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L2 Histoire ? UEC 33 EC1, partie Antiquité ? corrigé de l'examen du ...

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L2 Histoire – UEC 33 EC1, partie Antiquité – corrigé de l’examen du 23/11/07
Commentaire de texte : Polybe, Histoire, III, 31-32
(L. Baurain-Rebillard)

N.B. Ce corrigé est volontairement détaillé, afin d’être utile à tous en couvrant l’ensemble de ce que j’ai lu dans les copies. Il est bien évident que je n’attendais pas quelque chose d’aussi développé. Vous noterez d’ailleurs que j’ai glissé des remarques explicatives – hors plan – à plusieurs endroits, introduit des renvois à d’autres passages de Polybe (pour compléter l’éclairage) et parfois indiqué plusieurs possibilités (comme pour l’entrée en matière, où une seule phrase suffisait ; j’en propose plusieurs pour donner des pistes et tenter de vous sensibiliser à cet aspect de méthode…)

INTRODUCTION
Une entrée en matière
par exemple : Polybe entre historiographie grecque et historiographie romaine…
ou Polybe vu par certains comme le plus grand historien antique, un peu la synthèse d’Hérodote et de Thucydide (mais avec la dimension morale en plus)…
ou Polybe beaucoup lu dans l’Antiquité, mais aussi beaucoup pillé et pas mal dénaturé puisque ceux qui l’ont utilisé (et qui, pour des pans entiers, nous sont seuls parvenus, au détriment du texte de Polybe) ont repris les faits mais guère ce qui les accompagnait, alors que, pour Polybe, « ceux qui écrivent l’histoire, aussi bien que ceux qui la lisent, doivent appliquer leur attention moins au récit des faits eux-mêmes qu’à ce qui précède, à ce qui accompagne et à ce qui suit les événements proprement dits » (= début du passage)
ou sur les considérations méthodologiques chez les historiens antiques : à peine quelques remarques en passant chez Hérodote, le « père de l’Histoire », tandis que Polybe, 3 siècles plus tard, y revient à de très nombreuses reprises
ou encore quelque chose de plus général, voire un peu philosophique — mais ce genre de réflexion rejoint en fait celle de Polybe – sur le rôle de l’histoire et de l’historien au sein d’une société, sur leur « utilité », laquelle n’est pas forcément immédiate ni matérielle… (le « profit pour l’avenir », l. 12 ; « l’enseignement » à « apporter », l. 10)
et bien d’autres possibilités encore, que votre intérêt personnel pour l’histoire doit vous permettre de trouver sans trop d’effort…
Présentation de l’auteur et de l’œuvre
Il n’est pas indispensable de tout détailler, mais au moins ce qui figure ci-dessous en gras, voire également ce qui est souligné:
Les dates de Polybe : né vers 208, mort vers 126 av. J.-C.
Et signaler au moins qu’il était grec (éventuellement préciser davantage, cf. ci-dessous)
Les événements décisifs de sa vie : Arcadien (né à Mégalé/opolis), issu de la riche aristocratie locale, il a reçu une formation politique et militaire afin d’assumer des fonctions importantes dans le cadre de la Ligue (ou confédération) achéenne ; il est hipparque en 170/69 (c’est-à-dire le n° 2 de la Ligue) ; personnage éminent, il fait partie du millier de notables achéens déportés en Italie comme otages par les Romains, soucieux de s’assurer de la docilité de la Ligue après leur victoire de Pydna sur les Macédoniens. Cet exil durera de 167 à 150, des années passées à Rome, grâce à la protection de Scipion Emilien, qui introduit Polybe dans son cercle d’intellectuels et de politiques, des années au cours desquelles Polybe put également faire des voyages (Sud de l’Italie, Gaule, Espagne). Autorisé à regagner le Péloponnèse en 150, il retournera auprès de Scipion Emilien pour le conseiller au moment du siège de Carthage (3e guerre punique), puis s’emploiera à faire accepter l’ordre romain dans le Péloponnèse après le sac de Corinthe (146) et fera encore d’autres voyages.
Son œuvre : auteur de plusieurs ouvrages, mais le seul à nous être parvenu (quoique très incomplet) et le seul qui relève de l’histoire : l’Histoire ou les Histoires
En 40 livres – et c’est un découpage voulu par Polybe (cf. texte l. 16 !)
Répartis en deux ensembles, dont seul le 1er (de loin le plus volumineux) avait été d’abord programmé, sur la période 220-168 (assortie d’un préambule – la prokataskeuè – s’étendant de I, 5 jusqu’à la fin du livre II, sur la période 264-220) : histoire de l’expansion romaine, sur l’ensemble de l’oikouménè, de la 2nde guerre punique jusqu’à la 3e guerre de Macédoine
2e ensemble (les 10 derniers livres) sur la période 168-146, afin de montrer les conséquences des conquêtes de Rome
Date de composition :
en ce qui concerne l’œuvre dans son ensemble, il a été établi que la première partie, pour l’essentiel, a été rédigée à Rome, pendant les années d’exil, tandis que les dix derniers livres sont postérieurs à 150 ; cependant, même si notre extrait se situe au livre III, Polybe y évoque ses 40 livres (l. 16), ce qui implique un remaniement tardif, forcément postérieur à 146 (une date évoquée d’ailleurs l. 20 à propos de la « prise de Carthage »), comme pour d’autres passages portant sur la méthode historique (ainsi la quasi-totalité du livre XII) ; très probablement à l’occasion d’une nouvelle édition de l’ensemble de l’œuvre (cela expliquerait les considérations des l. 13-16 et 23-25)
Situation de l’extrait dans l’œuvre
livre III : peu après le préambule, dans les débuts du récit consacré à la période 220-168 —> une digression méthodologique qui vient interrompre ce récit
Problématique + annonce du plan
par exemple (en rapport avec le plan que je propose ensuite) :
L’Histoire de Polybe rassemble une matière considérable puisqu’elle s’attache à retracer et expliquer l’extension de la domination romaine à l’ensemble du monde alors connu (Méditerranée occidentale, sud de la Gaule, Méditerranée orientale) et sur une période finalement assez longue, puisqu’aux « moins de 53 ans » de la 1ère partie il faut ajouter les 22 ans de la seconde, ainsi que pas loin de 50 autres années avec le préambule. Pourquoi a-t-il voulu embrasser autant dans une seule œuvre ? N’aurait-il pas été plus simple de fragmenter les choses ? et comment a-t-il maîtrisé tout cela ?
On tentera de répondre à ces questions en considérant d’abord le concept d’histoire universelle, tel qu’il le définit pour sa période, se démarquant totalement de ce qui avait été fait avant lui, puis l’importance particulière accordée aux causes et aux conséquences, et enfin son idée d’une histoire utile.

DEVELOPPEMENT
Remarques préliminaires :
Les thèmes repris ci-dessus pour l’annonce des 3 parties étaient à repérer impérativement (et donc à traiter, quel que soit le plan adopté – pour l’agencement de ce dernier, il y avait toutefois plusieurs possibilités). On attendait donc que le développement leur fasse une place importante.
On relève dans cet extrait d’autres aspects, qui ne constituent pas exactement des thèmes dominants : ils donnent en quelque sorte une coloration au texte mais non des lignes de force (lesquelles sont dessinées par les thèmes mentionnés ci-dessus). Cette coloration, cette tonalité, nous renseigne cependant très utilement sur la façon dont Polybe se situe par rapport aux autres auteurs et par rapport au public (donc ces aspects peuvent très bien faire l’objet de sous-parties) : Il a été en butte aux critiques
Il justifie ses choix en expliquant ce qu’apporte sa façon de procéder
Il souligne le caractère superficiel d’autres démarches, leurs faiblesses, leurs erreurs.
Attention toutefois à ne pas trop vous focaliser là-dessus : certes, Polybe critique d’autres auteurs (qui ne sont d’ailleurs ni Hérodote ni Thucydide !!) et il fait la promotion de son ouvrage (cet extrait, je l’ai dit plus haut, accompagne très probablement une réédition d’ensemble), mais, et c’est ce qui importe davantage, à travers cette défense « du nombre et de l’étendue livres » (l. 14), il défend surtout sa position méthodologique pour le thème et la période retenue – que seule une histoire universelle permet selon lui de traiter – et, plus généralement, sa conception de l’histoire, qui doit être utile et ne pas se contenter d’empiler des récits.
L’analyse doit à la fois éclairer et critiquer (la critique s’entendant au sens historique, à savoir une évaluation équilibrée et argumentée), et il faut pour cela s’appuyer sur une lecture attentive de cet extrait, mais aussi sur la connaissance que vous avez du reste de l’œuvre et de la matière qu’elle traite

Un exemple de plan possible
I – La nécessité d’une histoire universelle
A/ Une nécessité liée au sujet
Remarque : pour Polybe, cela ne vaut pas nécessairement pour toutes les périodes et ses critiques ne visent nullement – pas plus dans cet extrait que dans le reste de son œuvre – Hérodote ou Thucydide ; seuls sont attaqués des auteurs relativement récents, ceux qui ont écrit, en ce qui concerne la Méditerranée occidentale, sur la période qui va « depuis l’époque de Pyrrhos jusqu’à la prise de Carthage » (l. 19-20) et, « pour le reste du monde », c’est-à-dire le Sud de la Gaule et la Méditerranée orientale, « depuis la fuite du roi de Sparte Cléoménès jusqu’à la bataille rangée qui opposa sur l’Isthme Romains et Achaiens » (l. 20-23) ; cela correspond, respectivement, aux périodes 272-146 et 221-146, mais, même sans connaître ces événements, vous pouviez comprendre que la matière évoquée ne recoupe en rien celles d’Hérodote ou de Thucydide ; Timée lui-même est ici hors de cause, puisqu’il s’est arrêté à la mort de Pyrrhos, en 272 ; ceux qui sont visés ne sont pas nommés et leurs œuvres ne nous sont pas parvenues, mais on peut songer par exemple à ceux qui ont écrit sur la 1ère guerre punique, comme Fabius Pictor ou Naevius …
• Rappeler quel est le sujet de Polybe (l’extension de la domination romaine à l’ensemble de l’oikouménè, sur la période 220-168, à quoi il ajoute dans son préambule la période 264-220, ainsi que, dans la 2e partie, les conséquences des conquêtes, pour la période 168-146) 
• il poursuit un but de cohérence, afin de reproduire « le cours des événements » (l. 18). Car pour lui, il n’y a qu’un seul cours ! A rapprocher de l’extrait vu en TD (I 4), où Polybe dit que, dans l’époque qui vient de se dérouler, tous les événements se sont orientés dans une direction unique
• également un but d’unité : sans Polybe, celui qui veut s’informer des conquêtes romaines dans leur ensemble doit consulter « les livres des auteurs qui traitent séparément des divers épisodes » (l. 24-25) et il y rencontre donc, « dans la plupart des cas, des versions différentes des mêmes faits » (l. 29-30) (problème évidemment de la partialité des auteurs, écrivant de leur point de vue, qui devait être le plus souvent un point de vue national, en particulier chez les auteurs romains ; Polybe, lui, en embrassant davantage, est sans doute moins exposé à ce risque ; en tout cas, un auteur unique permet d’assurer l’unité de l’ensemble)
B/ La critique des « histoires partielles »
• pour Polybe, les conquêtes particulières, les guerres individuelles ne sont que des « épisodes » (l. 25) d’une histoire à la portée bien plus large :
traiter, comme d’autres l’ont fait, seulement d’une guerre particulière (la 1ère ou la 2e des guerres puniques, menées par Rome contre Carthage, ou bien la 3e guerre de Macédoine – ce que Polybe, qui l’a vécu en tant qu’hipparque de la Ligue achéenne, aurait pu se contenter de faire) ou seulement d’une région (Carthage, la Gaule cisalpine, la Macédoine, le Péloponnèse…), c’est, pour Polybe, « traiter séparément des divers épisodes » (l. 25) —> il ne s’agit pas, pour lui, d’histoires indépendantes
• On pouvait sur ce point critiquer Polybe : tout dépend de la définition du sujet au départ… On peut très bien, par exemple, choisir de raconter l’histoire du royaume de Macédoine ; cela n’implique pas nécessairement de s’intéresser aussi aux guerres puniques (encore que Polybe, dans un autre passage, souligne qu’il y eut malgré tout des interférences…)
C/ La méthode mise en œuvre
Polybe fait son autopromotion en parlant de la « texture continue » (l. 17) de ses 40 livres, et du « récit clair » (l. 18) qu’ils déroulent. Il s’agit bien évidemment de se défendre des critiques (qui ont eu le temps de pleuvoir depuis la 1ère édition) portant sur « le nombre et l’étendue des livres » et la difficulté « à acquérir et (…) à lire » un tel ouvrage
Comment a-t-il fait pour assurer la cohésion d’une histoire universelle portant sur une telle étendue géographique et un nombre d’années certes plus réduit en proportion mais non négligeable ?
—> éclairer le texte en rappelant la structure originale mise au point par Polybe, combinant organisation chronologique et géographique : verticalement, agencement par olympiades, chacune divisée en ses quatre années ; horizontalement, cadre géographique exploré, pour chaque année, d’Ouest en Est, à savoir Italie, Sicile, Espagne, Afrique, puis Grèce et Macédoine, Asie, Egypte ; c’est ce qui apparaît dans le texte, l. 19-23, à propos des événements pris comme point de départ, pour la Méditerranée occidentale (« le cours des événements d’Italie, de Sicile et d’Afrique » [Espagne pas concernée par les événements du préambule]) et pour la Méditerranée orientale (« le reste du monde »).
Relever aussi que la « texture continue » (l. 17) renvoie à l’interdépendance d’événements survenus pourtant en des lieux différents, mais qui tous s’inscrivent dans le cadre de l’affirmation de la puissance romaine (à rapprocher du texte vu en TD, I 4 : Polybe, dans sa préface, affirme qu’il est impossible de comprendre l’époque qui vient de se dérouler « si l’on s’en tient aux histoires particulières » ; « ceux qui s’imaginent qu’à travers les histoires partielles, ils atteindront à une vue d’ensemble correcte sont dupes, à mon avis, d’une illusion »).
Et, même pour ceux qui n’auraient pas cette vision unitaire, Polybe souligne l’intérêt qu’il y a à comparer des événements distincts (mais relevant tous, pour lui, de l’extension de la domination romaine) : « ces historiens ne s’occupent pas des événements qui se produisirent en même temps ailleurs. Or, lorsqu’on les rapproche les uns des autres et qu’on les juge par comparaison, ces événements apparaissent sous un jour tout autre que lorsqu’on les considère isolément » (l. 30-35)
Il s’agit, au moins, d’ « indiquer les rapports de simultanéité » (l. 38-39)
(Transition) Et, de ce rapprochement, Polybe est persuadé que s’imposera le constat que tout est lié et qu’il faut, d’une manière plus générale, dépasser le simple « récit des faits eux-mêmes » (l. 3), pour regarder, aussi, avant et après :

II – L’analyse des causes et des conséquences, bien plus que le récit des faits eux-mêmes
D’abord s’étonner :
A/ Les faits pourtant comptent beaucoup pour Polybe
• rappeler qu’il désigne son œuvre sous le nom de pragmateia, qu’il fait de l’histoire pragmatique, dans la lignée du grand Thucydide
• noter cependant que cet extrait est un texte de la maturité, rédigé alors que toute l’œuvre avait déjà été publiée une première fois. Polybe considère ici les choses avec distanciation, il réfléchit sur l’ensemble de son travail et, plus globalement, sur son rôle
• il fait ces réflexions par rapport à une histoire pragmatique dévoyée, où les faits sont enfilés comme des perles, l’auteur cherchant, non pas l’exactitude et la rigueur, mais ce que nous appellerions, nous, le « succès de librairie » (cf. « séduisant sur le moment », l. 11, « démonstration » mais… « d’éloquence », l. 9-10, alors que Polybe cherche à démontrer, lui, « si ce qui est finalement arrivé devait normalement arriver », donc à répondre à une problématique — on y reviendra dans le III) ; en condamnant l’éloquence en histoire, Polybe pourrait viser Théopompe, maître en la matière, ou ceux qui, plus proches dans le temps, suivent son exemple parce que de tels récits, très rhétoriques, plaisent. À trop traiter les faits pour eux-mêmes, on risque de perdre de vue l’essentiel, de céder à la facilité de l’émotion, du pittoresque et donc ne produire que de l’éloquence
Donc, pour Polybe, importance des faits, mais pas comme une fin en soi ; leur étude doit permettre de répondre à une problématique —> ces faits importent au final moins que leurs causes, leurs circonstances et leurs conséquences. Que nous dit-il de ces catégories ?
B/ Les causes
• Une 1ère formulation assez plate : « ce qui précède » (l. 3), mais reprise juste après par le mot de « causes » (l. 6), qui lève l’ambiguïté ; et, à la fin du texte, mises au-dessus de tout le reste (« le plus important dans le travail de l’historien consiste (…) par-dessus tout, à dégager les causes »)
• Polybe n’innove qu’en partie : les causes étaient déjà importantes pour Thucydide, qui distinguait deux niveaux (causes apparentes et cause réelle). Polybe rajoute un 3e niveau, surtout par rapport à ses prédécesseurs immédiats, qui confondaient début et cause
Ces 3 niveaux n’apparaissent pas dans notre extrait ; on peut toutefois les rappeler (le fait initial, archè, marquant le début de la guerre ; le prétexte invoqué, prophasis, pour la commencer ; la véritable cause, aitia), mais en précisant que cela ne recoupe pas ce qui est dit l. 6 (causes, moyens, intentions)
N.B. Polybe a en fait évoqué cette distinction un peu plus haut, en III 6, et il n’a donc pas besoin d’y revenir ici.
• Ici, Polybe parle des causes sur un plan général, ayant manifestement en tête (puisqu’il critique les auteurs qui n’ont pas fait, comme lui, une histoire universelle, mais des histoires particulières) plutôt les causes des guerres particulières, des événements de détail. Mais il peut être intéressant de considérer ce qu’il en est de ces affirmations pour le thème d’ensemble de son œuvre : les causes de la domination romaine cherchées dans les structures de l’Etat (livre VI), encore que cela puisse relever, aussi, des « moyens ».
C/ Les conséquences
D’abord désignées comme « ce qui suit les événements proprement dits » (l. 4-5), puis simplement comme les « conséquences » que l’historien doit « marquer » (l. 38).
Leur importance est grande car (et Polybe le dit clairement à d’autres endroits), les conséquences de certains événements seront les causes d’autres événements.
Comme pour les causes, Polybe envisage ici plutôt les conséquences des guerres particulières, des événements pris individuellement. Mais on peut élargir la perspective au schéma d’ensemble de son œuvre : toute sa 2e partie (consacrée à la période 168-146, mais pas initialement prévue) a pour finalité d’étudier les conséquences des conquêtes romaines de la période antérieure, tant pour Rome que pour les peuples conquis.
Polybe, avec cette importance qu’il accorde aux conséquences, est totalement novateur : Thucydide avait réfléchi sur les causes, pas sur les conséquences (il est vrai qu’il n’a pas eu le temps d’achever son œuvre – mais on voit que Polybe parle des conséquences dès le 3e de ses 40 livres !)
(Transition) Tout cela s’inscrit dans une conception d’ensemble : l’histoire n’est pas seulement un ornement, elle doit démontrer (et analyser causes, circonstances et conséquences, en donnant tous les éléments d’appréciation, c’est bien faire de l’histoire apodictique – là aussi, quelque chose de nouveau par rapport à Thucydide) car c’est seulement ainsi qu’elle permettra la compréhension et qu’elle sera donc utile :

III – L’utilité de l’histoire
Une utilité d’abord très concrète :
A/ Polybe proche de ses lecteurs
Il aborde des questions très pratiques : il est selon lui « infiniment plus commode d’acheter et de lire un tel ouvrage que les livres des auteurs qui traitent séparément des divers épisodes » (l. 23-25), et donc cet ouvrage n’est pas si « difficile à acquérir » ni si « difficile à lire » (l. 15).
L’aspect économique n’est pas négligé, et n’est pas séparé de l’aspect intellectuel : plusieurs livres, c’est cher, mais c’est aussi rébarbatif
Or Polybe s’inscrit dans une démarche pédagogique : certes, il faut lire de nombreuses pages avec son ouvrage, mais la « texture » est « continue » (l. 17), le « récit clair » (l. 18), tandis que les mêmes lecteurs, finalement confrontés, en accumulant d’autres livres, à « une masse de textes bien plus volumineuse » (l. 26-27), sont « hors d’état de s’y reconnaître » (l. 27-28)
—> il souhaite vraiment être lu de ses contemporains, il est persuadé que son sujet intéressera le plus grand nombre
B/ Une œuvre pour comprendre le monde de l’époque
C’est pour expliquer, pour faire comprendre la période qui vient de se dérouler que Polybe a développé son concept (et sa pratique !) d’histoire universelle
Rome domine le monde « civilisé » et personne, que ce soit à Carthage, en Macédoine, en Péloponnèse, en Syrie…, ne vit en dehors de ce contexte. Cette réalité nouvelle est quasi universelle, on ne saurait donc, pour Polybe, y être indifférent (cf. ce qu’il dit dès I 1, en énonçant sa problématique : « Se pourrait-il (…) qu’on soit assez borné, assez indifférent pour refuser de s’intéresser à la question de savoir comment et grâce à quel gouvernement l’État romain (etc…) »)
C’est évidemment une histoire contemporaine, qui permet de comprendre comment on en est arrivé là – mais une histoire que Polybe a quand même « épaissie » en rajoutant sa prokataskeuè, ce qui la rend moins immédiate
Raconter les faits, même dans le détail et la plus grande exactitude, n’est pas suffisant, car il faut faire comprendre, donc démontrer (= histoire apodictique), et en particulier démontrer pour des lecteurs grecs, qui, compte tenu de leur histoire, se demandent forcément comment Rome, avec des institutions comparables à celles d’une cité grecque, a pu réussir là où les cités grecques ont échoué
L’historien doit, selon Polybe, s’efforcer d’« atteindre à l’essentiel » (l. 36), et l’essentiel, dans son sujet, c’est de comprendre « comment et grâce à quel gouvernement l’État romain a pu, chose sans précédent, étendre sa domination à presque toute la terre habitée et cela en moins de 53 ans » (= sa problématique, énoncée en I 1)
Cette problématique, on y trouve une allusion dans le texte avec les l. 7-8 : « la question de savoir si ce qui est finalement arrivé devait normalement arriver » (le raisonnement de Polybe étant que, si on ne se pose pas cette question, alors on ne produit pas une œuvre d’histoire mais seulement un morceau d’éloquence)
! Il ne fallait pas voir ici une référence à la Fortune ! il n’est pas dit « fatalement », mais « normalement », et cet adverbe est préparé par la réflexion, juste avant, dans la même phrase, sur l’importance de « l’analyse des causes, des moyens et des intentions » : l’historien doit examiner tout cela, en amont des événements, pour pouvoir apprécier correctement le déroulement de ces événements, voir s’il était logique, normal, naturel
La réflexion vaut évidemment pour le sujet de Polybe, mais aussi pour l’histoire en général. Certaines remarques s’inscrivent en effet dans :
C/ Une dimension plus prospective
L’histoire a selon Polybe une mission. En creux, il nous dit qu’elle doit « apporter un enseignement » (l. 10) et qu’elle doit générer un « profit pour l’avenir » (l. 12)
Cela rappelle d’ailleurs une phrase du texte vu en TD (I 4), sur « l’histoire (…) intéressante et instructive » (lorsqu’elle montre les interdépendances)
Cette utilité, elle semble concerner tout un chacun…
mais on sait que, pour Polybe, elle doit tout particulièrement servir à la formation des militaires et des politiques.
En outre, cette volonté d’être utile s’accompagne d’un souci d’édification morale et la deuxième partie a même été rédigée dans cette optique (ainsi, en III 4, il affirme « les générations futures […] pourront voir si, par la façon dont ils ont exercé l’empire, les Romains méritent l’éloge et l’admiration ou au contraire le blâme. C’est en cela surtout que réside l’utilité de notre travail pour l’époque actuelle et pour l’avenir »)
Enfin, Polybe fait manifestement référence, avec son idée de« profit pour l’avenir » (l. 12), au ktèma es aiei de Thucydide, qui voyait dans sa Guerre du Péloponnèse un « trésor pour l’éternité », un « acquis pour toujours » — et, si ni l’un ni l’autre ne pense que histoire se répète, ils ont du moins la conviction que le passé peut éclairer le présent et l’avenir.

CONCLUSION
Je fais ici des remarques générales, destinées à rappeler quelques principes sur les règles régissant une conclusion de commentaire de texte (et plus précisément historiographique). J’y ajoute quelques pistes possibles pour notre texte, mais il revient évidemment à chacun, à l’intérieur de ce cadre, de « personnaliser » sa conclusion.
La conclusion doit nécessairement dresser un bilan, dégager l’apport historiographique du texte et en marquer les éventuelles limites. Il est souhaitable d’élargir la perspective à l’ensemble de la démarche de l’auteur (et, dans la conclusion, on ne risque pas le hors-sujet). Eventuellement, on terminera par une ouverture plus large encore (mais elle ne saurait tenir lieu, à elle seule, de conclusion d’ensemble).
Le bilan, ici, rappellera les thèmes développés, en insistant sur ce qu’il y a de plus novateur chez Polybe : concept d’histoire universelle (adapté à son sujet) et observation des conséquences.
La perspective peut ensuite être élargie par une comparaison entre Polybe et Thucydide : Polybe a prolongé la réflexion sur les causes (ici, il estime que « dégager les causes » est ce qu’il y a de plus important dans le « travail de l’historien »), mais a aussi mis cela en pratique, de façon bien plus ample que Thucydide, en élargissant l’enquête aux structures de l’État romain, à ses institutions ; il a aussi développé une histoire apodictique, et, dans cette volonté de démontrer, il a permis au lecteur d’accéder bien davantage aux éléments de son travail et de sa réflexion.
On peut terminer par une ouverture plus large, sur l’évolution de la discipline histoire et de ses méthodes après Polybe : son souci de démonstration est très moderne, ses considérations moralisantes beaucoup moins.









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