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On a connu naguère les méfaits, vite corrigés par le juge[4], des pulsions ..... L' examen de la portée réelle des principes environnementaux, c'est-à-dire en fait de ...... L'environnement contre les droits de l'homme » RDP n°6-2004 page 1583 .




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QUEL DEGRE DE NORMATIVITE POUR LES PRINCIPES ENVIRONNEMENTAUX?
par Manuel GROS
Professeur à l’Université de Lille 2
Laboratoire Droits et perspectives du Droit (ex I.R.D.P)

SOMMAIRE
I-DES PRINCIPES DIFFICILES A INTEGRER
A-Les principes environnementaux ont vocation à s’intégrer dans un droit instable, le droit public français 
B-La difficile intégration d’un système juridique rigide par un droit mou
C-La difficile intégration de principes collectifs dans un système juridique structurellement individualiste
II-DES PRINCIPES DIFFICILES A INVOQUER
A-Le refus des principes flous 
B- L’invocabilité indirecte des normes précises, indépendamment de leur valeur 
C- Le stade constitutionnel ? ouverture de perspectives dans le maintien des incertitudes 

Ce que l’on appelle par simplification le droit de l’environnement ou aujourd’hui par extension le droit du développement durable et qui regroupe en fait ce que à ce stade de l’étude on pourrait appeler provisoirement les principes environnementaux ne cesse de préoccuper le juriste sur la double question conjuguée de leur valeur et de leur portée. Le Conseil d’Etat lui-même vient de rendre récemment un arrêt de l’assemblée du contentieux afin sans doute de solenniser sa jurisprudence sur la question.
Depuis une quinzaine d’années, se révèle – et à chaque législation ou jurisprudence. nouvelle s’accroit – la question de l’intégration des principes environnementaux dans les hiérarchies des normes des Etats.
Une double hypothèse de départ doit permettre de circonscrire le débat. La première est de considérer que les principes environnementaux – le « droit » de l’environnement pour simplifier – n’ont pas d’autonomie juridique, ne constituent pas un ensemble de règles de droit autonome, mais une discipline à intégrer au droit interne de l’Etat (ou de l’union européenne, comme système juridique intégré). On a connu naguère les méfaits, vite corrigés par le juge, des pulsions autonomistes de certaines disciplines juridiques en mode, comme le droit du sport, pour devoir les écarter sereinement : le droit de l’environnement fait partie intégrante du système juridique dans lequel il entend s’appliquer et au cas particulier de la France du droit public comme du droit privé.
La seconde hypothèse est de tenter de questionner le phénomène juridique environnemental du point de vue de sa normativité, d’essayer de le placer dans un axe croissant de la normativité : le premier degré est celui du projet ; il relève du domaine affectif et est exprimé par un ou quelques individus. En droit commun, l’envie qu’a un couple de vivre ensemble relève du projet, comme la situation de camaraderie institue une certaine égalité entre camarades. En matière environnementale, la célèbre phrase d’Antoine de Saint Exupéry selon laquelle « nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants » procède naturellement, au moment où elle est écrite, du projet.
Partagé par de nombreuses personnes, le projet accède au deuxième degré de la normativité, celui du principe. Le principe est donc un projet partagé par de nombreuses personnes, et à ce titre le mariage est également un principe, comme le principe d’égalité à la Révolution collectivise la situation de camaraderie et comme le développement durable est un principe (avec d’autres) issu du projet de Saint Exupéry. Mais le principe – qui est politique comme le projet est affectif -n’est pas encore une norme.
Le stade de la norme suppose l’entrée dans la sphère juridique et un minimum d’effets normatifs, à tout le moins théoriques. Ainsi le Préambule de la Constitution de 1946 ainsi que la Constitution de la Vème République qui y renvoie ont fait du principe d’égalité une norme. Mais la normativité ne suffit pas à conférer l’effectivité ; il lui faut acquérir l’opposabilité.
Cette opposabilité se retrouve dans un autre degré de l’axe de la normativité, celui du passage au stade de « droit », au sens du droit subjectif, tel que René Capitant le décrivait en substance comme un principe auquel serait associé une action procédurale permettant de faire respecter ou sanctionner ce principe. Le principe d’égalité accède ainsi au statut de droit subjectif par exemple dans le domaine de la responsabilité avec la célèbre jurisprudence. « Couitéas » Les récentes discussions sur le droit au logement « opposable » ont montré la nuance entre norme, droit et opposabilité.
Mais les  degrés de la normativité sont multiples ; par exemple au stade ultime de l’axe le « cas d’ouverture » constitue la version technique la plus achevée de la normativité ; c’est un principe (par exemple d’obligation de motivation d’un acte administratif ) qui a passé avec succès toutes les étapes de l’axe pour être reconnu comme argument (terme sociologique) comme moyen (terme procédural) et comme cas d’ouverture (terme spécifique au recours pour excès de pouvoir) et conduire à l’annulation d’un acte administratif qui l’aurait transgressé. Ainsi, toujours pour rester sur l’exemple du principe d’égalité, la jurisprudence. « Société des concerts de concerts du conservatoire » consacre l’admission du principe d’égalité (devant le service public) au stade de cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir.
Les principes environnementaux, comme leur nom l’indique, sont des principes et se pose naturellement la question de savoir s’ils sont (ou seulement certains d’entre eux, ou aucun ?) devenus des normes, des droits voire des moyens d’annulation en droit français.
La réponse à la question passe par le double questionnement distinct et complémentaire de la valeur et de la portée de ces principes environnement : les difficultés d’intégration relèvent de la valeur de ces principes (I) tandis que celles de leur invocabilité réelle appartiennent au registre de la portée de ceux-ci(II).


I-DES PRINCIPES DIFFICILES A INTEGRER

La question de l’intégration des principes environnementaux dans la hiérarchie des normes connait en droit français trois difficultés. La première est exogène et tient à l’instabilité du droit public interne français (A), les deux autres sont endogènes et ressortent de la nature même de ces principes, issus du droit « mou »(B) et de leur inspiration collective, sinon collectiviste (C).




A-Les principes environnementaux ont vocation à s’intégrer dans un droit instable, le droit public français :

Les principes environnementaux ont vocation à s’intégrer dans le droit interne, plus généralement le droit public et en fait le droit administratif. Or ce dernier est depuis la seconde moitié du XXème siècle devenu un droit instable. Sans chercher les causes de cette instabilité – nature jurisprudentielle adaptée à une administration surtout régalienne, codification à droit constant souvent plus compliquée plus simplificatrice, inflation quantititative des normes, inadaptation – le constat de cette dernière saute aux yeux, dans tous les domaines clefs du droit administratifs., instabilité textuelle permanente du droit des contrats, diversité et sophistication toujours plus grandes du droit de la responsabilité, c’est sans doute en terme de normativité administrative que le droit administratif est le plus instable.
Un exemple basique tiré des polices administratives le démontrera aisément. L’apparente summa divisio de la police générale opposée aux polices spéciales en est un premier exemple. Une première fiction de stabilité est en effet de considérer ces deux types de polices comme insusceptibles d’intervenir simultanément. Il n’en est pas toujours ainsi. En matière minière par exemple, la police –spéciale par excellence – des mines ne « prive » aucunement le maire – autorité de police générale- de ses obligations de police générale qui s’exercent sur tout le territoire de la commune, c’est à dire sur l’ensemble des sites miniers ou ayant le caractère d’installation classée, comme non miniers, sans exclusion, au titre du célèbre article L 2212-du Code général des collectivités territoriales. La même difficulté existe dans les rapports entre police générale et polices spéciales en matière d’Installations classées et d’organismes génétiquement modifiés
On le voit, dans les cas les plus complexes – comme l’exemple minier – où précisément les principes environnementaux auront à s’appliquer (prévention, précaution, pollueur payeur etc..) la superposition des polices, qualifiée parfois de véritable « mille feuille », est révélatrice d’un droit instable.
A cette instabilité stratigraphique liée à la superposition des compétences s’ajoute parfois une instabilité de nature, propre à certaines disciplines du droit public français. C’est le cas par exemple de l’état actuel de notre système normatif urbanistique, qui aujourd’hui révèle une instabilité à la fois quantitative et qualitative.
Quantitative par la profusion de « normes » à géométries et auteurs variables.
Qualitative par ce que le droit de l’urbanisme français connait au moins trois niveaux de rapports à la norme. Le premier est celui de la conformité, classique, et concerne les rapports entre les actes individuels (permis, autorisations) et certains document d’urbanismes (P.O.S, P.L.U, R.N.U). Le deuxième est le rapport de compatibilité réservé souvent aux rapports entre documents d’urbanisme - au sens large - eux-mêmes (rapports P.L.U/ S.C.O.T, ou Schémas de mise en valeur de la mer). Il a déjà suscité de nombreuses gloses sur le sens précis de la compatibilité (non incompatibilité manifeste ou non contrariété ou encore plus ambigüe). Quant au troisième rapport de normativité, celui de la prise en compte, il relève parfois du surréalisme, sur la question de savoir si la prise en compte se limite à viser – ce qui n’aurait aucun sens – ou va plus loin, mais alors se rapprocherait fortement de la compatibilité. Telles sont pourtant les obligations (la prise en compte) par exemple des PLU à l’égard des « programmes de références (L123-1 du Code l’urbanisme) ou des plans locaux de l’habitat (P.L.H).
Ainsi , le droit commun de l’urbanisme s’enlise dans ses nouveaux instruments de planification : les Plans locaux d’urbanisme (P.L.U) décidés par les communes et qui devront être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale (S.C.O.T ou anciens schémas directeurs) de niveau intercommunaux, les deux étant soumis aux prescriptions des Plans de prévention des risques « naturels » (PPRN) « technologiques » (PPRT) ou miniers (les PPRM visés par le code miniers) ou encore les Plans de prévention des inondations (PPI), ces différentes normes faisant l’objet d’une concertation arbitrée par l’Etat. Ce mélange sera peut être détonnant, car les volontés locales de développement (PLU et SCOT) ne seront pas toujours compatibles avec la prudence des plans de prévention (PPRN, PPRT, PPI) et d’autres « normes spécifiques (SDAGE et S.A.G.E pour l’eau, Plans départementaux pour les déchets, Chartes des parcs naturels régionaux). Sans compter que les P.I.G, prescrits par arrêté préfectoral ou encore les servitudes d’utilité publique (article L 126-1 du code de l’urbanisme) pourront compliquer la donne en exigeant à leur bénéfice un rapport de conformité.
On pourrait ajouter l’instabilité ajoutée par les nécessaires interférences apportées encore par le droit de l’union européenne lorsqu’elles sont – comme c'est parfois le cas en matière environnementale, divergentes des positions françaises, mais on l’aura compris : la première difficulté pour les principes environnementaux sera d’intégrer un système juridique lui-même très instable.

B-La difficile intégration d’un système juridique rigide par un droit mou

Instable, le droit public français repose néanmoins sur la fiction de sa propre rigueur, sinon rigidité, exprimée par la célèbre pyramide de KELSEN et l’articulation des normes en une hiérarchie dont le respect est pilier de la stabilité juridique.
En d’autres termes, qu’il s’agisse du droit civil et de ses fictions catégorielles (le bon père de famille, l’autonomie de la volonté, la présomption de bonne foi etc..) ou du droit public et de ses fictions jurisprudentielles (intérêt général, service public, prérogative de puissance publique, clause exorbitante du droit commun etc..), la rigueur hiérarchisée des différentes normes tient lieu de ciment ou de cadre, dans une logique de Droit dur ou à tout le moins rigide.
Les principes environnementaux ne sont pas issus de cette structure juridique ordonnancée mais des grands débats de société internationaux , de la déclaration générale de Stockholm en 1972 à la conférence de Rio de 1992, c’est-à-dire d’un amalgame entre principes politiques et normes juridiques, propre souvent au débat international , inspirée de la Soft Law et qui relève du droit mou., ou flexible ou souple selon les acceptions retenues.
Un peu comme ces jeux d’enfants composés d’un cadre de bois percé de trous à formes géométriques (carrés, ronds, rectangles) et où il faut poser le morceau de bois précis dans le trou idoine, la hiérarchie des normes kelsenienne exige la forme parfaitement adaptée. Si en revanche, alors que le cadre est en bois, les formes à intégrer sont molles – en caoutchouc par exemple – l’on arrivera sans doute à donner l’illusion de faire entrer un rond dans un carré, mais il ne tiendra jamais longtemps, son élasticité le faisant sortir de la cavité. Un autre exemple serait celui d’une clef en caoutchouc (la clef étant la métaphore des principes environnementaux auxquels sont aurait donné la forme apparemment parfaite, celle de lois constitutionnelles) que l’on insérerait dans une serrure en métal (la serrure symbolisant la hiérarchie des normes): la clef entrerait certes, mais le caoutchouc ne pourrait par sa mollesse ouvrir la serrure.
La question est très voisine de ces exemples enfantins : des principes mous peuvent-ils intégrer une hiérarchie des normes rigides ?
L’un des principes environnementaux les plus célèbres est sans doute le principe de précaution. Il illustre parfaitement le propos car il n’a pas de contenu exact, ou à tout le moins le contenu admis par tous, comme le remarque Olivier GODARD, mais la remarque vaut aussi pour tous les grands principes environnementaux .
Une simple analyse de textes permet d’aller plus loin. Ainsi le principe de précaution en droit français connait –il deux définitions textuelles. L’une législative avec l’article L 110-1 du Code de l’environnement, qui s’est substitué à l’article L 200-1 du code rural et la loi Barnier du 2 février 1995 , et l’autre constitutionnelle, en vertu de l’article 5 de la charte issue de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005. .On s’aperçoit à lecture attentive des différences ; que si certaines ne sont pas substantielles (« réalisation d’un dommage incertaine » (texte constitutionnel) / l'absence de certitudes (texte du code), d’autres le sont davantage notamment sur les obligations (veillent (…) à la mise en œuvre de procédure d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées (charte)/ ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées (code)et ceux à qui elles incombent (les autorité publiques (…) dans leur domaine d’attributions (charte)/ pas de destinataire précis de l’obligation dans le code), sans oublier les éléments absents dans l’un des textes (coût économiquement acceptable présent dans le code et absent dans la charte. Veiller à mettre en œuvre des procédures d «évaluation et adopter des mesures « provisoires » (charte) n’est pas la même chose que ne pas retarder l’adoption de mesures « effectives » (code), de même que l’allusion aux autorités publiques dans le respect des compétences (charte) diffère d’une obligation sans destinataire précis. Enfin l’absence de référence au « cout économiquement acceptable » de la charte a-t-elle un sens précis ou faut il voir dans l’article 6 cette référence mais cette fois non liée expressément au principe de précaution ?
On l’aura compris : un concept flou parce que téléologique, finaliste peut-il s’intégrer dans une hiérarchie (de normes) ?
En d’autres termes, comment placer dans une hiérarchie un principe qui n’a pas de contenu, ou à tout le moins de contenu précis ? On peut dire qu’un principe (être précautionneux, être prudent) a valeur législative (code de l’environnement) ou constitutionnelle (charte) mais cela n’a pas d’effet juridique puisqu’on ne peut cerner précisément ce qui aurait cette valeur.
C’est que le droit mou, comme notre clef en caoutchouc, s’il peut avoir la forme (la valeur en droit) du droit rigide, comme notre serrure métallique, ne peut produire les effets d’une clef en métal, c’est-à-dire avoir la portée d’une règle rigide.
Cette nécessaire transformation du mou en rigide constitue et constituera pour les grands principes environnementaux assurément une réelle difficulté.
C-La difficile intégration de principes collectifs dans un système juridique structurellement individualiste

Une dernière difficulté attend les principes environnementaux et tient à leur nature collective comparée à celle – individualiste – des fondements initiaux de nos démocraties, savoir les libertés individuelles et droits de l’homme.
On qualifie parfois le code civil de petit livre rouge – par allusion à un éditeur juridique connu- de la … « bourgeoisie » ! Au-delà du clin d’œil il est indiscutable que les principes fondateurs de notre système juridique sont individuels voire individualistes : droit de propriété, liberté du commerce et de l’industrie, liberté d’aller et venir, liberté d’opinion pour des valeurs bourgeoises issues de la Révolution, droit au travail, droit au progrès pour des valeurs issues de la révolution industrielle et plus sociales.
Or les principes environnementaux sont par principe des atteintes sinon des limitations à ces valeurs individuelles.
Ainsi le droit de propriété, protégé par les articles 2 et l’article 17 de la déclaration des droits du citoyen du 26 août 1789, intégrée au bloc de constitutionnalité par le préambule de la constitution du 4 octobre 1958, est par principe contrarié par le droit de l’environnement. On rappellera qu’en droit français, c’est un droit théoriquement absolu (« droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue » (C. civ. art. 544). Et de fait, les principes environnementaux sont- contradictoires de l’exercice absolu du droit de propriété 
Mais les principes environnementaux appliqués au droit des I.C.P.E sont aussi une atteinte permanente à la liberté du commerce et de l’industrie (régime déclaratif ou d’autorisation, régimes de surveillance et de sujétions (fumées, rejets, déchets etc…)
D’une certaine manière la référence à certains modes de circulation (seuils de pollution et interdiction de circulation automobile, voies piétonnes, couloirs réservés, incitation aux transports en commun) issus des principes environnementaux sonne le glas de la liberté individuelle d’aller au venir au profit d’une appréhension plus collective.
Le droit individuel au travail souffre également des principes de développement durable, de décroissance rationnelle, d’économie des ressources, ne serait ce que parce qu’il ne s’exprime plus dans son absolu individualiste, comme le droit au progrès s’exprime individuellement par un droit de consommer le progrès technologique, qui est antithétique des principes environnementaux. Le droit de posséder et d’utiliser plusieurs téléphones cellulaires par personne, d’être isolé à moindre coût par de l’amiante, de manger de la viande bovine à bon marché ou des poulets d’élevages à des coûts dérisoires sont contradictoires du principe de prévention ou à défaut de précaution.
D’une certaine manière l’on pourrait se demander si l’approche collective contraignante et péremptoire contenue dans les grands principes environnementaux n’est pas également attentatoire à la liberté individuelle essentielle de penser librement ?
En tous les cas, les principes collectifs sinon collectivistes du droit de l’environnement devront s’accommoder des vieux principes individuels sinon individualistes de notre système juridique initial.
L’intégration des principes environnementaux, quelle que soit leur valeur aujourd’hui incontestée, en notre hiérarchie des normes n’est donc guère aisée, aux triples raisons combinées du caractère instable du droit public actuel, mais aussi de la rigidité différente desdits principes et du système dans lequel ils doivent s’intégrer ainsi que de leur inspiration collective qui se distingue des valeurs individuelles inhérentes à noter société.
Aussi si leur valeur ne pose guère de problèmes à raison de leur insertion dans les normes majeures, aujourd’hui constitutionnelle, leur portée, c’est-à-dire leur effectivité ne saurait être absolue.

II-DES PRINCIPES DIFFICILES A INVOQUER
L’examen de la portée réelle des principes environnementaux, c’est-à-dire en fait de leur invocabilité pratique, suppose de dépasser nécessairement le constat d’une valeur élevée desdits principes.
Une première hypothèse facile serait sas doute de confirmer le refus jurisprudentiel d’admettre comme droit opposable ou moyen contentieux des principes trop flous (A). Une deuxième pourrait être de voir – à certaines conditions – dans l’invocabilité indirecte une condition de l’effectivité desdits principes (B). Mais l’intervention du stade constitutionnel ouvre des perspectives de confirmations ou incertitudes de ces deux hypothèses(C).
A-Le refus des principes flous :
Le premier principe à avoir subi le rejet contentieux faute de précision est incontestablement le concept de développement durable. Apparu lors de la conférence de Stockholm de 1972, il a pourtant après le rapport Brundtland de 1987 et la conférence de Rio de 1992 bénéficié de toutes les reconnaissances textuelles : L’article 2 du traité de Maastricht et surtout le nouvel article 6 du traité consolidé par le Traité d’Amsterdam de 1993 le placent parmi les objectifs fondamentaux de l’Union. Au niveau français, l’article L 111-1 du code rural issu de la rédaction de la loi 99-574 du 9 juillet 1999 en fait une priorité essentielle de l’aménagement du territoire, priorité reprise à l’article L 110-1 du code de l’environnement, avec une consécration constitutionnelle en 2005 par l’article 6 de la charte constitutionnelle du 1er mars 2005 (« les politiques publiques doivent promouvoir le développement durable. (…) »).
C’est donc aujourd’hui un principe de valeur constitutionnelle, même si le constituant lui-même atténue l’efficience sereine du principe en imposant expressément la conciliation dudit principe avec les intérêts économiques (« (…) À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique).
En tous les cas sa consécration contentieuse, comme moyen d’annulation ou fondement de la responsabilité est loin d’être évidente. Le Conseil constitutionnel se contenta en 2005., après l'intervention de la charte – de consacrer la valeur constitutionnelle du développement durable, ce qui n’en fait pour autant pas un moyen contentieux invocable directement. Le même constat de non invocabilité directe peut-être fait, même après intervention de la charte, s’agissant des les principes contenus aux articles 1er, deux et 6 de la charte, et donc pour ce dernier article du développement durable
Faut-il y voir un dénigrement contentieux propre à un projet collectif, à un principe de Rio encore controversé, à raison de son ambigüité sémantique selon que l’on se situe d’un coté ou de l’autre du développement économique ? Nous ne le pensons pas : la raison est sans doute plus technique ; le développement durable est suffisamment clair comme objectif ou comme norme, mais pas assez précis pour constituer un cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir pu même un moyen contentieux. En d’autres termes, le filtre méthodologique du principe d’intégration est indispensable à son utilisation, qui pour être indirecte (cf. infra), n’en est pas pour autant inexistante.
Sans doute un peu plus tangible, à tout le moins plus revendiqué, le principe de précaution n’est pas pour autant si simple à invoquer avec efficience. Le Conseil constitutionnel lui refusa, avant l’entrée en vigueur de la charte, en 2001 le statut d’objectif de valeur constitutionnelle. Sans doute le Conseil d’Etat, en son arrêt du 25 septembre 1998) alla t-il plus loin en en faisant un moyen sérieux, dans le cadre de l’ancienne procédure de sursis à exécution, mais quelques années plus tard il refusait encore en 2006, à la suite d’une jurisprudence constante, une invocation trop imprécise du principe. Sans doute l’intervention de la charte conduisit le Conseil d’Etat par trois fois en 2006 et 2007 à revoir sa position de principe et à examiner le moyen tiré de la violation du principe de précaution, mais cela ne signifie pas une efficience systématique de l’invocation dudit principe soulevé tel quel, sans autre précision, devant le juge.
A l’évidence l’utilisation contentieuse – directe à tout le moins – reste difficile in concreto si elle reste simplement proposée au juge sans la précision d’espèce permettant au juge de retenir la violation du principe.
La règle n’est pas propre au développement durable ou au principe de précaution et elle a frappé naguère d’autres grands principes. Ainsi le droit d’asile, exprimé à l’alinéa 4 du Préambule de 1946, ne « peut être utilement invoqué à l’encontre d’un acte administratif ». Même rejet pour le droit à l’emploi, tiré cette fois de l’alinéa 5 du même Préambule ou encore de la garantie des conditions de développement de la famille issue de l’alinéa 10
Cette règle n’est d’ailleurs pas récente et se retrouvait déjà dans le célèbre arrêt Tallagrand du Conseil d’Etat en date du 29 novembre 1968 à propos du grand principe de solidarité et d’égalité devant les charges publiques, lequel « ainsi posé, en l’absence de dispositions législatives en assurant l’application, ne saurait servir de base à une action contentieuse en indemnité. »
Certes la récente position de l’Assemblée du contentieux dans l’arrêt « commune d’Annecy » pourrait – à considérer que les essentielles conclusions du Commissaire du Gouvernement Aguila en constitue la grille de lecture – remettre en cause l’analyse d e l’influence du degré de précision sur la portée d’un principe. Le Commissaire du Gouvernement Aguila rappelait à la Haute Assemblée non sans finesse la formule de Georges VEDEL selon lequel « l’imprécision de la prescription n’en supprime pas le caractère normatif ». S’appuyant sur cette absence de présomption à l’égard d’un grand principe flou, M. Yann Aguila ajoute toutefois en corollaire de cette citation une note en bas de page de grande finesse sur la distinction entre normativité et justiciabilité, seule cette dernière permettant d’invoquer un principe comme moyen non contentieux. Et de poursuivre en ses conclusions que « il est vrai que la portée concrète d’un principe peut varier selon son degré de précision, selon son objet, ou selon la nature du contentieux ». De fait, l’annulation proposée et retenue par le Conseil d’Etat du décret du 1er août 2006 se fonde sur l’incompétence des autorités réglementaires en matière de fixation des règles fixant la bon respect du principe de participation.
Or au cas particulier du principe de participation, on peut a contrario constater ce principe environnemental, même d’apparence générale, est suffisamment « vérifiable », e que sa violation a déjà été admise comme moyen contentieux. Ainsi ledit principe de participation – article L110-1 du code de l’environnement – a priori pourtant assez vague, s’est déjà vu consacrer comme moyen contentieux par la Haute Assemblée dans l’arrêt remarqué « Réseau Ferré de France » (Conseil d’Etat 15 mai 2006 Association des riverains de la ligne des Carpates / RFF) req 278 942) : même si « en l’espèce le public a été amené a participer effectivement aux procédures d’élaboration du projet déclaré d’utilité publique » la « méconnaissance du principe de participation énoncé par les dispositions de l’article L 110-1 du code l’environnement » aurait a contrario permis sans doute l’annulation de l’arrêté de D.U.P. Sans doute est-ce parce que le principe de participation se vérifie objectivement et matériellement (réunions publiques tenues, registre annoté, avis recueillis …ou non.).
Cela n’empêche naturellement pas l’importance essentielle du dernier arrêt de l’Assemblée « Commune d’Annecy » lorsqu’elle juge, outre la consécration de la valeur constitutionnelle des principes de la charte, le fait que « les dispositions précitées, issues de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005, ont réservé au législateur le soin de préciser « les conditions et le limites » dans lesquelles doit s’exercer le droit de toute personne à accéder aux informations détenues par les autorités publiques et à participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement, » et qu’il annule un décret contrevenant à ce principe issue de l’article 7 de la charte.
Mais l’on peut persister à penser que la précision, notamment dans la possibilité pour le juge de vérifier –reste condition de l’efficience contentieuse d’un principe et si le constat peut étonner s’agissant de normes supérieures comme les principes environnementaux, il est le lot de toute norme insuffisamment précise, telle que par exemple les chartes des parcs naturels régionaux au regard du sol, celles-ci « n’ayant pas pour objet de déterminer les prévisions et règles touchant à l’affectation et à l’occupation des sols ».

B) L’invocabilité indirecte des normes précises, indépendamment de leur valeur :
Au delà de la condition de précision- nécessaire mais pas suffisante – l’on peut se demander si ce n’est pas aussi dans le degré de l’invocabilité que se situe une autre condition d’efficience.
Ainsi l’erreur serait peut-être d’exiger une possibilité d’invocation directe, de vouloir faire un cas d’ouverture à part entière des principes environnementaux, comme pour la violation directe de la règle de droit en matière d’excès de pouvoir.
Le droit de l’urbanisme a connu cette difficulté avec la question de la portée des ZNIEFF, et on le sait si les ZNIEFF sont "sans pouvoir normatif", le juge a très vite sanctionné la violation indirecte – notamment par le canal du contrôle de l’erreur manifeste – des principes inhérents à une ZNIEFF
La valeur n’est pas nécessairement condition de l’admission en examen par le juge à l’occasion d’un recours. Ainsi les SDAGE permettent pourtant de censurer des actes individuels qui leur seraient incompatibles. Posée dès 1998 par le tribunal administratif de Besançon dans un jugement de rejet, cette règle conduisit en 1999 le tribunal administratif de Nantes à admettre la légalité d’un refus d’autorisation rejetant une « mesure hydraulique compensatrice incompatible avec les orientations et les objectifs du SDAGE du bassin Loire Bretagne et du Schéma départemental des carrières. » S’agissant des schémas départementaux des carrières, ils se voient reconnaitre un caractère réglementaire mais surtout sont opposables à toutes décision individuelle d’autorisation, car ils ont « le caractère d’une décision réglementaire avec laquelle toute décision d’ouverture de carrière doit être compatible ». Même solution pour les « cartes d’objectifs », ou « documents d’objectifs »dont le principe résulte de la loi du 16 décembre 1964, dont l’esprit était d’imposer des objectifs de qualité des cours d’eaux aux industriels ; faute de décret d’application, ces documents découlent d’une circulaire du 13 mars 1978,pour lesquels la Cour administrative d'appel de Douai admettait déjà en 1999 que la non prise en compte dans un arrêté préfectoral entachait ce dernier d’illégalité et qui depuis 2006 sont considérées comme des actes qui contiennent « des dispositions susceptibles de produire de effets juridiques » et dont « l’arrêté préfectoral l’approuvant peut, dans cette mesure, être déféré au juge de l’’excès de pouvoir ». On constatera au travers de ces exemples que l’on retrouve une invocabilité indépendante de la valeur des normes de références ; S.D.A.G.E ou Schémas directeurs des carrières, documents d’objectifs ne culminent pas au niveau des principes de valeur constitutionnelle, mais ils sont invocables devant le juge.
A bien y regarder cependant, ils sont invocables, certes, mais dans une logique indirecte : indirecte soit par la nature du rapport juridique examiné, qui est celle de la comptabilité et non de la conformité, indirecte surtout par la nature du contrôle du juge.
Et le juge utilise au regard des principes environnementaux toutes les méthodes classiques du contrôle indirect.
Au premier chef la méthode de l’adéquation des mesures aux faits propre au contrôle de la police administrative. La formulation parfois du contrôle juridictionnel des normes environnementales rappelle ainsi de vieilles réminiscences. Un arrêt « Fédération nationale des syndicats de propriétaires forestiers sylviculteurs » (Conseil d’Etat 13 juillet 2006, n°281812), à propos des « règles relatives à la protection du milieu particulier des espaces protégés » rappelle que « ces règles ne peuvent toutefois légalement consister une interdiction générale et absolue (...) mais doivent au contraire être adaptées aux nécessités que la protection de certaines espèces impose en certains lieux. » On y retrouve la double idée du contrôle juridictionnel en matière de police ; celle de la prohibition des interdictions générales et absolues, et surtout celle d’une nécessaire adéquation des mesures aux faits, qualifiée ici de règles « adaptées ».
Dans la même logique que le contrôle dit de proportionnalité en matière de police, le « bilan cout avantage » cher à la jurisprudence du contrôle de l’utilité publique en expropriation, s’il avait naturellement dès le début intégré les éléments environnementaux allait recevoir consécration, par la première annulation d’une opération de grande envergure dans la célèbre affaire des gorges du Verdon. Ainsi l’arrêt du 10 juillet 2006 Association interdépartementale et intercommunale pour la protection du lac de sainte Croix voyait la Haute Assemblée considérer que « les atteintes graves portées par le projet à ces zones d’intérêt exceptionnel excèdent l’intérêt de l’opération et sont de nature à lui retirer son caractère d’utilité publique. ». Les pressions pour une consécration jurisprudentielle n’avaient pas manqué, par le passé, à la faveur d’affaires incorporant explicitement le principe de précaution dans le contrôle du bilan (CE, 28 juill. 1999, Assoc. intercommunale "Morbihan sous haute très haute tension", req. n° 184268 : Dr. env. n° 72, p. 13, note C. Cans) qu’elles fussent de nature doctrinales ou qu’elles émanent des magistrats eux-mêmes : ainsi dans ses conclusions sur deux arrêts de même date, le Commissaire du gouvernement prenait bien en compte le principe dans l'examen du contrôle de la légalité. Il relevait expressément que - dans le cas d'espèce- "le principe de précaution est précisément invoqué comme norme de référence directe", pour rappeler il est vrai que le contrôle du juge ne pouvait être qu'un contrôle restreint (concl. Mme Maugüé, 24 oct. 2001, Cne de Marennes : Environnement 2002, comm. n° 56 ;  HYPERLINK "http://www.lexisnexis.com:80/fr/droit/search/runRemoteLink.do?service=citation&langcountry=FR&risb=21_T787551523&A=0.0690804839990381&linkInfo=FR%23lnfr%23ref%25063046%25year%252001%25decisiondate%252001%25sel1%252001%25&bct=A" \t "_parent" Juris-Data n° 2001-063046). Cette prise en compte (simplement) indirecte du principe n’est plus contestée en ce domaine et a même fait l’objet d’explications claires du juge par le canal des conclusions Da Silva sur l’arrêt « Saint léger en Bray » (Conseil d’Etat 13 décembre 2002, association pour la sauvegarde de l’environnement et la promotion de Saint léger en Bray et autres, Lebon 963) : « il ne ressort pas des pièces du dossier qu’eu égard à l’importance de l’opération et aux précautions prises, notamment au regard des dispositions de l’article L 1110-1 du code de l’environnement, les inconvénients que cette opération comporte puissent être regardés comme excessifs … »).

Même prise en compte indirecte par le bais cette fois de l’erreur manifeste d’appréciation, déjà évoquée en matière de ZNIEFF, dans l’arrêt « C.R.I.L.A.N » du Conseil d’Etat, en date du 4 août 2006 : où à l’encontre du décret du 10 janvier 2003 autorisant l’agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) à modifier, pour passage en phase de surveillance, le centre de stockages de déchets radioactifs de la Manche, le Conseil d’Etat considéra que « Compte tenu des mesures prises par le décret qui devront être appliquées sans interruption, ce décret n’est pas entaché d’erreur manifeste d’appréciation ni dans l’application du principe de précaution, ni dans l’application du principe de prévention. »
Il confirme ainsi certes l’absence d’invocabilité absolue du principe de précaution devant le juge administratif mais aussi sa réelle invocabilité « indirecte » par le canal de l’erreur manifeste
Pour autant l’arrêt « C.R.I.L.A.N » n’écarte pas le principe de précaution de l’examen de la légalité, en admettant d’en examiner la violation indirecte en cas d’erreur manifeste d’appréciation. C’est en soi un classique de la jurisprudence sur le principe, notamment en matière de santé publique. Ainsi des quatre arrêts du Conseil d'État rendus en matière de santé publique, dans lesquels ce dernier a pu juger que “compte tenu des précautions qui s'imposaient en matière de santé publique”, les autorités administratives n'avaient pas entaché leurs décisions d'une appréciation manifestement erronée »
Cela a toujours été d’ailleurs la position du juge communautaire. Ainsi la Cour de Justice des communautés a estimé que “compte tenu de la gravité du danger et de l'urgence, la Commission n'avait pas réagi de façon manifestement inappropriée en adoptant, à titre transitoire et en attendant de plus amples informations scientifiques, une interdiction globale d'exportation des bovins, de la viande bovine et des produits dérivés” (CJCE,  HYPERLINK "http://www.lexisnexis.com:80/fr/droit/search/runRemoteLink.do?service=citation&langcountry=FR&risb=21_T793102697&A=0.3988825517726624&linkInfo=FR%23fr_acts%23enactdate%2520010411%25acttype%25Ordonnance%25sel1%252001%25&bct=A" \t "_parent" ord., 11 avr. 2001, aff. C-459/00 P (R), Comm. c/ Trenker SA : Rec. CJCE 2001, I, p. 2823). Cette position n’est pas propre à l’inquiétude de la « vache folle » mais semble déjà ancrée dans une méthode procédurale établie ; la Cour avait déjà rappelé dès 1993, en matière de réglementation et au regard du principe de précaution, que l'annulation ne pouvait être décidée qu’en administrant la preuve d’une “erreur manifeste, un détournement de pouvoir ou un dépassement manifeste des limites du pouvoir d'appréciation” de l'autorité décisionnaire (24 nov. 1993, aff. C-405/1992, Établissements Mondiet : Rec. CJCE 1993, I, p. 6133, concl. Gulmann).
Mais au fond peut-être en a-t-il toujours été ainsi : déjà dans la première décision, relative aux semences de maïs, le Conseil d'État, dans son arrêt au fond, avait déjà convoqué – certes à l’encontre de la directive communautaire mise en cause -, un raisonnement de ce type : « qu’il suit de là que le ministre aurait méconnu le- principe de précaution et commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’appréciation des risques doit être écarté. » (Conseil d’Etat 22 novembre 2000, Assoc. Greenpeace France Lebon page 548).
Quoiqu’il en soit, il est certain que l’intervention de la charte a modifié la donne en matière d’invocabilité des grands principes environnementaux.

C) le stade constitutionnel ? ouverture de perspectives dans le maintien des incertitudes 
L’entrée en vigueur de la charte de l’environnement – mettant un terme à la question de la valeur des princeps environnementaux - a nécessairement modifié les conditions d’invocabilité de ces principes. Elle a ouvert et développé des perspectives, mais aussi maintenu des incertitudes.
1-L’ ABROGATION DE FAIT ET LA THEORIE DE LA LOI ECRAN
L’intervention de la charte constitutionnelle du 1er mars 2005, si elle a naturellement modifié la valeur des principes environnementaux qu’elle reprend, pose la question de l’invocabilité de ces derniers, devenus principes constitutionnels, devant le juge. En écartant le spectre de « l’actio popularis environnementale » qui permettrait à quiconque (sans intérêt pour agir particulier) d’attaquer n’importe quel acte administratif au nom de la violation par exemple du « droit de vivre dans un environnement équilibré » (article ; 1er de la charte), très vite rejeté par le juge administratif, se pose réellement la question des conséquences de la promulgation de ce texte solennel en termes d’invocabilité. L’important arrêt du Conseil d’Etat du 19 juin 2006, « Association eaux et rivières de Bretagne » rappelle les effets de l’accession au niveau constitutionnel à l’égard des lois antérieures à la charte des principes des articles : « lorsque des dispositions législatives ont été prises pour assurer la mise e œuvre des principes énoncés aux articles, (…) de la charte de l’environnement (….)la légalité des décisions administratives ne s’apprécie par rapport à ces dispositions que sous réserve, s’agissant de dispositions législatives antérieures à l’entrée en vigueur de la charte (…)qu’elles ne soient pas incompatibles avec les exigences qui découlent de cette charte ». La théorie de la loi écran souffre ainsi une exception majeure en cas d’incompatibilité de la loi avec la charte.
Combinée avec la jurisprudence dite de l’abrogation de fait par laquelle le juge se permet d’écarter par la fiction de la théorie de la loi écran cette position du juge administratif suprême est essentielle en termes d’invocabilité des principes environnementaux. Certes s’agissant des principes environnementaux de la charte n’ayant pas fait l’objet d'une loi pour les mettre en œuvre – hypothèse exceptionnelle – il reste une interrogation.
Naturellement, s’agissant de l’intervention d’une loi postérieure à la charte, contraire ou incompatible avec cette dernière, la théorie de la loi écran joue toujours, mais il appartiendrait au Conseil constitutionnel de déclarer ladite loi non conforme. Au surplus, l’adoption possible sous peu d’une révision constitutionnelle incluant l’admission de l’exception d’inconstitutionnalité atténuerait encore le risque de non respect des principes environnementaux à valeur constitutionnelle. Il n’en reste pas moins que la combinaison de l’accession au niveau constitutionnel, de la jurisprudence sur l’abrogation de fait, et de la future admission de l’exception d’inconstitutionnalité dans notre système de contrôle juridique, constituent indiscutablement des perspectives importantes.
2-L’INDEPENDANCE DES LEGISLATIONS
Ces évolutions acquises comme supposées pourraient dans le même temps porter un coup fatal à l‘application aux principes environnementaux du principe d’indépendance des législations. Le célèbre arrêt « Société Bouygues telecom » (Conseil d’Etat 21 avril 2005 écartait, l’on s’en souvient le principe de précaution énoncé par les articles L 200-1 du code rural et L 110-1 du code de l’environnement à l’encontre d’un permis de construire à raison de ce que « ces dispositions ne sont pas au nombre de celles que doit prendre en compte l’autorité administrative lorsqu’elle se prononce sur l’octroi d’une autorisation délivrée en application de la législation sur l’urbanisme. ». Cette position a été maintes fois reprise dans la jurisprudence. des tribunaux administratifs, des Cours administratives d'appel , et confirmée par le Conseil d’Etat lui-même par la suite. Pourtant le « stade constitutionnel » des principes environnement efface la possibilité d’utilisation de l’indépendance des législations pour écarter l’opérance d’un moyen tiré de leur violation ; le texte législatif écarté (le code de l’environnement ou le code rural) en matière d’urbanisme, ne peut plus en théorie l’être. C’était le point de vue des autorités doctrinales autorisées , et on ne peut que le partager. C’est même devenu la position de certains juges. Ainsi le tribunal administratif d’Amiens a-t-il admis l’opérance du moyen tiré du principe de précaution à l’encontre d’une révision simplifiée d’un POS , jugeant que « que ces dispositions (article 5 de la charte) peuvent être utilement être invoquées à l’encontre d’une décision administrative intervenue sur le fondement de la législation de l’urbanisme »., suivant en cela son Commissaire du Gouvernement Anne Caron, laquelle proposait que « le caractère inopérant du principe de précaution au contentieux des autorisations d’urbanisme ne se pose plus de la même manière depuis l’entrée en vigueur de la charte de l’environnement de 2004 ».
Il est vrai que sans attendre la constitutionnalisation des principes, sans devoir réviser la constitution en permettant l’exception d’inconstitutionnalité, il était si facile d’intégrer un article type L 110-1du code de l’environnement, ainsi que d’autres dans le texte même du code de l’urbanisme. Mais pourquoi faire simple quand… ?
En tous les cas, le stade constitutionnel lève indiscutablement l’obstacle du principe d’indépendance des législations.

3 LA SOUSMISSION AU DROIT COMMUN ?
Le constat d’une valeur rattrapée par la portée des principes environnementaux ne doit cependant pas être aussi optimiste qu’il pourrait y paraître. En effet la valeur très élevée – la plus élevée puisque constitutionnelle – desdits principes pourrait laisser penser que ce qu’on peut appeler le droit de l’environnement ne connait pas de limite de position dans la hiérarchie des normes et constitue une sorte de sur droit. Le très important arrêt « ALUSUISSE » doit nous rappeler que les objectifs environnementaux connaissent des limites. Au cas particulier, il s’agissait de la prescription trentenaire. On sait que cet arrêt, qui a heurté les adeptes d’une imprescriptibilité de l’obligation de remise en état, aux fis d’aligner l’infraction écologique sur les crimes de guerre, oppose la prescription trentenaire à l’Etat.
Mais au-delà de cette règle, somme toute peu étonnante, c’est la manière utilisée par le Conseil d’Etat qui est sans doute révélatrice. En effet l’arrêt d’assemblée posa en premier lieu la question du rang hiérarchique en tant que norme de la prescription trentenaire, et si l’arrêt d’appel l’avait écarté au nom de l’intérêt général en « général » et des préoccupations d’environnement en « particulier » ; le Conseil d’Etat semble y voir un principe plus important, puisque non sans ambiguïté il en fait un principe qui s’oppose à l’autorité administrative et à l’obligation de remise en état.
Or cette invalidation de la primauté du droit de l’environnement sur le droit commun, par un arrêt d’assemblée, fait appel cependant à toutes les subtilités sémantiques. Le Conseil d’Etat, malgré la réticence initiale et répétée du juge administratif d'appliquer les principes du Code civil : dans une formulation expresse semble vouloir limiter le statut de la prescription trentenaire à celui de principe, même si au cas particulier il considère qu’elle s’impose à la volonté administrative environnementale de remise en état.
Cette limitation au rang de simple principe est étonnante si l’on considère que la Haute Assemblée, indépendamment de sa capacité générale à qualifier des principes issus du droit privé de principes généraux, avait déjà dans une certaine mesure élevé la prescription trentenaire à ce rang par le passé.
Mais expresse pour la responsabilité contractuelle, la solution est plus ambiguë dans le domaine extra contractuel. Au final l’application de la prescription trentenaire à une mesure de police pose la question de la confrontation des considérations environnementales aux règles de procédure.
Dans une lecture stricte de l’arrêt d’assemblée, la formulation lapidaire (« les principes dont s’inspire l’article 2262 du code civil » de l’arrêt d’assemblée du 8 juillet 2005 pourrait laisser penser que si la prescription trentenaire est un principe général de droit public en matière de contrat, elle ne serait qu’un « simple » principe  en droit de la responsabilité et au cas particulier au droit de la remise en état d’une installation classée.
Cette interprétation se heurterait à l’efficience de l’arrêt d’assemblée lui-même. Ce dernier en effet fait primer la fameuse prescription, simple principe « dont s’inspire l’article 2262 du code civil » sur le  « but d’intérêt général en vue duquel ce pouvoir est exercé, notamment pour faire cesser les dangers et nuisances pour l'environnement et la sécurité et la salubrité publiques (arrêt de la Cour de Marseille), c’est-à-dire sur un Environnement , au sens large, que chacun admet aujourd’hui, en vertu de la Charte, pour une liberté publique de valeur constitutionnelle .
On pourrait être tenté de penser que l’arrêt d’assemblée met la prescription trentenaire au dessus de principes dont certains, au nom d’une primauté du droit de l’environnement sur le droit commun, voulaient qu’ils fussent de valeur constitutionnelle et qui le sont finalement devenus.
L’on aurait sans doute admis que le Conseil d’Etat fasse de la prescription trentenaire un principe de valeur constitutionnelle, ou à défaut de rattachement à un concept flou appartenant au bloc de constitutionnalité et permettant de le raccrocher, à un principe fondamental reconnu par les lois de la République, ou même un principe de droit communautaire, ou même simplement un principe général de droit.
Faut-il voir dans l’édiction d’une règle de soumission d’un principe environnemental à un simple « principe dont s’inspire l’article 22 du code civil » une volonté d’humiliation des principes environnementaux. Sans doute pas, mais il faut en tirer une leçon quant à la soumission des principes environnementaux, quelle que soit leur valeur, aux règles procédurales de droit commun. Dans l’espèce Alusuisse, la conciliation passe par une confrontation entre deux normes qui ne relèvent pas du même registre : la prescription peut s’analyser comme un mécanisme de procédure, la remise en état participe des règles de fonds du droit de l’environnement.
Finalement seule la reconnaissance par l’ordre public d’un intérêt supérieur tout à fait extraordinaire justifie qu’un système juridique fasse échec en son nom au véritable droit procédural à l’oubli que constitue la prescription. C’est la solution retenue pour le crime contre l’humanité, ce n’est pas seule de l’obligation de remise en état.




CONCLUSION
Les principes environnementaux sont aujourd’hui à la croisée des chemins : les principes issus du débat international sont devenus des normes à part entières, placées en droit français au plus haut niveau de notre hiérarchie. Les techniques jurisprudentielles indirectes (erreur manifeste d’appréciation, bilan coût avantage, adéquation des mesures aux faits) et classiques sont aujourd’hui complétées – au stade constitutionnel - par des prises en compte prétoriennes encore plus hardies, comme la théorie du constat de l’abrogation de fait, l’admission de l’exception d’inconventionalité appliquée au droit de l’environnement ou la relativisation de la théorie de l’indépendance des législations ou encore par des potentialités nouvelles comme l’admission possible en droit français de l’exception d’inconstitutionnalité. On ne peut sur ce plan, qu’adhérer sans réserve à l’éloge fait justement par le Commissaire du Gouvernement Aguila du « rôle de premier plan » que « le juge administratif est appelé à jouer (…) en droit de l’environnement ».
Mais cette indiscutable évolution révélatrice d’un besoin sociologique de reconnaissance de ces principes dont on ne peut que se réjouir ne doit pas faire oublier certaines difficultés tenant à la nature instable du socle juridique français et aux différences de nature entre le droit des principes environnementaux et le droit classique issu de la Révolution et de la période napoléonienne. Elle devra nécessairement tenir compte des conditions de précision suffisante et de réalisme qu’une règle de droit doit nécessairement avoir pour être applicable avec efficience par le juge.
 Pour exemple récent Voir Nicolas HUTEN et Marie-Anne COHENDET La charte de l’environnement deux ans après (RDE 3.et 4 /2007) ou encore la « chronique de jurisprudence. relative à la charte de l’environnement » de Laurent FONBAUSTIER (Environnement n°12, décembre 2007, chron.1)
 Conseil d’Etat Assemblée 3 octobre 2008, Commune d’Annecy (requête 297 931) sur les conclusions de M. Yann AGUILA, Commissaire du Gouvernement.
 Pour prendre comme date de référence la conférence de Rio de 1992 comme point de départ d’une volonté de voir les principes entrer dans les hiérarchies des normes des Etats, même si les 27 principes dégagés à cette occasion l’ont été dans une simple déclaration politique.
 Cf. Manuel GROS et Pierre Yves VERKINDT, l’autonomie du droit du sport, fiction ou réalité ? AJDA décembre 1985 .699.
 Attribuée également à Léopold Sedar Senghor, qui l’avait sans doute empruntée à un proverbe Masaï, comme Saint Exupéry l’avait emprunté vraisemblablement à un proverbe indien d’Amérique du sud (« la terre n’est pas un don de nos parents, ce sont nos enfants qui nous la prêtent »).
 Conseil d’Etat 30 novembre 1923 Couitéas, R. 789.
 Conseil d’Etat 9 mars 1951, R.151.
 Pour de plus amples développements sur ce thème, Cf. Manuel GROS « les polices et responsabilités des maires des communes minières dans l’après charbon » (Environnement juillet 2002 n°7 page 8-11.
 Conseil d’Etat 29 septembre 2003 Houillères de bassin de Lorraine, n°28217, concl .Olson, AJDA n°40/2003 page 2164. Voir également D.DEHARBE « Les installations classées pour la protection de l’environnement, LITEC 2007 n°405-406.
 Yves JEGOUZO, note sous T.A Poitiers, ordonnance du 22 octobre 2002, AJDA n°21/2002 page 1351.
 Tel est le cas par exemple en matière de définition de la valorisation, où la définition communautaire n’est pas toujours retenue par l’Administration française et conduit le juge à sanctionner (Cf. TA Lille, ord. 26 sept. 2006, SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE VALORISATION DES DECHETS, ordonnant la suspension d’un arrêté préfectoral d’interdiction de transports de déchets d’incinération (REFIOM), TA Lille, 30 avril 2008, SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE VALORISATION DES DECHETS MENAGERS DU HAINAUT VALENCIENNOIS, req. n° 0605603 et CAA DOUAI, 21 juin 2007, MEDAD c/ SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE VALORISATION DES DECHETS MENAGERS DU HAINAUT, req. n° 06DA00736 annulant le même arrêté.

 R Kelsen, Hans, 1881-1973, Théorie pure du Droit, Bruxelles : Bruylant ; Paris: Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1999. Théorie générale des normes, Paris : Presses universitaires de France, 1996.
 « les acteurs ne s’accordent pas sur le même contenu exact de cette norme Olivier GODARD« Le principe de précaution dans les conduites des affaires humaines, Editions de la Maison des sciences de l’Homme, Paris 1997, Introduction générale, ou encore
 Nicolas de SADELEER « ces principes appartiennent en tous cas à des concepts dont la compréhension semble aller de soi, mais qui ont tendance à se dérober au fur et à mesure que l’on cherche à les définir. »Les principes du Pollueur-payeur, de prévention et de Précaution, Bruylant-Auf, Bruxelles, 1999, page 227.
 le principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable »,
 « Lorsque la réalisation d’un dommage bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent par application du principe de précaution et dans leur domaine d’attributions, à la mise en œuvre de procédure d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. »
 « Les politiques publiques doivent promouvoir u développement durable. A cet effet elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social.
 Le mot précaution vient littéralement du latin « praecavere » (prendre garde) mais le principe environnemental en cause relève manifestement davantage du concept de « prudence », c’est-à-dire de la « prudentia », dont Cicéron faisait une « vertu émanant de l’acte de prévoir » Cicéron, De legibus I, 60, cité par Charles COUTEL, op. prec. Page 173.
 Présent implicitement dans le préambule de 1946(points  10. Et 11 à et dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 (préambule) indépendantes de sa volonté »).

 Cf. Manuel GROS « L’environnement contre les droits de l’homme » RDP n°6-2004 page 1583.

 Le Conseil d’Etat, en l’arrêt « Commune d’Annecy » précité du 3 octobre 2008, vient de consacrer cette évidence de la valeur constitutionnelle en un considérant qui sera de principe : « Que ces dernières dispositions, comme l’ensemble des droits et devoirs définis dans la charte de l’environnement, et à l’instar de toutes celles qui procèdent du préambule de la constitution, ont valeur constitutionnelle. »
 G.H.BRUNDTLAND Votre avenir à tous Ed. Fleuve Montréal 1988.
 CC 28 avril 2005 dec DC 2005-514 Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Charte de l'environnement de 2004 : " Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social " ; qu'il appartient au législateur de déterminer, dans le respect du principe de conciliation posé par ces dispositions, les modalités de sa mise en œuvre ;
 Cf. Claire LANDAIS et Frédéric LENIKA in AJDA 11 septembre 2006, pages 1583 et suivantes, chronique générale de jurisprudence. administrative française)
 Voir sur ce point le commentaire de David DEHARBE « L’article 6 de la charte de l’environnement, le principe d’interprétation ou de méthodologie juridique pour le développement durable » (Environnement n°4/2005 comm.34).
 CC 27 juin 2001 dec DC 2001-446 ; « Considérant que, contrairement à ce qu'affirment les requérants, le principe de précaution ne constitue pas un objectif de valeur constitutionnelle » ;
 Requête n°194348 : « Considérant que les associations susnommées (…) qu'elles invoquent le principe de précaution énoncé à l'article L. 200-1 du code rural et les dispositions tant de l'article 15 de la loi du 13 juillet 1992 que de l'article 6-1 ajouté au décret susvisé du 18 mai 1981 par le décret du 18 octobre 1993 pris pour l'application de la loi précitée ; que ce moyen paraît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'annulation de l'arrêté attaqué ; qu'eu égard par ailleurs à la nature des conséquences que l'exécution de l'arrêté attaqué pourrait entraîner, il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de faire droit aux conclusions de l'association requérante tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêté » ;

Conseil d’Etat 4 août 2006 Comité de réflexion, d’information et de lutte antinucléaire, requête 254948, note Manuel GROS, Revue Droit de l’environnement, n°144 page 365 : « Considérant, enfin, que les moyens tirés de ce que le décret attaqué méconnaîtrait l'article 12 de la directive « Seveso II » et les principes de précaution et de prévention définis au II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ne sont pas assortis de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé » ;
 Conseil d’Etat 30 mars 2005 l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, requête N° 249066
 L’imprécision des moyens, à distinguer de l’imprécision des principes invoqués, est une constante jurisprudentielle de rejet (Cf. Conseil d’Etat 18 décembre 1964 Ets Omer Decugis R.64.669)
 Conseil d’Etat 6 avril 2006 Ligue pour la protection des oiseaux req 283103, 13 juillet 2006 France Nature environnement req 293764, 2 février 2007 Association convention vie et nature pour une écologie radicale req 289758 : « que la date retenue par l'arrêté ne méconnaît pas l'objectif de protection complète fixé par celle-ci ; que, par suite et en second lieu, elle ne saurait méconnaître le principe de précaution formulé dans la Charte » de l'environnement ainsi qu'à l'article L. 110-1 du code de l'environnement
 Conseil d’Etat 27 septembre 1985 Association France terre d’Asile, req 444484 et 444485.
 Conseil d’Etat 28 décembre 2005 Préfet de la haute Savoie, req 274204.
 Conseil d’Etat 28 décembre 2005 MASDOUA req 275439.
 R.607
 3 octobre 2008, Précité.
Georges VEDEL «  La place de la déclaration de 1789 dans le « bloc de constitutionnalité » Colloque du bicentenaire, mai 1989 P.U.F page 55.
 Conseil d’Etat 27 février 2004 Centre régional de la propriété foncière de Lorraine Alsace ; Req 198124.
 Réponse ministérielle n°43107 : JOAN Q 10 févr. 1997, p. 689.
 Erreur manifeste d’un préfet autorisant l'exploitation d'une carrière dans une ZNIEFF (CE, 30 déc. 1996, Sté Ballastières de Travecy : Mon. TP 1er août 1997, p. 35. – TA Caen, 10 déc. 1996, n° 951809, Assoc., Faune et Flore : Études foncières sept. 1997, p. 45). d’un conseil municipal permettant l'implantation d'un hôtel-restaurant et d’un équipement touristique dans une zone réputée à vocation agricole et en bordure d’une ZNIEFF. (TA Nantes, 1er avr. 1993, Les Verts du pays de Retz et a. : Dr. env. oct.-nov. 1993, p. 21 et 22) De même le tracé d'une zone NA (urbanisation future) sur des périmètres figurant à l'inventaire des ZNIEFF a été jugé comme entaché du même vice (TA Nice, 1er févr. 1996, Synd. d'exploitants agricoles de Fontau-Sorge et a. : Études foncières déc. 1996, p. 40, comm. B. Lamorlette).
 TA Besançon 22 octobre 1998, Association Haute Saône Nature environnement/ Préfet de la Saône, requête n°980686, in David DEHARBE, le droit de l’environnement industriel LITEC page 168.
 TA Nantes 19 octobre 1999 Société des carrières du Maine, n° 97-3165, in David DEHARBE, le droit de l’environnement industriel LITEC page 169.
 Cour administrative d'appel de LYON 20 juin 2000, SARL GUITTARD 99LY01774, solution confirmé par la Cour administrative d'appel de Nantes, 28 juin 2002, requête 00NT00037.
 Cour administrative d'appel de Douai 9 décembre 1999 Société Lefèvre surgelés 96 DA 10942.
 Conseil d’Etat 12 juin 2006 Féd dép des synd d’exploitants agricoles de la Vendée AJDA 2006 2015, note X.BRAUD.
 Les principes de la jurisprudence. « Ville nouvelle est » (Conseil d’Etat ass.28 mai 1971 R.409, concl BRAIBANT), intégraient dans les atteintes aux intérêts publics les atteintes environnementales dès 1975 avec l’arrêt « Syndicat CFDT Marins pécheurs de la rade de Brest » (Conseil d’Etat 25 juillet 1975, requêtes 90992 ! 91012 91013 91014 91015). L’environnement aurait même été à l’origine de la méthode du bilan dans l’arrêt de préfiguration sur les Boues rouges de Cassis (Conseil d’Etat 15 mars 1968, Commune de Cassis, .req 69312 69315 69326 69327 69328 69329 69334) 
 Conseil d’Etat 10 juillet 2006. Req 288108
 C. Cans, Le principe de précaution, nouvel élément du contrôle de légalité : RFD adm. juill.-août 1999, p. 750).
 Cf. supra.
 Conseil d’Etat 4 août 2006, précité
 CE, 21 avr. 1997, Barbier CE, 21 avr. 1997, Barbier, req. n° 180274 : D. 1997, inf. rap. p. 123 ;  HYPERLINK "http://www.lexisnexis.com:80/fr/droit/search/runRemoteLink.do?service=citation&langcountry=FR&risb=21_T790387240&A=0.46245979595962394&linkInfo=FR%23lnfr%23ref%25050225%25year%251997%25decisiondate%251997%25sel1%251997%25&bct=A" \t "_parent" Juris-Data n° 1997-050225, pour une autorisation de fabrication et d'utilisation d'un produit contenant du collagène bovin. – 24 févr. 1999, Sté Pro-Nat, 24 févr. 1999, Dr. adm. 1999, comm. n° 239, obs. Bonichot, pour l'interdiction de l'emploi de matières d'origine bovine dans des aliments pour bébés. –CE, 30 juin 1999, Germain, req. n° 202814 :  HYPERLINK "http://www.lexisnexis.com:80/fr/droit/search/runRemoteLink.do?service=citation&langcountry=FR&risb=21_T790387240&A=0.08677653917734585&linkInfo=FR%23lnfr%23ref%25050758%25year%251999%25decisiondate%251999%25sel1%251999%25&bct=A" \t "_parent" Juris-Data n° 1999-050758. – 17 déc. 1999, Gootjes, req. n° 202871 :  HYPERLINK "http://www.lexisnexis.com:80/fr/droit/search/runRemoteLink.do?service=citation&langcountry=FR&risb=21_T790387240&A=0.2867276979790958&linkInfo=FR%23lnfr%23ref%25051691%25year%251999%25decisiondate%251999%25sel1%251999%25&bct=A" \t "_parent" Juris-Data n° 1999-051691 en matière de médicaments homéopathiques et des souches servant à leur conception.
 Voir par exemple une ordonnance du Tribunal administratif d’Amiens du 8 décembre 2005 NOWALCKI (AJDA 2006 page 1053) « Considérant que si toute personne peut se prévaloir du droit de vivre dans un environnement équilibré (…) c’est à la condition qu’elle apporte devant le juge les éléments de nature à faire regarder la décision attaquée comme portant atteinte à sa situation personnelle protégée parce droit ».
 Requêtes 282456 et 283103, AJDA 2006 page 1584 Chronique générale de jurisprudence. administrative française.
 Position réaffirmée expressément dans le 4ème considérant de l’arrêt d’assemblée du 3 octobre 2008 « Commune d’Annecy » - précité.
 Conseil d’Etat ass. 16 décembre 2005 syndicat national des huissiers de justice…req 259584.
 Conseil d’Etat 27 juin 2007 Assoc. Nationale pour la protection des eaux et rivières (req 297531) : « qu’il n’appartient pas au juge administratif de statuer sur la conformité d’une disposition législative à la Constitution et que la ratification de l’ordonnance du 28 juillet 2005 fait donc obstacle à ce que soit examiné le moyen tirée de ce que cette abrogation méconnaitrait l’article 7 de la charte de l’environnement ».
L’arrêt, dans la logique de la jurisprudence. « Eaux et rivières de Bretagne » pour le même article 7 de la charte n’oppose pas la théorie à des dispositions cette fois antérieures à l’entrée en viguer de la charte. (cf. » chronique de jurisprudence. relative à la charte de l’environnement » de Laurent FONBAUSTIER (Environnement n°12, décembre 2007, chron.1).
 Requête n° 248233
 Par exemple tribunal administratif de Toulouse 2mars 2006 030603 et 0400074 Carentz/ Préfet de Haute Garonne, en matière de permis de construire d’éoliennes.
 Cour administrative d'appel de Lyon 8 juin 2006, en matière de porcheries (02LY01902), Cour administrative d'appel de Bordeaux 2 mai 2006 GOUDAN 02 Bx01286, note DEHARBE Droit de l’environnement, en matière d’antenne relai.
 Conseil d’Etat 23 novembre 2005 Commune de Nice 262105 pour un permis de construire de parking souterrain.
 Yves YEGOUZO qui considère que désormais l’application du principe de précaution « n’est pas limitée aux seules polices régies par le code de l’environnement » (« De certaines obligations environnementales : prévention, précaution et responsabilités AJDA 2005 page 1164), ou David DEHARBE qui vilipende « l’inconstitutionnalité environnementale du principe d’indépendance des législations. », « l’application du principe d’indépendance des législations », note sous Cour administrative d'appel de Douai Bordeaux 2 mai 2006 GOUDAN, 02Bx1286, droit de l’environnement n°144, novembre 2006 page 357.
 TA Amiens 23 avril 2007 Préfet de la Somme/Commune de Lanchères (req 0601149), conclusions CARON, (RJE 4/2007 PAGE 477°.
 Nous remercions le Commissaire du Gouvernement sur cette affaire de la communication de ses conclusions.
 Conseil d’Etat ass. 8 juillet 2005 SOCIETE ALUSUISSE-LONZA-France (Revue droit de l’environnement, 2008/8 page 219, note DEHARBE et GROS, « prescrire la dépollution ?»
 « qu'eu égard au but d'intérêt général en vue duquel ce pouvoir est exercé, notamment pour faire cesser les dangers et nuisances pour l'environnement et la sécurité et la salubrité publiques, l'action de l'État n'a ni pour objet ni pour effet d'assurer le recouvrement à l'égard de l'exploitant d'une créance présentant un caractère patrimonial ; qu'il suit de là que, nonobstant les dispositions de l'article 2227 du code civil, l'action du préfet tendant à mettre à la charge de l'exploitant d'une installation classée les travaux de remise en état du site à la cessation de l'exploitation n'est pas soumise au régime de prescription édicté par l'article 2262 du même code ; que, par suite, la société Alusuisse Lonza France n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté l'exception de prescription trentenaire » (COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE MARSEILLE, (1re chambre) 5 mars 2002 N° 98MA00656Société Alusuisse Lonza France).
 « Considérant, toutefois, que les principes dont s’inspire l’article 2262 du code civil font obstacle à ce que le préfet impose à l’exploitant, à son ayant-droit ou à la personne qui s’est substituée à lui la charge financière des mesures à prendre au titre de la remise en état d’un site lorsque plus de trente ans se sont écoulés depuis la date à laquelle la cessation d’activité a été portée à la connaissance de l’administration, sauf dans le cas où les dangers ou inconvénients présentés par le site auraient été dissimulés »(Conseil d’État N° 24797Assemblée 8 juillet 2005).
 dès 1844, en matière de responsabilité administrative on peut relever  un arrêté de conflit (CE, 8 août 1844, Dupart : Rec. CE, p. 464 ; DP 1845, 3, p. 3 ; S. 1845, 2, p. 58..). Le refus est confirmé en 1855 (CE, 6 déc. 1855, Rothschild : Rec. CE, p. 705), et trouve sa consécration par le tribunal des conflits dans la célèbre décision "Blanco ».
 « Considérant, toutefois, que les principes dont s’inspire l’article 2262 du code civil font obstacle à ce que le préfet… »
 Pour une des première reconnaissances : TA Châlons-en-Champagne, ord. 29 avril 2005, n° 0500828, 05000829 et 0500830, conservatoire du patrimoine naturel, ligue de protection des oiseaux et Fédérations des Conservatoires d’espaces natures C/ Préfet de la Marne, Environnement n° 8/9 2005, p. 22, com. n° 61 P. Trouilly et C. Nouzha ; AJDA, n° 24/2005, p. 1357, note H. Groud et S. Pugeault
 Le conseil constitutionnel a confirmé que la charte de l’environnement constitue un élément du bloc de constitutionnalité (CC n° 2005-514 DC, 28 évril 2005 : JO, 4 mai, 2005 ; CC n° 2005-516 DC, 7 juillet 2005, LPA, 24 août 2005, n° 168, p.3).
 La prescription extinctive (encore dite libératoire) est en effet consacrée en droit communautaire. Ainsi la CJCE, elle même, prohibe, au nom de la sécurité juridique et de la confiance légitime, les obligations imprescriptibles (aff. C-74/00 P, CJCE 24 septembre 2002, Falck Spa et acciaierie di Bolzano Spa / Commission : « en l'absence de texte à cet égard, l'exigence fondamentale de la sécurité juridique s'oppose à ce que la Commission puisse retarder indéfiniment l'exercice de ses pouvoirs. Par conséquent, le Tribunal a commis une erreur de droit en limitant son examen du grief relatif à l'action tardive de la Commission à la constatation selon laquelle aucun délai de prescription n'existait dans le domaine considéré et en ne vérifiant pas si cette dernière n'avait pas agi de manière excessivement tardive. Il y a lieu d'annuler l'arrêt attaqué à cet égard »
 Conseil d’Etat ass. 8 février 2007 Société ARCELOR Atlantique et lorraine et autres Juris-Data : 2007-071436
 Conclusions précitées sur Conseil d’Etat Assemblée 3 octobre 2008 Commune d’Annecy – précité.









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