lenseignement spécialisé ?.................................	p.163
				Pour conclure : la place centrale de la formation
				(collective)
..	p.165 
2.2.2 Linclusion : proposition de définition.........................................................	p.168
		2.2.2.1  Inclusion et besoins éducatifs particuliers : 
			 un couple puissant
.	p.169 
		2.2.2.2  La question de lhétérogénéité
..	p.173
		2.2.2.3  Une lutte pour les droits
.......	p.175 
		2.2.2.4  Une occasion dhistoriciser lécole
..	p.178 
2.2.3 Les AVS-i dans le processus inclusif
..................	p.179
Conclusion........................................................................	p.183
Chapitre 3 :		Position et propriétés du poste dAVS-i
3.1 Linconscient social du poste dAVS-i
	p.184
			
3.1.1 Léducation spéciale contre léducation scolaire : 
         un contentieux historique ?...................................................................................... 	p.184	
3.1.1.1 Aux origines.................................................................................	p.184
3.1.1.2 Complémentarité pratique et 
opposition symbolique................................................................	p.186 
					
3.1.2 	De la ségrégation à lémergence de
laccompagnement scolaire..................................................................................	p.187 
					
			3.1.2.1  La succession des paradigmes....................................................	p.187 
					Ségrégation....................................................................	p.188 
					Adaptation......................................................................	p.188
					Intégration......................................................................	p.188 
					Inclusion.........................................................................	p.190
					
			3.1.2.2  Les intentions et les effets de leur 
  mise en uvre...........................................................................	p.191 
			3.1.2.3  Intégration scolaire et accompagnement....................................	p.193 
3.2 Accompagnants scolaires : une histoire institutionnelle..............................................	p.195
3.2.1 	 Lémergence de laccompagnement scolaire
des enfants handicapés..........................................................................................	p.195 
			3.2.1 1  Les premiers accompagnants : 
  en marge des associations et des lois........................................	p.195 
			3.2.1.2  Les années 80-90 et lassociatif.................................................	p.197
	3.2.2	Du local au fédératif national...............................................................................	p.199 
			3.2.2.1  Les emplois-jeunes.....................................................................	p.200 
			3.2.2.2  Les étapes dune reconnaissance consacrée
  mais fragile...............................................................................	p.201 
			3.2.2.3  Les effets de ces étapes sur la définition des 
  contours de la pratique de laccompagnement.........................	p.203 
			3.2.2.4  La question dun métier daccompagnant
......................	p.205 
	3.2.3 	La politique du flou : 2003-2009..........................................................................	p.209 
					
3.2.3.1  2003 : les AVS AED..................................................................	p.209 
3.2.3.2  2005 : les EVS- ASEH...............................................................	p.215 
					CAE, CAV
.
	p.215 
					2010 : CUI et SAAD......................................................	p.216 
						
3.2.3.3  Une analyse critique....................................................................	p.216 
	Le sens commun et le travail 
avec des enfants handicapés : 
dévouement, bonne volonté et féminité
.	p.217 
La liminalité en partage
..	p.219 
« Qualités scolaires ou qualités humaines », 
ou lhéritage dune opposition 
historiquement constituée
...	p.221 
3.3 Laccompagnement scolaire dans lespace des positions des 
	agents/acteurs intéressés par lenfance handicapée..................................................	p.222					
3.3.1 	Les propriétés du poste.........................................................................................	p.224
	3.3.1.1	 Une position relationnelle
..	p.225 
3.3.1.2   Une position réactivée ?.............................................................	p.227 
	3.3.2 	Le poste dAVS-i AED et ses principales relations : 
		éléments délucidation
..	p.230 
3.3.2.1  La famille
	p.230
Lélève accompagné
.
.	p.230 
Les parents
...
..	p.234
La géographie du handicap
...	p.240 
3.3.2.3  Du côté de lécole
...
....	p.244
		Les élèves des classes
..
..	p.246
		Les enseignants
..	p.248
		Pédagogie, didactique et conduite de classe
..	p.256 
3.3.2.4  Du côté du médico-social
...
.	p.258
3.3.2.5  Léducation populaire
.
	p.263
	Conclusion.................................................................................	p.264
Chapitre 4 : 	(Comment) Accompagner (qui ?) selon les besoins (de qui ?) ?
4.1 La vogue et la vague de laccompagnement.......................................................	p.266
4.1.1	Un lieu commun
.
	p.266 
4.1.2  	Délitement et professionnalisation du lien social
..	p.268 
4.1.3	Définir laccompagnement : une notion en tension
	p.270 
4.2 Les cordes de linstrument accompagnement....................................................	p.273
4.2.1    Les pratiques et postures de laccompagnement
.
..	p.273
4.2.2	 Les registres de laccompagnement
.
.	p.278 
4.3 Mandat et demande : 
entre souci de lautre et instance de pouvoir
..
..
.....	p.281
4.3.1 	Un mandat unique ?.
.
..	p.281
4.3.2 	Priorité au mandat, priorité à la demande
...	p.284 
4.3.3 	La domination de « lintervention » ?.........................................................	p.288
4.4 Accompagner quoi, accompagner qui ?.............................................................	p.290
4.4.1 	Répondre aux besoins
.	p.291 
4.4.2 	Autonomie, dépendance, socialisation
..
.
	p.293 
4.4.3 	 Ecoute et violence symbolique
..	p.296 
Conclusion générale.........................................................................................................	p.299
Table des matières............................................................................................................	p.306 
Bibliographie.....................................................................................................................	p.314
Bibliographie électronique
	p.322
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Bibliographie électronique
	Jai souhaité rassembler et situer les liens hypertextes au sein du plan. Ce dernier est néanmoins amputé de toutes les parties et sous parties qui ne contiennent pas de renvoi hypertexte, afin dalléger la lecture de cette bibliographie. 
Introduction
	p.5
Présentation.......................................................................................................................	p.5
1.1 Le contexte de choix du sujet...............................................................................	p.5
 HYPERLINK "http://www.unapei.org/"UNAPEI
 HYPERLINK "http://www.unaisse.free.fr/"UNAISSE
 HYPERLINK "http://www.fnaseph.org/"FNASEPH
 HYPERLINK "http://mimibaby.free.fr" http://mimibaby.free.fr
[
]
Méthodologie
	p.10
[
]
		2.3.1	Du vécu dune condition à son historicisation 
et du militantisme à lapprentissage de la recherche..................	p.15
			 HYPERLINK "http://www.sociologie-cultures.com/essais/interdit.sociologique.htm"http://www.sociologie-cultures.com/essais/interdit.sociologique.htm
		2.3.2 	La position sociale de ma déficience..........................................	p.18
 HYPERLINK "http://www.mouvements.info/Politique-de-l-engagement.html" http://www.mouvements.info/Politique-de-l-engagement.html
2.3.3 	Le champ des sciences de l'éducation et                                            lobjet de recherche « éducation spéciale »................................	p.20
 HYPERLINK "http://ruralia.revues.org/document1108.html" http://ruralia.revues.org/document1108.html  
[
]
3.2 Milieu rural ?...........................................................................................	p.33
 HYPERLINK "http://entretenir.free.fr/ouvrier/ecole.html" http://entretenir.free.fr/ouvrier/ecole.html
	3.3 Les AVS-i interrogés : situation dans lespace social des positons.........	p.36
	 HYPERLINK "http://unaisse.free.fr" http://unaisse.free.fr
			3.3.1 Anciens et néo-recrutés..................................................................	p.45
			 HYPERLINK "http://dcalin.fr/textes/exclusion/html" http://dcalin.fr/textes/exclusion/html
[
]
Chapitre 1 : 	Un siècle déducation séparée. Une histoire des relations entre éducations scolaire et spéciale 1880-2005
[
]
	1.4.2 	Une définition du handicap.........................................................................	p.104 
	 HYPERLINK "http://www.lecolepourtous.education.fr/fileadmin/pdf/INSHEA_Courteix.pdf"http://www.lecolepourtous.education.fr/fileadmin/pdf/INSHEA_Courteix.pdf
[
]
Chapitre 2 : Les mondes des inclusions : origines, circulation, utilisation
[
]
2.1.1.2  Linclusion sociale
.	p.113
			 HYPERLINK "http://www.cnle.gouv.fr/?Les-indicateurs-communs"Indicateurs de suivi communs à tous
			 HYPERLINK "http://www.cnle.gouv.fr/"http://www.cnle.gouv.fr/    
	 HYPERLINK "http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=en&catId=89&newsId=816&furtherNews=yes"http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=en&catId=89&newsId=816&furtherNews=yes 
[
]
	De la normalisation à la VRS
.	p.119
 HYPERLINK "http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914" http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914.
[
]
	Un invariant historique
	p.125 
	
	 HYPERLINK "http://www.recit.net/IMG/pdf/CT_FAIRE_UNE_POL_D_AJUSTEMENT_OCDE.pdf"http://www.recit.net/IMG/pdf/CT_FAIRE_UNE_POL_D_AJUSTEMENT_OCDE.pdf 
[
]
2.1.2.4  Le cadre européen
.	p.132 
	 HYPERLINK "http://www.inshea.fr/expertise_detail.php?id=767&id_menu=3&id_ssmenu=35&id_rubrique=1&id_ssrubrique=216"http://www.inshea.fr/expertise_detail.php?id=767&id_menu=3&id_ssmenu=35&id_rubrique=1&id_ssrubrique=216
[
]
	Des concepteurs de linclusion ?.............................	p.134 
 HYPERLINK "http://www.lesmutins.org/chomskyetcompagnie/wp-content/uploads/chomskyciedp.pdf"http://www.lesmutins.org/chomskyetcompagnie/wp-content/uploads/chomskyciedp.pdf 
[
]
				Linclusion et la pensée de laltérité 
				radicale : une « réponse idéologique »
	p.148 
				 HYPERLINK "http://eghl.blogspot.com/2009/12/alain-blanc.html" http://eghl.blogspot.com/2009/12/alain-blanc.html
				Linclusion et ses promoteurs : la matrice dune 
				« mutation anthropologique »
.....	p.153 
				 HYPERLINK "http://www.aideeleves.infini.fr/lectures/gardou2.htm" http://www.aideeleves.infini.fr/lectures/gardou2.htm
[
]
				Ses conséquences relatives au mouvement
				Inclusif
.	p.162
 HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__20__p__4328206entry4328206" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__20__p__4328206entry4328206
				Et lenseignement spécialisé ?.................................	p.163
 HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__40__p__4335345entry4335345" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__40__p__4335345entry4335345
 HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__p__4320205entry4320205" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__p__4320205entry4320205
 HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__60__p__4408090entry4408090" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__60__p__4408090entry4408090
				Pour conclure : la place centrale de la formation
				(collective)
..	p.165 
				 HYPERLINK "http://dcalin.fr/publications/lescouarch2.html" http://dcalin.fr/publications/lescouarch2.html
[
]
		2.2.2.1  Inclusion et besoins éducatifs particuliers : 
			 un couple puissant
.	p.169 
 HYPERLINK "http://www.ac-montpellier.fr/sections/enseignement-scolaire/scolarite-pour-tous/handicap/handicap/communication-e/downloadFile/file/communication_e_plaisance.pdf" http://www.ac-montpellier.fr/sections/enseignement-scolaire/scolarite-pour-tous/handicap/handicap/communication-e/downloadFile/file/communication_e_plaisance.pdf
			 HYPERLINK "http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/handicapes/6_22.htm" http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/handicapes/6_22.htm
			 HYPERLINK "http://www.senat.fr/cra/s20100512/s20100512_8.html#par_35" http://www.senat.fr/cra/s20100512/s20100512_8.html#par_35
		2.2.2.2  La question de lhétérogénéité
..	p.173
		 HYPERLINK "http://dcalin.fr/textes/exclusion.html" http://dcalin.fr/textes/exclusion.html
 HYPERLINK "http://www.inrp.fr/manifestations/2009-2010/journees-ecole-et-handicap" http://www.inrp.fr/manifestations/2009-2010/journees-ecole-et-handicap 
		2.2.2.3  Une lutte pour les droits
.......	p.175 
		 HYPERLINK "http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914" http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914.
		2.2.2.4  Une occasion dhistoriciser lécole
..	p.178 
[
]
Chapitre 3 :		Position et propriétés du poste dAVS-i
[
]
			3.2.2.2  Les étapes dune reconnaissance consacrée
  mais fragile...............................................................................	p.201 
	
 HYPERLINK "http://intescol.free.fr/ASSOCOLLECTINTEGR/IRISINITIATIVE/irispresentation.htm"http://intescol.free.fr/ASSOCOLLECTINTEGR/IRISINITIATIVE/irispresentation.htm    
[
]
« Qualités scolaires ou qualités humaines », 
ou lhéritage dune opposition 
historiquement constituée
...	p.221 
					 HYPERLINK "http://www.senat.fr/questions/base/2009/qSEQ09120738S.html" http://www.senat.fr/questions/base/2009 ... 0738S.html
[
]
Chapitre 4 : 	(Comment) Accompagner (qui ?) selon les besoins (de qui ?) ?
[
]
4.1.3	Définir laccompagnement : une notion en tension
	p.270 
 HYPERLINK "http://dcalin.fr/phpBB/viewtopic.php?p=3161#p3161" http://dcalin.fr/phpBB/viewtopic.php?p=3161#p3161 
[
]
4.3.1 	Un mandat unique ?.
.
..	p.281
 HYPERLINK "http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page107.htm" \l "intervention" 2003-092.du 11 juin 2003
 HYPERLINK "http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page133.htm" \l "intervention" 2003-093.du 11 juin 2003
 HYPERLINK "http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page798.htm" http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page798.htm
[
]
4.4.1 	Répondre aux besoins
.	p.291 
 HYPERLINK "http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-58837QE.htm" http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-58837QE.htm
[
]
4.4.3 	 Ecoute et violence symbolique
..	p.296 
 HYPERLINK "http://www.homme-moderne.org/societe/socio/bourdieu/lexique/v/violencesymbolique.html" http://www.homme-moderne.org/societe/socio/bourdieu/lexique/v/violencesymbolique.html
	 HYPERLINK "http://www.dailymotion.com/video/x884r_la-violence-symbolique_news" http://www.dailymotion.com/video/x884r_la-violence-symbolique_news
	 HYPERLINK "http://www.barbier-rd.nom.fr/violencesymbolique.html" http://www.barbier-rd.nom.fr/violencesymbolique.html
[
]
En France, comme dans lensemble des pays occidentaux industriels, sest historiquement constituée, à lorigine adossée à lécole primaire, une filière spéciale déducation destinée à toutes les espèces décoliers qui ne parviennent pas, pour diverses raisons, à se conformer à ce que linstitution scolaire réclame comme élève moyen et bien portant (Plaisance, 1996, Gardou, 2006). Cest ainsi que lécole sest constituée comme « linstitution étalon de la normalité », de ses racines républicaines jusquà aujourdhui. (Mazereau, 1998). Cette « normalité » est aussi, mais pas seulement, celle qui est nécessaire pour participer au système productif  c'est-à-dire occuper un emploi. 
	Ce travail, basé sur une approche socio-historique, cest à dire historique avec les outils de la sociologie  en loccurrence la sociologie de Pierre Bourdieu et de sa théorie des champs   sintéresse à ce que lémergence du personnel uvrant à laccompagnement scolaire des enfants handicapés (AIS, AVS, EVS-h
etc.) doit à lhistoire des relations entre éducations scolaire et spéciale, et aux différents paradigmes qui se sont succédés pour organiser leurs complémentarité pratique, qui se double dune puissante opposition symbolique (Muel-Dreyfus, 1980). 
Les dénominations de ces enfants, qui connaissent léchec à lécole  puisque cest ainsi, beaucoup plus que la mise en échec par linstitution, quont été et sont toujours majoritairement exprimées les explications des processus dorientation vers léducation ou lenseignement spécial , trouvent dans lhistoire du champ de lenfance inadaptée des formes qui ont la caractéristique dêtre très dynamiques et fluctuantes, ce qui fonde une de ses plus importantes propriétés. Ces processus de nomination évoluent en effet très vite, selon l'état des luttes entre les trois pôles qui composent les principales forces du champ : la production scientifique, le discours des professionnels et les logiques dominant l'action publique. Les créations institutionnelles et les conquêtes de marchés professionnels nouveaux sont indissociablement adossées à ces processus de dénomination. 
Dans ce  cadre, ce travail sintéresse également à la position et à la nature du poste dauxiliaire de vie scolaire, et en particulier dauxiliaire de vie scolaire individuel (AVS-i), poste dont lhistoire est concomitante à celle de lintégration scolaire des enfants handicapés  auquelle linclusion semble avoir succédé. De fait, ce poste a plus de trente ans dexistence. En prenant appui sur la parole dAVS-i, ce travail tente de rendre intelligible ce qui peut naître (ou pas) de la rencontre entre lhistoire sociale du poste, ici largement élucidée, et lhistoire sociale de lindividu qui loccupe  étant bien entendu que les propriétés sociales des AVS-i ainsi que les conditions sociales de loccupation du poste sont surdéterminées par des forces sociales  dont font partie les choix politiques de la classe politico administrative. 
Laccompagnement, qui fonde à partir des années 1990, dans lensemble des métiers de la relation, un nouveau lieu commun (Paul, 2004), se trouve, dans sa forme « scolaire », faire partie intégrante dune évolution générale des métiers de la relation consistant en une professionnalisation du lien de soutien concomitante à une dégradation et une recomposition du lien social (Demailly, 2009). Accompagner scolairement des enfants handicapés dans des processus dinclusion, voilà donc comment la langue du pouvoir (du politique, des intellectuels et du droit, notamment) semble définir le poste dAVS-i. Mais que recouvrent ces mots et ces notions ? Quels sont les mondes et les visions du monde quils et elles contiennent ? Doù viennent-ils, quimpliquent leurs usages, leur défense ou leur rejet ? Quelles sont les réalités quotidiennes des AVS-i qui (parmi dautres) travaillent dans les coulisses de ces mots de représentation  et de « présentation de soi »  de linstitution scolaire ? 
Entre le spécial et lordinaire, mais aussi entre le familial et léducation populaire, laccompagnement scolaire des élèves en situation de handicap se trouve acquérir une forme de définition légitime de sa pratique et de modalités contractuelles demploi qui trouvent leur sens uniquement par rapport à la position spécifique que les accompagnants occupent dans le champ éducatif, qui à certains égards est tout à fait inédite mais qui semble néanmoins constituer une réinvention dune très ancienne position au sein de lécole (réelle ou invoquée, et dans la généalogie de laquelle il sinscrit) : celle dun personnel non enseignant intervenant dans les classes. 
Mots-clés : auxiliaire de vie scolaire AVS, emploi de vie scolaire EVS, accompagnement, école, handicap, enfance handicapée, champ de lenfance inadaptée, éducation spéciale, intégration scolaire, inclusion, liminalité. 
( Désolé Cyril et Frédéric, ça fait une juste (petite) revanche sur la grammaire.
 CAE : contrat daccompagnement vers lemploi ; CAV : contrat davenir. Ces deux contrats sont progressivement remplacés par les CUI, contrats uniques dinsertion depuis janvier 2010. Sur ce sujet, voir infra, 3.2.3.2
 Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC. 
 La DIPH a été supprimée à la fin de lannée 2009 et remplacée le 9 février 2010 par un « comité interministériel du handicap », dont le secrétaire général est depuis cette date Thierry Dieuleveux, énarque, ancien cadre dans lindustrie pharmaceutique et ancien inspecteur de linspection générale des affaires sociales. 
  HYPERLINK "http://mimibaby.free.fr" http://mimibaby.free.fr 
 Voir infra, 3.2.
 Lensemble des Inspections Académiques a opéré ce glissement entre 2007 et 2009 : auparavant, les AVS (individuels) étaient employés sur la base de 35 heures, malgré un temps de service réduit aux temps scolaire. Sur ce point, voir Bordeau Mona, Bourget Guillaume (2009) Le personnel accompagnant scolaire, une approche socio-historique. La nouvelle revue de ladaptation et de la scolarisation, pp. 55-69. Suresnes : Editions de lINSHEA. En 2010 en Loire-Atlantique, la quotité horaire dun contrat dAVS varie entre 6 et 35 heures (une seule personne dans ce dernier cas), mais la moyenne se situe aux alentours dune quinzaine dheures par semaine. 
 Décret de 1985 : procédure différente de la validation des acquis de lexpérience. La « VA 85 » permet dobtenir une inscription dans une formation à partir dune expérience professionnelle, la où la VAE permet dobtenir tout ou partie dune certification. 
 Ou handicapés ? La question de la façon de nommer ces enfants constitue un point important du présent travail. Nous verrons notamment que les choix, plus ou moins conscients, dutiliser telle ou telle manière de les catégoriser, est un indice important de la façon de penser le handicap et la déficience, et peut dans certains cas même constituer un indice dappartenance idéologique. Pour ma part, et à lencontre de ceux qui y voient une forme systématique de négation de la déficience (comme Alain Blanc par exemple), jutilise « situation de handicap », considérant comme positive et riche dopportunité pour la pensée que de sinscrire dans une approche environnementaliste du handicap. 
 Quelle confond dailleurs avec les personnes qui loccupent. Distinguer « poste » et  « personnes qui occupent le poste » a été un moment décisif pour construire le cadre de mon travail  et permis grâce à la lecture de Francine Muel-Dreyfus. 
 Que les rares ouvrages sur les AVS occultent complètement ou presque : les « historiques » y sont réduits à un ou deux paragraphes, autant dire une place inversement proportionnelle à son importance pour comprendre le poste et les réalités actuelles de son occupation. De fait, nous navons pas référencé ces ouvrages, pour lesquels nous navons trouvé nul intérêt. 
 A partir notamment de louvrage de Jacqueline Gautherin (Une discipline pour la république. La science de léducation en France (1882-1914)), qui y explicite une partie de linconscient social de ce département universitaire, il serait intéressant de produire une recherche sur la part des recherches menées dans le champ des sciences de léducation sur les métiers non enseignants  au sein par exemple dune histoire des personnels non enseignants de lécole. 
 ATSEM, agent territorial spécialisé pour lécole maternelle. 
 Sur ce point, confère le numéro 180 de Actes de la recherche en sciences sociales : école ségrégative, école reproductive, janvier 2010. La division sociale du travail au sein des écoles constitue de notre point de vue une des matrices du caractère reproducteur de lécole, en sus de ce que pointe les articles de ce numéro. 
 Sur le terme  « élite », confère Hazan Eric (2006) LQR, la propagande du quotidien. Paris : Raisons dAgir. 
 « Education populaire », terme polysémique, désigne ici lensemble du secteur de lanimation et des centres de loisirs. 
 Qu'il soit ou ait été nommé auxiliaire d'intégration scolaire (AIS), auxiliaire de vie scolaire (AVS), individuel  (AVS-i),  ou collectif (AVS-co), emploi de vie scolaire pour l'aide à la scolarisation des élèves handicapés  (EVS-ASEH) ou encore, produit d'une confusion bien compréhensible au vue de la multiplicité des sigles et des types de contrats créant les conditions de ce quon peut appeler une politique du flou, EVS-AVS. 
 La notion dintérêt est ici entendue comme un « concept totalement différent de lintérêt transhistorique et universel de la théorie utilitariste, universalisation inconsciente de la forme dintérêt qui est engendrée et exigée par une économie capitaliste. Loin dêtre un invariant historique, lintérêt est un arbitraire historique, une construction historique qui ne peut être connu que par lanalyse historique ». (Bourdieu, 1992) Par exemple, les enseignants « ordinaires » sont devenus, avec la loi n°2005-102 du 11 février 2005 posant le droit à la scolarisation « dans lécole de son quartier » pour tout enfant handicapé, intéressés, parfois contre leur gré, à lenfance handicapée.
 Et qui reste, avec des contacts dagents ayant occupé des positions importantes dans le champ, à disposition de chercheurs éventuellement intéressés. 
 Son origine, sa genèse et son histoire institutionnelle sont ici traitées, chapitre 3. 
 Sur lhistoire institutionnelle du poste, confère 3.2.
 Il y a eu en 2009 un espoir pour de nombreux AVS-i (quils soient dailleurs sous contrat AED ou sous contrat aidés par létat) de se voir pérennisés dans leur poste : ils étaient les premiers à arriver au terme des six années. Sans rentrer dans le détail des péripéties de lété 2009 entre gouvernement et associations, il est en tout cas possible daffirmer que léchec de cette possibilité a mis un terme à lespoir de rester AVS-i pour de nombreuses personnes qui le souhaitaient. 
 Il faut relativiser ce caractère dexception, sans pour autant le contester : en effet, les AVS-i sous contrat emplois-jeunes étaient, dans certains départements (mais pas dans tous), recrutés au niveau bac, et pouvait occuper leur poste pendant cinq ans, ce qui ne les éloigne pas tant que ça des conditions demploi des AED. Pour plus de précisions, confère chapitre 3.
 Caractérisés par une durée doccupation du poste variant de quelques mois à trois ans pour les EVS, et de cinq ans pour les emplois-jeunes (EJ), aucun de ces contrats nimposant dêtre titulaire du baccalauréat pour entrer dans le poste (à lexception de certaines associations départementales employant des EJ en fonction dAVS avant 2003, année du basculement du dispositif de lassociatif vers léducation nationale).
 Si cétait possible, je serais toujours AVS-i ; seulement, la logique demploi du poste ne rencontre pas les désirs de travail de ceux qui loccupent : elle limite la durée doccupation du poste de deux à six ans selon les contrats. Par ailleurs, jexplique plus loin (introduction, 2.3.2) ce qui fait que le poste dAVS-i semble fait pour moi, ce qui fonde le fait de ne pouvoir me départir dun sentiment dappartenance.
 Confère infra, introduction, 2.3.
 Et qui peut contribuer à qualifier les entretiens effectués comme des entretiens entre deux AVS-i  étant bien entendu que ma position implique une dissymétrie : je mène lentretien et connaît lhistoire du poste. Certains extraits utilisés dans ce travail peuvent être réceptionnées sur ce principe d « échange entre deux AVS-i ».   
 Alors que cet espace lest a priori toujours pour linterviewer. Jai eu des retours parfois très enthousiastes des entretiens menés, ce qui constitue pour moi une grande satisfaction. 
 Lensemble des propriétés du poste sont analysées en 3.3.1.
 Commission de circonscription du préélémentaire, antichambre de la commission départementale déducation spéciale (CDES), créées toutes deux par la loi de 1975 dite en faveur des personnes handicapées, et supprimées par la loi de 2005. 
 Secondaire, puisque jai connu moi-même, déficient visuel à lécole, une première initiation « de lintérieur » à cette réalité. 
 Plus précisément sur cette page :  HYPERLINK "http://www.sociologie-cultures.com/essais/interdit.sociologique.htm"http://www.sociologie-cultures.com/essais/interdit.sociologique.htm
 Quil conviendrait de développer. 
 A la suite de Philippe Mazereau (1998), jutiliserais la notion de « agents/acteurs » en guise de marqueur dune position (relative à une controverse profonde dapproches théoriques différentes dans le champ de la sociologie) consistant à postuler que tout individu est à la fois un agent (en ce quil est déterminé par lhistoire incorporée  de manière différenciée   des forces sociales qui façonnent son « monde ») et un acteur (c'est-à-dire quil a toujours, de manière socialement différenciée encore, des marges daction malgré ce qui le surdétermine). 
 Et brillamment résumé dans : Jacques Bouveresse (2003) La connaissance de soi et la science, Actes de la recherche en sciences sociales 5/2003 (no 150), p. 59-64. 
 « Les conditions de possibilités du « sujet » scientifique et celles de son objet ne font quun et à tout progrès dans la connaissance des conditions sociales de production des « sujets » scientifiques correspond un progrès dans les connaissances de lobjet scientifique, et inversement ». (Bourdieu, 1992)
 Déficience visuelle importante jamais reconnue comme un « handicap », puisque ce terme, entendu du point de vue du Droit (et non du sens commun), implique légalement lendossement dun statut et louverture de droits afférents ; on peut donc être déficient sans être « handicapé », mais également être statutairement « handicapé » sans être déficient. (Confère infra, 4-Les mots et notions autour du handicap) 
 Et de connaître ainsi de manière homologue ce sentiment, commun aux agents ayant connu de manière très intense et sur la durée, pour une raison ou pour une autre, la nécessité dun autocontrôle et dune vigilance permanente par rapport à soi-même, par rapport à son corps et son langage, ses gestes et son accent, ses postures et sa syntaxe, en dautre terme ce sentiment de « déplacement » quévoque Pierre Bourdieu comme étant une des matrices des dispositions layant conduit à exercer son métier. En dautres termes, un « habitus clivé », comme le rappelle Gérard Mauger dans larticle suivant :  HYPERLINK "http://www.mouvements.info/Politique-de-l-engagement.html" http://www.mouvements.info/Politique-de-l-engagement.html « politique de lengagement sociologique ». 
 Cette dernière étant de mon point de vue le terme du sens commun qui décrit le mieux ce que Francine Muel-Dreyfus présente plus haut de manière savante
 « Après avoir été des militants de lAction catholique dans leur jeunesse et dardents défenseurs des lois dorientation jusque dans les années 1965-1967, certains syndicalistes, en particulier autour de Bernard Lambert, vont « analyser les conflits de la France rurale en termes de lutte des classes ». Les industries agroalimentaires et les coopératives contribuent, selon eux, à lexploitation et à la prolétarisation des paysans qui doivent augmenter constamment le volume de leur production afin de préserver leurs revenus ».  Extrait dun compte-rendu de louvrage suivant : Jean-Philippe MARTIN (2005), Histoire de la nouvelle gauche paysanne. Des contestations des années 60 à la confédération paysanne. Paris : La Découverte. Compte-rendu consultable ici :  HYPERLINK "http://ruralia.revues.org/document1108.html" http://ruralia.revues.org/document1108.html  
 Et encore moins dune auto dévalorisation. 
 Qui peut être rapporté à ce que Ebersold (1996) et Gateaux-Mennecier (2000) nomment une perspective « défectologique ». 
 De linfirmité au handicap, un basculement sémantique, in BARRAL Catherine, PATERSON Florence, STIKER Henri Jacques, CHAUVIERE Michel (2000). Linstitution du handicap : le rôle des associations, Rennes : Presse Universitaires de Rennes. Cet ouvrage rassemble les contributions dun colloque organisé en 1999. 
 Avec tous les risques dapplicationnisme afférents. On trouve des éléments explicatifs essentiels à lappréhension du champ des sciences de léducation dans louvrage de Jacqueline Gautherin, déjà évoqué. 
 Les idéologies anciennement dominantes sont toujours plus facile à voir et à conspuer que celles qui ont pris leur place. 
 A part en licence 3 ; mais les modules proposés, loin de correspondre à une volonté de formation de lensemble des étudiants se destinant aux métiers de léducation, sinscrivent dans un parcours de préparation au concours de lécole déducateur spécialisé : ces derniers seraient donc les seuls à être intéressés par lhistoire de léducation des anormaux, par lhistoire sociale du handicap, etc.
 Ceci est éminemment lié à lhistoire de la constitution des sciences de léducation ; Gaston Mialaret, figure parmi les figures fondatrices, à lorigine de la réactivation de la « science de léducation » de la IIIème république, et de la création du premier département des sciences de léducation à Caen en 1967, ne projetait-il pas de nommer cette formation « licence de pédagogie » ? A une époque où est déjà fortement structuré le champ de léducation spéciale, et notamment lenseignement spécialisé, il apparaît comme évident que cette pédagogie ne concernait pas les inadaptés, qui en avaient déjà à lépoque une faite spécialement pour eux. 
 Nous affirmons également la volonté de nous positionner contre cette « attention (
) qui isole le moment critique (
) et introduit une philosophie de lhistoire [qui] conduit à supposer quil y a dans lhistoire des moments privilégiés, plus historiques que les autres en quelque sorte », et à nous situer dans « lintention scientifique » qui « vise, au contraire, à replacer lévénement extraordinaire dans la série des événements ordinaires, à lintérieur duquel il sexplique ». BOURDIEU Pierre (1984) Homo academicus. Paris : Minuit. p. 210. 
 Sur la sociologie conflictualiste, confère 2.2.1.1. 
 Cette sous partie est issu de la lecture de : BOURDIEU Pierre (1997) Les usages sociaux de la science, pour une sociologie clinique du champ scientifique. Paris : Editions INRA. Cet ouvrage est la retranscription dune intervention de Pierre Bourdieu devant des scientifiques de linstitut national de la recherche agronomique organisé à lINRA en mars 1997.  
 Il est lobjet de nombreuses critiques théoriques (parfois théoricistes) dont nous nous limitons ici à mentionner lexistence, quiconque étant intéressé pouvant les trouver sans difficultés. 
 Conservation quil est facile de (parfois malhonnêtement) traduire en conservatisme : quon pense par exemple aux résistances syndicales aux projets de privatisation de services publics par exemple, et les discours des élites politico administratives sur ce sujet. « Il est des temps où la réaction est progressiste et le progrès réactionnaire », comme a écrit Kierkegaard. 
 « Et davoir ce quon appelle au rugby, mais aussi à la bourse, le sens du placement ». 
 « Système durable et transposable de schèmes de perception, dappréhension et daction ». (Verdès-Leroux, 1978).
 Nommé comme tel du fait de la situation historique des travaux fondateurs en la matière (les années 1970), où la notion en usage était alors, face à la récente émergence du terme handicap, linadaptation. Dans ce mémoire, nous utiliserons donc indistinctement les termes de champ de lenfance handicapée et champ de lenfance inadapté, ainsi que champ de léducation spéciale qui leur est synonyme. 
 Il apparaît nécessaire ici de renvoyer vers louvrage danthropologie historique de Henri Jacques Stiker (1982) Corps infirmes et société.  
 « La politique dintégration [des enfants handicapés] nest pas particulière à la France », écrit Eric Plaisance (1996). Il sagit dun mouvement international commun à lensemble de pays développés, et qui a émergé dans les années 1960 et 1970, avec des réalités « plus poussées à la fin des années 1970 » du fait de mesures législatives. En effet, lensemble des pays industriels a, sur des modalités différentes, mis en place à un moment ou un autre des filières déducation spéciale. Sur ce point, confère : 2-1 et 2-2
 « Comprendre », écrit Pierre Bourdieu, « que des champs différents, à la fois relativement autonomes et structurés (
) puissent entrer en interaction pour produire un évènement historique dans lequel sexpriment à la fois les potentialités objectivement inscrites dans les structures de chacun dentre eux et les développements relativement irréductibles qui naissent de leur conjonction » est essentiel, en particulier dans une perspective socio-historique. On tentera de garder en mémoire cette analyse quand nous aborderons le « moment critique » de la codification de la notion dinadaptation. 
 Par ailleurs, le lecteur et la lectrice trouveront dans la seconde partie (notamment 2.2.1.2) des éléments danalyse qui viennent préciser les propriétés du champ de lécole française qui entretient une interrelation forte avec celui de lenfance handicapée, surtout depuis la loi de 2005 
 Cette expression consensuelle, centrée sur lemploi, oublie (dans ce quelle prétend désigner) tout le travail effectué notamment dans le cadre de léconomie domestique (à 80% par des femmes) sans lequel ne pourrait fonctionner aucun marché. 
 Avec notamment, relativement à ce dernier exemple, le poids dorganisation supranationale comme lOCDE.
 Nicole Ramognino (2004) « Les enjeux de la culture commune à lécole : lécole comme lieu de transmission et de construction institutionnelle des savoirs », in Dutercq Y. et Derouet J.-L., Le collège en chantier, INRP, Educations, Politiques, Sociétés, pp. 242-270.
 Et éventuellement du professionnel lui-même, sil est issu de ce même territoire  ce qui pousse alors à concevoir la démarche vers la connaissance du territoire au sein duquel il travaille comme une forme dauto-analyse (ou de socioanalyse) puisquil se trouve quil a alors lui aussi incorporé, en fonction de sa position dans lespace social, certaines des logiques propres à ce territoire. 
 Nous profitons de loccasion qui se présente ici pour exprimer le fait que nous trouvons cela tout à fait regrettable : les enseignants sont en effet issus « dhabitats naturel et social » relativement homogènes et passent une partie de leur carrière à tout faire pour ne pas aller travailler dans certains autres, qui ne produisent peu ou pas denseignants. 
 Il serait intéressant de chercher si existent des études sur le rapport global « enseignant/territoire », au-delà des spécificités du territoire rural. 
 On le voit, la formulation de la loi, et la mention du terme « quartier », passe à côté des réalités géographiques du « milieu rural » et témoigne de la centration des politiques publiques et de sa traduction dans léconomie du langage du législateur sur lunique espace urbain. 
 Et certes un peu grossièrement : les réalités propres à chacune des deux parties de cette opposition binaire « ville/campagne » se déclinent bien évidemment et il est possible de noter des homologies entre, par exemple, un territoire rural prospère sous forte influence urbaine et le centre-ville dune grande commune riche, ou entre un territoire rural isolé et certains territoires des villes, marqués par une prévalence de la classe ouvrière et un faible revenu moyen. 
 Institut national de la statistique et des études économiques. 
 Sur cette nouvelle référence de « lemploi » utilisée par lINSEE pour construire des typologies de territoire, confère 2.1.2.2 Linclusion sociale. 
 Jai suivi cette formation entre 2000 et 2003 à lécole normale sociale de louest (ENSO) à Rezé (44), école privée sous contrat avec le ministère des affaires sociales. 
 Alpe & Fauguet parlent à ce propos de « lappréhension mutilante des politiques publiques » et de leur « cécité idéologique ». (p. 205)
 Confère :  HYPERLINK "http://entretenir.free.fr/ouvrier/ecole.html" http://entretenir.free.fr/ouvrier/ecole.html 
 Ouvriers et employés forment ensemble en 60% de la population active du milieu rural. 
 La société agricole est depuis plusieurs décennies en voie de mutation, du fait notamment de la baisse du nombre dagriculteurs et du phénomène de concentration des terres agricoles  qui se double dun mouvement contradictoire de parcellisation des terres possédées par les nouveaux ruraux. (Alpe et Fauguet, 2008)
 On ne trouve évidemment pas denfant de retraités. 
 On trouve dautant plus de « familles en difficulté » quon séloigne des zones dinfluence urbaine, notamment pour des raisons immobilières déjà évoquées. 
 En particulier une enquête menée dans lAin, par Poirey et Fromajoux en 1998 : POIREY J.-L., FROMAJOUX R.-C. (1998)  L'école rurale au carrefour des territoires et des réseaux. Lyon : Presses Universitaires de Lyon.
 Nous rappelons que nous reprenons les termes des personnes interrogées, tout comme pour la profession des parents.  
 La nomenclature classant les niveaux de formation de I à V date de 1967. Sur ce sujet, voir : TANGUY Lucie (2005) La fabrication des nomenclatures de niveau de formation et leur inférence sur la notion de qualification. In MEDA Dominique, VENNAT Francis (Ed.) (2005) Le travail non qualifié. Paris : La Découverte. 
 Les prénoms ont été changés.
 Les (-) et les (+) correspondent à des indicateurs de létat du projet au moment des entretiens. 
 Elles ont fréquenté la même école, et se connaissent en tant qu « amies denfance », même si elles nentretiennent pas de contact. 
 « Pluri handicapé » désigne la situation dune personne qui accumule des déficiences dordre sensorielle et/ou motrices mais sans déficience cognitive ou mentale associé (ce qui est désigné par « polyhandicapé »). 
 Une enquête menée par lassociation UNAISSE en 2007-2008 auprès denviron 600 AVS a montré une représentation féminine de 94%. Confère  HYPERLINK "http://unaisse.free.fr" http://unaisse.free.fr 
 Nous empruntons ici à Bernard Friot (2010) la distinction (salutaire !) entre emploi et travail. 
 Il serait tout à fait intéressant de tenter délucider ce point, non pour insister ou servir des théories psychologisantes, mais dans une perspective sociologique. 
 Centre nationale denseignement à distance. 
 Qui est parfois (c'est-à-dire pas toujours) bien légitime, pas question pour nous ici de dénigrer le sens commun. 
 Commune denviron 4000 habitants en 2010. 
 La copine en question savère être Lalie, ce qui est un hasard total étant donné quelles nhabitent pas dans la même commune. 
 Association des paralysés de France, créée en 1933. 
 Commission des droits et de lautonomie de la personne handicapée, rattachée à la MDPH, maison départementale des personnes handicapées, créée par la loi n°2005-102 du 11 février 2005. Voir 1.4. 
 Sur ce point, confère infra, introduction, 4. 
 Le cursus-type est un produit historique. Il se caractérise par : enseignement et progression frontale, organisation par classe dâge. Confère :  HYPERLINK "http://dcalin.fr/textes/exclusion/html" http://dcalin.fr/textes/exclusion/html 
 Part des élèves accompagnés par chaque AVS-i et présentant le handicap / trouble / la déficience visée par rapport à la totalité des élèves accompagnés par cet AVS-i.  
 Dabord en ôtant les deux accompagnements qui ont duré seulement 2 mois, puis en les comptant. 
 Par rapport à lensemble des élèves que les anciens recrutés accompagnent. 
 Par rapport à lensemble des élèves que les néos-recrutés accompagnent.
 5 sur 49. 
 Réseaux daide spécialisée aux élèves en difficultés. Confère 1.2.3. 
 Nous verrons plus loin que malgré la position subalterne dexécutant, cette hétéronomie nest pas forcément la règle. Confère 3.3.2.3.
 MAZEREAU Philippe (1998) LEcole dans le champ français de léducation spéciale : 1909-1989. Les conflits de désignation psychiatrique, pédagogique et psychologique de linsuffisance mentale de lenfant. Thèse de doctorat en sociologie, Montpellier 3. p.45. 
 Cité par Philippe MAZEREAU, op.cit, p.48 
 BOURDIEU Pierre (1992) Réponses. Paris : Seuil. p.67. 
 Outre Philippe Mazereau déjà cité, voir notamment Jacqueline GATEAUX-MENNECIER (1990) La débilité légère, une construction idéologique. Paris : éditions du CNRS, et (2000) Les sciences humaines et la segmentation de lenfance inadaptée. In PLAISANCE Eric, CHAUVIERE Michel (éd.) Lécole face aux handicaps : éducation spéciale ou éducation intégrative ? (pp.31-52) Paris : Presses universitaires de France. 
 BOURDIEU Pierre (1977) Classement, déclassement, reclassement. In Actes de la recherche en sciences sociales. Vol.24, n°24, pp.2-22. Cet article relevant de la sociologie du travail est basé sur une analyse des évolutions que connaît  le marché du travail à la suite de la secondarisation de lenseignement et de louverture de lUniversité à des publics qui ny avaient jusque là pas accès,  des modifications des rapports entre titre et poste que ces évolutions font naître, et des stratégies socialement différenciées qui en découlent. 
 Organisation mondiale de la santé, Classification internationale du handicap, 1980. Cette nouvelle nomenclature consacre tout à la fois les travaux de Wood, que lOMS reprend directement, et lentré en scène de nouveaux « agents/acteurs » internationaux, comme dit Mazereau, dans le champ français  mais aussi étrangers, de léducation spéciale. (Lorganisation de coopération et de développement économique, OCDE, lance en 1978 un projet titré « Léducation de ladolescent handicapé ».)
 Direction générale de lenseignement scolaire.
 Voir notamment : OCDE (1994) Lintégration des enfants et adolescents handicapés : ambition, théorie et pratique. Egalement : OCDE (2008) Elèves présentant des déficiences, des difficultés et des désavantages sociaux : politiques et indicateurs. Surtout, confère : Plaisance Eric (1994) Comparer et produire des indicateurs internationaux. In Poizat Denis (Ed.) (2004) Education et handicap : dune pensée territoire à une pensée monde. Ramonville Saint-Agne, Erès. Pp. 163-174. 
 Il est utile de mentionner ici limportance de la notion de special education needs (« besoins éducatifs particuliers » ou « besoins éducatifs spécifiques » en français), qui subsume tout ce que recouvre les catégories A, B et C de lOCDE. Sur cette notion, confère 2.2.2.1.
 Confère CHAUVIERE Michel (1980) Enfance inadaptée : lhéritage de Vichy. Paris : les éditions ouvrières. On peut trouver, p.99 de cet ouvrage, un tableau construit par Michel Chauvière titré « Evolution sociale des désignations des enfants inassimilables », qui reprend les désignations en cours des années 1930 jusquà la période de codification de la notion dinadaptation. 
 Qui pose la question de ses effets et de son origine, notamment au travers des parts du descriptif et du prescriptif, dit autrement, du caractère normatif quimplique le choix de qualifier une activité. Sur ce point, confère les préoccupations analogues de Dominique Glasman (2001) Laccompagnement scolaire, sociologie dune marge de lécole. Paris, PUF, notamment page 56. (Laccompagnement scolaire dont il est question dans louvrage de Dominique Glasman nest pas celui des enfants handicapés). 
 Le docteur Jacquin exprime ici un point de vue social quon peut encore retrouver, sous des formes euphémisées, dans de multiples autres points de vue contemporains, produits de positions homologues à celle que cette personne occupait à son époque. Plusieurs éléments, tout le long du présent travail, viendront étayer cette assertion. 
 DONZELOT Jacques (1984) Linvention du social, essai sur le déclin des passions politiques. Paris : Fayard. 
 Schématiquement : lécart entre les conditions socio-économiques dexistence dune majorité de la population et les exigences induites par lexercice de la citoyenneté. 
 De manière plus générale, on peut aussi citer : 1898, loi sur les accidents du travail ; 1905, loi sur lassistance à la vieillesse, aux infirmes et incurables. Cest également dans cette période que se déroulent des congrès décisifs pour les déficients sensoriels : congrès des aveugles en 1878, et congrès de Milan en 1880, ce dernier mettant fin pour plus dun siècle à lenseignement de la langue des signes pour les sourds et sourds-muets, en imposant loralisme. 
 Nous avons déjà rapidement évoqué ce point, et il sera abordé encore tout au long de notre travail. Néanmoins, pour reprendre les catégories construites par lOCDE en 1994, il nous semble essentiel de préciser que la surreprésentation des catégories populaires dans lenfance handicapés concerne les catégories B et surtout C : la catégorie A (déficience) nest marquée par aucune prévalence sociale. 
 FAURE Olivier (2000), Dire et gérer lanormalité. In BARRAL C., PATERSON F., STIKER H-J, CHAUVIERE M., (éd.) (2000) Linstitution du handicap : le rôle des associations, XIXème, XXème siècle. (pp. 65-68) Rennes ; Presses universitaires de Rennes.   
 Avec louvrage fondateur de B.A. Morel : « Traité des dégénérescences physiques, intellectuelles et morales de lespèce humaine » en 1857. 
 Qui implique que « la grande industrie a besoin dune main-duvre assidue, capable de se plier au rythme des postes, attentive à respecter les consignes strictes de sa production » (FAURE, op.cit.)
 Plusieurs médecins proposent au cours de cette période la stérilisation des anormaux ou même leur élimination physique. Confère COFFIN Jean-Christophe (2001) Linaptitude à la vie : un thème psychiatrique fin de siècle. In BARRAL C, PATERSON F., STIKER H-J, CHAUVIERE M. (Ed.) (2001) Linstitution du handicap, le rôle des associations. Rennes : presses universitaires de Rennes. 
 Il faut ici citer H-J Stiker et son analyse de la notion de handicap : (2000) De linfirmité au handicap, un basculement sémantique. In BARRAL C., PATERSON F., STIKER H-J, CHAUVIERE M., (éd.) (2000) op.cit. (pp. 31-38).   
 Henri Jacques Stiker ajoute à cet égard le fait suivant : en 1924, loffice national des mutilés et réformés est ouvert aux mutilés du travail. 
 Il faudrait également, par exemple, aborder les analyses qui sintéressent aux homologies des structures de pensée traduites par des transpositions souvent brutales des découvertes scientifiques autour de létude du corps humain à la réflexion sur le corps social ; tradition ancienne qui a eu, ainsi que le mentionne O. Faure, un impact décisif dans les « pratiques classificatoires de la médecine » qui ont en quelque sorte inauguré la structuration du champ de léducation spéciale.
 Mentionnons notamment les Institutions pour jeunes sourds et pour jeunes aveugles, nées respectivement des travaux de lAbbé de lépée (1712-1789) et de Valentin Haüy (1745-1822) - dont Louis Braille était lélève. (Sur ce point, voir WEYGAND Zina (1990) Les débuts de léducation des infirmes sensoriels. In Handicaps et inadaptations. Les cahiers du CTNERHI n°50, pp. 5-25. Mentionnons aussi les colonies pénitentiaires et/ou agricoles et autres sociétés de patronages de jeunes détenus quaborde Francine Muel dans un article tout à fait essentiel de notre point de vue : MUEL Francine (1980) Linitiative privée, « terreau » de léducation spécialisée. Actes de la recherche en sciences sociales, volume 32, n°1, pp.15-49. 
 MUEL Francine, linitiative privée, op.cit
 Mot quon ne trouve guère, à lépoque, expliqué sous dautre forme que des lapalissades de ce type, y compris dans les travaux à vocation scientifique : « Sous cette appellation générique danormaux, on réunit tous les écoliers qui, soit au point de vue physique, soit au point de vue intellectuel ou moral, ne se trouvent pas dans des conditions normales pour recevoir lenseignement commun ». C. Baguer, 1898, cité par VIAL Monique (1990), Les enfants anormaux à lécole. Paris : Armand Colin. 
 Sur le sujet de limplication de Binet et Simon dans la loi de 1909, voir notamment GATEAUX-MENNECIER Jacqueline (1999) Les sciences humaines et la segmentation de lenfance inadaptée, op.cit, ainsi que VIAL Monique (1990) Les enfants anormaux à lécole. Op.cit.
 Confère sur ce point BELANGER Nathalie (1997) La psychologie à lécole de lenfance inadaptée. Le cas de la psychologie scolaire en France après la deuxième guerre mondiale. Thèse de doctorat en sciences de léducation. Université de Paris 5-Descartes. Nathalie Bélanger développe la nature des « liens exceptionnels » qui unissent léduction spéciale et la psychologie, notamment scolaire. 
 Qui renvoie de manière très forte à ceci : « On a quelques chances de comprendre les enjeux scientifiques du passé que si lon a conscience que le passé de la science est un enjeu de lutte scientifique présentes ». BOURDIEU Pierre (1988) Question de sociologie. Paris : Minuit. Cité par MAZEREAU Philippe, op. cit.
 Le CRESAS (Centre de recherche sur lenseignement spécial et ladaptation scolaire), est créé en 1969, par Mina Stambak, élève dHenri Wallon. Monique Vial fut sa première collaboratrice. En 1990, elle évoque les travaux du CRESAS au début des années 1970 comme une critique dune « école sélective, destinée avant tout à perpétuer une société fondée sur des rapports de domination sociale et économique ». Ces travaux prenaient comme objet les pratiques professionnelles et les médiations pédagogiques dans le domaine de lenseignement spécial (refusant dattribuer les échecs scolaires aux causes psychologiques ou médicales, et aux causes familiales), mais, avant le travail de Francine Muel, ne se penchent pas sur les logiques socio-historiques qui sous-tendaient ces pratiques. 
 « Il apparaît », complète F. Muel, « que lorsque légalité devant lécole, c'est-à-dire devant linstruction, qui se donne pour la vérité de lécole, est confrontée dans la pratique institutionnelle à la réalité socio-économique de la misère la plus grande  celle qui se voit dans les corps et sentend dans la pauvreté du langage , elle ne peut demeurer vérité quà  la condition de classer selon la logique dun autre système (médico-psychologique) ceux quelle ne peut tolérer. » p. 69b de : MUEL Francine (1975) Lécole obligatoire et linvention de lenfance anormale. Actes de la recherche en sciences sociales, n°1, vol.1. (pp.60-74)
 Ibid. p.68b. 
 VIAL Monique (1990) Les enfants anormaux à lécole : à lorigine de léducation spécialisée, 1882-1909. Paris : Colin. Dès 1979, Vial remet pourtant en cause lanalyse inaugurale de Francine Muel. Confère VIAL Monique (1979) Les débuts de lenseignement spécial en France : les revendications qui ont conduit à la loi du 15 avril 1909 créant des classes et écoles de perfectionnement. CRESAS, n°18, Paris, INRP. Mais cest son ouvrage de 1990 qui est le plus référencé.   
 Notamment VIAL Monique (1990), les enfants anormaux à lécole, op.cit ; également GATEAUX-MENNECIER (1989) Bourneville et lenfance aliénée. Paris : Centurion. 
 De ce point de vue, on note, à la lecture des différents travaux, surtout depuis les années 1990, un certain consensus pour célébrer la fin heureuse de ce qui est nommé les « grands récits », selon lexpression de Lyotard (1975). Au sein de ce consensus, il semble que soit rattachée à ces « grands récits » linterprétation selon laquelle la série législative des années 1880-1914 participe de la mise en place dun contrôle social. Michel Chauvière et Dominique Fablet (2001) citent ainsi Jacqueline Roca comme une évidence : « la loi de 1909 est considérée comme une loi de progrès », sans plus de développement. Des inspecteurs de lEducation Nationale écrivent également dans un rapport de 2002 titré « Analyse de lorganisation et du fonctionnement des EREA », témoignant de lhistoire officielle de leur institution : « La loi de 1909 est une loi de progrès, elle est la suite logique des lois de Jules Ferry ». (page 6). 
 En renvoyant néanmoins vers lexcellent travail de Jacqueline GATEAUX-MENNECIER (1990) La logique socio-historique de lenseignement spécial. Handicaps et Inadaptation, les cahiers du CTNERHI, n°50. pp.57-70. Nous reproduisons en annexe le schéma (« Genèse de la création dun enseignement spécial ») qui conclut cet article. ANNEXE 2. Voir également GATEAUX-MENNECIER (1999) Les sciences humaines et la segmentation de lenfance inadaptée. Op. cit., ainsi que la critique-bilan des recherches socio-historique françaises ici évoquées  faite par Philippe MAZEREAU (1998) Lécole dans le champ français de léducation spéciale. Op. cit. particulièrement pp. 36-41. 
 Ainsi que, par la suite, de ceux de Pinell et Zafiropoulos, principalement. 
 Pourtant, ces travaux (Muel-Dreyfus, et Pinell  & Zafiropoulos) ne sont cités, le plus souvent, que pour se positionner contre leur position internaliste sur le point précis des origines de la loi de 1909, alors que les apports les plus évidents de leurs recherches, sils sont désormais repris dans une grande majorité des publications, ne sont pourtant que rarement référencés. Tout se passe comme si certains aspects de leur travaux, contestés, empêchaient la reconnaissance du reste. 
 Promoteur du solidarisme mais également président de la commission sur les classes spéciales créée en 1904 pour préparer la loi de 1909. 
 Plusieurs projets de loi sont déposés pour rendre obligatoire la création de classes et décoles de perfectionnement dans lentre deux guerres, mais ne sont jamais votés. 
 La grande majorité de notre bibliographie est constituée darticles ou de chapitres douvrage collectif. 
 La justice, qui a vu les effets attendus de la loi de 1912 fortement repoussés par la guerre, voit se développer les tribunaux et les juges pour enfants, et « la poursuite de la politique de contrôle des mineurs » via la « constitution en réseaux régionaux de léquipement institutionnel ». Ce dernier est composé en majorité duvres privées dont les intérêts rencontrent dans lentre deux guerres ceux des psychiatres naissants, aboutissant à une alliance de fait qui inaugure le poids de la psychiatrie dans le traitement social de lenfance difficile. (Muel, 1980) Francine Muel écrit en 1975 : « laspect le plus spectaculaire de ces affinités institutionnelles est la création en 1925 de la clinique de neuropsychiatrie infanto juvénile sous la double égide du Patronage de lenfance et de ladolescence et de la faculté de médecine de Paris ». Sur ce sujet confère, outre MUEL (1980), op. cit., pp.39b-43a,  RENOUART Jean-Marie (1990) De L'enfant coupable à l'enfant inadapté. Le traitement social et politique de la déviance. Paris : Le Centurion.
 Sur ce point, Chauvière cite BECQUEMIN-GIRAULT Michèle (1998) Protection de lenfance et dynamique préventive. Origine, naissance et développement du service social de lenfance en danger moral dans le département de la Seine, 19ème, 20ème siècles. DEA de sociologie, EHESS. 
 Michel Chauvière renvoi sur ce sujet au travail de Jean-Marie RENOUART (1990) op.cit. 
 La définition suivante est proposée dans la « nomenclature et classifications des jeunes inadaptés », 1944. (dont le préambule est reproduit en annexe : ANNEXE 3) : « Est inadapté, un enfant, un adolescent, ou plus généralement un jeune de moins de vingt et un an que linsuffisance de ses aptitudes ou les défauts de son caractère mettent en conflit prolongé avec la réalité ou les exigences de lentourage conformes à lâge et au milieu social du jeune. Linadaptation se qualifie selon la situation dont elle est corrélative. Exemples : inadaptation familiale, inadaptation scolaire, inadaptation professionnelle. » Cette définition met laccent sur les caractéristiques intrinsèques du sujet. A son propos, on peut dire quelle relève dune conception défectologique. 
 Les ARSEA sont transformés en centres régionaux pour lenfance et ladolescence inadaptée, CREAI, en 1964. 
 Il en existe quatre avant 1945.
 « Côté santé, le financement des équipements sera progressivement relayé par lassurance maladie de la sécurité sociale après 1946. » (Chauvière, 1999). 
 Il est utile ici de mentionner une divergence quant à la validité de laffirmation de Michel Chauvière selon laquelle « la politique publique de lenfance inadaptée ne commence en France quen 1943 ». Jacqueline ROCA conteste cette version. ROCA Jacqueline (2001) Les relations ARSEA-UNAR avec lEtat. In BARRAL C, PATERSON F, op.cit. p197-206. Elle montre notamment que, durant les années 1930, nombre de documents écrits (rapports, projets, thèses de droit, etc.) préconisent des organisations de prise en charge des enfants déficients qui ont toutes en commun dassocier Etat et initiatives privées au sein de dispositifs ressemblant de fait beaucoup aux résultats des travaux du conseil technique de 1943.
 Les médecins sont au nombre de 10 sur 22 membres (Muel-Dreyfus, 1983). 
 Cest une des raisons pour lesquelles « le secteur naissant [de linadaptation] se fera tout à la fois accueillant aux milieux cléricaux (
) et à certains courants progressistes et laïques comme les scouts éclaireurs et les CEMEA ». (Chauvière, 1999). 
 Sur ce glissement de référence de linadaptation à lexclusion pour lensemble du secteur du travail social, confère VERDES-LEROUX Jeannine (1978) Le travail social. Paris : Minuit, pp. 242-254. Voir également BOLTANSKY Luc et CHIAPELLO Eve (1999) Le nouvel esprit du capitalisme. Paris :Gallimard, p. 426. 
 Refus traduit par lémergence de « nouvelles technologies médicales » guidées par la prévention, le dépistage, la rééducation. 
 LUNAR, union nationale des ARSEA, créée en 1948, est également présidée pendant 16 ans, de 1948 à 1964 par le professeur Lafon, pédopsychiatre. Au sujet du professeur Lafon, confère notamment TRICARD Jean-Paul (1981) Initiative privée et étatisation parallèle, le secteur dit de lenfance inadaptée. Revue française de sociologie, vol.22, n°4, pp. 575-607. Voir en particulier pp. 586-587. 
 Sur lévolution du métier denseignant spécialisé, confère 1.2.2.3. 
 Institut national détudes démographiques. 
 Patrice PINELL et Marcos ZAFIROPOULOS fournissent en 1978 une analyse de lémergence des psychanalystes dans le champ de lenfance inadaptée, contre les pédopsychiatres en position nettement dominante. In La médicalisation de léchec scolaire, op.cit., pp 39a-48b. 
 Qui créent la direction de léducation surveillée, qui deviendra la protection judiciaire de la jeunesse en 1990. 
 Jean-Paul Tricard note à travers cette opposition psychologie/pédopsychiatrie le « clivage retrouvé entre pédopsychiatrie et psychopédagogie » qui animait déjà les origines du champ, autour de la loi de 1909. 
 DATAR : délégation à laménagement du territoire et de laction régionale, créée en février 1963. Elle est remplacée, par un décret du 31 décembre 2005, par la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires ou DIACT.
 Les CREAI existent toujours (2009). 
 Qui devient le centre technique national détude et de recherche sur le handicap et les inadaptations, le CTNERHI, en 1975. En 2010, les personnels du CTNERHI ne sont pas sûrs de ne pas voir leur institution purement et simplement supprimée. 
 Association lyonnaise des amis et parents denfants inadaptés. 
 Sur la question des créations institutionnelles qui naissent de cette alliance de fait, confère partie suivante : 1.2.2.3.
 Politique associative de lUNAF qui a néanmoins partie liée avec la politique de lEtat, puisquelle a été créée par lui dans loptique de constituer un outil pour la politique familiale. 
 Date de la création des DDASS.
 Syndicat national des instituteurs, créé en 1920, devenu en 1992 le syndicat des enseignants de lUNSA. 
 « Insertion professionnelle » est une expression non contemporaine de lépoque, où on parle plutôt de « placement ». 
 Mutuelle Générale de lEducation Nationale, créée en 1947 à linitiative du SNI. 
 « Contre le monopole de lUNARSEA sur linadaptation », ajoute Francine Muel-Dreyfus, « Henri Wallon et Louis Le Guillant [ont fondé] en 1948 la revue Enfance et en 1951 La raison. ». 
 In BARRAL C, PATERSON F, op.cit.
 Devenus en  2005, à la faveur dun décret, les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP). 
 Dont il serait intéressant de tenter de constituer la généalogie, jusquà aujourdhui. « Il sest trouvé sans discontinuer (depuis Binet & Simon) des auteurs pour penser que les inégalités dintelligence innés et héréditaires expliquent et justifient lorganisation sociale », écrit Monique Vial en 1990.
 Le rationnel ne se confond pas toujours avec le raisonnable. . 
 Quelle a conservé malgré la recomposition induite par lémergence de la notion de handicap et la loi de 1975, ce qui explique que les éducateurs interviennent encore aujourdhui auprès de lensemble des anciennes populations de linadaptation. 
 A tort ou à raison, ça nest pas notre propos ici. 
 VAN EFFENTERRE H. (1947) Histoire du scoutisme. Paris : PUF. 
 Et de quelques milliers déducateurs dans les années 1950 à 10 500 en 1968 et à 40 000 en 1975. 
 Les AEMO peuvent être décidées soit par décision administrative, soit par décision judiciaire. 
 Pour Francine Muel-Dreyfus (1980), la formalisation de la psychologie scolaire correspond à une « scolarisation » de la psychologie, cest à dire à une « retraduction psychologique des qualités et défauts scolaires » (et non à un recours à une psychologie forgée hors lécole), ceci dans loptique dune « utilisation à des fins dorientation scolaire des outils psychologiques dappréciation ». Nathalie BELANGER (1997) conteste cette version dans sa thèse, déjà citée. 
 Les écoles de perfectionnement créées par la loi de 1909 deviennent à la faveur dune loi de 1951 les écoles nationales de perfectionnement (ENP), positionnées à linterface de lenseignement général et de lenseignement professionnel. Elles deviennent les établissements régionaux denseignements adaptés (EREA) en 1985, qui conservent cette ambivalence. Ces derniers, selon une circulaire de 1995 (Circulaire n° 95-127 du 17 mai 1995), devaient devenir des lycées denseignement adapté (LEA), mais lappellation est loin dêtre actuellement généralisée.  
 1947 : 400 ; 1951 : 1145 ; 1963-1964 : 4020. Chiffres extraits de GILLIG Jean-Marie (1996) Intégrer lenfant handicapé à lécole. Paris : Dunod. 
 Qui fait naître beaucoup dhostilité, essentiellement dans le milieu enseignant. 
 Entièrement rénovée par la loi n°2002-2 de janvier 2002. 
 François Bloch-Laîné, « Etude du problème général de linadaptation des personnes handicapées », rapport présenté au Premier ministre en décembre 1967. On trouve une quasi-célébration de luvre de François Bloch-Laîné dans louvrage de Alain Blanc, pages 27 et 29. 
 Sur ce point, confère 2.1.2.3. 
 Guyot cite également le rapport Laroque sur les personnes âgées (1962), la sectorisation psychiatrique (1966), le rapport Bloch-Laîné, bien entendu, et le rapport Dupont-Fauville sur laide sociale à lenfance (1971).  
 Lassociation des paralysés et rhumatisants (APR) est créée en 1933, et devient lassociation des paralysés de France (APF) en 1945. Cette même année, elle est reconnue dutilité publique. Avec lUNAPEI et lAPAJH, elle constitue le troisième terme de la triade des associations les plus importantes en terme de gestion détablissements spécialisés. Au moment de lélaboration de la loi de 1975, elles gèrent à elles trois 681 établissements qui offrent aux alentours de 40 000 places, ce qui représente environ 90 % des établissements et services de ce secteur. 
 WILSON F. (1983) Les groupes dintérêt sous la 5ème république, test de trois modèles théoriques de linteraction entre groupe et gouvernements.  Revue française de sciences politiques, n° davril 1983. Les trois modèles sont les suivants : pluraliste, néo-corporatiste, contestataire. 
 25 ans plus tard, comme pour illustrer les faits ici décrits, après quinze années passées à la direction de lUNAPEI, Patrick Gohet devient délégué interministériel aux personnes handicapés (DIPH). 
 Loi n°57-1223 du 23 novembre 1957 sur le reclassement des travailleurs handicapés.
 Pour Jacqueline Gateaux-Mennecier (1999), et contre par exemple Philippe Raynaud, qui a porté dans les années 80 lidée du bien-fondé du « détour ségrégatif », le « détour » est et a trop été une caution pour une simple arrivée. Philippe RAYNAUD (1984), « Léducation spécialisée », Encyclopaedia Universalis.
 Sur le terme de « normalisation » et le mouvement qui porte ce nom, confère 2.1.2.1.
 Sur le modèle social du handicap, confère 2.1.2.2.
 « Cest à dire », écrit Michel Chauvière en 2000, « précisément la catégorie à travers laquelle la mise en place de tout un secteur [celui de la Justice des mineurs, NDR] sétait réalisé pendant les années quarante ».  
 Ainsi, après que la codification de linadaptation ait été établie sur la base de linfluence décisive de la science psychiatrique, cest contre les évolutions de cette science que se construit le handicap, sous linfluence cette fois-ci des conceptions rationalisantes dune partie de la classe politico administrative. 
 LIBERMAN R. (1991) Handicap et maladie mentale. Paris : PUF. Que Sais-Je. 
 Sur ce sujet, confère CHAUVIERE Michel (2000) Critiques oubliées et réactions contrastées à la loi de 1975. In BARRAL C., PATERSON F., STIKER H-J, CHAUVIERE M., (éd.) (2000), op.cit., (pp 291-302), ainsi que TURPIN Pierre (2000) Les mouvements radicaux des personnes handicapées en France pendant les années 1970. In C., PATERSON F., STIKER H-J, CHAUVIERE M., (éd.) (2000), op.cit., (pp 315-324).
 Rotation qui sorganise annuellement. 
 Il est utile de noter que les CCPE et les CCSD doivent obligatoirement comporter dans leurs membres des « représentants du secteur de la psychiatrie infanto juvénile ».
 Ainsi que lon fait plusieurs commentateurs associatifs, notamment PHILBERT Marie-Christine, FARAUD (2005) Léducation et la formation, 1975-2005, quelles évolutions ? Reliance n°22, Décembre 2006. Ramonville Saint-Agne : Erès. pp.17-21.  
 En Italie, suite au choix radical dune politique de linclusion généralisée (1977), il a été créé un corps denseignants spécialisés, dits « enseignants de soutien ». Ils sont au nombre de un pour quatre élèves handicapés, et ont pour objectif délargir leur intervention à lensemble de la classe et même de lécole. Ils ont le même statut que les professeurs ordinaires mais avec une formation spécifique.  Sur ce sujet, confère DE ANNA Lucia (2000) La généalogie de lintégration scolaire en Italie. In CHAUVIERE Michel, PLAISANCE Eric (1999) Lécole face aux handicaps. Education spéciale ou éducation intégrative ? pp.132-146. Paris : PUF. 
 Le centre technique national détude et de recherche sur le handicap et les inadaptations (CTNERHI) témoigne de ce dualisme, tout comme le nom de lintergroupe « inadaptés/handicapés », déjà cité, pour préparer le cinquième plan (1966-1970). 
 Michel Chauvière explicite la notion de référentiel daction publique comme « lensemble des normes prescriptives qui donnent sens à un programme daction gouvernementale dans un secteur donné ». Il se réfère aux travaux de JOBERT B., MULLER P. (1987) LEtat en action, politiques publiques et corporatismes. Paris : PUF, qui précisent que cette notion a à voir avec « la représentation du rapport global/sectoriel que se font les acteurs concernés, destinataires, intermédiaires et décideurs ». 
 Michel Chauvière (2000c) déplore à juste titre que cette notion se soit imposée comme « presque concept pour certains chercheurs » négligeant quil sagit avant tout dune « catégorie de gestion administrative ciblée des populations » qui possède un caractère « libéral », induisant la faute de celui qui est concerné, « qui ne joue pas le jeu économique et doit en porter le stigmate ». 
 Lintégration en tant que terme, et en tant quobjectif, se trouve aujourdhui en situation déclinante : lors dune récente conférence (le 4 mars 2009 à lIUFM de Nantes), Pierre François Gachet, chef du bureau ASH (adaptation et scolarisation des enfants handicapés, nouvelle dénomination introduite par la loi de 2005 et venant se substituer à « ladaptation et intégration scolaire » AIS) de la DGESCO, a expliqué à lassemblée que lensemble des dénominations officielles contenant le mot intégration (souvent connues sous forme de sigles, comme CLIS, UPI, etc.), étaient en voie dêtre changées, afin de purger une fois pour toute ce mot de lensemble de linstitution scolaire. « On peut changer de mot sans changer de pratique, voire même pour ne pas changer de pratique » a dit à cette même conférence le sociologue Serge Ebersold. En juin 2009 (pour les CLIS) puis en juin 2010 (pour les UPI) ces annonces sont devenues de vraies mesures. Pour un résumé des évolutions, voir 2.2.1.2. 
 Cest à dire que lenfant est inscrit mais non scolarisé, et peut être accueilli en établissement spécialisé. 
 Cest dailleurs un des seuls pays de lOCDE à en proposer une, ce qui est critiqué dans de nombreux pays. 
 MEGE-COURTEIX Marie-Claude (2007) Réussir la scolarisation des élèves présentant un handicap. Les Cahiers Innover et réussir, n°13, pp. 4-10. Article consultable à cette adresse :  HYPERLINK "http://www.lecolepourtous.education.fr/fileadmin/pdf/INSHEA_Courteix.pdf"http://www.lecolepourtous.education.fr/fileadmin/pdf/INSHEA_Courteix.pdf 
 Compensation et accessibilité sont des thèmes adjacents à lémergence de cette idée « des droits », cest à dire la logique de la « participation » (ou « paradigme de la citoyenneté », comme lécrit Pierre Bonjour). Ils sont également des termes qui mériteraient une analyse spécifique ; pour sen convaincre il suffit de mentionner le fait quils sont également tous les deux des notions juridiques qui impliquent chacun des responsabilités institutionnelles différentes quant à leur mode de financement : laccessibilité relève du ministère ayant la tutelle de linstitution qui accueille, là où la compensation relève du financement du ministère de la santé. On devine alors ce quimplique la querelle des mots quand il sagit de qualifier de mesures daccessibilité ou de mesure de compensation telle ou telle réalité ; on devine également la lutte qui se déroule sur le terrain du droit pour qualifier le plus précisément possible ces termes.
 Pour une perspective critique de cette évolution, confère larticle de EBERSOLD Serge (2005) Linclusion : du modèle médical au modèle managérial, op.cit. 
 La première mention dun projet personnalisé pour les enfants handicapés scolarisés en classe dite « banale » dans un pays industriel semble être le fait dune loi de 1975 aux Etats-Unis, la loi dite EHA : « The production of an individual learning programme (ILP) for every handicapped child became a legal requirement in the USA with the passing of public law 94-142. » (Tominson, 1982, page 12). Sur la EHA, confère 2.1.2.1. 
 Confère chapitre 4. 
 « Favoriser limplication des parents » nest aujourdhui a priori plus de mise puisque ce sont eux qui, depuis la loi n°2005-102 du 11 février 2005, sont légalement partie prenante du projet de scolarisation de leur enfant. 
 Déjà évoquée précédemment : « Situation de handicap et scolarisation », IUFM de Nantes, le 4 mars 2009. Les éléments cités proviennent de louvrage suivant : BAZIN Anne Laure, EBERSOLD Serge (2005) Le temps des servitudes : la famille à lépreuve du handicap. Rennes : Presses Universitaires de Rennes. 
 Sur la notion de projet et dune éventuelle recherche sur les fondements qui la portent et sur le sens quelle véhicule, en particulier en matière éducative (et donc dans le processus de scolarisation des enfants handicapés), un point de départ intéressant pourrait être notamment louvrage suivant : BOUTINET Jean.-Pierre. (1993) Anthropologie du projet. Paris : PUF, 2e éd. Pierre Bourdieu a également formulé des analyses tout à fait intéressantes sur cette notion, notamment dans BOURDIEU Pierre (1980) Le sens pratique. Paris : Editions de Minuit, notamment celle qui explique que « les agents se déterminent aussi par rapport à des indices concrets de laccessible et de linaccessible », ce qui implique que le projet peut se résumer à lister les conditions de processus qui « tendent à réaliser le probable ». 
 Nous allons pouvoir constater dans le chapitre 2 que la notion dinclusion ne concerne pas seulement lenfance handicapée. 
  Confère supra, 1.4.1.
 Dans de nombreux pays mais aussi (et le lien est évident) dans les discours de plusieurs instances supranationales comme lONU, lUNESCO ou lOCDE. Sur ce point, voir : 2.1.3
 Le christianisme sest imposé en Europe par la prime conversion de laristocratie : il ne sagit pas dun culte dorigine populaire. 
 Une organisation syndicale, créée en 1987, sappelle la Confédération Paysanne. Lusage de ce terme (quasiment proscrit par le milieu agricole tout au long du 20ème siècle) dans lintitulé de cette organisation, est là pour témoigner à la fois du renversement de sens qui a été opéré en quelques décennies et de léloignement des origines étymologiques  éloignement dautant plus visible quand on sait que des membres de la jeunesse agricole catholique (JAC) ont joué un rôle prépondérant dans les origines du mouvement des paysans travailleurs puis de la Confédération Paysanne. 
 Au 13ème siècle. 
 Sur cette consécration, voir supra, 1.3. 
 Extrait du site gouvernemental du conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et lexclusion sociale (CNLE)   HYPERLINK "http://www.cnle.gouv.fr/"http://www.cnle.gouv.fr/    
 Nous pouvons dailleurs nous demander si la consécration du terme ne peut pas être aussi analysée au travers du fait que sa charge idéologique, la vision du monde qui sétait historiquement constituée en lui, répondait ou à tout le moins possédait des affinités avec celle qui caractérise le point de vue dans lespace social induit par les conditions sociales de ceux qui ont contribué à le consacrer. 
 A titre illustratif, voir par exemple, sur le site de la commission européenne, un articulet titré : « Closing the gender pay gap: the benefits for business. There are a number of reasons why it makes good business sense to take steps to eliminate pay differences between men and women » :   HYPERLINK "http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=en&catId=89&newsId=816&furtherNews=yes"http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=en&catId=89&newsId=816&furtherNews=yes 
 Par ailleurs, le logement et la santé sont mentionnés  mais ces secteurs ne font pas exception aux « politiques dajustement » qui impliquent un recul du  public au profit du privé (selon un principe consacrant la socialisation des pertes et la privatisation des profits). De plus, si une éducation « ordinaire » accentue les possibilités dinscription sur le marché « ordinaire » du travail, être logé et en bonne santé permet le permet également. 
 A ce titre, il est dailleurs notable de constater le fait quétymologiquement, être « exclu » signifie ni plus ni moins que d « être en dehors de lenfermement ».  
 Avec notamment les travaux de Michel Foucault, Robert Castel, Jacques Donzelot, Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Roger Establet et Christian Baudelot, etc. 
 « Daté » : mot entendu à plusieurs reprises concernant ce sujet, et alors même que, plus que la question, cest probablement plutôt la possibilité den tirer des bénéfices académiques qui est datée.  
 C'est-à-dire les travaux qui, consécutivement à la reprise de la notion de normalisation en provenance de Scandinavie, ont consacré et développé la notion dinclusion scolaire des années 1970 à 2000. Le champ intellectuel de ces travaux peut être considéré comme le champ dorigine en ceci que cest en son sein quémerge pour la première fois la notion dinclusion scolaire  mais pas la notion dinclusion tout court. 
 Ce qui renvoie directement à la notion de empowerment. 
 Sur ce point précis, confère 4.4.3 Ecoute et violence symbolique.
 « La loi [danoise] parle de « personnes considérées comme folle ou imbécile, précise Kemp (1994). 
 Nirje B. (1969) The normalization principle. In R.B. Kugel & W Wolfensberger (Eds.) Changing patterns in residential services for the mentally retarded. Pp. 179-195. Washington: department of heakth, Education and Welfare.
 Sur cette circulation originelle de la notion de normalization et ses implications sociales, confère supra,  2.1.3.
 Wolfensberger W. (1972) The principle of normalization in human services. Toronto: National Institute of mental retardation. 
 Lextrait du texte de Raymond Vienneau, professeur à la Faculté des sciences de l'éducation de lUniversité de Moncton, Nouveau-Brunswick, Canada, est pris ici :  HYPERLINK "http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914" http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914. 
 Confère 2.1.3, infra. 
 Il est intéressant de noter que la EHA introduit un élément qui va se retrouver dans lensemble des dispositifs législatifs des pays industriels sur le thème de la scolarisation des enfants en situation de handicap dans le milieu ordinaire : l « individual education plan ». Il serait intéressant, au travers dun travail spécifique sur la notion de « projet » (et notamment en éducation), de tenter de retracer la généalogie et la fonction sociale dun tel dispositif, qui est invariablement associé à léducation « ordinaire » des enfants non ordinaires scolairement. 
 Dépendant du gouvernement fédéral. 
 Qui mériterait elle aussi une analyse spécifique. Nous navons ici pas eu le temps de chercher plus avant des éléments sur ce mouvement. 
 Thomazet citent des chercheurs comme OBrien (1989) et W.C Stainback et S.P. Stainback (1990, 1992), qui « furent parmi les premiers chercheurs à utiliser [le terme dinclusion] dans le champ de léducation ». Voir par exemple : OBrien J., Forest M, Snow J., Pearpoint J., Hasbury D. (1989) Action for inclusion : how to improve school by welcoming children with special needs into regular classrooms. Toronto: Inclusion Press. Il est possible de trouver des bibliographies très fournies des travaux anglo-saxons sur linclusion scolaire dans les travaux de Thomazet (2008, 2009) et dans larticle de Serge Ebersold (2009) Autour du mot : inclusion. In Recherche et formation. Former à accueillir les élèves en situation de handicap, n°61. pp. 71-83. 
 Concernant la notion de besoins éducatifs particuliers, indissociable de celle dinclusion pour le versant scolaire de cette dernière, Confère 2.2.2.1.  
 Voir infra, 2.1.2.2. 
 Largement critiquée par la pensée de « laltérité radicale » (Alain Blanc, 2006) ; confère 2.2.1.1.
 Sur ce point, lire : J-F Ravaud (1999) Modèle individuel, modèle médical, modèle social : la question du sujet. In Handicap, n°81, 1999, pp. 64-75. Lauteur écrit que le MSH refuse d « expliquer le handicap par les caractéristiques individuelles des personnes, mais plutôt par lensemble des barrières physiques ou socioculturelles faisant obstacle à la participation sociale et à la plein citoyenneté des personnes handicapées ».
 Voir sur ce sujet Catherine Barral (2000) ONG de personnes handicapées et politiques internationales : lexpertise des usagers, In Prévenir, n°39, pp. 165-190. Elle évoque à ce titre des notions comme le « peer-support » (soutien entre pairs), le « peer-counselling » (la « pair-émulation »), l « advocacy » (la défense des intérêts individuels et collectifs face aux discriminations) et le processus d « empowerment ».
 OMS : organisation mondiale de la santé. BIT : bureau international du travail
 Sur ce point, confère 2.2.2 Linclusion, proposition de définition
 Ou plus précisément les considérations des milieux économiques et financiers
 Qui se trouvent, au fur et à mesure du 20ème siècle, de plus en plus seules à constituer ces discours, à la faveur dun processus dinvisibilisation des motivations économiques qui constituaient pourtant à la fin du 19ème siècle des arguments tout à fait centraux. Sur ce point, confère 1.1.1.3.
 OCDE (organisation pour la coopération et le développement économique)(1994) Lintégration scolaire des enfants et adolescents handicapés : ambitions, théories et pratiques. Paris : OCDE. 
 Sans développer la notion dorthodoxie économique, il est néanmoins possible de lillustrer en renvoyant vers la publication suivante : MORISSON Christian (1996) La faisabilité politique de lajustement. In Cahiers de politique économique de lOCDE, n°13. OCDE. Confère également ici :  HYPERLINK "http://www.recit.net/IMG/pdf/CT_FAIRE_UNE_POL_D_AJUSTEMENT_OCDE.pdf"http://www.recit.net/IMG/pdf/CT_FAIRE_UNE_POL_D_AJUSTEMENT_OCDE.pdf 
 En Angleterre, depuis une loi de 1902, léducation relève dun système décentralisé composé dune LEA (local education authorities) pour chaque comté. 
 Economie de coûts sociaux car la population composant « lanormalité » (ou composé des « subnormal » en Angleterre par exemple) se caractérisait par une surreprésentation des franges les plus pauvres des catégories populaires, ferment des révolutions et des « troubles sociaux » ; économie de coûts financiers car leur éducation permettait, pour les plus « capables », dentrer dans la production. Sur ce sujet, confère 1-1 Genèse et constitution du champ du spécial. 
 Cest le cas également pour les systèmes éducatifs en général  nous défendons ici une appréhension de lhistoire des systèmes éducatifs issue de la sociologie conflictualiste. Sue ce point, confère Sally Tomlinson, 1982, page 6, ainsi que : infra, 2.2.2.1.  
 De ce point de vue, lOCDE occupe une position particulière dans lespace des positions des instances supranationales puisquelle participe à la fois à linternationalisation des politiques éducatives et aux processus dinternationalisation des politiques économiques et financières. (Confère 2.1.2.3.)
 Résultats censés sinscrire dans un processus quil est à peine caricatural de résumer de la façon suivante : main duvre qualifiée et innovations techniques et technologiques créent de la croissance, elle-même de lemploi et, in fine, le bonheur des populations. Hors des préceptes de ce bréviaire, point de salut  et ceci in fine également pour toute pensée sur léducation. 
 Assertion quil conviendrait de préciser au sein dun travail spécifique. Cependant, de nombreux éléments viennent corroborer cette vision, notamment le fait, par exemple, du poids qua pu avoir après sa publication en 1967 le rapport de François Bloch-Lainé, alors ancien directeur du Trésor au ministère des Finances, directeur de la Caisse des dépôts et consignations et de la Banque européenne d'investissement depuis 1952. 
 Il anime un débat matinal sur LCI (groupe Bouygues), et est linvité presque permanent de Yves Calvi sur France 5 (dans lémission « C dans lair »). 
 Cité dans Chollet Mona, Cyran Olivier, Fontenelle Sébastien, Raymond Mathias (2009) Les éditocrates. Paris : la Découverte. 
 Les programmes dévaluation internationale des systèmes éducatifs, comme ceux de lOCDE (PISA, TIMSS) sont basés ainsi uniquement sur les performances scolaires des élèves, entendues en terme de maîtrise de savoirs disciplinaires. 
 Il est notable de mentionner ici le fait que, selon lINSEE, (en 2010), la part du PIB consacré au salaire a baissé depuis 1983 de 9,3%, au profit des revenus financiers  et notamment actionnariaux  et ce alors même que le PIB na cessé daugmenter. « La part des profits est inhabituellement élevée à présent (et la part des salaires inhabituellement basse). En fait, l'amplitude de cette évolution et l'éventail des pays concernés n'a pas de précédent dans les 45 dernières années », lit-on également dans un des Working Papers de la Bank for International Settlements, plus précisément le n°231 daté de juillet 2007 et titré Global upward trend in the profit share (« Hausse tendancielle mondiale de la part des profits »). 
 « Emploi » est un mot qui suppose un sujet et un objet : il y a en effet « lemployeur » et « lemployé ». « Occuper un emploi » revient de fait surtout à « être occupé » (dans les deux sens du terme). 
 Sur ce point, lire MENARD Noémie (2009) 
 Sur ce point, des éclairages importants sont mentionnés au 2.2.1.2. 
 Traduction littérale du terme de langue anglaise désignant au Royaume-Uni la population équivalente à celle des « anormaux » en France à la fin du 19ème siècle : subnormal. 
 Dans lacception première du terme, qui provient du latin docilus : « qui se laisse facilement apprendre ».  
 Le 19ème siècle et le début du 20ème constituent aussi la période où sépanouit le mouvement hygiéniste. 
 Confère ce site Internet :  HYPERLINK "http://www.inshea.fr/expertise_detail.php?id=767&id_menu=3&id_ssmenu=35&id_rubrique=1&id_ssrubrique=216"http://www.inshea.fr/expertise_detail.php?id=767&id_menu=3&id_ssmenu=35&id_rubrique=1&id_ssrubrique=216 
 CNEFEI : centre national pour létude et la formation autour de lenfance inadaptée, devenue lINS-HEA, linstitut national supérieur pour la recherche sur le handicap et les enseignements adaptés. 
 Que la loi n°2005-102 a entièrement rénovée, mais qui conserve malgré cela ses principes de compromis entre les deux pôles ici esquissés et représentés par lItalie et lAllemagne. 
 Et publié en 1990 dans les Cahiers dhistoire des littératures romanes (14e année, 1-2, p.1-10). Puis en 2002 peu après sa mort, dans les Actes de la recherche en sciences sociales 2002/5  145, pages 3 à 8. 
 Courant sociologique issu de la sociologie des sciences et des techniques et animé notamment par Michel Callon, Bruno Latour et Madeleine Akrich. La juxtaposition de la sociologie de Pierre Bourdieu et celle des sociologues de la traduction (qui sopposent sur plusieurs points, notamment épistémologiques), nest pas pour nous problématique dans la mesure où la portée heuristique des éléments danalyse utilisés prévaut sur des considérations de divergences théoriques qui ne trouvent pas, de notre point de vue, déchos véritables dans le présent travail. 
 Par « intellectuels » nous entendons ici les personnes répondant à la définition suivante, donnée par Noam Chomsky en 2009 (reformulée par nos soins) : des personnes qui ont le temps et la possibilité de diffuser dans lespace public des avis réfléchis et systématisés sur le monde  définition qui a la particularité de ne pas se limiter au champ académique. Confère :  HYPERLINK "http://www.lesmutins.org/chomskyetcompagnie/wp-content/uploads/chomskyciedp.pdf"http://www.lesmutins.org/chomskyetcompagnie/wp-content/uploads/chomskyciedp.pdf 
 Sur cette notion, confère supra, 2.2.2.1
 « Moment critique », selon le terme de Pierre Bourdieu (1984) quil serait tout à fait intéressant de cerner par une recherche » tant il nous semble riche de perspective analytique
 Si tant est quil soit possible didentifier ce dernier, bien que nous layons ici, et en accord avec les travaux dont nous avons pris connaissance, identifié comme étant le champ du handicap mental dans la Scandinavie des années 1940-1950  étant entendu que ce champ dorigine ne connaissait encore pas la consécration du terme. 
 « Théoriquement » car des agents/acteurs (individus ou associations) peuvent tout à fait bien revendiquer une définition autre de linclusion et de ses pratiques, inspirée dun autre contexte (ou sy rattachant sans le savoir), et contester celle définie par le législateur  et ceci y compris dans les pratiques professionnelles. 
 Dans le champ des instances supranationales, ces deux organisations ont donc une position tout à fait spécifique puisquelles participent à la fois à des missions régaliennes (« main droite ») et des missions relevant de la « main gauche ». 
 Il y en a bien sûr dautres, esquissées dans la partie historique du présent travail, et relative à la structure et aux propriétés du champ de lenfance handicapée en France. 
 LOCDE délivre des médailles aux représentants politiques qui mettent en uvre le plus scrupuleusement possible le programme contenu dans la doxa de « lajustement » : en 1993, cest Edouard Balladur qui a reçu cette distinction pour son action de premier ministre du gouvernement français. 
 Les transpositions ont été réalisées par nous. 
 Et, indissociablement, la genèse. 
 Confère supra, 1.4.
 Sur cette question confère infra, 2.2.2.1.
 Tout comme le nom de la notion elle-même. 
 Et ceci dautant plus que les principes inclusifs ont des fondements moraux et éthiques qui peuvent exister indépendamment de leur rencontre avec la dénomination consacrée. 
 Confère partie 2.1.1.3. 
 Dans laquelle ne figure pas lAVS, qui devrait y figurer pourtant. 
 En 2008, lestimation du nombre denfant en situation de handicap nouvellement scolarisés à chaque rentrée était de 10 000. La même année, leur nombre dans lensemble de la population scolaire des filières non spécialisées était estimé à 170 000  en sachant que la prévalence de lenfance handicapée dans la population totale est denviron 2%, et que la même prévalence est applicable à la population scolaire, ce qui fixe approximativement le plafond.  
 Ou, pour parler dans la langue des élites européennes, de la logique de linclusion sociale active  ce qui nous pousse à constater que laccompagnement de linclusion scolaire est confié à des personnes concernées par des dispositifs dinclusion sociale. En réfléchissant avec leurs catégories, et à des fins caricaturales, on pourrait dire quil sagit de créer lillusion de linclusion en regroupant ensemble des exclus, ou encore quest postulé le fait que des exclus sont, mis entre eux, susceptibles de devenir des inclus, ou encore que le fait de regrouper entre eux des exclus grâce à des dispositifs présentés comme étant destinés à les rendre inclus permet à bon compte de les reléguer dans des espaces sociaux où leur statut (permanent) dexclus en voie dinclusion permet daffirmer que le pouvoir politique « fait ce quil faut » pour les exclus. 
 Puis les sélections ainsi opérées sont avalisées par lEducation Nationale. 
 Lélève quévoque ici Noémie fait partie des 10% (des 49 élèves accompagnés par les 6 AVS-i interrogés) qui ont été retirés de leur famille et placés en famille daccueil (« placés » tout court, dit le sens commun)  ce qui ouvre également des nécessités danalyse concernant la géographie appliquée du handicap, et une éventuelle région qui serait caractérisée par une forme dessentialisation des catégories les plus pauvres comme intrinsèquement handicapés, ainsi que lindique Jacqueline Gateaux-Mennecier en 1999. 
 Et parfois lélève, pour lAVS-i et/ou lenseignant. 
 Et qui trouvent un écho très favorable dans la doxa politique des élites politico administratives et dans le monde social contemporain : il nest pas question ici de réduire lorigine de ces comportements au seul terme « inclusion ». 
 En 2009, les MDPH fonctionnent essentiellement avec des personnels daccueil employés en contrats aidés, donc là encore avec des personnels trop peu formés et temporaires. 
 Propriété dont on peut avancer quelle concerne également les champs des autres pays industriels. 
 Mais également, nous lavons vu, au sein du champ du travail social, en prenant dans les textes et les politiques européennes la suite des notions dintégration et dinsertion sociales. 
 Cette partie entend fournir des éléments explicatifs au « pourquoi ? » quappelle cette affirmation de Michel Fardeau. 
 Alain Blanc (2006) Handicap, ou le désordre des apparences. Confère bibliographie. Il ne sagit pas ici de proposer une critique complète et systématisée de louvrage (et du travail) dAlain Blanc, mais seulement de ce qui concerne notre sujet spécifique. Nous ne prétendons pas ici réduire lensemble de son  ouvrage (et de son travail) aux seuls éléments critiques que nous formulons. De fait, le lecteur et la lectrice auront soin de ne pas opérer cette réduction.
 Cest nous qui la nommons ainsi. 
 De fait, ses analyses ne concernent strictement que la part des élèves handicapés qui sont déficients  ce qui nest pas le cas pour tous ainsi que nous le montrons notamment dans lintroduction, en 3.3.
 Ils formeraient ainsi une caractéristique dhabitus parmi les mieux distribués socialement ; une disposition qui serait même essentiellement corporelle.
 Dans une conférence donnée en décembre 2009 à loccasion des états généraux du handicap dans la Loire, Alain Blanc rectifie sa position en parlant de « socialisation difficile, et non pas impossible » Confère  HYPERLINK "http://eghl.blogspot.com/2009/12/alain-blanc.html" http://eghl.blogspot.com/2009/12/alain-blanc.html « Si les liens sociaux sont difficiles, et non pas impossibles, à construire avec les personnes handicapées, cest parce que les déficiences et les idées que nous en avons ne permettent pas une interaction pacifiée. »
 Les formes de ces socialisations dans des économies déchange caractérisant la période préindustrielle (faible voir absence de mobilité, majorité dactivité agricole) sont encore un autre sujet détude historique. 
 Nommer les risques ne suffisent pas à les éviter, mais peuvent suffire pour penser en être quitte  et nous ne pensons pas être exempts de ce risque majeur dans la pratique de la recherche en sciences sociales. 
 Le « nous » des non déficients nest-il pas différencié socialement ?
 Et qui, malgré nos critiques ici exposées, a beaucoup de qualités. 
 Cest dans loptique de rapporter la situation des personnes déficientes aux processus de domination que Alain Blanc convoque Albert Memmi ; mais cest, in fine, pour considérer que ce qui prévaut cest la part intrinsèque de la déficience dans le ratage des processus de socialisation. Toute proportion gardée, ny a-t-il pas dintellectuels qui, dans le passé colonialiste et esclavagiste, ou dans les Etats-Unis de la ségrégation raciale, aient postulé que la couleur de la peau rendait impossible la socialisation ? 
 Nous parlons ici spécifiquement des « intégrations » scolaires en maternelle. 
 Sur cette dernière question, le présent travail a prétention de contribuer à esquisser quelques éléments de réponses. 
 Notion que, par ailleurs, Alain Blanc développe particulièrement dans son travail. On a ainsi un auteur qui dun côté postule laltérité radicale et la socialisation impossible et, de lautre, qui propose LA notion qui permet dembrasser et de saisir tout ce qui en est à lorigine : vente et service après-vente, en quelques sorte. Ceci étant dit, nous souhaitons rappeler, à la suite de Jacques Bouveresse (2003), que motivations et intérêts au principe de formes de recherches en sciences sociales ne présument pas de la validité des résultats et de la part de vérité sur le monde quils contiennent.  
 Bien plus loin que les positions de Charles Gardou, qui nest pas un défenseur de la full inclusion, on trouve des intellectuels plus radicaux qui la défendent  mais en France ils noccupent pas de position éminente. Une recherche spécifique sur le sujet des positions académiques en matière dinclusion semble nécessaire. 
 Sur ce point de lhyper protection, qui caractérise certaines pratiques du médico-social, confère 3.3.2.4, en fin de partie. 
 Les neuf « voies de la mutation » sont toutes centrées sur des éléments actualisables dans le fonctionnement des organisations, dans les programmes de formation, ou dans la création dinstitutions nouvelles (Charles Gardou propose notamment la création dun « institut national de formation, de recherche et dinnovation sur les situations de handicap » - proposition qui a été reprise par plusieurs personnalités mais qui na pas eu une réception politique favorable.  
 Texte consultable ici :  HYPERLINK "http://www.aideeleves.infini.fr/lectures/gardou2.htm" http://www.aideeleves.infini.fr/lectures/gardou2.htm 
 Parmi les chercheurs français qui travaillent sur cette notion ou/et avec elle, on trouve notamment, du côté des sociologues : Philippe Mazereau, Serge Ebersold, Eric Plaisance ; du côté de lanthropologie : Henri Jacques Stiker, Charles Gardou, Denis Poizat ; du côté des didacticiens : Teresa Assude, Jean-Michel Perez, Marie Toullec-Théry, Isabelle Nedelec-Troël, Serge Thomazet (ce dernier ayant une formation de psychologue et denseignant du premier degré). (Liste évidemment non exhaustive).
 Dont nous avons esquissé ici quelques éléments de réponse. 
 Il serait intéressant de produire une étude sur les différenciations sociales de mobilisation des parents denfants handicapés, y compris dans le passé, et notamment sur les partitions, dans la décennie 1950 ici évoquée, entre ville et campagne. On se rendrait probablement compte que les parents du milieu rural, bien que pas moins « humains » que les autres et pas moins habités de « désirs » pour leurs enfants, nenvisageaient pas ou peu léducation dans des structures qui nexistaient que peu sur leurs territoires. 
 Dans la perspective dun travail sur la perception du handicap et/ou de linclusion dans le champ académique, il apparaît indispensable de sextraire du caractère linéaire que nous habitons ici (deux pôles caractérisant les deux extrêmes dune même ligne) en enrichissant lanalyse par une approche pouvant être traduite par exemple au travers dun espace factoriel. 
 Cest son ouvrage qui va ici venir illustrer lanalyse que produit la sociologie conflictualiste sur la scolaristion des enfants handicapés. 
 « Les systèmes éducatifs et leurs caractéristiques se développent du fait des objectifs que poursuivent les groupes sociaux qui les contrôlent et qui ont des intérêts spécifiques dans leur développement. (
) Les systèmes éducatifs changent suite à des débats darguments et du fait de lutte de pouvoir. (
) Les changements se produisent car certains groupes veulent quils se produisent et ont le pouvoir de limposer aux autres ». (Traduction personnelle). 
 « Démystifier les processus sociaux et les situations sociales ». 
 « Certains groupes sociaux impliqués dans léducation spéciale ont des intérêts particuliers à structurer les débats dans un sens particulier plutôt quun autre ». 
 A linverse, la perspective de Sally Tomlinson a de mon point de vue un avantage que lexigence de rigueur scientifique de la théorie de Pierre Bourdieu  en tout cas avant les évolutions significatives du début des années 1990 , basée sur la rupture bachelardienne davec le « sens commun », ne permet pas : il sagit, comme lillustre la référence fréquente que fait lauteure à C. Wright Mills et sa « sociological imagination », de promouvoir certaines connaissances dégagées par la sociologie comme devant être intégrées au curriculum de formation dautres métiers et, plus largement, dêtre diffusées largement dans la société. 
 Pour des exemples d « exclusion par la pièce dà côté », confère 3.3.2.3. 
 Le néo-libéralisme. 
 En dautres termes, et selon le mot de Karl Marx, les « choses de la logique » dégagées par cette entreprise à vocation scientifique deviennent par le biais des  politiques menées sommées de prendre la place de « la logique des choses » : rendre les réalités sociales correspondantes aux théories, voilà louvrage politique du néo-libéralisme. 
 Selon lexpression de Erving Goffman (1968), Asiles, études sur la condition sociale des malades mentaux. Paris : Editions de Minuit, cité par Bourdieu (1998), « à la manière du discours psychiatrique dans lasile
 ».  
 Et de la recherche. 
 Sur lequel nous nous limiterons, sans étendre notre analyse au poste de professeur du second degré  néanmoins évoqué en creux dans cette partie, le « creux » étant particulièrement saisissable par les lecteurs et lectrices qui connaissent a minima lhistoire de ces deux postes, ce qui les caractérise et en quoi ils sopposent.  
 Institués en 1882 à lécole normale de garçons de la Seine, située à Auteuil, les « voyages de vacances » ou « voyage détudes », qui ont lieu tous les ans, imposent la pratique du tourisme comme le mode correct de la découverte de linconnu, c'est-à-dire font de linstituteur un consommateur de paysages » écrit Francine Muel-Dreyfus. Elle évoque également lencouragement que les « élèves maîtres » des écoles normales reçoivent à pratiquer les « marottes » appropriées à leur rang, ni trop ni trop peu : monographie sur la commune dexercice, poésie, promenades, lecture, occupation du poste de secrétaire de mairie, danimateur culturel, etc.
 Car si les formations ont évolué, si incidemment le recrutement social a changé, la nature intermédiaire de la position du poste denseignant du primaire reste tout à fait valide, depuis ses origines
 Et destinés à être enseignés par des enseignants spécialisés dont les caractéristiques objectives du poste sont fondées sur le modèle du « saint laïc » se dévouant corps et âme à sa vocation déduquer les inéducables. 
 Cette disposition se retrouve dune manière encore plus ancrée et puissante dans le corps professionnel des enseignants du secondaire. 
 Permettant aux femmes nayant pas ou peu occupé demploi au cours dune vie (mais ayant assuré la conduite de léconomie domestique et léducation des enfants) de dire (indice dune véritable incorporation de  et participation à - la domination) quelles nont pas ou peu « travaillé ». 
 Sur ce concept, voir infra, 2.2.2.
  Pris sur le forum Internet « enseignants du primaire ». Message consultable ici :  HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__20__p__4328206entry4328206" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__20__p__4328206entry4328206 
 Sur ce point confère partie 2.1.3. 
 Linclusion se trouve mentionnée (au-delà de sa consécration implicite dans « lesprit » de la loi de 2005) pour la première fois dans un texte de loi français en juin 2009 : les CLIS (classes dintégration scolaire, dans le premier degré) sont devenues des classes dinclusion scolaire. En juin 2010, les UPI (unités pédagogiques dintégration scolaires, dans le secondaire) sont devenues des ULIS (unités localisées dinclusion scolaire). Le fonctionnement général des ces classes spécialisées se trouvent également modifié  on assiste notamment à la suppression par de nombreuses inspections académiques des auxiliaires de vie scolaire collectives (AVS-co). Voir note 348, page suivante. 
 Il y a même, de notre point de vue, nécessité de porter jusque dans les territoires de léchange usuel et anodin ce quimplique les connaissances dégagées par lhistoire de sa constitution  sous peine de rendre invalides les efforts à lorigine de ce savoir quest lhistoire de la construction sociale de cette catégorie. Il ny a pas que dans le cercle académique que cette « dimension indiscutée des discussions » quest le handicap doit être largement abordée : dans les formations professionnelles également. Du point de vue de cette nécessité, omettre den tenir compte dans une publication à caractère savant nous semble une erreur importante. 
 Ce terme, utilisé par les enseignants eux-mêmes, est tout aussi peu anodin que celui de « ordinaire », ou « spécialisé », et mériterait une analyse spécifique.  
 « A 2 » signifie ici : enseignant en poste en classe spécialisée et AVS-co 
 Message et fil de discussion consultables à cette adresse :  HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__40__p__4335345entry4335345" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__40__p__4335345entry4335345 
 Nous insistons sur le « parfois », étant bien entendu que lappui sur un témoignage (a fortiori non situé socialement) ne suffit pas et appelle des recherches plus spécifiques. 
 Même si les décloisonnements et les relations des CLIS avec le reste de lécole étaient auparavant déjà encouragés, lémergence de linclusion dans les acronymes de ces classes témoigne dune rupture : pour les élèves des CLIS, la norme sera la présence dans les classes « banales » de leur classe dâge, et le regroupement dans la CLIS lexception. 
« Dans l'idée les enfants de CLIS seraient scolarisés dans leur classe d'age la plupart du temps, avec présence dans l'école (ou sur un groupe d'écoles) d'un dispositif appelé CLIS, qui serait une sorte de plaque tournante organisant les temps de scolarisation des gamins, les regroupant parfois pour des apprentissages spécifiques et servant de "ressource" aux collègues des classes ordinaires "incluant" des élèves en situation de handicap.
Dans les textes, c'est louable et intéressant, dans les faits irréalistes et sûrement destructeur pour les élèves et leurs maîtres », écrit ainsi une enseignante spécialisée.  HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__p__4320205entry4320205" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__p__4320205entry4320205.
 Message et fil de discussion consultables à cette adresse :  HYPERLINK "http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__60__p__4408090entry4408090" http://forums-enseignants-du-primaire.com/topic/214397-integration-ou-inclusion/page__st__60__p__4408090entry4408090 :
 Quau sein de la profession il serait tout à fait intéressant détudier : il doit y avoir des conditions sociales qui favorisent la prise de contact avec tel ou tel production intellectuelle en la matière. 
 Ce qui revient à dire que certains enseignants tissent des relations entre les trois niveaux dappréhension de la notion dinclusion que sont lacadémique, le légal et le pratique (à lécole). Ce sont ceux qui lisent des productions scientifiques ou théoriques sur le sujet. Ils peuvent à ce titre être opposés ou non à ce qui fonde cette notion. Dautres ne lappréhendent quà partir de leur pratique professionnelle : ce sont ceux qui y réfèrent lensemble de leur point de vue social. Ces derniers ont tendance à amalgamer le législateur et le milieu académique en un seul et même « parti », et à fustiger sévèrement toute réflexion dordre théorique au nom du primat du « terrain ». 
 Sur ce point, confère 2.2.3. 
  HYPERLINK "http://dcalin.fr/publications/lescouarch2.html" http://dcalin.fr/publications/lescouarch2.html 
 Certains endroits font exception  il serait dailleurs tout à fait éclairant den étudier les raisons au travers des conditions sociales de possibilité  comme par exemple lUniversité de Provence, dont certains professeurs ont créé lOPHRIS (Observatoire des pratiques sur le handicap : recherche et intervention scolaire). Seulement, ces exceptions continuent dêtre spécifiques, et spécifiées, donc relevant toujours du spécial, là où cest une forme dordinarisation du spécial qui semble plutôt nécessaire  et dont les formes de traduction académiques restent àc créer.  
 Sur ce dernier point, voir 2.1.2.3 Linclusion entre discours humaniste et intérêts économiques.
 On trouve un travail spécifique sur ce que le législateur français a fait des notions dintégration et dinclusion dans le travail dEric Gilles, ancien inspecteur de léducation nationale : (2007) Scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers, des compromis entre intégration et inclusion scolaire à lémergence dun nouveau modèle éducatif. Thèse de doctorat en sciences de léducation, dirigée par Jean-Pierre Astolfi, Université de Rouen. De notre point de vue, il manque (cruellement) à ce travail, centré presque exclusivement sur une analyse des textes (lois, décrets,circulaires) une approche sociologique ancrée dans la théorie des champs, seule apte à permettre de situer les positions des rédacteurs des textes, celle de leur groupe social, leur allégeances intellectuelles, etc. 
 Eléments tirés dune communication non datée mais lisible à ladresse suivante :  HYPERLINK "http://www.ac-montpellier.fr/sections/enseignement-scolaire/scolarite-pour-tous/handicap/handicap/communication-e/downloadFile/file/communication_e_plaisance.pdf" http://www.ac-montpellier.fr/sections/enseignement-scolaire/scolarite-pour-tous/handicap/handicap/communication-e/downloadFile/file/communication_e_plaisance.pdf 
 Cest Sally Tomlinson qui propose cette partition entre « normative category » et « non-normative ». Elle précise par ailleurs que cette distinction, valide pour le sens commun, ne lest scientifiquement que par souci de méthode et que, par exemple, définir précisément et uniformément la surdité est une gageure, ce qui relativise la distinction ici opérée : « While it might appear that some handicapps are easier to define than others, this is not necessarly so. » Par ailleurs, le principe de cette distinction est à la base de celle construite par lOCDE en 1994. 
 « Il ny a pas darguments éducatifs pour justifier de poursuivre la confluence entre la catégorie normative [aveugles, sourds, épileptiques, handicap physique, type sévère de handicap mental] et catégorie non-normative [faible desprit (=débile en Frane), sous normaux éducatifs (anormaux, ou irréguliers), mal ajustés (inadaptés),  instables, caractériels]. La notion de BEP est propre à intensifier cette confusion. » (Traduction personnelle). 
  HYPERLINK "http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/handicapes/6_22.htm" http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/handicapes/6_22.htm 
 Débat consultable ici :  HYPERLINK "http://www.senat.fr/cra/s20100512/s20100512_8.html#par_35" http://www.senat.fr/cra/s20100512/s20100512_8.html#par_35 
 Qui nest pas exempt dun fort caractère conflictuel au niveau politique : en effet, grandir et vivre au-delà du seul « entre-soi » social ne constitue pas un consensus ni un objectif politique consensuel, en témoigne le fait que les communes les plus riches ne respectent pas la loi SRU qui les oblige à construire au minimum 20% de logements sociaux sur leur territoire. Carquefou, dans la périphérie nantaise, pour ne prendre quun exemple, nen a que 3% (en 2002). 
 Confère :  HYPERLINK "http://dcalin.fr/textes/exclusion.html" http://dcalin.fr/textes/exclusion.html
 Les éléments présentés ici proviennent dun colloque organisé par lINRP à Lyon les 23 et 24 mars 2010 et titré « Ecole et handicap ». Lintervention de Maria Kron (université de Siegen, Allemagne) était titré : « hétérogénéité, un aspect fondamental de la pédagogie inclusive. » Les actes du colloque sont en ligne sur le site de lINRP :  HYPERLINK "http://www.inrp.fr/manifestations/2009-2010/journees-ecole-et-handicap" http://www.inrp.fr/manifestations/2009-2010/journees-ecole-et-handicap 
 Ou à propos des compétences phonologiques, par exemple Goigoux & Cébé, (2004) Favoriser le développement des compétences phonologiques pour tous les élèves en grande section de maternelle ». Repères, n°2, pp. 45-53. 
 Thomazet 2009 ; il renvoi à son propre travail, titré : « Relations possibles des enseignements adaptés avec les autres dispositifs de différenciation pédagogique », In Revue du CERFOP, n°15, pp. 45-53
 Raymond Vienneau est, en 2010, professeur à la Faculté des sciences de l'éducation, Université de Moncton, Nouveau-Brunswick, Canada. Texte consultable ici :  HYPERLINK "http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914" http://assoreveil.org/peda_actu_10.html#_Toc44406914.
 Confère supra 2.2.1.1.
 Quil faudrait analyser plus avant. 
 Nous souhaitons ici préciser que les dispositifs mis légalement en place en France tendent  de notre point de vue à imposer une mutation (basée sur des principes humaniste) sans offrir les conditions de possibilités de cette mutation, ce qui revient à porter des coups potentiellement mortels aux principes affichés, rendus responsables des situations déchecs (quand ça nest pas seulement les acteurs/agents à titre strictement individuel). Aux Etats-Unis, par exemple, le nombre de prescription de Ritaline (un médicament psychoactif destiné à réduire les problèmes de comportement des enfants « turbulents ») a littéralement explosé ces dernières années (Thomazet, 2009). Serge Thomazet en conclut que « les sociétés modernes ont tendance à « médicaliser » leurs problèmes : dans cette perspective, ce nest plus le système éducatif qui est malade, ce sont les enfants. » (Traduction personnelle). 
 Et susceptible de régression beaucoup plus rapide que ses processus de construction. 
 Et linverse, ce qui revient sensiblement au même. 
 Cest-à-dire, rappelons le, les auxiliaires de vie scolaire individuels, auxquels sont confiés les accompagnements délèves handicapés au sein de classes ordinaires
 Concours de recrutement des professeurs des écoles. 
 Ce qui ne permet pas vraiment à la profession de faire face à son inconscient social, chaque formateur étant « formé » à ce métier, c'est-à-dire ayant proprement incorporé les dipositions fondant cet inconscient à le demeurer. 
 Mais qui ne peut être considéré comme valide que pour les enfants ayant une déficience (ou, dans le cas où ils ne présentent pas de déficience, sont porteurs de troubles rendant difficile la socialisation, ce qui est loin dêtre le cas pour tous les élèves concernés). 
 Confère supra, 2.1.3. 
 Et de lintégration, dont elle prend suite, et qui a vu la genèse du poste dAVS  confère sur ce point le chapitre suivant. 
 Par cette précision nous souhaitons signifier que nous noublions pas les parents et les classons également parmi ceux qui sont « en premier lieu » concernés. 
 Quil faudrait confirmer ou infirmer par des recherches sur les procédures propres aux (et le fonctionnement des) CDAPH. 
 Il est à noter par rapport à cette remarque que les effectifs denseignants spécialisés ont diminué en une quinzaine dannée denviron 20 000 postes. 
 Cest une confusion opérée par les fondateurs de lUNAISSE (union nationale pour lavenir de linclusion scolaire, sociale et éducative), association qui défend lidée de la création dun métier spécifique dAVS. 
 Ca ne peut être quune esquisse, seule une recherche spécifique pourrait prétendre à dépasser ce stade
 Avec lélève. 
 Selon lexpression de Charles Péguy.
 Nous souhaitons rappeler ici, contre limaginaire collectif et le sens commun en matière de représentation du handicap, que, des (environ) 170 000 élèves handicapés scolarisés en milieu ordinaire en 2008-2009, seuls 1% sont en fauteuil roulant, et plus de 70% sont concernés par des « troubles cognitifs ou mentaux ». (Source : DGESCO, Education Nationale  dont nous utilisons ici la classification.)
 LAPAUW Régis. (1969) Educateurs
 inadaptés. Paris : EPI. 
 Il serait à ce titre tout à fait intéressant de se pencher sur la réception dans le milieu professionnel de léducation spéciale, de la réforme de la formation des enseignants, dite « masterisation ». 
 Une analyse comparative des modalités et formes de mobilisation politique des enseignants et des éducateurs serait à ce titre tout à fait intéressante. 
 Si on excepte les années 1950, décennie dans laquelle, « pour des raisons sociopolitiques », elle a été mise à lécart, avant de retrouver une place importante dans les années 1960 (Plaisance, 1999). 
 Par les ouvrages notamment de Michel Foucault, Robert Castel, Pierre Bourdieu, Jacques Donzelot, etc. 
 Confère chapitre 1, 1.3.3. 
 Progrès ou maintien déguisé de processus ségrégatifs par le biais de mécanismes deuphémisation sans cesse plus affinés et sophistiqués, on le voit, le débat sur la nature des évolutions politiques depuis les lois sociales de la troisième république trouve de multiples échos, et le positivisme du 19ème siècle, contre lequel se positionne Jacqueline Gateaux-Mennecier, de nombreux avatars. 
 « Rémanence moderne », ajoute Jacqueline Gateaux-Mennecier, « de la proximité idéologique misère/anormalité, que des catégories de pensée comme le handicap social, formulation hétéronymique, nourrissent encore avec une force insidieuse de nos jours ». On trouve dans le présent travail un écho de cette importante question : 1.4.3, Handicap et difficultés scolaires.
 Cette position de Jacqueline Gateaux-Mennecier rejoint celle qui se dégage des travaux dune chercheuse britannique Sally Tomlinson (cités par Eric Plaisance, 1999), qui se propose de « repérer les processus sociaux à luvre quand une partie dun système déducation de masse dans une société industrielle se développe comme spéciale plutôt que comme normale. »
 En langue anglaise, essentiellement (pour des raisons évoquées infra), mais aussi en langue française, (avec Charles Gardou, autour de la revue Reliance, ou avec Serge Thomazet, par exemple) et particulièrement, pour des raisons historiques, au Québec.
 Circulaire n°99-187 du 19/11/1999
 Loi du 2 janvier 2002 de rénovation de laction sociale et médico-sociale. 
 Il est par exemple absent de la loi du 11 février 2005, pour des raisons quil conviendrait danalyser. 
 BELMONT Brigitte, PLAISANCE Eric, VERILLON Aliette (2006) Accompagnement et intégration scolaire. Politique, pratiques et acteurs. Contraste, la revue de lANECAMSP, n°24, pp.247-266. Il semble ici que Belmont, Plaisance et Vérillon soient centrés sur lémergence de laccompagnement scolaire à un niveau national, au sein dun dispositif qui lest aussi, et non sur les origines historiques, plus locales et différenciées, de cette pratique, qui justifient que nous parlions de « quasi-synchronisation » entre émergence de lintégration scolaire et émergence de laccompagnement. (Sur ce point, confère 3.2.2.)
 On trouve dans la Revue dethnologie française (juillet-septembre 2009), tome XXXIX, n° 3, consacré au handicap (« Handicaps, entre discriminations et intégration), un article de Henri Jacques Stiker où il analyse la CIFH de 2001 comme « un modèle manifestant une anthropologie comportementaliste et adaptatrice » où les personnes apparaissent comme des « usagers consommateurs »  (Plaisance, 2010, notes de lecture de la revue Alter, vol. 4, n°2, avril/juin 2010, pages 148-152), consacrant ainsi une « élision du sujet », selon ses propres termes. 
 Mais il faut également mentionner le poids de lépoque et de la conception du métier denseigner qui lui est concomitante : le cadre symbolique du métier na guère évolué depuis les premières éditions du fameux « code soleil » par le syndicat national des instituteurs. La classe est le lieu où le maître ou la maîtresse nont pas de compte à rendre, et ne serait-ce que penser des modes de coopération avec des personnes extérieures semble alors éminemment difficile. Actuellement, et malgré les évolutions, cette problématique reste très vive (voir chapitre 2 et infra, 3.3.2.3). 
 Lisible sur le site de la FNASEPH
 Quil connaît par ailleurs, ayant grandi dans le même canton. 
 Monsieur P. est instituteur depuis 1962 (il passe son CAEI et devient instituteur spécialisé en 1968). Après quatre années en classe de perfectionnement et une en SES, il devient instituteur dans un établissement de rééducation et de réadaptation fonctionnelle (détaché de lEN). En 1981, il suit la formation de directeur détablissement spécialisé. Il fait partie des administrateurs de lAPAJH de son département de 1970 à 1997. 
 AFM, association de parents denfants déficients visuels ou aveugles, une association de parents denfants IMC, lAPF, lassociation spina-bifida et lassociation handicaps associés. 
 Sur ce point, confère infra : 3.3.2.3. 
 Plus tard, les évolutions de laccompagnement que connaît ce département seront très critiquées, notamment par la FNASEPH. Le nombre dauxiliaires dépasse en effet les 500 en 1998  alors même que tout le département nest pas couvert puisque les mairies sont employeurs : leur volonté de recruter est donc conditionnelle , là où la plupart des départements ne connaissent quune ou deux dizaines dauxiliaires. Un tel décalage est dû au fait que, ainsi que lexplique Monsieur P., « tout projet dintégration scolaire semble se solder par une embauche quasi-automatique dauxiliaire ». Cette quasi-automaticité est perçue par la suite par beaucoup comme contraire aux objectifs même de laccompagnement, à savoir une intervention préparée, pensée, non automatique, et réversible. 
 Bourdieu Pierre (1996) Sur la télévision. Paris : Raisons dAgir. 
 Un travail de sociologie sur les parents à lorigine de ces associations, puis à lorigine de la FNASEPH, contribuerait certainement à éclairer la position de cette organisation dans le champ associatif du handicap, et de fait à rendre ce dernier plus intelligible  travail qui nous paraît tout à fait urgent et nécessaire.
 En 2008, les associations nationales membres de la FNASEPH sont Trisomie 21 France (ex Geist 21), FGPEP, UNAPEI, AFM, Autisme France, Avenir dysphasie France, Anpea, GIHP, Unapeda, Unaïsse.
 Il serait tout à fait intéressant deffectuer une recherche sur le sujet des relations entre ces deux grandes associations que sont lUNAPEI et lAPAJH avec la FNASEPH, ainsi que leur positions vis-à-vis de la scolarisation des enfants en situation de handicap. Confère conclusion générale. 
 Belmont, Plaisance & Vérillon mentionnent le fait que des débats ont eu lieu entre associations sur la question de la tutelle envisagée dans le cas dun financement de lEtat des emplois dAIS. Ce débat portait notamment sur le fait de savoir si lEducation Nationale était bien placée pour devenir tutelle de ces emplois, dans la mesure où « des initiatives [avaient] été prises dans le cadre privé, médico-social, pour assurer une formation et un encadrement des AIS ». On retrouve ici le clivage historique de défiance entre spécial et scolaire, avec des associations de parents certes militant pour la scolarisation en milieu ordinaire mais imprégnés de la tradition du privé associatif propre à léducation spéciale qui se méfie toujours (à juste titre ou non) des capacités de ladministration publique, et surtout celle de lEN, à endosser des responsabilités dévolues historiquement au champ du spécial. 
 Missions publiées dans le bulletin officiel de lEducation Nationale de 1998. 
 Lanalyse de ces documents et leur contribution à la délimitation de la pratique des AVS au seul registre individuel serait intéressante. 
 « Emplois jeunes : conditions demploi des aides éducateurs »
 IRIS initiative est une association qui a été créée en 1991 sur la base dun partenariat entre une association consacrée à linformation autour du  syndrome de Rett et EDF-GDF. Ainsi que lexplique le site référencé plus bas, IRIS initiative est née « du concept du soutien d'une uvre humanitaire émergente et sans moyens par un grand réseau tel qu' EDF GDF qui peut lui donner rapidement l'impulsion nécessaire à sa réussite tout en se constituant une image "d'entreprise citoyenne" ». On le voit, cette association mériterait à elle seule une recherche spécifique. . HYPERLINK "http://intescol.free.fr/ASSOCOLLECTINTEGR/IRISINITIATIVE/irispresentation.htm"http://intescol.free.fr/ASSOCOLLECTINTEGR/IRISINITIATIVE/irispresentation.htm    
 Seuls les emplois des AIS sont financés dans le cadre de cette convention ; lencadrement et les frais de fonctionnement nétaient eux pas pris en charge, et ont été financés par des subventions de conseils généraux, de municipalités et de Ddass, « partenaires les plus favorables et fidèles » (Paumier, Lagisquet & Philbert, 2009).
 Ils sont tous trois membres fondateurs, respectivement actuel secrétaire général, ancien président et actuel président dhonneur, et actuelle présidente de la FNASEPH. 
 Dont je fais partie. 
 « Professionnalisation » est un terme ambigu dans lusage officiel : il traduit ainsi le plus souvent non la création dune profession (comme on pourrait le supposer) mais lamélioration de linsertion professionnelle au terme du passage dans la fonction dAVS, qui reste ainsi, dans ce cadre, une fonction précaire et non professionnelle. « Nous travaillons à la professionnalisation des AVS » signifie ainsi : pas question de créer un métier, mais daméliorer la sortie du dispositif. 
 Cest dans ce cadre que Marie Anne Montchamp a parlé, tel un patron, du « stock » de personnel que constituaient les AVS en poste. Sur ce procédé langagier de réification (absolument) pas anodin, confère supra, 2.1.3 La conception de lorganisation sociale promue par linclusion.
 Cette convention concernait potentiellement environ 1500 AVS-AED (et pas les EVS en poste dAVS-i), recrutés en 2003 et étant arrivé au terme de leur contrat. Ces AVS-i pouvaient être recrutés par des associations avec un financement de leur poste par lEN. Pour diverses raisons, seulement 70 reprises ont été actées. Les signataires de cette convention étaient : FNASEPH, UNAPEI, Autisme France, Fédération générale des pupilles de lenseignement public (FG-PEP).
 Comité national consultatif des personnes handicapées, créé avec la loi de 1975. En loccurrence, les organisations syndicales concernées sont des fédérations : lUNSA et la FSU. 
 Direction générale des affaires sociales, devenues direction générale de la cohésion sociale. 
 Direction générale de lenseignement scolaire. 
 C'est-à-dire intervenant potentiellement non seulement à lécole mais également dans les structures de la petite enfance, sur les temps périscolaires et dans les centres de loisirs. 
 Associations qui occupent toutes, à divers degré, des positions marginales dans le champ associatif du handicap. 
 Ce métier, intervenant dans le secteur du service à la personne et de laide à domicile, répond dun diplôme détat (le DEAVS) qui sanctionne une formation de neuf mois, de niveau V (CAP-BEP). En juin 2006, la CFDT avait déjà proposé la fusion de la fonction dAVS-i au sein de la profession dAVSociale, après avoir réuni à son siège à Paris des représentants des deux fonctions.
 Les SAAD sont depuis quelques années, et de plus en plus, en grandes difficultés financières. Larrivée des AVS en leur sein permettrait de rétablir un équilibre budgétaire. 
 Soient :  UNA, CSF, ADMR et ADESA. 
 Les SAAD relèvent du secteur non-marchand. Leur activité dépend de lagrément des conseils généraux. Les services à la personne (SAP) relèvent du secteur marchand et dépendent de la délivrance dun « agrément qualité » (loi Borloo de 2005) délivré par la direction départementale du travail, de lemploi et de la formation professionnelle (DDTEFP)  c'est-à-dire par le préfet. SAAD et SAP forment ensemble le secteur dit daide à la personne. 
 Tiré de Bailleul Marc, Bataille Pascal, Lanoë Céline, Mazereau Philippe (2010) Ecole et handicap. Paris : Sudel, page 32. Construit à partir dune recension du terme AVS entre 2002 et 2007 « dans les quotidiens français suivants : Le Monde, Les Echos, Libération, Le Figaro, LHumanité, La Croix, LEquipe, Ouest-France. » 
 DAVS-i, le plus souvent, mais également, dans certains départements (notamment dans les Hauts-de-Seine), dAVS-co. 
 Cette formulation est une caricature, délibérément provocatrice. 
 Il manque à cette partie la référence à des travaux sociologiques sur la population qui occupe des postes réservés à des contrats aidés par létat. Nous disons « a priori » afin de marquer ici le fait que ce versant manque à lanalyse. 
 Pour nous cest bien ce dernier point qui pose problème, et non pas le fait que des personnes éligibles à des contrats aidés aient la possibilité doccuper le poste. 
 La liminalité est une notion développée à lorigine par Arnold Van Gennep, et reprise ensuite par lanthropologue Robert Murphy, à la suite dun accident qui la immobilisé dans un fauteuil roulant. Plus récemment, Alain Blanc a particulièrement développé lanalyse autour de ce concept. 
 A ce propos, Sally Tomlinson écrit : « The common-sense assumption that only the lower classes produce dull children was assisted by the ability of upper and middle classes to provide privately for their dull and defective children. » (Tomlinson, 1982). En réalité, cette surreprésentation sociale concerne essentiellement, on le devine, les territoires du handicap qui ne relève pas de déficience avérée mais qui sont caractérisés par  une  grande variabilité des processus de dénomination. 
 Notre analyse ne présume pas dune intentionnalité.
 Consultable sur le site du Sénat :   HYPERLINK "http://www.senat.fr/questions/base/2009/qSEQ09120738S.html" http://www.senat.fr/questions/base/2009 ... 0738S.html
 Sur la question de lautonomie, voir chapitre 4. 
 Le mort saisit le vif, ARRS n°32/33. 
 Comme lécrit Jean-Jacques Rosat en 2009 : « Si vous affirmez que telle théorie en physique ou en biologie doit la reconnaissance dont elle jouit non à sa vérité mais à divers facteurs sociaux et historiques que vous vous faites fort dexhiber, vous assurez la supériorité de votre discours sur les sciences en question sans avoir besoin de rien en apprendre sérieusement ». Ici, nous ne nous attachons pas à établir les caractères de validité, de progression ou dévolution des connaissances (et des catégorisations qui en découlent) à propos de lenfance handicapée  pour désamorcer le risque pointé ci avant, il nous importait de le préciser. 
 Que nous ne restreignons ni au spécial ni au scolaire ni à léducation populaire, mais bien plutôt tout ces champs à la fois. 
 Nous tenons pour essentiel le fait de préciser que la place de lAVS-i dans la classe nest que potentiellement subversive, et seulement potentiellement porteuse dune remise en cause de lordre pédagogique.
 Dans certains départements, ce poste de coordinateur a également récupéré lencadrement des EVS en poste dAVS. 
 Commission de circonscription du pré-élémentaire, antichambre de la commission départementale déducation spéciale (CDES), créées toutes deux par la loi de 1975 dite en faveur des personnes handicapées, et supprimées par la loi de 2005. 
 De ce point de vue, le poste dAVS-i sinscrit dans une histoire des postes non enseignants à lécole  histoire qui, sauf erreur de ma part, reste à faire. 
 Lire Nathalie Bellanger, 2002. 
 Il manque à ce travail un recueil de la parole des élèves : revendiquer les conditions de possibilités quils soient, au niveau des dispositifs légaux et des politiques qui les inspirent, considérer comme des sujets, et non réifiés comme ils le sont trop souvent, nous oblige à le mentionner. 
 Cette notion dintérêt (et de « besoin », qui en est afférente) est abordée dans le chapitre 4.
 Et même des individus au sein dune de ces catégories : il y aune grande variabilité interindividuelle au-delà du partage dune « étiquette » - et si nous le rappelons ici, cest que nous estimons que ces catégorisations sont souvent reçus sur un mode essentialisant, essentialisant ainsi les individus qui en relèvent (et pas seulement par le sens commun). 
 Confère introduction, (3.3) et les tableaux présentant les parcours daccompagnement. 
 Ainsi quaux processus dincorporation de lordre social  et scolaire. Dans lextrait proposé, G. est un petit garçon dont Pascal dit quil a des « troubles autistiques ». 
 Qui est également lAVS-i qui entretient le rapport le plus distancié avec le territoire sur lequel elle travaille. Confère introduction, 3.3. 
 Il nest pas question ici de juger de leur validité ou de leur invalidité. 
 Louvrage « Le temps des servitudes » (2005, Rennes, Presses Universitaires de Rennes), dAnne-Laure Bazin et Serge Bersold, pourrait constituer une partie importante de cette nécessaire formation. 
 Elle y consacre même une partie du chapitre 5, ainsi titré : « Position of parents, pupils and teachers in special education ». Dans la présentation de ce chapitre, elle écrit ceci, qui à plusieurs égards nous semble toujours valide : « Despite the rethoric of parental involvement, parents are often associated with incompetency and are inadequatly involved. » 
 ESN : educational subnormal. On distingue, dans le Royaume-Uni du début des années 1980 : «ESN, ESN-M, (mild), ESN-S (severe) » tryptique qui rappelle étrangement  celui de « imbécile, idiot, crétin » ou « débile léger, moyen, profond ».  
 Rapporté à la situation française et à lorganisation de son système éducatif, ce dernier point mérite dêtre nuancé : quon pense aux agents territoriaux spécialisés pour lécole maternelle (ATSEM), ou aux « dames de la cantine », qui constituent des groupes (ou un groupe) parmi les plus dominés de tous les groupes prenant part au système éducatif français  et qui sont aussi un point aveugle des recherches en éducation.  
 Ce qui signifie que cette attente nest pas systématique, et probablement socialement différenciée. 
 Nous pourrions dire (dans loptique déviter une réception malheureuse de lévocation de « léducation familiale » - qui nest peut-être pas le meilleur terme à utiliser ) que le poste dAVS-i est potentiellement un poste déducateur qui peut induire de la part de son occupant que ce dernier ne considère pas la rupture et le surplomb avec les parents comme un fondement de sa position (nous insistons sur le « potentiellement », et relativement à ce que déclare Julie, qui livre des éléments contradictoires à ce sujet puisquelle affirme se sentir proche de la position des parents mais, en même temps, considérer cette proximité comme une dévaluation de sa légitimité à sexprimer). Autrement et plus simplement dit : les AVS-i travaillent autant avec les enfants quavec les élèves  là où les enseignants ne travaillent a priori quavec des élèves. 
 « Importante » au regard de son histoire, bien entendu. 
 Elle avait été agressée à de multiples reprises par la maman de la petite fille quelle accompagnait. Cette dernière avait fini par être placée en famille daccueil. Noémie a été très marquée par cette expérience  à son évocation, lémotion resurgit rapidement, et est encore palpable. Noémie est également la seule des trois anciens recrutés à ne pas être une initiée préalable à son entrée en poste. 
 Concernant ce sujet, voir supra, 2.2.1.2 Les professions enseignantes et linclusion. 
 Confère infra, 3.3.2.3 Du côté de lécole, les enseignants. 
 Dans 13 accompagnements sur 15, Cécile a travaillé entre la maternelle et le CP. Elle a accompagné seulement un enfant en CE1 et un autre en CE2. Confère introduction, 3.3. 
 Alors que certains AVS-i peuvent navoir travaillé que dans le secondaire, et ont ainsi moins de chances de  percevoir lexception que constitue leur parcours daccompagnement. 
 Il est très important de remarquer lélément suivant, qui concerne les anciens recrutés, et que rappelle Pascal : « je ne suis pas sûr quil y a eu un enseignant avec qui jai bossé qui avait eu un AVS-i dans sa classe
 » (Page 34). A contrario, les néo-recrutés ont beaucoup plus de chances (et de plus en plus) de travailler avec un enseignant qui a déjà eu un AVS-i dans sa classe  et de fait, ces mêmes néos recrutés ont plus de chance de voir leur positionnement influencé par les enseignants qui souhaiteront soit reproduire soit être en rupture avec des expériences précédentes. Lalie : «  mais [cet enseignant] a lhabitude de travailler avec des AVS-i parce que lannée davant il en avait déjà eu un (...) » (Page 43)
 Et qui concernent dailleurs également le système denseignement de lenseignant, la dynamique du groupe classe, celle de lécole, etc. 
 Il est possible à ce propos de formuler lhypothèse selon laquelle un accompagnement délivré par un AVS-i peut contribuer à ce que les enseignants, plus ou moins consciemment, désinvestissent (à des degrés divers) le travail individuel avec lélève accompagné y compris (et surtout) dans les temps où lAVS-i nest pas présent. 
 Recherche qui prenne en compte les apports du présent travail, notamment en matière de mise en exergue des périodes de recrutement différencié des agents en poste dAVS-i. 
 Nous entendons par là la partie du système denseignement qui concerne la façon pour lenseignant de se positionner face aux dynamiques du groupe classe
 Ceci même si un processus de formalisation et de mise en procédures de la pratique inhérente au poste soit en possibilité dannuler ou de rendre impossible une partie des caractéristiques de la pratique de Pascal. 
 Nous entendons ici, en utilisant lexpression polysémique d « éducation populaire », les actions d'éducation, inscrites dans le temps extra scolaire et plus précisément dans lensemble des structures collectives type centre de loisirs, centre aéré, centre socio-culturel, etc. 
 Il est frappant de constater que les intellectuels ayant travaillé sur le sujet (qui se traduit socialement par des pratiques professionnelles très marquées en terme de genre, vers le féminin) sont des intellectuelles. A lopposé, les économistes, « séparés par toute leur existence et surtout, par toute leur formation intellectuelle le plus souvent purement abstraite, livresque et théoriciste, du monde économique et social tel quil est, [et ainsi] particulièrement enclins à confondre les choses de la logique avec la logique des choses », sont très majoritairement des hommes qui traiteraient ces sujets, très probablement, avec un dédain affichée (ou ne les aborderaient pas du tout). (Bourdieu, 1998)
 Ceci même si la psychologie nest pas la discipline à laquelle est adossée la pratique des AVS-i : Lise Demailly évoque ici la notion de psychologisation en entendant tout ce que le sens commun a pu récupérer de la diffusion des théories psychologique dans la société  certaines notions initialement strictement théoriques sont devenues des mots à usages courants, et témoignent ainsi de cette diffusion (qui consacre également des phénomènes de traduction et de dévoiement du sens initial des notions.)
 Une analyse spécifique utilisant les notions de mandat et de demande est développée infra, 4.3. 
 Ca nest pas le cas pour les néos recrutés, ainsi que le présent travail sest attaché à démontrer. 
 Message et fil de discussion consultable à cette adresse :  HYPERLINK "http://dcalin.fr/phpBB/viewtopic.php?p=3161#p3161" http://dcalin.fr/phpBB/viewtopic.php?p=3161#p3161 
 Louvrage de Maëla Paul procède dune analyse beaucoup plus fouillée et profonde de cette notion, il nous apparaît nécessaire de le signaler ici. 
 Ce qui questionne la notion de « besoins » et fait émerger linterrogation suivante : qui lAVS-i accompagne t-il ?  Sur ce point confère infra, 4.4.
 Sur ce point, confère supra, 3.3.2.3. 
 Certains dentre eux étaient peut-être déjà AIS avant de devenir AVS. 
 Quand elles existent étant donné, nous lavons ici démontré, quelles ne sont que potentiellement activées, et le sont par des conditions sociales doccupation du poste qui restent à explorer plus avant, mais qui comportent des éléments nécessaires quoique non suffisants comme la durée doccupation.
 Une question importante est soulevée en matière de périmètre de la professionnalité potentiellement inscrite dans le poste dAVS-i par le fait que les élèves handicapés ne sont pas les seuls élèves à connaître lirruption de limpair  cest probablement là une des propriétés des élèves qui sont potentiellement concernés par la notion de « besoins éducatifs particuliers ». Face à un impair qui concerne un autre élève que celui quil accompagne, que fait lAVS-i ? 
 Le tableau reproduit ci-dessous est extrait de : Lise Demailly (2009) Fortune et ambiguïté de laccompagnement. 
 Cest nous qui rajoutons la colonne mandat et demande. 
 Au travers de lanalyse que nous allons ici développer, nous allons vraisemblablement nous éloigner du sens donné à la notion de « mandat » par Hugues (1992), que cite Lise Demailly et sur lequel elle sappuie. 
 Confère les circulaires suivantes :  HYPERLINK "http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page107.htm" \l "intervention" 2003-092.du 11 juin 2003 et  HYPERLINK "http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page133.htm" \l "intervention" 2003-093.du 11 juin 2003 (dont est extrait les quatre points ici cités), ainsi que le (très bon) site suivant :  HYPERLINK "http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page798.htm" http://scolaritepartenariat.chez-alice.fr/page798.htm.
 Nous avons pu constater au point 1.4.4 à quel point le PPS était souvent, et au moment de lenquête, une fiction. 
 Pour lenseignant et/ou lAVS-i, il peut même devenir un « mauvais objet ». 
 Sur ce point, confère 4.4.1. 
 Ce que précisément le député Guy Geoffroy désignait (sans se rendre compte de toutes les implications) dans son rapport en 2006 quand il disait que recruter des personnes au chômage de longue durée pour travailler sur le poste dAVS-i était une « idée juste et généreuse » : juste et généreux car, potentiellement, loccupation du poste peut contribuer à re-narcissiciser des personnes dont la confiance en eux a été malmenée par la violence du marché de lemploi, entièrement soumis quil est, et de manière grandissante, à lidéologie néolibérale. Leffet peut également être tout à fait inverse. 
 Il est un élément important à souligner à ce propos : si la ségrégation doit, par principe, tentée dêtre évitée, il nen reste pas moins que certains de ses avatars (ou pouvant être considérés comme ses avatars), aux vues des effets de lhistoire sédimentée du traitement social du handicap, peuvent fournir aux élèves handicapés des conditions plus sécurisantes et respectueuses de leurs rythmes quune inclusion systématique mal ou quasi impensée, qui peut avoir des effets proprement maltraitants. En particulier, la socialisation par les pairs constitue une possibilité de cadre éducatif qui ne doit pas être rendue impossible par un refus obstiné et aveugle de toute forme de ségrégation  étant bien entendu que cest, de notre point de vue, la systématicité des réponses et des orientations séparées qui fonde la ségrégation. Conserver un large panel de possibilités de cadre éducatifs (y compris, donc, le regroupement entre pairs) répondant potentiellement aux besoins et à la demande des élèves (qui doit être particulièrement travaillée) ne procède en rien de notre point de vue de phénomènes ségrégatifs. Lire à cette aune lévolution imposée aux CLIS et UPI ouvre bien des pistes danalyse. 
 Nous pourrions dire, en reprenant les analyses de Francine Muel-Dreyfus, que cest ici le poste qui simpose à lindividu, et que dans lexemple suivant, cest lindividu qui simpose face au poste. 
 Nous pouvons constater, en introduction (3.3, tableaux des parcours daccompagnement), que la durée moyenne daccompagnement de notre échantillon dAVS-i est de 1,3 an, que lécrasante majorité des accompagnements ne dure quune année scolaire, et quun nombre non négligeable daccompagnements (4 sur 49, soit 8%) ne durent que quelques mois, ce qui questionne fortement la nature et la qualité du lien relationnel mis en place. 
 Dun double point de vue (éthique et psychanalytique), le fait que la non réciprocité de la relation ne soit pas un problème (voire même quelle soit, dans la perspective qui fonde léconomie générale du mandat, un élément positif) ouvre bien des perspectives danalyses  notamment pour fournir des modèles explicatifs aux situations de conflits « durs », déchec et de situations à caractère maltraitant (tout aussi bien pour les enfants que pour les personnels). 
 Auquel il convient de ne pas réduire lensemble de lanalyse, mais dont on ne saurait faire non plus léconomie. 
  HYPERLINK "http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-58837QE.htm" http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-58837QE.htm 
 Dialogique au lieu de « dialectique » dans le sens Hégélien, puisque la dialectique Hégélienne implique la disparition des deux termes au profit dun dépassement, ce qui nest pas lobjet de notre raisonnement ici. 
 A sa décharge, elle nest pas faite pour être opérante à toute forme de dépendance, mais seulement pour les formes relatives à lobjet de son livre, les personnes déficientes. 
 Avec des effets puissants consécutifs à cette catégorisation, tout à la fois en termes de destin social quen termes de réponses interindividuelles données dans les conditions démergence possible dune forme de socialisation par ceux, nombreux, qui, ayant trop lu Alain Blanc  ou trop imprégnés de ce sens commun quil décrit comme une règle absolue et indépassable , nessaieront rien et préfèreront ne pas échanger avec cette fille « spéciale ». 
 Selon le titre dun ouvrage dEric Plaisance (2009) Autrement capables. École, emploi, société : pour l'inclusion des personnes handicapées. Paris : Autrement. 
 La violence symbolique résulte dun « pouvoir qui parvient à imposer des signification et à les imposer comme légitimes en dissimulant les rapports de force qui sont au fondement de sa force ». Bourdieu  Pierre, Esquisse d'une théorie de la pratique, Paris, Droz, 1972, p.18.  Pour consulter des éléments plus accessibles sur la notion de violence symbolique, voir également :  HYPERLINK "http://www.homme-moderne.org/societe/socio/bourdieu/lexique/v/violencesymbolique.html" http://www.homme-moderne.org/societe/socio/bourdieu/lexique/v/violencesymbolique.html, ou encore :  HYPERLINK "http://www.dailymotion.com/video/x884r_la-violence-symbolique_news" http://www.dailymotion.com/video/x884r_la-violence-symbolique_news. « C'est une "violence": elle se traduit donc par une imposition, un pouvoir sur des destinataires. C'est une violence "symbolique": ce qui est imposé ce sont des significations, des rapports de sens. C'est une violence symbolique "arbitraire" (
) C'est une violence symbolique culturelle "légitime" dans la mesure où elle apparaît, par une opération de méconnaissance instituée, comme "destinée" à certains à l'exclusion d'autres et comme ayant une valeur reconnue par tous. » (Pris ici :  HYPERLINK "http://www.barbier-rd.nom.fr/violencesymbolique.html" http://www.barbier-rd.nom.fr/violencesymbolique.html )
 Ce qui renvoie à nouveau à la question des besoins et de la « demande ». 
 Nous souhaitons préciser quil sagit de domination sociale objective, à son corps défendant parfois, et non consciemment exercée. 
 Sur ce dernier point, confère les travaux de Michel Charlot et Monique Pinçon Charlot. 
 Décret dapplication à la loi n°2005-102 du 11 février 2005 et quil a donc fallu attendre quatre ans pour voir émerger. 
 De ce point de vue, linclusion ne doit être abordée par une pensée relationnelle tissée entre les trois entrées présentées en 2.2.2. 
 « Linfirmité, ou déficience, ou non-conformité à la bonne et habituelle forme, constitue un lieu où se nouent des peurs, des fantasmes, des images qui se relient à une représentation de lespèce, des dieux, de la génération, de la sexualité, et forme bien un noyau symbolique ». (Stiker, 2001) De plus, il nous semble extrêmement intéressant de sintéresser à produire une sociologie de la doxa des classes dominantes à propos du handicap et des ses manifestations  ce qui pourrait contribuer à éclairer le traitement politique et social quelles construisent. 
 Aucun autre acteur du processus de scolarisation, à lexception des parents, ne passe autant de temps avec les enfants : les interventions des professionnels socio-éducatifs ou médico-sociaux se limitent le plus souvent à quelques heures par semaine. 
Université de Nantes  UFR Lettres & Langage  Département de Sciences de lEducation  Master 2 recherche en sciences de léducation et de la formation  Guillaume Bourget  Juillet 2010
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