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2 La sécurité des machines

Hazard and Operability study (HAZOP) ... La conception pour la sécurité appartient à la grande famille des méthodes modernes pour la conception. ...... des limites doit être revue et corrigée au fur et à mesure de l'avancement de l' analyse, ...




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Démarche d’analyse et de maîtrise du risque (DAMR)
intégrée à un
Processus de développement de produit (PDP)


Document produit par :

Patrik DOUCET
Professeur, Université de Sherbrooke
François GAUTHIER,
Professeur, Université du Québec à Trois-Rivières
Patrick DUBOIS
Étudiant, Université de Sherbrooke



12 septembre 2004
Clientèle ciblée et Objectifs poursuivis

Ce document s’adresse à toutes les étudiantes et tous les étudiants en ingénierie qui souhaitent apprendre à concevoir des outils, des machines ou des systèmes de production industriels plus sécuritaires. De façon plus spécifique, ce document vise à ce que les étudiantes et étudiants :

soient sensibilisés à l’importance, sur les plans social, professionnel et économique, d’améliorer la sécurité des machines;
comprennent les différentes étapes et méthodes de la démarche générale d’analyse et de maîtrise des risques;
comprennent quand, pourquoi et comment la démarche d’analyse et de maîtrise des risques peut être intégrée à un processus de développement de produit;
soient capables, en se basant sur l’étude de cas produite [DOUCET et coll., 2004], d’appliquer la démarche d’analyse et de maîtrise des risques à un projet de conception.

Bien qu’il soit possible, en procédant à quelques aménagements de la matière, de couvrir ce sujet en une semaine (9 heures, réparties en 3 heures d’enseignement, 3 heures de travaux dirigés et 3 heures d’études personnelles), ce matériel a été conçu pour une formation «  échelonnée sur deux semaines (18 heures).

Auteurs

Patrik DOUCET, ing., M.Sc.A.
Professeur
Département de génie mécanique
Université de Sherbrooke
Patrik.Doucet@Usherbrooke.ca

François GAUTHIER, ing., Ph.D.
Professeur
Département de génie industriel
Université du Québec à Trois-Rivières
Francois_Gauthier@UQTR.CA

Patrick DUBOIS, ing. stag.
Étudiant à la maîtrise en génie mécanique
Université de Sherbrooke

Des remerciements particuliers sont adressés à M. Joseph-Jean Paques de même qu’à M. Réal Bourbonnière, chercheurs à l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail du Québec (IRSST). Ce document est grandement inspiré des travaux de ces chercheurs [PAQUES et coll., 2003].
Tables des matières

 TOC \o "1-3" \t "Annexe;1;Gros titre;1;APPENDICE;1" 1 Introduction  PAGEREF _Toc86112685 \h 1
1.1 Domaine d’application de la conception pour la sécurité traité  PAGEREF _Toc86112686 \h 1
1.2 Contenu de ce document  PAGEREF _Toc86112687 \h 2
2 La sécurité des machines  PAGEREF _Toc86112688 \h 3
2.1 Les accidents machines  PAGEREF _Toc86112689 \h 3
2.1.1 Statistiques générales des accidents du travail  PAGEREF _Toc86112690 \h 3
2.1.2 Accidents associés aux machines industrielles  PAGEREF _Toc86112691 \h 6
2.2 Bases réglementaires et normatives  PAGEREF _Toc86112692 \h 7
2.2.1 Réglementation et normalisation des machines dangereuses  PAGEREF _Toc86112693 \h 7
2.2.2 Code de l’électricité, normes et certification CSA/ACNOR  PAGEREF _Toc86112694 \h 8
2.3 Processus accidentel  PAGEREF _Toc86112695 \h 10
2.3.1 Modèle graphique  PAGEREF _Toc86112696 \h 10
2.3.2 Exposition en situation dangereuse  PAGEREF _Toc86112697 \h 11
2.3.3 Événement dangereux  PAGEREF _Toc86112698 \h 15
2.3.4 Possibilité d’évitement  PAGEREF _Toc86112699 \h 16
2.3.5 Dommage  PAGEREF _Toc86112700 \h 17
3 La démarche d’analyse et de maîtrise des risques (DAMR)  PAGEREF _Toc86112701 \h 20
3.1 Schéma général  PAGEREF _Toc86112702 \h 20
3.2 Appréciation du risque  PAGEREF _Toc86112703 \h 22
3.2.1 Détermination des limites de la machine  PAGEREF _Toc86112704 \h 22
3.2.2 Identification des phénomènes dangereux  PAGEREF _Toc86112705 \h 25
3.2.3 Estimation du risque  PAGEREF _Toc86112706 \h 31
3.2.4 Évaluation du risque  PAGEREF _Toc86112707 \h 34
3.3 Réduction du risque  PAGEREF _Toc86112708 \h 35
3.3.1 Prévention intrinsèque  PAGEREF _Toc86112709 \h 36
3.3.2 Réduction du risque  PAGEREF _Toc86112710 \h 36
3.3.3 Sécurité par protection  PAGEREF _Toc86112711 \h 37
3.3.4 Autres dispositions  PAGEREF _Toc86112712 \h 38
3.4 Évaluation des solutions pour la maîtrise du risque  PAGEREF _Toc86112713 \h 39
3.4.1 La sécurité  PAGEREF _Toc86112714 \h 39
3.4.2 La fonctionnalité  PAGEREF _Toc86112715 \h 39
3.4.3 Le coût  PAGEREF _Toc86112716 \h 40
4 Intégration de la DAMR dans le processus de développement de produit (PDP)  PAGEREF _Toc86112717 \h 41
4.1 Principe général d’intégration  PAGEREF _Toc86112718 \h 41
4.2 Principaux contextes d’intégration  PAGEREF _Toc86112719 \h 43
4.2.1 Conception d’une modification sur une machine existante  PAGEREF _Toc86112720 \h 43
4.2.2 Conception d’une nouvelle machine  PAGEREF _Toc86112721 \h 43
4.3 Exemple d’intégration de la DAMR au PDP  PAGEREF _Toc86112722 \h 44
5 Conclusion  PAGEREF _Toc86112723 \h 46
Bibliographie  PAGEREF _Toc86112724 \h 47
Annexe A Description des méthodes pour l’identification des phénomènes dangereux  PAGEREF _Toc86112725 \h 49
Hazard and Operability study (HAZOP)  PAGEREF _Toc86112726 \h 52

Liste des figures

 TOC \c "Figure" Figure 1 : Domaine d’application de la conception pour la sécurité traité dans ce document  PAGEREF _Toc86112727 \h 2
Figure 2 : Normes européennes et internationales reliées à la sécurité des machines  PAGEREF _Toc86112728 \h 8
Figure 3 : Opérateur lors de sa tâche de nettoyage  PAGEREF _Toc86112729 \h 10
Figure 4 : Modèle accidentel général relatif aux accidents dus à une machine  PAGEREF _Toc86112730 \h 11
Figure 5 : Phénomène dangereux : un angle rentrant  PAGEREF _Toc86112731 \h 13
Figure 6 : Application du processus accidentel à l’exemple du nettoyage de rouleaux  PAGEREF _Toc86112732 \h 19
Figure 7 : Démarche d’analyse et de maîtrise des risques  PAGEREF _Toc86112733 \h 21
Figure 8 : Démarche générale itérative à suivre pour améliorer la sécurité d’une machine  PAGEREF _Toc86112734 \h 22
Figure 9 : Structure fonctionnelle du système  PAGEREF _Toc86112735 \h 23
Figure 10 : Analyse de risque pour les différentes phases du cycle de vie d’une machine  PAGEREF _Toc86112736 \h 24
Figure 11 : Analogie de la pêche aux quadripôles  PAGEREF _Toc86112737 \h 26
Figure 12 : Système mécanique simple à trois composantes  PAGEREF _Toc86112738 \h 27
Figure 13 : Illustration de la démarche d’analyse rétrospective  PAGEREF _Toc86112739 \h 27
Figure 14 - Illustration de la démarche d’analyse prospective inductive  PAGEREF _Toc86112740 \h 28
Figure 15 - Illustration de la démarche d’analyse prospective déductive  PAGEREF _Toc86112741 \h 29
Figure 16 : Graphe de l’indice de risque à quatre paramètres  PAGEREF _Toc86112742 \h 33
Figure 17 : Principe de l’échelle de priorité des solutions pour la maîtrise des risques  PAGEREF _Toc86112743 \h 35
Figure 18 : Efficacité des différents moyens pratiques de réduction du risque  PAGEREF _Toc86112744 \h 37
Figure 19 : Principe général d'intégration de la DAMR à un PDP  PAGEREF _Toc86112745 \h 42

Liste des tableaux

 TOC \c "Tableau" Tableau 1 : Tableau synthèse des statistiques publiées par l’ACATC  PAGEREF _Toc86112746 \h 4
Tableau 2 : Sommaire historique des accidents du travail et de leurs coûts (1980-1999)  PAGEREF _Toc86112747 \h 5
Tableau 3 : Exemples de phénomènes dangereux  PAGEREF _Toc86112748 \h 12
Tableau 4 : Exemples d'exposition d'une personne à un phénomène dangereux  PAGEREF _Toc86112749 \h 14
Tableau 5 : Exemples d’événements dangereux  PAGEREF _Toc86112750 \h 15
Tableau 6 : Exemples de dommages selon le phénomène dangereux  PAGEREF _Toc86112751 \h 17
Tableau 7 : Classes de méthodes d’analyse possibles  PAGEREF _Toc86112752 \h 26
Tableau 8 : Exemples de moyens de maîtrise des risques à différentes phases du PDP  PAGEREF _Toc86112753 \h 44
 Introduction
Ce document traite principalement de la notion de conception pour la sécurité (DFS). Dans un premier temps, une précision quant à son domaine d’application traité dans ce document sera faite. Puis, un aperçu des sections subséquentes sera donné.
Domaine d’application de la conception pour la sécurité traité
La conception pour la sécurité appartient à la grande famille des méthodes modernes pour la conception. L’objectif principal de cette méthodologie de conception est de permettre la prise en compte des aspects de sécurité lors de la conception de produits de consommation ou de machines. Comme son nom l’indique, un produit de consommation est un produit destiné au grand public. Il peut s’agir d’un tricycle pour les enfants aussi bien que d’un téléviseur ou d’une automobile. Pour ce qui est d’une machine, c’est un produit destiné à un usage industriel, comme un outil manuel, une fraiseuse ou une chaîne de montage pour les voitures.
Outre l’amélioration des conditions d’utilisation d’un produit ou d’une machine, la conception pour la sécurité vise, comme toutes les méthodes modernes de conception, l’augmentation de la compétitivité de l’entreprise. Ainsi, en anticipant les dangers potentiels qui sont inhérents aux produits et aux machines et en intégrant des solutions intelligentes lors de leur conception, il est possible d’augmenter la compétitivité de l’entreprise :
en diminuant les coûts globaux grâce à la possibilité d’éviter des retours en arrière, des rappels de sécurité (pour les produits de consommation) ou des arrêts de production (dans le cas d’une machine);
en augmentant la qualité d’un produit ou d’une machine (les solutions pour la sécurité sont harmonieusement intégrées au produit ou à la machine, plutôt que simplement rajoutées);
en limitant les pertes de temps dues à des retours en arrière dans les phases du processus de développement d’un produit (PDP).
Tel que mentionné, la conception pour la sécurité peut s’appliquer aussi bien à un produit de consommation qu’à une machine. La méthodologie demeure sensiblement la même, malgré certains points qui peuvent différer, dont particulièrement les règlements, les normes et les bonnes pratiques. De plus, les mauvais usages prévisibles associés à un produit de consommation doivent faire l’objet d’une étude plus approfondie, car la clientèle est très variée et donc susceptible de faire un usage du produit autre que celui prescrit. Malgré ces différences significatives, la démarche d’analyse et de maîtrise des risques (DAMR) demeure sensiblement la même.
Dans un autre ordre d’idée, il est bien connu, grâce aux statistiques recueillies par différents organismes, que les machines sont responsables de plusieurs accidents du travail. Or, une mauvaise conception est souvent à l’origine de ces accidents, qui peuvent avoir diverses conséquences, allant de la petite coupure jusqu’à la mortalité, voire de multiples mortalités.

Considérant que l’ingénieur a un rôle important à jouer dans la prise en compte de la sécurité des machines qu’il conçoit et compte tenu de l’expertise développée par les auteurs dans ce domaine particulier, il a été décidé que la suite de ce document traitera uniquement des aspects reliés aux accidents-machines pouvant être provoqués par des machines. La figure  REF Figure_domaine_application_traité \h 1 résume la précision du domaine retenu pour l’application de la conception pour la sécurité.


Figure  SEQ Figure \* ARABIC 1 : Domaine d’application de la conception pour la sécurité traité dans ce document
Contenu de ce document
Ce document consiste en une introduction à la prise en compte des aspects de sécurité industrielle lors de la conception de machines. Dans un premier temps, un aperçu général des notions relatives à la sécurité des machines sera offert : des statistiques accidentelles, un aperçu des normes, lois et règlements en vigueur, puis le scénario général pouvant décrire un accident. Par la suite, chacune des étapes de la DAMR sera présentée de manière détaillée. Enfin, la dernière section traitera de l’intégration de la DAMR à un PDP.
La sécurité des machines
La sécurité des machines est un aspect important pour différents organismes canadiens. Par exemple, l’Association des Commissions des Accidents du Travail du Canada (ACATC) recueille les données des différentes commissions des accidentés du travail et publie des rapports sur les statistiques concernant les accidents du travail. Cette section vise donc à donner au lecteur une compréhension globale de la sécurité des machines : statistiques d’accidents au Canada, réglementation en vigueur et processus accidentel typique associé aux dommages causés par des machines.
Les accidents machines
Statistiques générales des accidents du travail
Ces statistiques se veulent être une indication de l’importance du nombre d’accidents reliés au travail selon la province canadienne et, par le fait même, de l’attention particulière qu’il faut porter à la sécurité des milieux de travail où des machines sont présentes. Le tableau  REF Tableau_stat_ACATC \h 1 présente des statistiques tirées de la publication annuelle Accidents du travail et maladies professionnelles, Canada [ACATC, 2002].

À la lumière de celles-ci, on peut constater que, malgré une baisse des accidents du travail avec perte de temps, un grand nombre d’accidents se produisent encore, lesquels ont un impact non négligeable sur la compétitivité des entreprises. On peut aussi constater que pour un décès (lequel est généralement bien médiatisé), il se produit 555 autres accidents avec perte de temps (lesquels échappent souvent à la réalité du grand public).

D’autre part, tous les accidents répertoriés par l’ACATC sont des accidents avec perte de temps. Ceux-ci font généralement augmenter les coûts de production, car ils peuvent :
induire une augmentation des frais de cotisation aux commissions des accidents du travail;
entraîner des amendes ou autres pénalités, comme la médiatisation d’une mauvaise image de l’entreprise;
nécessiter des remplacements de personnel, ce qui requiert souvent de la formation supplémentaire (augmente les coûts de production, accroît les délais de production).
Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 1 : Tableau synthèse des statistiques publiées par l’ACATC


Tous ces accidents et décès occasionnent des dépenses en indemnisation. Au Canada, de 1980 à 1999, les dépenses engendrées par des accidents de travail ont atteint 83,5 milliards de dollars. Le tableau  REF Tableau_sommaire_accidents_coûts \h 2 résume les données recueilles par Développement des Ressources Humaines du Canada [2003].
Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 2 : Sommaire historique des accidents du travail et de leurs coûts (1980-1999)



Ceci montre bien qu’il existe une opportunité d’augmenter la compétitivité d’une entreprise en diminuant les dépenses relatives aux accidents de travail.

Une autre étude va dans ce même sens : un sondage effectué auprès d’entreprises américaines s’est intéressé à démontrer la rentabilité des mesures préventives en sécurité. En 2001, 95% des entreprises sondées affirmaient qu’investir dans la prévention en matière de santé et sécurité du travail est rentable, et 61% de ces dernières avançaient que pour chaque dollar investi en prévention, trois dollars sont gagnés [LIBERTY MUTUAL, 2001]. Considérant que la prise en compte de la sécurité dès la conception des machines est une mesure éprouvée pour diminuer le nombre d’accidents, cette étude renforce l’idée que la conception pour la sécurité est rentable.
Accidents associés aux machines industrielles
En l'absence de références spécifiques au Canada, il faut utiliser des études faites à l'étranger, depuis une quinzaine d’années, dans le domaine des accidents machines. Une première étude de référence est la publication de l'Institut national de recherche scientifique de France (INRS) sur l'impact de l'utilisation des robots et ensembles robotisés sur les conditions de travail. Celle-ci donne une image très complète de la situation en Europe au début des années 1990 [VAUTRIN et coll., 1992]. Une seconde étude de référence a été effectuée en 1995 aux ÉtatsUnis [JARVINEN et coll., 1995]. Elle a permis d'effectuer une comparaison intéressante avec des recherches antérieures dans d'autres pays. Parmi les conclusions de ces études, on constate que, de façon typique :
les accidents affectent souvent les opérateurs lorsqu'ils sont en train de récupérer des incidents de production;
dans beaucoup de cas (de 65 à 76 %), les moyens de protection sont considérés comme inappropriés ou absents.

D’autre part, une étude récente s’est penchée sur les dispositifs de sécurité et moyens de protection présents (ou absents) dans 76 accidents survenus sur des lignes de production automatisées [BACKSTRÖM et coll., 2000]. Les conclusions de cette étude confirment et précisent celles des études précédentes :
dans plus de la majorité des accidents étudiés (54 %), les moyens de protections étaient absents ou démontés ou non utilisés;
dans environ 20 % des cas, la portée des dispositifs de protection était trop limitée (par exemple, certaines charges n’étaient pas arrêtées par les dispositifs de sécurité lorsque ces derniers étaient actionnés, alors que dans d’autres cas, les dispositifs de protection étaient mal ajustés);
dans environ 18 % des cas, les moyens de protection ne pouvaient pas offrir de protection dans les circonstances des accidents étudiés;
dans un petit pourcentage de cas (5 % ), le moyen de protection avait fait défaut ou était brisé.

Cette étude a eu le mérite de confirmer que les efforts de prévention ont beaucoup plus de chance d’être efficaces si on aborde le problème de l’amélioration des machines en commençant par introduire, dès leur conception, les moyens de protection appropriés et en les maintenant en état de fonctionner efficacement.
Bases réglementaires et normatives
Réglementation et normalisation des machines dangereuses
Au niveau canadien, certaines normes s’appliquent à la sécurité des machines. La norme CAN/CSA Q63491 (Risk Analysis Requirements and Guidelines), traite des dispositions générales afin de mener efficacement une analyse de risque. Les normes CAN/CSA Z432 94 et CAN/CSA Z43494 portent sur des aspects plus spécifiques reliés à différentes machines industrielles. Par exemple, la norme CAN/CSA Z43494 traite des aspects de sécurité spécifiques aux robots industriels et aux systèmes robotisés. De plus, les différentes provinces canadiennes peuvent, par leurs lois et règlements, renforcer ces normes. Par exemple, il existe au Québec le Règlement sur la Santé et la Sécurité du Travail (RSST) [GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, 2004].

Aux États-Unis, il existe beaucoup de normes portant sur différents aspects de la sécurité des machines. La norme ANSI B11 TR3 (Risk assessment and risk reduction  A guide to estimate, evaluate and reduce risks associated with machine tools) en est une. Plusieurs autres normes, relatives à des aspects spécifiques des machines, sont facilement accessibles afin de mener à terme une analyse de risque complète.

Les pays européens, à la faveur des efforts très importants de normalisation qui ont été engagés depuis plusieurs années, ont défini un cadre très précis pour la normalisation des dispositifs et systèmes de commande et de sécurité associés aux machines dangereuses. Ainsi, à défaut de normes ou références locales, la prévention des accidents associés aux machines automatisées peut être grandement améliorée en se référant à certaines de ces normes étrangères qui représentent l'état de l'art en la matière. La figure  REF Figure_normes_europeennes \h 2 est une représentation symbolique des normes européennes et de leurs interrelations. Plusieurs de ces normes ont d’ailleurs été adoptées au niveau international via l’International Standard Organization (ISO).

La norme centrale, EN 292, présente les principes généraux de conception en matière de sécurité des machines; elle permet d'introduire les définitions et de clarifier les notions élémentaires de sécurité des machines associées aux risques et à leur analyse. Les normes qui gravitent directement autours de la EN 292 portent sur l'appréciation du risque (EN 1050), les distances de sécurité (EN 294), les équipements électriques (EN 602041) et les systèmes de commande relatifs à la sécurité (EN 954).

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 2 : Normes européennes et internationales reliées à la sécurité des machines

De nombreuses autres normes peuvent être utilisées ensuite, selon le moyen de prévention utilisé ou la technologie particulière en cause. Plus spécifiquement, il existe par exemple des normes qui traitent de protection contre les démarrages intempestifs, de dispositifs de commande bimanuelle, de dispositifs de protection sensibles à la pression tels que tapis et planchers, d’équipements d'arrêt d'urgence, de dispositifs de verrouillage associés à des protecteurs ou même pour la conception et la fabrication de protecteurs. Selon les cas et les besoins, le concepteur peut faire un choix parmi ces nombreuses normes de références.

Code de l’électricité, normes et certification CSA/ACNOR
Il existe, dans chaque province du Canada, des lois qui requièrent une certaine forme de certification des produits et des organismes pour effectuer cette certification. Toutefois, dans le domaine de la sécurité des machines et de leur commande, la certification n'apporte dans les faits qu'une aide modérée à l'amélioration de la sécurité fonctionnelle. Par exemple, si le code d'électricité d’une province sert de base à la conception et éventuellement à la certification d'un certain nombre de composants de nature électrique, les risques dont le code de l'électricité vise à protéger les travailleurs ou le public ne sont en général que de nature statique ou classique, tels que l’électrisation ou l’incendie, par exemple. Les risques fonctionnels ne sont pratiquement pas abordés. À cet effet, Fridlyand a donné cet exemple clair :
« [...] un rideau optique peut porter une étiquette de CSA, mais cette étiquette peut seulement signifier que le rideau optique a uniquement été examiné d'un point de vue de danger de choc électrique. En clair, cela signifie que vous n'allez pas être électrisé si vous vous en approchez. La performance du rideau optique en tant que dispositif de sécurité n'a pas été évaluée. Tout acheteur responsable devrait toujours demander si tels dispositifs ont été certifiés d'un point de vue des performances [fonctionnelles de sécurité] » [FRIDLYAND, 2000].

Il est ainsi facile de situer les limites du code de l'électricité vis-à-vis de la sécurité fonctionnelle des machines.
Processus accidentel
Dans toute démarche d’analyse et de maîtrise des risques, il est important d’utiliser, implicitement ou explicitement, un modèle de processus accidentel adapté aux accidents machines. Ceci permet une analyse de risque plus complète et plus efficace, de même qu’une meilleure recherche de solutions pour éventuellement maîtriser les risques. Il existe plusieurs modèles de processus accidentel; celui retenu n’a pas la prétention d’être le meilleur, mais il est à la fois simple et complet, compte tenu des objectifs poursuivis.
Modèle graphique
Parmi les modèles disponibles, celui de la figure  REF Figure_processus_accidentel_CRAMIF \h 4 (page  PAGEREF Figure_processus_accidentel_CRAMIF \h 11), proposé par David [1995], sera utilisé pour définir les différentes notions associées aux risques des machines. Ce modèle permet de mettre en parallèle le processus accidentel lui-même avec les composantes principales du risque et les stratégies pour le réduire. Aussi, chacun des termes de ce modèle accidentel sera défini. L’exemple suivant sera utilisé pour aider à la compréhension de ce modèle.
Dans une usine de production de feuille de métal (comme du papier d’aluminium, des feuilles de cuivre pour les circuits électroniques, etc.), un opérateur doit exécuter une tâche de nettoyage de certains rouleaux afin de s’assurer qu’aucune particule ne viennent endommager le fini de surface de la feuille. Pour ce faire, il doit monter sur une passerelle et frotter doucement sur la surface des rouleaux avec un chiffon. Pour assurer la qualité du produit, il doit nettoyer le rouleau des deux cellules de traitement, trois fois par jour. Or, il doit exécuter cette tâche pendant le fonctionnement de la machine (pour avoir accès à toutes les surfaces du rouleau).
À quel dommage s’exposerait-il, et de quelle manière pourrait-il en être victime?

La figure  REF Figure_operateur_nettoyage \h  \* MERGEFORMAT 3 illustre la tâche exécutée par l’opérateur ainsi que sa position sur la machine.

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 3 : Opérateur lors de sa tâche de nettoyage

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 4 : Modèle accidentel général relatif aux accidents dus à une machine
Exposition en situation dangereuse
La notion de situation dangereuse, telle que définie dans la norme ISO/CD 121001 (version internationale de la norme EN 292), est une « situation dans laquelle une personne est exposée à un ou des phénomènes dangereux ». Dans le domaine de la sécurité des machines, la situation dangereuse requiert donc la présence d’une personne.

La compréhension d’une situation dangereuse nécessite conséquemment :
de définir la nature du phénomène dangereux;
d’estimer le degré d’exposition de la personne à ce phénomène dangereux.
Phénomène dangereux
Un phénomène dangereux est défini comme étant une « source potentielle de blessure ou d’atteinte à la santé ». Les phénomènes dangereux sont d’origine multiple et peuvent engendrer des genres d’accidents différents selon leur nature. Ils sont classés selon les types présentés au tableau  REF Tableau_exemples_phénomène_dangereux \h 3.
Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 3 : Exemples de phénomènes dangereux
Types de phénomènes dangereuxExemplesMécaniquesénergie cinétique des éléments en mouvement;
forme dangereuse (tranchante, pointue, rugueuse);
angle rentrant;
accumulation d’énergie à l’intérieur de la machine (ressort, pression, vide, etc.);
énergie potentielle due à une masse soumise à la force gravitationnelle.Électriquesconducteurs sous-tension;
éléments de la machine devenus accidentellement sous tension;
phénomènes électrostatiques.Thermiquesobjets ou matériaux à température extrême;
flammes, explosions;
environnement de travail extrême (chaud ou froid).Bruits ou vibrationsbruit constant ou intermittent;
impacts, percussions de diverses fréquences.Rayonnementsbasses fréquences, radiofréquences et micro-ondes;
rayonnement infrarouge, visible et ultraviolet;
rayon X et gamma;
lasers.Engendrés par les matériaux et substancesmatériaux et substances nocives, toxiques, corrosives, humides, cancérogènes ou irritantes;
substances combustibles, inflammables ou explosives.
 REF _Ref84235079 \h Tableau 3 : Exemples de phénomènes dangereux (suite)
Types de phénomènes dangereuxExemplesEngendrés par le non-respect de principes ergonomiquesvisibilité restreinte;
accès difficile à l’espace de travail;
disposition des commandes non appropriée.Combinaison de phénomènes dangereuxphénomènes dangereux qui paraissent mineurs lorsqu’ils sont pris isolément mais qui deviennent équivalents à un phénomène dangereux majeur lorsqu’ils sont combinés les uns aux autres.

Dans l’exemple présenté (figure  REF Figure_operateur_nettoyage \h 3), la conception du procédé de finition des feuilles de métal a rendu nécessaire la juxtaposition de rouleaux, causant un angle rentrant accessible de la passerelle où s’installe l’opérateur pour nettoyer les rouleaux (voir figure  REF Figure_operation_nettoyage_angle_rentran \h 5). En fait, si l’opération de nettoyage pouvait se faire à l’arrêt, l’angle rentrant disparaîtrait. Toutefois, plusieurs interventions de ce genre nécessitent le fonctionnement de la machine, créant ainsi divers phénomènes dangereux.


Figure  SEQ Figure \* ARABIC 5 : Phénomène dangereux : un angle rentrant
Exposition
L’exposition au phénomène dangereux est estimée en fonction des besoins d’accès à la zone dangereuse, de la nature de l’accès, du temps passé dans la zone dangereuse, du nombre de personnes demandant cet accès et de la fréquence d’accès. L’exposition peut être composée de la fréquence et de la durée et contribue à évaluer la probabilité d’une blessure ou d’une atteinte à la santé.

La norme ISO 121001 ajoute que l’estimation de l’exposition au phénomène dangereux requiert l’analyse et la prise en compte de tous les modes de fonctionnement de la machine et de toutes les méthodes de travail. Le tableau suivant présente des situations où des personnes peuvent s’exposer à des phénomènes dangereux selon divers modes de fonctionnement.

Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 4 : Exemples d'exposition d'une personne à un phénomène dangereux
Mode de fonctionnementExposition possible d’une personne aux phénomènes dangereuxMise en serviceCes opérations nécessitent que l’installation soit sous ordre de marche. On retrouve dans cette phase tous les risques inhérents aux phases de production et de réglage, mais amplifiés pour les raisons suivantes :
absence de protections définitives;
enchaînement et déroulement des cycles mal maîtrisé;
programmes informatiques non définitifs et/ou logiciels insuffisamment mis au point pouvant être à l’origine de comportements inattendus de la partie opérative;
proximité de l’opérateur de certains organes en mouvement à des fins de vérification.RéglageGénéralement, à chaque changement de production, des réglages sont nécessaires (réglages de butées de courses, des vitesses, des débits, des températures, des pressions,…). La plupart de ces réglages se font à l’arrêt, mais certains doivent être effectués en marche.ProductionEn phase de production non perturbée, les opérateurs peuvent être amenés à intervenir mais uniquement dans des zones qui ne devraient pas être dangereuses pour des opérations nécessaires, comme :
modifier un réglage;
surveiller ou écouter la production;
exécuter une tâche sur une installation semi-automatisée.
Les opérateurs peuvent être également amenés à intervenir quand le fonctionnement est perturbé, par exemple pour :
repositionner une pièce ou un outil;
exécuter une tâche non réalisée par la machine pour subvenir à une défaillance d’une partie de l’installation (fonctionnement en mode dégradé).Maintenance et dépannageCertaines opérations de maintenance telles que le dépannage ou les vérifications après dépannage, nécessitent également des interventions sur les installations sous ordre de marche. On retrouve alors les risques précédents du fonctionnement normal perturbé ou non, amplifiés par le fait que les dispositifs de protection normalement utilisés sont généralement volontairement neutralisés.
Dans l’exemple de la machine de production de feuilles de métal, la nécessité de nettoyer deux des rouleaux, trois fois par quart de travail oblige une personne (l’opérateur) à s’exposer à un phénomène dangereux (l’angle rentrant). La situation dangereuse résultant de ces deux premières composantes est donc la présence d’un opérateur effectuant une tâche à proximité d’un angle rentrant.
Événement dangereux
Un événement dangereux est une circonstance, généralement non prévue, dans laquelle une situation dangereuse peut dégénérer en une blessure ou une atteinte à la santé. L’événement dangereux peut être d’origine naturelle, technique ou humaine. Il peut aussi être défini comme un événement pouvant être à l’origine d’un préjudice ou un événement susceptible de causer un dommage. Les événements dangereux sont très variés et dépendent de la nature des phénomènes dangereux en cause. Le tableau suivant en présente quelques exemples.
Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 5 : Exemples d’événements dangereux
Types de phénomènes dangereuxExemples d’événements dangereux associésMécaniquesaccès à une zone dangereuse dans laquelle un mécanisme est en marche ou en mouvement;
ralentissement ou freinage;
rupture d’un organe de la machine;
basculement de la machine, de l’un de ses éléments ou d’un objet traité par la machine;Mécaniques (suite)dysfonctionnement du dispositif de commande;
mise en marche intempestive;
projection d’un fragment d’outil ou d’une pièce usinée;
libération soudaine d’énergie accumulée (ressort, pression, dépression);
glissade, perte d’équilibre ou chute (de personnes, de matière, de matériau, d’élément de machine ou de machine) due à l’attraction gravitationnelle.Électriquesentrée en contact d’une personne avec des parties actives (contact direct);
apparition d’un défaut d’isolement;
décharge électrostatique;
court-circuit ou surcharge (peut aussi provoquer l’émission de rayonnement, la projection de matériaux en fusion ou avoir des effets chimiques).
 REF _Ref48720498 \h Tableau 5 : Exemples d’événements dangereux (suite)
Types de phénomènes dangereuxExemples d’événements dangereux associésThermiquesentrée en contact des personnes avec des objets ou des matériaux à des températures extrêmes (hautes ou basses);
rayonnement de sources de chaleur;
inflammation ou explosion.Bruits ou vibrationsexposition prolongée hors norme;
activation intempestive.Rayonnementsexposition prolongée hors norme;
activation intempestive.Engendrés par les matériaux et substancesexposition prolongée hors norme;
accès intempestif;
fuite ou déversement;
incendie, explosion ou réaction chimique.Le non-respect de principes ergonomiquesneutralisation involontaire d'un dispositif de protection;
passage intempestif d'un mode de fonctionnement à un autre;
mise en marche intempestive;
mise sous tension accidentelle de l’équipement ou d’une de ses composantes;
action intempestive sur un organe de commande;
action intempestive sur un capteur de la machine ou du procédé;
glissade, perte d'équilibre de la victime;Le non-respect de principes ergonomiques (suite)entrée, présence de la victime dans une zone dangereuse;
malaise de la victime ou autres gestes.

Dans l’exemple traité, un événement dangereux susceptible de se produire (associé au phénomène dangereux mécanique de l’angle rentrant) pourrait être une perte d’équilibre de l’opérateur ou encore un happement soudain du chiffon par l’angle rentrant. Ces événements, non prévus par l’opérateur, pourraient faire dégénérer la situation dangereuse en un dommage.

Possibilité d’évitement
La possibilité d’évitement est un facteur qui permet d’éviter ou de limiter le dommage, en fonction des personnes qui exploitent la machine, de la rapidité d’apparition de l’événement dangereux, de la conscience du risque, de la possibilité humaine d’éviter ou de limiter le dommage, de l’expérience ou de la connaissance pratique. Toutefois seule la notion d’évitement de dommage sera retenue, car dans le cadre de la sécurité associée aux machines, les éléments qui permettent de limiter les dommages dépendent plus souvent du procédé de fabrication lui-même (par exemple, réduction des vitesses, des forces) que des capacités du personnel, avec ou sans équipement de protection individuelle (EPI).

Toujours pour l’exemple de nettoyage des rouleaux, si l’opérateur venait qu’à perdre effectivement l’équilibre et, malencontreusement, prenait appui dans l’angle rentrant, comment pourrait-il éviter le dommage? Dans les faits, il faudrait admettre que sous ces conditions, il lui serait impossible d’éviter le dommage. Il est important de comprendre dans cet exemple que la possibilité d’évitement n’a aucun lien avec la tâche que l’opérateur effectue : de ne pas polir le rouleau ne représente pas la possibilité d’évitement. Dans cet exemple, si l’opérateur parvenait à éviter le dommage, ce serait uniquement une question de chance!

Dommage
Le dommage est défini comme une lésion physique et/ou une atteinte à la santé ou aux biens.

Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 6 : Exemples de dommages selon le phénomène dangereux
Types de phénomènes dangereuxExemples de dommages associésMécaniquesfracture, entorse, foulure;
coupure, lacération;
amputation;
perforation, piqûre;
écorchure, égratignure, ecchymose, contusion, plaie ouverte;
irritation;
blessures par friction;
blessures multiples;
décès.Électriqueschoc électrique;
électrisation (sans décès);
brûlure électrique;
électrocution (avec décès).Thermiquesbrûlure par chaleur (y compris le feu et les flammes) ou l’eau bouillante;
effet de la chaleur ou de la lumière;
engelure, hypothermie.
 REF _Ref49671074 \h Tableau 6 : Exemples de dommages selon le phénomène dangereux (suite)
Types de phénomènes dangereuxExemples de dommages associésBruits ou vibrationsdétérioration de l’acuité auditive, de l’équilibre;
fatigue, stress, baisse de la vigilance;
lombalgies, traumatismes vertébraux;
troubles neurologiques et ostéoarticulaires;
troubles vasculaires (par exemple, le phénomène dit « des doigts blancs »);
inconfort (par exemple, l’engourdissement).Rayonnementbrûlures;
mutations génétiques.Engendrés par les matériaux et substancesdommages pour la santé;
décès;
brûlure chimique;
dommages résultant d’incendies, d’explosions.Le non-respect de principes ergonomiqueseffets physiologiques (par exemple, des troubles musculo-squelettiques, « TMS») résultant, par exemple, de postures contraignantes, d’efforts excessifs ou répétitifs;
effets psycho-physioloqiues (effets de la surcharge mentale, notamment le stress);
blessures résultant de fonctionnements intempestifs, eux-mêmes causés par des erreurs humaines favorisées par une mauvaise conception de l’interface « homme-machine» (par exemple, une disposition inadéquate des organes de commande).
Dans l’exemple utilisé, un dommage pourrait être infligé à l’opérateur (entraînement puis écrasement de sa main), ou encore à la production si, par chance, seul le chiffon avait été happé et que l’opérateur avait eu le bon réflexe de ne pas le retenir. La figure suivante reprend le processus accidentel (figure  REF Figure_processus_accidentel_CRAMIF \h 4) et y intègre l’exemple du nettoyage de rouleaux pour la production de feuilles de métal.


Figure  SEQ Figure \* ARABIC 6 : Application du processus accidentel à l’exemple du nettoyage de rouleaux


La démarche d’analyse et de maîtrise des risques (DAMR)
Dans cette section, une démarche d’analyse et de maîtrise des risques est présentée. Dans la section  REF _Ref72052639 \w \h 4, cette même démarche sera arrimée à un processus de développement de produit.
Schéma général
Les documents de référence disponibles au pays n'exposent pas de vision d'ensemble des moyens de réduction des risques. C'est la norme internationale ISO 121001 qui propose une analyse globale de ces moyens. Un schéma général de la DAMR associée aux machines dangereuses (inspiré de la norme ISO 12100-1) est représenté à la figure  REF Figure_DAMR \h 7 (page suivante).

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 7 : Démarche d’analyse et de maîtrise des risques
Appréciation du risque
Toute amélioration de la sécurité d'une machine commence par une appréciation des risques. Les documents normatifs sont unanimes à ce sujet, que ce soit la norme canadienne sur les protecteurs de machines dangereuses CAN/CSA Z43294, la nouvelle version de la norme américaine sur les installations robotisées, ANSI RIA R15.03, ou les normes ou projets de normes internationales, comme ISO 121001. La figure  REF Figure_Appreciation_risque \h 8 représente ce processus itératif d’appréciation du risque.



Figure  SEQ Figure \* ARABIC 8 : Démarche générale itérative à suivre pour améliorer la sécurité d’une machine
Détermination des limites de la machine
Pour éviter de noyer l'analyse, il est nécessaire de bien définir les limites de la machine. Ceci permet d’une part de définir de façon détaillée le système devant être analysé et d’autre part de préciser l’ampleur de l’analyse. On distingue plusieurs types de limites pouvant être établies :
les limites de résolution;
les limites associées aux phases du cycle de vie de la machine;
les limites associées aux personnes qui seront en contact avec la machine;
les limites de la machine dans l’espace et dans le temps.

Lors de la détermination des limites, toutes ces catégories devraient être vérifiées. Aux premiers abords, ceci peut sembler long et fastidieux, mais avec un peu de pratique, ces catégories de limites peuvent être vues comme une liste de contrôle. Aussi, il est à noter que la détermination des limites doit être revue et corrigée au fur et à mesure de l’avancement de l’analyse, en fonction des nouvelles informations qui peuvent avoir été mises en évidence.
Limites de résolution
Les limites de résolution concernent le niveau de détail que l'on souhaite donner à l'analyse. Désire-t-on faire l’analyse du système au complet ou de seulement quelques parties? En établissant sommairement la structure fonctionnelle du système (voir figure  REF Figure_limite_resolution \h 9), il faut déterminer ce qui fera et ne fera pas partie de l’analyse.

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Figure  SEQ Figure \* ARABIC 9 : Structure fonctionnelle du système

Aussi, pour un système donné, il n’est pas forcément nécessaire que celui-ci soit analysé dans ses moindres détails. On peut choisir, par exemple, de ne considérer que les composantes électromécaniques, tels que les relais ou les détecteurs de positions. Ceux-ci sont alors considérés comme des éléments que l’on ne cherchera pas à décomposer. La définition des limites de résolution de l’analyse permet de contrôler en grande partie l’ampleur de l’analyse, et ainsi des ressources à engager (humaines, budgétaires, etc.).
Limites associées aux phases du cycle de vie de la machine
Il est reconnu que la sécurité d’un système ne doit pas se limiter seulement à l’utilisation pour laquelle il a été conçu, mais également à toutes les autres situations où il est en contact avec des personnes. Certains risques peuvent ne pas affecter les utilisateurs, mais être prépondérants pour les installateurs, les gens de maintenance ou les personnes responsables du démantèlement ou du recyclage du système. Idéalement, c’est tout le cycle de vie du système qui devrait faire l’objet d’une analyse de risque. Évidemment, compte tenu du temps et des ressources disponibles, on peut choisir de ne porter son analyse que sur certaines phases prépondérantes, telles que l’opération et la maintenance.

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 10 : Analyse de risque pour les différentes phases du cycle de vie d’une machine

L’analyse des risques est ainsi menée selon différents points de vue correspondant aux phases du cycle de vie du système, tel que l’illustre la figure précédente. Les différentes phases qui feront l’objet de l’analyse doivent donc être identifiées et définies le plus précisément possible.
Limites associées aux personnes qui seront en contact avec la machine
À chacune des phases du cycle de vie du système, différentes personnes seront en contact avec celui-ci. Il est important de définir qui elles sont afin d’être mieux en mesure d’élaborer des scénarios potentiels d’accidents. On cherchera notamment à déterminer les caractéristiques propres pour chacun des groupes de personnes impliquées à chacune des phases du cycle de vie. Parmi les caractéristiques qu’il peut être utile de connaître, il y a :
leur sexe;
leur âge (minimal, moyen, maximum);
leur niveau d’expérience et/ou de connaissance du système;
la formation suivie;
leurs autres caractéristiques pertinentes (main dominante, handicap, etc.).

Il est important de considérer non seulement les personnes qui sont habituellement en contact avec le système, mais aussi les personnes qui peuvent de façon occasionnelle ou exceptionnelle être en contact avec celui-ci. Même si l’employé d’un sous-traitant n’est en contact avec le système qu’une fois par an, il est probable que celui-ci se trouve exposé à des risques, puisqu’il n’a reçu aucune formation et ne possède aucune connaissance du système.
Limites de la machine dans l’espace et dans le temps
Les limites dans l’espace doivent être définies afin de connaître les interactions du système avec son environnement. On définira par exemple ses dimensions, l’amplitude de ses mouvements, les interfaces avec des systèmes connexes ou des sources d’énergie, etc. On déterminera également la position physique du système dans son environnement (atelier, usine, etc.) ainsi que la position relative des autres machines ou équipements qui peuvent se trouver dans son entourage à un moment donné. On indiquera, par exemple, si un pont roulant passe au-dessus de la machine analysée, si des chariots élévateurs passent à proximité, si un autre équipement se trouve dans l’environnement immédiat, si on entrepose des substances inflammables à proximité, et ainsi de suite.

Les limites temporelles concernent d’abord la durée de vie prévisible du système et de certains de ses composants. Par exemple, on identifiera des composantes exposer à l’usure et on déterminera leur durée de vie utile. Dans certains cas, les limites temporelles du système seront également établies en ce qui a trait à son utilisation dans le temps. Par exemple, on considérera des moments précis de la journée consacrés à des tâches particulières, on distinguera les quarts de travail de jour de ceux se déroulant la nuit, et ainsi de suite.
Identification des phénomènes dangereux
Améliorer la sécurité d’une machine revient à prévenir l’occurrence de dommage. Or, tel que vu à la section  REF _Ref72055313 \w \h 2.3 (voir figure  REF Figure_processus_accidentel_CRAMIF \h 4, page  PAGEREF Figure_processus_accidentel_CRAMIF \h 11), un dommage découle d’une situation dangereuse engendrée par l’occurrence d’un événement dangereux. Cette situation dangereuse résulte elle-même de l’exposition d’une personne à un phénomène dangereux. Un dommage résulte donc d’une grande chaîne causale, dont la source se trouve dans les phénomènes dangereux, voire leurs causes. Ainsi, pour améliorer la sécurité d’une machine, il faut identifier autant de phénomènes dangereux (et leurs causes) que possible.

Par contre, en pratique, il peut s’avérer parfois plus facile d’identifier une situation dangereuse, un événement dangereux ou un dommage. Ce qui importe, c’est de se rappeler que ces quatre termes—dommage, événement dangereux, situation dangereuse et phénomène dangereux—sont liés entre eux, comme un quadripôle : peu importe par quel pôle on prend ce dernier, les trois autres pôles y sont rattachés. Ainsi, l’analogie de la pêche aux quadripôles explicite bien l’idée que l’identification des phénomènes dangereux peut se faire aussi bien en identifiant d’abord des situations dangereuses, des événements dangereux ou des dommages.


Figure  SEQ Figure \* ARABIC 11 : Analogie de la pêche aux quadripôles
Classification des méthodes d’identification des phénomènes dangereux
Pour identifier des phénomènes dangereux, différentes méthodes existent. Afin de se retrouver plus facilement dans celles-ci, deux grandes classifications seront utilisées. La première est temporelle : soit la méthode est orientée vers le passé—dite rétrospective; soit elle est orientée vers le futur—dite prospective. La deuxième classification utilisée concerne le mode de logique utilisée : il peut s’agir d’une déduction—des effets observés vers les causes probables; il peut aussi s’agir d’une induction—des causes plausibles vers les effets potentiellement engendrés par ces causes. En combinant ces deux classifications, quatre classes de méthodes sont possibles. Celles-ci sont présentées dans le tableau ci-après.

Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 7 : Classes de méthodes d’analyse possibles


Si en théorie ces quatre classes de méthodes peuvent être obtenues, en pratique, il n’y en a que trois qui soient pertinentes. En effet, une approche rétrospective inductive n’a aucune utilité dans la pratique. On parle donc simplement d’analyse rétrospective. Ainsi, les trois classes de méthodes d’identification de phénomènes dangereux suivantes seront décrites dans les prochains paragraphes :  REF _Ref72116621 \n \h a) méthodes d’analyse rétrospectives;  REF _Ref72116718 \n \h b) méthodes d’analyse prospectives inductives;  REF _Ref72116720 \n \h c) méthodes d’analyse prospectives déductives. Pour les illustrer, un exemple simple (un système mécanique composé d’une machine reliée à une source de puissance par un arbre de transmission, figure  REF Figure_système_mécanique_simple \h 12) sera utilisé.


Figure  SEQ Figure \* ARABIC 12 : Système mécanique simple à trois composantes
Méthodes d’analyse rétrospectives
Les méthodes rétrospectives utilisent l’historique du système à analyser pour identifier les événements dangereux connus ainsi que leurs causes. Elles ont donc pour objectifs de répertorier les situations dangereuses qu’un système a engendrées dans le passé et d’identifier les causes réelles (connues) de ces événements. Ces analyses, qui s’apparentent à des enquêtes déductives, ne sont évidemment applicables qu’à des machines bien connues et utilisées depuis un certain temps. La figure  REF Figure_démarche_retrospective \h 13 illustre la démarche de l'analyse rétrospective à partir de l'exemple du système mécanique simple.

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 13 : Illustration de la démarche d’analyse rétrospective
Pour réaliser les analyses rétrospectives, on utilisera comme sources d’information les statistiques et rapports d’accidents, les cas d’incidents ou de quasi-accidents documentés, l’expérience des utilisateurs, la littérature spécifique, l’information provenant des autres usines ou du fournisseur de l’équipement. Des méthodes simples, telles que les entrevues, les groupes de discussion, les enquêtes et l’analyse des accidents, peuvent alors être utilisées.
Méthodes d’analyse prospectives inductives
Les méthodes d’analyse prospectives inductives débutent généralement par l’identification des possibilités de défaillance des éléments d’un système. Le plus souvent, les phénomènes dangereux et les situations dangereuses sont les points de départ de l’analyse. Ensuite, les effets probables de ces défaillances sur l’ensemble du système sont induits. La figure suivante reprend l’exemple du système mécanique simple pour illustrer cette démarche.

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 14 - Illustration de la démarche d’analyse prospective inductive
Plusieurs méthodes d’analyse prospective inductive peuvent être utilisées (voir  REF _Ref72121688 \w \h 3.2.2.2). Parmi les plus connues, il y a l’Analyse des modes de défaillances, de leurs effets et de leur criticité (AMDEC), la méthode What-if Analysis et le Hazard and Operability Study (HAZOP). Ces méthodes peuvent être utilisées pour l’analyse d’un système existant ou pour la conception d’un nouveau système en vue d'identifier les phénomènes dangereux qu’il peut présenter.
Méthodes d’analyse prospectives déductives
À l’inverse, les méthodes d’analyse prospectives déductives débutent généralement par la définition d’événements dangereux ou de dommages potentiels et se poursuivent par une recherche déductive des phénomènes qui en sont à l’origine. La figure suivante donne un exemple de cette démarche.

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 15 - Illustration de la démarche d’analyse prospective déductive
L’Arbre des fautes (voir  REF _Ref72122800 \w \h 3.2.2.2) est de loin la méthode d’analyse prospective déductive la plus connue et la plus utilisée en sécurité des systèmes. Cette méthode est utile pour la recherche de toutes les causes potentielles pouvant être à la source d'un événement dangereux.
Méthodes d’analyse pour l’identification des phénomènes dangereux
Dans cette section, six méthodes pour l’identification des phénomènes dangereux sont présentées :  REF _Ref72123510 \n \h a) le What-If Analysis;  REF _Ref72123535 \n \h b) l’analyse des modes de défaillances, de leurs effets et de leur criticité (AMDEC);  REF _Ref72123554 \n \h c) le Hazard and Operability Study (HAZOP);  REF _Ref72123571 \n \h d) l’arbre des fautes;  REF _Ref72123588 \n \h e) les listes de contrôle (Check List Analysis);  REF _Ref72123590 \n \h f) la méthode développée par l’IRSST. Ces méthodes sont également présentées de manière plus détaillée à l’annexe  REF Annexe_Methodes_analyse_risque \h A.
What-If Analysis
L’objectif de cette méthode d’analyse prospective inductive est d’identifier des phénomènes dangereux présents sur la machine à l’étude. Elle consiste à réaliser un remue-méninges (brainstorming) partant généralement de situations dangereuses ou d’événements dangereux imaginés, en se posant simplement la question « qu’arrive-t-il si… ? ». En répondant à celle-ci, des effets potentiels sont induits, aboutissant à des dommages plausibles. Dans l’exemple du système mécanique (figure  REF Figure_système_mécanique_simple \h 12), on pourrait poser la question « qu’arrive-t-il si le rouleau d’entraînement se bloque soudainement ? ». Les effets de cet événement dangereux pourraient alors être une contrainte en torsion très élevée dans l’arbre de transmission, pouvant en provoquer la rupture, puis résulter en la projection de débris métalliques.
Analyse des modes de défaillances, de leurs effets et de leur criticité (AMDEC)
Toujours dans la classe des méthodes prospectives inductives, l’AMDEC débute toujours par l’identification de défaillances possibles dans la machine, et ce pour tous les modes opérationnels. Elle se poursuit, par des inductions, pour identifier les effets potentiels de ces défaillances (situation dangereuse, événement dangereux et dommages). Une fois les effets potentiels établis, une estimation du risque (sujet de la section  REF _Ref72133398 \w \h 3.2.3) est faite, des priorités d’action sont accordées et, le cas échéant, des moyens de réduction du risque sont définis.
Hazard and Operability Study (HAZOP)
Une autre méthode d’analyse prospective inductive permettant l’identification des phénomènes dangereux est nommée HAZOP. L’objectif de cette méthode est d’identifier les phénomènes dangereux qui mènent à des évènements dangereux lors d’une déviation des conditions normales de fonctionnement de la machine. Lorsqu’une déviation dans le fonctionnement de la machine ou dans les actions humaines est identifiée, l’analyse se poursuit en mode inductif pour l’identification des dommages potentiels engendrés par cette déviation. La méthode se termine dans un mode déductif par l’identification sommaire des causes potentielles des déviations critiques identifiées.
Arbre des fautes
L’arbre des fautes est une méthode d’analyse prospective déductive. Elle est utilisée pour identifier les causes d’un événement dangereux ou d’un dommage. Elle consiste en une représentation graphique des multiples causes d’un événement dangereux. Elle permet de visualiser les relations entre les défaillances d’équipement, les erreurs humaines et les facteurs environnementaux qui peuvent conduire à des accidents. On peut donc facilement y inclure des facteurs reliés aux opérateurs humains des machines, ainsi que des facteurs organisationnels.
Listes de contrôle (Check List Analysis)
Pour sa part, la méthode de la liste de contrôle (Check List Analysis) consiste en une série d’informations pouvant indiquer les bonnes pratiques à respecter, les situations à éviter, les types de déviations possibles, les éléments de la conception à considérer, etc. L’application de cette méthode consiste à vérifier que les points inscrits sur la liste ont été pris en compte. Cependant, bien que sa simplicité et sa rapidité de mise en œuvre soient séduisantes, cette méthode comporte une importante limite : la qualité et la pertinence des informations inscrites.
Méthode développée par l’IRSST
Finalement, une méthode, dont s’inspire en grande partie ce document, a été développée par l’IRSST. Elle consiste à établir une liste de phénomènes dangereux qui peuvent être présents sur une machine et d’y associer la situation dangereuse, l’événement dangereux ainsi que les dommages potentiels pouvant se produire, pour ensuite poursuivre les étapes de la DAMR, jusqu’à la vérification de l’efficacité des moyens de réduction des risques envisagés.
Estimation du risque
L’estimation du risque est, par définition, obtenue par la combinaison de la gravité d’un dommage et de la probabilité d’occurrence de celui-ci. Bine qu’une approche quantitative puisse être utilisée (lorsque les données le permettent), une approche qualitative s’avère souvent être suffisante pour les études de sécurité des machines et plus rapide. Cette dernière consiste, à partir d’une grille éprouvée, à déterminer un indice de risque, composé de :
la gravité du dommage;
la probabilité d’occurrence du dommage, décomposée par :
la fréquence et la durée d’exposition au phénomène dangereux;
la probabilité d’occurrence de l’événement dangereux;
la possibilité d’évitement du dommage.
Gravité du dommage dû au phénomène dangereux
Selon l’INRS, la gravité peut être estimée en considérant notamment la gravité des blessures : lésion ou atteinte à la santé légère (généralement réversible), lésion ou atteinte à la santé grave (généralement irréversible), mort. Dans l’approche proposée ici, deux choix sont offerts :
G1 : lésion légère (normalement réversible), comme des écorchures, lacérations, ecchymoses, blessures légères qui requièrent seulement que les premiers soins;
G2 : lésion grave (normalement irréversible, y compris le décès), comme des membres brisés, arrachés, des blessures avec points de suture, etc.

En obligeant à choisir entre seulement deux catégories possibles de dommage (G1 ou G2), l’estimation qualitative devient un peu plus objective. Ce choix de catégories de gravité est par ailleurs en accord avec un jugement de la Commission d’appel en matières de lésions professionnelles (CALP) de 1991 : « la perte de tissu humain au bout des doigts d’un travailleur, cette perte fut-elle de quelques millimètres seulement, constitue, selon la CALP, une atteinte à l’intégrité physique de ce travailleur ». Enfin, il apparaît justifié de ne pas faire de distinction de gravité selon le nombre de travailleurs affectés par le même incident.
Fréquence et/ou durée d’exposition au phénomène dangereux
L’exposition à un phénomène dangereux peut être estimée en prenant en compte :
le besoin et la fréquence d’accès à la zone dangereuse (par exemple, pour des raisons de production, de maintenance ou de réparation);
la nature de l’accès (par exemple, l’alimentation manuelle de matières);
la temps passé dans la zone dangereuse;
le nombre de personnes pouvant demander l’accès.

Dans l’approche qui est proposée, les choix sont :
F1 : rare à assez fréquente et/ou courte durée d’exposition;
F2 : fréquente à continue et/ou longue période d’exposition.
Probabilité d’occurrence de l’événement dangereux
La probabilité d’occurrence d’un événement dangereux peut être estimée en tenant compte :
des données de fiabilité et autres données statistiques;
de l’historique des accidents et quasi accidents;
de la comparaison de risques.

Les choix qui sont offerts se résument à :
O1 : très faible (de très faible à faible), soit une technologie stable, éprouvée et reconnue pour les applications de sécurité;
O2 : faible (de faible à moyenne), soit un événement dangereux relié à une défaillance technique, de probabilité supérieure ou égale à 10 –5 bris/heure (1 bris pour 100 000 heures d’opération), ou bien un événement entraîné par une action d’une personne dans des circonstances atténuantes (expérience, tâche unique, formation, etc.);
O3 : élevée (de moyenne à élevée), soit un événement dangereux relié directement à une action humaine (probabilité supérieure ou égale à 10 –3 /heure, soit une fois par 1000 heures de travail).
Possibilité d’évitement du dommage
La possibilité d’évitement permet d’éviter ou de limiter le dommage, en fonction :
de la rapidité d’apparition de l’événement dangereux;
de la possibilité humaine d’éviter ou de limiter le dommage;
de l’expérience ou de la connaissance pratique.

Dans l’approche proposée, il faut choisir :
P1 : possible dans certaines conditions;
P2 : impossible ou rarement possible.
Détermination de l’indice de risque
Grâce aux critères présentés aux sections  REF _Ref72136017 \w \h 3.2.3.1 à  REF _Ref72136021 \w \h 3.2.3.4, l’indice de risque est déterminé à partir du graphe suivant.


Figure  SEQ Figure \* ARABIC 16 : Graphe de l’indice de risque à quatre paramètres
Une fois la pondération de chacun des quatre paramètres effectuée pour chaque situation dangereuse à analyser, le graphe de risque sert à déterminer l’indice de risque correspondant. Il existe d’autres types de combinaisons des paramètres; toutefois, il semble que ce graphe soit le plus simple à utiliser et représente un bon compromis. Si le besoin s’en fait sentir dans un cas particulier, il est toujours possible de définir un autre graphe à partir des mêmes paramètres, utilisant soit la même graduation, soit une graduation différente et produisant une quantité différente d’indices de risque.

Dans l’exemple de l’opérateur exposé à un angle rentrant lors du nettoyage de rouleaux (figure  REF Figure_operation_nettoyage_angle_rentran \h 5, page  PAGEREF Figure_operation_nettoyage_angle_rentran \h 13), l’indice de risque se composerait de :
G2, car les lésions potentielles (écrasement de la main) sont jugées graves (irréversibles);
F2, car le travailleur doit nettoyer le rouleau des deux cellules de traitement trois fois par quart de travail (exposition fréquente);
O2 (plutôt que O3, mais assurément une plus grande probabilité que O1), car l’opérateur est expérimenté (et donc conscient de la présence du phénomène dangereux), et la passerelle est stable, quoiqu’un peu étroite;
P2, car une fois que la perte d’équilibre se produit, l’opérateur ne pourrait que difficilement éviter le dommage.

En utilisant ces paramètres dans le graphe de la figure  REF Figure_indice_de_risque \h 16, l’indice de risque en découlant est 4. Une fois l’indice de risque estimé, il faut ensuite juger s’il est tolérable ou non; c’est ce qui s’appelle l’évaluation du risque, sujet de la prochaine section.
Évaluation du risque
Comme le mentionne la norme internationale sur l’appréciation du risque ISO/DIS 14121, lorsque l’indice de risque a été estimé, il faut effectuer une évaluation du risque afin de déterminer si des moyens de réduction du risque sont requis ou non. Autrement dit, le risque étudié est-il jugé tolérable ou intolérable ? Un problème se pose pour répondre à cette question : comment déterminer ce niveau de tolérabilité ?

L’indice de risque est un des moyens pour aider à décider si une réduction du risque est nécessaire; il peut aussi aider à définir des priorités d’intervention. Toutefois, bien d’autres facteurs doivent être utilisés pour prendre cette décision. Habituellement, une concertation soutenue du milieu de travail avec l’aide des intervenants permet de définir des critères de décision adaptés aux conditions particulières des situations étudiées.

La philosophie de l’entreprise peut aussi avoir une influence sur le niveau choisi. Par exemple, une compagnie peut avoir comme valeur de ne jamais porter atteinte à l’intégrité physique de ses employés. L’évaluation des risques doit donc tenir compte de cette valeur. Ainsi, dès que des blessures peuvent survenir, cette entreprise doit prendre des mesures afin de les éviter. Il faut donc qu’un dialogue se fasse avec toutes les personnes concernées afin d’avoir une vision globale de la manière dont elles voient les problèmes reliés à la sécurité.

Il faut être conscient que l’objectivité absolue est impossible, voire non souhaitable ! La notion de risque tolérable n’est pas universelle, ni universalisable. Un effort doit donc être fourni afin d’arriver à un consentement éclairé de tous les intervenants.
Réduction du risque
L’appréciation des risques est inutile si rien n’est entrepris pour introduire des mesures de prévention ou de protection permettant de réduire les risques analysés. Toutefois, les moyens de prévention n’apportent pas tous le même niveau de sécurité. Ainsi, une échelle de préférence, reconnue de façon universelle par les documents normatifs, est utilisée pour définir la priorité des mesures de réduction des risques à mettre en œuvre : c’est le principe de l’échelle de priorité des solutions pour la maîtrise des risques. La figure suivante (correspondant à la portion inférieure de la figure  REF Figure_DAMR \h 7, page  PAGEREF Figure_DAMR \h 21) présente cette hiérarchie.

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 17 : Principe de l’échelle de priorité des solutions pour la maîtrise des risques
Prévention intrinsèque
La prévention intrinsèque (priorité 1 sur la figure  REF Figure_echelle_priorit_moyens_réd_risque \h 17) se traduit par une modification du procédé de fabrication de la machine ou de ses composantes dangereuses, qui élimine à toute fin pratique le phénomène dangereux ou le rend totalement inoffensif. Divers moyens pour éviter ou réduire autant de phénomènes dangereux que possible sont décrits dans la norme internationale sur les principes de base de la sécurité des machines ISO 121001. Par exemple, le remplacement d’un produit hautement corrosif habituellement requis dans un procédé par un nouveau produit, quasiment inerte pour le corps humain, est une prévention intrinsèque. Dans l’exemple de l’opération de nettoyage (figure  REF Figure_operation_nettoyage_angle_rentran \h 5, page  PAGEREF Figure_operation_nettoyage_angle_rentran \h 13), une modification du procédé de traitement de la feuille de cuivre rendant le polissage des rouleaux non nécessaire serait aussi une prévention intrinsèque. Pour l’ingénieur-concepteur, c’est à ce niveau-ci qu’est posé le véritable défi de conception sécuritaire !
Réduction du risque
Étant donné que l’indice de risque se mesure en fonction de la gravité, de la fréquence et/ou durée d’exposition, de la probabilité d’occurrence et de la possibilité d’évitement, il est possible de réduire le risque en cherchant des solutions qui atténuent un ou plusieurs de ces quatre paramètres : c’est la priorité 2. Ainsi, en reprenant l’exemple de l’opération de nettoyage, si la prévention intrinsèque s’avérait difficile (en raison des coûts par exemple), le fait d’automatiser l’opération de polissage ferait en sorte que l’opérateur ne serait que rarement exposé au phénomène dangereux de l’angle rentrant Conséquemment, ceci réduirait la fréquence d’exposition (F1 plutôt que F2), ramenant l’indice de risque à 2.

Par ailleurs, en observant attentivement la figure  REF Figure_indice_de_risque \h 16 (graphe de l’indice de risque), on constate que la gravité a plus d’impact sur l’indice de risque que la fréquence et/ou la durée d’exposition, qui elle-même a plus d’effet que la probabilité d’occurrence, pour finalement arriver au paramètre ayant le moins d’impact, la possibilité d’évitement. Les solutions qui réduisent le plus efficacement le risque sont donc celles qui, dans l’ordre, réduisent la gravité associée au phénomène dangereux, la fréquence (ou durée) d’exposition à la situation dangereuse, la probabilité d’occurrence de l’événement dangereux et, dans une moindre mesure, la possibilité d’évitement du dommage. C’est ce principe que schématise la figure  REF Figure_efficacité_moyens_prévention \h 18.

Figure  SEQ Figure \* ARABIC 18 : Efficacité des différents moyens pratiques de réduction du risque
Sécurité par protection
Pour contrer les risques subsistants pour les travailleurs, il peut être nécessaire d’appliquer des principes de sécurité par protection. Ces principes constituent un ensemble de mesures de sécurité qui impliquent l’emploi de moyens techniques dans le but de protéger les personnes exposées à un phénomène dangereux en les empêchant d’entrer en contact avec ceux-ci. Cette approche fait appel à deux types de moyens techniques : le protecteur et le dispositif de protection.

Le protecteur (priorité 3), selon la norme canadienne CAN/CSA Z43294, est une barrière matérielle qui empêche l’accès à une zone dangereuse. Il peut s’agir d’un grillage métallique fixe qui bloque l’accès à la zone dangereuse, nommé protecteur fixe. Il peut aussi s’agir d’un protecteur à fermeture automatique.

Un autre type de sécurité par protection est ce que l’on appelle un dispositif de protection (priorité 4). Toujours selon la norme CAN/CSA Z43294, il s’agit d’un dispositif autre qu’un protecteur qui, seul ou associé à un protecteur, élimine les dangers ou contrôle les risques que présente une machine pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs. Les rideaux optiques, les détecteurs de présence et les interrupteurs qui détectent l’ouverture d’un protecteur sont des exemples de dispositifs de protection. Ces types de moyens de prévention font, pour la plupart, l’objet de normes spécifiques qui régissent la manière dont ils doivent être installés et utilisés.
Autres dispositions
Enfin, si le niveau de risque obtenu par les techniques de protection est encore trop élevé, il faut faire appel à une combinaison de différents moyens qui impliquent la participation directe des personnes exposées. Une combinaison d’indications ou d’avertissements (priorité 5) avec des procédures de travail (priorité 6) impliquant parfois l’usage d’équipements de protection individuelle (priorité 7) pourrait alors être envisagée.

Enfin, la formation des employés (priorité 8) se veut être un moyen de dernier recours pour assurer leur sécurité. Bien qu’elle soit nécessaire, voire tout à fait souhaitable, il est reconnu qu’elle est insuffisante. Il faut plutôt chercher à la combiner avec d’autres moyens de réduction du risque, en respectant ce principe : plus on descend dans les priorités des solutions pour la maîtrise des risques, plus la formation des employés revêt de l’importance. Ainsi, une solution combinant le port d’ÉPI (priorité 7) à une procédure de travail (priorité 6) requérra beaucoup plus de formation des employés qu’une solution où un protecteur fixe (priorité 3) serait privilégié.
Évaluation des solutions pour la maîtrise du risque
Les solutions pour la maîtrise des risques peuvent être nombreuses, mais elles ne sont généralement pas toutes également satisfaisantes. Le choix final de la ou des solutions pour la maîtrise d'un risque en particulier doit être fait en tenant compte de plusieurs critères importants dont la sécurité, la fonctionnalité et le coût. D’autres critères peuvent être utilisés, mais ces trois-ci étant reconnus comme les plus importants, ils seront ici privilégiés.
La sécurité
L'efficacité d'une solution à maîtriser les risques peut être exprimée par l'évaluation de la réduction du risque qui serait obtenue suite à son implantation. Cette efficacité doit, dans la mesure du possible, respecter le principe de l'échelle de priorité des solutions pour la maîtrise des risques. Une attention particulière doit également être portée à l'aptitude des dispositifs de sécurité proposés à ne pas être facilement neutralisés (volontairement ou non) ainsi qu'à leur fiabilité.

L'évaluation des solutions doit aussi tenir compte des risques résiduels, des nouveaux phénomènes dangereux ou des risques qui peuvent être augmentés par la ou les solutions proposées. Ainsi, il faut tenir compte :
de l'efficacité de la ou des mesures à maîtriser le risque;
de la fiabilité et de la stabilité de la ou des mesures;
des nouveaux phénomènes dangereux engendrés par la ou les mesures;
des autres phénomènes dangereux dont le risque est augmenté par la ou les mesures;
du temps requis pour l'implantation de la ou des mesures;
de la « contrôlabilité » de la ou des mesures.
La fonctionnalité
L'aptitude de la ou des solutions à ne pas entraver la fonctionnalité de la machine est un critère très important. En effet, toute mesure de sécurité imposée aux utilisateurs, sans tenir compte des effets négatifs qu'elle peut avoir sur les autres aspects de la tâche, pourrait ne pas être acceptée et, éventuellement, retirée ou rendue inefficace par les utilisateurs. Il faut donc tenir compte de :
l'aptitude de la ou des mesures à ne pas gêner la tâche;
la faisabilité organisationnelle et/ou technique pour la mise en œuvre de la ou des mesures.
Le coût
Dans tout projet, le coût est souvent le facteur le plus critique. On tient alors généralement compte :
du coût de la ou des mesures;
de l'influence de la ou des mesures sur le coût d'utilisation de l'équipement;
du coût de maintien en bon état de marche de la ou des mesures retenues.

L'aspect coût doit évidemment être pris en considération dans le choix des solutions pour la maîtrise des risques. En effet, l'objectif à atteindre est le plus haut niveau de sécurité possible compte tenu des contraintes—y compris les contraintes de coûts. Une autre approche consiste à apprécier la valeur de chacune des solutions potentielles, obtenue en comparant le coût de la ou des solutions (et/ou l'impact sur le coût d'utilisation de l'équipement) en fonction du niveau de sécurité obtenu.

Par exemple, une certaine solution pourrait faire passer un indice de risque de 5 à 0, alors qu'une autre solution, beaucoup moins dispendieuse, permettrait d’obtenir un indice de risque de 1. Il revient alors aux personnes responsables de faire les choix nécessaires, considérant également les autres critères d'évaluation des solutions.

À cet égard, il est toutefois important de considérer la maîtrise des risques dans son ensemble, et non un risque à la fois. Analysée pour un danger à la fois, une solution peut paraître économiquement mauvaise, mais elle peut être plus justifiable si l'on considère qu'elle permet de maîtriser plusieurs autres risques.

Enfin, en se rappelant le sondage de la Liberty Mutual, il ne faut pas voir la prévention en santé et en sécurité du travail comme une dépense, mais bien comme un investissement.


Intégration de la DAMR dans le processus de développement de produit (PDP)
Comme vu précédemment, le meilleur moment pour prendre en compte les aspects de sécurité industrielle est lors de la conception des machines. En effet, selon l’échelle de priorité des solutions pour la maîtrise des risques (figure  REF Figure_echelle_priorit_moyens_réd_risque \h 17), il est préférable d’éliminer les phénomènes dangereux dès la conception de la machine (prévention intrinsèque, priorité 1). Cette section traitera de l’arrimage de la DAMR à un PDP.
Principe général d’intégration
La DAMR est un outil moderne de conception, tout comme l’analyse fonctionnelle, le déploiement de la fonction qualité (Quality Function Deployment, QFD), ou toutes les méthodes de conception assistée par ordinateur (CAO). Cette DAMR peut donc être utilisée dans un PDP, à des moments stratégiques, en vue d’atteindre l’objectif qu’elle vise : améliorer la sécurité des machines industrielles.

Le principe général d’intégration des aspects de santé et sécurité du travail a fait l’objet d’une thèse de doctorat [GAUTHIER, 1997]. Essentiellement, ce qui en ressort est que la DAMR peut et devrait être appliquée à toutes les grandes étapes du PDP. La principale différence dans l’application de celle-ci est le niveau de détail des solutions en découlant, qui évolue à chacune de ces étapes. C’est ce que représente la figure suivante, construite en intégrant la figure  REF Figure_DAMR \h 7 (page  PAGEREF Figure_DAMR \h 21) au PDP du Réseau Canadien de Conception en Ingénierie (RCCI).


Figure  SEQ Figure \* ARABIC 19 : Principe général d'intégration de la DAMR à un PDP
Principaux contextes d’intégration
La démarche présentée à la section  REF _Ref72141387 \w \h 3 peut sembler difficilement applicable dans le cas où le projet consisterait à concevoir une nouvelle machine, par opposition à un projet visant la conception d’améliorations pour une machine existante. Pourtant, la démarche vue précédemment s’applique aussi bien dans un cas que dans l’autre.
Conception d’une modification sur une machine existante
La conception d’une modification sur une machine, dans un souci de sécurité, peut être nécessaire suite à un accident, à un incident (« passer-proche » ou quasi accident), ou à des commentaires émis par des utilisateurs. L’intégration de la DAMR dans ce contexte de conception est plus facile à mettre en œuvre, car la machine est tangible, ce qui permet de bien voir les phénomènes dangereux présents. Son historique permet au concepteur de mieux repérer les situations critiques et ainsi travailler sur les points importants. Les méthodes rétrospectives sont surtout utilisées pour bien se servir de l’historique. Par contre, des méthodes prospectives s’avèrent généralement nécessaires afin d’anticiper les dangers qui pourraient survenir.

Ce contexte est une façon assez courante de procéder. Par contre, l’efficacité résultant de cette intégration tardive des aspects de sécurité industrielle est moindre que si les phénomènes dangereux avaient été éliminés dès la conception initiale.
Conception d’une nouvelle machine
Dans ce contexte de conception, il faut partir d’une feuille blanche et arriver en bout de ligne avec une machine qui répondra aux besoins d’un client. Une des difficultés, concernant la sécurité, réside dans le fait qu’il faut penser aux dangers que pourrait comporter la machine, alors que celle-ci est encore immatérielle. Il faut penser aux opérateurs qui auront à la faire fonctionner, aux interventions qui devront être pratiquées, aux mauvais usages prévisibles. Par exemple, dû au fait que la machine n’est représentée que sur des plans d’ingénierie, la lecture de ceux-ci peut rendre difficile la participation des opérateurs, se traduisant par une perte de commentaires utiles. Tous ces aspects rendent la tâche des concepteurs plus difficile que dans un contexte de modification. Des revues de sécurité peuvent aider les concepteurs, car des personnes extérieures au projet sont appelées pour donner leur opinion. Le recul qu’elles peuvent avoir ouvre souvent des avenues non explorées par les concepteurs.
Exemple d’intégration de la DAMR au PDP
Comme l’indique la figure  REF Figure_DAMR_dans_PDP \h 19, l’application de la DAMR aux différentes étapes du PDP demeure sensiblement constante; c’est le niveau de détail des résultats qui évolue selon l’avancement du projet. Pour démontrer comment la DAMR s’arrime au PDP, une étude de cas a été produite [DOUCET et coll., 2004]. Il s’agit d’un projet, réalisé au Département de génie mécanique de l’Université de Sherbrooke, dont l’objectif était de concevoir et fabriquer une machine-outil à contrôle numérique pour la fabrication de moules en bois. Cette étude de cas présente donc un aperçu de comment appliquer la DAMR à la conception d’une machine.

Enfin, le tableau  REF Tableau_exemples_moyens_DAMR_McGro \h 8 présente des exemples de résultats typiques pour chacune des sept phases du PDP du RCCI. Notez l’évolution du niveau de détail des solutions : initialement très générales, elles deviennent de plus en plus spécifiques.
Tableau  SEQ Tableau \* ARABIC 8 : Exemples de moyens de maîtrise des risques à différentes phases du PDP
PhasesExemples (non exhaustifs) de moyens pour la maîtrise des risquesAnalyse du problèmechoix d’une option qui semble comporter moins de risque du point de vue de la sécurité des personnes;
dans l’énoncé de la situation actuelle, dénonciation d’accidents ou d’erreurs de conception qui auraient pu conduire à des accidents sur des machines existantes;
énoncé d’une contrainte liée à la sécurité des personnes, ou encore d’un objectif de projet;
prévisions de budgets supplémentaires pour garantir un bon niveau de sécurité.Émergence de conceptsfonctions de sécurité issues d’une analyse des tâches que devront réaliser les utilisateurs;
recherche de concepts favorisant l’atteinte des fonctions de sécurité.Évaluation des conceptscritères (dans le CdCF) spécifiquement associés à la sécurité (respect de normes, vitesse de déplacement de composantes mobiles, pression maximale admise, etc.);
sélection de concepts qui répondent le mieux aux critères de sécurité.Conception des systèmesspécifications techniques requises pour les technologies dédiées à la sécurité (dispositifs de protection, boutons d’arrêt d’urgence, etc.);
dimensionnement des composantes critiques pour assurer le niveau de sécurité requis;
interfaces critiques;
conception des systèmes de protection requis pour garantir la sécurité;
consignes de sécurité pour les expérimentations, le cas échéant.
 REF _Ref85857439 \h Tableau 8 : Exemples de moyens de maîtrise des risques à différentes phases du PDP (suite)
PhasesExemples (non exhaustifs) de moyens pour la maîtrise des risquesConception détailléeévaluation des technologies offertes répondant à ces spécifications;
achat de ces technologies et vérification de leur conformité aux spécifications;
consignes de sécurité pour les expérimentations, le cas échéant;
dimensionnement final des composantes pouvant avoir un impact sur la sécurité;
études (de fiabilité, de fatigue, ainsi de suite) des composantes les plus critiques;
instruction d’installation des technologies pour la sécurité.Essais et améliorationsmesures spéciales pour assurer la sécurité lors d’essais de validation du prototype;
modifications des systèmes jugés non sécuritaires suite aux essais de validation;
systèmes de protection additionnels pour assurer le niveau de sécurité défini;
manuel d’utilisation pour toutes les phases du cycle de vie de la machine.Pré-production
risques associés à la chaîne de production et d’assemblage;
instructions pour la production et d’assemblage.
Conclusion
L’objectif de ce document était de présenter comment il est possible d’améliorer la sécurité des produits en général, et des machines en particulier, en intégrant, dès leur conception, une démarche d’analyse et de maîtrise des risques.

Après avoir contextualisé brièvement le domaine d’application, le thème général de la sécurité des machines a été abordé. Un soin a été porté à présenter quelques statistiques accidentelles de manière à souligner l’importance stratégique et économique, d’intégrer les aspects de sécurité industrielle à la conception d’une machine. Puis, le processus accidentel, décrivant la chaîne causale minimalement requise pour qu’un dommage se produise, a été présentée.

La troisième partie a quant à elle permis d’exposer le cœur de cet ouvrage : la démarche d’analyse et de maîtrise des risques (DAMR). Celle-ci se décompose en deux grandes phases : l’appréciation du risque et la réduction du risque. Concernant l’appréciation du risque, il importe de souligner l’importance de d’abord bien déterminer les limites de l’analyse, sans quoi l’analyste pourrait s’embourber dans l’exhaustivité et ainsi se décourager. Par la suite, plusieurs méthodes d’identification des phénomènes dangereux ont été vues, regroupées sous trois grandes classes : les analyses rétrospectives, prospectives inductives (What-if Analysis, AMDEC, HAZOP) et prospectives déductives (Arbre des fautes). Enfin, l’estimation puis l’évaluation des risques concluent cette première phase d’appréciation du risque. Dans la deuxième phase—la réduction du risque—le principe de l’échelle de priorité des solutions pour la maîtrise des risques a été présenté. Deux points méritent d’être rappelés ici : la prévention intrinsèque est le véritable défi poser à l’ingénieur-concepteur pour améliorer significativement la sécurité des machines; la formation des employés pour assurer leur sécurité est importante, mais elle n’est pas une panacée et doit être vue comme un moyen de dernier recours.

Enfin, la dernière partie de ce document traitait de l’arrimage de la DAMR à un processus de développement de produit (PDP). Une des conclusions importantes à retenir est que la DAMR doit être appliquée à toutes les phases du PDP et que cette application demeure la même : c’est le niveau de détail des solutions trouvées qui diffère. Des solutions d’abord générales (abstraites), elles évoluent vers des solutions de plus en plus détaillées (concrètes).

En guise de conclusion, il faut se rappeler qu’intégrer les aspects de sécurité industrielle dès la conception d’une machine, ou d’un produit, est non seulement possible, mais tout à fait rentable !
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Annexe A Description des méthodes pour l’identification des phénomènes dangereux
What-If Analysis

ClassificationAnalyse prospective inductiveObjectif de l’analyse :Identifier des phénomènes dangereux potentiels découlant de divers facteurs de risque.Objet de l’analyse :Cette méthode peut être utilisée pour l’identification des phénomènes dangereux dans plusieurs contextes : analyse de la structure fonctionnelle, analyse de la conception préliminaire ou détaillée, analyse de la tâche ou des procédures, etc.Description de la méthode :Cette méthode est la plus simple des méthodes d’analyse prospective inductive. Elle consiste à réaliser un brainstorming orienté pour la recherche des effets potentiels d’événements ou de situations définies. En posant la question «Qu’arrive-t-il si…?», les analystes envisages les effets potentiels d’un événement ou d’une situation définie. Les facteurs de risque (les événements ou les situations définies) servant au démarrage de l’analyse peuvent être issus d’analyses précédentes ou être simplement identifiés dans le cadre d’un brainstorming. Idéalement, cette méthode est réalisée en groupe de 3 à 8 personnes.Limitations de la méthode :Cette méthode est simple et rapide, mais son optique est trop vague pour que tous les effets potentiels d’un événement ou d’une situation soient identifiés. Le niveau de profondeur de l’analyse est donc généralement faible.
Voici un exemple de comment pourrait être structuré cette méthode :

Scénarisation de tâchesQu’arriverait-il si...Phénomènes dangereux identifiésIci, on imagine un scénario typique de tâches, comme l’utilisation de la machine, sa maintenance, son installation, etc.Pour chaque tâche scénarisée, il faut se poser la question « qu’arrive-t-il si... » et, à la manière d’un remue-méninges, imaginer des scénarios accidentels.En reformulant les réponses aux questions « qu’arrive-t-il si... », des phénomènes dangereux sont identifiés. La DAMR se poursuivra ensuite (estimer et évaluer les risques associés, trouver et évaluer des solutions).

Analyses des Modes de Défaillances, de leurs Effets et de leur Criticité (AMDEC)

ClassificationAnalyse prospective inductiveObjectif de l’analyse :Identifier les phénomènes dangereux résultant des défaillances potentielles des composantes de la machine.Objet de l’analyse :La définition de la machine et de ses éléments, incluant les divers modes de défaillances.Définition de la méthode :L’analyse débute avec chacun des éléments du système, dont on étudie les possibilités de défaillances en fonction de tous les modes opérationnels. Elle se poursuit ensuite dans un mode inductif pour l’identification des effets potentiels de ces défaillances et des risques engendrés.Limitations de la méthode :L’AMDEC est une méthode de base, utilisée pour les analyses grossières, et doit être complétée par d’autres méthodes, notamment pour l’étude des défaillances multiples et des effets séquentiels. Cette méthode est néanmoins très exigeante en terme de temps et demande une certaine expérience pratique de la part des utilisateurs. Par conséquent, elle n’est que rarement utilisée sur des systèmes entiers, mais plutôt sur des sous-systèmes ou des composantes critiques. Par ailleurs, la méthode permet d’identifier presque exclusivement les facteurs de risque technologiques reliés aux défaillances des composantes. Les facteurs de risque humains, organisationnels et externes ne sont pas couverts par cette méthode.
Voici un exemple de comment cette méthode peut être structurée.



Les termes utilisés ci-dessus sont définis comme suit :
sous-ensemble, nom : c’est le nom usuel de la composante étudiée;
sous-ensemble, fonction : la fonction qu’accompli la composante à l’étude;
défaillance, mode : le mode de défaillance, comme la rupture, le blocage, l’éclatement, etc.;
défaillance, cause : la ou les causes pouvant être à l’origine de la défaillance;
défaillance, effets : les effets imaginables que peut entraîner cette défaillance sur la fonctionnalité du système et sur la sécurité des personnes;
criticité-1 : il s’agit d’estimer la criticité des défaillances (C)—leur risque pour utiliser les termes de ce document—avant que des actions correctives soit entreprises; il faut alors établir la gravité des effets (G), la fréquence ou la durée d’exposition à ces défaillances (F), la probabilité d’occurrence des défaillances (O) et la possibilité d’évitement des effets (P);
actions correctives : les actions qui peuvent être faites pour éviter ces défaillances ou en amoindrir les effets;
criticité-2 : la criticité des défaillances, une fois les actions correctives mises en place.
Hazard and Operability study (HAZOP)
ClassificationAnalyse prospective inductiveObjectif de l’analyse :L’objectif poursuivi par l’utilisation de cette méthode est d’identifier les phénomènes dangereux qui apparaissent lors d’une déviation des conditions normales de fonctionnement de la machine.Objet de l’analyse :La définition de la machine ou d’un de ces composants (structure fonctionnelle et/ou dessins techniques), des informations sur les matériaux et produits transformés et, dans une certaine mesure, les procédures d’utilisation.Description de la méthode :Cette méthode d’identification des phénomènes dangereux débute par l’identification des possibilités de déviation dans le fonctionnement de la machine ou les actions humaines. Pour ce faire, elle utilise une série de mots-clés définissant les différents types de déviations possibles :
pas, non, aucun;
plus;
moins;
aussi, pendant que;
partiellement;
inversé;
au lieu de.
La méthode favorise donc la recherche systématique et créative des déviations. Lorsqu’une déviation possible (vraisemblable) est identifiée, l’analyse se poursuit dans un mode inductif pour l’identification des effets potentiels et des risques engendrés par cette déviation. Finalement, la méthode se termine dans un mode déductif par l’identification sommaire des causes potentielles des déviations critiques identifiées.Limitations de la méthode :Des études ont démontré que cette méthode était une des plus performantes en terme de la quantité de facteurs de risques identifiés. On note cependant certaines lacunes au niveau de l’identification des facteurs de risque externes et organisationnels. De plus, elle ne permet d’identifier que dans une faible mesure les phénomènes dangereux engendrés par une combinaison de facteurs de risque.
Voici un exemple de comment cette méthode peut être structurée.



Les termes utilisés ci-dessus sont définis comme suit :
entité analysée : c’est le nom usuel de la composante étudiée;
déviation possible : partant de la liste des déviations types, il faut imaginer des déviations possibles par rapport au mode habituel de fonctionnement;
cause potentielle : penser aux causes qui peuvent être à l’origine de la déviation;
effet probable : imaginer les effets possibles de la déviation sur le reste du procédé ou sur la sécurité des personnes;
mesure corrective : les mesures correctives envisagées pour éviter cette déviation.
Arbre des Fautes

ClassificationAnalyse prospective déductiveObjectifs de l’analyse :Identifier les causes et développer les diverses chaînes de causalité d’un risque ou d’un facteur de risque (l’événement sommet). Dans certains cas, la méthode peut aussi servir à estimer quantitativement la probabilité d’occurrence de l’événement sommet.Objet de l’analyse :Un événement sommet quelconque, généralement un phénomène dangereux ou un dommage envisageable. Des facteurs de risque humains ou externes peuvent également faire l’objet de l’analyse.Description de la méthode :Cette méthode est une représentation graphique des multiples causes d’un événement. Elle permet de visualiser les relations entre les défaillances d’équipements, les erreurs humaines et les facteurs environnementaux qui peuvent conduire à des accidents. Les résultats qu’elle produit sont généralement qualitatifs, mais peuvent facilement être quantifiés si des données statistiques sont introduites dans le modèle. Dans la construction d’un arbre des fautes, on place l’effet indésirable que l’on souhaite étudier (l’événement sommet) en haut de l’arbre et on examine, par une logique déductive, les événements (les fautes et les défaillances) qui peuvent l’engendrer. Les différentes relations entre les événements, fautes et défaillances sont exprimées par des symboles qui sont des opérateurs logiques d’algèbre booléenne. La méthode peut également être utilisée dans un mode rétrospectif pour la reconstitution détaillée d’événements passés.Limitations de la méthode :La construction de ces arbres peut être un exercice très coûteux en terme de temps, et doit être justifiée par l’importance de l’événement sommet choisi. 
L’élaboration d’un arbre des fautes se fait principalement en quatre étapes, présentées dans les paragraphes suivants :

a) Identification de l’événement indésirable (événement sommet)

La construction de ces arbres peut être un exercice très coûteux en terme de temps, et doit être justifiée par l'importance de l'événement sommet choisi. Il s’agit souvent d’un dommage potentiel ou d’un événement dangereux que l’équipe d’analystes redoute.

b) Recherche des causes nécessaires, immédiates et suffisantes (NIS)

Les causes NIS sont la clé de la construction efficace d’arbre des fautes. Les causes de l’événement doivent répondre à ces trois critères :
Nécessaire : la cause doit effectivement avoir un impact sur l’événement;
Immédiates : la cause doit agir directement sur l’événement, elle n’est pas une cause indirecte de l’événement (en anglais, on appelle ce principe « think small »);
Suffisante : l’ensemble des causes associées à l’événement doit être suffisant pour l’engendrer.
Les causes NIS deviennent alors les premiers événements intermédiaires qu’il faut lier à l’aide des portes logiques (« ET » et « OU »).

c) Recherche des causes NIS des événements intermédiaires

De la même manière que pour l’événement sommet, on procède à la recherche des causes NIS des premiers événements intermédiaires. On procède ainsi jusqu’à ce que les causes identifiées soient des événements de base.

d) Représentation sous forme graphique de l’arbre des fautes

Voici, de manière non exhaustive, quelques symboles souvent rencontrés dans la construction d’arbres des fautes.

SymboleSignification EMBED Word.Picture.8 Événement de base
Événement initial ne nécessitant pas de développement. Il s’agit essentiellement d’une défaillance première d’une entité à la limite de l’analyse. EMBED Word.Picture.8 Événement non développé
Événement qui ne constitue pas un événement de base mais qui ne sera pas développé en raison d’un manque d’information ou d’autres considérations. EMBED Word.Picture.8 Événement intermédiaire
Représentation d’un événement qui est le résultat de la combinaison de d’autres événements.Porte « ET »
Nécessite l’addition des événements causes pour engendrer l’événement effet.Porte OU
Ne requiert qu’un seul des événements causes pour engendrer l’événement effet. EMBED Word.Picture.8 Transfert vers...
Indique que l’arbre se poursuit à la section indiquée par le numéro dans le triangle. EMBED Word.Picture.8 Transfert de...
Indique que cette portion de l’arbre est la suite détaillée de la section indiquée par le numéro dans le triangle.
Liste de contrôle (Check-List Analysis)

ClassificationAnalyse informativeObjectif de l’analyse :Faciliter l’identification de facteurs de risque en utilisant des listes préparées. Ces listes peuvent indiquer les bonnes pratiques à respecter, les situations à éviter, les types de déviations possibles, les éléments de la conception à considérer, etc.Objets de l’analyseCette méthode peut être utilisée pour faciliter l’identification de facteurs de risque dans plusieurs contextes : analyse de la structure fonctionnelle, analyse de la conception préliminaire ou détaillée, analyse de la tâche ou des procédures, etc.Description de la méthode :Les listes de contrôle sont depuis toujours utilisées en conception, que ce soit pour l’aspect de la santé et de la sécurité du travail, ou pour tout autre aspect du produit. Elles peuvent être applicables à une classe générale de problèmes ou à un problème spécifique d’un produit particulier. Utilisée comme outil de conception, cette méthode peut être adaptée à l’identification des facteurs de risque présents dans une conception. L’application de cette méthode informative consiste à contrôler chacun des points de la liste sur le sujet analysé. Elle est généralement utilisée conjointement avec d’autres méthodes d’analyse des risques. Dans ce cas, la liste de contrôle utilisée correspond à l’optique particulière de la méthode utilisée conjointement.Limitations de la méthode :Le danger de l’utilisation de cette méthode pour l’identification des phénomènes dangereux est que les concepteurs ne s’en remettent qu’à celle-ci pour assurer la sécurité de la machine. Par ailleurs, malgré une apparente simplicité, la préparation d’une bonne liste de contrôle requiert du temps, du sérieux et de l’expérience. L’efficacité de l’analyse dépend donc souvent de l’expertise de ceux qui ont préparé la liste. De plus, la majorité des listes de contrôle sont orientées vers l’identification des facteurs de risque techniques.
À titre indicatif, les tableaux  REF Tableau_exemples_phénomène_dangereux \h 3,  REF Tableau_exemples_exposition_phen_dang \h 4,  REF Tableau_exemples_évènements_dangereux \h 5, et  REF Tableau_exemples_dommages \h 6 du présent document peuvent très bien servir de liste de contrôle. Ils ont d’ailleurs été utilisés pour conduire l’étude de cas McGrO [DOUCET et coll., 2004].
Méthode développée par l’IRSST

ClassificationAnalyse prospective inductiveObjectif de l’analyse :Réaliser, simplement et efficacement, une appréciation du risque et vérifier l’efficacité et la conformité des moyens de réduction du risque préconisés.Objet de l’analyse :À partir soit d’un phénomène dangereux, d’une situation dangereuse, d’un événement dangereux ou d’un dommage potentiel, le processus accidentel est ensuite complété. Puis, les étapes subséquentes de la gestion du risque sont réalisées.Description de la méthode :La première qualité à soulever de cette méthode est sa simplicité de mise en œuvre. Une fois les notions relatives au processus accidentel bien maîtrisées, l’analyse débute par l’identification de n’importe quel de ces composants : phénomène dangereux, situation dangereuse, événement dangereux ou dommage. Après avoir pris soin de compléter chaque scénario accidentel imaginé, un indice de risque est obtenu en se basant sur quatre paramètres bien ciblés. Ensuite, des priorités (évaluation du risque) sont accordées aux différents scénarios accidentels et des moyens de réduction du risque, lorsque requis, sont déterminés. Dans le cas où des dispositifs de protection sont utilisés, les catégories requises selon la norme EN 954 peuvent être déterminées.Limitations de la méthode :La simplicité de la mise en œuvre de cette méthode a un prix : le risque de ne pas être suffisamment exhaustif. En effet, comme l’identification des phénomènes dangereux se fait par observation et remue-méninges, des scénarios accidentels peuvent être omis. L’utilisation conjointe d’autres méthodes pourrait pallier cette faiblesse.

Néanmoins, cette méthode offre généralement de bons résultats. De plus, elle a été développée par des instances notables en matière de sécurité industrielle, ce qui lui confère de la crédibilité.
À titre indicatif, la grille de la page suivante correspond à la grille suggérée par l’IRSST pour conduire une analyse du risque. Notez que les termes utilisés correspondent exactement à ceux présentés aux sections  REF _Ref84239447 \w \h 2 et  REF _Ref72141387 \w \h 3 de ce document. Il s’agit d’une partie de la grille d’analyse de l’inspection finale dans le cadre du projet McGrO [DOUCET et coll., 2004].

 Le mot « machine » sera utilise dans le texte pour désigner globalement les outils, les machines et les systèmes de production industriels.
 L’acronyme DFS provient de l’anglais Design For Safety.
 Toutefois, comme l’application de la DAMR dans le cas d’une machine et dans le cas d’un produit est similaire, une extrapolation prudente de la méthode présentée pourrait être faite par le lecteur soucieux d’améliorer la sécurité des produits destinés au grand public.
 L’expression « accident avec perte de temps » signifie un accident (ou une maladie) pour lequel/laquelle un employé reçoit une indemnité compensant la perte de salaire induite par la période de convalescence requis suite à l’accident ou à la maladie, que celle-ci ait ou non entraîné une interruption de la production. Dans certains cas, il peut s’agir d’une indemnité pour une incapacité permanente [ACATC, 2002].
 En dollars constants de 1992.
 Extraite de SCIENTIFIC TECHNOLOGIES Inc., 1996
 La manifestation de ces phénomènes dangereux d’origine mécanique pourra se faire sous la forme d’écrasement, de cisaillement, de coupure ou sectionnement, de happement, d’enroulement, d’entraînement ou d’emprisonnement, de choc, de perforation ou de piqûre, de frottement ou d’abrasion, d’éjection de fluide sous haute pression, de projection d’éléments de la machine ou de matière travaillée, de perte de stabilité de la machine ou d’élément de la machine, de glissade, de perte d’équilibre et de chute de personnes.
 Le bruit peut entraîner une détérioration de l’acuité auditive, mais aussi créer des interférences avec la communication orale ou des signaux acoustiques.
 IRSST : Institut Robert-Sauvé de recherche en santé et en sécurité du travail, Montréal.









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