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Première partie - TEL (thèses

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N° d’ordre : 846


THÈSE


Présentée à

L’Université Bordeaux I

Pour obtenir le grade de

DOCTEUR
Spécialité : Didactique des Mathématiques


par
Alain Mercier



L’élève et les contraintes temporelles de
L’enseignement, un cas en calcul algébrique



Soutenue le 18 décembre 1992, devant la commission d’examen

mm. M. Mendès-France. Professeur à l’Université Bordeaux I---------------Président

J. Beillerot. Professeur à l’Université Paris X Nanterre
G. Brousseau. Professeur à l’IUFM de l’Académie de Bordeaux
J. Brun. Maître d’enseignement et de Recherche à l’Université de Genève
Y. Chevallard. Professeur à l’IUFM de l’Académie d’Aix-Marseille-----Examinateurs


--1992--

L’élève et les contraintes temporelles de l’enseignement, un cas en calcul algébrique
le temps du Système Didactique et le temps de l’Enseigné, la Biographie Didactique d’un élève

Résumé
La thèse montre que les contraintes temporelles du fonctionnement didactique induisent des apprentissages invisibles à l’enseignant. Ces apprentissages n’assurent pas la progression didactique, mais ils jouent un rôle important dans la réussite des élèves. Leur existence est établie par l’observation d’épisodes didactiques au moyen de techniques d’approche biographique originales. La méthode est appliquée à l’observation des difficultés des élèves avec le calcul algébrique au Lycée, et à leur explication.

Mots-clés

Algébrique (calcul) ; Biographie didactique (fragments de) ; Didactique des mathématiques ; Dimension adidactique (d’une situation didactique) ; Elève ; Institution didactique ; Rapport à un objet (de savoir ou institutionnel) ; Temps (d’un système).


Cette thèse a été préparée dans le cadre du LADIST de Bordeaux, avec le soutien et en collaboration avec l’IREM d’Aix-Marseille.
Introduction

Pour étudier l’élève, il faut observer des élèves : Delphine, Frédéric, Solange et Danièle, Suzanne, Sabine, Denis et René, sont des élèves particuliers qui donnent accès à la connaissance de l’élève ; ils sont en Quatrième, en Seconde, en Terminale, en Première, des classes de mathématiques particulières qui donnent accès à l’enseignement des mathématiques ; ils entretiennent des rapports au calcul des limites, au développement des réels dans une suite de base, aux inéquations comportant des saleurs absolues, ou au calcul algébrique qui outille la géométrie, des savoirs particuliers qui nous donnent accès à la copnnaissance du rapport des élèves au savoir mathématique, à l’école. L’étude de l’élève est ainsi un moyen de l’étude du didactique, que nous menons ici d’un point de vue particulier sans oublier que c’est, le cas échéant, au niveau du savoir général sur le didactique que la connaissance que nous produirons peut montrer sa pertinence.

Enfin, les savoirs que produit la science du didactique lorsqu’elle attaque la question des personnes, comme en général les savoirs des sciences de l’homme lorsqu’elles tentent de penser la personne, découvrent au terme d’une construction théorique difficile ce que chacun savait déjà : que l’on n’est jamais trahi que par les siens lorsque l’on a du succès au delà de leurs espérances ; que l’on ne peut pas épouser toute personne et qu’il y a pour cela des interdits, des règles de conduite, des conditions de succès et des contraintes ; que les interdits sur la nourriture sont des déplacements de l’interdit du meurtre ; que les lapsus sont porteurs d’une vérité ; que les petits enfants ont une sexualité ; que les paysans ne se suicident pas par les mêmes moyens que les femmes ; que la valeur des choses est créée par le travail humain qui les produit ; que la société dépossède chacun de ce qu’il pourrait obtenir par la force pour donner à tous le droit de propriété ; ou que l’on n’apprend en général pas si l’on ne sait pas ce qu’il faut apprendre, et qu’il y a quelque chose à savoir. Pourtant, le travail de transformation de ce que chacun peut reconnaître comme sa connaissance personnelle des hommes et des choses en un savoir sur les hommes et les choses, est bien le travail des sciences : elles m :ontrent qu’il y avait là quelque chose à savoir, quand chacun trouvait qu’il n’y avait là rien à apprendre de plus que ce que, justement, chacun sait. L’adage nul n’est prophète en son pays –en son lieu ou en son temps- a sans doute ce sens là, de montrer, faute de la différence par laquelle on reconnaît qu’il y a en ce point, à la fois, quelque chose à savoir et un savoir qui se propose, la nécessité d’un délai, du temps de la maturation des questions, la nécessité d’une différance.
Faute de cette différance, le vocabulaire du domaine étudié -le didactique- sera spécifié du qualificatif de didactique. Nous parlerons de l’élève, sujet de la relation didactique. Soit, de l’enfant qui va à l’école pour y vivre les effets d’une intention didactique. Nous étudions, pour comprendre le fonctionnement de l’élève, à l’école, le temps des systèmes didactiques par lesquels l’enseignement est produit –le temps qui fait loi à l’intérieur de la classe– et la biographie didactique d’un élève –constituée de ses rencontres avec des objets de savoir qu’il réussit ou échoue à apprendre- afin d’accéder au temps de l’enseigné, sous-système du système didactique –le temps des épisodes didactiques effectifs. Le qualificatif de didactique, dans le cas de la biographie d’un élève comme dans bien d’autres cas, est en quelque sorte redondant ; par exemple, si l’élève est celui qui va à l’école (dans le cas qui nous intéresse, pour y apprendre des mathématiques), la biographie de l’élève est la suite des incidents constitutifs de son histoire d’élève (donc, à partir de sa fréquentation de l’école, de son histoire relativement aux mathématiques) : la biographie d’un élève est nécessairement didactique. Malgré cela et pour des raisons de visibilité du savoir que nous aurons produit, il sera utile, dans le cadre d’une thèse, d’insister sur l’aspect didactique des observations, des objets, des notions que nous travaillerons et c’est pourquoi la relation, l’intention, le système, le temps, la biographie, les épisodes et beaucoup de notions encore seront, dans ce texte, didactiques.
La physique des bosons, les mathématiques des variétés affines, le didactique des épisodes pour l’enseigné, doivent tout d’abord définir leur objet d’étude. Impossible pour cela de « partir de zéro ». Ainsi, le travail que nous présentons ne pouvait être pensé à l’origine de la didactique des mathématiques, et les problèmes qui y sont soulevés supposent l’existence d’un corps de doctrine déjà important et fortement structuré. Dans le cadre de la didactique des mathématiques, les questions relatives à l’élève sont encore nouvelles, alors que d’autres sciences s’occupent depuis longtemps de problèmes apparemment semblables qui ont, ailleurs, un nom et des solutions : la cognition et son corollaire l’apprentissage ; les relations de la personne aux institutions et les assujettissements correspondants – y compris dans le cas des institutions de transmission des savoirs ; etc.
Les problèmes que nous posons et qui sont nouveaux pour nous ne sont donc pas toujours posés comme il est d’usage et par exemple, ni les savoirs mathématiques particuliers dont l’enseignement est étudié ni les personnes que sont Delphine, Frédéric, Solange ou Sophie, ne sont vraiment (c’est-à-dire, au sens de la culture comme au sens des sciences qui ont traité avant nous de ces problèmes) présents dans le discours que nous tenons. Il nous suffira qu’ils soient présents comme il leur est possible de l’être dans le cadre de la science du didactique, lorsqu’il est question de mathématiques.

Présentation

Pour permettre l’entrée progressive dans le problème, nous avons donc choisi une organisation du texte qui ne respecte ni la progression temporelle des études réalisées, ni l’ordre traditionnel d’exposition.
La première partie a en effet une fonction propédeutique. On y propose un balisage du champ de la recherche à laquelle cette partie introduit en proposant la mise en place d’un lexique pour le travail qui va suivre.
La deuxième partie a une fonction emblématique, car on y propose une première étude du problème –à l’aide des notions clé pour ce travail d’épisode didactique et de fragment de la biographie didactique d’un sujet institutionnel- qui donne aussitôt quelques résultats de l’approche biographique des phénomènes didactiques.
La troisième partie propose alors une première réalisation de ce qui a été construit jusque là, en montrant ce que peut être l’observation biographique d’un élève in situ, dans le cadre d’une classe de mathématiques, les techniques d’observation biographique qui pourraient être proposées, et l’extension de ce qu’il faut compter dans les savoirs nécessaires à un élève de mathématiques, pour apprendre des mathématiques.
La quatrième partie conclut notre travail en proposant un première exploration du domaine de validité de l’approche biographique, ce qui nous amène d’une part à montrer comment cette approche peut produire des questions pertinentes pour la didactique des mathématiques, et d’autre part, à installer dans le champ de la didactique des mathématiques une technique issue en partie du champ des recherches anthropologiques, où le débat sur l’usage des techniques d’approche biographique des phénomènes humains est ancien.

L’annexe enfin a une fonction didactique, c’est pourquoi nous ne l’avons pas proposée dans le corps du texte. Elle a rempli une fonction autodidactique dans le travail préparatoire à cette thèse –elle fait ainsi partie de l’histoire du thème d’étude- parce qu’elle est l’épisode originaire de notre propre biographie didactique relative à ce thème. Les questions théoriques et techniques que l’étude aui y est présentée nous a amené à poser ont rendu nécessaire la définition d’une approche biographique des phénomènes es didactiques qui s’oppose dans sa forme à une approche institutionnelle –approche qui, en didactique des mathématiques, est aujourd’hui traditionnelle. Ces mêmes questions ont permis de produire, pour nous, les savoirs que ce travail présente et met en œuvre. Bien que le savoir didactique qui émerge dans ce texte soit fortement personnalisé, il nous a paru utile de présenter l’étude du rapport de sophie à la démonstration, en géométrie, comme on présente, avec un savoir, le problème qui l’a fait naître et le travail de ce problème : cette étude en est le contexte premier.
Sommaire


Première partie, Présentation du problème, l’étude de l’élève
Premier chapitre, L’originalité du didactique
Deuxième chapitre, Le savoir dans l’espace didactique
Conclusion de la première partie
Index de la première partie

Deuxième partie, Premières études de la construction didactique de l’élève, la nécessité d’apprendre
Premier chapitre, L’articulation de la biographie de l’élève qu temps didactique
Deuxième chapitre, Les embarras de delphine montrent la nécessité d’apprendre, et le temps de l’enseigné
Troisième chapitre, l’ignorance comme nécessité d’apprendre
Conclusion de la deuxième partie
Index de la deuxième partie

Troisième partie, La construction didactique de l’élève et la classe de mathématiques
Introduction de la troisième partie
Premier chapitre, Un épisode didactique banal caractérise la gestion didactique du rapport des élèves au savoir
Deuxième chapitre, Les conditions de l’évolution du rapport personnel des élèves au savoir
Conclusion de la troisième partie

Quatrième partie, Les conditions de l’évolution du rapport à l’algébrique, en Première S
Introduction de la quatrième partie
Premier chapitre, Les conditions institutionnelles de l’observation
Deuxième chapitre, le sens didactique –relatif à la classe de mathématiques- des observations biographiques, la question des interrogations, pour Sabine, et Samuel
Conclusion de la quatrième partie

Conclusion générale

Bibliographie raisonnée
Bibliographie

Table des matières

Etude annexée, la construction didactique de l’élève, comme problème didactique

Introduction, La construction des conditions de possibilité du rapport personnel de l’élève comme problème didactique, dans le cas de la géométrie, au Collège

Premier chapitre, Le premier problème de Sophie : pourquoi et comment démontrer

Deuxième chapitre, Le deuxième problème de Sophie : écrire une démonstration

Troisième chapitre, Propositions à propos de l’enseignement de la géométrie, venues de l’observation de Sophie

Conclusion, Les problèmes posés par l’enseignement de la géométrie comme étude de l’espace et comme activité dans l’espace

Première partie

Présentation du problème, l'étude de l'élève TC "Présentation du problème, l'étude de l'élève" \l 2 

L'étude de l'élève fait partie des études du domaine de réalité où évolue l'élève : le didactique.
L'intentionnalité didactique caractérise le didactique, elle est relative à des savoirs, que l’action enseignante présente à leur tour dans le cadre d’une institution didactique


 TOC \o "1-2" \n 
Première partie

 TOC \o "3-3" \n Présentation du problème, l'étude de l'élève

Premier chapitre
 TOC \o "4-9" 
L’originalité du didactique 12
Enfants et élèves 12
La nécessité de l'école 13
L'enseignement 13
Enseigner et apprendre 15
Conclusion 16
L'intentionnalité didactique 17
L'apprentissage est-il naturel ? 18
L'enfant est un produit de l'invention sociale de l'élève 20
Enseigner des savoirs 23
Conclusion 25
Le partage de l'intentionnalité didactique 27
L'intention d'apprendre et les institutions didactiques 28
Conclusion 30
Le chercheur et l’intentionnalité didactique 32

Conclusion du premier chapitre : La relation didactique est institutionnellement déterminée 35

Premier chapitre
L’originalité du didactique TC "L’originalité du didactique" \l 4 

L’école donne à voir « les enfants qui apprennent ». Pour notre part, nous n’étudierons pas cet objet trop naturellement offert  l’apprentissage réalisé par les enfants  mais la relation didactique elle-même. Nous étudierons principalement un des termes de la relation : les élèves. En allant à l’école en effet, les enfants deviennent élèves. L’enjeu de la relation dans laquelle ils entrent, où s’inscrit aussi le maître, est le savoir, qu’on leur enseigne, qu’ils doivent apprendre. En demandant : « Comment un enfant devient-il un élève ? », nous définissons, avec l’objet de notre étude, le domaine de réalité où cette étude se situe : le didactique.

Enfants et élèves TC "Enfants et élèves" \l 5 

Les études sur « la question du sujet » - dans le cas de l’élève - se sont souvent centrées, à la suite des travaux en psychologie, sur l’apprentissage du sujet, c'est-à-dire, mais cela n’est pas dit ou c’est naturellement dit, sur « les enfants qui apprennent » et plus précisément sur la question : Comment les enfants apprennent-ils ?
Nous poserons, en introduction à une recherche sur « l’élève », quelques questions sur le découpage de la relation didactique qui nous est proposé avec le vocable « enfant » et le problème de ce que l’on appelle naturellement « l’apprentissage » de l’enfant. Ce découpage du champ produit par l’objet d’étude apprentissage est sous-jacent aux études sur la dimension cognitive des activités humaines. Il fait de la dimension cognitive une propriété personnelle des enfants ou des adultes  sujets apprenants. Nous étudierons pour notre part les aspects institutionnels de la dimension cognitive ; les enseignés, les enseignants. Le découpage que propose la notion « apprentissage des enfants » est trop immédiatement donné par les études cognitives pour que nous n’éprouvions pas, avant de penser reprendre quelques-uns de leurs résultats, l’intérêt d’une tentative de détour théorique. Le langage courant dispose en effet de deux termes dont aucun n’est désuet  l’enfant, pour la maison et l’élève, pour l’école. La question initiale « Comment les enfants apprennent-ils ? » comporte donc pour nous une spécification essentielle, dont nous entreprenons l’étude : « Comment les enfants apprennent-ils, à l’école ? »

A l’école, les enfants se trouvent en effet dans une situation où quelqu’un a l’intention de leur enseigner quelque chose : l’intention de « leur faire apprendre » comme l’on dit souvent par raccourci ou par anticipation. Ils vont à l’école pour y apprendre un certain nombre de savoirs, déterminés précisément, dont la nécessité ne fait en principe pas de doute. A cet effet, l’école les fait élèves.

La nécessité de l'école TC "La nécessité de l'école" \l 9 

Quoi que nous pensions par ailleurs des enfants et de leurs apprentissages, la société a éprouvé la nécessité de créer des écoles publiques gratuites, et de rendre la fréquentation scolaire obligatoire puis, aujourd’hui, de rendre obligatoires les apprentissages qui se font à l’école : la scolarisation peut bien alors être libre, l’instruction elle-même est obligatoire. C’est que les apprentissages scolaires sont, sans aucun doute, particuliers ; socialement importants. Pour une première approximation de leur particularité, nous dirons qu’il s’agit des apprentissages qui portent sur des connaissances socialement reconnues et socialement nécessaires : « les savoirs ».
En abordant la question particulière de l’élève (l’enfant, à l’école), nous avons posé deux caractères qui spécifient l’école : l’intention d’enseigner, la nécessité sociale de l’enseignement du savoir.
Nous avons commencé de nommer la nature intentionnelle de la relation didactique que l'École institue, nous en avons donné une première raison. Nous devons maintenant, d’une part, définir ce qu’il en est des moyens que l’institution scolaire se donne pour que l’intentionnalité didactique trouve à se réaliser, d’autre part, étudier la nature des savoirs qui font l’enjeu des enseignements scolaires. Il nous appartiendra de déterminer comment ces deux études sont liés, pourquoi et comment elles déterminent la manière dont l’école fait les élèves.

L'enseignement TC "L'enseignement" \l 9 

De ce premier travail sur le domaine de réalité que nous proposons d’étudier, et qui relève de ce que nous appelons le didactique, nous retiendrons qu’il n’est pas certain a priori que l’on doive étudier d’abord « les enfants qui apprennent » pour connaître les apprentissages des enfants à l’école.
« Apprendre » ne peut pas être, dans le cadre didactique, un fait que l’on observe comme il vient. Par exemple, le fait des enfants. Dès que l’on rentre dans le domaine du didactique, c’est-à-dire dès que l’on s’intéresse à un ensemble de savoirs spécifié  pour nous, les mathématiques  on ne peut observer l’apprentissage de cet ensemble de savoirs sans observer comment une institution fait exister des situations visant à obtenir, pour « ses sujets », l’apprentissage de cet ensemble spécifié de savoirs : face à ces élèves, auxquels on cherche en effet à « faire apprendre », il faut « enseigner ». C’est même la seule chose que l’on puisse essayer de faire à cet effet, à l'École. Cela aura cette conséquence, que les autres formes de relation didactique permettant d’obtenir un apprentissage ne sont pas a priori l’objet de notre étude : ces autres formes de relation didactique ne traitent pas de savoirs, ce qui produit deux différences de ces formes de relation didactique avec la relation que l’on peut observer à l'École : elles opèrent en dehors des institutions scolaires et elles ne produisent pas d’élèves. La progression de cette introduction nécessite que nous en disions dès à présent quelques mots.
Le « maternage » est le moyen de l’apprentissage des premiers gestes sociaux, la mère appelle l’enfant à les produire.
L’« apprentissage » (sur le tas, par frayage et imitation), est depuis toujours le moyen privilégié des formations professionnelles que l’on peut restreindre aux gestes peu nombreux d’un métier simple, des gestes que l’on représente : parce que le sens de ces gestes est immédiatement accessible, on peut les obtenir de l’apprenti en lui en faisant la démonstration.
L’« enseignement » transmet par un discours, un savoir antérieur, présenté et, même, représenté dans ce que nous appelons « le texte du savoir », alors que l’apprentissage transmet par l’ostension muette du maître qui travaille pour lui-même.
L’« apprentissage » transmet, par le spectacle du faire où l’apprenti s’introduit peu à peu, une connaissance attachée à la personne qui connaît ; dans le « maternage » enfin, ni discours ni représentation des gestes, mais un soutien et un appel aux attitudes désirées.

Enseigner et apprendre TC "Enseigner et apprendre" \l 9 

Pour que les élèves apprennent, il faut leur enseigner. Il faut leur « Indiquer par signes, pour faire connaître », tenir un discours sur le savoir, en donner des leçons, c’estàdire des lectures, des interprétations.
L’existence sociale d’un vocabulaire adapté à notre problème montre que, jusqu’à présent tout au moins, les déclarations du type : « Il faut d’abord apprendre (aux enfants) à apprendre » ; ou « Il faut un apprentissage autonome, parce que l’on n’apprend que de soi-même » expriment des injonctions faites à l'École qui sont de l’ordre des vœux pieux. Personne ne prend ces injonctions pour l’énoncé de vérités sur l'École. Personne ou presque, car il y a des institutions périphériques des systèmes d’enseignement qui vivent dans la méconnaissance des phénomènes didactiques. Par exemple, les instituts de « formation de formateurs » sont souvent dans ce cas, pour des raisons qu’il faudrait analyser plus longuement, mais en grande partie parce qu’ils doivent tenir un discours d’instruction, de conseil, ou même de prescription et non un discours de description, d’observation, d’explication. Dans ces institutions s’est formé le néologisme « apprenant ». Il circule activement dans la noosphère du système d’enseignement, où il est porté par cette idée « assurer un accès direct aux composantes de la logique de l’apprenant ». Ce néologisme, « apprenant » (learner), désigne l’objet de notre étude  l’élève  dans la plupart des travaux anglo-saxons sur l’enseignement, et il y manifeste un style de pensée extérieur à la problématique didactique qui fait ici référence, puisqu’il provient de l’idée que la psychologie est le savoir fondamental des phénomènes d’enseignement, mais « learner » peut se compléter de « student » et « pupil ». Tandis que, lorsqu’il est importé par traduction littérale de learner (c’est-à-dire contre la notion d’élève) et lorsque le savoir enseigné n’est pas un objet à part entière de l’étude, ce terme vient trop souvent dans les sciences de l’éducation, en France, tenter de réunir à nouveau élève et enfant en donnant à voir, comme par transparence, l’« enfant qui apprend » dans un élève qui serait « maître du savoir à apprendre » et libéré de l’action enseignante.
Les institutions périphériques du système d’enseignement, lorsqu’elles sont en proie à l’obsolescence des injonctions traditionnelles sur les acteurs du système, c’estàdire, lorsqu’elles sont en appétit d’innovation, peuvent parfois sembler penser que « l’apprenant » est l’élève libéré du professeur, l’enfant « authentique ». Ainsi peut-on lire, dans la description des éléments constitutifs d’un « dispositif d’évaluation formatrice », qu’il est fondé sur le motif suivant : « La nécessité de transformer les cours habituels en séquences d’apprentissage qui assurent aux élèves la maîtrise des contenus des disciplines et celle des objectifs des tâches et des critères d’évaluation (...) ». Comment en effet ne pas avoir appris, dans une « séquence d’apprentissage » qui aurait assuré aux élèves la maîtrise des contenus, des objectifs, et finalement, des critères d’évaluation de l’apprentissage ?

Conclusion TC "Conclusion" \l 9 

Avant toute tentative de réponse, il faut interroger plus avant cette transparence-là, qui fait voir l’enfant dans l’élève au point que l’élève s’en trouve oublié, et que l’intention didactique le savoir et le maître sont oubliés avec lui.
Le réexamen des questions initialement posées aidera à mieux saisir les caractères de l’espace didactique qui s’ouvre maintenant, et à mesurer la pertinence de l’approche proposée.




L’élève est, avant toute autre chose, le produit d’une intention didactique. Cette intention le spécifie. Il est le produit d’un acte fondateur de l’intention didactique qui, pour qu’il soit « apprenant » doit commencer par le mettre en situation d’être « ignorant ». Apte à être instruit. Comme l’enfant est « celui que l’on éduque », l’élève est « celui que l’on enseigne ». Chaque jour, fait initialement ignorant, l’élève peut cesser aussitôt d’être ignare en recevant l’enseignement. Cette action qui, à tout moment, crée à nouveau l’élève, est l’objet de notre étude.

L'intentionnalité didactique TC "L'intentionnalité didactique" \l 5 

Lorsque « les enfants » apprennent d’eux-mêmes, et lorsqu’on leur enseigne c’est-à-dire lorsqu’une intention didactique à leur endroit trouve des moyens pour sa réalisation, la situation diffère, parce que le moyen - l’enseignement - ne garantit pas la fin  l’apprentissage. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, nous n’énonçons pas un truisme, mais un phénomène essentiel, qui advient certainement dès que l’apprentissage est, d’une quelconque manière, visé : dès que se manifeste une intention d’enseigner.
Cette inadéquation possible du résultat aux buts que visaient les moyens mis en œuvre est un phénomène que l’on pourrait sans doute étendre aux cas éventuels des apprentissages que des enfants feraient « d’eux-mêmes ». C’est bien sûr le cas si on leur prête l’intention d’apprendre et, pour cela, de s’enseigner eux-mêmes. La question se déplace simplement si l’on suppose que les enfants apprennent aussi sans intention d’apprendre : on s’aperçoit bientôt qu’ils n’apprennent pas ce que l’on croyait qu’ils avaient appris. Alors, il nous faut demander : « Qu’apprennent les enfants lorsqu’on leur enseigne ? » et « Qu’apprennent les enfants lorsqu’ils s’enseignent ? » soit « Qu’est-ce qui s’apprend, lorsque l’intention d’apprendre un savoir produit un enseignement de ce savoir ? »

Le problème posé sous cette forme est à la fois plus précis et plus vaste. Il est plus vaste, puisqu’il sort a priori du cadre de l'École proprement dite : l’intention didactique n’y est sans doute pas exclusivement présente. Il est plus précis, puisqu’il permet, dans le cadre de l'école, de spécifier les types de gestes scolaires qui nous intéressent a priori : les gestes didactiques. Il permet de penser que ces gestes ne sont sans doute pas présents à l’école seulement, et qu’il pourrait être profitable de les étudier aussi dans un autre contexte. Il permet de penser une distinction possible des gestes scolaires entre ceux qui participent d’une relation didactique et d’autres, dont l’existence et les fonctions resteraient à étudier et dont le poids sur les relations didactiques possibles pourrait n’être pas négligeable.
De nombreux chercheurs ont repéré il y a longtemps les difficultés particulières que crée la question de l’intentionnalité didactique supposée par la plupart des gestes d’enseignement, leurs travaux le montrent : ils n’observent plus l’apprentissage dans des situations de laboratoire où l’intention didactique peut se faire oublier ; ils travaillent en situation, dans des « situations didactiques » dont ils contrôlent a priori certains des paramètres et dont ils produisent a posteriori l’analyse.

L'apprentissage est-il naturel ? TC "L'apprentissage est-il naturel ?" \l 9 

Il est envisageable, que l’on puisse trouver, localement, des situations pour les apprentissages scolaires où se réaliserait l’absence d’intentionnalité didactique  ne serait-ce que momentanément - pour obtenir au moins à temps partiel  ce serait déjà, pensent certains, comme un moindre mal - un apprentissage « naturel » c’est-à-dire sans enseignement  sans intention didactique manifeste. Cependant, nous montrerons que penser ou donner à penser que cette possibilité locale pourrait avoir vocation à l’universel, que l’organisation de suites coordonnées « de séquences d’apprentissage naturel » est réalisable, et que cela pourrait apporter une réponse aux problèmes posés aujourd’hui à l'École, c’est mal poser le problème de l’enseignement. C’est parler en quelque sorte comme des militants écologistes de l’enfance qui, dans une position extrémiste, revendiqueraient pour l’apprentissage des enfants « des conditions naturelles », contre les « mauvais jardiniers » qui « forcent » leurs jeunes plants, et les rendent tout déformés. En ce point du travail ce problème n’est pas central. D’abord, parce qu’il est possible de penser une solution qui prenne en charge les impératifs que porte l’idée d’un apprentissage « naturel » sans reposer sur une application directe de cette idée (venue de la métaphore classique du « bon jardinier »), ensuite parce que nous étudions l’apprentissage tel qu’il se fait en régime didactique (c’est-à-dire dans le cadre défini par une intention didactique).
Nous rencontrerons avec profit ces questions lorsque nous aurons mieux compris l’apprentissage en régime didactique, et les raisons du fonctionnement métaphorique des discours sociaux habituels sur ce sujet.

Même dans les situations didactiques  cela peut sembler paradoxal mais à entendre certains discours qui valorisent exclusivement « un apprentissage autonome des enfants » dont ils omettent de noter qu’ils se proposent de le réaliser dans le cadre d’une institution didactique, il devient nécessaire de le rappeler  les « enfants » « apprennent ». Ils y apprennent à partir de ce qui leur est enseigné. Cela dit, l’intention didactique suffit-elle à produire « de l’apprentissage » ? Faut-il que les enfants qui apprennent dans ces conditions fassent preuve des mêmes genres d’initiative qu’en situation d’apprentissage dit « naturel », spontané ? Est-ce à l’école, ou hors de l’école, que l’on pourrait trouver des enfants apprenant des savoirs « sans le vouloir » ? Savoir pour avoir appris « naturellement », est-ce savoir différemment que savoir pour avoir appris en ayant été enseigné ?
Un dernier point : enfant ou adulte, ce n’est pas a priori une différence pertinente ; être le sujet d’une intention didactique suffit à définir l’élève. Pour ne pas préjuger de ce qu’il en sera au terme de l’étude, nous utiliserons un terme général. Nous parlerons de la personne lorsque les analyses se situeront au delà d’un assujettissement institutionnel particulier, de sujets pour désigner les personnes venues dans une institution prendre place, de sujets didactiques dans le cadre d’une institution didactique et plus simplement de maîtres et d’élèves dans l’institution particulière où se situe notre étude, l'école. Enfin, un lieu institutionnel particulier : le lieu « enseigné », où viennent s’assujettir les personnes que nous nommons élèves, est au centre de cette étude. On le comprend alors, nous n’étudions pas les personnes qui, en quelque manière, apprennent, mais celles qui se trouvent en situation didactique, celles qui sont enseignées ; les élèves, qui sont supposés apprendre.

L'enfant est un produit de l'invention sociale de l'élève TC "L'enfant est un produit de l'invention sociale de l'élève" \l 9 

Nous pouvons maintenant reprendre notre question introductive. L’élève est le produit du regard de l'École qui le fait « Connaissant en devenir » : pas encore vraiment doué de savoir ni de cognition, comme l’enfant est aujourd’hui le produit du regard social qui le fait « Homme en devenir » : pas encore humain vraiment. Il n’est pas un simple « pauvre en savoir », comme l’enfant avant l’invention moderne de l’enfant, qui à peine sevré était « petit homme » ou « petite femme », homme ou femme modèle réduit, pauvre seulement en taille comme un nain à qui il serait donné de grandir. Suivant le même schéma de pensée, l’émergence moderne de l’élève est contemporaine de l’émergence de la notion moderne d’enfant : comme l’Enfant mais sur d’autres registres, l'Élève est « en devenir », imparfait ; il n’est pas encore « Connaissant » comme l’enfant n’est pas encore « Homme ». Ainsi que l’écrit Philippe Ariès, l’invention sociale de l'Élève est sans doute à l’origine de l’invention de l’Enfant :

A partir d’une certaine période (…) en tout cas d’une manière définitive et impérative à partir de la fin du XVII siècle, un changement considérable est intervenu dans l’état de moeurs (…) On peut le saisir à partir de deux approches distinctes. L’école s’est substituée à l’apprentissage comme moyen d’éducation. Cela veut dire que l’enfant a cessé d’être mélangé aux adultes et d’apprendre la vie directement à leur contact. (…) Commence alors un long processus d’enfermement des enfants qui ne cessera plus de s’étendre jusqu’à nos jours et qu’on appelle la scolarisation.
Cette mise à part - et à la raison - des enfants (…) n’aurait pas été possible sans la complicité sentimentale des familles, et c’est la seconde approche du phénomène que je voudrais souligner. (…) La famille est devenue un lieu d’affection nécessaire entre les époux et entre parents et enfants, ce qu’elle n’était pas auparavant. Cette affection s’exprime surtout par la chance désormais reconnue à l’éducation. (…)
La famille commence alors à s’organiser autour de l’enfant, à lui donner une importance telle qu’il sort de son ancien anonymat (…).

La question de l’aspect naturel des apprentissages se pose d’ores et déjà en des termes nouveaux par rapport au débat entamé ici : nous retrouvons en effet, comme en filigrane du débat actuel, le débat sur l’éducation au Siècle des Lumières. A ce titre de « Connaissant » en devenir, ou bien l’enfant est « apprenant » c’est à dire Enfant Sage devenant de lui-même, « par nature » Homo Sapiens, Homme - mais pour ne pas contrarier sa nature fragile il faut une institution sociale spécialisée qui sera chargée de protéger sa croissance naturellement harmonieuse et ses progrès ; ou bien, « éducable », il est soumis à une éducation qui le fera, de Sauvageon, Civilisé - mais pour venir à bout de sa sauvagerie naturelle, il faut une institution sociale spécialisée qui sera chargée de le former et de le discipliner pour l’instruire. Les premiers textes pédagogiques qui accompagnent l’institution des Collèges et l’enfermement des enfants hésitent, entre les deux positions. Ils partageraient volontiers l’enfant entre ces deux pôles, selon les heures : l’ange, et le diable. Mais ce qu’il nous est possible d’observer, ce sont les styles institutionnels effectifs produits par les tenants de chacun des deux styles qui sont les produits d’une même transformation sociale du regard porté sur l’enfance, une transformation qui a créé l’enfant avec l’élève. Nous pourrions multiplier les exemples de l’opposition de ces deux thèmes, opposition qui traverse les discours des institutions qui traitent des enfants ou des élèves, mais cela n’est utile que pour mieux comprendre comment ces discours en apparence opposés correspondent à deux lectures d’une même situation. Un regard scientifique sur la manière dont l’école fait et enseigne les élèves devait d’abord prendre quelque distance avec les systèmes de pensée que la culture nous donne. Pour aguerrir notre regard, nous retiendrons deux exemples de l’effet de ces thèmes.
Voici le premier : les chercheurs du champ de la recherche en éducation qui se situent dans le cadre de la problématique de la psychologie ont entrepris récemment la publication de l’état de leurs travaux, le titre général de la collection en est déjà révélateur : Développement et fonctionnement cognitifs chez l’enfant, des modèles généraux aux modèles locaux, (Collection Croissance de l’enfant - Genèse de l’homme). Les titres particuliers des trois derniers articles ne seraient pas moins intéressants : « Une méthode d’apprentissage destinée à analyser les relations entre développement et fonctionnement cognitifs », « Acquisition de connaissances scientifiques et développement », « Développement et fonctionnement cognitifs dans le champ conceptuel des structures additives ». On voit en effet dans ces titres la notion d’enfant associée systématiquement à celles de croissance ou développement, et ce développement amener l’enfant à devenir homme fait.  ce qu’il n’était donc pas. C’est la croissance (naturelle) qui produit l’homme et non son éducation, la métaphore est toujours agricole mais elle tire du côté de la plante, nous sommes ici du côté de l’éducation de l’enfant. Les auteurs des articles cités travaillent et publient aussi en didactique, puisqu’ils participent régulièrement aux travaux du Groupement de Recherche Didactique du CNRS, mais la problématique de la psychologie de la connaissance est aujourd’hui « naturellement » porteuse du présupposé constructiviste, et tout travailleur de ce champ ou presque participe de ce présupposé alors même qu’il étudie un geste d’instruction : l’enseignement des savoirs mathématiques. Ces chercheurs sont ainsi, malgré qu’ils en aient, les alliés naturels des tenants du discours qui oppose l’enfant à l’élève. Ils sont les alliés naturels de ceux qui veulent, comme a dit un Ministre (de l’Éducation Nationale), « mettre l’enfant au centre du système éducatif ».
Nous choisirons le deuxième exemple dans un autre domaine : l’opposition développement / éducation, genèse / instruction, et qui oppose encore l’Homme au Citoyen, se fonde souvent sur des métaphores, nous avons rappelé par exemple celle du bon jardinier. Elle peut alors s’entendre entre deux langues, supports de deux cultures. Les usages en anglais et en américain, qui ne correspondent pas exactement aux mêmes fonds culturels, ont mis en avant des termes qui montrent une évolution en direction de chacun de ces deux sens : « to bring up a child », et « to raise a child » d’un côté, « to rear a child » et « to educate a pupil » de l’autre. To raise a child, issu du vocabulaire agricole, est plutôt d’usage américain. To raise signifie « faire pousser » avec l’idée de la récolte espérée (to raise cotton), il supporte en anglais britannique le sens propre de lever, les sens figurés de construire, cultiver, augmenter (un capital) et collecter (l’impôt). To bring up, d’usage britannique, signifie au sens propre faire monter, et supporte aussi le sens d’élever (un enfant) ; He was well brought up signifie « il est bien élevé ». Mais aucun des deux termes ne se dit pour parler de l’action à propos d’un enfant sur lequel le locuteur ne pourrait exercer l’autorité parentale : l’institution de référence est ici, nécessairement, la famille.
« To educate » est employé alors avec le sens d’une action scolaire. Venu du latin conduire, accompagner, il se traduit par enseigner, instruire, former et porte sur des « pupils » ou « students », à propos de contenus de savoir ; He was well educated signifie : « il est cultivé ». C’est alors le verbe vieillot et peu usité « to rear » (venu de l’anglais ancien ræran) et le substantif « rearing » qui signifient élever (un monument, ou un enfant), se cabrer ou se dresser, et l’équivalent possible du français éducation quand il s’agit d’un enfant dont on n’est pas un parent ou un tuteur, par delà l’instruction qu’on lui donne. Cette action sur ce que l’on fait dresser est une action fondamentale. On ne dit pas « he’s well reared » comme l’on dit « he was well raised » ou « badly brought up ». L’élevage parental fait les enfants « bien ou mal élevés », mais le « rearing » n’est pas un propriété du « child », il est une action à son intention ; le « rearing » ne produit pas une propriété de la personne, il produit la personne elle-même, debout. La notion de développement est absente de ces conceptions-là.
Le terme « education » désigne donc la seule action institutionnelle vivante aujourd’hui, parce que l’action que désigne le « rearing » ne se nomme pas, dans un College, et ne cherche pas à se rendre visible à l’extérieur. Mais chaque « College » construit sa réputation sur la capacité de son « education » à former des gentlemen accomplis et pas seulement des savants : les futurs « gentlemen », à leur entrée dans les « College », sont en effet déjà « des personnes de qualité », et seule une forme extérieure peut leur être apportée, pour qu’ils en usent à bon escient (comme l’homme de qualité du XIXe qui devait « faire ses humanités »). Pour eux, le « rearing » semble superflu.
Le lexique américain a semble-t-il abandonné et le terme « rearing » et l’idée de cette action pour la personne, mais « education » restant un terme relatif au domaine des activités scolaires et de l’enseignement, le champ laissé libre par l’absence de rearing serait investi par les théories développementales, qui s’adaptent fort bien à cette idée apportée déjà par « raise » : faire pousser, et récolter ce qui a crû.
Toutes les positions intermédiaires sont possibles (encore qu’il semble que les institutions produisent plutôt les positions extrêmes, pour des raisons d’économie institutionnelle, de stabilité de l’équilibre), mais toutes les institutions qui ont en charge les enfants rencontrent le problème didactique lorsqu’il faut, pour parfaire le processus éducatif  la socialisation , que l’enfant en vienne à « apprendre des savoirs ».

Enseigner des savoirs TC "Enseigner des savoirs" \l 9 

Savoir lire, en premier, écrire bien sûr et compter, cela peut encore, à la rigueur, pour certaines personnes, dans certains milieux culturels, s’apprendre comme on apprend à jouer au bridge ou à la pétanque : par frayage, en regardant faire les autres ; par imitation, en tentant de reproduire en premier les gestes que l’on a reconnus ; lentement, car le plus souvent, on ne commence ni par le plus pertinent ni par le plus aisé. Mais, même si dans une communauté humaine certains apprennent effectivement à lire par un procédé de cette sorte, l’expérience commune montre qu’on ne peut compter sur ce seul moyen pour qu’une population entière soit lettrée, comme cela se fait avec bonheur pour que tous marchent, de la marche usuelle. Cela devient déjà moins performant pour que tous nagent. Cela seul suffirait à nécessiter une « école ». Mais l’absence d'école poserait bien d’autres problèmes : en particulier on ne pourrait espérer l’apprentissage - avec quelques chances de succès - des savoirs que l’on ne peut atteindre que par les livres. Il y faut cette organisation sociale particulière qu’est l'école, et les techniques associées. Les formes de ces techniques sont déterminées par les conditions générales des organisations sociales où l'école existe.
Dans les contrées où elles étaient les seules écoles existantes, les écoles coraniques traditionnelles qui très longtemps ont limité leur ambition première à obtenir la récitation de morceaux choisis d’un seul livre, avant d’entreprendre les rudiments du calcul et de commencer la lecture de ces mêmes morceaux appris par coeur, ont pris un parti fort coûteux en temps comme en énergie : il eût été socialement plus économique d’enseigner à tous et plus tôt la lecture, puis de faire lire « Le Livre ». Par le moyen choisi, pour pouvoir commencer d’apprendre à lire, il fallait savoir par coeur le livre sacré. Voilà un premier contrôle de la pensée droite des lettrés ; voilà garanti l’analphabétisme des impies …et la stabilité sociale, à toute épreuve ou presque. Malgré les tenants du maintien d’une hiérarchie sociale bien utile aux nantis que l’on trouve dans toute société, puissants, organisés, influents, la société technique généralisée qui se nomme elle-même « occidentale » n’a pas réussi à se passer de l’instruction de tous. Mais l’instruction est souvent le support de tentatives sociales d’éducation de tous, et le phénomène d’inversion des priorités qui amène l’intention éducative à prendre le pas sur l’intention didactique est fréquent. C’est semble-t-il ainsi que les Collèges ont eu tendance à fonctionner jusqu’à ce qu’à la fin du XVIIIe on profite de la condamnation des Jésuites pour réorganiser les Collèges. Les débats du Comité d’Instruction Publique, en 1792, montre une conscience claire de ces problèmes. Le cas a été étudié aussi bien pour les manuels de grammaire de la fin du XIXe, dont les exemples traduisent la volonté d’éduquer le citoyen. Le prix en éducation (en apprentissage du discours institutionnel de la société) que les personnes doivent payer à la société pour l’accès à l’instruction est plus ou moins élevé, il existe toujours : l'intentionnalité n’est jamais déclarée, sur les savoirs totaux ou syncrétiques, et le fonctionnement didactique lui-même produit, indépendamment des intentions, des types de rapports à la personne et à la société qui sont de l’ordre de l’éducation. Les pays du Tiers Monde qui fondent des systèmes scolaires savent que le rapport à la nature de type technique occidental est livré clés en mains avec le savoir sans qu’on puisse l’en détacher, et aussi bien, inversement, les dictateurs éclairés savent que l’instruction de tous porte avec elle l’idée de progrès pour tous.

Notre société nécessite donc le didactique : la rencontre organisée des membres du corps social  devrait-on dire : les citoyens ?  avec des savoirs, pour qu’ils sachent ces savoirs.
 INDEX 
Conclusion TC "Conclusion" \l 9 

Ainsi naissent l’école, les élèves, et l’obligation scolaire. Mais on comprend mieux la confusion initiale quand on s’aperçoit que le projet didactique  qui invente l’élève avec l'école contemporaine, tandis que le projet éducatif invente l’enfant avec la famille moderne  prend « naturellement » appui sur le projet éducatif, qu’il a contribué à créer.
Nous pouvons maintenant nous défaire d’une mésaventure pédagogique qui pourrait arriver à la problématique de la psychologie : étudier « l’apprentissage des élèves » ne réglerait pas la question, parce que, justement, l’élève, ce n’est pas « la personne qui apprend », c’est en premier « la personne que l’on enseigne » ce qui fait que, par exemple, même lorsqu’il n’apprend pas, on l’enseigne. Nous pouvons même poser ce principe didactique : Lorsqu’un élève montre qu’il apprend, c’est parce qu’il est élève. C’est pourquoi il le montre comme un élève doit le montrer. C’est ce que démontrent les nombreux travaux sur les effets du Contrat didactique. C’est pourquoi ce concept est actuellement central en didactique : étudier les enfants qui apprennent, à l’école, les élèves, c’est nécessairement étudier comment s’établit le contrat didactique et surtout, comment ce contrat évolue lorsque l’entrée de savoirs nouveaux sur la scène didactique rend son évolution nécessaire. Le problème est particulièrement décisif en mathématiques, parce que des savoirs nouveaux peuvent remettre en cause l’appartenance de gestes bien connus des élèves au domaine des gestes contractuels. Certains gestes attendus par contrat deviennent d’un coup des comportements mathématiquement déterminés, et la décision se trouve alors appartenir à l’élève. Ainsi, à l’école primaire des débuts, une question n’a qu’une seule réponse, ce qui permet de demander à chaque élève de fournir une réponse lorsqu’il est questionné, « parce qu’il suffit de trouver la réponse et que si elle ne lui était pas accessible, la question ne lui serait pas posée » ; plus tard, vient le temps de résoudre tantôt « x Îð IR, x2 = 4 », tantôt « x Îð IR, x3 = -8 », ou « x Îð IN, 2x + 4 = 1 », l élève doit alors décider lui-même du nombre de réponses à fournir, parce que ce nombre fait partie de la compréhension mathématique du problème mathématique qu il doit montrer par ses réponses.




Nous sommes amenés à aborder le problème de la position institutionnelle de l’élève en nous référant de plus près au formalisme descriptif de la théorie des institutions didactiques et aux acquis des théorisations didactiques existantes. Nous ne chercherons pas à démontrer immédiatement les propositions qui seraient nouvelles dans cette approche, mais simplement à contrôler leur cohérence en commençant à les articuler les unes aux autres, à les « faire travailler ». Nous montrons ainsi que si, dans l’institution didactique, l’intention d’enseigner doit être partagée, l’intention d’apprendre ne se partage pas et ne peut appartenir qu’à l’élève.

Le partage de l'intentionnalité didactique TC "Le partage de l'intentionnalité didactique" \l 5 

Nous dirons donc, parlant du point de vue de l'élève : il est le sujet d’une intention d’apprendre, qui vient de lui et porte sur lui (de soi et pour soi). En tant qu'élève, il possède cette intention, qu’éventuellement il réalise pour lui-même. Il est le sujet d’une intention d’enseigner, dont il n’est pas nécessaire de qualifier d’abord l’origine et qui porte sur lui (de X, à soi). En tant qu'élève, il est le sujet de cette intention dont il peut partager l’origine, et qu’éventuellement il réalise pour une part, sur lui même. Mais pour décrire la position de l'élève du point de vue du maître, les mots nous manquent : ils montrent ainsi la dissymétrie de la relation didactique.
Le sujet d’une intention d’enseigner se conçoit, lorsqu’elle est par exemple le fait du maître et qu’elle porte sur l'élève (de soi, à Y). Une telle intention n’est pourtant pas portée en totalité par le maître, et l'élève lui-même peut en assumer une part non négligeable. Mais on ne peut concevoir l’intention d’apprendre comme le fait du Maître : ce sens n’est pas donné par la langue, le maître ne peut avoir une intention d’apprendre …qui porterait sur l'élève, parce que l’intention d’apprendre porte nécessairement sur soi-même. Il nous faut comprendre cela comme un phénomène institutionnel important : nous sommes par là amenés à considérer que l’intention d’apprendre ne se partage pas, sauf à nommer « apprendre » l’enseignement lui-même (comme nous l’avons vu faire dans certains cas aux institutions didactiques qui cherchaient un moyen d’effectuer ce partage, et d’assumer pour leurs élèves une intention d’apprendre que ceux-ci semblent ne pas manifester), parce que cette intention s’avère nécessaire à la réalisation de la relation didactique et que ces institutions ne peuvent dénoncer leur mission d’enseignement : elles doivent montrer à leurs sujets comme à leur environnement qu’elles remplissent leur fonction sociale et qu’elles « font apprendre ».
Non pas parce que « on ne peut apprendre que de soi-même », comme certains ont pu le dire en forme de paradoxe, mais parce que le maître ne peut avoir l’intention d’apprendre pour que l’élève ait appris : à cet effet, il ne peut avoir que l’intention d’enseigner. Si l’on peut faire quelque chose à quelqu’un, une personne ne peut se faire (à elle même) quelque chose pour que cela soit fait à autrui : porter l’intention d’apprendre a un sens réfléchi.
Il faut remarquer que ce ne serait pas le cas si l’intentionnalité pouvait être portée par une institution. Une institution didactique par exemple produit des conditions telles, qu’un effet donné (un apprentissage) en est la conséquence, pour une personne donnée : nous ne lui attribuons pas pour autant l'intentionnalité didactique, et nous pensons l'intentionnalité comme une propriété des personnes, quand même observerions-nous que cette propriété ne se réalise jamais que dans le cadre d’une institution. Car une institution peut faire, des personnes qu’elle s’assujettit, des « apprenants » …elle peut alors « penser » que les dispositifs par lesquels elle permet que l’intention didactique se réalise sont les porteurs réels de l’intentionnalité. Une institution peut penser « agir » et « vouloir » à la place des sujets et ce faisant, oublier ou même, dénier la nécessité de l’intentionnalité des acteurs. Mais le « faire » institutionnel est toujours effectué par le moyen d’un sujet de l’institution, qui est aussitôt le porteur  conscient ou non  de l’intention institutionnelle.

Le manque à vouloir est un manque à pouvoir, dans le cas de l’intention d’apprendre comme dans d’autres cas. Il induit un manque à agir institutionnel qui est bien sûr insupportable à toute institution, un manque à agir qui est insupportable au professeur ou à l’éducateur qui porte l'intentionnalité pour l’institution didactique, et le fait peut-être avec passion. Nous allons envisager rapidement quelques conséquences de cette proposition.

L'intention d'apprendre et les institutions didactiques TC "L'intention d'apprendre et les institutions didactiques" \l 9 

L’impossibilité à porter pour l’élève une part de l’intention d’apprendre est d’autant plus insupportable à l’institution didactique si, de ce fait, l’institution répond mal à la demande sociale qu’elle prend en charge et se trouve affaiblie.
L'Éducation Nationale en crise donne ainsi l’existence à une « solution » relevant de la magie institutionnelle. Devant le peu d’intention didactique personnelle de certains de ses sujets, et parce que cette intention propre lui manque pour réaliser sa fonction, l’institution vise à court-circuiter la médiation de l’intentionnalité en tentant d’instituer des dispositifs didactiques qui se veulent d’effet immédiat et qui, pour cela, dénient l’action du professeur. Les institutions qui devaient « faire apprendre » cherchent alors immédiatement à « apprendre aux élèves », comme nous l’avons noté plus haut. Mais la démission institutionnellement organisée de l’enseignant ne produit pas ipso facto la mobilisation de l’enseigné. Les élèves n’apprennent apparemment pas plus, lorsqu’ils n’ont pas d’intention d’apprendre ou celle de s’enseigner pour apprendre, si on renonce même à porter l’intention de leur enseigner. Aussi, en un second temps et au vu de l’échec de la première solution, le mot d’ordre institutionnel peut devenir « apprendre (aux élèves) à apprendre », en une fuite en avant irrémédiable.
L’usage courant en pays d’Oc, plus souple sur les formes réfléchies des verbes (On dit : « Je me le suis pensé » pour montrer le soliloque) et plus explicite sur la gestion des rapports de force (On dit : « Retenez-moi ou je fais un malheur », cela permet parfois d’éviter d’être mis en situation de le faire), forme en certaines circonstances des expressions qui pallient le manque. « Je vais lui apprendre, moi ! » peut-on s’écrier, sûr d’être entendu parce que l’on annonce par là que l’on dispose, en plus des moyens didactiques, de moyens coercitifs aptes à forcer la manifestation de l’intentionnalité nécessaire, et que l’on est prêt à mettre en oeuvre ces moyens (« lui », ou « elle », saura en effet, par cela, son assujettissement à une situation institutionnelle où il, elle, devra figurer muni des signes objectifs montrant que l’« apprentissage » en question est bien réalisé) ; il y faut cependant des situations où l’épisode didactique qui vient épuise d’un coup l’intentionnalité : nul ne peut s’installer, dans une relation didactique volontariste comme celle-là.
Si l’intention d’apprendre ne se partage pas, il est possible en revanche de porter soi-même la plus grande part de l’intention d’enseigner à soi-même, dans le but d’apprendre. Il est possible, par exemple, de le faire en s’aidant d’outils appropriés : c’est ce que montrent les systèmes d’enseignement à distance, bien sûr ; mais il existe des systèmes didactiques où l’intention d’enseigner extérieure semble plus ténue encore : ouvrages spécialisés pour autodidactes, compilations d’exercices corrigés, etc., réalisent semble-t-il les dispositifs institutionnels minimaux.

Nous considérerons donc que la dissymétrie de la relation didactique se déploie dans la dimension de l’intentionnalité qui, pour ce qui est d’apprendre, ne se partage pas  on ne peut apprendre que pour soi-même - tandis qu’elle se partage pour ce qui est d’enseigner  on peut s’enseigner à soi-même comme on peut enseigner à d’autres, même si on ne peut s’enseigner tout à fait seul.

Conclusion TC "Conclusion" \l 9 

Nous conclurons cette introduction à notre problématique sur deux propositions qui se fondent sur les travaux existants en didactique des mathématiques, et que nous reprendrons pour l’heure à notre compte, même s’il est dans nos intentions d’en apprécier plus loin la pertinence.
Premièrement, l’instrumentalité d’un dispositif didactique nécessite dans tous les cas la présence d’un dispositif d’objectivation des savoirs appris. Bien des intentions d’apprendre, qui nécessiteraient un enseignant qu’elles ne trouvent pas autrement, trouvent à se réaliser par le partage de l’intention d’enseigner entre un étudiant et un auteur qui ne se rencontreront pas en personne, si l’auteur et l’étudiant ont su trouver un moyen de réaliser l’objectivation des apprentissages. Ainsi, la relation didactique à un domaine d’étude n’est pas en principe une relation instrumentale  ce qui est fait n’est fait que pour aider à la réalisation d’une intention didactique -, mais le succès didactique se mesure toujours à l’aide d’une aptitude instrumentale manifestée, qui objective les rapports au savoir qui ont été noués. Ce phénomène est pointé comme un paradoxe, parce qu’il produit pour certains élèves, attachés à la lettre de l’injonction didactique, une injonction paradoxale : il est étudié en Quatrième Partie de ce travail, dans le cas de Sabine.
Deuxièmement, s’il est certain que l’on peut s’enseigner à soi-même bien sûr lorsque l’autre y manque, comme le font parfois les élèves euxmêmes, nous montrerons  ce qui est essentiel pour les conséquences que l’on peut en tirer pour la compréhension des faits didactiques  que le partage de l’intention d’enseigner est nécessaire à l’apprentissage scolaire effectif. C’est une fonction du discours professoral sur le savoir, que de créer ce partage. Une telle proposition mérite certainement un examen plus approfondi que celui auquel nous pouvons la soumettre à présent : si elle est vérifiée et si elle peut fonder des études didactiques, démontrer alors l’absence, dans un système à visée didactique, d’un partage possible de l’intention d’enseigner démontrerait aussitôt l’impossibilité, dans le système étudié, de l’apprentissage attendu.


Le chercheur et l’intentionnalité didactique TC "Le chercheur et l’intentionnalité didactique" \l 4 

La dissymétrie de la relation didactique est inscrite dans les lieux institutionnels d’enseignant et d’enseigné, où se fondent les assujettissements du maître et de l’élève. Elle donne une première définition fonctionnelle possible de ces lieux, ce qui justifie notre travail de redéfinition des termes primitifs de la description de l’espace du didactique et la poursuite de ce travail en direction de la modélisation de cet espace. Cela nous est d’autant plus nécessaire, que la difficulté du travail de dégagement des notions relatives à la description d’une situation où se réalise une intention didactique se redouble, du fait que le chercheur, qui est ou a été sujet d’une institution didactique, discourt spontanément en s’impliquant dans telle relation personnellement vécue qui fait pour lui, consciemment ou non, référence.

Qui connaît le didactique de l’intérieur (c’est-à-dire de l’un des points de vue possibles que donne la dissymétrie de la relation didactique) tient « naturellement » discours d’un point de vue qui est et reste partiel, parce que la perspective en est faussée par les phénomènes transférentiels dus à sa position d’observateur impliqué.
La pédagogie par exemple se place dans la position du professeur : dans la position d’avoir à informer le professeur ; pour informer l’action enseignante, elle s’appuie sur les sciences qui peuvent s’intéresser à l’élève ou au savoir : les « autres » de la relation didactique, vus du point de vue du professeur. Pour l’aider dans son effort de maîtrise de l’action enseignante, elle convoque ces sciences, qu’elles nomme « fondamentales ».
Nous cherchons pour notre part à nous démarquer de ce type d’approche, et pour cela, à quitter le point de vue du professeur. Complémentairement, en nous dépouillant des vues proposées par des approches exogènes, nous cherchons à travailler les questions que nous soulevons à l’aide exclusive des modèles du fonctionnement didactique que les théories didactiques ont construit et dont elles contrôlent les articulations. De tels modèles sont bien entendu réducteurs, mais en limitant nos explications à ce qu’ils expliquent, nous pouvons espérer montrer ce qui en fait la pertinence, comme ce qui leur échappe et qui relève pourtant du didactique.

A l’intérieur de ses limites, chaque discipline reconnaît des propositions vraies ou fausses ; mais elle repousse, de l’autre côté de ses marges, toute une tératologie du savoir. L’extérieur d’une science est plus et moins peuplé qu’on ne croit : bien sûr, il y a l’expérience immédiate, les thèmes imaginaires qui portent et reconduisent sans cesse des croyances sans mémoire ; mais peut-être n’y a-t-il pas d’erreurs au sens strict, car l’erreur ne peut surgir et être décidée qu’à l’intérieur d’une pratique définie ; en revanche, des monstres rôdent dont la forme change avec l’histoire du savoir..

Lorsque nous cherchons à rendre compte de phénomènes dont les discours produits par les modèles existants n’arrivent pas à se saisir, il nous faut faire entrer dans le discours théorique ce qui jusque là échappait, en renonçant à convoquer une explication externe ad hoc. Cela nécessite un travail toujours « à renouveler », ne serait-ce, par exemple, que forger le vocabulaire de la plus infime description.
Par exemple, parle-t-on jamais de l’enseignement tout à fait autrement que « en professeur » ? Parlerait-on à partir d’un « discours d’élève » ? Pourrait-on tenir, de la place d’élève, un discours « autre » sur l’école ? Y a-t-il aujourd’hui une place institutionnelle autre qu’une place d’enseignant, pour parler des questions de l’école avec quelque autorité ? Sans doute, la place « d’ancien mauvais élève qui a réussi malgré l’école » peut sembler posséder quelques caractères intéressants et donner quelques mérites à qui s’en empare, puisqu’elle apparaît dans un premier temps comme une position critique, mais elle ne procure que ce bénéfice passager : la critique en effet, si elle donne une première analyse, ne permet pas de construire des savoirs didactiques.
Par exemple, Marguerite Duras a produit, dans les années 70, un conte pour les enfants intitulé : « O, Ernesto ! ». Elle y raconte, avec l’intuition qui caractérise les plus grands romanciers, l’histoire de ce petit garçon qui ne veut pas aller à l’école, parce que la maîtresse prétend lui enseigner des choses qu’il ne connaît pas, ce qui lui est insupportable.
— « Comment feras-tu, si tu ne vas pas à l’école ? » lui demandent ses parents ?
— « J’apprendrai tout seul, en rachachant ! » répond Ernesto.
Pourtant, nous sommes aveugles et stupides face au texte du romancier. Il faut la construction théorique que propose le travail didactique pour arriver à comprendre que sa puissance d’émotion, sa force questionnante vient de ce qu'Ernesto met le doigt sur un phénomène essentiel de l’entrée à l’école : à l’école, l’enfant est fait élève en étant fait « ignorant », ce qui peut être, de son point de vue, une atteinte à sa personne. C’est le cas par exemple s’il ne désire pas, d’avance, acquérir par ce moyen, socialement déterminé, le savoir.
Voici encore un exemple de discours tenu, dans un texte de didactique même, « du point de vue du professeur » : dans les textes inauguraux pour les études présentées ici que sont « Les échecs électifs en mathématiques » (juin 1985), et « Un point de vue introductif à la didactique des mathématiques, du côté du savoir » (juin 1986), nous trouvons parfois un discours sur l’intentionnalité didactique où nous repérons la trace d’un « discours de professeur » récurrent, comme nous l’analysons ci-dessous.
Alors que le didacticien parle - depuis longtemps, en principe - d’intention didactique, il arrive donc que ce soit le professeur en lui qui parle (c’est-à-dire, le professionnel de l’enseignement). Le professeur nomme systématiquement cette intention, sans y penser autrement (c'est-à-dire que ce faisant il la nomme telle qu’elle se vit, pour lui, quotidiennement), d’une expression qui enregistre une dissymétrie de la relation didactique : « la volonté d’enseigner » et « le désir d’apprendre ». (On remarque ici que le désir de savoir, et pour cela d’apprendre, est toujours supposé appartenir à l’enfant.) Or, ces expressions, nous les trouvons encore dans la transcription d’une intervention orale faite au printemps 1990 et elles figurent, telles quelles, dans une analyse didactique écrite datant de 1989 (annexée à cette thèse). Comme si la dissymétrie de la relation didactique (que nous avons construite théoriquement ci-dessus) avait produit immédiatement (dans son expression culturelle ordinaire et en particulier dans la culture du professeur de mathématiques qui parle alors) une dissymétrie des investissements imaginaires du maître et de l’élève. Comme si, c’est ce que semble induire l’expression dans les textes cités, la position d’enseignant appelait  nécessitait même - la volonté comme expression instituante de l’intention d’enseigner, tandis que la position de l’enseigné nécessiterait - rien de moins - le désir comme moyen individuel de l’intention d’apprendre.

La présence, jusque dans les analyses didactiques, d’un discours marqué du parti pris du professeur, montre qu’il faut par conséquent persévérer humblement dans le travail du « contre-transfert épistémologique d’enseignant » si enseignant nous sommes, ainsi que Devereux propose de le faire avec méthode. Notre vocabulaire ne doit donc pas a priori être porteur d’une telle dissymétrie. Nous employons ainsi le terme d’intention didactique, pour nommer à la fois les intentions d’enseigner et d’apprendre : nous voulons désigner d’un seul terme la réalité que nous étudions.
Les modes institutionnels de réalisation de l’intention didactique, et, les formes particulières de dissymétrie de la relation didactique qui en résultent éventuellement, sont notre objet d’étude.

Conclusion du premier chapitre TC "Conclusion du premier chapitre" \l 5 
La relation didactique est institutionnellement déterminée

De fait, il importe peu en ce moment de notre argumentation de savoir comment, dans une institution donnée, se partage l’intention d’enseigner. Comment l’élève en assume une part, ou si le maître la porte entière. Nous abordons l’étude de l’institution par le point de vue de l’élève, parce qu’il est nécessaire de construire les outils de l’étude du didactique et que nous ne pouvons prétendre à les construire tous ensemble, mais nous pourrions presque aussi bien, en principe, atteindre à l’objet de notre intérêt à partir de l’étude de l'enseignant, et sans doute le travail engagé ici ne sera-t-il pas mené à bien de manière fiable avant que l’étude conjointe de l'enseignant n’ait été entreprise : nous en donnerons quelques éléments, afin de tester nos premiers résultats.
Nous étudions le fonctionnement didactique, pour les sujets de l’institution. L’élève est comme le maître, un « sujet de la relation didactique ». Dans la classe, il est une personne venue en position d’enseigné comme le maître est la personne venue en position d’enseignant. C’est à ce titre que l’élève nous intéresse, et que l’intérêt que nous lui portons suppose des moyens d’investigation spécifiques de l’approche didactique - moyens que nous devrons construire. En ce sens, notre approche ne s’intéresse pas a priori aux personnes, qui sont particulières, mais à la manière générale dont une personne vient être un élève. Les personnes ne nous intéressent ainsi que parce que nous posons à leur endroit des questions générales, c’est-à-dire des questions relatives à leurs relations institutionnelles.

Comment des particularités personnelles peuvent-elles trouver à s’inscrire dans le cadre des caractères spécifiques de l’espace didactique étudié ? Quels sont les caractères de l’espace mis en place par des institutions didactiques qui permettent que des personnes trouvent à s’y s’inscrire ? Ce sont là, sous une forme maintenant plus élaborée, des questions qui émergent des questions que nous avions initialement posées. Nous ne les traiterons pas dans le cas du maître, considérant ici que sa position ne doit être questionnée que si l’absence d’un tel questionnement obère la poursuite du travail sur l’élève. Dans le cas de l’élève, qui nous intéresse, nous pourrions les dire ainsi :

Comment cet élève-ci peut-il apprendre, dans cette écolelà ?
Que peut-il y apprendre de ce qu’on lui enseigne ?
Comment cette école particulière permet-elle, à des élèves particuliers, l’apprentissage de certains savoirs ?
Comment ne le permet-elle pas à d’autres ?

Avant de montrer comment la question de l’élève est déterminée par les contraintes temporelles de l’enseignement, le savoir, qui est l’enjeu de la relation didactique, doit entrer en scène. Nous verrons alors que le savoir enseigné  ses propriétés déterminent ce que l’élève peut apprendre, et comment il l’apprend  est déterminé par les contraintes de l’enseignement, parce qu’il mesure la progression didactique


Première partie

Présentation du problème, l'étude de l'élève

Deuxième chapitre

 TOC Le savoir dans l’espace didactique
Le savoir nécessite les institutions didactiques 38
Savoir et connaissance 39
Les savoirs et l'intention didactique 41
L'émergence conjointe des savoirs et des institutions didactiques 42
Conclusion 43
Les « rapports au savoir » des élèves 45
Décrire l'acte de « savoir » ou de « connaître » 46
Décrire les fonctions des rapports au savoir 48
Conclusion 50
Le fonctionnement temporel des systèmes didactiques 52
Le texte du savoir et le temps didactique 53
La logique temporelle de l'enseignement 55
La logique de l'apprentissage et les paradoxes de l'intentionnalité didactique 56
Les articulations des temps différents 57
Conclusion 58

Conclusion du deuxième chapitre : L’articulation du temps personnel au temps institutionnel doit être théoriquement construite 60


 Deuxième chapitre
Le savoir dans l’espace didactique TC "Le savoir dans l’espace didactique" \l 4 

L’espace du didactique est tracé par le projet de donner à « des personnes », des membres d’une société, l’accès direct à des « savoirs ». Nous l’avons pressenti dès le moment où nous avons remarqué l’insistance sociale sur la fréquentation scolaire et l’obligation de l’instruction. C’est sans doute que les « savoirs » sont des formes de la connaissance dans lesquelles seul un « enseignement » permet d’entrer : faute de l’enseignement approprié, une intention didactique à l’endroit d’un savoir peut manquer à se réaliser.

Le savoir nécessite les institutions didactiques TC "Le savoir nécessite les institutions didactiques" \l 5 

Dans certains cas, une relation didactique du type « apprentissage » semble il est vrai efficace. Mais dans le cas particulier des mathématiques, les gestes d’un « maître » qui pratique le savoir ne donnent pas à voir les éléments de sa pratique qui font le sens de celle-ci. Les gestes de la production mathématique ne sauraient sans doute être appris à partir d’un spectacle vide de sens, ne serait-ce que parce que les problèmes que le maître résout ne feraient pas problème pour l’apprenti mathématicien.
De plus, ce dispositif didactique qu’est l’apprentissage transmet des connaissances personnelles qui ne viennent qu’avec l’âge, et qui évoluent avec la lenteur du renouvellement des générations : le temps de leur efficience sociale s’en trouve réduit, le rythme de leur évolution ralenti. Nous avons posé le problème particulier de l’approche didactique, sur la question de l’apprentissage, parce que « apprendre sans intention didactique institutionnellement incarnée » n’est pas a priori identique à « apprendre en position d’enseigné ».
L’intention d’apprendre de l’élève est institutionnellement garantie par sa participation aux gestes d’élève appelés par le dispositif didactique : ces gestes sont attendus par l’institution, ils assurent l’existence et la pérennité de la relation didactique particulière dans laquelle il est élève. L’intention d’enseigner à laquelle il est assujetti (qu’elle soit le fait unique du professeur ou qu’il la partage) est, elle aussi, institutionnellement garantie par un dispositif spécifique et un ensemble de gestes d’enseignement instituant en particulier le dispositif didactique pour l’élève.
Ainsi, l’espace de l’intentionnalité didactique ouvre l’espace du didactique.
Cet espace, l’espace didactique, est organisé autour du savoir, qui est donc l’objet transactionnel de la relation didactique. Pour nous, ici, l’espace didactique s’ouvre autour du savoir mathématique, mais il est encore trop tôt pour que cette spécification nous soit nécessaire : nous devons encore montrer comment le savoir nécessite une relation didactique d’« enseignement ». C’est ce que nous allons réaliser à présent.

Savoir et connaissance TC "Savoir et connaissance" \l 9 

La connaissance d’un objet est le rapport à cet objet qui est nécessairement la propriété personnelle de celui qui connaît. Une connaissance, ainsi, n’est pas détachée de la personne qui connaît. Cette distinction n’est pas faite par la langue courante qui permet l’opposition arbitraire de connaissance et savoir, mais pour notre part nous pointerons d’abord le rapport, personnel, de connaissance (ainsi par exemple « lancer l’hameçon et l’appât avec la canne à pêche sans que le fil ne s’embrouille », « aller à vélo », etc.), ce qui interdit que l’on connaisse autrement qu’un peu, bien, pas du tout, et par exemple qu’on connaisse seulement d’une certaine façon, ou dans certaines conditions : on sait d’un coup, on est supposé connaître tout le temps et partout ; la connaissance est un rapport de maîtrise. On connaît mal, au début, et « le métier rentre », avec les premiers ratés.
Nous utiliserons alors exclusivement le terme de rapport de savoir dans le cas de ce type particulier de rapport à un objet qui peut se découper en rapports partiels parce qu’il n’est pas entièrement contenu dans les gestes maîtrisés par une personne, mais comporte des dispositifs impersonnels qui peuvent se découper en objets distincts. Ces dispositifs sont des rapports de connaissance devenus objets techniques, des rapports réifiés pouvant être en partie au moins dépersonnalisés et, de ce fait, décontextualisés. Cela est particulièrement important dans le cas d’une relation didactique du type « enseignement » : un discours peut se dérouler à propos d’un rapport du type savoir , parce que ce savoir n’est pas attaché à une personne mais vient dans le texte qui le présente comme un ensemble d’objets extérieurs à la personne et existant dans la société. Le discours peut en effet être structuré comme un texte, linéairement, et assurer ainsi la présentation successive des différents objets que sont les dispositifs impersonnels constitutifs du savoir : un ensemble d’objets relativement autonome des « savants » qui l’ont produit, auquel l’élève doit établir un rapport.

On peut noter immédiatement que le rapport à un objet de savoir peut donc être un rapport de savoir ou un rapport de connaissance. Cette propriété est caractéristique du savoir : on peut étudier le savoir, et au terme de l’étude, on peut « le connaître », d’un rapport personnel où le savoir est outil d’une action ; ou bien, on peut « le savoir », d’un rapport où le savoir est objet de discours.

Nous poserons alors par hypothèse qu’un savoir est un objet technique : plus précisément, un ensemble de dispositifs techniques avec lesquels une personne entre en rapport. Les savoirs « se pratiquent » : les mathématiques bien sûr, le latin, ou la littérature comparée, la langue naturelle même, sont des savoirs. Un savoir est, comme technique, composé de ce qui fait une technique : des dispositifs, donnés par une institution - ce sont les objets impersonnels transmissibles , les objets de savoir sont des outils ; des gestes, appelés par le dispositif - ceux que l’on fait quand on met en oeuvre le dispositif -, les gestes manifestent la connaissance des dispositifs du savoir, ce sont les gestes que l’on apprend quand on s’approprie des objets de savoir pour les connaître ; enfin, un discours sur le dispositif, les gestes et leurs liaisons, assure trois fonctions : le discours aide à construire la visibilité de la technique, la lisibilité des gestes (la possibilité de voir, et de comprendre) et produit de la visibilité interne, c'est sa « fonction sémiotique », il porte encore une part de la visibilité externe du dispositif comme des gestes, c'est sa « fonction emblématique », il aide enfin à la construction raisonnée et à l’évolution de l’ensemble, c’est sa « fonction théorique  »  pour les savoirs, la fonction théorique est l’équivalent de la « fonction technologique » pour les techniques.
Il est encore une propriété des savoirs comme des techniques qui justifie l’intérêt social des savoirs et, par voie de conséquence, la nécessité sociale du didactique : il s’agit de leur capacité à outiller l'action. Les savoirs ont bien sûr un usage et n’auraient pas d’intérêt s'ils n'étaient pas d'abord des savoirs opératoires : ils servent dans un domaine de réalité dont ils permettent la saisie, le travail. En quelques mots nous dirons que, en donnant un modèle de la réalité d’un domaine de réalité, les savoirs permettent, à partir de l’étude du modèle qu’ils constituent, l’émergence d’une technologie. Une technologie est à la fois une théorie et un outil de production technique c’est-à-dire conjointement un modèle de plus haut niveau, plus large qu'une technique, et le moyen de la production d'un ensemble d’outils nouveaux pour l’intervention dans le domaine de réalité modélisé : les savoirs fondamentaux aident à cette production de savoir. Les outils produits par les savoirs fondamentaux transforment en retour la matérialité du réel, dont ils se saisissent pour le modeler, ce sont encore des savoirs opératoires.

Les savoirs et l'intention didactique TC "Les savoirs et l'intention didactique" \l 9 

Enfin, nous retrouvons une propriété des savoirs repérée de longue date par le discours didactique : portés par des dispositifs, techniques, les savoirs sont descriptibles et aptes à être manipulés indépendamment des personnes par qui ils agissent (c’est la dépersonnalisation du savoir). En particulier, ils peuvent plus ou moins efficacement être ordonnés en suites, en théories de savoirs partiels, d’objets élémentaires. Nous étudierons plus loin comment cette capacité du savoir à être découpé en objets élémentaires, que l’on peut présenter « pour eux-mêmes » (c’est la décontextualisation du savoir), est essentielle à la réussite du projet d’enseignement moderne, un projet contemporain de l’idée qu’il existe une catégorie de connaissances qui peut se dépersonnaliser et se décontextualiser pour devenir échangeable La théorie de la transposition didactique a confirmé l’importance de ces phénomènes et a permis d’en entreprendre l’étude, nous n’y reviendrons pas plus longuement.
La possibilité de reconstruire les savoirs pour créer une institution didactique d’un type nouveau est l’une des intuitions de Comenius. Cet auteur en effet est un des premiers à penser que l’on peut économiser les références systématiques aux auteurs anciens que l’on montre dans une relation didactique du type « apprentissage » - longuement, en répétant parfois plusieurs années de suite le même spectacle où les « maîtres » travaillent pour eux-mêmes (ils sont maîtres au sens de maître artisan) devant un public « d'apprentis » au long cours qui sont toujours privés d’agir en personne, ne pouvant entrer dans une action qui reste souvent pour eux invoquée et ostentatoire - sauf s'ils prennent à leur tour la place en chaire. Comenius affirme que l’on peut assurer directement, en langue vernaculaire, l’entrée en rapport avec des savoirs dont on cherche à transmettre la maîtrise. La condition qu’il y trouve est qu’il faut pour cela organiser ces savoirs selon la logique de leur organisation propre et l’état de développement des enfants auxquels on s’adresse. Il tente d’ailleurs la production d’un texte des savoirs immédiatement transmissibles par le discours, mais sa culture scientifique est mauvaise et les ouvrages qui devraient servir de support à l’extension de son projet didactique contiennent des savoirs archaïques : cela le desservira longtemps, cela le desservira doublement. Les savants ne le liront pas. Les connaissances douées des propriétés nécessaires sont les connaissances scientifiques naissantes qui émergent des pratiques techniques et théoriques nouvelles, celles-là même qu’il maîtrise mal : il n’aboutira pas. A la même époque, Descartes commence de réaliser « à son usage propre », pour bien conduire son esprit et comme un effort autodidactique, ce qui était le projet de Comenius. Pour sa part, Descartes n’imaginera pas les conséquences didactiques de la reconstruction du discours scientifique dans une logique d’exposition dans laquelle il s'engage pour lui-même, appelant par son geste chacun à en faire autant. Il produira ainsi une des injonctions paradoxales qui viennent régulièrement peser sur l'action enseignante, injonctions paradoxales dont nous avons relevé la présence insistante dans les discours pédagogiques des mathématiciens les mieux intentionnés.
Ce sont justement ces connaissances-là, que l'on peut réorganiser en un texte du savoir parce qu'elles peuvent être manipulées indépendamment de leur contexte de production et par d'autres que leurs producteurs, que nous nommons des savoirs. Celles-là, dont Comenius entrevoit certaines propriétés didactiques, que Descartes cherche à produire pour s’enseigner à lui-même, que Galilée, Stevin ou Newton commencent à produire à partir des rapports existants aux techniques (à partir des savoirs techniques).

L'émergence conjointe des savoirs et des institutions didactiques TC "L'émergence conjointe des savoirs et des institutions didactiques" \l 9 

La réalisation d’un projet didactique relatif à une catégorie déterminée de savoirs suppose en effet l’existence première d’un domaine de réalité pour lequel des savoirs sont disponibles, sur lequel ils sont efficaces ; cependant, les objets techniques socialisés que sont les savoirs ne peuvent exister isolément, ils supposent l’existence conjointe d’une institution ayant pour fonction l’action dans ce domaine de réalité, la gestion des relations matérielles et humaines, des savoirs et connaissances afférents au domaine.
Ainsi, on peut observer les premiers signes de constitution de savoirs techniques socialisés dès la prise en charge par les pouvoirs locaux des premières exploitations nécessitant une technicité collectivement gérée - je veux dire les mines les hauts fourneaux et les forges, à la Renaissance, en Allemagne, le siège des places fortes, à la même période, en Allemagne comme en Italie, la meunerie, ou enfin le drainage et l’assèchement des sols comme aux Pays-Bas. En un mot, les mécanismes nécessaires aux machines éoliennes, hydrauliques et balistiques en général, qui sont dès lors inscrits dans des livres. Compilations de descriptions d’outils et de mécanismes, ouvrages descriptifs, les livres deviennent bientôt des ouvrages où sont décrites des idées d’outils et de mécanismes. De telles idées sont sans doute en premier à l’usage des artisans de haut niveau, qui réaliseront ces objets par la mise en oeuvre de dispositifs inventés d’abord sur la base de leur art, mais qui bientôt le feront par la mise en oeuvre des dispositifs produits par l’exploration systématique (au niveau de la description ou de la représentation) des problèmes, et des outils aptes à attaquer les problèmes.
Le succès des horlogers allemands et suisses proviendrait en effet de leur capacité à produire des outillages complexes spécifiques des problèmes techniques qu’ils rencontrent. Les carnets de croquis de Léonard de Vinci ne sont apparemment pas autre chose que les carnets d’idées, parfois rêveuses parfois réalistes, pouvant apparaître dans un milieu où fleurissent les carnets personnels d’idées techniques. Les fruits de cette exploration des problèmes techniques et de l’observation des inventions artisanales - inventions que l’on repense en les décrivant à l’aide des signes graphiques et dans les termes produits à l’usage des premières descriptions d’inventions et d’idées techniques - feront, le siècle suivant, la matière des livres de techniques dont l’usage se généralise bientôt à la construction navale ou à l’architecture. Déjà les savoirs de la gestion comptable et bancaire du Piémont et de Toscane, devenus mathématiques, sont l’objet d’enseignements dans des écoles d’abaque. Il faudra commencer dès lors à enseigner les savoirs nécessaires à l’usage et à l’amélioration des techniques de la production industrielle, des arts militaires, de l’architecture : il n’est plus temps de compter sur les vocations spontanées pour recruter les personnels nécessaires à leur maîtrise, et de compter sur l’apprentissage pour la formation de ces personnels.

Conclusion TC "Conclusion" \l 9 

C’est donc au sein des institutions de production technicisée que l’on trouve des savoirs à enseigner relatifs au domaine de réalité concerné. Savoirs d’une institution, liés à celle-ci, les savoirs y vivent le deuxième moment de leur dépersonnalisation : leur producteur a fait reconnaître par l’institution leur potentiel opératoire indépendant de sa personne, c’est le procès d’objectivation ; ils peuvent ainsi vivre à l’intérieur de l’institution, y être repris, modifiés, développés, y vivre leur vie institutionnelle. Leur gestion et leur développement devient autonome, dans le cadre d'une institution savante. Une institution à visée didactique se greffe sur l’institution technique initiale ou sur l'institution savante productrice des savoirs, pour assurer la permanence et le développement éventuel de l’institution qu’elle sert, en assurant la production et la reproduction du potentiel humain, l'apprentissage de savoirs, qui assure la reproduction de la force de travail complexe que ces savoirs représentent.
L’étude des objets de savoir, de leur vie institutionnelle, de leur écologie, a été menée sur de nombreux sujets : nous pourrons nous y référer si nécessaire.




Nous cherchons ici à comprendre comment l’intentionnalité didactique est indispensable à l’apprentissage des savoirs et par là même, comment les écoles se trouvent être les institutions incontournables que nous connaissons. Dans ces conditions et quel que soit le découpage du champ que l’on envisage, cet objet donné par la culture, « apprendre », ne peut pas, tel quel, nommer une partie du domaine de réalité des études didactiques. C’est pourtant ainsi que se désigne usuellement l’action organisée dans une institution didactique ; apprendre est alors, avec savoir  dans le sens d’« avoir appris » - un des termes que nous avons à reconstruire.

Les « rapports au savoir » des élèves TC "Les « rapports au savoir » des élèves" \l 5 

Puisque nous avons entrepris de nommer de la manière la plus neutre qu’il se peut les objets de notre champ de recherche, le terme même qui désigne la relation au savoir de qui « sait », doit être défini à nouveau. Apprendre nomme en effet d’un coup toutes les formes possibles de « l’apprendre » ; de même, savoir nomme toutes les formes du « savoir ». Ces termes se trouvent ainsi bien adaptés à la description du rapport aux connaissances, mais trop pauvres en nuances et en spécifications pour donner des descriptions pertinentes de ce que l’on peut observer dans une institution didactique qui organise la rencontre progressive d’un savoir en le découpant en une suite de sous-objets que l’enseigné découvre chacun à son tour.
Nous dirons donc qu’une École (une institution didactique) permet à des Maîtres (les personnes qui viennent dans l’institution en position d’enseignant) de produire, pour des Élèves (les personnes qui viennent dans l’institution en position d’enseigné) « l’émergence de rapports à des objets de savoir ».
Il reste alors à qualifier ce que sont les objets de savoir et les formes de leur organisation, ce que peuvent être les rapports d’enseigné ou d’enseignant à ces objets, les relations enfin entre les systèmes d’objets que sont les savoirs et l’émergence possible d’un rapport à ces systèmes.
Le type de description proposée, on le voit, pose aussitôt la question de la qualification des rapports aux objets de savoir et de leur description, ce qui renverse la situation initiale, où l’opposition nécessairement brutale « savoir, ou pas » nous interdisait pratiquement de penser ces problèmes. Les « rapports aux objets de savoir » seront, pour nous, chacun des gestes de l’ensemble de tous les gestes que l’on peut réaliser vis à vis de ces objets.

Décrire l'acte de « savoir » ou de « connaître » TC "Décrire l'acte de « savoir » ou de « connaître »" \l 9 

Nous avons posé que tout savoir peut être étudié comme le produit d’une institution, comme un produit technique. Un savoir peut alors se découper en sous-objets élémentaires dont la fonctionnalité peut s’étudier pour elle-même ; la présentation systématique et l’organisation des études de ces objets dans le but d’arriver à la transmission du savoir - l’enseignement - est le fait d’institutions d’un type particulier que nous nommons institutions didactiques : elles permettent qu’existent, pour les élèves, dans un ordre déterminé, des rapports aux sous-objets élémentaires du savoir visé. Nous disons qu’alors les élèves « savent » des savoirs lorsqu’ils peuvent faire exister des rapports à des sous-objets de ces savoirs, rapports qui se manifestent par leur aptitude à accomplir, avec ces objets, des gestes que l’on peut observer et décrire ; nous pouvons ainsi décrire comment les élèves savent, et ce qu’ils savent, mais aussi ce qui leur est enseigné, et comment cela leur est enseigné.

Avec l’énoncé nouveau de la question nous accédons aux outils de la qualification des rapports au savoir. En effet, le rapport à un objet de savoir, comme le rapport à un objet en général, se décrit par l’institution qui donne le dispositif d’entrée en rapport avec l’objet, par le dispositif qui appelle, provoque et organise des gestes, observables.
Ainsi, mon rapport à «  EQ \r(17) » peut se traduire par le geste « extraire la racine », geste qui sera, si le procédé d’extraction est le dispositif dit « algorithme de Babylone », commandé par ce dispositif. Voici une description succincte de ce geste : prendre une valeur approchée par défaut v1, (v1 = 4 par exemple puisque 42 = 16 +"         x->+"
   Donc,  lim  ( 1 -  EQ \F(2;x)  +  EQ \F(1;x3)  ) = 1
x->+"
Comme  lim  (x3) = +"
       x->+"
  lim  f(x) = +"
x->+"
De même,       lim  f(x) = -"
      x->+"II) Limite en +¥ð de  f(x) =  EQ \F(x2 - 1;x + 2) 
(Même méthode : factorisations en x et x2, sans commentaires notés par l élève ; il s’agit bien des premiers « exercices » après le tableau des limites, mais ils sont donnés en exemple, l'enseignant seul les traite, ils restent « dans son lieu » : ils ne sont pas « donnés à faire » à l’enseigné)
5) Limite d'un polynôme à l'infini :

Propriété :
La limite à l'infini d'un polynôme est celle de son terme de plus haut degré.
Exemple :
f(x) = 5x3 - 2x2 + 1
f(x) = 5x3( 1 -  EQ \F(2;5x)  +  EQ \F(1;5x3)  )comme  lim  ( 1 -  EQ \F(2;5x)  +  EQ \F(1;5x3)  ) = 1
x->+" 
  lim  f(x) = lim  (5x3) = +"
x->+"   x->+" 
De même  lim  f(x) = lim  (5x3) = -"
x-> -" x-> -" 
6) Limite à l infini d une fonction rationnelle :

Propriété :
La imite à l infini d une fonction rationnelle est celle du quotient des termes de plus haut degré.
Exemple :
I)    f(x) =  EQ \F( 5x2 - 2x ; 3x2 - 1 )      (...)
II)    lim   EQ \F( 5x2 - 1 ; 2x2 - 3 )     (…)
Propriété :
a, b, c, étant infinis ou réels,
si  lim  f(x) = b  et  lim  g(x) = c  alors lim  (gof)(x) = c
   x->a  x->b  x->a
Exemple :
limite de f(x) =  EQ \R(x2+2x-3)   en +¥ð (...)
Exercices :
(Il s agit, à proprement parler, des premiers exercices que feront les élèves de la classe. Nous n avions précédemment que des exemples, i.e. : des exercices que le professeur traite lui-même.)
Limite à l infini de :
a) f(x) =  EQ \F( \R(x4+x-1) ; x - 2 ) 
 f(x) =  EQ \F( \R(x4( 1 + \F(1;x3) - \F(1;x4) )) ; x( 1 - \F(2;x) ))  =  EQ \F( x2\R( 1 + \F(1;x3) - \F(1;x4) ) ; x(1 - \F(2;x) )) 
f(x) = x  EQ \F( \R( 1 + \F(1;x3) - \F(1;x4) ) ; 1 - \F(2;x)) 
donc lim  f(x) = lim x = +¥ð
+"  +"Énoncés des exercices suivants (Nous ne les traitons pas ici.) :

b) f(x) =  EQ \F( 2x - 1 ; \R(x2 + 3)) 

c) f(x) =  EQ \R(x2 + 1)   - 3x2 + 1
d) Limite à l infini de f(x) =  EQ \R(x2 + 2x - 1)   + x
(Changement de forme indéterminée.)

e) f(x) = 3x + x.sinx

etc.
Fin du cours de Delphine sur les limites infinies
Un objet de savoir inattendu TC "Un objet de savoir inattendu" \l 9 

Nous observons d'abord, à partir de l'interaction que nous avons eu avec elle, et à l'aide de son cahier de mathématiques, comment l'enseignant de la classe de Delphine gère, à l’occasion d’un enseignement qui porte officiellement sur le calcul des limites infinies, la « reprise du rapport ancien à un objet de savoir institutionnel ». C’est une première occurrence de notre objet d’étude.
L’observation porte sur l’objet O1 : la factorisation des expressions polynomiales.
La reprise du rapport institutionnel à la factorisation RI(O1) est, dans ce cas particulier, gérée par le moyen des exercices (donnés à voir, ou à faire, aux élèves). Mais  cela est tout à fait normal  cette gestion est tout entière implicite. La factorisation O1 n’est jamais nommée dans le cahier de Delphine, la transformation du rapport institutionnel à « la factorisation » n’est pas demandée, la reprise nécessaire de ce rapport n’est jamais indiquée.
L’injonction didactique portant sur cet objet de savoir se fait en effet par l’introduction d’un objet nouveau O2, qui semble-t-il n’a pas d’autre fonction didactique que de garantir la nécessité de la reprise du rapport ancien : cet objet nouveau est la recherche de limites de fonctions qui ne sont pas des fonctions polynômes, mais qui sont formées à partir de fonctions polynômes. Nous allons montrer que l’introduction de O2 est faite dans un seul but : pour que le travail de la factorisation O1 se fasse, sur ces fonctions ; pour que soit passé un nouveau contrat didactique à propos des manipulations standard d'expressions algébriques, un contrat comprenant un geste nouveau, à mettre en œuvre dans les situations de calcul de limites.

Tel est l’usage de la relation de dépendance fonctionnelle de la factorisation O1 au calcul des limites infinies, pour des fonctions qui ne sont pas des fonctions polynômes O2, que ce nouveau geste de factorisation outille : pour ces fonctions particulières, les théorèmes que le professeur vient de dicter ne sont pas valides, parce que le degré de ces fonctions est supposé inconnu. Chacun agira donc comme s'il était impossible de définir un degré, pour de telles fonctions : la question ne sera pas posée. La reprise du rapport ancien à la factorisation est demandée pour les seules expressions de fonctions non polynômes qui peuvent être rendues disponibles à ce moment de l’année, pour ces élèves : les fonctions « racines de fonctions polynômes ».
Si leur présence avait pour objet l’enseignement du calcul des limites de fonctions composées de fonctions polynômes et irrationnelles, il serait aisé de définir leur degré comme un degré fractionnaire. L'étude de ces fonctions particulières se compléterait par l'étude de leurs variations et la recherche de leur représentation graphique. Si leur présence n’avait pas, comme c'est le cas, un enjeu didactique : montrer aux élèves le geste de factorisation qu’il faut apprendre, mais un enjeu instrumental : l’étude d’un type particulier de fonctions que les élèves doivent savoir réaliser, la gestion didactique serait tout autre. Par exemple, l’enseignant accepterait de parler de degré rationnel d’une expression algébrique, et montrerait l’extension possible du théorème sur « les termes de plus haut degré », puisque c'est un théorème qu’il vient de dicter. Cela ferait sortir la notion (préconstruite elle aussi) du degré d’une fonction du domaine des fonctions polynômes (un domaine défini par contrat, car si l’objet polynôme est un objet à proprement parler mathématique, c’est encore un objet préconstruit), c’est-à-dire que cela organiserait la reprise du rapport à l'objet « degré d'une fonction » : le degré ne serait plus la propriété exclusive des fonctions polynômes (mais il pourrait rester encore une notion préconstruite, si la reprise était implicite, l’enseignant montrant seulement « comment faire »). Cela ferait sortir cet objet de la séquence d'exercices où nous le rencontrons, pour en faire un objet d'enseignement explicite : l'objet d'un cours.
Ce n’est manifestement pas souhaité, ici.

Conclusion TC "Conclusion" \l 9 

Quelle est alors l’utilité de la reprise proposée, au delà du traitement des questions portant sur O2, les fonctions « racines de fonctions polynômes », dans la mesure par exemple où ces questions ne sont jamais présentes dans les énoncés d’examen ? Nous pourrions proposer une réponse de bon sens : « C'est parce que le minimum exigible d’un élève ne peut être ce qu’on lui demande exactement lors de l’apprentissage, et qu’il faut viser plus haut pour obtenir la moyenne », mais cela ne correspond pas à la réalité didactique de la classe que nous observons par le moyen du cahier de Delphine.
Pour le comprendre, nous devrons faire appel à la manière dont cette observation a pu être produite : nous ne sommes pas allés directement en ce point du cahier sans y avoir été amenés par un indice essentiel pour notre propos : Delphine ellemême nous y a  indirectement - conduits, par son attitude embarrassée dans un calcul de limite, lors d’un devoir surveillé. Ces embarras ont attiré notre attention sur son cours de mathématiques et plus particulièrement sur « la factorisation du terme de plus haut degré dans la partie polynomiale d’une fonction non rationnelle formée sur des fonctions polynômes ». C’est donc un efficace biographique qui nous a montré cet épisode didactique particulier.




Delphine nous a conduit à l’observation précédente par son attitude embarrassée dans un calcul de limite, lors d’un devoir surveillé. Nous l’avons interprété comme un épisode didactique, comme la manifestation de sa rencontre avec de l’ignorance. Ces embarras de Delphine révèlent la forme de son rapport au savoir dans cette circonstance, ce qui a attiré l'attention sur son cours de mathématiques et plus particulièrement sur « la factorisation du terme de plus haut degré dans la partie polynomiale d’une fonction non rationnelle formée de fonctions polynômes », puis sur « le théorème donnant la limite du produit de deux fonctions de limite infinie ». Nous rendons compte ici de ces embarras, et de la manière dont ils se sont manifestés.

Le rapport de Delphine à la factorisation du terme de plus haut degré, dans le calcul de limites TC "Le rapport de Delphine à la factorisation du terme de plus haut degré, dans le calcul de limites" \l 5 

L’observation proposée est une observation « naturelle », non provoquée. Delphine, l’élève de Terminale D dont nous avons donné un extrait du cahier, suit des cours particuliers de mathématiques depuis le 30 octobre de son année de terminale, auprès d’un intervenant I.
Voilà aujourd’hui cinq séances que I et Delphine travaillent sur le thème de l’étude des fonctions. Le travail effectué durant ces séances prend normalement pour objet les exercices, devoirs en classe, devoirs à la maison déjà faits. Il consiste en l’étude de ce que Delphine a fait, dont elle conserve la trace en apportant ses brouillons, et de l’étude ce qu’elle aurait pu faire, si elle avait disposé des réponses aux questions a posteriori qu’elle pose. Ce jour-là (lundi 10/12/90), Delphine arrive avec « beaucoup de questions à poser » : elle a préparé trois questions sur le devoir en classe de la veille. En effet, « ça n’a pas bien marché » dit Delphine, alors même qu’elle peut annoncer un « 13,5 » pour le devoir en classe précédent. Sa première question porte sur des calculs de limites. Deux fonctions comportant le logarithme apparaissent successivement dans l’énoncé, on demande leur étude sur IR+*.

D’abord la fonction g(x) = 1 + x.( 1 - lnx ),
puis la fonction      f(x) =  EQ \F( lnx ; 1 + x )  

Pour chacune des fonctions, Delphine a, pense-t-elle, « déterminé l’ensemble de définition » sans difficulté, mais elle dit qu’en revanche elle « n’a pas réussi à lever l’indétermination ». I oriente aussitôt le travail sur la détermination de la limite de f en « plus l’infini ». Cette limite a bien sûr fait problème, pense-t-il, et il s’étonne tout haut de ce que Delphine n’ait pas su faire appel aux théorèmes pertinents pour son propos. Delphine avance pour sa part qu’elle dispose bien d’un théorème à ce sujet, mais qu’il ne s’applique pas ici, parce que le dénominateur n’est pas x lui-même. I lui fait observer qu’il aurait suffi d’écrire :

f(x) =  EQ \f(lnx;1 + x)  =  EQ \F( lnx ; x.( 1 + \F( 1 ; x )))  
     =  EQ \F( lnx ; x )  .  EQ \F( 1 ; 1 + \F( 1 ; x ))   —>ð 0ð*ð1ð =ð 0ð
On comprend dès lors l intérêt du travail qui a pris place deux mois plus tôt dans l histoire de la classe : pour pouvoir « appliquer le théorème » du cours sur les limites en +¥ð ðde fonctions comprenant des logarithmes (théorème qui porte sur le rapport   EQ \f(lnx;x) ), il faut savoir, sans même devoir y penser, « mettre x en facteur dans l’expression x + 1 » parce que ce geste « fait apparaître un x, et une expression de limite finie dont le signe seul risque d’intervenir, une expression qui se trouve donc être inerte pour la question ». Il faut encore que ce savoir d’usage résiste au changement de la situation, il faut que l’élève sache qu’ici ce geste peut toujours se faire, alors que la situation est nouvelle en comparaison de celles où ce geste était pertinent, dans le chapitre sur les limites infinies. La difficulté est donc, ici, due à l’utilisation de la technique de factorisation dans un cas nouveau, conjointement à l’utilisation du théorème nouveau (La limite à l’infini du quotient   EQ \F( lnx ; x ) est zéro) dans un cas où ce théorème nouveau n’est pas d’application directe.
C’est ce que les psychologues appellent une tâche complexe, et l’on sait, comme cela va être observé ici, que dans ces conditions le rapport au savoir le plus récent est déstabilisé. C'est un phénomène connu : un apprentissage nouveau déstabilise l'apprentissage immédiatement précédent qui est utilisé conjointement à l'apprentissage nouveau. Nous montrons que cette déstabilisation se fait ici en raison de l’émergence d’un rapport nouveau au savoir ancien : la déstabilisation est observée sur le théorème officiel du chapitre, qui semblait l’objet nouveau ; elle est donc l’indice du travail du rapport à l'objet le plus ancien, un travail qui constitue l'apprentissage nouveau effectif.
L’examen de la copie de Delphine, lorsque la correction l’aura rendue disponible à I, montrera que cette élève n’a, en fait, pas rencontré de difficulté insurmontable à ce sujet. Même, le geste proposé est celui qu’elle a fait, et elle a, normalement, produit une erreur sur le savoir le plus récent (le théorème du cours) : elle a conclu que la limite est +¥ð ! C était une difficulté somme toute banale, une difficulté vite réglée, produisant une erreur simple à saisir, vite corrigée. Une difficulté sans grande importance, qui remplit sa fonction de signal : la pertinence de la pratique de factorisation d un monôme du plus haut degré possible est énoncée, la pratique est mise en place dans le cas nouveau des fonctions comprenant un logarithme, où elle sera dorénavant employée. D'ailleurs, Delphine s'est désintéressé aussitôt de la fonction f. Elle demande à I « Comment on peut obtenir la limite de g en +¥ð ð?ð », considérant par là même la question précédente comme une question réglée.

Conclusion TC "Conclusion" \l 9 

Voilà donc l exemple d une gestion didactique qui - pour Delphine, tout au moins  a assuré l apprentissage attendu (la factorisation du terme de plus haut degré pour le calcul des limites), de telle manière que le savoir-faire correspondant se trouve disponible dès que nécessaire. La réussite montre que, pour Delphine, les exercices posés en classe à propos des fonctions non rationnelles ont été des occasions d'apprendre : ils n'étaient donc pas uniquement, pour elle, des exercices à faire, et elle avait déjà appris que les exercices peuvent être porteurs d'une injonction didactique. Ce n'est pas le cas de tous les élèves de Terminale, car cela n'est pas le contrat didactique initial sur les exercices, au Lycée. La gestion didactique proposée nécessitait ce savoir particulier (qui a été nouveau pour Delphine lors d'un épisode didactique antérieur) sur l'objet institutionnel « exercices ».
L’apprentissage nouveau sur les limites de  EQ \f(lnx;P(x)) , l’évolution de la technique de résolution des problèmes de limites nécessitée par l’apparition de la fonction logarithme, peut alors se réaliser, au moment où le théorème sur les limites de  EQ \f(lnx;x) est donné il est enjeu didactique lors de la présentation officielle du logarithme, qui le nécessite. Même s'il n’est pas objet sensible, la correction en classe va comporter une remarque rapide à son sujet si de nombreux élèves ont, comme Delphine, « mal utilisé » le théorème du cours et si leurs erreurs montrent un « embarras collectif ». Il est un peu tard pour que cet apprentissage réussi de Delphine soit rendu visible par la note du devoir surveillé (Delphine aura 7,5/20). Mais l’apprentissage nécessaire sera bien en place au moment de l’épreuve du baccalauréat.

Le rapport de Delphine aux théorèmes pertinents de son cours de mathématiques TC "Le rapport de Delphine aux théorèmes pertinents de son cours de mathématiques" \l 5 

Delphine insiste : elle a, dit-elle, beaucoup « séché » sur cette question durant l’interrogation écrite avant de renoncer ; cela lui a fait perdre beaucoup de temps et l’a inquiétée ; elle en a parlé, en sortant, à ses camarades de classe, mais aucun de ceux qu’elle a interrogés n’a su lui répondre. Malgré ses réflexes d’enseignant qui le portaient à ne voir que le problème posé par f, I finit par l’entendre, et s’intéresse dès lors avec elle à la fonction g. Selon les conventions de travail qu’ils ont mises en place, elle lui montre le brouillon de ses recherches au cours de l’interrogation écrite :


lim (1 + x( 1 - lnx)) en + ¥ð ð?
lnx  ®ð + "

æð 1ð ð-ð ðlnx  ®ð - ¥ð
èð   et x  ®ð ð+ ¥ð ð
« Il y a donc indétermination, et il n y a pas de théorème du cours dans ce cas », dit-elle.

Il existe certainement un théorème du cours qui permet de répondre à sa question. Mais cette fois, ce n est pas un théorème du chapitre logarithme et un calcul technique venu de la pratique du calcul des limites, qu’il faut faire intervenir, c’est un théorème du cours sur les limites : « Le produit de deux fonctions de limite infinie en x0 est une fonction de limite infinie en x0, dont le signe se détermine par la règle des signes ». Nous le trouvons bien dans le cours de Delphine, où il forme une des colonnes du tableau sur les produits de limites.
La « pertinence explicite durable » d’un théorème ne fait pas partie de ce qui peut trouver place dans le cadre normal du contrat didactique, pour Delphine. Un rapport institutionnel à ce théorème est établi, et un rapport institutionnel établi l’est définitivement, c’est là sans doute une clause essentielle du contrat didactique, parce que c’est l’expression d’une contrainte de la gestion du temps didactique ; mais l’appel d’un théorème  (la rencontre de sa nécessité) semble, dans le contrat didactique pour Delphine, ne pouvoir se produire que pour un théorème du cours c’estàdire un théorème du chapitre actuellement étudié : un théorème sensible. Le rapport à un théorème, lorsqu’il est devenu rapport institutionnel, ne comporte plus que « l’action naturelle du théorème », qui de ce fait n’est plus visible que comme « théorème en acte ». Par l’observation de Delphine, nous avons eu accès à une clause du contrat didactique, telle qu’elle peut vivre dans une Terminale scientifique : une contrainte de la situation.
Ce théorème lui fait donc défaut, ce manque vient d’une question de contrat didactique sur ce que sont les théorèmes du cours, qui doivent être disponibles. Delphine attendait un théorème du cours sur les logarithmes, et elle ne pensait pas pouvoir buter devant un théorème sur les limites. Ces théorèmes-là devraient, pense-t-elle, lui être disponibles sans effort, tout comme la factorisation du terme de plus haut degré dans la partie polynomiale de la fonction f. Comme I, elle imagine difficilement qu’elle ait pu être surprise sur ces savoirs auquel le rapport institutionnel (qui est attendu, et manifeste le contrat sur les calculs de limites infinies) est, depuis plus d’un mois, stable.
Le problème que ce théorème résout n’a pas été rencontré ailleurs, avant. Cette occasion assure donc la première rencontre d’un élève de cette classe avec le théorème O1. Enquête faite, c’est là un phénomène général : dans les cours de Terminale comme dans les livres de classe, l’utilité de ce théorème n’a jamais l’occasion de se manifester avant le moment des études de fonctions logarithmes ou exponentielles. Encore faut-il pour cela que ces études comportent une fonction du type de celles que Delphine rencontre ici. Ainsi, dans le cas de cette classe, comme dans le cas général, l’utilité du théorème que nous avons identifié comme l’objet O1 de notre problème ne se rencontre dans aucun des exercices posés usuellement. Ceux-là se règlent toujours par d’autres moyens puisque la factorisation du terme de plus haut degré associée au théorème sur l’importance de ce terme règlent tous les cas de produits de fonctions de limite infinie - ce sont des fonctions polynômes ou fractions rationnelles - quand bien même un professeur se risquerait à poser un produit de racines de fonctions polynômes. Par exemple, l’examen de tous les exercices d’étude de fonction traités en classe durant les deux mois qui séparent le moment du cours où le tableau est dicté, du moment du premier emploi de cette colonne-là, montre que ce cas est, toujours, traité « automatiquement » : sans avoir besoin d’être posé. L’élève se trouve toujours naturellement ramené au cas du produit d’une fonction de limite infinie par une fonction de limite finie.

L'organisation des savoirs enseignés dans le cours de mathématiques de Delphine TC "L'organisation des savoirs enseignés dans le cours de mathématiques de Delphine" \l 9 

Le phénomène didactique que l’incident révèle, relève du problème général que nous étudions. Soit en effet O2 l’étude de fonctions comprenant des fonctions logarithmes ; soit RI(O1) le rapport institutionnel au théorème pertinent O1, un rapport stable au moment de l’observation (il est d’ailleurs au point le plus bas possible, c’est-à-dire à peu près vide pour l’enseigné, bien qu’il existe comme rapport institutionnel) ; soit RI(O2) le rapport institutionnel naissant (ou rapport officiel) à O2. Il existe une relation trophique « O1 Üð O2 » entre O1 et O2 (elle se lit « O2 se nourrit de O1 » ; ou « O1 est pertinent pour O2 »), c est-à-dire que le théorème, O1, est aujourd hui nécessaire à la solution de la question et à l étude réussie de la fonction g, qui est la réalisation de l objet O2. Nous sommes donc en présence d'un épisode didactique portant sur le théorème des produits de fonctions de limite infinie O1, à propos de l'étude des fonctions comportant des fonctions logarithmes O2.

Le théorème O1 apparaît dans le cours sous la forme suivante :

si lim |f(x)| = L"si lim |g(x)| = L'"alors lim |f(x).g(x)| = L.L'"
Cette forme diffère radicalement de l énoncé que nous avons donné lorsque nous en avons évoqué le contenu : elle est mal adaptée à la mémorisation opératoire du théorème (qui est pertinent pour la détermination de la limite d un produit de fonctions dont l une a pour limite +¥ð ðet l autre -¥ð,ð ðalors que l étude de la fonction g comporte une telle question. De plus, sous la forme qui est la sienne ici, le théorème ne donne pas d information sur le signe de la limite. Quand bien même Delphine l’aurait su « par coeur » et mémorisé jusqu’à ce jour, il ne lui serait pas disponible sous une forme idoine à son emploi immédiat. L'injonction didactique relative à O1 suppose qu'un rapport à O1 soit établi, et que la forme même de O1 soit travaillée par les nécessités de ce rapport nouveau. Le théorème était seulement montré, il doit devenir opératoire et pour cela l’élève doit « le faire à sa main ». Peu importe alors cette forme, qui restera de l'ordre du privé puisque l'énoncé du théorème ne sera jamais demandé, si le rapport personnel à O1 paraît idoine : si le rapport personnel établi produit des réponses déclarées adéquates.

L’interaction avec I a ouvert sur une suite organisée « d’instants du système didactique » survenus dans la classe de Delphine. Cette suite est visible parce qu’un de ses éléments a fait sens pour Delphine, c'est un épisode didactique, qui a créé pour elle un fragment de sa biographie didactique. Nous pouvons alors observer comment d'autres épisodes ont préalablement existé, pour elle, comment toute une suite d’épisodes a fait sens. Si l’un d'eux avait manqué à faire sens pour Delphine, ses difficultés seraient plus graves que de simples embarras, et la vie didactique de sa classe lui serait en partie étrangère.
Delphine va maintenant pouvoir dire ce qui, selon elle, l’a arrêtée longtemps au cours de l’interrogation écrite : elle a pu retrouver le résultat, la limite est bien sûr infinie, mais l’indétermination qu’elle évoquait porte essentiellement sur le signe de cette limite et c'est sur ce point qu'elle a hésité.
Elle a en effet, à ce moment de l’année, une assez bonne habitude des problèmes de limite infinie, une « connaissance professionnelle d’élève de Terminale D » qui a travaillé la question, et elle peut penser « spontanément » c’est-à-dire en se fondant sur son expérience du domaine, que ce produit a une limite infinie. Quand bien même elle ne saurait pas le théorème correspondant. Mais elle ne peut pas résoudre la question avec assurance, par exemple, comme cela se fait par l’utilisation d’un théorème dans le cas de fonctions polynômes, ou en factorisant le terme de plus haut degré comme nous l’avons envisagé dans le cas des fonctions irrationnelles d’une fonction polynôme.

Telle est la suite d’incidents que l’observation de Delphine nous a révélé comme une suite d’épisodes didactiques nécessaire pour que son rapport au savoir se construise (tel que nous l’avons observé en accédant à un épisode déterminé). Le cours sur les limites s organise autour de la question des limites infinies et des limites pour x+¥ð, sans autre rappel des cas étudiés en première que les deux théorèmes qui commandent le procédé de majoration / minoration par des fonctions de référence. Les limites finies ont été traitées comme un « rappel de Première » par le moyen d’une « planche d’exercices », donnée en début d’année (c’est d’ailleurs ce traitement succinct qui a motivé le recours de Delphine à un professeur de mathématiques, car « Pour les limites, les règles à apprendre ne suffisent pas » avait-elle constaté lors du premier entretien avec I). Rapidement, le professeur a donné quatre tableaux que nous aurions pu considérer comme récapitulatifs des résultats si le cours avait consisté à énoncer d’abord les théorèmes et leurs démonstrations, ou s’il était organisé autour de la mise en place d’une technique d’étude des limites infinies et se poursuivait par l’exploration systématique des cas d’usage des théorèmes présentés. Ce n’est pas le cas, et dans l’organisation constatée de l’enseignement de cette Terminale D, les quatre tableaux doivent être considérés comme des formulaires techniques donnés a priori qui ne sont pas suivis pour autant du travail exploratoire auquel on pourrait s’attendre. Comme les études de limites données en exercices ne portent jamais sur leur emploi, nous devrons considérer (suivant l’organisation didactique observée) que les théorèmes de ce tableau assurent à eux seuls la présence des savoir-faire pertinents pour les études de fonctions en général : car le théorème pertinent n’est même pas « à apprendre par coeur ». Le rapport institutionnel pour l'enseigné est inexistant, RI,e(O1) = Æð.ð Le professeur pour sa part peut légitimement penser que la question doit être depuis longtemps réglée. Pour l'enseignant, un rapport institutionnel à O1 est mis en place depuis qu il a pris la peine de dicter l énoncé du théorème, RI,E(O1) ¹ð Æð. C est pourquoi, comme l’a d’abord, spontanément, fait I, le professeur traitera toujours l’hésitation de l’élève par l’appel au « minimum exigible », i.e. le tableau synoptique dicté.
Nous soulevons alors un problème essentiel de la topogenèse :

Le partage topogénétique n’a pas permis l’émergence d’un rapport personnel de Delphine au théorème O1 qui soit idoine aux emplois qu’elle doit en faire. ð

Cependant, le rapport de Delphine à O1 n a pas été mis en défaut dans le cadre des activités scolaires ordinaires, alors même que nous avons pu montrer qu il était pratiquement vide. L inadéquation n a pas eu l occasion d être prononcée. Nous disons par conséquent que ce rapport a semblé longtemps idoine, parce que la pertinence de O1 pour le calcul de certaines limites infinies ne trouvait jamais à se manifester : les objets auxquels O1 est lié étaient absents de la scène didactique. De plus, l’institution didactique (la classe de mathématiques de Delphine) avait assuré la mise en place d’un rapport institutionnel à O1, rapport dont le tableau pouvait témoigner.

Conclusion TC "Conclusion" \l 9 

Le problème que nous avons énoncé, et qui a fait l'embarras de Delphine, vient de ce que le rapport institutionnel est ici illusoire, c'est un rapport fictif qui n’implique pas (pour au moins cette élève) l’existence attendue d’un rapport personnel : le partage d’un rapport institutionnel trop faiblement existant ne laisse même plus à l’élève de quoi reprendre l’étude. C’est dans ce cas particulier, nous l’avons dit, un phénomène sans gravité, mais il nous appartient d’en étudier plus systématiquement les effets lorsque O1 est un objet de plus grande importance ou lorsque les conditions d’apparition du phénomène ne permettent pas une reprise aussi rapide du rapport à ce savoir.

Conclusion du deuxième chapitre TC "Conclusion du deuxième chapitre" \l 5 
Les aveuglements institutionnels (d’enseignant, ou d’enseigné) interdisent certains apprentissages

I est, comme l’enseignant de Delphine, soumis à un aveuglement institutionnel.
Il sait, d’un savoir professionnel d’enseignant du Lycée, que les élèves apprennent lentement la factorisation du terme de plus fort degré, et il pense immédiatement que les difficultés de l’élève viennent de la fonction f.
Il ne sait pas, alors qu’il suit depuis plus de deux mois le travail de cette élève sur les limites, que Delphine a appris la nouvelle technique de factorisation et son rôle dans le travail d’une fonction non rationnelle, mais qu'elle ignore toujours un théorème du cours.
Une enquête rapide suffit à confirmer que Delphine n’a jamais eu l’occasion d’employer jusqu’à ce jour le théorème concerné : son ignorance est bien normale. Mais l’objet est présent, et l’enseignant (tout professeur occupant le lieu enseignant) ne connaît que cette présence institutionnelle, qui est pour l’enseigné une présence légale.. Le rapport institutionnel au théorème existe depuis qu’il a été donné et écrit par les élèves dans le tableau récapitulatif des théorèmes, mais Delphine n’entretient aucun rapport personnel à cet objet. Il est présent, mais ignoré. L'épisode didactique est resté sans effet biographique.

Les enseignants sont aveugles à certaines formes de l’ignorance réelle des élèves, parce qu'ils sont, eux aussi, soumis aux contraintes de la situation, c’est-à-dire ici, au contrat didactique qui les fait toujours comptables du rapport institutionnel. Nous pouvons pour notre part observer cette ignorance parce que Delphine nous a montré qu’elle n’avait pas appris ce que nous pensions  les savoirs didactiquement sensibles  mais qu’elle avait appris, à l’occasion de la leçon sur les limites et à l’insu de l’institution, une nouvelle technique de factorisation des polynômes. La leçon sur les limites a donc servi de milieu favorable à l'émergence d’un problème « faire apparaître le degré entier d’une expression algébrique non polynomiale formée sur des polynômes » et d’une technique d’attaque de ce problème. Le rapport institutionnel aux polynômes a changé à cette occasion. En revanche, certain théorème sur le calcul des limites, objet sensible en principe, n’est toujours pas connu deux mois après sa présentation : il est appris à l’occasion d’une recherche de limite portant sur une fonction logarithme. Ce théorème a été un objet sensible, et il est appris alors qu’il est forclos. C'est une nouvelle occurrence du phénomène que nous avions construit à propos d’objets de savoir non sensibles, puisque le voilà à l’œuvre pour des objets désensibilisés  forclos.

Cet aveuglement institutionnel d’enseignant, nous pouvons observer aussi bien comment l’enseigné y est soumis. Voici par exemple l’observation rapide d’un échange en cours particulier de mathématiques :

« I examine le cahier d’exercices de l’élève, corrigé régulièrement par son professeur. Deux exercices sont entachés d’erreurs ; or, la correction apportée par le professeur est elle-même erronée : l’erreur n’est pas là où elle la situe. Pour trouver l’erreur, I prend un peu de temps, un peu trop au gré de l’élève, qui s’impatiente en disant :
— C’est sans importance, ça fait rien !
— Pourquoi ?
— Parce que c’est passé, ça… »

Cette attitude, qui révèle la soumission au temps didactique, interdit le travail nécessaire jusque dans le cadre de l’autre cours, dont le déroulement se trouve commandé par les contraintes institutionnelles du premier. Nous travaillerons particulièrement les effets de l’assujettissement temporel dans la troisième partie.

La formalisation de ce qu'est un épisode didactique semble donc décrire dans un cas plus général que prévu le phénomène que nous cherchons à saisir, puisqu’il semble indépendant du passé de l’objet O1 que la manipulation de O2 convoque. La formalisation proposée décrit aussi bien ce phénomène lorsque l’épisode n’a pas d’effet biographique pour un élève donné, que lorsqu’il a un tel effet. La faisabilité de l’approche biographique s’imagine ici, avec sa généralité. La productivité de cette approche comme instrument d’observation de la réalité didactique (elle produit des faits), comme instrument de questionnement de cette réalité (elle produit des hypothèses), ou comme instrument de validation théorique (elle produit des phénomènes expérimentaux) est ce qui est maintenant en question.

 TOC \o "1-4" \n 
Deuxième partie

Premières études de la construction didactique de l'élève, la nécessité d'apprendre

 TOC Troisième chapitre

L'ignorance comme nécessité d'apprendre
La solidarité des manques didactique, théorique, technique 106
Le manque didactique dans l'épisode didactique originaire, pour Delphine 107
Le manque d'une gestion didactique de la rencontre du problème que le théorème O1 outille 109
La solidarité des manques didactique, théorique, technique 110
Conclusion 111
La production institutionnelle des manques didactique, théorique, technique 114
Une contrainte productrice de manques théorique et technique, l'assujettissement au temps didactique 115
Les paradoxes du temps didactique, leurs solutions contractuelles 116
Une contrainte productrice du manque didactique, le manque théorique et l'algorithmisation 118
L'échec paradoxal de l'algorithmisation des comportements de l'enseigné 119
Une contrainte créatrice du manque technique, la préconstruction 120
La réussite paradoxale de la gestion didactique des rapports aux objets préconstruits 121

Conclusion du troisième chapitre : La nécessité de valider les savoirs didactiques produits au terme d’une approche biographique 124


Troisième chapitre
L'ignorance comme nécessité d'apprendre TC "L'ignorance comme nécessité d'apprendre" \l 4 

Dans les conditions que nous avons observées, le travail de la technique et la mise à l’épreuve de la maîtrise que l’élève en a acquis ne se font que très lentement. Ils se font « à l’occasion », si l’organisation écologique des mathématiques scolaires permet une vie des problèmes et des gestes correspondants suffisamment longue, si cette organisation permet que les mêmes problèmes soient rencontrés dans de nombreuses situations. Les différents gestes techniques qui ont alors trouvé un premier usage, peuvent y être réinvestis. Le manque du discours théorique par lequel un savoir est exposé et le manque de la prise en charge institutionnelle d’un travail technique de ce savoir semblent alors solidaires, sauf dans le cas où ce savoir serait introduit comme un préconstruit, et par l’ostension de son usage. Nous montrerons comment l’existence ou l’absence, dans la suite des instants du travail didactique, d’une situation adidactique effective, constituant un épisode didactique premier, est un élément déterminant dans la réussite didactique des épisodes didactiques ultérieurs par qui se constituent, pour ces élèves, les fragments de leur biographie didactique.

La solidarité des manques didactique, théorique, technique TC "La solidarité des manques didactique, théorique, technique" \l 5 

Le professeur a sans doute traité du rôle des valeurs absolues en donnant le tableau, avec cette indication que la « règle des signes » s’applique et que les valeurs absolues font économiser l’étude de nombreux cas (tous semblables pour la théorie des limites infinies). Nous le supposerons, afin de nous placer par principe dans les conditions a priori les plus favorables au professeur. La difficulté que crée cette pratique tient à l’absence des signes, c’est sans doute pour cela que la plupart des livres donnent des tableaux complets, alors que nous avons sans peine trouvé un autre professeur qui avait dicté le tableau de Delphine : le professeur de la classe de Première S où nous avons observé des élèves (le document qui en fait foi est annexé à la thèse). Sans doute le temps de la dictée est-il peu gratifiant, pour l’enseignant comme pour l’enseigné, et les tours de main pour le raccourcir sont-ils recherchés. A moins de faire l’hypothèse d’une valorisation scolaire inconsidérée de l’écriture sous la dictée comme moyen d’établir un rapport à un objet mathématique, cela montre que le but de cette opération pourrait presque aussi bien  pour les professeurs  être atteint par une feuille polycopiée que les élèves colleraient dans leur cahier  si les élèves de Terminale ou de première disposaient de colle d’écolier.
Indépendamment de la difficulté due à l’absence des signes, nous trouvons là une suite d'incidents didactiques qui relève d’un type de phénomènes fréquent aujourd’hui. Pour commencer d’en tester la généralité, voici la suite de moments, différents dans l’organisation didactique, que nous avons observée. Elle est résumée de manière à faire apparaître le phénomène type :

- la première rencontre du champ de problèmes « limite d’une fonction f(x) quand x tend vers l’infini » se compose d’un commentaire sur l’intuition qui « justifie » la définition de la notion présentée ; cette première rencontre est suivie d’un moment exploratoire mené par l’enseignant (il est généralement dit de théorie ou d’apport d’information) ;
- comme dans le cas que nous observons, ce moment exploratoire s’achève avec la donnée du tableau synoptique des résultats techniques indispensables à l’attaque des problèmes du champ ; le tableau est dicté : c’est pourquoi il est, dans les cahiers d’élèves, toujours réduit au minimum de signes, perdant fortement en sémioticité ;
- la mise en place technique se fait alors sur une période bien plus grande que celle qui sépare l’élève de la première interrogation de contrôle, et l’exploration du champ des problèmes par le moyen des différents exercices traités n’est pas menée systématiquement parce qu'elle n’est pas guidée par la succession organisée des théorèmes que l’on démontre et dont on démontre ensuite, au fur et à mesure, l’usage.

Le manque didactique dans l'épisode didactique originaire, pour Delphine TC "Le manque didactique dans l'épisode didactique originaire, pour Delphine" \l 9 

Revenons à l’exemple étudié et plus précisément au rapport personnel de Delphine à O1, pour en expliquer les manques : la théorie des situations permet l’étude de la dimension adidactique dans les différents moments de cet enseignement. Si en effet nous avons pu dire que le rapport institutionnel d’enseigné au théorème O1 sur la limite du produit de deux fonctions de limite infinie était vide, c’est qu’aucun de ces moments ne correspond à une situation didactique stricto sensu, c’est-à-dire au moins à une situation qui comprendrait une injonction didactique contractuelle à l’endroit de O1 (faute d’instaurer un rapport adidactique à cet objet). C’est ce que nous allons regarder de plus près maintenant, car si le rapport de Delphine à O1 aurait pu être déclaré adéquat parce que l’enseignant ne l’avait pas mis en défaut avant ce moment, il était malgré cela, de tout temps, non idoine : c’est-à-dire que du point de vue de l’organisation interne du système de ses rapports personnels aux savoirs, le rapport de Delphine aux théorèmes sur les limites était gravement en défaut.
Comment la forme de la rencontre que nous avons observée fait-elle problème pour l’élève ? Bien sûr, le fait que cette rencontre se fasse durant une interrogation écrite, c’est-à-dire dans le cadre d’une situation dans laquelle Delphine est censée tenter l’objectivation de son rapport au savoir, montre une faiblesse de gestion de la relation didactique. Mais cela n’explicite pas l’embarras de Delphine.
La rencontre du théorème, l’objet de savoir O1 auquel le problème fait appel, correspond en principe à une injonction instrumentale relative à O1. Ici, l'enjeu porte officiellement sur un tout autre objet, les fonctions logarithmes ; mais Delphine doit, pour résoudre le problème qu'elle se pose, s'enseigner le savoir nécessaire en le produisant pour elle-même, puisque O1 n'existe pas pour elle. Delphine se trouve dans une situation adidactique d'action dans le cadre de laquelle aucune communication n’est en principe possible à propos des gestes qu elle effectue  on la verrait bien, ici, chercher à savoir comment son voisin a répondu.
Nous devrions alors observer ensemble les deux propriétés suivantes : RI,e(O1) ¹ð Æð, RI,e(O1) »ð RI(O1), c est à dire d'une part, que le rapport institutionnel d enseigné existe dès lors et qu il est conforme au rapport institutionnel (ce qu'il n'était pas jusqu'ici) ; et R(e,O1)  [RI(O1) ; (O1 ð0, on dit qu un nombre réel r est valeur approchée à eð ðprès d un nombre réel x, si   EQ \x\le\ri(x-r ) d" eð ;
r est dit valeur approchée par défaut si r d" x, par excès si r e" x.
Définition 2
A est partout dense dans IR ssi x étant un réel, pour tout eð>0ð,ð ðil existe r dans A tel que r soit valeur approchée de x à eð près.
Propriété
Étant donnés un réel x et une suite décroissante d eð, de limite 0, (eðn) , soit (rn) une suite correspondante d éléments r de A, on a : (rn)  EQ \s\do5(n >" )  > x.
Conséquence
(eðn) étant dans A, et A étant un sous-groupe additif de IR, à tout x de IR , (eðn) étant donnée, on peut associer une suite de valeurs approchées par défaut (rn) (de limite x).En effet, I
R est Archimédien, donc l ensemble des pn entiers tels que pneðn d" x est un sous-ensemble de A possédant un plus grand élément, et il existe un entier pn et un seul tel que :
(1) pneðn d" x 4™4»4¼4595}5!6C6D6úñññññññññññññññññññññññññññ„`„gdB`ëgdôrD6X6Y6q66€6“6”6ä6å6„7…7Õ7Ö7#8$8“8”899"9#9‹9Œ9ð9£:¤:öööööööñöööööööööööïííçççå„]„gdôr„`„gdB`ëO9P9‰9Š9Œ9—9ž9à9í9ð9:?QRab EF–—âã]$^$$‚$º'ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷ü÷üíèíü÷á÷á÷üÙüÙü÷üÙüÏ÷Ï÷üÏüíèíüíèíüjh)5Ujh)U h)56 h)jh)U h)5h)RTé;_n…•ºÒ&€­åU«¼ç6Ic€Œ½ènéúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúúú$gd)é1jŸµÄþÿÈɾ¿ÀØèé=>úúúúúúúõõððëëæáÔÄÔ´Ô$„(„]„(^„a$gd)$„(„]„(^„a$gd) „(„]„(^„gd)gd)gd)gd)gd)gd)$gd)>PQ¤¾>ÃÑIW¾ÌÍEGXäåF$G$ƒ$„$óóîéäääääéääéäééßÚÚßÕßÐßgd)*gd)gd)gd) gd)gd)gd) $„`„a$gd)„$ï$ð$%9%:%'å,æ,}.~.©/ª/6070L2÷7ø7È;>>‡>ˆ>CCmH7I8Iúúõõúúúúúðõðëúúúúúúúëúúúúúú gd)#gd)*gd)gd)º'»'è*é*ˆ-—-4.C.D.è/é/4050>…>†>1@;@A@I@'A1A“AËA÷AÿABBpDqDI4I”L•LRQSQQžQS‚SoTpTšTŸT©T²TfV»V6WAWmW…WÐWÙW3X:XYY(Z)Z[[\–\»\Ï\^^ßabbÞbób×cdõñõñìñìõñâÝâñõñìñõñìñâÝâñìñìñìñìñìñìñÓñìñõñâÝâñõñõñìñìñìñìñìñìñìñìñÓñìñìñìñìñìÓñìñìjh)0JU h)jh)U h)6h)jh)0JUS8IJJ“J”J˜L™LlMNNQQŸQ Q÷UYŽ[Ò\Ó\ã]ä]·_bb„b…beefeúõõõðõõõõëæõõõõõõúõõõõõëúë gd)#gd)%gd)gd)*gd)d
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