Td corrigé Trente glorieuses - Td corrigé pdf

Trente glorieuses - Td corrigé






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u vocabulaire des traitements de la toxicomanie et de l’alcoolisme. Cependant ses racines sont multiples, il appartient tout d’abord au vocabulaire de la morale et de la religion, puis à celui de la médecine, de l’histoire naturelle, de la politique (on finira par lui préférer le terme d’abstentionnisme) et de la littérature. Il faut aussi mentionner son usage particulier dans le cadre de la théorie psychanalytique. Il se trouve donc à la croisée de contextes socio-historiques divers et de domaines de recherches qui n’ont pas toujours fait bon ménage. La tension s’est fait plus vive notamment entre l’héritage moral et la perspective médicale lorsque apparu au cours du 19éme siècle les termes alcoolisme, alcoolique (c’est avec Magnus Huss que l’ivrognerie entre en médecine) et le qualificatif abstinent, appliqué à une personne qui s’abstient de consommer de l’alcool. La réduction qui s’opère à ce moment là entre un produit et une conduite limitera la réflexion à venir en matière de traitement des problèmes liés à la sur-consommation d’alcool puis à celle des “ drogues ” qui deviendront illégales (le concept de “ toxicomanie ” apparaît en 1885).
Les différentes impasses auxquelles ont aboutis une gestion strictement médicale, puis uniquement pénale et finalement le mélange des deux, demandent de reprendre à nouveaux frais les questions sociales, politiques, économiques, psychologiques, philosophiques, éthiques, liées à la consommation des psychotropes (légaux ou non). Et par conséquent de revoir le ou les sens possibles du concept d’abstinence. L’évolution historique de l’usage des “ drogues ” et par conséquent de la gestion socio-politique, puis socio-sanitaire des “ drogués ” a placé ces derniers dans la position soit du délinquant, soit du malade. Deux positions qui peinent à reconnaître la dimension d’autodétermination à l’automédication de l’usager. Démarche qui, il faut bien l’admettre, met à mal le pouvoir du juge et du médecin. L’intervention de la loi comme celle de diverses thérapeutiques sanctionnant l’état de dépendance, ou souhaitant soigner celui-ci ont le plus souvent fait de l’abstinence une fin en soi, une disposition antérieure à rétablir, alors qu’il s’agirait plutôt de voir en elle un moyen et un processus, si l’on souhaite que ces derniers deviennent une fin, ou une valeur, pour la personne dépendante. L’abstinence comme objectif à atteindre par des voies légales (punir et/ou soigner), médicales (sevrer, soigner, guérir), éducatives (accompagner, éduquer, former), ou autres, se trouve donc questionnée depuis quelques années et s’enrichira par la reconnaissance que ces mêmes domaines accorderont à l’évaluation de l’ensemble des démarches issues de leurs analyses. Une approche plus modeste, pragmatique est peut-être mieux à même d’entendre et de respecter le paradoxe des conduites de dépendance contemporaines. L’abstinence comme moyen porte son attention sur les liens qui unissent les consommateurs à leurs produits (physiologiquement, psychologiquement, historiquement, culturellement, etc.), sur les comportements et le sens qu’ils leur donnent dans les contextes actuels et passés. La capacité de gérer ces différentes composantes replace le concept d’abstinence et l’ensemble des acteurs qu’il concerne dans une perspective de responsabilisation vis à vis d’eux-mêmes et de la société. Cette gestion va des produits aux conduites pour finalement arriver aux éléments subjectifs (émotions, pensées, actions) de la vie des consommateurs. Le processus d’abstinence représente aujourd’hui un moyen (multifonctionnel) capable d’aider les personnes pharmacodépendantes (OMS, 1969) à prendre du recul vis à vis des aspects excessifs de leurs conduites. Cette dimension dynamique les détache de la perspective réductrice qui liait l’abstinence à la cessation de leurs consommations et leurs redonne leur responsabilité quant aux objectifs qu’elle poursuit à travers le choix des moyens qu’elle retiendra au sein de la palette des offres de traitements (ambulatoire, résidentiel, avec et/ou sans produit de substitution, prescription médicale d’héroïne). Dans cette perspective le processus d’abstinence peut alors se décliner tout au long de la trajectoire des consommateurs, dès lors qu’à chaque étape de celle-ci leur est offerte la possibilité de prendre du recul (avec des moyens ad hoc) pour chercher à comprendre, à gérer, à dépasser les différents éléments qui entrent en ligne de compte dans cette problématique. Que la personne ait ou non décidé de se passer de psychotropes constitue un élément de son parcours, elle peut déjà faire le choix de s’abstenir de ce qu’elle estime être à la base de ses difficultés et faire ainsi de l’abstinence un moyen au service des fins qu’elle se fixe. Dès lors s’abstenir d’abuser puis d’user ou non de psychotropes (légaux ou illégaux) modifie la compréhension généralement admise à propos du concept d’abstinence. Par conséquent reconnaître la possibilité de cette gestion affectera nos représentations des usagers de ces produits, des professionnels qui s’en occupent (qui ont eux aussi leurs “ produits ”, théories, techniques, savoirs, etc.) et de la société de consommation au sein de laquelle chacun vit.
Site Internet : www.infoset.ch
Voir : Addiction — Alcoolisme — Dépendance — Toxicomanies
Gérald Thévoz
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Abus sexuels
Le rapport du Département fédéral de l’Intérieur sur l’enfance maltraitée en Suisse, juin 1992, donne de l’abus sexuel la définition suivante : “ La notion d’abus sexuel désigne l’implication d’enfants et d’adolescents dépendants, immatures dans leur développement, dans des activités sexuelles dont ils ne comprennent pas pleinement le sens ou qui violent les tabous sociaux concernant les rôles familiaux (Finkelhor, 1996 ; Kempe, 1978).
Ces abus sont commis par des adultes et parfois par des adolescents qui le plus souvent ont eux-mêmes fait l’objet d’abus sexuel durant leur développement. Des recherches montrent qu’environ 80 % des abus sexuels sont commis par un membre de la famille de l’enfant, 90 % par des personnes connues de l’enfant, 10 % seulement par des inconnus. Les abus sexuels sont commis sur des enfants de tous les âges, dès les premiers mois de la vie. Les abus commis par des proches se répètent et s’aggravent. ”
Le code pénal sanctionne les infractions sexuelles commises par les mineurs. Le délai de prescription a été en 1996 porté à 10 ans. L’abus sexuel envers enfant qui est généralement accompagné de mauvais traitements psychologiques et aussi, dans un nombre non négligeable de cas, de violences physiques engendre de nombreux traumatismes et désordres dans le développement de la personnalité de la victime prétéritant son développement affectif, physique, psychique et social.
Les signaux de détresse émis par le mineur et qui devraient servir d’appels au diagnostic sont les suivants : dépression chronique, fréquentes tentatives de suicide, suicide, auto-mutilation, signes de dévalorisation du corps (obésité/anorexie/énurésie/encoprésie), fugues, faillites scolaire et professionnelle, troubles de la santé physique, promiscuité sexuelle, transvestisme, évolution vers l’homosexualité, déviances comportementales, prostitutions masculine et féminine, criminalité qui, souvent, existe sous la forme d’abus sexuels.
Depuis quelques années, une importance significative est portée au développement de mesures spécifiques d’aide aux victimes de ces infractions.
R. Code pénal suisse, art. 187 et suivants — Enfance maltraitée en Suisse, Rapport final présenté au chef du Département fédéral de l’Intérieur par le groupe de travail Enfance maltraitée en Suisse, Office central des imprimés et du matériel, Berne, juin 1992. — C.-S. di Blasio, La famille maltraitante, ESF, Paris, 1992. — M. Gabel, Les enfants victimes d’abus sexuels, PUF, Paris, 1992. — M. Vannotti, Le silence comme un cri à l’envers, maltraitance et abus sexuels envers les enfants, Reflets des journées d’études de Neuchâtel, mars 1991, Médecine et Hygiène, Genève, 1993.
Voir : Maltraitance — Mauvais traitements — Prévention — Protection de l’enfant — Victimes d’infraction (Loi fédérale sur l’aide aux)
Jean Vallet
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Accord de siège et sécurité sociale
Un Accord de siège est un traité conclu entre une Organisation internationale et un État hôte (celui qui l’accueille). Il définit le statut juridique de la première dans ledit État. L’indépendance de l’Organisation internationale et de ses agents doit être garantie, d’où le bénéfice de privilèges et d’immunités. La Suisse a conclu une série d’Accords de siège avec les Organisations internationales accueillies sur son territoire ; ces Accords ont été complétés par des échanges de lettres. Ils prévoient l’exemption des Organisations et de leurs agents à l’égard de la sécurité sociale suisse, notamment de l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité et de l’assurance-chômage. Les agents internationaux de nationalité suisse peuvent s’assurer sur une base volontaire.
R. P.-Y. Greber, J.-L. Duc, G. Scartazzini, Commentaire des articles 1 à 16 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants, Helbing & Lichtenhahn, Bâle/Francfort-sur-le-Main, 1997, Art. 1, No 67 ss.
Pierre-Yves Greber
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Accord sur la libre circulation Suisse - CE
L'accord entre la Communauté Européenne et ses États membres, d'une part, et la Suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999 (FF 1999 VI, pp. 6319ss) vise à “ réaliser la libre circulation des personnes entre ” les parties contractantes “ en s'appuyant sur les dispositions en application dans la Communauté européenne ”. L'accord accorde notamment un droit d'entrée, de séjour, d'accès à une activité économique salariée, d'établissement en tant qu'indépendant. Il facilite la prestation des services et s'étend aux personnes sans activité lucrative. La coordination des régimes nationaux de sécurité sociale est également prévu ainsi que la reconnaissance mutuelle des diplômes.
R. B. Kahil-Wolff, L'accord sur la libre circulation des personnes Suisse-CE et le droit des assurances sociales, Semaine Judiciaire 2001, no 4, pp.56.
Site Internet : www.europe.admin.ch/f/int/abindex.htm
Voir : Autorisation de séjour — Circulation des personnes (Libre) — Communauté européennne et sécurité sociale — Conventions bilatérales de sécurité sociale — Eurocompatibilité
Bettina Kahil-Wolff
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Acculturation
La définition considérée comme classique vient du courant culturaliste de l’anthropologie et notamment des travaux de Redfield, Linton & Herskovits (1936) qui définissent l’acculturation comme l’ensemble des phénomènes, et des changements subséquents, qui résultent du contact continu et direct entre des groupes d’individus de cultures différentes. Les changements pris en considération sont donc attribués à des “ influences culturelles externes ” et non à des dynamiques “ internes ” à une culture donnée.
Dans cette perspective, l’acculturation apparaît comme un processus se réalisant au niveau des groupes. Cependant, à partir notamment des années cinquante, le terme est aussi employé pour signifier des changements psychologiques au niveau individuel concernant les sujets appartenant aux groupes en situation d’acculturation. Voir, par exemple, les travaux portant sur les attitudes, les conduites et les stratégies individuelles, les tensions intra-psychiques relatives à l’acculturation (Berry, 1989).
Cependant le terme acculturation est aujourd’hui considéré comme un peu désuet essentiellement en raison d’une vision réifiante de la culture qui lui est reprochée.
Deux questions apparaissent comme centrales dans le débat théorique consacré aux processus d’acculturation. D’un côté, celle de la direction du processus (uni ou bi-directionnel ?), et, de l’autre, celle de la “ dominance ”, à savoir la nature des rapports de pouvoir existant entre les groupes culturels en présence. Concernant la première question, on peut considérer qu’un large consensus existe sur l’idée de la bi-directionalité du processus, même si une partie des travaux qui adoptent cette idée ne s’intéressent pratiquement qu’aux changements d’un des groupes en présence, à savoir celui en position minoritaire. C’est le cas, en particulier, des recherches (assez nombreuses au cours de ces dernières décennies) qui se donnent comme objet d’étude les phénomènes d’acculturation de groupes d’immigrés, et s’interrogent notamment sur la valeur affective et identitaire attribuée à la culture dite “ d’origine ”.
Quant à la question de la “ dominance ” (dominance totale d’un groupe sur l’autre ou parité entre les groupes), elle renvoie à la problématique des rapports de pouvoir et aux échelles de prestige sur lesquelles les groupes se positionnent dans des contextes socio-historiques donnés.
Le processus d’acculturation est à différencier de celui d’enculturation (nommé parfois acculturation dans des travaux à perspective sociologique) qui explique davantage le processus de socialisation de l’enfant au cours de son développement au sein d’une culture que les changements résultant des contacts entre groupes culturels. Il est aussi à différencier de celui d’assimilation, en raison notamment du caractère plus unidirectionnel attribué à ce dernier (Teske and Nelson, 1974), même s’il ne manque pas d’auteurs qui considèrent l’assimilation comme un mode d’acculturation.
R. J. Berry, “ Acculturation et adaptation psychologique ”, in : J. Retschitzsky, M. Bossel-Lagos et P. Dasen (Éds), La recherche interculturelle, L’Harmattan, Paris, 1989, pp. 135-145. — R. Redfield, M. Linton et Herskovits, “ Memorandum for the Study of Acculturation ”, in : American Anthropologist, Vol. 38, 1936, pp. 149-152. — R.-H.-C. Teske et B.-H. Nelson, “ Acculturation and assimilation : a clarification ”, in : American Ethnologist, 1 (2), 1974, pp. 351-367.
Voir : Immigration — Interculturalité — Interculturel — Lien social — Multiculturalisme — Socialisation
Vittoria Cesari Lusso et Anne-Nelly Perret-Clermont
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Acharnement thérapeutique
L’acharnement thérapeutique consiste à utiliser tout les moyens médicaux à disposition pour maintenir un malade en vie (1), quelque soit son état. Le concept a pris une dimension qualitative en attribuant ce terme à des traitement dont la mise en route permet de prolonger la survie d’un malade dont la qualité de vie se révèle être très médiocre (2) ; en d’autres termes de traitements futiles. Deux concepts fondamentaux interviennent la définition de la futilité : l’effet ou futilité qualitative et le bénéfice ou futilité quantitative (3). L’effet se mesure par la réponse d’un organe à l’administration d’un traitement, par exemple le contrôle d’une infection par un antibiotique. La probabilité de l’obtention de l’effet escompté est basée sur des travaux scientifiques. Le bénéfice est plus difficile à évaluer puisqu’il fait intervenir une double subjectivité : individuelle, soit celle du malade, de ses proches et du corps soignant et collective, soit l’aspect socio-culturel, voir économique. En résumé, l’acharnement thérapeutique est un concept complexe créée dans une grande variabilité de la pratique médicale, pour lequel un consensus est souvent difficile à obtenir.
R. P. La Marne, “ L’acharnement thérapeutique ”, in : P. La Marne, Ethique de la fin de vie, acharnement thérapeutique, euthanasie, soins palliatifs. Ellipses, Paris, 1999 (1) — J.-C. Chevrollet, Réanimation du sujet âgé - jusqu’où aller ?, Les Rencontres du Sillon Alpin, Anesthésie et Grand Vieillard, 1999 (2) — L.-J. Schneidermann, The futility debate : effective versus beneficial intervention, J. Am. Geriatr. Soc. 1994 ; 42 : 883-886 (3).
Voir : Euthanasie — Soins palliatifs
André Laszlo
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Acte unique européen
Traité additionnel conclu par les pays membres de la CEE (actuellement Union Européenne), le 17 février 1986. Il complète et unifie les traités désignés sous le nom de Traité de Rome, 1957, d’où son nom d’Acte unique. Il impose, notamment, la suppression des frontières intérieures des pays membres de la Communauté européenne (aujourd’hui Union européenne). Il a pour but d’assurer la libre circulation des personnes, des marchandises, des services et des capitaux. Des fonds structurels doivent permettre de réduire les disparités économiques et sociales induites par la concurrence entre les pays membres. Le traité de Maastricht constitue un prolongement de l’Acte unique.
Voir : Parlement européen — Union européenne — Circulation des personnes (Libre)
jpf
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Action bénévole — Association pour l’étude et la promotion de l’action bénévole
L’association, créée à Lausanne, en 1988, s’est construite et conduit son activité en étant convaincue, avec beaucoup d'autres, que l'action sociale professionnalisée et l'action bénévole sont différentes mais nécessairement complémentaires. L’objectif principal de l’association est donc d'intensifier les échanges entre les milieux professionnels de l’action sociale et les milieux bénévoles.
Pour travailler à cette convergence, ACTION BÉNÉVOLE offre des services pour :
— favoriser l’expression et la capacité d’entreprendre de l’ensemble de la population et soutenir les porteurs d’initiatives dans l’élaboration de leur projet.
— Faciliter l’information et les prises de position des acteurs de la vie associative.
— Accompagner des travailleurs sociaux désireux de développer des actions en coopérant avec des milieux bénévoles.
— Promouvoir l’innovation sociale et la diversité des activités bénévoles.
Plusieurs publications sont mises à disposition des milieux intéressés afin de promouvoir toutes les formes de coopération.
R. M.-C. Collaud et C.-L. Gerber, Pour la collaboration entre bénévoles et professionnels dans l’action sociale, Cahiers de l’EESP, Lausanne 1991. — M.-C. Collaud, Comment créer et animer une association, Réalités sociales, Lausanne, 1990. — M.-C. Collaud, C.-.L. Gerber, Contre le chômage et l’exclusion, les ressources de la vie associative, Réalités sociales, Lausanne, 1997.
Site Internet : www.benevolat.ch
Voir : Action sociale — Associations — Bénévolat — Entraide
Marie-Chantal Collaud
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Action communautaire
L’action communautaire est un concept mettant en exergue la dimension collective du travail social ; il “ côtoie ” d’autres termes tels que : organisation, développement communautaire, action sociale de collectivité, animation sociale, etc., tous relevant de pratiques sociales collectives en tant que “ produits ” d’une dynamique historique, sociale, politique, culturelle et économique constituées par les rapports sociaux.
L’action communautaire et ses diverses variantes se réfèrent, au départ, aux courants issus de la tradition du travail social anglo-saxon de résolution des problèmes (tels que la pauvreté) par des interventions au niveau des solidarités primaires et avec les ressources des communautés.
Les pratiques d’actions communautaires que nous connaissons chez nous se sont développées dans la dynamique des mouvements sociaux “ post-soixante-huit ” en tant que moyens souples et non institutionnalisés visant à permettre à des groupes d’usagers et d’habitants d’être acteurs de changement. Terrains privilégiés : le quartier, le grand ensemble suburbain. Ce modèle se construit sur un rapport dialectique entre l’individu, ses problèmes et son milieu de vie d’une part, la participation des intéressés, la nécessaire décentralisation que cette participation exige, et la redéfinition des rôles et des fonctions des professionnels et acteurs du champ social d’autre part.
Les processus d’institutionnalisation et de centralisation des pouvoirs, la parcellisation et les spécialisations des interventions, le recul des expériences “ alternatives ”, ce sont là autant de tendances qui ont contribué à restreindre toujours plus ce modèle d’action sociale. On préfère aujourd’hui parler de la théorie de réseau, de la médiation, etc.
L’action sociale collective connaîtra-t-elle un nouveau souffle en ces temps de crise ?
R. “ Travailler le social ”, in : Revue internationale d’action communautaire No 7/1982, Édition Albert Saint-Martin, Montréal. — Ouvrage collectif, Le Développement communautaire ou les contradictions du travail social, I.E.S et EESP, Genève, 1975.
Voir : Action sociale — Aide mutuelle (Self-help) — Animation socioculturelle — Centre de loisir, centre d’animation de quartier — Don — Travail social — Travail social de groupe (TSG)
Daniel Dind
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Action de carême des catholiques en Suisse
Action de carême est née en 1961 d'une initiative de laïcs soucieux de l’ouverture au monde et du partage à l'échelle universelle. Depuis 1964, elle a le statut d'une fondation. Elle s’engage pour une société et une Eglise ouvertes et solidaires, dans l'esprit du Concile Vatican II et de l'“ option préférentielle pour les pauvres ”.
En Suisse, Action de carême développe des activités d'information, d'éducation et de politique de développement. Dans le Sud, elle appuie financièrement des communautés de la société civile et de la société ecclésiale, et des groupes sociaux défavorisés engagés dans la lutte pour leurs droits et pour leur reconnaissance en tant que citoyens et citoyennes à part entière. Le travail de politique de développement d'Action de carême se fait principalement dans le cadre de la Communauté de travail Swissaid/Action de Carême/Pain pour le prochain/Helvetas/Caritas. L’essentiel de l’engagement d'Action de carême en Suisse se fait de manière œcuménique, en collaboration avec Pain pour le prochain et Être Partenaires.
Voir : Charité — Diaconie — Enseignement social chrétien — Entraide
Charles Ridoré
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Action humanitaire
Longtemps basée sur le paradigme de la solidarité entre les peuples, l’action humanitaire a été l’expression de la charité au niveau international. Depuis quelques années cependant, l’action humanitaire est de plus en plus souvent l’unique réponse aux catastrophes humaines provoquées par l’homme. De ce fait, elle a été plus que jamais instrumentalisée par le politique. La réponse aux crises humanitaires se concentre désormais sur la Victime, faisant trop souvent abstraction du contexte sociopolitique et historique. L’action humanitaire ainsi chargée permet de se passer de la question de la responsabilité politique. Un sens moral différent prédomine dès lors. L’intervention humanitaire comme rédemptrice de l’Occident s’impose et devient même une des grandes valeurs morales de cette fin de siècle.
R. A. Finkelkraut, L’humanité perdue, Seuil, Paris, 1996.
Voir : Don — Organisation non gouvernementale (ONG) — Solidarité
Markus Pichler
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Action sociale
Ensemble des activités déployées par des institutions, privées ou publiques, face aux problèmes sociaux. Ces institutions vont des plus petits réseaux d’entraide opérant de façon autonome dans des villages ou des quartiers aux plus vastes organisations privées ou publiques : Caritas, Pain pour le prochain, AVS, départements cantonaux de la santé ; sans oublier les organisations internationales, telles que le Bureau international du travail, l’OMS, l’UNESCO, ou le Comité international de la Croix-Rouge, etc.
L’action sociale est exécutée tant par des bénévoles que par des professionnels.
R. M. Fehlmann, J.-P. Fragnière, Ch. Haefeli, A. Wagner (Éds), Manuel de l’action sociale en Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 1989. — J.-P. Fragnière e. a., L’étude de la politique sociale, Cahiers de l’EESP, Lausanne, 1990.
Voir : Action bénévole — Aide sociale — Assistant social — Bénévolat — Problèmes sociaux — Travail social
Roger Girod
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Activité àð Activité et travail
Activité compensatoire àð Politiques en matière de lutte contre la pauvreté
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Activité économique (au sens du BIT)
L activité économique est une notion théorique qui a été élaborée par le BIT en vue d offrir une catégorisation de la population active et de la population active occupée au travers de la réalisation d’enquêtes sur les forces de travail, tel que l’enquête suisse sur la population active (ESPA). L’activité économique regroupe toutes les activités de production de biens et de services qui sont définies dans le système de comptabilité nationale des Nations-Unies (System of National Accounts and Balances). Entre dans la catégorisation de l’activité économique, en premier lieu, l’ensemble des activités de production d’un bien primaire, le produit de cette activité étant destiné, soit à un échange sur le marché (production pour le marché), soit à la consommation personnelle (production hors-marché). En second lieu, l’activité économique regroupe l’ensemble des activités de production de biens industriels et de service qui, de même, sont destinés à faire l’objet d’un échange économique ou d’un usage personnel (par exemple, construction d’une maison de ses propres mains) lorsque ces biens sont produits par un ménage. La définition de l’activité économique exclut les activités bénévoles ainsi que les activités domestiques, qui, souvent sont des activités féminines. Il est à noter, par ailleurs, que dans la plupart des pays occidentaux réalisant des enquêtes sur les forces de travail, les activités de production pour ses besoins propres sont écartées de la définition de l’activité économique.
R. R. Hussmanns, F. Mehran and V. Verma, Surveys of economically active population, employment, unemployment and underemployment : An ILO manual on concepts and methods, International of Labour Office, Geneva, 1990. — J.-M. Le Goff, N. Malpas, P. Vielle, Intégration de l’égalité des chances pour les femmes et les hommes dans les politiques de l’emploi et du marché du travail. Un inventaire critique des indicateurs statistiques en vue d’une évaluation des politiques de l’emploi et du marché du travail en termes de genre, Rapport pour la Commission européenne, DGV, Bruxelles, 1999.
Voir : Activité et travail — Enquête sur la population active (ESPA) — Taux d’activité, taux d’activité occupée et de chômage au sens du BIT.
Jean-Marie Le Goff
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Activité et travail
Le travail est une activité, mais toute activité n’est pas du travail. Quels sont les critères qui permettent de caractériser chacune de ces deux notions ? Ce n’est pas la nature de l’activité elle-même qui peut offrir des critères de partition. Il y a en fin de compte peu d’activités qui ne soient considérées comme travail par quelqu’un : jouer au football, déguster un grand cru… c’est du travail pour certains. Par ailleurs, ni le critère de l’effort, ni celui du plaisir n’offrent de base sérieuse de partition. On est dès lors conduit à considérer comme travail les activités qui sont socialement instituées comme telles, indépendamment de leur contenu. Cette position nous amène à chercher les critères qui sont utilisés dans notre société pour considérer une activité comme un travail. Deux observations :
— on tend à appeler travail l’ensemble des activités rémunérées et visant à la production de valeurs d’usage permettant de satisfaire des besoins ;
— on observe cependant une tendance croissante à utiliser ce terme pour définir toute activité rationnellement orientée vers un but ; à savoir une activité qui se caractérise par la mise en œuvre délibérée de techniques permettant d’atteindre un effet attendu avec le minimum de moyens, sans perte d’énergie, avec un rendement optimalisé des capacités de l’individu.
Ainsi, il semble bien que l’on utilise le terme “ travail ” pour un nombre croissant d’activités, ce qui montre une tendance à privilégier dans toute activité son orientation vers le but qu’est la production de biens ou de services. Cela exprime le développement et la domination idéologique de la production dans notre société.
On voit ainsi apparaître une coupure idéologique de plus en plus marquée entre le travail et le non travail, à laquelle correspond un véritable découpage social du temps : travail/non travail qui en vient à recouvrir l’ensemble des activités humaines.
R. J.-P. Fragnière, Maîtriser la division du travail dans les professions sociales et les professions de la santé, Réalités sociales, Lausanne, 1984.
Voir : Profession — Travail — Travail (Marché du)
jpf
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Activités de la vie quotidienne (AVQ)
Les activités de la vie quotidienne (AVQ) ou activités élémentaires sont se laver, s'habiller, se nourrir, aller aux toilettes et contrôler ses sphincters. Elles sont complétées par les activités instrumentales (AIVQ) comme utiliser le téléphone, faire ses courses, préparer le repas, entretenir le ménage, faire la lessive, utiliser les moyens de transports, prendre des médicaments, tenir son budget.
Les AVQ et AIVQ permettent de mesurer l'indépendance et l'autonomie de l'individu. L'indépendance est la capacité fonctionnelle à accomplir les AVQ. L'autonomie est la capacité à prendre des décisions, selon ses valeurs et à assumer les conséquences.
Une personne peut perdre son autonomie et/ou son indépendance. La perte est progressive ou immédiate, définitive ou provisoire, liée à la survenue d'incapacités fonctionnelles et cognitives. D'abord apparaissent des incapacités liées aux activités instrumentales puis élémentaires. Les causes sont d'ordres biologique (maladie, accident), psychique (maladie mentale), affectif (troubles de l'humeur), socio-environnemental (isolement).
L'incapacité d'accomplir les AVQ n'est pas sans conséquence pour l'individu et dans sa relation avec les autres. Il peut éprouver des sentiments de culpabilité et d'inutilité. Il appréhende l'intrusion dans son intimité et redoute l'éloignement des proches.
Dans la dépendance psychique, la personne, en général, est institutionnalisée, Le processus de régression s'enclenche, elle devient passive, n'a plus de rôle sauf celui de se laisser faire.
R. M. Personne, Soigner les personnes âgées à l'hôpital. La formation à la relation d'aide, Ed. Privat, Toulouse, 1991. — J.-N. Du Pasquier, A.-M. De Roulet, M. Usel, F. Comba, Les chemins de l'aide. Enquête auprès des personnes âgées dépendantes, Ed. Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Voir : Autonomie — Ergothérapie
Mireille Balahoczky
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Adaptation des prestations du 1er et du 2e piliers à l’évolution économique
Les objectifs assignés aux prestations, à savoir la couverture des besoins vitaux et le maintien du niveau de vie, présupposent, indépendamment du système de rentes choisi, que les rentes soient adaptées à l’évolution des conditions économiques.
Sur le plan général les diverses méthodes d’adaptation et leur mode d’action sont les suivantes :
Dynamisation totale
Les anciennes et les nouvelles rentes sont entièrement adaptées à l’évolution des salaires.
Dynamisation partielle
Les nouvelles rentes sont adaptées à l’évolution des salaires et les rentes en cours sont (entièrement ou au moins largement) adaptées à l’évolution des prix. De nombreuses caisses de pension solidement implantées appliquent ce système. Le niveau des rentes s’élève d’une génération à l’autre parallèlement à l’évolution des salaires (grâce à l’adaptation correspondante des nouvelles rentes). Au même moment, nouvelles rentes et rentes en cours sont traitées différemment.
Indice mixte (dynamisation selon le pourcentage moyen)
Les rentes — nouvelles et en cours — suivent l’indice mixte ; celui-ci est déterminé à 50 % par l’indice des salaires et à 50 % par l’indice des prix de la même année. Ce système est appliqué dans l’AVS.
Rentes en cours et nouvelles rentes sont traitées de la même manière : l’égalité de traitement est synchronique. La personne qui bénéficie d’une rente maximale touche la même rente qu’elle soit âgée de 100, 85 ou de 65 ans.
Le taux de remplacement s’amenuise de génération en génération, car même les rentes des nouveaux bénéficiaires ne suivent que pour moitié l’augmentation des salaires réels de la population active. Cette situation contribue certes à atténuer les problèmes de financement de l’AVS, mais peut aussi, un jour ou l’autre, aboutir à des lacunes importantes dans la couverture d’assurance.
Indexation pure et simple
Les rentes — nouvelles et en cours — suivent l’indice des prix. Rentes en cours et nouvelles rentes sont traitées de la même manière ; le taux de remplacement s’amenuise encore plus sévèrement de génération en génération, car les rentes ne suivent pas du tout l’augmentation des salaires réels. Il semble parfaitement injuste que les cotisations suivent l’évolution des salaires, alors que les parts desdites cotisations provenant de la hausse des salaires réels ne se répercutent pas sur le calcul des rentes.
R. A. Streit, “ L’adaptation des rentes — un sujet d’actualit頔, in : Sécurité sociale, No 2, 1996.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Article constitutionnel relatif aux éventualités vieillesse (retraite), survivants et invalidité — Prévoyance professionnelle — Trois piliers
Anton Streit
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Addiction
Terme anglais qui a passé dans le vocabulaire des professionnels français. Vient du latin : ad-dictus “ dit. ࠔ mot qui désignait les esclaves pour dette à Rome. Cette énonciation donnait à la fois une identité et un statut à l’homme qui la recevait en même temps qu’elle l’asservissait à son maître. Cette dynamique qui fait en quelque sorte se rejoindre les opposés la rapproche de la logique du pharmakon platonicien où l’“ On ne peut dans la pharmacie distinguer le remède du poison… ”. Concept qui a aussi trouvé sa place dans la théorisation des toxicomanies. Quant à “ l’addict ” qui se voit assujetti au nom d’un autre, il illustre de manière analogique l’enjeu psychosocial des conduites de dépendance.
La notion d’assujettissement quant à elle se retrouve dans le terme d’assuétude qui exprime la dépendance psychique et physique d’un “ toxicomane ” vis à vis de son/ses toxique/s (produits, comportements, représentations).
R. J. Derrida ; “ La pharmacie de Platon ”, in : La dissémination, Seuil, Paris, 1972. — S. Le Poulichet, Les addictions, PUF, Paris, 2000. — M. Reynaud, P.-J. Parquet, G. Lagrue, Les pratiques addictives. Usage, usage nocif et dépendance aux substances psychoactives, Odile Jacob, Paris, 2000.
Site Internet : www.infoset.ch
Voir : Alcoolisme — Dépendance — Toxicomanies
Gérald Thévoz
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Adoption
Action juridique qui consiste dans la création d’un lien de filiation entre un enfant et des adultes qui ne l’ont pas conçu. Cet acte juridique social et psycho-social doit servir avant tout les intérêts de l’enfant. L’enfant ne peut être adopté que sous certaines conditions légales (voir CCS, OCF 77 et loi sur les étrangers). Après la délivrance d’une autorisation d’accueil par une autorité compétente, le processus se poursuit par la recherche légale d’un enfant et son placement pendant 2 ans auprès de ses futurs parents. Après rapport positif par l’autorité désignée, l’adoption peut être prononcée. L’enfant acquiert le statut juridique d’un enfant légitime. En règle générale, ce sont les services sociaux habilités qui accompagnent les parents adoptifs durant la procédure d’adoption.
R. Code civil suisse, art. 264 et suivants.
Voir : Allocations familiales — Autorité parentale — Droit du placement d’enfants — Enfant à charge — Filiation (Droit de) — Placement familial — Protection de l’enfant
Jean Vallet
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Adultes (Éducation des)
L'expression Éducation des Adultes est un terme générique qui découle des pratiques d'animation socio-culturelle qui se sont développées depuis le début du siècle, et, plus systématiquement, dès la fin de la deuxième guerre mondiale. Les pratiques d'éducation des adultes désignent des programmes ayant pour accent principal la culture générale. Elles s'inscrivent dans un mouvement d'ouverture des institutions éducatives à une population plus large que celle qui a bénéficié d'une scolarité longue. C'est la raison pour laquelle il est souvent fait mention, à propos de l'éducation des adultes, de rattrapage ou de deuxième chance, voire, dans une perspective plus ambitieuse, d'éducation permanente. L'éducation des adultes a largement bénéficié du support de la vie associative et de l'engagement de pionniers et de bénévoles. La pluralité des orientations allait de pair avec des regroupements régionaux et nationaux, comme celui que constitue la Fédération Suisse pour l'Education des Adultes.
Au cours des dernières décennies, l'éducation des adultes a connu un déplacement de priorité. Les nécessités dues à la compétition économique mondiale, au chômage ainsi qu'aux besoins de qualification professionnelle et d'ajustement aux découvertes scientifiques et technologiques ont entraîné des efforts nombreux de perfectionnement à l'intérieur des entreprises ainsi que dans les administrations publiques. La formation continue a fait l'objet de mesures gouvernementales et de projets de loi portant principalement sur les modes de financement et les critères de qualité des programmes. Elle est devenue la version officielle et politique de l'éducation des adultes. Les organismes associatifs et privés, qui avaient largement participé au développement de l'éducation des adultes, ont ainsi dû se redéfinir en donnant une place plus importante à la dimension de transmission de connaissances qualifiantes ou même diplômantes. Les offres éducatives de l'Ecole Club Migros, qui occupe dans le marché de la formation des adultes en Suisse une place prépondérante, en font la démonstration. La professionnalité des formateurs est devenue une des conditions de crédibilité de l'offre, de même que la demande de consultation qui inscrit la formation continue en tant que facteur d'innovation dans les démarches de restructuration des entreprises.
Si l'éducation des adultes a répondu à des objectifs privilégiant, dans un premier temps, la culture générale et, dans un deuxième temps, la qualification professionnelle, dans une troisième voie, complémentaire aux deux précédentes, elle accorde de plus en plus d'importance au développement de l'autonomie personnelle, entendu aussi bien comme équilibre de vie que comme compétence sociale. La santé de même que la vie relationnelle font l'objet de nombreuses offres éducatives, pour les cadres, pour les parents, pour les personnes âgées.
Le terme éducation des adultes doit ainsi aujourd'hui être considéré comme une expression légèrement désuète, même si elle présente l'avantage de désigner, dans sa globalité, un champ de pratiques éducatives diversifiées, selon les clientèles concernées ainsi qu'en tenant compte de la pluralité d'âges, de contextes et d'appartenances sociales.
R. P. Besnard, B. Liétard, La formation continue, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1995. — P. Dominicé, M. Finger, L’éducation des adultes en Suisse, Pro Helvetia, Fondation Suisse pour la Culture, Information, 1990.
Voir : Formation continue — Instruction publique — Troisième âge (Université du)
Pierre Dominicé
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Affiliation obligatoire (Principe de l’)
Le principe de l’affiliation obligatoire à un régime de sécurité sociale est ancré dans le droit international et les droits nationaux. Il part de la constatation que les protections facultatives sont généralement délaissées par les plus défavorisés ; si elles sont subsidiées, elles accentuent alors les inégalités sociales. L’affiliation obligatoire permet d’assurer une protection effective à ceux qui peuvent en avoir besoin et d’éviter le problème des personnes touchées par une éventualité, qui ne se sont pas assurées et qui ne bénéficient pas de ressources propres suffisantes pour vivre. Elle rend possible la répartition du coût de la protection sur un cercle large de personnes. Elle permet d’appliquer le principe de la solidarité, aussi bien entre revenus qu’entre générations.
En Suisse, le principe a été longtemps débattu. Actuellement, parmi les protections légales, seules les indemnités journalières de maladie et de maternité restent facultatives.
R. P. Durand, La politique contemporaine de sécurité sociale, Dalloz, Paris, 1953, pp. 67-70.
Voir : Assurance (Principe de l’) — Champ d’application personnel — Sécurité sociale (Généralisation de la) — Universalité.
Pierre-Yves Greber
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Âge moyen
Phase de la vie entre 40 et 62/65 ans. Cette phase de la vie est caractérisée par le passage de l’adolescence à l'âge adulte et le départ des enfants du foyer parental. Elle débute avec la transition de la période de formation au début de la vie professionnelle (et parfois le mariage, mais c’est une transition moins systématique aujourd’hui) et se termine par la fin de la vie active et le passage à la retraite. Cette période est également souvent marquée par la vieillesse et la mort des parents
Voir : Cycle de vie — Génération — Génération sandwich
François Höpflinger
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Âgisme/âgéisme
Terme collectif désignant des préjudices et discriminations à l’encontre des individus en raison de leur âge, par analogie avec le racisme. Il peut s’agir de discriminations sur le marché du travail, en politique ou dans la société en général.
Voir : Racisme
François Höpflinger
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Aide à domicile àð Soins à domicile
Aide à la survie àð Réduction des risques (Aide à la survie)
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Aide mutuelle (Self-help)
On parle d aide mutuelle quand des personnes touchées par un même problème se mettent ensemble pour échanger leurs expériences, leurs échecs et leurs réussites, dans un but de soutien et de développement réciproques. Ces personnes vivent des situations comparables et en parler ensemble peut être d’une grande aide. Une des premières démarches de self-help a été celle des Alcooliques Anonymes ; il existe aussi des Narcotiques Anonymes. Il y a des groupes de personnes luttant ensemble contre l’obésité ou poursuivant une réadaptation après un infarctus cardiaque ; il en existe pour des personnes ayant souffert du cancer (femmes opérées d’un sein — mouvement “ Vivre comme avant ” — laryngectomisés, stomisés). Se sont développées aussi des entraides entre proches de patients, comme les parents dont un enfant souffre d’une tumeur maligne ou qui ont perdu un enfant ; ou encore de personnes battues/abusées, et aussi de personnes battantes/abuseurs. Ces groupes peuvent être accompagnés par des professionnels qui jouent un rôle d’écoute et de conseil, mais sans apporter un encadrement directif/paternaliste.
Voir : Action communautaire — Associations — Entraide — Solidarité — Travail social de groupe (TSG)
Jean Martin
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Aide sociale
Au début de ce siècle, l’assistance aux pauvres (ou assistance publique) était généralement considérée comme un mal nécessaire, sa connotation négative étant particulièrement affirmée. Pour tenter de dépasser cette image, on parle aujourd’hui d’aide sociale, voire d’assistance sociale, même si cette terminologie ne s’est pas encore imposée partout.
Ce secteur de la politique sociale relève de la compétence des cantons dans son application, mais est régi par des lois fédérales. L’article 48 de la Constitution fédérale indique que : “ Les personnes dans le besoin sont assistées par le canton dans lequel elles séjournent. Les frais d’assistance sont à la charge du canton de domicile ”. La loi fédérale du 24 juin 1977 sur la compétence en matière d’assistance des personnes dans le besoin définit aussi ce qu’elle entend par personnes dans le besoin : une personne est dans le besoin lorsqu’elle ne peut subvenir d’une manière suffisante ou à temps par ses propres moyens à son entretien et à celui des membres de sa famille qui partagent son domicile. La mise en œuvre de ces règles est très différente selon les cantons, voire les communes. Elle est fondée sur trois principes :
a) le principe de subsidiarité : l’aide sociale est une prestation d’urgence attribuée aux personnes qui ne sont plus en mesure de bénéficier d’autres formes de soutien, en particulier de la famille, du secteur privé ou des assurances sociales. Elle assume donc une fonction de subsidiarité. Elle se présente comme le dernier filet du système d’assurances sociales ; cela signifie que lorsque l’ensemble des prestations de ces assurances se révèlent insuffisantes pour libérer de la pauvreté, voire de la misère, il reste une dernière ressource à exploiter : l’aide sociale.
b) Le principe d’individualisation du besoin : l’aide sociale est consentie aux personnes nécessiteuses, quelles que soient les raisons qui les ont conduites dans cet état de besoin. L’aide est individualisée selon la situation personnelle du demandeur. Elle repose sur le principe de la preuve de l’indigence, c’est-à-dire sur la constatation d’un état d’incapacité de disposer du minimum vital en raison d’un niveau de ressources net insuffisant.
c) Le principe de contrôle : l’aide sociale est octroyée aux individus sous certaines conditions et dans le cadre de l’imposition de règles de comportement.
En règle générale, les cantons délèguent aux communes l’organisation de l’aide sociale, ce qui induit une grande diversité des modèles de mise en œuvre. Il existe cependant un organe central, la Conférence suisse des institutions d’assistance publique (CSIAP) qui établit des normes de l’aide sociale, des recommandations et des lignes directrices quant au principe de la garantie du minimum vital. Bien que tous les cantons soient membres de cette conférence, certains d’entre eux font preuve d’indépendance en adaptant les montants proposés aux conditions locales : ils sont parfois plus généreux ou plus restrictifs.
Le financement de l’aide sociale est effectué par le biais des impôts et des finances publiques et non pas par un pourcentage prélevé sur les salaires ou par des cotisations.
Actuellement, l’aide sociale connaît une importante mutation, en particulier en raison du nombre de plus en plus important de personnes qui sont contraintes à y faire recours.
R. F. Wolffers, Fondements du droit de l’aide sociale, Haupt, Berne, 1996. — Aspects de la sécurité sociale (ASS), Revue de la Fédération suisse des employés d’assurances sociales, No 3, 1997 (important dossier contenant de nombreuses indications techniques).
Voir : Don — Minima sociaux — Minimum d’existence (Droit au) — Revenu minimum cantonal d’aide sociale (RMCAS) — Revenu minimum d’insertion (RMI) — Revenu minimum de réinsertion (RMR) — Sécurité sociale (Architecture de la)
jpf
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Aide sociale (Statistique de l')
L'aide sociale, élément important de la politique sociale helvétique, est en constante interaction avec d'autres systèmes de prestations de la sécurité sociale. Les mutations sociales et économiques ainsi que l'accroissement des dépenses de la sécurité sociale appellent dans ce domaine des mesures nouvelles, répondant aux exigences d'une politique sociale moderne. A cet égard, il est essentiel de disposer d'informations fiables pour étayer les décisions politiques et leur exécution. Or le secteur de l'aide sociale souffre d'un grave déficit sur le plan de la statistique. Pour l'heure, aucune donnée n'est disponible au niveau national.
La création d'une statistique harmonisée des bénéficiaires de l'aide sociale est un défi de taille : les 26 lois cantonales, spécifiant la conception et l'organisation de l'aide sociale, présentent d'importantes variations. Il s'ensuit que d'un canton à l'autre les modes de prise en charge sont diverses. Ainsi, dans certains cantons les aides à la vieillesse, aux chômeurs en fin de droits et au loyer ne relèvent pas de l'aide sociale mais sont réglées par des lois spécifiques. De surcroît, les méthodes de saisie des bénéficiaires et des prestations varient fortement d'un canton à l'autre. C'est pourquoi l'élaboration d'une statistique des bénéficiaires et des prestations fournissant des informations comparables aux niveaux suisse et cantonal est hautement prioritaire dans le programme statistique de la Confédération. L'Office fédéral de la statistique (OFS), de concert avec les cantons et les communes, a le mandat de développer une statistique suisse de l'aide sociale. Celle-ci doit recenser l'effectif et la structure des bénéficiaires de l'aide sociale, tout comme des informations sur leur situation financière et les prestations reçues. La phase de réalisation de la statistique suisse de l'aide sociale a débuté en avril 2000.
R. OFS, Inventaire des prestations sociales individuelles liées au besoin allouées dans les 26 cantons de Suisse, état : 3e trimestre 1997, Etabli par Prognos SA (Bâle), sur mandat de l'OFS, Berne, 1998. (Sur papier et sur CD-ROM) — K. Wyss, “ Aide sociale : un pilier de la sécurité sociale ? Un aperçu des prestations sociales liées au besoin allouées en Suisse ”, in : Info : social. La sécurité sociale dans les faits, No 4, 2000. — OFS, La statistique suisse des bénéficiaires de l'aide sociale. Conception générale, OFS, Berne, 1997.
Site Internet : www.statistique.admin.ch
Voir : Aide sociale — Statistique sociale
Tom Priester
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Ajustement (Politiques d’)
Depuis le début des année 80, le Fonds monétaire international (F.M.I.) impose aux pays en voie de développement les plus endettés, des programmes dits d’ajustement qui visent à réduire leurs déséquilibres internes et externes : réduction du déficit budgétaire et maîtrise de l’inflation ; réduction du déficit commercial par la baisse des importations (liée à celle du pouvoir d’achat de la population) et l’accroissement des exportations favorisé, dans de nombreux cas, par des dévaluations “ compétitives ”. Les conséquences sociales de ces mesures sont le plus souvent brutales, particulièrement pour les plus démunis.
Voir : Fonds monétaire international
jpf
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Albert le Grand S.A.
À Fribourg, Albert le Grand S.A., diffusion de livres, a pris de nombreuses initiatives pour faire connaître la documentation sociale produite en Suisse latine. Il assure, entre autres, la présence en librairie des Éditions suivantes : Éditions Réalités sociales, Éditions I.E.S., Éditions Seismo, Éditions Del Val, les Cahiers de l'EESP, les Cahiers du C.E.P.S., etc. En outre, par sa présence dynamique au salon du livre de Genève, dans de nombreux colloques et réunions scientifiques, il contribue à faire connaître ces travaux à un public plus large. Il assure ainsi une réelle convergence entre les différents milieux qui s'attachent à produire de la documentation sociale en Suisse latine.
Site Internet : www.albert-le-grand.ch
Voir : Centre d’étude de la politique sociale (CEPS) — Réalités sociales (Éditions)
Sophie Barras Duc
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Alcoolisme
Définie sur le plan médico-somatique au milieu du XIXe siècle, la notion d'alcoolisme se superpose progressivement à celle - très ancienne - d'ivrognerie. Depuis, le terme d'alcoolisme a été repris par de nombreuses disciplines et désigne l'ensemble des conduites liées à l'alcool, aussi bien ses causes que ses conséquences. Solidement ancré dans notre culture (religion, histoire), l'alcool l'est aussi dans notre économie.
Aujourd'hui, l'abus et la dépendance de l'alcool - considérés comme une maladie - se doublent souvent de la consommation d'autres psychotropes (polytoxicomanie) ; par ailleurs, la tendance chez les spécialistes est de recourir à la même notion de dépendance pour tenter d'expliquer le recours à tout psychotrope. La grande tolérance à l'égard de la consommation d'alcool ne favorise pas la promotion d'une politique de santé publique.
Si les seuils codifiant les conduites d'alcoolisation distinguent l'usage, l'abus et la dépendance, la notion de consommation normale, ajustée sur la prescription sociale du produit, permet trop souvent de masquer des difficultés et rend difficile toute prévention. La consommation d'alcool reste une conduite majoritairement masculine ; parmi la population s'adressant aux dispositifs d'aide et de soins, on compte 3/4 à 2/3 d'hommes et 1/4 à 1/3 de femmes. Les conduites d'alcoolisation sont à appréhender dans leur complexité et l'on s'abstiendra de tout “ diagnostic ” avant d'avoir pris en compte - outre le recours au produit - ses déterminants et ses incidences sur les plans somatique, psychologique et social, de même, le traitement s'adressera à toutes ses dimensions.
R. A. Ehrenberg, “ Individus sous influences, alcool, drogues, médicaments psychotropes ”, in : Esprit, Paris, 1991. — Institut suisse de prévention de l'alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA), Chiffres et données 1999 sur l'alcool et les autres drogues, Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies, Lausanne, 1999. — L. Nadeau, Vivre avec l’alcool. La consommation, les effets, les abus, Les éditions de l’homme, Québec, 1990. — P. Fouquet, P. Malka, G. Vachonfrance, Précis d’alcoologie, Masson, Paris, 1986.
Sites Internet : http://www.alcoweb.com — http://www.drogues.gouv.fr
Voir : Abstinence — Alcoolisme et les toxicomanies (Groupement romand d’étude sur) (GREAT) — Dépendance — Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA) — Toxicomanies
Jean Zufferey
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Alcoolisme et les toxicomanies (Groupement romand d’études sur l’) (GREAT)
Fondé en 1964, le GREAT est une association réunissant près de 300 membres dont l’engagement professionnel est lié aux problèmes posés par les drogues légales et illégales.
Le GREAT, à travers sa Charte, défend trois principes essentiels :
a) Le respect de la personne confrontée à des problèmes d’addictions, y compris la responsabilité de ses dépendances.
b) La mise en œuvre de traitements diversifiés répondant à la multiplicité des demandes.
c) La mise sur pied aux niveaux fédéral, cantonal et communal d’une politique sanitaire et sociale préventive et non stigmatisante.
Le GREAT est actif dans l’étude et la recherche de solutions face aux problématiques complexes posées par les dépendances.
Pour cela, il se préoccupe :
— de proposer de la formation continue, du perfectionnement et des échanges aux intervenants du champ des dépendances,
— d’initier et de réaliser des projets de prévention,
— de prises de position et de publications.
Le GREAT collabore avec diverses instances publiques et privées aux niveaux suisse et européen.
Voir : Alcoolisme — Institut suisse de prévention de l alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA)  Formation continue  Santé publique (Office fédéral de la) (OFSP)  Toxicomanies
Gérald Progin
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Allocation d'étude àð Allocations familiales
Allocation d'insertion àð Revenu minimum cantonal d'aide sociale (RMCAS)
Allocation de maternité àð Maternité (Protection de la)
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Allocation de maternité vaudoise
C'est en juillet 1992 que le canton de Vaud a institué une allocation de maternité. Cette allocation est accordée en cas de naissance, mais également en cas d'adoption ou d'accueil en vue d'adoption d'un enfant de moins d'un an. L'allocation de maternité étant destinée aux familles à revenus modestes, elle est octroyée sous condition de revenu. En outre, il faut être domicilié depuis six mois dans le canton de Vaud pour y avoir droit.
Deux types de prestations sont octroyées : une allocation de base (Fr. 200.-) lorsque le revenu familial net est inférieur à la limite légale et une allocation complémentaire, si la mère perd, totalement ou partiellement, un gain qu'elle réalisait antérieurement et qui ne serait pas déjà compensé par des prestations d'assurance. L'allocation de base et, le cas échéant, l'allocation complémentaire sont accordées pour une période de six mois. Elles peuvent être maintenues durant un à six mois de plus si l'état de santé de la mère ou de l'enfant rend nécessaire la présence constante de la mère au foyer. Si l'enfant souffre d'une affection grave, l'allocation peut être prolongée une nouvelle fois durant une période supplémentaire de douze mois au plus.
Voir : Maternité (Protection de la)
Elie Benmoussa
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Allocation universelle
Le principe de l’allocation universelle — dite aussi “ revenu de citoyennet頔 ou “ revenu d’existence ”— est le suivant : une partie du revenu national est répartie entre tous les individus, de manière égalitaire et sans conditions de ressources, ni d’activités. La partie restante du revenu national serait encore distribuée comme rémunération du travail accompli et de l’épargne investie, et ceci pour d’évidentes raisons d’incitation et d’efficience économiques. L’allocation universelle n’est donc pas un nouveau système de sécurité sociale qui redistribue les revenus après coup : elle est un nouveau paradigme de la répartition primaire du revenu, qui considère possible et souhaitable la dissociation partielle du revenu perçu et du travail accompli ou du capital investi.
R. J.-M. Ferry, L’Allocation Universelle, les Éditions du Cerf, Paris, 1995. — P. Van Parijs, Real Freedom for All, Claredon Press, Oxford, 1995.
Site Internet : www.econ.ucl.ac.be/etes/bien/bien.html
Voir : Aide sociale — Minima sociaux — Minimum d’existence (Droit au) — Revenu (Garantie du) — Sécurité sociale (Théorie générale de la)
Martino Rossi
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Allocations familiales
L’instrument principal de la politique familiale helvétique est constitué par la juxtaposition hétéroclite d’un régime fédéral et de 49 régimes cantonaux d’allocations familiales. Leurs caractéristiques sont la disparité et l’absence de solidarité.
1. Illustrations de la disparité
Types d’allocations versées : treize cantons ne versent pas d’allocations de formation professionnelle, quinze cantons ne versent pas d’allocations de naissance, etc.
Catégories de bénéficiaires : seuls neuf cantons versent des allocations aux indépendants ; trois seulement versent des allocations aux personnes sans activité lucrative, etc.
Montant des allocations : Le minimum légal pour un enfant varie dans un rapport de 1 à 2.5 suivant les cantons et la situation de l’enfant.
Progressivité des allocations : Si la plupart des cantons attribuent des allocations uniformes pour chaque enfant, d’autres en varient le montant en fonction de l’âge ou du nombre d’enfants.
Adaptation du montant des allocations : Seuls quelques cantons ont prévu l’indexation des allocations au coût de la vie.
Limites d’âge : Les limites d’âge pour l’attribution de l’allocation varient de 15 à 18 ans.
Caisses de compensation : La plupart des caisses de compensation possèdent chacune leurs propres caractéristiques quant à leur mode de financement, les types de caisses qui leur sont affiliées, leur structure administrative, leur zone d’implantation, leur taux de cotisation, le montant de leurs allocations, etc.
La présence de cette disparité entraîne une absence de solidarité à plusieurs niveaux.
Entre cantons : Pour le versement d’une allocation de base d’un montant comparable, les employeurs de deux cantons voisins doivent cotiser en moyenne dans un rapport de 1 à 2.5.
Entre professions : Les taux de cotisation varient de 0.2 à 5 % des salaires entre les différentes professions. En ce qui concerne le montant réel des allocations versées, il varie dans un rapport d’environ 1 à 3.
Entre catégories socioprofessionnelles : De manière générale, les indépendants et les personnes sans activité lucrative, telles les mères au foyer, ne bénéficient pas des allocations.
Entre employeurs : Près de 10 000 entreprises versent directement des allocations familiales à leurs salariés, sans passer par l’intermédiaire d’une caisse de compensation, c’est-à-dire qu’elles se dérobent ainsi à toute forme de solidarité.
Entre actifs à temps plein et à temps partiel : Le montant de l’allocation est généralement réduit en fonction du taux d’activité. Seuls quelques cantons ont prévu d’assouplir cette règle, les allocations étant versées intégralement lorsque la personne salariée, assumant seule la charge d’un ou de plusieurs enfants, ne peut exercer son activité qu’à temps partiel en raison de ses obligations familiales. Dès lors, par exemple, de nombreuses femmes divorcées, mères de familles monoparentales travaillant à temps partiel, ne touchent qu’une fraction de l’allocation.
Entre secteur privé et secteur public : Dans sept cantons, les administrations cantonales ne sont pas assujetties à la loi, alors que trois d’entre eux étendent cette exception aux administrations communales.
On constate donc un manque de solidarité entre les différentes régions du pays, entre les catégories socioprofessionnelles, entre actifs et non actifs, entre enfants suisses et étrangers, etc. Cette absence de solidarité se vit à l’échelle du pays par le fait des disparités cantonales, mais aussi à l’échelle des cantons eux-mêmes, des professions et même à l’intérieur de celles-ci.
R. P. Gilliand, F. Cuénoud, “ Les 4 temps de la politique familiale ”, in : Idéaux et débats, Éditions Pro Juventute, Zurich, 1993. — P. Gilliand et F. Cuénoud, Politique familiale et budget social de la Suisse, OFS, Berne, 1994. — F. Cuénoud, Allocations familiales en Suisse de 1943 à 1961. De l’espoir à l’enlisement. Mise en perspective pour 1995, Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Voir : Allocations familiales (Caisses d’) — Famille (Politique de la) — Famille (Article constitutionnel sur la protection de la) — OFAS (Attributions de l’)
François Cuénoud
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Allocations familiales (Caisses d’)
À l’origine, certains employeurs versaient spontanément les allocations familiales aux pères de famille nombreuse de leur personnel. Pourtant, rapidement, le patronat s’est aperçu que de telles pratiques désavantageaient, de fait, ces employeurs pionniers en termes de concurrence. Se sont dès lors constituées les premières caisses d’allocations familiales, organisées sur une base professionnelle, instituant entre elles une compensation et regroupant les employeurs d’une branche économique au niveau d’une région ou d’un pays.
Aujourd’hui, il existe en Suisse plus de 800 caisses d’allocations familiales. La plupart de ces caisses possèdent leurs propres caractéristiques quant à leur mode de financement, leur structure administrative, leur zone d’implantation, leur taux de cotisation, le montant des allocations versées, etc.
On peut distinguer les caisses publiques (caisses cantonales) des caisses privées. Ces dernières, de nature professionnelle, pratiquent soit la compensation sur le plan suisse, soit sur le plan régional. Il existe également, dans le canton de Vaud, des caisses dites “ caisses d’entreprise ” L’appellation de “ caisses de compensation ” est ici usurpée, car il s’agit en fait d’entreprises versant elles-mêmes les allocations à leur personnel.
R. P. Gilliand et F. Cuénoud, Politique familiale et budget social de la Suisse, OFS, Berne, 1994. — F. Cuénoud, Allocations familiales en Suisse de 1943 à 1961. De l’espoir à l’enlisement. Mise en perspective pour 1995, Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Voir : Allocations familiales — Famille (Politique de la) — OFAS (Attributions de l’) — Famille (Article constitutionnel sur la protection de la)
François Cuénoud
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Aménagement du territoire
L’aménagement du territoire peut se concevoir de plusieurs manières : un modèle d’organisation pour un territoire donné, une procédure administrative de coordination, une politique publique avec des instruments comme le zoning et le règlement de construction, une procédure de décision. Toutes ces définitions ont leur légitimité et montrent que l’aménagement peut avoir plusieurs finalités selon les points de vue : le propriétaire ou le locataire, l’autorité communale ou l’administration cantonale, l’agriculteur ou l’entrepreneur. Pour notre part, l’aménagement est une politique publique dont l’objet est à la fois la médiation des conflits liés à l’utilisation du sol et le régime de l’affectation du sol. Il a donc une dimension à la fois technique et politique.
Sous l’angle technique, l’aménagement tient compte de la législation fédérale et cantonale mais aussi de critères qui visent à affecter le sol et à autoriser des constructions conformément à des besoins : par exemple, mettre en zones agricoles les terrains de qualité et appropriés pour les activités de l’agriculture, concevoir des implantations d’équipements publics en fonction de l’accessibilité et des transports.
Mais la décision en aménagement est conditionnée par des choix politiques effectués par les autorités comme par exemple le canton ou la commune. À cela s’ajoute la prise en compte de la propriété privée qui est garantie par la Constitution fédérale. On parle alors de pesée d’intérêts où tous les acteurs sont égaux, en sachant bien que certains le sont plus que d’autres !
L’aménagement du territoire n’a généralement pas de préoccupations sociales. Il s’intéresse surtout aux activités, à l’habitat, aux déplacements, aux espaces de loisirs. Mais autant dire, qu’indirectement, les choix d’aménagement ont des impacts sociaux. Privilégier des zones d’habitat collectif ou de villas détermine de manière étroite le type de vie sociale d’une localité ; choisir de réaliser des équipements d’accueil pour les jeunes ou pour les personnes âgées donne un profil à une commune.
Ces exemples montrent à l’évidence que l’aménagement du territoire et la politique sociale sont très imbriqués. Aussi, les démarches d’aménagement — la manière d’élaborer un plan ou de concevoir et de réaliser un équipement public — sont-elles déterminantes car elles permettent d’associer ou d’exclure des acteurs aux choix politiques. C’est ainsi que se joue l’articulation entre politique sociale et politique d’aménagement du territoire.
R. L. Bridel, Manuel d’aménagement du territoire pour la Suisse romande, volume I, Georg, Genève, 1996. — L. Bridel, Manuel d’aménagement du territoire pour la Suisse romande, volume II, Georg, Genève, 2000. — S. Decoutère e. a., Le management territorial : Pour une prise en compte des territoires dans la nouvelle gestion publique, Presses Polytechniques Fédérales et Universitaires Romandes, Lausanne, 1996.
Voir : Logement (Politique du) — Office fédéral du logement (OFL) — Politique sociale
Michel Rey
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Analphabétisme àð Illetrisme
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Analyse de tendances
L analyse de tendances procède à une observation systématique des formes de développement que connaît un secteur de la vie sociale : par exemple, le système d éducation ou l action sociale. Elle représente une forme de prise de conscience qu’opère la société sur elle-même en répondant à la question : où allons-nous ?
Dans le secteur de l’action sociale, l’opération pourrait consister à observer dans quelle mesure les groupes sociaux sont en situation de vivre des valeurs que l’on peut considérer comme fondamentales telles que, par exemple : l’égalité des droits entre hommes et femmes, la liberté de pensée, le droit à un minimum vital décent. Notons que ces valeurs sont définies par un processus de négociation sociopolitique et que, dans ces conditions, elles sont marquées par un certain dynamisme ; périodiquement, elles peuvent faire l’objet de réinterprétations.
Ainsi, l’analyse de tendances remplit deux fonctions. Dans le secteur de l’action sociale, elle peut, d’une part, apprécier quels sont les buts qui sont atteints et détecter les effets inattendus et non souhaités, d’autre part, elle a une fonction prospective en proposant des mesures susceptibles de favoriser la réussite des objectifs poursuivis, voire de corriger les erreurs détectées à temps.
R. D. Clerc, e. a., La crise, Syros, Paris, 1983. — A. Gorz, Adieux au prolétariat, Galilée, Paris, 1980. — K. Weber, Trendberichterstattung Sozialpolitik, Schweizerischer Wissenschaftsrat, Bern, 1985.
Voir : Détection avancée (en politique de la recherche)
jpf
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Animateur àð Animation socioculturelle
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Animation en établissements gériatriques
  Il faut penser autant en terme de qualité de vie que de qualité de soins  , Prof. Kunzmann, gériatre.
L animation, c est avant tout favoriser un art de vivre. C est un état d esprit, une culture d’entreprise qui favorise dans tous les secteurs de l’établissement la communication, la convivialité, la qualité de vie. Elle doit imprégner l’institution, être tangible, par la décoration, la musique, la présentation des plats, l’attitude du personnel, etc.
Face à la dépression de désinvestissement ou au syndrome de glissement, si fréquent chez les personnes âgées, il faut réinventer la notion de plaisir, d’humour, d’art de la table et de sens de la fête, la vie tout simplement !
Une ou plusieurs personnes ressources, ayant du talent, de l’imagination et de la créativité sont nécessaires comme ferments ou stimulateurs. Dès lors, peuvent émerger des activités variées évitant le “ mourir d’ennui ”. Au-delà, la créativité : les personnes âgées ont prouvé leurs ressources, leur talent, leur liberté et leur bonheur à retrouver un sens à leur vie.
“ Créer, en effet, c’est exister, se situer hors de la relation pathologique, hors de l’institution et de ses normes. L’acte de création est source de plaisir : c’est ce qui permet à toute personne de se libérer, se révéler, se restaurer. ” René Laforestrie.
R. “ Gérontologie et société. Animation : intégration, participation ? ”, in : Cahiers de la Fondation nationale de gérontologie, No 66, Paris, 1993. — R. Laforestrie, L’âge de créer, Centurion, Paris, 1991.
Voir : Action communautaire — Animation socioculturelle — Bénévolat — Gérontologie — Home/Établissement médico-social (EMS) — Retraite (Âge de la)
Jean-Daniel Pochon
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Animation socioculturelle
Le champ de l’animation socioculturelle recouvre l’ensemble des initiatives de groupe ou de collectivité visant par l’emploi de méthodes et de techniques appropriées à la réappropriation des différents aspects de la vie quotidienne et de l’environnement.
Pendant de nombreuses années, et particulièrement en Suisse, on a limité le champ de l’animation aux activités de loisirs destinées à l’enfance et à la jeunesse dans une perspective de prévention de la délinquance et d’intégration.
De nombreuses expériences visant à l’émancipation de groupes et de collectivités se sont développées dans des domaines aussi divers que la culture, l’habitat, la santé, l’environnement et le développement urbain ou régional. D’autres expériences concernent des populations spécifiques, telles que les personnes âgées, les chômeurs, les requérants d’asile, les habitants d’un quartier.
La promotion de la fonction d’acteur social, de même que le renforcement du lien social constituent des priorités de l’animation socioculturelle.
La professionnalisation de l’animation reste un exercice difficile. Les animateurs sont presque exclusivement employés d’associations ou de fondations et rares sont les collectivités publiques qui les engagent. Toutes les enquêtes mettent en évidence le fait que les animateurs considèrent eux-mêmes l’animation comme une étape dans une carrière professionnelle.
R. P. Besnard, Animateur socioculturel, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1980. — M. Simonot, Les animateurs socioculturels, PUF, Paris, 1974. — À la découverte de l’animation socioculturelle en Suisse, mandats, moyens et réalisation, Symposium de l’animation socioculturelle, à Bienne, Pro Helvetia, Zurich, 1992.
Voir : Action communautaire — Animation en établissements gériatriques — Associations — Écoles supérieures de travail social et hautes écoles spécialisées (Conférence suisse) (SASSA) — Hautes Écoles Spécialisées (HES) — Travail social
Jean-Marc Genier
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Apprentissage
On appelle “ apprentissage ” la formation duale faite simultanément en entreprise et dans une école professionnelle (1 à 2 jours par semaine) ou la formation faite à plein temps dans une école de métier, d'arts appliqués ou de commerce (ces dernières sont essentiellement situées en Suisse latine). L'apprentissage dure entre deux et quatre ans. La maturité professionnelle, qui ouvre la voie vers les Hautes écoles spécialisées (HES), existe depuis 1993.
La première loi sur la formation professionnelle date de 1930. Pendant près de 60 ans, le système suisse de formation professionnelle a été particulièrement figé. Depuis le début des années 1990 cependant, suite aux évolutions technologiques et aux nécessités imposées par la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’Union européenne, ce système est en pleine mutation.
La compétence fédérale en matière d'apprentissage était limitée par la Constitution fédérale de 1874, mais elle a été élargie avec l’adoption de la nouvelle Constitution en avril 1999. Désormais, l’article 63 autorise le Parlement à légiférer sur l’ensemble de la formation professionnelle. Pour répondre à cette nouvelle compétence, un projet de nouvelle loi sur la formation professionnelle a été proposé par le Conseil fédéral en juin 2000 et va être discuté au Parlement. Elle est conçue de manière à regrouper dans une seule base légale l'ensemble de la formation professionnelle, à l'exception du secteur tertiaire. Les formations du domaine de la santé, du travail social et des arts qui relevaient jusqu'à présent de la compétence des cantons, ainsi que les formations des domaines de l'agriculture et des forêts seront également soumises à cette nouvelle loi. Mais, dans l’attente de son adoption, c’est la loi fédérale sur la formation professionnelle (LFPr) du 19 avril 1978 qui est en vigueur.
L’apprentissage est régi depuis 1998 par un office spécifique, l’Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie (OFFT). Il y a environ 300 professions réglementées, permettant d'obtenir un certificat fédéral de capacité (CFC). Différents nouveaux modèles de formation sont en cours depuis la fin des années 90, soit modifiant les concepts de base de la formation duale (par exemple dans le domaine du commerce), soit visant l’élargissement des métiers (dans l’hôtellerie par exemple).
On compte 161 707 personnes en apprentissage en 1998, dont 42 % de femmes. La participation à la formation professionnelle est en baisse relative depuis le milieu des années 80.
Les disparités de participation à la formation professionnelle sont considérables : parmi les Suisses alémaniques de sexe masculin terminant l'école obligatoire, trois quarts entament encore aujourd'hui une formation professionnelle ; les jeunes filles habitant en Suisse romande et au Tessin sont à peine la moitié à être dans ce cas. En ce qui concerne l’égalité des chances, on relève que les femmes font des formations plus courtes et choisissent moins de professions que les hommes et que, de manière générale, les personnes de nationalité étrangère occupent une place inférieure dans le système de formation.
Différents programmes nationaux de recherche ont été consacrés récemment à la formation professionnelle. Ainsi, le programme national de recherche No 43 du FNRS, “ Formation et emploi ”, qui a débuté en 1999, a pour but de mettre en lumière les relations entre la formation et l'emploi. Auparavant le PNR No 33, “ Efficacité de nos systèmes de formation ”, mis au concours en 1991, avait permis de clarifier une série de points ignorés jusque-là, notamment en ce qui concerne le coût de la formation en apprentissage pour les entreprises.
R. A. Borkowsky, P. Gonon, La formation professionnelle en Suisse : évolution de la participation et nouveaux défis, OFS, Berne, 1996. — S. Hanhart, H.-R. Schultz, La formation des apprentis en Suisse. Coûts et financements, Delachaux et Niestlé, Lausanne et Paris, 1998. — R. Lischer, Intégration : une histoire d'échecs ? Les enfants et les adolescents étrangers face au système suisse de formation, OFS, Berne, 1997. — OCDE, Regards sur l’éducation. Les indicateurs de l’OCDE, OCDE, Paris, 2000. — J.-P. Tabin, Formation professionnelle en Suisse. Histoire et actualité, Réalités sociales, Lausanne, 1989.
Site Internet : www.admin.ch/bbt/BBTBBF.HTM, site de la section formation professionnelle de l’OFFT.
Voir : Formation continue — Jeunesse— Orientation scolaire et professionnelle —Politique de la Jeunesse
Jean-Pierre Tabin
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Arrière-grand-parentalité
Plutôt rare autrefois, l’arrière-grand-parentialité implique l’existence de quatre générations d’une même famille en vie simultanément. Au vu de l’augmentation de l’espérance de vie au cours de ces dernières décennies, elle gagne progressivement en importance et aujourd’hui les familles de quatre, voire (plus rarement) cinq générations sont de plus en plus fréquentes. En Suisse toutefois, la fondation d'une famille est traditionnellement tardive, ce qui réduit l'augmentation du nombre des arrière-grands-parents.
Voir : Espérance de vie
François Höpflinger
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Article constitutionnel relatif aux éventualités vieillesse (retraite), survivants et invalidité
La Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 contient trois articles concernant la protection relative aux pensions (vieillesse, survivants, invalidité), à savoir les art. 111, 112 et 113 Cst. Ces dispositions ont remplacé l’art. 34quater a. Cst qui avait été adopté en 1972. Si la forme est modifiée, le contenu reste le même.
La protection demeure conçue selon une architecture à trois étages (ou piliers) : un régime public, des régimes professionnels, des protections individuelles. Elle est destinée à durer. La Confédération, acteur principal, prend des mesures, veille à l’équilibre et prévoit des exonérations fiscales (art. 111 Cst). Cette architecture est fondamentale : elle s’oppose aussi bien à une solution qui serait entièrement publique, qu’à une privatisation du domaine des pensions.
La Constitution, à l’art. 112 Cst, fixe un cadre et des principes valant pour le régime public de pensions, soit l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité (AVS/AI). Ce régime repose sur une assurance sociale obligatoire, de conception universelle (protection de l’ensemble de la population ; cf. l’art. 41 al. 2 Cst), qui doit couvrir les besoins vitaux. L’indexation des rentes, au moins à l’évolution des prix, est prévue. Le principe de l’intégration des personnes handicapées et du soutien des personnes âgées et des survivants a également un rang constitutionnel. Des règles concernent le financement (cotisations et subventions). Dans ce domaine, c’est la Confédération qui légifère : le droit est fédéral, impératif et exhaustif.
La Constitution, à l’art. 113 Cst, fixe un cadre et des principes valant pour les régimes complémentaires de pensions, soit la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité. Le texte prévoit que la prévoyance professionnelle est obligatoire pour les salariés, la loi pouvant prévoir des exceptions ; la législation actuelle (LPP) ne semble pas en harmonie avec cette règle : le montant dit de coordination exclut en effet les petits salaires et écarte pratiquement du régime obligatoire la moitié des travailleuses. Le but de la protection, compte tenu des prestations du régime de base AVS/AI, réside dans le maintien du niveau de vie antérieur, “ de manière appropriée ”. Des règles concernent l’obligation de l’employeur d’assurer ses salariés, l’accès facultatif des indépendants (éventuellement obligatoire), le financement (cotisations). La Confédération légifère également dans ce domaine, mais sous forme de normes minimales : il y a donc place pour une autonomie des caisses de pensions (institutions de prévoyance) et pour une prévoyance professionnelle surobligatoire.
La prévoyance individuelle est encouragée par des mesures fiscales et par une politique facilitant l’accession à la propriété (art. 111 Cst).
Ce type d’architecture à trois étages est devenu un élément de convergence spontanée en Europe ; en effet, les trois formes de protection ont des qualités complémentaires.
R. H.P. Tschudi, Die neue Bundesverfassung als Grundlage des Sozialversicherungsrechts. Schweizerische Zeitschrift für Sozialversicherung und berufliche, Vorsorge (SZS), 2001, pp. 63 ss.
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Prévoyance professionnelle — Protection sociale (Articles constitutionnels sur la) — Sécurité sociale (Architecture de la) — Trois piliers — Universalité
Pierre-Yves Greber
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Asile (Loi sur l’)
Si la Suisse a rapidement adhéré à la Convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951 et à son Protocole additionnel du 31 janvier 1967, ce n’est qu’en 1973 qu’une motion a demandé au Conseil fédéral de donner à la politique d’asile une base juridique sûre en droit interne. Un projet est présenté le 31 août 1977, la Loi sur l’asile est adoptée par le Parlement le 5 octobre 1979 et entre en vigueur le 1er janvier 1981 (Recueil systématique 142.31).
Ce qui marque certainement cette législation est l’étonnante fréquence de ses modifications. En effet, à peine la loi était-elle en application que le Parlement la révisait en 1983. Puis les révisions se sont succédé en 1986, 1988, 1990 et 1994. En 1998, une refonte totale a été adoptée par les Chambres fédérales, avant qu’une nouvelle révision ne soit soumise à consultation en 2001 ! Ce phénomène est assez rare dans notre pays et il s’explique en large partie par le caractère de plus en plus passionné qu’a pris le débat sur la politique d’asile.
Il faut souligner que la définition du réfugié n’a presque pas varié depuis 1979. L’article 3 LAsi reprend la notion de la Convention de Genève en affirmant que sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l’être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. Sont notamment considérés comme de sérieux préjudices la mise en danger de la vie, de l’intégrité corporelle ou de la liberté, de même que les mesures qui entraînent une pression psychique insupportable. Il y a lieu de tenir compte des motifs de fuite spécifiques aux femmes.
Par contre, ce sont les aspects liés à la procédure d’asile qui ont pris une importance croissante : obligation de déposer la demande dans un centre d’enregistrement, obligation de collaborer sous peine d’irrecevabilité de la demande, audition sur les motifs d’asile organisée par les cantons, possibilité à l’autorité de retirer l’effet suspensif en cas de recours, etc. On a également multiplié la possibilité de rendre des décisions de non-entrée en matière suivie de l’exécution immédiate du renvoi, notamment lorsqu’une personne provient d’un “ pays exempt de persécutions ” (actuellement : Albanie, Bulgarie, Gambie, Ghana, Inde, Lituanie, Mongolie, Roumanie, Sénégal).
Après l’enregistrement de sa demande, le requérant d’asile est attribué à un canton qui organise une audition approfondie. L’Office fédéral des réfugiés statue en première instance, sur dossier dans 80 % des cas ; il peut ordonner une audition complémentaire, ainsi que d’autres mesures d’instruction (expertise de langue, analyse de documents, enquêtes dans le pays d’origine). En cas de décision négative, il n’existe qu’une seule voie de recours, auprès de la Commission suisse de recours en matière d’asile. Comme la loi ne reconnaît pas au requérant un droit subjectif à l’asile, il n’y a aucun contrôle judiciaire des décisions de l’administration.
Soulignons que la loi interdit au demandeur de travailler pendant les 3 premiers mois de son séjour en Suisse, une aide sociale minimale (hébergement, entretien, argent de poche) étant dispensée par les structures cantonales. Remarquons enfin que l’on prélève systématiquement les empreintes digitales de chaque requérant dès qu’il s’annonce à l’autorité, afin de permettre des comparaisons informatiques avec les pays limitrophes.
R. M. Gattiker, La procédure d’asile et de renvoi, OSAR, Berne, 1999.
Voir : Asile (Politique d’) — Asile (Requérant d’) — Étrangers (Politique à l’égard des) — Exil — Office fédéral des réfugiés (ODR) — Réfugié
Christophe Tafelmacher
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Asile (Politique d’)
Pendant les 1960-1970, la politique d’asile de la Suisse s’est inscrite dans l’affrontement des deux blocs au niveau international. Ainsi, les réfugiés fuyant les régimes communistes ont trouvé un accueil généreux et l’on se préoccupait plutôt des problèmes liés à leur intégration. La procédure d’examen était relativement simple et l’octroi d’asile la règle, à l’exception des ressortissants de pays africains, dont seulement 33 % étaient admis dans les années 1970.
Cette politique a évolué depuis le début des années 1980, marquées par une augmentation de demandeurs fuyant le plus souvent des États avec lesquelles la Suisse avait de bons rapports (Chili, Zaïre, Turquie, Sri Lanka, etc.). Peu après l’entrée en vigueur de la loi sur l’asile en 1981, des voix ont dénoncé les “ faux ” réfugiés, ou encore les réfugiés “ économiques ”, qui seraient venus “ profiter du bien-être helvétique ”. Le taux d’acceptation des demandes a fortement chuté pour arriver à son seuil le plus bas en 1990-1991 (environ 4 % d’octroi d’asile). Il est remonté ensuite, oscillant entre 5 % et 10 %. Le débat politique s’est ainsi déplacé de l’intégration des réfugiés reconnus au traitement des demandeurs d’asile.
La pratique des autorités se définit comme restrictive et l’on a affirmé officiellement que la politique d’asile était une politique de renvoi et de dissuasion. Dans ce contexte, le Parlement a souvent modifié la législation, octroyant un pouvoir d’appréciation de plus en plus large à l’administration. Face au retard accumulé par celle-ci dans le traitement des demandes au début des années 1980, ces diverses révisions ont invoqué le besoin d’accélérer la procédure. Cet objectif est en grande partie atteint aujourd’hui, mais au détriment des candidats réfugiés qui doivent affronter nombre de mesures policières ou discriminatoires, comme les décisions de non-entrée en matière avec renvoi immédiat, la prise systématique des empreintes digitales, l’interdiction de travailler, les normes d’aide sociale inférieures aux minima de la CSIAS, etc.
Dans les années 1990, la figure du réfugié est associée de plus en plus souvent à celle du délinquant. Réclamées par les autorités zurichoises en prise avec les scènes ouvertes de la drogue, les mesures de contrainte dans le droit des étrangers sont alors adoptées en 1993 par le Parlement, permettant d’emprisonner jusqu’à 12 mois des personnes pour de purs motifs administratifs.
Notons que, depuis 1992, l’Office fédéral a octroyé des dizaines de milliers d’admissions provisoires à des personnes fuyant les guerres civiles en Somalie, Angola, Afghanistan et Yougoslavie. Ce statut écarte l’asile, mais constate le caractère inexigible de l’exécution du renvoi. Ces “ réfugiés de la violence ” suscitent des discussions visant à modifier la définition du réfugié figurant dans les Conventions internationales. Des dispositions particulières ont également été introduites dans le cadre de la révision totale de la loi sur l’asile adoptée en 1998.
R. M.-C. Caloz-Tschopp, A. Clevenot, M.-P. Tschopp, Asile, violence, exclusion en Europe, histoire, analyse, prospective, Genève, 1994. — A. Maillard, C. Tafelmacher, “ Faux Réfugiés ” ? La politique suisse de dissuasion d’asile 1979-1999, Éditions d’En Bas,.Lausanne, 1999.
Voir : Asile (Loi sur l’) — Asile (Requérant d’) — Croix-Rouge suisse — Étrangers (Politique à l’égard des) — Normes CSIAS — Office fédéral des réfugiés — Réfugié
Christophe Tafelmacher
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Asile (Requérant d’)
Terme désignant une personne persécutée à la recherche d’asile, de protection. Dès les années 80, alors que se constitue la “ forteresse européenne ” face aux réfugiés, apparaît une catégorie socio-administrative qui devient juridique, celle de requérant d’asile. On y trouve les personnes en attente d’une décision d’octroi d’asile et aussi beaucoup de personnes victimes de persécution mais qui n’entrent pas dans les critères admis par le droit national et international (femmes, déserteurs, réfugiés des nouvelles formes de violence généralisée). C’est un statut provisoire d’attente avec des restrictions des droits fondamentaux et sociaux, avec la crainte d’expulsion générant insécurité, angoisse (Arendt).
R. Ch. Hausammann, Les femmes victimes de persécution et la notion de réfugié, Bureau de l’Égalité, Berne, 1992. — J.-C. Hataway, The law of Refugee Status, Éditions Butterworths, London, 1991. — Ligue Suisse des droits de l’homme, La forteresse européenne et les réfugiés, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1985. — H. Arendt, “ Nous autres réfugiés ”, in : La tradition cachée, Éditions Ch. Bourgois, Paris, 1976, pp. 57-77.
Voir : Asile (Loi sur l’) — Asile (Politique d’) — Croix-Rouge suisse — Étrangers (Politique à l’égard des) — Exil — Office fédéral des réfugiés (ODR) — Réfugié — Regroupement familial
Marie-Claire Caloz-Tschopp
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Assimilation àð Acculturation
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Assistance de la parenté (Devoir d )
En vertu du droit de la famille, l obligation d entretien incombe, prioritairement, aux père et mère, ainsi qu au conjoint. Par ailleurs, les parents en ligne directe et, sous certaines conditions, les frères et sœurs, sont tenus de se fournir mutuellement une assistance lorsque, à défaut, ils tomberaient dans le besoin. Le Code civil parle de “ dette alimentaire ”. Cette dernière est prioritaire par rapport à l’obligation de la collectivité publique d’assister les citoyens tombés dans le besoin. En raison de l’évolution des conceptions dans ce domaine, et du fait que les relations entre parents sont devenues moins étroites, le devoir d’assistance est, aujourd’hui, controversé. De nombreuses lois cantonales d’aide sociale restreignent, du reste, sa portée. Néanmoins, en tant qu’institution de droit fédéral, elle peut continuer à jouer un rôle important.
Voir : Aide sociale — Pensions alimentaires (Avance et recouvrement) — Prestations complémentaires (PC)
Béatrice Despland
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Assistance éducative àð Enfance (Politique de l')
Assistance publique àð Aide sociale
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Assistant social
Attend-on d un assistant social qu il soit capable d être social ? L assistant social appartient à une entité professionnelle : le Travail social. Celui-ci peut être défini non comme une science, mais comme un usage : par l’agencement de savoirs pratiques, construits en interaction avec des terrains et des champs théoriques diversifiés.
L’assistant social exerce au nom de la collectivité, un service public de solidarité à l’égard des personnes, des groupes sociaux, concernés par un processus de désocialisation, de disqualification, voire d’exclusion. Il se situe sur une passerelle : intermédiaire entre les individus et les lois, médiateur entre la population et les institutions.
Attend-on d’un assistant social qu’il soit capable d’assister ? Entre relation rationnelle et solidarité relationnelle, la fonction de l’assistant social consiste à instrumenter la relation à un client (individu, famille, groupe), par la fourniture de prestations de service (alliant compétence et éthique). Celles-ci sont définies par des intentions de réparation et par des intentions de développement social.
Par sa connaissance pratique des situations de précarité, l’assistant social peut refléter aux instances de gestion du social, l’évolution des problématiques exigeant un aménagement de la législation, en vue d’une justice sociale opérationnalisée selon un impératif d’équité et de réciprocité.
L’assistant social agit comme promoteur du lien social et de la citoyenneté. La mise en œuvre de son rôle tend à contribuer au maintien et au renforcement de la cohésion et de l’harmonie sociale. L’action de l’assistant social s’articule aux modes d’élaboration et aux significations du lien social opérant dans une collectivité [rapports de communauté (Gemeinschaft) ; rapports de société (Gesellschaft)]. L’objet privilégié de l’assistant social peut se configurer dans une perspective : la compensation et la prévention des insuffisances et des déséquilibres entravant la participation à la société.
R. O. Taramarcaz, Les fondements de la sécurité sociale en Suisse, Enjeux, Fully, 1997. — O. Taramarcaz, L’étranger familier, Enjeux, Fully, 1997.
Voir : Justice sociale — Lien social — Solidarité — Travail social — Travailleurs sociaux (Formation des)
Olivier Taramarcaz
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Association internationale de la sécurité sociale (AISS)
Cette organisation internationale a été fondée en 1927 pour promouvoir au niveau international la coopération entre les organisations de sécurité sociale, favoriser l’échange régulier d’informations et l’étude de problèmes communs dans le domaine de la sécurité sociale. L’AISS est constituée de plus de 340 organisations dans quelque 130 pays, rassemblant des administrateurs de sécurité sociale du monde entier. Son siège principal se trouve à Genève au Bureau international du travail avec lequel l’Association a des liens historiques. L’AISS jouit également d’un statut consultatif auprès du Conseil économique et social des Nations Unies. L’objectif de l’AISS est de défendre et de promouvoir la sécurité sociale à travers le monde. Pour ce faire, elle offre à ses membres la possibilité d’échanger des informations et des expériences. Elle organise des cours de formation et des séminaires de perfectionnement ; elle réalise des recherches sur la sécurité sociale et publie un vaste programme de publications sur les questions de sécurité sociale. Face aux nouvelles données économiques et sociales, face aux transformations des modèles familiaux et du marché du travail, l’AISS œuvre aujourd’hui prioritairement pour renforcer les moyens dont disposent des organisations de sécurité sociale pour remplir leur mission d’une façon aussi complète et efficace que possible et pour améliorer la qualité, la pertinence et la disponibilité des informations concernant les développements, les innovations et les expériences dans le domaine de la sécurité sociale à travers le monde. Pour ce faire, l’AISS possède le Centre de documentation international le plus complet dans le domaine de la sécurité sociale. Son fonds documentaire est constitué essentiellement par les publications de l’AISS et d’autres organismes internationaux (BIT, OCDE, etc.), un choix important d’ouvrages en sécurité sociale, une vaste collection de périodiques nationaux ou internationaux (près de 1000 titres) et un choix de bases de données bibliographiques ou textuelles, produites par l’AISS ou par d’autres organismes (consultables sur place pour l’instant ; un accès par Internet est prévu par phases). Par ailleurs, le Centre assure, outre les différents traitements documentaires et la gestion d’une base de données bibliographiques, un service d’information (recherches bibliographiques, consultation sur place, et réponse aux demandes provenant de l’extérieur).
Pour information : AISS, Case postale 1, 1221 Genève 22.
Site Internet : www.aiss.org
Voir : Bureau international du travail (BIT) — Sécurité sociale
Roland Sigg
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Association romande et tessinoise des institutions d’action sociale (ARTIAS)
La création de l’ARTIAS en mars 1995 résulte de la fusion du Groupement romand des institutions d’assistance publique et privée (GRIAPP) et la Conférence romande de l’action sociale (CORAS). Elle correspond à une volonté de regrouper les forces dans le domaine de l’action sociale. L’ARTIAS veut contribuer au développement d’une action sociale basée sur la promotion de l’information, de la solidarité et de la lutte contre l’exclusion. Elle a en particulier pour but de favoriser la coordination entre secteurs publics et privés. Elle souhaite offrir une plate-forme d’échanges entre acteurs de l’action sociale en Suisse romande et au Tessin. Elle organise des journées de réflexion ou d’étude et des cours et développe, seule ou en partenariat, des outils d’information sociale. Elle s’adresse tant aux corporations de droit public (cantons et communes) qu’aux associations privées, de bénévoles et de professionnels. L’ARTIAS a son siège à Yverdon-les-Bains.
Site Internet : www.artias.ch — www.socialinfo.ch
Voir : Action sociale — Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) — Information sociale — Professionnels de l’action sociale (Association suisse des) (ASPAS) — Recherche sociale
Martine Kurth
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Association suisse de politique sociale (ASPS)
L’Association suisse de politique sociale est née en 1926 de la fusion de l’Association suisse tendant à encourager la protection internationale des travailleurs et de l’Association suisse des assurances sociales.
Selon ses statuts, l’ASPS a pour but “ de proposer l’idée d’une politique sociale progressiste. ” Elle poursuit aujourd’hui cet objectif avant tout par l’organisation de conférences et par sa participation aux procédures de consultation.
Depuis 1977, ses publications, d’abord éditées sous le titre de “ Solidaritas Helvetica ” puis, depuis 1981 sous le titre de “ Forum de politique sociale ” représentent un échantillon significatif de l’élaboration de la nouvelle politique sociale suisse. Les plus importantes de ces publications peuvent être consultées aux Archives sociales suisses à Zurich.
L’Association suisse de politique sociale compte aujourd’hui environ 350 membres (membres individuels et collectifs), dont un cinquième sont suisses romands. Parmi les plus connus de ses présidents, ont figuré l’ancien Conseiller fédéral Hans-Peter Tschudi, l’ancien Juge fédéral Alexandre Berenstein et le Professeur de Droit bernois Bernardo Zanetti.
Site Internet : www.socialinfo.ch
Voir : Centre d’étude de la politique sociale (CEPS) — Politique sociale
Antonin Wagner
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Associations
Les associations sont des groupements à but non lucratif, d’accès libre au point de vue juridique, poursuivant leurs activités selon des modalités prévues dans des statuts acceptés par l’Assemblée générale des membres, et notamment grâce à l’activité des participants et aux initiatives d’un comité élu par cette même Assemblée. Les ressources des associations proviennent généralement de cotisations des membres, de dons (y compris les campagnes de récolte de fonds) et de subsides éventuels reçus de collectivités publiques. Elles sont régies en Suisse par les articles 60 et suivants du CCS.
Bien que connues depuis l’Antiquité, les associations se sont particulièrement développées au XIXe siècle, lorsque l’emprise croissante de la société industrielle et urbaine cassa les anciennes formes de cohésion sociale et suscita des besoins que seule alors l’union de multiples acteurs privés pouvait prendre en charge. On en compte en Suisse plusieurs dizaines de milliers, plusieurs millions aux États-Unis. Gravitant d’abord beaucoup autour de groupes-porteurs tels que les Églises, les partis, etc., dont elles relayaient la philosophie, les associations s’en sont largement dégagées depuis la Deuxième Guerre mondiale.
Les auteurs classiques (Tocqueville, Durkheim, Wirth, Warner, etc.) assignent aux associations plusieurs fonctions centrales pour le fonctionnement des sociétés modernes : 1. elles sont un puissant mécanisme d’intégration relationnelle et idéologique des personnes dans la société ; 2. elles permettent la formulation explicite de besoins sociaux latents et leur présentation en des termes adéquats dans les instances de décision publiques ; elles forment également un contrepoids à la puissance de l’État face aux individus atomisés ; 3. elles contribuent décisivement à la formation des élites politiques ; 4. elles favorisent, par leurs multiples interconnexions, fédérations, alliances, la définition de priorités sociales.
Face à l’importance de ces fonctions, on notera pourtant que la participation aux associations est sensible à plusieurs “ freins ” sociaux : 1. la participation est d’autant moins prononcée que le statut économique des personnes est précaire et que leur niveau d’instruction est bas ; 2. la participation est d’autant moins forte que l’intégration relationnelle et fonctionnelle des personnes dans la société est faible ; en ce sens, les milieux qui auraient peut-être le plus besoin de cette médiation pour défendre leurs intérêts sont peut-être ceux qui sont les moins bien armés pour le faire ; 3. le fonctionnement associatif est chroniquement menacé de bureaucratisation, soit que l’on délègue trop au comité, soit que celui-ci en vienne à redouter l’expression des membres.
Le fonctionnement des associations d’aujourd’hui peut être classé en quatre grands modèles : 1. le modèle d’allégeance, où la participation répond surtout à un souci d’expression des valeurs et solidarités d’un groupe-porteur confessionnel, social ou régional ; 2. le modèle de médiation où la participation répond surtout à une logique d’efficacité et de moindre coût dans la satisfaction de besoins sectoriels (sportifs, musicaux, hobbies, etc) ; 3. le modèle de conscientisation où l’on cherche, à travers des activités très diverses et diffuses, à une conversion de la personne toute entière ou à une radicale redécouverte de soi ; 4. le modèle de gestion, où des personnes à forte assise sociale et culturelle gèrent un domaine d’action sociale au nom de l’intérêt d’un “ public ” et grâce à l’appui financier de l’État ou d’autres collectivités publiques.
R. M.-C. Collaud, C.-L. Gerber (Éds), Vie associative et solidarités sociales, Réalités sociales, Lausanne, 1993. — M.-C. Collaud, Comment créer et animer une association, Réalités sociales, Lausanne, 1990. — J. Kellerhals, Les associations dans l’enjeu démocratique, Payot, Lausanne, 1974. — S. Passaris, G. Raffy, Les associations, La Découverte, Paris, 1984.
Voir : Action communautaire — Aide mutuelle (Self help)
Jean Kellerhals
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Associations de Parents d’élèves (APE)
Actives depuis la fin des années 1960, ces associations œuvrent dès leur création en poursuivant deux buts parallèles :
— améliorer la communication et les relations entre les parents et l’école (à savoir les établissements scolaires et les Départements de l’Instruction publique) ;
— animer et enrichir la vie pratique, sociale et culturelle des élèves et des parents, sur un plan local.
Elles ont acquis aujourd’hui, dans plusieurs Cantons, un statut, formel ou informel, d’interlocuteur des pouvoirs publics et sont régulièrement consultées (encore que, ici et là, le modèle d’une école insuffisamment ouverte sur la communauté et notamment les parents, se fait encore sentir). L’APE-Vaud, pour prendre un exemple, comporte 50 sections et 6000 membres (familles).
(NB. On ne confondra pas les APE avec les “ Écoles de Parents ”, qui existent dans plusieurs cantons et dont la création est souvent antérieure à celle des APE. La vocation de ces Écoles est plutôt de préparer les parents à leur rôle d’éducateur).
R. Bulletin de l’ape-Vaud.
Site Internet : www.ape-vaud.ch
Laurence Martin
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Assurance àð Assurance (Principe de l')
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Assurance militaire
L'assurance militaire est la plus ancienne des branches de sécurité sociale, puisque la première loi sur l'assurance militaire date du 28 juin 1901. Elle assure contre la maladie (y compris la maternité) et les accidents toutes les personnes effectuant un service obligatoire ou volontaire en faveur de la Confédération (service militaire, protection civile, service civil). Elle s'applique également aux assurés professionnels ayant un contrat de travail avec la Confédération (instructeurs de l'armée et de la protection civile, gardes-fortifications, escadre de surveillance, contrôleurs d'armes, etc.). Enfin, elle couvre également les personnes participant en Suisse ou à l'étranger à des actions de maintien de la paix et de bons offices de la Confédération (bérets jaunes et bleus), ainsi que les membres du corps suisse d'aide en cas de catastrophe.
Une des particularités de l'assurance militaire réside dans ses diverses règles de responsabilité, qui démontrent qu'elle n'est pas à proprement parler une assurance, mais la mise en œuvre d'une responsabilité étatique. Au demeurant, l'assurance militaire n'est pas financée par des cotisations, mais par le budget de la Confédération, à l'exception de l'assurance facultative réservée aux assurés professionnels à la retraite.
Outre les prestations générales telles que frais de traitement et indemnisation de la perte de gain, l'assurance militaire verse une rente d'invalidité en cas d'incapacité de gagner. Le taux de cette rente s'élève au minimum à 5 % et au maximum à 100 %. Elle est versée au plus tard jusqu'à l'âge donnant droit aux prestations de l'AVS. Dès ce moment, elle est remplacée par une rente de vieillesse de l'assurance militaire, s'élevant à 50 % de la rente d'invalidité versée précédemment. Enfin, elle verse des rentes de survivants lorsque l'assuré décède à la suite de l'affection assurée. Une caractéristique de l'assurance militaire dans le domaine des prestations concerne l'indemnisation du dommage immatériel. A l'instar de l'assurance-accidents, l'assurance militaire verse une rente pour atteinte à l'intégrité en cas d'atteinte notable et durable des fonctions vitales au sens large (troubles fonctionnels et atteinte non fonctionnelle). En cas de perte totale d'une fonction vitale, la rente s'élève au maximum à 50 % (100 % dans le cas de l'assurance-accidents). Cette rente est en principe capitalisée (table de mortalité de Stauffer/Schaetzle), ce qui permet, contrairement à l'assurance-accidents, de tenir compte de l'âge de l'assuré au moment de la survenue de l'atteinte à l'intégrité. En outre, l'assurance militaire est la seule assurance sociale qui verse une indemnité pour tort moral en cas de décès ou de lésions corporelles graves en rapport étroit avec les dangers spécifiques du service (circonstances particulières) :
— à l'assuré, en cas de lésions corporelles graves d'origine accidentelle (pour autant que celui-ci ne touche pas de rente pour atteinte à l'intégrité),
— aux survivants en cas de décès de l'assuré dû à une maladie ou un accident.
Le 19 juin 1992, le Parlement a procédé à une révision totale de la loi sur l'assurance militaire (entrée en vigueur le 1er janvier 1994). Par cette révision, le législateur a voulu essentiellement supprimer les lacunes d'assurance, améliorer la coordination et unifier la procédure administrative avec les autres assurances sociales.
R. Guide de l'assurance militaire, Publication de l'OFAM No 3, 2000. — J. Maeschi, Kommentar zum Bundesgesetz über die Militärversicherung vom 19. Juni 1992, Berne, 2000.
Voir : Assurance — Assurance en cas d'accidents — Assurances sociales (coordination des) — Cotisations/primes — Indemnisation — Sécurité sociale
Philippe Le Grand Roy
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Assurance (Principe de l’)
Le principe de l’assurance, en droit de la sécurité sociale, peut comprendre plusieurs aspects :
— c’est d’abord une référence à l’assurance sociale, soit une technique de protection au service de la sécurité sociale, fondée sur le paiement de cotisations ;
— une relation, plus ou moins étroite, entre revenu, cotisations et prestations, typique de l’assurance sociale (p. ex. les indemnités journalières de l’assurance-accidents s’élèvent à 80 % du gain assuré, art. 17 LAA) ;
— la clause d’assurance : le droit à des prestations est subordonné à la condition d’être assuré à un moment fixé par la législation (p. ex. le début de l’incapacité de travail). En Suisse, l’assurance-maladie, l’assurance-accidents, la prévoyance professionnelle appliquent des conditions d’assurance.
R. P.-Y. Greber, Les principes fondamentaux du droit international et du droit suisse de la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1984, pp. 369 ss, RO 2000, p. 2682.
Voir : Assurance sociale (Notion générale) — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Prestations de sécurité sociale — Sécurité sociale
Pierre-Yves Greber
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Assurance sociale (Notion générale)
L’assurance sociale est une invention allemande, de la fin du XIXe siècle ; son origine est associée au chancelier impérial Bismarck, qui a piloté le projet et l’implantation de cette forme de protection.
Les caractéristiques générales de l’assurance sociale sont :
— la reprise de la technique de l’assurance, mais en en faisant une institution de protection sociale ;
— une affiliation obligatoire en vertu de la loi (pas de sélection selon le degré de risque) ;
— un droit légal à des prestations lorsqu’un risque défini se réalise et que les conditions d’octroi sont remplies ;
— une protection qui tend à se rapprocher du gain de l’assuré ;
— une organisation autonome à l’égard de l’État, tout en étant sous son contrôle ;
— un financement qui associe personnes protégées, employeurs et État, les cotisations ne tenant pas compte du niveau de risque.
Invention majeure, l’assurance sociale est intégrée dans le concept de sécurité sociale.
R. J.-J. Dupeyroux, Droit de la sécurité sociale, 13e éd. par Rolande Ruellan, Dalloz, Paris, 1998, pp. 36 ss. — E. Eichenhofer, Sozialrecht. 2. Auflage, Mohr Siebeck, Tübingen 1997, pp. 17 ss.
Voir : Assurance (Principe de l’) — Sécurité sociale
Pierre-Yves Greber
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Assurance-accidents
Adoptée avec l’assurance-maladie, le 13 juin 1911, l’assurance-accidents a protégé certaines catégories de travailleurs. Dès le 1er janvier 1984, la protection sociale a été étendue à l’ensemble des travailleurs salariés, par l’entrée en vigueur de la Loi fédérale sur l’assurance-accidents (LAA). L’assurance facultative est ouverte aux personnes exerçant une activité à titre indépendant.
L’assurance-accidents couvre les accidents professionnels. Elle assure également les accidents non professionnels, pour autant que l’activité exercée porte sur 12 heures par semaine au moins. Si tel n’est pas le cas, les coûts relatifs à l’accident doivent être supportés par l’assurance-maladie.
L’assurance-accidents garantit, à court terme, la couverture des frais de traitement, le versement de l’indemnité journalière compensant la perte de salaire, la prise en charge des moyens auxiliaires, la réparation des dommages matériels. Lorsque l’accident entraîne une invalidité ou le décès, l’assurance intervient par le versement de rentes (invalidité, survivants), d’une indemnité pour atteinte à l’intégrité ou d’une allocation pour impotent.
La Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (CNA) et d’autres assureurs (compagnies privées, caisses-maladie) gèrent l’assurance-accidents. Cette dernière est financée par les cotisations des employeurs (pour la couverture de l’accident professionnel) et des travailleurs (pour la couverture de l’accident non professionnel).
R. A. Gehlew, O. Ramelet, J.-B. Ritter, Commentaire de la loi sur l’assurance-accidents (LAA), Réalités sociales, Lausanne, 1992 — J.-M. Frésard, “ L’assurance-accidents obligatoire ”, in : Schweizerishces Bundesverwaltungsrecht, Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1998, 106 pages.
Voir : Assurances en cas d’accidents (Caisse nationale suisse d’) (CNA) — Assurances sociales (Coordination des) — Caisses-maladie — Prévoyance professionnelle
Béatrice Despland
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Assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur l’)
Elle institue une assurance sociale couvrant les éventualités suivantes :
a) le chômage ;
b) la réduction de l’horaire de travail (généralement appelé chômage “ partiel ”) ;
c) les intempéries ;
d) l’insolvabilité de l’employeur.
En cas de chômage, l’assurance garantit un revenu de remplacement, sous la forme d’une indemnité journalière (de 67,9 % à 79,2 % du gain assuré, selon les cas). L’assurance propose par ailleurs des mesures actives du marché du travail telles qu’emplois temporaires subventionnés, cours, allocations d’initiation au travail, allocations de formation. La modification de la loi du 23 juin 1995 accorde une importance particulière à ces mesures (la loi confie aux cantons le soin d’en organiser quelque 25 000) et développe sensiblement le service public de l’emploi : chaque assuré doit se présenter deux fois par mois auprès d’un des 189 Offices Régionaux de Placement de Suisse.
La mesure active est définie comme un droit que l’assuré peut faire valoir, une fois passée la période d’indemnisation passive (durée selon liste ci-dessous). Mais l’assuré peut être contraint d’accepter un emploi temporaire ou de suivre un cours. Certains parlent alors de contre-prestations exigées de l’assuré, plutôt que de prestations offertes au titre de l’aide à la réinsertion professionnelle.
L’assurance-chômage a fait l’objet de mesures d’économies transigeant avec les règles usuelles de l’assurance sociale : certaines prestations sont désormais soumises à des conditions de ressources (ou calculées en tenant compte des charges de famille) et le versement de cotisations, même durant plus de 6 mois, n’ouvre plus aucun droit si l’assuré occupait un emploi temporaire subventionné.
Le délai-cadre
Un délai-cadre d’indemnisation de deux ans commence à courir le premier jour où toutes les conditions dont dépend le droit à l’indemnité sont réunies. Le délai-cadre de cotisation commence à courir deux ans plus tôt. L’assuré doit avoir cotisé durant 6 mois au moins (12 mois en cas de chômage répété) durant le délai-cadre de cotisation, ou être expressément libéré de l’obligation d’avoir cotisé s’il n’a pu s’acquitter de cette obligation en raison d’une formation professionnelle ou d’une maladie, par exemple.
Le droit maximum à l’indemnité de chômage
Le droit maximum à l’indemnité de chômage est le nombre d’indemnités auxquelles l’assuré peut prétendre durant son délai-cadre d’indemnisation s’il ne retrouve pas d’emploi :
— jusqu’à 50 ans : 150 indemnités ;
— jusqu’à 60 ans : 250 indemnités ;
— plus de 60 ans : 400 indemnités.
L’indemnité spécifique
L’indemnité spécifique est calculée comme l’indemnité journalière, mais elle n’est versée que si l’assuré accepte de participer à une mesure de reconversion, perfectionnement ou intégration professionnels, ou s’il n’obtient pas l’emploi temporaire auquel il a droit. Elle est versée par tranches de 80 indemnités, jusqu’à la fin du délai-cadre d’indemnisation.
En cas de réduction de l’horaire de travail, l’assurance verse une indemnité correspondant à 78,4 % de la perte de gain prise en considération.
En cas d’insolvabilité de l’employeur, l’assurance verse une indemnité correspondant à 100 % de la perte de gain prise en considération. Seules sont couvertes les créances portant sur les six derniers mois de travail.
R. Loi fédérale sur l’assurance-chômage du 25 juin 1982 — Ordonnances, Modification du 11 décembre 1995 — Ordonnances, Arrêté fédéral urgent du 13 décembre 1996.
Voir : Chômage — Chômage (Article constitutionnel relatif à la protection contre le) — Contre-prestations — Office régional de placement (ORP)
Michel Cornut
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Assurance-invalidité (AI)
La loi fédérale sur l’assurance-invalidité (LAI) du 19 juin 1959 constitue l’une des principales lois de la sécurité sociale suisse. Elle est harmonisée et coordonnée avec la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS).
L’assurance-invalidité (AI), comme l’assurance-vieillesse et survivants (AVS), est une assurance obligatoire pour toute personne ayant son domicile civil en Suisse, et pour celle qui y exerce une activité lucrative. L’AI favorise, dans la mesure du possible, la réadaptation ou la réinsertion de la personne handicapée dans la vie professionnelle.
Elle accorde des prestations aux assurés qui, par suite d’une atteinte à leur santé, sont totalement ou partiellement incapables d’exercer une activité lucrative ou leurs travaux habituels, et cela, probablement, d’une manière permanente ou de longue durée. Les assurés mineurs sont réputés invalides lorsque l’atteinte à leur santé aura vraisemblablement pour conséquence, à l’âge adulte, une diminution de leur capacité de gain. Peu importe que l’invalidité soit de nature physique ou mentale ou qu’elle provienne d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident.
L’assurance-invalidité privilégie la réadaptation ou le reclassement professionnel des assurés par rapport à la rente. De ce fait, elle accorde des prestations sous forme de mesures médicales, de mesures professionnelles et, le cas échéant, d'indemnités journalières pendant l’application de ces mesures. Elle prend en charge la formation scolaire spéciale des enfants invalides et accorde des moyens auxiliaires, ainsi que des rentes et des allocations pour impotents.
Une rente AI n’est versée que si les mesures de réadaptation ne permettent pas d’atteindre, en totalité ou en partie, le but recherché, ou si elles n’ont, d’emblée, aucune chance de réussir. Le droit à ces prestations s’éteint au plus tard à la fin du mois au cours duquel l’assuré atteint l’âge ouvrant le droit à la rente vieillesse. Outre, les prestations individuelles, l'AI accorde également des prestations collectives sous forme de subventions aux établissements, ateliers et homes pour personnes handicapées, aux associations qui leur apportent une aide ainsi qu'aux centres de personnel spécialisé pour le prise en charge des personnes handicapées.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Assurance-maladie (AM) — Assurance-accidents — Assurances sociales (Coordination des) — Handicap — Indemnités journalières (AI) — Invalidité — Office AI (Assurance-invalidité) — Prestations complémentaires (PC)
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Assurance-maladie (AM)
Définition : L’assurance-maladie est l’un des piliers de la sécurité sociale. En Suisse, elle remplit une triple fonction :
— elle assure le remboursement des frais de soins ;
— elle prend en charge les prestations spécifiques de la maternité ;
— elle permet la couverture de la perte de gain due à l’incapacité de travail provoquée par la maladie ou la maternité.
Ces fonctions, l’assurance-maladie les partage avec d’autres assurances sociales : l’assurance-accidents, l’assurance-invalidité, l’assurance militaire.
Rappel historique : En 1889, le Conseil fédéral propose un nouvel article 34bis introduisant l’assurance-maladie et accidents dans la Constitution fédérale, qui, modifié par l’Assemblée fédérale, est largement approuvé par le peuple et les cantons le 26 octobre 1890. Une première loi, la Lex Forrer, prévoit l’affiliation obligatoire pour les salariés jusqu’à un certain revenu, couvre les frais médicaux et garantit une indemnité journalière (60 % du salaire pendant 1 année). Adoptée à une large majorité par le Parlement fédéral, elle est rejetée par le peuple en votation référendaire le 20 mai 1900.
La loi sur l’assurance-maladie — LAMA — du 13 juin 1911, passe de peu devant le peuple suisse. De portée réduite en comparaison de la Lex Forrer, elle est considérée d’abord comme une loi de subventionnement des caisses-maladie reconnues qui se voient imposer des obligations minimales.
La seule révision de 1964 apporte plusieurs améliorations significatives. Notamment, elle interdit aux caisses-maladie de refuser des candidats pour cause de mauvaise santé, avec l’instauration, en contrepartie, des réserves médicales, fait un petit pas envers le libre-passage d’une caisse à l’autre, clarifie et renforce la définition des prestations à charge des caisses-maladie, instaure diverses mesures relatives aux cotisations et aux subsides fédéraux, fixe le droit pour les assurés de recourir contre les décisions de leur caisse auprès des tribunaux des assurances (jusqu’ici devant les tribunaux civils).
De 1964 à 1994, deux projets fédéraux de loi et trois initiatives populaires sont rejetés en votations populaires. Plusieurs modèles conçus par des experts contribuent à préparer la législation actuelle.
Le Parlement fédéral tente de résoudre par voie d’arrêtés urgents (AFU) les dysfonctionnements touchant en particulier l’évolution des coûts et des cotisations.
La LAMal — Loi fédérale sur l’assurance-maladie du 18 mars 1994
L’objectif premier de la LAMal vise à garantir à chacun l’accès à des soins de haut niveau pour un coût supportable. Cet objectif se réalise par un ensemble de moyens complémentaires : la solidarité entre assurés grâce à l’obligation généralisée d’assurance, à la prime unique par caisse (quelque soit l’âge ou le sexe), et à la création (pour 10 ans) d’un système de péréquation entre assureurs, le libre passage intégral d’une caisse à l’autre, à n’importe quel âge, sans réserve médicale ni droit d’entrée, l’extension du catalogue des prestations de l’assurance sociale (soins à domicile et en EMS, mesures préventives, prestations de médecine alternative, etc.), la séparation nette entre l’assurance de base obligatoire et l’assurance complémentaire facultative, la maîtrise des coûts par la responsabilisation des assurés (franchises à option, réseau de santé ou HMO par exemple) et par la concurrence entre dispensateurs de soins, la réduction des primes avec un système de subsides aux personnes à revenu modeste.
R. Message du Conseil fédéral concernant la révision de l’assurance-maladie du 6 novembre 1991. — P. Gilliand (Éd.), Assurance-maladie, Quelle révision ?, Réalités sociales, Lausanne, 1990. — P.-Y. Greber, Droit suisse de la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1982.
Voir : Assurance-maladie et l’assurance-accidents (Article constitutionnel sur l’) — Assureurs-maladie — Assureurs-maladie suisses (Concordat des) — Caisses-maladie — Caisses-maladie (Fédérations cantonales des) — Coûts de la santé — Prestations complémentaires (PC) — Sécurité sociale
Michel Surbeck
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Assurance-maladie complémentaire
Les prestations à la charge des assureurs pratiquant l’assurance-maladie sociale sont fixées de manière exhaustive par la LAMal et les ordonnances y relatives du Conseil fédéral. Les prestations qui excèdent ce cadre légal (notamment celles qui couvrent les frais supplémentaires de traitement et de pension en cas de séjour hospitalier en division privée ou semi-privée) relèvent de l’assurance-maladie dite complémentaire. Cette assurance est régie par la loi fédérale sur le contrat d’assurance (LCA), laquelle réglemente les contrats d’assurance privés. De tels contrats peuvent être conclus par les institutions d’assurances qui ont demandé et obtenu l’agrément y relatif prévu par la loi fédérale sur la surveillance des assurances (LSA). Les conditions générales des assurances privées doivent respecter les dispositions impératives et semi-impératives de la LCA - qui sont protectrices des intérêts des assurés - ainsi que les dispositions du droit des obligations relatives aux contrats en général. Les litiges entre assureurs et preneurs d’assurance ou ayants droit relèvent de la compétence des tribunaux civils et non de celle des tribunaux d’assurance.
Voir : Assurance-maladie (AM) — Assurances privées.
Bernard Viret
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Assurance-maladie et l’assurance-accidents (Article constitutionnel sur l’)
L’article 34bis Cst. (adopté le 26 octobre 1890), enjoint à la Confédération d’introduire, par voie législative, l’assurance en cas d’accident et de maladie, en tenant compte des caisses de secours existantes. Elle peut déclarer la participation à ces assurances obligatoire en général ou pour certaines catégories déterminées de citoyens. Ce sont aujourd’hui la LAA et la LAMal qui réalisent ces objectifs.
Tentatives infructueuses de réviser cette disposition (dans le domaine de l’assurance-maladie essentiellement) :
Initiative du Parti socialiste suisse pour une meilleure assurance-maladie, du 31 mars 1970. Nouveautés : assurance obligatoire, cotisations paritaires. Contre-projet du Conseil fédéral. Nouveautés : assurance obligatoire des gros risques, cotisations paritaires, planification hospitalière sur le plan national. Variante parlementaire plus ou moins inspirée du projet du Conseil fédéral. Rejet net par le peuple, le 8 décembre 1974, de l’initiative et du contre-projet du Parlement.
Initiative populaire “ pour une assurance-maladie financièrement supportable ” (initiative des caisses-maladie, du 30 avril 1985). Nouveautés : meilleur contrôle des frais, augmentation massive des subsides des pouvoirs publics. Rejet net par le peuple, conformément à la recommandation du Conseil fédéral et du Parlement, de l’initiative à laquelle aucun contre-projet n’avait été opposé, le 16 février 1992.
Initiative du Parti socialiste et de l’Union syndicale suisse “ pour une saine assurance-maladie ” du 17 mars 1986. Nouveautés : refonte totale de la législation actuelle, assurance obligatoire des soins médicaux et pharmaceutiques ainsi que d’une indemnité journalière, primes proportionnelles au salaire, planification hospitalière contraignante. Contre-projet sous forme de projet de révision de l’assurance-maladie, qui déboucha sur la Loi fédérale du 18 mars 1994 sur l’assurance-maladie (LAMal). Celle-ci fut acceptée de justesse le 4 décembre 1994 par le peuple, qui rejeta simultanément l’initiative.
Signalons seulement pour mémoire les travaux en cours de révision totale de la Constitution.
R. J.-L. Duc, Commentaire de la Constitution Fédérale de la Confédération Suisse du 29 mai 1874, article 34bis, Éditions Helbing & Lichtenhahn, Bâle, Schulthess Polygraphicher Verlag, Zurich, Stämpfli, Berne, 1993. — P.-Y. Greber, Droit suisse de la sécurité sociale, avec un aperçu de théorie générale et de droit international de la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1982. — A. Maurer, Schweizerisches Sozialversicherungsrecht, Stämpfli, Berne, 1979 (Band I, Allgemeiner Teil), 1981 (Band II, Besonderer Teil, Sozialversicherungszweige). — A. Maurer, Bundessozialversicherungsrecht, Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1993.
Voir : Assurance (Principe de l’) — Assurance-accidents — Assurance-maladie (AM) — Sécurité sociale
Jean-Louis Duc
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Assurance-maternité àð Maternité (Protection de la)
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Assurance-vieillesse et survivants (AVS)
La loi fédérale sur l assurance-vieillesse et survivants (LAVS), du 20 décembre 1946, constitue l une des principales lois de sécurité sociale en Suisse. Elle est harmonisée et coordonnée avec la loi fédérale sur l’assurance-invalidité (LAI) du 19 juin 1959. Une série d’ordonnances, la plus importante étant le règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants (RAVS), la précise.
Depuis 1948, date de son entrée en vigueur, cette législation a subi de nombreuses modifications. Jusqu’en 1974, l’évolution de l’AVS fut le reflet assez exact de l’essor économique de l’après-guerre. La loi fédérale sur l’AVS fut soumise à dix révisions proprement dites, et à trois révisions de loi de moindre envergure.
Obligation de cotiser
Toutes les personnes exerçant une activité lucrative en Suisse sont tenues de cotiser, ainsi que, à certaines conditions, les personnes travaillant à l’étranger pour le compte d’un employeur en Suisse. Depuis le 1er janvier 1997, les veuves et les femmes mariées sans activité lucrative sont désormais soumises à l’obligation de cotiser. Toutefois les cotisations de la femme mariée sans activité lucrative sont considérées comme étant payées si le mari exerce, lui, une activité lucrative et a versé au moins le double de la cotisation minimale. Cette règle est indépendante du sexe : le mari sans activité lucrative d’une femme qui exerce une activité lucrative ne paie pas non plus de cotisation si son épouse a versé au moins le double de la cotisation minimale. Il faut souligner que les cotisations ne sont pas plafonnées alors que le montant des rentes l’est.
Genre de prestations
L’AVS octroie des rentes de vieillesse, des rentes de veuve et de veuf (pour ces derniers seulement si l’enfant ou les enfants ont moins de 18 ans), des rentes pour enfants, des allocations pour impotents ainsi que des moyens auxiliaires. Dès le 1er janvier 1997, date de l’entrée en vigueur de la dixième révision de l’AVS, mari et femme touchent désormais chacun leur rente. Celle-ci est fixée en fonction de la durée de cotisations de chacun des conjoints et des revenus de ceux-ci, en application du splitting. Cela signifie que les revenus obtenus durant le mariage tant par le mari que par l’épouse sont inscrits pour moitié au compte de l’autre conjoint. S’y ajoutent les bonifications pour tâches éducatives ou pour tâches d’assistance attribuées aux membres de la famille qui s'occupent des enfants ou prennent soin des parents impotents.
Naissance de la rente
Le droit à la rente de vieillesse prend naissance le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel la personne assurée a atteint l’âge de la retraite. Les personnes doivent s’annoncer auprès des caisses de compensation pour avoir droit à leur rente.
Âge de la retraite
L’âge de la retraite des hommes est de 65 ans. L’âge de la retraite des femmes est relevé à 63 ans en 2001 et à 64 ans en 2005. (Période transitoire pour l’élévation de l’âge de la femme avec possibilité de prendre une retraite anticipée à un taux d’anticipation réduit). L'élévation de l'âge de la retraite à 65 ans avec la possibilité de prendre une retraite à la carte sera discutée dans le cadre de la 11e révision de l'AVS.
Âge flexible de la retraite
Toutes les personnes assurées peuvent et pourront, si elles le souhaitent, toucher leur rente avant d’avoir atteint l’âge ordinaire de la retraite. En contrepartie, elles doivent s’accommoder d’une réduction actuarielle de leur rente.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Assurances sociales (Coordination des) — Caisse de compensation — Impotent (Allocation pour) — Préretraite — Prestations complémentaires (PC) — Prévoyance professionnelle — Retraite (Âge de la) — Sécurité sociale — Trois piliers
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Assurances en cas d’accidents (Caisse nationale suisse d’) (CNA)
Organe de gestion de l’assurance-accidents, la CNA a été instaurée par la Loi fédérale sur l’assurance-maladie du 13 juin 1911. Jusqu’au 1er janvier 1984, la CNA gérait, seule, l’assurance-accidents qui couvrait les deux tiers des salariés. L’entrée en vigueur de la LAA a étendu le cercle des assurés (ensemble des salariés) et celui des assureurs (institutions privées, caisses publiques, caisses-maladie). La CNA reste, néanmoins, l’organe le plus important. Établissement de droit public, la CNA jouit d’une autonomie assez étendue : l’organisation interne et le statut du personnel, notamment, sont définis et arrêtés par le Conseil d’administration. Au sein de ce dernier, les employeurs et les travailleurs sont représentés majoritairement. Le siège de la CNA est à Lucerne. Des agences locales et d’arrondissement fonctionnent dans les diverses régions du pays.
R. J.-M. Frésard, “ L’assurance-accidents obligatoire ”, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1998, pp. 83-84.
Voir : Assurance-accidents
Béatrice Despland
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Assurances privées
En complément aux institutions d’assurances qui relèvent explicitement de l’assurance sociale, la Confédération fait également appel, dans certains domaines, aux assureurs privés pour atteindre des buts de politique sociale.
Ce sont d’abord des institutions d’assurances sur la vie (31 en 1997). Elles représentent environ un quart des 129 institutions qui pratiquent l’assurance directe, en Suisse, et elles gèrent deux tiers de l’ensemble du volume des primes. En grande partie, elles exercent leur activité dans le domaine du deuxième pilier. Dans le cadre des contrats collectifs avec les institutions de prévoyance professionnelle, les assureurs sur la vie complètent le premier pilier (AVS) par le deuxième pilier obligatoire, ainsi que par le deuxième pilier facultatif dans le cadre d’assurances individuelles. En 1995, on estime à 3 millions les personnes assurées collectivement dans le cadre du deuxième pilier, ce qui représente une somme d’assurance d’environ 250 milliards. À cela s’ajoutent les prestations en capital dans l’assurance individuelle pour un montant d’environ 180 milliards, ainsi que des rentes servies ou en attente pour environ 6 milliards de francs. Ces chiffres reflètent une tendance récente à s’assurer contre les risques par l’épargne et les possibilités de couverture qu’offre l’assurance sur la vie.
L’assurance-maladie constitue un secteur important de la politique sociale. La LAMal du 18 mars 1994 a engagé des réformes importantes. Depuis son entrée en vigueur en janvier 1997, 47 assureurs privés exercent leur activité, ont été reconnus et ont reçu l’aval de l’OFAS pour pratiquer l’assurance-maladie obligatoire, cela à côté des caisses-maladie reconnues. Jusqu’à ce jour, les assureurs privés n’ont pas utilisé cette autorisation qui leur est offerte. Leur principal champ d’activité est l’assurance-maladie complémentaire. Celle-ci concerne surtout les personnes qui ne sont pas satisfaites des limites imposées par l’assurance-maladie de base en ce qui concerne le niveau de couverture et les services offerts, qu’elles le puissent où qu’elles le souhaitent. Ce secteur est aussi ouvert aux assurances-maladie reconnues sous réserve de l’accord et de la surveillance de l’Office fédéral des assurances privées. Soixante-six caisses-maladie ont utilisé cette possibilité.
Cinquante-cinq assureurs privés pratiquent l’assurance-accidents. En partie, ce sont des assureurs vie qui, en prolongement de l’assurance sur la vie, offrent une assurance-accidents. Cependant, en majorité, ce sont des institutions d’assurance-accidents et responsabilité civile. Les assureurs privés qui offrent des prestations d’assurance-accidents obligatoire se trouvent en concurrence avec la CNA pour la pratique de l’assurance sociale.
L’assurance-incendie obligatoire poursuit également des objectifs de politique sociale dans la mesure où elle est couplée avec l’assurance contre les éléments naturels. Cette association permet d’assurer une couverture à des populations vivant dans des zones à risque et qui se trouvent protégées contre les dommages liés aux inondations, aux avalanches ou aux tremblements de terre.
Enfin, il convient de nommer toutes les assurances obligatoires. Elles sont réglées par les pouvoirs publics dans la mesure où sans la couverture qu’elles offrent, certaines parties de la population pourraient subir des dommages qui pourraient les conduire à solliciter l’aide des pouvoirs publics. À titre d’exemple significatif, on peut nommer l’assurance contre les risques liés à l’énergie, au transport des matières inflammables, ainsi que, bien sûr, l’assurance obligatoire pour les véhicules à moteur. La couverture de ces risques est l’affaire des assureurs privés.
Les institutions d’assurance privée doivent obtenir la reconnaissance du Département fédéral de Justice et Police. Leur solvabilité, leur organisation, et leur gestion sont contrôlées régulièrement par l’Office fédéral des assurances privées.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Prévoyance professionnelle — Trois piliers
jpf
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Assurances sociales (Coordination des)
Les branches d’assurances sociales se sont développées progressivement, en déterminant, chacune, les personnes protégées, les risques couverts, la notion de salaire assuré, les prestations versées et les conditions d’ouverture du droit. Les règles de coordination permettent de déterminer quel régime s’applique à l’exclusion de tout autre ou, au contraire, quels régimes peuvent intervenir de manière cumulative. Ces règles doivent donc garantir à l’assuré le passage d’un régime à l’autre sans perte de droit et le bénéfice de toutes les prestations auxquelles il peut prétendre, sans que soit violé, pour autant, le principe général prohibant la surindemnisation dans les assurances sociales.
Il n’existe aucune base constitutionnelle donnant, à la Confédération, la compétence de régler, de manière générale, la question de la coordination. Les règles doivent donc être recherchées dans les différentes lois d’assurances sociales. Une première catégorie de dispositions permet de désigner la branche d’assurance qui doit intervenir, à titre provisoire, lorsque la qualification juridique du risque, qui vient de se réaliser, pose problème. Dans le système suisse, cette qualification est d’autant plus importante qu’elle ouvre, à l’intéressé, des droits différents en fonction du régime qui doit couvrir l’événement assuré. Dans cette hypothèse, les règles de coordination garantissent une protection sans faille de l’assuré. Elles ne figurent cependant pas, de manière exhaustive, dans toutes les lois d’assurances sociales.
Une deuxième catégorie de règles déterminent la protection accordée lorsque deux risques se réalisent simultanément (accident en période de maladie, p. ex.). Pour les prestations dites “ à court terme ” (soins de santé, indemnités journalières, notamment), un seul régime est tenu d’intervenir. La règle est identique pour les prestations à long terme (rentes et allocations) ou les prestations en nature (moyens auxiliaires) lorsque deux éventualités se réalisent (invalidité et vieillesse, p. ex.). En droit suisse, il ne peut y avoir cumul. Mais le principe des “ droits acquis ” garantit le maintien du niveau de prestation lors du passage d’un régime d’assurance à l’autre.
Un seul risque social (décès, invalidité ou vieillesse) peut entraîner l’intervention de plusieurs régimes. Les règles de coordination déterminent, alors, dans quelle mesure les rentes versées par le premier pilier de la sécurité sociale (AVS/AI) peuvent se cumuler avec les prestations du deuxième pilier (LPP), voire d’un régime particulier (assurance-accidents ou assurance militaire). Les dispositions légales fixent un pourcentage du gain assuré, qui devient la limite de surindemnisation, donc la limite des prétentions que peut faire valoir un assuré.
Le concours de prestations entre assurances sociales et assurances privées est régi par le principe de la “ congruence ”. Ne peuvent donner lieu à une éventuelle réduction que les prestations affectées au même but (couverture du salaire, p. ex.).
Adoptée le 6 octobre 2000 par le Parlement, la nouvelle Loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) contient des dispositions relatives à la coordination entre les différents régimes.
Voir : Assurance-maladie (AM) — Assurance-accidents — Sécurité sociale (Architecture de la)
Béatrice Despland
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Assurances sociales (Partie générale du droit suisse des)
Développé par étapes successives, et non selon un plan d'ensemble, le droit suisse de la sécurité sociale est régi par plus d’une centaine d’actes normatifs. Chaque branche d’assurance sociale possède sa propre base constitutionnelle, sa ou ses propres lois ainsi que ses propres ordonnances. Cette construction “ anarchique ”, l’éparpillement des sources et le cloisonnement des branches qui en résultent rendent le système complexe et peu transparent, et la coordination entre les divers régimes difficile, sans parler des différences matérielles parfois sensibles, notamment quant au niveau de protection.
Dans la perspective d’une simplification, l’idée a été lancée de créer une partie générale du droit des assurances sociales, c’est-à-dire une nouvelle loi, qui se juxtaposerait aux lois existantes et rassemblerait les règles qui leur sont communes. Si l’idée n'est pas nouvelle, sa concrétisation législative a une longue histoire, encore inachevée. Lancée en 1984 par la Société suisse du droit des assurances (SSDA), qui publiait un rapport et un projet de loi, l’idée a été reprise, au niveau politique, par la conseillère aux États Josi Meier, dans une initiative parlementaire déposée en février 1985 et “demandant que soit édictée une loi fédérale réunissant la partie générale du droit des assurances sociales”, sur la base du projet de la SSDA. Après deux procédures de consultation, la commission du Conseil des États chargée de donner suite à l’initiative présentait son rapport, accompagné d’un projet de loi, en septembre 1990 (Feuille fédérale, FF 1991 II 181). Malgré les réserves émises par le Gouvernement en avril 1991 (FF 1991 II 888), le Conseil des États adoptait tel quel le projet de sa commission la même année, sans discussion de détail (BO CE 1991 773). Le Conseil national décidait pour sa part, en mars 1992, de suspendre pour deux ans l'examen du projet, jugé non prioritaire au regard des révisions matérielles en cours dans diverses branches et de l'adaptation du droit suisse au droit européen (BO CN 1992 237). Suite au rejet de l'Espace économique européen le 6 décembre 1992, la discussion pouvait reprendre, et la commission compétente du Conseil national priait le Conseil fédéral de préciser ses critiques à l'égard du projet, ce que le Gouvernement a fait en août 1994 (FF 1994 V 897). Par la suite, la commission du Conseil national a présenté son propre rapport, en mars 1999 (FF 1999 4168), et l'Assemblée fédérale a adopté la loi fédérale sur la parte générale des assurances sociales (LPGA) le 6 octobre 2000 (FF 2000 4657). Cette loi, qui n'est pas encore en vigueur, a principalement pour objets de définir de manière uniforme les principes, concepts et institutions du droit des assurances sociales, de régler (uniformément) la procédure et les voies de droit, ainsi que de poser les règles de coordination des prestations des différentes branches des assurances sociales. L'entreprise se limite cependant, en principe, à une réforme formelle : elle ne pas modifie, sous réserve de quelques exceptions, le droit matériel de la sécurité sociale.
L’idée d’une telle partie générale représente une alternative à deux autres voies en vue d’une simplification formelle du système : celle, tout d’abord, d’une codification générale du droit des assurances sociales, c’est-à-dire d’un acte normatif unique qui rassemblerait toutes les dispositions applicables à cette matière (l’élaboration d’un tel code de la sécurité sociale a cependant été écartée au motif qu’elle constituerait une entreprise difficile et de longue haleine), et celle, d’autre part, d’une loi d'harmonisation, savoir une loi dont l'objet aurait été (uniquement) de réviser toutes les lois existantes, pour y ancrer les mêmes notions et définitions, les mêmes normes de procédure, les mêmes règles de coordination des prestations, etc. (ainsi, par exemple, les notions de maladie ou d'accident auraient été définies, de manière identique, dans chaque loi où elles jouent un rôle ; de même, des normes de procédure identiques auraient figuré dans toutes les lois ; une telle loi d'harmonisation cesserait d'exister le jour même de son entrée en vigueur, toutes ses dispositions étant intégrées dans les lois existantes).
R. H.-P. Tschudi, “ Vereinfachung und Verbesserung des schweizerischen Sozialversicherungsrechts ”, in : SZS, 1995, pp. 173 ss.
Voir : Assurances sociales (Coordination des) — Décision administrative — Juridiction sociale — Sécurité sociale (Codification de la) — Recours (en assurances sociales)
Pascal Mahon
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Assureurs-maladie
Les assureurs-maladie suisses garantissent à la population la protection nécessaire en cas de maladie, d'accident et de maternité. Ils pratiquent aussi bien l'assurance obligatoire des soins et facultative d'indemnités journalières que les assurances complémentaires au choix des personnes assurées. Près de la moitié des dépenses de santé sont financées en Suisse par les assureurs-maladie. Ceux-ci concluent des conventions avec les fournisseurs de prestations (hôpitaux, médecins, pharmaciens, établissements médico-sociaux, organisations de soins à domicile, etc.). Grâce à leurs statistiques et à l'échange de données voulus pas le législateur, les assureurs-maladie se donnent d'importantes sources d'informations en vue d'établir une planification qui couvre les besoins et améliore constamment notre système de santé.
Santésuisse, l'association professionnelle de la branche, remplit une fonction dirigeante de coordination, de promotion et d'orientation de la branche. Elle est divisée en un siège et des secrétariats régionaux.
Site Internet : www.santesuisse.ch
Voir : Assurance-maladie (AM) — Assurance-accidents (Article constitutionnel sur l') — Assureurs-maladie suisses (santésuisse)
santésuisse
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Assureurs-maladie suisses (Santésuisse)
Organisation professionnelle des assureurs-maladie actifs dans l'assurance-maladie sociale suisse, santésuisse s'efforce de promouvoir la cause de l'assurance dans les milieux politiques et le grand public. santésuisse défend les intérêts de la branche face aux autorités suisses et cantonales.
santésuisse s'efforce de donner au grand public une image positive des assureurs-maladie suisses. Leader d'opinion sur le plan politique, santésuisse diffuse et défend les opinions de ses membres dans les milieux politiques et devant l'opinion publique.
santésuisse favorise la collaboration ponctuelle avec les organisations et les institutions dans le domaine de la santé. L'organisation est au service de ses membres pour l'information, le soutien dans les relations à haut niveau et la formation. Dans l'intérêt des assurés, santésuisse tend à obtenir une couverture en soins de haute qualité à des prix supportables. Sur mandat de ses membres, santésuisse mène des négociations tarifaires à l'échelon suisse et cantonal.
Site Internet : www.santesuisse.ch
Voir : Assureurs-maladie
santésuisse
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Austérité (Politiques d’)
Politiques conjoncturelles qui visent à obtenir un ralentissement de la demande afin de lutter contre l’inflation et/ou de réduire le déficit commercial d’une économie. Le ralentissement de la demande peut être obtenu par des mesures budgétaires et monétaires restrictives : réduction des déficits budgétaires, ralentissement de la croissance de la masse monétaire (notamment, par l’augmentation des taux d’intérêts).
Voir : Politique conjoncturelle
jpf
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Autoconsommation
Acte par lequel des agents économiques sont amenés à produire eux-mêmes les biens et les services qu’ils consomment. Cette production de richesse échappe en grande partie à la comptabilité nationale ce qui tend à sous-estimer la valeur du Produit Intérieur Brut (PIB). De surcroît, la plupart des systèmes fiscaux ne prennent pas en considération cette autoconsommation pour définir le revenu imposable des contribuables même si formellement elle correspond à un accroissement du pouvoir économique de la personne qui s’attelle à cette activité au même titre que d’autres sources de revenus qui sont elles soumises à imposition. Vouloir les prendre en considération, dans une définition exhaustive du revenu, pose pourtant pas mal de problèmes. Tout d’abord, ces activités sont difficiles à identifier si elles ne sont pas annoncées spontanément, ce qui est illusoire. En outre, leur évaluation est malaisée parce qu’elles ne donnent pas lieu à une rémunération en espèces. Finalement, l’imposition de l’autoconsommation risque de créer des différences de traitement. En effet, si la part de la récolte qu’un agriculteur retient pour sa propre consommation constitue sans doute un revenu, qu’en est-il des travaux de bricolage ? En ignorant généralement ces sources non monétaires pour déterminer le revenu imposable, les systèmes fiscaux peuvent inciter les individus à modifier leur comportement afin de minimiser leur charge fiscale. Plus le taux d’imposition marginal (appliqué sur une tranche de revenu supplémentaire) est élevé plus ce risque d’évasion est important. De même, si les taux d’imposition prélevés sur la consommation sont élevés, les agents économiques peuvent être incités à produire eux-mêmes les biens et les services qu’ils souhaitent plutôt que de travailler pour obtenir un revenu qui leur permettra ensuite de les acquérir sur le marché.
Voir : Impôt (et sécurité sociale) — Politique fiscale — Produit intérieur brut (PIB)
Yves Flückiger
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Autonomie
L’autonomie est un concept nomade, en vogue dès les années soixante dans le langage du social, qui concerne autant l’individu, les groupes et les institutions que les entités économiques, sociales et politiques.
L’autonomie, en psychologie, est définie comme liberté de jugement, capacité de recourir à l’information et d’émettre des jugements ; liberté de décision, capacité de pouvoir choisir entre les alternatives qui se présentent à l’intérieur de contraintes données par les facteurs agissant sur la situation ; liberté d’action, capacité et liberté de mouvements et capacité d’agir suivant des décisions prises de façon autogérées.
En philosophie, l’autonomie signifie la capacité d’un sujet de se donner à lui-même ses propres lois, où la reconnaissance de l’altérité est la condition nécessaire de son développement (Hegel).
Au sens commun (en tant qu’idéologie contemporaine), la notion d’autonomie est associée au sujet individuel, pensé comme un absolu coupé de toute insertion sociale et marqué par le refus de reconnaître sa dépendance envers autrui.
Notion de nature relationnelle, qualifiée en fonction de l’individu saisi à partir de sa relation à autrui, son sens et son contenu peut être défini en fonction du système de relations (règles partagées qui caractérisent toute société et tout groupe humain) et d’interactions (réseaux) dans lesquelles l’individu est inséré.
R. E. Fuchs, C. Lalive d’Epinay, J.-P. Michel, K. Scherer, M. Stettler, La notion d’autonomie : une reformulation interdisciplinaire, Cahiers médico-sociaux, No 41, 1997.
Voir : Lien social — Citoyenneté — Participation
Pierre Thétaz
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Autorisation de séjour
On distingue divers types d’autorisations de séjour dont, entre autres, le permis de saisonnier (A), le permis annuel (B), le permis d’établissement (C), l’autorisation de courte durée (L), le permis frontalier, l’autorisation pour le requérant d’asile (F), l'autorisation pour requérant d'asile, etc. Le permis annuel (B) et l'autorisation de courte durée (L) peuvent être attribués par le biais d'un même permis. On dénombre ainsi en Suisse plus de 50 manières différentes d’attribuer une autorisation de séjour. Les variantes portent sur la durée du séjour, sur son caractère renouvelable ou non, sur les possibilités de transformation, sur l’autorisation ou l’interdiction partielle ou totale de travailler, sur le droit de changer de changer de secteur économique, sur le droit de changer de canton, sur les possibilités de réaliser un regroupement familial, sur le droit à une activité indépendante, etc.
En dehors de cette disposition particulière, les renouvellements, les transformations et les regroupements familiaux constituent une possibilité offerte aux immigrés, moyennant la réalisation d’un certain nombre de critères ; ils ne reposent pas sur un droit et les voies de recours sont limitées.
Seul le permis d’établissement lève ces réserves. Il permet un séjour illimité en Suisse, tout en étant cependant soumis à un contrôle périodiquement. Par exemple, des dettes excessives, une condamnation pénale ou encore une absence de plus de six mois peuvent conduire à son non-renouvellement. Le regroupement familial est plus facile à réaliser.
Le type d’autorisation de séjour n’est pas déterminant en ce qui concerne la sécurité sociale : ce sont la qualité d’assuré et/ou la durée du séjour en Suisse qui sont prises en compte.
R. Commission fédérale pour les problèmes des étrangers (CFE), Les étrangers dans la commune, Berne, 1989.
Voir : Circulation des personnes (Libre)  Étrangers (Politique à l égard des)  Immigration  Permis d établissement
Christine Buillard Margili
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Autorité de surveillance àð Office fédéral des assurances sociale (OFAS) — Ordonnance administrative
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Autorité parentale
L'autorité parentale est le pouvoir légal qu'ont les parents de prendre les décisions nécessaires pour l'enfant mineur (éducation représentation de l'enfant, administration des biens). Elle est exercée jusqu'à la majorité de l'enfant. L'autorité parentale étant une conséquence juridique du rapport de filiation, elle ne peut être exercée que par les parents. Les parents mariés l'exercent en commun. Si les parents ne sont pas mariés, l'autorité parentale appartient à la mère.
En cas de divorce, l’autorité parentale est, en principe, attribuée à l’un des parents. Toutefois, selon le nouveau droit du divorce entré en vigueur le 1er janvier 2000, le juge peut maintenir l’autorité parentale conjointe à titre exceptionnel. Trois conditions cumulatives sont cependant exigées :
— les parents donnent leur accord et présentent une requête commune ;
— la solution est compatible avec le bien de l’enfant ;
— le juge ratifie une convention entre les parents, qui fixe la participation à la prise en charge des enfants et la répartition des frais d’entretien.
Lorsque les parents mariés se séparent, l'autorité parentale est, en principe, exercée par les deux parents. La garde de l'enfant est peut être alternée ou conjointe.
Dans le cadre de mesures de protection de l'enfance, l'autorité parentale peut être restreinte, voire entièrement retirée.
En cas de décès de l'un des époux, l'autorité parentale est transmise au conjoint survivant.
R. J. Micheli, P. Nordmann, C. Jaccottet Tissot, J. Crettaz. T. Thonney, E. Riva, Le nouveau droit du divorce, Éditions Pépinet, Lausanne, 1999.
Voir : Filiation (Droit de) — Obligation d’entretien — Protection de l’enfant
Béatrice Despland
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Autorités tutélaires
Le droit suisse distingue (art. 361 CCS) : l'autorité tutélaire qui, d'une manière générale, est l'instance officielle chargée de prononcer les mesures de protection (curatelle, tutelle) et de désigner et de contrôler les personnes qui vont exercer les fonctions tutélaires (conseil légal, curateur, tuteur) ; et l'autorité tutélaire de surveillance qui statue sur les recours formés contre les décisions de l'autorité tutélaire et consent à certains actes particulièrement importants, comme par exemple l'adoption, que le pupille soit l'adopté ou l'adoptant (art. 422 CCS).
Ces autorités sont désignées par chaque canton et peuvent être soit des autorités judiciaires (ce qui est la règle en Suisse romande), soit administratives, soit de composition mixte. Ainsi dans le canton de Vaud ou de Fribourg, l'autorité tutélaire est exercée par la Justice de Paix, en Valais par la Chambre pupillaire cantonale, à Genève par le Tribunal tutélaire, dans le Jura par le Conseil communal et à Berne par le Conseil municipal. Le Tessin, qui a connu jusqu’ici le système éclaté de la compétence des communes (Délégations tutélaires communales) va adopter dès 2001 une régionalisation des autorités tutélaires (Commissions tutélaires régionales, dont le nombre sera quand même encore d’une quarantaine).
R. H. Deschenaux, P.-H. Steinauer, Personnes physiques et tutelles, Ed. Stämpfli, 3e éd., Berne, 1995.
Voir : Conseil légal — Curatelle — Tutelle
Nicolas Queloz et Ariane Senn Gromelle
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Avantage injustifié
En vertu de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle (LPP), le Conseil fédéral a qualité pour édicter des prescriptions afin d’empêcher que le cumul de prestations ne procure un avantage injustifié à l’assuré ou à ses survivants. L’avantage injustifié est un concept plus large que celui de surindemnisation au sens de la loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales (LPGA).
Selon l’ordonnance du Conseil fédéral sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (OPP 2), un avantage est injustifié lorsque les prestations d’invalidité ou de survivants dépassent 90 pour cent du gain annuel dont on peut présumer que l’intéressé est privé. L’OPP 2 institue un mode de détermination de l’avantage injustifié dans lequel les revenus à prendre en compte sont les prestations d’un type et d’un but analogues qui sont accordées à l’ayant droit en raison de l’événement dommageable. Au nombre de ces prestations figurent les rentes et les prestations en capital (prises à leur valeur de rentes) provenant d’assurances sociales ou d’institutions de prévoyance, à l’exception, toutefois, des allocations pour impotents, des indemnités pour atteinte à l’intégrité et de toutes autres prestations semblables. Le revenu provenant d’une activité lucrative exercée par un assuré invalide est aussi pris en compte. La rente pour couple de l’AVS/AI n’est comptée que pour deux tiers. Les revenus de la veuve et des orphelins sont comptés ensemble.
La notion d’avantage injustifié a donné lieu à une intéressante jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances, dans le détail de laquelle on n’entre pas ici.
Voir : Assurances sociales (Coordination des) — Assurances sociales (Partie générale du droit suisse des) — Prévoyance professionnelle — Surassurance — Surindemnisation
Bernard Viret
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Avortement
L’avortement est la fin prématurée de la grossesse par expulsion du fœtus avant que celui-ci ne soit viable. L’avortement peut être spontané : dans ce cas, il est communément appelé fausse couche. L’avortement peut aussi être provoqué : on parle alors d’interruption de grossesse. C’est actuellement l’article 120 du Code pénal suisse datant de 1942 qui garantit l’impunité de l’interruption de grossesse si celle-ci est pratiquée avec le consentement écrit de la personne enceinte par un médecin diplômé disposant d’un avis conforme (autorisation légale délivrée par un second médecin diplômé), lorsque la poursuite de la grossesse représente un danger menaçant sérieusement et gravement la vie ou la santé de la femme enceinte. L’avortement provoqué est considéré clandestin lorsqu’il est pratiqué illégalement. Il est alors punissable et passible d’emprisonnement ou de réclusion. Un nouveau projet de loi est actuellement en discussion au Parlement.
R. M. Dondénaz, Avortement, Interruption de grossesse : le cas de la Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 1987.
Site Internet : www.svss-uspda.ch
Voir : Famille (Politique de la) — Planning familial — Prévention — Union suisse pour décriminaliser l'avortement (USPDA)
Martine Despland-Dondénaz
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Banque centrale européenne
Institution prévue par le traité de Maastricht pour gérer la monnaie unique (Euro) et définir la politique monétaire de la Communauté. Elle a vu le jour en 1999. Elle est dirigée par un Conseil des gouverneurs des banques centrales nationales et un directoire nommé par le Conseil européen.
Voir : Union européenne (UE)
jpf
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Banque européenne pour la reconstruction et le développement (B.E.R.D.)
Cette banque internationale publique a été créée en 1989, à l’initiative des pays de la CEE. Son objectif est d’aider les pays d’Europe de l’Est à passer d’une économie centralisée à une économie de marché (financement de projets privés et publics, aides aux privatisations, modernisation des infrastructures, assistance technique).
Voir : Union européenne (UE)
jpf
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Banque mondiale (B.I.R.D.)
Cette banque, conçue lors de la conférence de Bretton Woods (1944), a été créée en 1945 à Washington. Affiliée à l’ONU, elle est une organisation complémentaire du F.M.I. pour accorder une aide financière et technique, au bénéfice, pour l’essentiel, des pays en voie de développement.
Elle lie fréquemment ses crédits à des conditions sévères dans le domaine social. Elle a pris récemment des positions très restrictives en matière de prestations vieillesse.
Voir : Fonds monétaire international (FMI)
jpf
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Bénévolat
Classiquement, la notion de bénévolat décrit l’ensemble des activités, conduites par des individus ou des groupes, dont l’action répond à deux critères : le volontariat et l’absence de rémunération.
Le bénévolat social actuel peut être considéré comme un “ produit ” de la professionnalisation de l’action sociale qui a joué un rôle décisif dans son développement et dans l’orientation de son action depuis les années 70. De ce fait, l’action des bénévoles s’inscrit largement dans la perspective de l’action sociale menée par les institutions professionnalisées. Cette évolution se traduit par son adaptation aux impératifs des techniques professionnelles. Parallèlement, l’institutionnalisation du bénévolat s’est opérée sous l’impulsion d’organismes spécialisés et d’associations faîtières orientés vers la promotion et la coordination des activités bénévoles.
Le bénévolat joue en règle générale un rôle de complément auxiliaire par rapport à l’action sociale professionnalisée. Il est très difficile d’établir une évaluation précise des prestations du bénévolat social, dans la mesure où il n’existe pas de données statistiques reposant sur des critères objectifs et comparables.
L’engagement bénévole concerne en grande majorité des femmes. Il prend différentes formes telles que l’administration (tâches d’organisation et de bureau), la récolte de fonds (activités de collectes, de vente), la gestion (participation à un comité), la prestation d’aide (services rendus à des personnes).
Le domaine de la vieillesse, constitue incontestablement le problème social qui, en raison même de la multiplicité des besoins et de leur expansion, mobilise le plus de bénévoles à travers des prestations telles que la visite, les transports, la distribution de repas, l’animation ponctuelle, etc.
Parmi les activités assimilées à du bénévolat, on note également les services échangés dans le cadre de l’entourage familial ou du voisinage ainsi qu’entre des personnes concernées par un même besoin dans le domaine social (entraide). La notion s’applique aussi à l’ensemble des engagements volontaires (ou militants) dans le domaine politique, culturel, religieux, sportif, etc. L’utilisation de la notion de bénévolat s’étend par conséquent à l’ensemble des activités qui sont non ou très peu rémunérées.
L’avenir du bénévolat est étroitement lié à celui du travail. D’une part, la question de la reconnaissance des activités des bénévoles se pose de façon récurrente, en relation étroite avec le dossier de l’égalité hommes-femmes (bonus éducatif, etc.). D’autre part, le champ des activités du bénévolat recouvre largement celui des activités dites d’utilité sociale, souvent considérées comme un gisement d’emploi pour les personnes qui n’en trouvent pas sur le marché du travail.
R. C. Bovay, R.-J. Campiche, J.-P. Tabin, Bénévolat : modes d’emploi, Réalités sociales, Lausanne, 1995. — R. Fischler, M. Lande, Freiwillige im Sozialbereich, Heuwinkel, Neu-Allschwill, 1990. — P.-C. Meyer, M. Budowski, Bezahlte Laienhilfe und freiwillige Nachbarschaftshilfe, Seismo, Zürich, 1993. — M.-C. Collaud, C.-L. Gerber, Vie associative et solidarités sociales, Réalités sociales, Lausanne, 1993.
Voir : Action bénévole (Association pour l’étude et la promotion de l’action bénévole) — Associations — Entraide — Éthique — Lien social — Professions sociales — Travail
Claude Bovay
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Besoin
On considère généralement que le besoin constitue un manque, un sentiment de privation auquel le groupe ou l’individu entendent remédier par la consommation ou l’investissement, eux-mêmes liés à la production de biens et services. Il est courant d’utiliser comme quasi-synonymes : besoin, désir, envie. Ce qui sépare le besoin du simple désir, c’est, en principe le critère de la nécessité qui caractériserait le besoin, quel que soit le degré de cette nécessité et quel que soit le degré d’urgence de cette nécessité.
Pour traduire le caractère plus ou moins impérieux des besoins, plusieurs classifications ont été proposées. Une des plus connues, mais aussi des plus contestées, est la distinction entre besoins primaires, secondaires et tertiaires.
Les besoins primaires sont ceux qui sont indispensables à la vie, tels la nourriture, l’habillement… Relève des besoins secondaires ce qui est nécessaire, non indispensable à la survie : lecture, loisirs… Et enfin les besoins tertiaires comprennent le superflu : gadgets, futilités, etc.
En fait, on peut se demander si l’essentiel du discours sur les besoins n’est pas destiné à contrôler les aspirations voire les revendications exprimées par les individus et les groupes sociaux.
Voir : Besoin social
jpf
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Besoin social
Un besoin devient non plus individuel mais social, quand il est reconnu comme indispensable par une majorité des membres du groupe. Les besoins sociaux constituent l’ensemble des besoins dont la satisfaction est considérée par les membres d’une collectivité donnée comme indispensable pour assurer un niveau et un style de vie adaptés au degré de développement et au statut du groupe.
Ainsi, les besoins sociaux sont une création permanente de l’histoire. Un exemple : depuis qu’ils se sont très largement répandus, le téléphone et le récepteur TV sont considérés comme des “ besoins ” et, à ce titre, pris en compte dans les budgets des bénéficiaires de l’aide sociale.
Voir : Aide sociale — Minimum vital — Minimum vital — Normes CSIAS
jpf
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Bien de consommation àð Consommation
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Bien-être
Le   bien-être  est considéré comme une construction multidimensionnelle (le bien-être physique, psychique et social). Il s'agit en plus de différencier entre le bien-être actuel (sensation momentanée) et le bien-être habituel (qualité permanente de la personnalité) .
Des influences contextuelles peuvent agir à court et à moyen terme sur les différents aspects du bien-être. On peut toutefois affirmer - s'appuyant sur les résultats d'études longitudinales et cliniques - que l'organisme, momentanément perturbé dans son fonctionnement, tend à regagner son équilibre originel de son bien-être.
Dans ce cas, un rôle crucial est attribué à la question de la disponibilité des ressources internes (psychiques et mentales) et des ressources externes (réseau social, profession etc.). Cela explique p. ex. le “ paradoxe du bien-être dans l'âge ” : le bien-être psychique ne subit pas de changements en corrélation avec l'âge croissant. Face à l'augmentation de l'âge accompagnée par l'augmentation des souffrances et des pertes de fonctionnalités, le processus d'interprétation psychique est amené à jouer un rôle décisif en permettant une adaptation aux changements constants.
Site Internet : www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Voir : Bien-être social — Image de soi — Qualité de vie — Usure professionnelle–Burnout — Vieillesse — Vieillesse (Psychologie de la)
Pasqualina Perrig-Chiello
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Bien-être social
Avec des indicateurs sociaux adéquats, il est possible de circonscrire le stade idéal de développement d’une société. Telle est l’ambition positiviste poursuivie par les tenants d’une définition objective du bien-être social, pour qui tout se quantifie. Outre que cette démarche suppose possible une définition de l’essence même du bien-être et implique de recueillir un consensus général sur les fins ultimes de la société — une quête sans fin —, elle occulte les difficultés de mise en œuvre d’une politique visant à remplir des critères qui sont aussi subjectifs. Toutefois, à défaut du plus ambitieux commun multiple, un dénominateur commun du bien-être social peut être trouvé sur une base théorique et empirique plus modeste, permettant notamment des comparaisons internationales. Parallèlement, il convient de mener une réflexion sur les fins et les moyens d’action de l’État ainsi que sur la nature de l’homme et ses besoins.
Disposer du seul PNB par habitant comme mesure du progrès économique et du développement social ne répond pas à la question de savoir si les membres d’une collectivité vivent “ bien ” ou mieux et s’ils en sont conscients. Dès 1954, les Nations Unies en prirent conscience. Les données sur le PNB furent complétées d’indications sur le pouvoir d’achat ; des indicateurs de développement social furent successivement testés, tel l’indice de développement humain du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) utilisé dans son rapport annuel, s’ajoutant aux travaux de l’OCDE et de la Banque mondiale. Dans l’optique du PNUD, la capacité pour un individu de fonctionner en société, partant ce qu’il peut faire ou être, représente un indicateur plus significatif que les ressources économiques, qui n’ont qu’un impact indirect sur le bien-être social, ou que des biens tels le bonheur, le désir d’accomplissement ou encore les possibilités de choix. Le bien-être social devient évaluation de la possibilité d’être, saisie par des indicateurs de résultats et non de moyens.
Pour permettre des comparaisons internationales, le bien-être social est alors défini empiriquement comme un indice composite de données sur l’espérance de vie, la mortalité infantile, l’illettrisme des adultes, le taux et la durée de scolarisation. Tout en étant larges en ce qu’elles renseignent plus ou moins directement sur l’accès des femmes aux services de santé, la qualité des soins prénataux et de l’alimentation, la qualité et l’existence d’une offre scolaire, ces mesures sont aussi limitées. En sont particulièrement absentes des données sur la sécurité, les libertés civiques, les droits de l’homme, l’emploi, autant de “ capacités ” pertinentes du bien-être social, singulièrement dans la vision du monde des habitants des pays développés démocratiques.
Le bien-être social peut aussi être approché en combinant des indicateurs sociaux objectifs et subjectifs à des indices synthétiques, à des données comparées ou longitudinales, à des analyses dynamiques, le tout dans une perspective aussi bien rétrospective que prospective. Ces différentes approches ne s’imposent pas d’elles-mêmes ; elles dépendent des préoccupations considérées comme essentielles par la société à un stade particulier de son développement. C’est ainsi que pour certains, le rôle de l’État doit dorénavant être repensé en fonction et de la quantité indispensable de biens à fournir, et de leur qualité optimale, propres à satisfaire des seuils variables selon les individus, d’aspirations et de besoins. L’analyse du bien-être se double alors d’une réflexion sur le mieux-être et sur l’adéquation des solutions existantes.
R. F. Andrews, S. Withey, Social indicators of well-being, Plenum Press, New-York, Londres, 1976. — A. Campbell, The sense of well-being in America, McGraw-Hill, New-York, 1981. — J. Drewnowski, On measuring and planning the quality of life, Mouton, La Haye, 1974. — D. Morris, Measuring the conditions of the world’s poor, Pergamon, New-York, 1979. — C. Murray, In pursuit of happiness and good government, Simon & Schuster, New-York, 1988. — OECD (OCDE), Measuring social well-being, Paris, 1976. — OECD (OCDE), Living conditions in OECD countries, a compendium of social indicators, Paris, 1986. — A. Sen, The standard of living, Cambridge University Press, Cambridge, 1987. — UNDP (PNUD), Human development report, Genève, annuel. — R. Veenhoven, Data book of happiness, Reidel, Boston, 1984. — World Bank (Banque mondiale), World development report, Washington, annuel.
Site Internet : www.oecd.org
Voir : Bien-être — Indicateurs sociaux — OCDE (Organisation de coopération et de développement économique)
Pierre Weiss
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Biens et services collectifs purs
Deux critères sont généralement utilisés pour différencier les biens et services : la rivalité (vs non-rivalité) et l’exclusion (vs non-exclusion). Un bien est considéré comme rival si la consommation d’une unité de ce bien par une personne empêche la consommation simultanée de la même unité par un autre consommateur. Par opposition, un bien est dit non rival lorsque sa consommation par un individu donné n’empêche pas d’autres consommateurs d’en jouir simultanément. Cette non rivalité peut être absolue ou relative comme dans le cas du cinéma où la non rivalité est limitée à la capacité d’accueil de la salle. Lorsque celle-ci est pleine, la consommation par un spectateur supplémentaire redevient rivale. Le deuxième critère se réfère à la capacité des producteurs d’exclure les consommateurs qui refuseraient de payer le prix pour le bien qu’ils offrent. On parle de non exclusion lorsque les producteurs sont dans l’incapacité d’écarter des consommateurs qui ne s’acquitteraient pas du prix exigé. Cette incapacité peut être technique s’il est impossible de pratiquer l’exclusion, comme dans le cas de l’éclairage public. Elle peut être aussi économique lorsqu’il serait possible techniquement d’exclure les consommateurs récalcitrants mais qu’il serait irrationnel de le faire en raison de coûts d’exclusion prohibitifs. Sur la base de ces deux caractéristiques, on peut discerner quatre groupes de biens : le premier est formé par les biens et services privés purs qui se prêtent à l’exclusion et qui sont rivaux (exemple : biens alimentaires). Le second est constitué par les biens et services collectifs mixtes marqués par la non rivalité et l’exclusion (cinéma ou autres spectacles culturels ou sportifs). Le troisième est toujours celui des biens et services collectifs mixtes marqués cette fois-ci par la rivalité et la non exclusion. Cette catégorie concerne essentiellement les ressources naturelles (renouvelables ou non) telles que par exemple la pêche en haute mer. Dans ce cas, la pêche réalisée par un bateau est rivale de celle d’un autre navire qui ne peut plus pêcher les mêmes poissons. En revanche, aucune exclusion n’est possible (dans le droit international actuel) pour écarter des producteurs qui ne voudraient pas payer le prix de cet usage. Cette situation se traduit par le risque d’un gaspillage de la ressource incriminée qui est surexploitée en raison même de l’absence de toute possibilité d’exclusion. La dernière catégorie est celle dite des biens et services collectifs purs qui se caractérisent par la non rivalité et la non exclusion. Elle recouvre de manière générale les services de l’administration publique, la défense nationale, les services diplomatiques, la justice ou l’éclairage public. La nature même de ces biens fait qu’aucune entreprise privée ne sera disposée à les produire sans une garantie de couverture financière de l’État. De surcroît, les individus ne sont pas incités à révéler leurs préférences sachant que si le bien est produit il est disponible pour tous. Il existe donc dans ce cas un problème d’allocation optimale des ressources puisque si ces services répondent à une demande, celle-ci reste insatisfaite en raison de l’absence de production privée. Le marché est donc mis en échec.
Pour combler cette lacune, l’État doit intervenir pour prendre en charge lui-même la production de ce bien (production publique) ou pour la confier à une entreprise privée concessionnaire. Néanmoins, il sera difficile de déterminer la quantité à produire puisque les consommateurs ne révèlent pas leurs préférences. Pour contourner ce problème, l’État peut, dans un système de démocratie directe, organiser des votations pour sonder la demande des citoyens. Il peut également forcer les contribuables à révéler leurs préférences en cessant de produire un service collectif pur. Finalement, le fédéralisme peut offrir une réponse partielle à ce problème. En effet, plus la taille des collectivités publiques chargées de la fourniture de certains services collectifs purs est réduite, plus les citoyens seront incités à révéler leurs préférences sachant qu’un comportement de resquilleur risque d’être vite détecté.
R. L. Weber, L’analyse économique des dépenses publiques, PUF, Paris, 1978.
Voir : Concurrence — Démantèlement social — Externalité
Yves Flückiger
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Bilan social
Le bilan social est un instrument d'information, de gestion, de concertation et d'aide à la décision s'adressant à la fois aux entreprises et aux institutions d'utilité publique. Contrairement au budget social, il ne vise pas la mesure d'un secteur d'activité, mais se présente comme un moyen d'évaluation de l'action sociale fondé sur l'analyse des institutions assurant la mise en œuvre sur le terrain des politiques sociales.
À partir d'objectifs prédéterminés, le bilan social évalue des actions accomplies au cours d'une période donnée. Domaines d'évaluation : clientèle et prestations, personnel, finances, stratégies, etc.
Budget social et bilan social ne recouvrent pas la même réalité et ne sont donc pas interchangeables.
R. B. Esnault, Le bilan de l’entreprise, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1993.
Voir : Budget social — Évaluation
Stéphane Rossini
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Bioéthique àð Comités et commissions éthique
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Bons (ou chèques) d éducation
Les bons (ou chèques) d éducation sont des titres de créance délivrés par les pouvoirs publics aux usagers qui ont droit à un service éducatif. Ces titres peuvent être échangés par leurs détenteurs, contre des prestations scolaires, dans les établissements de leur choix, lesquels obtiennent le remboursement de la valeur monétaire des bons d’éducation auprès des pouvoirs publics.
Ce système de financement public des écoles, qui a souvent été introduit dans des contextes de restrictions budgétaires, vise à mettre en concurrence les établissements éducatifs (publics et privés). Mais il contient le risque, si des mesures correctives n’y sont pas apportées, de renforcer à terme la disparité entre les établissements et l’inégalité d’accès aux offres éducatives. Car les projets d’extension à l’ensemble du système scolaire de la logique du marché recèlent bien souvent les buts inavoués des classes supérieures de mettre leurs enfants à l’abri des “ mauvaises fréquentations ” et de leur réserver l’accès aux meilleures écoles.
R. M. Carton, S. Hanhart, S. Perez e. a., Globalisation économique et systèmes de formation en Suisse. Cahier de la section des sciences de l’éducation, No 90, FPSE, Genève, 1999.
Voir : Coûts des enfants  Éducation (Politique de l )  Enfance (Politique de l ).
Joseph Coquoz
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Bonus éducatif àð Assurance-vieillesse et survivants
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Bourse
De manière générique, ce terme désigne tout marché public organisé sur lequel se négocient toutes sortes de biens ou de services. Aujourd’hui, il désigne une catégorie particulière de marché, celui sur lequel les acteurs échangent des capitaux et plus précisément des titres que l’on a pris l’habitude de désigner par le terme de valeurs mobilières par opposition à une autre forme de détention de la fortune, les valeurs immobilières. L’organisation d’un marché organisé présente l’avantage d’offrir une liquidité bien supérieure aux agents économiques que des transactions de gré à gré où chaque intéressé doit rechercher sa contrepartie sans être sûr de la trouver. Elle permet également d’établir un prix par confrontation de l’offre et de la demande et de financer les sociétés cotées lorsqu’elles procèdent à une augmentation de leur capital. L’organisation d’un tel marché ne nécessite en principe que l’accord de certains professionnels mais compte tenu de l’incidence de la bourse sur les taux d’intérêt, sur l’épargne et les investissements des entreprises et plus généralement sur l’opinion que se fait le public quant aux perspectives économiques à plus ou moins long terme, les pouvoirs publics interviennent sur ces marchés en fixant notamment les conditions pour l’accession à la profession de négociateur en bourse. Jusqu’à un passé récent, on distinguait, parmi les valeurs mobilières, les titres à revenu fixe (les obligations) et les valeurs à revenu variable (les actions). Mais face à la démultiplication des titres présentant des caractéristiques mixtes (obligations à taux variables, obligations convertibles en actions, actions à dividende garanti), cette distinction a perdu de sa pertinence. On parle aujourd’hui plus fréquemment de titres représentatifs d’un droit de propriété, de valeurs représentatives d’un droit de créances et de titres mixtes qui combinent les spécificités des deux autres catégories. Le cours des valeurs mobilières cotées en bourse connaissent des fluctuations souvent très amples et erratiques en apparence. Ce constat est suffisant pour admettre que ces cours ne reflètent pas en permanence la valeur réelle d’une entreprise. Les cours se forment à chaque instant à partir de transactions qui portent sur une fraction marginale des titres d’une entreprise. L’achat d’une valeur en bourse exprime l’espoir d’une certaine rentabilité basée sur des revenus futurs versés aux détenteurs du titre et d’une éventuelle plus-value au moment de sa revente. Si le revenu est parfois connu d’avance, la plus-value est elle incertaine. Le cours va donc traduire l’équilibre entre l’offre et la demande à un instant donné, en tenant compte des appréciations subjectives diverses qui se forment quant à l’évolution future du cours de ce titre. Les facteurs susceptibles d’influencer l’offre et la demande sont nombreux. Citons notamment l’évolution du taux d’intérêt qui, en cas de hausse, a tendance à réduire le cours des valeurs déjà émises. L’évolution des cours boursiers dépend également de l’abondance de l’épargne disponible et des préférences des épargnants pour les différentes formes de placement de leur fortune. La bourse suit également avec beaucoup d’attention la conjoncture économique ambiante et à venir puisque celle-ci détermine les perspectives bénéficiaires des entreprises et les prévisions de dividendes versés aux détenteurs de ces titres. Finalement, le climat politique international et la politique interne constituent également des facteurs susceptibles d’infléchir l’évolution des bourses. A ces facteurs globaux viennent évidemment s’ajouter des variables propres à chaque entreprise qui influencent le cours de son titre par rapport au reste du marché. La vigueur de la concurrence dans un secteur, les innovations technologiques, les annonces de fusion, les décisions prises par les autorités de la concurrence vont modifier les prévisions émises par les acteurs et influencer ainsi le cours des titres négociés en bourse.
Voir : Marché du travail
Yves Flückiger
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Boycott
Terme désignant de manière générale l’action visant à empêcher une personne, un groupe d’individus ou un État de conclure des contrats en tant que client, fournisseur, employé ou employeur afin de paralyser son action économique. L’étymologie de ce terme remonte à l’action entreprise en 1880 par une ligue agraire de l’Irlande de l’Ouest qui parvint à entraver l’exploitation agricole d’un certain Charles Cunningham Boycott réputé pour sa dureté excessive à l’encontre des petits fermiers. Le boycott peut être décrété soit par un État à l’encontre d’un autre État et de ses ressortissants soit par des entreprises ou des syndicats envers d’autres personnes. Si les objectifs d’un boycott sont clairement économiques, en visant à sanctionner un pays ou une entreprise sur le plan financier notamment, les motifs du boycott sont généralement politiques ou sociaux. Si les boycotts internationaux relèvent du droit public international, les actions décidées par des entreprises ou des syndicats à leur propre initiative sont du ressort du droit privé. Dans ce cas, les actions de boycottage sont généralement considérées comme illicite par le droit américain car elles dérogent de manière disproportionnée au principe de la liberté de commerce et d’industrie. Néanmoins, dans plusieurs pays européens, et en Suisse notamment, la licéité de boycottage entre entreprises a été admise parfois comme moyen de défense des intérêts d’une profession.
Voir : Syndicats
Yves Flückiger
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Budget des ménages
Cette notion évoque une réalité importante, particulièrement pour les études qui s’attachent à définir les niveaux de vie et à mesurer l’évolution du coût de la vie. Les budgets des ménages sont fréquemment présentés sous forme de tableaux de dépenses des ménages. En général, on distingue (1) entre les niveaux des dépenses et la structure de celles-ci et (2) entre les dépenses de consommation (achat de biens et de services) et les dépenses de transfert (impôts, assurances, cotisations). En ce qui concerne les niveaux des dépenses, ils se traduisent par la présentation des dépenses moyennes mensuelles (ou éventuellement annuelles) des ménages, souvent selon le type de ménage et certaines caractéristiques de la personne de référence du ménage (sexe, âge, nationalité, groupe socio-économique, groupe de revenus, etc.). A titre d’exemple, l’Office fédéral de la statistique a pu montrer que, de 1990 à 1998, les dépenses mensuelles moyennes des ménages ont progressé d’environ 19 %, passant de 6219 à 7418 francs. Plus précisément, on a observé que les dépenses de consommation n’ont progressé que d’environ 9 % de 1990 à 1998 (passant de 4296 à 4670 francs par ménage et par mois), tandis que les dépenses de transferts ont fortement augmenté (43 %), passant de 1923 à 2748 francs par ménage et par mois. L’analyse de la structure des dépenses se base sur une nomenclature plus ou moins détaillée des catégories de dépenses des ménages. Au sein du groupe des dépenses de consommation, on distingue généralement les postes suivants : produits alimentaires et boissons non alcoolisées ; boissons alcoolisées et tabac ; vêtement et chaussures ; logement et énergie ; ameublement, équipement et entretien du ménage ; services médicaux et dépenses de santé ; transports ; communications ; loisirs et culture ; enseignement ; restauration, hôtellerie ; autres biens et services. Les postes suivants décomposent les dépenses de transfert : assurances sociales retenues sur le salaire ; assurances sociales des indépendants ; assurance-maladie de base ; assurances maladie et accidents complémentaires ; autres assurances de ménages ; impôts et taxes ; cotisations, dons et autres versements. A titre d’exemple également, on notera qu’au sein des dépenses de consommation (63 % du total des dépenses), le logement (environ 18 %) représente le poste le plus important. Viennent ensuite l’alimentation et les boissons (environ 10 %), les loisirs et la culture (environ 7 %), les transports (environ 7 %) et l’hôtellerie et la restauration (environ 6,5 %). La part des autres postes se situe au-dessous de 5 %. Au niveau des dépenses de transfert (37 % au total), les assurances sociales et les impôts occupent les premières places, avec des parts respectives d’environ 14 et 13 %. Tous ces résultats sont issus de l’Enquête sur les revenus et la consommation 1998 de l’Office fédéral de la statistique. Plus généralement, les données recueillies au sujet des budgets des ménages autorisent plusieurs types d’analyses. D’une part, elles servent, par exemple, à l’analyse de la consommation et pour le calcul de l’indice des prix à la consommation. D’autre part, elles fournissent la base empirique d’analyses sociologiques des comportements, des modes et des styles de vie notamment. Enfin, elles ont été longtemps une base pour l’approche du phénomène de pauvreté sous l’angle des dépenses des ménages. Il faut relever qu’aujourd’hui ce phénomène tend à être étudié plutôt sous l’angle des revenus (seuils objectif et/ou subjectif) ou des conditions d’existence. Ce dernier point permet de relever au passage que, de manière plus globale, on peut concevoir la notion de budget des ménages en y incluant systématiquement le niveau et la structure des revenus des ménages, c’est-à-dire finalement comme une “ balance ” entre les revenus et les dépenses des ménages.
Site Internet : www.unine.ch/psm/f/panel.html
Voir : Budget familial — Consommation des ménages — Panel des ménages
Robin Tillmann
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Budget familial
Cette notion évoque une réalité importante, particulièrement pour les études qui s’attachent à définir les niveaux de vie et à mesurer l’évolution du coût de la vie. Les budgets familiaux sont fréquemment traduits par des tableaux donnant les dépenses moyennes annuelles par ménage pour de nombreuses catégories de population dans une nomenclature de consommation très détaillée. Ils enregistrent la totalité des dépenses des ménages, que ce soit des achats de biens et de services de consommation, des investissements ou des transferts.
Ils permettent l’étude des disparités de consommation entre catégories de population, l’analyse du comportement et des modes de vie de sous-populations spécifiques (personnes âgées, immigrés). ou encore l’approche de phénomènes comme le chômage ou la pauvreté.
En Suisse, les résultats de travaux de ce type sont actuellement disponibles à l’Office fédéral de la statistique.
Voir : Consommation des ménages — Famille (Politique de la) — Indice des prix — Office fédéral de la statistique (OFS)
jpf
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Budget social
Le budget social apparaît en France lorsqu'est institué le régime des prestations familiales, en 1949. Plusieurs pays et organismes internationaux développeront par la suite des systèmes de mesure financière destinés à la politique sociale. En Suisse, plusieurs interventions parlementaires condamnent, à partir des années soixante, le manque de vue d'ensemble de la protection sociale et de ses coûts et réclament davantage d'aides à la décision. En 1989, le Fonds national de la recherche scientifique finance un projet consacré à l'élaboration du budget social de la Suisse. La problématique est enfin officialisée. En 2000, l’Office fédéral de la statistique établit les Comptes globaux de la protection sociale selon la méthode Eurostat.
Définition. Le budget social est un cadre de référence quantitatif, qualitatif et politique traitant de la politique sociale de la nation. Il est un instrument de connaissance, de mesure et d'analyse des actions mises en œuvre dans le champ social. Il est l'expression d'une politique, à travers ses objectifs, ses moyens et ses résultats effectifs. Il contribue à la gestion, la coordination, l'évaluation et la planification de la politique sociale.
Le budget social doit permettre de répondre aux questions suivantes :
— Quelles politiques sociales sont instituées, pour répondre à quelles éventualités ?
— Quels groupes de personnes sont protégés et qui sont les bénéficiaires ?
— Qui assure la mise en œuvre et selon quelle organisation ?
— Jusqu'à quel niveau de protection ?
— À quels coûts et selon quels financements ?
— Quelles sont l'efficacité et les perspectives de la politique sociale ?
L'expression “ budget social ” est ambiguë. Financièrement, il s'agit de l'ensemble des recettes et dépenses affectées à la politique sociale d'un pays. Mais au plan politique, un budget est l'acte par lequel sont prévues et autorisées les recettes et dépenses annuelles de l'État ou des autres services assujettis aux mêmes règles. Un budget public doit donc être soumis à l'assemblée législative pour être voté et, s'il est accepté, autoriser l'utilisation des ressources ainsi mises à disposition. Le concept semble donc trop restrictif en regard du contenu et des fonctions attribués dans la définition. Désormais, officiellement, la terminologie Comptes globaux est à utiliser, sachant toutefois qu’au informations financières s’ajoutent des données quantitatives et qualitatives au service de l’évaluation des politiques sociales.
R. S. Rossini, Budget social de la Suisse. Nécessité et perspectives, Réalités sociales, Lausanne, 1995. — S. Rossini, Budget social de la Suisse. Nécessité et perspectives, Réalités sociales, Lausanne, 1995. — P. Gilliand, S. Rossini, La protection sociale en Suisse. Recettes et dépenses 1948-1997, Réalités sociales, Lausanne, 1997. — Office fédéral des assurances sociales, Statistique des assurances sociales 2000, Berne.
Voir : Bilan social — Comptes globaux de la protection sociale — Eurostat-Sespros — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Sécurité sociale — Statistique sociale — Transferts — Transparence (Principe de)
Stéphane Rossini
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Budget-temps
Recueil de données concernant l’emploi du temps des personnes dans une société moderne. Cette notion est particulièrement utilisée dans les travaux concernant les institutions et l’organisation du travail. Elle concerne également des problèmes qui touchent à la consommation ou à l’organisation de la vie familiale.
Voir : Flexibilité du travail — Temps de travail
jpf
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Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes
Créé en 1988, le Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes a aujourd'hui la fonction d'un office au sein du Département fédéral de l'intérieur. L'article sur l'égalité dans la Constitution fédérale et la loi sur l'égalité de 1995 (LEg) constituent le fondement de son mandat : promouvoir l'égalité des sexes dans tous les domaines et éliminer toutes les formes de discrimination, directe ou indirecte.
Ses services couvrent des activités de conseils et d'information dans des domaines aussi divers que l'égalité des salaires, la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle, les assurances sociales, la violence à l'égard des femmes, la formation, la migration, la participation politique. Le Bureau participe à l'élaboration des actes normatifs fédéraux et s'engage pour l'égalité entre femmes et hommes sur le plan international. Il traite les demandes d'aides financières selon la LEg et met à disposition du public un centre de documentation.
R. Loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes (RS 151). — M. Bigler-Eggenberger, C. Kaufmann, Commentaire de la loi sur l'égalité, Réalités sociales, Lausanne, 2000.
Site Internet : www.equality-office.ch
Voir : Égalité (Bureau de l’) — Égalité de traitement entre femmes et hommes — Égalité entre hommes et femmes — Femmes (Émancipation des)
Patricia Schulz
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Bureau international du travail (BIT)
Le Bureau international du travail est le seul organe permanent de l'Organisation internationale du travail. Il est composé de fonctionnaires internationaux indépendants de leur gouvernement. Conçu dans un premier temps comme un simple secrétariat, le Bureau devient bientôt, grâce au dynamisme de son premier directeur Albert Thomas, partenaire à part entière des négociations menées au sein de l'Organisation. Par delà les clivages idéologiques et les conflits d'intérêts, il est censé défendre le point de vue universel des droits sociaux de l'homme. Il ne dispose cependant pas de capacités décisionnelles qui sont réservées aux organes représentatifs de l’OIT : la Conférence internationale du travail et le Conseil d’administration du BIT. Le Bureau fonctionne également comme quartier général des activités de coopération technique de l'OIT et assure la préparation des rapports scientifiques présentés lors de chaque session de la Conférence internationale du Travail.
R. J.-M. Bonvin, L’Organisation internationale du travail, Étude sur une agence productrice de normes, Paris, PUF, 1998. — N. Valticos, Droit international du travail, 2e éd., Dalloz, Paris, 1983.
Site Internet : www.ilo.org
Voir : Conférence internationale du travail — Organisation internationale du travail (OIT)
Jean-Michel Bonvin
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Burnout àð Usure professionnelle
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Caisse de compensation
Les caisses de compensation sont des organes juridiquement indépendants, créés spécialement pour l application de l AVS. Il en existe au total 98 en Suisse, soit 26 caisses de compensation cantonales, 70 caisses de compensation professionnelles et deux caisses de compensation de la Confédération.
Les caisses de compensation assument la plupart des tâches administratives de l’AVS. Elles fixent les cotisations des personnes qui exercent une activité indépendante et des personnes sans activité lucrative. Elles se chargent également de la perception des cotisations, du calcul et du paiement des rentes et du décompte avec la Centrale de compensation. Les caisses de compensation cantonales doivent en outre contrôler l’affiliation de toutes les personnes tenues de payer des cotisations sur le territoire de leur canton.
Les caisses de compensation professionnelles peuvent ouvrir des agences dans certaines régions linguistiques ou dans des cantons où sont regroupés de nombreux employeurs et des personnes de condition indépendante qui leur sont affiliés. La caisse de compensation fédérale est compétente pour le personnel de l'administration fédéral et des établissements fédéraux, alors que la Caisse suisse de compensation est chargée d'appliquer l'assurance facultative des suisses à l'étranger ainsi que les conventions internationales de sécurité sociale.
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Assurance-vieillesse et survivants (AVS)
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Caisses-maladie
Les caisses-maladie constituent l’une des deux catégories d’assureurs chargés de gérer l’assurance obligatoire des soins et l’assurance individuelle d’indemnités journalières selon la LAMal. Elles peuvent pratiquer les assurances complémentaires, voire d’autres branches d’assurance à certaines conditions et limites fixées par le Conseil fédéral. Les caisses-maladie sont des institutions de droit privé (la grande majorité) ou de droit public (telles les caisses cantonales). Elles exercent leur activité sans but lucratif et doivent être reconnues par le Département fédéral de l’Intérieur. Les caisses-maladie ont existé bien avant la première loi fédérale, sous des appellations et en organisations diverses (caisses de secours, sociétés mutuelles, caisses cantonales ou communales). Leur effectif passait les 1000 unités entre 1925 et 1964. Il tourne autour de 200 caisses actuellement. La LAMal s’est ouverte à une seconde catégorie d’assureurs : les institutions d’assurances privées ayant obtenu l’autorisation et la reconnaissance de la Confédération pour la gestion de l’assurance-maladie sociale.
R. Statistiques de l’assurance-maladie, Assureurs reconnus par la Confédération, OFAS, Berne, mai 1995.
Voir : Assurance-maladie et l’assurance-accidents (Article constitutionnel sur l’) — Assurance-accidents — Assurance-maladie (AM) — Caisses-maladie (Fédérations cantonales des)
Michel Surbeck
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Caisses-maladie (Fédérations cantonales des)
Les fédérations cantonales des caisses-maladie sont organisées par canton ou par groupe de cantons, auxquelles sont affiliés la quasi-totalité des assureurs LAMal. Elles ont pour but de coordonner les actions de leurs membres et de défendre leurs intérêts auprès des autorités publiques et des dispensateurs de soins, notamment dans la négociation, la signature et l'application des conventions tarifaires cantonales.
Jusqu'en 1994, les fédérations cantonales étaient autonomes. Les assureurs-maladie ont entrepris une refonte totale de leur organe faîtier national “ santésuisse - Les assureurs-maladie suisses ”; et les fédérations cantonales, chapeautées par une organisation régionale (quatre régions pour la Suisse) ont perdu leur autonomie juridique et sont dorénavant rattachées organiquement à santésuisse.
R. Infosantésuisse, le magazine des assureurs-maladie, suisses No 7-8, juillet-août 2001.
Voir : Assureurs-maladie — Assureurs-maladie suisses (santésuisse) — Caisses-maladie
Michel Surbeck
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Capitalisation
Il s’agit d’un système de financement utilisé dans la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité, collective et individuelle (prévoyance professionnelle selon la LPP et prévoyance personnelle). Il s’oppose aux systèmes de répartition. Sa caractéristique réside dans le fait qu’il incombe à chaque bénéficiaire potentiel de prestations de constituer, pendant le temps qu’il exerce une activité lucrative — moyennant la participation de l’employeur s’il s’agit d’un salarié — le capital nécessaire au financement des prestations auxquelles il aura droit dès son départ en retraite. Ce processus d’épargne conduit à une accumulation de fonds qui eux-mêmes produisent des intérêts. Les prestations de vieillesse sont déterminées sur la base des cotisations versées et des intérêts produits pendant toute la période d’activité de l’assuré. Le financement par capitalisation s’impose chaque fois que la condition de la pérennité de l’institution de prévoyance n’est pas assurée, soit lorsque le renouvellement de l’effectif des cotisants n’est pas garanti et qu’il existe ainsi un risque de liquidation de l’institution de prévoyance ou d’assurance, à tout le moins celui d’une diminution abrupte du nombre des actifs.
Avantages de la capitalisation : elle permet de financer les prestations au moyen des contributions versées par et pour les assurés eux-mêmes ; elle ne reporte donc pas la charge de ces prestations sur les générations futures ; en outre, les intérêts générés par les capitaux accumulés réduisent d’autant la charge des cotisations pour les assurés et leurs employeurs.
Inconvénients de la capitalisation : en période de forte inflation, la substance des fonds accumulés en vue du paiement des prestations futures est plus ou moins fortement entamée ; lors de l’entrée en vigueur d’un régime de prévoyance fondé sur la capitalisation se pose le problème du sort à réserver à la génération d’entrée.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Prévoyance professionnelle — Primauté des cotisations — Primauté des prestations — Répartition — Répartition (Méthodes de)
Bernard Viret
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Caritas Suisse
Œuvre d’entraide catholique fondée en 1901. Caritas Suisse est une association d’utilité publique dont le siège est à Lucerne. Caritas Suisse mène des programmes d’aide au développement en Afrique, en Amérique latine, en Asie et en Europe de l’Est. Elle intervient également en cas de catastrophe et procure une aide d’urgence. En Suisse, elle s’occupe de l’accompagnement des requérants d’asile et des réfugiés statutaires sur mandat de la Confédération et des cantons. En collaboration avec les Caritas Régionales, Caritas Suisse mène des programmes de lutte contre la pauvreté multidimensionnelle (chômage, exclusion, endettement, suicide, médiation pénale) et offre des services de consultation juridique. Elle propose également des produits du commerce équitable à travers ses magasins Fairness. Caritas Suisse publie des ouvrages traitant des questions sociales, de développement et de migration. Un contrat lie l’œuvre d’entraide à la Conférence des évêques suisses : Caritas Suisse, en tant que service diaconal, doit s’efforcer de promouvoir une certaine justice sociale et mettre tout en œuvre pour secourir les personnes en détresse.
R. Aide sociale - une action concertée? Éditions Caritas, Lucerne, 2000. — Des alliances pour la paix, Prise de position sur la prévention des crises, le traitement des conflits et la promotion de la paix dans la coopération internationale, Éditions Caritas, Lucerne, 2000.
Site Internet : www. caritas. ch
Voir : Entraide
André Simonazzi
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Cas social
La méthode de pédagogie active appelée “ Étude des cas ” a renforcé l’usage courant de l’expression “ Cas social ” pour désigner des personnes dont les problématiques médico-psycho-sociales sont suffisamment importantes et permanentes pour justifier leur description et leur analyse à titre d’exemple dans la formation et la gestion de l’action sociale. La méthode d’intervention individualisée appelée “ Case work ”, importée des USA dans les années 1950, a elle aussi contribué à perpétuer l’usage du mot “ cas ” pour parler des clients du travail social.
Encore très utilisée dans le langage commun, cette acception est aujourd’hui considérée comme stigmatisante par les professionnels du travail social. Pour éviter l’amalgame personne-objet, on s’en tient plus volontiers à l’expression “ situation sociale ” ou à “ usager ” ou “ client ”.
Voir : Étiquetage (Théorie de l’) — Stigmatisation — Travail social
Charles Chalverat
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Catégories socioprofessionnelles
Cette notion renvoie à des instruments permettant de classer les individus selon leur situation professionnelle. Ces classifications sont très largement utilisées dans les enquêtes conduites dans le cadre des diverses disciplines des sciences humaines. Elles sont d’un usage généralisé dans les annuaires de statistiques. Le fait qu’il n’existe pas un accord sur la définition de ces catégories ne manque pas de poser des problèmes, surtout dans la pratique des analyses comparatives.
Voir : Profession
jpf
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Causalité (Rapport de)
Clause générale fondée sur un raisonnement d’analyse qui consiste à s’interroger sur le rapport et l’organisation d’enchaînements événementiels. On distingue entre le rapport de causalité naturelle et le rapport de causalité adéquate, le premier devant être réalisé pour que l’on puisse examiner le second. La causalité naturelle a pour objet la sélection, parmi un nombre théoriquement indéfini d’éléments, des conditions dont on ne peut pas faire abstraction sans que le résultat ne se produise pas du tout, qu’il ne survienne pas de la même manière ou à la même époque. La causalité adéquate, fondée sur une sélection causale en vertu d’un jugement de valeur, pose la question de savoir si le fait considéré comme condition nécessaire à l’effet est propre, d’une manière générale, selon le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, à causer un résultat du genre tel qu’il s’est produit.
R. G. Scartazzini, Les rapports de causalité dans le droit suisse de la sécurité sociale, Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1991. — P. Omlin, Die Invalidität in der obligatorischen Unfallversicherung, Universitätsverlag, Freiburg, 1995.
Voir : Assurance (Principe de l’) — Risque — Risques sociaux
Gustavo Scartazzini
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Centrale de compensation àð Perte de gain (Allocations pour) (APG)
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Centre d étude de la politique sociale (CEPS)
Créé en 1979, le CEPS est à l origine du présent dictionnaire comme de diverses autres publications. Il s agit d un organisme indépendant réunissant différentes institutions, associations et personnes intéressées au développement de l’étude de la politique sociale, de l’action et de la législation sociale. Il organise des journées de politique sociale. Par exemple, en date du 6 décembre 1993, la journée a été consacrée à la sécurité sociale en Suisse et en Europe. Elle a réuni plus de 200 participants au BIT.
Voir : Association suisse de politique sociale (ASPS) — Journées de politique sociale
Roger Girod
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Centre de loisirs, centre d’animation de quartier
L’expression “ centre de loisirs ” apparaît au début des années 60. On propose alors les premières activités de loisirs organisées ; elles sont destinées aux seuls adolescents qui se retrouvent dans des “ bistrots protégés ”, des foyers et des maisons de jeunes. En 1996, elle renvoie à divers lieux : maisons de quartier (ouverture à tous), centres de rencontres (adultes et aînés), jardins Robinson et terrains d’aventures (enfants). Le nom “ centre de loisirs ” a vieilli, son sens est trop étroit pour rendre compte de l’éventail des animations offertes aujourd’hui. Du temps des loisirs, on est passé au temps libre et au temps du non travail. Par exemple, les centres accueillent des chômeurs et des préretraités. Pour marquer cette évolution, on préfère les nommer désormais “ centres d’animation ”.
Sur le plan de l’animation socioculturelle, Genève est atypique par rapport à d’autres cantons suisses ou d’autres régions francophones d’Europe. C’est probablement le lieu où on est allé le plus loin dans l’institutionnalisation et la légitimation de l’animation (État – communes – associations – professionnels – bénévoles), dans la formation des animateurs et des moniteurs. Les centres d’animation y sont reconnus par tous comme l’une des composantes indispensables de la politique sociale.
— 1961-1968. Prévenir la délinquance juvénile. Faire face à un problème social par une animation de prévention : “ des loisirs sains pour une jeunesse saine ”.
— 1968-1975. Ère des controverses politiques : lutte pour ouvrir les centres sur le quartier et pour une animation porteuse de changement social.
— 1976-1980. Le Règlement du Conseil d’État met de l’ordre dans la maison ; il crée la commission cantonale qui produira “ en partenariat ” les règles du jeu du système des centres ; les animations enfants sont privilégiées.
— 1993. Un an de concertation pour fabriquer une Charte cantonale qui affirme le sens et les finalités des actions d’animation partagés par tous les partenaires.
Actuellement, les centres défendent une politique de prévention de certains effets de la crise. On cherche à prévenir la dégradation de certaines situations sociales (précarisation, marginalisation, exclusion). Ainsi, on développe des réseaux de solidarité dans les deux secteurs de l’action éducative et de l’action associative. L’animation de quartier destinée à toutes les populations vise à renforcer le lien social.
R. J. Dumazedier, Vers une civilisation du loisir ? Seuil, Paris, 1962. — D. Felder, M. Vuille, “ De l’aventure à l’institution : les centres de loisirs genevois ”, in : Service de la recherche sociologique, Cahier No 12, Genève, 1979. — Charte cantonale des centres de loisirs, centres de rencontres, maisons de quartier, jardins Robinson et terrains d’aventure du canton de Genève, 1993.
Voir : Animation socioculturelle — Désaffiliation — Jeunesse — Jeunesse socialemement vulnérable — Pauvreté — Politique de la jeunesse — Solidarité
Michel Vuille
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Centres sociaux protestants (CSP)
Les Centres Sociaux Protestants de Suisse romande ont été créés à partir de 1954, successivement à Genève, Lausanne, Neuchâtel et Moutier. Ils sont issus de l’action sociale des paroisses. Les CSP, en tant que services privés, assurent gratuitement auprès de chacun, sans distinction de confession, des rôles d’écoute et de soutien à travers des consultations sociales, juridiques, conjugales. Dès leur début, ils ont développé des activités d’accueil et de défense aux côtés des immigrés, réfugiés et requérants d’asile. En collaboration avec des bénévoles, chaque CSP met dans son travail des accents qui lui sont propres : activités destinées aux jeunes, prévention sida, réinsertion des chômeurs, etc. Dans une tradition issue de la Réforme, les CSP défendent une éthique de la solidarité, de la responsabilité et une pratique du débat public.
R. D. Pache, Centre Social Protestant-Vaud, 30 ans au service des uns et des autres, La Passerelle, Lausanne, 1991.
Voir : : Action sociale — Aide sociale — Bénévolat — Diaconie — Enseignement social chrétien — Travail social
Pierre-André Diserens
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Certificat de perfectionnement en politique sociale
Depuis 1974, le Département de sociologie de la Faculté des sciences économiques et sociales de l'Université de Genève propose, avec l'appui de divers organismes (Institut international d'études sociales du BIT, Association internationale de la sécurité sociale, Institut d'études sociales de Genève, École d'études sociales et pédagogiques de Lausanne, Institut universitaire d'études européennes) un programme d'enseignement et de recherche en matière de politique sociale.
La fréquentation des cours est parfaitement compatible avec l'exercice d'une activité professionnelle, puisqu'ils sont regroupés au même endroit et le même jour de la semaine. À la demande du canton du Tessin, un cycle de formation a été organisé à Mendrisio. Le diplôme qui y est décerné est identique à celui que reçoivent les étudiants de Genève.
Ce dictionnaire est issu du réseau de collaborations scientifiques qui s'est tissé dans le cadre de ces programmes d'enseignement.
Site Internet : www.unige.ch/ses/socio/Etudes/certif.htm
Voir : Fonds national suisse de la recherche scientifique — Formation continue — Formation continue en travail social (Diplôme de) — Travailleurs sociaux (Formation des)
Sophie Barras Duc
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Chaîne du Bonheur (Fondation suisse de la)
La Fondation suisse de la Chaîne du Bonheur est une institution de droit privé, sans but lucratif, issue de la radio suisse romande. Elle est reconnue d'utilité publique. Née en 1946, elle est aujourd'hui le plus puissant outil de recherche de fonds à but social et humanitaire en Suisse. La Chaîne est l'instrument par lequel peuvent s'exprimer concrètement toutes les générosités. Elle se situe au carrefour entre les donateurs et les victimes. Avec l'appui de la Société suisse de radiodiffusion et de télévision (SSR), dont elle est le bras humanitaire, elle lance des collectes afin de secourir les personnes confrontées au malheur et à l'adversité, en particulier lors de catastrophes majeures en Suisse et à l'étranger. Les dons sont attribués intégralement aux actions pour lesquelles ils ont été collectés. Les fonds récoltés pour la mise en œuvre de programmes d'aide à l'étranger sont attribués, après analyse des projets soumis, aux principales œuvres suisses d'entraide qui sont ses partenaires réguliers. En 2000, la Chaîne du Bonheur a récolté la plus importante collecte de l'histoire suisse : 72,2 millions de francs suisses suite aux graves intempéries qui ont frappé le Valais et les régions avoisinantes.
Voir : Action humanitaire — Action sociale
Félix Bollmann
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Champ d’application personnel
Le champ d’application personnel est l’une des composantes essentielles de tout système ou régime de sécurité sociale, avec le champ d’application matériel (éventualités), les prestations, l’organisation administrative, financière et contentieuse. Il fait l’objet de règles précises dans les droits nationaux comme dans le droit international. Il s’agit de la détermination des personnes couvertes, qui pourront prétendre aux prestations si elles remplissent les conditions d’octroi de celles-ci. Dans les régimes constitués sous la forme d’assurances sociales, le terme est synonyme d’assurés.
R. Bureau international du travail, Introduction à la sécurité sociale, 3e éd., BIT, Genève, 1986, pp. 11 ss.
Voir : Affiliation obligatoire (Principe de l’) — Éventualité — Prestations de sécurité sociale — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Généralisation de la) — Universalité
Pierre-Yves Greber
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Charge de travail
La charge de travail comprend l’ensemble des activités qu’un travailleur ou une travailleuse doit exécuter selon un standard de qualité déterminé. Elle indique par ailleurs l’effort à fournir par le travailleur pour accomplir le travail exigé. Elle peut être consignée dans un cahier des charges (travail prescrit) dont cependant s’éloigne en règle générale, le travail effectif. La question de la charge de travail apparaît lorsqu’elle est problématique (sur- ou sous-charge) dans un contexte de transformation de l’entreprise et d’absence de consensus quant à la quantité et à la qualité du travail exigé et supportable.
Dans le domaine du travail social en Suisse, la question est documentée dès le milieu des années 1950 et donc contemporaine aux débuts de la professionnalisation. Les modèles d’évaluation les plus courants sont : le comptage du nombre de dossiers, parfois pondérés en fonction de divers critères ; la détermination d’un nombre de travailleurs sociaux en fonction du nombre d’habitants d’une région ; l’attribution d’une durée standard aux actes courants.
Ces modèles, pragmatiques, trouvent leurs principales limites dans l’absence d’un consensus social quant à la légitimité et aux objectifs de l’action sociale, et d’un standard de qualité des prestations.
R. R. Brack, Das Arbeitspensum in der Sozialarbeit. Ein Beitrag zur Klärung der Arbeitsbelastung, 3e édition, Verlag Paul Haupt, Bern und Stuttgart, 1994. — V. Keller, J.-P. Tabin, L’évaluation de la charge de travail en service social, Recherche Do-Re en cours, EESP, Lausanne. — J. Orme, Workloads : Measurement and Management, Hants, Avebury, 1995.
Voir : Usure professionnelle  Travail social
Véréna Keller
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Charge locative àð Logement (Politique du)
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Charge sociale
Le financement de la sécurité sociale mobilise d importantes ressources financières. Celles-ci ne sont toutefois pas retirées du circuit économique ; elles y reviennent par la voie de la consommation et de l’épargne, jouant un rôle stabilisateur sur la conjoncture.
Le poids relatif des recettes des assurances sociales dans l’économie – le rapport des recettes au produit intérieur brut (PIB) – est un indicateur de la charge sociale. Dans les comparaisons internationales, on se réfère plutôt à la quote-part des prestations sociales (dépenses pour les prestations/PIB) qui indique la part de la production économique globale redistribuée par les assurances sociales.
Le niveau optimal de la charge sociale ne se laisse pas déterminer directement. Les quotes-parts n’ont de sens qu’en comparaison sur la durée et entre pays. On observe une corrélation entre la quote-part des prestations et le PIB : plus un pays est riche, plus il consacre de ressources aux prestations sociales. La Suisse se situe en deçà de cette tendance, mais elle s’est rapprochée de la moyenne européenne depuis la dernière récession (hausse sensible des dépenses sociales, stagnation du PIB).
R. P. Gilliand, S. Rossini, La protection sociale en Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 1997. — Groupe de travail interdépartemental IDA FiSo, Rapport sur les perspectives de financement des assurances sociales, OFAS, Berne, 1996. — Office fédéral des assurances sociales, Statistiques des assurances sociales suisses 1999, Berne, 1999.
Voir : Budget social — Financement de la sécurité sociale
Géraldine Luisier
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Charité
La charité (du latin caritas, Agapè en grec) désigne l’amour de bienveillance par opposition à l’amour érotique ou à l’amour de simple dilection. Dans la tradition judéo-chrétienne, elle concerne essentiellement la relation entre Dieu et ses créatures. Le Nouveau Testament souligne le lien étroit entre le “ premier commandement ” d’amour pour Dieu et le second, “ qui lui est semblable ” : “ tu aimeras le prochain comme toi-même ”. Jésus-Christ manifeste la suprématie de la charité en allant jusqu’à la mort sur la croix : “ Il n’y a pas plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ” (Jn 15,13).
Service de Dieu et du prochain traversent ainsi l’histoire du christianisme, l’hôtel-Dieu médiéval (cf. l’hospice de Beaune) est indissociablement lieu d’accueil, de soins et d’adoration. Vertu théologale, la charité couronne la foi et l’espérance, elle se conjugue nécessairement avec la justice et la miséricorde.
Réduite à sa dimension philanthropique, la charité chrétienne a été critiquée par le marxisme, le socialisme et le libéralisme pour son inefficacité ou son aspect conservateur. En réponse, s’est développé, depuis Léon XIII, l’enseignement social de l’Église qui souligne les dimensions sociales et politiques de l’Évangile.
En Suisse, Caritas, organe de l’Église catholique, dispose d’un budget d’une centaine de millions de francs. Elle est active de l’aide aux réfugiés aux soupes populaires, en passant par les crèches, les hôpitaux, les homes pour handicapés, personnes âgées, orphelinats, le logement social, les foyers de jour, l’aide aux drogués, aux sidéens, la réinsertion des prisonniers, les banques de vêtements, de nourriture, etc. Comme ses homologues protestants, elle dispose d’un service juridique, et permet une aide à large spectre, de type généraliste.
Voir : Caritas Suisse — Enseignement social chrétien
Jean-Blaise Fellay
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Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs
Les chefs d’État ou de gouvernement des États membres de la Communauté européenne, soit de 11 États membres (le Royaume-Uni n’y ayant pas souscrit), ont adopté le 9 novembre 1989 une proclamation solennelle intitulée “ Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs ”.
Cette Charte s’inspire notamment des conventions de l’Organisation internationale du travail et de la Charte sociale européenne du Conseil de l’Europe. Elle comprend un préambule et deux parties.
Le préambule rappelle les principes de base sur lesquels repose l’Europe sociale : création d’emplois, compétitivité, rapprochement dans le progrès des conditions de vie et de travail, cohésion économique et sociale, égalité de traitement, subsidiarité, dialogue social.
Le titre I énumère en 26 articles les droits sociaux fondamentaux des travailleurs dans les domaines de la libre circulation, de l’emploi et de la rémunération, de l’amélioration des conditions de vie et de travail, de la protection sociale, de la liberté d’association et de la négociation collective, de la formation professionnelle, de l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes, de l’information, de la consultation et de la participation des travailleurs, de la protection de la santé et de la sécurité dans le milieu de travail, de la protection des enfants et des adolescents, des personnes âgées et des personnes handicapées. Le titre II, comprenant 4 articles, s’occupe de la mise en œuvre de la Charte : la Commission est invitée à présenter le plus vite possible les initiatives relevant de sa compétence en vue de l’adoption des instruments juridiques pour la mise en œuvre effective des droits fondamentaux des travailleurs.
Effectivement, plusieurs des directives édictées en matière sociale ont été élaborées sur la base de la Charte.
R. G. Guery, La dynamique de l’Europe sociale, Paris, 1991. — G. et A. Lyon-Caen, Droit social international et européen, 8e éd., Dalloz, Paris, 1993.
Voir : Droits sociaux — Union européenne (UE) — Union européenne (Réglementation de l’)
Alexandre Berenstein
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Charte sociale européenne
L’un des premiers objectifs du Conseil de l’Europe a consisté dans la rédaction d’instruments destinés à assurer le respect des droits de l’homme par les États membres. La Convention européenne des droits de l’homme, conclue en 1950, ne traitait en principe pas des droits sociaux. La lacune fut comblée par l’adoption le 18 octobre 1961 de la Charte sociale européenne, entrée en vigueur le 26 février 1965.
La partie I de la Charte formule 19 principes généraux que les États doivent se proposer comme objectifs de leur politique sociale. La partie II reprend ces 19 principes et les concrétise, en formulant sous le couvert de ces principes des engagements précis, parmi lesquels les États entendant se lier par l’instrument doivent choisir, dans la mesure autorisée par la Charte. Le choix doit porter sur 5 au moins des sept articles de ce qu’on appelle le “ noyau dur ” de la Charte, relatifs au droit au travail, au droit syndical, au droit de négociation collective, au droit à la sécurité sociale, au droit à l’assistance sociale et médicale, au droit de la famille à une protection, au droit des travailleurs migrants. Les États ratifiant la Charte doivent en outre se considérer comme liés par un total de 10 articles ou 45 paragraphes numérotés.
Le contrôle de l’application de la Charte par les États qui l’ont ratifiée est effectué sur la base de rapports présentés par chacun de ces États ; ces rapports sont soumis à un Comité d’experts indépendants et au Comité des ministres, qui peut adresser des recommandations individuelles à des États.
La Charte a été révisée à plusieurs reprises, en 1988, par la reconnaissance de quatre nouveaux droits, en 1991, par des dispositions destinées à améliorer les mécanismes de contrôle, en 1995, par l’introduction d’un système de réclamations collectives. Enfin, la Charte a été intégralement révisée le 3 mai 1996.
La Charte révisée énumère un total de 31 droits ; le noyau dur (chaque État devant reconnaître au moins 6 droits) est complété par la prise en considération du droit des enfants et des adolescents à la protection et du droit à l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession. Le nouveau texte n’est pas encore entré en vigueur.
La Charte a été ratifiée par 20 États membres du Conseil de l’Europe, soit par tous les États de l’Europe occidentale, à l’exception de la Suisse et du Liechtenstein, qui l’ont signée, mais non ratifiée (l’Assemblée fédérale suisse a pris une position négative en 1984 et 1987).
R. G. Agnelli e. a., Die Europäische Sozialcharta, Baden-Baden, 1978.
Voir : Conseil de l’Europe — Conseil de l’Europe (Instruments du) — Droits sociaux — Fondements du droit de la sécurité sociale
Alexandre Berenstein
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Choix budgétaires (Rationalisation des)
La rationalisation des choix budgétaires, ou RCB, est une méthode datant des années soixante, qui fixe un cadre analytique au processus décisionnel des pouvoirs publics. Autrement dit, un moyen de répondre à la question “ Comment l’État doit-il intervenir ? ”.
La RCB prévoit cinq étapes initiales : analyse des objectifs, analyse des moyens, confrontation objectifs – moyens, élaboration de programmes alternatifs et évaluation des différents programmes. À l’issue de ce processus, une décision est prise. Elle est suivie par une phase de contrôle qui fournira des enseignements utiles aux autres réflexions en cours. Autrement dit, à partir d’un plan stratégique, il s’agit de choisir un programme d’action en fonction des moyens à disposition sur la base de critères objectifs.
Les outils de la RCB proviennent essentiellement de la science économique appliquée (recherche opérationnelle, budget base zéro, optimisation) et de la théorie des systèmes.
Appliquée en France et aux États-Unis jusque dans les années quatre-vingt, la RCB a permis d’engager une multitude d’études. Toutes n’ont pas débouché sur des décisions formelles. La RCB a toutefois eu le mérite d’ajouter une culture économique à la culture juridique des acteurs de l’administration. Elle a aussi élargi le champ d’application de l’analyse rationnelle.
La complexité des problèmes a joué un rôle dans l’abandon de la RCB. Ceux-ci ne peuvent plus être résolus grâce à la seule analyse simplement en y consacrant suffisamment de ressources. Ensuite, il est difficile d’évaluer si une décision effective a été prise scientifiquement ou sur une base plus intuitive. Enfin, la question des années 90 est moins le “ Comment l’État intervient-il ? ” mais plutôt “ Faut-il que l’État intervienne et quelle est sa place au sein de l’économie ? ”. L’analyse ex ante de la RCB est plutôt remplacée par des interrogations ex post basées sur des évaluations de l’action conduite.
R. Dictionnaire critique d’action sociale, Coll. Travail social, Bayard, Paris, 1995. — Société suisse pour la politique de la santé (SGGP), Maîtrise des coûts dans l’économie hospitalière : approches et moyens, Cahiers d’études de la SGGP, Lausanne, 1983.
Voir : Budget social — Enveloppe budgétaire — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Planification sociale
Fabrice Ghelfi
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Chômage
La reconnaissance du chômage, comme fait social et économique, remonte à la fin du XIXe siècle. Elle intervient dans un contexte où il s’agit de renforcer l’ordre industriel et réguler l’emploi. Dès le départ, le dénombrement des “ vrais ” chômeurs fait l’objet de controverses entre les syndicats, les autorités et le patronat. Il introduit des discriminations qui touchent ceux qui, sans travail, ne se plient pas à la discipline des entreprises et au système salarial. Actuellement, le chômage reste associé à des notions telles que salariat, emploi, droit au travail et socialisation par le travail, il se définit par l’exclusion qui isole les sans travail en classe distincte, et il ouvre la porte à la régression sociale.
R. J. Batou e. a. (Éd.), Pour une histoire des gens sans histoire. Ouvriers, exclus et rebelles en Suisse, XIXe-XXe siècles, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1995.
Voir : Assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur l’) — Chômage (au sens du BIT) — Contre-prestations — (Mesures actives du marché du travail (MMT)) — Office régional de placement — Travail (Marché du)
Jacqueline Millet
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Chômage (Article constitutionnel relatif à la protection contre le)
L'art. 114 Cst. (tout comme l'art. 34 novies a Cst., adopté le 13 juin 1976) contient un véritable programme de politique sociale. La Confédération a reçu le mandat de régler par voie législative l'assurance-chômage (al. 1) et la compétence de légiférer en matière d'aide sociale en faveur des chômeurs (al. 5). Au niveau des prestations, l'assurance-chômage doit remplir trois fonctions : une compensation appropriée de la perte du revenu (donc l'objectif du régime va au-delà de la couverture des besoins vitaux), la prévention et la réadaptation (al. 2 let. a). L'affiliation est obligatoire pour les salariés (al. 2 let. b) et les indépendants peuvent s'assurer à titre facultatif (al 2 let. c).
L'assurance-chômage est financée par les cotisations des assurés. L'employeur prend à sa charge la moitié du montant de la cotisation de ses salariés (cotisations paritaires) (al. 3). La Confédération et les cantons allouent des prestations financières dans des circonstances exceptionnelles (al. 4).
Observations :
— Tout changement radical du régime d'assurance-chômage (réduction des prestations à une garantie minimum et/ou privatisation) nécessite une modification préalable de la Constitution.
— L'art. 114 al. 5 pourrait constituer une des bases pour une future loi fédérale sur le revenu minimum d'insertion (devenue urgente après la 2e révision de la LACI, cf. DLA 2000 p. 81).
— L'art. 114 al. 2 let. a, interprété d'une façon téléologique, permet d'instaurer des liens étroits entre l'assurance-chômage et la politique de formation (en particulier : aide à la formation des travailleurs actifs).
— Le mandat constitutionnel de l'art. 114 al. 2 let. c n'est pas encore rempli.
— Sur la participation des Cantons à l'élaboration et à l'exécution des dispositions légales, cf. art. 42 ss et 147 Cst. Sur celle des organisations économiques, cf. art. 164 al. 2 et 178 al. 3 Cst.
R. P.-Y. Greber, Commentaire de la Constitution fédérale, “art. 34 novies”in : J.-F. Aubert, K. Eichenberger e. a., Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1987-1996. — D. Cattaneo, Les mesures préventives et de réadaptation de l'assurance-chômage, Helbing & Lichtenhahn Bâle et Francfort sur-le-Main, 1992. — D. Cattaneo, “ I provvedimenti inerenti al mercato del lavoro nella LADI ”, in : Il Ticino e il diritto, Ed. CFPG, Lugano, 1997, pp. 231 ss. — T. Nussbaumer, “ Arbeitslosenversicherung ” in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht (SVBR), Ed Helbing & Lichtenhahn, Bâle, Genève et Munich, 1998.
Voir : Assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur l’) — Chômage — Revenu minimum d’insertion (RMI)
Daniele Cattaneo
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Chômage (au sens du BIT)
Instrument de référence pour la définition du chômage. Quatre critères doivent être remplis simultanément pour être chômeur au sens du BIT : a) être dépourvu d’emploi ; b) être à même de travailler ; c) chercher un travail rémunéré ; d) le rechercher activement. En pratique, les législations nationales “ traduisent ” ces critères de manière plus ou moins restrictive.
Voir : Bureau international du travail (BIT) — Chômage
jpf
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Chômage (Structure du)
Le chômage global peut être divisé en trois composantes : frictionnel, structurel et conjoncturel. Le chômage frictionnel apparaît lorsque sur un marché particulier (hôtellerie genevoise par exemple), les employeurs déclarent des places vacantes alors que l’on enregistre, au même moment, des chômeurs dans ce secteur. Cette situation est liée à un problème d’information et au processus de recherche d’un nouvel emploi de la part des chômeurs ou d’un nouvel employé du côté des entreprises. C’est un chômage de courte durée par opposition au chômage structurel qui est associé à une inadéquation entre les personnes sans travail et les éventuels emplois disponibles. Ce chômage est difficile à combattre. Il exige des efforts de requalification ou de mobilité géographique de la part des chômeurs. Finalement, le chômage conjoncturel provient d’une insuffisance globale de la demande de travail émanant des entreprises par rapport à l’ensemble des personnes qui souhaitent travailler.
Pour lutter efficacement contre le chômage, il faut adopter des mesures adaptées au type de problème observé. Une politique de relance économique ne parviendra pas à réduire le chômage d’origine structurelle de même qu’elle ne pourra pas éliminer les frictions liées au fonctionnement du marché. Par opposition aux instruments macro-économiques, les politiques de l’emploi ont pour objectif d’améliorer le fonctionnement du marché du travail pour réduire les frictions tout en agissant sur les qualifications des chômeurs et en incitant les entreprises à embaucher des personnes inemployées. Malgré leur diversité, ces mesures actives peuvent être rangées en quatre catégories. La première regroupe les mesures ciblées sur l’offre de travail pour améliorer les qualifications des chômeurs, les orienter vers des nouvelles professions ou accroître les efforts de formation continue. La seconde concerne les mesures dirigées plus spécifiquement vers les entreprises pour les inciter à embaucher des jeunes qui entrent sur le marché du travail ou des chômeurs en fin de droit en subventionnant, durant une certaine période, le salaire des personnes qu’elles engagent. Ces mesures peuvent prendre la forme également d’aide en faveur des chômeurs qui créent leur propre entreprise. La troisième catégorie porte sur des mesures visant à améliorer l’information sur le marché du travail et l’efficacité des services de placement. Finalement, la dernière catégorie concerne les mesures visant à adapter les lois et les institutions en modifiant les coûts de licenciement, en aménageant le temps de travail (retraite anticipée, annualisation du temps de travail) ou en modifiant la fiscalité et les cotisations sociales pour favoriser la création d’emplois. Jusqu’en 1995, la part des mesures actives dans les dépenses totales en faveur du chômage s’élevait en Suisse à moins de 25 % alors qu’elle dépassait 33 % en Europe. Avec la révision de la LACI en 1995, les mesures actives sont devenues une pièce centrale du dispositif helvétique de lutte contre le chômage.
R. OCDE, Politiques du marché du travail en Suisse, Paris, 1996.
Voir : Assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur l’) — Chômage —Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Office régional de placement (ORP)
Yves Flückiger
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Chômage (Taux de)
Le taux de chômage est défini comme le rapport entre la population au chômage et l’ensemble des personnes actives qu’elles soient occupées ou non. La population active regroupe donc à la fois les personnes qui ont un emploi et celles qui en recherchent un activement. Le nombre de chômeurs représente quant à lui l'ensemble des personnes disposées à travailler aux conditions existantes du marché (notamment en matière de salaires) mais qui ne parviennent pas à trouver un emploi malgré leurs recherches actives. Pour calculer ce taux, il faut donc disposer de données relatives aux chômeurs et à la population active. En Suisse, il existe deux statistiques du chômage. La première, officielle, est établie par le Secrétariat à l’économie (Seco). Elle recense le nombre de personnes inscrites, à la fin de chaque mois, auprès d’un office cantonal de l’emploi, qu’elles aient ou non droit à une indemnité de chômage. Dans cette statistique, pour qu’une personne soit considérée comme chômeur, il faut qu’elle soit inactive et à la recherche d'un emploi à plein-temps ou à mi-temps; employée à mi-temps au maximum et à la recherche d'un emploi à plein-temps ou d'un deuxième poste de travail à mi-temps ; immédiatement disponible et apte à être placée, ce qui signifie qu'elle doit être disposée à accepter un travail et être en mesure et en droit de le faire. Finalement, elle doit être âgée de plus de 14 ans révolus. Comme l'inscription auprès d'un office cantonal de l'emploi constitue une prémisse obligatoire pour obtenir des indemnités, les données officielles publiées par le Seco permettent de recenser toutes les personnes indemnisées. En revanche, les personnes qui ne peuvent pas ou qui ne peuvent plus obtenir d’indemnités (notamment les chômeurs en fin de droit) sont libres de s'inscrire auprès d'un office de l'emploi. Leur décision d'inscription dépendra des bénéfices qu'elles peuvent escompter obtenir. Si elles pensent que l'office du travail de leur lieu de domicile est en mesure de les aider à retrouver un emploi, ou si cette inscription est indispensable pour avoir droit à des mesures cantonales, comme à Genève, elles auront tendance à s'y rendre pour s'annoncer comme demandeurs d'emploi. En revanche, si cette démarche leur paraît vaine, elles ne seront pas inscrites officiellement auprès d'un office. Elles échapperont ainsi aux statistiques du chômage qui seront sous-estimées.
Jusqu'en 1991, les données publiées chaque mois par le Seco constituaient la seule source officielle de statistiques du chômage en Suisse. Depuis 1991, notre pays dispose d'une nouvelle source d'information provenant d'une enquête effectuée auprès d'un échantillon représentatif de la population. Cette enquête suisse sur la population active (ESPA) a été réalisée pour la première fois en 1991 par l'OFS. Elle est reconduite depuis lors au courant du deuxième trimestre de chaque année civile. Grâce à l'ESPA, on peut désormais dénombrer les chômeurs en Suisse sur la base des recommandations édictées par le BIT, l'OCDE et la CE. Pour qu'une personne soit considérée comme chômeur dans cette enquête, elle doit, conformément aux normes internationales en vigueur, satisfaire les quatre critères suivants : n'avoir exercé aucune activité lucrative au cours de la semaine ayant précédé l'enquête ; avoir cherché un emploi au cours des quatre dernières semaines ; avoir entrepris durant cette période une ou plusieurs démarches spécifiques pour trouver un emploi et être en mesure de commencer à travailler au cours des quatre semaines consécutives à l'enquête. Sur la base de ces critères, on peut établir le nombre de personnes considérées comme chômeur dans l'échantillon. En extrapolant cette information pour l'ensemble de la population, on obtient alors le chiffre estimé du nombre total de chômeurs en Suisse au moment de l'enquête.
R. A. de Coulon, Y. Flückiger, “ The Analysis of Regional Unemployment Inequality : The Case Of Switzerland ”, in : Unemployment in Europe, M. A. Landesmann, K. Pichelmann, McMillan (Éds), 2000, pp. 260-272.
Voir : Bureau international du travail (BIT) — Chômage — OCDE — Office fédéral de la statistique (OFS) — Population active
Yves Flückiger
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Ciblée (Politique)
Un raisonnement apparemment simple est proposé par les milieux défiants à l’égard de la sécurité sociale : les dépenses sociales croissent, les ressources sont comptées, impossible de poursuivre les “ politiques d’arrosage ”, il faut définir des priorités et ne fournir des prestations qu’à ceux qui en ont “ vraiment besoin ”. Le principe tombe : il faut donner la priorité à des politiques ciblées.
Ce propos bardé d’évidences semble être incontestable. Qui oserait mettre en doute le fait qu’il faut aider le vrai pauvre, et que la priorité doit être donnée aux plus nécessiteux ? Pourtant, cette piste politique est dangereuse, contre-productive, le plus souvent inefficace et peut-être plus coûteuse. En un mot, une politique ciblée vers les pauvres est une pauvre politique.
D’abord, cela implique de définir des critères, de classer et de coller des étiquettes. On devine les sentiments d’exclusion qui en résultent. Sans parler de l’armée de spécialistes appelés à déterminer les seuils, à construire les catégories et à vérifier le statut et le comportement des bénéficiaires. Au bout de la démarche : une société découpée en multiples segments bien rangés, où chacun aura sa place après avoir dû mettre à plat la plupart des dimensions de ce qui fait sa vie quotidienne.
Plusieurs études récentes, de dimension internationale, ont montré que les politiques ciblées ne parviennent pas à atteindre leurs objectifs. Pire, elles tendent à aggraver la situation. Pourquoi ? En fait, c’est assez simple : pour accéder à ses droits et obtenir les prestations disponibles, chacun doit s’engager dans un véritable “ parcours du combattant ”.
a) D’abord, il faut qu’il perçoive le besoin, et dans les délais. Or, on sait que les plus pauvres sont ceux qui anticipent le moins et qui, trop souvent, se résignent.
b) Ensuite, il doit disposer des connaissances de base pour savoir que les solutions existent et qu’elles lui sont accessibles.
c) Il doit être informé du fait qu’il y a droit. Quand tout chancelle a-t-on encore le sentiment d’avoir des droits ?
d) Il doit être persuadé de l’utilité de ce qui lui est offert. Les prestations qu’on lui propose vont-elles résoudre son problème ?
e) Il doit aussi avoir une attitude neutre ou positive vis-à-vis de la démarche qu’il est appelé à entreprendre. Comment vont se dérouler les négociations ? Quelle sera la réaction de l’entourage ? Que signifie pour lui le fait de devenir dépendant d’une instance officielle ?
f) Il doit enfin mesurer la situation dans laquelle il se trouve. Situation passagère ou durable ? A-t-il encore la force d’élaborer un projet ? Vit-il sa souffrance comme surmontable ?
Les couches les plus défavorisées sont celles qui éprouvent le plus de difficultés à faire face à ce type d’interrogation et qui renoncent trop fréquemment à parcourir avec succès un chemin aussi sinueux.
R. J.-P. Fragnière (Éd.), Repenser la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1995. — J.-P. Fragnière (Éd.), Politiques sociales pour le XXIe siècle, Réalités sociales, Lausanne, 2001.
Voir : Aide sociale — Démantèlement social — Effet pervers — Solidarité
jpf
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Circulation des personnes (Libre)
La libre circulation des personnes constitue l’une des quatre libertés fondamentales garanties par le traité instituant la Communauté européenne (traité CE). L’article 18 de ce dernier attribue le droit à tous les citoyens de l’Union européenne de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. Ce droit fondamental à la libre circulation est défini par les articles 39 ss (travailleurs salariés) et 42 ss (indépendants) du traité CE. Des actes adoptés par le législateur communautaire prévoient l’obligation des États membres d’accorder des avantages sociaux aux migrants sans discrimination fondée sur la nationalité et la coordination des régimes nationaux de sécurité sociale.
R. B. Kahil-Wolff, Sécurité sociale et libre circulation des personnes en droit communautaire, Lausanne, 1992. — P. Mercier, O. Jacot-Guillarmod, La libre circulation des personnes et des services, Bâle, 1991.
Voir : Accord sur la libre circulation Suisse-CE — Communauté européenne et sécurité sociale — Coordination — Immigration
Bettina Kahil-Wolff
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Citoyenneté
La citoyenneté peut être définie comme l’ensemble des prérogatives et des obligations propres aux membres d’une communauté politique.
Historiquement, la citoyenneté a d’abord eu comme lieu d’ancrage la cité ou le bourg (la constitution suisse en garde trace). Par la suite, l’institutionnalisation de la citoyenneté moderne s’est inscrite dans un ensemble de processus : la formation des États où se sont combinés, selon des modalités variables, unification territoriale sous l’autorité d’un agent central unique (non sans que celui-ci ait vu ses fonctions et responsabilités être redéfinies), émergence d’une société civile et d’un espace public, et construction “ d’imaginaires nationaux ” (B. Anderson) ; le développement économique consécutif à la révolution industrielle et son impact sur l’organisation sociale et le monde de vie des individus, plaçant le travail et les travailleurs au cœur des enjeux de citoyenneté ; enfin, sur le plan culturel, l’avènement de l’individualisme, et la place prépondérante que celui-ci confère à la liberté individuelle et sa protection légale. Au XXe siècle, l’émergence et consolidation de l’État social intègre à la citoyenneté une dimension sociale (droit à l’éducation, droits sociaux).
D'un point de vue analytique, on peut distinguer trois principes ou composantes de la citoyenneté :
— un principe politique dans lequel les individus égaux entre eux en tant que membres d'un même corps politique (le demos) participent à la délibération et à l’élaboration des lois auxquelles ils sont liés (on reconnaît ici la notion d'autolégislation formulé par Aristote) ;
— un principe légal, qui fait de l’individu un citoyen en lui attribuant un ensemble de droits spécifiés juridiquement ; le citoyen n’est donc pas nécessairement ici un co-auteur de la loi, mais une personne qui, de par la loi, peut agir librement et est en situation d'en attendre protection ;
— un principe d’appartenance qui définit le citoyen en référence à sa qualité de membre d’une catégorie spécifique, cette appartenance commune constituant un lien spécial entre les membres et un pôle d’identification susceptible de susciter solidarité, vertu civique et engagement.
L’État national, démocratique et social a été perçu comme un espace permettant d’articuler ces trois principes et de faire se coïncider participation civique, statut légal et identité culturelle de manière relativement peu conflictuelle. Cela est remis en question aujourd’hui. La mondialisation économique et la mise en place d’institutions supranationales imposant leur régulation aux individus et aux États ; le développement d’associations et de mobilisations collectives transnationales contribuant à l’élaboration d’un espace public et d’une culture politique postnationaux ; ou, de manière interne aux États, la présence de populations étrangères ou de minorités culturelles revendiquant droits et reconnaissances : ces facteurs, parmi d’autres, amènent à devoir reconsidérer la manière d’articuler ces trois principes et leur lieu d’ancrage respectif. Ainsi, si l’État reste un espace essentiel d’institutionnalisation et de pratique de la citoyenneté, en a-t-il de moins en moins l’exclusivité.
R. J. Cohen, “ Changing Paradigms of Citizenship and the Exclusiveness of the Demos ”, in : International Sociology, 14 (3), 1999, pp. 245-268. — Y. Deloye, Sociologie historique du politique, La Découverte, Paris, 1997. — M. Walzer, “ Citizenship ”, in : T. Ball, J. Farr, R.L. Hanson (Éds), Political Innovation and Conceptual Change, Cambridge University Press, Cambridge, 1989, pp. 211-219.
Voir : Démocratie (et politique sociale) — Droits sociaux — Société civile
Jean-François Bickel
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Clandestin àð Immigration
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Classe spéciale, classe spécialisée, classe de développement
La classe spéciale correspond à une innovation pédagogique de la seconde moitié du 19e siècle. Elle relève des philanthropes engagés dans l amélioration des conditions de vie des classes populaires, mais aussi de tous les “ laissés pour compte du progrès ”. C’est après la guerre franco-allemande de 1870 que se développe en Suisse une volonté politique de contrôle des acquis scolaires et que sont repérés les “ analphabètes ”, les “ faibles d’esprit ” et les “ arriérés ” ou “ retardés ” scolaires.
En 1896 est organisé un dénombrement fédéral de l’“ enfance malheureuse ”, lequel est une statistique des enfants “ faible d’esprit ”, “ idiots ”, infirmes physiques et mentaux et “ abandonnés moralement ”. Un des objectifs est d’évaluer le nombre d’enfants ayant besoin d’un enseignement spécial.
Les classes spéciales apparaissent ainsi comme une première brèche dans l’enseignement ordinaire, lequel s’adresse à tous les enfants (l’obligation de l’instruction est inscrite dans la Constitution de 1874). Désormais les enfants qui ont pris du “ retard ”, calculé en fonction du rapport entre niveau d’instruction et âge biologique, sont placés dans ces classes, souvent à effectif réduit, et y reçoivent un enseignement individualisé. Dans les années 1910 on cherchera à homogénéiser les classes en regroupant les élèves selon les degrés et les types d’“ arriération ”.
Aujourd’hui on constate que dans les classes spéciales les enfants étrangers sont en général sur-représentés, comme le sont les enfants dans des situations de précarité ; une grande hétérogénéité y est donc la règle plutôt que l’exception.
Voir : Éducation spécialisée — Instruction publique
Martine Ruchat
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Clause du besoin
Par clause du besoin, il faut entendre les dispositions arrêtées par la Confédération ou les cantons pour restreindre l’offre ou le financement de certaines prestations du système sanitaire. Il s’agit essentiellement de mesures visant la maîtrise des prestations et qui interfèrent sur les investissements, la densité médicale ou les prestations des régimes d’assurance. La clause du besoin s’inscrit dans le débat sensible de l’évolution des coûts du système de santé.
Voir : Coûts de la santé — Politique de la santé
Stéphane Rossini
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Clause sociale
Dans le but d’améliorer leur compétitivité, les gouvernements du Sud sont incités à démanteler le dispositif de protection sociale des travailleurs. De telles décisions entraînent ces pays dans le cercle vicieux d’une surenchère à la dévaluation sociale compétitive.
Pour empêcher ces évolutions, il existe des conventions internationales relatives aux droits sociaux ratifiées au sein de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). Par celles-ci, cet organisme a tenté de jouer un rôle de régulateur en matière sociale en favorisant la liberté syndicale, le droit d’organisation et de négociation collective, en agissant contre le travail forcé ou obligatoire et contre toute discrimination dans l’emploi, pour l’égalité de rémunération entre femmes et hommes, contre le travail des enfants. L’OIT a rencontré de réels problèmes d’application de ces conventions.
Dans le cadre d’une régulation globale, seules les règles du commerce international décidées à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) sont contraignantes. Une fois qu’il a été statué sur le litige commercial, la sanction est déterminée. Face à ce pouvoir, quelques pays du Nord ont proposé d’amender les règles de l’OMC par une clause sociale qui garantisse le respect de droits sociaux afin de permettre d’empêcher les importations de pays dont les modes de production violeraient tout ou partie de la clause sociale.
Cette proposition est rejetée par les pays du Sud et quelques organisations. Selon eux, tout agenda social à l’OMC cache une tentative de protectionnisme du Nord puisqu’ils ne peuvent pas s’aligner sur des normes de pays riches sans en payer le prix fort en termes de compétitivité de leurs industries d’exportation. En outre, une telle clause ne concernerait pas les infractions constatées sur les marchés internes. Enfin, une norme ne serait pas applicable là où l’économie est surtout informelle et où les capacités institutionnelles sont insuffisantes pour imposer l’application d’une norme.
La question de la clause sociale, comme réponse au développement durable et à la lutte contre la pauvreté du Sud, n’est donc pas tranchée. D’autant plus qu’elle s’insère dans un débat plus large sur la dignité humaine : code de conduite des entreprises, certification de responsabilité sociale des entreprises, fonds d’investissements éthiques, labels de produits du commerce éthique, achats publics éthiques, campagne de sensibilisation citoyenne et, en bout de chaîne, commerce équitable.
Sites Internet : www.evb.ch/db/hp5a.htm — www.solagral.org/international/omc/omc_citoyen/social/clause_omc. htm
Voir : Développement durable — Direction du développement et de la coopération — Organisation Internationale du Travail — Organisation Mondiale du Commerce
Fabrice Ghelfi
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Clonage
Le clonage est une technique médicale permettant d’amplifier une séquence génétique (clonage de gènes) ou de reproduire une cellule, voire un organisme entier, génétiquement identique (clonage cellulaire), par la division d’un embryon ou par le transfert d’un noyau cellulaire dans un œuf dont on a retiré le noyau. Le clonage de gènes est utilisé principalement pour fabriquer des médicaments et des vaccins. Le premier clonage de vertébré a eu lieu en 1952 (une grenouille) mais c’est la naissance de la brebis clonée Dolly en février 1997 en Écosse qui a suscité la plus grande inquiétude, en montrant que le clonage reproductif humain était théoriquement possible.
Cette inquiétude est à l’origine d’une vague de réactions législatives, en particulier l’adoption en janvier 1998, à Paris, d’un protocole additionnel à la Convention européenne sur les droits de l’homme et la biomédecine, signé par 29 pays, dont la Suisse, et ratifié par 5 d’entre eux (Espagne, Géorgie, Grèce, Slovaquie et Slovénie), pour lesquels il entre en vigueur le 1er mars 2001. Ce Protocole interdit le clonage reproductif. En Suisse, l’article 119 de la Constitution fédérale interdit “ toute forme de clonage ” et l’article 36 de la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée punit de l’emprisonnement “ quiconque crée un clone ”, sans faire les distinctions nécessaires entre les diverses formes et finalités du clonage.
R. J. Humber, R. Almeder (Éds), Human Cloning, Humana Press, Totowa (N.J.), 1998.
Voir : Comités et commissions d’éthique — Déontologie — Génome humain
Olivier Guillod
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Code civil suisse (CCS)
Largement conçue par Eugène Huber, cette œuvre d’unification et de codification de pans entiers du droit privé est entrée en vigueur en 1912. Un titre préliminaire regroupe dix dispositions générales dont la portée rejaillit sur l’application de l’ensemble de la législation. Pour le surplus, le Code est composé de quatre livres et d’un titre final faisant l’objet d’une numérotation qui lui est propre :
— Droit des personnes (art. 11 à 89bis).
— Droit de la famille (art. 90 à 456).
— Droit des successions (art. 457 à 640).
— Droit réel (art. 641 à 977).
Pièce maîtresse de la législation privée, le Code civil est complété par le Code des obligations, lequel en constitue formellement le livre cinquième. Le droit privé ne se limite toutefois pas aux textes codifiés. Il comprend en outre diverses lois spéciales, notamment celle sur le droit international privé, laquelle répond aux exigences de la diversité des ordres juridiques nationaux et de l’internationalité d’un grand nombre de situations de la vie juridique. Les textes légaux sont par ailleurs complétés par de nombreuses ordonnances fédérales, dont celle sur l’état civil et celle sur le registre foncier.
Tant le Code civil que le Code des obligations ont subi de nombreuses modifications. L’on se bornera à relever ici la révision achevée ou en cours de l’essentiel du droit de la famille (adoption, filiation, mariage, divorce, tutelle).
R. Scyboz/Gilliéron, Version annotée du Code civil et Code des obligations complétée par d’autres textes, 6e éd., Payot, Lausanne, 1999. — Pour un commentaire du Code civil et une bibliographie détaillée, l’on se rapportera au traité de Tuor/Schnyder/Schmid, Das schweizerische Zivilgesetzbuch, 11. Auflage, Schulthess Polygraphischer Verlag, Zürich, 1995.
Martin Stettler
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Cohésion sociale
La notion de cohésion sociale connaît aujourd’hui les honneurs médiatiques avec son pendant négatif qu’est la fracture sociale. Le discours politique comme la vulgate sociologique en ont fait une des notions de base de leur analyse de la crise des sociétés contemporaines, pressentant l’une comme le rempart contre l’autre. Face au risque de déchirure sociale qui traverse les sociétés nationales par le bas et face au danger d’éclatement par la mondialisation qui les aspire par le haut, la cohésion sociale est appelée sur l’autel des valeurs fortes de cette fin de siècle.
Cependant cette notion n’est pas en soi nouvelle ; elle a un fort ancrage dans la tradition sociologique. Elle est en effet au cœur du paradigme intégrationniste, constituant la toile de fond de toute la sociologie durkheimienne qui cherchait à comprendre comment la société pouvait tenir comme totalité signifiante. Pour Durkheim, la cohésion d’une société passe par la mise en place d’une morale étayée sur des valeurs collectivement partagées et rationnellement fondées. Mais en parallèle, un tel paradigme présuppose consubstantiellement, d’une part, l’intégration des individus à la société grâce à l’existence de mécanismes intégrateurs et d’instruments légitimes de contrôle social, d’autre part, l’intégration de la société caractérisée par son unicité et son utilité.
Il faut dès lors se demander quelle est la pertinence d’une telle résurgence, hormis une utilité purement idéologique.
Primo, il est en effet frappant de constater que ce paradigme intégrationniste connaît un renouveau quand le paradigme conflictualiste, reposant sur la domination, l’aliénation et la division de la société en classes, subit un discrédit profond. En ce sens, l’omniprésence de la cohésion sociale dans les propos contemporains participe à occulter la question des inégalités socio-économiques, voire à légitimer ces dernières, en mettant l’accent sur le spectre de la dualisation de la société.
Secundo, la multiplicité des sources normatives, l’illégitimité des instruments de contrôle social, la désintégration des régulations traditionnelles et l’avènement d’un individualisme intransigeant (d’un égoïsme dirait Durkheim), caractéristiques actuelles de nos sociétés, nous contraignent à penser l’intégration à la société sans intégration de la société. En quelque sorte, alors même que la cohésion sociale connaît une remise au goût du jour idéologique, sa pertinence conceptuelle s’estompe puisque le défi contemporain est non pas tant de se demander comment maintenir la cohésion d’une société (une et indivisible comme le pensait Durkheim) pour permettre l’intégration de ses membres, que de comprendre quelles sont les voies de l’affiliation à une société culturellement et normativement plurielle.
R. E. Durkheim, De la division du travail social, 9e édition, PUF, Paris, 1973. — E. Durkheim, L’Éducation morale, 2e éd., PUF, Paris, 1963. — A. Lipietz, La société en sablier. Le partage du travail contre la déchirure sociale, La Découverte, Paris, 1996. — D. Schnapper, La France de l’intégration. Sociologie de la nation en 1990, Gallimard, Paris, 1991.
Voir : Désaffiliation — Intégration — Lien social — Pauvreté — Solidarité
Marc-Henry Soulet
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Comités et commissions d’éthique
Un comité ou une commission d’éthique est un groupe de réflexion formé de médecins et autres professionnels de la santé et des sciences du vivant, ainsi que de “ non-scientifiques ” : théologiens, philosophes, juristes et représentants de la société civile. Ces-derniers sont souvent appelés “ laïcs ” par opposition aux spécialistes qui maîtrisent les aspects scientifiques des questions abordées par la commission.
Le rôle des commissions d’éthique est multiple : offrir un espace privilégié de discussion et de débat, agir comme promoteur et protecteur des valeurs fondamentales de la société et servir d’arbitre – en se référant à ces mêmes valeurs – entre les différents points de vue et intérêts en jeu face aux dilemmes moraux soulevés par la pratique et la recherche médicale et par les progrès de la médecine en générale. Plus récemment, des commissions d’éthique ont étendu leur champ d’activité à l’ensemble des problèmes liés aux sciences du vivant, notamment au génie génétique, mais aussi aux problèmes démographiques, écologiques, économiques et sociaux.
La création des commissions d’éthique au sens moderne du terme coïncide avec le développement de la bioéthique dans les années soixante aux États-Unis. Alors que le principe de se référer à des pairs ou “ peer review ” est depuis longtemps ancré dans la pratique professionnelle des médecins, les comités d’éthique ne sont plus composés exclusivement de médecins. Cette ouverture interdisciplinaire constitue en soi une caractéristique de la bioéthique. Les comités d’éthique constituent ainsi autant l’expression de la bioéthique que le lieu où s’est développé ce nouveau champ de réflexion.
Il est usuel en bioéthique de distinguer éthique de la recherche, éthique clinique et éthique “publique”. La même distinction s’applique pour les comités d’éthique. Les commissions d’éthique de la recherche ont connu un essor particulier. Un chercheur désireux de procéder à un test avec des êtres humains doit en effet obtenir l’avis favorable d’une telle commission avant de débuter son essai. Cette obligation a été exprimée dans la Déclaration d’Helsinki de l’Association médicale mondiale lors de sa révision à Tokyo en 1975 et dans d’autres codes d’éthique nationaux et internationaux, par exemple les directives de l’Académie suisse des sciences médicales. Elle a été ensuite introduite dans les législations de la plupart des pays, dont la Suisse. Les comités d’éthique de la recherche ont suivi la même évolution. D’organes privés émanant d’associations professionnelles ou d’institutions de recherche, ils sont devenus des commissions relevant directement des autorités sanitaires et des organes de contrôle de la recherche. Les comités d’éthique clinique tendent à se développer moins rapidement, du moins en Europe. Leur rôle est de conseiller et d’accompagner les professionnels de la santé et les patients lorsqu’ils sont confrontés à des problèmes concrets dans leurs activités. Enfin, l’éthique publique est l’apanage des Commissions nationales d’éthique dont de nombreux pays se sont pourvus dans le courant des années nonante. Ce fut le cas en Suisse en 2001. Leur rôle est d’alimenter le débat public et, au besoin, d’émettre des propositions au gouvernement ou au législateur.
Voir : Acharnement thérapeutique — Clonage — Ethique — Génome humain — Institut d’éthique sociale (IES)
Dominique Sprumont
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Commission européenne
C’est en quelque sorte l’“ exécutif ” de l’Union européenne. Elle est composée (depuis le dernier élargissement) de 20 membres nommés d’un commun accord par les Gouvernements (2 pour les États les plus importants : Allemagne, Espagne, France, Italie et Royaume-Uni ; 1 seul membre pour les dix autres États). Depuis le traité de Maastricht, le Parlement européen est associé à sa désignation : le président est d’abord seul désigné mais après consultation du Parlement sur un nom retenu à l’unanimité par les Gouvernements, les autres membres sont choisis par les États mais après avoir pris l’avis du président désigné ; président et membres sont soumis à un vote d’approbation du Parlement avant leur nomination d’un commun accord par les Gouvernements. Après le français Jacques Delors, président depuis 1985, la Commission est présidée actuellement par Romano Prodi.
Voir : Parlement européen — Union européenne (UE)
jpf
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Commission fédérale pour la jeunesse
Rattachée administrativement à l’Office fédéral de la culture, la Commission fédérale pour la jeunesse (CFJ) est une interlocutrice du Conseil fédéral sur tous les problèmes touchant de près ou de loin à la jeunesse et à l'enfance. Sa compétence dans ce dernier secteur lui est quelquefois contestée, mais sa conception holistique de la jeunesse justifie l’attention qu’elle porte au respect et à la promotion des droits de l’enfant.
Ses membres sont proposés par les principales organisations de la jeunesse ; ils sont nommés par le Conseil fédéral, qui respecte la représentation des régions linguistiques et l’équilibre des sexes. Une fois nommés, les membres de la CFJ s’expriment en leur nom personnel et agissent pour le compte de la CFJ. De sa propre initiative, la CFJ peut faire des propositions aux autorités fédérales ; elle peut aussi s’adresser à diverses autorités, aux niveaux cantonal ou communal.
Tous les deux ans la CFJ met sur pied une réunion nationale (Séminaire de Bienne) ; elle invite les animatrices et animateurs de jeunesse de toute la Suisse à venir débattre d’un thème. Parmi les thèmes traités, signalons l’intégration professionnelle, la violence, la participation, l’intégration des jeunes étrangers.
R. Commission fédérale pour la jeunesse, Quel avenir sans travail? Les jeunes à la recherche de leur place dans la société, Office fédéral de la culture, Berne, 1997. — Commission fédérale pour la jeunesse, Les jeunes : cogneurs ou souffre-douleur?, Office fédéral de la culture, Berne, 1998.
Site Internet : www.kultur-schweiz.admin.ch/franz/index.htm
Voir : Jeunesse — Politique de la jeunesse.
Jean-Pierre Boillat
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Commission paritaire
Organe de concertation qui repose sur l’égale représentation de deux (ou plusieurs) catégories de personnes ou d’intérêts et qui est investie d’une fonction à la fois spécialisée et plus souvent consultative que délibérative. La commission paritaire exprime, entre les éléments représentés en son sein, la reconnaissance d’une volonté de conciliation qui remplace ou atténue les rapports d’autorité ou de prééminence ; elle implique aussi une gestion et une solution concertées des problèmes qui lui sont soumis. On trouve ce type d’organe dans de nombreux secteurs de la sécurité sociale suisse.
jpf
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Commissions extra-parlementaires
Avec les procédures de consultation, les commissions extra-parlementaires constituent l’un des deux modes consultatifs formels utilisés par l’administration pour l’élaboration d’un avant-projet de loi.
Elles sont définies par les directives du Conseil fédéral du 3 juillet 1974 comme étant “ des groupes d’études, des collèges d’experts et de conseillers ainsi que des organes d’exécution, qui assument des tâches pour le gouvernement et l’administration en vertu d’un mandat bien défini, mais qui sont composées en majorité de personnes n’appartenant pas à l’administration fédérale ” (chiffre 13).
De manière générale, ces commissions sont considérées par les spécialistes comme le lieu où se forge, entre partisans et adversaires d’un même projet, le “ compromis helvétique ”. D’un point de vue institutionnel, elles découleraient du référendum, et permettraient l’intégration des organisations à capacité référendaire (Neidhart). D’un point de vue symbolique, elles légitimeraient certaines propositions du Conseil fédéral du fait que ses membres assument “ la double fonction de représentation des intérêts et de détention d’un savoir ” (Linder) ; ou encore, de par leur caractère permanent ou ad hoc, elles permettraient de stigmatiser certaines questions, ou de légitimer une non-décision par la création d’une commission permanente (Poitry).
Quant à l’impact de ces commissions sur les politiques sociales, c’est certainement leur composition qui nous le résume le plus directement : caractérisée par une présence importante d’experts provenant d’entreprises privées (Frutiger), ainsi que par une sous-représentation des acteurs appartenant à la mouvance sociale-démocrate (Germann), la part belle est donnée au statu quo et aux rapports de force sociaux en faveur des dominants.
R. A. Frutiger, Les commissions extra-parlementaires de la Confédération en 1978, Cahiers de l’IDHEAP, No 9, Lausanne, 1983. — R. Germann e. a., Experts et commissions de la Confédération, Presses Polytechniques Romandes, Lausanne, 1985. — R. Germann, Ausserparlementarische Kommissionen, Haupt, Berne, 1981. — W. Linder, La décision politique en Suisse, Réalité sociales, Lausanne, 1987. — L. Neidhart, Plebiszit und pluralitäre Demokratie, Franke, Berne, 1970. — A. Poitry, La fonction d’ordre de l’État, Lang, Berne, 1989.
Voir : Démocratie (et politique sociale) — Phase pré-parlementaire — Procédure de consultation — Référendum
Christophe Al Kurdi
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Communautarisme
Le communautarisme, comme courant de pensée philosophique et de théorie sociale, se définit historiquement par la défense du bien commun et de sujets ancrés dans leur communauté. Né en Amérique du Nord, par réaction à La Théorie de la Justice développée par John Rawls au début des années 1970, qui assigne une priorité aux individus sur la communauté, le communautarisme privilégie la communauté à l’individu. En d’autres termes, les communautaristes, comme Michael Sandel, Charles Taylor, s’opposent à une conception de la société centrée sur l’individu abstrait et universel. Ils prônent, par contre, l’idée que l’intérêt communautaire peut être une valeur fondatrice de la société. Dans le domaine de la migration, la politique d’intégration, visant à valoriser les différences linguistiques, culturelles et ethniques des immigrés, repose sur le communautarisme. Les politiques de discrimination positive et de quotas, pratiquées plutôt dans les pays anglo-saxons, en sont les exemples les plus significatifs.
R. M. Sandel, Liberalisme and the Limits of Justice, University Press, Cambridge, 1982. — C. Taylor, Multiculturalism and “the Politics of Recognation”, Princeton University Press, Princeton, 1992.
Bülent Kaya
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Communauté européenne et sécurité sociale
Dans la Communauté européenne, le dossier de la sécurité sociale est d’abord dans les mains des États membres : ce sont eux qui conçoivent leurs systèmes, en organisent la gestion et le financement. Ainsi, il n’existe pas de système européen de sécurité sociale, qui garantirait des soins, des retraites, etc. Cependant, la Communauté elle-même a aussi des compétences en la matière. Le Traité CE contient une mission portant sur un niveau élevé de protection sociale (art. 2), comporte une politique dans le domaine social (art. 3), prévoit une coordination des systèmes liée à la libre circulation des travailleurs (art. 42, ex-art. 51), fait état d’un programme de politique sociale (art. 136, ex-art 117), dispose que la Communauté soutient et complète l’action des États membres (art. 137, ex-art. 118). L’art. 141 (ex-art. 119) interdit les discriminations entre travailleuses et travailleurs notamment dans les régimes professionnels. Cependant, l’art. 4 relatif à la politique économique et monétaire met l’accent sur la concurrence libre (sans réserves pour le social), l’art. 5 § 2 pose le principe de subsidiarité, les dispositions sociales mentionnées ci-dessus (art. 42 et 137) requièrent l’unanimité. Le cadre de compétences est ainsi limité.
Le droit pris en application du Traité (droit dérivé) est développé en matière de coordination des systèmes nationaux de sécurité sociale (Règlement (CEE) No 1408/71 et Règlement (CEE) No 574/72). Sa portée est nettement plus réduite en matière d’harmonisation ou de convergence, à l’exception cependant des domaines de l’égalité de traitement entre femmes et hommes et de la santé et de la sécurité des travailleurs. La Recommandation sur la convergence des objectifs et politiques de protection sociale (1992) met en évidence les missions fondamentales de la sécurité sociale. Il convient de souligner le rôle très important joué par la Cour de justice des Communautés européennes ; son intervention est guidée par les finalités du Traité, notamment la libre circulation des personnes, l’interdiction des discriminations.
R. P. Léger (Éd.), Commentaire article par article des traités UE et CE. Helbing & Lichtenhahn, Basel/Dalloz, Paris/Bruylant, Bruxelles, 2000. — B. Kahil-Wolff, Sécurité sociale et libre circulation des personnes en droit communautaire, IRAL, Lausanne, 1992. — G. Lyon-Caen, A. Lyon-Caen, Droit social international et européen, 8e éd., Dalloz, Paris, 1993. – F. Pennings, Introduction to European Social Security Law, 2e ed. Kluwer Law International, The Hague, 1998.
Voir : Accord sur la libre circulation Suisse-CE — Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs — Circulation des personnes (Libre) — Convergence — Coordination — Égalité de traitement entre femmes et hommes — Eurocompatibilité — Europe sociale — Eurostat — Union Européenne (UE).
Pierre-Yves Greber
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Communication sociale
La communication sociale, au sens strict, se définit comme l’ensemble des actes de communication qui visent à modifier des représentations, des comportements ou à renforcer des solidarités. On peut distinguer trois buts :
— Informer sur des problèmes sociaux, afin de faire prendre conscience, de redonner du pouvoir aux individus.
— Transmettre des valeurs pour renforcer des réseaux de solidarité.
— Modifier des idées ou des comportements à risque pour les personnes ou la collectivité.
Ce type de communication va à l’encontre de l’opinion du destinataire du message, contrairement à la publicité (communication produit), puisqu’on désire la modifier. Or, la plupart des études sur les effets de la communication mettent en avant le renforcement de l’opinion du récepteur. Aussi, la communication sociale nécessite-t-elle, d’une part, du temps et, d’autre part, une articulation entre une campagne médiatique, afin de rendre visible le problème abordé et une proximité avec les personnes concernées afin d’agir par la relation et le dialogue. Les campagnes STOP SIDA mettent bien en œuvre ces deux dimensions.
R : OMS, La prévention du SIDA par la promotion de la santé - Comment aborder les questions sensibles, Édition OMS, Genève, 1992. — A.-L. Haering, Traits d’union : la communication associative en pratique, Éditions IES, Genève, 1995.
Voir : Information sociale — Marketing social
Albert-Luc Haering
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Comptabilité analytique
Alors que la comptabilité se contente de recueillir et d’organiser les informations chiffrées sur une entreprise, son activité, la structure de son patrimoine et les relations avec son environnement, la comptabilité analytique cherche elle à exploiter ces données dans le but d’interpréter la gestion passée de l’entreprise ou de préparer des décisions pertinentes pour l’avenir. Pour y parvenir, la comptabilité analytique élabore des ratios dont l’ensemble fournit un véritable tableau de bord destiné aux responsables de l’entreprise. Elle décortique également les différents éléments des coûts de production en les ventilant par service, par département ou selon les différents produits fabriqués afin d’en dégager les prix de revient. La comptabilité analytique cherche en particulier à déterminer le volume de production minimal qu’une entreprise doit réaliser pour atteindre son seuil de rentabilité (point mort) au-delà duquel elle parvient à couvrir l’ensemble de ses frais fixes et variables.
Si l’utilité de la comptabilité analytique ne fait guère de doute, elle est confrontée à de nombreuses difficultés. La principale tient au fait que la méthode choisie pour classer toutes les informations chiffrées influence le sens et la portée des résultats obtenus, en particulier lorsqu’il s’agit d’établir des comparaisons entre différents produits. En effet, si certains éléments des coûts de production peuvent être attribués sans hésitation à un produit déterminé, la plupart des coûts fixes sont en revanche difficiles à attribuer puisqu’ils permettent de financer, de manière non discriminatoire, l’ensemble des activités d’une entreprise. Ainsi, l’ensemble des frais généraux (loyers, assurances, éclairage, etc.) et des amortissements sont très difficiles à ventiler dans une entreprise à produits multiples. Malgré toutes les tentatives qui ont été faites pour trouver une solution à ce problème d'affectation des coûts, on peut dire que la notion de prix de revient reste une information subjective susceptible de varier en fonction des méthodes employées.
Malgré ces critiques, la comptabilité analytique demeure un instrument largement utilisé par les entreprises. Elle est notamment employée dans le domaine de la gestion des stocks pour éviter d’éventuelles ruptures et calculer un niveau de stock optimal permettant de produire en minimisant les coûts associés à la détention de matières premières ou de produits intermédiaires. La comptabilité analytique est aussi utilisée pour éclairer des décisions d’investissement et des choix de financement optimal des nouveaux équipements. Finalement, elle aussi employée dans le domaine de la politique salariale de l’entreprise pour déterminer en particulier les primes individuelles ou collectives attribuées en fonction des indicateurs de productivité mis en place pour mesurer l’apport productif de différents départements, ateliers ou sections.
Yves Flückiger
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Comptes globaux de la protection sociale
Les Comptes globaux de la protection sociale, établis pour la première fois par l'Office fédéral de la statistique (OFS) en l'an 2000, rassemblent dans un cadre de synthèse cohérent et homogène - le SESPROS - les informations statistiques relatives aux dépenses et recettes de protection sociale pour les années 1990 à 1998. Le SESPROS ou Système européen de statistiques intégrées de la protection sociale est élaboré par l'Office statistique des Communautés européennes (EUROSTAT) et garantit la comparabilité avec les pays de l'UE et de l'AELE. Les composantes essentielles des Comptes globaux sont les régimes, c'est-à-dire les unités qui assurent l'allocation des prestations sociales et en supportent entièrement ou partiellement les coûts. Pour la Suisse 23 régimes ont été au total classés selon cinq types. Les Régimes d'assurance sociale contiennent l'Assurance-maladie sociale, l'Assurance-accidents obligatoire, l'Assurance-invalidité, l'Assurance-vieillesse et survivants, la Prévoyance professionnelle, les Allocations familiales et l'Assurance-chômage. Les Régimes publics sous condition de ressources se composent des Prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, de l'Aide au logement, des Bourses d'étude et de l'Aide sociale. Les Subventions des collectivités publiques comprennent les Contributions publiques au système de santé, les Institutions pour handicapés, les Homes pour personnes âgées et la Protection de la jeunesse. Parmi les Mesures sociales figurent les Mesures en faveur des chômeurs, la Politique de la drogue et la Politique d'asile. Finalement, il existe d'Autres interventions, à savoir l'Assurance militaire, la Couverture du salaire en cas de maladie et de maternité, la Prévoyance professionnelle des magistrats et des professeurs des écoles polytechniques et les activités des Institutions privées. Les régimes ont un volet “dépenses” et un volet “recettes”, divisés en types. Parmi les dépenses, il y a lieu de distinguer entre prestations sociales, en espèces (en premier lieu les rentes) et en nature (par exemple le remboursement des frais de maladie), dépenses de fonctionnement et autres dépenses. Les recettes se composent des contributions des employeurs et des employés, des contributions publiques et des primes de caisse-maladie ainsi que des revenus du patrimoine et d'autres recettes. Les prestations sociales font l’objet d’une ventilation par fonction, chaque fonction correspondant à un risque ou besoin couvert par la protection sociale. On distingue entre Maladie, Invalidité, Vieillesse, Survie, Famille et enfants, Chômage, Logement et Exclusion sociale.
Cette nouvelle statistique de synthèse que sont les Comptes globaux est importante à plusieurs égards. Tout d'abord, elle chiffre l'effort social de la Suisse selon un cadre de référence cohérent et homogène, permettant d'établir des comparaisons avec les autres pays européens à l'heure où l'intérêt pour les comparaisons internationales des systèmes de protection sociale, singulièrement dans le cadre de l'intégration européenne avec la libre circulation des personnes et des capitaux, est de plus en plus grand. Ensuite, la classification des prestations par fonction fournit des éléments d'information utiles aux différentes interventions publiques. Finalement, les différentes sources de financement de la protection sociale (cotisations sociales et contributions publiques, entre autres) sont mises en relief. Les Comptes globaux seront réunis chaque année. Ils fourniront des informations statistiques fort utiles pour diverses analyses économiques. Mais surtout, ils donneront aux acteurs de la politique sociale d'importants éléments pour fonder les décisions politiques et optimaliser leur exécution.
R : S. Greppi, H. Ritzmann, “ Les Comptes globaux de la protection sociale. Premiers résultats pour la Suisse selon la méthodologie Sespros d'Eurostat ”, in : Info : social. La sécurité sociale dans les faits, No 4, 2001.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Budget social — Statistique sociale — Eurostat — Eurostat-Sespros
Spartaco Greppi
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Concentration économique
Dans le secteur économique, on appelle concentration le mouvement par lequel des entreprises se regroupent en ensembles de plus en plus importants et de moins en moins nombreux.
En règle générale, la concentration conduit à des économies d’échelle, les entreprises regroupées mettant en commun des ressources, des services, des unités de production, etc. Elle peut se produire entre entreprises d’un même secteur, mais aussi entre entreprises fonctionnant en amont l’une de l’autre. On parle alors parfois d’intégration. Souvent, les procédures de concentration entraînent d’importantes suppressions d’emplois. Lorsque le phénomène s’accélère, on assiste à une forte montée de l’insécurité sociale. La concentration a pour résultat de mettre de plus en plus de pouvoirs dans les mains d’un nombre de plus en plus réduit d’acteurs. Elle pose donc des questions d’ordre à la fois éthique et politique.
Voir : Déréglementation — Société postindustrielle  Postfordisme
jpf
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Concubinage àð Union libre
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Concurrence
Un des problèmes auxquels est confronté tout système économique est celui de son efficacité. Puisque les ressources sont rares, elles doivent être allouées de manière optimale pour éviter le gaspillage et produire les biens et les services les plus utiles à la collectivité de façon la plus économe possible. La théorie économique démontre que la concurrence permet d’atteindre cet objectif grâce aux prix que le processus concurrentiel permet de faire émerger. Les économistes ont tendance à qualifier un marché de concurrentiel si les quatre conditions suivantes sont respectées. La première, dite de l’atomicité, implique que sur tous les marchés, il y ait un nombre suffisamment important de consommateurs et de producteurs pour qu’aucun d’eux n’ait la possibilité d’influencer l’évolution du marché (et notamment les prix qui y règnent). La deuxième condition, celle de l’homogénéité du bien ou du service échangé, stipule simplement que toutes les unités écoulées sur un marché sont parfaitement identiques et que les consommateurs ne ressentent aucune différence entre elles. Cette seconde condition implique que le seul mode de concurrence possible entre les producteurs se situe au niveau du prix. Elle suppose également qu’aucun producteur n’est en mesure de différencier suffisamment sa production de celle de ses concurrents pour obtenir un pouvoir sur le marché. La troisième condition stipule que la transparence règne sur tous les marchés. Cela signifie que les producteurs et les consommateurs reçoivent librement et gratuitement les mêmes informations. Ils ne peuvent donc tirer profit d’informations privilégiées qu’ils détiendraient. La quatrième condition, celle de la libre entrée, stipule simplement que toute entreprise souhaitant entrer sur un marché est entièrement libre de le faire et qu’aucune barrière ne s’oppose à une telle décision. Cette condition est particulièrement importante. Elle implique que si une entreprise abuse de sa position dominante pour obtenir des profits excessifs, d’autres concurrents potentiels devraient faire irruption sur ce marché perçu comme très profitable. Ce faisant, ils créeront une situation de concurrence susceptible de ramener le profit à un niveau normal.
Longtemps durant, les économistes ont pensé que ces conditions étaient suffisantes pour créer une situation dite de concurrence parfaite. Néanmoins, des recherches empiriques ont démontré qu’un marché pouvait fort bien compter un grand nombre de producteurs sans empêcher pour autant que des accords s’établissent entre eux pour imposer des prix plus élevés. A l’inverse, il peut exister sur un marché un producteur unique empêché d’abuser de sa position par une meute de concurrents potentiels prêts à envahir le marché en cas de pratique abusive. De même, la condition de transparence s’avère être souvent un facteur favorisant l’apparition d’accords horizontaux. C’est la raison pour laquelle, les économistes ont tendance aujourd’hui à se concentrer sur les performances d’un marché plutôt que sur ses structures (nombre d’acteurs etc) pour déterminer si la concurrence y est réellement efficace. Pour ce faire, il faut analyser les données issues du fonctionnement du marché et vérifier notamment si le taux de profit réalisé par les entreprises présentes n’est pas anormalement élevé, si le prix est égal au coût marginal de production, si des innovations sont introduites et s’il y a eu dans le passé des entrées de nouvelles entreprises sur le marché. Si les analyses démontrent que la concurrence n’est pas efficace, l’État devrait alors intervenir pour restaurer une situation concurrentielle. Cette action peut prendre la forme d’une intervention directe sur les marchés concernés (contrôle des prix, imposition d’une quantité de production minimum ou d’une norme de qualité). Elle peut également se traduire par la mise sur pied d’une instance de contrôle chargée, comme la Commission de la concurrence en Suisse, d’examiner les concentrations d’entreprises, de combattre les abus de position dominante et les ententes entre producteurs.
R. Y. Flückiger,, “ Analyse économiques du nouveau droit suisse de la concurrence ”, in : La Nuova Legge sui Cartelli, CFPG, Vol. 22, 1999, pp. 59-102.
Voir : Biens et services collectifs purs — Économie d’échelle  Étude de marché  Externalités  Marché du travail
Yves Flückiger
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Confédération européenne des syndicats àð Syndicat
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Conférence des directeurs cantonaux de l instruction publique (CDIP)
Organe de coordination politique des chefs des départements cantonaux de l’instruction publique, responsables de l’éducation, de la formation, de la culture et du sport. Fondé en 1897.
Cette conférence a pour buts :
— la coopération intercantonale et régionale dans l’exercice des prérogatives cantonales en matière d’enseignement et d’éducation : planification de l’éducation, de la recherche pédagogique et de la statistique scolaire ;
— la garantie d’une unité minimale au niveau des structures scolaires et de certification : concordat sur la coordination scolaire, accord intercantonal de reconnaissance des diplômes de fin d’étude et participation au financement des universités ;
— la promotion d’une politique éducationnelle et culturelle commune aux cantons.
Structures :
— Membres : les chefs des départements cantonaux concernés.
— Hôte permanent : la principauté du Liechtenstein.
— Assemblée plénière : quatre plénières annuelles dont une commune avec les chefs des départements cantonaux de l’économie publique concernés par la formation professionnelle.
Président : désigné pour quatre ans, renouvelable une fois.
— Quatre conférences régionales (Suisse romande et Tessin, Suisse nord-ouest, Suisse centrale et Suisse orientale).
— Comité directeur composé de dix membres et siégeant cinq à six fois l’an.
— Commissions permanentes : formation générale, formation professionnelle, Conseil des HES, reconnaissance des diplômes, politique des bourses d’études.
— Conférences intercantonales des chefs de service : orientation professionnelle, activités culturelles, formation des adultes, administration des bourses d’études, promotion du sport.
— Secrétariat général, avec siège à Berne, chargé notamment :
a) de la gestion d’un centre de documentation et d’information, répertoriant systématiquement tout ce qui a trait à la politique suisse de l’éducation (IDES) ;
b) de la supervision de quatre instituts spécialisés :
— centre suisse de perfectionnement des professeurs de l’enseignement secondaire (Lucerne et Genève),
— centre suisse de coordination pour la recherche en matière d’éducation (Aarau),
— secrétariat suisse de pédagogie curative et spécialisée (Lucerne et Lausanne),
— centre suisse des technologies de l’information dans l’enseignement (Berne).
Activités :
a) Élaboration de réglementations unitaires communes :
— concordat sur la coordination scolaire (1970),
— accords intercantonaux de reconnaissance des diplômes de fin d’étude (1993),
— accords intercantonnaux universitaires, HES et ESS.
b) Recommandations formelles aux cantons, en application du concordat sur la coordination scolaire : plan d’études - cadres des écoles de degré de diplôme, des écoles de maturités, scolarisation des enfants de langue étrangère, harmonisation des régimes des bourses d’études ;
c) Réalisation d’études - bilan, de projet et études prospectives ;
d) Coopération avec la Confédération : reconnaissance de la maturité, aide aux universités, développement du régime des bourses d’études, enseignement spécialisé, promotion de la culture et des sports ;
e) Représentation des cantons à l’étranger dans le domaine de la politique éducationnelle.
Informations : Secrétariat central, Zähringerstrasse 25, 3001 Berne.
Voir : Conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires (CDS) — Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) — Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS) — Formation des travailleurs sociaux — Formation continue — Instruction publique
Jean-Pierre Rageth
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Conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires (CDS)
Organe de coordination politique des responsables cantonaux de la santé publique, fondé en 1919 et ayant pour buts :
— la promotion de la collaboration intercantonale ainsi qu’entre cantons et Confédération ;
— la pratique de la coopération avec les grandes organisations du domaine de la santé publique.
Structures :
— Membres : les chefs des départements cantonaux.
— Hôtes permanents : Offices fédéraux concernés (OFSP, OFAS, affaires sanitaires de l’Armée), principauté du Liechtenstein, Croix-Rouge suisse et Institut suisse de la santé publique.
— Assemblée plénière : deux par année.
— Comité directeur composé de dix représentants et quatre hôtes permanents (cinq à six séances par an).
— Commissions permanentes : différentes commissions dans le cadre de la formation professionnelle (conseil de formation, formation continue, domaine HES, etc.), statistique sanitaire, application de la LAMal, examens chiropraticiens.
— Secrétariat central permanent, avec siège à Berne.
Activités :
Domaines clés : coordination, problèmes politiques d’intérêt commun, position des cantons face au pouvoir central.
La CDS aborde toute question relevant de la politique de la santé.
La CDS a établi une convention avec la Croix-Rouge suisse, chargeant cette organisation de la réglementation et de la surveillance des formations de différentes professions de la santé.
La CDS gère la certification (examen fédéral) des chiropraticiens.
Les tâches permanentes de la CDS sont :
— la coordination de la médecine de pointe ;
— le financement de la santé par les assurances sociales ;
— la mise en place de systèmes d’information (statistique, comptabilité) en matière de santé.
Les domaines de préoccupation sont :
— la promotion de la santé et de la qualité des soins ;
— la politique en matière de toxicomanie ;
— la lutte contre le SIDA ;
— la transplantation d’organes ;
— les questions liées à l’intégration européenne.
Informations : Secrétariat central, Weltpoststrasse 20, 3000 Berne 15.
Voir : Croix-Rouge Suisse — Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) — Conférence des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) — Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS) — Politique de la santé
Jean-Pierre Rageth
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Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS)
Organe de coordination politique des chefs des départements cantonaux des affaires sociales, fondé en 1943 et dont les buts sont :
— le traitement des questions de la politique sociale, de prévention et d’assistance sociale ;
— la promotion et le développement de l’information, de la coordination et de la collaboration dans le domaine social, des cantons entre eux d’une part et des cantons avec la Confédération, les conférences intercantonales constituées et les autres organisations d’action sociale, d’autre part.
Structures :
— Membres : chefs des départements cantonaux concernés.
— Hôtes permanents : Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS), Union des villes suisses (UVS), Association des communes suisses (ACS).
— Assemblée plénière annuelle.
— Comité directeur composé de treize membres, dont sept directeurs cantonaux des affaires sociales (avec droit de vote). (Organe consultatif du Comité directeur réunissant huit chefs de services cantonaux de l’action sociale (+ CSIAS, UVS et ACS).
— Commissions permanentes : office de liaison en matière de convention intercantonale relative aux institutions (CII), office de liaison en matière d’aide aux victimes d’infractions (LAVI), groupe de contact CDAS-Coordinateurs cantonaux de l’asile, groupe de travail politique sociale, commission tripartite des agglomérations, commission spécialisée en accompagnement des personnes âgées, commission de coordination en matière de politique des drogues.
Dans la mesure où les directeurs cantonaux des affaires sociales sont souvent également directeurs des affaires sanitaires, il existe une relation étroite mais non formalisée entre la CDAS et la CDS.
Secrétariat central avec siège à Berne, chargé notamment :
— de la gestion et de l’application de la CII ;
— de la gestion de la centrale de coordination nationale de l’offre des thérapies résidentielles pour les problèmes de drogue (COSTE) ;
— de l’animation de divers groupes de travail intersectoriels : asile, formation du domaine social, aide à domicile, aide aux victimes d’infractions, assurances sociales ;
— de la liaison avec les organisations régionales,
— des relations étroites avec la CDIP concernant les formations sociales.
Activités :
Domaines clés : politique sociale intercantonale, aide sociale, asile, aide aux victimes d’infractions, personnes âgées, personnes handicapées, toxicomanies, assurances sociales, formations du domaine social, questions du fédéralisme.
La CDAS s’efforce de coordonner l’action des cantons dans la gestion des problèmes politiques d’intérêt commun et dans la négociation entre cantons et pouvoir central.
La CDAS dispose des instruments suivants :
a) réglementations unitaires (concordats intercantonaux),
b) recommandations aux cantons — membres,
c) accords bilatéraux/multilatéraux entre cantons membres.
Informations : Secrétariat central, Eigerstrasse 5, case postale 459, 3000 Berne 14.
Voir : Conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires (CDS) — Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS)
Jean-Pierre Rageth
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Conférence internationale du travail
La Conférence internationale du travail est considérée comme l'organe suprême de l'Organisation internationale du travail. Elle réunit chaque année les représentants de tous les États membres. Les délégations nationales siégeant à la Conférence sont composées de quatre membres, deux représentants gouvernementaux et deux délégués professionnels - un employeur et un travailleur - désignés par les organisations professionnelles les plus représentatives de l’État concerné. Cette structure tripartite qui permet souvent d'éviter l'enlisement des débats dans des considérations diplomatiques, fait de la Conférence un authentique forum de discussion des questions liées au travail et aux problèmes sociaux. La Conférence établit le budget de l'Organisation, adopte les normes internationales du travail (plus de 350 conventions ou recommandations à ce jour, que les États-membres sont invités à ratifier) et veille à leur application par les États ratifiants.
R. J.-M. Bonvin, L’Organisation internationale du travail, Étude sur une agence productrice de normes, PUF, Paris, 1998. — N. Valticos, Droit international du travail, 2e éd., Dalloz, Paris, 1983.
Site Internet : www.ilo.org
Voir : Bureau international du travail (BIT) — Normes internationales du travail — Organisation internationale du travail (OIT)
Jean-Michel Bonvin
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Conférence latine des écoles supérieures de travail social (CLESTS)
La Conférence Latine des Écoles Supérieures de Travail Social réunit les 5 écoles de Suisse romande et du Tessin (Centre de Formation Pédagogique et Sociale de Sion, École d’Études Sociales et Pédagogiques à Lausanne, École Supérieure de Travail Social à Fribourg, Institut d’Études Sociales de Genève, Scuola Superiore di Lavoro Sociale di Mendrisio) qui dispensent une ou plusieurs formations professionnelles de niveau tertiaire extra-universitaire reconnues et subventionnées par les Cantons et par la Confédération (OFAS, art. 74 loi AI ; OFES, Loi féd. ESTS du 19.6.1992). Les écoles de la CLESTS coordonnent leurs politiques pour les formations, à plein temps et/ou en cours d’emploi de : assistants sociaux, animateurs socioculturels, éducateurs de la petite enfance, éducateurs spécialisés, maîtres socioprofessionnels, ergothérapeutes, psychomotriciens. La CLESTS collabore avec les organes intercantonaux romands pour les projets de mise en place des Hautes Écoles Spécialisées.
Site Internet : www.sassa.ch
Voir : Écoles supérieures de travail social et hautes écoles spécialisée (Conférence suisse) (SASSA) — Hautes Écoles Spécialisées (HES) — Travailleurs sociaux (Formation des)
Paola Richard-De-Paolis
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Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS)
Organe de coordination politique des chefs des départements de santé publique, ultérieurement des affaires sociales, des cantons romands, de Berne et du Tessin.
Cette conférence, qui a été fondée en 1981 et élargie en 1992, a pour buts :
— l’harmonisation des dispositions cantonales d’application de la législation fédérale et des dispositions cantonales en matière de santé publique ;
— les contacts réguliers pour l'échange d’informations et de documentation ;
— les échanges de vues et d’expériences sur toutes les questions politiques, économiques ou sociales en rapport avec la santé publique ;
— la concertation dans le domaine des prises de position en matière de consultations fédérales.
Structures :
— Membres : chefs des départements cantonaux concernés.
— Associés : président-e du GRSP, du GRAS et du GLAS.
— Assemblée plénière : cinq séances annuelles.
Le GRSP, le GRAS et le GLAS sont les organes consultatifs et exécutifs, respectivement en matière de santé publique d’action sociale et d’assurances sociales.
Informations : auprès du Président ou du secrétariat assuré par un mandataire extérieur.
Voir : Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) — Conférence des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) — Conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires (CDS)
Jean-Pierre Rageth
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Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS)
Association spécialisée œuvrant sur la plan national, fondée en 1905, la CSIAS vise à optimiser la compétence, la coordination et la collaboration de ses membres, dans le domaine de l’action sociale publique et privée, au niveau communal, régional, cantonal et fédéral.
Structures :
— Membres : cantons, communes, Confédération et institutions privées d’action sociale.
— Assemblée générale annuelle.
— Comité de 51 membres délégués des cantons, des communes et autres œuvres d’entraide.
— Comité directeur de 8 membres.
— Commissions spécialisées : formation et recherche, normes et aide à la pratique, migrations et étrangers, questions juridiques, action sociale et politique sociale.
— Secrétariat permanent avec siège à Berne.
Activités :
Établissement de recommandations et de directives pour l’application de l’aide sociale (Normes CSIAS).
Formation continue et représentation des intérêts professionnels des membres.
Conseil aux membres sur des questions d’ordre technique, structurel et organisationnel.
Informations : R. Ruder, secrétaire générale, Mühlenplatz 3, 3000 Berne 13.
Site Internet : www.skos.ch
Voir : Association romande et tessinoise des institutions d’action sociale (ARTIAS) — Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) — Minima sociaux — Normes CSIAS
Jean-Pierre Rageth
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Conflits de générations
Opposition culturelle, sociale ou économique entre les générations, que ce soit sur la base de différences de valeurs ou de divergences d'intérêts entre la jeune génération et une génération plus âgée. Si les conflits sont particulièrement fréquents dans la sphère familiale entre les parents et les jeunes dans la phase de détachement; ils peuvent aussi surgir dans la sphère publique à propos de questions sociopolitiques, telles que le financement de l'AVS ou l’assurance-maternité par exemple. Dans les médias et parfois dans le monde des politiciens, il est commun de prendre un ton alarmiste pour traiter du conflit, voire de la “ guerre des générations ”. Il est vrai que la confrontation de trois, quatre, voire cinq générations, avec autant de réalités de vie, de vécus, d’histoires et des références événementielles différentes n’est pas toujours évidente. Quel(s) lien(s), quelle(s) réalité(s) commune(s) entre un grand-père qui, à quinze ans, a connu la crise de 1929 et a vécu une début de vie professionnelle dans les années trente, période de récession, de crise et de guerre et son petit-fils qui, à vingt ans, en 1985, entre à l’université et prépare une brillante carrière en période de plein-emploi ? (Re)nouer le dialogue avec une telle distance temporelle et de réalité de vie entre les individus n’est pas toujours chose facile et l’on peut parfois observer un certain fossé dans les opinions politiques des uns et des autres. Ces divergences, très médiatisées, sont généralement surestimées et provoquent dans l’imaginaire collectif des angoisses qui ne sont pas fondées ; on parle de vieillissement de la population comme d’un péril grave, du poids financier des personnes âgées ruineux pour les populations plus jeunes (coût en soins et en pensions), etc. De la réalité aux représentations, le vieillissement prend une dimension fausse et exagérée, qui explique un discours dramatisant. Ces images déformées de la réalité pourraient constituer un terreau fertile au développement de conflits intergénérationnels. Les études réalisées en Suisse sur ce thème démontrent que le poids démographique des jeunes est sous-estimé par les jeunes et les vieux et surtout que l’estimation de la proportion de personnes âgées et largement surfaite. Malgré tout, les résultats indiquent que ces visions déformées de la réalité n’impliquent pas pour autant des rapports conflictuels entre les jeunes et les vieux et, qu’au contraire, c’est une vision consensuelle d’intérêts communs, de solidarité et de coopération nécessaires entre les générations dans le système social et des soins qui dominent chez les personnes interrogées.
R. P. Gobet, P. Roux, Jeunes et personnes âgées face au rationnement des soins, Médecine et Hygiène, 53, 2405-2412, 1995. — P. Roux, P. Gobet, A. Clémence, Stéréotypes et relations entre générations, Rapport final de recherche PNR 32, Lausanne, 1994
Voir : Génération — Jeunesse — Solidarité entre générations  Vieillesse
Valérie Hugentobler et François Höpflinger
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Congé maternité àð Maternité (Protection de la)
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Conseil conjugal/Consultation conjugale
Le conseil conjugal est centré sur la relation de couple. Il s agit d un travail d ordre psychologique avec des couples mariés ou non qui éprouvent des difficultés dans leur vie commune et qui sont à la recherche d’une relation plus satisfaisante. Cette démarche peut permettre d’améliorer les relations et la communication ou de faire mûrir une décision de séparation dans un contexte familial moins dramatique. Le conseiller conjugal intervient à tous les stades des difficultés conjugales. Il donne la priorité à la relation conjugale tout en prenant en considération la relation parentale et les relations aux familles d’origine.
Il permet aux intéressés de clarifier leur demande, de mieux comprendre leur fonctionnement relationnel et de trouver leurs propres solutions.
Le conseil conjugal s’exerce dans le cadre d’institutions sociales à but non lucratif qui garantissent la confidentialité et la neutralité sur les plans politiques et confessionnels.
En Suisse romande, les services sont regroupés en une “ Fédération romande et tessinoise des services de consultation conjugale ”. Celle-ci est garante de la formation des conseillers conjugaux.
R. J.-Y. Savoy, Duo-Duel, étapes de vie en couple, La Passerelle/Labor et Fides, Lausanne, 1995-1997.
Voir : Divorce — Famille
Jean-Yves Savoy
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Conseil de l’Europe
Organisation internationale créée en 1949 et ouverte aux États démocratiques d’Europe (actuellement 21 États d’Europe Occidentale). Le Conseil de l’Europe exerce son activité dans tous les domaines de la coopération internationale (sauf le domaine militaire), mais n’a pas de pouvoir de décision. Il a apporté une contribution majeure à la construction du droit international de la sécurité sociale, en particulier par l’adoption de textes fondamentaux. La Suisse en fait partie. Son siège est à Strasbourg.
Sites Internet : www.coe.int — www.socialinfo.ch
Voir : Conseil de l’Europe (Instruments du) — Fondements du droit de la sécurité sociale
jpf
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Conseil de l’Europe (Instruments du)
Les instruments du Conseil de l’Europe en matière sociale sont :
1. La Charte sociale européenne, du 18 octobre 1961, ses protocoles additionnels du 5 mai 1988 et du 9 novembre 1995 et son protocole portant amendement du 21 octobre 1991, ainsi que la Charte révisée, du 3 mai 1996. La Charte sociale européenne est une convention fondamentale, destinée à proclamer les droits sociaux de l’individu, spécialement du travailleur. Elle fait l’objet d’une rubrique particulière du présent dictionnaire.
2. La Convention européenne des droits de l’homme, plus exactement la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950, et ses protocoles annexes. Bien que cette convention s’occupe essentiellement de la sauvegarde des droits civils et politiques, certaines de ses dispositions garantissent également l’exercice de droits sociaux (art. 4 et 11).
3. Les autres conventions conclues sous les auspices du Conseil de l’Europe, soit notamment :
a) Le Code européen de sécurité sociale et son Protocole, du 16 avril 1964. Le Code est la reproduction presque littérale de la Convention No 102 de l’OIT concernant la norme minimum de sécurité sociale (1952), qui prévoit des normes minimales que les États devraient respecter dans les différentes branches de la sécurité sociale. Le Protocole contient des normes légèrement supérieures à celles du Code. Ce dernier a été ratifié par 16 États, dont la Suisse.
b) Le Code européen de sécurité sociale révisé, du 6 novembre 1990. Cet instrument améliore les normes du Code et leur donne plus de flexibilité. Il n’est pas encore en vigueur.
c) Les deux accords intérimaires européens du 11 décembre 1953 (non ratifiés par la Suisse), l’un concernant les régimes de sécurité sociale relatifs à la vieillesse, à l’invalidité et aux survivants, l’autre les autres régimes de sécurité sociale.
d) La Convention européenne de sécurité sociale, du 14 décembre 1972 (non ratifiée par la Suisse), qui fait suite aux accords intérimaires et qui tend à assurer la coordination entre les législations de sécurité sociale des États parties ; elle traite notamment de la législation applicable et réglemente, pour chaque catégorie de prestations, les modalités de la totalisation des périodes d’assurance et de l’égalité de traitement des assurés.
e) La Convention européenne d’assistance sociale et médicale, du 11 décembre 1953 (non ratifiée par la Suisse).
R. G. et A. Lyon-Caen, Droit social international et européen, 8e éd., Paris, 1993. — S.-G. Nagel, C. Thalamy, Le droit international de la sécurité sociale, Paris, 1994.
Site Internet : www.coe.int
Voir : Charte sociale européenne — Conseil de l’Europe — Sécurité sociale
Alexandre Berenstein
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Conseil de Sécurité
Organe de l’ONU, composé de 15 membres (5 permanents et 10 élus pour deux ans par l’Assemblée Générale). Il est chargé de la responsabilité principale du maintien de la paix : règlement pacifique des conflits (pouvoir de recommandation), action coercitive en cas d’agression ou de menace d’agression, recours à des méthodes d’apaisement des conflits. Les multiples résolutions qu’il a adoptées constituent un élément de référence dans les négociations internationales. Récemment, l’Allemagne et le Japon ont émis le vœu d’obtenir le statut de membres permanents.
Site Internet : www.un.org/french/documents/scinfo.htm
Voir : ONU
jpf
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Conseil économique et social (CES)
Propre au canton de Genève, cet organe consultatif a été créé en 1995 dans la tradition locale de concertation tripartite : un tiers de ses 60 membres est désigné par les syndicats, le second par les associations patronales, le dernier par le Conseil d’État. Le CES ne préavise pas sur les décisions gouvernementales au jour le jour, mais travaille à la façon d’un laboratoire d’idées pour le moyen et long terme. Il dispose d’un secrétariat permanent indépendant de l’administration et recourt à des experts extérieurs.
De son propre chef ou sur mandat de l’Exécutif, le CES a notamment traité, en des rapports rendus publics, de la formation continue, des emplois de proximité, du développement de la région, de l’exclusion sociale et de l’accueil des étrangers. Il organise et alimente aussi le débat public sur des thèmes économiques (le financement des PME) et sociaux (l’aménagement et la réduction du temps de travail).
R. P. Bodineau, Les Conseils économiques et sociaux, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1994.
Site Internet : www.geneve.ch/ces/welcome.html
Voir : Organisations économiques et patronales — Planification sociale — Prospective — Syndicat
Jean-Pierre Thorel
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Conseil européen
Il désigne la réunion régulière, depuis 1975, des Chefs d’État ou de Gouvernement des États membres de l’Union européenne. Cette institution non prévue à l’origine par les traités, a été créée en décembre 1974 et constitue un moment essentiel de la vie communautaire. Elle a été officialisée par l’Acte unique européen en 1987. Elle se réunit, depuis, deux fois par an dans le pays qui assure la présidence du Conseil des Ministres. Conçue pour donner un nouvel élan à la construction européenne et être l’occasion régulière de nouvelles avancées, elle n’a pas toujours répondu à cette attente même si certaines réunions constituent des dates importantes.
Site Internet : www.europa.eu.int/comm/nice_council/index_fr. htm
Voir : Acte unique européen — Union européenne (UE)
jpf
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Conseil légal
C'est une mesure qui se situe entre la curatelle et la tutelle. Elle conduit à une restriction de l'exercice des droits civils. On distingue trois formes de conseil légal :
— le conseil légal coopérant : apporte son concours pour la conclusion de certains actes d'administration importants précisés par la loi, notamment prêter et emprunter (art. 395, al. 1 CC), le pupille restant libre d'accomplir tous les autres actes,
— le conseil légal gérant : chargé de la gestion de tous les biens du pupille, celui-ci continuant à disposer du revenu de sa fortune et du produit de son travail,
— le conseil légal combiné : addition des deux mesures précédentes.
Bien que la loi limite les tâches du conseil légal à la protection d'intérêts matériels, il est admis dans la pratique qu'il apporte une assistance personnelle au pupille.
La mise sous conseil légal n'entraîne aucune restriction de la capacité civile en dehors du domaine patrimonial.
R. H. Deschenaux, P.-H. Steinauer, Personnes physiques et tutelle, Stämpfli, 4e éd., Berne, 2001. — M. Stettler, Droit civil I (Représentation et protection de l'adulte), 4e éd., Éditions Universitaires, Fribourg, 1997.
Voir : Autorités tutélaires — Curatelle — Tutelle
François Perrinjaquet
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Conseil suisse de la science et de la technologie
Le Conseil suisse de la science et de la technologie (CSST) est l’organe consultatif du Conseil fédéral pour toutes les questions de politique scientifique (recherche et Hautes Écoles), notamment celles qui touchent à :
— la situation de la Suisse dans la coopération et la concurrence scientifiques internationales,
— les objectifs de la Confédération pour la recherche et la formation scientifique : domaines scientifiques à développer, structures, institutions, etc.,
— la concrétisation de ces objectifs : reconnaissance et financement d’institutions, de programmes et de projets, dans le cadre des Hautes écoles, du Fonds national, de programmes de recherche nationaux ou internationaux, etc.,
— l’évaluation des politiques scientifiques et technologiques et de leurs influences sur l’homme, la société et l’environnement.
Le CSST réunit les éléments servant à orienter la politique scientifique nationale, élabore des conceptions générales à l’intention du Conseil fédéral et lui propose les mesures visant à les réaliser. En particulier, il élabore tous les quatre ans pour chaque législature des propositions relatives aux objectifs de la politique suisse en matière de recherche et des grandes orientations pour le développement des universités suisses.
Le CSST est un organe indépendant composé principalement de scientifiques reconnus et de responsables d’institutions scientifiques, économiques et politiques. Il se veut un trait d’union entre communauté scientifique et monde politique, entre science et société, entre science et économie, entre paradigmes scientifiques et options éthiques. Il peut compter sur un staff scientifique et opérationnel, sur la collaboration de nombreux experts mandatés ad hoc, ainsi que sur son Centre de documentation de politique de la science.
Le CSST organise ses activités en plusieurs programmes touchant la politique de la recherche, la politique universitaire, la politique technologique, la détection avancée en politique de la recherche, l’évaluation des choix technologiques (Technology Assessment) et la recherche sur l’environnement.
Sites Internet : www.swtr.ch — www.sassa.ch
Voir : Centre d étude de la politique sociale (CEPS)  Recherche sociale  Travailleurs sociaux (Formation des)
Edo Poglia
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Consommateurs àð Consommation
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Consommation
Essayer de définir, voire d'étudier la consommation pose à l'analyste un problème particulier, celui de s'intéresser à la trame même à partir de laquelle se développent les modes de vie dans les sociétés contemporaines, considérées comme des sociétés de consommation. L'expérience quotidienne de la consommation ne signifie aucunement qu'il soit facile de l'analyser. Du point de vue économique, les consommations peuvent être appréhendées en fonction de leur destination : les consommations intermédiaires ou productives (p. ex. le lait utilisé comme matière première pour la production de yaourts) et les consommations finales (p. ex. le lait consommé comme boisson). Elles peuvent aussi être différenciées en fonction des agents économiques qui en sont responsables : ménages (consommation privée) ou administrations et collectivités publiques (consommation de biens publics). Les nomenclatures comptables considèrent quant à elles que les consommations correspondent à des dépenses. De ce point de vue, les légumes cultivés au jardin potager à des fins de consommation personnelle ne sont pas des consommations. Mais il y a aussi des dépenses, comme les impôts et les assurances p. ex., qui ne sont pas considérées comme des consommations.
Selon Jean Baudrillard la consommation doit être appréhendée comme une logique sociale totale “ Nous rejoignons ici dans son aboutissement la logique formelle de la marchandise analysée par Marx : de même que les besoins, les sentiments, la culture, le savoir, toutes les forces propres de l'homme sont intégrées comme marchandises dans l'ordre de la production, se matérialisent en forces productives pour être vendues, aujourd'hui tous les désirs, les projets, les exigences, toutes les passions et toutes les relations s'abstraient (ou se matérialisent) en signes et en objets pour être achetées et consommées ” (Le système des objets, Gallimard, Paris, 1978, p. 278). Ce n'est donc pas qu'un phénomène économique, mais aussi et surtout un fait social et culturel. C'est pourquoi l'étude de la consommation, surtout celle des ménages, peut répondre à plusieurs fonctions :
— de politique sociale par l'établissement d'indices de coût de la vie sur lesquels se fondent par exemple des calculs de rentes ou en référence auxquels se font les négociations salariales entre employeurs et employés ;
— socio-économique par l'analyse des conditions de vie de diverses catégories de population ;
— psychosociologique par l'étude des comportements de consommation, des goûts, des styles de vie selon les milieux sociaux.
R. J. Baudrillard, La société de consommation, ses mythes, ses structures, Denoël, Paris, 1970. — F. Node-Langlois, L. Rizet, La consommation, Le Monde Éditions, Paris, 1995. — R. Rochefort, La société des consommateurs, O. Jacob, Paris, 1995. — V. Scardigli, La consommation, culture du quotidien, PUF, Paris, 1983.
Site Internet : www.credoc.asso.fr/
Voir : Consommation des ménages — Consommation (Unité de) — Consumérisme
Dominique Gros
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Consommation des ménages
L’observation et l’étude de la consommation des ménages ont pour origine les enquêtes sur les conditions de vie des familles. Les toutes premières enquêtes connues ont été réalisées en Angleterre à la fin du XVIIIe siècle. En raison de leurs fondements et de leurs objectifs philanthropiques, ces enquêtes manquaient de précision, les données recueillies ne se prêtaient qu’à des exploitations simples et sommaires. Au cours du XIXe et au début du XXe siècles, l’étude de la consommation des ménages va acquérir un caractère scientifique, principalement par le biais d'études budgétaires en relation avec les développements de la statistique, de l’économie et de la sociologie, notamment grâce aux travaux de E. Engel, F. Le Play, T. Veblen ou encore M. Halbwachs.
L'économiste et statisticien allemand Ernst Engel (1821-1896) est principalement connu pour la “ loi d’Engel ”, loi relative aux dépenses de consommation. Dégagée à partir de l’analyse statistique de données budgétaires, cette loi qui n'a jamais été démentie établit que plus une famille est pauvre, plus grande est la part de ses dépenses totales qu’elle utilise pour se procurer sa nourriture. Mais ses travaux sont aussi à l’origine d’autres avancées importantes pour rendre les enquêtes sur les budgets des familles méthodologiquement rigoureuses et scientifiquement fiables.
L'ingénieur et sociologue français Frédéric Le Play (1806-1882) a fait du budget une pièce centrale des monographies qu'il a consacrées aux Ouvriers européens. Selon lui, les dépenses permettent de saisir le “ mode d’existence ” des familles en évaluant leurs consommations. Celles-ci traduisent, pour chaque ménage étudié, les besoins ressentis et le degré de satisfaction qui leur est donné. Elles apparaissent donc comme des indicateurs du bien-être matériel.
Avec le sociologue français Maurice Halbwachs (1877-1945), l'analyse des comportements de consommation des ménages a acquis une orientation véritablement sociologique. Affirmant le primat du social sur l’économique, il montre que le revenu n’a pas un effet direct et simple sur le budget, car son action s’exerce à travers un système de goûts, de préférences des individus. Et ce système s’est modelé au sein d’un milieu social fait de conditions objectives d’existence, de traditions familiales, d’enracinement géographique, de culture locale, etc. La logique collective des comportements sociaux déborde donc la pure rationalité économique individuelle immédiate. Elle la réinterprète et l’adapte à la position occupée au sein de la société tout comme elle façonne les mentalités. Plus récemment, les analyses de Pierre Bourdieu sur les formes et logiques de distinction sociale ont réactualisé les réflexions initiées par Maurice Halbwachs au sujet de la différenciation des goûts selon les milieux sociaux, ainsi que celles de Thorstein Veblen (1857-1929) sur la fonction ostentatoire des comportements de consommation.
R. C. Baudelot, R. Establet, Maurice Halbwachs, consommation et société, PUF, Paris, 1995. — P. Bourdieu, La distinction : critique sociale du jugement, Minuit, Paris, 1979. — J.-J. Gislain, P. Steiner, La sociologie économique 1890-1920, PUF, Paris, 1995. — S. Fleury, D. Gros, O. Tschannen, Analyse sociologique de la consommation des ménages en Suisse, Institut de sociologie, Université de Neuchâtel, 1999. — C. Presvelou, Sociologie de la consommation familiale, Vie Ouvrière, Bruxelles, 1968.
Site Internet : www.unine.ch/psm/f/panel.html
Voir : Budget des ménages — Consommation — Consommation (Unité de) — Crédit à la consommation.
Dominique Gros
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Consommation (Unité de)
Les ménages sont les unités de consommation d'une économie. Selon cette acception, ménage signifie individu, famille, mais aussi institution, organisation, association, etc. Les ménages apparaissent sur le marché comme demandeurs (acheteurs) de biens et de services. Ils peuvent en principe, dans une économie libérale, exprimer librement leurs préférences et utiliser les revenus à leur guise (consommation et/ou épargne). En fonction du niveau de revenu (y compris les transferts de sécurité sociale, par exemple), la capacité de consommation des différentes unités diffère. De nombreuses études cernent ces aspects de propension à consommer ou épargner des ménages. Pensons ici aux problématiques de pauvreté ou à celles du niveau de protection sociale.
Voir : Consommation — Consommation des ménages — Pauvreté — Pauvreté (Seuil de) — Transferts
Stéphane Rossini
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Consumérisme
Tout le monde connaît la Fédération romande des consommateurs et consommatrices. Elle développe une activité de consumérisme.
Le consumérisme désigne l’organisation des consommateurs, la formation d’associations et le développement de leurs moyens d’information et d’action afin de faire reconnaître leurs droits.
Au-delà des actions de défenses ponctuelles, le consumérisme est un mouvement qui cherche à promouvoir des consommateurs moins dépendants, plus rationnels et capables de faire face à la puissance de groupes industriels et commerciaux recherchant d’abord leur profit.
Voir : Consommation — Protection des consommateurs
jpf
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Contrat de travail
Par la conclusion d’un contrat de travail l’employé s’engage, contre rémunération, à mettre sa capacité de travail à disposition de l’employeur pendant un certain temps. Quatre éléments caractérisent ce contrat :
— La prestation de travail, sous forme d’activité physique ou intellectuelle.
— La subordination de l’employé aux instructions de l’employeur.
— La durée pendant laquelle l’employé accepte d’être à disposition de l’employeur.
— La rémunération, mesurée au temps ou à la tâche.
Le contrat de travail n’est pas soumis à une obligation de forme. Sa conclusion peut être écrite, mais aussi orale ou même tacite.
Le contrat de travail est en principe conclu pour une durée indéterminée. La partie qui veut y mettre fin doit donc communiquer à l’autre sa décision de le rompre, en respectant le délai de résiliation. Les parties peuvent aussi conclure un contrat de durée déterminée, dont l’échéance surviendra automatiquement à la fin de la période prévue, sans qu’une résiliation soit nécessaire.
R. C. Brunner, J.-M. Bühler, J.-B. Waeber, Commentaire du contrat de travail, Réalités sociales, Lausanne, 1996.
Voir : Licenciement — Licenciement (Protection contre le) — Travail (Loi sur le)
Jean-Bernard Waeber
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Contrat entre les générations
De plus en plus de voix s’élèvent qui appellent à définir un nouveau contrat entre les générations : un contrat qui rétablisse l’équilibre démographique, qui préserve les intérêts des générations à venir et qui réintègre les jeunes, les chômeurs, et les retraités récents dans la vie sociale. Un tel objectif implique la nécessité de faire appel à des éléments plus larges que la redistribution de revenus : à des formes de service civique ou de solidarité-temps, par exemple. La question essentielle de la réciprocité des droits et des devoirs sociaux réapparaît. Une partie des “ misères humaines ”, comme la vieillesse et les souffrances de la mort, résulte et résultera toujours de la fatalité ; mais une partie croissante lui échappe peu à peu avec une rapidité qui eût paru impensable à la génération précédente, comme les maladies génétiques, ou bien encore provient des effets pervers de l’organisation sociale et des incitations en faveur du risque, comme certaines formes de chômage et certains cancers. La société moderne est appelée à concentrer son action sur la solidarité, sur les méfaits de la fatalité, et à stimuler la responsabilité pour limiter le développement inconsidéré des risques pris sciemment ou par négligence.
Le droit à l’aide de la société implique la réciprocité. Par exemple, le droit à la retraite peut-il se légitimer encore longtemps sans une aide plus généreuse aux familles et une attitude de la société plus favorable aux enfants ? Les débats qui nous attendent font appel aux principes qui étayèrent déjà le débat sur les poor laws au XIXe siècle : fatalité, solidarité, responsabilité, et réciprocité.
Ces préoccupations ont été considérées, par exemple, dans le récent rapport de la Commission fédérale chargée d’analyser la situation de la vieillesse en Suisse.
R. Commission fédérale, Vieillir en Suisse, Office fédéral des imprimés, Berne, 1995.
Site Internet : www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Voir : Génération — Gérontologie — Politique de la Jeunesse — Solidarité — Vieillesse — Vieillesse (Politique de la)
jpf
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Contrat-type de travail (CTT)
Un contrat-type de travail est un ensemble de règles, édictées par l’État, qui régissent les rapports de travail d’une profession. En général le contrat-type réglemente en détail les obligations réciproques du travailleur et de l’employeur et fixe notamment les délais de résiliation des contrats individuels de travail.
Pour entrer en vigueur, un contrat-type de travail doit être publié officiellement. Il est alors applicable obligatoirement à toutes les relations de travail de la profession considérée. Toutefois il est loisible aux parties à un contrat de travail de déroger aux dispositions du contrat-type, même oralement, à moins que le contrat-type exige la forme écrite pour les dérogations ou interdise ces dernières sur certains points.
Il existe quelques contrats-types au niveau fédéral, mais la plupart sont cantonaux ; la loi fait d’ailleurs obligation aux cantons d’édicter des contrats-types pour les travailleurs agricoles et pour le personnel de maison. Dans la pratique, en plus des deux professions précitées, les contrats-types ont surtout été édictés dans les secteurs syndicalement peu organisés et dans lesquels le besoin de protection des travailleurs est important.
Voir : Contrat de travail — Convention collective de travail (CCT)
Jean-Bernard Waeber
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Contrats collectifs àð Syndicat
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Contre-prestations
Depuis une dizaine d années, de nouvelles politiques sociales se développent en Suisse. Elles sont basées sur le principe suivant : les individus ne peuvent bénéficier de transferts de revenus de la part de l'État qu'à la condition, impérative, qu'ils se conforment à des obligations précises en matière de travail, d'amélioration de leur employabilité ou de leur insertion sociale, obligations fixées par les organismes publics ou leurs représentants. C'est le principe de contre-prestation.
C'est cette politique qui est à l'œuvre dans la nouvelle conception de l'Assurance-chômage ou dans le cadre des revenus minimums à Genève, au Tessin ou dans le canton de Vaud. L'aide devient en quelque sorte une aide liée : elle s'accompagne d'une contre-prestation comme nouvelle condition d'admissibilité à l'assistance de l'État.
Selon ses promoteurs, la contre-prestation est un élément qui permet d'éviter la marginalisation des sans-emploi et elle peut être très positive pour des individus. Mais la contre-prestation, basée sur la topique de l’activité, repose sur deux principes pour le moins discutables : le versement d'indemnités sans contrepartie est un facteur démobilisant (l'idée de la lutte contre les abus est toujours en toile de fond) et l'absence de travail est liée à la personne même de la personne au chômage (il suffit de lui donner un peu de formation, de lui faire suivre une “ mesure active ”, pour qu'elle retrouve un emploi). C'est faire fi du fait que la précarisation de l'emploi et le chômage sont inscrits dans la dynamique actuelle de la modernisation.
R. C. Yerochewski, Faut-il forcer les pauvres à travailler ?, Alternatives économiques, No 157, 1998. — J.-P. Tabin, “ L'utilité des mesures d'insertion ”, in : M.-C. Collaud, C.-L. Gerber, Contre le chômage et l'exclusion, Réalités sociales, Lausanne, 1997, pp. 39-59. — L. Boltanski, E. Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Gallimard, Paris, 1999.
Voir : Assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur l’) — Mesures d'insertion sociale (MIS) — Revenu minimum cantonal d’aide sociale (RMCAS) — Revenu minimum d’insertion (RMI) — Revenu minimum de réinsertion (RMR)
Jean-Pierre Tabin
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Contrôle social
Comment comprendre le fait que la plus grande partie des gens se comportent de façon adéquate dans les multiples situations dans lesquelles ils se trouvent ?
Les réponses à cette question sont multiples et peuvent être regroupées sous le concept général de théorie du contrôle social. Ce dernier peut être défini comme l’ensemble des processus sociaux qui déterminent l’existence de la conformité des membres d’une société aux règles et exigences comportementales en usage dans l’environnement social. Ces processus sont d’autant plus nombreux et complexes que, comme l’a montré Goffman par exemple, chaque individu est amené à s’adapter quotidiennement à une très grande variété de contextes sociaux, dont chacun comporte des normes qui peuvent varier.
On distingue généralement les processus externes et internes de contrôle social. Les premiers se composent de l’ensemble des institutions, juridiques, scolaires, familiales, etc. qui sont à la fois producteurs de normes et de sanctions en cas de déviance. Les processus internes sont mis en œuvre par les individus eux-mêmes, dans l’objectif, généralement, d’une adaptation gratifiante à l’environnement. À ce titre, on peut par exemple considérer que des mécanismes tels la contrainte morale, l’acceptation du principe de réalité, au sens freudien du terme, et plus généralement toute situation dans laquelle l’individu perçoit que son identité est dépendante du jugement et des attentes d’autrui participent du contrôle social.
Due au sociologue américain Ross, cette expression a connu une très grande fortune auprès de la sociologie américaine et, particulièrement, de l’École de Chicago.
Ce concept a connu son heure de gloire, dans les années 70, alors que nombre d’auteurs mettaient en évidence la fonction de “ contrôle social ” que pouvait jouer le travail social. La permanence, voire l’extension des situations de marginalité et d’exclusion, la relative impuissance des “ agents de contrôle social ” à remplir cette fonction, l’irruption de la thématique dominante de la pauvreté, notamment, ont quelque peu relégué ce concept dans l’ombre. Il n’en reste pas moins essentiel en tant que terme générique permettant de comprendre nombre de processus sociaux.
R. E. Durkheim, L’éducation morale, PUF, Paris, 1963. — P. Lascoumes, Prévention et contrôle social, Médecine et Hygiène, Genève, 1977. — C. Montandon, “ La socialisation des émotions : un champ nouveau pour la sociologie de l’éducation ”, in : Revue Française de Pédagogie, No 101, oct. – déc. 1992, pp. 105-122.
Voir : Acculturation — Cohésion sociale — Délinquance — Déviance — Stigmatisation
Martial Gottraux
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Convention collective de travail (CCT)
La convention collective de travail (CCT) est un accord conclu par écrit entre une ou plusieurs associations de travailleurs, d’une part, et une ou plusieurs associations d’employeurs, voire un ou plusieurs employeurs, d’autre part. Sa particularité est que la loi (art. 356 — 358 CO) confère aux parties contractantes la compétence d’élaborer librement des règles sur la conclusion, l’objet et la fin des relations de travail entre employeurs et travailleurs intéressés (dispositions normatives) ; les parties contractantes établissent en outre leurs droits et obligations réciproques, notamment à propos du contrôle et de l’exécution des clauses de la CCT (dispositions constitutives d’obligations). Les autorités compétentes de la Confédération et des cantons peuvent, à la demande de toutes les parties contractantes, étendre le champ d’application d’une CCT. Une décision d’extension a pour effet de lier non seulement les membres des associations signataires de la CCT, mais l’ensemble des employeurs et des salariés de la branche économique concernée.
R. G. Aubert, Études de droit du travail, Schulthess Polygraphischer Verlag, Zurich, 1995. — J.-Cl. Prince, L’impact des conventions collectives de travail en Suisse, Schulthess Polygraphischer Verlag, Zurich, 1994.
Voir : Paix du travail (Convention de la) — Participation — Travail — Travail (Loi sur le)
Jean-Claude Prince
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Convention relative aux droits de l'enfant àð Nations Unies (Istruments des)
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Conventions bilatérales de sécurité sociale
La Suisse a conclu des conventions bilatérales de sécurité sociale avec près de 30 États, dont tous ceux de l Union européenne (UE). Elles portent toutes au moins sur l AVS/AI, et, de cas en cas, sur l’assurance-accidents obligatoire et l’assurance-maladie. Si le contenu des conventions signées avec chaque État peut varier, elles reposent toutes sur des grands principes largement reconnus en droit international, qui sont : 1) le traitement sur pied d’égalité des ressortissants de l’autre État ; 2) le paiement des rentes aux ayant droit dans leur pays d’origine (éventuellement aussi dans des États tiers) ; 3) la préservation des droits acquis ou en cours d’acquisition. Les conventions déterminent également l’assujettissement aux assurances de l’un ou l’autre État, règlent les exceptions nécessaires à l’égalité de traitement et au paiement à l’étranger et contiennent de plus des dispositions complémentaires. Les conventions bilatérales en matière de sécurité sociale ne concernant pas l’assurance-chômage. Celle-ci fait l’objet d’accords particuliers avec les États voisins. On retiendra que les principes les plus important régissant toutes les conventions sont l’égalité de traitement entre ressortissants des Parties contractantes et la réciprocité.
Dans le cadre des accord bilatéraux conclus entre la Suisse et l’UE, l’art. 8 de l’accord sur la libre circulation des personnes dispose que les Parties contractantes règlent la coordination de leurs systèmes de sécurité sociale. Il engendre de ce fait une correction des restrictions contenues dans la législation nationale de chacune des Parties. Il ne vise pas l’harmonisation des divers systèmes nationaux de sécurité sociale, mais il tend à leur coordination maximale, afin de lever les obstacles à la libre circulation des travailleurs et de leur famille. Les législations des États contractants peuvent rester inchangées et continuer à être adaptées en fonction des besoins nationaux, tout en respectant un certain nombre de principes, dont l’interdiction de toute discrimination fondée sur la nationalité et le versement intégral des prestations en espèces en cas de domicile dans un autre État contractant. L’ensemble des dispositions prévues se réfèrent aux branches d’assurances sociales traditionnelles, comme la maladie et la maternité, l’invalidité, la vieillesse, le décès (prestations aux survivants), les accidents et les maladies professionnels, le chômage ainsi que les prestations familiales. Elles englobent la totalité de la législation d’un État, y compris celle de collectivités publiques et ce indépendamment du fait que les prestations soient financées par des cotisations ou des impôts. L’assistance sociale est cependant exclue du champ d’application. Il faut noter toutefois que les titulaires de permis de séjour de courte durée n’auront droit, durant une période transitoire de sept ans, à l’indemnité de chômage que s’ils ont cotisé en Suisse pendant le nombre minimum de mois requis (pas de totalisation).
Les conventions bilatérales entre la Suisse et chacun des États de l’UE ont un champ d’application personnel plus vaste que l’accord avec l’UE elle-même, puisqu’elles visent non seulement les travailleurs, mais tous les ressortissants des deux États contractants. C’est pourquoi les conventions bilatérales restent en vigueur pour les personnes auxquelles l’accord avec l’UE n’est pas applicable.
R. Rapport du Conseil fédéral sur les engagements de la Suisse en matière d’assurances sociales liés à des conventions internationales (Postulat du groupe de l’Union démocratique du centre du 10 juin 1998, Conseil national, 98.3241). — Message du Conseil fédéral relatif à l’approbation des accords sectoriels entre la Suisse et la CE du 23 juin 1999. — Département fédéral de l’économie/Département fédéral des affaires étrangères, Accords sectoriels Suisse-CE, rapport explicatif pour la procédure de consultation, mars 1999.
Site Internet : www.bvs.admin.ch/blind/int/grundlag/f/abkom.htm
Voir : Accord sur la libre circulation Suisse-CE — Communauté européenne et sécurité sociale — Droits acquis/en cours d'acquisition (Maintien des) — Sécurité sociale
Christine Bulliard Mangili
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Conventions de l'OIT àð Normes internationales du travail
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Convergence
La convergence des objectifs et des politiques de protection sociale est un concept élaboré dans le cadre de la Communauté européenne. Elle est fondée sur les éléments suivants : les systèmes nationaux de sécurité sociale sont très différents, cependant ils sont exposés à des problèmes communs (chômage, pauvreté, fragilisation des familles, grand âge, etc.), les transferts de revenus nécessitent tant une économie développée qu’une adhésion des populations, les différences de protection gênent la libre circulation des personnes. Il est dès lors utile de développer une stratégie de convergence, souple, progressive et non contraignante ; elle définit des objectifs communs et prend en compte la cohésion sociale. L’instrument principal est la Recommandation du Conseil du 27 juin 1992 (92/422/CEE ; JOCE du 26 août 1992, No L 245/49). Ce texte propose quatre grandes missions : garantie universelle des soins de santé, de l’intégration sociale et professionnelle, garantie à toute personne de ressources conformes à la dignité humaine (lutte contre la pauvreté), maintien du niveau de vie pour les travailleurs salariés. S’y ajoutent le développement d’une protection pour les indépendants, le respect de l’égalité, l’adaptation des systèmes aux besoins. Toujours sous forme de recommandations, la convergence porte également sur des dossiers. maladies professionnelles, retraite flexible, ressources pour les plus démunis, lutte contre le chômage. La convergence est ainsi contrastée : elle est forte sur le fond – c’est la défense et la promotion d’un modèle social européen – et faible sur la forme (textes non contraignants). Ceci est dû aux compétences limitées de la Communauté et à des choix politiques. Le concept peut aussi être utile en dehors du cadre communautaire (p. ex. ONU, OIT).
R. Y. Chassard, La convergence des objectifs et politiques de protection sociale, Europe sociale, supplément 5/1992, pp. 13 ss. — Revue belge de sécurité sociale, déc. 1994.
Voir : Communauté européenne et sécurité sociale — Conventions bilatérales de sécurité sociale — Fondements — Harmonisation — Sécurité sociale.
Pierre-Yves Greber
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Coordination
Le droit international ou européen de la sécurité sociale relatif à la coordination a pour objectif de résoudre deux types de problèmes. Il s’agit tout d’abord des inégalités de traitement fondées sur la nationalité : un non-national (un étranger) est moins bien traité qu’un national (p. ex. il doit remplir des conditions d’octroi de prestations plus sévères) ; au lieu d’être directes, formelles, les discriminations peuvent aussi être indirectes (les mêmes règles valent pour les nationaux et les étrangers, mais elles sont plus difficiles à remplir dans les faits par les seconds). Le deuxième type de problèmes est celui des situations transfrontières ou qui excèdent la sphère d’un seul État : les législateurs nationaux définissent souverainement (sous réserve de normes les liant) leurs systèmes de sécurité sociale ; ce sont eux qui en déterminent les composantes : champs d’application personnel et matériel, prestations, organisation administrative et financière. Mais le pouvoir de ces législateurs s’arrête aux frontières de l’État concerné : il y a donc un besoin de règles autres que nationales. Ainsi, la coordination a pour but d’établir des liens entre des systèmes nationaux de sécurité sociale, sans avoir pour objectif de les modifier : elle les considère comme des données. Ces liens vont permettre d’effacer – totalement ou partiellement – les conséquences négatives qui résultent habituellement du franchissement d’une frontière ; en droit communautaire, la coordination est essentielle pour la libre circulation des personnes.
Les principes de la coordination portent dès lors sur : l’égalité de traitement (entre nationaux et étrangers) ; le maintien des droits en cours d’acquisition (qui met en œuvre la totalisation de périodes – d’assurance, d’activité professionnelle ou de résidence – pour ouvrir un droit, suivie d’une proratisation qui répartit les charges entre les systèmes) ; le maintien des droits acquis (qui permet de se faire soigner en dehors de l’État compétent et à charge de ses institutions, ou d’exporter une prestation en espèces, p. ex. une pension de retraite) ; la désignation du droit (et du système) applicable (qui évite des conflits de lois positifs comme négatifs) ; la coopération administrative (entre institutions de sécurité sociale). A noter que la terminologie peut varier selon les textes et les auteurs : le deuxième principe est parfois appelé totalisation, le troisième exportation.
Le droit de la coordination trouve ses sources dans les conventions bilatérales (la solution la plus ancienne), multilatérales (certaines ont été conclues dans le cadre de l’Organisation internationale du Travail et du Conseil de l’Europe), dans les règlements communautaires (les Règlements No 1408/71 et 574/72). En vertu de l’Accord Communauté européenne/États membres – Suisse sur la libre circulation des personnes (1999), la Suisse va passer du bilatéralisme à l’application des règlements No 1408/71 et 574/72 à l’égard des Quinze.
R. G. Perrin, Histoire du droit international de la sécurité sociale, Association pour l’étude de l’Histoire de la Sécurité Sociale, Paris, 1993. — J.-L. Duc, B. Kahil-Wolff (Éds), Assurances sociales et frontières nationales : perspectives suisses et européennes, IRAL, Lausanne, 1998.
Voir : Circulation des personnes (Libre) — Communauté européenne et sécurité sociale — Convention bilatérales de sécurité sociale — Droits acquis/en cours d’acquisition (Maintien des) — Droit applicable (désignation du) — Égalité de traitement entre nationaux et non-nationaux — Fondements du droit de la sécurité sociale — Harmonisation
Pierre-Yves Greber
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Cotisation/Prime
En Suisse, les deux termes sont souvent employés comme synonymes pour désigner les contributions des assurés et/ou de leurs employeurs aux divers régimes de la prévoyance sociale, par opposition aux subventions et autres subsides étatiques financés par l'impôt. Traditionnellement, on utilise le mot cotisation dans les régimes de l'assurancevieillesse et survivants, de l'assuranceinvalidité, de la prévoyance professionnelle, de l'assurancechômage, des allocations pour perte de gain et des allocations familiales. En revanche, le terme prime  qui vient du droit de l'assurance privée où il désigne la somme payée à l'assureur par le preneur d'assurance en échange de la couverture du risque assuré  se retrouve dans le droit de l'assuranceaccidents et de l'assurancemaladie.
Ces contributions sont généralement prélevées en fonction du revenu ou du salaire (avec ou sans plafond) et non du risque assuré, comme c'est en revanche la règle dans l'assurance privée.
Dans la mesure où elles sont destinées au financement d'assurances sociales, les cotisations et les primes jouissent d'un régime particulier dans trois domaines : elles peuvent être compensées par l'assureur avec des prestations échues (pour autant que cela n'entame pas le minimum vital de l'assuré) ; elles bénéficient d'un privilège dans la faillite (créances colloquées en deuxième classe) et enfin, leur détournement par l'employeur ou leur nontransfert à l'institution d'assurance constitue un délit spécialement réprimé par la loi.
Voir : Allocations familiales — Assuranceaccidents — Assurancechômage — Assurancemaladie — Assurancevieillesse et survivants — Assurances privées — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques et aspects juridiques — Mutualité (Principe de) — Prévoyance professionnelle — Primauté des cotisations
Raymond Spira
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Couples de même sexe
Sous le terme couples de même sexe (ou partenariat homosexuel) nous entendons ici la communauté de vie durable et, en principe, exclusive que forment deux personnes de même sexe. Leur partenariat présente, en général, une composante affective, spirituelle, corporelle et économique.
Il est difficile de chiffrer le nombre de couples homosexuels en Suisse, des statistiques à ce sujet n’existent pas. Si l’on admet que 5 % de la population seraient homosexuels, le nombre de personnes vivant en couple de même sexe pourrait s’élever entre 100 et 200'000.
Pendant que les relations homosexuelles étaient encore discriminées par le code pénal suisse jusqu’en 1992 (âge de consentement différent, interdiction des relations homosexuelles par le code pénal militaire), les homosexuels sont, aujourd’hui, protégés par la Constitution fédérale. D’une part, toute discrimination à cause notamment du “ mode de vie ” d’une personne est interdite par la Constitution (art. 8 al. 2 ; terme qui a été ajouté précisément pour inclure les homosexuels dans cette protection), d’autre part, les relations homosexuelles font partie de la sphère de la “ vie privée ”, protégée à l’art. 13 Cst. féd.
En droit suisse, les couples de même sexe ne peuvent pas se marier. Comme le mariage est la seule structure juridique offerte par le droit suisse pour la vie en couple, les couples homosexuels sont ainsi obligés de vivre en union libre. Or, l’union libre n’est pas prévue par la législation suisse. Elle est cependant soumise aux règles ordinaires du droit, notamment du droit des contrats. Sous certaines circonstances, la vie commune peut alors déclencher des obligations mutuelles. En revanche, en droit des assurances sociales ou en droit des étrangers, la vie commune des personnes vivant dans un partenariat homosexuel, considérées comme des personnes célibataires, n’entraîne ni un droit à des prestations pour survivants ni un droit à l’octroi d’une autorisation de séjour pour le partenaire étranger.
Plusieurs pays européens connaissent des institutions juridiques pour les couples de même sexe, leur accordant le même statut qu’aux couples mariés, sauf l’adoption (“ partenariat enregistr頔) : le Danemark (depuis 1989), la Norvège (1993), la Suède (1995), l’Islande (1996), et les Pays-Bas (1998). Depuis 2001, le mariage est ouvert aux couples de même sexe aux Pays-Bas. La France (en 1999, “ Pacs ”), la Belgique (en 1998) et l’Allemagne (en 2000) ont adopté des lois permettant aux partenaires un enregistrement de leur partenariat ayant des conséquences juridiques non équivalentes au mariage. Le Danemark et les Pays-Bas permettent l’adoption par des couples homosexuels depuis 1999 resp. 2001. En Suisse, le canton de Genève permet depuis 2001 aux concubins – de même sexe ou de sexe opposé – l’enregistrement de leur partenariat. Au niveau fédéral, plusieurs interventions parlementaires ont proposé une législation sur les couples de même sexe ; le 17 septembre 1999, le Conseil national a donné suite à une initiative parlementaire du genevois Jean-Michel Gros qui demande une législation sur un partenariat enregistré, visant surtout la situation des couples homosexuels. Le Conseil fédéral a annoncé un projet de loi pour la fin 2001.
R. F. Guillaume, R. Arn, Cohabitation non maritale. Évolution récente en droit suisse et étranger, Genève, 2000. — Office fédéral de la justice, La situation juridique des couples homosexuels en droit suisse. Problèmes et propositions de solution, Berne, 1999. — B. Pulver, L’union libre, Réalités sociales, Lausanne, 1999. — M. Bertschi, “ Les lois nationales permettant aux couples de même sexe d’enregistrer leur partenariat ”, in : Pratique juridique actuelle, 2001, pp. 340-349.
Voir : Homosexualité — Mariage — Union libre
Bernhard Pulver
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Coûts de la santé
Ce sont les ressources directement dépensées pour l’exécution d’activités qui visent la promotion et la sauvegarde de la santé, la prévention, les soins et la réhabilitation sanitaires. Le coût global du secteur sanitaire est généralement exprimé en pourcentage du Produit Intérieur Brut (1998, estimation pour la Suisse = ~ 10,3 %), ou bien sous forme de valeur monétaire dépensée en moyenne par tête d’habitant.
Le coût global est d’habitude ventilé (entre [ ] les ordres de grandeur pour la Suisse) selon les agents de production (établissements intra-muros [53 %], soins ambulatoires [40 %], assurances sociales et État [7 %]), ou en fonction de la nature des biens et des services consommés (soins intra-muros [47 %], soins ambulatoires [35 %], médicaments [11 %], prévention [1,5 %] et administration [5,5 %]). La dépense sanitaire totale est contrôlée, directement ou indirectement, par les professionnels de la santé à hauteur de 80-90 %.
Le financement de la dépense sanitaire est ventilé selon les agents payeurs (caisses-maladie et autres assurances, ménages et collectivités publiques) ou en fonction des agents qui supportent réellement la charge économique (ménages [66 %], collectivités publiques [24 %], autres [10 %]). En réalité environ 90 % de la dépense sanitaire est supporté par les ménages sous forme de cotisations aux caisses et aux assurances, payements directs et impôts.
La comparaison internationale des dépenses de santé requiert une grande prudence car la délimitation du secteur sanitaire peut varier d’un pays à l’autre comme d’ailleurs les prix et les salaires.
Par définition comptable, la dépense sanitaire est égale aux revenus encaissés par les fournisseurs de prestations. Dès lors, l’objectif prioritaire de la maîtrise des coûts de la santé ne pourra être poursuivi que dans le cadre d’un conflit entre ceux dont le revenu dépend de l’administration des soins et ceux qui doivent les payer (Evans).
R. R. Rossel, Coûts du système de santé : évolution durant la période 1960 à 1995 et résultats détaillés récents, Office fédéral de la statistique, Berne, 1998. — G. Domenighetti, P. Zweifel, “ Les politiques de santé : incitation économique et contrainte légale ”, in : F. Gutzwiller, O. Jeanneret, (Éds) Médecine sociale et préventive, Santé publique, Hans Huber, Berne, 1996, pp. 200-220. — La réforme des systèmes de santé : étude de dix-sept pays de l’OCDE/Organisation de coopération et de développement économiques, OCDE, Paris, 1994.
Voir : Assurance-maladie (AM) — Budget social — Caisses-maladie — Enveloppe budgétaire — Managed care (ou réseau de soins coordonnés) — Médicaments génériques — Santé publique — Statistique sociale — Soins de santé primaires
Gianfranco Domenighetti
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Crèche et garderie
Les institutions d’accueil à la journée pour enfants d’âge préscolaire se distinguent, en Suisse romande, par la surprenante variété de leurs appellations. Dans leur raison sociale (avec profusion de références à des noms supposés refléter l'univers enfantin) mais surtout dans leurs dénominations génériques : crèche, garderie, crèche-garderie, nursery, jardin d’enfants, centre de vie enfantine, espace de vie enfantine, halte-garderie, l'énumération est loin d'être close. A cela s’ajoute le fait que d'un canton à l'autre un même terme peut recouvrir des modalités d'accueil différentes, ou qu'un même type de structure n'aura pas la même désignation.
On réunira avec les termes de crèche et de garderie l'ensemble des lieux qui s'apparentent par leurs propriétés fonctionnelles. Ces structures, à quelques nuances près (toutes les garderies n’assurent pas le repas de midi, ou n’accueillent pas des bébés), se caractérisent par une offre de prestations horaires élargies (quotidiennes, hebdomadaires, annuelles) qui correspondent à la journée de travail de l’adulte. Ce qui n’est pas le cas des autres formes d'accueil en collectivité, dont le temps d'ouverture est restreint.
Crèches et garderies remplissent une fonction de service, destinée aux parents qui exercent une activité professionnelle. Elles constituent une alternative au placement chez une “ maman de jour ”, en valorisant la socialisation du jeune enfant auprès d’un groupe de pairs.
Bien que régies par l’Ordonnance fédérale de 1977 sur le placement extra-familial, ces institutions ne bénéficient guère d’une politique sociale concertée, comme l’atteste la multiplicité de leurs modes de financement Certaines sont publiques, d’autres subventionnées, d’autres totalement privées. On note encore de fortes disparités régionales quant aux taux d’équipement. Leur développement, comme son incitation par les autorités compétentes, est d’autant plus marqué que l’on se trouve dans une région urbanisée, où se concentrent ces indicateurs que sont le maintien des jeunes mères sur le marché du travail ou la désagrégation des modèles familiaux traditionnels. Crèches et garderies expriment ainsi l’évolution des modes de vie, que l'on décrira succinctement par une augmentation de la demande.
Augmentation quantitative d'une part : le manque de places d’accueil se fait chaque fois plus ressentir. Les statistiques, lorsqu'elles sont disponibles, font état d'une pénurie, sans compter les cas croissants de familles ayant un horaire de travail atypique, par exemple travail sur appel ou de nuit, cas pour lesquels ces institutions ne peuvent offrir de solutions appropriées.
Augmentation qualitative d'autre part : le personnel éducatif se recrute chaque fois davantage parmi les détenteurs d'une qualification professionnelle (la recherche de diplômés est devenue insistante, l'offre dépasse, ici, la demande), et les attentes parentales vont désormais au-delà d’un strict souci de garde et de soins, pour s’orienter vers la priorité donnée à l’action éducative des lieux d’accueil.
Reste qu'en dépit de la légitimation accrue d'une prise en charge socio-éducative de qualité, crèches et garderies continuent de faire l'objet de débats politiques, pour ne pas dire électoralistes, quant à leur bien-fondé (idéologique ou financier).
R. P. Richard-De Paolis, P.-Y. Troutot, P.-E. Gaberel, C. Kaiser, G. Meyer, S. Pavillard, M. et A. Pecorini, A. Spack, Petite enfance en Suisse romande. Enquête sur les institutions, les politiques et les pratiques de la prime éducation, Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Voir : Éducateur de la petite enfance — Enfance (Pédagogie de la petite) — Enfance (Politique de l’) — Famille (Politique de la)
Gil Meyer
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Crédit à la consommation
Le crédit à la consommation recouvre différentes facilités de paiement permettant au consommateur d’accéder à un prêt ou à des biens de consommation (à l’exception des biens immobiliers), en en différant le paiement. Les formes de crédit à la consommation ont connu une diversification nette au cours de la dernière décennie : le crédit au sens traditionnel comprend les ventes à tempérament ou par acomptes dont le nombre est en diminution depuis qu'ils sont bien réglementés, ainsi que les crédits en espèces (prêts comptants et à terme), communément nommés “petits crédits”. Le crédit traditionnel représente un volume d’affaires de 5,13 mia de francs suisses en 2000, selon les indications des professionnels de la créance. A ces formes traditionnelles s’en ajoutent d’autres plus modernes dont le développement est très rapide : les contrats de leasing (crédit-bail) ne cessent d’augmenter, et les formes de crédit liées à l'argent plastique - cartes de crédit, cartes clients avec options de remboursement, cartes de grands magasins - connaissent également un essor très rapide. En 2000, le volume d’affaires engendré par les seuls contrats de leasing a dépassé les 6 mia de francs (2.6 mia en 1996).
Sur le plan légal, le crédit à la consommation est resté longtemps essentiellement réglementé par des dispositions cantonales de nature et de portée diverses. La situation n’a pas été modifiée fondamentalement par l’introduction tardive d’une loi-cadre fédérale en 1993 (loi fédérale sur le crédit à la consommation, LCC), dont la portée protectrice est très restreinte. La loi fédérale a subi une révision de fond début 2001, retirant toute compétence aux législations cantonales (entrée en vigueur prévue en 2003). Il n’existe pas d’autorité neutre de surveillance en matière de crédit à la consommation.
Voir : Consommation — Dettes — Désendettement — Petit crédit — Surendettement
Caroline Regamey
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Croix-Rouge suisse
Fondée en 1866, la CRS est une institution privée, avec siège à Berne. Elle est implantée dans l’ensemble du pays, grâce à ses associations cantonales, et à ses organisations affiliées : Alliance suisse des Samaritains, REGA, Société suisse de sauvetage, Société suisse des troupes sanitaires, Société suisse pour chiens de catastrophe, Union suisse pour la protection civile.
À sa mission initiale — renforcer le service sanitaire de l’armée — la CRS a ajouté d’importantes activités dans les domaines de la santé (cours, transfusion sanguine, formation des professions de la santé, soins à domicile, ergothérapie), du bénévolat social (services de transport, par ex.), et de l’aide aux réfugiés. À l’étranger, elle intervient en cas de catastrophe et réalise des programmes de coopération au développement.
La CRS est membre de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Elle entretient des relations privilégiées avec le CICR, et avec les pouvoirs publics, dont elle est l’auxiliaire dans l’accomplissement de tâches humanitaires.
R. R. Durand e. a., La Croix-Rouge en Suisse romande, Berne, 1992. — P. Bender, La Croce Rossa in Ticino, Berne, 1996.
Site Internet : www.croixrouge.ch
Voir : Action humanitaire — Asile (Politique d’) — Bénévolat — Organisations non gouvernementales (ONG) — Réfugié — Soins et aide à domicile
Philippe Bender
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Curatelle
La curatelle est un régime de protection volontaire ou institué par l'État dont l'objectif est d'assister un individu pour des besoins déterminés et de manière provisoire. La curatelle peut revêtir plusieurs formes :
— la curatelle de représentation (art. 392 CCS) qui vise notamment les cas d'empêchement d'une personne majeure (pour cause de maladie ou d’absence) ou de conflits d'intérêts entre le représentant légal et le représenté ;
— la curatelle de gestion (art. 393 CCS) qui vise le cas d'une personne dont les biens ne sont pas ou ne sont qu'insuffisamment gérés ;
— la curatelle mixte (art. 392 ch. 1, 393 ch. 2 CCS) qui combine les deux types de curatelle précités.
La curatelle, qui est une mesure de protection moins contraignante que la tutelle, n'entraîne pas pour la personne représentée une privation complète, mais une limitation de l'exercice de ses droits civils.
R. H. Deschenaux, P.-H. Steinauer, Personnes physiques et tutelle, 3e éd., Ed. Stämpfli, Berne, 1995. — M. Stettler, Représentation et protection de l’adulte, 4e éd., Éditions universitaires, Fribourg, 1997.
Voir : Autorités tutélaires — Conseil légal — Contrôle social — Tutelle — Tutelle (Droit de la)
Nicolas Queloz et Ariane Senn-Gromelle
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Cycle de vie
L’idée commune de cycle de vie fait de l’existence humaine un processus de maturation (puis dans certaines conceptions de décrépitude), constitué d’une succession d’étapes (de stades, “ d’âges de la vie ”), réitérée de manière invariante au fil des générations. Historiens et anthropologues ont mis en évidence la grande diversité des conceptions et représentations de ces périodisations de l’âge, ainsi que les fonctions variables qui leur sont assignées dans l’organisation de la société et dans la définition sociale de l’identité de ses membres.
Les biologistes et psychologues de l’école développementaliste (human development) ont repris cette notion et ont cherché à rendre compte du développement des facultés physiologiques et neurologiques de l’organisme, comme des différentes composantes (cognitives, affectives, etc.) de la personnalité et du comportement. La psychologie du développement s’est longtemps focalisée sur l’enfance (Piaget en est la figure de proue) pour, plus récemment, porter une attention croissante sur les âges plus avancés. Le développement de l’intérêt pour l’ensemble du cycle de vie a conduit au développement d’une nouvelle orientation théorique dite du life span. Dans cette dernière, l’individu se développe tout au long de son existence ; ce développement est à la fois multidimensionnel, au sens où il est constitué de plusieurs processus entrelacés, et multidirectionnel, certaines capacités pouvant croître jusqu’à un âge avancé alors que d’autres peuvent décliner de manière beaucoup plus précoce, gains et pertes se rééquilibrant de manière continue ; de plus, il existe une grande plasticité intra-individuelle, ce qui implique d’importantes différences interindividuelles dans les trajectoires de vie, ces dernières étant enchâssées dans un contexte historique, social et culturel.
Sociologues et démographes ont cherché pour leur part à analyser le parcours de vie (Life Course, Lebenslauf) en tant qu’institution sociale, c’est-à-dire comme un ensemble de régulations ordonnant la vie humaine dans son extension temporelle. Le mouvement des individus au long de leur existence est régulé d’une part par une organisation séquentielle de positions sociales et de strates d’âge, d’autre part par une structuration des perspectives individuelles de mouvements au long de la vie, ce “ script ” (les contraintes, opportunités, significations structurellement définies) étant négocié par les individus en fonction des ressources dont ils disposent et des schémas d’interprétation cognitifs et symboliques dont ils sont porteurs. Au cours de la période récente, parcours scolaires, modalités du passage de l’école à l’entreprise, formes de mobilité professionnelle et de transition vers la retraite, types de carrières familiales, pour ne citer que ces aspects, ont été profondément transformés sous l’effet des mutations du système de production économique, du modèle culturel, des manières d’être reliés à autrui.
Ces différents apports confluent au sein du paradigme du parcours de vie en tant qu’approche multidisciplinaire de l’étude de la vie humaine.
R. C. Attias, C. Donfut, Générations et âges de la vie, PUF, Paris, 1987. — M. Kohli, “ Die Institutionalisierung des Lebenslaufs. Historische Befunde und theoretische Argumente ”, in : Kölner Zeitschrift für Soziologie und Sozialpsychologie, No 37 (1), 1985, pp. 1-29. — C. Lalive d’Épinay, “ La construction sociale des parcours de vie et de la vieillesse en Suisse au cours du XXe siècle ”, in : G. Heller (Éd.), Le poids des ans. Une histoire de la vieillesse en Suisse romande, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1994, pp. 127-150.
Voir : Gérontologie — INAG (Institut Universitaire Âges et Générations) — Jeunes vieux — Jeunesse — Petite enfance — Pyramide des âges — Quatrième génération — Retraite (Âge de la) — Société postindustrielle — Thèse de l’ambivalence des relations — Vieillesse — Vieillissement de la population
Jean-François Bickel
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Décentralisation/intégration
Après une longue période marquée par la centralisation de la gestion, mais aussi par la prolifération des services, de plus en plus spécialisés, on voit s’esquisser des démarches qui sont animées par un souci de décentralisation et d’intégration des diverses prestations offertes aux usagers.
L’intention est d’améliorer la qualité des prestations, de les rendre plus accessibles et, quelquefois, de favoriser la participation du plus grand nombre à la gestion de l’action sanitaire et sociale.
Décentraliser, c’est lutter contre les effets bureaucratiques et favoriser l’adéquation des services offerts aux besoins réels des populations-cibles ; c’est aussi réduire les effets négatifs de l’hospitalocentrisme et de l’institutionnalisation générale trop souvent inutile, voire dommageable, des demandeurs de soins. La légitimité de telles démarches est de moins en moins discutée, ce qui n’entraîne pas automatiquement une accélération de la mise en œuvre.
En revanche, l’intégration veut être une réponse à l’atomisation des services dont l’usager est le premier à pâtir. Elle vise à coordonner les pratiques des professionnels socio-sanitaires et les pratiques politico-administrative. Elle implique une communication ouverte entre des réseaux d’information et d’action qui ne fonctionnent pas nécessairement selon la même logique ; elle suppose la gestion des inégalités et des asymétries tant au niveau des connaissances que du pouvoir. Les difficultés à surmonter sont multiples, d’autant plus qu’elles ne sont pas toujours prévisibles. Beaucoup surviennent “ dans le feu de l’action ”. En outre, le rapport avec le milieu social est rendu beaucoup plus étroit et les influences réciproques s’exercent et deviennent partie intégrante de l’organisation quotidienne des prestations de services.
Tout cela exige que de véritables modèles d’intégration soient conçus, explicités, expérimentés, qui permettent une optimisation des rapports entre les services intégrés et leur champ d’action. Il convient encore de définir des méthodes qui rendent possible une souple redéfinition des priorités pour qu’un véritable accueil puisse être fait aux besoins dont on aura permis, voire suscité l’expression. Cette souplesse n’est pas évidente ni aisée à mettre en place ; elle est tributaire des rythmes politico-administratifs ; on devine qu’ils sont appelés à s’accélérer sous peine d’entraîner des blocages vite démobilisateurs.
De telles initiatives appellent généralement une vigoureuse mise en cause de la division du travail établie ; ce qui n’implique évidemment pas une négation des compétences, des rôles, et des objectifs de carrière. Ce sont peut-être les formes de direction qui sont appelées à être le plus significativement transformées.
R. D. Clerc, e. a., La crise, Syros, Paris, 1983. — A. Gorz, Adieux au prolétariat, Galilée, Paris, 1980.
Voir : Division du travail (Mécanismes de la) — Marketing social — Réseau de soin — Réseau de soin (Organisation du)
jpf
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Décision administrative
Acte juridique unilatéral par lequel une autorité administrative ou une institution privée délégataire de la puissance publique (p. ex. une caisse-maladie ou une caisse d’assurance-chômage d’un syndicat) prend une mesure, fondée sur la loi, ayant pour objet de régler un rapport de droit dans un cas d’espèce (p. ex. taxation fiscale, permis de bâtir, octroi ou refus de prestations d’une assurance sociale). En règle ordinaire, elle revêt la forme écrite et comporte le mot “ décision ” ou le verbe “ décider ”. Elle doit être motivée de manière compréhensible et signée. Le destinataire de la décision peut, selon les cas, élever une réclamation ou former une opposition auprès de l’auteur de la décision, ou interjeter un recours devant l’autorité compétente et dans le délai prévu par la loi. Une décision entrée en force peut, à certaines conditions, être l’objet d’une reconsidération ou d’une révision.
R. B. Knapp, Précis de droit administratif, 4e éd., 1991, pp. 214 ss. — P. Moor, Droit administratif, vol. II, 1991, pp. 103 ss.
Voir : Recours (en assurances sociales)
Raymond Spira

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Déclaration de Caracas
Cette déclaration a été adoptée à Caracas le 14 novembre 1990 lors de la Conférence régionale pour la restructuration des soins psychiatriques en Amérique Latine, sous l’égide de l’Organisation Panaméricaine de la Santé / Bureau régional de l’Organisation Mondiale de la Santé pour les Amériques. La déclaration reconnaît que la restructuration des soins psychiatriques basée sur les principes de Soins Primaires de Santé et dans le cadre du modèle des Systèmes de Santé Locaux, permet la promotion de modèles alternatifs de services basés sur la communauté et intégrés dans les réseaux social et sanitaire. Le processus de restructuration implique une révision critique du rôle dominant et central joué jusqu’alors par les hôpitaux psychiatriques. De plus, les ressources, les soins et les traitements disponibles doivent :
— assurer la dignité personnelle, les droits de l’homme et les droits civils des patients ;
— être fondés sur des critères rationnels et adéquats du point de vue technique ;
— assurer le maintien des patients dans la communauté.
Les législations nationales doivent être révisées, si nécessaire, pour :
— assurer la protection des droits de l’homme et des droits civils des patients avec troubles mentaux ;
— garantir que l’organisation des services assure l’application de ces droits.
La formation en santé mentale et en psychiatrie doit utiliser un modèle de services basé sur les centres communautaires de santé et encourager les admissions psychiatriques dans les hôpitaux de soins généraux. Les participants à la conférence s’engageaient à défendre et à développer des programmes communautaires pour promouvoir les restructurations souhaitées et à contrôler et à défendre les droits de l’homme pour les patients avec troubles mentaux selon la législation nationale et selon les accords internationaux. Pour atteindre ces objectifs, les signataires de la déclaration ont fait appel aux Ministres de la Santé et de la Justice, aux Parlements, aux Assurances Sociales et aux autres institutions responsables de soins, aux organisations professionnelles, aux associations de consommateurs, aux universités et aux services d’enseignement, ainsi qu’aux médias, pour que tous soutiennent la restructuration des soins en psychiatrie, afin d’assurer le succès de son développement au bénéfice de la population et des régions.
R. World Health Organization, Guidelines for the promotion of human right of persons with mental disorders, WHO/MNH/MND/95.4, Geneva, 1996.
Voir : Déclaration sur les droits des personnes avec retard mental — Déclaration universelle des droits de l’homme — Réseau de soins (Organisation du)
Armin von Gunten
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Déclaration de Hawaii II
Déclaration adoptée en 1992 par l’Assemblée Générale de l’Association Mondiale de Psychiatrie. Elle consiste en une liste de 10 orientations pour promouvoir l’étroite adhésion des psychiatres à un niveau éthique élevé et à prévenir une mauvaise utilisation des concepts, des connaissances et des techniques de la psychiatrie. Selon la déclaration, le but de la psychiatrie est de traiter les maladies mentales et de promouvoir la santé mentale. Le psychiatre doit ainsi servir au mieux les intérêts du patient et être aussi concerné par la bonne et juste allocation des ressources. Pour que ces objectifs soient atteints, il faut développer des recherches suivies et éduquer de façon permanente le personnel du domaine de la santé, les patients et le public. Chaque psychiatre doit offrir au patient la meilleure thérapie disponible selon ses connaissances et ceci avec la sollicitude et le respect dû à la dignité de tous les êtres humains. Le psychiatre aspire à une relation thérapeutique fondée sur l’accord mutuel. Quand ceci n’est pas possible, un contact doit être établi avec un proche du patient. La nature du trouble mental, les procédures thérapeutiques proposées (ainsi que les alternatives) et si possible les résultats attendus doivent être expliqués au patient par le psychiatre. Aucune procédure ne devait être réalisée et aucun traitement administré contre l’avis libre du patient, sauf s’il n’est pas capable de juger ce qui est de son propre intérêt. Aussitôt que les conditions pour imposer au patient un traitement ne sont plus réunies, le psychiatre doit libérer le patient de la nature imposée du traitement : si un traitement ultérieur est encore nécessaire, il doit obtenir l’accord du patient. Les dispositions pour faire appel contre un traitement imposé doivent être communiqueées au patient par le psychiatre. Celui-ci ne doit jamais utiliser son pouvoir professionnel pour violer la dignité des droits de l’homme d’un individu ou d'un groupe. Il ne doit pas permettre que ses souhaits personnels, sentiments, préjugés ou croyances interfèrent avec le traitement. Toute information fournie par le patient doit rester confidentielle sauf si le médecin est relevé de cette obligation par le patient lui même ou pour prévenir une atteinte sérieuse de la sécurité du patient ou d’autrui : dans ce cas, le patient doit être informé par le psychiatre de la rupture du secret professionnel. La participation des patients est nécessaire pour l’enseignement et la recherche : le consentement éclairé doit être obtenu avant toute démarche. Enfin, le psychiatre doit arrêter tout traitement, enseignement ou recherche qui ne respecte pas les principes de la Déclaration.
R. World Health Organization, Guidelines for the promotion of human right of persons with mental disorders, WHO/MNH/MND/95.4, Geneva, 1996.
Voir : Déclaration sur les droits des personnes avec retard mental — Ethique — Médecine sociale et préventive — Secret médical
José Manoel Bertolote
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Déclaration de Philadelphie
La “ Déclaration concernant les buts et objectifs de l’Organisation internationale du travail ”, adoptée le 10 mai 1944 à Philadelphie par la Conférence internationale du travail, est la première déclaration internationale des droits proclamée par une autorité internationale. Elle se place sous l’angle du nouveau concept de la sécurité sociale et assure la protection de l’OIT non plus aux seuls travailleurs, mais à tous ceux qui en ont besoin. Elle a été intégrée en 1946 à la constitution de l’OIT.
R. N. Valticos, Droit international du travail, 2e éd., Dalloz, Paris, 1983.
Voir : Conférence internationale du travail — Organisation internationale du travail (OIT) — Sécurité sociale
Alexandre Berenstein
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Déclaration sur les droits des personnes avec désavantages
Déclaration en 13 points proclamée par la Résolution 3447 (XXX) du 9 décembre 1975 de l’Assemblée Générale de l’Organisation Mondiale de la Santé. La déclaration appelle à une action de niveau national et international pour assurer qu’elle soit utilisée comme un document de référence pour la protection de droits des personnes avec désavantages. Elle définit ce qu’est une personne avec un désavantage et affirme le droit de ces personnes de jouir de tous les droits proclamés par la Déclaration. Le respect est dû à ces personnes en fonction de leur condition humaine ; leurs droits civils et politiques doivent être assurés. Elles doivent pouvoir bénéficier de toutes les mesures susceptibles de les rendre le plus indépendantes possible. Plus particulièrement, est affirmé le droit de ces personnes à avoir accès à un traitement médical, psychologique et fonctionnel, à une réadaptation médicale et sociale, à une réorientation professionnelle ainsi qu’à tout autre type de service capable de contribuer au développement maximal de leurs capacités et ressources, renforçant ainsi le processus de leur intégration ou réintégration sociale. Le droit à une sécurité économique et sociale ainsi qu’à un niveau de vie décent est affirmé. Est également reconnu le droit de ces personnes de vivre avec leur famille et de participer à toutes les activités sociales, créatives et de loisir. Les personnes souffrant d’un désavantage doivent être protégées contre toute forme d’exploitation, discrimination, abus ou dégradation. Ces personnes doivent pouvoir avoir l’accès à une aide légale qualifiée pour assurer leur protection personnelle et celle de leurs biens. L’organisation en associations de personnes avec des désavantages est encouragée. Elles doivent être complètement informées, ainsi que leurs familles et les communautés, par tous les moyens appropriés, des droits mentionnés par la Déclaration.
R. World Health Organization, Guidelines for the promotion of human right of persons with mental disorders, WHO/MNH/MND/95.4, Geneva, 1996.
Voir : Handicap — Organisation mondiale de la santé (OMS)
Carlos Augusto de Mendonça Lima
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Déclaration sur les droits des personnes avec retard mental
Déclaration en 7 points proclamée par la Résolution 2856 (XXVI) du 20 décembre 1971 de l’Assemblée Générale de l’Organisation Mondiale de la Santé. La déclaration appelle à une action à niveau national et international pour assurer qu’elle soit utilisée comme un document de référence pour la protection de droits des personnes avec un retard mental. La déclaration reconnaît que les personnes avec un retard mental ont les mêmes droits que tous les autres personnes. Ces personnes ont droit à des soins médicaux adéquats, une éducation, une formation, une réadaptation et un accompagnement pour développer au maximum leurs capacités et leurs ressources. Elles ont droit à une sécurité économique et à un niveau de vie décent. Les personnes affectées par un retard mental ont le droit d’exercer une activité de travail productive ou de s’engager dans toute activité selon leurs capacités. Dans la mesure du possible elles doivent pouvoir vivre au sein de leur famille et participer à différentes formes de vie communautaire. Les proches doivent être soutenus. Si des soins au sein d’une institution sont nécessaires, ils devraient être dispensées dans des conditions les plus proches de la vie normale. Ces personnes doivent pouvoir bénéficier d’un représentant pour assurer leur bien être et leurs intérêts. Les personnes souffrant d’un retard mental doivent être protégées contre toute forme d’exploitation, discrimination, abus ou traitement dégradant. En cas de poursuite judiciaire, toute personne avec un retard mental a droit à une reconnaissance de son degré de responsabilité mentale. Si une personne avec un retard mental est incapable d’exercer tous ses droits à cause de la sévérité de son désavantage ou qu’il devienne nécessaire de limiter ou refuser certains de ces droits, la procédure adoptée pour cela doit contenir des garanties légales contre toute forme d’abus. Cette procédure doit être basée sur une évaluation des capacités sociales de la personne avec un retard mental, faite par des experts qualifiés. Les décisions prises doivent être régulièrement révisées, et il doit être possible à l’intéressé de faire recours auprès d’instances supérieures.
R. World Health Organization, Guidelines for the promotion of human right of persons with mental disorders, WHO/MNH/MND/95.4, Geneva, 1996.
Voir : Déclaration de Caracas — Déclaration de Hawaii II — Organisation mondiale de la santé (OMS)
Michel Gaillard
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Déclaration universelle des droits de l’homme
La Charte des Nations Unies, adoptée en 1945 à San Francisco, a institué une Commission des droits de l’homme, dont la première tâche a été d’élaborer une déclaration universelle des droits de l’homme. Son projet a été soumis à l’Assemblée générale, qui a adopté le texte de la déclaration le 10 décembre 1948.
La Déclaration n’est pas un traité international, mais elle a été reconnue, à diverses reprises, comme ayant une valeur obligatoire.
Elle comporte des dispositions de caractères différents : les articles 1 à 21 proclament les droits civils et politiques, concrétisés par la suite par le Pacte relatif à ces droits ; les articles 22 à 27 proclament les droits économiques, sociaux et culturels, concrétisés par la suite par le Pacte relatif à ces derniers droits ; enfin, les articles 28 à 30 sont les articles finals.
R. K. Vasa, Les dimensions internationales des droits de l’homme, Paris, 1980.
Site Internet : www.un.org/french/aboutun/dudh.htm
Voir : Droit social — Droits de l’homme (Convention européenne des) — Droits de l’homme (Cour européenne des) — Nations Unies (Instruments des)
Alexandre Berenstein
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Déficiences
D’après l’Organisation Mondiale de la Santé, les déficiences désignent des problèmes dans les fonctions organiques ou des structures anatomiques, comme un écart ou une perte importante. C’est ainsi qu’une déficience peut être une anomalie, carence, perte ou autre écart important par rapport à une norme. Les déficiences ne sont pas équivalentes à la maladie de base, mais elles sont plutôt les manifestations de la maladie. Elles représentent des écarts par rapport à certaines normes généralement acceptées de l’état biomédicale du corps et de ses fonctions. La définition de leurs composantes repose principalement sur l’évaluation faite par des personnes qualifiées. Les déficiences peuvent avoir différentes évolutions : être temporaires ou permanentes ; progresser, régresser ou rester stables ; être intermittentes ou continues. L’amplitude de l’écart par rapport à la norme peut être grand ou petit, et être variable dans le temps. Les déficiences sont indépendantes de l’étiologie et de la façon dont elles sont apparues. Toute déficience a nécessairement une cause, mais la cause en elle-même ne suffit pas forcément à l’expliquer. Lorsqu’une déficience se manifeste, il y a naturellement un dysfonctionnement des fonctions organiques, mais il peut être lié à diverses maladies, troubles ou états physiologiques. Elle peut faire partie intégrante d’un état de santé donné, mais elle ne signifie pas nécessairement qu’il y ait présence d’une maladie ou que l’individu doive être considéré comme malade. Les déficiences couvrent un champ plus vaste que les troubles ou les maladies (la perte d’un membre est une déficience de la structure anatomique mais ce n’est pas pour autant un trouble ou une maladie). Une déficience peut en entraîner d’autres : la perte de la force musculaire peut limiter la mobilité, les altérations de la perception peuvent découler des troubles cognitifs.
R. World Health Organization, International Classification of Impairments, Activities, and Participation, WHO/MSA/MNH/EAC/97.2, Geneva, 1997.
Carlos Augusto de Mendonça Lima
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Délais cadre àð Chômage
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Délinquance
La délinquance appartient à l ensemble des déviances. Toutes deux sont définies par rapport à des normes sociales, la délinquance comprenant spécifiquement les infractions à des normes juridiques, à dominante pénale.
Quantitativement, la délinquance – ou criminalité – est l’ensemble des délits et des crimes commis dans une société donnée. Il faut alors au moins distinguer, parce que les contours en sont différents :
— l’ensemble des infractions commises ou délinquance réelle,
— l’ensemble des infractions non enregistrées ou délinquance cachée,
— l’ensemble des infractions connues ou délinquance apparente,
— l’ensemble des infractions condamnées ou délinquance sanctionnée.
Outre les statistiques officielles, les sources de connaissance de la délinquance sont les sondages (notamment de délinquance auto-révélée et de victimisation). Il a ainsi été estimé qu’un tiers à 50 % seulement de la délinquance “réelle” serait connue de la police et 5 à 25 % sanctionnée par les tribunaux. Ces proportions peuvent varier fortement selon les types d’infractions (homicides, agressions sexuelles, trafic de stupéfiants, etc.).
Qualitativement, la délinquance peut être comprise (perspective interactionniste) comme un ensemble de confrontations sociales complexes mettant aux prises : des acteurs qui édictent des normes juridiques (instances de définition et groupes de pression), des acteurs qui les transgressent (enregistrés comme délinquants) et des acteurs qui les poursuivent et réagissent à ces transgressions de façon informelle (victimes, témoins, voisinage) et formelle (système pénal). Dans ce processus, les médias, les préjugés et les stéréotypes, les craintes et les sentiments d’insécurité, jouent un rôle important (représentations et amplification de la délinquance).
Enfin, les typologies de la délinquance sont variées, notamment :
— dans une perspective évolutive : délinquance occasionnelle, de transition, de carrière ;
— selon les cibles visées : délinquance de profit, acquisitive (vols) et économique (délits d’affaires ou des “cols blancs”) ; délinquance d’intimidation et de violence contre les personnes ; délinquance “hédoniste” (jeux, drogues, sexe) ;
— selon son degré d’organisation : délinquance organisée, par opposition à non professionnelle, non systématique, etc.
R. S. Bauhofer, N. Queloz, E. Wyss (Éds), Wirtschaftskriminalität, Criminalité économique, Rüegger, Zurich, 1999. —J.M. Bessette (Éd.), Crimes et cultures, L’Harmattan, Paris, 1999. — M. Cusson, Criminologie actuelle, PUF, Paris, 1998. — C. Debuyst, F. Digneffe, A. Pires, Histoire des savoirs sur le crime et la peine, De Boeck, Bruxelles, Vol. 1, 1995, Vol. 2, 1998. — M. Killias, Précis de criminologie, Stämpfli, Berne, 1991. — J. Proux, M. Cusson, M. Ouimet (Éds), Les violences criminelles, Presses de l’Université Laval, Ste-Foy, 1999.
Voir : Contrôle social — Délinquance juvénile — Déviance — Étiquetage (Théorie de l’) — Exclusion — (Office fédéral de la justice) — Office fédéral de la police (OFP) — Prison (Privation de liberté) — Travail social — Victimes d’infractions (Loi fédérale sur l’aide aux) — Violence
Nicolas Queloz
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Délinquance juvénile
Délinquance commise par des enfants (en Suisse : dès l’âge de 7 ans révolus et jusqu’à 14 ans) et des adolescents (15 ans révolus à moins de 18 ans révolus, seuil de la majorité pénale). Les délits commis par les mineurs sont traités par une juridiction spécialisée, la justice des mineurs.
Outre une grande part d’actes d’insouciance (sans mobile ni explication spécifiques), les comportements délictueux commis par des jeunes sont de trois types :
— initiatiques : formes généralement transitoires de délinquance liées à l'immaturité et à la dépendance des jeunes qui sont destinées à tester les limites de la légalité, de l’autorité et du monde adulte,
— pathologiques : formes de délinquances associées à des troubles précoces de la personnalité,
— d'exclusion : formes de délinquance apparues avec l’échec scolaire, le chômage de longue durée et la constitution de quartiers de relégation, ce sont des réactions à la précarité chronique.
Les condamnations de jeunes en Suisse concernent principalement des infractions aux règles de la circulation routière, des infractions contre le patrimoine et des délits liés aux drogues. Les condamnations pour actes de violence, bien qu'en augmentation, sont beaucoup moins fréquentes.
R. H. Lagrange, “ La délinquance des mineurs et les violences ”, in : Regards sur l'actualité, No 243, 1998. — M. LeBlanc, Intervenir autrement : un modèle différentiel pour les adolescents en difficulté, PUM, Montréal, 1998. — L. Mucchielli, “ Quand la jeunesse fait peur ”, in : Sciences Humaines, No 116, 2001. — N. Queloz, “ L’édifice de la nouvelle justice pénale pour les mineurs construit par les Nations Unies : ses implications, pour la Suisse en particulier ”, in : P. Jaffé (Ed.), Challenging Mentalities, Déifer les mentalités, Gent, Children’s Rights Centre, 1998, pp. 293-307. — D. Salas, La délinquance des mineurs, La Documentation Française, Problèmes politiques et sociaux No 812, Paris, 1998.
Voir : Délinquance — Exclusion — Jeunes socialement vulnérabelesés — Jeunesse —Mineurs (Droit pénal des) — Violence
Dominique Gros et Nicolas Queloz
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Démantèlement social
On parle de démantèlement social pour évoquer des stratégies politiques globales visant à réduire significativement le champ d’action et les ressources de l’État social. De telles démarches ont été entreprises dans divers pays tels que le Royaume-Uni et les États-Unis. De manière plus rampante et plus discrète, des tendances analogues ont vu le jour dans certains pays dont la Suisse.
Voir : Ciblée (Politique) — Insécurité sociale — Néo-libéralisme — Précarisation (Mécanismes de la)
jpf
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Démocratie (et politique sociale)
Les institutions de démocratie directe telles qu’elles sont organisées en Suisse expliquent pour une bonne part les caractéristiques de la politique sociale qui y est pratiquée. Nous pensons à l’initiative populaire fédérale et au référendum. La première est la faculté accordée à 100 000 citoyens de demander une modification de la Constitution fédérale. En rédigeant une proposition précise, les signataires contraignent les autorités à faire voter le peuple et les cantons.
Le référendum législatif permet à 50 000 citoyens de demander qu’une loi fédérale (ou un arrêté fédéral de portée générale) votée par le parlement soit soumis au vote du peuple. L’initiative n’a guère d’effet direct ; aucune initiative concernant la sécurité sociale n’a été acceptée par le peuple et les cantons. En revanche, elle permet de faire pression, d’orienter le législateur, de susciter des mesures. Le référendum fonctionne d’une manière plus complexe. Il permet bien sûr de refuser des lois votées par le Parlement. En outre, la seule menace de lancement d’un référendum constitue une forte pression sur les autorités chargées de préparer les projets. Elle pousse à l’adoption de compromis très substantiels quand elle ne légitime pas des temporisations qui peuvent être très longues.
L’existence du référendum rend difficile la mise sur pied d’un système global d’assurances sociales (la même remarque vaut d’ailleurs pour les autres domaines du droit). En effet, sur une question de principe, simple, les opposants votent généralement “ non ” pour la même raison. Dès qu’il s’agit d’un système plus complexe, impliquant un nombre de choix plus grand, les raisons de voter “ non ” augmentent. Il se crée alors ces fameux “ cartels de non ” composés de groupes disparates, refusant la loi pour des raisons différentes, mais dont le cumul constitue une majorité. Ajoutons à cela, souvent, l’alliance de fait d’une droite conservatrice qui trouve que l’État va trop loin et d’une extrême-gauche qui l’estime trop timide (ce qui s’est passé en 1900 pour la loi sur l’assurance-maladie et accidents et, en 1931, pour l’assurance-vieillesse et survivants), et l’on mesurera mieux la quasi-impossibilité de la réalisation d’un système plus cohérent de sécurité sociale.
R. P. Bois, “ Spécificités de la politique sociale en Suisse ”, in : P. de Laubier et J.-P. Fragnière, Droit et politique sociale, Delta, Vevey, 1980.
Voir : Assurance-maladie et l’assurance-accidents (Article constitutionnel sur l’) — Initiative constitutionnelle — Participation — Référendum — Sécurité sociale
jpf
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Démographie
La démographie, ou science de la population, peut se définir selon deux approches complémentaires. Au sens strict, elle procède à une analyse quantitative des populations humaines. Comptabilité d’hommes, elle enregistre leur nombre et ses variations, mesure les phénomènes démographiques vécus (fécondité, vie de couple, cycle de vie, migration, reproduction, mortalité…), développe les méthodes, concepts et modèles adéquats.
Au sens large, la démographie, à l’instar de toute science, ne se contente pas de mesurer les phénomènes. Elle tente de les comprendre, de les expliquer, d’en déterminer les causes et d’en évaluer les conséquences. Dans cette perspective, la dimension démographique traverse de nombreux champs de la vie économique et sociale : l’emploi, la santé, les systèmes de retraite, la politique familiale, les relations intergénérationnelles, les migrations, les rapports Nord-Sud.
Science-carrefour par excellence, la démographie débouche alors sur l’interdisciplinarité. Tout en s’appuyant sur un socle solide de connaissances de base, elle offre des pistes de réflexion, d’échange et d’action utiles à la compréhension de nos sociétés et de leur évolution, notamment par les développements récents de la démographie sociale, de la démographie économique et de la démographie historique.
R. A. Sauvy, Eléments de démographie, PUF, Paris, 1981. — R. Pressat, L’analyse démographique, PUF, Paris, 1983. — G. Tapinos, La démographie, Éd. de Fallois, Paris, 1996.
Voir : Cycle de vie — Démographie (Laboratoire de) — Espérance de vie — Jeunesse — Population — Pyramide des âges — Vieillissement de la population
Hermann-Michel Hagmann
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Démographie (Laboratoire de)
Le Laboratoire de démographie économique et sociale est une unité interdisciplinaire d’enseignement et de recherche créé en 1990 par l’Université de Genève (Faculté SES) dans le but d’organiser des cycles de formation continue (par exemple Population, famille et société, migrations, cycles de vie et relations intergénérationnelles), de développer des recherches (Famille et fécondité, Échanges dans le réseau de parenté, Politiques de population…), d’offrir un Espace-ressources (services à la cité) et un Centre suisse de référence “ Population et développement ”.
Site Internet ; www.unige.ch/ses/demog
Voir : Démographie — Population
Hermann-Michel Hagmann
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Déontologie
Étymologiquement, le terme désigne tout discours se référant au devoir. En français, il peut être utilisé dans deux contextes différents. On parle généralement de déontologie dans le contexte de la morale professionnelle, en désignant ainsi les devoirs spécifiques, et même codifiés, d’une profession précise (par ex. : déontologie médicale). En deuxième acception, on introduit le terme comme caractéristique d’une théorie éthique qui souligne le caractère absolu des normes morales (p. ex. : déontologisme kantien).
L’ensemble des catalogues des devoirs professionnels est fort intéressant pour le chercheur en sciences sociales. Ils l’informent en effet sur les attentes sociales émanant d’une profession ainsi que sur l’image qu’une profession se fait d’elle-même.
Pour l’éthique, au contraire, de tels catalogues ne peuvent pas prétendre avoir directement une force normative en soi, si leurs normes n’ont pas fait l’objet de réflexions de principe. Pour cette raison, les différents codes déontologiques professionnels ne peuvent pas avoir automatiquement force de loi.
R. Éthique, déontologie et droits de l’homme, La Documentation française, Paris, 1996.
Voir : Acharnement thérapeutique — (Bioéthique) — (Biotechnologie) — Clonage — Éthique sociale
Alberto Bondolfi
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Dépendance
Il existe différents comportements de consommation de substances psychoactives : l’usage, l’abus, la dépendance. Ces trois catégories définissent chacune des manières de consommer distinctes, comportant des conséquences socio-sanitaires différenciées.
Dans le langage courant dépendance signifie l’assujettissement à un produit ou à un comportement dont on ne peut plus se passer. La définition médicale s’efforce à plus d’objectivité en particulier en développant un certain nombre d’outils de diagnostic et en proposant des critères qui permettent à la fois de mettre en évidence le diagnostic de dépendance : DSMIV, ICD-10, et aussi d’envisager sa sévérité : ASI (Addiction Severity Index).
La dépendance c’est donc l’impossibilité de s’abstenir de consommer une substance. Elle se manifeste entre autres par l’existence d’une tolérance : il faut pour obtenir l’effet attendu d’un produit en augmenter les doses et la survenue d’un syndrome de sevrage, qui signifie que l’arrêt de la consommation induit chez le dépendant un état particulier : le manque. Cet état pousse l’usager à vouloir y échapper par la reprise de la substance. Le manque se manifeste au travers d’un certain nombre de signes qui sont à la fois d’ordre physique et psychologique.
Pendant longtemps, le concept de dépendance était limité à la consommation compulsive de substances psychoactives (alcool, médicaments, drogues illégales, tabac). Actuellement cette notion couvre un champ beaucoup plus vaste et prend en compte les addictions comportementales. On peut donc avoir développé une dépendance par rapport à une pratique : le jeu pathologique, les achats compulsifs, la sexualité, etc.
R. American Psychiatric Association, Diagnostic and Satistical Manuel of Mental Disorders DSM-IV — World Health Organization Geneva, the ICD-10 Classification of Mental and Behavioural Disorders. — L. O’Brien, Asi addiction severity index, Mc Lellan. at, c. p et al, 1980.
Voir : Addiction — Alcoolisme — Prévention secondaire — Prévention tertiaire  Toxicomanies
Viviane Prats
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Dépenses de santé àð Coûts de la santé
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Déréglementation
Sous l impulsion des économistes néo-libéraux et, en particulier, de ceux de l école du Public Choice, plusieurs gouvernements ont réduit les réglementations auxquelles les entreprises sont soumises sur le marché (surtout depuis la fin des années 70). Ils justifient ces mesures par la nécessité d’en revenir à une véritable concurrence. Elle est censée mettre un terme à la complexité de la régulation administrative. En fait, en l’absence de contrôle des règles du jeu, elle a souvent favorisé la fraude, encouragé la corruption et propagé l’instabilité. Ce courant se développe en Suisse et s’en prend de plus en plus ouvertement au secteur social.
Voir : Ciblée (Politique) — Démantèlement social — Emploi (Politique de l') — Postfordisme — Société postindustrielle
jpf
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Désaffiliation
Dans le cadre des débats sur la pauvreté et l’exclusion, cette notion est proposée par le sociologue Robert Castel pour désigner le “ mode particulier de dissociation du lien social ”, la “ rupture du lien sociétal ” qu’ont en commun les exclus, les pauvres. “ Au bout du processus, la précarité économique est devenue dénuement, la fragilité relationnelle isolement. […] En schématisant : être dans la zone d’intégration signifie que l’on dispose des garanties d’un travail permanent et que l’on peut mobiliser des supports relationnels solides ; la zone de vulnérabilité associe précarité du travail et fragilité relationnelle ; la zone de désaffiliation conjugue absence de travail et isolement social. ”
R. R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Fayard, Paris, 1995. — M.-H. Soulet (Dir.), De la non-intégration : essais de définitions théoriques d’un problème social contemporain, Éditions universitaires, Fribourg, 1994.
Voir : Cohésion sociale — Disqualification sociale — Exclusion — Isolement — Pauvreté — Socialisation
jpf
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Désendettement
On peut estimer à 30 % la population touchée par l’endettement. Face à ce problème de société, les moyens de lutte sont peu importants, mais ils existent. La démarche de désendettement nécessite de la conviction et de la persévérance et un minimum d’argent. Cinq moyens sont à disposition :
1. Échelonnement des paiements (remboursement des dettes par acompte).
2. Gestion des dettes : appuis à la gestion d’un budget réduit au minimum vital de l’office des poursuites.
3. Rachat des dettes (concordat extra-judiciaire) : les anciennes dettes peuvent être rachetées au créancier à 30 % de leur valeur initiale.
4. Procédure de règlement à l’amiable : art. 333 à 336 LP. Même procédure que le rachat des dettes mais avec l’aide d’un commissaire nommé par le Président du tribunal de première instance.
5. Une “ faillite privée ” peut être prononcée après une déclaration d’insolvabilité (art. 191 LP.) communiquée par l’envoi d’une lettre au Président du tribunal de première instance.
R. P. Aubort, Les bénéfices de la dette, IDHEAP, Chavannes, 1992. — J.-P. Tabin, Misère à crédit, La Passerelle, Lausanne, 1992.
Voir : Dettes — Pauvreté — Surendettement
Pierre Aubort
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Détection avancée (en politique de la recherche)
La détection avancée en politique de la recherche consiste à observer les développements intervenant dans la science, l’économie et la société en général. Elle porte non seulement sur les courants principaux généralement admis, mais aussi sur des mouvements marginaux porteurs d’avenir. L’objectif est de discerner les avantages et les risques de certains développements autant que possible dès le moment où ils s’opèrent, afin de pouvoir décider les mesures de politique scientifique correspondantes destinées à stimuler ou à limiter l’accomplissement de ce développement.
La détection avancée procède de la conviction que la science est une condition indispensable à la construction de l’avenir. Elle constitue une phase indispensable aux interventions de politique scientifique des pouvoirs publics, des hautes écoles et des institutions concernées par les problèmes de recherche. Elle contribue essentiellement au maintien et à l’élargissement du champ d’action de la politique de la recherche. La détection avancée doit en outre contribuer à raccourcir l’intervalle entre la perception des problèmes et une intervention appropriée sous forme de mesures de politique de la recherche.
La détection avancée s’effectue selon une double approche.
L’approche par la voie des disciplines scientifiques consiste à analyser par discipline ou groupe de disciplines les tendances de l’évolution sur le plan de la théorie et de la méthodologie. Les nouveaux besoins de recherche sont mis en évidence, ainsi que les potentialités de transfert entre recherche et pratique.
L’approche par la voie des problèmes exogènes à la science est par définition pluri- et interdisciplinaire. Elle tend à identifier les possibilités et les risques probables dans les domaines de la technique, de la culture, de la politique, de l’économie, etc. Elle établit la manière selon laquelle la recherche peut contribuer à exploiter les ressources potentielles ou à réduire les problèmes.
Dans les deux cas, l’horizon de la réflexion et de l’analyse se situe à une quinzaine d’années.
L’élaboration des informations concernant la détection avancée s’effectue selon des règles précises. L’accent est placé sur le nouveau et le non-conventionnel. Une grande attention est apportée au pluralisme des méthodes et des valeurs. Les sources d’informations sont multiples, classiques et non conventionnelles. Comme toute autre démarche prospective, elle ne prétend pas éviter de porter des jugements de valeur.
En politique sociale, certaines mesures produisent des effets immédiats. Très souvent, ceux-ci ne se manifestent que dans le long terme. Les omissions d’aujourd’hui peuvent avoir de lourds effets demain. Dans ces conditions, l’étude de la politique sociale doit pouvoir s’appuyer sur un effort résolu de détection avancée des problèmes sociaux.
R. K. Weber, Trendberichterstattung Sozialpolitik, Schweizerischer Wissenschaftsrat, Bern, 1985.
Voir : Centre d’étude de la politique sociale (CEPS) — Recherche sociale
jpf
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Détenu àð Prison (Privation de liberté)
Dette alimentaire àð Assistance de la parenté (Devoir d')
Dettes àð Surendettement
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Deuxième génération
La notion de   deuxième génération  apparaît pour la première fois dans la littérature sociologique américaine aux alentours des années quarante. Elle désigne les enfants, nés aux États-Unis, de parents immigrés étrangers. Ces enfants bénéficient d’emblée de la nationalité américaine du fait de la législation sur la transmission de la nationalité qui privilégie le droit du sol. Actuellement, malgré la polysémie du terme, les politiques d'immigration réservent en général son usage à la désignation des enfants de travailleurs migrants qui sont nés ou ont grandi dans le pays de résidence et résident sur son sol.
Dans certains États dont le droit de la nationalité se fonde sur le jus sanguinis, ne sont inclus dans la catégorie des “ deuxième génération ” que les jeunes descendants d’immigrés demeurés étrangers. C’est le cas de la Suisse, où l'on parlera d’emblée de “ deuxième génération d’étrangers ”. Le terme fait son apparition dans le débat politique en 1980, avec un rapport rédigé par la Commission fédérale consultative pour le problème des étrangers (CFE) : “ Par deuxième génération d'étrangers, il faut entendre les enfants nés en Suisse de parents étrangers ayant immigré, de même que les enfants entrés en Suisse dans le cadre du regroupement familial, dans la mesure où ils ont accompli dans notre pays la plus grande partie de leur scolarit頔. La notion apparaîtra plus tard dans le discours officiel lorsque, en 1983, une loi visant à alléger la procédure de naturalisation pour les jeunes de la deuxième génération est soumise au référendum populaire; dans le texte explicatif qui accompagne la présentation du projet de loi aux Chambres, il est fait référence à la définition proposée par la CFE afin de délimiter le champ d'application de la loi. La question de la naturalisation facilité pour cette catégorie demeure pourtant toujours en suspens.
R. C. Bolzman, R. Fibbi, M. Vial, Adultes issus de la migration. Le processus d'insertion d'une génération à l'autre, Seismo, Zurich, 2002. — P. Béday, C. Bolzman, On est né quelque part mais on peut vivre ailleurs. Familles, migrations, cultures, travail social, Les Éditions IES, Genève, 1997.
Voir : Immigration — Intégration — Multiculturalisme — Interculturalité — Naturalisation
Claudio Bolzman
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Développement durable
Aspect du développement économique et social qui tend à prendre une place majeure dans le débat public. La Commission mondiale sur l’environnement et le développement le présente comme “ celui qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins ”. Depuis la conférence de Rio en 1992, il fait partie du credo de la Banque mondiale et de la CNUCED. Il apparaît dans le traité de Maastricht. Mais il semble que la distance soit encore grande entre le discours et la pratique. Au début du IIIe millénaire, le développement est ainsi devenu un enjeu éthique. Le Nord saura-t-il modifier son mode de vie, ses financements et ses technologies pour aider le Sud à sortir d’un sous-développement durable et à créer une Terre qui préserve la vie de ses enfants ?
Voir : Banque mondiale (BIRD) — Fonds monétaire international (FMI) — Organisation des nations unies (ONU)
jpf
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Développement équilibré hommes-femmes
En matière de coopération au développement, l'égalité entre les femmes et les hommes est un objectif stratégique du développement durable centré sur la personne dans le respect des principes de gouvernance démocratique. Elle est une des condition de l'amélioration de l'efficacité de l'aide au développement.
Le développement équilibré hommes-femmes reconnaît que les hommes et les femmes assument ensemble la responsabilité de fixer des objectifs du changement social devant conduire au développement. Il implique que les visions, les intérêts et les demandes tant des hommes que des femmes soient pris en compte. Il nécessite une amélioration de la position sociale des femmes par le biais de leur participation active à tous les niveaux de décision, et un accès plus équitable des hommes et des femmes aux ressources disponibles et aux bénéfices du développement. Il suppose une répartition plus équitable du pouvoir.
A des degrés divers tous les programmes de coopération des pays membres de l'OCDE s'efforcent de promouvoir une telle approche. Le succès de stratégies basées sur ces orientations découle avant tout de la motivation propre des partenaires (ONG, société civile, individus) dans les pays concernés et de leur engagement.
Voir : Direction du développement et de la coopération — Femmes (Émancipation des) — Genre (Rapports sociaux de) — OCDE
Jacques Martin
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Déviance
La déviance est un comportement qui implique la transgression de normes sociales ainsi que des sanctions. Ce comportement ne peut être défini par des propriétés qui lui seraient intrinsèques, mais bien à partir de la réaction sociale qui lui est associée. “ De ce point de vue, l’anormalité d’une conduite est le produit des institutions qui ont reçu mandat de la traiter, pas une attitude blâmable qui serait l’effet de causes sociales répertoriées et mesurables ” (A. Ogien, p. 69). La déviance implique donc la dialectique entre l’individuel et le collectif, entre la normalité et l’exceptionnel. Le respect de la norme et la sanction sont de nature transactionnelle et toute discussion sur la déviance implique nécessairement un débat à propos des conditions constitutives de l’ordre social. En effet, la réaction sociale au comportement déviant met en lumière les valeurs et les contraintes qui sont à la base de l’adaptation conforme. L’étude de la déviance s’interroge donc nécessairement sur le sens que les instances sanctionnantes donnent aux critères qui définissent le comportement conforme. Cela comporte également un questionnement sur les rapports entre autorité (légitimité) et pouvoir (légalité) dans la société. Ce questionnement permet entre autres de comprendre pourquoi il n’y a pas de définition exhaustive de la déviance. L’étude de la déviance est donc aussi celle des différentes logiques sociales sur lesquelles repose le lien social.
La déviance est un phénomène universel. Ce qui change d’une époque à l’autre, d’une société à l’autre ce sont : a) les comportements qualifiés déviants, b) les catégories de personnes considérées comme déviantes, c) les instances ayant la compétence de sanctionner les actes déviants, d) les types de réactions à la déviance, e) les justifications des sanctions appliquées à l’acte déviant et f) les conséquences de ces réactions pour l’acteur déviant et la société (Ch. S. Suchar). On comprend alors que la définition sociale de la déviance comporte un nombre très élevé d’actes considérés comme tels.
La sociologie de la déviance n’étudie pas seulement le comportement criminel et délinquant, mais aussi des phénomènes tels que le suicide, la consommation de drogue, l’alcoolisme, le divorce, la marginalité sociale, etc. Elle est ainsi étroitement associée à l’étude des problèmes sociaux et s’intéresse aux sous-cultures tout comme aux réponses que la société donne à la déviance. Deux paradigmes coexistent aujourd’hui dans l’étude de la déviance. Le premier comprend les théories étiologiques qui conçoivent la déviance comme un phénomène intrinsèquement réel. Dans ce cas, le sociologue s’occupe avant tout des causes qui expliquent le passage à l’acte déviant. Le deuxième paradigme est de nature interactionniste. Ici, la déviance est conçue comme le produit de l’étiquetage des comportements, comme le résultat d’une mise en ordre du monde. Mentionnons pour terminer les principales théories contemporaines de la déviance : 1. théorie de l’anomie, 2. théorie de l’association différentielle, 3. théorie de la sous-culture déviante, 4. théorie de l’étiquetage.
R. A. Ogien, Sociologie de la déviance, A. Colin, Paris, 1995. — M. Xiberras, Les théories de l’exclusion, Méridiens Klincksiek, Paris, 1994.
Voir : Contrôle social — Délinquance — Étiquetage (Théorie de l’) — Lien social — Stigmatisation
Riccardo Lucchini
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Devoir àð Déontologie
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Diaconie
Le mot diaconie, transcription du grec diakonia (service) désigne  surtout en protestantisme  l ensemble des Suvres caritatives entreprises dans le rayonnement de l Évangile, y compris les interventions en faveur d une réforme des structures sociales génératrices d’injustice.
Le temps est révolu en Occident où la quasi-totalité de l’action sociale était assumée par l’Église (écoles, hôpitaux, assistance, etc.). L’État et des institutions sans connotation religieuse ont pris le relais dans la plupart des cas et, généralement, les Églises ne leur contestent pas la fin de leur monopole. Reste toutefois l’exigence spirituelle qui motive les croyants pour le service, reste aussi le mode propre de la présence chrétienne auprès des faibles et des démunis. Le cas échéant, cette présence se manifestera dans tel secteur échappant au réseau de l’aide sociale générale (p. ex. la relation d’aide) ; la plupart du temps cependant, c’est par l’offre loyale d’une collaboration à l’œuvre commune que la mission diaconale de l’Église se poursuivra. Variable selon les lieux et le statut de l’Église dans la société, cette participation à l’effort de tous aura pour caractéristique l’engagement communautaire des chrétiens.
La responsabilité institutionnelle des Églises s’exerce à divers niveaux : la diaconie paroissiale veille à l’entraide fraternelle tant individuelle que catégorielle (p. ex. les paroissiens âgés) ; elle fournit souvent un appui apprécié pour les démarches de type social. La diaconie d’institution garde encore sa raison d’être dans certains établissements relevant directement de l’Église : cliniques, homes pour vieillards, établissements médico-pédagogiques, formations aux carrières sociales. La coordination de l’effort diaconal sur le plan régional est assurée, notamment en Suisse romande, par les Centres sociaux protestants dotés d’un personnel spécialisé et largement ouverts à la population. Enfin, certaines aumôneries spécialisées ont une dimension diaconale spécifique (visites aux malades, accompagnement des personnes en fin de vie).
Ministres consacrés par l’Église, les diacres (hommes et femmes) sont voués à l’animation du service des chrétiens. Pour leurs parts, les diaconesses groupées en communautés sont également engagées dans la diaconie de l’Église parmi ses membres et dans la société.
R. C. Bridel, L’Église justifiée par ses œuvres. Une diaconie pour notre temps, Fontaines (Ne), 1989. — P. Pilly e. a., De geste et de parole : 20 ans de ministère diaconal dans les Églises réformées de Suisse romande, Labor et Fides, Genève, 1987. — D. Pache, Trente ans au service des uns et des autres. CSP vaudois, La Passerelle, Lausanne, 1991.
Voir : Caritas Suisse — Centres sociaux protestants (CSP) — Charité — Entraide
Claude Bridel
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Direction du développement et de la coopération (DDC)
La Direction du développement et de la coopération (DDC) fait partie du Département fédéral des affaires étrangères. Il s'agit de l'une des deux agences gouvernementales suisses dont la mission est définie par la Loi fédérale sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationales du 19 mars 1976 et l'Arrêté fédéral du 24 mars 1995 sur la coopération avec les États d'Europe de l'Est. L'autre est le Seco (Secrétariat d'État à l'économie du Département fédéral de l'économie). La coopération internationale et l'aide humanitaire de la Confédération sont des instruments de la politique extérieure de la Suisse. Par souci d'efficacité et pour assurer le meilleur rayonnement possible, la DDC concentre son travail de développement à long terme sur un nombre limité de pays et de secteurs d'activités. L'aide humanitaire et l'aide en cas de catastrophe sont en revanche mises en œuvre dans le monde entier, là où la situation l'exige.
Site Internet : 194.230.65.134/dezaweb2/home. asp
Voir : Développement durable — Développement équilibré hommes-femmes
Jacques Martin
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Directives anticipées
Les directives anticipées sont des dispositions écrites prises par une personne en prévision de futures décisions de soins, au cas où elle perdrait sa capacité de discernement. Elles permettent à la personne soit d’exprimer sa volonté sur les soins qu’elle aimerait recevoir ou non dans certaines hypothèses (exemple : refus de l’acharnement thérapeutique exprimé dans un testament de vie ou testament biologique, qui n’est qu’une forme particulière de directive anticipée), soit de désigner un tiers comme personne de confiance autorisée à prendre les décisions de soins.
La validité des directives anticipées est consacrée dans plusieurs législations sanitaires cantonales récentes, surtout en Suisse romande (notamment dans les cantons de NE, FR, GE, VD et VS). La solution sera probablement reprise au niveau fédéral dans la réforme en cours du droit de la tutelle.
R. O. Babaïantz, Les directives anticipées en matière de soins médicaux et la représentation thérapeutique privée, Cahier No 6 de l’Institut de droit de la santé, Neuchâtel, 1998. — O. Guillod, P. Meier, “ Représentation privée, mesures tutélaires et soins médicaux ”, in : Famille et droit, Mélanges Schnyder, Fribourg, 1995, pp. 325 ss.
Voir : Acharnement thérapeutique— Euthanasie — Information au patient — Tutelle (Droit de la)
Olivier Guillod
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Disqualification (dans l’action sociale)
Dans les pays industrialisés, le développement du secteur des services s’est accompagné d’une vaste production de savoirs scientifiques sur les diverses dimensions de la vie quotidienne et les problèmes qui peuvent y apparaître. Si nous prenons l’exemple du travail social, nous observons qu’il tend à se considérer comme un champ dans lequel le savoir sur la vie quotidienne est produit méthodiquement et systématiquement et puis diffusé et mis en œuvre dans des systèmes d’action déterminés. En élaborant ces savoirs et ce savoir-faire, le travail social prétend contribuer au renforcement de l’autonomie des usagers. Cependant, dans le cadre de sa socialisation, dans son milieu culturel, sa famille et son entourage, chaque individu acquiert des savoirs qui lui permettent de maîtriser la gestion de sa vie quotidienne ; ceux-ci sont, en outre, souvent transmis de génération en génération.
Or, de plus en plus, dans la réalité, ces deux formes de savoirs, les savoirs scientifiques et le sens commun, entrent en concurrence pour expliquer les situations de la vie concrète et les problèmes qui peuvent y apparaître. De fait, dans les sociétés industrielles du monde occidental, la connaissance scientifique a pu briguer et conquérir une suprématie par rapport à d’autres chemins de la connaissance ; elle légitime cette prétention, entre autres, par le fait qu’elle s’appuie sur des procédures méthodiques, systématiques et reproductibles, celles-ci étant indépendantes des circonstances de temps, de lieu et de personnes et, par conséquent, susceptibles de conduire à la production d’un savoir universel.
La croissante valorisation sociale de ce type de connaissances a eu pour conséquence un dépérissement des autres formes de connaissances. Cela signifie concrètement que l’individu, ou les petites unités sociales telles que la famille, sont peu à peu dépossédés du savoir nécessaire pour affronter la vie quotidienne. Que faire lorsqu’un membre de la famille est malade ? Que faire lorsque l’on est confronté à des difficultés financières ? Ces multiples savoirs distribués en professions dont la simple nomenclature échappe à la plupart des usagers peuvent engendrer une dépendance tout aussi inquiétante que coûteuse.
R. J.-P. Fragnière, M. Vuille, Assister, éduquer et soigner, Réalités sociales, Lausanne, 1982.
Voir : Centre d’étude de la politique sociale (CEPS) — Certificat de perfectionnement en politique sociale
jpf
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Disqualification sociale
Le concept de disqualification sociale, récemment venu sur la scène scientifique, connaît un engouement important lié à la résurgence de la question de l’exclusion. Il est en fort voisinage de notions comme celle de désinsertion sociale insistant davantage sur des phénomènes perçus et vécus individuellement, de celle de relégation sociale mettant l’accent sur la stigmatisation collective ainsi que de celle, plus ancienne, de déclassement social visant, elle, à rendre compte des effets de mécanismes sociaux globaux.
La disqualification sociale, dans une perspective d’analyse des modes de gestion de l’échec social, s’attache au discrédit porté sur ceux qui ne participent pas pleinement à la vie économique et sociale. Elle tend à qualifier un processus à l’articulation d’éléments objectifs et d’éléments subjectifs. Elle met au centre le statut occupé et sa position dans la hiérarchie sociale en même temps que les effets identitaires des logiques de désignation et d’étiquetage. À ce titre, elle porte également un intérêt au rôle du disqualifié qui n’est plus seulement posé comme agi, mais aussi comme acteur de la disqualification, que cette action prenne les formes de l’acceptation, de la dénégation ou de la transaction.
La disqualification tend ainsi à rendre compte tant de la dégradation morale que représente ce processus de changement organisé de statut que de la procédure sociale de désignation qui l’accompagne. Elle repose sur l’idée selon laquelle des faits sociaux, comme le fait assistanciel, peuvent être vécus comme une cérémonie de dégradation statutaire à l’occasion de laquelle est mise en vue une nouvelle appartenance à une catégorie sociale peu honorable ou tout au moins inférieure au rang social antérieurement occupé. Elle réintègre, ce faisant, une dimension symbolique (celle de la valeur de place occupée dans la hiérarchie sociale), à côté des dimensions économiques et sociales. La question de la valeur sociale des individus et celle de leur contribution à la collectivité en termes d’utilité sociale recoupe en ce sens intimement la dévalorisation de l’identité d’individus qui, ayant intégré celle-ci, en viennent simultanément à l’auto-dénigrement et au décrochage social.
R. P. Bourdieu, “ Classement, déclassement, reclassement ” in : Actes de la recherche en sciences sociales, No 24, novembre 1978. — V. De Gaulejac, I. Taboada Léonetti, La Lutte des places, Desclée de Brouwer, Paris, 1994. — H. Garfinkel, “ Conditions of Successfull Degradation Ceremonies ”, in : American Journal of Sociology, No 61, mars 1956. — E. Goffman, Stigmates, les usages sociaux des handicaps, Éditions de Minuit, Paris, 1975. — S. Paugam, La disqualification sociale, essai sur la nouvelle pauvreté, PUF, Paris, 1991.
Voir : Désaffiliation — Exclusion — Lien social — Pauvreté — Précarité — Stigmatisation
Marc-Henry Soulet
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Division du travail (Mécanismes de la)
Quels sont les mécanismes qui déterminent les processus de division du travail ?
Alors qu’il y a moins de vingt ans, on pouvait considérer que la plupart des travailleurs, dans nos sociétés notamment, entretenaient avec leur profession des rapports peu problématiques, voire tout à fait sereins, et que le fait d’avoir une profession était un gage d’honorabilité indiscuté, la situation est en voie de se modifier sensiblement.
En effet, les professions ne sont pas en mesure d’offrir à leurs membres des chances satisfaisantes et durables de participer à l’ensemble du processus de travail.
Il apparaît souvent que les contenus spécifiques de chaque profession, ainsi que les champs d’action que ces professions partagent avec d’autres professions voisines, ne correspondent plus aux exigences effectives de la pratique. C’est la perception diffuse ou explicite de ces réalités qui nous paraît fonder, actuellement, l’acuité des débats sur la professionnalisation.
R. J.-P. Fragnière, Maîtriser la division du travail dans les professions sociales et les professions de la santé, Réalités sociales, Lausanne, 1984. — U. Beck, M. Brater, H. Daheim, Soziologie der Arbeit und der Berufe, Reinbeck, 1980. — W. Tousijn, Sociologia delle professioni, Bologna, 1979.
Voir : Profession — Travail
jpf
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Divorce
Le divorce est la dissolution, sous forme judiciaire, du lien conjugal formé par le mariage. Il est réglé, en Suisse, par les articles 137 à 158 du CCS.
On distingue classiquement le divorce-sanction, basé sur la reconnaissance du manquement d’une des parties à certaines de ses obligations fondamentales, du divorce-faillite où l’on reconnaît simplement l’échec de l’union, sans pouvoir ou vouloir l’attribuer à la faute de l’un ou l’autre des conjoints. Cette deuxième conception semble prévaloir dans les situations où le couple et la famille ont prioritairement des finalités relationnelles plutôt que de survie économique.
Cette distinction n’est pas strictement équivalente à celle qui oppose le divorce automatique (la simple cessation de la vie commune suffit à faire entériner le divorce) au divorce par consentement mutuel (l’accord des deux acteurs sur la nécessaire rupture de leur union suffit à produire le divorce) ou au divorce par décision du juge (qui décrète, lui, s’il y a vraiment motif de divorce). La Suisse par exemple ne reconnaît pas (encore) le divorce par consentement mutuel alors même que le juge se prononce le plus souvent sur la base de causes indéterminées du genre divorce-faillite.
Le nombre des divorces en Suisse s’élève actuellement (1995) à environ 15 000 par an, dont la moitié environ impliquent des enfants mineurs. La proportion de divorces pour 100 mariages conclus a fortement augmenté depuis les années 65. En effet, l’indice conjoncturel de divortialité (proportion de mariages qui se dissoudront par divorce si les tendances du moment perdurent) passe de 11 % environ à la fin de la guerre à 38 % aujourd’hui. La tendance est la même dans les divers pays d’Europe, avec des proportions souvent comparables (Angleterre, Allemagne, France, Danemark). L’interprétation de ces tendances est rendue toutefois difficile par le fait que le divorce, notion sociojuridique, mélange deux phénomènes : l’insatisfaction conjugale et la possibilité de transformer cette insatisfaction en rupture. La montée du divorce peut alors correspondre aussi bien à un abaissement des barrières économiques et culturelles au divorce qu’à une augmentation des tensions ou conflits conjugaux dans les situations modernes.
Sociologiquement, on a souvent tenté d’expliquer les divorces par divers “ modèles de déficit ”. C’est ainsi que la carence d’apprentissage d’autrui (climat familial désastreux durant l’enfance, mariage trop précoce, mariage “ forc頔) favorisent, en Suisse comme aux États-Unis, les ruptures d’union. Par ailleurs, le manque de ressources socio-économiques (revenu familial bas et précaire, niveau de scolarité élémentaire ou incomplet) est également associé à une plus forte propension à la divortialité. Enfin, le manque de similitude culturelle (mariages mixtes) est aussi associé à une fragilité légèrement plus grande. Toutefois, ces divers modèles de déficit ne jouent que dans les situations extrêmes et n’expliquent donc qu’une partie très restreinte des divorces contemporains. Ceux-ci apparaissent plutôt relever d’une conception moderne du mariage (Roussel) où l’accent mis sur les buts relationnels de l’union ainsi que sur les valeurs d’autonomie et d’épanouissement individuels expliquent que l’on s’estime fondé à cesser une union jugée insatisfaisante. À cet égard, nombre d’auteurs notent que les couples contemporains sont peut-être victimes du sur-investissement mis aujourd’hui dans la famille comme lieu de sens et de relation, ainsi que des tensions culturelles qui traversent le projet conjugal (tension entre égalitarisme et inégalité, entre individualisme et fusion, entre longue durée et valorisation de l’instant).
R. B. Bastard, L. Cardia-Vonèche, J.-F. Perrin, Pratiques judiciaires du divorce, Réalités sociales, Lausanne, 1987. — J. Kellerhals, P.-Y. Troutot, E. Lazega, Microsociologie de la famille, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1994. — L. Roussel, La famille incertaine, Odile Jacob, Paris, 1989. — I. Théry, Le démariage, Odile Jacob, Paris, 1993.
Voir : Droit de la famille — Droit matrimonial — Famille — Pensions alimentaires (Avance et recouvrement)
Jean Kellerhals
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Doctrine sociale de l'Église àð Enseignement social chrétien
Don
Une des modalités fondamentales des échanges ; sans doute une des plus anciennes aussi, nettement dominante dans les micro-sociétés orales, mais encore fortement présente dans les sociétés modernes. L’échange oblatif est généralement opposé à l’échange impliquant une dimension explicite d’intérêt et de négociation. Ces deux modalités ont en commun la qualité de faire circuler pacifiquement des valeurs, en se substituant aux formes violentes : pillage, vol, chantage, extorsion.
Don et négoce ne forment pas des ensembles homogènes. C’est ainsi que l’on distingue entre don unilatéral et don réciproque, entre don interpersonnel et don à des inconnus (souvent médiatisé par une instance de centralisation-redistribution), entre réciprocité immédiate et réciprocité différée, etc. De même, on veille à ne pas confondre troc (échange négocié en nature), échange monétarisé simple (prix fixé par les acteurs locaux) et échange marchand (prix fixé par les lois du marché) ; on sépare aussi contrat ponctuel et contrat à long terme, échange symétrique et échange asymétrique (ou inégal, c’est-à-dire camouflant une appropriation).
Cette opposition entre don et négoce — et surtout marché — anime déjà le célèbre Essai sur le don, où Marcel Mauss théorise une réalité multiforme dévoilée par les ethnologues. Si l’opposition entre troc et don existe déjà dans les petites sociétés orales, l’énorme extension du marché et des marchandises dans les sociétés modernes n’a fait que la rendre plus aiguë, certains chercheurs actuels, à la suite de Mauss, voyant même dans le don un moyen de limiter l’action corrosive du marché et de l’État sur les liens sociaux. Pendant longtemps, le don est resté une affaire d’anthropologues. Le structuralisme lévi-straussien a contribué à évider la problématique originale de Mauss en éliminant la question du sens et en évacuant les acteurs.
Timidement dans les années 1970, puis de façon soutenue à partir des années 1980, sociologues, économistes et anthropologues se sont interrogés avec un certain succès sur le don dans les sociétés contemporaines. Ils ont découvert un continent largement inconnu, en concentrant leur attention sur les cadeaux de Noël ou d’anniversaire, sur les invitations, sur la transmission intergénérationnelle, sur les sociétés charitables et les actions humanitaires, sur le don du sang et d’organes, sur le don dans la famille, dans le voisinage ou dans l’entreprise, etc. Peu à peu, une nouvelle vision des sphères d’échange a pris forme, venant heureusement corriger le monolithisme de l’économisme ambiant. À côté du marché en voie de mondialisation, on discerne la sphère étatique dans son rôle de centralisation-redistribution des ressources fiscales, la sphère des assurances sociales et mutuelles, parfois inféodée à l’État, et enfin la sphère du don interpersonnel, fortement ancrée dans la famille. Les commentaires qui suivent délaissent les microsociétés orales pour se concentrer sur le don dans les sociétés d’aujourd’hui.
Nous pouvons donner, recevoir et rendre (ou vendre et acheter) des biens, des sentiments, de l’influence ou des savoirs. Qui dit échange dit le plus souvent rapport entre des objets aux qualités incommensurables. À l’intérieur de la catégorie des biens, l’échange oblatif ou négocié peine déjà à trouver un dénominateur commun entre un pot et des fruits, un filet et des patates. Même problème si l’on reste à l’intérieur de la catégorie des sentiments ou de l’influence. Mais combien vaut, en argent ou en nature, un renseignement, une pression, l’amour d’un être cher ? Pour passer d’une catégorie à une autre de ces “ objets ” d’échange, il n’existe pas de clef de traduction stable et homogène. Les échanges humains sont hétérogènes. Cette hétérogénéité n’est dépassée que de façon locale et approximative, par des synthèses rituelles ou ponctuelles définies par les acteurs. Hétérogénéité et semi-intégration assurent une primauté à la logique des acteurs sur la logique du système, qui est toujours partielle et toujours à recomposer.
Le don et sa représentation suivent une dynamique complexe. Idéalement, le donateur agit librement (pouvoir), son geste est gratuit (biens), vrai (savoirs) et doté d’une valeur de lien (sentiments). Le don unilatéral positif, sans attente de retour, donne le ton du don réciproque. Le plus souvent, les dimensions de l’obligation, de l’intérêt, de la semi-vérité et de l’ambiguïté des sentiments sont présentes, quoique non dites et minoritaires. Un don totalement contraint ne peut plus être vécu comme don ni par le donateur ni par le receveur. Si l’intérêt prime sur toute autre considération, celui qui offre et celui qui reçoit cessent de se percevoir dans un rapport oblatif, à moins que l’un se mente à lui-même et que l’autre soit dupe. Nous butons sur le mensonge et l’inauthenticité, incompatibles, lorsque dominants, avec un échange oblatif positif. Idem pour le lien à autrui : la couverture infectée de variole offerte à l’Indien par le colonisateur n’est pas un don mais un acte de guerre, un don négatif qui se drape de positivité normative.
En résumé, la définition du don se révèle indissociable d’un espace normatif à deux pôles, positif et négatif, où les échanges se teintent d’amour et/ou de haine, de vérité et/ou de mensonge, de générosité et/ou de pingrerie, de liberté et/ou d’obligation. Le don, dans son acception usuelle, occupe le pôle positif. Les acteurs recourent à cette forme en réaffirmant sa positivité normative, mais ils peuvent aussi simultanément utiliser cette forme comme un cheval de Troie, pour convoyer subrepticement un contenu négatif. Nous basculons alors dans le don négatif, qui peut à tout moment se dépouiller de son enveloppe abusive et, à visage découvert, distribuer la mort, la haine, le vol et l’oppression. Cette réversibilité des formes et des conventions sociales dans le jeu des acteurs est caractéristique du champ symbolique. Elle est particulièrement manifeste dans l’échange oblatif, car le don exige le non-dit sur le retour (faute de quoi plus rien ne le distingue du troc ou de l’échange marchand). Et ce non-dit, qui laisse à l’autre un espace de liberté pour moduler son contre-don et réaffirmer ses liens à autrui, offre aussi un abri idéal pour dessiner des projets contraires. La positivité du don ne s’ouvre qu’en offrant un abri à sa réversibilité virtuelle en action négative. Telle est la rançon de la plus belle figure des échanges, qui a servi de couverture idéologique au féodalisme (les nobles offrent la protection à ceux qui prient et à ceux qui travaillent), au patriarcat (le sacrifice de la mère) et au patriotisme (sacrifice du soldat).
Idéalement, le don est au service du lien, tandis que les marchands ne se préoccupent que de la valeur d’échange. Par exemple, les cadeaux de Noël sont des preuves rituelles d’attachement réciproque. Ce sont des objets-valeurs (pour la plupart achetés sur le marché) et en même temps des objets-signes, signes d’affection, mais aussi signes de statut hiérarchique (la valeur d’échange des cadeaux varie avec la hiérarchie familiale). Les cadeaux de Noël marient ainsi tous les registres de l’échange en une synthèse qui vérifie l’idée de Mauss, inspirée par Les Argonautes du Pacifique occidental de Malinowski, selon laquelle le don est un phénomène social total. Le marché concentre la relation autour de la valeur d’échange en libérant les acteurs de tout lien autre qu’économique. Le don agit au contraire comme un opérateur de synthèse.
Dans la relation oblative alternée, les partenaires acceptent tour à tour d’être en dette, attendant l’occasion de rendre qui mettra l’autre en position de “ devoir quelque chose ”. Parfois, chacun s’estime en dette de l’autre et croit sincèrement qu’il reçoit plus que ce qu’il donne ; dans ce cas de figure, chacun donne sans compter, dans un sentiment de gratitude réciproque. En général, plus une relation oblative se déroule dans l’équivalence et dans le court terme, plus elle est superficielle et proche de la relation marchande ; plus elle tolère une réciprocité différée et asymétrique, plus au contraire elle renvoie à des liens interpersonnels profonds : entre parents et enfants, le don va surtout dans un sens ; les couples heureux partagent, ceux à l’agonie font les comptes. Dans l’univers des liens directs, le don a encore de beaux jours devant lui, car on imagine mal des amis, des amoureux, des couples avec enfants, des relations intergénérationnelles basées strictement sur des rapports marchands ou étatiques.
La relation oblative aux inconnus prend dans les grandes sociétés politiques une forme surtout indirecte. Elle fait appel à des instances de centralisation-distribution qui s’interposent entre ceux qui donnent et ceux qui reçoivent : sociétés charitables religieuses et philanthropiques et aussi services publics. Dans ces cas, le don n’est pas au service de liens interpersonnels, mais au service d’une harmonisation et d’une correction des asymétries sociales et économiques en général. Il contribue à la paix sociale en limitant les conséquences de la maladie, de la misère et la marginalisation. Générale et indirecte, cette relation oblative est soutenue par des représentations généralisantes elles aussi : apologie de la charité dans toutes les grandes religions, où le pauvre et le malade sont perçus comme les protégés d’un Dieu unique enclin à récompenser les bonnes actions en leur faveur. Ici, la boucle du don passe par l’au-delà et l’amour du prochain se teinte d’amour divin. Les représentations changent, mais le schéma reste le même dans les sociétés philanthropiques laïques à philosophie humanitaire.
L’intervention de l’État fait disparaître la liberté individuelle du donateur. Celui-ci ne la retrouve qu’en tant qu’acteur politique contribuant à déterminer les ressources fiscales, assurantielles et leur redistribution. Encore une fois les représentations se modifient autour de ce qu’on a nommé l’État-providence. Les citoyens et l’État s’estiment collectivement responsables dans un certain nombre de circonstances (maladie, accident, chômage, retraite, handicap…) et rendent obligatoire le système assurantiel qui est né au siècle dernier sur une base volontaire au sein des mutuelles. Cette solidarité “ statistique ” au moyen d’assurances obligatoires n’a plus grand-chose à voir avec le don interpersonnel ; mais elle n’appartient pas non plus à la logique du marché. Elle marie plutôt deux logiques : celle des rapports de force et de sens au niveau politique et celle de l’assurance comme système de centralisation-redistribution distinct de la fiscalité. Si les petites sociétés mutuelles peuvent encore être englobées dans la sphère du don interpersonnel, la sécurité sociale étatique a créé une nouvelle forme de solidarité, qui allie la froideur bureaucratique à l’anonymat statistique. La circulation des valeurs s’opère encore en faveur du lien social en général, sans toutefois s’enraciner aucunement dans des liens directs : au contraire, la solidarité statistico-bureaucratique, comme le marché, nous libère du fardeau de la solidarité concrète avec autrui, de la dette et de la dépendance consenties. Face au marché, à l’État et aux assurances, le don interpersonnel se resserre autour de la sphère des relations intimes, où il continue de jouer son rôle d’opérateur de synthèse en pliant à notre jeu symbolico-normatif le monde opaque des objets.
R. J. T. Godbout, L’esprit du don, Boréal, Montréal, 1992. — A. Petitat, “ Le don : espace imaginaire normatif et secret des acteurs ”, in : Anthropologie et sociétés, 19, 1-2, 17-44, 1995.
Voir : Action communautaire — Action humanitaire — Aide sociale — Chaîne du Bonheur (Fondation suisse) — Solidarité — Solidarité entre générations
André Petitat
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Drogue àð Toxicomanies
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Droit à la santé
Le   droit à la santé  est un concept controversé. Les uns le raillent en soutenant l impossibilité de sa concrétisation. Les autres l utilisent comme un cri de ralliement pour défendre la cause des droits des patients et prévenir l’introduction de mesures de rationnement. Il est donc important de tenter d’en dégager la signification et les limites et de préciser ses fondements légaux.
Dans une vision large, on peut décortiquer le droit à la santé en quatre prérogatives complémentaires, deux générales et deux spécifiques :
— le droit à l’information en matière de santé, à l’encontre des professionnels de la santé et de l’État. Il inclut notamment l’information sur les moyens de prévention et de promotion de la santé, sur les traitements disponibles et sur les risques pour la santé humaine ;
— le droit de participer aux décisions en matière de santé, non seulement comme patient, au niveau des décisions personnelles de soins, mais aussi comme citoyen, au niveau des politiques de santé et des autres choix affectant la santé humaine ;
— le droit de recevoir les soins que son état de santé requiert (soins nécessaires) ;
— le droit à une prise en charge financière des soins nécessaires ;
Le droit d’accès aux soins nécessaires et à leur prise en charge financière est garanti par la Constitution fédérale, par le biais du droit à des conditions minimales d’existence (art. 12), ainsi que par diverses Conventions internationales (notamment : Pacte de l’ONU, Convention sur les droits de l’enfant, Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine) dont la portée est toutefois variable. Il est consacré aussi dans diverses Constitutions cantonales (ex : BE, art. 29 ; NE, art. 13).
Le droit d’accès aux soins nécessaires est au surplus garanti par les législations sanitaires cantonales (ex : art. 16 loi VS), qui le limitent parfois aux établissements sanitaires reconnus d’intérêt public (ex : art. 20 loi VD). Ces dispositions légales donnent donc à chacun le droit d’obtenir les soins qu’exige son état de santé. Les contours précis de la notion de “ soins nécessaires ” sont toutefois difficiles à fixer ; elle inclut en principe tous les soins propres à éviter une atteinte à la vie ou une atteinte grave à l’intégrité physique ou psychique de la personne.
La prise en charge financière des soins nécessaires est assurée par la législation fédérale sur l’assurance-maladie, dans le cadre de l’assurance obligatoire des soins. Celle-ci soumet toutefois le remboursement à la triple condition que les prestations soient “ efficaces, appropriées et économiques ” (art. 32 LAMal). Le catalogue des prestations remboursées est constamment mis à jour pour tenir compte des progrès médicaux.
R. O. Guillod, D. Sprumont, “ Le droit à la santé : un droit en émergence ”, in : De la Constitution. Études en l’honneur de Jean-François Aubert, Bâle, 1997, pp. 337ss
Voir : Assurance-maladie — Information du patient — Médicaments essentiels — Soins de santé primaires — Prévention
Olivier Guillod
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Droit acquis
En cas de conflit entre deux lois qui se succèdent, le droit acquis sous l’empire de la règle antérieure est souvent maintenu malgré les dispositions contraires du nouveau texte. Cette situation est fréquente dans le domaine des assurances sociales.
Voir : Droits acquis/en cours d’acquisition (Maintien des)
jpf
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Droit applicable (Désignation du)
Les systèmes de sécurité sociale sont nationaux (y compris dans l’Union européenne). Dès lors, chaque État détermine le champ d’application de ses régimes ; les critères principaux se réfèrent au lieu de travail et à la résidence. Ceci est de nature à créer des conflits de lois positifs (plusieurs régimes ont vocation à s’appliquer au même état de fait) ou négatifs (aucun régime ne s’applique). Le droit de la coordination contient dès lors un principe consacré à la désignation du droit applicable, plus précisément du système national applicable. Ce dernier est généralement celui du lieu de travail. Il en est ainsi p. ex. dans le Règlement CE No 1408/71 et dans les conventions bilatérales conclues par la Suisse.
R. Bureau international du Travail, La sécurité sociale des travailleurs migrants, BIT, Genève, 1974. — P. Guibentif, La pratique du droit international et communautaire de la sécurité sociale, Faculté de Droit de Genève, Helbing & Lichtenhahn, Basel, 1997.
Voir : Coordination.
Pierre-Yves Greber
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Droit de la famille
Au sens large, le droit de la famille se définit comme l'ensemble des règles de droit régissant les rapports entre les membres d'une famille. Au sens étroit, il s'agit des dispositions du Livre deuxième du code civil suisse qui traite des relations juridiques entre les époux (mariage, divorce, effets généraux du mariage, régime matrimonial), entre les parents et leurs enfants (établissement et effets de la filiation, dette alimentaire), ainsi que de la tutelle. Les articles du code civil sur la famille ont été complétés par l'ordonnance fédérale réglant le placement d'enfants et celle sur l'activité d'intermédiaire en vue de l'adoption. Depuis 1972, pour adapter le droit de la famille à l'évolution de la société, le législateur a révisé successivement : l'adoption, la filiation, les effets généraux du mariage et le régime matrimonial, la conclusion et l'annulation du mariage, ainsi que le divorce. Actuellement, il est procédé à la révision du droit de la tutelle qui devrait aboutir d'ici à 2007.
R. Code civil suisse, art. 90 à 455 — P. Tuor, B. Schnyder, J. Schmid, “ Das Familienrecht ”, in : Das Schweizerische Zivilgesetzbuch, Schulthess polygraphischer Verlag, Zürich, 1995, pp. 152 à 427.
Voir : Adoption — Divorce — Droit matrimonial — Droit privé — Famille — Famille monoparentale — Filiation — Tutelle — Tutelle (Droit de la)
Margit Moser-Szeless
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Droit de pétition
Prévu par l'article 33 de la Constitution fédérale, le droit de pétition garantit à chacun la faculté d'adresser aux autorités des requêtes, des propositions, des critiques ou des réclamations, sans avoir à craindre un quelconque préjudice en retour. Le droit de pétition n'est soumis à aucune condition de forme et peut être exercé aussi bien par les Suisses que les étrangers, par les personnes physiques et morales, ainsi que par les mineurs. Proche parent de la liberté d'expression et des droits politiques, il crée pour l'autorité destinataire l'obligation de prendre connaissance de la pétition, sans que celle-ci soit toutefois obligée de lui donner suite. Quand bien même il ne déploie pas les effets contraignants propres à une initiative populaire ou à une demande de référendum, le droit de pétition permet aux justiciables d'exercer une certaine influence sur la prise de décisions par les organes de l'État.
R. A. Auer, G. Malinverni, M. Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II, Les droits fondamentaux, Staempfli Éditions SA, Berne, 2000.
Voir : Démocratie (et politique sociale) — Droits politiques — Référendum
Michel Hottelier
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Droit du divorce
Le droit du divorce précise les conditions auxquelles il peut être mis fin à un mariage, organise la procédure menant à un tel jugement et réglemente les conséquences, tant personnelles que financières, de la dissolution du mariage.
Le droit suisse du divorce se trouve dans le Livre 2e (droit de la famille) du Code civil, aux articles 111ss, qui ont fait l’objet d’une réforme totale entrée en vigueur le 1er janvier 2000. Le nouveau droit a éliminé en principe la notion de faute de la réglementation du divorce. Il consacre la prééminence du divorce par consentement mutuel (“divorce sur requête commune”) et prévoit que les contributions financières dues par un ex-époux à l’autre dépendent des besoins et non plus des torts respectifs. Le nouveau droit permet par ailleurs à des personnes divorcées de conserver ensemble l’autorité parentale à l’égard des enfants communs et garantit le droit de l’enfant d’être entendu dans la procédure de divorce.
R. F. Werro, Concubinage, mariage et démariage, 5e éd., Stämpfli, Berne, 2000. — J. Micheli et al., Le nouveau droit du divorce, Éditions Pépinet, Lausanne, 1999.
Voir : Divorce — Droit de la famille — Famille
Olivier Guillod
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Droit du placement d'enfants
Le placement d'enfants hors du foyer familial est réglé par l'Ordonnance fédérale réglant le placement d'enfants (OPE) dont l'application incombe aux cantons. L'OFE définit les exigences que doivent remplir :
— les personnes qui accueillent un enfant chez elles pour assurer son entretien et son éducation, à titre onéreux ou gratuit (placement chez des parents nourriciers)
—les futurs parents adoptifs qui accueillent un enfant de nationalité étrangère en vue de son adoption ;
—les personnes qui accueillent dans leur foyer des enfants de moins de 12 ans, à la journée et contre rémunération (placement à la journée) ;
—les institutions qui accueillent plusieurs enfants pour la journée et/ou la nuit (placement en institution, notamment crèches, garderies).
Le placement est soumis à l'autorisation et à la surveillance de la part de l'autorité tutélaire cantonale du lieu de placement ou d'autres autorités ou offices désignés par les cantons. La surveillance consiste notamment en la visite régulière d'une personne compétente au domicile des parents nourriciers, des institutions ou des autres personnes accueillant des enfants.
R. Ordonnance fédérale réglant le placement d'enfants, (RS 211.222.338) — Les effets de la filiation, Droit civil VI/2, 4e éd., Ed. Universitaires, Fribourg, 1998, No 751 à 775.
Voir : Adoption — Autorités tutélaires — Famille d'accueil — Placement familial — Protection de l'enfant
Margit Moser-Szeless
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Droit du sang
Le jus sanguinis ou “ droit du sang ” consiste à tenir compte du lien de filiation avec un national pour accorder la citoyenneté. Ce modèle repose sur une représentation de la nation comme une famille, un peuple dont les membres partagent les mêmes valeurs profondément incorporées dans les habitudes et les comportements. C'est un critère qui rend excessivement visible la présence étrangère dans un pays, car il limite très fortement l'accès à la nationalité : ce n’est pas facilement qu’on est accepté dans une famille.
Le droit de la nationalité de pays comme la Suisse, l’Italie ou le Japon, par exemple, donne une part très importante au droit du sang.
Voir : Droit du sol
Jean-Pierre Tabin
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Droit du sol
Le jus soli ou “ droit du sol ” consiste à retenir le lieu de naissance (lien territorial) comme prépondérant pour accorder la nationalité. Ce modèle repose sur une représentation de la nation comme un ensemble relié par un pacte, comme le fruit d'une volonté politique. L’union du peuple d’une nation passe par la reconnaissance de valeurs et la participation économique. De ce fait, dans ces pays, les individus vivant sur le sol national sont fortement encouragés à acquérir la nationalité.
Le droit de la nationalité de pays comme la France, la Grande Bretagne ou les USA donne une part très importante au droit du sol.
Voir : Droit du sang
Jean-Pierre Tabin
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Droit international (Primauté du)
Selon ce principe, le droit international conventionnel prime le droit interne. En ce sens, un État qui s’engage par traité doit en respecter les clauses sans considération de la teneur de son droit interne. On distingue entre les clauses des traités internationaux dites “ self-executing ”, lesquelles s’appliquent directement dans chaque État contractant, sans adoption préalable de dispositions internes, ce qui implique qu’elles soient suffisamment précises pour servir de base à la solution du cas d’espèce, et les traités “ executory ”, qui ne sont applicables dans les États contractants qu’après l’adoption de dispositions internes.
R. O. Jacot-Guillarmod, “ L’applicabilité directe des traités internationaux en Suisse : histoire d’un détour inutile ”, in : Annuaire suisse de droit international, vol. XLV, 1989, pp. 129 ss. — O. Jacot-Guillarmod, Les règles d’interprétation. Principes communément admis par les juridictions, Fribourg, 1989, pp. 109 ss. — A. Maurer, Bundessozialversicherungsrecht, Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1993. — Sur l’ensemble de la question : ATF 119 V, pp. 171 ss.
Voir : Nations Unies (Instruments des) — Union Européenne (Réglementation de l’)
Gustavo Scartazzini
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Droit matrimonial
Au sens large, le droit du mariage comprend l’ensemble des règles qui régissent la naissance, les effets et l’extinction des rapports entre époux.
Le droit du mariage fait partie intégrante du droit de la famille, lequel regroupe le droit de la parenté et celui de la tutelle. Les dispositions du droit matrimonial sont contenues dans le Livre deuxième du Code civil suisse. La révision du droit matrimonial, entrée en vigueur le 1er janvier 1988, a apporté des changements importants, concrétisant l’égalité de traitement dans les effets généraux du mariage (notamment le nom de famille, le droit de cité, l’entretien de la famille). Les dispositions relatives au divorce sont en cours de révision. De nombreuses modifications seront apportées, notamment en ce qui concerne les causes du divorce et le sort des enfants mineurs.
R. H. Deschenaux, P. Tercier, F. Werro, Le mariage et le divorce. La formation et la dissolution du lien conjugal, Stämpfli, Berne, 1995.
Voir : Divorce — Droit de la famille — Droit du divorce — Famille
Béatrice Despland
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Droit privé
Le droit privé regroupe l'ensemble des règles qui régissent les relations des particuliers entre eux. Il comprend le droit des personnes et de la famille, le droit des successions, les droits réels (statut de la propriété mobilière et immobilière), le droit des obligations (droit des contrats, responsabilité civile, enrichissement illégitime), le droit commercial, celui des papiers-valeurs, ainsi que la propriété intellectuelle. Le droit privé se présente en principe comme un droit de coordination, qui tend à assurer un équilibre entre des intérêts privés contradictoires. En tant qu'il vise à assurer la sauvegarde d'intérêts individuels, il laisse une large place à l'autonomie de la volonté et présente souvent un caractère dispositif. La réglementation du droit privé relève en Suisse du droit fédéral, les cantons ne disposant plus guère de compétence en ce domaine, et elle découle pour l'essentiel du Code civil, du 10 décembre 1907, et du Code des obligations, adopté le 30 mars 1911.
R. H. Deschenaux, Le Titre préliminaire du Code civil, Traité de droit civil suisse, Tome II, I, Éditions universitaires, Fribourg, 1969. — C. Du Pasquier, Introduction à la théorie générale et à la philosophie du droit, 6e éd., Delachaux et Niestlé, Neuchâtel, 1988.
Voir : Code civil suisse (CCS) — Droit de la famille — Droit public
Michel Hottelier
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Droit public
Le droit public comprend les normes qui organisent l'État et les collectivités publiques d'une part, ainsi que celles qui gouvernent les rapports entre les pouvoirs publics et les particuliers d'autre part. Cette division du droit s'est développée en même temps que les attributions qui ont été conférées à l'État et regroupe le droit constitutionnel, le droit administratif, le droit pénal, le droit fiscal, le droit des assurances sociales, ainsi que les règles d'organisation judiciaire et la procédure nécessaires à leur mise en œuvre. Le droit public se présente comme un droit largement fondé sur la subordination des particuliers face à la puissance publique. De nature impérative, il ne ménage qu'une place réduite à l'autonomie de la volonté, en tant qu'il poursuit le but d'assurer l'intérêt général. La compétence d'édicter les normes de droit public se partage en Suisse entre la Confédération et les cantons, les règles adoptées à ces deux niveaux de pouvoir étant fréquemment appelées à coexister et à se compléter, comme c'est par exemple le cas en matière d'assurances sociales, de droit fiscal ou d'aménagement du territoire.
R. P. Moor, Droit administratif, 2e éd., vol. I, Stämpfli Éditions SA, Berne, 1994.
Voir : Droit privé — Droit social
Michel Hottelier
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Droit social
La notion de “ droit social ” est controversée. On entend généralement par là la branche du droit qui tend à protéger la personne la plus faible, en principe le travailleur, quelquefois à renforcer la situation de l’homme, quel que soit son état, vis-à-vis des risques sociaux qui peuvent l’affecter.
Historiquement, à la fin du XlXe siècle, alors que les premières assurances sociales étaient des assurances ouvrières, le droit social comprenait ces dernières et se confondait avec le droit du travail. C’est ainsi qu’en Allemagne, selon les auteurs, on employait pour exprimer le même concept les termes de Arbeitsrecht ou de Sozialrecht.
La situation se modifia après la Deuxième Guerre mondiale avec l’apparition de la notion de sécurité sociale. Les assurances sociales n’étaient plus destinées à protéger les seuls travailleurs, mais bien toutes les personnes ayant besoin de la protection que leur offrait la sécurité sociale. En Allemagne, il se produisit une séparation entre les notions de droit du travail et de droit social (Sozialrecht) ce dernier terme étant réservé à la sécurité sociale et à l’aide sociale. Il n’en fut pas de même dans d’autres pays, comme en France, où le droit social paraît constituer une notion enveloppant le droit du travail, la sécurité sociale, l’aide sociale ; on y joint quelquefois d’autres branches juridiques, comme le droit de l’environnement.
En Suisse aussi, on peut admettre que le droit social constitue une catégorie générale, englobant le droit du travail, les assurances sociales, l’assistance sociale et l’assistance publique. L’administration fédérale a longtemps édité une publication annuelle, intitulée “ Législation sociale de la Suisse ” et reproduisant les actes législatifs fédéraux et cantonaux portant sur le droit du travail ainsi que les assurances et l’assistance sociales. Dans les universités, bien que le terme “ droit social ” n’apparaisse guère dans les programmes d’enseignement, le droit du travail est généralement relié aux assurances sociales.
R. E. Schweingruber, Sozialgesetzgebung der Schweiz, 2e éd., Zürich, 1977. — M. David, L’état actuel du droit du travail et de la sécurité sociale dans le domaine de l’enseignement et de la recherche, Actes du Sixième Congrès international de droit du travail et de la sécurité sociale, tome III, Stockholm, 1968.
Voir : Droit public — Droits sociaux — Sécurité sociale
Alexandre Berenstein
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Droits acquis
Au cours des dernières décennies, la notion d’acquis sociaux s’était imposée et il arrivait rarement que l’on mette en cause les “ droits acquis ”. Au cours des dernières années, on assiste à des mouvements de remise en cause de ces droits : une expression fréquemment utilisée consiste à affirmer : il n’y a plus de tabous.
Voir : Ciblée (Politique) — Droits acquis/en cours d’acquisition (Maintien des)
jpf
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Droits acquis/en cours d’acquisition (Maintien des)
Le transfert du lieu de travail engendre des problèmes de protection sociale du migrant. Il en résulte des incertitudes en particulier sur le maintien des droits acquis et la continuation des périodes de cotisation. Les règles relatives à la coordination des régimes nationaux de sécurité sociale tendent à surmonter ces difficultés en remédiant aux limites territoriales qui continuent de caractériser la législation sociale des États. Des principes d’équivalence telles la prise en compte des périodes d’affiliation accomplies à l’étranger (totalisation/proratisation) et l’exportation des prestations sociales, garantissent aux migrants le maintien des droits acquis ou en cours d’acquisition.
R. B. Kahil-Wolff, A. Donzell, “ La protection sociale des migrants en Suisse et dans la Communauté européenne ”, in : Cahiers genevois et romand de sécurité sociale 16, 1996, pp. 87 ss. — S. Nério, “ Le cumul des prestations de sécurité sociale en droit communautaire ”, in : Revue trimestrielle de droit européen, 1988, pp. 573 ss.
Voir : Conventions bilatérales de sécurité sociale — Coordination — Équivalence (Principe d’)
Bettina Kahil-Wolff
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Droits aux mourants
Les droits aux mourants sont conçus pour garantir la protection et le respect des personnes en fin de vie. Ils garantissent la dignité du mourant :
— Le mourant souffre toujours et il peut le dire. Il doit donc être écouté et il doit même être entendu. Il a droit à de l’attention, il a droit à toute l’attention et ses besoins doivent être satisfaits. Les symptômes de sa souffrance doivent être reconnus et soulagés en toute équité. La porte de sa chambre doit rester ouverte mais elle peut aussi rester fermée. Il a droit à son intimité corporelle, affective et spirituelle. Il a le droit de dire non. Il n’est pas seul car sa famille et ses amis l’accompagnent. Il doit pouvoir mourir en leur présence s’il(s) le souhaite(nt). Il doit savoir que ses souhaits seront respectés après sa mort. Il est une personne et le reste dans la mort pour ne devenir cadavre que beaucoup plus tard.
— La mort est une réalité qui fait partie de la vie.
— Chacun a le droit de mourir au terme de sa propre vie.
— La mort est permise lorsqu’arrive l’heure et il est vain de s’y opposer.
— Personne ne détermine ou l’heure ou l’instant mais tous respectent et l’un et l’autre.
— La mort n’est jamais donnée par quelqu’un mais elle est par contre reçue par le mourant et par lui-seul.
— La bonne mort n’existe pas puisque le mort ne peut plus s’exprimer.
Voir : Acharnement thérapeutique — Directives anticipées (Testament de vie) — Euthanasie — Soins palliatifs
Gilbert B. Zulian
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Droits de l'enfant àð Enfance (Politique de l')
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Droits de l homme (Convention européenne des)
La Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée le 4 novembre 1950 à Rome, est entrée en vigueur le 3 septembre 1953. Instrument le plus important et le plus achevé dans le domaine de la protection internationale des droits individuels, elle lie l'ensemble des États membres du Conseil de l'Europe, et déploie ses effets dans un bassin de population qui regroupe quelque 800 millions de justiciables.
Les droits énoncés par la Convention s'inspirent des garanties proclamées par la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée 10 décembre 1948 par l'Organisation des Nations Unies. Ils regroupent d'une part les libertés individuelles classiques (droit à la vie, liberté personnelle, liberté religieuse, liberté d'expression) et d'autre part les garanties de l'État de droit les plus élémentaires reconnus dans une société démocratique fondée sur le respect de la dignité humaine (droit à un procès équitable, présomption d'innocence, droits de la défense). La plupart de ces droits peuvent toutefois souffrir de restrictions, selon des conditions prévues par la Convention elle-même. Depuis son adoption, la Convention a été complétée par cinq protocoles additionnels venus étendre et compléter la protection qu'elle accorde, dans des domaines aussi variés que le droit à l'instruction (1952), la protection de la propriété (1952), la liberté de circulation (1963), l'interdiction de la peine de mort (1983), les garanties procédurales en cas d'expulsion d'étrangers (1984), l'égalité entre époux (1984) ou l'interdiction générale de la discrimination (2000).
L'apport essentiel de la Convention réside moins dans la nature des droits qu'elle proclame, dans la mesure où ceux-ci sont le plus souvent déjà reconnus par les constitutions et la législation des États parties, que dans le mécanisme de protection qu'elle institue en vue d'assurer leur mise en œuvre sur le plan international. Depuis une importante réforme intervenue le 1er novembre 1998, la Cour européenne des droits de l'homme statue en qualité d'instance internationale unique et permanente sur les violations des droits de l'homme qui lui sont déférées soit par les États parties, soit par des particuliers. La saisine de la Cour suppose que le litige ait préalablement été soumis à l'ensemble des instances nationales compétentes. La protection internationale des droits conventionnels s'avère ainsi subsidiaire, en tant que les États parties assument la mission prioritaire de promouvoir, assurer et sanctionner leur respect. La portée des droits garantis par la Convention européenne est cependant façonnée d'une manière déterminante par la Cour. L'instance de Strasbourg considère en effet la Convention comme un instrument vivant, qui doit s'interpréter à la lumière des conceptions prévalant de nos jours dans les sociétés démocratiques, dans la perspective de garantir des droits non pas théoriques et illusoires, mais véritablement concrets et effectifs. Le droit européen des droits de l'homme se présente ainsi comme un droit en grande partie jurisprudentiel et évolutif.
R. F. Sudre, Droit international et européen des droits de l'homme, 4e éd., Presses Universitaires de France, Paris, 1999. — A. Haefliger, F. Schürmann, Die Europäische Menschenrechtskonvention und die Schweiz, 2e éd., Stämpfli Éditions SA, Berne, 1999. — M. E. Villiger, Handbuch der Europäischen Menschenrechstkonvention unter besonderer Berücksichtigung der schweizerischen Rechtslage, 2e éd., Schulthess, Zürich, 1999.
Site Internet : www.echr.coe.int
Voir : Déclaration universelle des droits de l'homme — Droits de l'homme (Cour européenne des) — Charte sociale européenne
Michel Hottelier
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Droits de l’homme (Cour européenne des)
En fonction depuis 1959, la Cour européenne des droits de l'homme est une juridiction internationale indépendante et, depuis le 1er novembre 1998, permanente, qui a pour tâche d'assurer le respect des droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme. Siégeant à Strasbourg, elle comprend un nombre de juges égal au nombre des États parties et peut être saisie soit par les États eux-mêmes, soit par les particuliers placés sous leur juridiction. Les fonctions qu'exerce la Cour sont au nombre de quatre : elle statue en premier lieu sur la recevabilité des requêtes qui lui sont déférées. Cette étape franchie, elle procède à l'instruction de l'affaire et se met à la disposition des intéressés en vue de parvenir à un règlement amiable du litige. En l'absence d'arrangement, elle rend un arrêt sur la question de la violation des droits allégués. Si la Cour admet qu'une violation de la Convention a eu lieu, elle dispose de la faculté d'accorder une satisfaction équitable à l'intéressé. Les arrêts de la Cour ne sont pas dotés d'un effet cassatoire. Ils présentent toutefois un caractère obligatoire pour les États mis en cause, lesquels assument la responsabilité de rétablir une situation conforme au droit européen des droits de l'homme. L'exécution des arrêts de la Cour fait l'objet d'un contrôle, qui est assuré par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe.
R. V. Berger, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, 7e éd., Paris, Sirey, 2000.
Site Internet : www.echr.coe.int
Voir : Déclaration universelle des droits de l'homme  Droits de l'homme (Convention européenne des)
Michel Hottelier
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Droits des personnes handicapées àð Déclaration sur les droits des personnes avec désavantage
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Droits politiques
Les droits politiques sont des instruments démocratiques, qui permettent d'assurer une participation collective de la population à la gestion et au contrôle des affaires publiques. Ils comprennent en Suisse le droit d'élire, de voter et de signer.
Présent dans toutes les démocraties, le droit d'élire est également garanti par les instruments internationaux de protection des droits de l'homme. Ce droit fonde un rapport de représentation et porte sur la désignation d'une ou de plusieurs personnes appelées à composer un organe étatique (parlement, gouvernement, tribunaux). Le droit de voter, synonyme de référendum, concerne l'acceptation ou le rejet d'un acte normatif ou d'une décision par le corps électoral (constitution, loi, certains traités internationaux). Le droit de signer porte sur la faculté d'appuyer une demande de référendum (50000 signatures sur le plan fédéral), une initiative populaire tendant à la révision de la Constitution (100000 signatures au niveau fédéral), ou encore une liste de candidats à une élection (entre 100 et 400 signatures dans le cadre de l'élection du Conseil national).
Les droits politiques sont garantis par l'article 34 de la Constitution fédérale. Cette disposition protège la libre formation de l'opinion des citoyennes et des citoyens et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. La capacité civique nécessaire à leur exercice présuppose la nationalité suisse, la majorité civique de 18 ans, ainsi que l'absence d'interdiction pour cause de maladie mentale ou de faiblesse d'esprit.
Pour être fréquemment usités sur le plan fédéral, les droits politiques sont plus largement répandus et plus développés encore sur le terrain cantonal et même municipal. Les cantons et les communes apparaissent historiquement comme le berceau de la démocratie en Suisse. Ils y jouent, aujourd'hui encore, le rôle de laboratoires et de pionniers dans l'apparition et le développement de nouvelles formes de participation de la population à l'exercice du pouvoir (par exemple : droits politiques en faveur des étrangers, initiative populaire législative, référendum administratif et financier).
R. A. Auer, G. Malinverni, M. Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. I, L'État, Stämpfli Éditions SA, Berne, 2000. — E. Grisel, Initiative et référendum populaires, 2e éd., Stämpfli Éditions SA, Berne, 1997.
Sites Internet : www.admin.ch — www.c2d.unige.ch
Voir : Démocratie (et politique sociale) — Droit de pétition — Initiative constitutionnelle — Référendum
Michel Hottelier
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Droits sociaux
On entend généralement par le terme de “ droits sociaux ” les droits sociaux fondamentaux. Contrairement aux droits fondamentaux classiques, qui ont pour objet essentiel la limitation du pouvoir de l’État, ils ont surtout pour fin l’intervention de l’État en vue de venir en aide aux individus, par exemple par l’instauration d’un système de sécurité sociale. Mais ils peuvent aussi avoir pour objet la non-intervention de l’État, comme le droit à la liberté syndicale. Ils se caractérisent en réalité par leur but, qui doit être “ social ”, c’est-à-dire destiné avant tout à protéger les moins favorisés.
Les droits sociaux actuellement reconnus figurent dans plusieurs articles de la Constitution fédérale. Certains d’entre eux résultent de règles constitutionnelles non écrites ou de traités internationaux.
R. E. Grisel, “ Les droits sociaux ”, in : Revue de droit suisse, Vol. 2, 1973. — J.-P. Müller, Soziale Grundrechte in der Verfassung ?, 2e éd., Bâle, 1981.
Voir : Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs — Charte sociale européenne — Nations Unies (Instruments des) — Protection sociale
Alexandre Berenstein
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Dumping fiscal
Pratique consistant pour un État (un canton, une commune), à diminuer délibérément certains de ses impôts ou taxes en dessous du niveau pratiqué par les régions concurrentes en vue d’attirer des entreprises ou des contribuables fortunés sur son territoire, ou de favoriser les exportations. En Suisse, les différences intercantonales et intercommunales sont particulièrement frappantes. Elles correspondent à une forte inégalité de fait entre les personnes résidentes. Les systèmes de péréquation ne résolvent que partiellement le problème.
Voir : Impôt — Inégalités sociales
jpf
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Dumping social
Phénomène repérable au niveau international, mais aussi dans les cantons et les communes. Il désigne des politiques ou des pratiques administratives qui tendent à affaiblir la protection sociale ou le droit du travail dans le but, ou avec l’espoir, d’attirer l’implantation d’entreprises.
Voir : Ciblée (Politique) — Démantèlement social
jpf
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École spéciale
Traditionnellement l’Hôpital général et les congrégations catholiques comme, du côté protestant, la philanthropie, souvent d’obédience évangélique, ont reçu dans des instituts les enfants dits “ déshérités ”. Les premiers établissements spécialisés ont été destinés aux enfants aveugles et sourds dans une tradition à la fois charitable mais aussi dans un intérêt pour le développement mental et moral.
Puis se sont multipliés, au cours des 19e et XXe siècle, les établissements en fonction des types et des degrés de handicaps repérés (asile, institut, maison de correction). Les débats autour de l’intégration pendant les années septante ont entraîné une critique des institutions trop fermées, qui ségrèguent, excluent et donc stigmatisent, et ont valorisé une prise en compte de la personne handicapée et son droit à participer à une vie ordinaire, familiale et collective (publique).
Actuellement, selon les différents systèmes scolaires, les écoles spécialisées regroupent des enfants avec des déficiences modérées à sévères pour lesquels on n’envisage pas une réintégration dans le circuit de l’école ordinaire.
R. P. Avvanzino, Histoire de l'éducation spécialisée (1827-1979) Les arcanes du placement institutionnel, Cahiers de l'EESP, 15, Lausanne, 1993. — M. Ruchat, L'oiseau et le cachot. La naissance de l'éducation correctionnelle en Suisse romande au 19e siècle, Édition Zoé, Genève, 1993. — M. Ruchat, Les chroniques du mal. Le journal de l’éducation correctionnelle (1850-1918), Passé présent, Genève, 1999.
Voir : Éducateur spécialisé  Éducation (Politique de l')
Martine Ruchat
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Écoles sociales àð Écoles supérieures de travail social et hautes écoles spécialisées (Conférence suisse) (SASSA)
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Écoles supérieures de travail social et Hautes écoles spécialisées (Conférence suisse) (SASSA)
La Conférence a pour but la promotion et la coordination des formations en travail social en Suisse (service social, éducation spécialisée, animation socioculturelle). Elle atteint ses objectifs notamment au moyen des tâches suivantes :
— Echange régulier d'informations et d'expériences entre les membres ;
— Soutien à la création et à la consolidation des hautes écoles spécialisées de travail social ;
— Relations avec les autorités concernées notamment en vue de la planification, du financement et de la reconnaissance des écoles et des diplômes ;
— Coordination des offres de formation continue et de prestations de services des écoles membres, ainsi que la recherche au sein des écoles.
R. Rapport annuel 2000.
Site Internet : www.sassa.ch
Voir : Animation socioculturelle — Conférence latine des écoles supérieures de travail social (CLESTS) — Éducation spécialisée — Hautes écoles spécialisées (HES) — Travailleurs sociaux (Formation des)
Regula Villari
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Économie appliquée
L’économie appliquée constitue une branche particulière des sciences économiques. Elle s’efforce de mettre en application les instruments développés par l’analyse économique pour répondre à des questions d’actualité. Dans ce but, elle s’appuie tout autant sur des approches théoriques que sur les outils de l’analyse empirique (statistique et économétrie) pour établir des prévisions sur les développements économiques et sociaux futurs, mettre en évidence les conséquences de certaines réformes envisagées ou aider les acteurs politiques à élaborer des solutions concrètes à des problèmes actuels. Par son champ d’étude, l’économie appliquée établit un pont entre les milieux universitaires et la Cité, collaboration qui est appelée à s’étendre dans les années à venir. L’institut “ Créa ” de macroéconomie appliquée à Lausanne et le Laboratoire d’économie appliquée (LEA) à Genève représentent deux exemples de structures créées dans les universités romandes et financées essentiellement par des fonds extérieurs pour développer ce créneau de recherche.
Voir : Économie sociale — Planification sociale — Nouvelle gestion publique
Yves Flückiger
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Économie d’échelle
Le concept de rendement d’échelle permet de caractériser l’accroissement relatif de la production totale obtenue par une entreprise si elle décide d’augmenter tous ses inputs dans des proportions strictement identiques. On parle de rendements d’échelle croissants (ou d’économie d’échelle) lorsque, pour une hausse de k % de chacun de ses facteurs de production, l’entreprise parvient à augmenter son volume de production de plus de k %. Dans ces conditions, le coût moyen diminue au fur et à mesure que l’entreprise augmente son échelle de production ce qui lui permet d’obtenir un avantage concurrentiel par rapport aux autres producteurs. A l’opposé, on parle de rendements d’échelle décroissants (ou de “ déséconomie ” d’échelle) si un accroissement de k % de tous les facteurs de production conduit à une hausse de la production totale inférieure à k %. Finalement, cas le plus fréquemment observé dans la réalité, les rendements d’échelle sont constants si les inputs et l’output varient exactement dans la même proportion.
Lorsque toute une industrie est caractérisée par des rendements d’échelle croissants, on assiste à une concentration progressive de la production dans un nombre de plus en plus réduit d’entreprises. En effet, en augmentant leur taille, elles obtiennent un avantage en termes de coûts sur les entreprises plus petites qui disparaîtront du marché. Ce processus peut conduire à la monopolisation de la production aux mains d’un seul producteur. Les autres concurrents potentiels seront alors empêchés d’entrer sur le marché en raison de leur taille insuffisante qui génère des coûts plus élevés. On parle dans ce cas de barrières à l’entrée permettant à l’entreprise qui fournit seule le marché de jouir en toute quiétude de sa position de monopoleur puisque celle-ci ne peut être remise en cause par des concurrents potentiels. Pour éviter que l’entreprise en question n’abuse de sa position dominante, une intervention de la part de l’État s’impose, sous la forme par exemple d’un prix maximum ou de “ nationalisation ” de la production. Une telle situation existe en particulier dans le domaine des infrastructures de transport (rail notamment) ou de distribution (électricité par exemple).
Voir : Concurrence — Marché du travail
Yves Flückiger
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Économie sociale
L’expression “ économie sociale ” désigne un ensemble d’entreprises, appartenant au secteur marchand ou non marchand, signataires d’une charte sociale (formelle ou informelle), selon laquelle elles s’engagent à mettre en œuvre des techniques d’organisation reposant sur les principes de solidarité, de démocratie et de participation (une personne = une voix) entre les membres (producteurs, salariés, usagers, consommateurs, actionnaires, etc.), et sur les valeurs d’autonomie et de citoyenneté. Ces entreprises se structurent autour de la forme juridique des coopératives, des mutuelles ou des associations, et constituent une nouvelle composante institutionnelle, appelée généralement le troisième secteur, entre le secteur de l’économie privée traditionnelle et le secteur public. Elles cherchent à intégrer en un unique objectif le bien-être social et l’efficacité économique, en réconciliant le monde de la production, le monde financier et le monde de la solidarité, en favorisant de nouvelles pratiques économiques d’ordre éthique. Expressions apparentées : entreprises citoyennes, non-profit organisation.
R. J. Defourny, J. Monzon Campos (Éds), Économie sociale – Entre économie capitaliste et économie publique, Ouvertures Économiques, Ciriec, De Boeck Université, Bruxelles, 1992. — A. Neurisse, L’économie sociale, PUF, Paris, 1983. — C. Vienney, L’économie sociale, La Découverte, Paris, 1994. — T. Jeantet, L’économie sociale en action, Éditions CIEM, Paris, 1995. — Coll., “ Une ambition, l’économie sociale ”, in : Économie et Humanisme, No 330/octobre 1994, Lyon.
Voir : Charte sociale européenne — Éthique — Éthique sociale — Socio-économie — Solidarité — Tiers secteur
Marie-Luce Délez
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Éducateur de la petite enfance
L’éducateur de la petite enfance exerce son activité auprès de jeunes enfants de 0 à 7 ans, bien portants ou handicapés, qui sont confiés à un lieu d’accueil extra-familial. Professionnels de l’éducation, les éducateurs de la petite enfance s’insèrent dans le champ du travail social et utilisent leurs connaissances de l’enfant et de son contexte de vie afin de favoriser son développement en créant les conditions qui lui permettent la découverte de soi, de son environnement élargi et de la vie en groupe. Ils collaborent à la prévention et au dépistage des difficultés pouvant toucher les enfants. Ils ont pour partenaires, outre les parents, des professionnels du champ social, de l’enseignement et de la santé, ainsi que divers spécialistes qui sont en contact avec l’enfant.
Voir : Crèche et garderie — Travailleurs sociaux (Formation des)
jpf
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Éducateur spécialisé
L’éducateur spécialisé est un professionnel de l’action sociale dont le rôle est de favoriser le développement, l’autonomie et l’intégration sociale des personnes dont il s’occupe. Par des techniques et des méthodes éducatives adaptées, ainsi que des connaissances approfondies en sciences humaines, il intervient là où il y a rupture vis-à-vis de la famille et/ou de la société. Il travaille dans des institutions accueillant des populations de tous âges souffrant de handicaps divers (handicap physique, mental, toxicomanie, délinquance, etc.), mais aussi, avec la crise économique, dans des lieux informels auprès de personnes et de groupes que leur mauvaise situation a marginalisés. Ce travailleur social cherche à favoriser le développement de ces personnes et à faciliter ainsi leur resocialisation.
Voir : École spéciale — Travailleurs sociaux (Formation des)
Paul Weber
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Éducation (Politique de l’)
En règle générale, ce terme recouvre l’action de l’État en tant qu’ordonnateur d’un système d’enseignement ou de formation (générale et professionnelle) formalisé et organisé et en tant que prestataire de services éducatifs par le biais des écoles publiques.
Malgré que l’éducation et l’instruction des enfants et des jeunes soient partagées entre l’école et les familles, les systèmes scolaires occupent une position dominante dans le champ éducatif. Leur emprise sur le temps et sur la nature des activités de leurs usagers en fait une composante non négligeable, quoique peu reconnue, de la politique de l’enfance et de la jeunesse et de la politique familiale.
Plus globalement, la politique de l’éducation est d’abord une politique d’orientation de la connaissance et de la culture légitimes, par le double biais :
a) de la définition — sélective — des savoirs, savoir-faire et savoir-être, des valeurs éthiques et morales, des croyances et des mythes qui sont jugés dignes d’un travail de transmission-acquisition délibéré et contrôlé dans des écoles, et
b) de la définition des conditions dans lesquelles le travail des élèves et leur expérience d’apprentissage sont organisés dans ces écoles (socialisation).
Le choix et la définition des contenus de formation et des critères d’évaluation des apprentissages, ainsi que des conditions du travail scolaire se jouent entre une multiplicité de protagonistes qui défendent des visées culturelles, religieuses, éthiques, morales, civiques et économiques souvent divergentes. Ils s’inscrivent inévitablement dans un champ de tension entre la transmission d’un héritage du passé et la préparation d’un avenir collectif et individuel incertain.
La politique de l’éducation est ensuite une politique de distribution des savoirs, savoir-faire et savoir-être. Depuis le début du XX siècle, et plus particulièrement après la Deuxième Guerre mondiale, le développement explosif des savoirs et savoir-faire à transmettre et l’accélération du rythme de leur obsolescence ont favorisé un allongement notable de la durée de la formation initiale dans les parcours de vie individuels, en même temps que la différenciation croissante des cursus, des filières et des écoles. L’articulation des différents segments des systèmes éducatifs et l’orientation des flux d’élèves entre eux déterminent le degré d’accessibilité de types et niveaux de formation différenciés. La tension est ici entre homogénéisation et différenciation culturelles.
Les apprentissages et les compétences reconnus et certifiés à l’issue de parcours de formation (initiale et continue) qualifient leurs porteurs pour l’accès à des positions sociales et professionnelles différenciées. De plus en plus, les diplômes de formation constituent une condition nécessaire sinon suffisante de l’accès à des emplois définis en termes de compétences requises de la part des personnes qui les occupent. De plus en plus aussi, le niveau de formation intervient dans la justification des inégalités de salaire, de prestige, d’autorité et de pouvoir sur les lieux de travail et plus généralement dans la vie sociale et politique. Dans des sociétés démocratiques et inégalitaires, le système de formation joue ainsi un rôle de plus en plus dominant dans les processus d’intégration sociale mais aussi d’attribution légitime de places et de destinées sociales inégalement avantageuses et désirables. La politique de l’éducation est dans ce sens une politique de distribution de destinées et de statuts sociaux qui s’inscrit dans la tension entre cohésion sociale et inégalité des conditions d’existence. D’autant plus que le niveau de formation initiale conditionne aussi l’accès plus ou moins fréquent à la formation continue.
La politique de l’éducation participe enfin de plus en plus étroitement d’une politique économique. Le “ capital ” de qualifications intellectuelles et professionnelles disponibles sur le marché du travail devient un facteur de productivité économique et un potentiel d’innovation scientifique et technologique ainsi que, par conséquent, un facteur d’attractivité pour les entreprises. Sous cet angle, les dépenses d’éducation sont d’ailleurs de plus en plus considérées comme des investissements plutôt que des dépenses sociales.
Au cours des récentes décennies, conjuguant une logique de développement économique avec les aspirations de justice sociale et d’émancipation, les politiques de l’éducation ont dans l’ensemble favorisé l’accessibilité croissante des institutions de formation et la réduction de certaines inégalités (entre hommes et femmes notamment). La plupart des pays industrialisés ont vu le niveau général de formation des nouvelles générations s’élever. Mais cette élévation générale n’a pas empêché la conservation des inégalités d’accès aux formations les plus intéressantes entre jeunes issus de classes sociales inégales. Dans la mesure même où il qualifie une fraction des individus, le système de formation en disqualifie d’autres, avec dorénavant un risque croissant de marginalisation ou d’exclusion sociale pour les moins instruits.
R. E. Poglia, Politique et planification de l’éducation en Suisse. Un essai de systématisation, Peter Lang, Berne, 1983. — L. Legrand, Les politiques de l’éducation, PUF, Paris, 1988. — W. Hutmacher, Quand la réalité résiste à la lutte contre l’échec scolaire, Cahier du Service de la recherche sociologique, No 36, SRS, Genève, 1993.
Voir : Apprentissage — Enfance (Politique de la petite) — Famille (Politique de la) — Formation continue — Formation professionnelle — Inégalités des chances — Inégalités sociales — Instruction publique — Jeunesse — Orientation scolaire et professionnelle
Walo Hutmacher
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Éducation pour la santé
La société occidentale attache une importance croissante à la santé et à la qualité de la vie, et au fait d’œuvrer à cet égard dans un sens de prévention et de promotion. D’abord, il s’agit de fournir à la collectivité en général, ou à des groupes en son sein (par exemple enfants, jeunes, personnes exposées à des risques particuliers) une information pertinente et compréhensible. Puis, par des méthodes interactives, proches de la vie quotidienne et de la pratique, de faire en sorte que les personnes évoluent dans leurs attitudes et choisissent d’adopter des modes de vie et d’activité sains plutôt que délétères. Les manières de faire dépendront du problème et du groupe concerné. Chez les jeunes notamment, on souhaite une éducation à la santé globale, dans l’optique d’une bonne gestion de sa vie en général (consommation de diverses substances, sexualité, activité physique, circulation routière) et des risques qu’on est forcément amené à y rencontrer. À cet égard, l’école est un lieu privilégié. Dans le canton de Vaud, en collaboration avec les infirmières et médecins scolaires, on a développé depuis 1987 le réseau des animateurs de santé. Des succès remarquables ont été obtenus aussi par l’éducation de patients souffrant d’une maladie chronique (notamment diabète) dans le sens de limiter la gravité de l’affection et ses complications. Soulignons qu’il importe que l’éducation pour la santé soit positive, stimulante et évite des messages moralisants ou effrayants.
R. J.-D. Boegli, Éducation pour la santé à l’école : cure de jouvence pour l’école de l’an 2000, Éditions LEP, Le Mont-sur-Lausanne, 1990. — J. Martin, Pour la santé publique, Réalités sociales, Lausanne, 1987.
Voir : Information du patient — Instruction publique — Prévention — Santé publique
Jean Martin
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Éducation spécialisée
“ Éducation spécialisée est une expression qui se réfère à un type d’éducation destinée aux personnes qui ne réussissent pas, ou ne réussiront vraisemblablement pas dans le cadre de l’enseignement ordinaire, les niveaux éducatifs, social et autre qui correspondent à leur âge. En français, on rencontre à la fois les expressions éducation spéciale et éducation spécialisée pour désigner tous les aspects de l’éducation scolaire ou non, des personnes handicapées et inadaptées. Enseignement spécial ou spécialisé a un sens plus étroit et concerne d’avantage le domaine de l’instruction ” (Terminologie de l’éducation spéciale, Unesco, 1983).
L’éducation ou l’enseignement spécialisé a une histoire : celle des tentatives d’éducation et d’instruction des enfants sourds, aveugles et “ idiots ”. Au 18e siècle, l’enfant sauvage pris en charge par J.-F. Itard a été une occasion de création de matériel et de méthode pédagogiques, ainsi que de débats entre pédagogues et médecins.
L’éducation spécialisée est un champ de connaissances et de pratiques qui intéresse divers professionnels : les pédagogues et médecins psychiatres ; mais aussi, dès la fin du 19e siècle, les médecins hygiénistes et les psychologues qui ont développé leurs pratiques de dépistage, de diagnostic et de pronostic quant à l’éducabilité de l’enfant dit alors “ arriéré scolaire ”, “ anormal ” ou “ exceptionnel ”. Ce sont aussi des pratiques pédagogiques nouvelles qui ont fleuri sur le terrain de l’enfance hors norme : les classes spéciales, l’école sur mesure (E. Claparède), l’école active (A. Ferrière), la pédagogie par objectifs. Il n’y a dans la logique de ces psychopédagogues du début du XXe siècle aucune séparation à faire du point de vue pédagogique entre l'enseignement aux “ arriérés ” et l'enseignement ordinaire : ils destinaient leurs méthodes et leurs matériel à tous les enfants.
Les enfants pris en considération par le champ de l’éducation spécialisée ont au cours du temps changé d’appellation : l’enfant “ anormal ” s’est démultiplié en autant de figures du handicap mental (handicap moteur, déficient physique, déficient sensoriel, déficient intellectuel), alors que l’enfant “ vicieux ” du 19e siècle se mue en un enfant “ difficile ”, puis un enfant “ nerveux ” ; quant à l’enfant “ arriér頔 du début du XXe siècle, il devient dans les années quarante l’enfant “ inadapté scolaire ”. De l’ère de “ l’orthopédie ” (physique ou morale), on passe à celle de la réadaptation. Dès les années cinquante, une nouvelle force sociale émerge : celle des parents d’enfants handicapés, lesquels réclament une vie “ comme tout le monde ” pour leurs enfants. Le concept d’“ intégration sociale ” fait son apparition, lequel préfigure celui d’“ intégration scolaire ”. Une politique de l’exclusion rivalise avec des velléités d’une politique de l’inclusion. Aujourd’hui en Suisse, en absence d’une législation univoque qui imposerait l’intégration scolaire des enfants avec une déficience, l’organisation et les pratiques de l’enseignement spécialisé ou de l’éducation spéciale sont encore extrêmement diverses selon les régions ; des nombreuses tentatives d’éducation scolaire intégrée (concernant surtout les élèves avec des déficiences sensorielles ou motrices) et des mesures “ les moins restrictives que possibles ” coexistent avec des placements traditionnels, donc ségrégatifs.
R. J.-L Korpès, Handicap mental. Notes d’histoire, Cahiers de l’EESP, Lausanne, 1991. — M. Jecker-Parvex, Retard mental. Contribution pour un lexique commenté, Éditions SZH, Lucerne, 1996. — H.-J. Sticker, M. Vial, C. Barral, Fragments pour une histoire : notions et acteurs, Alter, Fondation de France, 1996.
Voir : École spéciale — Écoles supérieures de travail social et hautes écoles spécialisées (Conférence suisse) (SASSA) — Éducateur spécialisé — Éducation/Socialisation — Hautes Écoles Spécialisées (HES)
Martine Ruchat
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Éducation/Socialisation
Cette rubrique ne propose pas un aperçu de la sociologie de l’éducation, mais se limite à la définition du phénomène. Dans la société moderne, l’immense poussée de la scolarisation encourage à se représenter la socialisation comme un rapport institutionnel entre des moyens (absorption passive ou acquisition active) et des fins (intégration conforme ou adaptation critique). Dans cette logique, l’intégration des nouvelles générations apparaît comme le produit d’un ensemble de dispositifs institutionnels implicites ou explicites aboutissant à l’intériorisation de connaissances, valeurs et schèmes d’action. D’Ignace de Loyola à Durkheim jusqu’à Bourdieu, le même canevas s’impose. Dans cette perspective instrumentale propre à toutes les bureaucraties, même l’adaptation à l’histoire devient un sous-produit du pédagogue qui tente d’“ apprendre à apprendre ”, d’“ apprendre à s’adapter ”, d’“ apprendre à transformer ”, d’inculquer des “ habitus transposables ”.
Ce rapport réfléchi et institutionnalisé entre moyens et fins constitue une réalité éducative pesante aujourd’hui. Les sociologues savent tous que l’éducation déborde la scolarisation, mais la plupart ne s’intéressent à l’éducation familiale qu’en qualité d’antichambre préparatoire à l’école, aux succès ou aux échecs scolaires. La socialisation tient-elle dans ce schéma ? Évidemment non. Les psychologues n’en ont cure, car ils réfléchissent l’acquisition des compétences à un niveau plus élevé de généralité. Les psychosociologues font intervenir le contexte social d’apprentissage, mais sans s’en tenir au cadre scolaire. En revanche les sociologues subissent inévitablement la fascination d’institutions scolaires massives, obligatoires, incontournables, qui rythment la socialisation moderne. Et ils ont tendance à faire leur les axiomes du ministre, du directeur d’école et du pédagogue, qui mettent en rapport des ressources et des profils de compétences.
Les anthropologues, dans leur effort de décentration et d’universalisation, échappent plus aisément à la fascination scolaire. Dans les microsociétés orales, la préparation à la vie adulte dans des institutions spécialisées n’existe pas. Les nouvelles générations se voient progressivement insérées dans les diverses catégories (d’hommes et de femmes, de jeunes et de vieux…). L’enfant vit sa vie d’enfant, ce qui l’entraîne vers sa vie d’adolescent, etc. Il est happé par les divisions et les distinctions, porté par la dynamique des relations inter- et intracatégorielles à laquelle il participe. Enfant, adolescent, adulte, vieillard et finalement ancêtre, il est chaque fois acteur dans le jeu des oppositions et des différences catégorielles.
Cette dynamique d’insertion ne ressemble pas à une mécanique bien huilée, mais plutôt à un processus approximatif avec ses ratés. Pour principalement deux raisons : l’hétérogénéité et la mouvance des catégories sociales. Une catégorie ne consiste pas en la réunion d’éléments identiques. Elle ressemble plutôt à un noyau central autour duquel gravitent des modèles, des définitions et des interprétations centrifuges, jusqu’aux limites de l’exclusion, jusqu’à des catégories alternatives. Il n’existe pas un modèle de jeune fille, de femme, de mère et de grand-mère, mais un ensemble de modèles qui tournent autour d’un centre de gravité et qui en même temps offrent un espace aux nouvelles arrivantes. Même les petites sociétés de quelques centaines de personnes connaissent cette définition catégorielle en accordéon, avec des marginaux sur les franges et un noyau plus compact au centre.
Par ailleurs, les rapports entre catégories sont en mouvance perpétuelle. Tel clan monte en puissance, en s’inventant une mythologie adéquate ; tel autre s’essouffle faute de rejetons. Tel conflit suscite des tensions, resserre les liens intracatégoriels et élargit le fossé intercatégoriel. Les nouvelles générations vivent à leur manière ces turbulences, leur déploiement et leur résorption. Invitées à épouser (ou à repousser) ces dynamiques, avec leurs déplacements de définition catégorielle, elles les investissent avec plus ou moins de distance et de proximité.
Suite à ces remarques, nous pouvons hasarder une première définition approximative : la socialisation consiste en un processus actif d’insertion dans une dynamique intra- et intercatégorielle, où les catégories sont toujours plus ou moins hétérogènes.
L’avantage principal d’une telle définition est de faire coller le processus de socialisation à la dynamique évolutive des catégories. Par exemple, les conflits sociaux et la guerre mobilisent d’autres modèles d’hommes et de femmes qu’en temps de paix. Ce genre de situations ouvrent à la socialisation des espaces inhabituels, investis de façon plus ou moins réversible. La socialisation épouse les déchirures, les failles, les compromis, les équilibres précaires, les virtualités et les espoirs. Des conflits peuvent ainsi s’accumuler et exploser (ou se résorber) à l’initiative des jeunes générations qui accentuent (ou prennent de la distance envers) une tendance à l’œuvre dans les relations intra- et intergroupes.
Cette définition évite d’introduire une distinction de nature entre la socialisation des adultes et celle des enfants. Les uns comme les autres vivent un processus permanent d’insertion — et aussi de retrait ou de marginalisation —, dont le rythme se ralentit avec l’âge tout en connaissant des accélérations lors de mutations sociales, culturelles, religieuses ou professionnelles. Elle s’abstient aussi de faire de l’intériorisation des contenus symboliques le centre de référence quasi exclusif du processus de socialisation. Elle rompt par conséquent avec le schéma typiquement scolaire de sélection préalable des contenus à inculquer : si l’école peut formellement circonscrire ses contenus symboliques, elle ne peut évidemment sélectionner le contexte socio-historique qui leur conférera leur sens, les mettra en évidence ou les dévaluera. L’école, elle aussi, s’insère dans une dynamique plus large dont adultes et enfants sont directement partie prenante. Cette définition s’applique en outre à l’intérieur de l’école elle-même, en la considérant comme une mini société avec ses subdivisions interdépendantes, ses tensions et conflits inter- et intracatégoriels, entre élèves, entre professeurs, etc.
Cette première définition a cependant le défaut de ne rien contenir de spécifique ni par rapport aux nouvelles générations ni par rapport à l’apprentissage. L’enfant naît dans une dépendance à l’égard des adultes dont il ne s’affranchit que lentement. Dans la plupart des sociétés, il ne sera vraiment adulte que lorsqu’il aura lui-même constitué sa famille, avec un entre-deux qui commence à la puberté et finit au mariage (aujourd’hui : ressources autonomes et toit propre). Au cours de cette période, il s’affranchit de cette asymétrie de subsistance en s’inscrivant dans une dynamique intra- et intercatégorielle — scolaire, culturelle, professionnelle, relationnelle — qui le portera en principe à bon port.
L’insertion suscite et exige l’apprentissage. D’emblée, la définition adoptée fait appel à l’acteur, à ses ressources et à son point de vue pour fonctionner dans une dynamique mouvante voire effervescente : celle de ses rapports aux adultes (avec des réaménagements incessants), aux autres enfants, aux catégories de genres, etc. C’est trop peu de dire que l’enfant apprend son “ métier d’enfant ” ou son “ métier d’élève ” : le pluriel s’impose. Il n’a pas vraiment le temps de devenir “ ethnomembre ” ou d’acquérir un “ habitus ” de la garderie, de la maternelle, d’une famille d’abord sans, puis avec frère et sœur, avec ou sans père, etc. Dans notre perspective, les acquisitions de compétences particulières (langage, cognition, affectivité, habiletés relationnelles, etc.) ne doivent pas être réfléchies en elles-mêmes mais mises en rapport avec l’effort d’insertion dans des dynamiques relationnelles, toujours marquées par des divisions catégorielles.
L’enfant vit aujourd’hui dans un maquis contextuel assez complexe, où prolifèrent les modèles contradictoires de la petite fille, du petit garçon, de l’écolier… Les noyaux catégoriels sont soumis à d’amples tiraillements centrifuges auxquels l’enfant lui-même participe et qu’il relaie auprès de ses pairs.
On comprend que ni la métaphore éducative du remplissage ni celle de l’arrosage ne sont ici recevables. Seule celle du cheminement est acceptable, à condition de ne pas l’envisager comme un parcours stable dans un univers statique. L’image de l’initiation est trop faible elle aussi, car enfermée dans le stéréotype des épreuves rituelles. L’initiation se confond aujourd’hui avec la participation à la vie même des groupes et des catégories et à leurs dissensions identitaires.
Que devient sous cet angle la question de l’intériorisation des valeurs et des schèmes d’action ? L’enfant (et aussi l’adulte) se trouvent placés devant la nécessité non seulement d’apprendre, mais aussi de désapprendre, d’abandonner voire d’oublier des fonctionnements, des savoirs et des valeurs. Plus profondément, en même temps qu’il apprend à se conformer ou à adhérer à des valeurs, l’enfant (et aussi l’adulte) apprend aussi à prendre ses distances, intérieures ou manifestes, à leur égard, à jouer avec leurs applications et leurs contournements. Certaines adhésions sont purement formelles et de surface, d’autres profondes. Et l’enfant, comme l’adulte, développe des compétences pour cacher et déguiser ses tiédeurs, ses excès d’attachement et ses transgressions.
Cette distance est nécessaire à l’existence d’un espace de jeu entre les acteurs, sinon chacun serait prévisible à partir de ses schèmes intériorisés et notre vie sociale ressemblerait un peu à une fourmilière. Nous sommes maintenant en mesure de compléter notre proposition de définition :
La socialisation consiste en un processus actif d’insertion dans une dynamique intra- et intercatégorielle, où les catégories sont toujours plus ou moins hétérogènes.
Au cours de cette insertion active, les nouveaux acteurs, transitoirement ou durablement, avec des adhésions superficielles ou profondes, s’initient et participent aux pratiques et aux représentations centrales et/ou périphériques des diverses catégories en interaction.
Dynamique d’insertion et hétérogénéité catégorielle assurent une socialisation qui colle à l’évolution des catégories et où les nouvelles générations investissent systématiquement les ouvertures historiques en faisant de la socialisation l’occasion d’une production sociale.
Cette définition évite de placer au cœur de la définition de la socialisation les logiques de l’intérêt ou de l’intériorisation pour leur substituer une logique d’adaptation/participation pragmatique à une dynamique entre des unités catégorielles toujours hétérogènes et interdépendantes.
R. A. Petitat, Production de l’école, production de la société, Droz, Genève, 1982. — A. Van Haecht, L’école à l’épreuve de la sociologie, De Boeck, Bruxelles, 1990.
Voir : Cohésion sociale — Éducateur spécialisé — Éducation (Politique de l’) — Éducation spécialisée
André Petitat
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Effet pervers
Il désigne un résultat non désiré, contraire à l’objectif de l’action entreprise (exemples : une politique de lutte contre le chômage des jeunes qui se traduit par une hausse du chômage des travailleurs plus âgés ; la mise en place d’une franchise dans l’assurance-maladie qui retient nombre de personnes de recourir à des examens préventifs).
Voir : Ciblée (Politique) — Contre-prestations
jpf
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Égalité (Bureau de l’)
Depuis 1981, le principe de l'égalité entre femmes et hommes est inscrit dans la Constitution fédérale (art. 4, al. 2). Les bureaux de l'égalité ont pour tâche de contribuer à ce que cette notion juridique se réalise sur le terrain et ne reste pas à l'état de vœu pieux.
23 bureaux de l'égalité ont été créés en Suisse, tant au niveau fédéral, cantonal que communal. Leur domaine d'activité est vaste et complexe. Leur tâche peut cependant être résumé de la manière suivante :
— La promotion de l'égalité dans tous les domaines.
— L'élimination de toute forme de discrimination, directe ou indirecte.
Pour réaliser leur mandat, les bureaux de l'égalité s'engagent de manière ciblée dans le plus de lieux possible : dans l'administration, au parlement, avec les partenaires sociaux, les institutions, les organisations féminines et avec les particuliers.
Leur devoir d'information passe par l'organisation de campagnes et de colloques sur les questions féminines et d'égalité. Tout le monde peut faire appel à eux pour leur demander conseils ou consulter les nombreuses publications qu'ils mettent à disposition dans leurs centres de documentation.
Les services ou bureaux de l'égalité forment ensemble le Conférence suisse des délégués à l'égalité. Cette conférence planifie et réalise des campagnes et des projets communs.
Certains bureaux ont un mandat limité dans le temps. La fragilité occasionnée par l'incertitude quant au maintien de ces bureaux compromet, en partie, la réalisation du principe de l'égalité.
Informations : Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes, Eigerplatz 5, 3003 Berne, Tél. 031/322 68 43, ebg@ebg.admin.ch.
Sites Internet : www.equality.ch — www.equality-office.ch
Voir : Égalité de traitement entre femmes et hommes — Égalité entre hommes et femmes — Femmes (Émancipation des)
Sophie Barras Duc
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Égalité de traitement entre femmes et hommes
L’article 4 de la Constitution fédérale consacre le principe général de l’égalité de traitement, qui trouve une application importante dans le domaine de la sécurité sociale, notamment. Depuis le 14 juin 1981, son deuxième alinéa contient une disposition spécifique, relative à l’égalité de traitement dans les domaines de la famille, de l’instruction et du travail. La disposition constitutionnelle reconnaît le droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale. Le 1er juillet 1996 est entrée en vigueur la Loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes, votée par le Parlement fédéral le 24 mars 1995. Cette Loi fédérale, qui est fondée sur l’interdiction de discrimination en raison du sexe, concerne l’ensemble des rapports de travail (privés et publics) aux différents niveaux (fédéral, cantonal, communal). Le Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes (BFE) est investi de compétences spécifiques en la matière.
R. C. Jobin, Entre les activités professionnelle et domestique : la discrimination sexuelle, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1995.
Sites Internet : www.equality.ch — www.equality-office.ch
Voir : Égalité (Bureau de l’) — Inégalités sociales — Travail féminin
Béatrice Despland
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Égalité de traitement entre nationaux et non-nationaux
Les législations nationales de sécurité sociale peuvent prévoir des règles plus sévères pour les étrangers ; on peut les qualifier de discriminations directes ou formelles. Parfois, des normes identiques pour tous sont plus difficiles à observer par les non-nationaux (p. ex. la famille doit résider dans le même État que le travailleur) ; il peut y avoir discrimination indirecte. Cela heurte la reconnaissance à chaque être humain d’un droit à la sécurité sociale. Ainsi, le premier principe du droit de la coordination porte sur l’égalité de traitement entre nationaux et non-nationaux ; il est à géométrie variable : il peut être absolu, souffrir d’exceptions (p. ex. à l’égard de prestations non contributives) ou n’être que partiel ; il peut être lié à des conditions de réciprocité. L’égalité de traitement peut être prévue : par un texte constitutif (cf. art. 12 et 39 TCE), par un règlement communautaire (cf. art. 7 du règlement No 1612/68 relatif à la libre circulation ; art. 3 du Règlement No 1408/71 relatif à la coordination), par une convention internationale multilatérale (cf. art. 3 de la Convention OIT No 118 concernant l’égalité de traitement des nationaux et des non-nationaux en matière de sécurité sociale), par une convention internationale bilatérale (cf. art. 4 de la Convention entre la Suisse et la République tchèque du 10 juin 1996). En amont, l’égalité de traitement peut bien sûr être décidée unilatéralement par un État et traduite dans sa législation.
R. G. Perrin, Histoire du droit international de la sécurité sociale, Association pour l’étude de l’Histoire de la Sécurité Sociale, Paris, 1993. – Bureau international du Travail, La sécurité sociale des travailleurs migrants, BIT, Genève, 1974.
Voir : Coordination  Immigration
Pierre-Yves Greber
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Égalité des chances àð Inégalité des chances
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Égalité entre hommes et femmes
La notion d'égalité entre hommes et femmes ne constitue pas un concept clairement défini, ni ne fait appel à une théorie ou à un modèle qui ferait l'unanimité. Elle présente un caractère tronqué et flou, qui recouvre (potentiellement mais non explicitement) plusieurs autres notions d'usage dans le cadre des réflexions sur les rapports sociaux de sexe. L'utilisation de cette expression s'avère donc problématique et simplificatrice si elle n'est pas accompagnée de précisions permettant de situer le discours. Pour illustration, la Loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes (24.3.1995) consacre “ l'interdiction de discrimination à raison du sexe dans les rapports de travail ”.
Cependant, on peut affirmer que la notion d'égalité entre femmes et hommes, dans son sens le plus courant, est utilisée comme raccourci pour qualifier une politique de non discrimination entre les sexes, et recouvre principalement deux concepts : celui de l'égalité des droits et des chances et celui de l'égalité de traitement des individus, quel que soit leur sexe.
En Suisse, le principe d'égalité entre les sexes, accepté par le peuple en 1981, consacre d'un point de vue juridique l'égalité des droits et des chances des femmes et des hommes dans les domaines de la famille, de la formation et de la vie professionnelle, particulièrement. Il consacre également l'égalité de traitement entre femmes et hommes, d'un point de vue formel (par exemple : un salaire égal pour un travail de valeur égale). Il est cependant nécessaire d'insister sur l'écart existant entre cette égalité formelle et l'égalité de fait, c'est-à-dire la réalisation effective de ces droits. Cette dernière est malaisée à mesurer du fait des différences importantes que l'on peut observer entre les sexes dans tous les domaines de l'existence, et sachant que toute différence n'implique pas nécessairement une inégalité ou une discrimination.
D'un point de vue sociologique, la concrétisation de l'égalité de traitement entre femmes et hommes nécessite l'abolition ou l'abandon de la prédétermination des rôles et des fonctions des personnes, basée sur leur sexe. L'objectif poursuivi, énoncé ainsi, rend mieux compte de la complexité de la problématique : les différences sexuelles objectives (biologiques) et subjectives (ce qui est donné comme relevant du tempérament dit féminin, par exemple) servent de légitimation non seulement aux différences de position des femmes et des hommes, mais aussi aux inégalités en découlant : ces dernières sont ainsi le résultat d'une construction sociale des inégalités fondées sur les différences entre les sexes, avec de fortes représentations sur le plan des mentalités, qui expliquent d'ailleurs l'intériorisation des différences de position et des inégalités entre femmes et hommes.
R. Office fédéral de la statistique, Vers l'égalité? Aperçu statistique de la situation des femmes et des hommes en Suisse, OFS, Berne, 2000 (mises à jour régulières). — T.-H. Ballmer-Cao, Changement social et rapports entre hommes et femmes. La question de l’égalité en Suisse, Ed. Payot, Lausanne, 2000. — C. Jobin, Entre les activités professionnelle et domestique : la discrimination sexuelle, Éditions d'En Bas, Lausanne, 1995.
Voir : Égalité (Bureau de l )  Égalité de traitement entre femmes et hommes  Femmes (Émancipation des)  Inégalités sociales
Caroline Regamey
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Eglise àð Enseignement social chrétien
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Emploi (Politique de l’)
L’emploi, au sens individuel du terme, est l’échange d’un temps de travail contre un revenu. Dans un sens général, l’emploi désigne la somme du travail humain dans un système économique donné.
On appelle “ politique de l’emploi ” les mesures déployées par l’État pour réglementer l’emploi des personnes ou pour stimuler le marché de l’offre et de la demande d’emploi dans un pays.
En ce qui concerne la réglementation, l’évolution de ces dernières années est marquée par le démantèlement progressif de la protection de l’emploi au profit (!) d’une conception néo-libérale (y compris dans les régimes sociaux-démocrates). Elle implique notamment un désengagement de l’État de la gestion de l’économie.
Comparé à celui des autres pays, le droit suisse du travail est souple et flexible, par exemple en ce qui concerne la protection contre les licenciements. La nouvelle loi sur le travail du 20 mars 1998 illustre bien la volonté de flexibilisation et de déréglementation des autorités. Selon le Professeur Pascal Mahon, “ on ne voit donc pas très bien ce qu’il pourrait encore bien y avoir à flexibiliser et à déréglementer ”.
En ce qui concerne la stimulation du marché de l’emploi, surtout effective en période de crise, on peut constater différentes tendances.
D’une part, des mesures structurelles, comme garantir le droit au travail, n’ont jamais pu s’imposer en Suisse : proposées par voie d’initiative trois fois devant le peuple (en 1894, en 1946 et en 1947), ce type de mesures a toujours été largement refusé et la dernière tentative de lancer une initiative à ce propos (initiative ARE, Association pour une répartition équitable du travail) a échoué en 1998.
D’autre part, différentes mesures conjoncturelles, visant à relancer l’économie, ont été prises au cours du temps. Leur but est de favoriser l’embauche en finançant des investissements, en général dans des travaux publics. Le dernier programme d’envergure en date est le programme de mesures spécifiques de politique conjoncturelle proposé par le Conseil fédéral le 26 mars 1997, dont un des buts explicites était d’assurer approximativement 24 000 emplois supplémentaires pendant une année. Ces mesures ont pour visée de relancer l’emploi en agissant de manière ponctuelle sur l’économie : sous le prétexte d’avoir un effet anticyclique (jamais clairement démontré), elles permettent à des entreprises privées de se faire subventionner par l’État.
La politique de l’emploi ces dernières années permet d’institutionnaliser la précarisation de l’emploi, aujourd’hui de plus en plus perceptible, en Suisse comme dans d’autres pays.
R. Y. Flückiger et al., La précarité, une réalité genevoise, Hopice général, Genève, 2001. — J.-M. Dolivo, B. Rosende, “ Ruptures de la solidarité dans le travail salari頔, in : Aspects de la sécurité sociale, bulletin FEAS, 2000, pp. 27-35. — P. Mahon, “ L’évolution récente du droit du travail en Suisse - une appréciation critique ”, in : Aspects de la sécurité sociale, bulletin FEAS, pp. 9-26. — S. Paugam, Le salarié de la précarité. Les nouvelles formes de l’intégration professionnelle, PUF, Paris, 2000. — J.-P. Tabin, “ Chômeur ancien, chômeur moderne : persistance des représentations ? Réflexions à partir de l’évolution des lois suisses en la matière et de l’exemple de la mise en œuvre de la LACI dans le canton de Vaud ”, in : Revue suisse de sociologie, 1998, pp. 209-236.
Voir : Déréglementation — Flexibilité du travail — Licenciement (Protection contre le)
Jean-Pierre Tabin
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Empowerment
Ensemble d'interventions et d'actions multisectorielles et interdisciplinaires de type culturelle et technique qui visent, par un renforcement des connaissances et des compétences individuelles ainsi que par la mise en œuvre de nouvelles ressources, la promotion de l'autonomie décisionnelle des individus quant à une meilleure “ maîtrise de soi ” et de leur environnement dans les domaines d'intervention choisis.
Une politique d'empowerment implique la promotion, la mise en œuvre et le soutien de programmes et d'actions d'information, de communication, d'éducation, de marketing social, de changements institutionnels et législatifs et d'évaluation à plusieurs niveaux (national, régional, local, de groupe, d'association, etc.).
Le succès d'une telle stratégie au niveau de la société civile implique le consensus politique, social et éthique, la collaboration intersectorielle et multidisciplinaire, la transparence sur les objectifs poursuivis, la “ crédibilit頔 et l'absence de “ conflits d'intérêts ” de la part des promoteurs et des financeurs du ou des programmes ainsi que le soutien des media (media advocacy).
Voir : Information du patient  Information sociale  Marketing social
Gianfranco Domenighetti
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Encycliques àð Enseignement social chrétien
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Enfance (Pédagogie de la petite)
Dès la fin des années 70, l’évolution quantitative et qualitative de la demande d’accueil d’enfants en âge préscolaire en crèche, garderie et jardin d’enfants, est allée de pair avec l’élaboration de pédagogies spécifiques à ces institutions. Moins centrées qu’auparavant sur la pensée de grandes figures de pédagogues, ces pédagogies font appel à l’interdépendance des divers partenaires de l’accueil extra-familial (parents, enfant, équipe éducative, responsables locaux) pour créer les conditions de mise en place d’activités ludiques, créatives, éducatives et de vie quotidienne dans les institutions. De nouvelles attentes de partage des responsabilités éducatives des parents et la qualification accrue du personnel éducatif contribuent à transformer la pédagogie de la petite enfance : c’est le passage de l’aménagement de la “ garde ” de l’enfant, à connotation assistancielle, à la construction de complémentarités éducatives, consacrée hâtivement par le mot “ socialisation ” qui fonde une culture pédagogique propre à ces lieux d’accueil.
R. D. Verba, Le métier d’éducateur de jeunes enfants, Syros, Paris, 1993. — P. Richard-De Paolis, P.-Y. Troutot e. a., Petite enfance en Suisse romande, Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Voir : Crèche et garderie — Éducateur de la petite Enfance — Enfance (Politique de l’) — Instruction publique — Protection de l’enfant — Socialisation
Paola Richard-De-Paolis
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Enfance (Politique de l’)
L’enfance correspond, selon la Convention internationale des droits de l’enfant (ONU 1990), à la période de la vie humaine qui va de la naissance à la majorité civile. Catégorie sociale d’âge, elle regroupe l’ensemble des 0-18 ans, soit, pour la Suisse, plus de 20 % de la population résidante. On distingue couramment : a) la petite enfance, enfants de 0-5 ans non encore soumis à l’obligation scolaire ; b) l’enfance proprement dite, caractérisée par le temps de l’école ; c) l’adolescence, incluse dans la notion de jeunesse.
L’enfance se caractérise par un statut (minorité juridique, filiation privée et dépendance de l’autorité parentale), un mouvement (processus de développement physique, cognitif, affectif et social conduisant à l’autonomie de l’âge adulte), une production (l’action éducative au sens large) et un enjeu de société (reproduction du capital humain, formation des nouvelles générations et des citoyens de demain).
Par politique de l’enfance on peut comprendre l’ensemble des mesures prises par les pouvoirs publics et les autres acteurs de la scène politique pour aménager les conditions matérielles et institutionnelles de la prise en charge éducative. Schématiquement, on peut distinguer trois grandes orientations dans la gestion publique de l’enfance, qui portent sur les rapports entre la famille, l’enfant et l’État :
1. Politique de protection de l’enfant : La prise en charge matérielle et éducative de l’enfant est d’abord une affaire de famille, déléguée aux parents, sur la base de la filiation privée Lorsque la famille naturelle n’est pas ou plus en mesure de remplir son rôle, ou manque à ses devoirs, l’État doit se substituer à elle au nom de la protection des mineurs (assistance éducative, prévention des mauvais traitements, mesures de placement, etc).
2. Politique de soutien fonctionnel à la famille : L’importance sociale de la fonction éducative de la famille étant reconnue, l’État est amené à soutenir les parents dans leur tâche par des mesures d’appui appropriées (aides financières directes ou indirectes, services socio-éducatifs, etc.). Plutôt que de se substituer à la famille, la collectivité agit sur les conditions sociales externes afin de favoriser l’exercice de la parentalité.
3. Politique des droits de l’enfant : L’État se reconnaît des responsabilités directes vis-à-vis des enfants, futurs citoyens et sujets de droits sociaux (Convention internationale des droits de l’enfant). Dans cette orientation, l’enfant n’a plus seulement des droits dérivés, mais doit pouvoir bénéficier progressivement de droits directs (être entendu lors d’un divorce, etc.) et de mesures sociales spécifiques (allocations, places en crèche ou en école enfantine, services de santé, espaces de jeu dans la ville, centres de loisirs, etc).
R. F. Dekeuwer-Défossez, Les droits de l’enfant, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1991. — L. Fox Harding, Perspectives in Child Care Policy, Longman, London, 1991. — S. Pavillard, M. Gottraux (Éds), Politiques de la petite enfance, Cahiers de l’EESP, Lausanne, 1990.
Voir : Éducation/Socialisation — Famille — Jeunesse (Politique de la) — Protection de l’enfant
Pierre-Yves Troutot
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Enfant à charge
Dans le cadre du calcul de l’impôt sur le revenu, les enfants à charge peuvent être pris en compte suivant le cas, soit pour la détermination du nombre de parts dans le système du quotient familial (exemple : canton de Vaud), soit pour bénéficier d’un abattement forfaitaire sur le revenu net imposable. En principe, il s’agit d’enfants légitimes, naturels, adoptifs ou recueillis, même s’ils disposent de revenus. Les enfants à charge sont pris en considération dans de nombreux domaines de la sécurité sociale.
Voir : Adoption — Autorité parentale — Obligation d’entretien — Quotient familial
jpf
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Enquête sociale
L’enquête sociale désigne une forme systématique de recueil et d’analyse des données empiriques concernant essentiellement le mode de vie des populations les plus pauvres. On admet aujourd’hui que le développement des politiques sociales a considérablement été influencé par les résultats des enquêtes sociales (social survey dans la tradition anglo-saxonne). La tradition prend naissance en France et en Grande-Bretagne au début du XIXe. L’origine est politique et administrative. Les gouvernements des grands pays en voie d’industrialisation rapide comme la France et la Grande-Bretagne sont alarmés par le développement de la pauvreté massive qui accompagne le développement économique. Les premières grandes enquêtes empiriques sont donc menées par des administrateurs supérieurs : préfets, inspecteurs des fabriques, de santé, des écoles. Les plus célèbres sont en France celle de Louis, baron de Villermé, État physique et moral des ouvriers employés dans les manufactures (1840), et en Grande-Bretagne, celle de Chadwick consacrée à la condition sanitaire de la classe ouvrière (Sanitary report, 1842). L’observation des classes inférieures et de leurs problèmes s’autonomise peu à peu — mais toujours partiellement — vis-à-vis des demandes publiques. Dans son œuvre majeure, Les ouvriers européens (1855), Frédérique Le Play donne l’exposé le plus complet de sa méthode. Le principe premier est de toujours partir des faits. L’observation doit être directe, personnelle et systématique. Ces principes sont toujours pour l’essentiel ceux des enquêtes sociales. C’est cependant en Angleterre, à la fin du siècle dernier, que l’enquête sociale trouve son épanouissement avec les célèbres études de Charles Booth, Life and labor of the people in London (1902-1903, 17 vol), et de Rowntree, Poverty, a study of town life (1902).
Avec la philosophie des lumières et la théorie sociale du XIXe siècle, les enquêtes sociales constituent une des racines de la sociologie moderne. La tradition de l’enquête sociale se poursuit aujourd’hui en travail social où elle constitue un des fondements essentiels de l’action.
R. G. Leclerc, L’observation de l’homme. Une histoire des enquêtes sociales, Seuil, Paris, 1979. — P. Wagner e. a., Social sciences and modern states, Cambridge University Press, Cambridge, 1991.
Voir : Planification sociale — Prospective — Recherche sociale
François-Xavier Merrien
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Enquête sur la population active (ESPA)
L’enquête sur la population active est une enquête annuelle conduite par l’Office fédéral de la statistique depuis 1991 auprès d’un échantillon de ménages dans lesquels sont interrogés des personnes âgées de 15 ans et plus. Le questionnaire de l’enquête est construit sur le modèle des enquêtes sur les forces de travail qui a été élaboré par le BIT. L’objectif premier de l’enquête est de ventiler la population interrogée en population active occupée (ou en emploi), en personnes sans emploi (chômage au sens BIT) et en personnes inactives. A cet objectif s’ajoutent des questionnements sur les professions exercées, sur la dynamique des branches d’activité ainsi que sur la mobilité professionnelle. L’échantillon étant renouvelé d’un cinquième tous les ans, l’enquête offre un suivi longitudinal des personnes sur une période de cinq années. Le modèle d’enquête du BIT ayant été adopté par de nombreux pays occidentaux ainsi que par Eurostat, l’ESPA est la seule base de donnée qui puisse permettre des comparaisons internationales fiables.
R. L’enquête suisse sur la population active, OFS, Berne-Neuchâtel, publication annuelle.
Voir : Activité économique (au sens du BIT) — Chômage (au sens du BIT) — Office fédéral de la statistique (OFS) — Population active — Taux d’activité, d’activité occupée et de chômage (au sens du BIT).
Jean-Marie Le Goff
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Enseignement social chrétien
Si l’imposant corpus de l’enseignement social des Papes contemporains n’a pas trouvé sa place dans la plupart des ouvrages d’histoire des idées politiques, économiques ou sociales, ce n’est pas toujours à la suite d’une exclusion de principe, mais le plus souvent en raison du genre littéraire dont il relève. Il s’agit au premier abord de théologie, de philosophie, d’exhortation pastorale et plus généralement d’éthique sociale destinée plus directement aux catholiques mais aussi aux “ hommes de bonne volont頔 qu’ils soient ou non croyants. Cet ensemble sui generis n’en constitue pas moins une des œuvres maîtresses de notre temps. Beaucoup de sujets sont abordés dans ces très nombreux documents dont l’élément commun est d’avoir pour auteur l’Évêque de Rome. En général, c’est à Léon XIII que l’on remonte en citant quelques-unes de ses encycliques riches en principes dont ses successeurs ont tiré les conséquences en les adaptant aux circonstances nouvelles.
Cette continuité d’inspiration n’est pas seulement due à l’autorité doctrinale de ceux qui énoncent la pensée sociale de l’Église, elle se rattache à un projet, à une idée “ architectonique ” qui traverse et inspire ces textes si variés. On pourrait définir ce projet comme un idéal historique chrétien post-médiéval, il s’agit d’une inspiration vitale par le christianisme de l’ordre temporel dont l’autonomie légitime est respectée. Le rapport de cet idéal historique avec l’idée de chrétienté traditionnelle est analogique, c’est-à-dire gardant certains éléments typiques communs, la conception de la personne par exemple. À la suite de l’effondrement d’un monde profondément marqué culturellement et institutionnellement par le christianisme, les Papes ont progressivement tiré les leçons des “ choses nouvelles ” d’abord avec réserve, puis avec une sympathie croissante. Ils n’ont pas perdu de vue l’universalité du christianisme et ont cru que son génie était d’apporter une dimension propre aux diverses civilisations en respectant leur nature profonde. Par ailleurs, le monde moderne, d’abord hostile à l’Église, offre aujourd’hui une psychologie beaucoup plus complexe à son égard, en constatant le caractère essentiellement spirituel de son action.
La pensée sociale de l’Église trouve ainsi sa cohérence immédiate dans un idéal historique chrétien et ce dernier n’est intelligible que d’un point de vue analogique. Telle est la clé qui s’offre pour aborder un corpus dont l’élaboration se poursuit maintenant depuis un siècle. Loin de reléguer aux archives les textes plus anciens, les documents récents les éclairent et sont éclairés par eux. L’évolution est incontestable, mais la continuité ne l’est pas moins, et c’est la connaissance de l’ensemble du corpus qui permet de saisir son orientation profonde. La lecture globale que l’on propose ici fait référence au projet architectonique, déjà évoqué, qui vise non pas à reconstituer une chrétienté, mais plutôt à christianiser un monde nouveau en respectant sa nature (nouvelle) et en ne puisant dans les expériences passées qu’en vue d’applications analogiques.
En réalité, l’Église n’a aucun modèle de vie économique et sociale à proposer, pas plus que de régimes politiques à défendre. Elle n’a pas été fondée pour se substituer à César, mais pour étendre le Royaume de Dieu. Elle cherche à promouvoir les conditions favorables à cette tâche spirituelle que sont la paix et la liberté. L’histoire montre malheureusement que la guerre et l’asservissement sont plus habituels que la paix et la liberté, en raison des injustices qui ne cessent de se produire et engendrent des conflits. Depuis des millénaires, des utopistes proposent la solution qui résoudrait, selon eux, toutes les difficultés, solution qui est rarement la même, y compris chez les théoriciens du communisme, qui, après avoir préconisé la suppression de la propriété privée, ne s’entendent pas sur l’organisation de la société collective et notamment sur le statut de la famille.
L’Église, dans son enseignement social, ne préconise pas une solution de cet ordre, mais propose un humanisme qui, en confortant les personnes, doit rejaillir sur les sociétés. Lorsque des précisions plus grandes sont fournies à propos de l’économie ou de la politique, ce n’est pas d’un point de vue technique, mais plutôt pour fournir un support concret à des normes d’essence éthique. Qu’il suffise d’évoquer ici la participation ou la propriété privée dont les formes, extrêmement variées, ne font pas l’objet d’une sélection exclusive dans l’enseignement social des Papes, même si telle ou telle expérience ou coutume est citée. Foncièrement théologique, l’enseignement social des Papes fait aussi appel à des considérations politiques, économiques et sociales si nombreuses qu’un véritable genre littéraire en est résulté dont l’unité est assurée par l’intention pratique, savoir la réalisation de l’idéal historique chrétien s’appliquant selon le génie du temps et du lieu. Avec la mondialisation qui n’a cessé de progresser dans les faits et les mentalités, surtout depuis trente ans, cet idéal d’abord posé à partir d’une problématique pratique très européenne, a pris une dimension beaucoup plus large et résolument internationale. Ceci ne veut pas dire que le contenu social du message chrétien n’ait pas eu jusque-là une vocation universelle, mais plutôt que ses applications pratiques se référaient à un contexte plus spécialement européen.
Incontestablement, la création de l’ONU et la déclaration universelle des droits de l’homme (1948) ont été des facteurs importants dans l’élargissement pratique de l’enseignement social de l’Église, et l’insistance sur la loi naturelle (Pie XII) a traduit cette volonté de proposer un idéal historique dont les bases juridiques ne présupposent pas la foi en la Révélation et qui, loin de s’opposer au christianisme, s’harmonise avec ses exigences fondamentales formulées dans les droits de l’homme.
On peut noter à cet égard que l’existence d’une autorité mondiale (naissante) n’est pas un fait radicalement nouveau pour une Église fondée à une époque où l’Empire romain contrôlait pratiquement le monde connu et imposait un ordre que l’on pouvait considérer alors comme universel. La chrétienté médiévale était plus localisée, du fait de la séparation avec l’Orient et surtout de son opposition avec le monde musulman, cependant il s’agissait d’un authentique univers transnational. L’hégémonie nationaliste actuelle, que les organisations internationales ne parviennent pas à mettre sérieusement en cause, date de la fin de la chrétienté médiévale. Plus profondément, c’est l’unité foncière de l’humanité dont l’Église a conscience qui explique sa sympathie pour les organisations qui rassemblent les nations autour d’objectifs à dimension mondiale. Les visites de Paul VI et Jean Paul II à l’ONU prennent une valeur hautement significative et donnent une idée des nouveaux rapports entre le spirituel et le temporel à la veille de l’an 2000, savoir non plus un rôle tutélaire de l’Église dans le style médiéval, ni un dualisme conflictuel, comme bien souvent depuis le XIXe siècle, mais plutôt une collaboration étroite d’une instance spirituelle “ experte en humanit頔, c’est-à-dire inspiratrice de valeurs culturelles et religieuses, et d’une instance politique au niveau mondial. Les chances d’un tel projet historique sont indissociables d’un œcuménisme actif intéressant l’ensemble des traditions religieuses et spirituelles, œcuménisme qui pourrait bien être lui-même une condition du développement social et économique des plus pauvres et de la paix elle-même.
R. P. de Laubier, Idées sociales, Éditions Universitaires, Fribourg, 1982.
Voir : Charité — Éthique sociale
Patrick de Laubier
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Enseignement spécialisée àð École spéciale
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Entraide
L entraide permet et essaie de compenser, de corriger, grâce à certaines activités, les lacunes et les limites de l action sociale ainsi que les évolutions indésirables de la société. L entraide peut-être individuelle. Elle est alors réalisée par une personne dans sa sphère privée et son entourage. Elle peut être aussi collective lorsque des individus, confrontés au même problème, se réunissent pour surmonter ensemble les conséquences matérielles et psychosociales de celui-ci. Enfin, elle peut s’exercer sur l’initiative de groupes de citoyens ayant les mêmes intérêts en vue d’améliorer les bases écologiques, sociales et culturelles de la vie.
L’entraide est fondée sur le principe de réciprocité (don et contre-don) généralisé et ouvert. Elle est un acte non rémunéré.
R. J.-T. Godbout, L’esprit du don, La Découverte, Paris, 1992. — J. Kellerhals e. a., Figures de l’équité, la construction des normes de justice dans les groupes, PUF, Paris, 1988.
Voir : Action bénévole (Association pour l’étude et la promotion de l’action bénévole) — Aide mutuelle (Self-Help) — Associations — Bénévolat — Solidarité
Claire-Lise Gerber
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Enveloppe budgétaire
En économie libérale, l’offre et la demande se confrontent par l’intermédiaire des prix pour trouver un niveau d’équilibre. Pour certains marchés (comme les soins par exemple) cette fonction du prix est inefficace ; soit parce que la concurrence y est faible, soit parce que la demande évolue indifféremment des prix, soit parce que l’offre détermine la demande. Il faut donc y utiliser un autre moyen de régulation.
L’enveloppe budgétaire est l’un de ces systèmes de maîtrise du marché. Il est appliqué avec quelques nuances par le Québec, la France et le canton de Vaud. Il prévoit trois étapes :
1. Le coût global d’exploitation est négocié entre les payeurs, selon leurs possibilités, et les prestataires, selon leurs demandes. Il dépend de l’évolution des coûts des facteurs, des résultats des exercices précédents et de l’évolution de l’offre et de la demande.
2. Le budget global est réparti prospectivement par unité de service (par établissement par exemple) selon leurs activités, les comptes des années antérieures et leurs facteurs de production. Chacune d’entre elles reçoit une enveloppe qui contient tous les moyens nécessaires pour remplir sa mission.
3. Au terme de l’exercice, une correction permet de tenir compte de l’activité réelle. Un éventuel surplus budgétaire est laissé à l’unité de service, de même qu’elle devra assumer seule une perte d’exploitation.
Les dépenses d’investissement sont proposées par les prestataires et décidées par les payeurs afin de conserver la maîtrise de l’offre.
Ce système de financement prospectif peut provoquer les effets pervers suivants :
— limitation de la qualité des prestations ;
— engagement de personnel bon marché et acquisition de facteurs de production au rabais ;
— développement d’une politique de sélection de la demande (par exemple pour un hôpital refus d’effectuer tel ou tel traitement).
R. C. Kleiber, Questions de soins, Payot, Lausanne, 1992. — P. Gilliand (Éd.), Les défis de la santé. Les coûts et l’assurance, Réalités sociales, Lausanne, 1986. — Société suisse pour la politique de la santé (SGGP), Maîtrise des coûts dans l’économie hospitalière : approches et moyens, Cahiers d’études de la SGGP, Lausanne, 1983.
Voir : Coûts de la santé — Choix budgétaires (Rationalisation des) — Planification sociale
Fabrice Ghelfi
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Épargne forcée
L’épargne forcée résulte d’une action imposée par les pouvoirs publics ou un groupe de personnes, par le biais d’une loi ou de contrats collectifs, afin de mettre en place un système de solidarité et de prévoyance sociale. En Suisse, elle prend la forme d’une épargne obligatoire pour la retraite et est essentiellement constituée des cotisations au 1er pilier (AVS) et au 2e pilier (fonds de prévoyance professionnelle).
Elle se distingue de l’épargne volontaire, qui est le résultat d’une décision libre et qui peut prendre diverses formes (épargne bancaire, de titres, d’assurances sur la vie, etc.) et de l’épargne liée, ou prévoyance liée (3e pilier A), qui comprend les contrats de prévoyance conclus avec un établissement d’assurance ou les conventions de prévoyance souscrites auprès d’une fondation bancaire.
Voir : Assurance (Principe de l )  Assurance-vieillesse et survivants (AVS)  Prévoyance professionnelle  Trois piliers
Marie--Luce Délez
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Épargne liée àð Épargne forcée
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Équité
Ce mot désigne, en éthique ou en droit, la qualité principale de la justice, c est-à-dire son manque d’arbitraire et de discrimination, ainsi que son adéquation au contexte de toute décision. L’équité peut être une qualité spécifique des individus, de procédures ou de lois des institutions sociales et politiques. Sa signification sera chaque fois analogique au contexte dans lequel elle est formulée.
Le terme est entré en philosophie avec Aristote et, par la médiation de Cicéron et de Thomas d’Aquin, l’équité est devenue une catégorie centrale de toute philosophie du droit contemporain. L’équité constitue le critère qui doit guider toute interprétation et application de la loi dans la pratique des juges et des tribunaux. Elle peut et doit entrer en conflit avec la loi écrite lorsqu’une application trop mécanique de cette dernière crée des discriminations ultérieures. En vertu de l’équité, on ne donne pas à tout le monde la même chose, mais à chacun ce qui lui revient.
R. J. Kellerhals, Figures de l’équité, PUF, Paris, 1988. — J. Rawls, Théorie de la justice, Seuil, Paris, 1987. — P. Van Parijs, Qu’est-ce qu’une société juste ?, Seuil, Paris, 1992.
Voir : Éthique — Justice sociale
Alberto Bondolfi
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Équivalence (Principe d’)
Le principe d’équivalence est lié à l’assurance. Dans celle-ci, il y a création d’une communauté de risques et versement de primes. Le calcul des prestations dépend du fait que certains assurés ne seront pas touchés par le risque assuré et du montant des primes. Il y a application du principe d’équivalence si primes et prestations se situent dans un rapport de prestation/contre-prestation : elles sont théoriquement équilibrées. L’équivalence s’oppose au principe de la solidarité qui, dans sa dimension verticale (entre revenus), va au contraire favoriser une partie des personnes protégées, lesquelles recevront davantage de prestations que selon l’équivalence individuelle.
R. E. Kaiser, Les possibilités et les limites d’une solidarité conçue dans le cadre des générations et des revenus, RCC 1971, pp. 217 ss.
Voir : Assurance (Principe de l’) — Assurance sociale (Notion générale) — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Solidarité
Pierre-Yves Greber
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Ergothérapie
L’ergothérapie est une profession de la santé. Elle s'intéresse aux personnes de tous âges qui, à la suite d’une maladie physique ou mentale, d’un accident ou de troubles du développement, souffrent de difficultés dans la réalisation de leurs activités de la vie courante. L'ergothérapie concourt à la restauration des activités de la vie quotidienne des usagers. Elle permet aux personnes qui souffrent d'incapacités définitives de réaménager leurs activités et leur environnement. Elle aide les personnes souffrant d'affections chroniques à maintenir leurs capacités d'agir. Les traitements sont effectués au moyen d'activités de la vie courante ou d'exercices que l'usager réalise en collaboration avec l'ergothérapeute. L'intervention en ergothérapie comprend l'aménagement de l'environnement et la fourniture de moyens auxiliaires que la personne apprend à utiliser. Les traitements impliquent fréquemment la famille de l'usager.
R. Association canadienne des ergothérapeutes, Promouvoir l'occupation, Ottawa, 1997.
Site Internet : www.ergotherapie.ch
Voir : Hautes Écoles Spécialisés (HES)
Sylvie Meyer
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Espace économique européen (Accord sur l’)
Accord d’association conclu entre la Communauté européenne et ses États membres d'une part et des États tiers d'autre part (membres de l’AELE). Destiné à créer un Espace économique européen homogène entre les parties contractantes, cet accord prévoit la reprise de l’acquis communautaire en matière de libre circulation (personnes, services et marchandises), de droit de la concurrence et de certaines politiques d’accompagnement, dont la politique sociale. Après l’adhésion de la Suède, de la Finlande et de l’Autriche à l’Union européenne, l’accord EEE ne comporte plus que le Liechtenstein, l’Islande et la Norvège au nombre d’États non membres de la CE. Le peuple suisse et les cantons l’ont refusé lors des votations du 6 décembre 1992. L'accord EEE est entré en vigueur en 1996.
R. P.-Y. Greber, “ Sécurité sociale ”, in : Schindler, Hertig, Kellenberger, Thürer, Zäch, (Éds), Le droit suisse et le droit communautaire : convergences et divergences, Zurich, 1990, pp. 617 ss. — Message du Conseil fédéral du 18 mai 1992, tiré à part 92 052.
Voir : Circulation des personnes (Libre) — Eurocompatibilité
Bettina Kahil-Wolff
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Espérance de vie
L’espérance de vie à la naissance — ou durée moyenne de vie, ou encore vie moyenne — mesure le nombre moyen d’années de vie d’une “ personne statistique ”, au sein d’une population habitant un territoire délimité, à un “ moment ” donné. Elle est un résumé des conditions de mortalité observées aux divers âges, lors d’une année ou d’une période considérée. Une table de mortalité indique, dans les conditions de la période d’observation et âge par âge, les probabilités de décès et de survie, les nombres de décès et de survivants (pour 100 000 à la racine de la table), l’espérance moyenne de vie. Une espérance de vie peut être calculée à chaque anniversaire selon le sexe. Par exemple, l’espérance de vie à 65 ans représente, pour les individus qui ont atteint cet âge, le nombre moyen d'années qui leur reste à vivre. La comparaison dans le temps dégage l’allongement de la durée de vie entre deux périodes (longévité, à ne pas confondre avec vieillissement de la population). En Suisse, dans les conditions du 1876/80, l'espérance de vie à la naissance est de 40.6 ans pour le sexe masculin, de 43.2 ans pour le sexe féminin ; dans les conditions du 1997/98 (table abrégée), elle est respectivement de 76.5 ans et 82.5 ans. A 65 ans, et relativement à ces deux périodes, elle s'élève de 9.6 ans à 16.7 ans pour les femmes de 9.8 ans à 20.6 ans.
R. Tables de mortalité pour la Suisse 1988-1993, Office fédéral de la statistique, Berne, 1996. — Annuaire statistique de la Suisse.
Voir : Espérance de vie sans incapacité — Mortalité — Vieillissement de la population
Pierre Gilliand
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Espérance de vie sans incapacité
Elle est égale à l’espérance de vie moins le nombre d’années d’incapacité qu’aurait vécu une personne subissant les conditions d’incapacité prévalant pendant l’année (l’incapacité a une définition internationale). En Suisse, au cours de la dernière décennie, l’espérance de vie sans incapacité a augmenté plus rapidement que l’espérance de vie. (On parle aussi d’espérance de vie en bonne santé.)
Voir : Espérance de vie — Vieillesse
jpf
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Estimation statistique
L’utilisation d’un échantillon de personnes ou d’événements suppose une mesure de la probabilité d’erreur introduite par la procédure suivie. Différentes techniques sont disponibles pour effectuer cette mesure. Le lecteur des rapports de recherche et de résultats d’enquêtes doit accorder la plus grande attention aux informations fournies par les auteurs qui concernent la confiance que l’on peut attribuer aux résultats proposés.
Voir : Enquête sociale — Recherche sociale — Statistique sociale
jpf
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État incitateur
Alors que l’État de droit libéral réalisait sa suprématie par l’instrument de la coercition et que l’État-providence tirait son pouvoir de sa compétence en matière de planification, dans l’action étatique contemporaine s’ajoute un instrument clé qu’est l’information, dans tous ses aspects, allant de la propagande, à la persuasion, à la création de consensus. L’État généralise en effet l’action incitative — développée dans le cadre des politiques économiques d’inspiration keynésienne afin de renforcer la production — sur tous les terrains de son intervention suite à l’intégration de changements fondamentaux qui ont eu lieu dans nos sociétés, à savoir : a) La pluralisation des formes de vie remplaçant une classe moyenne uniforme comme point de référence de l’action étatique par une multitude de modes de vie qui ne peuvent être maîtrisées par l’État qu’à travers des collaborations État – société civile dans lesquelles la primauté du savoir passe de l’État aux expressions organisationnelles de la société civile représentant ce pluralisme. b) La pluralisation des morales et des éthiques de vie, demandant à l’État de passer d’une conception culturelle unidimensionnelle, basée sur des religions d’État, à une conception demandant pour la formulation de politiques publiques la concertation entre diverses visions du monde. c) L’augmentation du savoir spécialisé demandant à l’État une intervention basée sur les connaissances propres aux acteurs et aux réseaux sociétaux, donc la gestion des savoirs et des actions dans le but de permettre à une société de répondre à des problèmes sociaux. Dans l’idée d’État incitateur est résumée la différenciation de l’action étatique qui fait des acteurs étatiques des modérateurs ou des superviseurs de domaines politiques régulés par des acteurs sociétaux.
R. D. Bütschi, S. Cattacin, Le modèle suisse du bien-être, Réalités sociales, Lausanne, 1994. — H. Willke, Ironie des Staates, Suhrkamp, Francfort sur-le-Main, 1992.
Voir : Empowerment — État-providence — Information sociale — Subsidiarité
Sandro Cattacin
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État-providence
L’État-providence est une réponse politique du XVIIIe siècle à l’augmentation de la protestation contre la paupérisation de masse issue de l’industrialisation sans règles (le capitalisme sauvage). Sa mise en place engendre une double dynamique d’expansion : par son succès, il sera régulièrement légitimé à effectuer de nouvelles interventions ; par sa dynamique interne (la bureaucratisation croissante), il renforcera sa compétence et l’envergure de son action. L’État-providence est donc un produit de la modernisation. Par ses interventions, il fournit protection sous forme d’assistance, d’assurance et de sécurité sociale. En outre, il introduit un nombre de droits en cas d’événements prédéfinis et un nombre de devoirs en forme de contribution fiscale. Ses effets sont multiples. Sa mise en place socialisera le marché en rendant le capitalisme “ organis頔. L’État ne se limitera plus uniquement à la sauvegarde de la propriété privée et à la tutelle de l’ordre publique, mais il se fera interprète de valeurs que le marché n’est pas capable d’enregistrer : la justice distributive, la sécurité, le plein emploi, la défense des droits des ouvriers. Par la politique keynésienne qui débute dans les années trente, la politique du laisser-faire sera liquidée et l’État amené à un nouveau type de politique économique basée sur l’intervention systématique de l’État dans l’économie. Son devoir est, en effet, d’intervenir, à travers les moyens fiscaux, sur la propension à la consommation, d’intervenir dans le marché des investissements avec des propres initiatives, et enfin, de promouvoir une politique du plein emploi. Dans le modèle général de Keynes, l’initiative privée reste décisive, mais elle n’est plus le seul moteur du développement économique. L’État garantit en effet l’équilibre général, à travers sa politique d’investissement, en limitant la crise conjoncturelle. Socialement l’État-providence contribuera à une grande redistribution de la richesse en créant cette classe moyenne qui en sera la base et le point d’orientation. Politiquement il inaugurera le passage d’un monde politique en conflit à un monde politique en négociation et coalition. Le passage d’un marché autoréglé avec un État abstentionniste à un État protecteur dans un entourage de capitalisme organisé correspond donc à un mélange idéologique qui justifie le marché parce qu’il l’estime efficient et efficace dans l’allocation, mais qui permet aussi de limiter ce marché en donnant une importance politique centrale à la revendication socialiste de l’égalité et, dans une certaine mesure, de la fraternité. Dans ces deux tendances s’exprime un compromis pragmatique entre l’idéologie libérale et socialiste ; un compromis qui peut être vu comme base de l’État-providence (ledit compromis social-démocrate). Les politiques caractérisant l’histoire de succès de l’État-providence sont : l’expansion progressive des services publics comme l’école, l’habitation populaire, l’assistance médicale ; l’introduction d’un système fiscal basé sur les impôts relevés de façon progressive ; la mise en place d’une politique apte à défendre les droits des employés ; la redistribution de la richesse pour permettre la survie de tous les citoyens ; la mise en place d’un système de rente pour les anciens qui leur garantit une existence aussi après avoir exercé un métier ; une politique du plein emploi pour minimiser les effets néfastes d’un point de vue économique et social du chômage.
L’État-providence connaît son plus grand succès après la Grande Dépression (29) et surtout après la Deuxième Guerre mondiale. Si l’on parle aujourd’hui d’État-providence, on entend un ensemble d’institutions et de mesures publiques qui appartient à une phase historique spécifique avec un entourage idéologique et économique spécifique. Mais ces bases de l’État-providence sont aujourd’hui, plus exactement depuis les années soixante-dix, fortement discutées. On se trouve dans un autre type de société qu’on pourrait appeler “ postmatérialiste ” ; l’entourage idéologique qui permettait ce compromis social-démocrate entre les forces libérales et les forces de gauche s’est fortement fêlé, non pas seulement avec la venue des verts, mais en général avec la pluralisation des formes de vie. L’entourage économique de croissance continue, base de la politique de redistribution de l’État-providence, a aussi fortement changé : on admet l’impuissance face au chômage ; il y a une crise du concept de croissance dû aux effets non contrôlables sur l’environnement ; la politique keynésienne n’est plus appliquée parce qu’elle se basait sur l’endettement de l’État et la progressive compensation de ses dettes avec la relance économique induite par la politique d’investissement étatique. Enfin, même l’idée d’État-providence paraît entrer en crise, quand commencent à participer à la production du social de plus en plus d’autres acteurs que ceux étatiques (le passage de l’État-providence à une société du bien-être).
R. D. Bütschi et S. Cattacin, Le modèle suisse du bien-être, Réalités sociales, Lausanne, 1994. — J. Alber, Vom Armenhaus zum Wohlfahrtsstaat, Campus, Francfort sur-le-Main, 1982. — K. Polanyi, La Grande Transformation. Aux origines politiques et économiques de notre temps, Gallimard, Paris, 1983.
Voir : Ciblée (Politique) — Démantèlement social — État incitateur — État-providence (Approches comparatives) — État-providence (Modèles d’) — Sécurité sociale — Syndicat
Sandro Cattacin
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État-providence (Approches comparatives)
L’étude des politiques sociales et de leur évolution suppose d’accorder un soin tout particulier aux approches comparatives. De nombreux auteurs s’y sont essayés. On notera ici la synthèse proposée par F.-X. Merrien. L’auteur rappelle une typologie élaborée par Guy Perrin. Celle-ci est fondée sur quatre éléments : le degré de généralisation ; le degré d’universalité de la protection sociale ; le degré d’uniformité des prestations ; le degré d’unicité des structures. Il dessine ainsi plusieurs types d’États-providence qu’il caractérise en tenant compte de facteurs historiques et culturels. Une telle approche se révèle d’autant plus nécessaire que les rapports internationaux s’intensifient.
R. F.-X. Merrien, L’État-providence, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1997.
Voir : État-providence — État-providence (Modèles d’) — Centre d’étude de la politique sociale (CEPS)
jpf
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État-providence (Modèles d’)
La construction d’“ idéal-type ” d’Etats-providence peut être considéré considéré comme un outil heuristique essentiel. Elle nous permet d’analyser la ou les logiques complémentaires qui se combinent dans des cas de figures historiquement situés.
Dans la tradition juridique, l'opposition entre modèles bismarckiens d'Etat-providence contributifs, assurant des prestations (en partie) fonction des salaires et Etats-providence beveridgiens financés par l'impôt et assurant des prestations forfaitaires constitue un lieu commun de la littérature en droit social.
En sociologie la distinction entre modèles d'Etat-providence : institutionnel-redistributif et "industriel-méritocratique" d'une part, et résiduel de marché de l'autre proposée par Richard Titmuss constitue la pierre angulaire de la recherche. Dans cette typologie, le premier modèle se contente de traiter les cas de plus grandes détresses. Le second et le troisième intègrent la dimension sociale dans les fonctions étatiques en cherchant à assurer un certain niveau de sécurité sociale (le second), ou, plus ambitieusement à achever l'idéal démocratique en assurant une redistribution institutionnalisée du revenu national (le premier).
Guy Perrin a pour sa part proposée une typologie (1) fondée sur quatre éléments : le degré de généralisation et le degré d'universalité de la protection sociale, le degré d'uniformité des prestations, le degré d'unicité des structures. Il dessine de cette manière trois types d'Etats-providence dont il tente de rendre compte par des facteurs historiques et culturels. Le modèle national unitaire est caractérisé par l'universalité d'application quant aux personnes, l'uniformité des prestations et l'unicité des structures. Le modèle professionnel unitaire se caractérise par l’universalité quant aux personnes, l'unicité des structures, mais la variablilité des prestations qui sont liées aux revenus antérieurs. Le troisième modèle, dit professionnel pluraliste généralise la protection sociale à l'ensemble de la population mais dans le cadre de régimes professionnels multiples. L'université quant aux personnes est respectée, mais il n'y a ni unicité des prestations, ni unicité des structures.
Dans un livre devenu un classique livre, Gösta Esping a proposé une classification entre régimes d’Etat-providence : le modèle libéral, conservateur-corporatiste et enfin socialiste.
Esping-Andersen, dans la lignée de Polanyi, mais aussi de Karl Marx, accorde la toute première attention à ce qu'il appelle le degré de démarchandisation". On peut classer les Etats-providence en forts, moyens ou faibles, en fonction de la possibilité qu'ils offrent légalement aux individus de s'extraire plus ou moins fortement du marché tout en prenant en compte leurs besoins. L'indice de démarchandisation est d'autant plus fort que l'éligibilité est aisément accessible, que les droits sont soumis à peu de conditions restrictives, que le niveau des revenus de remplacement est proche du revenu d'activité et que le bénéfice est octroyé pour une longue durée, et enfin que les situations offrant cette possibilité sont nombreuses.
Plusieurs auteurs ont proposé d’ajouter un quatrième modèle : le modèle latin. En effet, les pays méridionaux se caractérisent sur le plan social par l'existence de systèmes de garantie de revenu d'inspiration bismarkienne assez généreux et segmentés mais réservés au noyau dur de la force de travail, mais une absence traditionnelle de protection minimale de base. Par ailleurs, ils possèdent tous, à des degrés divers, un système sanitaire national à vocation universelle. Les pratiques sociales clientélistes sont fortement développées.
R. G. Esping-Andersen, Les trois mondes de l’Etat-providence, PUF, Paris, 1999. — M. Ferrera, Modelli di solidarietà, Il Mulino, Milano, 1993. — F.-X. Merrien, L’Etat-providence, PUF, Paris, 2000. — G. Perrin, Sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1993. — 1) G. Perrin, “ Pour une théorie sociologique de la sécurité sociale ”, Revue française de sociologie, VIII, 1967, 299-324.
Voir : État-providence
François-Xavier Merrien
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Éthique
L’éthique constitue une “ sous-discipline ” aussi bien de la philosophie que de la théologie et étudie les problèmes liés aux jugements de valeur moraux et aux normes liées à ces derniers. Elle cherche à fonder ces normes en utilisant des arguments qui sont censés être universalisables. L’éthique se distingue ainsi de toutes les autres disciplines qui, de leur côté, essaient de décrire ou d’expliquer la genèse et le développement des normes à partir d’une méthodologie empirique. L’éthique se réfère tout de même à l’expérience quand elle cite la morale vécue ou les mœurs, sans toutefois leur donner une portée directement normative. Dans ce cas, la réflexion éthique tomberait dans le paralogisme naturaliste.
À un niveau d’abstraction supérieur à celui de la réflexion éthico-normative, se situe la métaéthique, sous-discipline de l’éthique, qui a pour objet de réfléchir à la portée épistémologique et à la structure langagière des discours éthiques eux-mêmes. On considère que la métaéthique devrait être normativement neutre. En métaéthique, on soutient des thèses tout à fait différentes les unes par rapport aux autres : dans une perspective minimaliste, on considère les affirmations de l’éthique comme pures expressions non cognitives de sentiments (émotivisme), par ailleurs, certains éthiciens pensent pouvoir donner aux affirmations éthiques une évidence presque mathématique.
L’éthique normative, à son tour, se structure en deux parties distinctes : l’éthique fondamentale ou générale et l’éthique spéciale ou appliquée. Cette dernière a connu tout récemment un fort développement en se structurant en sous-disciplines presque autonomes. On parle ainsi de bioéthique, d’éthique des affaires, d’éthique de l’environnement, d’éthique des médias, etc. Le statut de ces différentes éthiques appliquées est fortement discuté, soit en soulignant leur autonomie méthodologique, soit en les ramenant à leur racine commune dans l’éthique générale.
Les problèmes fondamentaux de l’éthique générale font également l’objet de vives discussions. Faut-il que l’éthique s’oriente seulement vers la normalisation, ou faut-il qu’elle élabore une théorie du sujet agissant, dans une théorie de la vertu ?
La portée des normes est discutée : ont-elles de la valeur en tant que telles, indépendamment des conséquences provoquées par leur respect (déontologisme), ou bien faut-il toujours considérer la portée des conséquences tant des actes que des normes prônées en éthique (conséquentialisme, téléologisme, utilitarisme) ? Quel est enfin le rôle des représentations et des convictions religieuses dans l’élaboration et la fondation des normes morales ? Certains éthiciens, tant parmi les philosophes que parmi les théologiens, soulignent l’indépendance méthodologique des jugements moraux par rapport aux représentations religieuses, alors que d’autres soutiennent que le caractère absolu des normes morales peut être garanti seulement par une référence théonome.
R. M. Canto-Sperber (Éd.), Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, PUF, Paris, 1996. — B. Baertschi, La valeur de la vie humaine et l’intégrité de la personne, PUF, Paris, 1995. — E. Fuchs, Comment faire pour bien faire ?, Labor et Fides, Genève, 1995. — D. Müller, La morale, Labor et Fides-Cerf, Genève-Paris, 1999. — D. Müller, Les passions de l’agir juste. Fondements, figures, épreuves, Éditions Universitaires-Cerf, Fribourg-Paris, 2000. — R. Simon, Éthique de la responsabilité, Cerf, Paris, 1993.
Voir : Déontologie — Éthique sociale — Justice sociale
Alberto Bondolfi
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Éthique sociale
L’expression “ éthique sociale ” peut désigner soit une partie de l’éthique, soit l’ensemble de l’éthique en tant que telle. Ce dernier usage est répandu surtout dans la littérature éthico-théologique d’inspiration protestante. Dans le langage philosophique, l’éthique sociale est une partie de l’éthique appliquée et se distingue de l’éthique individuelle. Elle peut être comprise très globalement comme la réflexion sur toutes les normes morales qui ne peuvent pas être classifiées dans la sphère de l’éthique économique, politique ou juridique, mais qui gardent une dimension liée à la société. La spécificité de toute éthique sociale réside dans le fait que les valeurs et les normes sur lesquelles elle réfléchit, touchent surtout des institutions et non pas directement des individus. Toute éthique sociale est ainsi strictement liée tant à la philosophie sociale qu’à la philosophie du droit, et reprend ainsi des thèmes et des options de ces dernières.
R. G. Mutzenberger, Éthique sociale dans l’histoire du mouvement œcuménique, Labor et Fides, Genève, 1992. — M. Canto-Sperber (Éd.), Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, PUF, Paris, 1996.
Voir : Éthique — Institut d’éthique sociale (IES) — Justice sociale
Alberto Bondolfi
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Étiquetage (Théorie de l’)
“ Le comportement déviant est ce que les gens étiquettent comme tel ; le déviant est celui à qui on a réussi à coller cette étiquette ”. C’est ainsi que H. S. Becker (in Outsiders) résume lapidairement la théorie de l’étiquetage. Cette dernière s’inscrit dans l’ensemble des travaux qui, à partir de Schütz, Berger et Luckmann notamment, suggèrent que les représentations de la réalité sont socialement construites et que, dès lors, toute interaction humaine est déterminée par les représentations mutuelles des interactants. D’où le terme d’interactionnisme symbolique auquel se rattache la théorie de l’étiquetage. Cette dernière a été relativisée, dans le domaine de la criminologie notamment. Reste qu’elle a connu un indéniable succès, auprès des travailleurs sociaux, mais souvent dans une compréhension moralisante. L’idée “ qu’il ne faut pas étiqueter ” reste fort présente et participe de la construction d’une idéologie professionnelle affirmant la “ neutralit頔 des intervenants. Cet usage social de la théorie de l’étiquetage est un fait social en lui-même.
R. H. S. Becker, Outsiders. Études de sociologie de la déviance, Paris, 1985. — A. Schütz, Le chercheur et le quotidien, Klincksieck, Paris, 1987.
Voir : Contrôle social — Délinquance — Représentation sociale — Stigmatisation
Martial Gottraux
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Étrangers (Politique à l’égard des)
La politique à l’égard des étrangers est définie par l’économie et les impératifs du droit d’asile. D’autres secteurs (échanges scientifiques, artistiques, culturels, éducation), en sont les parents pauvres. C’est une prérogative de l’État-nation et le règne de “ la tyrannie du national ” (Sayad, Noiriel), sauf qu’en Suisse le poids de l’économie marque le pas au politique, au risque de tensions régulières entre le DFJP et le DFAE.
La police fédérale des étrangers centralisée a été fondée (1889) pour contrôler les étrangers et le mouvement ouvrier. Le discours raciste dans la politique des étrangers a une longue histoire (1848, 1914, 1931, etc.). Après les années 80, l’expression des sentiments anti-étrangers s’est polarisée sur la question des réfugiés du “ sud ”. La vieille xénophobie nationaliste qui dans les années 60-70 s’exprimait à l’encontre des travailleurs immigrés européens du sud, s’est déplacée (Ebel, Fiala). La notion partagée d’Ueberfremdung, est inscrite dans la LSEE de 1931. Elle a servi à justifier une politique d’immigration sélective, limitative (quantité), provisoire (hiérarchie, rotation des permis, statut de saisonnier, clandestins), à prendre des mesures discriminatives (intégration). Une réorientation de la politique des étrangers est en cours dans le droit fil du “ laboratoire Schengen ” auquel la Suisse ne participe pas formellement, mais pratiquement. Le “ modèle des trois cercles ” basé sur l’origine nationale des candidats à l’immigration au détriment d’autres critères (qualification, etc.). fabriqué par l’OFE et officialisé par le Conseil fédéral (1991) en est une illustration.
Elle est encore empreinte d’anachronisme et d’une vision sécuritaire héritée de la guerre froide. L’affaire Kabuga, un criminel de guerre ruandais couvert par le chef de la police des étrangers (Hunziker) et les récentes nominations à la tête de l’OFE et à l’OFR en sont des preuves flagrantes.
R. M.-C. Caloz-Tschopp, “ Les trois cercles de la démocratie sécuritaire ”, in : Transeuropéennes, No 9, Paris, pp. 31-41. — Widerspruch, No 32, Zürich, (allemand), 1997, pp. 151-162. — A. Auer, Constitution et politique d’immigration : la quadrature des trois cercles, Avis de droit, Université de Genève, 1996. — M.-C. Caloz-Tschopp, “ La “ Communauté politique ” européenne et les groupes “ intergouvernementaux ”, in : Revue Suisse de Sociologie, No 1, Zurich, 1991, pp. 49-80. — M. Vuillemier, Immigrés et réfugiés en Suisse. Aperçu historique, Pro Helvetia, Zurich, 1989.
Voir : Autorisation de séjour — Asile (Loi sur l’) — Asile (Politique d’) — Égalité de traitement entre nationaux et non-nationaux — Immigration — Office fédéral des étrangers (OFE) — Office fédéral des réfugiés (ODR) — Racisme
Marie-Claire Caloz-Tschopp
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Étude de marché
Étude visant à définir les contours et les caractéristiques du marché pour un bien ou un service particulier. Pour délimiter le marché pertinent, il s’agit tout d’abord de déterminer tous les biens et services considérés par les consommateurs comme des substituts suffisamment proches pour qu’ils puissent satisfaire un même besoin. Pour procéder à cette délimitation, on peut s’appuyer soit sur des enquêtes effectuées auprès des consommateurs soit sur des analyses quantitatives qui permettent de mesurer l’élasticité-prix croisée de la demande d’un bien par rapport au prix d’un autre bien substituable. Si cette élasticité est élevée, il conviendra de placer les deux biens considérés sur le même marché pertinent. Il s’agit ensuite dans une deuxième étape de délimiter le contour géographique du marché pour définir le territoire sur lequel les partenaires à l’échange sont engagés du côté de l’offre ou de la demande. Il s’agit en particulier de se demander si l’offre d’une entreprise localisée dans une région particulière peut être substituée par l’offre d’une autre entreprise localisée dans un autre région, sans pour autant que cette substitution au niveau de l’offre ne se traduise par un désavantage de prix qui rende ce remplacement difficile ou impossible pour les consommateurs. En partant de la dimension du produit et de l’étendue géographique du marché pertinent, il s’agit ensuite de caractériser les structures de ce marché en considérant les acteurs qui y sont actifs, notamment le nombre et la taille des entreprises concurrentes ainsi que le nombre et les habitudes des consommateurs. Il conviendra également de caractériser l’environnement de ce marché en décrivant les barrières économiques, techniques, légales et administratives qui sont susceptibles d’exister et d’entraver l’entrée de nouveaux concurrents. Ces études sont généralement réalisées par des entreprises qui envisagent d’entrer sur un nouveau marché ou de lancer une nouvelle gamme de produits. Elles sont également au centre des analyses effectuées par les autorités nationales de la concurrence qui doivent définir les contours du marché sur lequel porte leur examen avant même d’étudier le degré de concurrence qui y règne. Cette définition joue fréquemment un rôle très important sur les décisions prises par les autorités de la concurrence. En effet, si le marché est défini de manière très large en y incluant des produits finalement peu substituables les uns aux autres ou en considérant un marché géographique trop étendu, les conclusions des investigations menées par les autorités de la concurrence risquent d’être très différentes par rapport au cas où le marché est défini de manière très étroite. Cela explique sans doute pourquoi les entreprises sujettes à tel examen ont toujours tendance à définir le marché de manière très large afin de réduire les soupçons qui pourraient peser sur leur comportement.
Voir : Concurrence — Marché du travail
Yves Flückiger
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Études Genre
Les Études Genre (Gender studies) ont pour objet d’étude scientifique les processus sexués qui structurent l’ensemble de l’organisation sociale.
Vers la fin des années 60 aux États-Unis, puis au début des années 70 en Europe, les préoccupations des mouvements féministes se sont infiltrées dans les universités et sont devenues des objets d’analyse théorique concentrés dans ce qu’on a initialement appelé les Women’s studies. Ces études se sont développées en réaction aux théories scientifiques traditionnelles qui se voulaient universelles mais qui, de fait, étaient généralement fondées sur la vision d’un être humain neutre et général : l’homme, blanc, occidental et hétérosexuel. Leur premier objectif a été de visibiliser les femmes, de les considérer comme sujets de leur histoire, ainsi que de décrire, expliquer et dénoncer les conditions de vie imposées aux femmes, leur statut et leur position de dominées dans la société. Néanmoins le risque était à terme d’ériger les femmes en “ problème social ” plutôt que de problématiser la construction des rapports sociaux de sexe, marqués par la domination masculine. Le pas suivant a alors consisté à comprendre comment se construit et se transforme la relation entre homme et femme, comment sont instituées, transmises et modifiées les normes qui guident leurs comportements (ce que les unes et les autres doivent faire), comment les significations socioculturelles attribuées au sexe, ou plutôt à la différence des sexes, contribuent à forger des identités genrées, à légitimer le patriarcat et des principes de division sociale arbitraires : privé/public, travail domestique-reproductif-gratuit/professionnel-productif-rémunéré, féminin/masculin, hétérosexuel/homosexuel, etc. On entre alors dans l’ère des Études Genre.
Le genre est un concept qui a été élaboré pour remettre en question ces principes de division du monde et leur légitimité à gouverner un ordre des choses conçu comme naturel, fondé sur des différences biologiques. Au même titre que la classe et la race, ce concept doit permettre de comprendre que les différences ne sont pas à l’origine des discriminations, mais qu’elles en sont le produit et qu’elles sont utilisées pour justifier les inégalités. Le sexisme, la domination de classe, le racisme et l’homophobie sont des formes de discrimination qui structurent le pouvoir, créant un monde divisé en sujets dominants et groupes dominés.
Les Études Genre deviennent peu à peu, en Suisse aussi, une masse critique dans le champ scientifique. Faisant le lien entre la théorie et l’action, elles contribuent à contrer les effets discriminatoires des logiques sexuées dans lesquelles le savoir, tout comme le sens commun et les institutions sociales et politiques, est enfermé. La reconnaissance institutionnelle et scientifique des études genre est encore précaire, mais l’apport des théories féministes dans la compréhension des inégalités sociales et des rapports de pouvoir est désormais incontournable.
R. C. Delphy, L'ennemi principal, Syllepse, Paris, 1998 (Tome 1), 2001 (Tome 2). — H. Hirata, F. Laborie, H. Le Doaré, D. Senotier (Éds), Dictionnaire critique du féminisme, Presses Universitaires de France, Paris, 2000. — P. Roux, V. Perrin, M. Modak, B. Voutat, Couple et égalité : un ménage impossible, Réalités sociales, Lausanne, 1999.
Voir : Égalité entre hommes et femmes — Inégalités sociales — Représentation sociale — Travail féminin
Patricia Roux
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Eugénisme
Ensemble des théories et des pratiques visant à améliorer l’espèce humaine en intervenant sur la procréation et l’hérédité. L’histoire moderne de cette notion remonte à F. Galton (1865). Pendant près d’un siècle, l’eugénisme est à la fois une para-science et un mouvement social, qui prend appui tour à tour sur la biométrie, la génétique, l’anthropologie, la psychiatrie et d’autres sciences médicales. Il propose des mesures d’incitation à la procréation des éléments supposés “ supérieurs ” et porteurs de traits “ désirables ” dans la population (e. positif) et des obstacles à la procréation des porteurs de “ tares ” (e. négatif). Bien que les théories et certaines pratiques eugénistes se soient d’abord développées dans des pays démocratiques, l’eugénisme trouvera son aboutissement le plus criminel dans les programmes d’extermination nazis. Aujourd’hui, la notion d’eugénisme apparaît dans de nombreuses controverses sur la génétique humaine et les procréations assistées.
R. D. J. Kevles, Au nom de l’eugénisme, PUF, Paris, 1999. — G. Jeanmonod, G. Heller, “ Eugénisme et contexte socio-politique. L'exemple de l'adoption d'une loi sur la stérilisation des handicapés et malades mentaux dans le canton de Vaud en 1928 ”, Revue suisse d’histoire, 50, 2000, pp. 20-44.
Voir : Clonage — Ethique — Génome humain — Racisme
Alex Mauron
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Eurocompatibilité
Terme désignant l’adaptation du droit national au droit de l’Union européenne. L’eurocompatibilité de grandes parties du droit suisse, y compris le droit du travail et les assurances sociales, était exigée par l’Accord sur l’Espace économique européen. Après que le peuple et les cantons eurent refusé cet accord lors de la votation populaire de 1992, le législateur a décidé d’adapter divers domaines du droit suisse au droit européen. Au chapitre du droit social on peut mentionner les règles du Code des obligations relatives au contrat de travail (transfert d’entreprise et licenciements collectifs) et la loi fédérale sur la participation (FF 1993 I 757). La question de l’eurocompatibilité des assurances sociales suisses se pose dans le cadre de l'accord sur la libre circulation conclu entre la Suisse d'une part et la Communauté européenne et ses états membres d'autre part.
R. Message sur le programme consécutif au rejet de l’Accord EEE du 24 février 1993, FF 1993 I 757 — B. Kahil-Wolff, Suisse – Europe, mesurer le possible, viser à l’essentiel, Centre Patronal, Lausanne, 1995.
Voir : Accord sur la libre circulation Suisse-CE — Circulation des personnes (Libre) — Communauté européenne et sécurité sociale — Conventions bilatérales de sécurité sociale — Union européenne (UE)
Bettina Kahil-Wolff
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Europe sociale
A la fin des années quatre-vingt, les premiers textes en faveur d'une Europe sociale ont donné à penser que l'on s'acheminait vers la création d'un État social européen. Par là, on entendait la généralisation d'un modèle social européen fortement intégré, protecteur et redistributif. Pourtant, que l'on prenne en considération les évolutions récentes, ou qu'on se situe sur la longue durée et malgré quelques avancées indéniables, il faut admettre que cet espoir d’une évolution vers un État-providence européen unifié ne s’est pas réalisée.
En tout premier lieu, il faut noter que la protection sociale n'apparaît pas comme un enjeu majeur de la construction sociale européenne. Si le Traité de Rome se fixe comme objectif le progrès social, c'est de la croissance économique qu'il attend ce dévelopement. Les politiques de protection sociale demeurent strictement nationales. Durant les quinze premières années du marché commun, la dimension sociale n’est pas absente. Mais elle n’existe que comme instrument de la construction d’un vaste marché commun. En d’autres termes, l’ambition est de supprimer à terme tous les obstacles non seulement à la circulation des marchandises, mais également à la circulation des travailleurs. Cette volonté implique de supprimer les discriminations à l’embauche, ou de permettre le transfert des droits acquis en matière de sécurité sociale.
En revanche, à partir des années 1970, et plus encore des années 1980, le social commence à apparaître comme un objectif en soi. Le Conseil des ministres de 1974 propose des objectifs sociaux relativement ambitieux. Plus tardivement, la conférence de Luxembourg introduit la dimension sociale dans l'Acte Unique Européen (1987) à la suite d'un requête du Danemark et de la France. L'Acte Unique, complété par des directives, intègre plusieurs dispositions de nature sociale. Elles visent notamment à l'harmonisation des conditions de santé et de sécurité au travail, à établir une meilleure cohésion économique et sociale et à favoriser le dialogue social. Par rapport à la période précédente, le social entre de plain pied dans l’agenda européen.
Néanmoins , la problématique sociale reste fortement articulée à la question du marché, plus particulièrement avec de la circulation des travailleurs, et celle du dumping social. La Commission réaffirme constamment qu’il n'est aucunement question pour elle de viser à une véritable harmonisation européenne des systèmes de protection sociale trop profondément ancrés dans les cultures, les structures et les institutions de chaque pays. Le principe de subsidiarité demeure le seul principe d'action reconnu.
Certes le Traité d’Amsterdam (1999) en faisant admettre le principe de “ lignes directrices en matière d’emploi ” marque un léger progrès de l’Europe sociale, mais un progrès limité. Néanmoins, il ne faudraient pas oublier que la dimension sociale européenne est particulièrement présente dans certains secteurs. C’est notamment le cas de politiques aussi importantes que celles des fonds structurels, des politiques coordonnées de sécurité sociale pour les travailleurs européens s’installant dans un autre pays que leur pays d’origine, et dans les politiques imposant des standards minima, par exemple en matière de santé et de sécurité sur le lieu de travail, ou encore de temps de travail et de congé maternité. Ces domaines contribuent d’autant plus à l’édification d’une Europe sociale que des décisions de la Cour de Justice Européenne oblige les États à s’y conforter.
Cependant, les champs d’intervention directs de l’Union ne touchent que de manière marginale la protection sociale. La politique sociale européenne demeure un champ d’intervention connexe, déterminée par des enjeux économiques. Elle manque d’unité et de légitimité. Elle ne dispose que de ressources limitées et dépend de la bonne volonté de ses membres. Les divergences entre États et l’impossibilité de trouver un accord pour dépasser le principe de subsidiarité font obstacle à l’émergence d’un modèle unifié.
R. G. Caire, L'Europe sociale : faits, problèmes, enjeux, Masson, Paris, 1992. — J.-P. Faugère, “ La régulation sociale dans la construction européenne ”, in : de P. Senarclens (dir), Maîtriser la mondialisation, Presses de de Science Po, Paris, 2000, pp 217-242.
Voir : Charte sociale européenne — Union européenne (Réglementation de l')
François-Xavier Merrien
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Eurostat
Eurostat est l'Office statistique de l'Union européenne. En collectant, harmonisant et diffusant des informations sur tous les domaines de la vie économique et sociale, Eurostat joue un rôle primordial au service du développement de l'UE, des nations qui la composent et des politiques qu'elles entreprennent. Plusieurs types de données (générales et spécifiques) sont publiées. Ce sont autant d'outils pour analyser et comprendre les problèmes et processus économiques et sociaux.
R. Eurostat, L’Europe en chiffres, 5e édition, Luxembourg, 1999. — Eurostat, Portrait social de l’Europe, dernière édition, Luxembourg , 1999.
Site Internet : europa. eu. int/comm/eustat
Voir : Eurostat-Sespros — Statistiques sociales
Stéphane Rossini
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Eurostat-Sespros
Eurostat-Sespros constitue la référence méthodologique de l'Office statistique de l'Union européenne pour ce qui relève de la production des statistiques de protection sociale. Ce concept a été publié dans sa version initiale en 1981 et se rapporte d'abord aux informations financières. Des investigations ont également trait à l'étude des personnes protégées et des bénéficiaires de prestations sociales.
Eléments centraux de la démarche Eurostat-Sespros :
— Élaboration de nomenclatures permettant de ventiler les recettes et dépenses des régimes de protection sociale selon le type, la nature et/ou les secteurs de provenance.
— Répartition des dépenses par fonction de protection sociale : maladie, invalidité, vieillesse, survie, famille et enfants, chômage, logement, exclusion sociale et prestations non classées ailleurs.
R. Eurostat, Dépenses et recettes de protection sociale 1980-1997, Luxembourg, 1999.
Voir : Budget social — Eurostat — Sécurité sociale — Statistique sociale
Stéphane Rossini
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Euthanasie
Les controverses sur l’euthanasie ne sont pas près de s’éteindre. Elles touchent même à la terminologie, de sorte qu’il est important de définir d’emblée les termes que l’on utilise.
On parle d’euthanasie passive quand un soignant renonce à administrer ou à poursuivre un traitement qui serait susceptible de prolonger l’existence, mais sans guérir le malade (exemple : interruption d’une chimiothérapie au profit de soins purement palliatifs). On parle d’euthanasie active directe quand une personne prend une mesure ayant pour finalité et pour résultat immédiat de provoquer la mort du malade (ex : injection d’un cocktail de médicaments à dose létale). On parle d’euthanasie active indirecte quand un soignant administre un traitement à des fins thérapeutiques ou palliatives en sachant que ce traitement est susceptible d’abréger la vie du malade (ex : prescription de morphine). Sous ces diverses formes, l’euthanasie est dite volontaire quand elle se fonde sur le consentement de la personne concernée (donné sur le moment ou dans des directives anticipées), voire de son représentant autorisé, et involontaire lorsqu’elle intervient sans que la personne (ou son représentant autorisé) ait donné son accord. Enfin, l’euthanasie se distingue de l’assistance au suicide, qui consiste à apporter une aide matérielle à une personne désireuse de mettre fin à ses jours (ex : fourniture de doses mortelles de médicaments). Contrairement aux hypothèses d’euthanasie, c’est donc ici la personne elle-même qui fait le geste ultime qui provoquera sa mort.
En droit suisse, aucune forme d’euthanasie involontaire n’est admise. En d’autres termes, il faut toujours que le patient (ou la personne juridiquement apte à décider à sa place) se prononce. Si le patient y consent, l’euthanasie passive est admise, de même que l’euthanasie active indirecte. L’assistance au suicide, pour autant qu’elle ne soit pas motivée par un mobile égoïste et qu’elle ait été demandée par la personne (art. 115 du Code pénal) reste aussi impunissable. En revanche, l’euthanasie active directe, même volontaire, est érigée en infraction par l’article 114 du Code pénal. La Suisse est ainsi l’un des pays européens le plus tolérant après les Pays-Bas, qui ont adopté en 2000 une législation autorisant, à des conditions strictes, l’euthanasie active directe.
Dans un rapport de 1999, un Groupe de travail fédéral a estimé à l’unanimité que l’euthanasie était subsidiaire par rapport aux soins palliatifs, que les mesures actuellement licites (euthanasie passive, active indirecte, assistance au suicide) devaient le rester, mais faire l’objet de dispositions légales explicites, et que l’interdit juridique de l’euthanasie active directe devait subsister. A la majorité, le groupe a en outre proposé de modifier l’article 114 du Code pénal pour permettre aux autorités de ne pas poursuivre l’auteur d’une euthanasie active directe qui aurait agi pour soulager les souffrances aiguës d’une personne atteinte d’une maladie incurable. Malgré ces recommandations, le Conseil fédéral a renoncé en 2000 à modifier la réglementation actuelle.
R. M.-O. Baumgarten, The right to die ?, Berne, 1998. — Assistance au décès, Rapport d’un groupe de travail nommé par le Conseil fédéral, Berne, 1999.
Voir : Acharnement thérapeutique — Directives anticipées (Testament de vie) — Euthanasie — Information au patient — Soins palliatifs
Olivier Guillod
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Évaluation
À la fin des années quatre-vingt, on estime qu’il faut élaborer de nouvelles approches dans la gestion du secteur social, sur les plans de l’analyse et de l’action. Face à la crise de l’État social ou à la demande de légitimation des pratiques professionnelles, on veut se donner les moyens d’évaluer la “ production ” des services sociaux. De l’évaluation interactive comme acte démocratique à l’évaluation managériale comme instrument de gestion, les définitions varient, mais les représentations dominantes associent alors à l’évaluation les idées de contrôle, d’intrusion et même de répression. On lui confère un aspect essentiellement vertical, quantitatif, administratif et politique.
Pour s’adapter aux mutations de la société et aux technologies du “ new public management ”, on va dans les années 90 déplacer le centre de gravité de l’évaluation du politique au professionnel, plus exactement on tentera d’intégrer les deux niveaux : la verticalité et l’horizontalité, le quantitatif et le qualitatif, etc. On introduit ainsi la complexité — notamment à travers la référence au partenariat — à diverses logiques d’action et aux différentes ressources présentes dans l’organisation et dans son réseau interne et externe.
On admet aujourd’hui que l’évaluation est un processus (temporalité) et un mélange qui emprunte à la fois à la pensée scientifique et à l’action, aux savoirs théoriques et aux savoirs d’expérience. Dès lors, sa méthodologie doit répondre à des critères de validité et de fiabilité aux regards de la science aussi bien que de l’action.
L’auto- et l’hétéro-évaluation doivent dans l’idéal être conduites ensemble pour nourrir la réflexion des partenaires sur les états passés, présents et à venir de leur organisation. Elles visent la fondation qualifiante de l’expérience. Il ne s’agit pas d’évaluer les capacités individuelles des gens, mais les ressources et les compétences sociales acquises par l’ensemble des partenaires : compétences finalisées, apprises, organisées et coordonnées pour la réalisation d’un projet collectif.
Dans un sens large, évaluer signifie : a) identifier les partenaires et les contenus de l’organisation, b) visibiliser l’ensemble des ressources et leur utilisation, c) expliciter l’implicite, c’est-à-dire ce qui “ va de soi ” ou ce qui est banalisé au niveau des règles de fonctionnement, d) rendre compte (décrire, argumenter, clarifier) et rendre des comptes (présenter les résultats, justifier les actions entreprises et l’utilisation des ressources).
R. “ L’évaluation au pouvoir ”, Revue POUR, No 107, 1986. — “ L’évaluation dans le travail social ”, in : Champs professionnels, No 18, textes réunis par A. Dupont, Éditions I.E.S., Genève. — G. Terssac, “ Savoirs, compétences et travail ”, in : Savoirs théoriques et savoirs d’action, publié sous la direction de J.-M. Barbier, PUF, Paris, 1996.
Voir : Bilan social — Marketing social — Nouvelle gestion publique — Planification sociale — Politiques publiques — Prospective — Ressources humaines (Gestion des)
Michel Vuille
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Évaluation de l’efficacité (ORP)
La révision de la LACI en 1995 a constitué un tournant dans la politique de lutte contre le chômage en introduisant en Suisse les mesures actives du marché du travail (LMMT). Pour gérer ces mesures, les cantons ont dû instaurer des offices régionaux de placement (ORP) chargés de la mise en œuvre des MMT. La décentralisation voulue par le législateur visait à laisser aux cantons une marge de manœuvre suffisante pour permettre aux ORP d’adapter leurs services de placement aux conditions de l'économie locale. En même temps qu’elle mettait en place une structure décentralisée de lutte contre le chômage, la LACI a introduit le principe de l’évaluation de l’efficacité des mesures actives et des offices chargés de leur application. Dans ce but, le Secrétariat d’État à l’économie (Seco) a défini des indicateurs de performance des ORP qui apparaissent (implicitement) dans la loi. Il en a retenu quatre : la durée du chômage, la proportion des chômeurs de longue durée (plus de 12 mois), la proportion des fins de droit et le pourcentage de retour au chômage durant les 4 mois qui suivent une reprise d’emploi. Pour examiner l’efficacité des ORP, il faut analyser la relation entre les ressources utilisées (les inputs tels que le nombre de conseillers) et la quantité de services produits (les outputs) en tenant compte du fait que chaque ORP travaille dans un contexte cantonal différent (facteurs externes tels que la situation conjoncturelle locale, la proportion de chômeurs qualifiés, de nationalité suisse etc.). Sur la base des inputs et des facteurs externes, il est possible de définir une frontière de production efficace, dont les ORP peuvent être plus ou moins éloignés. La distance d’un ORP par rapport à cette frontière reflète sa performance relative en fonction de ses inputs et compte tenu du contexte dans lequel il opère.
Si le principe de l’évaluation des performances des services publics est généralement admis, surtout lorsqu’une loi laisse à une organisation décentralisée une grande latitude de mise en œuvre, l’analyse effectuée par le Seco démontre toute la difficulté d’un tel exercice. La première d’entre elles provient de la définition des outputs. Dans le cas des ORP, on constate que des quatre objectifs retenus, les trois premiers sont très fortement corrélés. Ils mesurent tous la rapidité de la réinsertion. Le quatrième concerne la qualité de la réintégration. Il faudrait donc limiter les outputs à deux indicateurs : la rapidité et la qualité du retour en emploi. Cet exemple démontre également que les processus d’évaluation ont tendance à privilégier les indicateurs quantitatifs (mesurables) au détriment de critères plus qualitatifs tout aussi importants. D’autre part, la méthode employée traite chacun des quatre outputs retenus de manière séparée. Or, les ORP se caractérisent par des processus de production à produits joints. Leur performance doit donc être examinée en considérant les différents outputs conjointement. Un autre problème est lié à l’utilisation des résultats de l’évaluation. Idéalement, l’évaluation devrait permettre de démontrer à chaque ORP si, compte tenu de ses inputs et de ses facteurs externes, il atteint un output maximum. Elle devrait surtout lui indiquer les raisons qui l’empêchent d’atteindre la performance qu’un autre ORP, en tous points semblables, parvient à obtenir. Finalement, si l’évaluation est associée à une incitation financière, encore faut-il déterminer comment distribuer les récompenses. On peut choisir de récompenser les ORP qui parviennent à améliorer leur performance au cours du temps ou on peut attribuer un bonus aux ORP qui sont plus efficaces que la moyenne tout en pénalisant les autres.
R. M. Curti, E. Meins, “ Politique suisse du marché du travail : différences résultant de sa mise en application au niveau du service de l'emploi ”, in : La Vie Économique - Revue de politique économique, 2/1999, pp. 64-70.
Voir : Assurance-chômage — Chômage — Office régional de placement (ORP)
Yves Flückiger
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Évasion fiscale
Démarche intentionnelle permettant à un contribuable individuel ou à une entreprise de diminuer, voire d'éviter le paiement d'un impôt.
L'évasion fiscale au sens strict consiste à organiser ses activités économiques et financière afin d'échapper à l'impôt en utilisant les lacunes de la loi : par exemple, en réalisant des gains en capitaux plutôt que des revenus de placement, sachant que les premiers échappent à tout impôt. L'évasion fiscale provient du flou inévitable dans la définition des assiettes fiscales et, aussi, de la mobilité plus ou moins forte de certaines ressources imposables. L'utilisation des incohérences ou des divergences entre les législations fiscales cantonales (“ concurrence fiscale ”) ou internationales (“ paradis fiscaux ”) relève de l'évasion.
Il faut la distinguer de la fraude fiscale, qui consiste à cacher un état de fait qui, légalement, obligerait au paiement d'un impôt : le travail au noir, qui permet un gain accessoire sans qu'il soit déclaré, donc échappant autant à l'impôt qu'au cotisations sociales, est une forme de fraude fiscale.
R. OCDE, Concurrence fiscale dommageable : un problème mondial, Paris, 1998 — Revue économique et sociale, Lausanne, No 59, 2001.
Voir : Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Impôt — Impôt (et sécurité sociale) — Politique fiscale
Bernard Dafflon
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Éventualité
L’existence comporte un certain nombre de risques (voir la définition correspondante) et d’événements positifs ; parmi ces derniers : la maternité, les charges familiales, la retraite (alors qu’il n’y a pas d’incapacité de travail due à l’âge), la reconversion professionnelle ou culturelle librement choisie. Les risques et les événements positifs, appelés éventualités, entraînent un besoin de protection et posent la grande question de leur prise en charge : individuelle ou collective ? Au sens classique, et inscrit dans la Convention OIT No 102 concernant la norme minimum, la sécurité sociale est destinée à couvrir neuf éventualités : soins médicaux, indemnités de maladie, maternité, accidents du travail et maladies professionnelles, vieillesse, survivants, invalidité, chômage, charges familiales. Cette liste s’est ouverte à la dépendance et à la pauvreté (en tout cas dans certaines législations).
R. Bureau international du Travail, Introduction à la sécurité sociale, 3e éd., BIT, Genève, 1986. — J. Van Langendonck (Éd.), Les nouveaux risques sociaux, Annuaire IESS/EISS, 1996, Kluwer Law International, The Hague, 1997.
Voir : Risque — Sécurité sociale — Société des risques (risk society)
Pierre-Yves Greber
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Exclusion
La notion d’“ exclusion ” (par opposition à l’inclusion) est un concept utilisé pour la première fois en France par René Lenoir en 1974, dans un contexte marqué par le développement du chômage et par ce que l’on nomme d’abord “ nouvelle pauvret頔, rendue de plus en plus manifeste par la réapparition dans les rues des grandes villes de miséreux, sans moyens d’existence ni domicile fixe, survivant grâce à la charité publique ou privée.
L’exclusion est un mot pour définir des choses sans nom. Elle nomme une foule de situations toutes différentes en gommant la spécificité de chacune. La notion d’exclusion a une grande force évocatrice et elle connaît une utilisation idéologique importante qui, en même temps qu’elle permet un plus grand ralliement, accroît son imprécision sémantique.
Est exclue la personne qui a vu les liens qui la rattachaient aux autres se rompre et qui a été ainsi rejetée aux marges, là où les êtres perdent toute visibilité, toute nécessité et, quasiment, toute existence. Elle n’est plus, ou plus suffisamment rattachée à aucune des chaînes dont l’enchevêtrement constitue le tissu social et elle devient par là “ inutile au monde ”.
Il existe un continuum entre les personnes intégrées, celles qui sont précarisées et celles qui sont “ désaffiliées ” et finalement exclues. Les chemins qui conduisent à la pauvreté s’expliquent par un processus de déqualification ou de fragilisation de l’intégration dans le marché du travail. Ce processus peut engendrer une précarisation de la situation professionnelle et, finalement, la perte de l’emploi et du revenu et une perte de tout ce qui découle de l'intégration au travail, notamment au niveau des relations sociales.
L’exclusion n’est cependant pas un destin, contre lequel il faudrait lutter, mais le résultat d’une asymétrie sociale dont certains tirent profit au détriment d’autres : en effet, les processus d’exclusion touchent d’abord et prioritairement les couches les plus défavorisées de la société.
L’exclusion ignore l’exploitation et ce concept brise de ce fait le maillon qui, mettant en rapport le bonheur des riches et le malheur des pauvres, maintenait la référence à une balance de justice dans une société conçue comme un équilibre entre groupes sur un territoire. L’exploitation, même non intentionnelle, de certaines personnes suppose bien que d’autres personnes (ou les mêmes, mais à d’autres moments) contournent les exigences de visée d’un bien commun pour ne considérer que leurs intérêts particuliers.
R. C. Gros-Jean, C. Padieu, “ Les exclus. Comment sortir de l’approche en “ catégories ” ? ”, in : Revue française des affaires sociales, No 2-3, 1995. — R. Lenoir, Les exclus, Le Seuil, Paris, 1974. — S. Karsz, L’exclusion, définir pour en finir, Dunod, Paris, 2000. — S. Paugam (dir.), L’exclusion : l’état des savoirs, La Découverte, Paris, 1996 — M.-H. Soulet, “ L’exclusion : usages et mésusages d’un concept ”, in : Revue suisse de sociologie, vol. 24, No 3, 1998.
Voir : Inégalités sociales — Isolement — Licenciement — Lien social — Paupérisme — Pauvreté — Politique en matière de lutte contre la pauvreté
Jean-Pierre Tabin
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Exécution des peines àð Prison (Privation de liberté)
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Exil
L exil est une forme spécifique d'émigration. Il s'agit de l'obligation de quitter son État, suite à un contexte de violence politique, afin de chercher refuge dans le cadre d'un autre État pour une période d'une durée imprévisible. Cette situation entraîne des conséquences directes pour les individus concernés : il imprime à leur émigration un caractère non volontaire (les événements politiques restreignant fortement les choix individuels possibles) et aléatoire (la décision de résider sur le territoire d'un autre État et le moment du retour au pays échappant aux individus).
Les principales formes de violence politique sont les persécutions idéologiques, ethniques, religieuses ou les conflits entre États. Le type de violence et son étendue définissent les caractéristiques sociales de la population exilée : opposants idéologiques, membres de minorités ethniques territoriales ou intermédiaires, populations civiles se trouvant sur les lieux où s’exerce la violence.
La majorité des exilés cherchent en général refuge dans un pays voisin, seul une partie restreinte d'exilés émigre vers des pays plus lointains.
La situation juridique des exilés dans L'État de destination dépend de la politique d'asile de cet État. Selon le degré de reconnaissance des persécutions subies ceux-ci deviendront des réfugiés statutaires, des réfugiés de facto, des immigrés, des clandestins ou des "réfugiés en orbite".
L'exil, en tant que situation collective spécifique, prend fin lorsque la violence politique qui était à l'origine du départ des exilés cesse d'exister. Les acteurs sociaux se trouvent alors confrontés à une situation nouvelle qui les rapproche des autres migrants : ils ont la possibilité de retourner dans leur pays ou du moins de reprendre physiquement contact avec celui-ci. Ils peuvent aussi demeurer dans la société de résidence mais sur la base d'une autre légitimité que la légitimité politique. L'État d'accueil, par des mesures des soutien appropriées, peut faciliter la prise de décision.
R. C. Bolzman, Sociologie de l'exil. Une approche dynamique, Seismo, Zurich, 1996.
Voir : Asile (Politique d') — Asile (Requérant d') — Étrangers (Politique à l'égard des immigrés) — Office fédéral des réfugiés (ODR)
Claudio Bolzman
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Externalisation àð Postfordisme
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Externalités
La quantité échangée d un bien ou d un service sur un marché est déterminée par la confrontation entre les coûts privés de production supportés par les entreprises et les bénéfices privés obtenus par les personnes qui consomment ce bien ou ce service. Or, ces activités de consommation et/ou de production peuvent engendrer des coûts supplémentaires subis par des tierces personnes qui ne peuvent pas obtenir de compensation pour les dommages subis. De même, elles peuvent être à l’origine de bénéfices obtenus par des tiers qui ne doivent pas payer pour les gains obtenus. Sans intervention aucune, le marché n’intègre pas ces externalités négatives (coûts externes) ou positives (bénéfices externes) si bien qu’il conduira, dans le premier cas, à une production trop abondante ou, dans le second, à une production insuffisante. Comme pour les biens collectifs purs, le marché, même s’il est concurrentiel, est mis en échec puisqu’il n’assure plus, dans ce cas, une allocation optimale des ressources. La pollution, les accidents de la circulation, le bruit ou les risques professionnels constituent des exemples de coûts externes qui, s’ils ne sont pas “ internalisés ”, conduisent à une consommation excessive des produits générateurs de dommages externes. A l’inverse, les vaccins représentent un exemple de bénéfices externes puisque le fait que certaines personnes choisissent de se faire vacciner permet à d’autres individus, qui eux ne consomment pas le vaccin, d’être protégés contre les risques d’infection sans devoir payer pour ce bénéfice. Dans ces circonstances, le marché conduira à une consommation insuffisante de vaccins. L’éducation constitue un autre exemple de bénéfices externes puisque cette activité suscite des avantages aussi bien pour les personnes qui consomment ce service que pour celles qui ne le consomment pas directement mais qui en bénéficient indirectement. Un dernier exemple est constitué par l’agriculture. Elle produit à la fois des biens qui procurent une utilité aux consommateurs des produits agricoles tout en offrant un service bénéfique à l’ensemble de la collectivité grâce à l’entretien du paysage naturel qu’elle assure.
Pour forcer le marché défaillant à intégrer ces externalités, différentes solutions existent. La première consiste à imposer, dans le cas des coûts externes, des normes de pollution maximale (limitation de la vitesse par exemple) ou des consommations obligatoires dans le cas de bénéfice externe (vaccin). La seconde revient à imposer une taxe sur le bien qui est à l’origine de la pollution ou sur la pollution elle-même (taxe sur le CO2). En cas de bénéfice externe, il faut au contraire subventionner le bien générateur des externalités positives. Finalement, la dernière solution, celle qui a été envisagée dans le cadre du Protocole de Kyoto, consiste à mettre en place un système de certificats échangeables. Il consiste à attribuer à chaque partie concernée un droit d’émettre une certaine quantité de pollution. Ce droit est reconnu par des certificats qui sont négociables. Dans ces conditions, l’agent ayant le coût de dépollution le plus faible sera incité à vendre une partie de ses droits de pollution à une autre partie qui est elle caractérisée par un coût de dépollution très élevé et qui sera prête à lui verser un prix nettement supérieur à celui qu’il exige au minimum pour céder ses certificats. Ce système permet donc d’atteindre l’objectif fixé par les pouvoirs politiques (limite de pollution totale admise) tout en minimisant les coûts de dépollution grâce à une répartition optimale de l’effort de réduction du dommage.
Voir : Biens et services collectifs purs — Concurrence — Marché du travail
Yves Flückiger
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Faillite privée àð Désendettement
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Famille
La définition classique de Murdock   Groupe social caractérisée par la cohabitation et la coopération d adultes des deux sexes, dont deux au moins entretiennent des relations sexuelles socialement approuvées et qui élèvent ensemble les enfants nés de cette union ou adoptés ” ne fait plus aujourd’hui l’unanimité tant au plan institutionnel qu’au plan statistique : les cohabitations sans mariage, les familles monoparentales, les couples sans enfant, voire l’autonomie professionnelle des conjoints ou les formes de vie commune sans toit commun (“ living apart together ”) apparaissent comme autant de défis à une définition unique du groupe familial. On est alors amené soit à considérer chacune de ces variantes comme une forme “ incomplète ” de famille, risquant par là de lui appliquer à tort des stigmates de déficit ou de carence, soit à adopter une définition pluraliste qui noie son objet dans la notion de ménage ou de groupe domestique. Cette ambiguïté a d’ailleurs d’immédiates implications en matière de politique familiale : les sociétés occidentales semblent passer d’une régulation “ moderne ” de la famille — privilégiant l’unité du triangle classique mère, père, enfants — à une régulation “ post-moderne ” centrée sur des actions spécifiques ciblées sur l’un ou l’autre de ces acteurs en particulier.
Dans sa forme classique, la famille réunit les trois liens constitutifs de la parenté : le lien d’alliance (entre conjoints), celui de filiation (entre parents et enfants) et celui de germanité (entre frères et sœurs). Mais on peut aussi les “ découpler ” et définir souplement la famille comme un groupe de personnes unies par un lien d’alliance (officiel ou officieux), de filiation ou de germanité et coopérant à leur développement ou leur épanouissement mutuels.
On parle de famille “ nucléaire ” pour désigner un groupe domestique qui ne comprend qu’un exemplaire de chacun de ces trois liens et de famille “ étendue ” pour approcher les situations dans lesquelles l’un ou plusieurs de ces liens se retrouvent à plusieurs exemplaires sous un même toit. La diffusion des familles “ recomposées ” (deuxièmes mariages) et des réseaux de parenté marqués par la dissociation des fondements juridique, biologique et social de la parenté (cas du “ beau-père ” notamment, mais aussi gardes conjointes ou alternées des enfants après divorce) vient toutefois limiter la clarté de cette distinction.
S’agissant du lien d’alliance, on distingue le mariage d’“ affinit頔, basé sur l’inclination mutuelle de conjoints libres de leur propre décision, du mariage d’“ arrangement ”, fondé sur l’influence déterminante de l’entourage et des coutumes tant dans le choix de l’état de mariage que dans celui du partenaire. Notons que, d’un point de vue ethno-historique, il serait faux de coupler systématiquement cette distinction à celle qui opposerait harmonie et violence.
Les variations culturelles du lien de filiation — caractérisé tantôt (comme dans nos sociétés) par sa bilatéralité (les enfants sont reliés symétriquement aux lignées maternelle et paternelle) et tantôt par l’unilinéarité (patrilinéarité ou matrilinéarité, les liens de parenté se développant surtout le long de l’un des lignages) — montrent bien, comme le dit Levi-Strauss, que la parenté n’est pas une simple copie des déterminismes biologiques, mais une institution sociale attribuant des droits et obligations précis à divers acteurs. En ce sens, on ne peut pas opposer brutalement les mérites d’une parenté “ naturelle ” aux défauts d’une parenté “ artificielle ”.
On distingue couramment, pour opposer sociétés traditionnelles et modernes, un mariage-institution, dont le but principal est la survie économique et sociale, à un mariage-compagnonnage à finalité essentiellement affective ou relationnelle. L’importance des heures ouvrées dans les familles modernes (de 25-50 heures/semaines en moyenne) aussi bien que l’allongement de la durée de prise en charge des enfants par les parents ou encore la permanence des fonctions de solidarité de la famille envers la parenté doivent pourtant apporter des sourdines à cette distinction.
R. J. Kellerhals, P.-Y. Troutot, E. Lazega, Microsociologie de la famille, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1994. — G.-P. Murdock, La structure sociale, Payot, Paris, 1972. — L. Roussel, La famille incertaine, Odile Jacob, Paris, 1989. — F. Singly (Dir.), La famille : l’état des savoirs, La Découverte, Paris, 1991.
Voir : Divorce — Droit matrimonial — Famille (Article constitutionnel relatif à la famille) — Famille (Imposition de la) — Famille monoparentale — Famille (Politique de la) — Famille recomposée — Réseau de sociabilité
Jean Kellerhals
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Famille (Article constitutionnel sur la protection de la)
La première disposition constitutionnelle sur la famille (l'article 34 quinquies) avait été adoptée en votation populaire du 25 novembre 1945, à une majorité écrasante par le peuple et par tous les cantons et demi-cantons à l'exception d'Appenzell Rh. Ext. Cette disposition a été reprise en grande partie (article 116) dans la nouvelle constitution fédérale en vigueur dès le premier janvier 2000.
1. Le premier alinéa de l’article 116 Cst prévoit que “ dans l’accomplissement de ses tâches, la Confédération prend en considération les besoins de la famille. Elle peut soutenir les mesures destinées à protéger la famille ”.
La portée de ce texte peut donner lieu à plusieurs interprétations. Selon la doctrine dominante, il équivaut à une “ directive générale ”, à une “ disposition programme ”, à une “ garantie de l'institution familiale ”, à “ un mandat confié au législateur fédéral, ce dernier devant toujours en être conscient et ne laisser échapper aucune occasion d'y donner suite ”.
La disposition en cause ne saurait être l'objet d'une application directe et immédiate ; elle ne crée pas de nouvelle compétence législative et ne fonde aucun droit fondamental individuel à une protection de la vie familiale. Ce dernier est plutôt garanti par le nouvel article 13 Cst (voir infra). Ce premier alinéa n’est applicable que dans les domaines où la Confédération est compétente sur la base d’une autre norme constitutionnelle “ dans l’accomplissement de ses tâches ”. Toutefois, la réalité constitutionnelle vécue diffère et, dans deux domaines au moins, les activités de la Confédération vont plus loin. Ainsi, selon une pratique admise depuis plusieurs années, la Confédération soutient des institutions actives sur le plan de la famille. En outre, une compétence avait été fondée pour la loi fédérale sur les centres de consultation en matière de grossesse. Aussi, ce 1er alinéa est complété par une phrase donnant la possibilité de soutenir des mesures destinées à protéger la famille.
Quant aux besoins de la famille, ils sont d'ordre économique, social, moral et culturel. Etant donné la dimension transversale de la politique familiale, les domaines principaux où le législateur est appelé à tenir compte des besoins de la famille, outre ceux faisant l'objet de l'article constitutionnel, sont le droit civil, la fiscalité, les assurances sociales, les bourses, le monde du travail, l'éducation, le logement, les médias et la protection de l'enfance. Le premier alinéa mentionne la famille sans la définir. La notion de famille est à interpréter dans un sens large, vu que la politique sociale actuelle attache une importance particulière à la présence de l'enfant ; elle comprend, outre la famille nucléaire traditionnelle, les autres formes de familles, telles que familles monoparentales, familles d'accueil, familles consensuelles, familles recomposées et familles comprenant la parenté au sens large. La Confédération est tenue de respecter les autres garanties et dispositions constitutionnelles, en particulier le principe de l'égalité entre femmes et hommes dans la famille, la formation et le travail (art. 8, al. 3, Cst).
Le nouvel article 41 Cst (buts sociaux) aborde également des aspects de politique familiale (cf. infra).
2. Le 2e alinéa attribue à la Confédération la compétence de légiférer dans le domaine des allocations familiales. Il s'agit d'une faculté et non d'un mandat impératif. De plus, la Confédération est autorisée, en particulier, à gérer une caisse fédérale de compensation (compensation financière centrale au niveau national) et à faire dépendre ses prestations financières d'une juste contribution des cantons (cf. alinéa 4).
La Confédération n'a fait qu'un usage très limité de ses attributions en faveur d'une seule branche économique : l'agriculture. La loi fédérale du 20 juin 1952 sur les allocations familiales dans l'agriculture fixe un régime de prestations en faveur des salariés agricoles et des petits paysans, cette dernière notion recouvrant les agriculteurs indépendants dont le revenu ne dépasse pas une certaine limite.
Peu de dispositions de la Constitution ont donné lieu à autant d'interventions parlementaires et d'initiatives (cantonales ou parlementaires) que l'alinéa 2 précité. Elles tendaient à instituer un régime fédéral généralisant les allocations familiales et établissant une compensation des charges au niveau national entre les caisses de compensation familiale. Toutes les tentatives se sont terminées par un échec. Les arguments négatifs qui ont prévalu trouvent avant tout leur origine dans le respect du fédéralisme et du principe de subsidiarité. La question de l'instauration d'une loi fédérale a été reprise dans une initiative parlementaire le 13 mars 1991 (Fankhauser). Pour y donner suite, une solution fédérale permettant d’harmoniser les différents systèmes et de combler les lacunes actuelles est en cours d’examen. La Confédération n'ayant pas épuisé sa compétence, le domaine des allocations est demeuré, en large partie, une tâche des cantons. Tous les cantons ont édicté des lois sur les allocations familiales en faveur des salariés. Dans 10 cantons, les indépendants non agricoles, et dans 5 cantons les personnes sans activité lucrative, peuvent recevoir, sous certaines conditions, des allocations.
3. Selon l'alinéa 3, la Confédération “ instituera une assurance-maternité”. Il s'agit d'un mandat impératif et non d'une faculté. Par ailleurs, elle peut astreindre à verser des cotisations même des personnes non qualifiées pour bénéficier des prestations. Le texte constitutionnel donne au législateur une grande liberté dans les domaines du financement et de l'organisation de l'assurance. Les tentatives en vue d'instituer une véritable assurance-maternité ont été très nombreuses mais elles ont toutes échoué.
L'assurance-maternité se résume pour le moment au plan fédéral à la protection accordée dans le cadre de l'assurance-maladie, de la loi sur le travail et du code des obligations.
La loi fédérale sur l’assurance-maternité a été rejetée par le peuple en juin 1999. Le Conseil fédéral a l’intention de proposer une solution permettant d’améliorer la protection des femmes exerçant une activité lucrative en cas de maternité.
Par ailleurs, certains cantons ont pris l’initiative d’instaurer une assurance-maternité ou des prestations en cas de besoin sur le plan cantonal.
4. Le 4e alinéa habilite la Confédération à déclarer l’affiliation à une caisse de compensation familiale et l’assurance-maternité obligatoires, de façon générale ou pour certaines catégories de personnes. Elle peut en outre faire dépendre sa participation financière aux allocations familiales et à l’assurance-maternité de contributions appropriées des cantons.
5. La nouvelle Constitution fédérale du 18 avril 1999 traite en outre de la famille dans de nouveaux articles.
L’article 11 accorde une protection particulière aux enfant et aux jeunes, encourage leur développement et leur permet d’exercer eux-mêmes leurs droits, alors que l’article 67 prévoit que la Confédération et les cantons tiennent compte des besoins de développement et de protection propres aux enfants et aux jeunes en matière de formation, de culture et d’activités extra-scolaires.
L’article 13 protège la vie privée et familiale en conférant à toute personne le droit d’organiser sa vie et d’entretenir des rapports avec d’autres personnes sans que l’État ne l’en empêche. Le terme de vie familiale doit s’entendre ici au sens large.
L’article 14 garantit le droit au mariage entre deux personnes de sexe biologique opposé et le droit de fonder une famille.
L’article 41 souligne la vocation sociale de l’État fédéral. Les cantons assument pour leur part un grand nombre de tâches de politique sociale et contribuent à la concrétisation de la justice sociale. A l’alinéa 1, lettre c, la Confédération et les cantons s’engagent à ce que les familles en tant que communautés d’adultes et d’enfants soient protégées et encouragées.
L’article 108, 4e alinéa, souligne la dimension sociale que doit prendre l’encouragement de la construction de logements en tenant compte des intérêts des familles, des personnes âgées, handicapées ou dans le besoin.
Enfin, à l’article 119, 2e alinéa, la Confédération protège la dignité humaine, la personnalité et la famille en ce qui concerne l’utilisation du patrimoine germinal et génétique humain.
R. P. Mahon, Commentaire de la Constitution fédérale, art. 34quinquies, Berne, Bâle, Zurich, 1993. — Message du Conseil fédéral sur la réforme de la Constitution fédérale, Berne, 1996. — A. Auer, G. Malinverni, M. Hottelier, Droit constitutionnel suisse, Vol. II, Berne, 2000. — La politique familiale en Suisse, rapport présenté au chef du DFI, Berne, 1982. — Rapport sur la situation de la famille en Suisse, OFAS, Berne, 1978.
Voir : Famille — Famille (Imposition de la) — Famille (Politique de la)
Jean-Marie Bouverat
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Famille d’accueil
C’est une famille qui se propose candidate pour accueillir un enfant ou un adolescent. Cet accueil peut se faire de différentes façons : soit durant la journée, soit lors des week-ends et des vacances, soit à long terme. Chaque famille est informée et évaluée par un service social avant d’obtenir une autorisation qui se base sur des critères bien définis. Elle a besoin d’une préparation et d’un suivi durant toute la procédure du placement. Elle reçoit un défraiement.
Il existe la famille d’accueil professionnelle. Elle se différencie des autres en ce qu’un des deux membres du couple doit avoir une formation sociale et ainsi être apte à accueillir un (des) enfant(s) à problématiques lourdes. Elle reçoit un salaire.
R. D. Bourgault, F. De la Harpe, L’enfant en famille d’accueil, Édisem, Québec, 1988. — M. David, Le placement familial de la pratique à la théorie, ESF, Paris, 1989. — P. Sans, Soins et placement en famille d’accueil, Presse universitaire de Nancy, Québec, 1991. — S. Kajdasz, D. Zeltner, Placement familial, EESP, Lausanne, 1997.
Voir : Droit du placement d'enfant — Protection de l’enfant
Solange Wilson Kajdasz et Dominique Zeltner
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Famille (Imposition de la)
Dans la période récente, on observe une tendance des régimes ûscaux à tenir compte de la situation familiale des contribuables et à proposer des allégements, en particulier en faveur des enfants ou des personnes à charge. Le système du   quotient familial  constitue à cet égard l expression d’une volonté explicite de tenir compte des conditions de vie réelles du ménage. On ne saurait contester l’importance de l’apport de ces mesures à l’allégement du budget des familles dites modestes. Néanmoins, leurs limites sont évidentes. Retenons le cas d’une famille de trois personnes (mère, père, enfant) ; le   cadeau  ûscal lié au quotient familial couvre à peu près la totalité des frais induits par l enfant dans le cas d une famille de cadres, alors que pour un ouvrier non qualiûé, il permet tout juste d acheter les   Pampers  .
La remise d impôts constitue également une mesure relativement répandue destinée à permettre au contribuable en difûculté de faire face à des périodes difûciles. Néanmoins, les conditions d obtention de ces facilités sont souvent particulièrement sévères, voire complexes et ne sont que rarement orientées vers un souci réel de favoriser une véritable réinsertion plutôt qu une simple   remise à ûots  . Il est incontestable que l instrument ûscal pourrait apporter une contribution plus marquée à la lutte contre la paupérisation des familles.
R. T. Fleiner-Gerster, P. Gilliand, K. Lüscher, (Éds), Familles en Suisse, Département fédéral de l’Intérieur, Éditions Universitaires, Fribourg, 1991.
Voir : Famille — Famille (Politique de la) — Quotient familial
jpf
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Famille monoparentale
Ce terme désigne les noyaux familiaux composés par un ou plusieurs enfants avec un seul parent, définition qui comprend des situations très diversifiées. À partir de cadres théoriques et de finalités différents, plusieurs tentatives ont été effectuées pour cerner le concept avec plus de pertinence. Presque universellement, la famille constitue le noyau central de l’organisation sociale ; cependant ses formes et sa structure peuvent varier de façon importante, variabilité qui est aussi en relation avec sa perméabilité et son adaptation aux conditions sociales, économiques et historiques de la société dans laquelle elle est insérée. Par “ famille monoparentale ” on entend un ménage privé constitué par un parent et au moins un enfant, qui n’a pas nécessairement été conçu au sein d’un mariage. D’autres parents peuvent faire partie du noyau familial ; les membres sont unis par des liens économiques, relationnels, juridiques. Le parent monoparental peut être veuf, séparé, divorcé ou célibataire, nettement plus fréquemment il s’agit de femmes.
En considérant le concept du point de vue de la fonction, quelques restrictions peuvent être établies : tout d’abord le terme “ monoparental ” relève de la fonction “ parentale ”, en excluant de ce fait les noyaux familiaux où parents et enfants n’ont pas de liens biologiques (parents/enfants naturels) et/ou juridiques (parents/enfants reconnus ou adoptés). Si l’on attribue au terme “ parental ” non seulement une fonction biologique et juridique, mais aussi éducative, la qualité de famille monoparentale se limiterait aux ménages avec un parent et au moins un enfant pas encore “ adulte ”, acception qui varie : dans les sociétés industrielles avancées l’entrée dans la phase adulte peut être considérée comme concomitante avec la fin des études et l’entrée dans le monde du travail (maximum 25 ans).
Du point de vue synchronique, la condition de monoparentalité se présente donc comme très diversifiée et complexe, et sous l’angle diachronique comme variable, avec des membres qui peuvent s’ajouter et s’éloigner : le départ des enfants et/ou de nouveaux mariages mettent fin à la monoparentalité, d’autres enfants peuvent être insérés et/ou naître, en formant un nouveau noyau nommé “ famille recomposée ”, dont la présence s’accroît dans notre société.
Dans la recherche scientifique, les familles monoparentales ont été étudiées du point de vue démographique, économique, historique, juridique, sociologique, psychologique, anthropologique et psychiatrique.
R. P. Gilliand, M. Lévy (Éds), Familles et solidarité dans une société en mutation, Réalités sociales, Lausanne, 1990. — J.-P. Fragnière (Éd.), Familles et sécurité sociale, Cahiers de l’EESP, Lausanne, 1994. — B. Bastard, L. Cardia-Voneche (Éds), “ Familles monoparentales : monographie ”, in : Les Cahiers médico-sociaux, 31, 2, 1987, pp. 77-144.
Voir : Divorce — Famille — Famille recomposée — Pensions alimentaires (Avance et recouvrement)
Cristina Molo Bettelini et Elio Venturelli
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Famille multigénérationnelle multilocale
Expression de la sociologie de la famille désignant des relations familiales étroites entre des générations vivant en ménages séparés. Chaque génération a son propre ménage, mais elles sont unies par des liens d'affection et de solidarité.
François Höpflinger
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Famille nucléaire
Unité familiale comprenant un couple (marié ou non) et un ou plusieurs enfants. On distingue la famille nucléaire de la famille élargie (grands-parents, oncles, tantes). Contrairement à de nombreuses cultures extra-européennes, le modèle familial de l'Europe centrale se caractérise par l'accent mis sur la famille nucléaire face aux autres relations avec la parenté.
Voir : Famille
François Höpflinger
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Famille (Politique de la)
La politique familiale se définit comme l'ensemble des institutions et des mesures ayant pour objectif de soutenir et de promouvoir la famille, cellule constitutive de la société. Sujet typiquement interdisciplinaire, – dans presque tous les domaines politiques il y a une dimension familiale – elle doit prendre en compte les aspirations et les besoins des familles dans leurs diverses composantes, ce qui rend complexe une mise en œuvre cohérente et rationnelle. Elle se situe dans le champ de tension entre diverses conceptions de politique sociale et d'éthique, entre défense des intérêts individuels de la famille et volonté de réduire les inégalités entre ses membres, entre rôle de l'institution familiale et compatibilité avec l'exercice d'une profession. La politique familiale prend en considération la multiplicité des types de familles de notre société moderne, nucléaires, monoparentales, recomposées, consensuelles, groupes familiaux composés d'enfants adultes ou s'occupant de parents âgés. La famille est généralement appréhendée comme une réalité affective, éducative, culturelle, civique, économique, sociale, morale et spirituelle, comme un lieu de rencontre, d'apprentissage, de dialogue, de partage, de transmission des valeurs et de solidarité intergénérationnelle.
En Suisse, la politique familiale n'est plus une politique d'assistance ou de protection de la famille, où l'octroi de prestations matérielles apparaît en premier plan, mais elle procède de la reconnaissance par la société des prestations irremplaçables fournies au sein des familles et par elles. Inspirée par des motifs de politique sociale et non d'ordre démographique, cette politique ne découle cependant pas d'un concept global ; elle est pragmatique et surtout diversifiée, eu égard au principe de subsidiarité et en particulier au fédéralisme, c'est-à-dire à la répartition des compétences entre Confédération, cantons, communes et organisations privées.
En comparaison européenne, la politique familiale suisse est plutôt modeste.
Dans notre pays, la politique familiale repose notamment sur les articles 116, 41 al.1 let. c, et 11 de la Constitution fédérale ainsi que sur les normes constitutionnelles de certains cantons. Toute mesure de politique familiale doit en outre respecter l'égalité des droits entre hommes et femmes (art. 8 Cst).
Principales mesures matérielles
a) Compensation des charges familiales
Elle est assurée avant tout par :
– les allocations familiales. Il existe des régimes fédéraux pour l'agriculture (petits paysans et travailleurs agricoles) et les fonctionnaires, 26 lois cantonales sur les allocations familiales en faveur des salariés, 10 régimes pour les indépendants non agricoles et 5 pour les personnes sans activité lucrative. Les prestations familiales sont constituées par des allocations pour enfants, des allocations de formation professionnelle, de naissance et d'accueil. Une solution fédérale qui permettrait d'harmoniser les différents systèmes et de combler les principales lacunes actuelles est en cours d'examen.
– les allégements fiscaux. Tant la Confédération que les cantons ont aménagé leur système fiscal dans un sens favorable à la famille, avec différentes formes de correctifs (déductions, barème double, quotient familial). Le Conseil fédéral a annoncé une réforme de l’imposition des familles (impôt fédéral direct).
b) Logement
Dans l'art. 108 Cst, l'aide fédérale à la construction de logements est clairement exprimée comme soutien en faveur des familles également.
c) Prise en compte des charges familiales et des tâches éducatives et d'assistance dans la fixation des prestations des assurances sociales (AVS, AI, assurance-chômage).
d) Protection de la maternité
La loi fédérale sur l’assurance-maternité a été rejetée par le peuple en juin 1999. Le Conseil fédéral a l’intention de proposer une solution permettant d’améliorer la protection des femmes exerçant une activité lucrative en cas de maternité. Par ailleurs, certains cantons ont pris l’initiative d’instaurer une assurance-maternité ou des prestations en cas de besoin sur le plan cantonal.
Autres mesures
Concilier exercice d'une activité lucrative et vie familiale implique un partage des responsabilités à l'intérieur comme à l'extérieur de la communauté familiale. L'instauration d'horaires souples, du travail à temps partiel, d'un système scolaire adapté aux horaires des parents et de lieux d'accueil subventionnés pour les enfants (crèches, garderies) permet de mieux tenir compte des situations familiales.
Autres mesures relevant de la politique familiale : les bourses d'études et d'apprentissage, la prise en compte des besoins de la famille et des enfants dans les médias et les loisirs, les consultations conjugales ou familiales, la formation des parents, la protection de l'enfance, la prévention de la violence et de l'exploitation sexuelle, les services d'aides familiales, les tarifs réduits pour familles dans les transports publics.
Structures
– La Centrale pour les questions familiales à l'OFAS, qui applique les dispositions légales sur les allocations familiales dans l'agriculture, est le service de coordination pour les questions familiales au sein de l'administration fédérale. D'autres attributions en liaison avec les lois cantonales sur les allocations familiales et la politique familiale sur les plans suisse et international lui sont conférées.
– La commission fédérale de coordination pour les questions familiales qui est un organe consultatif du DFI avec un rôle d'information et de recherches.
– Le Groupe parlementaire pour la politique de la famille qui a pour but de défendre les intérêts de la famille aux Chambres fédérales.
– Les conseils de la famille ou des bureaux pour la famille créés par certains cantons (par ex. FR, VD, VS, JU).
– Les communes qui jouent un rôle essentiel dans l'action sociale familiale (crèches, jardins d'enfants, services d'aide familiale, etc.).
– Pro familia qui représente l'organisation faîtière des associations familiales suisses.
– Diverses organisations exerçant leurs activités dans les domaines de la protection de l'enfance, de la jeunesse, des familles monoparentales, des relations parents-écoles, de la formation des parents.
A l'avenir, la politique familiale devra mieux tenir compte des grands défis de notre société : évolution démographique caractérisée par une baisse de la fécondité, diminution de la nuptialité, augmentation du nombre des divorces, des unions libres et des familles recomposées, nouvelle pauvreté et exclusion, augmentation du nombre des personnes âgées, violences intrafamiliales.
R. La politique familiale en Suisse, Rapport présenté au chef du DFI, Berne, 1982. — Rapport sur la situation de la famille en Suisse, OFAS, Berne, 1978.
Sites Internet : www.profamilia.ch — wwwe-bsv. root. admin. ch/
Voir : Allocations familiales — Crèche et garderie — Divorce — Famille — Famille monoparentale — Maternité (Protection de la) — Planning familial — Pro Familia Suisse — Quotient familial
Jean-Marie Bouverat
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Famille recomposée
Le terme désigne communément une famille comprenant un couple et un ou plusieurs enfants dont l’un au moins est l’enfant biologique d’un seul des deux conjoints. Pour mettre en lumière la complexité de la recomposition familiale, les sociologues proposent d’étendre la notion à l’ensemble (très variable) des ménages entre lesquels l’enfant circule : par exemple, selon les cas, foyers du parent gardien, du parent non gardien, de l’ex-femme du beau-père, voire de l’ex-conjoint de la nouvelle femme du père, des grands-parents, des “ beaux-grands-parents ”, etc. La question du lien de parenté est alors posée : qui est parent de qui, qui a quels droits et quels devoirs à l’égard de qui, qui est censé se comporter comment à l’égard de qui ? Particulièrement problématiques sont les relations entre beaux-parents et beaux enfants et les rapports entre (quasi) demi-frères et sœurs. Le droit et les normes n’apportent encore que peu de réponses à ces interrogations.
R. M.-T. Meulders-Klein, I. Théry (Dir.), Les recompositions familiales aujourd’hui, Nathan, Paris, 1993. — F. Hurstel, Paternités plurielles et recompositions familiales, PUF, Paris, 1996.
Voir : Divorce — Famille — Famille monoparentale
Josette Coenen-Huther
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Faute en droit des assurances sociales
La violation par les assurés de certaines obligations est en principe sanctionnée, s’il y a eu faute. Une faute peut être commise avec intention ou au contraire par simple négligence. Or, le Tribunal fédéral des assurances admet aujourd’hui que divers instruments du droit international ne permettent pas la réduction des prestations, dans certaines circonstances, en présence d’une faute non intentionnelle.
En principe, seule la faute grave (il faut réserver l’assurance-chômage) peut entraîner une réduction, voire un refus des prestations. On entend par faute grave l’inobservation des règles élémentaires de prudence que tout homme raisonnable aurait observées dans la même situation et les mêmes circonstances pour éviter un dommage qui, selon le cours naturel des choses, était prévisible. Il faut un rapport de causalité entre la faute et le dommage.
R. R. Schaer, J.-L. Duc, A. Keller, La faute au fil de l’évolution du droit de l’assurance privée, sociale et de la responsabilité civile, Helbing & Lichtenhahn, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1992.
Voir : Prestation de sécurité sociale — Tribunal fédéral des assurances — Sécurité sociale
Jean-Louis Duc
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FEAS (Fédération suisse des employés d’assurances sociales)
La FEAS, créée en 1972, a comme objectif principal la formation professionnelle dans le secteur de la Sécurité sociale. Elle organise à travers toute la Suisse des cours et des examens conduisant au brevet fédéral et au diplôme fédéral en assurances sociales, titres reconnus par la Confédération. Elle met sur pied des manifestations et des séminaires traitant de sujets d’actualité dans le domaine de la sécurité sociale, favorisant ainsi la transmission de connaissances et stimulant le débat d’idées entre personnes engagées et provenant de différents horizons de la Sécurité sociale. Elle publie, d’autre part, trimestriellement, une revue intitulée “Aspects de la Sécurité sociale” qui traite de différentes questions d’ordre social et qui rend compte de la vie des associations régionales.
R. P. Gnaegi, “ La formation en assurances sociales ”, in : Sécurité sociale, 3/1997, pp. 156 ss.
Site Internet : www.socialinfo.ch/aveas/9000feas.htm
Voir : Formation continue — Sécurité sociale
Philippe Gnaegi
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Fédéralisme
Le fédéralisme désigne une forme particulière de l’organisation de l’État, que l’on oppose généralement à la structure unitaire. Mais au-delà de cette classification, peut-être un peu simple, se cachent, à l’intérieur de chacune de ces deux catégories, des différences parfois assez fondamentales. Il suffit de mentionner pour les États unitaires les cas de la France et du Royaume-Uni, et pour les pays fédéralistes, les exemples des États-Unis et de l’ex-URSS. Notons que l’Union Européenne peut être présentée comme l’exemple d’une fédération en gestation.
D’une façon générale, on peut dire que le fédéralisme essaye de concilier trois concepts en principe contradictoires. Tout d’abord, la superposition, concrétisée par l’existence d’organes centraux à qui l’on a confié la réalisation de tâches qui doivent être accomplies de façon identique pour l’ensemble du pays, et qui, de ce fait, sont hiérarchiquement supérieures aux organes des collectivités locales (États, cantons, communes, etc.). Ensuite, l’autonomie, qui laisse aux collectivités locales des compétences propres, qu’elles accomplissent selon des règles adoptées de façon autonome. Enfin, la participation, qui permet aux collectivités locales de contribuer à la formation de la volonté collective au niveau central. C’est la mise en œuvre de ces trois principes, dans le cadre d’un développement historique et d’une culture particulière, qui a donné lieu à des formes parfois très différentes d’États fédéraux.
L’État fédéral suisse ne représente donc qu’un type possible de cette structure de l’État. Les traits distinctifs du fédéralisme suisse sont les suivants : tout d’abord, la Confédération suisse se compose de 20 cantons et de 6 demi-cantons, à leur tour subdivisés en communes, ce qui donne une structure juridique à trois niveaux. Deuxièmement, les cantons, en tant que collectivités composant l’État fédéral suisse, constituent d’une part des entités quasi-étatiques avec un territoire (garanti par la Constitution fédérale), une population, des ressources financières et un pouvoir politique propre. Ils jouissent ainsi d’une large autonomie. D’autre part, ils sont considérés comme des organes de la Confédération, vu qu’ils participent directement à la “ vie politique ” de celle-ci. Troisièmement, les cantons ne sont pas souverains, car il ne sont pas indépendants vis-à-vis de l’extérieur (art. 85 ch. 5, 6 et 102 ch. 7, 8 et 9 de la Constitution) et ils ne sont pas pleinement autonomes à l’intérieur (art. 3 et art. 6 de la Constitution). En quatrième lieu, aucun canton n’a plus de compétences ni d’obligations qu’un autre. Il existe ainsi un principe implicite (car il n’est pas mentionné dans la Constitution) d’égalité entre cantons. Enfin les cantons participent, de manière égale, à la formation et à l’expression de la volonté nationale. En effet, en tant qu’organes de la Confédération, ils participent à la composition des institutions fédérales (Assemblée fédérale, par exemple) ; plus particulièrement, ils doivent être consultés sur tous les projets de loi fédérale. L’exemple le plus significatif, qui sanctionne parfaitement le principe de l’égalité entre cantons, est celui de la composition de la Chambre haute (le Conseil des États) pour laquelle chaque canton, petit ou grand, délègue deux députés, et celui des référendums constitutionnels, pour lesquels sont comptés les votes de chaque canton, en plus des votes du corps électoral de toute la Suisse (c’est l’exigence de la double majorité du peuple et des cantons pour adopter une modification de la Constitution fédérale). Les cantons participent à la vie politique fédérale également à d’autres niveaux : ainsi, par exemple, chacune des collectivités peut adresser directement des propositions (initiatives) à l’Assemblée fédérale. Les cantons sont aussi consultés dans la procédure concernant les prises de décision et enfin, dans certains domaines, les membres des gouvernements cantonaux se réunissent en conférence avec le conseiller fédéral du même domaine pour délibérer sur leurs affaires communes.
Notons enfin que le fédéralisme suisse est souvent qualifié de “ fédéralisme d’exécution ”, pour rendre l’idée qu’en Suisse, contrairement à ce qui se passe dans d’autres États fédéraux, le gouvernement fédéral n’exécute pas lui-même une grande partie de la législation fédérale au moyen de son administration, mais délègue cette tâche aux cantons. Cela permet d’une part d’adapter l’application du droit fédéral aux conditions particulières des cantons, tout en sauvegardant le respect de principes et règles générales édictés par l’État fédéral. D’autre part, cette technique a permis de limiter la croissance de l’administration fédérale.
En guise de conclusion on peut affirmer que si le fédéralisme a créé en Suisse une certaine complexité, une certaine lenteur, un risque d’incohérence et d’inégalités (par exemple dans la différence d’application des lois dans les différents cantons), il présente néanmoins des avantages importants : il permet de tenir compte de la diversité des situations cantonales, il rapproche les citoyens du pouvoir, il permet aux petits cantons d’exercer un certain pouvoir, il assure la protection des minorités et facilite l’expérimentation et l’innovation.
R. J.-F. Aubert, Traité de droit constitutionnel Suisse, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1967, Supplément 1967-1982, 1982. — M. Hottelier, Cours de droit constitutionnel, Faculté de droit, Université de Genève, Genève, 1991-1992. — H.-P. Kriesi, Le système politique suisse, Economica, Paris, 1995. — J. Rohr, La démocratie en Suisse, Economica, Paris, 1987.
Voir : Subsidiarité — Référendum
Paolo Urio
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Fédération romande des consommateurs (FRC)
Association fondée en 1959, à Genève, dont le nom d'origine, Fédération romande des Consommatrices, fut modifié en 1996, perdant alors son caractère d'association féminine.
Les buts statutaires de l'association : informer, défendre et représenter les consommateurs. Elle recense environ 40'000 membres, presque exclusivement en Suisse romande.
Elle atteint ses buts statutaires au moyen :
— du mensuel qu'elle édite : J'Achète Mieux depuis 1966 et qu'on trouve sur le site Internet de la FRC ;
— des bureaux FRC-Conseil dont dispose chaque section (ou canton) et qui répond aux diverses demandes des consommateurs, membres ou non de l'association.
Mais, la FRC joue aussi un rôle essentiel de lobby économique et politique, tant aux plans fédéral que cantonal. On lui doit notamment l'article constitutionnel sur la protection des consommateurs, l'affichage obligatoire des prix, l'affichage obligatoire de la date limite de vente, l'interdiction des phosphates dans les lessives, pour sauver nos lacs et cours d'eau, l'interdiction des CFC pour les objets de consommation courante, pour préserver la couche d'ozone, etc…
Site Internet : www.frc.ch
Voir : Consumérisme — Indice des prix à la consommation — Protection des consommateurs
Pascale Erbeia
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Fédération romande des syndicats patronaux (FRSP)
Fondée en 1947, la Fédération romande des syndicats patronaux (FRSP) est composée de sept sections provenant de tous les cantons romands et du Jura bernois. Fait exception le canton de Vaud où la Fédération patronale vaudoise (FPV), née en 1996 de la fusion des Groupements patronaux vaudois (GPV) et de l’Union vaudoise des associations commerciales, industrielles et de métiers (UVACIM), regroupe les employeurs de ce canton. Les sections de la FRSP rassemblent quelque 200 associations réunissant plus de 36 000 membres et entreprises qui occupent à leur tour quelque 180 000 collaborateurs. Son siège est à Genève auprès de la Fédération des syndicats patronaux (FSP), sa composante quantitativement la plus importante.
Seule association patronale faîtière de Suisse romande, la FRSP est partenaire à ce titre des procédures fédérales de consultation pour les projets de lois et d’ordonnances ; elle est aussi membre de plusieurs commissions fédérales extraparlementaires et d’experts, sous-commissions et groupes de travail où elle représente les intérêts et la sensibilité des employeurs romands. L’hebdomadaire Entreprise romande (créé en 1933 à Genève par la FSP sous le titre d’Ordre professionnel) en est l’organe. Elle est en outre membre fondateur du FODERE, une organisation patronale regroupant le patronat de cinq régions européennes.
Depuis sa création, elle a participé activement à l’essor de l’économie, au partenariat social et à l’édification du réseau des assurances sociales — notamment, dès sa gestation, de l’AVS, par l’entremise de la Caisse interprofessionnelle romande d’assurance-vieillesse et survivants (CIRAV), ainsi que des caisses d’allocations familiales et de prévoyance professionnelle — tant au niveau de la Confédération qu’à celui des cantons où elle est présente.
Site Internet : www.fsp.ch
Voir : Organisations économiques et patronales — Participation — Syndicat
Chiara Crivelli
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Femmes (Émancipation des)
Émanciper : affranchir de la tutelle d’une autorité supérieure (Petit Robert).
Les femmes sont-elles, ici et aujourd’hui, émancipées ? Certes, leurs conquêtes sont nombreuses. Depuis le siècle passé, elles ont accès à la connaissance, facteur important d’une mobilisation possible. Plus récemment, en l97l, le peuple masculin leur octroie le droit de vote ; en l98l, un article constitutionnel leur assure l’égalité ; en l988 un droit matrimonial plus équitable est entré en vigueur.
Pourtant, en pratique, les deux piliers de la domination masculine demeurent. Le premier — contrôle de la fécondité féminine — tend à vaciller depuis l’introduction de contraceptifs fiables : les femmes peuvent en principe choisir d’avoir des enfants si et quand elles le veulent. Mais les pressions sociales restent fortes, qui les poussent vers leur rôle traditionnel. Et l’avortement n’est toujours pas légalisé. Le second — extorsion et contrôle du travail des femmes — est encore solide : non seulement le marché du travail reste ségrégué horizontalement et verticalement, avec toutes les inégalités que cela implique au niveau des salaires, des possibilités de promotion et de la précarité croissante des emplois féminins. Mais encore, dans le cadre de la famille, les femmes restent les seules, en tout cas les principales responsables du travail domestique. Indispensable à la société, dévalorisé, non rémunéré, c’est un travail qui prend beaucoup de temps et qui souvent s’oppose à leurs projets de carrière. Gérer vie professionnelle et vie familiale relève de la course contre la montre.
Et les moyens classiques de la domination masculine perdurent : exclusion du pouvoir, de ses plus hautes sphères en tout cas ; atteinte à l’intégrité physique des femmes : violences domestiques, mais aussi viol, prostitution, etc. Enfin, plus difficile à détecter, la violence symbolique suinte par tous les pores de la société ; cette forme de violence qui n’est pas ressentie comme contraignante et qui fait accepter aux femmes leur statut inférieur.
Non ; malgré certains discours à la mode, les femmes ne sont pas — encore — libérées de la tutelle masculine. Leur combat n’est pas achevé, même et surtout si les buts à atteindre sont aujourd’hui plus flous, la discrimination sexuelle plus sournoise.
R. Commission fédérale pour les questions féminines, Des acquis, mais peu de changements ?, CFQF, Berne, l995. — C. Jobin, La discrimination sexuelle, Éditions d’En Bas, Lausanne, l995. — Office fédéral de la statistique, Vers l’égalité ?, OFS, Berne, l996.
Voir : Avortement — Divorce — Droit du divorce — Droit matrimonial — Égalité (Bureau de l’) — Égalité entre hommes et femmes — Études genre — Prostitution — Travail féminin
Claire Rubattel
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Filiation (Droit de)
Ensemble des normes de droit civil qui règlent l’établissement et les effets du rapport de filiation. À l’exception des dispositions régissant l’adoption, les normes relatives à la filiation sont entrées en vigueur en 1978. À l’égard de la mère, le rapport de filiation résulte de la naissance ou de l’adoption. À l’égard du père, le rapport de filiation est établi par son mariage avec la mère, par reconnaissance ou par jugement. La filiation déploie, notamment, des effets en ce qui concerne l’obligation d’entretien des père et mère, l’autorité parentale (comprenant les mesures de protection de l’enfant), l’administration, l’utilisation et la protection des biens de l’enfant.
Voir : Autorité parentale — Droit de la famille — Obligation d’entretien
Béatrice Despland
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Financement de la sécurité sociale : aspects économiques
La plupart des pays financent leur système de sécurité sociale par des cotisations salariales. On peut adresser quatre critiques à l’encontre de ce mode de financement. La première est liée à l’évolution de l’assiette fiscale sur laquelle sont prélevées les cotisations. Dans la majorité des pays, la part des salaires dans le revenu national diminue. Si cette tendance devait s’accentuer, cela signifierait que les cotisations salariales ne suivront plus la croissance des dépenses sociales qui augmentent au rythme du revenu national. D’autre part, ce mode de financement crée des différences de traitement injustifiées entre les secteurs économiques. Si l’on mesure les contributions patronales à l’assurance-chômage par rapport à la valeur ajoutée brute, il appert que les cotisations versées par les entreprises de la métallurgie représentent en Suisse le double de celles du secteur bancaire. La troisième critique provient du fait que le financement actuel a été construit sur la base d’une société où le statut de salarié occupé à plein temps constituait la forme d’emploi la plus fréquente. Or, on assiste à l’apparition de nouvelles formes d’emplois qui vont poser des problèmes pour les systèmes de protection sociale (temps partiel, indépendants, télétravail, etc.). Finalement, les cotisations salariales tendent à augmenter les coûts indirects du travail. Les entreprises qui licencient reportent sur les autres, celles qui conservent leur personnel, les coûts sociaux de leur propre décision.
Une réforme du financement s’impose. Elle doit être basée sur la finalité de l’assurance considérée. Si celle-ci a pour but essentiel de couvrir un risque, il faut utiliser les cotisations. La voie de la fiscalité doit être en revanche choisie si l’objectif prioritaire est la redistribution du revenu. Dans le cas de l’assurance-chômage, il est ainsi normal d’utiliser les cotisations. Cependant, celles-ci ne devraient plus être appliquées sur les salaires, comme actuellement, mais sur la totalité de la valeur ajoutée brute des entreprises. Avec ce système, les cotisations seraient prélevées non seulement sur la masse salariale mais aussi sur les dividendes, sur les bénéfices distribués ou non, sur les intérêts ainsi que sur les amortissements.
Dans le cas de l’AVS, compte tenu des développements actuels (bonus éducatif) et futurs éventuels (autres activités d’intérêt collectif), le recours à la fiscalité, en complément aux cotisations salariales, s’avère justifié puisque la part redistributive de l’assurance tend à s’accroître. Différentes solutions sont envisageables. La contribution sociale généralisée a le mérite d’être un impôt simple, caractérisé par une assiette très large, proportionnelle au revenu. Elle est plus équitable que la TVA. En revanche, la TVA présente un avantage qu’elle ne partage avec aucun autre impôt. En taxant les importations et en exonérant les exportations, elle n’influence pas la compétitivité des entreprises domestiques sur les marchés mondiaux. Simultanément, les produits fabriqués à l’étranger apportent leur contribution au financement des assurances sociales. De ce point de vue, la TVA agirait comme une mesure de protection sociale de l’économie nationale. Pour départager ces deux impôts comme source de financement complémentaire de l’AVS, il faut pondérer leurs mérites et inconvénients respectifs.
R. Y. Flückiger, S. Suarez, “ Propositions de réforme du financement de la sécurité sociale en Suisse ”, in : P.-Y. Greber (Éd.), La sécurité sociale en Europe à l’aube du XXIe siècle : mutations, nouvelles voies, réformes du financement, Helbing & Lichtenhahn, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1996. — P. Mahon, “ Le financement de la sécurité sociale en Suisse ”, in : Cahiers genevois et romands de la sécurité sociale, No 14, Genève, 1995. — G. Perrin, “ Rationalisation du financement de la sécurité sociale ”, in : Sécurité sociale : quelle méthode de financement ? Une analyse internationale, Bureau international du travail, Genève, 1984.
Voir : Assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur l’) — Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Dumping social — Emploi (Politique de l’) — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Politique fiscale
Yves Flückiger
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Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques
L’analyse juridique du financement des assurances sociales porte principalement sur les systèmes (ou modes) et sur les sources de financement.
Les principaux systèmes de financement sont ceux de la répartition des dépenses, de la capitalisation et de la répartition des capitaux de couverture. La répartition signifie, à l’état pur, que les prestations servies au cours d’une période déterminée sont couvertes par les recettes de la même période. Les recettes sont donc utilisées immédiatement et il n’y a, dans un tel système pur, aucune constitution de réserve mathématique ou d’épargne. Cela suppose une certaine pérennité de l’assureur et une solidarité, horizontale, entre les personnes qui fournissent les recettes et les bénéficiaires de prestations (entre génération “ active ” et génération à la retraite, par ex.). Le système de la répartition est dès lors sensible à l’évolution démographique, en particulier au vieillissement de la population. La capitalisation pure signifie que chaque assuré finance lui-même, par ses cotisations, le capital qui permettra de couvrir les prestations dont il bénéficiera lors de l’événement assuré ; les prestations sont donc financées à l’avance et il existe une garantie, concrétisée par la réserve mathématique, que la prestation pourra effectivement être payée lorsque le droit à la rente prendra naissance ; cette garantie ne porte toutefois que sur la valeur nominale du capital, non sur sa valeur réelle (sensibilité à l’inflation). La capitalisation fait appel à l’idée et au principe de l’assurance, donc d’une certaine équivalence, individuelle, entre cotisation et prestation ; elle n’intègre en revanche pas, en principe, l’idée de la solidarité : chaque assuré finance ses propres prestations. Pour équilibrer avantages et inconvénients des deux modes, la législation peut les combiner (par ex., en Suisse, le premier pilier de la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité est financé essentiellement en répartition, le deuxième en capitalisation). Variante de la capitalisation, la répartition des capitaux de couverture implique que l’assureur constitue, au moment de la fixation de la prestation, un capital qui doit suffire à financer toutes les prétentions futures nées des versements successifs de cette prestation. La différence par rapport à la capitalisation pure réside dans le fait que le capital de couverture doit être constitué dès le moment où le droit prend naissance, et non avant (chaque génération finance donc elle-même ses propres prestations).
Les sources de financement, qui peuvent être combinées, sont les cotisations des assurés — et, éventuellement, de leur employeur — les subsides des pouvoirs publics ainsi que les intérêts des placements de capitaux et les produits des recours des assurances contre les éventuels tiers responsables de l’événement assuré. Les cotisations constituent généralement, en Suisse, la source principale (il arrive cependant qu’il n’y en ait pas). L’aménagement et les modalités de la cotisation sont très diversifiés, d’abord quant aux personnes tenues de cotiser. Il peut s’agir des salariés seuls, mais aussi des indépendants, voire des personnes sans activité lucrative. Pour les salariés, la cotisation est le plus souvent partagée entre l’assuré et son employeur, avec une clé de répartition variable (généralement, par moitié, individuellement, mais aussi parité globale, charge exclusive de l’employeur ou répartition en fonction de l’objet de l’assurance). L’assiette de la cotisation varie elle aussi. Le plus souvent, la cotisation est fixée en fonction de la situation financière de l’assuré : proportionnellement à son revenu ou à son salaire ; plus rarement, sur la base de sa situation sociale (fortune, etc.) ; parfois aussi en fonction des prestations assurées et du risque. Lorsqu’elle est déterminée en proportion du revenu ou du salaire, la cotisation fait intervenir une solidarité “ verticale ”, entre les différentes couches de revenus. Cette solidarité est limitée lorsque l’ordre juridique aménage un plafond du revenu ou du salaire soumis à cotisation. Elle est en revanche beaucoup plus forte lorsque la loi ignore le plafonnement des cotisations tout en fixant un plafond (et même un plancher) dans le domaine des prestations. Les subsides des pouvoirs publics constituent la deuxième source principale de financement, dont l’importance varie d’une branche à l’autre. D’autres variations sont envisageables, quant à l’origine de ces fonds (fiscalité générale ou impôts spéciaux, directs ou indirects, etc.), à leurs modalités d’aménagement (couverture d’une partie des dépenses, fixée par la loi en proportion des dépenses ou sur la base d’un montant forfaitaire) et à leur affectation, spécifique ou non. Il faut souligner que l’effet redistributif vertical de la fiscalité générale est plus grand que celui des cotisations.
Il n’est pas non plus indifférent, sous l’angle du financement de la sécurité sociale, de savoir s’il existe ou non une compensation générale des risques, à l’échelle nationale, c’est-à-dire de déterminer si une branche d’assurance forme une seule caisse, couvrant l’ensemble de la population assurée sur tout le territoire, alimentée de toutes les recettes et débitée de toutes les dépenses, ou si le financement est au contraire divisé en de multiples entités, indépendantes les unes des autres et devant se suffire à elles-mêmes. Si les diverses solidarités horizontales et verticales peuvent déployer leur plein effet dans le premier cas, elles demeurent limitées à une communauté de risques réduite dans les régimes dépourvus d’une telle osmose permanente (“ bons ” et “ mauvais ” risques ne sont pas nécessairement équitablement répartis et ne peuvent donc se compenser).
R. B. Viret, “ Aspects constitutionnels et légaux du financement des assurances sociales en Suisse, Aspects de la sécurité sociale ”, in : Bulletin de la FEAS, 2-3/1996, pp. 63-72. — P. Mahon, “ Le financement de la sécurité sociale en Suisse ”, in : Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, No 14-1995, pp. 75-97.
Voir : Assurance (Principe de l’) — Budget social — Équivalence (Principe d’) — Évasion fiscale — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Politique fiscale — Prélèvements obligatoires — Redistribution des revenus — Revenus (Transfert des) — Solidarité — Transferts
Pascal Mahon
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Fiscalité àð Impôt (et sécurité sociale)
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Flexibilité
Dans le monde du travail, la flexibilité revêt différents aspects. Elle se manifeste en particulier sous la forme d une flexibilité externe lorsque les entreprises embauchent ou licencient du personnel. Si cette première forme de flexibilité n’est pas nouvelle, on constate que les entreprises ont tendance aujourd’hui à ajuster plus rapidement leur main-d’œuvre et à ne plus “ thésauriser ” le personnel en cas de mauvaise conjoncture comme c’était le cas dans le passé. Ce comportement a des conséquences néfastes sur le plan économique et social en développant des contrats de travail à court terme. Dans un monde où les travailleurs changent fréquemment d’emploi, les entreprises n’ont plus intérêt à investir dans la formation continue de leurs employés alors même que le perfectionnement professionnel n’a jamais été aussi indispensable pour prévenir les risques de chômage, accroître les chances de retrouver un travail et améliorer la productivité du personnel en place. La deuxième forme de flexibilité devient, elle aussi, de plus en plus fréquente de nos jours. Elle concerne la flexibilité fonctionnelle qui peut être appréhendée par le biais de la mobilité professionnelle des personnes actives. Selon les données du recensement fédéral de la population, il apparaît que la part des personnes actives ayant changé de profession par rapport à celle qu’elles avaient apprise n’a cessé de croître au cours des 20 dernières années pour toutes les classes d’âges. Cette observation confirme le fait que l’on n’apprend plus aujourd’hui une profession pour la vie mais qu’il faut se préparer à changer de profession, et ceci sans doute plusieurs fois au cours de sa carrière ce qui a des conséquences non négligeables pour les systèmes de formation. La flexibilité se manifeste également au niveau des rémunérations, avec le développement du salaire au mérite ou des revenus différés dans le temps par le biais de plan de “ stock options ”. Ces nouvelles formes de rémunération ont des conséquences sociales importantes. Elles tendent en particulier à individualiser les rapports de travail et à réduire ainsi le rôle et le pouvoir des syndicats dans les négociations collectives. Elles peuvent aussi conduire des travailleurs à accepter des salaires immédiats plus bas dans l’espoir d’un gain futur aléatoire au moment de la réalisation des options. La flexibilité se manifeste finalement sur le plan chronologique avec l’extension des horaires atypiques, l’annualisation du temps de travail, l’accroissement du temps partiel et les transitions de plus en plus fréquentes entre les différents statuts d’occupation, notamment entre le salariat et l’indépendance.
R. M. Paysant, “ Les nouveaux modèles de travail ”, in : Futuribles, vol. 207, mars 1996, pp. 43-48.
Voir : Flexibilité du travail — Indépendants— Marché du travail — Temps partiel — Travail (Nouvelles formes de)
Yves Flückiger
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Flexibilité du travail
Depuis les années 1980, les rythmes de travail se sont accélérés, les horaires sont devenus de plus en plus instables, le travail par équipe (2x8 ou 3x8) a progressé. En Suisse, en 1991, selon l’Office fédéral de la statistique, 27,8 % des personnes actives travaillaient de manière régulière ou occasionnelle le dimanche et 10,4 % occupaient un poste de travail où le travail de nuit est normal ou éventuel ; en 1999, elles étaient respectivement 39,6 % et 18,8 %. Une forte progression donc : les salariées et salariés travaillent toujours davantage la nuit, le samedi et le dimanche. Adapter au maximum la durée et les horaires de travail aux besoins de l’employeur implique en particulier la disparition du temps de présence sur le lieu de travail qui n’est pas directement lié à l’accomplissement de la prestation de travail. La flexibilité du travail contribue à multiplier les contraintes qui pèsent sur le personnel. On assiste à une combinaison entre, d’une part, un travail toujours plus répétitif, une contrainte de temps de plus en plus forte et, d’autre part, une exigence d’attention de plus en plus soutenue. Cette intensité accrue du travail provoque notamment une augmentation des troubles musculo-squelettiques. Les conséquences des horaires décalés sur la santé et sur la pénibilité du travail sont importantes ( par exemple on constate un accroissement des troubles du sommeil et du stress, augmentation des maladies cardio-vasculaires et des accidents de travail). Une situation d’urgence empêche de construire de bonnes conditions de travail. Changer de position, souffler un instant, aménager son espace, choisir et trouver l’outil ou le document adapté : ces comportements sont de plus en plus difficiles, voire rendus impossibles. La flexibilisation du temps de travail diminue la maîtrise globale du temps quotidien, elle constitue par-là une forme de dépossession et un facteur de fragilisation sur le plan psychologique.
Des horaires atypiques ont pour effet de perturber la vie sociale, familiale et les activités culturelles. Les mères qui travaillent de nuit pour pouvoir s’occuper de leurs enfants pendant la journée le font au détriment de leur temps de récupération personnelle. La programmation des périodes de travail est de moins en moins prévisible. L’emploi du temps change chaque jour. De même, le nombre de jours travaillés varie d’une semaine à l’autre. Or les horaires de travail déterminent les périodes de sommeil, de prise des repas, les activités sociales et familiales. Les divers moments de la journée et de la nuit ne sont pas de manière égale propices à toutes ces activités, par exemple à l’alimentation ou au sommeil.
La multiplication des emplois précaires, notamment par le biais du travail temporaire et à temps partiel irrégulier, constitue un autre instrument de la flexibilisation du travail. Les conditions de travail des travailleuses et travailleurs précaires sont très souvent nettement plus mauvaises que celles qui découlent des contrats de durée indéterminée ( de nombreuses conventions collectives de travail ne sont par exemple pas applicables aux salariés à temps partiel). Le personnel le plus précaire est soumis à des rythmes de travail davantage contrôlés par la hiérarchie de l’entreprise, leurs pauses sont fréquemment écourtées, voire repoussées. Ils et elles travaillent plus souvent en équipe et sont plus exposés aux risques d’accident. Avec cette main d’œuvre rendue extrêmement malléable, les entreprises peuvent coller au plus près aux impératifs du marché et ajuster leurs activités à ses fluctuations. La flexibilité du travail est donc imposée pour améliorer la rentabilité. La flexibilité du travail, c’est cette subordination accrue du salarié et de la salariée aux exigences d’une organisation du travail et de la production répondant aux intérêts de l’employeur.
R. J.-C. Barbier, H. Nadel, La flexibilité du travail et de l’emploi, Dominos/Flammarion, Paris, 2000. — M. Gollac, S. Volkoff, Les conditions de travail, Repères/La Découverte, Paris 2000. — Dossier Temps de travail : Temps modernes / horaires antiques, Réseau “ Raisons d’agir sur les lieux de travail ”, Lausanne, 1999. — J.-M. Dolivo, B. Rosende H., “ Dossier Travail, Ruptures de la solidarité dans le travail salari頔, in : Aspects de la sécurité sociale, FEAS, 2000.
Voir : Déréglementation — Marché du travail — Précarisation (Mécanismes de la) — Précarité — Temps de travail — Tertiarisation — Travail — Travail (Loi sur le) — Travail (Nouvelles formes de) — Travail sur appel — Travaux atypiques et sécurité sociale
Jean-Michel Dolivo
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Flux tendus (Méthode des)
Ce mode d’organisation de la production permet d’adapter le niveau des consommations intermédiaires à celui de la production. Il a pour objectif la disparition des stocks. Cette méthode participe à la réduction des coûts de production. Elle ne peut être mise en œuvre que par des entreprises qui peuvent obtenir de leurs fournisseurs l’exécution de commandes à très court terme (ces derniers supportant alors le coût de stockage des produits à livrer). Les grèves des transporteurs routiers, par exemple, ont mis en évidence la fragilité inhérente à cette stratégie industrielle. Elle a en outre des effets parfois très pénibles sur les conditions de travail des agents de la production, en particulier sur l’organisation de leur vie familiale.
Voir : Flexibilité du travail — Postfordisme
jpf
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Fondation 19 - Fondation suisse pour la promotion de la santé.
Institution nationale qui stimule, coordonne et évalue des mesures destinées à promouvoir la santé.
La Fondation 19 qui tient son nom de l’article 19 de la LAMal, agit au niveau national mais aussi local, pour la santé de toutes les personnes qui vivent en Suisse. Crée en 1999, et s’appuyant sur les objectifs formulés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), son objectif est de “ stimuler, coordonner et évaluer des mesures destinées à promouvoir la sant頔.
La notion de Promotion de la santé qui est au centre de son activité se traduit dans les différentes mesures par l’accent mis sur l’encouragement de chacun à être responsable de sa santé, ainsi que sur l’amélioration du bien-être et de la qualité de vie. Dans cette perspective, les engagements de la Fondation prennent des formes multiples : développement de programmes prioritaires, soutien de projets, campagnes et actions visant le grand public sur le thème de la promotion de la santé. A terme, la Fondation s’est donné pour mission d’élaborer une “ Politique nationale de promotion de la sant頔.
La Fondation propose un service d’informations et de documentation sur le thème de la promotion de la santé et son magazine FOCUS permet de se tenir informé des nouvelles dans le domaine.
R. D. Nutbeam, Glossaire Promotion de la santé, Éditions Promotion de la santé, Gamburg, 1998.
Site Internet : www.promotiondelasante.ch
Voir : Éducation pour la santé — Droit à la santé — HMO — Médecine sociale et préventive — Politique de la santé — Prévention — Prévention tertiaire — Santé publique
Sanda Samitca
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Fondations collectives et communes (prévoyance professionnelle)
Il s’agit de fondations de prévoyance en faveur du personnel, auxquelles plusieurs employeurs sont affiliés. Nous ne sommes donc pas ici dans le “ cas classique ” d’une caisse de pensions destinée à protéger les salariés d’un seul employeur. Les fondations collectives et communes assurent plus de la moitié des salariés assujettis à la prévoyance professionnelle en Suisse (à raison des deux tiers pour les premières, d’un pour les secondes), c’est dire leur importance pratique.
Dans le cas d’une fondation collective, chaque employeur signe un contrat d’affiliation et constitue une caisse de prévoyance au sein de l’institution collective ; chacune de ces caisses fait l’objet d’une comptabilité propre, qui porte sur le financement, les prestations, la gestion de la fortune. Ces institutions collectives sont généralement créés par des compagnies d’assurance ou par des banques.
Les fondations communes sont généralement mises sur pied par des associations professionnelles, pour éviter à leurs membres de devoir mettre en place leur propre infrastructure. Ces institutions ont en principe une comptabilité commune et un capital de prévoyance commun. Les employeurs sont soumis au même règlement, lequel peut comprendre plusieurs plans de prévoyance.
R. R. Molo, Aspects des fondations collectives et communes dans la prévoyance professionnelle suisse, Schulthess, Zurich, 2000.
Voir : Prévoyance professionnelle — Trois pilier
Pierre-Yves Greber
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Fondements du droit de la sécurité sociale
Le concept de fondements se rapporte au droit international et au droit européen de la sécurité sociale. Il a été élaboré par Guy Perrin (1926-1992), l’un des maîtres de cette discipline.
Les fondements réunissent deux sortes d’instruments juridiques. Il s’agit tout d’abord des textes constitutifs ou de compétences. Ils sont indispensables : sans eux, une organisation internationale ou de type communautaire n’est pas autorisée à agir ni à adopter des instruments juridiques. Les textes constitutifs peuvent contenir une compétence générale en matière sociale – c’est le cas de la Charte des Nations Unies, de la Constitution de l’OIT (dès sa révision de 1946 : inclusion de la Déclaration de Philadelphie) et du Statut du Conseil de l’Europe – ou certaines compétences, plus ou moins limitées, c’est le cas du Traité instituant la Communauté européenne.
La deuxième sorte d’instruments est composée des textes de principes. Ils ne sont juridiquement pas indispensables et ils doivent eux-mêmes reposer sur un texte constitutif. Pourtant leur rôle de guide, leur valeur symbolique leur fait mériter la qualification de fondements : ils reconnaissent le droit à la sécurité sociale (Déclaration universelle des droits de l’homme, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, Nations Unies, 1948 et 1996), sans aucune discrimination (Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes, Nations Unies, 1969 et 1979). Ils peuvent aussi affirmer et développer un certain nombre de droit sociaux pour guider l’organisation concernée et ses États membres (Charte sociale européenne, Charte sociale européenne révisée, Conseil de l’Europe, 1961 et 1996 ; Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, 1989).
Les instruments relatifs à l’harmonisation, à la convergence et à la coordination des systèmes de sécurité sociale doivent reposer sur un texte constitutif ; ils peuvent trouver une inspiration, un guide parmi les textes de principes.
R. G. Perrin, Les fondements du droit international de la sécurité sociale, Droit social, 1974, pp. 479 ss.
Voir : Charte sociale européenne — Conseil de l'Europe — Convergence — Coordination — Harmonisation — Organisation internationale du travail
Pierre-Yves Greber
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Fonds cantonal pour la famille (FCF)
En 1985 est créé le Fonds cantonal pour la famille (FCF). Il a pour mission de venir en aide, dans le canton de Vaud, aux familles qui se trouvent momentanément en difficultés financières. Les montants attribués ne sont pas une assistance, mais un coup de pouce pour aider à passer un cap difficile et retrouver l’équilibre du budget familial. Les prestations ne sont pas fixées en application de limite de revenu ou de fortune précise. C’est plutôt l’insuffisance des revenus par rapport à tel ou tel besoin qui détermine l’octroi des prestations. Le FCF intervient de manière subsidiaire aux régimes cantonaux d’aide individuelle (subside LAMV, Brapa, par ex.) mais il ne se substitue pas à l’aide sociale vaudoise.
Les allocations familiales peuvent être complétées ou octroyées aux personnes travaillant à temps partiel ou ayant perdu leur droit au salaire et une allocation de naissance extraordinaire peut être octroyée en cas de chômage.
Voir : Allocations familiales — Famille — Famille (Politique de la)
Elie Benmoussa
[Certains cantons suisses étudient la possibilité de mettre en œuvre des mesures analogues. Réd.]
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Fonds de pensions (Modèle chilien)
La Banque Mondiale est devenu l’une des organisations phare en matière de politique de pensions de retraite. Son rapport de 1994 “Eviter la crise du vieillissement. De nouvelles politiques pour protéger les personnes âgées et promouvoir la croissance ” (seule une version abrégée existe en français. “ Curieusement ”, elle assouplit le message du texte anglais). constitue tout à la fois une condamnation sans équivoque des régimes publics de pensions et la promotion d’une nouvelle orthodoxie. La Banque défend une position extrêmement précise, prenant le contre-pied complet de celle traditionnellement défendue par les spécialistes de sécurité sociale. Il faut renoncer aux régimes de pensions par répartition à prestations définies, c’est à dire ceux dans lesquels le financement des pensions des retraités repose sur les cotisations des actifs (comme l’AVS ) et qui, dans la majeure partie des cas, prometent une pension fonction du salaire d’activité (comme les régimes de retraites français et allemands). La solution à la crise du vieillissement et à la faillitte des régimes de pensions passe par l’adoption de régimes totalement capitalisés (on épargne pour sa propre pension comme dans le deuxième et troisième pilier en Suisse), gérés par le secteur privé et à cotisation définie. Pour la Banque, Le Chili est le modèle à suivre.
Le modèle chilien est mis en place en 1981 dans le cadre des mesures de libéralisation économiques impulsées par le gouvernement Pinochet. Les principales caractéristiques du nouveau régime sont le passage à la répartition intégrale. Les cotisations finissent sur des comptes individuels, gérés par des institutions privées, les “ administradoras de fondos de pensions ” (AFP) en concurrence. Les cotisants peuvent choisir leur AFP et en changer. Les employeurs ne participent plus aux cotisations. La valeur de la pension de vieillesse est déterminée par le montant des cotisations versées et les intérêts perçus. A l’âge de la retraite , le travailleur peut soit utiliser le solde de son compte pour acheter une rente viagière auprès d’une compagnie d’assurance, soit procéder à des retraits échelonnés de son compte, dont la valeur tient compte de l’espérance de vie. L'État, quant à lui, apporte sa garantie en cas de défaillance des AFP et paie la pension minimale pour les travailleurs qui ont cotisé pendant vingt ans et qui n'ont pas réussi à constituer un capital suffisant.
Les points faibles du système ont été mis en éidence par de nombreux experts. Tout d’abord se pose le problème du nombre croissant de personnes qui ne payent plus leurs cotisations, notamment dans les catégories à bas revenu. C’est ainsi qu’il n’y a plus que 55 % des actifs qui assument leurs obligation contre 79 % dans l’ancien système (1999). Or, le montant de la pension n’est plus garantie, mais directement liée au montant de l’épargne. En outre, les salariés supportent en totalité la totalité des coûts (et des risques) du nouveau système, même si la garantie étatique offre aux chiliens une certaine sécurité.
R. R. Beattie, W. McGillivray, “ Une stratégie risquée : réflexion sur un rapport de la Banque Mondiale ”, in : Revue internationale de sécurité sociale, vol 48, 1995, pp. 5-22. — F.-X. Merrien, “ Les nouvelles politiques sociales de la Banque Mondiale. Le cas des pensions ”, in : Revue Internationale des sciences sociales, UNESCO, Paris, 2001. — J. Williamson, F. Pampel, “ La privatisation de la sécurité sociale est-elle une solution judicieuse pour les pays en développement?  ”, in : Revue internationale de la sécurité sociale, No. 4, 1998, pp. 3-34. — World Bank, Averting the old age crisis. Policies to protect the old and promote growth, DC, Washington, 1994.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Banque mondiale (B.I.R.D.) — Troisième pilier (ou prévoyance individuelle)
François-Xavier Merrien
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Fonds monétaire international (FMI)
Créé en 1945, le FMI regroupe actuellement 183 États-membres et son siège est à Washington. Il poursuit notamment les objectifs suivants : la coopération monétaire internationale, l’expansion du commerce international, la stabilité des changes et l’établissement d’un système multilatéral de règlement des transactions courantes entre les États-membres. A cette fin, il mobilise les instruments suivants : la surveillance, l’assistance financière (pour préserver au mieux l’équilibre de la balance des paiements) et l’assistance technique. L’aide financière accordée par le FMI est cependant conditionnée par l’adoption de mesures d’ajustement structurel mettant l’accent sur certaines grandes variables macro-économiques (notamment le déficit du secteur public et la dette extérieure) et sur des éléments clés du système de formation des prix (le taux de change, le taux d’intérêt, le niveau des salaires et des prix des produits de base). Cette insistance sur la stabilité économique impose des sacrifices douloureux aux groupes les plus vulnérables des pays concernés et l’action du FMI, au même titre que celles des autres institutions financières multilatérales, fait l’objet de nombreuses et vives critiques.
R. M. Aglietta, S. Moatti, Le FMI, De l’ordre monétaire aux désordres financiers, Economica, Paris, 2000. — M. Lelart, Le Fonds monétaire international, 2e éd., coll. Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1995.
Site Internet : www.imf.org
Voir : Banque mondiale (BIRD) — Développement durable — Indice de développement humain — Organisation des nations unies (ONU)
Jean-Michel Bonvin
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Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNRS)
Cet organisme de promotion de la recherche au niveau national joue un rôle important dans le développement des sciences sociales. Il soutient également la publication d'ouvrages scientifiques et publie un catalogue de ces travaux (à disposition sur simple demande). Une part importante des études dont s'inspirent les auteurs de ce dictionnaire a été réalisée dans le cadre des programmes de recherche qu'il a mis en place.
Informations : Fonds national suisse de la recherche scientifique, Wildhainweg 20, 3001 Berne, Tél. 031/308 22 22.
Site Internet : www.snf.ch
Voir : Programme national de recherche No 29 — Programme national de recherche No 32 — Programme national de recherche No 45
Sophie Barras Duc
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Formation continue
L’abondante littérature sur l’éducation des adultes et la très grande diversité des organismes dispensant des programmes de formation ont pour effet de rendre équivoque le vocabulaire utilisé. Ainsi le concept de “ formation continue ” peut prendre des sens plus ou moins précis selon les auteurs, et il est fréquemment utilisé comme synonyme d’“ éducation des adultes ”.
Pour tenter de clarifier ces notions, la Fédération suisse pour l’éducation des adultes (FSEA) a proposé, en 1990, de réserver l’expression “ formation continue ” aux offres de complément ou d’approfondissement de la formation professionnelle de base, et de donner un sens générique à l’appellation “ éducation des adultes ” pour désigner tous les programmes de formation pour adultes. Cependant les anciens usages perdurent : le récent rapport de l’Office fédéral de la statistique, La formation continue en Suisse, utilise en effet l’expression de son titre au sens large d’“ éducation des adultes ” défini par la FSEA.
La formation continue est devenue une préoccupation politique en Suisse, lorsqu’à la fin des années quatre-vingt le manque de personnel qualifié est apparu comme un signe d’inadaptation du marché du travail au développement de l’économie. Des mesures spéciales ont alors été prévues par le Parlement. Mais le changement de conjoncture économique a rapidement élargi les finalités de cet instrument de politique sociale, appelé désormais à assurer aussi la réinsertion sociale et le reclassement professionnel des chômeurs.
Ces nouvelles finalités fondent le succès de la formation continue dans les discours politiques et lui confèrent une image globalement positive auprès de l’opinion publique. Mais cette unanime sympathie n’est pas sans illusion. Elle repose en partie sur notre croyance moderne au potentiel “ miraculeux ” de l’éducation, et elle occulte les fortes divergences dans les attentes des différents acteurs sociaux.
Aussi convient-il de ne pas se cacher le fait que l’éducation des adultes en général demeure précaire en Suisse. L’offre est d’abord essentiellement privée, et, contrairement à la scolarité obligatoire et à la formation professionnelle, ce secteur ne dispose pas d’un statut de plein droit dans le système éducatif. Il n’existe aucune loi fédérale à son propos, alors même qu’en 1992-1993 par exemple, près de 2 millions de personnes de 20 à 74 ans résidant en Suisse (40 % de ce groupe d’âges) ont suivi au moins un cours.
R. M. Cotting, D. Golay, B. Morand-Aymon e. a., Formation continue et prévention du chômage, FASE, Cahiers de la section des sciences de l’éducation, No 64, Genève, 1992. — Fédération suisse pour l’éducation des adultes : Plan de développement de la FSEA pour les années 90, FSEA, Zurich, 1990. — Office fédéral de la statistique : La formation continue en Suisse. Enquête de 1993, OFS, Berne, 1995.
Voir : Adultes (Éducation des) — Éducation (Politique de l’) — Formation continue (Centre d’étude de la) — Inégalité des chances
Joseph Coquoz
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Formation continue (Centre d’études et de) (CEFOC)
Créé en 1978, dans le but de fournir aux travailleurs sociaux des moyens de poursuivre leur formation, cette institution dépend de l’Institut d’études sociales (I.E.S.) de Genève. Elle offre une large gamme d’enseignements courts ou plus longs. À ce titre, elle participe au développement de l’étude de la politique sociale en Suisse.
Site Internet : www.ies-geneve.ch
Voir : Formation continue — Travailleurs sociaux (Formation des)
jpf
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Formation continue en travail social (Diplôme de)
Ce cycle de formation supérieure est destiné aux professionnels de l'action sociale. Il est organisé sur la base d'une convention signée par : l'Université de Neuchâtel (Institut de sociologie et de science politique et Collège de psychologie et des sciences de l'éducation) ; l'Université de Genève (Département de sociologie, Certificat de perfectionnement en politique sociale) ; l'Université de Fribourg (Chaire de travail social) ; l'Université de Lausanne ; l'École d'études sociales et pédagogiques de Lausanne ; l'Institut d'études sociales de Genève ; l'École d'éducateurs spécialisés de Fribourg ; le Centre de formation pédagogique et social (CEPS) de Sion. La politique sociale représente une part substantielle de l'enseignement qui y est dispensé.
Site Internet. www.unine.ch/foco
Voir : Fonds national suisse de la recherche scientifique  Formation continue  Perfectionnement en politique sociale (Certificat de)  Travailleurs sociaux (Formation des)
Sophie Barras Duc
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Formation permanente àð Formation continue
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Formation professionnelle
En Suisse, les cantons sont pour l’essentiel souverains en matière d’éducation, à l’exception de la formation professionnelle qui relève de la compétence de la Confédération. Placé sous la responsabilité de l’Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie (OFFT), lequel dépend du Département fédéral de l’Economie, le système de formation professionnelle est actuellement en profonde mutation. Devant à la fois répondre à la demande sociale de formation de la population et aux exigences du monde économique, la formation professionnelle fait l’objet d’enjeux importants.
La première loi sur la formation professionnelle a vu le jour en 1930. Actuellement, c’est la Loi fédérale du 19 avril 1978 sur la formation professionnelle (LFPr) qui régit les prescriptions concernant l’orientation professionnelle, la formation professionnelle de base, le perfectionnement professionnel et la recherche en matière de formation professionnelle dans les domaines de l’industrie des arts et des métiers, du commerce et du service de maison. La maturité professionnelle qui permet l’accès aux Hautes écoles spécialisées (HES) a été introduite en 1993.
Le type de formation professionnelle le plus répandu est l’apprentissage effectué simultanément dans une entreprise et dans une école professionnelle ou dans une école de métiers. La formation professionnelle s’adresse aussi aux adultes notamment grâce à l’article 41 (possibilité de passer l’examen pour l’obtention du Certificat fédéral de capacité (CFC) après une expérience professionnelle d’une fois et demi le temps prévu de la durée de formation), aux examens de maîtrise professionnelle et la formation professionnelle supérieure.
En 2000, on comptait en Suisse, 168'319 apprentis. Cette même année, 6878 certificats de maturité professionnelle ont été délivrés dont moins de 25 % à des femmes. Les disparités de participation à la formation professionnelle sont importantes à tous les niveaux en fonction notamment du sexe et de la région linguistique. Si deux tiers des jeunes Suisses alémaniques optent pour un apprentissage, ils ne sont que la moitié à le faire en Suisse romande. La tendance générale est à la baisse de participation des jeunes à la formation professionnelle depuis les années 80 et à une augmentation des choix d’accès à une formation générale. En Suisse, 14 % des jeunes restent sans formation post-scolaire, l’accès à une formation professionnelle est particulièrement problématique pour les jeunes à faible bagage scolaire et issus de l’immigration récente.
La législation en matière de formation professionnelle se fondait sur un article constitutionnel datant de 1874 limitant les compétences de la Confédération aux domaines de l’industrie, des arts et des métiers, du commerce, de l’agriculture et du service de maison. La nouvelle constitution fédérale adoptée le 18 avril 1999 a étendu ses compétences à tous les domaines de la vie active et notamment aux professions du domaine social, de la santé et artistique.
Pour faire face aux mutations technologiques et structurelles de l’économie, à la nécessité de reconnaissance des titres et des diplômes dans le cadre de la libre circulation des personnes (Suisse-UE), une nouvelle loi sur la formation professionnelle est en préparation et devrait entrer en vigueur au plus tôt en 2003. Elle regroupera tous les domaines de formation excepté le niveau tertiaire HES. Les mots clés de ce projet de loi-cadre sont flexibilité dans l’organisation des formations, différentiation en fonction des besoins et des demandes des individus, des régions et des branches économiques, perméabilité en proposant de rompre le lien entre formation et procédure de certification et apprentissage tout au long de la vie. Les innovations principales sont l’introduction d’une formation pratique pour les personnes avec difficulté aboutissant à une attestation, la création d’écoles spécialisées dans les domaines des hautes technologiques, des services, du social et de la santé et un concept de formation supérieure non HES. Dans le domaine de la formation professionnelle continue, la Confédération interviendra pour la promotion, l’information et la coordination des offres de formation.
R. H. Barmettler, “ La révision de la loi sur la formation professionnelle – les principales nouveautés ”, in : La vie Économique, Berne, 2, 2001. — J.-P. Tabin, Formation professionnelle en Suisse. Histoire et actualité, Réalités sociales, Lausanne, 1989. — E. Wettstein, Aperçu de la formation professionnelle en Suisse, DBK, Lucerne, 2000.
Site Internet : www.admin.ch/bbt/f — www.berufsbildung.ch (Portail suisse pour la formation professionnelle)
Voir : Apprentissage  Éducation (Politique de la)  Jeunes socialement vulnérabilisés
Nicole Richard
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Fracture sociale àð Cohésion sociale
Fraude fiscale àð Évasion fiscale
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G7 (Groupe des 7-8)
L Allemagne, les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne et le Japon constituent le “ groupe des 5 ” (accords du Plaza) qui devient le G7 avec le Canada et l’Italie. Depuis 1976, les réunions du G7 sont un lieu de concertation sur les questions économiques et financières mondiales. Les “ sommets ” annuels (et les réunions ministérielles et d’experts) du G7 s’intéressent aujourd’hui à toutes les questions internationales et sont de plus en plus un moyen de promotion de l’image des participants à des fins de politique intérieure. Les pays du G7 représentent moins de 10 % de la population mondiale mais près de 40 % du PIB mondial. En 1997, le G7 est devenu le G8. La Russie a été admise dans le Club avec quelques restrictions, notamment en matière économique.
jpf
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Garderie àð Crèche et garderie
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Généalogie
Recherche sur les sexes, l'histoire familiale, l'arbre généalogique (connaît un regain d'intérêt de nos jours).
François Höpflinger
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Génération
Le concept de génération est développé dès le XIXème siècle dans le cadre de réflexions sur l’histoire, à la quête d’une démarche scientifique ; la notion de génération apporte un outil méthodologique qui semble permettre de de mesurer le temps historique, en comprendre et en expliquer les mouvements. C’est K. Mannheim, au début du XXe siècle, qui développera une conception, considérée aujourd’hui comme classique, des générations. Dans la recherche, la notion de génération est utilisée dans trois contextes différents : a) pour la différenciation de l'ascendance et de la descendance dans les familles (génération généalogique), b) comme catégorie pédagogico-anthropologique, désignant le rapport entre une génération qui transmet et une génération qui acquiert (génération pédagogique), et c) pour la différenciation de groupes collectifs historiques ou sociaux ayant des orientations culturelles ou des intérêts communs du fait qu'ils ont grandi dans le même temps (génération historico-sociale).
Selon K. Mannheim, le problème des générations est essentiel pour comprendre le changement social et relève de la recherche des processus sociaux qui strucurent le phénomène : il s’inscrit ainsi dans une démarche sociologique. Être né à une certaine date ne procure pas en soi une appartenance collective, sinon d’ordre démographique, mais assigne un positionnement dans un processus historique. Mannheim propose également une analogie avec la classe sociale, tout en précisant qu’il s’agit de réalités différentes avec une certaine ressemblance structurelle. On ne peut parler de “ génération effective ” que dans la mesure où se crée un lien entre les membres d’une génération (sinon, il parle de “ génération potentielle ”, fondée sur le rythme biologique de l’existence, avec une durée limitée et un vieillissement).
Dès les années 50, on assiste à un regain d’intérêt pour le concept de génération, mais l’idée première qui consistait à mieux expliquer et comprendre l’histoire disparaît au profit d’études très diversifiées et avec des ambitions théoriques plus modestes et moins globalisantes. Il s’agit plutôt d’analyser par ce biais certains aspects de l’organisation sociale, dans le cadre de la sociologie de la famille, de la jeunesse ou encore des âges. C’est un concept qui sera surtout, dans un premier temps, utilisé pour définir des jeunes générations (mai 68, hippies, grunge, baby-boom, etc.), mais que l’on retrouve peu à peu associé à d’autres âges de la vie. Souvent relayé par les médias (et dans le sens commun), de manière plutôt réductrice (désignation de l’ensemble des membres d’une génération selon un repère unique tel qu’une guerre, une mode, une crise, etc.), ce concept est aussi de plus en plus fréquemment utilisé dans d’autres disciplines, telles que l’économie, la démographie ou la psychologie.
C. Attias-Donfut note un certain glissement de la notion de génération à la notion d’âge, dont peut résulter un certain nombre de notions dérivées, avec des utilisations variables mais aussi une certaine confusion. Elle définit deux séries de notions : celles désignant un ensemble de personnes apparentées à une générations (cohorte, classe d’âge, groupe d’âge) et celles qui se réfèrent à un intervalle de temps qui sont apparentés à l’âge (phase de vie, échelon d’âge, périodisation).
R. Karl Mannheim, Le Problème des générations, Essais & Recherche, Nathan, Paris, 1990. — Claudine Attias-Donfut, Sociologie des générations. L’empreinte du temps, PUF, Paris, 1998.
Voir : Cycle de vie — Génération sandwich — Institut national âges et générations (INAG) — Jeunesse — Jeunesse (Subculture de la) — Vieillesse
Valérie Hugentobler
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Génération d’entrée
Aux termes de l’article 11 des dispositions transitoires de la Constitution fédérale, le législateur est tenu de prévoir, pour les assurés de la génération d’entrée, des mesures particulières leur permettant de bénéficier de la protection minimale légalement prescrite après une période dont la durée, à compter de l’entrée en vigueur de la LPP, varie entre dix et vingt ans.
Les personnes qui, à l’entrée en vigueur de la LPP le 1er janvier 1985, avaient plus de 25 ans et pas encore atteint l’âge donnant droit à la rente font partie de la génération d’entrée. En effet, si ces personnes n’étaient pas affiliées auprès d’une caisse de pension, elles ne disposeraient pas d’une durée de cotisation suffisante, soit 40 ans pour les hommes et 37 ans pour les femmes.
Raison pour laquelle le législateur a prévu une protection minimale, qui doit en l’occurrence être comprise en ce sens que les personnes de la génération d’entrée doivent toucher les mêmes prestations de prévoyance qu’elles auraient obtenues au terme d’une pleine période d’assurance. Les institutions de prévoyance sont tenues, dans les limites de leurs possibilités financières, de garantir des améliorations de prestations pour les assurés de la génération d’entrée, en particulier pour ceux d’entre eux qui ne disposent que de revenus modestes.
Ces mesures tendent à améliorer les prestations aux assurés de la génération d’entrée et sont financées par des fonds spéciaux que chaque institution de prévoyance est tenue de prévoir à cet effet.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Prévoyance professionnelle
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Génération sandwich
Par génération sandwich, on désigne des personnes, souvent des femmes, qui se trouvent dans la génération médiane de la vie (entre 40 et 60 ans environ), et qui doivent prendre soin à la fois de la jeune génération (enfants) et de la génération aînée (parents âgés). On entend par là qu’il s’agit de personnes ayant au moins un enfant à charge (vivant en principe encore sous le même toit ou étant au moins financièrement dépendant), ainsi qu’un parent dépendant, vivant ou non dans le même foyer.
En Suisse, pays ou traditionnellement et en moyenne la naissance du premier enfant est relativement tardive, les études réalisées sur cette thématique révèlent en fait qu’une faible proportion de personnes se trouvent réellement dans cette situation de “ sandwich ” (environ 6 à 7 % des femmes entre 40 et 49 ans). Ce résultat s’explique principalement par le fait qu’au cours de ces dernières années l’espérance de vie sans handicap de la génération des parents a significativement augmenté. Il semble que le discours, parfois alarmiste, véhiculé sur le “ déficit ” des personnes âgées qui représenterait une surcharge dans les rapports intergénérationnels, surestime cette problématique en nombre, même si les cas effectivement confrontés à cette situation supportent des prises en charge parfois lourdes.
Ce terme se rapporte parfois également au domaine des assurances sociales et à la situation dans laquelle les personnes actives d'âge moyen doivent payer en même temps pour la jeune génération (frais de formation) et pour la génération âgée (prévoyance-vieillesse).
Voir : Assurance vieillesse et survivants (AVS) — Contrat entre les générations — Espérance de vie sans incapacité — Génération
Valérie Hugentobler et François Höpflinger
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Générations du welfare
Terme technique utilisé pour la catégorisation sociopolitique des groupes d'âges dans les États sociaux d'aujourd'hui. Il décrit un principe de redistribution sociopolitique dans lequel les personnes exerçant une activité lucrative participent au financement des rentes des personnes qui n'en exercent pas ou plus.
François Höpflinger
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Générativité
Depuis E. Erikson, la générativité est considérée comme la principale tâche développementale de la vieillesse. La générativité désigne aussi bien la transmission d'expériences aux jeunes générations qu'un engagement productif en faveur des jeunes générations. La générativité consiste notamment à se préoccuper des générations futures, mais aussi à intégrer ce qui est nouveau dans ce qui est ancien, et inversement.
Voir : Solidarité entre générations
François Höpflinger
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Génome humain
Le génome correspond à l’ensemble des molécules d’ADN (acides désoxyribonucléiques ) contenu dans un organisme ou une cellule. Il inclut chez l’homme l’ADN des chromosomes contenu dans le noyau et l’ADN des mitochondries de chaque cellule constituant un organisme. Il porte l’ensemble du code génétique qui se transmet de parent à enfant.
Les acides désoxyribonucléiques se présentent sous la forme d’une double chaîne spiralée. Chaque chaîne est formée par la succession d’un groupement moléculaire représentant l’unité primaire de “ l’ADN ”. Chaque groupement moléculaire associe une molécule de sucre, de phosphates et une base azotée dont il existe 4 types différents (adénine, thymine, guanine, et cytosine). Les bases azotées réunissent les deux chaînes nucléotidiques en s’associant deux à deux formant une paire de base ; une base adénine est toujours pairée à une base de thymine et une base de guanine à une base cytosine. l’aspect qui en résulte est une double hélice d’ADN. L’ensemble d’acides désoxyribonucléiques ainsi agencés forme des séquences d’ADN. Certaines séquences correspondent à des gènes codant pour des protéines. D’autres séquences ont un rôle de régulation de l’expression de ces gènes. Enfin une large partie des séquences d’ADN n’ont pas encore de rôle connu. Les régions dites codantes (correspondant à un gène) ne représentent en effet que 5 % de l’ensemble du génome humain. Le génome humain est ainsi composé de plus de 3 billions de paires de bases qui codent pour 30 000 à 40 000 protéines, soit seulement un peu plus de 2 fois plus que le génome d’une mouche. Selon les prévisions du “ Human Genome Project ”, structure qui assure l’analyse de l’ensemble des séquences nucléotidiques constituant le génome humain sera achevé dans le courant de l’année 2003.
Les chromosomes correspondent au matériel génétique (séquences d’ADN) qui se situe dans le noyau cellulaire. Chez l’homme, ils sont au nombre de 23 paires ou 23 chromosomes homologues, soit 46 en totalité. 44 sont dits autosomiques et 2 sont dits sexuels car ils déterminent le sexe de l’individu. Les chromosomes se situant dans le noyau de chaque cellule de l’individu, toute cellule qui se divise transmet l’information génétique (23 chromosomes) aux cellules filles. Ainsi chaque parent contribue pour la moitié de l’information génétique de leur enfant.
Les gènes codent pour les protéines nécessaires à la vie et au fonctionnement cellulaire. Les gènes codant pour une protéine sont au nombre de 2, dits allèles ou gènes allomorphiques situé au même endroit sur chaque chromosome homologue. Bien que codant pour une protéine devant avoir le même rôle au sein de la cellule, ils diffèrent de quelques paires de bases aboutissant à une variabilité de la protéine qu’ils codent. Ils sont responsables de la variabilité des caractères héréditaires transmis comme par exemple, la couleur des cheveux ou le groupe sanguin. Un allèle peut être dominant vis à vis de l’autre allèle(dit par opposition, récessif) et être le seul à coder pour la protéine qui lui correspond.
Les gènes peuvent donner naissance par réplication à des gènes identiques permettant la transmission des caractères héréditaires. Ils peuvent cependant subir des mutations (erreurs de réplication) et être à l’origine de protéines anormales. Ces protéines anormales peuvent être directement associées à des maladies. Ces maladies associées à une anomalie unique de réplication d’un gène sont dites génétiques. Près d’une centaine sont actuellement répertoriées. Certaines d’entre elles sont dites héréditaires car transmissibles de génération en génération. Les mutations peuvent aussi ne concerner que certaines cellules qui se divisent au sein d’un organe. Il s’agit d’un mécanisme reconnu à l’origine de certains cancers
Perspectives
Le séquençage complet du génome humain laissent envisager de nombreuses perspectives tant sur le plan médical (diagnostic, mécanismes, traitements des maladies) que pour la connaissance du vivant (évolution des espèces).
La détection de mutation de gènes codant pour des maladies génétiquement déterminées est déjà effectuée en routine. Le diagnostic antenatal de certaines maladie héréditaire en est une application particulière. Pour d’autres pathologies des tests sont en cours d’élaboration.
Les progrès de la biologie moléculaire ainsi que ceux de l’informatique et de la robotique ont permis non seulement le décryptage du génome humain mais aussi celui de nombreux agents infectieux. Ces résultats ont déjà permis d’obtenir des tests de détection génétique de ces agents et de nombreux autres sont en cours d’élaboration. Ils permettent pour la plupart d’améliorer la qualité et la rapidité du diagnostic.
Un grand nombre maladies rares ou même fréquentes semble lié à des anomalies de certaines protéines. La recherche de déterminants génétiques de ces protéines anormales contribuera à la découverte sinon à une meilleure compréhension de ces maladies. Il est évident que la connaissance de gènes responsables de maladies va favoriser la conquête de nouveaux moyens thérapeutiques. Il s’agira de modifier ces gènes anormaux afin de leur redonner leur structure normale ou de modifier leur expression.
Enfin, en raison du caractère particulier et rapide de ces avancées scientifiques qui touchent au centre même de la vie, une réflexion éthique multidisciplinaire et permanente semble nécessaire afin de déterminer, et par là limiter, leurs champs d’application. Un cadre légal est la réponse de société conséquente à cette réflexion. Un certain nombre d’entre elles sont déjà en vigueur comme la limitation de l’utilisation des embryons humains : cette réponse est bien sûr différente d’un pays à l’autre.
Voir : Clonage — Comités et commissions d’éthique — Déontologie
Gaetan Gavazzi
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Genre (Rapports sociaux de)
Les rapports sociaux de genre sont caractérisés par toute partition (hiérarchique, différentielle ou égalitaire), socialement significative, entre femmes et hommes. Cette interaction est considérée comme la plus petite unité analysable d’un système social. Elle est porteuse de tensions incitatrices, de dynamiques sociales.
Dans une perspective traditionnelle, soumise à des règles de causalité, l’appartenance sexuelle est fixe, prédéterminée, absolue, immuable dans le temps et l’espace et produit des discours préformatifs sur la division des rôles sociaux entre femmes et hommes. La domination masculine représente le principe organisateur des rapports sociaux de sexe.
Dans une perspective constructiviste, les catégories de sexe ne sont pas un donné indépendant, mais une construction sociale dynamique déterminée par des contextes socioculturels changeants – variabilité dans l’espace – et par des discours historiquement déterminés – variabilité dans le temps. Les rapports sociaux de genre englobent la construction des identités (biologiques et sociales), le naturel se voit ainsi culturalisé. Les catégories sexuelles ont à être déconstruites pour être contextuellement resituées, culturellement analysées et accéder ainsi à une compréhension post-moderne des rapports sociaux de genre.
R. T.-H. Ballmer-Cao, Changement social et rapports entre hommes et femmes : la question de l’égalité en Suisse, Payot, Séries Collection Hic & Nunc, Lausanne, 2000. — L. Parini, M.-J. Manidi, “ Constructivisme et études genre ”, Swiss Journal of Sociology, 27, 1, 2001, pp. 79-89.
Sites Internet : http://www.univ-tlse2.fr/rech-simone.html — http://www.unige.ch/etudes-genre
Voir : Études genre — Inégalités sociales — Femmes (Émancipation des)
Marie-José Manidi
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Gériatrie
“ Médecine de la vieillesse ”, la gériatrie est le domaine de la médecine portant sur tous les aspects de la santé et du traitement des personnes vieillissantes et âgées : la médecine interne générale, psychiatrie-gériatrie, médecine rééducative et palliative et gérontologie sociale. La gériatrie est donc une médecine globale qui implique des professionnels de santé de formation différente, travaillant en équipe interdisciplinaire. La pratique de la gériatrie, centrée sur le patient, intègre cinq concepts : 1. biomédical, 2. fonctionnel, 3. environnemental, 4. qualité de vie, 5. éthique clinique.
R. E. Martin, J.-P. Junod, Abrégé de gérontologie, Hans Huber, Berne, 1982. — Y. Kagan, Dictionnaire de pratique gérontologique, Frison Roche Éditions, Paris, 1996.
Site Internet : www.hug-ge.ch
Voir : Gérontologie — Home/Établissement médico-social (EMS) — Soins et aide à domicile — Vieillesse — Vieillesse (Psychologie de la)
Jean-Pierre Michel
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Gérontologie
Le terme gérontologie a été scellé au début du siècle par le microbiologiste d’origine russe Elie Metchnikoff, pour désigner l’étude scientifique de la vieillesse. Une approche systémique de l’être humain conçu comme un être biologique, psychique et socioculturel conduit la gérontologie à affirmer un projet interdisciplinaire. Centrée sur les individus, elle analyse les populations âgées et les processus du vieillissement. Mais populations et processus sont largement affectés par l’insertion socio-historique des différentes générations humaines ; dès lors la gérontologie doit également soumettre à l’analyse l’évolution démographique de la population âgée, les institutions qui leur sont destinées (établissements médico-sociaux, réseaux d’aide et de soins, mais aussi associations volontaires et nouvelles formes de participation), le développement concomitant de professions spécifiques, les politiques ainsi que l’économie de la vieillesse.
Un courant veut séparer l’étude de la vieillesse (comprise comme phase de vie) de celle de la mort. Cela conduit à renforcer la négation de la mort qui caractérise notre civilisation, à nier aussi qu’aujourd’hui tout particulièrement, la mort et les morts font partie de la vie des personnes âgées (en Suisse aujourd’hui, 80 % des décès ont lieu après l’âge de 65 ans).
Si la frontière ad quem des études gérontologiques est donc naturellement la mort, sa frontière a quo est le plus souvent associée à la cessation de l’activité professionnelle. Cette délimitation, justifiée par le changement d’insertion sociale et souvent aussi familiale qui s’opère à cette époque de la vie, n’en est pas moins arbitraire si l’on considère que bien des caractéristiques des personnes âgées et de leur trajectoire de vieillissement s’expliquent par leur vie passée.
Deux tendances complémentaires se sont manifestées au cours des dernières décennies. D’une part, un élargissement du cadre de référence disciplinaire : de celui du human development, compris avant tout comme un phénomène biologique et physiologique, donc essentiellement endogène, vers celui du parcours de vie (life course), qui affirme l’importance du contexte historique de vie et ménage une place aux sciences sociales. De l’autre, la coopération croissante des unités de recherche qui focalisent telle ou telle période de la vie humaine, parfois même leur fédération dans des vastes instituts consacrés à l’étude du cycle de vie. Ces tendances s’observent avant tout dans les pays du Nord de l’Amérique et de l’Europe. Plus au Sud, France et Suisse comprises, alors même que le “ péril gris ” fleurit dans le discours politique, l’institutionnalisation de la gérontologie reste encore embryonnaire.
En tant que science du présent spécialisée dans l’étude d’un des défis contemporains majeurs, la gérontologie assume une responsabilité particulière : non seulement produire des connaissances, mais aussi les traduire en termes de possibilités pour l’avenir. Elle doit alors refuser la tour d’ivoire et contribuer à la révision permanente de la politique de la vieillesse, mais aussi se garder de proposer, sous la pression de la demande publique, des théories du bien vieillir qui, très vite, peuvent s’avérer relever non de la science mais de la croyance, voire de la mode du moment.
R. G.-L. Maddox (Éd.), The Encyclopedia of Aging, 2e Éditions, Springer, New York, 1995. — Commission fédérale, Vieillir en Suisse, Office fédéral des imprimés, Berne, 1995. — C. Lalive d'Epinay, J.-F Bickel, C. Maystre, N. Vollenwyder, Vieillesses au fil du temps, une révolution tranquille, Réalités sociales, Lausanne, 2000.
Voir : Gérontologie (Centre interfacultaire de) (CIG) — Cycle de vie — Gériatrie — Gérontologie (Société Suisse de) — Soins palliatifs — Vieillesse — Vieillesse (Politique de la) — Vieillesse (Psychologie de la) — Vieillissement de la population
Christian Lalive d’Épinay
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Gérontologie (Centre interfacultaire de) (C.I.G.)
Le C.I.G. a été créé en 1992 à l’initiative de cinq facultés de l’Université de Genève. Il est en Suisse le premier, et à ce jour, l’unique institut interdisciplinaire et interfacultaire dans le domaine de la gérontologie. Avec le concours, entre autres, du FNSRS, on y poursuit un ensemble de recherches transversales et longitudinales afin, d’une part, d’établir les changements survenus dans la population âgée de 1980 à nos jours et, de l’autre, de suivre le vieillissement des personnes dans le grand âge.
Le Centre organise deux programmes de formation continue débouchant sur des certificats universitaires, le premier en gérontologie et le second en éthique clinique.
Le C.I.G. édite un bulletin, Médi‘A’ge, un “ Spécial Recherche ” qui donne en primeur des résultats de ses travaux et des fiches documentaires qui font le point des connaissances sur des questions d’actualité. Par ailleurs, le Centre anime la collection “ Âge et Sociét頔 aux éditions Réalités sociales.
Site Internet : www.unige.ch/CIG
Voir : Cycle de vie — Formation continue — Gériatrie — Gérontologie — Gérontologie (Société Suisse de) — Réalités sociales — Vieillesse
Christian Lalive d’Épinay
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Gérontologie (Société Suisse de )
La Société suisse de gérontologie (SGG-SSG) est l’organisation faîtière qui regroupe les professionnels qui sont engagés dans des activités scientifiques et pratiques orientées vers les personnes âgées. Elle a été fondée en 1953 par des médecins préoccupés par les questions de gériatrie. La SSG est une organisation sans but lucratif. C’est une association qui regroupe plus de 1100 membres actifs dans les divers domaines de la gérontologie. Elle est soutenue par l’Office fédéral des assurances sociales sur la base d’un mandat de prestations. Ses autres ressources proviennent de la contribution des membres, de dons et des recettes liées aux journées d’étude qu’elle organise. En 1990, le comité de la SSG a créé un secrétariat permanent qui est ancré au sein du Zieglerspital, à Berne. Le comité résolument interdisciplinaire travaille bénévolement avec le soutien du secrétariat et s’attache à construire un réseau de plus en plus large. La durée du mandat de la présidence s’étale sur six ans, quatre ans de vice-présidence et deux ans de présidence. Dans le cadre des activités de la SSG, on note l’engagement de personnes spécialistes en gériatrie, en gérontopsychologie, en gérontologie, en physiothérapie ou chargées de missions dans les divers domaines professionnels du secteur de la vieillesse. Les buts de cette société scientifique sont construits sur la base d’un souci permanent d’assurer les contacts avec la pratique, avec la recherche et l’enseignement gérontologique, ainsi que de mettre en place des réseaux. Au cœur de ses préoccupations, aujourd’hui et demain, le souci d’accompagner l’activité professionnelle des membres est central. Elle offre une plate-forme d’échanges aux personnes intéressées par le développement humain (Human development) ou par le parcours de vie (Life course) en vue de favoriser une utilisation optimale des savoirs et des savoir-faire en gérontologie.
Un congrès bisannuel privilégie les aspects interdisciplinaires et nationaux dans l’approche gérontologique. Des activités de formation continue sont offertes régulièrement. Pour certains aspects spécifiques et interdisciplinaires, des groupes de travail sont constitués. Les résultats de ces réflexions sont régulièrement publiés. Le périodique Gerontologie Information paraît quatre fois par an. Il publie les principales contributions d’intérêt national. La SSG est membre de l’International Association of Gerontology (IAG). Elle se propose ainsi d’avoir un rayonnement international.
R. Les publications de la SSG sont disponibles sur le site Internet 
Site Internet : www.sgg-ssg.ch
Voir : Gériatrie — Gérontologie — Vieillesse
Pia Graf-Vögeli
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Grand-parentalité
Un rôle des personnes âgées important, longtemps négligé. La position sociale des grands-parents varie dans l'histoire et selon les cultures. Dans de nombreuses culturelles préindustrielles, les grands-parents sont plutôt les détenteurs de l'autorité; aujourd'hui, les grands-parents ont souvent une relation intense et de camaraderie avec leurs petits-enfants. A relever toutefois que la grand-parentalité est aménagée différemment selon l'âge du grand-père, de la grand-mère et du petit-enfant.
François Höpflinger
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Grève
La grève consiste dans la cessation ou dans la désorganisation collective et concertée du travail, décidée par les salariés pour exprimer une réclamation ou appuyer une revendication. Bien que la Constitution fédérale et les constitutions cantonales ne stipulent pas le droit de grève (à l’exception de la Constitution du canton du Jura), son existence n’est pas contestée dans la doctrine helvétique qui considère qu’il découle de la liberté de coalition, elle-même garantie par la liberté d’association (art. 56 Cst). Son usage est interdit aux fonctionnaires fédéraux (art. 23 LS StF) et à ceux de la plupart des cantons. Là où les rapports de travail sont régis par convention collective de travail, l’utilisation de moyens de combat pour modifier le contenu de celle-ci alors qu’elle est toujours en vigueur est prohibée ; la grève n’est totalement interdite que si les parties en sont convenues expressément (art. 357a CO). L’interdiction de la grève résulte également de la loi en cas d’intervention des offices publics de conciliation chargés de résoudre les conflits collectifs de travail.
R. P. Bois, Études de droit social, Le droit du travail en pratique, Schulthess Polygraphischer Verlag, Zurich, 1991. — M. Rossinelli, Les libertés non écrites, Collection juridique romande, Payot, Lausanne, 1987.
Voir : Lock-out — Paix du travail (Convention de) — Syndicat
Jean-Claude Prince
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Groupement des affaires sociales des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRAS)
Organe consultatif et exécutif de la Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS), agissant en parallèle avec son pendant en matière de santé publique, le Groupement des services de santé publique des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRSP). Fondé en 1993.
Les objectifs du GRAS sont :
— la promotion de l’harmonisation des législations et des politiques cantonales dans le domaine de l’action sociale ;
— la concertation intercantonale en matière de prise de position dans les procédures de consultation fédérale ;
— l’échange régulier d’informations et d’expériences ;
— la coopération avec les organismes publics et privés de l’action sociale ;
— l’étude technique de questions spécifiques du domaine de l’action sociale.
Structures :
— Membres : chefs des services cantonaux de l’action sociale.
— Hôtes permanents : Secrétaires généraux de la Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) et de la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS).
— Réunion plénière : six - huit séances annuelles.
— Groupes de travail : aide sociale, LAVI, asile, relations avec OFAS (AVS/AI), formation.
Activités :
a) coordination de l’aide sociale avec les régimes d’assurances sociales (LACI, LAI),
b) insertion sociale, asile, répartition des tâches et des financements entre Confédération et cantons.
Informations : le secrétariat et les relations extérieures sont assurés par le/la président-e désigné-e par tournus et par un mandataire extérieur.
Voir : Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) — Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS) — Groupement des services de santé publique des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRSP)
Jean-Pierre Rageth
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Groupement des services de santé publique des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRSP)
Organe consultatif et exécutif de la Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS), agissant en parallèle avec son pendant en matière d’action sociale, le Groupement des affaires sociales des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRAS). Fondé en 1973.
Les objectifs du GRSP sont :
— l’harmonisation des législations dans le domaine de la santé publique ;
— la concertation intercantonale en matière de prise de position dans les procédures de consultation fédérale ;
— l’échange régulier d’informations et de documentation ;
— l’étude technique de questions spécifiques du domaine de la santé.
Structures :
— Membres : chefs des services cantonaux de santé publique et médecins cantonaux.
— Hôte permanent : Secrétariat central de la Conférence des directeurs des affaires sanitaires (CDS).
— Hôtes occasionnels : pharmaciens cantonaux et chimistes cantonaux.
— Réunion plénière : quatre à six séances annuelles.
— Groupes de travail permanents liés aux conventions intercantonales : hospitalisations hors cantons, financement de la formation des professionnels de la santé.
Informations : les relations extérieures sont assurées par le (la) président(e), désigné(e) pour deux ans, par tournus. Le secrétariat est assuré par un mandataire extérieur.
Voir : Conférence romande des affaires sanitaires et sociales (CRASS) — Conférence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires (CDS) — Groupement des affaires sociales des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRAS)
Jean-Pierre Rageth
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Groupement latin des assurances sociales (GLAS)
Groupement intercantonal de coordination en matière d’assurances sociales, fondé en 1973 et poursuivant les objectifs suivants :
— analyse de la législation fédérale en matière d’assurances et de régimes sociaux et de ses effets pour les cantons sur les plans juridique, économique et social ;
— échange de vues et d’expériences, fondées sur la concertation et la coordination intercantonale, en matière de :
1. conceptualisation et élaboration des législations cantonales,
2. coordination et surveillance de l’application déléguée (caisses de compensation, organes d’exécution PC, Offices cantonaux AI),
3. harmonisation romande des systèmes,
4. études prospectives, évaluation budgétaire et gestion budgétaire des assurances et régimes sociaux par les cantons.
Structures :
— Membres : chefs des offices cantonaux de l’assurance-maladie.
— Le secrétariat est confié à un mandataire extérieur.
Activités :
Objectif immédiat : application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal).
Échanges d’expériences et d’informations sur les solutions cantonales en matière de :
— coût des cotisations et sélection des risques par les caisses ;
— application des subsides individuels ;
— relations avec les caisses (convention, surveillance) ;
— relations avec l’OFAS.
Voir : Assureurs-maladie suisses (Concordat des) — Groupement des affaires sociales des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRAS) — Groupement des services de santé publique des cantons romands, de Berne et du Tessin (GRSP)
Jean-Pierre Rageth
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H + Les Hôpitaux de Suisse
H + Les Hôpitaux de Suisse est une association fondée en 1930 sous le nom de VESKA (Association suisse des établissements hospitaliers). Sa nouvelle dénomination date d'octobre 1995.
H + a pour but la défense, la promotion et la représentation des intérêts des établissements hospitaliers publics et privés, dans les domaines politique, économique et juridique. Elle participe également à l'élaboration des conditions-cadres dans les domaines médicaux, économiques, sanitaires, sociaux, ainsi que des soins et de la formation dans le secteur de la santé publique suisse.
H + Les Hôpitaux de Suisse compte 453 membres actifs (hôpitaux et homes) et 252 membres partenaires (associations d'établissements hospitaliers, pouvoirs publics, institutions).
R. H + Les Hôpitaux de Suisse, Rapport annuel, Aarau.
Site Internet : www.hplus.ch
Voir : Coûts de la santé — Politique de la santé
Sophie Barras Duc
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Habitat multigénérationnel
Forme d'habitat qui vise délibérément à mélanger les générations (par ex. jeunes familles et personne âgées vivant dans le même lotissement). Il n'existe en Suisse que de rares modèles visant à un habitat multigénérationnel. On trouve quelques exemples de quartiers destinés à des familles avec enfants, incluant également un établissement médico-social pour personnes âgées : la proximité géographique a pour but de favoriser les relations entre les différentes générations. D’autres projets intergénérationnels ont été mis sur pied, qui intègrent soit une crèche dans un établissement médico-social, organisent la formation de jeunes apprentis au sein de l’institution ou en invitent régulièrement des classes d’école maternelle. Il ne s’agit pas là forcément de lieux de vie que l’on peut qualifier d’habitat multigénérationnel permanent, mais on essaie de créer le lien entre générations à travers ces moments de vie partagés.
Valérie Hugentobler et François Höpflinger
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Handicap
Terme générique d’usage récent (1957) dans le domaine médico-social servant à désigner les désavantages qu’entraînent sur le plan social une déficience et/ou des incapacités chez une personne (cf. Classification internationale des handicaps OMS).
Dans le langage commun, handicap a remplacé progressivement les termes d’infirmité, d’invalidité ou d’inadaptation jugés trop dévalorisants. Hors du champ médico-social le handicap reste un terme flou qui englobe des difficultés de nature, de gravité et de causes très diverses.
En réalité, la notion de handicap est une notion relative qui doit être évaluée en regard de la situation vécue par l’individu et des possibilités d’évolution en fonction de son environnement.
Le handicap (ou désavantage social) recouvre de ce fait des réalités particulières non généralisables d’emblée à l’ensemble des personnes souffrant de déficience.
R. P. Wood, CIH : déficiences, incapacités, désavantages, OMS, 1980, CTNERHI-INSERM, Paris, 1988. — R. Liberman, “ Approche historique et sociologique de la construction du concept de handicap ”, in : C. Gardou (Dir.), Le regard interrogé, Erès, Toulouse, 1991.
Site Internet : www.askio.ch
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Déclaration sur les droits des personnes avec désavantage — Invalidité — Stigmatisation
Jean-Louis Korpes
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Harmonisation
L’harmonisation des systèmes de sécurité sociale vise le rapprochement de ceux-ci, dans une optique de progrès, sur des points considérés comme essentiels : la définition des éventualités (soins de santé, retraite, etc.) et du champ d’application personnel (en allant vers la généralisation, l’universalité), les prestations (orientations : prévention, indemnisation, réinsertion ; sortes ; niveau ; conditions d’octroi et durée de service), la responsabilité générale de l’État en la matière. Ce rapprochement est prévu sous forme de normes souples (pour s’adapter à la diversité des systèmes), qui peuvent être améliorées par les États. Les motivations à la base de l’harmonisation relèvent de la politique sociale (améliorer la protection des populations), de la concurrence internationale (éviter que cette dernière ne soit défavorable aux États qui ont développé leur législation sociale), du souci de préserver la paix.
Deux grandes institutions ont joué un rôle majeur en matière d’harmonisation : l’Organisation internationale du Travail et le Conseil de l’Europe. L’OIT a permis à la notion même de sécurité sociale d’émerger et elle a guidé le développement des systèmes : trois instruments se trouvent à la base de ce processus : la Recommandation OIT No 67 concernant la garantie des moyens d’existence (1944), la Recommandation OIT No 69 concernant les soins médicaux (1944) et la Convention OIT No 102 concernant la norme minimum de la sécurité sociale (1952). L’OIT a adopté une série de conventions et de recommandations qui élèvent les standards prévus par la convention OIT No 102. Le Conseil de l’Europe a procédé de manière analogue, en commençant par le Code et le Protocole européen de sécurité sociale (1964), suivis du Code européen de sécurité sociale révisé (1990). La Suisse a ratifié certaines de ces conventions (totalement ou partiellement).
La Communauté européenne n’a que peu contribué à ce grand courant social, par contre ses institutions (surtout la Commission) ont beaucoup discuté le terme d’harmonisation, l’assimilant à un moment donné à celui d’unification (un but impossible à atteindre ou en tout cas totalement inapproprié). D’où l’émergence d’un nouveau concept, celui de convergence. Actuellement, soit le terme d’harmonisation est réservé à des instruments juridiques qui peuvent avoir un caractère obligatoire (conventions internationales ; directives communautaires), soit il n’est plus utilisé (il est alors remplacé par celui de textes normatifs ou de convergence).
R. G. Perrin, Histoire du droit international de la sécurité sociale, Association pour l’étude de l’Histoire de la Sécurité Sociale, Paris, 1993. — S. G. Nagel, C. Thalamy, Le droit international de la sécurité sociale, PUF, Paris, 1994.
Voir : Conseil de l’Europe (Instruments du) — Conventions bilatérales de sécurité sociale — Conventions de l’OIT — Convergence — Fondements — Généralisation — Organisation internationale du Travail (OIT) — Universalité.
Pierre-Yves Greber
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Hautes écoles spécialisées (HES)
Le terme haute école spécialisée (HES) s’entend comme le regroupement de plusieurs établissements partenaires englobant la technique, l’économie et les arts appliqués pour ce qui est des établissement sous compétence de la Confédération ; les hautes écoles spécialisées sous compétence cantonale, comme par ex. la santé et le social, suivront dans cette phase d’intégration mise en route récemment. La plupart des HES portent le nom de la région qu’elles recouvrent, par exemplaire HES de Suisse occidentale (HES-SO), de Suisse centrale, etc.
La création et la gestion d’une haute école spécialisée sont soumises à l’autorisation du Conseil fédéral. Cette autorisation est accordée s’il est prouvé que l’école assume les tâches qui lui sont imparties par la présente loi, qu’elle est organisée de manière adéquate et dispose de moyens financiers suffisants, offre des cycles d’études qui répondent à un besoin, respecte la répartition des tâches et assure la coopération entre les hautes écoles spécialisées et les hautes écoles universitaires au niveau national et régional et assure les contrôles de qualité et les évaluations internes. Toute école à qui l’autorisation a été accordée a droit à l’appellation de Haute école spécialisée.
Les écoles faisant partie des HES sont les anciennes et actuelles écoles supérieures (ETS, ESCEA, ESTS) qui demandent à être reconnues comme éléments des hautes écoles spécialisées.
Sites Internet : www.admin.ch/offt — www.hes-so.ch/fr/ — www.sassa.ch
Voir : Animation socioculturelle — Conférence suisse des hautes écoles spécialisées et des écoles supérieures de travail social (SASSA) — Conférence latine des écoles supérieures de travail social (CLESTS) — Éducation spécialisée — Travailleurs sociaux (Formation des)
Regula Villari
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Histoire sociale
Apparue au début du XXe siècle, l’histoire sociale s’est surtout développée dès les années 70. Elle étudie le passé dans une perspective la plus large possible en tenant compte de la multiplicité des facteurs sociaux alors qu’une histoire descriptive traditionnelle mettait en évidence un récit, avec des dates successives (chronologie), des événements marquants (guerres, fondations, etc.) et des noms de personnalités (grands hommes, héros, inventeurs).
Grâce au développement des sciences, notamment des sciences sociales, le champ de l’histoire s’est considérablement modifié, diversifié et amplifié. La démographie, la sociologie, l’économie, l’anthropologie, la psychologie ont apporté des méthodes et des thèmes qui ont enrichi l’approche historique.
L’histoire sociale étudie des collectivités, elle analyse les rapports entre les groupes sociaux, entre l’individu et le groupe, entre le privé et le public ; elle examine les conditions de vie, de travail, les facteurs d’aggravation ou d’amélioration de celles-ci ; elle s’interroge sur les comportements et les mentalités. Tous les groupes sociaux relèvent de son étude : les masses populaires (paysans, ouvriers), les élites, les relations de dominants à dominés, les rôles des genres (hommes, femmes), les exclus, les minorités ou les marginaux (pauvres, étrangers, malades, handicapés, prostituées, étrangers). Les manifestations de la vie sociale sont explorées : la vie quotidienne, la vie associative, l’exceptionnel, le banal, la famille, les âges de la vie (enfance, vieillesse), la santé, la maladie, la mort, la normalité et les convenances, les pathologies et les déviances. Ainsi ce sont des pans entiers de la société, négligés jusqu’alors par le champ historique, qui sont pris en considération.
L’histoire sociale, en s’appuyant généralement sur des archives de première main, tend à mettre en relation plusieurs facteurs dans des lieux, des situations et à des moments précis pour mieux dégager les spécificités et les différences. Elle cherche à repérer les changements, les innovations, mais aussi les résistances, l’inertie, les lenteurs. Elle s’interroge sur les circonstances récentes, sur les motivations conjoncturelles tout en tenant compte de la longue durée et des systèmes de valeurs, souvent conflictuels, qui donnent un sens variable aux faits et aux idées selon les individus et les groupes. Ainsi, le chômage ou la maladie sont à la fois un vécu personnel, dans un contexte spécifique, et un phénomène social, dans une société particulière, tous deux porteurs de conceptions plus anciennes qu’ils ignorent, refusent ou prolongent.
L’histoire sociale, portant à la fois sur la société, ses groupes et ses individus, sur les relations entre eux, sur les phénomènes d’exclusion mais aussi sur les modalités de soutien, d’émancipation, de solidarité, donne de multiples éclairages aux divers secteurs de la politique sociale.
R. J. Batou e. a., Pour une histoire des gens sans Histoire. Ouvriers, excluEs et rebelles en Suisse XIXe-XXe siècles, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1995. — Société suisse d’histoire économique et sociale, Cahier No 1 sq., puis Chronos, Lausanne, Zurich, 1982 ss.
Voir : État-providence — Déclaration de Philadelphie — Société industrielle
Geneviève Heller
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Histoire familiales àð Récit de vie
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HMO
Cette abréviation anglaise (Health Maintenance Organization) désigne une forme particulière d assurance rendue possible par la Loi fédérale sur l assurance-maladie (LAMal) dans le but de réduire les coûts de la santé. Fondée sur le choix limité des fournisseurs de prestations, cette “ caisse de sant頔 (ou “ plan de sant頔) ne vise pas, en premier lieu, à combattre la maladie, mais à préserver la santé. Tous les partenaires impliqués ont un intérêt commun : que l’état de santé des assurés soit le meilleur possible et que les coûts de la guérison soient réduits.
Souvent pris comme synonyme de “ managed care ”, les HMO peuvent prendre la forme de cabinet de groupe HMO ou de cabinet médical HMO. Dans le premier cas, le cabinet est propriété des caisses-maladie. Les médecins et le personnel touchent un traitement fixe. Dans le deuxième cas, les médecins sont propriétaires. Ils engagent le personnel et passent des conventions avec les assureurs.
Dans tous les cas de figure, le patient est contraint de recourir aux médecins de “ premier recours ” qui travaillent pour la HMO. Le cas échéant, il sera acheminé, par ces derniers, vers des spécialistes. La coordination des traitements, mais aussi un contrôle des résultats et la responsabilisation des patients sont au cœur de ce système.
R. R. Kocher, “ L’essor des “ formes particulières d’assurance ”, in : Sécurité sociale, 1995, pp. 250-256. — L. Buchs, “ Managed Care ”, in : Système de santé suisse 2001/2002, CAMS, Soleure, 2001, pp. 124-135.
Voir : Coûts de la santé — Éducation pour la santé — Fondation 19 - Fondation suisse pour la promotion de la santé — Politique de la santé — Prévention
Béatrice Despland
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Home/établissement médico-social (EMS)
Les termes home ou EMS recouvrent des réalités semblables. Ils sont utilisés indifféremment en Suisse romande en fonction d’acceptions cantonales.
Le terme EMS (établissement médico-social) a été adopté par le Plan hospitalier vaudois en 1967 et, au niveau national, par la LAMal (Loi fédérale sur l’assurance-maladie) du 18 mars 1994.
Propre au canton de Vaud, l’EMS a pris la place de l’asile de vieillards — presque toujours d’inspiration religieuse — en prenant ses distances par rapport à la priorité donnée à l’assistance des démunis.
Les termes de “ maison de retraite ”, “ maison de repos ” et “ pension ” désignent une certaine conception de l’accueil, mais se réfèrent surtout à une époque.
Les années d’après-guerre voient se développer la notion de retraite et de “ repos bien mérit頔 qui induisent des réponses en prestations à dominante socio-hôtelières.
Puis, par analogie avec le secteur hospitalier, l’établissement médico-social se médicalise. Il accueille dans les années 80 des personnes nécessitant des soins permanents mais non aigus.
La LAMal précise l’analogie avec l’hôpital (article 39) en matière de reconnaissance de l’EMS en qualité de fournisseur de prestations.
L’assureur prend en charge, en établissement médico-social, les mêmes prestations que pour un traitement ambulatoire et pour les soins à domicile (article 50).
L’EMS est aujourd’hui un lieu de vie, offrant des prestations médico-sociales, hôtelières, de soins et d’animation. Si l’hébergement en long séjour reste une activité importante, d’autres possibilités sont offertes à la clientèle.
La palette des prestations s’étend de l’accueil temporaire au court séjour. Des logements sécuritaires permettent à des personnes autonomes de bénéficier de la sécurité assurée par la proximité de l’EMS.
Les EMS se consacrent à diverses missions, selon leur clientèle : la gériatrie somatique pour des personnes atteintes de troubles physiques liés à l’âge, la psychogériatrie pour des personnes souffrant d’affections psychiques liées à l’âge, allant des états dépressifs jusqu’aux démences, la psychiatrie pour des personnes jeunes ou âgées atteintes de pathologies psychiatriques (psychoses, Korsakoff, débilités, etc.), les accueils sociaux destinés à des personnes seules, isolées, dont la vie à domicile devient impossible, les autres missions dans des domaines nouveaux (troubles neurologiques du sida par exemple).
R. G. Heller, Le poids des ans. Une histoire de la vieillesse en Suisse romande, SHSR et Éditions d’En Bas, Lausanne, 1994. — Documentation AVDEMS, Historique (1992), Cadre de référence (1992). — Charte éthique (1994). — “ EMS 2000 ” (1996).
Voir : Animation en établissements gériatriques — Ménages collectifs — Unité d’accueil temporaire (UAT) — Vieillesse (Politique de la)
Patrick Béal
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Homosexualité
La représentation sociale de l’homosexualité a changé de manière considérable durant la deuxième partie du XXe siècle, avec une accélération frappante à partir des années 80. Une révolution qu’on peut estimer à la fois tranquille et chaotique, silencieuse et tapageuse (cf. les remous récurrents autour de la Gay pride), s’est opérée, faisant passer les sociétés occidentales modernes d’une attitude de criminalisation, de discrimination et d’“ injure ” (Eribon) à des formes plus ou moins consensuelles et flexibles de coexistence pacifique et de reconnaissance mutuelle. Le débat français sur le PACS, complexe, a été révélateur des ambivalences de la société envers la réalité et le vécu à géométrie variable des couples et des personnes homosexuelles (hommes et femmes). La Suisse s’oriente en douceur vers des solutions juridiques de partenariat avec des effets partiellement semblables à ceux du mariage. Dans les Eglises (de manière explicite dans le protestantisme, plus larvée voire bloquée dans le catholicisme), le débat porte sur la situation des ministres homosexuels et surtout sur la légitimité ou non de créer des célébrations de bénédiction pour les couples homosexuels. Ces points chauds sont significatifs d’un débat plus profond qui concerne l’acceptation même des personnes homosexuelles par l’ensemble de la société. Toute la question est en effet de savoir comment nos sociétés parviendront à une reconnaissance des couples homosexuels à la fois satisfaisante et valorisante pour les personnes concernées et équitables pour les autres et pour la société dans son ensemble (couples hétérosexuels, enfants, etc.). Le principe de traitement équitable (particulièrement sensible dans des domaines aussi divers que le droit du bail, la libre circulation des personnes, le droit de visite dans les hôpitaux, la taxation fiscale, le droit des successions, etc.) ne devrait pas conduire à effacer la différence symbolique et sociale entre le mariage hétérosexuel et le partenariat homosexuel. Le débat touchant le droit des couples homosexuels à l’adoption d’enfants ou à la procréation médicalement assistée demeure à cet égard l’objet d’une controverse ouverte et légitime. Ces questions ne seront pas réglées par une tolérance molle qui reviendrait à de l’indifférence ou à un nouveau conformisme, mais par des mesures nuancées de reconnaissance résultant de discussions démocratiques approfondies ; car, contrairement à un discours trop banalisant, le “ fait ” homosexuel demeure, aux yeux d’une partie non négligeable de la population, une “ question ouverte ”.
R. D. Borillo, (Dir.), Homosexualités et droit, Presses Universitaires de France, Paris, 1998. — P. Bühler, I. Graesslé, C. Müller (Éds), Qui a peur des homosexuel(le)s ?, Labor et Fides, Genève, 2001. — C. Demur, D. Müller, L’homosexualité. Un dialogue théologique, Labor et Fides, Genève, 1992. — F. Dermange, C. Ehrwein, D. Müller (Éds), La reconnaissance des couples homosexuels. Enjeux juridiques, sociaux et religieux, Labor et Fides, Genève, 2000. — Office fédéral de la justice, La situation juridique des couples homosexuels en droit suisse. Problèmes et propositions de solution, Berne, 1999. — J.-Y. Savoy, A l’écoute des personnes concernées par l’homosexualité, Centre social protestant, Lausanne, 1982.
Voir : Couples de même sexe — Union libre
Denis Müller
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Hospitalisation (Couverture d'assurance)
Une hospitalisation en chambre commune est reconnue à charge de l'assurance-maladie sociale (LAMal) à un certain nombre de conditions, notamment : l'établissement hospitalier a reçu la mission de traiter des maladies aigües ou d'exécuter des mesures médicales de réadaptation; il figure sur la liste des établissements reconnus par le canton de domicile de l'assuré (planification); il dispose de personnel qualifié et d'équipements médicaux adéquats; l'hospitalisation a duré, en règle générale, au moins 24 heures.
Les coûts d'une hospitalisation sont assumés, en principe, par moitié par le canton (impôts) et par moitié par l'assurance-maladie; le tarif en est fixé par convention entre l'établissement et les assureurs ou, si aucun accord n'a été possible, par le canton.
Si une hospitalisation urgente ou médicalement nécessaire doit se faire dans un autre canton que celui de domicile de l'assuré, les mêmes conditions sont exigées; le surplus de coût est pris en charge par le canton de domicile.
Les assurés qui vivent seuls (qui ne vivent pas en ménage commun avec un ou plusieurs proches de leur famille) payent une contribution journalière fixée par le Conseil fédéral (Fr. 10.- en 2001).
L'hospitalisation en chambre privée peut être remboursée par les assurances complémentaires (droit privé) et fait actuellement l'objet d'un important débat politique.
Voir : Assurance-maladie (AM) — Assurances privées— Coûts de la santé — H+ Les Hôpitaux de Suisse
Michel Surbeck
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IDAFiSo
Pour faire face aux enjeux qui marquent l’avenir de la sécurité sociale suisse, le Conseil fédéral a suscité la constitution d’un groupe de travail interdépartemental chargé d’étudier les perspectives de financement des assurances sociales. Un premier rapport a été publié qui s’intitule : Rapport sur les perspectives de financement des assurances sociales. Cette démarche peut avoir une importance notable pour l’avenir du débat sur la politique sociale suisse. D’ailleurs, un deuxième rapport a été consacré aux questions de financement. L’approche retenue, qui fait la part belle aux perspectives économiques, peut s’ouvrir à d’autres dimensions susceptibles de marquer les formes de développement de la sécurité sociale.
R. IDAFiSo, Rapport sur les perspectives de financement des assurances sociales, Office fédéral des assurances sociales, Berne, 1996.
Voir : Office fédéral des assurances sociales (OFAS) — Prospective
jpf
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Illettrisme
Néologisme utilisé seulement en français pour désigner ce qui est appelé ailleurs “ analphabétisme fonctionnel ” ou “ semi-analphabétisme ”, par exemple. Il ne s’agit pas de l’analphabétisme proprement dit, qui est l’ignorance complète de l’alphabet, y compris des signes représentant les nombres. L’illettrisme ne vient donc pas par le fait de ne pas savoir du tout lire et écrire, ou encore calculer en déchiffrant ou écrivant des nombres. L’illettrisme n'est donc le fait de savoir mal lire, écrire ou calculer, plus exactement d’être faible dans l’une de ces branches de l’instruction de base, dans deux ou les trois. Suivant le degré de sévérité des critères utilisés, la proportion des cas d’illettrisme varie. En Suisse, comme dans d’autres pays développés, environ 40 % des adultes autochtones, non handicapés mentaux, se situent au-dessous des objectifs des classes obligatoires ou même simplement primaires. Ils ont de la peine à comprendre le journal, à écrire une lettre, à faire une addition, ou n’y parviennent quasiment pas. Leur bas degré d’instruction de base s’explique entièrement par le mode de vie du pays et par le fonctionnement réel de ses écoles. Le cas des immigrés analphabètes ou affectés par l’illettrisme est différent quant à ses causes.
R. R. Girod, L’illettrisme, Que Sais-Je ? PUF, Paris, 1997.
Voir : Adultes (Éducation des) — Instruction publique — Quart Monde
Roger Girod
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Image de soi
L’“ image de soi ”, ou le “ concept de soi ”, renvoie à l’ensemble des connaissances (“ je suis un homme ”), des croyances (“ je n’aurai jamais ce job, parce que je suis une femme ”) et des évaluations (“ je suis quelqu’un de bien ”) auxquelles on se réfère pour se définir et agir. Dès la prime enfance l’individu construit et mémorise une structure complexe de connaissances sur lui-même à travers ses expériences personnelles et sociales.
L’image de soi comprend des aspects physiques (“ grande ”), des traits de personnalité (“ intelligent ”), des informations liées aux relations interpersonnelles (“ ce que disent mes amis sur moi ”), aux rôles sociaux (“ parent ”), et à la culture (des images de soi plus individualistes dans les cultures occidentales). Le soi contient des images du passé, des éléments idéaux et des (im)possibilités pour le futur. Il est faux de considérer l’image de soi de manière unifiée ou constante. Certains de ses aspects sont plutôt continus dans le temps (certaines dimensions de la personnalité), d’autres renvoient à des conceptions multiples de soi (la possibilité de se définir de manière opposée, par exemple “ sérieux ” et “ insouciant ”). Ainsi, de manière générale, seule une information limitée sur soi est utilisée dans une situation donnée.
R. D. Martinot, Le soi, Presses Universitaires de Grenoble, Grenoble, 1995.
Voir : Bien-être — Éducation/Socialisation — Stigmatisation
Dario Spini
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Immigration
On utilise le terme “ immigration ” pour désigner l'entrée dans un pays de personnes non autochtones qui viennent s'y établir, généralement pour y trouver un emploi.
Depuis la fin du XIX siècle, la Suisse est un pays d’immigration. C’est au cours de la Première Guerre mondiale que le Conseil fédéral pris les premières mesures pour contrôler l’immigration. L'article 69 ter de la Constitution fédérale, adopté en 1925, donne à la Confédération le droit de légiférer sur l'entrée, la sortie, le séjour et l'établissement des étrangers. Sur la base de cet article constitutionnel, la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE) est entrée en vigueur en 1934. L’acceptation le 21 mai 2000 de l’accord entre l’Union européenne et la Suisse sur la libre circulation des personnes va progressivement modifier cette législation, tandis qu’un projet de révision totale de la LSEE a été mis en consultation en juin 2000, qui concernera essentiellement les personnes de nationalité étrangère originaires d’un pays non-membre de l’UE.
La politique suisse d’immigration se base depuis le début des années 90 sur une division sommaire du monde : la politique mise en œuvre vise à permettre aux Européens – et aux personnes venant d’un pays industrialisé – de venir en Suisse, tandis qu’elle limite au maximum les entrées de personnes venant de pays peu ou pas développés.
La politique suisse en cette matière est clairement dictée par l’intérêt économique, même si différentes mesures (de contingentement, notamment) ont été prises pour aller dans le sens des différentes initiatives xénophobes sur lesquelles la population suisse a été amenée à se prononcer à six reprises entre 1969 et 2000.
Les permis de séjour et de travail sont divisés en diverses catégories, qui forme une hiérarchie de droit et une hiérarchie inverse de précarité. Les permis de courte durée autorisent l’économie helvétique d’employer une main-d’œuvre de “ rotation ”, souvent mal rémunérée, et permet, au prix de l’instabilité des travailleurs, de faire face aux activités saisonnières des entreprises. Les permis de plus longue durée permettent une stabilisation de la main-d’œuvre nécessaire à des travaux plus qualifiés.
Si, entre 1974 et 1979, suite à la crise énergétique, on a assisté à une forte diminution du nombre d'étrangers résidants à l'année (– 181 000, soit – 17 %), depuis 1980, on constate une nouvelle demande de main-d’œuvre étrangère, fluctuante selon les besoins de l’économie.
Au 31 décembre 1998, la Suisse compte 1 383 645 personnes de nationalité étrangère (sur 7 123 537 habitants), soit 19,4 % de la population résidante permanente. Si l’on retranche les personnes de nationalité étrangère nées en Suisse ou y résidant depuis plus de dix ans, soit des personnes qui, dans la plupart des pays européens, auraient obtenu la nationalité de leur pays de résidence, ce pourcentage descend à 7,23 %, un chiffre proche de ce qu’il est, par exemple, en France (6,1 %).
89,9 % des personnes de nationalité étrangère présentes en Suisse fin 1998 sont originaires de l’Europe, 2,4 % de l’Afrique, 3,2 % de l’Amérique, 4,4 % de l’Asie, et 0,2 % de l’Australie ou de l’Océanie. Les huit nationalités les plus représentées (77,7 % des personnes de nationalité étrangère) sont les suivantes : Italie : 24,4 % ; ex-Yougoslavie : 23,5 % ; Portugal : 9,9 % ; Allemagne : 7,2 % ; Espagne : 6,6 % ; Turquie : 5,8 % ; France : 4,2 %, Autriche : 2,4 %.
La logique administrative et juridique tend à ne séparer les habitants d'un pays que sur une distinction simple : national et non national. Cette classification est basée sur une logique de division du monde social, qui est imposée par des groupes constitués en tant que nation. Cette logique est souvent contestée, de manière interne (conflits autour des “ identités régionales ”) ou externe (guerres territoriales). Elle est en outre très réductrice : les diverses communautés d'étrangers présentent entre elles de fortes différences ethniques et sociales, parfois plus fortes que celles qui les séparent du pays dans lequel ils vivent. Pour être complètes, les analyses sur l'immigration doivent non seulement se baser sur le pays d'accueil, mais encore tenir compte des particularités de chaque groupe de migrant, et donc aussi des conditions qui ont mené à l'immigration (l'émigration).
R. P. Béday-Hauser, C. Bolzman (Dir.), On est né quelque part mais on peut vivre ailleurs. Familles, migrations, cultures et travail social, IES, Genève, 1997. — I. Chaudet, C. Regamey, B. Rosende Haver, J.-P. Tabin, Migrations et travail social. Une étude des problèmes sociaux des personnes de nationalité étrangère en Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 2000. — P. Centlivres, I. Girod, Les défis migratoires, Seismo, Zurich, 2000. — H.-R. Wicker, J.-L. Alber, C. Bolzman, R. Fibbi, A. Wimmer, L'altérité dans la société : migration, ethnicité, État, Seismo, Zurich, 1996.
Site Internet : www.unine.ch/fsm
Voir : Acculturation — Autorisation de séjour — Égalité de traitement entre nationaux et non-nationaux — Étrangers (Politique à l’égard des) — Inégalité de chances — Office fédéral des étrangers (OFE) — Office fédéral des réfugiés (ODR) — Permis d’établissement —Réfugié — Requérant d’asile — Secrétariat d’État à l’économie (Seco) — Travail au noir
Jean-Pierre Tabin
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Impôt
Composante essentielle des ressources publiques l’impôt occupe aujourd’hui une place prépondérante au sein des “ prélèvements obligatoires ”. On peut le définir comme une prestation pécuniaire, requise des particuliers par voie d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie, en vue de la couverture des charges publiques.
L’impôt progressif peut également avoir un effet démobilisateur et amener le contribuable à renoncer à “ travailler pour le fisc ”. En effet, au-delà d’un certain seuil d’imposition, variable selon les individus, la pression fiscale peut entraîner un effet de substitution entre le travail et le loisir ou donner naissance à une économie parallèle ou souterraine.
Voir : Évasion fiscale — Impôt (et sécurité sociale) — Impôt négatif — Politique fiscale
jpf
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Impôt (et sécurité sociale)
Le financement de la sécurité sociale suisse est assuré pour une part majeure par ce qu’il est convenu d’appeler des “ pour cent du salaire ”. En règle générale, les employeurs et les salariés cotisent aux principaux régimes de sécurité sociale. Actuellement, plus de la moitié du volume financier total est constitué par cette voie. Une autre partie importante des ressources est mobilisée par la voie de l’impôt. Les débats en cours sur l’avenir du financement de la sécurité sociale envisagent diverses modalités de recours au système fiscal. Certaines sont déjà en place, d’autres sont à l’étude. Énumérons-les.
Contribution indépendante du revenu (prime par tête). Couramment appelées prime par tête, ces contributions ne varient pas en fonction du revenu. Il s’agit d’une somme forfaitaire pour chaque assuré (un échelonnement étant possible pour certains groupes à risques).
Taxe sur la valeur ajoutée (TVA). La TVA renchérit d’un certain pourcentage (réduit pour certains groupes de produits) les ventes des entreprises aux consommateurs indigènes. En Suisse, la TVA n’a pas encore été affectée au financement des assurances sociales. Cependant, le peuple Suisse a donné son accord de principe pour une augmentation de 1 % de la TVA en faveur de l’AVS.
Taxe sur l’énergie. La taxe sur l’énergie pourrait effectuer des prélèvements tant sur la production (imposition de l’énergie entrant dans le processus de production) que sur la consommation d’énergie utilisée par les ménages.
Impôt sur le revenu. L’impôt sur le revenu porte sur l’ensemble des revenus des ménages (y compris les revenus de facteurs en provenance de l’étranger) ; certaines exonérations/déductions sont admises. Un barème fiscal est appliqué au solde du revenu imposable.
Taxe sur la plus-value. On entend par plus-value brute le produit intérieur brut total de quelque 360 milliards de francs. Cette valeur recouvre tous les éléments entrant dans la composition de la plus-value : travail, utilisation du capital et des prestations d’entreprise. La plus-value nette est égale à la valeur ajoutée brute moins l’amortissement. Du point de vue de son utilisation, une taxe sur la valeur ajoutée s’étend à tous les domaines, et donc aussi aux exportations et aux investissements en plus de la consommation indigène. Certaines propositions prévoient la limitation selon la branche économique et l’autorisation de certaines déductions.
Impôt sur le facteur capital en nature (impôt sur les machines). La participation du capital en nature à la production se mesure par les amortissements. On peut parler d’impôt sur les machines lorsqu’un certain pourcentage est perçu comme impôt social sur la somme des amortissements.
Contribution sociale généralisée. Il s’agit d’un pourcentage prélevé sur l’ensemble des revenus des personnes physiques. Aucune déduction n’étant admise, les revenus de transfert (par exemple les rentes) y sont également soumis.
Impôt sur la fortune. L’impôt sur la fortune grève la fortune des ménages. Il autorise toutefois différentes exonérations et déductions. Un barème fiscal progressif est appliqué au solde de fortune imposable.
Impôt sur les successions. Les droits de successions frappent celles et ceux qui ont fait un héritage. Le barème appliqué peut varier en fonction de leur degré de parenté avec le/la défunte. Les donations (entre vifs et après décès) peuvent être imposées d’une manière analogue.
R. IDAFiSo, Rapport sur les perspectives de financement des assurances sociales, Office fédéral des assurances sociales, Berne 1996.
Voir : Évasion fiscale — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Fiscalité — IDAFiso — Politique fiscale
jpf
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Impôt négatif
Lorsque le revenu d’un contribuable, vérifié par l’administration fiscale, ne dépasse pas un niveau déterminé compte tenu de ses charges familiales (“ seuil d’intervention ”), ce même contribuable reçoit de l’État une prestation en espèces. Cette prestation est dénommée impôt “ négatif ”, car celui-ci n’est pas versé à l’État, mais par l’État au contribuable. Le montant de la prestation est le plus élevé (minimum garanti) lorsque le revenu du contribuable est nul. Lorsque celui-ci augmente, elle diminue d’une somme égale au produit du revenu fois le “ taux d’imposition ”. Par exemple, si l’augmentation du revenu est de 1’000 fr. et le taux d’imposition est de 50 %, la prestation diminue de 500 fr. Elle devient nulle lorsque le revenu atteint le niveau du “ seuil d’intervention ”. Ce mécanisme est censé encourager au travail rémunéré les bénéficiaires de la prestation : en effet, si celle-ci diminuait autant que le revenu du travail augmente, les bénéficiaires auraient peu d’intérêt, d’un point de vue strictement économique, à s’efforcer d’obtenir, par leur travail, un revenu d’activité plus élevé.
R. J. Myles, P. Pierson, R. Friedman, The Reform of “ Liberal ” Welfare States in Canada and The United States, European Institute, Robert Schuman Centre, San Domenico (FI), 1997. — R. Weber, Existenzsicherung ohne Fürsorge ? Die negative Einkommenssteuer in Theorie und Praxis, Haupt, Berne, 1991. — OCDE, L’impôt négatif sur le revenu : un instrument de coordination des politiques fiscales et sociales, OCDE, Paris, 1974.
Voir : Politique fiscale — Revenu (Garantie du) — Revenus (Transfert des)
Martino Rossi
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Impotent (Allocation pour)
L’assurance-invalidité verse une allocation pour impotent lorsque l’assuré invalide domicilié en Suisse a besoin de façon permanente de l’aide d’autrui ou d’une surveillance personnelle pour accomplir les actes ordinaires de la vie (se lever, s’asseoir, s’habiller, faire sa toilette, manger, etc.) et cela pour autant qu’il ne bénéficie pas déjà d’une allocation pour impotent de l’assurance-accidents obligatoire ou de l’assurance militaire. Le montant mensuel de cette allocation est fixé d’après le degré d’impotence (légère, moyenne ou grave). Les assurés âgés de deux ans révolus et jusqu’à 18 ans ont droit dans les mêmes conditions à une contribution aux frais de soins. Celle-ci se distingue de l’allocation pour impotent par le mode de calcul uniquement (par jour de soins à domicile et non par mois). Toutes ces prestations visent à prendre en charge, du moins partiellement, les frais supplémentaires dus à l’invalidité qui ne s’inscrivent pas dans le cadre d’une activité professionnelle et ne peuvent être couverts par une mesure de réadaptation concrète de l’AI.
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Soins et aide à domicile
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Incapacité de travail
Le droit social fait, classiquement, une différence entre l’incapacité de travail et l’incapacité de gain. Dans la première hypothèse, le fait de ne pouvoir exercer son activité lucrative peut ouvrir un droit aux prestations en espèces. L’incapacité de travail doit cependant résulter d’une éventualité prévue par la sécurité sociale : maladie, accident, maternité. Le régime de l’assurance-maladie requiert un taux minimal d’incapacité (50 %) pour que la compensation du salaire soit versée. Il n’en va pas de même dans l’assurance-accidents, qui verse une indemnisation en fonction du taux médicalement reconnu. L’assurance militaire fonctionne selon le même principe. En revanche, l’assurance appelée à verser des prestations en cas de maternité ne peut exiger aucune incapacité de travail attestée. Le congé maternité est, en effet, destiné à couvrir le salaire durant la période suivant l’accouchement, sans égard à la capacité de travail effective de la mère.
R. J.-L. Duc, Les assurances sociales en Suisse, IRAL, Lausanne, 1995.
Voir : Assurance-maladie — Assurance-accidents — Maternité (Protection de la)
Béatrice Despland
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Inceste
L’origine du terme inceste résulte de la combinaison des mots latins incestum (sacrilège), incestus (souillé, impur, non chaste) et castus (conforme aux règles et aux rites). Il serait apparu dans les écrits religieux vers 1350 et qualifie les relations sexuelles entre proches parents ou alliés, dont le mariage est prohibé par la loi. L’inceste a toujours provoqué la répulsion et la désapprobation des sociétés, même si l’inceste dynastique a été toléré voir encouragé, afin de préserver l’intégrité d’une famille (par exemple les Ptolémées de l’ancienne Egypte ou la famille royale incasique). Le concept de l’inceste varie selon les cultures et les sociétés : inceste par le mariage, inceste par les liens du sang, inceste par la parenté à un certain degré. Certaines cultures non-occidentales ne possèdent pas pour qualifier l’inceste d’un terme correspondant au nôtre ; les chinois parlent de confusion dans les relations ou de désordre ; les indonésiens de répugnant. Certaines sociétés n’ont même pas de terme pour le décrire, tant le phénomène de l’inceste leur apparaît comme inconcevable. Les conséquences de l’inceste sur les enfants entraînent des troubles relationnels et du comportement, et un fort sentiment de culpabilité car l’enfant participe contre son gré à des activités sexuelles qu’il n’est pas en mesure de comprendre, qui sont inappropriées à son âge ainsi qu’à son développement psychosexuel et qui transgresse les tabous sociaux. Il s’agit donc d’une agression sexuelle intra-familiale qui peut être intranucléaire (perpétrée entre ascendants directs) ou extra nucléaire (dans une famille élargie, oncle et nièce, beau-père et belle-fille). L’article 213 du Code pénal suisse définit l’inceste comme un acte sexuel entre ascendants et descendants, ou entre frères et sœurs germains, consanguins ou utérins. L’inceste en droit suisse est un délit contre la famille, non pas contre l’intégrité sexuelle, et sa répression vise entre autre à protéger les générations futures des dangers de la consanguinité ainsi que l’ordre moral et social.
R. : C. Cloarec, Du père incestueux à l’hebephile, Université de Bretagne Occidentale, Brest 1999/2000. — Code Pénal Suisse
Sites Internet : www.inceste.org — www.disno.ch — www.childsrights.org
Voir : Abus sexuels — Déviance — Protection de l'enfant
Paola Riva Gapany
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Incitation au travail
La réflexion sur les incitations se fonde sur l’idée que les prestations sociales, par leur niveau, voire par leur existence même (hasard moral), découragent l’offre de travail. La recherche d’emploi doit donc être stimulée.
L’aide sociale devient en effet un “piège de la pauvreté” qui dissuade de travailler lorsque les revenus acquis sont entièrement retenus dans le calcul de la prestation. La reprise d’une activité ou une augmentation de salaire se soldent alors d’abord par une baisse ou un retrait de l’aide, d’où une diminution du revenu total après impôt. Une forme d’incitation consiste à permettre, dans certaines limites au-dessus du seuil d’intervention de l’aide sociale, le cumul du revenu et de la prestation.
L’incitation au travail se mesure au taux net de remplacement, rapport entre le revenu tiré de l’aide sociale et le revenu du travail, après impôt et compte tenu de toutes les prestations réservées aux bénéficiaires de l’aide sociale (remboursement de frais de garde, etc.).
Une autre approche vise à stimuler l’activité par des contre-prestations – mesures de qualification et d’insertion pour les uns, contrainte pour les autres.
R. OCDE, L’aide sociale au Canada et en Suisse, OCDE, Paris, 1999, (Combattre l’exclusion, vol. 3).
Voir : Assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur) – Contre-prestations – Marché du travail secondaire – Politiques en matière de lutte contre la pauvreté
Géraldine Luisier
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Indemnisation àð Incapacité de travail
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Indemnités journalières (AI)
L assurance-invalidité verse aux assurés qui se soumettent à des mesures de réadaptation des indemnités journalières destinées à garantir dans une mesure appropriée leur subsistance et celle des membres de leur famille. Dans certains cas d’exception (par exemple : pas de perte de gain due à l’invalidité, perception d’une rente), l’assurance-invalidité n’accorde cependant pas le droit à une indemnité journalière.
L’indemnité journalière est allouée au plus tôt dès le premier jour du mois qui suit le 18e anniversaire de l’assuré. Le droit à l’indemnité journalière s’éteint au plus tard à la fin du mois au cours duquel les hommes ont accompli leur 65e année et les femmes leur 62e année (63e à partir de 2001 et 64e en 2004).
Il existe deux sortes d’indemnités journalières qui se distinguent fondamentalement par les conditions dans lesquelles elles sont allouées et par leur calcul.
La grande indemnité journalière
La grande indemnité journalière est octroyée aux assurés majeurs pendant la durée de mesures de réadaptation médicale, de recyclage professionnel, de mesures d’instruction, de délais d’attente avant les mesures de réadaptation, la période de recherche d’emploi après les mesures de réadaptation, la convalescence après des mesures médicales de l’assurance-invalidité et de périodes de mise au courant après un changement d’emploi dû à l’invalidité
Droit à une indemnité journalière :
L’assuré a en général droit à une indemnité journalière si lesdites mesures l’empêchent d’exercer une activité lucrative durant trois jours consécutifs au moins ou s’il présente, dans son activité habituelle, une incapacité de travail de 50 pour cent ou moins. Ou si, au cours d’un mois, lesdites mesures l’empêchent d’exercer une activité lucrative à plein temps durant trois jours isolés au moins. S’il présente, dans son activité habituelle, une incapacité de travail permanente de 50 pour cent au moins, il peut faire valoir son droit à l’indemnité également pour les jours intermédiaires.
Calcul de l’indemnité :
La grande indemnité journalière se calcule en principe comme l’allocation pour perte de gain qui est allouée aux personnes servant dans l’armée et la protection civile. Elle dépend du revenu de l’assuré avant la survenance de l’atteinte à la santé et de l’état civil. Des suppléments pour personnes seules ou de réadaptation peuvent, le cas échéant, s'ajouter à ces montants.
La petite indemnité journalière
La petite indemnité journalière est allouée aux assurés en cours de formation initiale, ainsi qu’aux assurés mineurs qui n’ont pas encore exercé d’activité lucrative et suivent l’enseignement d’une école spéciale ou se soumettent à des mesures de réadaptation médicales. Ils doivent toutefois, pour y avoir droit, subir un manque à gagner dû à l’invalidité pendant la réadaptation ou les périodes assimilées.
Elle correspond en général à un trentième du salaire moyen de tous les apprentis selon la statistique annuelle des salaires et des traitements établie par la Seco. Les suppléments de réadaptation et pour personnes seules sont compris dans ce montant. Les assurés majeurs en cours de formation professionnelle initiale qui, sans une atteinte à leur santé, auraient achevé leur formation et se trouveraient déjà dans la vie active, reçoivent le montant maximal.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Assurance-invalidité (AI)
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Indépendant (Travail)
Les indépendants sont des personnes qui mettent leur force de travail à leur propre service ou au service de leur propre entreprise. Cette forme de travail regroupe une population hétérogène composée, entre autres, de professions libérales nécessitant des études supérieures (comme par exemple les médecins ou les avocats), d'entrepreneurs, de personnes dont les services ont été externalisés par leur précédent employeur et de multiples professions à faible valeur ajoutée.
La part du travail indépendant a constamment diminué entre le début du siècle et les années 70, ceci aussi bien en Suisse que dans les autres pays développés. Cette décrue s'explique principalement par la perte d'importance du secteur agricole, la concentration de la distribution et la marginalisation de l'artisanat. A partir des années 70, on a observé, selon les pays, soit une stabilisation, soit un accroissement du pourcentage d'indépendant. En ce qui concerne la Suisse, le taux d'indépendant s'est accru de 15,2 % en 1991 à 18 % en 2000. Ce phénomène peut s'expliquer par différents facteurs parmi lesquels on peut mentionner :
— Des facteurs institutionnels comme l'augmentation des taux marginaux d'imposition sur le revenu du travail qui a rendu le statut d'indépendant plus attractif.
— Des motifs liés à la demande de biens et services et à la technologie de production avec le retour de petites entreprises et une demande accrue de services.
— Des causes conjoncturelles liées au fait que le travail indépendant constitue une voie utilisée fréquemment par les chômeurs pour pouvoir retrouver un emploi rémunéré pendant les périodes de récession.
Si le travail indépendant est généralement considéré de manière positive par les pouvoirs publics, comme semblent l'indiquer les aides accordées à la création d'entreprises, cette évolution du pourcentage d'indépendant pourrait être corrélée cependant à un accroissement de la précarité. Par ailleurs, l'augmentation du nombre d'indépendant ne devrait pas occulter les obstacles menant à ce type d'emploi comme les problèmes de financement découlant souvent d'imperfections sur le marché des capitaux.
R. J.-M. Falter, G. Ferro Luzzi, Y. Flückiger, “ Le travail indépendant : caractéristiques et développement prévisible ”, in : Rapport final pour le Programme Prioritaire “ Demain la Suisse ”, 2001. — J.-M. Falter, “ Self Employment and Wage Discrimination in Switzerland  , in : Swiss Review of Economics and Statistics, 136(3), 2000, pp. 349-369.
Voir : Flexibilité  Travail (Nouvelle forme de)
Jean-Marc Falter
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Indexation àð Adaptation des prestations du 1er et du 2e pilier à l'évolution économique
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Indicateurs sociaux
L’élargissement et l’approfondissement du champ de la politique sociale, les impératifs de la politique économique ainsi que certains essais de planification et de rationalisation budgétaires ont imposé aux pays développés, depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le recours à des instruments d’analyse et de mesure toujours plus coordonnés et perfectionnés. Le concept de “ budget social ” ou de “ bilan social ” et le recours à des “ indicateurs sociaux ” se sont ainsi progressivement imposés. On note toutefois un certain ralentissement dans leur diffusion. Celui-ci provient d’une part d’un effet-plafond. D’autre part, le consensus quant aux thèmes susceptibles d’être mesurés et à l’interprétation des évaluations opérées n’est pas garanti.
Selon l’OCDE, les indicateurs sociaux sont des mesures statistiques permettant d’observer le niveau et les variations dans le temps d’une préoccupation sociale fondamentale. Quel est le taux de mortalité ou de chômage ? Diminue-t-il ? On peut aussi les définir comme des instruments représentatifs d’une société qui résument des données habituellement quantitatives et ayant pour objet de renseigner quant à son bien-être social. Ils supposent donc une option quant au sens du progrès. Simples mais précis, univoques mais significatifs, ils doivent en outre répondre à une définition stable dans une liste adaptable.
L’on distingue habituellement les indicateurs de moyen (nombre de médecins pour 1000 habitants), reflétant une intervention, des indicateurs de résultats, résumant l’effet de ladite intervention (taux de mortalité). Quant à l’efficacité de l’intervention, elle met en rapport le moyen (numérateur) et le résultat (dénominateur) ; un exemple en est l’évolution du taux de redoublement selon le nombre d’élèves par enseignant. Au surplus, la construction des indicateurs sociaux devrait permettre une présentation agrégée des données de base, qui en illustre la puissance, mais aussi désagrégée (par sexe, âge ou origine), qui témoigne de leur finesse et augmente la qualité des informations disponibles.
Les domaines couverts sont très variés. En Allemagne, treize dimensions — cernant la démographie, les structures sociales, le marché du travail, l’éducation, les revenus, les transports, l’habitat, la santé, les diverses formes de participation sociale, l’environnement, la sécurité et les loisirs — ont été retenues pour circonscrire tant les conditions objectives que la qualité subjective de la vie des citoyens saisies au travers de 260 indicateurs et de 900 séries temporelles remontant pour certaines au début des années cinquante. En France, près de 400 variables avaient été recensées par une équipe réunie autour de Jacques Delors au début des années soixante-dix. En Suisse, une démarche initiée dans les années quatre-vingt par l’Office fédéral de la statistique (OFS) avait permis d’identifier douze domaines désagrégés en 130 indicateurs. Plus récemment, l’OFS a remis l’ouvrage sur le métier pour approfondir l’évaluation du système helvétique d’enseignement. Alors que certains domaines reflètent des objectifs universellement partagés (augmentation de l’espérance de vie, réduction du chômage), d’autres peuvent davantage faire l’objet de controverses (travail des femmes, avortement, suicide, criminalité). Il est à souligner que ces démarches se caractérisent par leur approche inductive et, partant, non exhaustive ; elles mettent essentiellement l’accent sur l’offre de biens sociaux.
Prenant le contre-pied méthodologique, d’autres chercheurs ont développé de manière déductive une comptabilité sociale rassemblant des indicateurs de résultats ou performance et des indicateurs de structure portant sur les valeurs et aspirations des citoyens. Cette démarche répond davantage à une logique de la demande visant à calculer une fonction globale de satisfaction. Elle suppose une définition sinon commune, du moins convergente des objectifs de la société ainsi que des priorités des individus à court comme à long terme.
R. R. Bauer, Social Indicators, MIT Press, Cambridge/Mass., Londres, 1966. — M. Carley, Social measurement and social indicators, George Allen & Unwin, Londres, 1981. — J. Delors e. a., Les indicateurs sociaux, Sedeis, Paris, 1972. — B. Gross, The state of a Nation : Social systems accounting, Tavistock, New York, 1966. — H.-H. Noll, W. Zapf, “ Social indicators research ”, in : I. Borg, P. Mohler (Éds), Trends and perspectives in empirical social research, Walter de Gruyter, Berlin-New York, 1994. — OECD, The OECD list of social indicators, OCDE, Paris, 1982.
Voir : Bien-être social — Bilan social — Budget social — Indice des prix — Niveaux de revenu — OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) — Recherche sociale
Pierre Weiss
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Indice de développement humain
Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) publie depuis 1990 un indice synthétique du développement humain (IDH). Cet indice correspond à la volonté de compléter les indicateurs traditionnels (PNB, PIB, Revenu national) par un chiffre plus synthétique construit à partir de critères fondamentaux liés au développement.
On retrouve ainsi les idées du développement humain, à savoir préserver les facultés et droits de l'homme à tous les niveaux et instaurer la capacité de gestion du développement.
L'IDH privilégie la longévité, le savoir, le niveau de vie. Cet indice est actuellement calculé à partir de quatre variables de base : revenu, espérance de vie, alphabétisation des adultes, nombre moyen d'années d'étude, en différenciant le primaire, le secondaire et le supérieur. Le développement est lié à trois composantes : mener une vie longue et saine, accéder à la connaissance et à l'information, enfin bénéficier de ressources assurant un niveau de vie décent.
L'IDH comporte une valeur maximale et une valeur minimale pour chaque critère ; ce qui permet d'exprimer la position de chaque pays entre 0 et 1. Ainsi, l’espérance de vie à la naissance s’étale entre 25 et 85 ans, l’alphabétisation des adultes et le taux de scolarisation entre 0 % et 100 %, et le PIB réel par habitant entre 100 $ et 40 000 $.
Le PNUD distingue trois groupes de pays : les pays à développement humain élevé (IDH > 0,804), les pays à développement moyen (0.803 > IDH > 0,507) et les pays à faible développement humain (IDH < 0.506).
Cet indice a donné naissance à d’autres indices comme l’indicateur synthétique des libertés politiques ou l’indicateur sexospécifique du développement humain (analyse de l’inégalité entre les sexes).
Sites Internet : www.globenet.org/horizon-local/webdev/9905indic.html — www.undp.org/hdr2000/french/book/back1.pdf
Voir : Fonds monétaire international (FMI) — Organisation mondiale du commerce (OMC)
Fabrice Ghelfi
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Indice des prix
Un indice est un nombre indiquant le rapport entre deux grandeurs, ce nombre est multiplié par 100. On calcule un indice pour comparer des résultats numériques, dans le temps ou dans l’espace. On distingue les indices simples des indices synthétiques. Un indice simple de prix est donc un rapport entre le prix d’un article à un instant donné et celui de ce même article à une période dite de base. Généralement, pour appréhender une réalité complexe, il faut résumer en un seul plusieurs indices simples.
L’indice suisse des prix à la consommation est un indice synthétique car il est une moyenne pondérée d’indices élémentaires des prix de plus de 200 postes de dépenses. Cette pondération est déterminée, dans le cadre d’une enquête sur la consommation, par le poids que représente dans leur budget les dépenses des ménages. Avec la révision intervenue en 2000, cette structure de pondération sera revue chaque année afin de tenir comptes des nouvelles d’habitude de consommation. L’indice des loyers fait partie de l’indice des prix à la consommation.
Il existe d’autres indices de prix, notamment l’indice des prix à la production qui mesure l’évolution des prix de biens produits et vendus par les entreprises des secteurs agricole et industriel situées en Suisse ; cet indice porte sur les prix au premier stade de la commercialisation, c’est-à-dire les prix au départ de l’usine. L’indice des prix à l’importation mesure l’évolution des prix de quelques marchandises importées. Ces deux indices remplacent l’indice des prix de gros.
A côté de ces indices nationaux, des indices régionaux des prix à la construction de logements sont calculés dans les villes de Zurich et de Berne ainsi que dans les cantons de Genève et Lucerne. Ces indices mesurent l’évolution des coûts, pour le maître d’ouvrage, de la construction de maisons à plusieurs logements dans les régions concernées.
Parmi les indices de prix on peut aussi ranger l’indice des salaires, les indices de taux de change.
R. Office fédéral de la statistique, Annuaire statistique de la Suisse, NZZ Verlag, Zurich, publication annuelle. — J. Fourastié, B. Grais, Les indices statistiques, Masson, Paris, 1984.
Site Internet : www.statistik.admin.ch/findex.htm (Office fédéral de la statistique)
Voir : Consommation — Indice des prix à la consommation — Indice des salaires
Claude Enz
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Indice des prix à la consommation
Cet indice est un instrument de mesure de l’évolution générale des prix des biens et services figurant dans la consommation des ménages résidant en Suisse. Le premier indice suisse date de 1922. Il a fait l’objet de plusieurs révisions totales, dont la dernière en 2000. Depuis 1987, l’OFS (Office fédéral de la statistique) en est le maître d’œuvre. L’indice suisse des prix à la consommation (IPC) est le principal indicateur de l’évolution des prix mais non le seul (cf. Indice des prix).
Derrière cet indice, il y a des conventions, des hypothèses, des méthodes et procédures qui doivent être appréciés en fonction de l’usage pour lequel l’indice a été construit et en fonction de son utilisation effectivement faite. Un indice des prix peut être conçu et calculé de nombreuses manière. Il n’y a pas d’indice idéal ou seul juste. L’aspect consensuel de l’IPC se traduit par la consultation de différents acteurs (milieux économiques, associations de consommateurs, syndicats, …) lors des révisions.
Certaines critiques portent sur le contenu de la consommation (panier-type). Des raisons méthodologiques, des raisons pratiques, le manque de données fiables sont à la base de l’exclusion de certains postes qui représentent pourtant une dépense effective pour les ménages (les impôts directs, les cotisations aux assurances sociales, les primes d’assurances privées, les primes d’assurance-maladie, les impôts sur les véhicules à moteurs, les dépenses d’investissement,…). Ainsi seuls 70 % du total des dépenses des ménages sont considérées comme des dépenses de consommation qui détermineront la pondération des groupes de dépenses dans l’indice.
Au delà des aspects techniques, l’utilisation d’indices de prix à la consommation est éminemment politique. C’est, par exemple, au nom de la lutte contre l’inflation, mesurée par l’évolution de l’indice des prix, que les banques centrales ont mené ou vont mener des politiques restrictives avec les conséquences sur l’emploi, sur la vie quotidienne des gens.
Les utilisations principales de l’IPC au niveau suisse sont la mesure de l’inflation, l’indexation de valeurs monétaires (salaires, rentes, pensions alimentaires, loyers,..), la déflation de séries nominales de la comptabilité nationale ou d’autres grandeurs statistiques mesurant des valeurs.
L’indice des prix à la consommation ne mesure pas l’évolution du coût de la vie, ni l’évolution du pouvoir d’achat. C’est par convention qu’on l’utilise comme indicateur du renchérissement. La question reste posée de savoir s’il faut indexer certaines valeurs avec cet indice ou plutôt avec d’autres, existants ou à créer.
R : Office fédéral de la statistique, Le nouvel indice suisse des prix à la consommation (mai 2000). Aperçu des méthodes, Neuchâtel, 2000. — Office fédéral de la statistique, Statistique des prix 1999, Inventaire des mesures politiques influant sur les prix, Neuchâtel, 1999. — J.-P. Piriou, L’indice des prix, La Découverte, Paris, 1983.
Site Internet : www.statistik.admin.ch/findex.htm (Office fédéral de la statistique)
Voir : Consommation — Fédération Romande des consommatrices — Indice des prix — Indice des salaires — Protection des consommateurs
Claude Enz
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Indice des salaires
Si, historiquement, la statistique des salaires est une des plus anciennes (en 1918 sont publiés les premiers résultats basés sur les déclarations d’accidents des travailleurs assurés auprès de la CNA, et dès 1942, une enquête structurelle sur les salaires, dite enquête d’octobre, est établie), il faut se rendre compte de l’indigence des informations en matière de revenus et de salaires en Suisse.
Suite à l’entrée en vigueur de la loi fédérale sur l’assurance-accidents (LAA), en 1984, instaurant l’obligation pour tous les travailleurs d’être assurés, le Conseil fédéral a donné mandat à l’Office fédéral de l’industrie, des arts et métiers et du travail (OFIAMT), (aujourd'hui Secrétariat d’État à l’économie (Seco), de réviser la statistique salariale.
Depuis 1994, une nouvelle statistique bisannuelle sur la structure des salaires ainsi que la statistique de l’évolution des salaires basés sur les données du Service de centralisation des statistiques de l’assurance-accidents (SSAA) ont officiellement remplacé les anciennes statistiques en la matière. Depuis 1995, c’est l’Office fédéral de la statistique qui élabore ces deux statistiques.
La statistique de l’évolution des salaires, qui permet le calcul de l’indice des salaires, est basée sur les données concernant plus de 300'000 personnes accidentées dont on connaît la branche d’activité économique, le sexe, la qualification, le domaine d’activité (exploitation, technique, bureau, vente), le salaire, la durée du travail, l’âge notamment. Dans le calcul de l’indice, on exclut les salariés occupés à temps partiel et les cadres moyens et supérieurs.
Cet indice est publié annuellement en termes nominal et réel (après déflation à l’aide de l’indice des prix à la consommation).
Selon l’Office fédéral de la statistique, cet indice doit permettre “ d’observer la conjoncture et l’analyser, de connaître l’évolution des salaires sur le long terme, de produire des informations nécessaires aux partenaires sociaux dans le cadre des discussions salariales, de disposer d’informations statistiques pour l’application de différentes législations ”. Cet indice est utilisé pour le calcul des revenus cantonaux et pour l’élaboration de l’indice mixte (moyenne entre l’indice des prix à la consommation et l’indice des salaires) qui sert à l’indexation des rentes AVS.
R. Office fédéral de la statistique, La nouvelle statistique de l’évolution des salaires, Berne, 1995. — “L’adaptation des rentes de l’AVS et de la prévoyance professionnelle à l’évolution économique ”, in : Sécurité sociale, Revue de l’Office fédéral des assurances sociales, No.2 1996.
Site Internet : www.statistik.admin.ch/findex.htm (Office fédéral de la statistique)
Voir : Indice des prix — Indice des prix à la consommation — Office fédérale de la statistique — Secrétariat d'État à l'économie (Seco)
Claude Enz
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Indice mixte àð Assurence-vieillesse et survivants
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Industrialisation
Ce terme désigne le processus par lequel l industrie est devenue la principale source de revenu d une société et son mode d organisation un exemple généralisable. Dans ce contexte, l urbanisation et l’éducation, par exemple, ont été stimulées alors que l’apparition de nouvelles couches sociales a bouleversé le jeu politique traditionnel. Les conflits sociaux liés à l’industrialisation ont joué un rôle prépondérant dans le développement de la sécurité sociale et, plus généralement, dans la généralisation des politiques sociales.
Voir : Société industrielle
jpf
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Inégalités des chances
L’étude de l’inégalité des chances consiste à examiner dans quelle mesure des caractéristiques dont les individus ne sont nullement responsables (caractéristiques dites assignées, imposées, ou encore dans le langage de la sociologie “ ascriptives ”) pèsent sur leur destinée. Il s’agit principalement du sexe, du pays et de la région d’origine, de la condition sociale des parents, du groupe “ ethnique ”, de la nationalité pour les immigrés. L’incidence de telles caractéristiques sur la carrière scolaire (inégalité face aux études) et professionnelle (mobilité sociale) des individus sont au nombre des principaux thèmes des travaux consacrés à ce sujet. De tels travaux portent aussi sur la longévité (inégalité devant la mort), l’illettrisme, le degré de participation à la vie politique, par exemple. Au cours de ces dernières décennies, les recherches de cette nature ont fait de grands progrès, grâce surtout à des analyses multivariées (analyse des effets combinés d’un ensemble de facteurs) effectuées sur ordinateur.
R. R. Boudon, L’inégalité des chances (La mobilité sociale dans les sociétés industrielles), nouvelle édition revue et augmentée, Armand Colin, Coll. Pluriel, Paris, 1979, réédité en 1985. — R. Dahrendorf, Life Chances, The University of Chicago Press, Chicago, 1979. — R. Girod, Les inégalités sociales, Que Sais-Je ?, Deuxième édition mise à jour, PUF, Paris, 1993. — R. Girod, Problèmes de sociologie de l’éducation, Unesco, Paris, et Delachaux et Niestlé, Lausanne, 1989.
Voir : Éducation (Politique de l’) — Immigration — Inégalités sociales
Roger Girod
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Inégalités et discriminations salariales
Le marché du travail instaure des inégalités de salaires entre différents groupes de la population selon l’origine ou le genre des personnes actives. Ainsi, en Suisse, le salaire médian des hommes dépasse de 30 % celui des femmes. Dans le même temps, les statistiques indiquent que les personnes actives d’origine étrangère détentrice d’un permis C disposent d’une rémunération médiane inférieure de 15,6 % à celle des Suisses, différence qui se réduit à 11,5 % par rapport aux frontaliers mais qui culmine à 44,2 % par rapport aux saisonniers.
De manière générale, les inégalités de salaires peuvent être dues à des différences de caractéristiques personnelles (formation acquise, expérience accumulée sur le marché du travail ou années d’ancienneté passées au sein du même établissement). D’autre part, une partie des inégalités salariales peut être liée à la position détenue par l’entreprise sur son marché. Si elle est en situation de monopole, elle pourra verser des rémunérations supérieures aux salaires qui seraient susceptibles d’être attribués si l’employeur était en concurrence avec d’autres entreprises. Finalement, sans être exhaustif sur tous les facteurs explicatifs des inégalités, une partie des différences peut être due au fait que certains employeurs peuvent choisir de verser des rémunérations supérieures à celles versées par leurs concurrents afin de réduire le taux de rotation du personnel ou stimuler l’ardeur à la tâche de leurs employés. Il n’en reste pas moins que même lorsque l’on tient compte de tous ces variables explicatives, il demeure encore des inégalités de salaires qui ne peuvent pas être expliquées par ces facteurs “ objectifs ”. Ce résidu inexpliqué est alors attribué à une attitude discriminatoire des employeurs qui rémunèrent différemment des personnes qui présentent pourtant, hormis leur sexe et/ou leur origine, des caractéristiques parfaitement identiques.
En Suisse, toutes les études réalisées sur ce sujet démontrent que près de 40 % des différences de salaires entre les femmes et les hommes sont dues à des comportements discriminatoires. En ce qui concerne la population étrangère, les différences de salaires sont plus largement attribuables à des inégalités dans les profils individuels de la population (notamment en termes de formation). Mais elles proviennent aussi d’une non-reconnaissance des titres obtenus par les immigrés dans leur pays, discrimination qui diffère selon l’origine des personnes. Ainsi, le même nombre d'années de formation obtenues en Allemagne est mieux valorisé sur le marché suisse du travail que la même éducation acquise en Turquie ou même au Portugal.
R. Y. Flückiger, G. Ferro Luzzi, “ Différences de salaires entre femmes et hommes en Suisse : aspects méthodologiques ”, in : T.-H. Ballmer-Cao, V. Gonik (Éds) Hommes/femmes, métamorphoses d’un rapport social, Georg, Genève, 1998, pp. 73-87. — Y. Flückiger, A. de Coulon, “ Analyse économique de l’intégration de la population étrangère sur le marché suisse du travail ”, in : Les défis migratoires, sous la direction de P. Centlivres et I. Girod, Seismo, Coll. Cohésion sociale et pluralisme culturel, Zurich, 2000, pp. 109-119.
Voir : Inégalités sociales — Égalité de traitement entre femmes et hommes— Égalité entre hommes et femmes — Immigration — Migrations (Politique des) — Salaire — Salaires (structure des) — Travail (Nouvelle forme de)
Yves Flückiger
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Inégalités intergénérationnelles
La question fondamentale est de savoir si une génération vit “ aux frais des autres générations ”. On craint parfois que l'exploitation écologique par les générations actuelles s'opère aux dépens des générations futures. Jusqu'ici, l'expression d'inégalité intergénérationnelle était plus souvent employée dans l'autre sens, pour dire que les jeunes générations vivent mieux que les générations précédentes.
François Höpflinger
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Inégalités sociales
Les inégalités sociales existent dans toutes les sociétés connues. Même dans les sociétés les plus égalitaires, l’âge et le sexe — critères qui en soi échappent aux possibilités d’influence individuelle — donnent lieu à des interprétations culturelles et à des attributions de rôles, de positions, de parcours spécifiques. Ces interprétations et attributions relèvent non seulement de différences (d’identité, d’activités, d’espaces propres), mais aussi d’inégalités, en matière de considération sociale, d’autonomie, de pouvoir.
Par inégalités on entend l’accès différencié à des biens sociaux importants. Ce qui est un “ bien ”, dans le sens de cette définition, peut varier entre sociétés et cultures aussi bien qu’entre les sous-ensembles d’une même société ; la centralité d’un tel bien découle des valeurs dominantes et de l’organisation de la société. Les sociétés industrielles et postindustrielles sont des sociétés marchandes, d’où la centralité de biens comme le revenu, la propriété, la position professionnelle et la formation.
Les processus réglant l’accès à des situations favorables, voire privilégiées et ceux qui induisent des mouvements descendants ou qui stabilisent des discriminations (cloisonnement social) s’appuient régulièrement sur des éléments faciles à repérer et qui échappent à l’influence des intéressé-e-s : notamment l’origine sociale (statut des parents), l’appartenance ethnique, nationale, régionale, et surtout sexuelle.
Les mécanismes de maintien des inégalités ainsi que les tentatives de les réduire ou au contraire de les accentuer sont multiples, complexes, en partie peu visibles. Le système dans sa totalité paraît difficile à appréhender et encore plus difficile à influencer par le commun des mortels. Le caractère socialement construit et non “ naturel ” des inégalités est souvent occulté par les expériences quotidiennes, marquées pour beaucoup par un aspect inébranlable. La conscience des inégalités est aussi affaiblie par certaines représentations culturelles, voire des idéologies quand celles-ci fixent l’attention de manière à dé-thématiser les inégalités et la question de leur légitimité (notamment des visions qui mettent l’accent sur le mérite individuel, expliquent le monde social avant tout par les valeurs et les intentions des acteurs, nient l’existence de phénomènes autres qu’individuels, présentent les inégalités comme “ naturelles ”, ou soulignent la nécessité de privilégier les personnes dotées de capacités rares et indispensables).
Enjeu social fondamental, les inégalités ne donnent pas automatiquement lieu à des contestations ou des conflits de redistribution. Elles sont contestées si elles ne sont pas considérées comme légitimes, d’où l’intérêt, souvent ressenti par les plus nantis, à diminuer la visibilité sociale de leurs privilèges, voire à leur donner des justifications. S’accordant mal avec des valeurs égalitaires, les inégalités économiques peuvent mettre en question la démocratie politique quand leur légitimité fait défaut à long terme.
La pauvreté s’avère être une situation particulièrement défavorisée dans le cadre des inégalités sociales, mais l’inégalité n’implique pas nécessairement la pauvreté ; celle-ci résulte d’une situation où les forces tendant au maintien, voire à l’augmentation des inégalités l’emportent sur les forces tendant à la redistribution.
R. Y. Lemel, Stratification et mobilité sociale, Colin, Paris, 1991. — R. Levy, La structure sociale de la Suisse, Pro Helvetia, Zurich, 1996. — R. Levy e. a., Tous égaux ? De la stratification aux représentations, Seismo, Zurich, 1997.
Voir : Bien-être social — Disqualification sociale — Exclusion — Femmes (Émancipation des) — Immigration — Intégration — Pauvreté — Redistribution des revenus — Revenus (Transfert des)
René Levy
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Inégalités sociales en matière de santé
Les catégories socio-économiques présentent des différences notables à cet égard : être socialement défavorisé entraîne une morbidité accrue (plus de risques de tomber malade) et une mortalité plus élevée (espérance de vie moindre). C’est en Grande-Bretagne que ces variations ont été d’abord mises en évidence, puis des observations semblables ont été faites partout où des études appropriées ont été conduites, y compris en Suisse. En France, pour la période 1976-1980, l’espérance de vie (supplémentaire) à l’âge de 35 ans était de 41 à 43 ans pour les enseignants, cadres et professions libérales, alors qu’elle n’était que de 34,3 années pour les manœuvres. À Montréal, au Canada, l’espérance de vie à la naissance était en 1976 de 68 ans pour les habitants des quartiers pauvres et de 75 ans pour ceux des secteurs les plus aisés. Dans une enquête suisse portant sur la période 1979-1982, la mortalité par cancer bronchique chez les hommes de 30 à 49 ans passe de 40 chez les dirigeants et professions libérales à 145 chez les ouvriers. Il y a des différences comparables pour la mortalité liée à l’ensemble des cancers. Le risque de tumeur génitale est plus grand chez les femmes de conditions plus modestes. En plus d’autres facteurs liés au statut socio-économique (sexualité, hygiène, grossesses), un suivi médical moins régulier joue probablement un rôle. Ces différences vis-à-vis de la santé, de la maladie et de la mort sont constantes et généralisées. Il n’y a pas de moyen aisé de les corriger et elles doivent retenir l’attention des responsables politiques en général, afin d’en atténuer autant que possible l’intensité.
R. V. Beer e. a. “ Social class gradients… ”, in : Social Science and Medicine 37, 1993, pp. 1011-1018. — P. Lehmann et coll., “ Les inégalités sociales face à la santé et la maladie en Suisse ”, in : Cahiers médico-sociaux 32, 1988, pp. 3-59.
Voir : Espérance de vie — Inégalités sociales — Médecine sociale et préventive — Politique de la santé
Jean Martin
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Inflation
L’inflation est la perte du pouvoir d’achat de la monnaie. Elle provoque la hausse du niveau général des prix, mais elle doit être distinguée de l’augmentation du coût de la vie. La perte de valeur des unités de monnaie est un phénomène qui frappe l’économie nationale dans son ensemble, sans aucune discrimination entre les catégories d’agents. En revanche, l’augmentation du coût de la vie affecte la répartition fonctionnelle et personnelle des revenus, sans toucher à la relation entre la masse monétaire et le produit national définissant le pouvoir d’achat de la monnaie. Il est commode de mesurer le taux d’inflation à l’aide de la variation de l’indice des prix à la consommation. Cette mesure n’est toutefois pas exacte car les variations de l’indice des prix ne sont pas toutes d’origine inflationniste. Qui plus est, la stabilité de l’indice des prix peut aller de pair avec un taux d’inflation positif : la baisse tendancielle des prix suscitée par le progrès technique peut être en effet compensée par une hausse des prix due à la perte de valeur de la monnaie. La cause efficiente de cette pathologie n’a pas encore été trouvée.
R. : M. Parkin, Inflation, in The New Palgrave : A Dictionary of Economics, Macmillan, London, 1987. — S. Rossi, Money and Inflation, Elgar, Cheltenham, 2001.
Voir : Banque centrale européenne — Monétarisme — Pouvoir d’achat
Sergio Rossi
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Information du patient
L’information du patient est devenue un élément essentiel dans le fonctionnement des systèmes de soins et un préalable indispensable à l’empowerment des patients. Ce n’est qu’en garantissant le droit d’être informé à tout patient qu’on peut développer son regard critique sur les propositions que lui font les professionnels de la santé et le mettre en situation de prendre des décisions en connaissance de cause.
Le droit d’être informé se concrétise par le droit du patient d’accéder à son dossier (médical, hospitalier, infirmier, etc.) et par son droit d’obtenir de tout soignant une information complète, impartiale et véridique avant de décider d’un traitement (théorie du consentement éclairé).
Le Tribunal fédéral a consacré en 1979 le devoir du médecin d’informer son patient sur le diagnostic, le traitement proposé, ses modalités, ses bienfaits et ses risques (ATF 105 II 279). Il a ajouté à ces éléments d’information les autres formes de traitement disponibles (ATF 108 II 59) ainsi que leurs coûts (ATF 114 Ia 350), y compris la prise en charge par l’assurance obligatoire des soins (ATF 119 II 456). Durant les années nonante, les législations romandes sur la santé ont repris ces principes et consacré l’obligation des professionnels de la santé d’informer les patients. De même, la Convention européenne sur les droits de l’homme et la biomédecine (non encore ratifiée par la Suisse) pose l’information du patient comme un principe fondamental.
L’information doit être donnée de manière compréhensible (du point de vue du contenu comme de la langue) pour le patient concerné. Il n’existe aucune exigence générale que l’information soit donnée par écrit, mais des lois spéciales peuvent le prévoir, comme la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée (art. 7) ou celle sur les produits thérapeutiques en ce qui concerne les essais cliniques de médicaments (art. 54). Le professionnel de la santé a cependant intérêt à consigner dans le dossier du patient l’information donnée, dans la mesure où il lui appartiendrait, dans un éventuel procès ultérieur en responsabilité, de prouver qu’il a bien informé son patient. En milieu hospitalier, spécialement pour certaines interventions chirurgicales, des formules écrites d’information et de consentement ont été mises au point ces dernières années. Elles ne devraient toutefois pas remplacer l’indispensable dialogue entre soignant et soigné.
Si le patient est incapable de discernement, l’information sera donnée à la personne qui peut décider à sa place des soins : son représentant légal (tuteur pour un interdit, père ou mère pour un mineur) ou la personne qu’il avait désignée à l’avance à cette fin (représentant privé). Un interdit et un mineur capables de discernement peuvent décider seuls des soins, de sorte que c’est eux, et non pas leur représentant légal (sauf, bien sûr, s’ils sont d’accord), qui doivent être informés par les professionnels de la santé.
R. D. Manaï, Les droits du patient face à la médecine contemporaine, Genève, 1999. — O. Guillod, Le consentement éclairé du patient, Neuchâtel, 1986.
Voir : Directives anticipées — Droit à la santé — Droits aux mourants— Empowerment — Relation médecin-malade
Olivier Guillod
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Information sociale
L’information sociale se définit comme l’ensemble des informations qui concernent les problèmes sociaux, notamment :
— les faits, les problématiques, dans leurs aspects quantitatif et qualitatif, par exemple : la dépendance, la violence, la pauvreté, etc. ;
— les droits des personnes, les dispositifs institutionnels, par exemple : la LAVI, les RMR cantonaux, l’aide sociale, etc. ;
— les pratiques d’action sociale et de solidarité développées par des organismes publics ou privés, par exemple : Caritas, Centres sociaux protestants, Pro Senectute, etc.
L’information sociale, selon les objectifs visés, peut être au service de la prévention (renforcer les liens sociaux), de l’action sociale (réinsérer, rendre autonome) ou de la politique sociale (modifier la législation, créer de nouveaux dispositifs tels que les RMR cantonaux).
Site Internet : www.socialinfo.ch
Voir : Association romande et tessinoise des institutions d’action sociale (ARTIAS) — Communication sociale — Marketing social — Réalités sociales
Albert-Luc Haering
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Infractions contre l’intégrité sexuelle
Les infractions contre l’intégrité sexuelle prennent des formes multiples et comprennent des actes sexuels sans contact corporel, avec contact, ou avec pénétration : cela recouvre notamment le viol, la contrainte sexuelle et le harcèlement. Elles peuvent être commises envers des enfants ou des adultes. Des recherches montrent que ce sont les femmes et les enfants qui en sont majoritairement victimes, et que l’agresseur est le plus souvent connu de la victime. Le code pénal suisse sanctionne les infractions contre l’intégrité sexuelle par les articles 187 à 200. Depuis 1992 il sanctionne également le viol conjugal. Les infractions contre l’intégrité sexuelle ont existé de tout temps, mais à cause des préjugés qui les entouraient (et qui subsistent encore aujourd’hui) peu d’entre elles étaient dénoncées. Depuis quelques années, l’action des associations féministes et l’entrée en vigueur de la LAVI (loi sur l’aide aux victimes d’infractions) ont favorisé une prise de conscience de la gravité de ces infractions et des traumatismes qu’elles engendrent, et différentes mesures de soutien ont été mises en place.
R. G. Vigarello, Histoire du Viol, XVIe-XXe siècle, Seuil, Paris, 1998. — E. Charrière, Le viol : oser en parler, Réalités sociales, Lausanne, 1993.
Sites Internet : www.sosfemmes.com — www.frauenberatung.ch
Voir : Abus sexuels — Victimes d’infractions (Loi fédérale sur l’aide aux) (LAVI)
Colette Fry
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Initiative constitutionnelle
En droit fédéral suisse, on entend par initiative constitutionnelle la procédure par laquelle une fraction du corps électoral, actuellement cent mille citoyens, peut proposer une modification, totale ou partielle, de la Constitution. L’initiative peut être présentée soit sous forme de proposition conçue en termes généraux, destinée à être concrétisée par l’Assemblée fédérale en cas d’acceptation, soit sous forme de projet rédigé de toutes pièces, à savoir une ou plusieurs dispositions nouvelles venant prendre place, telles quelles, dans la Constitution. Lorsqu’elle tend à la révision totale, l’initiative ne peut toutefois être présentée qu’en termes généraux. En pratique, le type d’initiative le plus fréquemment utilisé est l’initiative tendant à la révision partielle de la Constitution présentée sous forme de projet rédigé, à laquelle l’Assemblée fédérale peut, si elle le juge nécessaire, opposer un contre-projet. En dépit de leurs différences, le point commun entre ces diverses formes d’initiatives populaires réside dans leur mode d’acceptation final, lequel dépend toujours d’un référendum nécessitant une double majorité des voix, celles du peuple d’une part et celles des cantons de l’autre.
R. A. Aver, G. Malinverni, M. Hottelier, Droit constitutionnel suisse, Stämpfli Éditions SA, Berne, 2000. — É. Grisel, Initiative et référendum populaires, 2e éd., Stämpfli Éditions SA, Berne, 1997. — J.-D. Delley, L’initiative populaire en Suisse, L’Âge d’Homme, Lausanne, 1978.
Sites Internet : www.admin.ch — c2d. unige. ch
Voir : Démocratie (et politique sociale)  Référendum
Michel Hottelier
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Injustice àð Inégalités sociales  Justice sociale
Innovation technologique àð Postfordisme  Société postindustrielle
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Insécurité sociale
Cette notion est apparue dans les débats récents à propos de l’évolution de la sécurité sociale voire de ce que l’on a appelé le “ démantèlement social ”. Elle rend attentif au fait que certaines réductions des prestations de la sécurité sociale induisent des coûts supplémentaires pour la collectivité ainsi que des situations de souffrance pénibles pour les personnes concernées. En particulier, la maladie frappe de nombreuses personnes qui subissent ces mesures. La volonté de faire des économies débouche, en fait, sur des dépenses supplémentaires.
Voir : Démantèlement — Sécurité sociale — Précarisation (Mécanismes de la) — Welfare
jpf
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Insertion
Ce terme est fréquemment évoqué dans le champ social depuis un quart de siècle. Mais il s'applique à un ensemble disparate de processus visant aussi bien la socialisation, la formation en vue du marché du travail que la création de travail pour faciliter l'accès à l'activité humaine fondamentale (insertion par l'économique).
Le succès récent de ce terme est associé au besoin de la collectivité de réagir à l'exclusion sociale consécutive des profondes mutations socioéconomiques qui traversent notre société. L'insertion, dans ce sens, se réfère à l'ensemble des actions destinées à pallier la menace que ces transformations font peser sur l'intégration sociale. Cette dernière notion, souvent confondue avec l'insertion, est plus ancienne et repose sur une définition sociologique précise. Un groupe, ou une société, est intégré quand leurs membres se sentent liés les uns aux autres par des valeurs, des objectifs communs, le sentiment de participer à un même ensemble sans cesse renforcé par des interactions régulières (cf. E. Durkheim). L'intégration sociale est donc une propriété collective et l'insertion, dans ce contexte, se réfère à la participation au niveau individuel à un système social intégré.
Le terme d'insertion désigne par conséquent à la fois un but et un moyen. C'est, d'une part, le résultat des mécanismes d'intégration, tels la socialisation, par lesquels chaque individu tout au long de sa vie assimile les éléments lui permettant d'occuper une place dans les échanges sociaux. Dans notre société, l'axe le plus intégrateur autour duquel se cristallise l'insertion est le travail.
D'autre part, l'insertion désigne les interventions menées au moyen de dispositifs publiques (dans le cadre par ex. de l'aide aux chômeurs ou de l'aide sociale) auprès de populations dont la situation d'exclusion est révélatrice de défaillances des mécanismes d'intégration. Ces interventions consistent, au niveau individuel, en une stratégie de discrimination positive (cf. R. Castel) visant à renforcer les processus de socialisation et le développement des liens sociaux afin de rattraper la distance par rapport à une intégration accomplie (en favorisant par ex. le retour de chômeurs “ en fin de droit ” sur le marché du travail ou dans l'assurance-chômage). Mais l'insertion a aussi une portée sociétale pour se réaliser, dans la mesure où une insertion passe nécessairement par l'aménagement de conditions propres à assurer un accueil des personnes (mises) en marge.
Les dispositifs d'insertion récemment instaurés (cf. RMI, RMCAS, RMR, MIS et PEQ, etc) ouvrent dans le système de sécurité sociale un nouvel espace intermédiaire entre le régime de l'assurance et celui de l'assistance classique. C'est aussi un espace transitionnel puisque ces interventions sont en principe limitées dans le temps et s'apparentent à une étape dans la trajectoire d'insertion des individus. Cet espace se veut promotionnel en renforçant les compétences sociales et professionnelles et en favorisant le développement des liens sociaux. C'est un espace structuré régit par une volonté politique d'éviter par ce moyen l'apparition de fractures sociales. Mis en œuvre sur la base d’un principe de réciprocité en exigeant des bénéficiaires une contre-prestation, ces dispositifs novateurs sont toutefois constamment menacés d'être réduit à une action d'euphémisation, voire de pénalisation, ou d'astreinte au travail et de disciplinarisation (workfare).
R. R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale, Fayard, Paris, 1995, pp. 418-435. — E. Durkheim, De la division du travail social, PUF, Paris, 1930. — C. Guérin-Plantin, La genèse de l'insertion, Dunod, Paris, 1999, pp. 205-216. — M. Loriol, Qu'est-ce que l'insertion?, Harmattan, Paris, 1999.
Voir : Chômage — Contre-prestations — Mesures d'insertion sociale (MIS) — Revenu minimum d'insertion (RMI) — Revenu minimum de réinsertion (RMR)
Jean-Claude Simonet
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Institut d’éthique sociale (IES)
Organe de la Fédération des Églises protestantes de la Suisse créé en 1971. Le siège central de l’IES est à Berne, le Bureau romand à Lausanne. Il est chargé de mener une réflexion éthique dans les domaines de la politique sociale (chômage, drogues, etc.), de l’économie, de l’environnement, du développement, de la bioéthique, etc. La méthode de réflexion s’appuie sur des recherches interdisciplinaires qui articulent la tradition chrétienne, l’éthique profane et l’analyse des problèmes sociaux contemporains. Le Bureau romand conduit également des recherches touchant la situation religieuse en Suisse (sociologie de la religion).
R. H.-B. Peter, R.-J. Campiche, H.-U. Germann, Éthique, Église et société, Études et Rapports 45, IES, Lausanne, 1993. — A. Rich, L’éthique économique, Labor et Fides, Genève, 1994. — R.-J. Campiche, A. Dubach, Croire en Suisse(s), L’Âge d’homme, Lausanne, 1992.
Site Internet : www.ref.ch/ise
Voir : Éthique — Éthique sociale — Politique sociale
Roland-J. Campiche
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Institut Universitaire Âges et Générations (INAG)
L’INAG a été fondé en 1998 à Sion avec le soutien du Fonds national suisse pour la recherche scientifique (FNSRS), des universités de Bâle et de Genève, de Pro Senectute Suisse, de l’Institut Universitaire Kurt Bösch (IUKB), de l’État du Valais, ainsi que de nombreuses personnalités scientifiques et politiques. C’est un instrument de coopération dont le but est de servir les initiatives engagées en vue de comprendre et d’améliorer les relations entre les générations, dans un contexte sociopolitique marqué par des changements majeurs. En collaboration avec ses partenaires au sein des universités et dans les champs de pratique, l’INAG s’attache à promouvoir et à développer des travaux d’analyse et de synthèse sur les questions liées à la vieillesse et aux rapports entre les générations. Les activités de l’Institut sont orientées de manière à permettre de stimuler et d’approfondir la recherche et l’enseignement gérontologique dans les universités et les HES suisses, favoriser la discussion et la diffusion des résultats de recherche interdisciplinaires dans les domaines définis par les notions d’âges et de générations, ainsi que faire le lien entre recherche fondamentale, recherche appliquée et les activités professionnelles. L’INAG est conçu comme une plate-forme d’information en gérontologie très ouverte et régulièrement complétée, qui propose des services tels qu’une bibliothèque, une formation post-graduée en gérontologie, des journées scientifiques, des publications spécialisées, un site Internet. Il peut également apporter son concours à la réalisation de projets de recherche et assume un certain nombre de tâches d’expertise.
Site Internet : www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Voir : Cycle de vie — Centre interfacultaire de gérontologie (CIG) — Génération — Gérontologie —Vieillesse
Valérie Hugentobler
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Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA)
L’ISPA, créé en 1902 sous le nom de Service antialcoolique, est une organisation à but non lucratif, non gouvernementale et indépendante. L’ISPA s’intéresse en particulier aux aspects psychosociaux de la consommation d’alcool et de drogue.
Ses activités, en relation avec l’usage de substances psychoactives, touchent les domaines de la prévention, de l’information, de l’éducation, de la recherche, des statistiques et du développement des études méthodologiques. Toutes ces activités visent à réduire l’ensemble des problèmes liés à la consommation des substances psychoactives, en particulier l’alcool, les drogues, le tabac et les médicaments psychoactifs. Ses prestations sont en grande partie offertes à toute la population.
L'ISPA collabore avec les universités, les institutions spécialisées dans les problèmes de dépendance, les associations de prévention, les autorités fédérales et cantonales ainsi que les
instituts de recherche du monde entier. Le Centre InfoDoc, regroupant la bibliothèque et le service de documentation est mis à disposition de toute personne intéressée. Par ailleurs, son site Internet fourmille d'informations spécialisées sur l'ensemble des thèmes traités par l'ISPA ; un glossaire complète l'offre proposée.
Site Internet : www.sfa-ispa.ch
Voir : Alcoolisme — Politique de la santé — Prévention — Prévention secondaire — Toxicomanie
Michel Graf
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Institutions internationales
Pour organiser les relations internationales, les États se sont donnés un ensemble d’institutions dont l’importance est devenue majeure au cours du Xxe siècle. Leur action a souvent été déterminante dans le domaine de la politique sociale, en particulier dans la construction des droits sociaux.
R. J.-C. Zarka, Les institutions internationales, Ellipes, Paris, 1996.
Voir : Conseil de l’Europe — Droit international (Primauté du) — Droits de l’homme (Convention européenne des) — Organisation des nations unies (ONU) — Organisation internationale du travail (OIT)
jpf
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Institutions sociales privées
En Suisse, la politique sociale est mise en œuvre par un réseau d’institutions fort diversifié. De nombreuses tâches sont déléguées à des institutions privées qui reçoivent un mandat plus ou moins explicite. Ce sont de grandes organisations telles que la Croix-Rouge ou Pro Infirmis, mais aussi de nombreuses petites associations (par exemple dans le domaine des prestations apportées aux personnes handicapées).
Ce secteur a connu un important développement pendant les “ Trente glorieuses ”. Aujourd’hui, le contrôle de leurs activités tend à se renforcer et les subventions publiques leur sont de plus en plus comptées ou soumises à des contrats de prestations.
En fait, les institutions sociales privées présentent un visage fort diversifié. Certaines sont presque entièrement financées par des ressources publiques, d’autres travaillent sur une base d’autofinancement.
On trouve de nombreux exemples de ce type d’institutions dans ce dictionnaire. En ce qui concerne leurs ressources et le financement de leurs activités comme l’ampleur de leurs prestations, l’étude : “ Le budget social de la Suisse ” donne quelques indications qui permettent de situer les enjeux et d’apprécier les services rendus.
R. P. Gilliand, S. Rossini, Le budget social de la Suisse. Conception théorique, méthode et chiffrage, Rapport final au Fonds national de la recherche scientifique, PNR 29, Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Voir : Budget social — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Financements de la sécurité sociale : aspects juridiques — Pro Infirmis (Association Suisse) — Pro Juventute (Fondation suisse) — Pro Senectute (Fondation suisse)
jpf
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Instruction publique
En Europe, l’éducation et l’instruction ont été l’apanage des familles et des Églises jusqu’au XIXe siècle. Elles sont devenues une affaire des pouvoirs civils à la faveur des idées de la Révolution française et du processus d’industrialisation et de modernisation.
À la fin de l’Ancien Régime, il existe un petit nombre d’universités (certaines remontant d’ailleurs au Haut Moyen Âge), des Collèges ou Gymnases qui y préparent (très sélectivement), ainsi qu’un ensemble assez disparate et plus ou moins dense d’écoles élémentaires — à caractère religieux pour la plupart — qui assurent la catéchèse et favorisent l’alphabétisation croissante des enfants du peuple. L’étatisation de cet héritage institutionnel est plus ou moins précoce selon les pays et elle s’accommode de formules de partage plus ou moins étroit avec les Églises. Mais partout, au cours du XIXe siècle, l’enseignement primaire devient gratuit dans les écoles publiques et tous les États imposent progressivement une obligation légale de s’instruire à tous les enfants (et à leurs familles). Destinée à soustraire les enfants (de six à douze ans environ) au marché du travail et à la rue, cette mesure visait aussi une certaine homogénéisation linguistique et idéologique des espaces nationaux, tout en assurant à chacun une maîtrise minimale des techniques culturelles de base (lire, écrire, compter) et en préparant les jeunes à leurs rôles futurs de citoyens d’un État national et démocratique et de producteurs dans une économie en voie d’industrialisation.
Une réorientation utilitariste de l’enseignement parachèvera en effet le processus de modernisation vers la fin du XIXe siècle. Elle justifiera aussi la progressive différenciation des filières selon les destinées professionnelles et sociales probables des élèves. La première moitié du xxe siècle verra se développer un triple mouvement : a) l’allongement de la durée de la scolarité obligatoire (aujourd’hui en général jusqu’à l’âge de 15-16 ans) ; b) la multiplication des écoles ou institutions de formation à vocation technique et professionnelle ; c) l’intégration de cet ensemble d’écoles en un système à la fois différencié et intégré de filières de formation. En matière de formation professionnelle, les pays germanophones ont opté durant cette période pour un système dual, où la formation est partagée entre l’entreprise et l’école, tandis que la plupart des autres pays ont opté pour une formation en école.
La bascule de l’autorité éducative du champ religieux vers le champ politique est ainsi consubstantielle de la formation de l’État moderne. Les États territoriaux de l’Ancien Régime s’étaient construits autour du monopole du pouvoir de violence physique (Max Weber, Norbert Elias), c’est-à-dire du droit de lever des troupes, de maintenir une police et d’administrer la justice pénale. L’État enseignant moderne cumule ce monopole avec celui du pouvoir de violence symbolique (Pierre Bourdieu) au sens du droit d’imposer des significations légitimes (connaissances et croyances, savoir-faire et savoir-être) par le biais d’une action pédagogique délibérée et organisée.
Ce monopole est toutefois moins entier que celui du droit de violence physique. L’autorité éducative reste partagée avec les familles et avec d’autres réseaux de communication, tels les médias. De plus, le droit constitutionnel garantit en général la liberté d’enseignement et, selon les pays, à côté de l’enseignement public soumis à la régulation politique, il existe un marché de l’enseignement privé plus ou moins étendu, dont les prestations sont parfois subventionnées par les pouvoirs publics mais de toutes façons soumises à un certain contrôle étatique.
De nos jours, les systèmes éducatifs atteignent partout des dimensions appréciables. Les collectivités publiques des pays industrialisés consacrent entre 10 et 15 % de leurs budgets à l’éducation. Le personnel du secteur éducatif forme entre 3 et 5 % de la population active, tandis que les élèves, étudiants et apprentis en formation initiale représentent entre 15 et 20 % de la population résidente. Au-delà de la formation initiale, l’éducation des adultes, la formation continue et le perfectionnement professionnel sont en très rapide expansion mais, beaucoup plus que la formation initiale, ce domaine est régi par les lois du marché.
Voir : Éducation (Politique de l’) — Formation continue — Socialisation
Walo Hutmacher
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Intégration
L'intégration est un des concepts généraux de la sociologie, difficile à définir parce qu’il s’agit d’un concept-horizon auquel il nous est indispensable de nous référer pour expliquer un certain nombre de choses, mais sans qu'il ait jamais d'existence réelle.
L’intégration d’un groupe ou d’une société est un mécanisme qui se déroule avec succès si ses membres ont acquis une relative conscience commune, en partageant des mêmes croyances et pratiques, en se mettant en interaction les uns avec les autres et en ayant des buts communs. C'est un processus complexe qui permet le développement d’une certaine cohésion sociale.
L’intégration à un groupe ou à une société décrit le processus individuel d'incorporation à un groupe social. Ce processus concerne avant tout les personnes étrangères au groupe constitué (les “ étrangers ” au sens strict), mais peut aussi, par extension, concerner des individus ou des groupes qui sont en voie d’intégration dans celui-ci (les jeunes dans la société, par exemple). Le fait d’avoir un travail, d’élever des enfants, de participer à la vie sociale et culturelle d’une région donnée ou de respecter les lois sont généralement considérés comme signes d’intégration à la société.
La notion d'intégration repose sur l’idée selon laquelle il y a une relation d'inégalité de principe entre le sujet qui est intégré et celui qui intègre : enfants et parents, éduqué et éducateur, bénéficiaire et assistant social, chômeur et conseiller en placement, individu et société, petits groupes et grands groupes, étrangers et autochtones, minorités et majorités, etc. Le social intégrateur n'a pas lui-même à s'intégrer : il est ce qu'il faut reproduire, le modèle, la limite, la normalité. Par voie de conséquence, tout ce qui dévie par rapport à ce modèle d'intégration est péjorativement connoté par les termes de marginalité, de déviance ou d’exclusion.
En ce qui concerne plus particulièrement les étrangers en Suisse, l’article sur l’intégration n’a été introduit dans la loi qu’en 1998 (art. 25 a). Des subventions sont désormais allouées pour réaliser des projets pour favoriser la compréhension réciproque entre les populations suisse et étrangère, pour faciliter leur coexistence sur la base de valeurs et de comportements communs, pour familiariser les étrangers avec l’organisation de l’État, la société et le mode de vie en Suisse et pour créer des conditions propices à l’égalité des chances et à la participation des étrangers à la société (Ordonnance sur l’intégration des étrangers du 13 septembre 2000, art. 3).
R. Y. Barel, “Le Grand Intégrateur ”, in : Connexions No 56, 1990. — E. Durkheim, De la division du travail social, Quadrige, PUF, Paris, 1991 [1er édition 1893]. — Commission fédérale des étrangers (Riedo René), Esquisse pour un concept d'intégration, CFE, Berne, 1996. — R. Lischer, Intégration : une histoire d'échecs ? Les enfants et les adolescents étrangers face au système suisse de formation, OFS, Berne, 1997. — D. Schnapper, La communauté des citoyens. Sur l'idée moderne de nation, Gallimard, Paris, 1994. — J.-P. Tabin, Les paradoxes de l’intégration. Essai sur le rôle de la non-intégration des étrangers pour l'intégration de la société nationale, Réalités sociales, Lausanne, 1999.
Voir : Cohésion sociale — Immigration — Inégalités sociales — Insertion — Intégration (Politique d'intégration à l'égard des immigrés) — Jeunes socialement vulnérabilisés — Jeunesse — Lien social
Jean-Pierre Tabin
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Intégration (Politique d'intégration à l'égard des immigrés)
Par intégration des immigrés on entend leur accès à la formation, à l'emploi et au logement, ainsi qu'à la participation à la vie sociale et politique, et ce sur un pied d'égalité avec les autochtones. Sur le plan culturel, intégration veut dire que cette participation égalitaire des immigrés à toutes les sphères de la vie sociale et politique est considérée comme compatible avec le maintien des éventuelles spécificités et de la cohésion des groupes immigrés.
L'on a observé que la variabilité de ces modes d'intégration des étrangers est imputable notamment aux caractéristiques socio-politiques de la société d'immigration. Tel est le cas pour la Suisse également : trois facteurs politiques caractérisant le contexte helvétique ont façonné les modalités de participation économique, sociale et politique des étrangers.
La politique relative à l'admission d'étrangers sur le territoire trouve sa base légale dans la loi sur les étrangers de 1931, encore en vigueur en 2001 bien qu'en révision ; parmi les objectifs poursuivis par cette loi il y a la lutte contre l'emprise étrangère (l'Ueberfremdung), les effets jugés négatifs d'une présence massive et prolongée des étrangers sur le territoire du pays. Cette politique a subordonné efficacement l'entrée des travailleurs étrangers aux besoins du marché de l'emploi depuis la fin de la guerre jusqu'au début des années 90. Ce système entre en crise au début des années 90 quand justement le statut juridique des étrangers s'améliore et le dispositif de sécurité sociale en Suisse inclut l'assurance-chômage, avec l'apparition d'un chômage massif chez les immigrés ; d'où la nécessité de la révision.
La structure politique suisse se singularise par le fédéralisme, la large autonomie communale, la démocratie directe. Or, à cause du fédéralisme, il n'y a pas eu de réponse fédérale au défi de l'intégration des populations immigrées ; celle-ci est l'œuvre des institutions telles que l'école, la vie religieuse et les droits politiques locaux, tous des domaines de compétence cantonale, de telle sorte que l'on observe des modèles assez différents à l'intérieur du pays, reflétant notamment le clivage linguistique.
La traditionnelle et forte autonomie municipale, a comme conséquence que l'intégration des immigrés passe nécessairement par leur inclusion préalable dans les communautés locales. Cela se reflète dans la conception de la citoyenneté et par suite dans les pratiques de naturalisation.
Les institutions de la démocratie directe, (référendum et initiative populaire) ont donné aux mouvements opposés à la politique officielle - notamment les milieux xénophobes - de larges opportunités de participation politique en dehors de l'arène parlementaire. On leur doit donc la forte politisation de la question de l'immigration qui a dominé l'agenda politique suisse pendant plusieurs décennies.
R. H. Mahnig, A. Wimmer, “ Integration Without Immigrant Policy : the Case of Switzerland ”, in : The Integration of Immigrants in Europe - National Policies and Experiences, edited by Friedrich Heckmann, Roger Penn, and Dominique Schnapper, 2000, pp. 1-32. — H. Mahnig, E. Piguet, La politique d'immigration suisse de 1948 à 1998 : évolution et effets, Rapport au Fonds national de la recherche scientifique, PNR 39, Berne, 2001.
Site Internet : www.unine.ch/fsm
Voir : Immigration — Intégration — Étrangers (Politique à l'égard des)
Hans Mahnig
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Interculturalité
Le concept d'interculturalité est né dans les années septante, à propos d'abord de l'intégration scolaire des élèves migrants. En mettant l'accent sur les échanges entre les diverses cultures habitant nos sociétés, l'interculturalité s'oppose à la multiculturalité, simple juxtaposition de cultures différentes.
L'approche interculturelle de l'éducation a été prônée par le Conseil de la coopération culturelle du Conseil de l'Europe à Strasbourg (1977, 1982, 1985, 1988) et, en Suisse, par la Conférence suisse des Directeurs de l'Instruction Publique (1985). En 1977 déjà, Bruxelles édicte une directive (donc exécutoire par les pays membres) établissant le droit des élèves migrants à bénéficier, durant trois heures par semaines, d'un enseignement officiel sur leur langue et culture d'origine.
Force est cependant aujourd'hui de constater que l'interculturalité n'a le plus souvent guère été plus loin que les déclarations de bonnes intentions ; du moins en Suisse. Dans la plupart des cantons, la langue maternelle est bannie des écoles, les enseignants de langue et de culture d'origine n'ont pratiquement aucun contact avec leurs homologues de la société d'accueil, et l'échange présupposé par le terme interculturalité - en dehors du folklore musical ou gastronomique - reste généralement pensé à sens unique. L'interculturel serait-il alors, comme le Conseil de l'Europe s'interrogeait en 1985 déjà, un “fourre-tout” vide de sens? La question est aujourd'hui d'autant plus pertinente que le concept d'interculturalité est désormais nomade : s'y réfèrent aussi les professionnels de la santé et du social, les œuvres d'entraide et les multinationales.
De fait, une véritable interculturalité implique une redéfinition de notre rapport à soi et à l'autre. Rapport à soi : prendre conscience du métissage historique de notre propre culture, de son caractère par essence dynamique ; chercher à connaître et reconnaître nos propres repères culturels, tâche assez ardue en cette époque de globalisation et d'évanescence du sens. Rapport à l'autre : chercher à le (re)connaître et à nous faire (re)connaître par lui, prendre conscience de nos inévitables jugements de valeur, (re)trouver les similitudes fondamentales - ou les “universels-singuliers” - que lui et moi, de même que tout être humain, partageons. Inévitablement, les professionnels du social, de la santé et de l'éducation doivent alors redéfinir leur rôle, prêter une attention soutenue au lien social qui dédouble la relation professionnelle entretenue avec les usagers, les patients, les élèves et leurs parents.
R. M. Abdallah-Pretceille, L. Porcher, Diagonales de la communication interculturelle, Anthropos, Paris, 1999. — J.-C. Métraux, “ Le don au secours des appartenances plurielles ”, in : Les défis migratoires, Ed. Centlivres P. & I. Girod, Seismo, Zurich, 2000, pp. 457-464.
Voir : Conférence des directeurs cantonaux de l'instruction publique — Conseil de l'Europe — Immigration — Instruction publique  Interculturel  Intégration  Médiation culturelle
Jean-Claude Métraux
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Interruption de grossesse àð Avortement
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Intervention psychosociale
Le terme d intervention psychosociale désigne, en France et en Suisse, certaines méthodes d action pratiquées par des travailleurs sociaux (Menthonnex, 1995). Au Canada ces mêmes méthodes sont nommées service social individualisé (casework) ou plan de service individualisé que l’on abrège en PSI (Turcotte, 1992, p. 27).
Dans tout social l’intervention est comprise dans le sens d’une relation d’aide qui crée un rapport entre deux systèmes : le système-client et sa situation-problème et le système-intervenant qui fait partie d’un service aux mandats spécifiques et aux moyens d’action délimités.
Le but de l’intervention psychosociale est la résolution des problèmes liés au bien-être personnel et au fonctionnement social des clients. Le problème du client doit être envisagé “ … tel qu’il est vécu par lui, tel qu’il se présente pour le client, tel qu’il pourra être résolu par lui avec notre aide ” (Menthonnex, 1995, p. 85). L’intervention psychosociale ne prétend pas résoudre des problèmes sociaux.
Les cadres conceptuels qui sous-tendent l’étude des problèmes personnels sont empruntés à diverses théories : théories psychanalytiques sous la forme de stades du développement de la personnalité et les fonctions du MOI (Freud, Abraham, Hartmann) ; développement de la personnalité en fonction de la société (Erikson) ; les théories sociologiques avec les notions de cultures, d’institutions ; les théories de l’anthropologie culturelle avec les notions de valeurs et de culture ; les théories de psychologie sociale (Lewin, Moreno) avec les notions d’interactions, de groupes dominants ou dominés, de marginalité, de rôle, de statut, de préjugés ; des théories de la communication ; des connaissances des dynamiques des groupes, de psychodrames, de changement social ; des connaissances sur les mouvements thérapeutiques et humanistes (Rogers, Reich). Toutes ces connaissances doivent être imprégnées d’une éthique démocratique au sens lewinien du terme. Cette méthode serait plus qu’une science sociale appliquée puisqu’elle produit des connaissances (Zùniga, 1994).
Ces divers ordres de connaissances servent à la fois de cadre d’interprétation pour évaluer la situation du client et de cadre-guide pour aller rechercher les informations pertinentes. L’analyse de la situation-problème et du client se fait par la combinaison de ces multiples éléments conceptuels, considérés comme facteurs explicatifs et agissants. Par ce fait, ils deviennent des données sur lesquelles l’assistant social peut agir et qui lui permettent d’établir un plan d’action. La réalisation de ce plan constitue la résolution du problème.
Menthonnex, principale théoricienne en Suisse de l’intervention psychosociale, estime qu’elle ne convient qu’à certains clients. Des contextes dits d’autorité sont propices à ces méthodes (Trottier, Racine, 1992) tandis que d’autres, comme la maltraitance envers enfants lui sont réfractaires (Turcotte, 1992).
En conclusion, l’intervention psychosociale est une méthode qui tire sa légitimité, non pas des résultats dont elle pourrait se prévaloir, mais des théories, des modes explicatifs, des concepts qu’elle emprunte à d’autres champs de connaissance et dont elle a accepté comme étant admise la validité des présupposés.
R. A. Menthonnex, Le service social et l’intervention sociale, Éditions I.E.S., Genève, 1995. — G. Trottier, S. Racine, “ L’intervention en contexte d’autorit頔, in : Service Social, Vol. 41, No 3, 1992. — D. Turcotte, “ L’utilisation du plan de services individualisé en protection de la jeunesse ”, in : Service Social, Vol. 41, No 3, 1992. — R. Zùniga, L’évaluation dans l’action, Presses de l’Université de Montréal, Montréal, 1994.
Voir : Assistant social — Problèmes sociaux — Travail social
Isabelle Flückiger
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Invalidité
L’invalidité, au sens de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité est une diminution de la capacité de gain, présumée permanente ou de longue durée, qui résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale provenant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident. L’atteinte à la santé du point de vue médical ne suffit pas en soi pour créer un droit aux prestations de l’assurance. Il faut plutôt considérer cette atteinte à la santé sous l’angle de ses répercussions consistant soit en une atteinte durable à la capacité de gain, soit en une entrave à la faculté d’accomplir les travaux habituels chez les personnes qui n’exercent pas d’activité lucrative.
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Handicap — Impotent (Allocation pour) — Incapacité de travail — Indemnités journalières (AI)
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Isolement
Les termes isolement et solitude ont souvent été utilisés comme synonymes. Par ailleurs, chacun de ces termes est utilisé différemment selon les auteurs et les contextes de référence, ce qui amène à une confusion terminologique certaine.
Selon la terminologie sociologique, l’isolement est un isolement social, qui peut être défini comme un manque de réseau, une absence ou une pauvreté de contacts sociaux. Cette carence de liens est un état de fait objectif et mesurable.
L’isolement peut comprendre plusieurs dimensions :
— isolement résidentiel (ménages d’une personne),
— rareté ou absence de relations de voisinage, d’interactions familiales ou amicales,
— pauvreté des activités qui permettent des contacts et des échanges,
— absence de lien de couple.
Face à l’augmentation marquée du nombre de ménages d’une personne, l’isolement a souvent été associé à cette donnée, mais elle ne suffit pas à illustrer le phénomène. En effet, selon plusieurs recherches, les ménages d’une personne ont un réseau de relations beaucoup plus dense que les ménages à deux personnes ou plus.
De multiples transformations sociétales ont amené à l’apparition du phénomène d’isolement. En effet, chaque société et chaque époque produisent un type de lien social particulier. Tönnies soulignait, il y a déjà un siècle, le passage de la Gemeinschaft, société de statut, où chacun avait sa place définie et où la solidarité était de type familiale, à la Gesellschaft, société de contrat, axée sur les échanges, les réseaux, les liens que chacun doit construire et qui, de ce fait, requièrent une capacité à les créer et les maintenir. Ainsi, pour Kaufmann, “ l’isolement contemporain est en rapport étroit avec le mouvement historique d’individualisation de la société, qui repose sur l’autonomie croissante des personnes ”.
Les mutations démographiques et la mobilité géographique influencent également le réseau relationnel de chaque personne, mais il importe d’éviter les simplifications réductrices.
Certaines populations sont plus exposées que d’autres au risque d’isolement, à cause des ruptures de liens ou des difficultés à en créer que leur situation provoque : les personnes âgées, (cessation d’une activité professionnelle, décès des proches, départ des enfants) ; les femmes (difficile conciliation de la double insertion professionnelle et familiale, conséquences d’un divorce sur leur réseau social, plus grande longévité) ; les malades et handicapés (difficultés d’insertion sociale et professionnelle, mobilité difficile) ; les immigrés (rupture avec les réseaux d’origine), les chômeurs (perte du réseau de sociabilité lié à l’emploi).
L’isolement est un facteur de précarisation : il entraîne une fragilisation des actes de la vie quotidienne en cas d’atteinte à la santé et de perte d’autonomie, un risque de précarisation financière en l’absence de solidarités familiales. Pour plusieurs auteurs, une carence de réseau social est également un facteur de risque pour la santé (illustré notamment par la problématique de la sous-alimentation des personnes âgées).
L’isolement social est un des facteurs qui peuvent susciter un sentiment de solitude, sous l’influence également de la représentation sociale négative de l’isolement qui prévaut dans notre société. Phénomène aussi complexe que celui de la solitude, toute approche de l’isolement devra tenir compte des interrelations avec celle-ci.
R. C. Fry, Solitude et isolement : Approches pluridisciplinaires, Département de sociologie, Université de Genève, 2000. — J.-C. Kaufmann, Célibat, ménages d’une personne, isolement, solitude. Un état des savoirs, Commission des communautés européennes, Bruxelles, 1993.
Voir : Exclusion — Lien social — Pauvreté — Solitude
Colette Fry
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Jeunes socialement vulnérabilisés
Les jeunes des générations de la crise vivent une expérience commune très particulière, celle de constituer la première jeune génération socialement vulnérabilisée depuis la deuxième guerre mondiale.
En effet pour la première fois depuis plusieurs décennies, divers signes attestent que les jeunes en tant que catégorie sociale sont globalement exposés à vivre dans un contexte et des conditions de vie objectivement moins favorables que ceux qu’ont connus leurs parents : difficultés à faire reconnaître et valoriser les connaissances et compétences acquises, insertion professionnelle problématique, indépendance financière tardive, image sociale négative associée à la violence et aux incivilités, etc.
Les liens sociaux entre la population jeune et les autres composantes de la société sont distendus. Ce constat d’ensemble doit être nuancé selon les situations sociales, scolaires, familiales, ainsi qu'en fonction des ressources institutionnelles, économiques, culturelles ou interpersonnelles que les jeunes peuvent mobiliser, facteurs qui vont limiter ou au contraire aggraver les risques encourus de désafiliation, voire d’exclusion sociale.
R. C. Baudelot, R. Establet, Avoir 30 ans en 1968 et en 1998, Seuil, Paris, 2000. — François Dubet, La galère : jeunes en survie, Fayard, Paris, 1987. — P. Röthlisberger, Les jeunes donnent-ils le ton ou sont-ils des exclus? Un portrait statistique des jeunes, Office fédéral de la statistique, Berne, 1997. — J.-P. Terrail, La dynamique des générations. Activité individuelle et changement social (1968/1993), L'Harmattan, Paris, 1995.
Voir : Délinquance juvénile — Jeunesse — Lien social — Modes de vie (changements des) — Jeunesse (Subculture de la) — Précarisation (Mécanismes de la)
Dominique Gros
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Jeunes vieux
Expression désignant les rentiers/rentières AVS actifs, ayant un comportement novateur, dynamique et actif (et contredisant de ce fait les représentations traditionnelles de la vieillesse). La distinction entre “ jeunes vieux ” et “ vieux vieux ”, souvent délimitée par le “ troisième ” et “ quatrième âge ”, est toutefois contestée.
François Höpflinger
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Jeunesse
La jeunesse correspond à la phase de vie située entre la dépendance infantile et l'indépendance de l'âge adulte, qui est caractérisée principalement par certaines transitions :
— passage de la famille d'origine à la constitution d'une nouvelle cellule familiale ;
— passage de la formation initiale à l'insertion professionnelle ;
— accession légale graduelle à diverses majorités (religieuse, sexuelle, civique, matrimoniale, civile, pénale) assorties de droits et obligations (cotisation AVS, déclaration de revenus, service militaire pour les hommes…) ;
— passage de la dépendance à l'indépendance financière, autonomisation du pouvoir d'achat, concentration des dépenses sur des produits et services liés à un style de vie jeune (habillement, produits de beauté, livres, revues, disques, cigarettes, sorties).
Jusqu'à récemment, ces diverses transitions étaient synchrones et permettaient de délimiter la jeunesse à la période 15-25 ans. La jeunesse avait donc un début (on y entrait à la puberté et en terminant la scolarité obligatoire) et une fin (le premier emploi, l'autonomie financière, le mariage et la décohabitation coïncidaient). Ces signes étaient communs à la majeure partie de chaque génération.
Les sciences sociales ont commencé à s'intéresser à la jeunesse au début des années soixante, c'est-à-dire lorsque les enfants de la forte croissance démographique de l'après-guerre ont atteint l'adolescence. Les jeunes ont alors été perçus comme une force sociale s'affirmant dans le conflit et la contestation. Les analyses parlaient alors de “ soulèvement de la jeunesse ”, de “ crise de la jeunesse ”, de “ problème de la jeunesse ” ou encore de “ fossé des générations ”.
Cependant, les retombées de la contestation juvénile, au début des années septante, amènent les observateurs à réviser leur diagnostic. C'est tout d'abord par ses goûts musicaux ou vestimentaires, par sa quête d'expériences individuelles et collectives nouvelles, par l'adoption de valeurs qui la différencie des autres générations, bref par ses comportements culturels que la jeunesse leur semble se distinguer ; elle constitue une “ sous-culture ”, voire une “ contre-culture ”.
Avec les années quatre-vingts et la dissociation entre les formes populaires et élitaires de marginalité juvénile, c'est un nouveau regard qui s'impose. Il fait éclater les modèles sociaux qui s'efforcent d'uniformiser les jeunes en mettant l'accent sur leurs différences, leurs divisions, les inégalités et les clivages qui existent entre eux. Des sociologues affirment que “ la jeunesse n'est qu'un mot ” (P. Bourdieu), d'autres préfèrent désormais employer le pluriel pour en parler.
En fait, les sociétés ont tellement changé en trois décennies que même les repères usuels d'entrée dans la phase adulte du cycle de vie sont maintenant brouillés. De multiples facteurs ont entraîné la désynchronisation des transitions : l'âge moyen de la puberté s'est abaissé, la durée des études initiales s'est allongée, l'insertion professionnelle et l'indépendance financière sont devenues plus difficiles et plus tardives, la cohabitation avec les parents dure plus longtemps, les relations sexuelles sont plus précoces, la “ jeunesse éternelle ” et ses valeurs hédonistes guident les aspirations d'une bonne part des adultes. De ce fait, la phase de vie “ jeune ” devient floue et très hétérogène, elle ne constitue plus un vécu commun, une expérience partagée dans des conditions similaires par la majorité d'une cohorte. En conséquence, la notion singulière de jeunesse tend à éclater au profit de visions plurielles et nuancées des populations jeunes.
R. O. Galland, Sociologie de la jeunesse, A. Colin, Paris, 1997. — D. Gros, P. Zeugin, F. Radeff, Les jeunes en Suisse. Acteurs, valeurs et comportements, Pro Helvetia, Zurich, 1991. — V. Marange, Les jeunes, Le Monde-Editions, Paris, 1995.
Site Internet : obs-jeunes. inrs-culture. uquebec. ca/
Voir : Cycle de vie — Enfance (Politique de l') — Mouvement social — Jeunesse (Subculture de la) — Réseau de sociabilité
Dominique Gros
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Jeunesse (Culte de la)
Représentation selon laquelle la jeunesse (et la beauté de la jeunesse) est survalorisée, ce qui contribuerait à une discrimination des personnes âgées. Le “ culte de la jeunesse ” est très présent dans les médias et le marketing. On en veut pour preuve les incitations à responsabiliser les individus de manière générale et les personnes vieillissantes en particulier quant à leur hygiène de vie, ceci afin de “ rester jeune ”, en bonne santé, se “ maintenir en forme ”, ainsi que tous les efforts de prévention développés tant par les différentes branches des politiques sociales et de la santé, que par les entreprises directement intéressées par l’état de santé de leurs clients (caisses d’assurance-maladie, mais aussi les entreprises de loisirs notamment, qui ont découvert un nouveau marché avec les “ nouveaux ” retraités, financièrement bien lotis et en bonne santé). Ces efforts, qui peuvent se traduire de manière positive en terme de gain d’années de vie en bonne santé, peuvent aussi avoir un effet pervers dans le sens ou une responsabilisation de l’individu quant à sa capacité à se “ maintenir ” en bonne santé grâce à des habitudes de vie jugées plus ou moins adéquates, pénalise, voire discrimine ceux qui malgré tout sont confronté à la maladie ou à une santé défaillante et ne “ réussissent pas ” à “ rester jeune ”.
Voir : Jeunesse — Représentation sociale — Retraite (Âge de la) — Vieillesse
Valérie Hugentobler
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Jeunesse (Politique de la)
La politique de la jeunesse est récente, elle ne date que de l’après-deuxième guerre mondiale, lorsque les milieux politiques ont reconnu la jeunesse comme un “ groupement socialement important ”. Le débat autour de cette nouvelle entité prend forme en 1972 avec le rapport Gut (Conseil national) intitulé “ Réflexions et propositions pour une politique de la jeunesse en Suisse ”. Trois perceptions fondamentales de la politique de la jeunesse sont présentées : politique pour la jeunesse, avec la jeunesse, de la jeunesse. Et le rapport de constater que c’est généralement la première acception qui prévaut, la deuxième est proposée ici ou là, la troisième est restée une utopie.
L’année 2000 constitue peut-être un tournant. La nouvelle Constitution fédérale est entrée en vigueur : elle comprend pour la première fois des articles explicites permettant la mise en place d’une véritable politique de la jeunesse. Par ailleurs, la Suisse a élaboré à l’intention de l’ONU son premier rapport relatif à la Convention sur les droits de l’enfant, qu’elle a ratifiée en 1997, avec des réserves. Sur ces bases, le débat autour des jeunes en tant qu’actrices et acteurs de leur propre émancipation et de leur insertion dans la société est relancé. Sur ces bases, la CFJ a remis au Conseil fédéral, en avril 2000, un rapport intitulé “ Fondements d’une politique de l’enfance et de la jeunesse ”.
Les contacts sont fréquents entre la CFJ et le Conseil suisse des activités de jeunesse (CSAJ), organisation faîtière des associations de jeunesse. Aux yeux de ces deux institutions, il apparaît urgent de traduire dans la pratique la volonté politique de construire une politique de la jeunesse dans laquelle cette dernière sera l’actrice principale. Toutes les expériences de participation, soutenues par les diverses organisations de jeunesse, doivent entraîner un transfert de compétences décisionnelle et de gestion aux enfants et aux jeunes.
Un nouveau programme national de recherche (PNR 52) sur “ l’enfance, la jeunesse et les rapports entre les générations dans une société en mutation ” vient d’être lancé. La limite d’âge prévue, 18 ans, n’a pas paru pertinente aux yeux de nombreuses organisations de jeunesse. Il a par ailleurs été demandé que des recherches soient menées à bien sur les possibilités de participation offertes aux enfants et aux jeunes, de même que sur les spécificités liées au sexe. Malheureusement, aucune étude n’est prévue, pour l’instant, sur l’école et la formation professionnelle comme instances de socialisation des enfants et des jeunes.
R. Commission fédérale pour la jeunesse, La politique de la jeunesse à un carrefour : perspectives pour la Suisse, Office fédéral de la culture, Berne, 1996.
Voir : Commission fédérale pour la jeunesse — Jeunes socialement vulnérables — Jeunesse
Jean-Pierre Boillat
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Jeunesse (Subculture de la)
Une subculture est un ensemble de croyances, d'attitudes, de comportements et de styles de vie qui, d'une part, se différencient de ceux qui sont adoptés par la majorité de la population d'une société et, d'autre part, permettent à ceux qui y adhèrent de développer leur propre identité, de se forger un statut. C'est une manière, pour des groupes socialement dominés, de faire face aux problèmes collectifs découlant de leur position sociale. La notion de subculture a été associée à des facteurs très différents (ethniques, résidentiels, religieux, générationnels, professionnels, sexuels, etc.). Cependant, beaucoup de subcultures étudiées par les sciences sociales concernent les jeunes (beatniks, hippies, skinheads, punks, rastas, zulus, gothiques… ), car l'analyse de la posture entretenue par la subculture avec la culture dominante a servi à identifier des formes de rapports sociaux existant entre les jeunes et la société : respect, délinquance, rébellion, militantisme. De par sa connotation péjorative, la notion de subculture tend à être remplacée par celle de culture.
R. S. Bévillard, Comprendre les jeunes. Ruptures et émergence d'une nouvelle culture, Chronique Sociale, Lyon, 1998. — M. Brake, The sociology of youth culture and youth subcultures, Routledge & Kegan Paul, London, 1980. — V. Fournier, Les nouvelles tribus urbaines. Voyage au cœur de quelques formes contemporaines de marginalité culturelle, Georg, Genève, 1999.
Voir : Jeunesse — Jeunesse (Subculture de la) — Lien social — Modes de vie
Dominique Gros
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Journées de politique sociale
Dans le cadre des activités du Certificat de perfectionnement en politique sociale, sous l'égide du Centre d'étude de la politique sociale (CEPS) et dans une perspective de collaboration romande, des “ Journées de politique sociale ” sont organisées régulièrement en Suisse latine. Elles réunissent des praticiens et des experts. Parmi les nombreux thèmes traités, plusieurs inspirent directement ce dictionnaire. Notons, en particulier les domaines suivants : Politique sociale et éducation - Politique sociale et travail - Politique sociale, droit et idéologie - Politique sociale et santé - Politique sociale et emploi - Vieillir aujourd'hui et demain - Les droits sociaux - Formation professionnelle en Suisse. Les actes de ces rencontres sont publiés régulièrement.
Site Internet : www.socialinfo.ch
Voir : Centre d’étude de la politique sociale (CEPS) — Certificat de perfectionnement en politique sociale
Sophie Barras Duc
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Juridiction sociale
La garantie des droits sociaux implique un contrôle juridictionnel des décisions rendues par les assureurs. Chaque loi d’assurance sociale contient des dispositions qui permettent aux assurés de recourir auprès d’une instance cantonale, puis auprès du Tribunal fédéral des assurances. Les procédures ne sont pas uniformes. Dans l’assurance-chômage et dans l’assurance-vieillesse et survivants, l’assuré peut recourir directement contre la décision de la caisse. Dans l’assurance-invalidité, l’assuré peut se prononcer sur un projet de décision rendu par la caisse, avant d’introduire son recours. Dans l’assurance-maladie et dans l’assurance-accidents, l’assuré doit d’abord faire opposition à la décision rendue, puis formuler un recours contre la décision sur opposition émanant de la caisse ou de l’assureur. Dans tous les cas, l’accès à la justice est facilité. Les lois prévoient que la procédure doit être simple, rapide et gratuite.
Adoptée le 6 octobre 2000 par le Parlement, la Loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales harmonise la procédure en généralisant la procédure d’opposition.
Voir : Décision administrative — Droits sociaux — Recours (en assurances sociales) — Tribunal fédéral des assurances
Béatrice Despland
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Justice distributive (Sentiment de)
La notion de justice distributive fait référence aux normes définissant la part de ressources rares ou de gratifications que doivent recevoir les membres d’un groupe ou d’une entreprise en quittance de leur participation à l’action commune. Il s’agit donc de savoir “ qui a droit à quoi ” pour sa peine. Le sentiment de justice évoque alors les représentations ou croyances des individus à cet égard.
Les premières études empiriques sur ce thème (Homans, 1964) ont tenté de vérifier l’hypothèse selon laquelle il n’y a pas de critère absolu de juste distribution, mais que c’est toujours par comparaison que l’on éprouve un sentiment de justice ou d’injustice. Dans cette perspective, elles ont élaboré la “ théorie de l’équit頔, selon laquelle une seule norme de justice distributive, universelle, marquerait les mentalités, à savoir la norme du mérite, selon laquelle on doit être rétribué proportionnellement à la valeur de ses contributions (cf. déjà Aristote). L’écart à cet équilibre entraînerait chez les lésés des frustrations qui les conduisent à réduire la quantité ou la qualité de leurs prestations, et chez les bénéficiaires des réactions de culpabilité se traduisant par l’envie de dénigrer les mérites ou la personnalité des moins bien lotis.
Les recherches ultérieures, sans nier toute validité à cette thèse, en ont beaucoup limité la portée. La règle du Mérite n’est qu’une règle parmi d’autres (par ex. l’Égalité, qui attribue à chacun le même montant, indépendamment des contributions, ou le Besoin, qui donne à chacun selon son nécessaire, sans tenir compte de l’égalité ni des contributions). On a pu montrer que la légitimation donnée à l’une ou l’autre norme dépend notamment de la relation entre les partenaires (Lerner) — le critère du Besoin paraissant légitime lorsque les acteurs sont proches, alors que le Mérite semble plus juste lorsqu’ils sont plus étrangers l’un à l’autre —, des objectifs principaux du groupe (Deutsch) — l’Égalité apparaissant légitime lorsque l’on vise d’abord la cohésion du groupe, le Mérite l’emportant lorsque l’on attache plus d’importance à la productivité — et du type de bien en jeu (le Mérite pour l’argent, le Besoin pour l’affection ou le soutien, l’Égalité pour les droits civiques, etc.).
De surcroît, dans les groupes complexes (un pays par ex.), le choix d’une norme dépend non seulement des mérites reconnus à chacun, mais aussi de l’équilibre que l’on veut ou non promouvoir entre les différents sous-groupes. C’est ainsi que dans une conception “ proactive ” de la justice, on peut promouvoir des entorses momentanées à l’égalité pour rééquilibrer d’anciennes injustices ou discriminations (procédure des quotas en matière de race, de sexe, etc.).
Les études récentes tendent donc souvent à montrer que le problème des normes de justice distributive n’est pas vécu comme celui de “ choses ” qui s’équivalent, mais plutôt comme celui de “ personnes ” qui se reconnaissent ou se nient. En ce sens, il défie les définitions toutes faites et a fatalement une composante politique.
R. J. Kellerhals (Éd.), “ Les images du juste ”, in : Année Sociologique, PUF, Paris, 1995. — L. Boltanski, L’Amour et la Justice comme compétences, Métailié, Paris, 1990. — R. Boudon, Le juste et le vrai, Fayard, Paris, 1995. — J. Kellerhals, M. Modak, D. Perrenoud, Le sentiment de justice dans les relations sociales, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1997. — P. Ricoeur, Le Juste, Esprit, Paris, 1995. — P. Van Parijs, Qu’est-ce qu’une société juste ? Introduction à la pratique de la philosophie politique, Le Seuil, Paris, 1991.
Voir : Inégalités sociales — Justice sociale
Jean Kellerhals
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Justice sociale
À première vue, les notions de justice et de justice sociale paraissent synonymes. Mais c’est oublier que la justice peut n’exprimer que des droits abstraits selon un principe arithmétique : à travail égal, salaire égal (on parlera alors de “ justice commutative ”). Par ailleurs, elle peut se limiter aux relations courtes, entre individus ou groupes particuliers.
L’idée de “ justice distributive ” (selon la distinction établie par Aristote) oblige par contre à considérer la progression géométrique (celui qui produit davantage doit recevoir un salaire supérieur), en fonction des inégalités existantes et reconnues comme telles.
Un des problèmes centraux liés à la notion de justice sociale est donc son rapport à l’idéal d’égalité.
Le but de la justice sociale n’est pas d’éliminer les inégalités dites naturelles, découlant de la différence normale entre les humains, mais de corriger les injustices produites et augmentées par les mécanismes sociaux, culturels et politiques, ce qui implique notamment de remédier aux inégalités sociales.
La justice sociale, si elle postule la propension à l’égalité, ne revient aucunement à l’égalitarisme. On doit même considérer ce dernier comme une forme sournoise d’injustice sociale, ne rendant pas justice à l’apport spécifique et aux besoins particuliers des individus.
Le principe de différence implique que soient mis en place des mécanismes de compensation et de correction en faveur des plus défavorisés.
L’idée de justice sociale est une concrétisation et un élargissement de l’idée de justice. Elle découle en fait des exigences normatives de la justice, telles qu’elles sont définies par les deux principes de justice du philosophe John Rawls.
Le premier principe de justice stipule que “ chaque personne doit avoir un droit égal au système total le plus étendu de libertés de base égales pour tous ”. La justice consiste donc d’abord à protéger les libertés individuelles ; l’idée de justice sociale trouve ici sa limite : elle ne saurait être utilisée (comme c’est le cas dans certaines formes d’utilitarisme social) pour réduire à néant les libertés.
Le deuxième principe de justice, dit principe de différence, impose de son côté que les inégalités sociales et économiques soient tenues dans le cadre étroit d’une priorité pour les plus désavantagés susceptible de garantir une réelle égalité des chances pour tous.
Trop souvent, la justice sociale reste comprise comme une simple aspiration émotionnelle ou comme un droit vague et indéfini. Sans rien nier de l’ancrage affectif du sentiment de justice et d’injustice qui se tient à la racine de l’exigence normative de justice, il importe de souligner que la justice sociale, à l’instar des règles de droit, est indissociable de l’État de droit compris comme un État social et solidaire, mû par l’idéal d’égalité, et qu’elle implique une attention permanente au principe de réalité et de responsabilité.
Il existe un lien étroit entre la justice sociale et la solidarité. Mais alors que cette dernière garde toujours aussi les caractères d’une vertu “ facultative ” et d’un engagement personnel, la justice sociale comporte un élément d’obligation politique et juridique inséparable d’authentiques “ politiques sociales ”.
R. N. Bobbio, Droite et gauche, trad. fr., Seuil, Paris, 1996. — R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Fayard, Paris, 1995. — R. Mehl, D. Müller, “ Art Politique ”, in : Encyclopédie du protestantisme, Labor et Fides-Le Cerf, Genève-Paris, 1995, pp. 1160-1181. — P. van Parijs, Refonder la solidarité, Le Cerf, Paris, 1996. — J. Rawls, Théorie de la justice, trad. fr., Seuil, Paris, 1987. — A. Rich, Éthique économique, trad. fr., Labor et Fides, Genève, 1994 (avec une introduction de R.-J. Campiche et D. Müller). — C. Arnsperger, P. van Parijs, Ethique économique et sociale, La Découverte, Paris, 2000. — A. Sen, Un nouveau modèle économique. Développement, justice, liberté, trad. fr., Odile Jacob, Paris, 2000. — P. van Parijs, Qu’est-ce qu’une société juste ? Introduction à la pratique de la philosophie politique, Seuil, Paris, 1991.
Voir : Éthique sociale — Inégalités sociales
Denis Müller
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LAVI àð Victimes d'infractions (Loi fédérale sur l'aide aux)
Libéralisme àð Société postindustrielle
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Libre passage dans la prévoyance professionnelle
Le libre passage permet la mobilité professionnelle des salariés sans entraîner des pertes dans le niveau de prévoyance acquis antérieurement, en vertu de la loi fédérale sur le libre passage (LFLP) entrée en vigueur le 1er janvier 1995.
Lors du départ de l’institution de prévoyance une prestation de sortie est versée. Celle-ci équivaut dans les systèmes à primauté des contributions au montant de l’épargne-vieillesse ou à la réserve mathématique d’assurance. Dans les systèmes en primauté des prestations, elle est égale à la valeur actuelle des prestations acquises. De plus, une prestation de sortie minimale est garantie par la loi.
La prestation de sortie est transférée, en principe, à l’institution de prévoyance liée au nouvel emploi. Dès qu’il entre dans cette dernière, le salarié est couvert pour les prestations qui lui reviennent, d’après le règlement, sur la base de la prestation d’entrée à payer. Des versements complémentaires peuvent être effectués si la prestation de sortie apportée est insuffisante pour s’acquitter intégralement de la prestation d’entrée nécessaire. Les réserves médicales empêchant l’affiliation ou la couverture sont fortement limitées.
Voir : Prévoyance professionnelle — Primauté des cotisations — Primauté des prestations — Retraite (Âge de la)
Jacques-André Schneider
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Licenciement
Le licenciement correspond à la résiliation d’un contrat de travail, à l’initiative de l’employeur. À moins que le contrat individuel de travail ou une convention collective stipule la forme écrite, un licenciement communiqué oralement est valable. Il doit s’agir d’une manifestation de volonté claire, sans ambiguïté sur l’intention de son auteur de mettre fin définitivement au contrat. Le licenciement déploie ses effets dès sa réception par l’employé concerné. D’une manière générale, l’employeur est tenu de respecter un certain délai entre la communication du licenciement et la fin effective des rapports de travail, à moins que l’employé ait commis une faute si grave qu’elle justifie un licenciement avec effet immédiat.
La personne dont le contrat de travail est résilié peut demander à l’autre partie que les motifs lui soient communiqués par écrit. Il sied toutefois de préciser que le non respect de cette exigence est sans incidence sur la validité de la résiliation.
Voir : Contrat de travail — Licenciement (Protection contre le) — Précarisation (Mécanismes de la)
Jean-Bernard Waeber
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Licenciement (Protection contre le)
En droit suisse existent deux types de protection contre les licenciements. On distingue la protection s'appliquant pendant certaines périodes de la vie d'un travailleur : les périodes de protection (a) et celles découlant de motifs de licenciement inacceptables : licenciement abusif (b) et licenciement immédiat injustifié (c). Les effets de ces deux types de protection sont très différents (d).
a) Il y a période de protection, après le temps d'essai, et pour les contrats de durée indéterminée seulement :
— pendant toute la durée de la grossesse d'une travailleuse et durant les 16 semaines qui suivent son accouchement,
— pendant qu'un travailleur est incapable de travailler, totalement ou partiellement, en raison d'une maladie ou d'un accident. Cette période de protection augmente avec la durée des années de service. Elle est de 30 jours pendant la première année de service, de 90 jours de la deuxième à la cinquième année de service et de 180 jours dès la sixième année de service,
— pendant qu'un travailleur accomplit une période de service obligatoire, militaire ou dans la protection civile, ou un service civil, et pendant encore les 4 semaines qui précèdent et qui suivent ce service pour autant que ce dernier ait duré plus de 11 jours.
b) Est abusif le licenciement donné par un employeur en respectant le délai de congé mais pour des motifs étrangers à la gestion de l'entreprise et en vue d'objectifs que la loi considère contraires à la bonne foi. Sont par exemple abusifs le licenciement pour appartenance ou activité syndicale, celui notifié pendant l'exercice d'un mandat de représentation des travailleurs ou le congé de représailles donné parce que le travailleur a fait valoir des prétentions découlant du contrat. Est également abusive la résiliation fondée sur une raison inhérente à la personnalité du travailleur telle que le sexe, la nationalité, la race (à moins que cette raison ne constitue une condition d'engagement) ou celle résultant de l'exercice par le travailleur d'un droit constitutionnel.
c) Constitue un licenciement avec effet immédiat, celui prononcé par un employeur en raison d'une faute si grave du travailleur qu'elle détruit les rapports de confiance et ne permet pas la poursuite des rapports de travail pendant le délai de congé. Le licenciement immédiat est injustifié si la faute commise ne revêt pas un caractère de gravité suffisant, pour justifier la mesure très sévère que constitue le licenciement avec effet immédiat.
d) Un licenciement prononcé pendant une période de protection est nul et ne déploie aucun effet. En revanche un licenciement abusif et un licenciement immédiat injustifié ne sont pas nuls ; ils déploient pleinement leurs effets et mettent effectivement fin à la relation de travail, à l'échéance légale ou contractuelle pour le licenciement abusif, et sur le champ pour le licenciement immédiat. Ces deux types de licenciement ne permettent au travailleur concerné que de tenter de faire constater par un tribunal le caractère abusif ou injustifié du licenciement immédiat et d'obtenir, cas échéant, le versement d’indemnités.
e) Enfin il faut signaler que lorsqu'un employeur procède à un licenciement collectif pour raisons économiques, la loi l'oblige à respecter un certain nombre de modalités dès lors que le nombre de personnes licenciées est égal ou supérieur à 10 et dépasse une certaine proportion de ses employés. Il doit notamment annoncer préalablement son projet à la commission du personnel (ou à défaut à l'ensemble du personnel) et à l'office cantonal du travail.
R. C. Brunner, J.-M. Bühler, J.-B. Waeber, Commentaire du contrat de travail, Réalités sociales, Lausanne, 1996.
Voir : Contrat de travail — Convention collective de travail (CCT) — Licenciement — Maternité (Protection de la)
Jean-Bernard Waeber
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Lien social
La théorie du lien social est avant tout une théorie sociologique. Elle pose une question essentielle : comment faire pour que des individus dotés de talents différents, de chances sociales différentes, des individus mus par des passions et des intérêts contradictoires puissent arriver néanmoins à construire un vivre ensemble collectif.
Selon les analyses sociologiques du lien social : il y a toujours — sauf cas exceptionnels — du lien, mais ces liens sociaux appartiennent à plusieurs catégories, c’est-à-dire ne font pas appel aux mêmes mécanismes. Selon Tönnies et Durkheim, le lien social peut relever d’un modèle communautaire (solidarité organique selon Durkheim) dans laquelle l’appartenance à un groupe et l’obéissance absolue aux règles du groupe sont la forme primordiale du rapport des individus entre eux. Dans ce cadre, le lien social est fort, mais l’autonomie individuelle est niée et la non-conformité aux normes du groupe est fortement sanctionnée. Dans le modèle sociétaire, typique des sociétés modernes, le rapport des individus entre eux est fondé sur l’intérêt bien compris de chacun. Le lien social autorise une grande autonomie dans le cadre d’un contrat social généralisé. Les sociologues modernes admettent que les deux formes de solidarité coexistent dans la société contemporaine.
Mais les théories du lien social dessinent en creux plusieurs figures ou plusieurs degrés de l’absence de lien social : la figure de l’étranger, de l’exclu, de celui qui n’appartient à aucune forme de groupement organisé. La théorie du lien social permet également de penser les situations critiques dans lesquelles les populations ne parviennent plus à s’entendre sur les normes qui organisent leur vie collective.
R. E. Durkheim, De la division du travail social, Paris, 1893. — E. Durkheim, Le suicide, Paris, 1897. — F. Tönnies, Communauté et société, Paris, 1887. — R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale, Fayard, Paris, 1995. — Y. Grafmeyer, I. Joseph (Éds), L’école de Chicago. Naissance de l’écologie urbaine, Aubier-Montaigne, Paris, 1990.
Voir : Cohésion sociale — Éducation/Socialisation — Intégration — Socialisation — Solidarité
François-Xavier Merrien
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Locataires (Protection des)
La protection des locataires s’inscrit dans la branche du droit, nommée droit social. Plus exactement, c’est dans le Code des Obligations que les articles relatifs au droit du bail consacrent la protection des locataires. Afin de faire respecter ces dispositions juridiques, les locataires se sont organisés en associations fédérées du niveau régional à l’échelon national, sous l’égide de l’association suisse des locataires (ASLOCA). L’objectif de l’ASLOCA est double : d’une part, assurer la défense individuelle des locataires en difficulté, et ainsi faire progresser la jurisprudence en faveur de ceux-ci et, d’autre part, participer au développement d’une politique sociale du logement, par diverses actions politiques.
R. D. Lachat, J. Micheli, Le nouveau droit du bail, Fédération romande des locataires (Éd.), Lausanne, 1991. — Droit au Logement, le journal de l'Asloca. — Le guide pratique du locataire, ASLOCA et Bon à Savoir, Genève, 2000.
Site Internet : www.asloca.ch
Voir : Logement (Aide au) — Logement (Encouragement à la construction du) — Logement (Politique du) — Office fédéral du logement (OFL)
Sophie Rodari
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Lock-out
Le lock-out consiste en la suppression, par l’employeur, de la possibilité pour le salarié de travailler. C’est un moyen de combat patronal dont l’exercice est garanti dans les mêmes conditions que la grève.
R. G. Aubert, Études de droit du travail, Le droit du travail en pratique, Schulthess Polygraphischer Verlag, Zurich, 1995. — P. Bois, Études de droit social, Le droit du travail en pratique, Schulthess Polygraphischer Verlag, Zurich, 1991.
Voir : Grève — Paix du travail (Convention de)
Jean-Claude Prince
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Logement (Aide au)
On appelle aide au logement les mesures fédérales encourageant la construction et la rénovation de logements locatifs et aidant l’accession à la propriété :
— Une caution pour l’emprunt hypothécaire en second rang, permettant de réduire le besoin de fonds propres à 10 % et le taux d’intérêt à celui du crédit en premier rang.
— Un “ abaissement de base ” servant à diminuer le loyer initial de 15 % environ. L’avance s’éteint progressivement. Le loyer contrôlé augmente, même au-delà du niveau des coûts, pour rembourser les avances initiales sur un total de 25 ans, avec intérêts calculés au taux du marché. Comme l’abaissement de base ne comprend aucune subvention, il est ouvert à tout maître d’ouvrage qui accepte le plan des loyers et qui ne dépasse pas un plafond de coût modulé selon la qualité des logements.
— Les abaissements supplémentaires sont des subventions à fonds perdus octroyées aux locataires lorsque la charge du loyer est encore trop lourde. Les bénéficiaires doivent remplir des conditions de revenu et de fortune ou personnelles.
Il existe encore quelques dispositions plus favorables pour les maîtres d’ouvrage d’utilité publique.
Voir : Logement (Encouragement à la construction du) — Logement (Politique du) — Office fédéral du logement (OFL)
Philippe Thalmann
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Logement (Encouragement à la construction du)
L’aide au logement prend traditionnellement la forme d’une aide à la pierre, en encourageant la construction et la rénovation. On espère ainsi aider indirectement les ménages qui peinent à se loger adéquatement pour une charge supportable. En même temps, on n’impose pas de conditions aux occupants, contrairement par exemple au régime HLM genevois. Cette approche implique donc une grande imprécision, qui oblige à continuer sans cesse d’encourager la construction. Pour venir plus directement en aide aux ménages en difficultés, il existe encore une aide à la personne sous la forme de subventions à fonds perdus dépendant de la situation des ménages, mais elle est peu développée car on craint qu’elle ne soit capturée par des hausses de loyers ou qu’elle soit “ puit sans fond ”. Les abaissements supplémentaires (voir Logement (Aide au)) sont une forme d’aide à la personne.
La Confédération aide particulièrement les maîtres d’ouvrage d’utilité publique (coopératives). Elle ne construit pas elle-même et il n’existe pratiquement pas de logement public en Suisse (2,7 % du stock). La construction repose donc largement sur l’initiative privée. Lorsque la rentabilité n’est pas assurée, même avec l’aide fédérale, la construction ralentit.
La LCAP prévoit des exigences précises de qualité pour les logements dont la construction est subventionnée (le système d’évaluation de logements SEL), une qualité plus élevée donnant droit au subventionnement de coûts de construction plus élevés.
Voir : Logement (Aide au) — Logement (Politique du) — Office fédéral du logement (OFL)
Philippe Thalmann
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Logement (Politique du)
La politique fédérale du logement repose, depuis 1972, sur l’article 34sexies de la Constitution. Cet article prévoit que la Confédération encourage la construction de logements et l’accès à la propriété. Il est concrétisé dans la Loi encourageant la construction et l’accession à la propriété de logements (LCAP), entrée en vigueur en 1975. Cette loi définit encore aujourd’hui les instruments utilisés par l’Office fédéral du logement (OFL) à Granges (SO), mais elle est en voie de révision.
La politique du logement prend encore la forme du droit du bail dans le Code des obligations (art. 269-274). Ces dispositions protègent les locataires contre des loyers et les congés abusifs. Le caractère non abusif d’un loyer repose sur l’un ou l’autre des deux principes, pas toujours compatibles : il correspond aux coûts (rendement normal) ou il reflète le niveau usuel du quartier. Cette dernière disposition permettrait en principe de retourner progressivement à des loyers libres, mais les tribunaux ne l’acceptent pas souvent.
Le marché du logement fonctionne à la satisfaction de la grande majorité des locataires et propriétaires. Trois quarts des ménages vivent à l’aise pour une charge locative tout à fait supportable (moins de 25 % de leur revenu). Un quart rencontre des difficultés à se loger adéquatement pour une charge supportable : des grandes familles, des familles monoparentales, des personnes âgées, des jeunes. Ces personnes sont aidées en partie directement par les abaissements supplémentaires de la LCAP.
La satisfaction générale des locataires, surtout aisés, et la modestie des mesures d’encouragement contribuent à expliquer la proportion faible et stagnante de ménages propriétaires de leur logement (environ 30 %), contraire à l’intention constitutionnelle. D’ailleurs, l’OFL encourage en moyenne la construction de deux logements locatifs pour l’accession d’un logement en propriété, soit les proportions existant déjà. Son aide a été utilisée par un ménage sur 10 pour accéder à la propriété et on estime que dans la moitié des cas elle n’était pas nécessaire (comme pour la construction de logement locatif).
Les cantons sont libres de compléter l’aide fédérale au logement et les dispositions réglementaires du droit du bail. Peu le font et ceux qui le font greffent leurs mesures sur le cadre de la politique fédérale. Genève est une exception notoire, avec une politique du logement indépendante qui fait que les maîtres d’ouvrage de ce canton ont peu fait appel à l’aide fédérale.
En moyenne, on peut estimer que les pouvoirs publics prennent sur eux environ 3 % des coûts de construction de logements par année et parviennent ainsi à aider la construction d’un logement sur huit.
R. F.-W. Gerheuser, “ Loyer et revenu 1990-1992. L’approvisionnement en logements des ménages locataires et coopérateurs ”, in : Bulletin du Logement 58, OFL, Granges, 1995. — D. Lachat, J. Micheli, Le Nouveau Droit du Bail, ASLOCA, 1990. — Office fédéral du logement, “ Les 20 ans de la LCAP ”, in : Bulletin du Logement 61, Granges, 1995. — Office fédéral du logement, “ L’habitat en Suisse ”, in : Bulletin du Logement 63, Granges, 1996.
Voir : Locataires (Protection des) — Logement (Aide au) — Logement (Encouragement à la construction du) — Office fédéral du logement (OFL)
Philippe Thalmann
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Loisirs
Le terme peut correspondre à l’ensemble des occupations auxquelles l’individu s’adonne de son plein gré durant son “ temps libre ” une fois dégagé de ses obligations professionnelles, familiales et sociales. On a parlé également d’une civilisation des loisirs et d’une industrie des loisirs, le marché s’emparant de ce nouvel espace-temps rendu disponible. La question des loisirs est une composante des débats sur le travail, notamment sur le partage du travail.
Voir : Animation socioculturelle — Centre de loisirs, centre d’animation de quartier — Partage du travail — Travail
jpf
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Loterie romande
Fondée en 1937, la Société de la Loterie de la Suisse Romande a pour mission d'organiser des loteries dont les bénéfices sont entièrement consacrés au soutien d'institutions romandes d'utilité publique à caractère social, culturel ou de recherche ne faisant pas l'objet d'obligation légale pour la collectivité publique.
Les gains dégagés après paiement des lots (au moins 50 % des sommes engagées par les joueurs) sont confiés à des organes cantonaux de répartition qui se chargent de les attribuer aux différentes institutions. En 1999, la Loterie romande a ainsi mis à disposition de ces organismes, désignés ou agréés par les cantons, près de 80 millions de francs.
Les cantons romands font partie de l'exploitation de la Loterie romande et en reçoivent la totalité des bénéfices.
Site Internet : www.loterie.ch
Sophie Barras Duc
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Maintien à domicile (quelques caractéristiques)
Les pratiques sociales et sanitaires au domicile du patient se trouvent confrontées à des réalités qui déterminent l’activité.
L’élargissement de l’espace
L’institution est un espace bien défini. La plupart des acteurs vivent dans les mêmes murs. La structure institutionnelle définit les rôles, les tâches et le rythme des activités. La pratique du maintien à domicile vient bousculer cette situation. L’appartement du patient peut sembler être le cœur de l’action, en réalité, il constitue un espace beaucoup plus large qui englobe à la fois le domicile du malade et l’ensemble des organismes appelés à lui fournir des prestations ; le voisinage peut y occuper une place de choix. Cet état de fait entraîne d’importantes conséquences pour l’organisation des communications.
Le réseau des acteurs concernés
Le fait d’organiser les soins au domicile du malade entraîne une modification du type d’acteurs concernés par le processus de soins et une transformation des rôles qu’ils ont à jouer. Parents, familiers, voisins, bénévoles sont appelés à accomplir des tâches nécessaires à la réussite de chaque projet. Tous sont amenés à établir des échanges entre eux, quel que soit leur statut.
Un autre lieu d’accueil
L’appartement d’un malade n’est pas organisé comme un hôpital. La plupart des professionnels devront s’adapter à cet espace.
Un autre rapport hiérarchique
Le malade a des droits, dès qu’il entre en institution. Déraciné, il acceptera bon gré mal gré cet état de fait. Chez lui, il conserve, dans nombre de cas, ces réflexes du maître chez soi. Il est en position plus forte pour négocier, voire discuter les prestations qui lui sont prodiguées.
Diversification des lieux de coopération
Si le malade est chez lui, les professionnels sont appelés à se concerter en des endroits multiples. Dans l’appartement du malade, bien sûr, mais aussi à l’extérieur, entre spécialistes de plusieurs disciplines, chez la voisine, au centre médico-social, dans un colloque en milieu hospitalier.
L’organisation de la convergence
Si la convergence entre les professionnels de l’action sociale et sanitaire est une mesure qui s’impose dans la plupart des champs d’action, elle est particulièrement nécessaire pour la mise en œuvre des systèmes de maintien à domicile : elle se construit plus près du patient ; elle appelle aussi un sérieux effort de planification, donc d’anticipation ; elle doit aussi être ouverte à une certaine plurifonctionnalité. Personne ne prétend que chacun peut tout faire. Mais, il s’agit, dans toute la mesure du possible, de définir les espaces de chevauchements entre les diverses interventions qui s’imposent. Une telle négociation est nécessaire pour renforcer l’efficacité des prestations et les rendre plus humaines.
Des contacts directs avec le milieu
Dans la prise en charge en terrain hospitalier, le milieu est souvent une variable que l’on délègue à l’assistante sociale. Dans le maintien à domicile, chaque intervenant est directement confronté à l’entourage du patient. Il est contraint de le connaître directement, ne serait-ce que pour s’y mouvoir et y déployer sa sollicitude technicienne. Beaucoup reconnaissent au milieu sa richesse pédagogique. Il parle du patient, de sa maladie, mais aussi de son bien-être, voire de sa guérison.
La connaissance du cadre de vie constitue donc pour les divers professionnels une force unificatrice, un terrain privilégié pour la convergence. Elle permet aussi de limiter les risques de cécité et certaines aberrations qu’engendre la routine, il participe de l’ensemble du processus de soins.
R. H.-M. Hagmann, J.-P. Fragnière, Maintien à domicile, Le temps de l'affirmation, Réalités sociales, Lausanne, 1997.
Voir : Réseau de soins  Réseau de soins (Organisation du)  Service médico-social  Soins et aide à domicile
jpf
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Maison de retraite àð Home/Établissement médico-social (EMS)
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Maître socioprofessionnel
Le maître socioprofessionnel est un acteur social qui travaille auprès des personnes handicapées du travail en raison de déficiences physiques, sensorielles, motrices, psychiques, intellectuelles ou sociales. Il offre une activité adaptée permettant à ces personnes de retrouver un rôle social valorisé de travailleur. Il œuvre dans une perspective de développement afin de favoriser pour chacun l’amélioration de ses capacités et viser une intégration optimale dans l’atelier ou le circuit économique ordinaire.
L’atelier s’inscrit le plus souvent dans un contexte productif, c’est dire que les objets fabriqués ou transformés, ainsi que les services offerts à la clientèle, répondent à des contraintes qualitatives et quantitatives.
Voir : Handicap — Intégration — Lien social — Travailleurs sociaux (Formation des) — Travail
jpf
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Malthusianisme
Cette notion renvoie à une attitude voire une position fréquemment tenue par certains groupes sociaux en particulier dans le domaine de la politique sociale. Elle correspond à des attitudes qui vont de l’inquiétude face à l’accroissement de la population à une volonté de réduire les prestations sociales. Elle exprime une crainte de débordement lié au nombre.
Le malthusianisme en tant que doctrine a été proposé par Thomas Robert Malthus (1766-1834). Cet auteur pensait avoir mis en lumière “ la tendance constante qui se manifeste chez tous les êtres vivants à accroître leur espèce plus que ne le comporte la quantité de nourriture qui est à leur portée ”. De cette “ loi naturelle ” il concluait au danger de surpopulation du globe et préconisait la limitation des naissances par la chasteté et le recul de l’âge du mariage. Par extension, on appelle malthusianisme ou néo-malthusianisme l’ensemble des doctrines qui, se réclamant plus ou moins ouvertement de Malthus, préconisent les pratiques anticonceptionnelles. Il inspire également diverses prises de position actuelles dans le domaine économique et social.
R. A. Sauvy, Théorie générale de la population, 3e éd., 2 Vol., Paris, 1966.
Voir : Démantèlement social
jpf
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Maltraitance
Ce néologisme, synonyme de mauvais traitements envers les enfants, figure dans les dictionnaires depuis 1994. Par sa connotation plus abstraite il sert également à désigner toutes formes de violence entre adultes. Seules celles infligées aux enfants par des adultes proches ou responsables (parents y inclus) et dans le cadre d'institutions (Tomkiewicz, 1991) sont prises en compte ici. On exclut donc de ce champ l'exploitation sexuelle des enfants (pédophilie), l'esclavage d'enfants, l'enrôlement dans les conflits armés, la malnutrition et l'absence des soins médicaux élémentaires des pays pauvres.
La notion de mauvais traitements ou d'enfants maltraités apparaît en France en 1889 déjà, dans les textes de loi qui visent à assurer “ la protection des enfants maltraités et moralement abandonnés ”. La reconnaissance de la maltraitance comme un problème social implique des mécanismes socio-légaux complexes (protection de l'enfant) ; toute intervention repose alors sur une collaboration interprofessionelle (Flückiger, 2000) avec ce paradoxe que les citoyens profanes sont aussi aptes à reconnaître les mauvais traitements et que la loi leur impose de les signaler .
Bien que regroupées sous le terme maltraitance, l'extrême diversité des expériences réelles vécues par les enfants quant à leur nature (sévices physiques (Kempe, 1977), sexuels (Halpérin,1997), cruauté mentale, négligences et rejets (Gabel, 1996) ), leur intensité, leur durée et leur contexte plaident en faveur de politiques différenciées de prévention, d'intervention et de protection.
De nombreuses thérapies dont les modèles théoriques préexistaient à la reconnaissance de cette réalité l'ont absorbée sans modifier leurs concepts. Les théories de l'attachement, qui étudient comment l'enfant se construit en fonction des ses interactions, sont les plus riches, les plus documentées pour l'aborder (Ainsworth & Crittenden 1989).
Au début des années 1990, en Suisse, une masse importante d'intervenants prend conscience de la maltraitance comme problème social (Enquête fédérale, 1992). Depuis, des progrès considérables ont été accomplis dans la détection et dans la collaboration entre professionnels. Cependant des lacunes subsistent dans la prise en charge des enfants, dans l'efficacité des thérapies et dans la prévention. Par ailleurs, la popularité de cette problématique contribue à réduire certains de ses descripteurs à des explications simplistes ; il en va ainsi des concepts de transmission intergénérationnelle et de résilience.
R. : M.-S. Ainsworth, P.-M. Crittenden, “ Child maltreatment and attachement theory ”, in : Cichetti & Carlson Child Maltreatment, University Press, Cambridge, 1989. — I. Flückiger, Enfants maltraités, intervention sociale, Ed EESP, Lausanne, 2000. — M. Gabel et coll., Maltraitance psychologique, Fleurus, Paris, 1996. — Groupe Enfance Maltraitée, Enfance maltraitée en Suisse. Office central des imprimés, Berne, 1992. — D.-S. Halpérin, P. Bouvier, H. Rey, A contre-coeur , à contre-corps, Ed. Médecine et Hygiène, Genève, 1997. — C. Kempe, L'enfant battu et sa famille, Fleurus, Paris, 1997. — S. Tomkiewicz, P. Vivet, Aimer mal, châtier bien, Seuil, Paris, 1991.
Voir : Protection de l'enfant — Violence
Isabelle Flückiger
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Managed care (ou réseau de soins coordonnés)
Il s’agit d’un système de gestion des prestations de soins, coordonné, qui a pour but de conjuguer une amélioration de la qualité des soins avec des coûts moins élevés. Il se caractérise par un contact étroit entre les fournisseurs de soins reconnus par le réseau et l’assureur. Les premiers acceptent des rémunérations moins élevées, mais ils bénéficient de la clientèle du réseau. Les assurés doivent en principe consulter le médecin généraliste avant les médecins spécialistes.
L’origine vient des États-Unis. Ce système est reconnu et appliqué en Suisse (cf. art. 41 al. 4 et 62 al. 1 et 3 de la loi fédérale sur l’assurance-maladie, LAMal, du 18 mars 1994).
R. A. Rilliet Howald, “ Les réseaux de soins coordonnés ou le “ managed care ” : vers une nouvelle organisation des soins de santé ? ”, in : Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, No 20-1998, pp. 57 ss.
Voir : Assurance-maladie — Coûts de la santé
Pierre-Yves Greber
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Marché du travail
Le marché du travail constitue le lieu où l’offre et la demande se rencontrent pour établir le prix du travail. Les processus menant à la détermination du salaire et à l’adéquation entre offre et demande, qui suppose une distribution des emplois sans obstacle, sont complexes et correspondent rarement à un marché du travail “ parfait ”. Dans un tel marché, chaque participant, complètement informé des conditions, serait libre de prendre un emploi et d’en changer ; ce dernier serait définissable et homogène. Au surplus, les coalitions seraient inexistantes, d’où une égalité de conditions entre participants.
En réalité, les marchés du travail sont souvent cloisonnés (par branches, par régions), incomplets, peu transparents. Les acteurs du marché ou leurs représentants peuvent aussi défendre les intérêts des parties prenantes en recourant à des ententes. Les salaires en seront influencés. Quant à la mobilité des travailleurs, elle est aussi influencée par l’existence de places vacantes, les qualifications et caractéristiques individuelles, les motivations, la disponibilité et la possibilité de rechercher un emploi sur un autre marché, ainsi que par les conditions de travail, le type d’entreprise, etc. Le marché du travail est donc “ imparfait ”. Diverses théories en rendent compte.
Voir : Étude de marché — Flexibilité du travail — Économie d'échelle — Segmentation (du marché du travail) — Travail — Travail (Loi sur le) — Travail au noir
Pierre Weiss
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Marché du travail et vieillissement
L’association des deux termes marché du travail et vieillissement peut être entendue de deux manières différentes selon la signification qui est donnée à chacun de ces termes. Le vieillissement peut se référer au vieillissement physiologique ou au vieillissement de la population. De même, le marché du travail peut prendre le sens d’organisation de la production ou celui d’offre et de demande d’emploi. Les liens entre organisation de la production et vieillissement physiologique sont analysés essentiellement dans les disciplines de l’ergonomie et de la santé du travail. Partis de questionnements sur les éventuelles inadaptations des travailleurs âgés aux conditions de travail en raison de leur âge, les chercheurs de ses disciplines aboutissent à la critique des processus de travail qui sont mis en œuvre dans l’organisation traditionnelle des chaînes de production dans les entreprises industrielles ou des services. Ces processus valorisent, en effet, l’intensité du travail, capacité que peuvent déployer les jeunes, plutôt que les expériences acquises, capacité que pourraient développer les travailleurs âgés.
Les conclusion des études ergonomiques trouvent des applications dans les secteurs d’activité se caractérisant par le vieillissement de la pyramide des âges de leur main-d’œuvre, celui-ci étant dû à l’entrée sur le marché du travail de générations nées après le baby-boom et d’effectifs moins nombreux que les générations précédentes. Nombre d’entreprises sont ainsi amenés à réaménager leurs chaînes de production, en vue de valoriser les capacités de travail de leur main-d’œuvre vieillissante.
R J.-M. Le Goff, Les trajectoires des travailleurs âgés sur le marché du travail en Suisse et en Europe. Analyse socio-démographique, Réalités sociales, Lausanne, 1999. — J.-C. Marquié, D. Paumès et S. Volkoff, Le travail au fil de l’âge, Octarès, Toulouse, 1995.
Voir : Marché du travail — Vieillesse (Politique de la) — Vieillissement de la population – Travailleurs âgés.
Jean-Marie Le Goff
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Marché du travail secondaire
Le marché secondaire couvre les postes de travail 1) subventionnés, mais normaux du point de vue du droit du travail et de la législation sociale, 2) pourvus en fonction d’objectifs de politique de l’emploi et de politique sociale, et non selon les critères du marché, 3) limités dans le temps, 4) complémentaires à ceux du marché primaire et non concurrentiels.
Les statuts d’occupation spéciaux qui ne remplissent pas ces quatre critères définis par Baur sont compris dans la notion plus large de marché du travail complémentaire (p. ex. postes dans les ateliers protégés pour handicapés).
Le marché du travail secondaire répond à l’idée de remplacer ou compléter les prestations sociales passives par des mesures actives visant à (ré)intégrer les bénéficiaires dans le monde du travail. Il se présente comme un instrument de réduction des coûts financiers et sociaux du chômage. Il s’est développé lors de la récession avec les mesures relatives au marché du travail introduites par la LACI en 1997 et les contre-prestations prévues dans certaines lois cantonales sur l’aide sociale.
R. R. Baur, “ Le marché du travail secondaire en Suisse. Dimensions actuelles et perspectives ”, in : La Vie économique, 1/98, p. 22 ss. — Rapport du groupe de travail interdépartemental “Marché du travail secondaire” donnant suite au point 6 du postulat 99.3003 de la CER-N du 26 janvier 1999, Berne, 2001.
Voir : Assurance-chômage obligatoire et l indemnité en cas d insolvabilité (Loi fédérale sur)  Contre-prestations  Politiques en matière de lutte contre la pauvreté
Géraldine Luisier
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Mariage àð Divorce  Famille
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Marketing social
Le marketing social est un outil organisationnel qui positionne les usagers au centre de l’organisme en visant la satisfaction de leurs besoins. Ses trois idées forces sont l’écoute, l’évaluation et la différenciation. L’écoute organisée des usagers permet d’élucider leurs besoins et leurs demandes. L’évaluation doit examiner dans quelle mesure les effets que l’on essaie d’induire (objectifs) par l’action sociale sont atteints. La différenciation de la population en groupes homogènes permet de proposer des services plus personnalisés. Ainsi, le marketing se préoccupe des deux dimensions principales de toutes prestations sociales : la tâche à accomplir et la relation à co-construire. Le marketing peut donc se définir comme une technique de l’échange.
R. R. Baptiste, Rénover l’action sociale par le management et par le marketing, CREAI, Lyon, 1990. — R. Baptiste, Le social mérite mieux !, Édition des Deux Continents, Genève, 1996. — A.-L. Haering, Traits d’union : la communication associative en pratique, Éditions I.E.S., Genève, 1995.
Voir : Associations — Communication sociale — Évaluation
Albert-Luc Haering
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Maternité (Protection de la)
Au sens large, la protection de la maternité comprend la couverture des soins de santé et la prévention, la garantie du revenu durant le congé de maternité et la protection contre les licenciements, un soutien financier aux mères sans activité lucrative. Aucune assurance ne couvre la protection des mères, ainsi définie, en dépit du mandat impératif inscrit dans la Constitution en date du 25 novembre 1945 (repris dans le texte révisé entré en vigueur le 1er janvier 2000). Toutes les tentatives ont échoué en votation :
— 2 décembre 1984 : rejet de l’initiative pour une protection efficace de la maternité (1980) ;
— 6 décembre 1987 : rejet de la révision de la LAMal, introduisant le versement d’une indemnité de maternité :
— 13 juin 1999 : rejet de la Loi fédérale sur l’assurance-maternité, adoptée par le Parlement le 18 décembre 1998.
En l’absence d’une Loi fédérale couvrant la maternité, il convient de rechercher, dans différentes lois, quels sont les droits de la femme enceinte et de la jeune mère.
Pour toutes les femmes, la Loi fédérale sur l’assurance-maladie prévoit la couverture des soins de santé à titre obligatoire, sans délai d’attente et sans réserve. La prévention, bien que limitée, fait également partie des prestations obligatoirement à charge des assureurs-maladie.
Pour les femmes professionnellement actives, une première catégorie de normes imposent, à l’employeur, des mesures protectrices tenant, notamment, aux conditions de travail durant la grossesse ainsi qu’à l’interdiction de travailler après l’accouchement. Ces normes sont contenues dans la Loi fédérale sur le travail, dont la dernière révision est entrée en vigueur le 1er août 2000.
Une deuxième catégorie de normes, rattachées au contrat individuel de travail, consacrent la nullité du licenciement durant toute la grossesse et dans les 16 semaines qui suivent l’accouchement.
Enfin, les dispositions de la Loi fédérale sur l’assurance-maladie fixent à 16 semaines la durée du paiement de l’indemnité de maternité. Elles n’ont cependant aucun caractère obligatoire. La protection peut donc également dépendre de contrats de droit privé conclus selon les règles de la Loi fédérale sur le contrat d’assurance (LCA). Enfin, un grand nombre de femmes sont dépourvues de toute prestation d’assurance après l’accouchement. Leur sécurité économique est entièrement fondée sur le droit privé qui impartit, à l’employeur, l’obligation de verser le salaire durant une période limitée dépendant de l’ancienneté dans l’entreprise.
Pour combler la lacune existant au niveau fédéral, certains cantons s’engagent sur la voie d’une assurance-maternité cantonale. Tel est le cas de Genève qui dispose, depuis le 1er juillet 2001, d’un régime offert à toutes les femmes professionnellement actives (80 % du salaire durant 16 semaines).
Les femmes au foyer ne bénéficient d’aucune prestation en espèces fondée sur le droit fédéral. Un certain nombre de cantons ont adopté des législations à caractère assistantiel, garantissant le droit à une allocation de maternité, parfois assorti d’un délai de carence défini comme une durée minimale de domicile sur le territoire cantonal. De telles allocations reviennent, en priorité, à la mère. Elles sont parfois accordées au père, généralement s’il assume la charge de l’enfant.
R. A. Aebi, D. Dessoulavy, R. Scenini, La politique familiale et son arlésienne : L’assurance-maternité, Les Éditions IES, Genève, 1994. — J.-L. Duc (sous la direction de), L’assurance-maternité : colloque de Lausanne 1998, IRAL, Lausanne, 1999.
Voir : Assurance-maladie (AM) — Avortement — Famille (Article constitutionnel sur la protection de la) — Incapacité de travail
Béatrice Despland
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Mauvais traitements
Est nommé mauvais traitement tout acte ou omission d’acte commis par des personnes ou des institutions qui entravent ou sont de nature à entraver le développement physique et/ou psycho-affectif d’un mineur. Quatre grandes catégories de mauvais traitements sont généralement distinguées : les négligences et carences, les mauvais traitements physiques, les mauvais traitements psychiques et les abus sexuels. Le Code civil suisse (CCS) parle de mise en danger du développement de l’enfant et énumère les moyens d’y remédier lorsque celle-ci a lieu au sein de la famille (art. 307 ss) tandis que le Code pénal suisse (CPS) énumère les infractions commises sur les mineurs et sanctionne le ou les auteurs ; y compris s’ils sont parents.
R. Enfance maltraitée en Suisse, Rapport final présenté au chef du Département fédéral de l’Intérieur par le groupe de travail Enfance maltraitée en Suisse, Office central des imprimés et du matériel, Berne, 1992.
Voir : Abus sexuels — Maltraitance — Protection de l’enfant
Jean Vallet
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Mécénat
Le terme de mécénat vient du nom de Gaius Maecenas, qui fut conseiller d’Auguste et protecteur des belles-lettres ; sa signification s’est élargie, à l’époque moderne, jusqu’à désigner toute forme de protection des arts et des activités relevant du talent. Est mécène quiconque, sans exercer lui-même d’activité artistique, contribue à promouvoir la pratique de l’artiste. Derrière toute œuvre, ou presque, se manifeste la présence de quelqu’un qui commande et achète, et qui en estime la valeur, au point qu’il est permis de voir dans l’art, aux époques de culture les plus évoluées, le résultat de la rencontre entre le mécène et l’artiste, le premier ne pouvant rien sans le second, et le second ayant besoin du premier pour donner corps à ses intentions artistiques. Le mécène, acheteur et collectionneur, exerce toujours un choix, une action critique implicite, et il s’érige ainsi en arbitre du goût, dont les idées influencent de façon décisive les caractères mêmes de la production artistique. Son action est déterminante, même si lui fait défaut le sens de l'autonomie esthétique.
jpf
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Médecine (Histoire de la)
Vieille comme l’humanité, dans la mesure où on la conçoit comme une disposition technique visant à soulager la souffrance, fondée sur la propension quasi spontanée à la conservation de la vie de soi et de ses semblables, art et science à la fois, la médecine se définit aussi comme pratique au sein d’un contexte social et culturel où elle se déploie et s’incarne à travers différents acteurs socialement construits (le Médecin et les différentes catégories de soignants, le Malade,…), différents savoirs et techniques (la Science ou les para-sciences, les spécialités médicales…), différentes institutions (la Faculté, l’Hôpital, les corporations professionnelles, les systèmes d’assurances sociales, …).
C’est à ce dernier titre qu’elle est susceptible d’une histoire qui ne la considère pas en son état actuel comme l’aboutissement inéluctable d’une dynamique de croissance spontanée des connaissances, dont découleraient tout naturellement aussi les pratiques et les institutions, mais comme le fruit complexe de l’évolution d’une discipline dont les valeurs et les contenus sont en interaction constante avec une pluralité de déterminants sociaux.
Or, une telle conception ne va pas de soi au sein de notre société contemporaine : elle constitue en réalité l’héritage de la “ crise ” de la médecine de la deuxième moitié du XXe siècle, dont les symptômes les plus marquant furent les critiques vigoureuses adressées au système de pouvoir représenté l’institution médicale après la deuxième guerre mondiale (les mouvements de l’antipsychiatrie en furent l’un des moments notables), parallèlement au soupçon grandissant portant sur l’efficacité de la médecine (les ouvrages de McKeown et Illich, notamment, connurent un grand retentissement dans le monde occidental lors de leur parution dans les anées 1970). Cette “ crise ” sociale de la médecine, sans doute non résorbée aujourd’hui, accompagne comme leur ombre des bouleversements majeurs tant dans le domaine technique et thérapeutique (chirurgie, psychiatrie, révolution moléculaire), épidémiologique (émergence à l’échelle planétaire de maladies comme le sida), ou encore socio-économique et politique (rôle primordial des grandes compagnies pharmaceutiques dans les systèmes médicaux, explosion des coûts et crise des systèmes de financement de la santé). Aujourd’hui, plusieurs autres facteurs contribuent encore à façonner le tableau général de la médecine. Soulignons ainsi la prise en compte du patient comme protagoniste dans la gestion générale de la médecine ainsi que dans la prise de décision thérapeutique ; l’émergence au plan collectif des préoccupations bioéthiques, ainsi que, sur un plan plus général encore, le phénomène du pluralisme médical, lié à l’intensification des échanges de tous ordres au plan planétaire.
La prise en compte de l’ensemble de ces facteurs et de leurs interactions permet de penser la complexité de la médecine et d’en mesurer sa dimension intrinsèquement communautaire. Elle souligne par ailleurs, la nécessité d’une histoire intégrée de la médecine, comme le montrent les récents développements, en Suisse et ailleurs, d’une telle discipline, qui s’allie aux sciences sociales et politiques dans l’examen critique de la “ science médicale en contexte ”.
R. V. Barras, “ Le médecin, de 1880 à la fin du XXe siècle ”, in : L. Callebat (Éd.), Histoire du médecin, Flammarion, Paris, 1999, pp. 269-307. — T. McKeown, The Role of Medicine, Blackwell, Londres, 1976. — I. Illich, Némésis médicale : l’expropriation de la santé, Seuil, Paris, 1976. — B. J. Good, Medicine, rationality and experience, Cambridge University Press, Cambridge, 1994. — H.-J. Rheinberger, “ Beyond Nature and Culture : A Note on Medicine in : the Age of Molecular Biology ”, in : Science in Context, 8, 1995, pp. 249-263.
Site Internet : www.hospvd.ch/public/instituts/iuhmsp/
Voir : Acharnement thérapeutique — Assurance-maladie — Caisses-maladie — Coûts de la santé — Droit à la santé — Éthique — Médecine sociale et préventive — Médecine libérale
Vincent Barras
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Médecine libérale
Forme d’organisation de la médecine qui repose, en particulier, sur les principes fondamentaux suivants : le libre choix du médecin par le malade, la liberté de prescription du médecin, le secret professionnel, le paiement direct des honoraires par le malade, la liberté d’installation du médecin.
En Suisse, la médecine est considérée comme “ à haute dose de libéralisme ”. Dans le cadre des mesures prises pour maîtriser les coûts de la santé, des “ régulateurs ” sont mis en place pour réduire les dysfonctions du système.
Voir : Coûts de la santé — Médecine (Histoire de la) — Relation médecin-malade — Secret médical
jpf
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Médecine sociale et préventive
La médecine sociale et préventive a comme objet l’action préventive visant l’amélioration de la santé des individus et des populations en se basant sur :
— l’étude des problèmes de santé dans leur complexité bio-psycho-sociale (y compris donc l’étude des facteurs sociaux et communautaires de risque d’atteinte à la santé) et l’étude du fonctionnement des services de santé (y compris, par exemple, leur degré d’accessibilité pour divers sous-groupes de la population).
Plus précisément, la médecine sociale et préventive veillera à :
— identifier les besoins de santé de la population (ex : identifier les problèmes prioritaires de santé, identifier les grandes causes de mortalité) ;
— identifier les déterminants sociaux de la santé (ex. : identifier les taux de morbidité différentiels) ;
— identifier les déterminants des différences sociales, y compris les facteurs de risque des maladies chroniques (ex. : identifier les facteurs d’inégalité devant la santé, identifier les contextes environnementaux influençant la santé) ;
— caractériser le rôle des soins médicaux dans leur santé (ex. : faire l’analyse des déterminants de santé selon McKeown) ;
— déterminer le rôle des divers services de santé dans la prise en charge des individus et de la population (ex. : caractériser la place des services de soin versus les actions de prévention) ;
— établir l’adéquation/inadéquation entre problèmes prioritaires de santé et actions mises en œuvre (ex. : établir l’impact d’une mesure de prévention sur un problème de santé donné) ;
— identifier les enjeux économiques de la santé (ex. : établir l’évolution du prix de la santé) ;
— caractériser la dimension collective des choix individuels (ex. : établir la couverture vaccinale d’une population) ;
— établir les enjeux socio-sanitaires de l’assurance sociale et de la santé au travail ;
— déterminer et caractériser les actions de prévention (ex. : caractériser une action de prévention de niveau primaire, de niveau secondaire et de niveau tertiaire) ;
— identifier l’impact possible des actions de prévention sur des problèmes prioritaires de santé (ex. : tabagisme, accidents, suicides, alcoolisme) ;
— identifier les possibilités et les limites des actions de prévention (ex. : identifier les problèmes techniques d’un test de dépistage) ;
— identifier et caractériser les stratégies de prévention (ex. : établir la place d’une stratégie à haut risque versus celle d’une stratégie populationnelle) ;
— identifier les enjeux éthiques, sociaux et juridiques de la prévention et de la promotion de la santé (ex. : identifier les directives éthiques à considérer dans une campagne de dépistage) ;
— établir un plan de lutte contre les maladies transmissibles (ex. : investiguer une épidémie) ;
— planifier une action de prévention ou de promotion de la santé (ex. : fixer les objectifs d’un programme d’éducation à la santé) ;
— établir la place d’un entretien et le rôle d’autres instances de santé dans les actions de prévention (ex. : identifier des collaborations entre acteurs de la prévention dans une campagne de promotion de la santé).
R. D. Clark, “ A vocabulary for preventive and commmunity medicine ”, in : D. Clark, B. Mac Mahon (Éds), Preventive and Community medicine, Little Brown, Boston, 1981, pp. 3-15.
Voir : Éducation pour la santé — Coûts de la santé — Planning familial — Prévention — Santé publique — Sécurité sociale — Sida-VIH
Philippe Chastonay
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Médiation
Depuis une trentaine d’années, on assiste dans la grande majorité des pays dits “ industrialisés ”, à un développement de la médiation comme mode de gestion des conflits et ceci dans tous les domaines de la vie sociale : la famille, le quartier, le travail, l’école… Ce renouveau de la médiation s’inscrit dans un contexte de crise des lieux traditionnels de régulation des conflits, comme la justice qui connaît de plus en plus de difficultés à gérer les flux judiciaires, ce qui explique que la médiation soit souvent assimilée à une forme d’alternative à la justice. C’est aux États-Unis, et surtout dans les pays anglo-saxons que les alternatives à la justice, comme la médiation, l’arbitrage, la conciliation mais aussi des formes hybrides comme les mini-trials, ont connu un plus grand développement que dans les pays latins, comme la France. Ces différences s’expliquent par un certain nombre de facteurs socio-culturels comme les formes d’intégration sociale (modèles universalistes et différentialistes), les rapports entre État et société civile (place de la loi et de la négociation), les conceptions du droit (droit écrit et commun law)…
Au delà de ces différences, la médiation représente dans l’ensemble des pays, un modèle plus consensuel et négociatoire de régulation des litiges. On peut définir ce mode de gestion des conflits, comme un processus le plus souvent formel par lequel un tiers impartial, le médiateur, tente à travers l'organisation d'échanges entre les parties de leur permettre de confronter leurs points de vue et de rechercher avec son aide une solution au conflit qui les oppose. Dans l’ensemble des pays, le champ de la médiation est traversé par différentes logiques : logiques institutionnelles et sociétales, logiques professionnelles et bénévoles, logiques communicationnelles et instrumentales. Ce sont les médiations institutionnelles qui dominent le mouvement de la médiation avec en premier lieu les médiations judiciaires que ce soit dans le domaine civil (médiation familiale, travail…) ou pénal (médiation pénale) ; en second lieu, on trouve les médiations mises en œuvre par les organisations administratives (médiation dans les établissements scolaires, santé…), les organisations privées (médiation dans les assurances, les banques,…). Les médiations sociétales, comme la médiation de quartier ou scolaire, créées par des associations et faisant appel à des bénévoles, demeurent dans l’ensemble des pays, un phénomène minoritaire.
Au fil des années, on assiste à une professionnalisation de plus en plus grande des médiateurs surtout dans le domaine de la médiation familiale et des affaires avec des durées de formation s’élevant à 30 jours, avec la création de diplôme universitaire de médiation, comme le master européen de médiation. Il existe aussi une forme d’instrumentalisation de la médiation, de la part des pouvoirs publics pour tenter de désengorger l’appareil judiciaire, pour lutter contre le sentiment d’insécurité, ou encore des organismes privés qui utilisent la médiation comme un moyen de fidélisation de leur clientèle. A coté de ces logiques instrumentales, coexistent des projets de médiation reposant sur des logiques plus communicationnelles, basés sur la réappropriation par les personnes du pouvoir de gérer leur conflit, sur une vision transformative des rapports entre individus et plus largement sur une recomposition des rapports entre états et société civile.
Le développement de la médiation suscite aussi des critiques, de la part de ceux qui voient dans ce mode de règlement des litiges, une nouvelle forme de contrôle social, une promotion de l’idéologie de l’harmonie sociale. Si la médiation suscite des débats, on ne doit pas oublier que dans l’ensemble des pays, la médiation demeure un phénomène minoritaire et qu’elle relève d’une contre-culture face à la tendance actuelle à la juridiciation et judiciarisation des relations sociales.
R. J.-P. Bonafé-Schmitt, J. Dahan, J. Salzer, M. Souquet, J.-P. Vousche, Les médiations, la médiation, Erès-trajets, 1999, p. 302. — M. Guillaume-Hofnung, La médiation, PUF, Que Sais-Je ? No 2930, Paris, p. 128.
Site Internet : http//www.amely.ifrance.com/amely
Voir : Médiation culturelle — Médiation familiale
Jean-Pierre Bonafé-Schmitt
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Médiation culturelle
L'expression médiation culturelle prête à de multiples interprétations. Entend-on “médiation-conflit” ou “médiation-rencontre”? En France, la première acception est la plus prisée : le médiateur culturel intervient dans son quartier pour y réguler les conflits. En Suisse, la seconde est davantage valorisée. La médiation culturelle est alors conçue comme une des modalités de l'interprétariat dans les domaines de la santé, du social et de l'éducation : les personnes allophones nécessitent certes de pouvoir s'exprimer dans leur propre langue, mais la compréhension du sens des messages échangés ne peut faire fi des contextes culturels des partenaires.
En Suisse, la première formation d'envergure d'interprètes-médiateurs culturels a été organisée en 1996 par Appartenances. En 1999 a par ailleurs été fondée l'association suisse pour la promotion de l'interprétariat et de la médiation culturelle, Interpret' , qui cherche aussi à faire reconnaître leur statut.
R. J.-C. Métraux, S. Alvir, L'interprète : traducteur, médiateur culturel ou co-thérapeute, Interdialogos, Neuchâtel, (2), 1995, pp. 22-26. — R. Weiss, R. Stuker, Interprétariat et médiation culturelle dans le système de soins, Rapport de recherche No 11 du Forum suisse pour l'étude des migrations, Neuchâtel, 1998.
Site Internet : www.appartenances.ch
Voir : Médiation — Interculturalité — Entraide
Jean-Claude Métraux
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Médiation familiale
La Médiation familiale est un processus volontaire de règlement amiable et équitable des conflits familiaux, principalement à l’occasion de séparation et divorces. Ce processus est caractérisé par l’intervention confidentielle d’une tierce personne neutre et qualifiée : le médiateur.
Sa mission est d’écouter, d’apaiser les passions, d’éclaircir les prétentions respectives, de rétablir le dialogue, de donner les moyens aux personnes de trouver par elles-mêmes des solutions concrètes, satisfaisantes pour chacun et s’inscrivant dans le cadre légal.
Objectifs :
Maintenir les liens de parentalité au-delà de la séparation ou du divorce, rétablir une communication satisfaisante et constructive, favoriser la responsabilisation et l’autonomie des partenaires.
La médiation permet aux enfants de préserver des relations harmonieuses avec leurs deux parents, que ceux-ci soient mariés ou non, au-delà de la séparation. Cet objectif est atteint en donnant aux adultes les moyens de traiter concrètement, dans un climat de respect et de coopération, d’une partie ou de l’ensemble des conséquences de leur nouvelle situation et en leur permettant de résoudre eux-mêmes leurs conflits.
Lieux de pratiques de la médiation familiale :
L’association suisse pour la médiation ASM peut fournir la liste des associations cantonales. (tél. 041 342 17 63, fax 041 340 35 72)
AVMF Association vaudoise pour la médiation familiale
Sites Internet : www.lausanne-famille.ch/divers/med-fam/ — www.ikb.vsnet.ch/default.htm
Voir : Divorce — Famille — Famille monoparentale — Médiation
Alain Renaud
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Médicaments essentiels
Les médicaments essentiels sont ceux qui satisfont aux besoins de la majorité de la population en matière de soins de santé; ils doivent donc être disponibles à tout moment en quantité suffisante et sous la forme pharmaceutique appropriée. Le choix de ces médicaments dépend de nombreux facteurs, tels que la prévalence locale des maladies, les moyens matériels de traitement, la formation et l'expérience du personnel disponible, les ressources financières, ainsi que les facteurs génétiques, démographiques et environnementaux. La liste arrêtée par le Comité d'experts de l'OMS compte désormais 306 médicaments contre 208 à l'origine, il y a 20 ans. 166 nouveaux produits ont été ajoutés à la liste, alors que 68 produits initiaux ont disparu. Chaque médicament choisi doit être disponible sous une forme dont la qualité peut être garantie; sa stabilité dans les conditions prévues de stockage et d'utilisation doit être démontrée. La liste OMS est un modèle qui guide les pays et les services de santé dans l'établissement de leurs propres listes nationales et locales. Le concept a fait l'objet d'une diffusion et d'une promotion intenses au niveau national. Ces 20 dernières années, la liste modèle de l'OMS s'est affirmée comme un outil inestimable pour sauver des vies et améliorer la santé grâce à un usage plus rationnel des médicaments, un meilleur accès aux médicaments et une meilleure qualité.
Voir : Droit à la santé — Médicaments génériques
Jacques Martin
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Médicaments génériques
Médicaments qui imitent une préparation et une prescription originales tant dans leur substance active, leur forme que leur dosage et qui peuvent remplacer les spécialités originales. Il s'agit habituellement de préparations dont la formule est tombée dans le domaine public. D’abord vus d'un mauvais œil et délaissés par les grandes compagnies pharmaceutiques, les médicaments génériques commencent aujourd’hui à être produits par ces mêmes entreprises multinationales. Dans un pays comme la Suisse, les génériques sont meilleur marché à hauteur de 25 % en moyenne. S’ils étaient utilisés aussi souvent que possible à la place des originaux, une économie substantielle, estimée en Suisse à plusieurs centaines de millions de francs, serait réalisée chaque année dans les dépenses de santé. Contrairement à la contrefaçon (par exemple de médicaments encore couverts par un brevet) qui peut parfois poser des problèmes de qualité et de sécurité, le médicament générique est éprouvé et, de ce fait, sûr. L'accès aux coûteux médicaments anti-rétroviraux (ART) nécessaires à la survie des personnes vivant avec le VIH-sida a relancé le débat sur les médicaments génériques, leur production, le droit éventuel à une production locale ou à une distribution s'affranchissant des règles de l'OMC ou faisant référence aux exceptions prévues par les accords TRIPS.
Voir : Coûts de la santé
Jacques Martin
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Ménage àð Consommation (Unité de)
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Ménages collectifs
En démographie, le ménage est une unité de résidence. On distingue les ménages privés de ménages collectifs. Les premiers sont subdivisés en ménages d une personne, ménages familiaux et non familiaux. Les ménages familiaux comprennent un noyau familial formé au moins d'un couple ou d'un binôme parent – enfant. Les ménages collectifs ne doivent pas être confondus avec les ménages privés complexes pouvant regrouper plusieurs noyaux familial ou des unités familiales avec des tiers. Sous la dénomination de ménage collectif sont regroupées toutes les formes de résidence en institution. Ils représentent moins d'un pour cent de l'ensemble des ménages (0,6 % en 1990). La proportion de personnes vivant en institution a décliné (-6,8 % entre 1970 et 1990) mais le nombre de ménages collectifs s'est considérablement accru (+65% entre 1970 et 1990) parallèlement à une réduction de la taille moyenne des institutions (23,6 à 13,3 personnes durant la même période). Plus de la moitié des personnes vivant en ménages collectifs résident dans des homes ou établissements hospitaliers (31 % et 23 % des personnes vivant en ménages collectifs); à peine une sur dix dans un internat (8 %, comme aussi celles vivant à l'hôtel). Près d'un quart des personnes vivant dans des ménages collectifs ont 80 ans ou plus (23 %), près d'un tiers ont au moins 70 ans (32 %). La proportion des personnes âgées vivant en institution est en légère progression (7,0 % en 1970 et 8,4 % en 1990). Le nombre de seniors vivant en institution est devenu supérieur à celles vivant dans des ménages complexes : alors que, en 1970, pour dix personne de 65 ans ou plus en institution, on en trouvait 34 dans un ménage complexe, vingt ans plus tard on n’en trouvait plus que huit.
R K. Lüscher, R. Thierbach, J. Coenen-Huther, M.-F. Goy, Ménages et familles pluralité des formes de vie. Statistiques de la Suisse, RF 1990, OFS, Berne, 1996. — Ménages et familles. Tableaux thématiques, RF 1990, OFS, Berne, 1993. — C. Sauvain-Dugerdil, N. Kalmykova, H.G. Gu, G. Ritschard, M. Olszak, H.-M. Hagmann, Vivre sa vieillesse en Suisse. Les transformations des modes de résidence des personnes âgées, European Journal of population, 13 : 169-212, 1997.
Voir : Démographie — Famille — Home/Établissement médico-social (EMS)  Vieillissement de la population
Claudine Sauvain-Dugerdil
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Mères de jour àð Enfance (Pédagogie de la petite)
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Mesures d'insertion sociale (MIS)
Les mesures d insertion sociale sont destinées aux personnes n'ayant pas accès aux mesures d'insertion professionnelle et auxquels une aide personnalisée est proposée afin de les inciter à poursuivre deux objectifs indissociables : renforcer leurs compétences sociales et développer leurs liens sociaux. Ces mesures ne préparent pas directement à une insertion sur le marché du travail mais visent un développement personnel et socio-relationnel pour aménager un ultérieur retour à une activité rétribuée. L’insertion sociale est donc conçue comme un préalable à l’insertion professionnelle.
En vigueur depuis le 1er janvier 2000 dans le canton de Fribourg les MIS sont des moyens supplémentaires dont l'aide sociale a été dotée dans le but de promouvoir l'autonomie et l'insertion des bénéficiaires d'une aide matérielle. Ces mesures sont complémentaires d'autres mesures cantonales visant l'insertion professionnelle (ex. les programmes d'emplois qualifiants, PEQ) et avec lesquelles elles forment le dispositif général conçu pour venir en aide aux personnes durablement exclues du marché du travail. La coordination entre ces deux volets de l’insertion est assurée par une convention de collaboration entre les offices régionaux de placement et les services sociaux régionaux. Des commissions paritaires peuvent être appelées à statuer en cas de divergences.
La participation à une MIS a valeur de contre-prestation dans le contrat d’insertion sociale établi entre le/la bénéficiaire et l’autorité d’aide sociale qui, en échange, fournit une aide matérielle non remboursable, accorde un montant incitatif (dont la valeur fixée par le Conseil d’État s’élève à Fr. 100.- par mois en 2001), prend en charge les frais d’organisation de la MIS et assure un accompagnement social.
Les MIS se ventilent en une grande variété d’activités choisies pour répondre aux besoins individuels et offrir des solutions sur-mesures aux bénéficiaires pour réaliser leur projet d’insertion. L’organisation de ces activités est assumée par des organismes tiers, indépendants de l’aide sociale, qui interviennent en qualité d’agents d’insertion. Ces organismes servent de médiation aux bénéficiaires pour renforcer leur participation à la collectivité et valoriser leurs ressources. La durée maximale d’engagement dans une MIS est de 12 mois.
Les services sociaux régionaux accompagnent et gèrent la démarche insertionnelle avec chaque bénéficiaire. Le Service social cantonal valide les MIS et coordonne le dispositif d’insertion sociale soumis à une évaluation une fois par législature.
R. Loi sur l'aide sociale du 14.11.1991(LASoc). — Règlement d’exécution du 30.11.1999 de la loi sur l’aide sociale (RELASoc). — Concept d’application MIS/LASoc émis par la Direction de la santé publique et des affaires sociales du canton de Fribourg, nov. 1999. — Catalogue MIS, mise à jour permanente depuis novembre 1999. — J.-C. Simonet, Distinction entre l’insertion sociale et professionnelle : point de vue du canton de Fribourg suite aux modifications de la LASoc, actes de la journée ARTIAS / CSIAS du 11 avril 2000.
Voir : Aide sociale — Contre-prestations — Insertion.
Jean-Claude Simonet
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Mesures de fécondité
La fécondité (ou l'infécondité), qui se rapporte aux résultats, est à distinguer de la fertilité (ou la stérilité) qui concernent la capacité de donner le jour à des enfants vivants. En anglais, le sens est inverse, la fécondité se traduit par “ fertility ” et la fertilité par “ fecundity ”. Trois ensembles de mesures sont utilisés en démographie : la fécondité se rapporte au nombre d'enfants par femme, la natalité désigne la fréquence des naissances (vivantes) dans une population, et la reproduction se réfère au processus de renouvellement des générations. Les deux derniers s'expriment généralement en taux bruts, qui suppose la mortalité nulle jusqu'à la fin de la période reproductive. La fécondité dépend du comportement procréateur des couples, décrit par ce qui a été dénommé les déterminants proches, en particulier l'âge à la maturité sexuelle et à l’entrée dans la vie de couple, la fréquence des rapports sexuels, la durée des intervalles génésiques et le recours aux méthodes contraceptives.
R. L. Henry, Dictionnaire démographique multilingue, Vol. français. UIESP, Ordina, Liège, 1981. — R. Matos et coll., Population et développement. Lexique multilingue de termes démographiques, DDC, Berne, sous presses — G. Tapinos, Eléments de démographie, A. Colin, Paris, 1985.
Voir : Santé de la reproduction — Taux de fécondité et taux de natalité — Taux de reproduction
Claudine Sauvain-Dugerdil
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Mesures de sûreté
Les mesures de sûreté sont des sanctions pénales, dont la Suisse n’a pas l’exclusivité, mais qui ont connu un développement législatif particulier dans ce pays. Elles consistent à soumettre à une prise en charge, le plus souvent un traitement de type médical, psychologique ou socio-éducatif, des individus au motif qu’ils ont commis une infraction. La réponse pénale ne se présente ainsi pas sous forme d’un mal, comme c’est le cas pour les peines, mais sous celle d’une prise en charge sous contrainte.
Un peu plus de mille mesures de sûreté sont ordonnées chaque année en Suisse. La clientèle visée comprend en premier lieu des toxicomanes, puis des personnes atteintes d’affections mentales, des alcooliques, des “ jeunes adultes ” (18-25 ans) souffrant de désordres de la personnalité et, enfin, les multirécidivistes (désuète, la mesure ne s’applique pratiquement plus à cette population).
Il existe un fossé entre, d’une part, les intentions affichées par le législateur et que l’on peut lire dans la loi et d’autre part la réalité. Les “ établissements appropriés ” font souvent défaut, ainsi que les moyens mis à disposition pour le traitement. Cela est particulièrement vrai pour les délinquants “ mentalement anormaux ” (art. 43 Code pénal), déclarés dangereux au moment de leur jugement ; ils séjournent le plus souvent en prison. La situation est meilleure pour les personnes atteintes d’affections mentales mais déclarées non dangereuses, ainsi que pour les toxicomanes, catégories de condamnés pour lesquelles existent, au moins, des établissements.
Se développe de plus en plus, dans le cadre des mesures de sûreté, une prise en charge beaucoup plus légère que l’internement, sous la forme du traitement ambulatoire qui maintient le condamné en liberté et l’oblige à se soumettre à un traitement régulier en milieu hospitalier ou auprès d’un thérapeute privé.
R. P. Albrecht, Die allgemeinen Voraussetzungen zur Anordnung freiheitsentziehender Massnahmen gegenüber erwachsenen Delinquenten, Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1981. — Catalogue des établissements destinés à l’exécution des peines, des mesures et de la détention préventive en Suisse, Offices de la justice et de la statistique, Berne, 1995.
Voir : Contrôle social — Sanctions pénales — Prison (Privation de liberté) — Privation de liberté à des fins d'assistance
Robert Roth
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Mesures médicales de réadaptation àð Réadaptation (Mesures de)
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Midlife crisis
Expression désignant la crise du   milieu de la vie  ; peut être causée par la prise de conscience que des désirs anciens n'ont pas pu être réalisés, ou que la réalisation des ambitions professionnelles n'apporte pas ce qu'on avait imaginé.
François Höpflinger
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Migration
Les mouvements de population d'un espace à l'autre sont un phénomène “ courant ” de la nuit des temps jusqu'à aujourd'hui.
Les phénomènes suivants président à l'émergence et la consolidation des migrations :
— les disparités entre lieux d'origine et d'immigration : cela est particulièrement évident dans les migrations économiques, déterminées par des facteurs push-pull, qui poussent les émigrants à quitter leur pays et les attirent vers les pays d'immigration. Les disparités peuvent toutefois être aussi d'ordre politique, les lieux concernés étant différents quant au niveau de sécurité pour les habitants, défini par le degré de respect des droits humains.
— le développement des réseaux et des institutions des communautés migrantes : les réseaux connectent les migrants du passé aux migrants actuels et potentiels ainsi que ceux qui ne migrent pas, facilitant la formulation et la réalisation des projets migratoires.
— les régimes migratoires : le corpus de lois nationales et internationales, de régulations diverses et d'institutions qui régissent les mouvements de personnes.
Le phénomène migratoire intéresse la Suisse depuis fort longtemps, d'abord sous la forme d'émigration : ce sont les mercenaires qui quittent le pays et plus tard les colons qui migrent vers les Amériques. En 1888 le solde migratoire, positif jusque là, se renverse : les entrées d'étrangers sont plus nombreuses que les sorties des ressortissants helvétiques. En 1914 la population étrangère immigrée atteint le 14 % de la population résidante en Suisse. Le recul de la période entre les deux guerres fait suite une nouvelle immigration massive : la proportion d'étrangers parmi les résidants passe de 5 % en 1949 à 15 % en 1965. Les autorités s'efforcent dès lors de limiter le nombre d'étrangers sous la pression des milieux xénophobes - qui lancent des nombreuses initiatives visant à contrer “ l'emprise étrangère ” - tout en répondant aux besoins de l'économie.
Aujourd'hui la proportion d'étrangers sur la population résidante se monte à 19 %, alors que la main-d'œuvre étrangère représente le 25 % des travailleurs en Suisse.
Aux migrations traditionnelles provenant des pays limitrophes se sont progressivement ajoutés les flux en provenance d'Espagne, du Portugal, de Yougoslavie et de Turquie. Depuis les années 80, ont gagné en importance les demandeurs d'asile qui fuient des situations de conflit armé ou de tensions politiques aiguës. A cause de la proximité géographique des zones de guerre et de la présence d'effectifs importants de compatriotes, actuellement deux demandeurs d'asile sur trois viennent des Balkans.
R. P. Dewitte (Éd.), Immigration et intégration. L'état des savoirs, Ed. La Découverte, Paris, 1999. — H.-R. Wicker, J.-L. Alber, C. Bolzman, R. Fibbi, K. Imhof, A. Wimmer, L'altérité dans la société : migration, ethnicité, État, Seismo, Zurich, 1996.
Site Internet : www.unine.ch/fsm
Voir : Asile (Requérant d') — Étrangers (Politique à l'égard des) — Immigration — Xénophobie
Rosita Fibbi Carton
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Migrations (Politique des)
Les migrations constituent un transfert passager ou durable du domicile au-delà des frontières. Elles n’englobent pas seulement l’immigration mais également l’émigration. Les migrants sont tout à la fois constitués de réfugiés, de personnes séjournant illégalement, d’individus admis à titre provisoire ainsi que de personnes détentrices d’un titre de séjour. Dans le cas de la Suisse, cette dernière catégorie recouvre aussi bien les personnes au bénéfice d’un permis de courte durée, d’un permis à l’année (B), les saisonniers (A), les personnes au bénéfice d’un permis d’établissement (C) sans oublier les diplomates, les rentiers, les étudiants ou les écoliers. La politique migratoire regroupe donc l’ensemble des objectifs, des moyens et des mesures qui ont une incidence sur les migrations et leurs conséquences. Elle recouvre quatre phases distinctes du processus de migration qui sont respectivement la politique d’admission, d’intégration, le renvoi et le rapatriement et, finalement, la politique extérieure en matière de migration.
En matière d’admission, de nombreuses critiques ont été adressées à l'encontre de la politique migratoire helvétique. Elles se sont en particulier focalisées sur le système des multiples permis de travail adopté par la Suisse. La politique migratoire helvétique a contribué en particulier à retarder des ajustements structurels pourtant indispensables en offrant à certaines activités une main-d’œuvre immigrée abondante et bon marché. En soutenant des branches intensives en travail peu qualifié, elle a aidé des secteurs qui ne constituent pas, à long terme, des domaines où la Suisse possède un avantage comparatif. De surcroît, d'un point de vue conjoncturel, la politique migratoire a accentué l’ampleur des cycles économiques traversés par notre pays, notamment dans les années 70. A ce propos, il faut rappeler que lors de la première crise pétrolière, le PIB helvétique a connu un recul largement supérieur à celui des autres pays de l’OCDE. Cette différence s’explique, en partie du moins, par le départ forcé de travailleurs étrangers qui a eu des conséquences néfastes pour les investissements et la consommation en Suisse, déprimant encore un peu plus la conjoncture économique domestique. Surtout, la politique migratoire a échoué du point de vue de l’intégration de la main-d’œuvre étrangère. Cet échec résulte du fait que le système d’immigration a été bâti sur un modèle de rotation des travailleurs qui a longtemps fait illusion. Dans ce modèle, la main-d'œuvre immigrée était supposée rester quelques années seulement sur le territoire helvétique avant de retourner dans son pays d'origine. Dans la réalité, les travailleurs étrangers sont arrivés en Suisse avec des statuts temporaires (saisonniers ou annuels) qui ont été progressivement transformés en permis d’établissement sans qu’aucun effort d’intégration n’ait été consenti à leur égard. Lorsque ces personnes perdent aujourd'hui l’emploi pour lequel elles étaient venues dans notre pays, leurs chances de réinsertion sont souvent très minces. On s’aperçoit alors soudain que leur maîtrise d’une langue nationale est déficiente et que leurs qualifications ne favorisent pas une mobilité professionnelle souvent indispensable pour retrouver un emploi. Il n’est dès lors pas surprenant de constater que le taux de chômage de la population étrangère soit actuellement trois fois plus élevé que celui de la population suisse.
Voir : Asile (Requérant d') — Chômage — Consommation — Étrangers (Politique à l'égard des) — Inégalités et discriminations salariales — Intégration — Marché du travail — Migration — Salaires
Yves Flückiger
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Mineurs (Droit pénal des)
Il est contenu pour l’essentiel dans les art. 82 à 99 du Code pénal suisse (mais voir aussi art. 369 à 373 CPS + OCP 1 + ord. sur le casier judiciaire). Le droit matériel est fédéral, mais la procédure et l’organisation judiciaire sont de la compétence des cantons. Depuis la votation populaire du 14.3.2000 (acceptation d’une unification de la procédure), le chantier d’un “ code de procédure pénale ” unifiée pour les mineurs est ouvert.
En Suisse, tous les cantons connaissent des instances spécialisées. Cependant, les systèmes diffèrent et se rattachent à deux grands modèles, le modèle “ Juge des Mineurs ” en Suisse romande et Berne, et le modèle “ Jugendanwalt ” en Suisse alémanique et Tessin. L’intervention de l’instance judiciaire se fait sur un modèle médical et se base sur le principe de l’unité du traitement (ou cumul des fonctions judiciaires) qui permet à un même autorité d’intervenir aux 3 phases de l’action judiciaire (instruction, jugement et exécution). L’exécution des sanctions est primordiale et offre la possibilité, par le biais de la modification de la mesure (art. 86 et 93 CPS), d’adapter en tout temps la réponse aux besoins individuels du mineur.
Ce droit ne s’applique qu’aux mineurs ayant commis des infractions aux lois pénales ; il ne s’applique pas aux situations de mineurs en danger ou d’enfants victimes qui relèvent des autorités tutélaires ou des services de protection de la Jeunesse.
Le seuil inférieur d’intervention se situe à 7 ans et le seuil supérieur à 18 ans ; entre ces deux limites, une césure à 15 ans, qui marque la différence entre les enfants (7-15 ans) et les adolescents (15-18 ans). Les moins de 7 ans ne sont pas des sujets pénaux (= irresponsabilité absolue) ; les enfants sont en régime de responsabilité relative (art. 82 à 88 CPS) ; de même que les adolescents, pour qui cependant l’amende et la détention de 1 jour à 1 an sont possibles (art. 89 à 99 CPS). À 18 ans révolus, fin du traitement spécifique et majorité pénale. Le moment déterminant est celui de la commission de l’infraction. Pour les problèmes de compétences lorsque des infractions ont été commises à cheval sur la limite des 18 ans, voir l’Ordonnance relative au code pénal suisse (RS 311.01), art.1.
Le droit pénal des mineurs se différencie du droit pénal ordinaire par ses objectifs qui sont éducatif (faire prendre conscience de la loi et de ses effets), curatif (soigner les causes), préventif (prévention spéciale secondaire et tertiaire, soit éviter la récidive et la délinquance chronique), d’intégration sociale (permettre l’insertion) et protecteur (soit vis-à-vis de l’auteur lui-même, victime d’une situation pathogène, soit vis-à-vis de la société). La prévention dont il est question est une prévention spéciale, soit basée sur la personne de l’auteur et non la prévention générale du droit des adultes.
Le droit pénal des mineurs s’appuie avant tout sur le principe de l’individualisation (Täterrecht) et fait appel en priorité à des mesures éducatives (art. 84 à 86 et 91 à 94bis CPS) où l’accent est mis sur le soin ; elles peuvent être ambulatoires (assistance éducative, traitement spécial) ou résidentielles (placement familial, placement institutionnel, traitement spécial institutionnel). Les mesures priment les punitions disciplinaires des art. 87, 95 et 96 CPS (principe du monisme judiciaire : pas de cumul entre mesures et peines). Les punitions doivent elles aussi revêtir un contenu éducatif. À noter les réponses importantes sous forme de travail d’intérêt général, cours d’éducation divers (LCR, santé) et la médiation-réparation, développée par les praticiens. La privation de liberté reste l’exception (cf. Statistiques de l’OFS, dès 1984).
Le droit actuel est soumis à une révision. Un projet d’une “ Loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs ” a été présenté par le Conseil fédéral et est soumis au Parlament actuellement. Ce projet reste dans l’optique d’un droit éducatif et de protection, mais consacre l’idée d’une loi indépendante, adaptée aux exigences des conventions internationales et des droits de l’enfant.
R. M. Boehlen, Kommentar zum schw. Jugendstrafrecht, Stämpfli, Berne, 1975. — M. Stettler, Condition pénale des jeunes délinquants, Georg, Genève, 1980. — Projet de Loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs, message du 21.9.1998 (98.038).
Sites Internet : www.ikb.vsnet.ch/default.htm — www.childsrights.org
Voir : Déviance — Éducateur spécialisé — Peines restrictives de droits (Peines de substitution) — Travail d’intérêt général
Jean Zermatten
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Minima sociaux
En Suisse, il n’y a pas de montant minimum d’existence officiel. On trouve par contre différentes limites de revenus, définies de manière conventionnelle et politique, qui constituent des minima vitaux ou sociaux de nature et de portée différentes. Chacun se réfère à un cadre légal différent et définit un cercle d’ayants droit particulier. Ces minima sont des seuils d’intervention sociale, et constituent deux ensembles.
a) Minima visant à compléter ou suppléer un revenu insuffisant par un versement en espèces, présents notamment dans : les prestations complémentaires à l’AVS/AI, les législations cantonales ou communales régissant les régimes d’aide sociale et de revenus minimums, les recommandations en matière d’aide sociale de la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS), les normes d’assistance aux requérants d’asiles et personnes admises provisoirement, les dispositions cantonales régissant l’octroi de bourses d’études ou d’apprentissage.
b) Minima visant à ne pas entamer le revenu considéré comme minimum vital et/ou à libérer les personnes ou ménages concernés de certaines charges fixes, notamment : le “salaire insaisissable” (minimum vital) de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, les limites de revenus d’exemption d’impôts, donnant droit aux subsides de la LAMal (la loi sur l’assurance-maladie) ou à l’octroi de logements à loyer subventionné.
Le droit des personnes est fondamentalement catégorisé, du fait que chaque norme cible son propre groupe de bénéficiaires ou d’ayants droit en fonction de critères particuliers : le statut légal, l’âge et surtout les causes de l’impécuniosité (vieillesse, endettement, invalidité, asile, chômage non indemnisé, sous-rémunération).
D’un point de vue conceptuel, les minima vitaux des législations fédérales, cantonales ou communales recouvrent une définition et des objectifs communs : il s’agit pour chacun d’eux de garantir le pouvoir d’achat minimum absolument nécessaire à la satisfaction des besoins essentiels pour préserver un mode de vie respectant la dignité humaine. Ce pouvoir d’achat minimum est considéré comme incompressible. En ce sens, le minimum vital social pose une limite en dessous de laquelle on considère qu’il y a exclusion des modes de vie minimaux acceptables, tant par rapport à des ressources matérielles que par rapport à des ressources culturelles et sociales.
A l’heure actuelle, il n’existe aucune coordination entre les minima sociaux : la multiplicité et les différences des barèmes appliqués impliquent de facto de grandes différences de traitement, notamment en termes d’écart entre les niveaux de vie garantis, qui sont parfois très importants (par ex. entre les PC AVS/AI et le minimum vital des requérant-e-s d’asile). Ces différences et les discriminations qui en découlent sont essentiellement dues à une absence de considération du minimum vital en tant qu’objet de politique sociale en soi, qui serait transversal aux dispositions de sécurité sociale.
R. H. Gropetti, C. Regamey, Minimum pour vivre, Étude de diverses normes, Association des Centres sociaux protestants, Ed. La Passerelle, Lausanne, 1999.
Voir : Conférence suisse des institutions d'action sociale (CSIAS) — Minimum vital — Normes CSIAS (Conférence suisse des institutions d'action sociale) — Pauvreté (Seuil de)
Caroline Regamey
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Minimum d’existence (Droit au)
On reconnaît généralement qu’il existe un droit non écrit au minimum d’existence en Suisse. La jurisprudence du Tribunal fédéral l’a confirmé dans un arrêt de 1995. Elle a considéré que la satisfaction de besoins élémentaires de la personne humaine, tels que se nourrir, se vêtir, et disposer d’un abri, représentait la condition même de l’existence humaine et du développement de la personne, et que cette satisfaction constituait ainsi un élément indispensable d’un état de droit démocratique. La nouvelle Constitution prévoit une sorte de minimum vital (art. 12).
Pour la mise en œuvre de ce principe général, les modalités pratiques sont laissées à l’initiative des cantons et des communes. De récentes tentatives d’unifier le droit au niveau fédéral ont rencontré une forte résistance dans les cantons. Le débat reste cependant ouvert et la situation peut évoluer rapidement en fonction de l’ampleur des besoins et du nombre des personnes concernées.
R. R. Leu, S. Burri, T. Priester, Lebensqualität und Armut in der Schweiz, Haupt, Berne, 1997. — P. Farago, Prévenir et combattre la pauvreté. Forces et limites des mesures prises par l’État, OFAS, Berne, 1995.
Voir : Aide sociale — Minima sociaux — Minimum vital — Normes CSIAS — Pauvreté (Seuil de)
jpf
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Minimum vital
Biens et services indispensables à l’existence. Le minimum vital est généralement exprimé en termes monétaires : un revenu minimum permettant l’acquisition de ces biens et services. Originairement défini en tant que “minimum biologique” (minimum de calories, nourriture, vêtements, chauffage…), il est aujourd’hui conçu comme un “minimum social”, permettant un style de vie, certes très modeste, correspondant toutefois aux normes de consommation, de dotation de ressources et de participation à la vie sociale courante dans un pays et une époque donnés (logement, couverture des frais de maladie, téléphone, transports, culture et information…). Impossible à déterminer “scientifiquement”, le minimum vital est établi par des experts (ex. : directives de la CSIAS) ou par le processus de décision politique (ex. : PC de l’AVS/AI).
R. C. Régamey, H. Gropetti, Minimum pour vivre. Étude de diverses normes, Association des Centres sociaux protestants, Éditions La Passerelle, Lausanne 1999. — R. Leu, S. Burri, T. Priester, Lebensqualität und Armut in der Schweiz, Haupt, Berne, 1997.
Voir : Minima sociaux — Normes CSIAS — Pauvreté (Seuil de)
Martino Rossi
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Minimum vital (Garantie du)
Dispositif unique ou ensemble de mesures ayant une base légale garantissant aux individus et aux ménages l’acquisition du minimum vital. En Suisse, le droit au minimum vital (en espèces et /ou nature) pour toute personne qui ne peut pas être économiquement autosuffisante a été inscrit dans la nouvelle Constitution fédérale (art. 12).
R. I. Meier, P. Zweifel, C. Zaborowski, I. Jent-Sörensen, Lohnpfändung : optimales Existenzminimum und Neuanfang ? Eine rechtliche und ökonomische Analyse der Einzelwangsvollstreckung gegen Privatpersonen in der Schweiz mit Erarbeitung von Reformvorschlägen, Schulthess Verlag, Zürich, 1999. — M. Rossi, E. Sartoris, Ripensare la solidarietà, IRE/Dadò editore, Bellinzona/Locarno, 1995 (édition allemande : Solidarität neu denken, Seismo Verlag, Zürich, 1996).
Voir : Minima sociaux  Minimum vital  Impôt négatif  Revenu (Garantie du)  Revenus (Transfert des)
Martino Rossi
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Misère àð Pauvreté (Seuil de)
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Mobilité intergénérationnelle
Ascension ou baisse sociale entre générations (d'une même famille). On parle d'ascension intergénérationnelle lorsque les fils/filles atteignent un statut social plus élevé que leurs parents, de baisse intergénérationnelle lorsque le statut des enfants est inférieur à celui de leurs parents.
François Höpflinger
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Modes de vie
Façons particulières de vivre ensemble des pratiques sociales et culturelles, repérables au niveau de l’individu, du groupe, de la société. Apparemment, au fur et à mesure de l’élévation du niveau de vie, les modes de vie se diversifient. Cet état de fait entraîne des conséquences majeures pour l’organisation et le fonctionnement des politiques sociales. Si les systèmes de sécurité sociale ne sont pas adaptés aux modes de vie, il peut en résulter d’importants dysfonctionnements. Ces phénomènes ont été analysés en Suisse dans le cadre du Programme national de recherche No 29 “ Changements des modes de vie et avenir de la sécurité sociale ”. De nombreux auteurs ayant collaboré à ce dictionnaire ont conduit des travaux sur les divers thèmes retenus dans ce programme.
R. J.-H. Sommer, S. Schütz, Changements des modes de vie et avenir de la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1997.
Voir : Mode de vie (Changement des) — Programme national de recherche No 29
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Modes de vie (Changements des)
Les individus et/ou les groupes sociaux vivent leur quotidien sous des formes fort différentes. Ces manières de gérer la vie peuvent être désignées par la notion de “ modes de vie ”. Dans ce contexte, on parle de changements lorsque l’on voit apparaître, à côté des modes de vie traditionnels, de nouvelles manières d’organiser son existence.
En Suisse, comme dans d’autres pays industrialisés, on assiste à d’importantes transformations de ces modes de vie, comme nous le suggèrent les exemples suivants :
Évolutions dans le monde du travail
L’apparition des nouvelles technologies, les tendances à la redéfinition de l’organisation du travail, le développement de Travail (Nouvelles formes de) ainsi que des besoins accrus de mobilité, etc., ont donné un autre visage au monde du travail.
Évolutions des rôles de la femme
Les nouvelles aspirations exprimées par les femmes et les efforts qu’elles engagent pour renforcer leur autonomie au plan de la formation et de la vie professionnelle modifient la répartition des rôles dans le mariage et la famille.
Évolutions des structures familiales
On observe aujourd’hui l’existence de multiples manières de vivre au sein d’une cellule familiale. Pour différentes raisons, individuelles ou sociales, la répartition des tâches entre la famille et l’environnement social s’est modifiée. Partant, les rôles des agents extérieurs à la famille se sont également transformés.
En outre, on constate une mutation des structures démographiques. Avec l’allongement de l’espérance de vie et le vieillissement général de la population, la perception du rôle des personnes âgées s’est modifiée à tel point que l’on parle aujourd’hui du “ quatrième âge ”. À cela s’ajoute une diminution de la proportion des enfants et des jeunes dans la population.
Si ces changements persistent, et c’est vraisemblable voire certain, s’ils touchent l’ensemble de la société, on devra s’interroger sur la compatibilité entre le système de sécurité sociale existant et la réalité des problèmes sociaux induits par ces faits nouveaux. Ainsi, il convient de se demander si le système de sécurité sociale actuel est adapté à la nouvelle configuration des problèmes, et dans quelle mesure les problèmes sociaux et les initiatives à prendre pour les résoudre sont pertinents pour l’ensemble de la société.
R. J.-H. Sommer, F. Höpflinger, Changements des modes de vie et avenir de la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1990. — K. Lüscher, F. Schultheis, M. Wehrspann, Die “ postmoderne ” Familie. Familiale Strategien und Familienpolitik in einer Uebergangszeit, Universitätsverlag, Constance, 1988. — P. Gilliand (Éd.), Familles et solidarité dans une société en mutation, Réalités sociales, Lausanne, 1991.
Voir : Modes de vie — Problèmes sociaux — Famille — Femmes (Émancipation des) — Flexibilité du travail — Travail (Nouvelle formes de)
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Monétarisme
Le monétarisme est une école de la pensée économique. Son idée est que la banque centrale peut modifier la masse monétaire en agissant directement sur la quantité de monnaie en circulation. La banque centrale peut donc contrôler l’inflation par une politique monétaire visant un taux de croissance de la masse monétaire égal au taux de croissance de la production. Cette doctrine est associée aux travaux de M. Friedman, qui dans les années 1950–60 avait proposé l’utilisation d’une règle de politique monétaire en vue d’assurer un taux d’inflation optimal, qui reflète le taux de croissance à long terme du produit national en termes réels. Dans les années 1970–80 le monétarisme a beaucoup influencé les politiques monétaires des pays industrialisés, grâce aussi à l’hypothèse des anticipations rationnelles des agents économiques. De là, la crédibilité des décisions de politique monétaire a gagné en importance dans la lutte contre l’inflation. C’est ainsi que la transparence, l’indépendance et la responsabilité des banques centrales – la triade de la politique monétaire moderne – sont issues de cette école.
R. P. Cagan, “ Monetarism ”, in : The New Palgrave : A Dictionary of Economics, Macmillan, London, 1987. — S. Rossi, Money and Inflation, Elgar, Cheltenham, 2001.
Voir : Banque centrale européenne — Pouvoir d’achat
Sergio Rossi
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Mortalité
La mortalité est l’action de la mort sur la population d’un territoire délimité (pays, canton, commune, etc.). Un taux de mortalité mesure la fréquence des décès ; par ex. un taux annuel brut de mortalité générale est le quotient de l’ensemble des décès observés par l’effectif moyen des habitants, durant l’année ou la période considérée. Des taux et indicateurs spécialisés sont calculés par sexe, groupe d’âges, cause de décès (mortalité infantile : décès d’enfants de moins d’un an ; surmortalité masculine par âge, par accident, etc.). La mortalité différentielle analyse des sous-populations selon des critères d’habitat, de nationalité, d’état civil, de niveau d’éducation, d’appartenance sociale, de revenus, de profession, de modes de vie, etc. Des taux et indices comparatifs tiennent compte des différences de structures (âges, sexe) entre diverses populations (mortalité-type, population-type). Par exemple, en 1999, le taux brut de mortalité générale est de l’ordre de 7 ‰ en Chine et de 9 ‰ en Suisse ; or l’espérance de vie à la naissance en Chine est plus basse qu'en Suisse. Cela provient du fait que le taux de mortalité croît avec l’avance en âge et que le vieillissement de la population helvétique est nettement plus élevé.
R. Annuaire statistique de la Suisse. Mouvement de la population de la Suisse, Office fédéral de la statistique, Berne (chaque année).
Voir : Espérance de vie — Mortalité infantile — Taux de mortalité — Vieillissement de la population
Pierre Gilliand
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Mortalité infantile
Le fait que, aujourd’hui en Suisse, moins de 5 enfants décèdent pour 1000 nouveau-nés reflète les progrès de la médecine : au début du XXe siècle, on comptait encore 150 décès infantiles pour 1000 naissances vivantes. La mortalité infantile est ainsi un indicateur-clé de la santé publique, utilisé par exemple pour l’évaluation du programme Santé pour tous de l’Organisation mondiale de la santé ou pour le calcul des indices du développement humain du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). La valeur prise par cet indicateur traduit le développement social et sanitaire d’un État ou d’une région, et c’est une des raisons de son usage fréquent. Une autre raison est la disponibilité de données dans la plupart des régions du monde permettant le calcul de cet indicateur. En Suisse, des disparités importantes perdurent quant au niveau de mortalité infantile parmi les enfants de femmes classées la nationalité, la catégorie socio-professionnelle ou la région de résidence. Les composantes de la mortalité infantile sont la mortalité néonatale (décès au cours des 4 premières semaines de vie), qui peut être précoce (décès au cours des 6 premiers jours de vie) ou tardive (décès entre le 7e et le 28e jour), et la mortalité post-néonatale (décès entre le 2e et le 11e mois de vie).
R. G. Drack, U. Ackerman-Liebrich, C. Schindler, Mortinatalité et mortalité infantile en Suisse de 1986 à 1992, Office fédéral de la staitstique, Neuchâtel, 1998.
Voir : Espérance de vie — Mortalité — Taux de mortalité
Philippe Wanner
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Mouvement social
La notion de “ mouvement social ” englobe et synthétise les diverses manières d'agir collectivement - manifestations, grèves, mobilisations, formes institutionnelles et non institutionnelles de revendications ou de protestations, groupements, moyens de propagande et d'information - que les acteurs et groupes dominés développent dans la durée pour contester et transformer le modèle de société qu’imposent les classes dominantes et les milieux dirigeants. Tout mouvement social présente une certaine unité qui repose sur les principales caractéristiques suivantes :
— une cohérence “ idéologique ”, un projet de société qui précise ses orientations, ses justifications, qui identifie ses adversaires et qui clarifie ses aspirations ;
— une cohésion sociale, qui donne sens à la solidarité collective et qui imprègne l'identité individuelle de ceux qui y participe
— et une orientation de l'action, qui se manifeste par des formes de luttes et des moyens d'action privilégiés.
R. M. Giugni, Entre stratégie et opportunité : les nouveaux mouvements sociaux en Suisse, Seismo, Zurich, 1995. — E. Neveu, Sociologie des mouvements sociaux, La Découverte, Paris, 1996. — F. Passy, L’Action altruiste : contraintes et opportunités de l’engagement dans les mouvements sociaux, Droz, Genève, 1998.
Site Internet : www.pscw.uva.nl/sociosite/topics/activism.html
Voir : Action communautaire — Animation socioculturelle — Femme (Émancipation de la) — Grève — Jeunesse — Syndicat
Dominique Gros
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Multiculturalisme
Le débat sur la création d’une société multiculturelle oppose deux écoles, les “ culturalistes ” et les “ universalistes ”. Alors que les premiers insistent sur le droit à l’autodétermination culturelle, les seconds considèrent que la réalisation de cette autodétermination mène à une impasse, impasse qui aboutit à l’exclusion et à la soumission. Evidemment, le multiculturalisme suit l’une ou l’autre voie en fonction du contexte social et culturel dans lequel il s’inscrit. Cette différenciation a aussi un rôle important lorsqu’on parle du concept de la société plurielle.
Aux États-Unis, l’idée d’un pluralisme ethnique et culturel fait référence à l’essai du philosophe juif Horace Kallen, “ Democracy versus the Melting Pot ”, dont la politique assimilatrice envers les immigrants au début du XXe siècle fut critiquée. Kallen était un multiculturaliste ante litteram, pour lequel la compréhension du concept de différence aboutit à la constatation que “ personne ne peut choisir son grand-père ”. Il estimait que les immigrants n’avaient pas le choix de leurs racines culturelles profondes, mais qu’en revanche ils pouvaient effectuer consciemment le choix de leur loyauté politique en matière de migration. C’est pourquoi les États-Unis pouvaient, et devaient même, exiger une loyauté politique, mais ne pas effacer les différences. La politique devait ne pas considérer l’origine ethnique, comme d’ailleurs la confession religieuse. Cette devise des société pluralistes semble être aujourd’hui défiée par l’immigration et son rôle dans le débat sur la société multiculturelle.
La position universaliste a sévèrement critiqué la notion même de la société multiculturelle. Le concept suggère, selon la critique, que les sociétés modernes soient composées par des cultures (et non par des classes). De cette façon, on semble vouloir relier les difficultés observées par les immigrants dans les sociétés occidentales à la sphère culturelle plutôt qu’à la sphère sociétale. Cette argumentation est souvent interprétée comme une stratégie de diversion voire même une attitude discriminatoire, car la focalisation sur la notion de culture a comme conséquence de favoriser l’exclusion. Le transfert de la notion de culture d’origine à celle d’une culture du lieu de vie quotidien entraîne par ailleurs le risque d’un narcissisme de la petite différence et d’une surestimation des disparités de styles de vie. Les nouveaux arrivés ne devraient pas être vu comme les membres d’un autre peuple, mais plutôt comme de futurs citoyens, qui ne se distinguent pas humainement des autochtones. Ils ont pour cette raison le droit d’être traités d’égal à égal. On peut, par compensation, attendre des immigrants une adaptation aux valeurs séculaires de la République, argumente la position universaliste.
La position des culturalistes a été formulée et élaborée par Charles Taylor (1992/93). Son point de départ s’articule autour du désir des hommes à être reconnus, un désir qu’il suppose universel. L’envie de reconnaissance ne se résume pas seulement au respect de la dignité humaine. Il repose plutôt sur un besoin important des individus à être reconnus dans leurs particularités. Comment déduire, demande Taylor, l’exigence de chacun à être respecté dans sa dignité ? Par sa capacité à agir modérément, avec assurance, avec un propre projet qui fait part d’une identité singulière et inamovible. Le propre projet se basant toujours sur l’origine, on ne veut pas seulement être accepté pour ce qu’on est, mais pour ce qu’on est devenu. Ce désir de manifester sa propre culture exprime la volonté d'être fidèle à soi. L’origine, la religion, l’appartenance ethnique, la couleur de la peau et la langue sont pour beaucoup, surtout hors du pays d’origine, une source de respect, d’identité et même d’orgueil. Ainsi, on réclame la reconnaissance pour des caractères partagés par tout le monde, mais substantiellement différents pour chacun. On réclame, pour emprunter les paroles des multiculturalistes, le droit à la différence.
Finalement, l’impulsion libératrice de l'identité propre peut mener à un retrait ou, même, à des forme d’agression ethnique. Dans les sociétés pluralistes il faut toujours se poser les mêmes questions : jusqu’à quel degré l’état constitutionnel et égalitaire va-t-il protéger la différence culturelle et l’affirmation d’une identité culturelle ? Et, jusqu’à quel niveau va-t-il assurer les droits des communautés selon le modèle de la protection des minorités garanti par le droit international ?
R. G. D’Amato, Forum suisse pour l’étude des migrations, Neuchâtel. — H. Kallen, “ Democracy versus the Melting Pot ”, in : The Nation, 1915. — A. Finkielkraut, La défaite de la pensée, Gallimard, Paris, 1989. — C. Taylor, Multiculturalism and The Politics of Recognition, Princeton University Press, Princeton, 1992. — A. Touraine, Critique de la modernité, Fayard, Paris, 1993.
Site Internet : www.unine.ch/fsm/welcome.html
Voir : Intégration — Intégration (Politique d'intégration à l'égard des immigrés) — Interculturalité — Xénophobie
Gianni D'Amato
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Multigénérativité
Idée selon laquelle les gens, dans une société dynamique et ouverte, peuvent faire partie de générations différentes suivant les domaines de la vie : ainsi une femme peut à la fois être grand-mère d'un petit enfant et membre active de la génération Internet.
François Höpflinger
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Mutualité (Principe de)
Pierre angulaire de l’assurance-maladie, le principe de la mutualité est une des conditions posées par la Loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMal) pour la reconnaissance des assureurs. Elle joue également un rôle dans les relations entre les assureurs et leurs assurés. Se fondant sur les définitions de la doctrine, le Tribunal fédéral des assurances a précisé le contenu de la notion de mutualité : communauté de risques dans laquelle les membres se garantissent les mêmes avantages en excluant toute idée de bénéfice. Ce principe implique un équilibre entre cotisations et prestations.
Du principe de la mutualité découlent un certain nombre de principes de droit public : l’égalité de traitement, la proportionnalité et la liberté d’organisation des assureurs-maladie.
R. B. Viret, “ Les principes de la mutualité dans l’assurance-maladie sociale ”, in : A. Grisel, Mélanges, Éditions Ides et Calendes, Neuchâtel, 1983, pp. 605-620. — J.-L. Duc, P.Y. Greber, “ La portée de l’art. 4 de la Constitution fédéral e en droit de la sécurité sociale ”, in : ZSR, 1992 II, S. 473 ff.
Voir : Assurance-maladie (AM) — Cotisation/prime — Prestations de sécurité sociale
Béatrice Despland
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Natalité
Nombre de naissances pour 100 femmes. Si la natalité est inférieure à 210 naissances pour 100 femmes, il en résulte à long terme un recul du nombre d'habitants. En Suisse, la natalité est relativement basse depuis la fin des années 60; elle constitue l'une des causes principales du vieillissement démographique.
François Höpflinger
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Nations Unies (Charte des)
Les cinquante États présents à la Conférence de San Francisco signent, le 26 juin 1945, la Charte des Nations Unies. Formellement, la Charte des Nations Unies est un simple traité international ; mais celui-ci contient deux types très distincts de dispositions. D’une part, la Charte forme la “ Constitution ” de l’Organisation des Nations Unies ; elle décrit ses principaux organes et leurs règles de fonctionnement. D’autre part, elle énonce un certain nombre de règles de conduite dont le respect par les États membres assurera la paix et la sécurité internationales. Théoriquement, ces règles ne lient que les membres de l’ONU ; mais la vocation universaliste de l’Organisation devait assurer leur respect par toutes les entités formant la Communauté internationale.
L’Organisation des Nations Unies compte parmi ses organes principaux un Conseil économique et social élus par l’Assemblée générale. Il a pour mission de promouvoir la coopération économique et sociale internationale à ce titre.
R. J.-C. Zarka, Les institutions internationales, Ellipses, Paris, 1995.
Site Internet : www.un.org/french/aboutun/charte
Voir : Nations Unies (Instruments des) — Organisation de nations unies (ONU)
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Nations Unies (Instruments des)
Le principal instrument des Nations Unies en matière sociale est le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Ce Pacte a été adopté par l’assemblée générale des Nations Unies le 16 décembre 1966, en même temps que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et est entré en vigueur le 3 janvier 1976. Il fait suite à la Déclaration universelle des droits de l’homme et en concrétise le contenu en ce qui concerne les droits sociaux. La Suisse l’a ratifié.
Dans une première partie (art. 1er), le Pacte proclame le droit des peuples de disposer d’eux-mêmes. Une deuxième partie (art. 2 à 5) expose notamment la portée des engagements pris aux termes du Pacte : chacun des États liés par ce dernier s’engage à agir en vue d’assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus par l’instrument. Une troisième partie (art. 8 à 15) énumère les droits reconnus, soit en droit du travail, soit en matière de sécurité sociale, soit en matière culturelle. Une quatrième partie (art. 16 à 25) traite notamment du contrôle de l’exécution du Pacte et contient des dispositions de caractère général : chaque État doit présenter périodiquement au Conseil économique et social des rapports sur les mesures adoptées par lui et les progrès réalisés, ces rapports étant soumis à l’examen des organes compétents des Nations Unies.
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, lui aussi ratifié par la Suisse, contient certaines dispositions qui touchent à la fois au domaine des droits civils et à celui des droits sociaux : interdiction du travail forcé ou obligatoire (art. 8), droit syndical (art. 22).
On peut mentionner encore la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes, adoptée le 18 septembre 1979 par l’Assemblée générale des Nations Unies et que les Chambres fédérales ont décidé de ratifier. Cette convention prévoit notamment (art. 11) l’élimination des discriminations à l’égard des femmes dans les domaines de l’emploi, de la sécurité sociale et de la protection de la santé et de la sécurité au travail, ainsi que des discriminations à l’égard des femmes dans le monde du travail en raison du mariage et de la maternité.
Enfin, on mentionnera aussi la Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989 par l’Assemblée générale des Nations Unies, qui reconnaît notamment le droit de l’enfant à la sécurité sociale (art. 26) et à la protection contre l’exploitation économique (art. 32). L’adhésion de la Suisse à cette convention a été votée par le Parlement le 13 décembre 1996. La convention est entrée en vigueur le 16 mars 1997.
R. W. Kälin, G. Malinverni, M. Nowak, La Suisse et les Pactes des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme, Bâle, 1991. — C. Hausammann et E. Schläppi, “ Das UNO-Uebereinkommen zur Beseitigung jeder Form von Diskriminierung der Frau und seine Bedeutung für die Schweiz ”, in : Pratique juridique actuelle, No 1, 1995.
Site Internet : www.unhchr.ch/french/html/menu3/b/a_cescr_fr. ht
Voir : Droits sociaux — Déclaration universelle des droits de l’homme — Sécurité sociale
Alexandre Berenstein
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Naturalisation
La naturalisation est en général l'acte par lequel on acquiert une autre nationalité que celle d'origine. L’acquisition de la nationalité suisse peut prendre diverses modalités : naturalisation (ordinaire ou facilitée), adoption, réintégration. La naturalisation est la forme largement majoritaire : plus de 90 % des acquisitions sont faites par naturalisation ordinaire ou facilitée. La naturalisation d’un étranger s'obtient normalement dans un canton et une commune. La procédure couvre ainsi trois niveaux : fédéral, cantonal et communal, chacun ayant ses propres exigences et règles. Le fait qu'aux niveaux cantonal et communal, la décision n'appartient pas à l'administration mais aux législatifs cantonaux et communaux forme la spécificité de l'acquisition de la nationalité suisse par rapport à la plupart des pays du monde. Cette situation est aussi une des raisons de la lenteur de la procédure et de l'extrême diversité qui existe parmi les lois cantonales et les règlements communaux, diversité touchant aussi bien les conditions financières que le nombre de formalités et d'auditions ou les exigences quant à la durée de résidence des candidats. Certains cantons et communes ont une vision plus “ integrationniste ” de l'acquisition de la nationalité : il suffit de prouver que l'on est un “ bon citoyen ” pour obtenir la naturalisation ; d'autres en ont une vision plus “ assimilationniste ”, seuls ceux qui peuvent prouver avoir acquis les “ us et coutumes ” locaux méritent l'accès à la nationalité.
R. P. Centlivres, M. Centlivres, N. Madjard, L. Ossipow, Une seconde nature. Pluralisme, naturalisation et identité en Suisse romande et au Tessin, L'Age d'Homme, Lausanne, 1991.
Voir : Adoption — Deuxième génération — Intégration — Intégration (Politique d'intégration à l'égard des immigrés)
Claudio Bolzman
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Néo-libéralisme
Le néo-libéralisme apparaît sur la scène politique à partir des années 1980 avec les succès de Margaret Thatcher et Ronald Reagan. Ses sources d’inspiration se trouvent dans les travaux des philosophes et économistes Friedrich Hayeck, Milton Friedman, et leurs successeurs, dont nombre enseignent aux départements d’économie et de droit de l’université de Chicago. Les “ néo-libéraux ” mettent en évidence les effets pervers de l'intervention de l'État. Elle produit selon eux des effets économiques indésirables tels l’inflation, la perte de compétitivité, le développement de l'économie souterraine et le développement d’une société d’assistance généralisée. Le marché est supérieur par définition à toute action planificatrice.
Pour les néo-libéraux, les États-providence doivent être condamnés. Ils minent le sens des responsabilités, de la famille et de l'effort. Les propositions des experts consistent à : diminuer le poids de l'État, déréguler l'économie, supprimer les obstacles aux échanges internationaux, privatiser les services publics, renforcer le sens des responsabilités sociales, réduire la place de la protection sociale.
R. D. Yergin, J. Stanislaw, La grande bataille. Les marchés à l'assaut du pouvoir, Odile Jacob, Paris, 1998. — B. Jobert, Le tournant néo-libéral en Europe, L’Harmattan, Paris, 1994 . — K. Dixon, Les évangélistes du marché, Raisons d’agir, Paris, 1998.
Voir : État-providence — Démantèlement social — Précarisation (Mécanismes de la)
François-Xavier Merrien
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Niveaux de revenu
Évoquer les niveaux de revenu renvoie d’une part à sa répartition, à sa mesure — via l’indice de Gini — et à son évolution au fil de la carrière professionnelle, partant aux inégalités sociales, à leurs causes et aux mesures correctrices (fiscalité, revenu minimum, échelle mobile des salaires). En découlent d’autre part la notion de pouvoir d’achat ou salaire réel, son évolution collectivement et par catégories sociales, ainsi que la fixation de seuils. Selon l’axe retenu, sera privilégiée l’importance des inégalités de revenu ou l’étendue de la pauvreté.
Combien les gens gagnent ? Démontrer l’existence de niveaux de revenu différents soulève des questions d’efficacité économique et de justice sociale. L’incidence de la responsabilité individuelle, invoquée notamment par les théoriciens du “ capital humain ”, celle du hasard ou au contraire du déterminisme social, voire l’importance de la position personnelle dans le cycle de vie ou encore de la conjoncture divisent les spécialistes.
Quel est le niveau de vie de la population ? Il s’évalue par le biais du pouvoir d’achat ou salaire réel qui mesure la durée du travail nécessaire pour acheter un bien déterminé. Lorsque le prix réel baisse, le pouvoir d’achat augmente. Selon les biens, cette évolution peut influencer les niveaux relatifs de revenu. En est la preuve l’extension de la diffusion sur le marché de certains objets.
Site Internet : www.statistik.admin.ch/findex.htm
Voir : Fiscalité — Indicateurs sociaux — Inégalités sociales — Sécurité sociale
Pierre Weiss
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Normes CSIAS (Conférence suisse des institutions d’action sociale)
Pour calculer l’aide matérielle à allouer, les autorités d’aide sociale fixent des montants pour les principaux postes de dépenses du budget mensuel.
Ces montants se réfèrent aux “ Normes CSIAS pour la conception et le calcul de l’aide sociale ” conçues comme des recommandations destinées aux autorités d’aide sociale. Ces normes comprennent un montant forfaitaire pour la couverture des besoins de base (dont nourriture, vêtements, électricité, téléphone, TV, transports). Y sont additionnés : le loyer, les frais de soins médicaux, les cotisations minimales AVS. Des aides à l’insertion sociale et professionnelle pourront compléter ces montants.
Les normes sont adaptées aux variations des indices qui leur servent de base (dont ISPC, salaires). Les normes de la CSIAS ont acquis valeur de référence dans les pratiques de l’aide sociale et les décisions des tribunaux (jurisprudence). Elles apportent ainsi une garantie juridique et assurent en Suisse une certaine égalité de traitement en matière d’aide sociale.
R. F. Wolffers, Fondements de l’aide sociale, Haupt, Berne, 1995.
Site Internet : www.skos.ch
Voir : Aide sociale — Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) — Minima sociaux — Minimum vital
Daniel Monnin
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Normes internationales du travail
Une des fonctions les plus importantes de l’Organisation internationale du travail (OIT) consiste à élaborer des conventions et des recommandations internationales fixant des normes minima de travail. Depuis 1919, ce sont ainsi 180 conventions et 187 recommandations qui ont été adoptées par la Conférence internationale du travail, à laquelle chaque pays membre est représenté par des délégués gouvernementaux, employeurs et travailleurs. Ces normes portent, par exemple, sur l’abolition du travail forcé, la liberté syndicale, l’égalité de chances et de traitement, l’emploi et la formation professionnelle, la sécurité sociale, les conditions de travail, la protection de la maternité, l’âge minimum pour l’accès au travail, la protection des migrants et de catégories de travailleurs comme les marins. Les conventions lient les pays qui les ont ratifiées. Pour vérifier leur application, l’OIT a établi un système de contrôle très développé qui est fondé sur l’examen objectif de l’application des conventions par des experts indépendants et sur la discussion des cas par les organes tripartites de l’Organisation. Une procédure spéciale a été établie pour l’examen des plaintes en violation des droits syndicaux. Les recommandations ne sont pas sujettes à ratification ; elles n’ont donc pas la valeur juridique contraignante des conventions. Elles sont souvent adoptées en même temps que les conventions portant sur le même sujet, qu’elles complètent de façon plus détaillée.
R. H. Bartolomei de la Cruz et A. Euzéby, L’Organisation internationale du travail, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1997. — M. Voirin, “ Les normes internationales de sécurité sociale à l’épreuve du temps ”, in : J.-P. Fragnière (Éd.), Repenser la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1995, pp. 85-95. — BIT, L’OIT au service du progrès social : manuel d’éducation ouvrière, 2e éd., BIT, Genève, 1995.
Site Internet : www.ilo.org/public/french/50normes/index.htm (Site du BIT pour consulter les conventions et recommandations)
Voir : Droit social — Organisation internationale du travail (OIT)
Roland Sigg
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Nouvelle gestion publique
Approche globale de gestion des organisations publiques, apparue au début des années 1990 dans les pays anglo-saxons, puis s'étendant progressivement à la plupart des pays de l'OCDE. Contrairement à l'approche classique de la gestion publique, provenant des sciences administratives et marquée par la prégnance du droit comme mode d'analyse et de conduite de l'action publique (Chevallier, 1987, Debbasch, 1989), la nouvelle gestion publique (NGP) emprunte à l'économie et à la gestion d'entreprise (privée) l'essentiel des concepts et outils qu'elle préconise (Schedler/Proeller, 2000, Hufty, 1998). Pour remédier aux dysfonctions classiquement identifiées au sein des systèmes bureaucratiques (Hablützel et al, 1995), notamment la difficulté à exercer une réelle direction politique des organismes publics, ainsi que la lourdeur et le cloisonnement de leur fonctionnement interne, la NGP préconise de manière résumée les éléments suivants :
— Promouvoir la qualité des services fournis aux citoyens -rebaptisés “ clients ”- sur la base d'une évaluation de leurs besoins, puis d'une évaluation des prestations effectivement fournies par l'administration publique. Ce faisant, renforcer l’efficacité et l’efficience des services publics, évalués sur la base d’objectifs de prestations clairement définis par les autorités politiques (orientation sur les “ outputs ” et non les “ inputs ”).
— Pour ce faire, délimiter des centres de prestations à l'intérieur de l'administration, puis en confier la direction à des managers publics bénéficiant d’une autonomie d’action accrue par rapport au système traditionnel. Négocier ensuite un contrat (ou mandat) de prestations entre les autorités politiques et les managers publics, lequel fixe les objectifs de prestations à atteindre, les indicateurs retenus ainsi que l'enveloppe financière attribuée.
— Simplifier les structures et le fonctionnement de ces centres de prestations, flexibiliser les processus dans le respect de l’égalité de traitement, afin de favoriser l'émergence d'une forme d'esprit d'entreprise. Y compris en agissant sur la gestion des ressources (financières, humaines) pour laquelle une large autonomie est laissée aux managers publics, et en favorisant des mécanismes de type marché (mise en concurrence, privatisation partielle, etc.).
La NGP est considérée par certains comme une conséquence majeure liée à l'hégénomie progressive de la pensée néolibérale, aboutissant à un démantèlement des structures étatiques, alors que d'autres, s'appuyant sur l'introduction poussée de la NGP dans de nombreux pays à tradition socialiste -tels les pays scandinaves- estiment au contraire qu'elle recèle les éléments salvateurs d'un appareil étatique englué dans des procédures kafkaiennes et des déficits publics endémiques (Delley, 1994).
Suite à la publication de l'ouvrage de Osborne et Gaebler “ Reinventing Government ” (1993), qui a déclenché la vague de nouvelle gestion publique en Suisse (Emery, 2000), les organisations publiques mettent en œuvre le plus souvent sous la forme d'opérations pilotes les principes de la NGP. Vers la fin des années 1990, un ralentissement des expériences NGP est relevé, singulièrement en Suisse romande, alors que certains cantons de Suisse allemande généralisent au contraire ses principes à l'ensemble de l'administration (par ex. : Zurich).
Au-delà d'un ensemble de techniques managériales, la NGP introduit un changement culturel profond, elle modifie les rôles, compétences et moyens d'intervention attribués aux dirigeants politiques ainsi qu'aux gestionnaires publics -essentiellement donc, leurs sources de pouvoir. A notre sens, il faut voir en ce dernier aspect l'origine de la plupart des difficultés engendrées par la mise en œuvre de la NGP, une approche qui apparaît à la fois logique et rationnelle au premier abord, mais dont les implications juridiques, politiques et gestionnaires n'ont pas encore toutes été analysées à satisfaction.
Cela étant, la NGP pourrait bien, même si l’appellation de “ nouvelle gestion publique ” en tant que telle devait tomber en désuétude, se montrer décisive pour le pilotage des organisations publiques au XXIe siècle, tant sur le plan pratique que théorique.
R. J. Chevallier, Science administrative, 2e éd., PUF, Paris, 1987. — C. Debbasch Science administrative, 5e éd., Dalloz, Paris, 1989. — J.-D. Delley, Quand l’esprit d’entreprise vient à l’État : pour une réforme du service public, Domaine public, Lausanne, 1994. —Y. Emery, “ Le service public en marche vers le XXIème siècle ”, in : Actes du colloque sur l’“ Aventure des réformes dans les services publics ”, Idheap, Chavannes-près-Renens, 2000. — P. Hablützel et al. (Hsgr), Umbruch in Politik und Verwaltung : Ansichten und Erfahrungen zum New Public Management in der Schweiz, Haupt, Berne, 1995. — M. Hufty ; La pensée comptable, État, néolibéralisme, nouvelle gestion publique, Collection Enjeux, PUF, Paris, 1998. — D. Osborne, T. Gaebler, Reinventing Government : How the Entrepreneurial Spirit is Transforming the Public Sector, Plume Book, New York, 1993. — D. Pulitano, (Éd.), New Public Management, Terminologie, terminologie, terminologia, Haupt, Bern, 2000. — K. Schedler, I. Proeller, New Public Management, Haupt, Berne, 2000.
Voir : Évaluation — OCDE (Organisation de coopération et de développement économique)
Yves Emery
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Objecteur de conscience
Citoyen qui refuse, par respect d’une règle morale ou d’un choix politique, d’accomplir ses obligations militaires, mais sans se soustraire à la justice de son pays (différence avec l’insoumission ou la désertion). Certains États admettent plus ou moins explicitement l’objection de conscience en accordant aux objecteurs un statut qui les dispense du service armé, remplacé par l’affectation à des tâches civiles, généralement pour une période plus longue. En Suisse, au terme d’un long débat public, certaines catégories d’objecteurs peuvent obtenir un statut spécial et effectuer leur service en assumant des tâches d’intérêt collectif. Dans ce cadre, ils sont appelés à offrir des services dans les divers secteurs de l'action sociale et sanitaire.
jpf
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Obligation d’entretien
Fondée sur le rapport de filiation, l'obligation d'entretien est une institution du droit de la famille astreignant les parents à subvenir aux frais d'éducation et de formation de l'enfant, et à prendre toute mesure tendant à le protéger. L'obligation d'entretien dure, en principe, jusqu'à la majorité de l'enfant. Si la formation n'est, alors, pas achevée, l'obligation des parents subsiste, pour autant que la formation soit achevée dans les délais normaux. Les père et mère sont déliés de leur obligation d'entretien dans la mesure où l'on peut attendre de l'enfant qu'il subvienne à son entretien par le produit de son travail ou par ses autres ressources.
Lorsque les parents divorcent, la contribution d'entretien est fixée par le juge, si aucune convention n'a été conclue et ratifiée par les autorités tutélaires. L'enfant dispose d'un droit d'action contre son père et sa mère, ou contre les deux ensemble, afin de réclamer l'entretien pour l'avenir et pour l'année qui précède l'ouverture de l'action en divorce.
En cas de séparation, le parent qui n’exerce pas le droit de garde devra s’acquitter de son obligation par une prestation pécuniaire.
Les parents nourriciers n’ont aucune obligation d'entretien. Ils ont droit, au contraire, à une rémunération. La gratuité des services est présumée lorsqu'il s'agit d'enfants de proches parents ou d'enfants accueillis en vue de leur adoption. Les beaux-parents n'ont aucune obligation d'entretien. Chaque époux est cependant tenu d'assister son conjoint de façon appropriée dans l'accomplissement de son obligation d'entretien envers les enfants nés avant le mariage.
Voir : Autorité parentale — Divorce — Filiation (Droit de) — Pensions alimentaires (Avance et recouvrement)
Béatrice Despland
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OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques)
L’Organisation de coopération et de développement économiques est un lieu d’étude et de concertation des pays industrialisés qui a succédé en 1960 à l’OECE (Organisation européenne de coopération économique), créée en 1948 pour favoriser la reconstruction de l’Europe au moyen de l’aide américaine. Dans les années nonante, l’OCDE est l’un des avocats les plus vifs de la thèse qui attribue le chômage à un niveau de salaire trop élevé, à l’existence de salaires minimum et de l’État-providence (le Royaume-Uni est considéré par l’OCDE comme un modèle). L’OCDE publie régulièrement des rapports et des séries de données utiles pour l’étude de la politique sociale (en particulier pour les analyses utilisant la méthode comparative). Un rapport sur la Suisse est disponible.
Site Internet : www.oecd.org
Voir : Indicateurs sociaux
jpf
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Œuvre suisse d’entraide ouvrière (OSEO)
Association fondée en 1936, active en Suisse et dans les pays du Sud et de l’Est, qui a pour but le développement de l’autonomie par des réalisations fondées sur la formation, le travail et le conseil.
Activités en Suisse : mise sur pied de projets (emplois temporaires subventionnés, bourses à l’emploi, aide à la recherche d’emploi, semestres de motivation pour les jeunes, cours de qualification de base, intégration des réfugiés et migrants) avec pour objectifs la prévention, la valorisation, la réinsertion et l’intégration.
Activités à l’étranger : coopération au développement avec un accent sur le développement des organisations locales – syndicats, organisations féminines, associations rurales — et les activités économiques à bas seuil. Membre du réseau européen Solidar regroupant des organisations de même orientation.
Aide humanitaire : aide d’urgence et aide à la reconstruction à moyen et long terme.
R. Journal de l’OSEO Solidarité, rue Chaucrau 10, cp 437, 1000 Lausanne 17. — C. Lafontat, J. Milliet (Dir.), Travaille qui peut, Éditions d’En bas, Lausanne, 1996.
Site Internet : www.oseo.ch
Voir : Chômage — Emploi temporaire subventionné — Solidarité — Union syndicale suisse (USS) — Chaîne du bonheur — Développement durable — Réfugié.
Frances Trezevant
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OFAS (Attributions de l’)
Les attributions de l’OFAS sont réparties entre plusieurs divisions.
AVS/APG/PC
Les tâches de la division AVS/APG/PC sont en relation avec l’application de la législation sur l’AVS, les allocations pour perte de gain et les prestations complémentaires y compris l’aide à la vieillesse. Parmi ses tâches citons les questions d’assujettissement aux assurances, de la perception des cotisations, du calcul des rentes et de leur versement, de l’étude de nouveaux modèles (splitting, rente unique, etc.) à la demande du Parlement.
Assurance-invalidité
Chargée de l’application de la législation sur l’AI, la division traite des prestations individuelles, des mesures de réadaptation et du droit aux indemnités journalières de même que des contributions à la construction et à l’exploitation d’établissements, d’ateliers et de homes, des subventions aux centres de formation et aux organisations de l’aide privée aux invalides.
Prévoyance professionnelle
Cette division est chargée de l’application de la loi, du traitement de la législation, y compris les ordonnances, de la coordination et de la planification. Elle est chargée de la surveillance directe des institutions de prévoyance de caractère national et international.
Assurance-maladie et accidents
Cette division traite de tous les problèmes généraux en relation avec l’assurance-maladie et de l’assurance-accidents — tarifs ambulatoires et hospitaliers —, et l’élaboration de projets de révision. Elle examine les comptes annuels et les bilans des caisses-maladie, approuve les primes et gère les subventions fédérales pour la réduction des primes individuelles. Elle prépare, en matière d’assurance-maladie les recours et les préavis pour le Tribunal des assurances sociales de Lucerne. La section assurance-accidents et prévention des accidents veille à l’application de la loi LAA et elle est chargée du contrôle des assureurs LAA. L’OFAS fait office d’instance de recours. Cette section élabore les préavis à l’intention du Tribunal des assurances sociales de Lucerne.
Affaires internationales
Cette division examine et traite principalement les demandes de conventions bilatérales et multilatérales de sécurité sociale et les réactualise si nécessaire. Elle est chargée des relations avec les organisations internationales.
Centrale pour les questions familiales
La Centrale surveille l’application de la loi fédérale sur les allocations familiales dans l’agriculture et collabore à la préparation de projets de révision des lois cantonales sur les allocations familiales. Elle est un centre de coordination pour les questions familiales au sein de l’administration fédérale.
Mathématique et statistique
Cette division prépare les bases mathématiques et statistiques nécessaires au développement, au suivi des divers projets de loi ainsi qu’à la surveillance des œuvres sociales placées sous le contrôle de l’OFAS.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Assurance-maladie et l'assurance-accidents (Article constitutionnel sur) — Office fédéral des assurances sociales (OFAS) — Sécurité sociale (Architecture de la)
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Office AI (Assurance-invalidité)
Les offices AI cantonaux sont le résultat de la réorganisation de l’AI approuvée par les Chambres fédérales, le 22 mars 1991 dans le cadre de la 3e révision de la loi, entrée en vigueur le 1er janvier 1992. Cette réorganisation a eu pour but de réaliser une application plus simple, plus compréhensible et plus économique, d’assurer une plus grande uniformité des dispositions légales ainsi qu’une réduction des délais de procédure.
Par la modification du Règlement de l’AI du 15 juin 1992, le Conseil fédéral a donné aux cantons des directives concernant la mise en place des nouvelles structures. Dans ce but, il a fixé à fin 1994, au plus tard, la création des offices AI cantonaux qui regroupent les commissions, les secrétariats et les offices régionaux et leurs tâches spécifiques pour l’application de l’AI.
La loi confère aux offices AI la personnalité juridique et leur donne la compétence de rendre des décisions relatives à toutes les prestations de la loi : les mesures médicales, les mesures d’ordre professionnel, les mesures de formation spéciale et en faveur des mineurs impotents, les moyens auxiliaires, les indemnités journalières, les rentes et l’allocation pour impotent. Les attributions des offices AI sont d’examiner si les conditions générales d’assurance sont remplies et si le requérant est susceptible d’être réadapté, de pourvoir à l’orientation professionnelle et à la recherche d’emplois, d’évaluer l’invalidité et l’impotence, de prendre les décisions relatives aux prestations et d’informer le public.
R. P. Thétaz, A. Regazzoni, L’intégration professionnelle des personnes handicapées, Cahiers de l’EESP, Lausanne, 1995.
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Caisse de compensation — Impotent (Allocation pour)
Olivier Urfer
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Office communal du travail (OT)
En matière d'assurance-chômage, l'office communal du travail enregistre les demandeurs d'emploi et leur donne les premiers renseignements ou adresses. Il leur indique les documents qui leur seront nécessaires lors de l'inscription à l'Office régional de placement. Une information particulière doit être faite concernant l'obligation d'effectuer des recherches de travail pendant le délai de congé. L'OT a également le devoir de délivrer aux demandeurs d'emploi la liste des caisses de chômage auxquelles ils peuvent s'affilier.
Dans le cadre d'une procédure de demande de main d'œuvre étrangère, l'OT de la commune du siège de l'entreprise requérante vérifie que le dossier soit complet, et que les indications figurant sur la demande soient conformes au contrat de travail en annexe. L'OT délivre ensuite un préavis à l'intention des autorités cantonales. Son opinion se fonde sur le sérieux des recherches d'emploi effectuées sur le marché local de l'emploi par le futur employeur, et après consultation de l'ORP sur sa position quant au personnel au chômage susceptible d'occuper l'emploi offert.
L'office communal du travail exerce enfin un rôle en matière de protection des travailleurs. Il établit une liste nominative des entreprises établies sur le territoire communal, et communique aux autorités cantonales, en y joignant son préavis, les horaires de travail des entreprises industrielles. Il préavise également les demandes d'autorisation d'occuper des jeunes gens âgés de moins de quinze ans révolus, et transmet les avis d'engagement et de licenciement des jeunes gens âgés de moins de 19 ans révolus qui ne sont pas au bénéfice d'un contrat d'apprentissage.
Voir : Assurcance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité (Loi fédérale sur l') — Chômage — Office régional de placement (ORP)
Michel Cambrosio
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Office fédéral de l'assurance militaire
L'Office fédéral de l'assurance militaire (OFAM) est chargé de l'application de la loi sur l'assurance militaire et de la gestion de la Clinique fédérale de réadaptation de Novaggio. Il dépend du Département fédéral de l'Intérieur. Dans le cadre de lésions corporelles accidentelles causées à des civils par l'armée, le Département Militaire fédéral lui confie l'instruction des cas. La Direction de l'OFAM se trouve à Berne. Il comprend sept sections AM qui traitent les cas, soit 2 à Genève, 2 à Berne, 2 à St-Gall et 1 à Bellinzone. Les sections sont compétentes pour le paiement des prestations en nature, l'indemnité journalière et pour la procédure administrative jusqu'à l'établissement de la décision. Les rentes sont versées par la section prestations d'assurances, sise à Berne.
R. Règlement d'organisation et de gestion de l'Office fédéral de l'assurance militaire, Publication de l'OFAM No. 1, 2000.
Voir : Assurance militaire
Philippe Le Grand Roy
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Office fédéral de la police (OFP)
L’État a pour mission essentielle de garantir la sécurité à l’intérieur du pays, qui constitue l’un des éléments déterminants pour le bien-être de l’humain et de la société. Bien que le domaine de la police relève en principe de la compétence des cantons, la Confédération assume des tâches partielles en la matière, tâches qui lui sont dévolues par la Constitution. Ainsi, l’Office fédéral de la police (OFP) soutient les services cantonaux au moyen de divers systèmes informatisés (Service d’identification, Système de recherches informatisées de police Ripol, Casier judiciaire) pour combattre la criminalité. En tant que centre d’analyse et de coordination, il prête également main-forte aux cantons dans la lutte contre le crime organisé. S’agissant de l’entraide judiciaire et de l’extradition, l’OFP collabore avec d’autres pays afin d’éviter que la Suisse ne devienne un refuge pour des criminels. Sur le plan législatif, l’OFP est notamment responsable de la loi sur les maisons de jeux et de celle sur les armes, ainsi que du droit de la circulation routière ; celui-ci est constamment adapté aux progrès techniques, à l’évolution du droit international et aux nouvelles connaissances et exigences en matière de sécurité routière et de protection de l’environnement.
R. Un aperçu de l’Office fédéral de la police (dépliant) à commander auprès de l’Office fédéral de la Police, 3003 Berne.
Site Internet : www.admin.ch/bap
Voir : Délinquance — Politique criminelle — Violence
OFP
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Office fédéral de la statistique (OFS)
L'Office fédéral de la statistique (OFS) fournit les informations indispensables aux milieux politiques, économiques et scientifiques ainsi qu'à la population sur l'état et l'évolution du pays dans les domaines démographique, économique, social, spatial et écologique. La statistique, en tant qu'information quantitative de synthèse élaborée d'après des critères scientifiques, est un élément indispensable de toute société démocratique et pluraliste moderne. Elle représente un langage universel qui apporte la transparence nécessaire dans le fonctionnement de notre société et constitue une base objective pour la connaissance de la réalité et pour la préparation rationnelle des décisions. Les activités de l'OFS sont régies par la loi du 9 octobre 1992 sur la statistique fédérale et par quatre ordonnances d'exécution ainsi que par une loi fédérale sur le recensement de la population (loi fédérale du 3.2.1860, révisée le 23.6.1988). L'OFS est chargé en outre de la coordination statistique au niveau fédéral (FEDESTAT) et de celle entre la Confédération et les Cantons et les villes (REGIOSTAT). L'OFS entretient des contacts étroits avec EUROSTAT, l'Office Statistique des Communautés européennes, avec l'OCDE, l'ONU et nombre de ses agences spécialisées et régionales, ainsi qu'avec le Conseil de l'Europe à Strasbourg. Il a également des relations avec des associations faîtières internationales du secteur scientifique, telles que l'Institut international de statistique et ses sections et l'Association internationale de recherche sur le revenu et la fortune, etc. Il occupe quelque 600 collaborateurs, dont 45 % d'universitaires, qui ont le statut d'employés permanents. A l'occasion des relevés de grande envergure, jusqu'à 250 auxiliaires peuvent venir grossir l'effectif du personnel. Le budget annuel s'élève à 70 millions de francs en moyenne. Depuis 1998, l'OFS est établi à Neuchâtel.
La contribution de l'OFS à l'élaboration de données statistiques pertinentes pour la politique sociale est majeure.
R. Office fédéral de la statistique, Programme pluriannuel de la statistique fédérale pour les années 1999 à 2003, Office fédéral de la statistique, Neuchâtel, 2000. — Office fédéral de la statistique, Personnes pouvant fournir des renseignements sur la statistique officielle (édition : mars 2000), OFS, Neuchâtel, 2000. — Office fédéral de la statistique, L’Office fédéral de la statistique en bref, 5e édition, Office fédéral de la statistique, Neuchâtel, 1999.
Site Internet : www.statistik.admin.ch/findex.htm
Voir : Eurostat — OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) — Service cantonal de recherche et d’information statistiques (SCRIS) — Statistique sociale
Carlo Malaguerra
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Office fédéral des assurances sociales (OFAS)
Origine et développement
Le premier texte légal relatif à nos assurances sociales remonte à l’année 1890, date d’une révision partielle de notre Constitution fédérale. À cette occasion, la compétence fut donnée à la Confédération d’introduire par voie législative l’assurance en cas de maladie et d’accidents. Le texte de la loi fédérale fut accepté le 13 juin 1911 par le Parlement et approuvé par le souverain en 1912 en votation populaire. Pour remplir cette nouvelle tâche, les Chambres fédérales décidèrent de créer le 19 décembre 1912 au sein du Département fédéral du Commerce, de l’Industrie et de l’Agriculture, un Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Ce dernier commença son activité le 1er février 1913. En 1954, l’OFAS changea de Département fédéral et fut attribué au Département fédéral de l’Intérieur. Dès sa création, les tâches de l’OFAS n’ont cessé de croître suite à l’élaboration et l’approbation de nouvelles lois, telles que :
— l’assurance-vieillesse et survivants/AVS (entrée en vigueur en 1948),
— les allocations familiales dans l’agriculture/LAF (entrées en vigueur en 1952),
— le régime des allocations pour perte de gain/APG (entré en vigueur en 1953),
— l’assurance-invalidité/AI (entrée en vigueur en 1960),
— la loi sur les prestations complémentaires à l’AVS/AI/PC (entrée en vigueur en 1965),
— la nouvelle loi sur l’assurance-accidents obligatoire/LAA (entrée en vigueur en 1984),
— la loi sur la prévoyance professionnelle/LPP (entrée en vigueur en 1985),
— la nouvelle loi sur l’assurance-maladie (entrée en vigueur en 1996).
Les assurances gérées par l’OFAS n’ont cessé de prendre de l’ampleur. En 1999, les charges totales des assurances sociales ont atteint la somme de 100.4 milliards de francs.
Rôle et tâches de l’OFAS
L’OFAS est avant tout une autorité de surveillance. L’Office est le garant du bon fonctionnement des assurances sociales et de l’application correcte des lois. Cependant, l’élaboration des lois sociales, nouvelles ou révisées, ne relève pas ou seulement indirectement de la compétence de l’OFAS ; elles sont le résultat de longs travaux préparatoires suivis d’intenses délibérations, dans un premier temps au sein de commissions d’experts, puis au Conseil des États et au Conseil national. L’avant-projet qui résulte de ces délibérations est généralement soumis à une procédure de consultation, ce qui permet aux milieux intéressés et aux offices concernés de formuler les remarques et suggestions. Projet de loi qui est à son tour soumis pour examen et adoption au Conseil fédéral et au Parlement. Le projet de loi finalement approuvé — après de nombreuses discussions, modifications, redimensionnement devient loi fédérale. — pour autant qu’il n’y ait pas de référendum et de rejet par le peuple en votation populaire.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : OFAS (Attributions de l') — Ordonnance administrative
Brigitte Dumas et Michel Valterio
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Office fédéral des étrangers (OFE)
L’OFE est chargé d’un rôle de direction et de la coordination dans le domaine du droit des étrangers. Il incombe notamment à l’OFE :
— d’édicter des directives à l’intention des polices cantonales des étrangers ;
— d’approuver dans certains cas déterminés les décisions prises par les cantons ;
— de statuer sur les exceptions aux mesures de limitation du nombre des étrangers ;
— de prononcer des interdictions d’entrée ;
— de préparer des traités internationaux, ainsi que des modifications de lois et d’ordonnances dans le domaine du droit des étrangers ;
— d’étendre les décisions cantonales de renvoi à tout le territoire suisse ;
— d’être responsable pour les préparatifs de la politique des visas et pour une pratique uniforme des visas ;
— d’édicter des directives sur le contrôle des personnes à la frontière et sur les contrôles à l’intérieur du pays en vue d’empêcher les séjours illégaux ;
— de fournir et évaluer des informations et prendre des mesures préventives dans le domaine de la migration illégale ;
— de gérer un registre central des étrangers.
R. Das aktuelle schweiz. Ausländerrecht, Teil 3, Kap. 2.2.3 WEKA-Verlag, Zürich, 1995.
Site Internet : www.auslaender.ch/default.asp
Voir : Étrangers (Politique à l’égard des) — Immigration
OFE
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Office fédéral des réfugiés (ODR)
Du point de vue de l’organisation, l’Office fédéral des réfugiés est rattaché au Département fédéral de Justice et Police (DFJP). Il est responsable de l’application du droit d’asile suisse.
Lors d’une procédure légale individuelle, l’ODR examine les demandes d’asile et accorde, en première instance, l’asile en Suisse à des personnes victimes de persécution. Ce faisant, il ne prend en considération ni l’origine, ni les opinions politiques, ni la race, la religion ou l’appartenance sociale de ces personnes.
L’ODR partage avec les cantons, les communes et les œuvres d’entraide le soin d’accueillir et d’enregistrer les demandeurs d’asile et les réfugiés, et de leur fournir assistance et encadrement. L’Office fédéral s’attache en outre à promouvoir l’intégration des réfugiés reconnus.
Dans le cas des requérants dont les demandes d’asile ne satisfont pas aux exigences de la loi suisse sur l’asile, l’ODR s’efforce d’assurer à ces personnes un retour dans la sécurité et le respect de leur dignité.
R. Office fédéral des réfugiés, L’asile en suisse : Un aperçu de la situation au printemps 1995, OCFIM, Berne, 1995. (Chapitre : Réfugiés, Requérants d’asile).
Site Internet : www.asyl.admin.ch
Voir : Asile (Politique d’) — Asile (Requérant d’) — Étrangers (Politique à l’égard des) — Réfugié
Daniel Gruber
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Office fédéral des transports (OFT)
Dans un monde en perpétuel mouvement, la mobilité est une notion fondamentale. Il est donc impératif d’élaborer des solutions concrètes pour organiser efficacement le trafic en constante augmentation. L’Office fédéral des transports (OFT) est l’autorité compétente en matière de transports publics terrestres ; son mandat politique poursuit deux objectifs :
— garantir des transports publics efficaces en développant des mesures et une infrastructure qui réponde aux besoins de la société actuelle ;
— garantir des transports respectueux de l’environnement en augmentant la part des transports publics sur les transports privés et en favorisant le transfert des marchandises de la route au rail.
Afin d’atteindre ces objectifs, l’OFT a mis en œuvre une politique cohérente : le financement des nouvelles infrastructures et autres mesures repose sur des bases solides. La politique suisse des transports est aussi européenne : l’accord sur les transports terrestres signé en 1999 garantit la reconnaissance des buts et des moyens de cette politique par l’Union européenne.
Le peuple suisse a toujours clairement soutenu cette politique des transports au cours des votations de la dernière décennie.
Site Internet : www.bav.ch
Anne-Lise Cattin
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Office fédéral du logement (OFL)
L’OFL est chargé de la conception et de l’exécution de la politique du logement menée par la Confédération. L’encouragement de la construction et de l’accession à la propriété de logements, l’amélioration du logement dans les régions de montagne, la recherche et les études de marché, la rationalisation de la construction de logements, la protection des locataires (droit de bail), l’information et le conseil sont parmi ses principales missions. L’OFL travaille en étroite collaboration avec les autres offices fédéraux, les services cantonaux compétents, les maîtres d’œuvre d’utilité publique et les instituts de créd. La Commission fédérale pour la construction de logements et la Commission fédérale de recherche pour le logement conseillent l’OFL dans ses activités.
R. OFL, Les 20 ans de la loi fédérale encourageant la construction et l’accession à la propriété de logements/Une documentation, Bulletin du logement, Vol. 61, 1995.
Site Internet : www.bwo.admin.ch
Voir : Locataires (Protection des) — Logement (Aide au) — Logement (Encouragement à la construction de) — Logement (Politique du)
OFL
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Office régional de placement (ORP)
Conseiller les chômeurs de manière personnelle, leur trouver un travail si possible durable, sinon les placer dans des mesures actives, comme des programmes d’emploi temporaire, des cours de formation professionnelle ou de perfectionnement pour ne citer que quelques exemples et offrir aux entreprises un service gratuit de placement, tel est en résumé le travail quotidien du conseiller en placement de l’Office régional de placement (ORP). En créant les ORP, depuis 1996, le Seco vise six objectifs : réinsérer les chômeurs sur le marché du travail, raccourcir la durée moyenne du chômage, améliorer la transparence du marché du travail, exploiter au maximum les mesures actives, lutter contre les abus et enfin réduire les dépenses de l’assurance-chômage. Le réseau ORP comprendra à terme près de 150 offices dans toute la Suisse, employant 2 500 personnes pour un budget total de 300 millions de francs (chiffres 1997 en 1997).
R. A. Andersen, “ Réforme du service public de l’emploi ”, in : Contributions à la politique du marché du travail, No 3, Publications OFIAMT, mars 1994.
Site Internet : www.orientation.ch/bera/jube/lapl/lapl005.htm
Voir : Assurance-chômage obligatoire et indemnités en cas d’insolvabilité (Loi fédérale sur) — Office communale du travail
Jean-Marie Monnerat
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Ordonnance administrative
Une ordonnance est un règlement dont l’auteur est une autorité exécutive (p. ex. le Conseil fédéral ou l’un de ses départements) ou un service administratif. Tandis que l’ordonnance législative s’adresse aux administrés, à qui elle accorde des droits ou impose des obligations (p. ex. l’ordonnance sur l’assurance-maladie ou le règlement sur l’assurance-invalidité), l’ordonnance administrative émane d’un supérieur hiérarchique ou d’une autorité de surveillance (p. ex. l’OFAS) et s’adresse soit aux organes de l’administration, soit aux institutions chargées d’exécuter une loi (p. ex. les caisses de compensation ou les caisses-maladie). Toutefois, elle a souvent une portée qui dépasse ses destinataires au sens étroit, dans la mesure où elle indique comment il faut appliquer la loi dans un cas d’espèce (p. ex. les circulaires et directives de l’OFAS dans les domaines de l’AVS/AI). Une telle ordonnance ne lie pas le juge qui la considère comme l’expression de la pratique administrative.
R. A. Grisel, Traité de droit administratif, vol. I, 1984, p. 89. — B. Knapp, Précis de droit administratif, 4e éd., 1991, pp. 76 ss.
Voir : Office fédéral des assurances sociales (OFAS)
Raymond Spira
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Organisation des Nations Unies (ONU)
L’Organisation des Nations Unies, créée à San Francisco en 1945, est en fait un important système institutionnel dont l’un des buts est de contribuer au développement économique et social. La Charte des Nations Unies, dans son préambule, assigne à l’organisation aussi bien de maintenir la paix et la sécurité internationales que de “ favoriser le progrès économique et social de tous les peuples ”. À ce titre, elle a permis l’éclosion de plusieurs textes fondamentaux et mis en place des organismes spécialisés, dont l’OMS, l’UNESCO, etc.
Site Internet : www.un.org
Voir : Nations Unies (Charte des) — Nations Unies (Instruments des) — Organisation mondiale de la santé (OMS) — Organisation non gouvernementale (ONG)
jpf
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Organisation internationale du travail (OIT)
Fondée en 1919, l'Organisation internationale du travail est l'institution la plus ancienne de la famille des Nations Unies. Dans l'entre-deux-guerres, son action vise essentiellement l'amélioration des conditions de travail, mais l'émergence de régimes totalitaires et les circonstances dramatiques du deuxième conflit mondial entraînent bientôt un élargissement de son mandat qui englobe dès lors le vaste domaine des droits sociaux de l'homme. A cette fin, l'Organisation privilégie deux axes d'action : l'adoption de normes internationales par des organes tripartites réunissant gouvernements, employeurs et travailleurs et la mise sur pied de programmes de coopération technique destinés en priorité aux pays en voie de développement. En 1969, à l'occasion de son cinquantenaire, l'OIT s'est vue décerner le Prix Nobel de la Paix. La chute du mur de Berlin et la fin de la bipolarité sur le plan idéologique ont induit un nouveau contexte géopolitique, où l’OIT est appelée à trouver sa place en tant qu’instance de régulation des questions économiques et sociales. L’adoption par la Conférence internationale du travail de la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail (1998) s’inscrit dans cette optique.
R. J.-M. Bonvin, L’Organisation internationale du travail, Étude sur une agence productrice de normes, PUF, Paris, 1998. — V.-Y. Ghebali, L'OIT, Georg, Genève, 1987.
Site Internet : www.ilo.org
Voir : Bureau international du travail (BIT) — Conférence internationale du travail — Déclaration de Philadelphie — Fondements du droit de la sécurité sociale
Jean-Michel Bonvin
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Organisation mondiale de la santé (OMS)
Institution spécialisée des Nations Unies pour les questions de santé, elle a son siège à Genève. Les fonctions exercées par l’OMS sont nombreuses : coordination des travaux internationaux, collaboration avec des institutions internationales et nationales, assistance technique, études épidémiologiques et statistiques, actions contre les maladies épidémiques et endémiques, actions en faveur de l’amélioration de la nutrition et de l’hygiène, aide à la coopération scientifique, élaboration de normes internationales en matière de maladies et de produits pharmaceutiques. La définition de la santé et les objectifs déclarés de l’OMS sont à l’évidence utopiques, mais seules des orientations claires peuvent mobiliser les énergies pour répondre à des besoins manifestement trop criants.
Selon la déclaration d’Alma-Ata, la priorité doit être mise sur la promotion des soins de santé primaires. Ceux-ci doivent comprendre au minimum une éducation sur les problèmes de santé (méthodes de prévention et de lutte contre les maladies) ; la promotion de bonnes conditions et de bonnes règles de nutrition ; un approvisionnement suffisant en eau et des mesures minimales d’assainissement ; la protection maternelle et infantile (comprenant la planification familiale) ; les vaccinations contre les grandes maladies infectieuses ; la prévention et le contrôle des grandes endémies locales, le traitement des maladies et lésions courantes, la fourniture de médicaments essentiels.
R. J.-C. Zarka, Les institutions internationales, Ellipes, Paris, 1996.
Site Internet : www.who.int
Voir : Organisation des nations unies (ONU)
jpf
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Organisation mondiale du commerce (OMC)
Née en 1995, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) succède à l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), créé au lendemain de la seconde guerre mondiale. Sa principale fonction consiste à favoriser autant que possible la bonne marche, la prévisibilité et la liberté des échanges commerciaux. Au cœur du système, - que l’on appelle le système commercial multilatéral - se trouvent les Accords de l'OMC, négociés et signés par la majeure partie des puissances commerciales du monde et ratifiés par leurs parlements. Ces accords constituent les règles juridiques de base du commerce international. Ils contraignent les gouvernements à maintenir leur politique commerciale à l'intérieur de limites convenues. L’OMC fait l’objet de vives critiques en raison de son manque d’attention aux questions de justice sociale (qui se manifeste notamment par la quasi-absence de toute collaboration avec l’OIT). Elle est en outre accusée d’accorder des prérogatives excessives aux États les plus riches.
R. M. Rainelli, L’Organisation mondiale du commerce, La Découverte, coll. Repères, Paris, 2000. — D. Jouanneau, GATT et Organisation mondiale du commerce, coll. Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 2000.
Site Internet : www.wto.org
Voir : G7 (groupe des 7-8)
Jean-Michel Bonvin
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Organisation non gouvernementale (ONG)
Groupement de personnes privées poursuivant, par-dessus les frontières étatiques, la satisfaction d’intérêts ou d’idéaux communs, et susceptible d’être consulté par l’ONU et les Institutions spécialisées (selon l’art. 71 de la Charte de l’O.N.U). Exemples : Croix-Rouge, Médecins du monde, Terre des hommes, etc. À en croire certains observateurs, les organisations non gouvernementales commencent à se percevoir et à être perçues comme les éléments moteurs d’une société civile internationale. On recense actuellement plus de 4 000 ONG. Elles exercent leur activité dans de nombreux domaines : politique, syndical, scientifique, religieux, écologique, sportif, etc.
R. R. M. Bettati, P. M. Dupuy (Dir.), Les ONG et le droit international, Economica, Paris, 1990.
Voir : Organisation des nations unies
jpf
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Organisation scientifique du travail (OST) àð Postfordisme
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Organisations économiques et patronales
Trois organisations faîtières nationales représentent les différents secteurs de l économie suisse : l Union patronale suisse (UPS, appelée UCAPS jusqu en 1996), l Union suisse des arts et métiers (USAM) qui représente essentiellement les petites et moyennes entreprises (PME) et l’Union suisse du commerce et de l’industrie, représentant les grandes entreprises, plus connue sous son appellation de Vorort. Alors que la première s’occupe avant tout de politique patronale, l’USAM et le Vorort ont pour tâche spécifique la politique économique (commerce extérieur, politiques douanière, monétaire, financière, etc.). En outre, l’Union suisse des paysans (USP) est la principale organisation du monde agricole helvétique et la Fédération romande des syndicats patronaux (FRSP) est la seule organisation regroupant des associations patronales en Suisse romande, à l’exclusion du canton de Vaud.
L’UPS a été fondée à Zurich en 1908 à la suite des mouvements de grève du début du siècle. Les employeurs ont senti la nécessité de s’unir au niveau des branches pour opposer un contrepoids au monde syndical. L’UPS compte comme membres non pas les entreprises en tant que telles, mais 30 associations professionnelles et 28 organisations régionales représentant plus d’un million de salariés. Parmi ces dernières, l’Union des associations patronales genevoises (UAPG) dont la principale composante est la Fédération des syndicats patronaux (FSP).
L’UPS a pour buts de sauvegarder les intérêts de ses membres en matière de politiques patronale, sociale et de formation et de développer la concertation systématique entre employeurs et salariés. À cet effet, elle coordonne ses démarches avec celles des autres associations faîtières. Elle ne possède aucun moyen de contrainte juridique sur les organisations affiliées, ni ne peut s’engager juridiquement en leur nom.
R. Fédération des syndicats patronaux (Éd.), Relations du travail en Suisse, quelques points de repères, Genève, 1991.
Site Internet : www.arbeitgeber.ch
Voir : Fédération romande des syndicats patronaux (FRSP) — Syndicats
Pierre Bonnet
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Organisme génétiquement modifié (OGM)
Organisme dont le matériel génétique a subi une modification délibérée par les techniques de l’ADN recombinant. Comme l’ADN (acide désoxyribonucléique) est la base chimique de l’hérédité dans l’ensemble du monde vivant, il est en principe possible d’intervenir sur n’importe quel organisme par ces méthodes, découvertes au début des années 1970. Néanmoins, dans les débats politiques contemporains, les OGM en discussion sont principalement les plantes cultivées et éventuellement d’autres organismes d’utilisation agronomique. Ces controverses portent entre autres sur l’opportunité et les risques liés à la dissémination de telles plantes, en particulier le risque de transfert génétique horizontal vers d’autres espèces sauvages, les avantages, risques et inconvénients liés à leur introduction dans l’alimentation et les changements que leur développement introduirait dans les circuits économiques de l’agriculture.
Site Internet :
www.inra.fr/Internet/Directions/DIC/ACTUALITES/DOSSIERS/OGM/OGM.htm
Alex Mauron
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Organisme médico-social vaudois (OMSV)
L’Organisme médico-social vaudois, fondé en 1967, est une institution de droit public indépendante de l’État qui a pour but de prendre, pour toutes les communes, des mesures préventives et sociales en matière de santé publique et de soins médicaux et paramédicaux extra-hospitaliers.
L’OMSV est actif dans les secteurs sanitaires, social et de planification. 39 centres médico-sociaux desservent la population. Ils sont regroupés au sein de 10 associations ou fondations régionales, liées par convention à l’OMSV.
Pour assurer la coordination entre l’OMSV et les régions :
— les services communs (finances, informatique, personnel, encadrement, communication et information) ont été groupés. Une “ Commission des utilisateurs ” exerce des missions de contrôle, de suivi et d’appui ;
— un secteur “ allocation, recherche et développement ” a été créé et chargé, par exemple, des contrats de prestations liant l’OMSV et les institutions régionales ainsi que des négociations relatives au contrat de prestations liant l’OMSV et l’État ;
— un secteur prévention :
1. centre de ressources pour les programmes de prévention menés dans les associations régionales et concernant en particulier la petite enfance et les personnes âgées ;
2. assure la gestion :
— du programme “ école et sant頔, infirmières scolaires dans tout le canton sauf la Ville de Lausanne et s’adressant aux élèves de l’enseignement obligatoire ;
— du programme “ jeunesse et sant頔, infirmières en santé publique dans les gymnases et centres d’enseignement professionnel.
Site Internet : www.aide-soins-domicile-vaud.ch/index.htm
Voir : Éducation pour la santé — Soins et aide à domicile — Service médico-social — Prévention
Pierre Berlie
[Des institutions analogues, quoique significativement différentes, existent dans d’autres cantons. Nous avons retenu l’OMSV à titre d’exemple. Réd.]
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Orientation scolaire et professionnelle
L’orientation scolaire et professionnelle aide les jeunes et les adultes à élaborer un projet de formation qui tient compte de leurs aspirations, de leurs aptitudes et de leur environnement. Dans cette perspective, elle élabore et diffuse de l’information et elle assure des consultations individuelles ou collectives.
Ses prestations sont facultatives, gratuites et confidentielles. Dans sa recherche de solutions adéquates, elle entretient des contacts étroits avec les milieux scolaires, économiques et ceux concernés par le marché du travail.
R. N. Raboud, De l’orientation en Suisse : historique, réalité actuelle et évolution possible, Mémoire de licence, Université de Lausanne, 1996. — L'orientation scolaire et professionnelle, Bulletin de la CIIP No 7, novembre 2000.
Site Internet : www.orientation.ch
Voir : Apprentissage — Éducation (Politique de l') — Instruction publique — Profession — Travail (Marché du)
Maurice Dirren
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Pacte intergénérationnel
Si la génération familiale est définie par la position qu’elle occupe dans la succession le long de la ligne de filiation, la génération sociale l’est en référence aux grandes étapes du parcours de vie (enfance, vie économiquement active, retraite et grande vieillesse) et à la position qui en découle dans le système de solidarité publique, alors que la génération historique se caractérise par son insertion spécifique dans le cours de l’évolution sociétale.
Dans chacun de ces trois sens, les générations sont liées entre elles : par des systèmes de normes fixant leurs droits, obligations et attentes réciproques ; par l’engagement de leurs membres dans des relations sociales concrètes qui lient entre eux les participants.
Généralement, ces normes et relations sociales ne résultent pas d’un pacte au sens courant du terme. Si l’on s’y réfère, c’est dans un sens plus figuré pour évoquer l’engagement actif qu’implique le fait d’honorer une obligation ou de participer à une relation ; et pour signaler que la solidarité entre générations est pour une part aussi un projet politique dont la réalisation dépend de la participation publique du plus grand nombre.
R. : C. Attias-Donfut (Éd.), Les solidarités entre générations. Vieillesse, familles, État, Nathan, Paris, 1995. — F. Höpflinger, Generationenfrage. Konzepte, theoretische Ansätze und Beobachtungen zu Generationenbeziehungen in späteren Lebensphasen, INAG/Réalités sociales, Lausanne, 1999.
Site Internet : www.unige.ch/CIG
Voir : Famille — Génération — Solidarité — Solidarité entre générations.
Jean-François Bickel
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Pacte international relatif aux droits civils et politiques àð Nations Unies (Instruments des)
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels àð Nations Unies (Instruments des)
Pain pour le prochain àð Action de Carême des catholiques en Suisse
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Paix du travail (Convention de)
En septembre 1936, le Conseil fédéral dévalua la monnaie et prit un arrêté autorisant le Département fédéral de l’Économie publique à arbitrer d’office et sans appel les conflits de salaires collectifs. C’est alors que l’Association patronale suisse des constructeurs de machines et industriels en métallurgie (ASM) et la Fédération suisse des ouvriers sur métaux et horlogers (FOMH) convinrent, rejoints par la Fédération chrétienne des ouvriers sur métaux de la Suisse (FCOM) et l’Union suisse des syndicats autonomes (USSA), de conclure une convention, qui est la convention de Paix du travail dans la métallurgie. Cette convention, du 19 juillet 1937, instituait la paix absolue du travail, interdisait pendant sa durée (2 ans) les mesures de combat et prévoyait l’arbitrage en cas de conflits ayant pour objet des modifications générales des salaires.
R. G. Aubert, L’obligation de paix du travail : étude de droit suisse et comparé, Georg, Genève, 1981. — G. Aubert, Études de droit suisse et comparé, Thèse, publiée par la Faculté de droit, 66, Genève, 1981. — K. Humbel, En toute bonne foi, Berne, 1987.
Voir : Grève — Lock-out — Syndicat — Union syndicale suisse (USS)
Alexandre Berenstein
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Panel suisse des ménages (PSM)
Le Panel suisse de ménages (PSM) est basé sur un échantillon de 5'074 ménages sélectionnés au hasard parmi la population résidant de façon permanente en Suisse. En 1999, lors de la première vague de l'enquête dite “ Vivre en Suisse ” près de 7'800 personnes de plus de 14 ans ont été interrogées sur un large éventail de thématiques fournissant à la fois des données “ objectives ” (ressources, conditions et événements de vie, position sociale, participation, etc.) et des données “ subjectives ” (satisfaction, valeurs, évaluation, etc.).
Les personnes appartenant à ce panel de ménages sont interrogées une fois par année et cela pour les cinq à dix prochaines années. Les interviews sont réalisées dans les trois langues nationales (allemand, français, italien) par l’Institut M.I.S. Trend de Lausanne au moyen du CATI (Computer Assisted Telephone Interviewing).
Le PSM est mené conjointement par le Programme prioritaire Demain la Suisse, l’Université de Neuchâtel et l’Office fédéral de la statistique. Cette recherche longitudinale a pour objectif de fournir une base de données permettant une observation fiable du changement social et une analyse approfondie des dynamiques sous-jacentes à l’évolution sociale en Suisse.
Site Internet : www.unine.ch/psm
Voir : Bilan social — Office fédéral de la statistique (OFS) — Planification sociale  Recherche sociale
Erwin Zimmermann
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Parcours de vie àð Cycle de vie
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Parlement européen
À l origine, c est un organe commun aux trois Communautés Européennes, dénommé   Assemblée européenne  par les traités initiaux mais qui se proclame   Parlement européen ” dès 1962, appellation définitivement reconnue par l’Acte unique européen. Il est composé jusqu’en 1979 de délégués des parlements nationaux et, depuis cette date, de représentants des peuples élus au suffrage universel direct (626 actuellement). Il participe de façon de plus en plus décisive au pouvoir législatif ; longtemps doté d’un simple pouvoir consultatif, l’acte unique introduit pour l’adoption de certains règlements et directives la procédure de coopération ou l’avis conforme (conclusion des accords avec les pays tiers et adhésion de nouveaux États), et le traité de Maastricht les étend tout en instituant de plus une procédure de codécision. Le Parlement européen dispose également de pouvoirs budgétaires qu’il a su exploiter.
Site Internet : www.europarl.eu.int
Voir : Acte unique européen — Union européenne (UE)
jpf
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Partage du travail
Le partage du travail vise à répartir le volume de travail existant dans une société parmi les personnes qui souhaitent un emploi. La diminution correspondante du temps de travail individuel peut prendre une multitude de formes. Discutée depuis le début des années quatre-vingt, l'idée a gagné d'actualité par la crise des années 1990. Celle-ci en a altéré le sens (sacrifice pour maintenir l'emploi plutôt qu'amélioration “ immatérielle ” de la qualité de vie) et l'a rendue plus controversée.
Le cloisonnement du monde professionnel (professions et qualifications spécifiques, niveaux hiérarchiques, barrières de genre) limite les possibilités pratiques, sans les exclure pour autant. Autres questions fondamentales : les salaires, doivent-ils être maintenus, baissés proportionnellement à la réduction du temps, ou diminués seulement dans la mesure où ils ne sont pas compensés par des gains de productivité? Où est la limite du sous-emploi?
L'idée exige un choix politique : la société, doit-elle être sélective, laissant tomber les exclus du travail dans la dépendance sociale, ou doit-elle être solidaire en plaçant la cohésion sociale au dessus de l'enrichissement individuel?
R. A. Gorz, Métamorphoses du travail, Quête du sens, Critique de la raison économique, Galilée, Paris, 1988.
Voir : Chômage — Cohésion sociale — Exclusion — Temps de travail — Temps partiel
René Levy
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Partenaires sociaux
On désigne généralement sous ce terme les organisations d’employés et d’employeurs engagées dans les négociations concernant les conditions de travail et de revenus, mais aussi de nombreux autres enjeux de politique sociale. Les pouvoirs publics sollicitent généralement l’avis des partenaires sociaux dans le cadre des procédures de consultation.
Voir : Organisations économiques et patronales — Syndicat
jpf
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Participation
La notion de participation (ou “ participation des travailleurs ”) désigne les procédures, légales ou conventionnelles, qui confèrent aux travailleurs un droit de participer aux décisions de l’entreprise. En fonction de l’objet ou du niveau de ce droit, on distingue la participation à l’exploitation (betriebliche Mitwirkung) de la participation à la gestion de l’entreprise (unternehmerische Mitbestimmung). S’agissant de sa portée, la participation peut se limiter à l’information et à la consultation, ou s’étendre jusqu’à la codécision.
Suite au rejet de l’Espace économique européen, et dans le sens d’une adaptation autonome du droit suisse au droit européen, le Parlement a adopté, le 17 décembre 1993, une nouvelle loi fédérale sur l’information et la consultation des travailleurs, appelée aussi loi sur la participation. Cette loi fixe le cadre et les modalités d’exercice des droits de participation que la législation accorde aux travailleurs, notamment dans les hypothèses des transferts des rapports de travail et des licenciements collectifs (cf. art. 333, 333a et 335d-335g du Code des obligations, également révisé le 17 décembre 1993).
Auparavant, la Suisse ne connaissait pas de réglementation légale de la participation. Peuple et cantons avaient même rejeté, en mars 1976, une initiative populaire et un contre-projet de l’Assemblée fédérale visant à introduire une participation aux décisions dans les entreprises et administrations, et toutes les tentatives de légiférer en la matière depuis lors avaient avorté au niveau du Parlement. C’était donc essentiellement la négociation collective qui avait développé l’information et la consultation des travailleurs, parfois avec un certain succès, notamment en matière de licenciements collectifs.
R. P. Bois, La participation, Neuchâtel, 1976. — M. Fritz, Das Mitwirkungsgesetz, ein Handkommentar mit Handlungshilfen für die Praxis, Zürich, 1994.
Voir : Convention collective de travail (CCT) — Organisations économiques et patronales — Syndicat
Pascal Mahon
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Patronage
1. Notables ou (et) autorités qui soutiennent une action, parrainage (gala de bienfaisance placé sous le patronage de…) ;
Appui moral, protection donnés par un organisme ou une personne.
2. Sur la plan juridique, il s’agit d’une mesure d’aide et de contrôle imposée par l’autorité judiciaire ou administrative à des personnes majeures ou mineures, condamnées.
Ainsi, depuis 1942, date de l’entrée en vigueur du Code pénal suisse, les cantons doivent, selon son article 379, organiser le patronage pour les cas prévus par la loi. Ils ont la faculté de recourir à des organisations privées, mais veillent à ce que chaque patronné soit pourvu d’un patron.
La mission de patronage, définie par l’article 47 du Code pénal suisse, est double : assistance morale et matérielle, surveillance. Le patronage tend au reclassement des personnes qui y sont astreintes.
R. C. Favre, M. Pellet, P. Stoudmann, Code pénal annoté, Éditions Bis et Ter, Lausanne, 1997.
Voir : Autorité tutélaires — Prison (Privation de liberté) — Tutelle
Marianne Bornicchia
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Paupérisme
Le concept de “ pauper ” et de “ pauperism ” apparaît dans la langue anglaise au début du XIXe siècle pour désigner une nouvelle forme de pauvreté : non une pauvreté individualisée ou liée à des circonstances exceptionnelles comme de mauvaises conditions climatiques, mais une pauvreté de masse apparemment liée de manière inéluctable avec le développement de l’industrialisation et de la richesse. Un observateur français utilise cette définition révélatrice : “ Le paupérisme, si on veut le définir d’un mot, est, l’épidémie de la pauvreté. ” (Emile Laurent, 1865). Dans son ouvrage magistral, De la misère des classes laborieuses en Angleterre et en France (1840), Eugène Buret explique que “ Le terme de paupérisme emprunté à l’Angleterre embrasse tout l’ensemble des phénomènes de la pauvreté. Ce mot anglais signifiera donc pour nous la misère en tant que fléau social, la misère publique ”.
La montée du paupérisme va provoquer des réflexions et des débats de grande ampleur en France aussi bien qu’en Grande-Bretagne. L’Angleterre cherche à résoudre la question du paupérisme en inventant le libre marché du travail pour les pauvres valides et le “ Workhouse ” pour les autres. La plupart des économistes français sont persuadés, pour leur part, que l’industrie est la source du paupérisme. Villeneuve de Bargemont assure que “ l’Angleterre est destinée à périr par les causes qui ont engendré le paupérisme et peut être par le paupérisme lui-même ” (1834). La France cherche une autre voie : celle d’une industrialisation limitée et d’une campagne préservée.
Le terme de paupérisme va progressivement disparaître du vocabulaire au fur et à mesure que va progresser la compréhension des différentes causes de la pauvreté (âge, maladie, chômage, etc.) et que se développent les politiques sociales modernes.
R. G. Himmelfarb, The idea of poverty. England in the early industrial age, Vintage, New York, 1985. — F.-X. Merrien (Éd.), Face à la pauvreté, Éditions Ouvrières, Paris, 1994. — K. Polanyi, La grande transformation, Gallimard, Paris, 1983.
Voir : Exclusion — Pauvreté — Précarité
François-Xavier Merrien
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Pauvreté
La définition de la pauvreté comme exclusion insoutenable devrait mettre fin à la prolifération des variantes terminologiques par lesquelles on essaye de décrire un phénomène réellement complexe. Si, comme l’explique Serge Milano, le foisonnement des vocables (pauvreté absolue, pauvreté relative, pauvreté traditionnelle, nouvelle pauvreté, pauvreté persistante, pauvreté laborieuse, grande pauvreté, pauvreté-précarité, etc.) traduit simultanément une réalité perçue différemment, selon que l’on cherche à connaître ou à agir, et une réalité difficile à cerner, fuyante et mouvante, la définition de pauvreté comme “ exclusion insoutenable ”, permet de rendre compte unitairement de la pluralité de dimensions qui caractérisent un état de pauvreté.
Pour qu’il y ait pauvreté, il faut premièrement une quantité de ressources matérielles et de citoyenneté excessivement inférieure à la moyenne, un manque tel que le partage des formes de vie communes et la coopération dans les activités habituelles de la société analysée, soient compromises. Mais, l’exclusion sociale ainsi définie devient insoutenable seulement lorsqu’elle comporte aussi une crise des conditions bio-psychiques et morales de la survie d’une personne ou d’un groupe de population.
La pauvreté est donc le résultat de la séquence causale : ressources inférieures à la moyenne — exclusion sociale — crise de la survie morale et physique.
L’individuation et la délimitation de la pauvreté comportent par conséquent la participation des acteurs sociaux à la recherche des processus de paupérisation et à la construction analytique des “ carrières de pauvret頔 sur le plan local. La présence simultanée de l’exclusion et de la crise permet de sortir de la tautologie et des paradoxes implicites dans les définitions officielles de la pauvreté, selon lesquelles pauvre est celui qui a un revenu au-dessous d’un certain seuil fixé par convention (40, 50, 66 % du revenu disponible équivalent moyen ou médian). De ce point de vue, en effet, la pauvreté est (seulement) une inégalité particulièrement grave. Sa mesure conventionnelle est équivoque (lien inverse entre pauvreté et conjoncture économique et sociale). La distinction entre pauvreté et inégalité est, par contre, indispensable parce qu’elle renvoie à différentes formes de légitimation des politiques sociales. La lutte contre la pauvreté concerne en fait la défense du droit fondamental à la survie, ce qui représente un devoir moral pour chaque société civile. La lutte contre les inégalités (d’opportunité, de revenu, de rapports de force ou de faiblesse sur le marché des biens et du travail, etc.) est, au contraire, subordonnée aux compatibilités systémiques et aux motivations socialement et politiquement partagées. En tant que telle, la mise en cause des inégalités doit être négociée. Le devoir moral de la lutte contre la pauvreté permet aussi de définir le seuil de pauvreté comme seuil d’intervention, le seuil de pauvreté que la collectivité reconnaît comme “ absolu ” et en faveur duquel elle est disposée à consentir au moins un effort financier. Il s’agit d’un seuil dans lequel la situation économique, pour importante qu’elle soit, n’est pas exclusive d’autres formes d’affiliation sociales (solidarité familiale, de groupe, formes de réciprocité, de secours mutuel) dans l’analyse des causes de pauvreté.
R. P. Gilliand (Éd.), Pauvretés et sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1990. — S. Milano, La pauvreté dans les pays riches. Du constat à l’analyse, Nathan, Paris, 1992. — K. Polanyi, La grande transformation, Aux origines politiques et économiques de notre temps, Gallimard, Paris, 1983.
Voir : Aide sociale — Exclusion — Pauvreté (Nouvelle) — Pauvreté (Seuil de) — Politiques en matière de lutte contre la pauvreté — Précarité — Prestations complémentaires (PC)
Christian Marazzi
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Pauvreté (Nouvelle)
Si “ vieille pauvret頔, ou pauvreté traditionnelle, est une notion et une condition de vie unitaire, qui traverse cumulativement les sous-systèmes (économique, culturel, résidentiel, relationnel, sanitaire) à travers lesquels s’articule la vie d’un individu ou d’un groupe, la nouvelle pauvreté n’apparaît plus comme condition existentielle unitaire et cumulative. On peut être précarisé dans un ou plusieurs sous-systèmes, sans que ceci comporte automatiquement une précarisation dans tous les autres. À la rigueur, on devrait parler de pauvreté au pluriel. La nouveauté réside dans le fait qu’aujourd’hui les facteurs qui peuvent générer les syndromes de la pauvreté se sont différenciés et multipliés (complexification de la société). Un choc aléatoire (par exemple la perte du travail) peut provoquer une rupture de l’équilibre entre disponibilité de ressources et capacité de les utiliser, sans que la perte du travail soit nécessairement suivie d’une perte excessive de ressources monétaires. Il s’ensuit que la nouvelle pauvreté traverse le corps social, elle n’est pas l’exclusivité de ceux qui se situent au-dessous d’un seuil de revenu.
R. N. Negri, Saggi sull’esclusione sociale, Il Segnalibro, Milano, 1990. — N. Luhmann, “ L’uso della identità negli ordini autodisostitutivi, in particolare nella societࠔ, in : L. Sciolla (Éd.), Identità, Rosenberg & Sallier, Torino, 1983. — A. Sen, Scelta, benessere, equità, Il Mulino, Bologna, 1986. — P. Gilliand (Éd.), Pauvretés et sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1990.
Voir : Pauvreté — Petit crédit — Précarité
Christian Marazzi
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Pauvreté (Seuil de)
Par ses effets de désignation (nombre et catégories de pauvres), la construction d’un seuil de pauvreté est toujours un enjeu scientifique et politique.
Un seuil de pauvreté peut être défini directement, voir “ objectivement ”, en recourant par exemple aux normes de la diététique (sous-nutrition = 1500 calories par jour et par personne ; malnutrition = 2500). Dans ce cas, la pauvreté absolue est, de fait, relative à l’âge, au sexe, au type d’activité et à l’état de santé.
La définition du seuil peut par contre découler d’une convention, comme dans le cas de l’International Standard of Poverty. Dans ce cas le seuil sera égal à un pourcentage du revenu (40, 50 % du revenu disponible moyen par unité de consommation, calculé en termes de revenu équivalent, en utilisant la technique des échelles d’équivalence qui permettent de tenir compte des économies d’échelles, c’est-à-dire des épargnes proportionnelles à la dimension du ménage).
Un seuil peut fonctionner soit comme indice numérique, ce qui permet de dénombrer les pauvres et de les classer par typologie, soit comme indice volumétrique, ce qui donne la mesure de l’intensité de la pauvreté en tenant compte de la distribution des pauvres au-dessous du seuil (10 % des pauvres situés à 1 % au-dessous du seuil, etc.).
R. M. Rossi, E. Sartoris, Ripensare la solidarietà, Mutamenti economici, crisi della sicurezza sociale e modelli di riforma, IRE, A. Dadò Editore, Locarno, 1995. — S. Milano, La pauvreté dans les pays riches. Du constat à l’analyse, Nathan, Paris, 1992.
Voir : Inégalités sociales — Minima Sociaux — Normes CSIAS (Conférence suisse des institutions d'action sociale) — Pauvreté
Christian Marazzi
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Peer-groups
Groupes de personnes du même âge; les relations avec des personnes du même âge jouent un rôle central pour les grands enfants, les adolescents et les jeunes. Les “ peer-groups ” jouent parfois et à certaines périodes le rôle de contre-monde face au monde des adultes.
François Höpflinger
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Peines restrictives de droit (Peines de substitution)
L’expression “ peine de substitution ” s’explique historiquement : les sanctions restrictives de droit ont été largement conçues et développées dans le but de diminuer l’usage de la privation de liberté qui, de l’avis de la majorité des spécialistes, devrait être réservée aux auteurs des infractions les plus graves : la légitimité de la peine privative de liberté est en effet largement discutée (voir sous ce terme), et sa mise en œuvre coûte extrêmement cher, surtout si la prison se donne des ambitions de réhabilitation de l’individu. Dès lors, on recherche depuis plus d’un siècle des alternatives — qui offrent un choix au juge : prison ou une autre sanction — et de véritables substituts, qui remplacent la prison.
On parle souvent de sanctions “ exécutées dans la communaut頔. C’est sous ce titre que le Conseil de l’Europe a édicté en 1992 une Recommandation (R (92) 16) établissant un cadre juridique et des garanties pour les condamnés. Ces garanties sont importantes, car l’apparente légèreté des restrictions de liberté qui accompagnent ces sanctions pourrait conduire à des excès. Une autre critique formulée à l’endroit des peines de substitution tient à ce que leur développement pourrait paradoxalement élargir la répression pénale, en ce sens que de nombreuses infractions qui seraient dépénalisées si elles ne pouvaient être sanctionnées que par la prison ou l’amende demeureront dans le droit pénal, puisqu’elles peuvent être sanctionnées plus légèrement.
La plus connue et la plus discutée des sanctions est le travail d’intérêt général ou au service de la communauté. Elle existe depuis quelques lustres en Angleterre, en France ou en Allemagne. La Suisse a suivi ses voisins avec quelque retard dû, entre autres facteurs, à la relative pauvreté des structures d’encadrement, lesquelles sont beaucoup plus développées dans des pays qui connaissent depuis plus longtemps encore d’autres peines de substitution, telles que la probation. L’introduction s’est faite prudemment, sous la forme d’une modalité d’exécution des courtes peines privatives de liberté (voir sous prison). Les cantons ont été invités à expérimenter des modèles de travail d’intérêt général ; ces expériences font parfois, comme à Berne, l’objet d’une évaluation extérieure (par un institut universitaire, voir la bibliographie).
L’avant-projet de révision du Code pénal suisse de 1993 fait la part belle aux peines restrictives de droits : travail d’intérêt général, interdiction de conduire. La privation de liberté devrait, sur le plan législatif déjà, être reléguée à un rang subsidiaire. Il est loin d’être certain que cette philosophie de la sanction s’impose.
R. M. Gisel-Bugnion, Punir sans prison, Genève, 1984. — K.-L. Kunz, T. von Witzleben, Gemeinnützige Arbeit – Modellversuch im Kanton Bern, Haupt, Bern, 1996.
Voir : Sanctions pénales — Prison (Privation de liberté) — Travail d'intérêt général
Robert Roth
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Pensions alimentaires (Avance et recouvrement)
La loi fédérale du 25 juin 1976 portant modification du Code civil suisse (filiation) est entrée en vigueur le 1er janvier 1978.
Pour les cantons, il ne s’agissait pas simplement d’éliminer de leur législation des dispositions périmées et de désigner les autorités chargées d’appliquer les nouvelles règles, mais aussi et surtout, de mettre en place les moyens légaux et matériels devant permettre l’application d’une mesure sociale nouvelle et importante contenue dans ce nouveau droit, à savoir l’aide à fournir aux personnes ayant des difficultés à obtenir le versement des contributions d’entretien qui leur étaient dues, voire, dans certains cas, d’en faire l’avance.
Progressivement, et sous des formes parfois différentes en raison de la structure fédéraliste du pays, tous les cantons, au besoin en créant de toutes pièces des services spécialisés, ont mis en place des systèmes qui, d’une manière générale, garantissent à tous — moyennant la possession d’un titre juridiquement valable — une aide au recouvrement adéquate et gratuite ; et à certains — dans des limites de revenu et de fortune, et à des conditions parfois variables d’un canton à l’autre — une avance totale ou partielle des contributions dues.
Ces dernières années, en raison notamment des difficultés financières graves des pouvoirs publics, et sous le prétexte qu’en terme de sémantique le mot d’avance comporte en lui-même la notion implicite d’un remboursement, même partiel, plusieurs cantons qui accordaient leurs prestations sans limite dans le temps autre que celle de la validité du titre juridique, ont fait marche arrière et cessent les avances après un certain temps variable d’un canton à l’autre, lorsque le débiteur est durablement insolvable ou dont le domicile est inconnu.
Dans les cas qui le justifient, c’est alors l’aide sociale qui prend le relais, avec l’inconvénient majeur de transformer sournoisement une créancière d’aliments en débitrice de prestations d’assistance. Cette évolution est regrettable à plus d’un titre car c’est justement lorsque le débiteur est définitivement défaillant que l’intervention de la collectivité est la plus nécessaire, voire indispensable. Si, “ par malheur ”, les ressources de la créancière d’aliments sont légèrement supérieures à celles justifiant l’intervention de l’aide sociale, on assiste alors à la création d’une situation de précarité confinant à la pauvreté.
R. V. Degoumois, Pensions alimentaires, aide au recouvrement et avance, application des art. 290 et 293 CCS, Médecine et Hygiène, Genève, 1982. — P. Gilliand, C. Schaub, G. Stucki, Pensions alimentaires, pratiques et enjeux, Réalités sociales, Lausanne, 1985. — F. Hainard, M. Nolde, G. Memminger, M. Micheloni, Avons nous des pauvres ? Enquête sur la précarité et la pauvreté dans le canton de Neuchâtel, Université de Neuchâtel, Faculté de droit et des sciences économiques, Institut de sociologie et de science politique, 1990.
Voir : Aide sociale — Droit de la Famille — Divorce — Famille (Politique de la) — Famille monoparentale — Obligation d’entretien
Jean-Claude Knutti
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Péréquation financière
La notion de péréquation financière caractérise le principe de répartition des ressources entre les différents niveaux institutionnels, à savoir pour la Suisse : entre la Confédération et les cantons, d’une part, entre les communes d’un canton, d’autre part. Au-delà des flux financiers, la péréquation renvoie à la répartition des tâches et compétences dans la mise en œuvre des politiques publiques. Elle est un des éléments constitutifs de la solidarité financière d’un système politique décentralisé, contribuant ainsi à la réduction des inégalités résultant des disparités cantonales et/ou communales.
Depuis 1994, un vaste processus de réforme de la péréquation financière entre Confédération et cantons est entrepris. Expertises, groupes de travail, rapports intermédiaires, chiffrages financiers ont été produits. Un large débat s’est instauré, mobilisant les acteurs-partenaires des différentes politiques publiques, plus particulièrement des politiques sociales. La complexité de la tâche et la multiplication des oppositions ont imposé une forme de moratoire. L’horizon 2003 est désormais postulé pour l’aboutissement des travaux.
R. B. Dafflon, Fédéralisme et solidarité, Institut du fédéralisme, Fribourg, 1995. — Département fédéral des finances, Der Neue Finanzausgleich zwischen Bund und Kantonen. Vernemlassung, Bern und Solothurn, 2000.
Voir : Budget social — Comptes globaux — Financement de la sécurité sociale — Impôt — Subventions
Stéphane Rossini
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Permis d’établissement
L’autorisation d’établissement (permis C) est délivrée aux ressortissants étrangers qui ont accompli un séjour ininterrompu de dix ans en Suisse. Ce délai est de cinq ans pour les citoyens de la communauté européenne et de quelques pays avec qui la Suisse a conclu un accord, ainsi que pour les réfugiés reconnus comme tels et les conjoint(e) s de suisse (sse) s
Le permis C permet un séjour illimité en Suisse. Il donne le droit à son détenteur de changer librement de canton et d’employeur. Il lui permet également d’exercer une activité lucrative indépendante. Le permis C confère au travailleur étranger les mêmes droits qu’au travailleur suisse en matière d’emploi et d’assurances sociales.
Les bénéficiaires du permis C ont le droit de vote dans le canton de Neuchâtel, au niveau communal, et dans le canton du Jura au niveau communal et cantonal. Dans le canton du Jura les étrangers sont éligibles au niveau communal.
Un séjour de plus de 6 mois hors de Suisse signifie, à quelques exceptions près, la perte définitive de l’autorisation.
R. P. Kenel, Ch. Schaffer, La main-d’œuvre étrangère, guide pratique et juridique, UVACIM, Lausanne, 1995.
Sites Internet : www.auslaender.ch/BfA.asp?lang=f — www.asile.admin.ch/sitemap_f. htm
Voir : Autorisation de séjour — Étrangers (Politique à l'égard des) — Immigration — Office fédéral des Étrangers (OFE) — Regroupement familial
Oscar Tosato
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Permis de séjour àð Autorisation de séjour
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Personnalité (Protection de la)
La protection de la personnalité recouvre l ensemble des valeurs essentielles, physiques, affectives et sociales liées à la personne humaine, dont cette dernière jouit de par sa seule existence. En font notamment partie :
— le droit à la vie et à l’intégrité physique,
— le respect de la santé physique et psychique,
— l’intégrité morale et la considération sociale, notamment les sentiments d’honneur, de dignité, d’estime professionnelle,
— le respect de la sphère privée et des données personnelles,
— la jouissance des libertés individuelles, notamment la liberté d’expression, de conscience, d’association, ainsi que la liberté sexuelle et le droit à la différence,
— le droit au nom.
En principe toute atteinte aux droits de la personnalité est illicite et la victime peut réclamer la protection des tribunaux pour faire cesser l’atteinte et solliciter une réparation (indemnité pour tort moral et/ou dommages et intérêts).
Dans le cadre d’un contrat de travail, l’employeur est tenu légalement de protéger la personnalité de ses salariés de toute atteinte, qu’elle soit causée par un collègue de travail, un supérieur hiérarchique ou un tiers (fournisseur, client, etc…). Il répond personnellement de tout manquement fautif en cette matière.
R. A. Bucher, Personnes physiques et protection de la personnalité, Helbing & Lichtenhahn, Bâle, 1999.
Voir : Bien-être — Image de soi — Socialisation Usure professionnelle - Burnout
Jean-Bernard Waeber
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Perte de gain (Allocations pour) (APG)
Objectif
Les prestations du régime des allocations pour perte de gain (APG) en faveur des personnes servant dans l’armée, le service civil ou la protection civile compensent le manque de gain pour la période affectée ou service militaire, service civil ou à la protection civile. Nommée à l’origine “ protection des militaires ”, cette assurance a été introduite pendant la deuxième guerre mondiale.
Personnes assurées
Tout comme l’assurance-invalidité, les APG sont en relation étroite avec l’AVS. Cette assurance couvre l’ensemble de la population, sans restriction. Ont droit aux allocations pour perte de gain les personnes domiciliées en Suisse ou à l’étranger qui accomplissent leur service au sein de l’armée suisse, du service civil ou de la protection civile. Les personnes qui effectuent une mission au sein de la Croix-Rouge, des services complémentaires ou qui participent aux cours fédéraux et cantonaux pour moniteurs de Jeunesse + Sport ainsi qu’aux cours pour moniteurs de jeunes tireurs bénéficient également des prestations des APG.
Cotisations
Le financement du régime des APG est assuré par les personnes soumises aux cotisations et par les employeurs. Le cercle des personnes assujetties se recouvre avec celui des personnes soumises à l’AVS. À l'inverse des dispositions régissant l’AVS, l’AI et le régime fédéral des allocations familiales, les pouvoirs publics (Confédération et cantons) ne versent aucune contribution au régime des APG. Les cotisations sont perçues sous la forme d’un supplément aux cotisations AVS. Leur prise en charge incombe par moitié aux employeurs et aux employés. Lorsqu’on applique dans l’AVS un barème dégressif à l’égard des personnes de condition indépendante ou des salariés dont l’employeur n’est pas soumis aux cotisations, la contribution due au régime des APG subit une réduction correspondante.
Prestations
Le régime des APG prévoit les prestations suivantes :
— L’allocation de base allouée à toute personne qui accompli son service indépendamment de son état civil et de l’exercice d’une activité lucrative.
— L’allocation pour enfants est attribuée aux enfants de l’ayant droit, à ceux qui sont recueillis ou aux enfants pour lesquels l’ayant droit verse une pension alimentaire (jusqu’à l’âge de 18 ou 25 en cas d’apprentissage ou d’études).
— L’allocation pour frais de garde si l’ayant droit a des enfants de moins de 16 ans et que font ménage commun.
— L’allocation d’exploitation est versée à l’ayant droit qui supporte les frais d’une exploitation, dont il retire la majeure partie de son revenu – activité lucrative indépendante (définie par la loi).
Les modalités de calcul et la détermination du montant minimal et maximal des allocations sont indiquées dans la loi, son règlement et les “ Tables des allocations journalières APG ” éditées pour l’OFAS et dont l’usage est obligatoire.
Application du régime des APG
L’application du régime des APG incombe aux organes de l’AVS, soit les employeurs, les caisses de compensation et la Centrale de compensation, assistés eux-mêmes par les comptables de l’armée de la protection civile.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Sécurité sociale (Architecture de la)
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Petit crédit
Par petit crédit, on entend généralement les formes les plus traditionnelles de crédit à la consommation, comme les crédits en espèces (prêts comptant et à terme). Le petit crédit est réglementé par la loi fédérale sur le crédit à la consommation (LCC). En 2000, selon les chiffres de la Centrale d’information de crédit (CIC, banque de données privée des prêteurs professionnels), environ 370’000 petits crédits courent, pour un volume d’environ 5 milliards de francs.
En raison des risques de dépendance et de surendettement qu'il comporte, ainsi que de l’aspect minimaliste de la protection légale prévue, le petit crédit pose problème : forme d'engagement à (plus ou moins) long terme, il est reconnu comme un facteur paupérisant pour les personnes, en particulier lorsque le revenu diminue suite à une modification de la situation (séparation, divorce, maladie ou chômage, par exemple). Différentes études ont démontré le rôle important que jouent les petits crédits dans les processus aboutissant au surendettement.
Voir : Crédit à la consommation — Désendettement — Dettes — Pauvreté (Nouvelle) — Surendettement.
Caroline Regamey
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Phase pré-parlementaire
La phase pré-parlementaire est la première étape dans l’élaboration des lois. Sur demande du Conseil fédéral et par l’entremise de consultations extérieures (commissions extra-parlementaires et procédures de consultation), l’administration prépare un avant-projet. Si le Gouvernement l’adopte, il deviendra le “ Projet du Conseil fédéral ” et sera transmis aux Chambres accompagné de son “ Message ”.
Les premières études ont expliqué l’importance de cette phase par l’existence du référendum : elle permettrait l’intégration au processus décisionnel des acteurs à “ capacité référendaire ” (Neidhart). Des travaux plus récents relativisent cette thèse en insistant sur la dimension consensuelle de cette phase qui découlerait de la nécessité d’éviter les conflits dans une société traversée par de nombreux clivages culturels (Lijphart), ou encore, de l’importance de la cohésion interne pour un petit pays ouvert sur l’économie mondiale (Katzenstein). D’autres approches décrivent le degré de consultation de la “ société civile ” (Poitry), la nature des groupes consultés (Germann), ainsi que l’imbrication des secteurs public et privé dans une optique néo-corporatiste (Lehmbruch/Schmitter).
R. R. Germann e. a., Experts et commissions de la Confédération, Presses Polytechniques Romandes, Lausanne, 1985. — P. Katzenstein, Small States in World Markets. Industrial Policy in Europe, Cornell University Press, Ithaca, 1985. — G. Lehmbruch, P. C. Schmitter (Éds), Patterns of Corporatist Policy-making, Sage, London, 1982. — A. Lijphart, Democracy in Plural Societies, Yale University Press, New Haven, 1974. — L. Neidhart, Plebiszit und pluralitäre Demokratie, Franke, Berne, 1970. — A. Poitry, La fonction d’ordre de l’État, Lang, Berne, 1989.
Voir : Commissions extra-parlementaires — Démocratie (et politique sociale) — Procédures de consultation — Référendum
Christophe Al Kurdi
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Placement familial
L’enfant qui, pour différentes raisons, momentanées ou durables, ne peut vivre auprès de ses parents ou de la personne détentrice de l’autorité parentale, peut être accueilli ou placé pour une durée limitée ou indéterminée dans une autre famille, apparentée ou non. En Suisse, le placement d’enfants est régi par l’Ordonnance fédérale sur le placement d’enfants (OCF 77). La famille accueillante ne se substitue pas à la famille de sang, mais reçoit pour mission de veiller à la prise en charge et à l’éducation domestique de l’enfant, en complémentarité avec la famille d’origine. La famille d’accueil doit être agréée par les instances désignées par la législation et elle est souvent soutenue dans sa tâche, par le service social référent du placement de l’enfant.
Voir : Famille d’accueil — Mauvais traitements — Protection de l’enfant
Jean Vallet
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Plan Beveridge
En 1941, le gouvernement britannique désigna une commission interministérielle placée sous la présidence de Sir William Beveridge et chargée de présenter un rapport sur les régimes d’assurances sociales en vigueur, ainsi que sur les services connexes, en vue de formuler des recommandations. Le rapport, signé par Beveridge, fut déposé en novembre 1942.
Le rapport présente des propositions concrètes tendant à la mise sur pied d’un plan général de sécurité sociale, comportant notamment l’unification des assurances sociales, la création d’un service général de santé comprenant la réparation des accidents de travail, l’institution d’allocations pour enfants, le maintien de l’emploi et la prévention d’un chômage massif. Les assurances sociales doivent reposer sur le principe d’une couverture généralisée à l’ensemble de la population et de l’uniformité des contributions et des indemnités.
R. E. Milhaud, Le Plan Beveridge, Les Annales de l’économie collective, Genève, 1943. — E.-F. Riemensberger, Qu’est-ce que le Plan Beveridge ?, Neuchâtel, 1974.
Voir : Déclaration de Philadelphie — Planification sociale
Alexandre Berenstein
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Planification sociale
Planifier consiste à explorer des besoins et à définir une ligne de conduite (une politique publique par ex.) afin d’utiliser “ au mieux et aux moindres frais ” les ressources monétaires et humaines, ainsi que les moyens techniques disponibles, en vue d’atteindre des objectifs dûment choisis et coordonnés. Planifier est une action volontariste, subordonnée à une vision prospective à longue échéance.
La planification est une démarche technique, fondée sur des recherches et l’identification des moyens à appliquer, dans le temps et l’espace, pour joindre les buts fixés. Elle exige transparence des faits (inventaire, équipement, personnel, etc.) et des intentions, exposé des points de vue et des obstacles, articulation et relations aux diverses politiques, estimation du coût et modalités de financement. La planification est un processus qui met en jeu des valeurs pouvant différer grandement selon les acteurs ; en conséquence, elle relève de la rationalité et de la négociation ; elle est un lieu où s’expriment les débats, les conflits d’intérêts et de pouvoirs ; elle requiert une instance d’arbitrage.
Le plan est un rapport (acte politique, décision d’entreprise) qui présente la stratégie, les options, expose les motifs, indique les priorités et l’étalement des réalisations dans le temps, leur implantation géographique ou leur date de mise en application. Réducteur d’incertitudes, le plan est d’abord aide à la décision — puis décision après son acceptation ; il vise la cohérence et le pilotage de la mise en œuvre, dans une perspective de rationalisation et d’humanisation.
La planification s’applique aux domaines sociaux : sécurité sociale, hospitalisation, système de santé, mesures concernant la jeunesse, la vieillesse, l’invalidité, l’emploi, le logement, l’aménagement du territoire, etc.
N.B. La planification peut être impérative (ex-URSS), semi-contraignante, indicative, molle, etc.
Voir : Panel des ménages — Plan Beveridge — Politique de la santé (Société suisse pour la) (SSPS/SGGP) — Politiques publiques — Prospective
Pierre Gilliand
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Planning familial
Le planning familial est un domaine de la médecine sociale et préventive visant à rendre possibles, par une action psychosociale et médicale, la compréhension, la discussion et le choix face à la procréation.
Aujourd’hui et en Europe de l’Ouest, cette spécialité traite non seulement de la santé sexuelle et procréative, mais aussi de la plupart des aspects de la vie affective. En tant que telle, elle interfère grandement avec le bien-être et la santé des individus. Elle contribue ainsi à promouvoir la qualité de la vie.
Les procédés contraceptifs remontent à des temps immémoriaux. Cependant, c’est la première fois dans l’histoire de l’humanité que la femme — et par elle le couple — peut, en principe, librement et totalement maîtriser sa fécondité ; issue de la révolution démographique, on n’en mesure pas encore toutes les conséquences sociopolitiques sur l’organisation sociale et familiale.
L’IPPF (International Parenthood Planification Federation) a défini huit catégories de préoccupations majeures dans ce domaine : la grossesse non désirée et l’avortement à risque, la mortalité maternelle, les maladies sexuellement transmissibles (incluant le sida), la grossesse à risque (médico-psychosocial), l’infécondité, la violence à l’encontre des femmes et les mutilations génitales féminines, les déviances sexuelles (prostitution, abus sexuels et mobbing, inceste, perversions psychopathologiques). L’action des centres de planning familial intègre les moyens préventifs et curatifs de ces éléments.
En Suisse romande, les centres de planning familial offrent aussi des consultations de grossesse ; ils sont en principe à la fois informateurs et prescripteurs, tout en étant extra-hospitaliers. Toutefois, des consultations à l’hôpital sont de plus en plus souvent couplées aux consultations en ville. Ils proposent pour répondre à la demande du public :
— Un accueil téléphonique pour toutes les questions touchant à la contraception, à la grossesse, à la sexualité, à la vie de la famille et du couple.
— Un entretien psychosocial visant à clarifier certains aspects de ces demandes et répondre aux questions d’information.
— Une préparation à la naissance avec conseils juridiques et sociaux à la demande.
— Une relation d’aide temporaire en cas de problèmes particuliers.
— Une rencontre en groupe occasionnellement pour aborder une question commune à plusieurs personnes.
— Une consultation gynécologique et une prescription contraceptive.
— Des contrôles gynécologiques réguliers avec dépistage des maladies transmises sexuellement et du cancer dans la limite du cahier des charges du médecin.
— Des campagnes de promotion de la santé et de prévention des comportements à risque auprès de populations ciblées.
— Un enseignement de la pédagogie de la vie affective et sexuelle auprès des professionnels concernés par ce domaine.
— Les équipes de travail des différents centres sont pluridisciplinaires et constituées de :
— Un ou plusieurs médecins gynécologues.
— Un ou plusieurs conseillères ou conseillers en planning familial, sages-femmes et assistantes sociales.
— Une ou plusieurs secrétaires ou assistantes médicales.
Sites Internet : www.svss-uspda.ch/famplare.htm
Voir : Avortement — Famille (Politique de la) — Femmes (Émancipation des) — Prévention
Charles Riolo
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Politique budgétaire
Politique économique ayant pour instrument le budget de l’État. Elle peut être orientée vers la relance par la demande (par le déficit budgétaire) ou au contraire, vers l’assainissement de l’économie par le désendettement de l’État (réduction des dépenses publiques, rigueur budgétaire). En Suisse, le débat a lieu périodiquement sur l’opportunité de mettre en œuvre une telle politique. Au milieu des années '90, le Parlement a libéré un crédit de quelque 500 millions de francs au titre de la relance.
jpf
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Politique conjoncturelle
Politique économique dont l’objectif est d’obtenir la réalisation d’équilibres à court terme (réduction du taux d’inflation, baisse du taux de chômage, équilibre extérieur). C’est la “ méthode ” la plus fréquemment utilisée par les collectivités publiques en Suisse, au cours des dernières décennies.
Voir : Politique structurelle
jpf
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Politique criminelle
La politique criminelle est un “ art ” difficile, que chacun pourtant maîtrise si facilement, à l’heure de l’apéro, au Café du commerce... Elle devrait être la résultante, toujours fragile, du meilleur équilibre entre les moyens préventifs (proactifs) et les mesures répressives (réactives) qu’une société met en œuvre pour tenter de maîtriser la criminalité et les divers problèmes qui y sont liés. Son but essentiel doit être le maintien de la qualité de la vie en société (meilleure “ convivance ” possible). Dans la poursuite de ce but, les défis sont nombreux puisqu’ils consistent à la fois à réduire le plus possible les risques et les dommages engendrés par la criminalité, tout en limitant au maximum les effets pervers causés par la lutte contre la criminalité, en particulier les atteintes aux droits et libertés fondamentaux des citoyens.
En matière d’élaboration et de réalisation d’une politique cohérente – qu’il s’agisse de politique sociale, familiale, criminelle ou autre – le système fédéraliste suisse ne facilite pas les choses. Tout au moins nécessiterait-il une meilleure réflexion d’ensemble et une collaboration plus efficace aux trois échelons du système politique suisse : fédéral (lois unifiées), cantonal (organisation coordonnée) et communal (politique de la ville par exemple). Les diverses connaissances acquises empiriquement par les “ sciences criminelles ” (criminologie, criminalistique, droit pénal, sociologie et psychologie criminelles notamment) constituent une base essentielle à partir de laquelle devrait être édifiée une politique criminelle rationnelle. Ce n’est encore que rarement le cas puisque les actions concrètes de “ lutte contre le crime ” sont régulièrement le fruit de marchandages politiques et résultent surtout de confrontations entre experts, politiciens, magistrats, associations et groupes de pression divers, sondages d’opinion et médias. Les exemples de telles confrontations ne manquent pas en Suisse : pensons par exemple aux débats liés à la politique de décriminalisation de l’avortement ou de l’euthanasie, de dépénalisation en matière de consommation de stupéfiants, de prévention de la violence (en milieux urbain ou scolaire), de lutte contre les diverses formes de la criminalité organisée (traite d’êtres humains, trafics de drogues ou d’armes, corruption, blanchiment d’argent, etc.). Enfin, ce que nos compatriotes alémaniques appellent la politique de la “ sécurité intérieure ” (innere Sicherheit, un concept qui n’a pas la cote en Suisse latine !) se heurte à une difficulté supplémentaire : les problèmes sociaux, y compris bien sûr ceux liés à la criminalité, ne sont pas limités aux frontières locales ou nationales, mais leurs dimensions transfrontalières et internationales sont toujours plus prégnantes (fossé Nord-Sud, pauvreté, migrations, libre échange, nouveaux moyens de communication, etc.).
R. P. Hebberecht, F. Sack (Éds), La prévention de la délinquance en Europe, L’Harmattan, Paris, 1997. — K.-L. Kunz, Kriminalpolitik in Entenhausen, Helbing & Lichtenhahn, Basel, 1999. — N. Queloz et al., Processus de corruption en Suisse, Résultats de recherche et stratégie de prévention et de riposte, Helbing & Lichtenhahn, Bâle/Genève, 2000. — P. Robert, Le citoyen, le crime et l’État, Librairie Droz, Genève/Paris, 1999. — L.-W. Sherman et al., Preventing Crime : What Works, What Doesn’t, What’s Promising, National Institute of Justice, Washington D.C., 1997.
Voir : Contrôle social — Délinquance — Droits de l’homme (Convention européenne des) — Office fédéral de la police (OFP) — Prévention — Peines restrictives de droit (Peines de substitution) — Prison (Privation de liberté) — Victimes d’infractions (Loi fédéral sur l'aide aux)
Nicolas Queloz
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Politique de la santé
La politique de la santé est un ensemble de mesures préventives et d’actions curatives visant à maintenir et promouvoir “ un état de bien-être physique, mental et social ” (OMS), à limiter les risques prévisibles ou, lors de leur survenance (maladie, accident, impotence), à soigner les “ patients ”, les guérir, ou soulager, ou accompagner.
La santé, pour la philosophie grecque, est équilibre et harmonie, emmerie ou bon ordre, eucrasie ou bon mélange. Au plan personnel, la santé peut être considérée comme un fonctionnement idoine du corps et de l’esprit, une adaptation au milieu de vie. Cependant cette définition “ positive ” laisse place à la subjectivité et n’est pas opérationnelle. Aussi la santé est-elle généralement abordée de façon “ indirecte ” : une “ absence de maladie et d’infirmit頔 (OMS), ou “ négative ” : décès prématuré évitable, maladie, accident, handicap.
L’épidémiologie identifie, par son approche, quatre composantes principales de la santé : la biologie humaine (génétique, physiologie, vieillissement) ; l’environnement et les conditions de vie (habitat, travail, alimentation, aspects physiques, sociaux, psychologiques) ; le style de vie (hygiène, comportements de consommation, loisirs) ; l’organisation du système de santé (prévention primaire — vaccins —, dépistage, médecine curative, réadaptation, soins palliatifs, ainsi que sécurité sociale, modes de financement, accès aux soins — et donc indirectement les disparités et inégalités d’accès).
Le domaine de la santé “ réparatrice ”, qui n’a guère de frontières, est d’une vaste complexité. Les champs, les acteurs et les personnels y sont multiples : médecine, soins infirmiers, prévention, administration et technique dans les secteurs ambulatoire, hospitalier, d’hébergement médico-social et de maintien à domicile, fabrication et commerce de produits pharmaceutiques et d’appareils médicaux, construction d’établissements de soins, enseignement et recherche scientifique, etc.
Au plan collectif de la santé publique, la décision, l’organisation, la planification, le pilotage, la surveillance, l’arbitrage et, le cas échéant, la sanction — c’est-à-dire la politique de la santé — relèvent essentiellement des pouvoirs publics (en Suisse, les niveaux Confédération, cantons et communes) ; ceux-ci tiennent compte des rapports de force, débats parlementaires et groupes de pression.
Les objectifs de la politique de la santé “ réparatrice ” sont la lutte contre la mort, la réduction de la morbidité, la guérison, ou le soulagement, ou l’accompagnement des personnes handicapées ou en fin de vie.
L’évaluation politique et scientifique prend en compte les effets — réels et attendus — et les moyens d’action — présents et espérés (prospective). D’où une batterie d’indicateurs sanitaires. La démographie fournit deux évaluateurs indirects : la mortalité infantile (en Suisse : 180 ‰ en 1880, 32 ‰ en 1950, moins de 5 ‰ en 2000) et l’espérance de vie (à la naissance) : 42 ans en 1880, 68 ans en 1950, 79 ans en 1997 (75 ans pour le sexe masculin, 82 ans pour le sexe féminin), et peut-être 85 ans vers 2050 ?
Le coût du système de santé est devenu une préoccupation. La santé n’a pas de prix, mais elle a un budget. En Suisse, la quote-part est de 3,5 % du PIB vers 1950, d'environ 11 % en 2000, plus demain avec le vieillissement inéluctable de la population, ainsi que les progrès de la médecine et des sciences qui l’accompagnent. En 1998, plus de la moitié du coût est affectée à l’hospitalisation et à l’hébergement médico-social (vieillards, handicapés), un quart aux honoraires des médecins et dentistes, 1/12 pour les produits pharmaceutiques, 1/12 pour les tâches de l’État et des assurances, et la portion congrue (2 %) pour les soins à domicile, etc. Le financement passe pour plus de moitié par les diverses assurances, un cinquième par les pouvoirs publics (plus d’un quart avec les subventions), plus d’un quart pour le paiement direct des ménages, (médicaments sans ordonnance, dentiste, frais hôteliers en établissements pour malades de longue durée), etc. Montants qui financent des emplois : 3,5 % des actifs vers 1950, 10-11 % probablement en 2000 (évolution similaire à celle du coût relatif au PIB).
L’éthique prend une importance croissante. La santé fait l’objet de surenchère et de dérive : surconsommation, surprestation, mercantilisation ; et les percées technologiques peuvent entraîner des bienfaits comme des abus. La logique des moyens, à laquelle notre société est impérativement tenue, jamais ne doit faire oublier les finalités : plus que des années à la vie, ajouter de la vie aux années.
Sites Internet : www.admin.ch/bag/f — www.sggp.ch
Voir : Coûts de la santé — Politique de la santé (Société suisse pour) (SSPS/SGGP) — Prévention — Recherche épidémiologique — Santé de la reproduction — Santé publique
Pierre Gilliand
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Politique de la santé (Société suisse pour la) (SSPS/SGGP)
Fondée en 1976, la SSPS est une association qui a pour buts d'améliorer et coordonner la politique sanitaire. Son siège est à Muri BE. Actuellement, elle compte 1670 membres : 1406 membres individuels et 264 membres collectifs (associations suisses, hôpitaux, caisses-maladie, cantons, entreprises privées, fondations, etc.).
Des groupes régionaux existent à Bâle, Berne, Genève, Lausanne, St-Gall et Zurich. Leur activité principale est d'organiser des discussions et des conférences (env. 150 à ce jour). Sur le plan national, la SSPS a organisé 84 congrès et symposiums.
“ Politique de la santé : informations ” est le nom d'un bulletin publié en 2'200 exemplaires. Depuis 1977, 13'300 articles brefs y ont paru. En plus, la SSPS publie des livres (64 à ce jour) sur le système sanitaire en Suisse.
Quelques sujets sont traités prioritairement par la SSPS, p. ex. les droits des patients, les coûts de la médecine, la rationalisation et le rationnement, l'assurance-maladie, les HMO, les soins, la prévention, la qualité, la planification, les tarifs et la réforme des structures politiques.
Site Internet : www.sggp.ch
Voir : Coûts de la santé — Politique de la santé — Planification sociale — Prévention — Soins et aide à domicile
Gerhard Kocher
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Politique fiscale
L'État remplit de multiples fonctions et ses tâches vont en s'amplifiant. Pour les analyser, il est souhaitable des les classer par catégories bien délimitées. La classification qui s'est imposée auprès des économistes a été proposée en 1959 par Richard Musgrave, un économiste américain; elle à l'avantage de faire coïncider les principales fonctions du secteur public avec trois domaines bien définis de l'analyse économique et des politiques publiques.
La branche allocative s'occupe de l'allocation optimale des ressources rares pour en tirer le meilleur parti pour le bien-être de la collectivité : quelles tâches sont privées, lesquelles relèvent de l'État et, pour ces dernières, selon quelles priorités, puisque les ressources sont limitées ? La fonction de redistribution a pour objet de répartir de manière équitable la capacité économique – en termes plus concrets les revenus et la fortune – entre les individus, entre les générations ou entre les régions. Enfin, la fonction de stabilisation cherche à maîtriser les grandeurs macroéconomiques, comme le produit intérieur brut (PIB) ou le revenu national (RN), en favorisant la croissance (pas seulement quantitative) de l'économie nationale, en évitant l'inflation ou le chômage.
La politique fiscale concerne l'ensemble des démarches budgétaires liées au financement du secteur public, visant à atteindre ces trois objectifs ou, pour le moins, visant une convergence vers ceux-ci, sous la contrainte du budget disponible – en fait, sous la contrainte des ressources budgétaires, avant tout les impôts, que les électeurs-contribuables décident démocratiquement d'attribuer à l'État.
Les domaines de la politique fiscale concernent :
l'ensemble des prélèvements du secteur public sur l'économie : les impôts, les taxes ou les redevances d'utilisation et les cotisations sociales;
dans un État fédéral ou décentralisé, la répartition des ressources (et du droit à l'emprunt) entre les niveaux fédéral (central), cantonal (régional), communal (local) et entre les gouvernements d'un même niveaux (les cantons, ou les communes d'un canton);
la répartition entre les catégories de ressources : décider de financer un budget public par l'impôt, ou dissocier les diverses tâches budgétisées pour les financer individuellement en appliquant le principe de l'utilisateur-payeur ou celui du pollueur-payeur, si cela est possible, n'a pas la même conséquence en terme d'efficience allocative et d'équité. Ou bien, financer une partie des assurances sociales par la TVA plutôt que par des cotisations sur les salaires, n'a pas le même impact sur l'amplitude des prestations et la redistribution des incidences financières entre les catégories de payeurs, consommateurs-contribuables et non plus assurés.
la répartition des impôts entre les diverses catégories. À budget constant, chaque mesure d'allègement fiscal consentie à un groupe particulier, pour des motifs de politique (de concurrence) régionale (cantonale), ou pour des raisons de politique sociale, déplace la pression fiscale sur une autre catégorie de contribuables. Proposer une hausse de la TVA pour diminuer l'impôt fédéral direct serait une démarche relevant de cette catégorie de problèmes.
Notons que la politique fiscale se fait en concours avec d'autres politiques publiques : la fiscalité verte ou l'impôt écologique participent à la fois de la politique fiscale et de la politique environnementale. Choisir la TVA pour financer l'AVS appartient à la politique fiscale et à la politique sociale. Si elle permet de diminuer la pression fiscale de l'impôt fédéral direct, la politique fiscale entre alors aussi dans le champ de la péréquation. Ces mesures peuvent se trouver en situation de complémentarité (l'amélioration des résultats de l'une contribue à ceux de l'autre) ou au contraire d'antagonisme (les mesures prises au titre d'une fonction pénalisent une autre) : il faut alors transiger sur un compromis acceptable.
R. L. Weber, L'État, acteur économique; analyse économique du rôle de l'État, Economica, Paris, 2e édition, 1991 — OCDE, Étude des politiques fiscales de l'OCDE : les pouvoirs fiscaux des administrations infranationales No 1, Paris, 2000.
Voir : Autoconsommation — Évasion fiscale — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Impôt — Impôt (et sécurité sociale) — Impôt négatif — Pression fiscale
Bernard Dafflon
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Politique intergénérationnelle
Politique qui cible la promotion de bonnes relations intergénérationnelles. A l'heure actuelle, il n'existe pas, au niveau fédéral ni au niveau cantonal, de politique intergénérationnelle explicite. Quelles expériences de projets intergénérationnels sont développées au sein d’institutions de prise en charge des personnes âgées (intégration d’une crèche dans un EMS, visites régulières de jeunes aux résidents, rencontres entre générations, etc.), qui visent à créer du lien social entre les générations, mais il s’agit là d’initiatives ponctuelles et privées.
François Höpflinger
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Politique sociale
Part de l’État (en Suisse : Confédération, cantons, communes) dans l’action sociale. Autrement dit, activités de l’État face aux problèmes sociaux.
Il s’agit d’abord d’activités à but explicitement social menées par l’État lui-même et ses services (AVS, enseignement public, départements cantonaux de la santé, etc.). Mais il n’y a pas de limite évidente entre de telles activités et la politique de l’État considérée dans son ensemble, puisque, au moins officiellement, toute action de l’État a pour objet le bien de la population. La politique économique, en particulier, ne doit donc pas être envisagée seulement sous ses aspects techniques, mais aussi sous l’angle social : place des préoccupations d’ordre social dans l’élaboration et l’exécution des divers volets de cette politique, évaluation, du point de vue social, des résultats obtenus effectivement.
En plus, l’État est impliqué de diverses façons dans les activités de quantité d’institutions semi-officielles ou privées d’action sociale, notamment, par des subventions, avec les conditions qui les accompagnent, par des lois et règlements qu’il édicte et dont il contrôle l’application, de même qu’en se faisant représenter dans les organes dirigeants de ces institutions. Ainsi, le domaine de la politique sociale, aussi vaste que celui de la politique tout court, comme noté plus haut, recouvre encore à peu près complètement tout le reste de celui de l’action sociale.
R. J.-P. Fragnière, Pour l’étude de la politique sociale en Suisse, Certificat de perfectionnement en politique sociale, Département de sociologie, Université de Genève et École d’études sociales et pédagogiques, Lausanne, 1997. — P. de Laubier, La politique sociale dans les sociétés industrielles : 1800 à nos jours, Economica, Paris, 1984.
Voir : Action sociale — Économie sociale — Politiques publiques — Problèmes sociaux — Social
Roger Girod
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Politique structurelle
Ensemble des politiques économiques dont le but est de modifier la structure même de l’économie nationale (appareil productif, structure de l’emploi, comportement des agents, etc.). La planification indicative, les politiques de nationalisation et d’aménagement du territoire relèvent de la politique structurelle. Sa réalisation s’étale sur une longue période (long terme). Elle s’oppose aux politiques conjoncturelles qui visent seulement à réaliser des équilibres à court terme.
Voir : Politique conjoncturelle
jpf
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Politiques en matière de lutte contre la pauvreté
Parmi les mesures étatiques de lutte contre la pauvreté, il faut bien évidemment citer la plupart des régimes constituant le système de sécurité sociale actuel en Suisse. Parmi les plus importants, l’AVS, l’AI, les PC, la LACI au niveau fédéral, l’aide sociale au niveau cantonal sont tous appelés à se substituer (ou compléter le cas échéant) à un revenu provenant d’une activité lucrative, à défaut duquel les personnes concernées risquent de se retrouver dans une situation de pauvreté ou de précarité. La LAMal à son tour est appelée à combler des dépenses extraordinaires, le plus souvent imprévisibles, qui, dans certaines situations, pourraient mettre en danger l’équilibre budgétaire du ménage en cas de maladie ou d’accident. Dans ce contexte, on distingue entre le principe de “ causalit頔 qui prévaut dans le domaine des assurances sociales, et le principe de “ finalit頔 qui régit l’aide sociale, celle-ci intervenant quelle que soit la cause de la pauvreté. Même s’il répond à une grande partie des besoins, le système helvétique de sécurité sociale est aujourd’hui critiqué pour son manque de systématique et de transparence et son inadéquation par rapport aux récents changements sociaux et économiques, s’orientant encore et toujours au modèle familial et professionnel traditionnel. L’aide sociale en particulier est également critiquée pour contenir certains aspects qualifiées “ d’archaïques ”, tels la remboursabilité ou l’obligation d’entretien en vertu du droit de la famille. Sous l’effet de la crise économique des années nonante et de l’apparition de nouvelles formes de pauvreté, les instruments financiers de lutte contre la pauvreté, dans le cadre de l’aide sociale notamment, ont été complétés ces dernières années par de nouvelles dispositions dans la plupart des cantons. La Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) de son côté a procédé en 1998 à une révision des normes d’aide sociale et y a introduit un nouveau chapitre concernant les “ mesures favorisant l’intégration sociale et l’insertion professionnelle ”. Dans ce cadre, les nouvelles dispositions cantonales (ou communales) d’aide sociale introduisent dans la plupart des cas les notions de “ contre-prestation ” et/ou de “ contrat ”. Ces notions sont cependant loin de faire l’unanimité, et dans le débat les concernant, deux conceptions opposées s’affrontent. L’une prône “ l’activité compensatoire ”, à savoir l’exigence faite au bénéficiaire par les pouvoirs publics de fournir une contrepartie pour l’aide financière qu’il reçoit, afin que celle-ci “ ne soit pas prétexte à l’oisivet頔. Par conséquent, dans cette conception, l’usager peut être “ assujetti ” à une mesure d’insertion le cas échéant. L’autre conception postule le droit du bénéficiaire, en sus de l’aide financière, à des mesures de (ré-) insertion sociale et/ou professionnelle correspondant à sa situation individuelle, sans qu’une contrainte soit exercée sur l’allocataire de participer à une telle mesure. Ceci avec le but de lutter contre l’exclusion et de permettre au bénéficiaire de se libérer le plus rapidement possible de la dépendance financière. Par ailleurs, on parle également de plus en plus de “ systèmes d’incitation ” à la participation à des mesures d’insertion en octroyant au bénéficiaire un supplément financier. Cette conception est également combattue par d’aucuns qui la qualifient “ d’aide sociale au mérite ”. D’autres la refusent l’estimant superflue ; le bénéficiaire, sous menace de réduction des prestations financières le cas échéant, étant de toute manière obligé de tout entreprendre pour retrouver son autonomie financière. Les nouveaux régimes cantonaux d’aide sociale ne relèvent cependant que rarement de manière “ pure ” de l’une ou de l’autre de ces conceptions, mais constituent souvent un savant dosage entre elles.
R. P. Farago, “ Prévenir et combattre la pauvreté. Forces et limites des mesures prises par l’État ”, in : Sécurité sociale, No 3, OFAS, Berne, 1995. — U. Tecklenburg, “ Les nouveaux modèles cantonaux d’aide sociale ”, in : Sécurité sociale, No 1, 1997. — OCDE, Combattre l’exclusion. L’aide sociale au Canada et en Suisse, Paris, 1999. — U. Tecklenburg, Rapport sur les évaluations des mesures d’insertion professionnelle ou sociale en faveur des chômeurs en fin de droit ou des bénéficiaires de l’aide sociale, CSIAS, Berne, 2000.
Voir : Action sociale — Pauvreté — Mesures d’insertion — Norme CSIAS (Conférence suisse des institutions d'action sociale) — Revenu minimum d’insertion (RMI) — Revenu minimum de réinsertion (RMR) — Sécurité sociale
Ueli Tecklenburg
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Politiques publiques
Les symptômes d’un problème social sont le point de départ d’une prise de conscience et d’un débat sur la nécessité d’une politique publique.
Une politique publique se définit comme un ensemble de décisions juridiques et d’actions, cohérentes et ciblées vers des objectifs, que les acteurs privés, corporatistes ou étatiques, prennent ou appliquent dans le but de résoudre un problème social.
Chaque politique publique vise à résoudre un problème public, reconnu comme tel à l’agenda gouvernemental. Elle représente donc la réponse du système politico-administratif à un état de la réalité sociale jugé politiquement inacceptable. Elle est débattue dans le processus décisionnel démocratique.
La politique publique tend, par des mesures appropriées, à changer ou à stabiliser le comportement des groupes-cibles. Assurément pour être complète, toute politique publique doit se réaliser par poussées successives.
Certains états de changements sociaux n’occasionnent pas de politiques publiques, notamment parce qu’ils ne sont pas articulés ou parce qu’aucune modalité d’intervention étatique ne s’avère faisable et/ou consensuelle.
R. W. Bussmann, U. Klöti, P. Knoepfel, Politique publiques évaluation, Ed. Economica, Paris, 1998. — P. Knoepfel, C. Larrue, F. Varone, Analyse et pilotage des politiques publiques, Matériel de cours de l’IDHEAP, Chavannes-près-Renens, 2001.
Site Internet : www-idheap. unil. ch/idheap. nsf/vwBaseDocuments/IdAct01
Voir : Évaluation — Planification sociale — Politique sociale — Précaution (Principe de)
Lionel Haas
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Population
Communément, le mot population désigne l’ensemble (l’effectif) des habitants d’un territoire (État, région, commune, etc.). En tant qu’objet d’étude de la démographie, la population est un ensemble d’individus qui se renouvelle par des mécanismes d’entrées (naissance, immigration) et de sortie (décès, émigration).
On peut alors observer l’état et le mouvement d’une population, sa dimension dynamique et ses diverses composantes (sous-populations, population active, population urbaine…).
R. Union internationale pour l’étude scientifique de la population, Dictionnaire démographique multilingue, Liège, Ordina, 1981.
Voir : Démographie — Démographie (Laboratoire de)
Herman-Michel Hagmann
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Population active
Apparemment, ce terme renvoie à une évidence, la population active correspondant à l’ensemble des personnes exerçant une activité professionnelle. En fait, il existe de multiples définitions qui ne sont pas toujours concordantes et qui peuvent induire des malentendus. La population active incluse-t-elle les chômeurs, les bénéficiaires des prestations d’aide sociale, les étudiants, certaines catégories de retraités, les ménagères qui assument le travail domestique ? L’évolution actuelle des formes de travail ne peut que renforcer les difficultés liées à une telle définition.
Voir : Acivité économique (au sens du BIT) — Enquête sur la population active (ESPA) — Travail
jpf
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Postfordisme
Pour expliquer la différence entre fordisme et postfordisme, l’ingénieur japonais Taijchi Ohno, inventeur du modèle de production Toyota (d’où l’expression “ toyotisme ” pour indiquer l’origine du postfordisme), suggère de “ penser à l’envers ” toutes les catégories fondamentales de la société économique à la fin du XXe siècle.
Les axes principaux du postfordisme sont :
— le système de production “ juste à temps ”, dans lequel les quantités et la variété des biens et des services à produire sont déterminées à partir de la demande, à partir des commandes des citoyens-clients. Ceci implique la “ miniaturisation ” de l’entreprise par l’élimination des gaspillages (d’espace, d’invendus, de machines) et, surtout, par l’expulsion de la force de travail en excès par rapport à la demande effective ;
— le dépassement de la séparation entre exécution (ouvriers spécialisés) et programmation (techniciens, cadres) pour mieux lubrifier le flux productif en tant que flux d’informations. Le travail devient ainsi une activité communicationnelle, surtout avec l’introduction des nouvelles technologies informatiques ;
— la flexibilisation du processus de travail, soit comme dépassement de la parcellisation des fonctions typiques du taylorisme (d’où la polyvalence de l’ouvrier postfordiste), soit comme élimination des rigidités contractuelles (précarisation des contrats : intérim, contrats à durée déterminée, temps partiel) ;
— l’externalisation (sous-traitance) de toutes les fonctions productives qui ne concernent pas directement le noyau central de l’entreprise, ce qui est à l’origine de l’émergence d’une nouvelle couche importante de travailleurs indépendants soumis d’une part aux fluctuations de la demande et, d’autre part, aux mandats de la maison mère ;
— l’ouverture des marchés nationaux (libéralisation) et l’instauration de réseaux productifs transnationaux (globalisation).
R. C. Marazzi, La place des chaussettes, L’Éclat, Paris, 1997. — A. Lipietz, La société en sablier, Le partage du travail contre la déchirure sociale, La Découverte, Paris, 1996. — P. Zarifian, Travail et communication, PUF, Paris, 1996.
Voir : Flexibilité du travail — Flux tendus (Méthode des) — Précarisation (Mécanismes de la) — Précarité — Société postindustrielle
Christian Marazzi
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Pouvoir d’achat
Littéralement, il s’agit de la capacité financière d’un acheteur potentiel. On distingue le pouvoir d’achat de la monnaie qui représente la quantité de biens que l’on peut acquérir avec une unité monétaire et le pouvoir d’achat du salaire qui représente la quantité de biens que l’on peut acheter avec une unité de salaire.
Le pouvoir d’achat est fortement lié à deux notions : l’inflation (hausse du niveau général des prix) et la consommation (usage d’un bien pour satisfaire un besoin). Par exemple, si les prix augmentent dans un environnement où les revenus sont constants, on dira alors que le pouvoir d’achat diminue ; ce qui réduira la consommation. A l’inverse, une hausse des salaires supérieure au taux d’inflation pourra accroître le pouvoir d’achat des salariés et influencer positivement la consommation et, indirectement, la production et l’emploi. Ainsi, l'évaluation du pouvoir d'achat est l'inverse de l'indice des prix.
Les systèmes de sécurité sociale ont aussi pour but de garantir un pouvoir d’achat minimum ou de le maintenir lorsque des circonstances de l’existence induisent des baisses de revenu (chômage, maladie de longue durée, invalidité, retraite).
La notion de pouvoir d’achat est très proche de celle de niveau de vie (quantité de biens et de services dont dispose un ménage, une catégorie sociale, un pays, en fonction de leurs revenus), lequel correspond au niveau de consommation.
Voir : Besoin — Consommation — Indice des prix — Inflation — Revenu
Fabrice Ghelfi
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Précarisation (Mécanismes de la)
Nombre d’auteurs font état d’une précarisation liée, en particulier, au développement du chômage. F.-X. Merrien en définit les mécanismes en ces termes : “ Le développement de nouvelles formes d’insécurité sociale est la résultante mécanique d’un choix brutal pour une société de marché ouverte à la concurrence internationale, privilégiant compétitivité (substitution rapide du capital au travail) et lutte contre l’inflation (taux d’intérêt élevé).
La globalisation économique a entraîné une recherche de compétitivité sans précédent dans l’histoire économique. Dans tous les pays le taux de productivité s’est élevé, ce qui signifie simplement qu’il faut toujours moins d’heures de travail et donc d’hommes pour produire le même nombre de marchandises.
Le licenciement s’est banalisé, les emplois intérimaires et à durée indéterminée, autrefois formes atypiques du travail salarié, se sont généralisés. L’exclusion du marché du travail ou l’impossibilité de s’y faire une place est la cause principale des situations de précarité. Le monde du travail est désormais composé de trois strates. La strate centrale est composée des travailleurs disposant d’un emploi fixe et d’une qualification reconnue. Ils constituent le noyau dur des entreprises et sont globalement protégés des aléas économiques. La deuxième strate résulte du nouveau mode productif. Elle est composée des personnes naviguant entre emploi et chômage et donc très sensibles à la conjoncture économique. Il se forme ainsi une réserve de travailleurs en attente, subventionnés par l’assurance-chômage. La troisième strate est composée des exclus-marginalisés. Elle est composée de personnes sans qualifications, mal adaptées à la discipline d’entreprise et à ses contraintes. En période de forte expansion économique, elles peuvent trouver des petits boulots, mais dans la période actuelle, leur situation est devenue très difficile. Leurs chances d’intégrer le marché du travail sont de plus en plus minces. Elles peuvent au mieux trouver une occupation dans le secteur d’utilité sociale. ” Ce processus de précarisation se développe significativement en Suisse et ses effets appellent des tâches nouvelles pour la sécurité sociale voire une révision des modalités de son organisation.
R. F.-X. Merrien, L’État-providence, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1997.
Voir : Exclusion — Flexibilité du travail — Licenciement — Postfordisme — Sécurité sociale — Société postindustrielle — Travail (Nouvelles formes de) — Travaux atypiques et sécurité sociale
jpf
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Précarité
La notion de précarité comme “ pauvreté potentielle ” (donc distincte de la pauvreté) inclut l’idée d’instabilité (par exemple du revenu, lorsqu’il est sujet à oscillations imprévisibles) et de fragilité (manque de pouvoir contractuel, par exemple). La précarité est devenue un phénomène important au cours de la transformation sociétale dite “ postfordiste ” qui s’est mise en place depuis la fin des années 70. Cette transformation est caractérisée par une tendance à l’aggravation de la “ déchirure sociale ” (polarisation des revenus, dégonflement des couches moyennes, déréglementation des contrats collectifs, segmentation du marché du travail, prolifération de contrats précaires : intérim, à durée déterminée, temps partiel). Dans cette “ société en sablier ”, comme l’a définie Alain Lipietz, la précarité remonte vers ceux qui sont “ juste au-dessus du col ”, ce qui diffuse le sentiment d’être “ les prochains à y passer ”, à basculer du côté des exclus. La notion de précarité renvoie donc, en utilisant la terminologie de Pierre Bourdieu, à la “ misère de position ” (sentiment d’être attiré vers le bas, dans un mouvement qui nous échappe) plutôt qu’à la “ misère de situation ” (pauvreté objective).
R. J.-C. Ray, “ La précarité, définie et mesurée en tant que pauvreté potentielle ”, Cahiers Économiques de Nancy, Vol. 18, 1987. — P. Bourdieu, La misère du monde, Seuil, Paris, 1995. — R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Fayard, Paris, 1995. — A. Lipietz, La société en sablier, Le partage du travail contre la déchirure sociale, La Découverte, Paris, 1996.
Voir : Flexibilité du travail — Pauvreté (Nouvelle) — Pauvreté (Seuil de) — Postfordisme — Quart Monde — Travail au noir — Travail féminin — Travail (Nouvelles formes de)
Christian Marazzi
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Précaution (Principe de)
Le principe de précaution est issu des débats en éthique environnementale au sujet des catastrophes écologiques des 50 dernières années et des limites de l'action humaine eu égard aux conséquences qu'elle peut entraîner, sans pouvoir les prévoir, tout ou partie. Compte tenu de la puissance techno-scientifique désormais capable de nuire aux conditions mêmes de l'existence de la nature, l'interdépendance des êtres vivants et la fragilité des équilibres de l'écosystème peuvent-elles constituer des limites aux entreprises humaines, et à quelles conditions ? Le principe de précaution tente de répondre à cette question.
L'idée principale en est que l'absence de connaissances scientifiquement établies ne constitue pas une raison pour ne pas prendre des mesures préventives et pour ne pas chercher à modifier l'activité humaine, lorsqu'on estime probables des risques à effets irréversibles ou engageant de sérieux dommages pour l'environnement. Le principe connaît plusieurs formulations, ce qui lui donne tout à la fois une puissance rhétorique remarquable et une fragilité épistémologique et pratique non moins évidente. (*)
Le principe de précaution est en effet devenu (surtout à partir des années 1990) un nouveau principe éthique venant compléter et concrétiser l'éthique de responsabilité au sens que Max Weber puis Hans Jonas ont successivement conféré à cette expression. Des événements-catastrophes comme Tchernobyl, le sang contaminé ou la maladie de la vache folle ont contribué à renforcer le sens et la nécessité d'une telle précaution.
La précaution est liée à l'idée d'une responsabilité morale et politique de type collectif ; elle a trait aux conséquences à moyen et à long terme de l’action humaine ou à l’effet cumulatif d’actions individuelles dont il est impossible de prévoir ni les effets, ni leur probabilité. Dans sa finalité positive, le principe de précaution entend protéger l'humanité et l'environnement des risques liés à une logique instrumentale insensée et inhumaine.
Toutefois, poussé à l'extrême et absolutisé, le principe de précaution rendrait tout agir et toute prise de risque absolument impossibles. Afin d'éviter une telle dérive, typique de l'éthiquement et du politiquement correct à la mode, on considérera plutôt le principe de précaution comme un principe complémentaire dont il convient de tenir compte dans toute pesée d'intérêts, à côté des autres principes de l'éthique de responsabilité : la prudence, la liberté de recherche et d'entreprise, la justice sociale, la protection de l'environnement, le respect des générations futures, etc.
(*) Exemples :
Formulation forte : Déclaration de Londres sur la protection de la mer du Nord (1987). Il faut fixer des règles sur l'émission de substances lorsqu'on a des raison de penser qu'un certain dommage ou des effets nocifs pourraient être causés à l'encontre des ressources vivantes de la mer, même si l'on ne dispose pas de preuve scientifique quant au lien de cause à effet entre les substances incriminées et les effets redoutés.
Formulation faible : Déclaration de Rio (1992). En cas de menaces de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique ne peut servir de raison pour ne pas prendre des mesures effectives et à coûts raisonnables (cost-effective) en vue de prévenir la dégradation de l'environnement.
Cette formulation est plus faible, en ce sens qu'elle invite les parties à prendre des mesures de régulation tout en suggérant que, bien qu'il puisse y avoir des raisons valables contre cette régulation, l'incertitude scientifique ne peut servir d'argument pour s'abstenir de prendre des mesures restrictives (cf. Parker, 1998).
“ L'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable. ” Loi Barnier (F)
R. D. Birnbacher, La responsabilité envers les générations futures, trad. O. Mannoni, PUF, Paris, 1997. — O. Godard (Dir.), Le principe de précaution dans la conduite des affaires humaines, Ed. de la Maison des sciences de l'homme : Institut national de la recherche agronomique, Paris, 1997. — H. Jonas, Le principe responsabilité, trad. J. Greisch, Cerf, Paris, 1990 (Passages), en poche : coll. Champs, chez Flammarion. — P. Kourilsky, G. Viney, Le principe de précaution : rapport au Premier ministre, O. Jacob, Paris, 2000. —D. Müller, R. Simon, (Éds) Nature et descendance. Hans Jonas et le principe "responsabilité", Labor et Fides, Genève, 1993 (Le champ éthique). — D. Müller, Les éthiques de responsabilité dans un monde fragile, Fides-Labor et Fides Montréal-Genève, 1998.
Voir : Politiques publiques — Prospective
Sylvain Fattebert et Denis Müller
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Prélèvements obligatoires
Les prélèvements obligatoires sont, pour une entreprise, les charges à assumer en matière d'impôts et de cotisations sociales. Ces dépenses se font en faveur des pouvoirs publics ou des institutions qui les représentent (institutions de sécurité sociale). Les prélèvements obligatoires composent aussi le taux de pression fiscale, qui influence le degré de capacité concurrentielle des entreprises. À cet égard, la discussion et la controverse sont intenses. En effet, le taux de pression fiscale est souvent utilisé pour illustrer l'évolution des dépenses publiques et celle des dépenses de protection sociale. En fait, les comparaisons internationales montrent que ce ne sont pas systématiquement les pays où ce taux est le plus élevé, qui enregistrent les performances économiques les plus mauvaises et, inversement. D'autres facteurs s'y rapportent : productivité, valeur ajoutée, etc.
Voir : Budget social — Eurostat — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques
Stéphane Rossini
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Préparation à la retraite
La préparation à la retraite recouvre les actions d’informations et/ou de formation (séminaires) destinées aux salariés en fin de carrière (futurs retraités, préretraités). Ces actions ont pour but de permettre à chacun(e) :
— d’identifier les ruptures multiples et brutales qui introduisent le passage de la vie professionnelle à la retraite,
— de stimuler le processus d’anticipation des changements existentiels auquel il sera confronté (financier, temporel, relationnel, identitaire),
— de renforcer ses capacités à faire face aux adaptations qu’implique cette nouvelle étape de vie.
Organisées par les entreprises ou par des organismes spécialisés (Pro Senectute), ces actions, d’une durée de 2 à 4 jours, sont offertes par les employeurs et se déroulent 1 à 3 ans avant la fin de l’activité professionnelle.
R. P. Paillat et Coll. Passages de la vie professionnelle à la retraite, PUF, Paris, 1989. — G. Bovey, Les pratiques de préparation à la retraite sous la loupe, Quelles stratégies de formation pour une action de prévention, Mémoire, FAPSE, Genève, 1992. — O. Taramarcaz (sous la direction de), Préparation a la retraite : Concepts et enjeux, Pro Senectute CH, secrétariat romand, Vevey.
Site Internet : www.age-migration.ch
Voir : Pro Senectute (Fondation suisse) — Retraité — Retraite anticipée — Retraite (Âge de la) — Vieillesse
Guy Bovey
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Préretraite
Situation d’un salarié proche de l’âge légal de la retraite qui, en raison de difficultés économiques de l’entreprise ou d’un choix personnel, n’occupe plus un emploi rémunéré mais perçoit un revenu de substitution, jusqu’à l’âge de la retraite. Le plus souvent, le fait d’être “ préretrait頔 implique une notable diminution des revenus, issus du système de prévoyance vieillesse. Un problème important est ainsi posé, qui constitue un enjeu majeur de la onzième révision de l’AVS.
Voir : Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Prévoyance professionnelle — Retraite anticipée — Retraite (Âge de la)
jpf
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Pression fiscale
La pression fiscale définit l'importance relative d'un impôt ou d'un groupe d'impôts (ou des prélèvements obligatoires, telles les cotisations d'assurances sociales sur les salaires) dans l'économie nationale. La pression fiscale concerne les grandeurs macroéconomiques. Par exemple, on exprime le poids des impôts en pour cent du Produit Intérieur Brut (PIB) pour mesurer l'emprise de l'État sur les contribuables. Ou bien, pour mesurer la pression fiscale sur les entreprises, la somme totale des impôts sur le bénéfice qu'elles paient est mise en rapport à la somme totale de leurs bénéfices. Ces “ mesures ” permettent des comparaisons globales, internationales ou intercantonales, sur l'emprise de la fiscalité dans l'économie.
Il faut distinguer la “ pression fiscale ” de la “ charge fiscale ”, qui exprime la même idée, mais par contribuable (niveau microéconomique) : ainsi, on peut connaître la charge fiscale d'un contribuable marié avec 2 enfants et un revenu imposable de 60'000 francs en comparant l'impôt dû, compte tenu de sa situation familiale, à ce revenu.
R. OCDE, Les impôts sur les salaires 1999/2000, avril 2001, Paris. — Office fédéral de la Statistique, Neuchâtel, Série 18 Finances publiques, Charge fiscale en Suisse, AFC, Berne
Voir : Évasion fiscale — Politique fiscale — Prélèvements obligatoires
Bernard Dafflon
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Prestation de sortie àð Libre passage dans la prévoyance professionnelle
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Prestations complémentaires (PC)
Objectif
Le régime des prestations complémentaires (PC) a été introduit par la loi fédérale du 19 mars 1995 (LPC), entrée en vigueur le 1er janvier 1966. Conformément au Message y relatif du Conseil fédéral, l’objectif poursuivi est d’assurer un minimum vital à cette partie de la population qui en est réduite, ou peu s’en faut, aux prestations de l’AVS et de l’AI.
Nature des PC
Les PC sont de véritables prestations d’assurance, qui créent en faveur de leurs bénéficiaires un droit bien défini, susceptible de recours et indépendant des conditions spécifiques attachées à l’octroi de prestations d’assistance (telles que délais d’attente, subordination aux aliments de proches, restitution si retour à meilleure fortune, etc.). Elles sont formées de deux composantes, à savoir :
a) la prestation complémentaire annuelle, versée mensuellement ;
b) le remboursement des frais de maladie et d’invalidité.
Ayants droit
Le cercle des bénéficiaires de PC s’étend aux personnes qui :
— ont un droit propre à une rente de l’AVS (même en cas d’anticipation du droit à la rente), à une rente entière ou à une demi-rente de l’AI, à une allocation pour impotent de l’AI, ou touchent une indemnité journalière de l’AI pendant six mois au moins ;
— ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse ;
— sont de nationalité suisse ou, si elles sont étrangères, ont habité en Suisse de manière ininterrompue durant 15 ans (cinq ans pour les réfugiés et les apatrides).
Les personnes qui n’ont pas droit à une rente de l’AVS/AI, ou n’ont droit qu’à une rente de faible montant de l’AVS/AI, peuvent, en vertu d’une convention de sécurité sociale, prétendre à des PC après 10 ans déjà dans le cas d’une rente de vieillesse, voire de 5 ans dans le cas d’une rente d’invalidité, d’une rente de survivant ou d’une rente de vieillesse venant se substituer à une rente de survivant ou d’invalidité.
Calcul de la PC annuelle
Le montant de la PC annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants. Si les revenus déterminants (rentes AVS/AI, caisse de retraite, revenu du travail, revenu du capital, parts de fortune ou de revenu dessaisies, etc.) sont inférieurs à l’addition des montants destinés à la couverture des besoins vitaux et des autres dépenses reconnues par la loi (frais de loyer p. ex.), une PC peut être versée à concurrence du solde à combler.
Pour les personnes qui vivent en permanence ou pour une longue période dans un home ou dans un hôpital (pensionnaires), les dépenses reconnues spécifiques à cette catégorie de bénéficiaires sont la taxe journalière d’une part, le montant pour dépenses personnelles d’autre part.
Frais de maladie et d’invalidité
Si elles vivent à domicile, les personnes au bénéfice d’une PC annuelle peuvent obtenir, en sus, le remboursement des frais de maladie et d’invalidité reconnus et dûment établis de l’année civile en cours jusqu’à concurrence de 25 000 francs pour les personnes seules et de 50 000 francs pour les couples. Pour les pensionnaires, un montant de 6000 francs peut être versé en plus de la PC annuelle. Enfin, un remboursement est également susceptible d’entrer en ligne de compte lorsqu’aucune PC annuelle n’est versée.
Financement
La LPC est une loi de subventionnement, en ce sens que la Confédération restitue aux cantons qui ont légiféré en la matière et octroient des PC (c’est le cas de tous les cantons) une partie de leurs dépenses correspondantes. Ainsi, les cantons à forte capacité financière reçoivent l’équivalent de 10 % de leurs dépenses. Les cantons à capacité financière moyenne se voient rembourser, selon une échelle mobile, de 11 à 34 % de leurs dépenses, et les cantons à faible capacité financière, 35 % de leurs dépenses. Pour la couverture du solde (soit 65 à 90 %), les cantons doivent recourir à leurs propres sources de financement (soit aux impôts). Ils peuvent aussi faire participer les communes.
Organes d’exécution des PC
Ce sont les caisses cantonales de compensation, à l’exception de Genève, Bâle-Ville et Zurich.
R. E. Carigiet, Ergänzungsleistungen zur AHWIV, Schultess Polygraphischer Verlag, Zürich, 1995. — A. Rumo-Jungo, Bundesgesetz über Ergänzungsleistungen zur Alters-, Hinterlassenen- und Invalidenversicherung, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum Sozialversicherungsrecht, Schultess Polygraphischer Verlag, Zürich, 1994. — P. Gilliand (Éd.), Pauvretés et sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1990.
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Assurance-maladie (AM) — Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Soins et aide à domicile — Home/Établissement médico-social (EMS)
François Huber
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Prestations de sécurité sociale
Les prestations constituent le cœur des systèmes et des régimes de sécurité sociale. En effet, toutes les autres composantes essentielles (champ d’application personnel et matériel, organisation administrative, financière et contentieuse) sont instituées pour garantir une protection. Le domaine est complexe, car il peut combiner :
— l’intervention de plusieurs régimes (publics ou privés),
— des possibilités de cumul de prestations ou au contraire des priorités,
— des prestations en nature, en espèces et en services ;
— les prestations en espèces peuvent être liées au revenu ou être forfaitaires ;
— les prestations peuvent être servies quelle que soit la situation économique du bénéficiaire ou au contraire être soumises à des conditions de revenus et de fortune ;
— l’octroi de prestations suppose l’observation de conditions, qui peuvent être strictes (cf. chômage) ;
— l’octroi peut être limité dans le temps ou durer aussi longtemps que l’éventualité est réalisée (cf. chômage v. retraite) ;
— les prestations peuvent faire l’objet d’indexations ;
— elles peuvent être exportables ou servies seulement dans le pays compétent ;
— leur calcul peut reposer sur des bases internes ou également considérer des éléments venant d’autres États.
R. Bureau international du Travail, Introduction à la sécurité sociale, 3e éd., BIT, Genève, 1986. – J. J. Dupeyroux, Droit de la sécurité sociale, 13e éd. par R. Ruellan, Dalloz, Paris, 1998.
Voir : Champ d’application personnel — Coordination — Éventualité — Primauté des prestations — Risque — Sécurité sociale — Sélectivité
Pierre-Yves Greber
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Prévention
Ce terme fait partie intégrante du langage actuel, tant dans le domaine de la santé que de l’action sociale. Son champ recouvre deux sens principaux, ceux de devancer et d’avertir. Les spécialistes regroupent sous ce concept toutes les mesures visant à améliorer la santé publique ou, plus généralement, la qualité de la vie. Les objectifs visés devraient être atteints, soit en modifiant les conditions générales de l’environnement (conception globalisante), soit en cherchant à obtenir des changements dans les comportements individuels (conception restreinte). Que cherche-t-on à prévenir et quels moyens est-on prêt à consentir pour atteindre les objectifs fixés ? Les tiraillements existants entre ces deux orientations divisent les praticiens comme les théoriciens autour d’un enjeu politique de taille : mettre l’accent sur l’environnement ou sur les comportements individuels entraîne une responsabilité sociétale bien différente. Par ailleurs se posent les questions relatives à la contrainte et aux mesures de contrôle social que nécessite une politique globale de prévention.
L’OMS décompose la prévention sur trois niveaux : la prévention primaire dont l’action entend sensibiliser l’individu aux avantages du bien-être ou aux risques de certains comportements avant qu’ils n’existent ; la prévention secondaire qui entend enrayer un processus ou l’aggravation d’une situation déjà détériorée ; la prévention tertiaire qui cherche à éviter un ancrage ou une rechute.
Les mesures nécessitées par une action préventive peuvent être spécifiques en visant un comportement, un problème, ou non spécifiques en cherchant à atteindre un objectif par une action indirecte. Le dilemme de la prévention se perçoit au travers des limites de son action qui oscillent toujours entre deux termes : s’éloigner de la répression et se distancer de l’information. La prévention ne peut assimiler la répression qui constitue la marque de son échec, pas plus qu’elle ne peut se limiter à l’information qui est une de ses composantes mais trop souvent la seule développée.
Les tendances récentes montrent une globalisation de la perspective face aux problèmes affrontés. Il est de plus en plus question de conduites addictives (toxicomanie, alcoolisme, boulimie, anorexie, tentatives de suicide, etc.) qui constituent autant de réponses spécifiques des individus face à leur incapacité à utiliser les ressources dont ils disposent pour affronter les situations difficiles de notre civilisation. Ces comportements autodommageables ou autodestructeurs peuvent se lire sur un continuum qui va du “ normal ” (toléré) au pathologique (réprimé ou soigné). Malgré une similarité dans les causes, ils nécessitent une intervention spécifique laquelle devrait être impérativement coordonnée entre les différents spécialistes auxquels il est fait appel. La difficulté demeure toutefois l’offre d’alternatives crédibles pour les intéressés.
R. J.-D. Boegli, L’éducation pour la santé à l’école, LEP, Lausanne, 1990. — R. Knüsel, Mieux vaut guérir que prévenir, Réalités sociales, Lausanne, 1991.
Voir : Abus sexuels — Alcoolisme — Délinquance — Fondation 19 - Fondation suisse pour la promotion de la santé — Organisation mondiale de la santé (OMS) — Précaution (Principe de) Prévention secondaire — Prévention tertiaire — Réduction des risques (Aide à la survie) — Sida - VIH — Toxicomanie
René Knüsel
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Prévention primaire àð Prévention
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Prévention secondaire
La prévention secondaire d une maladie ou d un problème social consiste à poser un diagnostic précoce afin de proposer des mesures au plus tôt et d éviter ainsi une aggravation du phénomène. S adressant à des personnes fragiles, à risque, et non à toute la population (prévention primaire), ces mesures englobent également une action sur le contexte favorisant l’apparition du problème. En matière de toxicomanie par exemple, on cherchera à repérer les jeunes en difficulté et les situations à risques pour éviter que ne se produise le passage d’une consommation sporadique à une consommation régulière, voire une dépendance. Certains auteurs contestent la distinction entre prévention primaire et secondaire préférant les concepts de prévention spécifique ou non spécifique.
R. H. Fahrenkrug, J. Rehm, R. Müller, H. Klingemann, R. Linder, Drogues illégales en Suisse 1991-1993, Seismo, Zurich, 1995 (chapitre 4, pp. 55-96).
Voir : Alcoolisme — Prévention — Toxicomanie
Geneviève Ziegler
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Prévention tertiaire
Pour l’Organisation Mondiale de la Santé, la prévention tertiaire consiste à donner des soins, à prévenir la rechute et à favoriser la réinsertion des malades.
La prévention tertiaire s’adresse donc à des personnes qui présentent des difficultés ou des risques du fait d'une maladie ou d'un problème social. Il s’agira par exemple, dans un cas d’infarctus, de faire en sorte que la personne adopte un rythme de vie, des comportements sociaux et alimentaires et/ou une médication qui diminuent le risque de nouvel infarctus.
La notion de prévention tertiaire est particulièrement utilisée dans le cadre des problèmes d’abus de substances. Au niveau de la toxicodépendance aux produits stupéfiants, le réseau préventif tertiaire s’est fortement étoffé depuis l'apparition du VIH/SIDA.
Voir : Alcoolisme — Organisation mondiale de la santé (OMS) — Prévention — Prévention secondaire — Réduction des risques (Aide à la survie) — Sida - VIH — Toxicomanie
François Perrinjaquet
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Prévention individuelle àð Troisième pilier (ou prévoyance individuelle)
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Prévoyance professionnelle
La prévoyance professionnelle est un système de protection sociale qui est complémentaire à l assurance fédérale vieillesse, survivants et invalidité (AVS/AI) et à l assurance-accidents obligatoire (LAA). Son but essentiel est le maintien adéquat du niveau de vie antérieur, en versant des prestations de vieillesse, de survivants et d’invalidité qui complètent celles de l’AVS/AI (art. 34quater Constitution fédérale), voire celles de la LAA. Mais elle n’assure ces éventualités que sur une base professionnelle. La prévoyance professionnelle est donc un deuxième étage plutôt qu’un deuxième pilier de protection sociale. En effet, seules en principe les personnes exerçant une activité lucrative sont ou peuvent être protégées. L’assurance-chômage (LACI) fait exception en assurant les éventualités du décès et de l’invalidité, en complément à la couverture offerte par l’AVS/AI.
Mais la prévoyance professionnelle offre à son tour deux étages de protection. Le premier étage est l’assurance obligatoire instaurée par la loi fédérale sur la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité, entrée en vigueur le 1er janvier 1985 (LPP). Le deuxième étage relève de la prévoyance professionnelle facultative (PPF) améliorant la couverture offerte par la LPP et décidée par l’employeur ou les partenaires sociaux au travers des conventions collectives. La prévoyance professionnelle est financée par le système de la capitalisation.
En vertu de la LPP, les salariés dont le salaire annuel est égal ou supérieur à 23 880 francs sont obligatoirement assurés jusqu’à un plafond de salaire de 71 640 francs l’an (en 1997). La LPP couvre les risques du décès et de l’invalidité par le droit à une rente dès le 1er janvier qui suit le 17e anniversaire. L’assurance d’une rente ou d’un capital pour la vieillesse débute dès le 1er janvier qui suit le 24e anniversaire. La couverture cesse à 62 ans pour les femmes et à 65 ans pour les hommes. La LPP est fondée sur le système de la primauté des contributions. La prestation de vieillesse est donc fonction de l’épargne constituée par les cotisations paritaires du salarié et de l’employeur, augmentée des intérêts procurés par le rendement de la fortune. Un taux d’intérêt minimal de 4 % par an est garanti. Le taux de cotisation augmente avec l’âge, pour tenir compte du raccourcissement progressif de la durée du processus d’épargne. Avec une durée complète de cotisations, la rente de vieillesse LPP ajoutée à celle de l’AVS doit permettre d’atteindre le 60 % du dernier salaire assuré obligatoirement.
L’amélioration de la couverture par la prévoyance professionnelle facultative permet, par exemple, d’assurer une part plus importante du salaire ou même de rentes qui garantissent le maintien d’un pourcentage déterminé du dernier salaire, selon le système de la primauté des prestations. Elle permet également des contributions de l’employeur plus élevées que celles des salariés.
La prévoyance professionnelle est mise en œuvre par des institutions de prévoyance décentralisées, dirigées paritairement par les employeurs et les salariés. Ces institutions sont contrôlées régulièrement par des experts comptables et actuariels ; elles sont soumises à une surveillance étatique. Leur fortune est gérée selon les principes de sécurité, de rendement, de répartition appropriée des risques et de maintien de liquidités suffisantes. Les cotisations, la fortune et son rendement sont exonérés fiscalement. Une assurance obligatoire permet de garantir l’ensemble des prestations jusqu’à un plafond déterminé contre le risque de l’insolvabilité de l’institution.
Voir : Assurance-accidents — Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Fondations collectives et communes (prévoyance professionnelle) — Libre passage dans la prévoyance professionnelle — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Architecture de la) — Trois piliers — Troisième pilier (ou prévoyance individuelle)
Jacques-André Schneider
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Primauté des cotisations
Il s’agit, dans les régimes publics ou privés de la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité, d’un système de détermination des prestations fondé sur le montant des contributions versées par les assurés (et leurs employeurs) pendant la durée d’affiliation ; ces contributions sont ordinairement exprimées par la loi ou par le règlement de l’institution de prévoyance en pour cent du salaire cotisant. Le montant des prestations est alors fixé, pour chaque assuré individuellement, en fonction du montant des cotisations dont il a été crédité pendant toute la durée de son affiliation (et en tenant compte, dans le système de capitalisation, des intérêts accumulés). Toute variation du salaire entraîne une modification du niveau des cotisations, mais les prestations ne varient pas dans la même proportion, du fait que la durée résiduelle de cotisations, jusqu’à l’âge de la retraite, devient plus courte lors de chaque nouvelle augmentation de salaire ; il est toutefois possible de corriger ce phénomène par l’application de taux de cotisations progressifs selon l’âge atteint.
Avantage du système de la primauté des cotisations : il confère une grande sécurité financière aux employeurs et aux assurés, leurs charges étant déterminables avec exactitude.
Inconvénient du système de la primauté des cotisations : exprimées en pour cent du salaire, les prestations diminuent lors de chaque adaptation de celui-ci.
Le régime des prestations de l’AVS/AI peut être qualifié de mixte. Ni réelle primauté des prestations, ni véritable primauté des cotisations. Le montant de la rente de vieillesse découle d’une formule complexe, comprenant plusieurs paramètres ; il est enserré au surplus entre un montant minimum et un montant maximum. En vertu de l’article 34 LAVS, la rente mensuelle simple de vieillesse se compose d’un montant fixe (qui est une fraction du montant minimal de la rente de vieillesse) et d’un montant variable (qui est une fraction du revenu annuel moyen déterminant). La formule de rente appliquée à l’AVS/AI apparente l’assurance fédérale au système de la primauté des cotisations plutôt qu’à celui de la primauté des prestations, ce que confirme le fait qu’il existe des rentes complètes pour les assurés comptant une durée complète de cotisations et des rentes partielles pour les autres.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Capitalisation — Financement de la sécurité sociale — Prestations de sécurité sociale — Primauté des prestations — Retraite (Âge de la)
Bernard Viret
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Primauté des prestations
Il s’agit, dans les régimes publics ou privés de la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité, d’un système dans lequel les prestations sont déterminées — par la loi ou par le règlement de l’institution de prévoyance — selon un certain pourcentage du salaire assuré, qui peut être le dernier salaire touché, le salaire moyen des cinq ou dix dernières années, voire le salaire moyen calculé sur toute la durée de l’affiliation. Le pourcentage du salaire assuré dépend en général de l’âge de l’affilié lors de son admission dans l’institution de prévoyance, souvent aussi de l’âge atteint lors d’augmentations de salaire ou de changements de catégorie professionnelle. Pour que le taux des prestations puisse être maintenu lors des variations du salaire, les charges supplémentaires qui en résultent doivent être financées par des “ rappels ou des suppléments ” de cotisations. Si le salarié, lors de son affiliation, dépasse l’âge d’entrée qui permet d’obtenir les prestations réglementaires ordinaires, une “ finance de rachat ” portant sur les années d’assurance manquantes doit être demandée par l’institution d’assurance, faute de quoi le taux des prestations sera réduit.
Avantage principal du système de la primauté des prestations : il permet de maintenir le niveau relatif des prestations en cas de variations du salaire assuré.
Inconvénient majeur du système de la primauté des prestations : il impose des charges financières de plus en plus lourdes lors de chaque adaptation du montant des prestations à l’évolution des salaires, tout particulièrement en périodes de forte inflation.
Voir : Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Primauté des cotisations — Retraite (Âge de la)
Bernard Viret
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Prison (Privation de liberté)
Peine par excellence, la privation de liberté est la pierre angulaire du système des sanctions pénales depuis la fin du XVIIIe siècle. Malgré les nombreuses peines de substitution mises en place depuis plus d’un demi-siècle, elle demeure centrale dans notre droit de la sanction. Chaque année sont prononcées environ 50 000 condamnations à des peines de prison ; toutefois, 70 % environ de ces condamnations sont assorties du sursis. Le nombre d’incarcérations effectives représente un peu plus de 10 000 personnes par année ; avec un taux de détention de 76 pour 100 000 habitants, la Suisse se situe dans la moyenne des pays européens, à une énorme distance des États-Unis, qui connaissent un taux d’incarcération sans équivalent dans les pays dits développés.
S’agissant de leur exécution, il convient de distinguer les courtes peines privatives de liberté (jusqu’à six mois) des “ longues ” peines, qui dépassent cette limite. L’imposition d’une courte peine se justifie par “ l’effet de choc ” : il s’agit de donner un avertissement sévère au condamné, sans le couper trop longtemps de son milieu ordinaire. De nombreux aménagements sont prévus afin d’atténuer cette coupure, voire de l’éliminer : ainsi, la courte peine s’exécute aujourd’hui majoritairement sous la forme de la semi-détention (le condamné n’est incarcéré que de nuit et à ses heures de loisirs) ou des arrêts de fin de semaine. Plusieurs cantons suisses ont mis sur pied un service de travail d’intérêt général, qui remplace la courte peine.
L’exécution des longues peines doit tendre à “ préparer le détenu à son retour à la vie libre ” et donc à le resocialiser. Ce principe même a été fortement remis en cause depuis une vingtaine d’années, avant tout aux États-Unis ; il reste la pierre angulaire de notre droit. Les réalisations de cet objectif sont pour le moins partielles, faute de moyens mis à disposition de l’administration pénitentiaire. Les conditions actuelles du marché du travail, qui exigent de la mobilité et des carrières évolutives, rendent l’opération encore plus délicate : “ apprendre un métier ” surtout quand il est en voie de disparition — les divers artisanats et les activités d’agriculture, qui forment le noyau du travail carcéral en Suisse — n’a plus beaucoup de sens. Il faut “ apprendre à apprendre ”, ce qui est plus difficile en prison. Reste la punition nue, en vogue aux États-Unis : l’incarcération purement rétributive, qui a pour ambition et effet uniques de neutraliser le condamné.
R. : J. Favard, Les prisons, Flammarion, Paris, 1994. — C. Faugeron, A. Chauvenet, P. Combessie, Approches de la prison, de Boeck, Bruxelles, 1996. — M. Gottraux (Éd.), Prisons, droit pénal : le tournant ?, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1987. — A. Kuhn, Punitivité, politique criminelle et surpeuplement carcéral, Haupt, Berne, 1993. — Catalogue des établissements destinés à l’exécution des peines, des mesures et de la détention préventive en Suisse, Offices de la justice et de la statistique, Berne, 1995.
Voir : Sanctions pénales — Mesures de sûreté — Peines restrictives de droit (Peines de substitution) — Travail d'intérêt général
Robert Roth
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Privation de liberté à des fins d’assistance
La privation de liberté à des fins d’assistance est une mesure tutélaire prévue aux articles 397a ss du Code civil, consistant à priver temporairement de sa liberté une personne ayant besoin d’une aide (spécialement des soins) qui ne peut lui être donnée ailleurs que dans un établissement. La mesure ne peut être décidée qu’envers une personne souffrant de maladie mentale, de faiblesse d’esprit, d’alcoolisme, de toxicomanie ou de grave état d’abandon et suppose l’existence d’un établissement approprié à même d’apporter les soins requis. Elle est prise par une autorité désignée dans chaque canton et est sujette à recours devant une autorité judiciaire de la part de la personne intéressée (ou d’un de ses proches) qui bénéficie de garanties de procédure étendues.
Selon le Tribunal fédéral (ATF 125 III 169 ; ATF 126 I 112), la décision de priver une personne de liberté ne permet pas à l’établissement qui l’héberge de lui administrer un traitement contre sa volonté (“ traitement forc頔). Ce point sera réglé dans le cadre de la réforme en cours du droit de la tutelle.
R. M. Borghi, G. Rezzonico (Éds), Évaluation de l’efficacité de la législation sur la privation de liberté à des fins d’assistance, Pro Mente Sana, Zurich-Lausanne, 1991. — J. Gasser, B. Yersin (Éds), Prescrire la contrainte, Genève, 2000.
Voir : Autorités tutélaires — Mesure de sûreté — Tutelle
Olivier Guillod
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Privatisation
On parle de privatisation lorsqu’une entreprise appartenant entièrement ou majoritairement à l’État (ou à un organisme parapublic), passe aux mains de capitaux majoritairement privés, à savoir : des particuliers, des banques ou des groupes privés.
La transaction peut porter sur la totalité du capital, mais aussi sur une partie seulement. D’un point de vue pratique, la privatisation pose le problème de l’évaluation de la valeur d’une entreprise. D’un point de vue politique, elle pose celui du rôle des collectivités publiques vis-à-vis du tissu industriel et commerçant du pays ; ainsi que celui du choix des intérêts privés auxquels l’entreprise privatisée sera vendue. La question se pose actuellement en Suisse, en particulier dans le cadre du processus de privatisation des télécommunications et de la poste. La résistance s’organise, en particulier pour garantir un véritable service public.
Voir : Concentration économique — Société postindustrielle
jpf
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Pro Familia Suisse
Pro Familia Suisse (PFS) est l’organisme faîtier des sections cantonales Pro Familia. Elle regroupe d’autres associations ainsi que d’autres organisations privées et publiques à caractère social, économique ou politique, actives dans les domaines relevant de la politique familiale. Elle défend les intérêts de toutes les familles, indépendamment de leur forme de vie en demandant la non-discrimination des différents types de vie familiale. Elle contribue à la définition d’une politique familiale globale et cherche à la promouvoir par le biais d’une action politique auprès des différents acteurs politiques (Départements fédéraux, conseil des États et conseil national, commissions fédérales, gouvernements cantonaux, etc.). PFS stimule l’action des familles au plan local, régional et national et encourage ses membres à engager un dialogue avec tous les partenaires sociaux afin de parvenir à une meilleure conciliation des tâches éducatives, familiales et professionnelles. PFS exige la reconnaissance des prestations familiales, une juste compensation des charges (contribution aux coûts de l’enfant, de la maternité, des frais de garde, révision fiscale pour alléger le budget familial, prestations de compensation pour les familles vivant dans la précarité, abolition des discriminations dans les assurances sociales, etc.) qui incombent aux familles et souligne la nécessité de repenser les concepts de solidarité, c’est-à-dire la solidarité intra- et intergénérationnelle.
R. Charte des Familles, Pro Familia Suisse, Berne, 1992. — Les cahiers de la famille, No 1 à 9, Pro Familia Suisse, Berne. — Les prestations inappréciables des familles, Pro Familia Suisse, Berne, 1994. — I. Meier, Famille – Partenariat – Profession : réalité ou utopie?, Berne, 1995. — 10 Questions et réponses concrètes sur la Convention relative aux droits de l’enfant, Berne / Zurich, 1997. — Politique familiale et avenir de la sécurité sociale, Pro Familia Suisse, 1999. — R. Osswald Frizt, T. Huber-Winter, Beruf und Familie partnerschaftlich anpacken – Eine Werkmappe für Paare, Pro Familia Suisse, Berne, 1999. — Enfants et jeunes en Suisse : Rapport sur leur situation, Unicef, Pro Familia Suisse et. al., Zurich / Berne, 1999.
Site Internet : www.profamilia.ch/profamilia.htm
Voir : Famille — Famille (Politique de la)
Lucrezia Meier-Schatz
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Pro Infirmis (Association suisse)
Fondée en 1920, Pro Infirmis est une organisation d’aide spécialisée au service des personnes handicapées. L’Association — dont le siège est à Zurich — gère plus de 50 services d’information et de conseil répartis sur le territoire helvétique.
Les prestations sont gratuites et offertes en toute confidentialité. Outre un soutien individuel, Pro Infirmis encourage ou crée de nombreux projets collectifs : relève de l’entourage, transports, formation continue des personnes avec un handicap mental, loisirs, emplois, constructions sans barrières architecturales.
Indépendante tant sur le plan politique que confessionnel, l’organisation s’engage en matière de politique sociale — aux niveaux fédéral, cantonal et communal — pour les questions relatives au handicap.
La mission de l’Association suisse Pro Infirmis est de mettre tout en œuvre pour que les personnes en situation de handicap vivent de façon autonome et participent activement à la vie sociale, sans discrimination.
Organisation faîtière, Pro Infirmis compte 13 membres collectifs, actifs dans le domaine de l’entraide ou spécialisées dans un handicap particulier.
Site Internet : www.proinfirmis.ch
Voir : Assistant social — Handicap — Invalidité — Travail social
Daniel Petitpierre
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Pro Juventute (Fondation suisse)
La fondation Pro Juventute, dont le siège est à Zurich, s’engage pour le bien et la dignité des enfants, des jeunes et de leurs familles vivant en Suisse. Ses buts ont été fixés dès sa création en 1912. Pour les atteindre, elle dispose d’une solide organisation : on trouve à la base les districts — 191 pour toute la Suisse — qui s’appuient sur 8000 collaborateurs bénévoles. Sur le plan local, ils proposent une aide directe et lancent ou soutiennent des projets dans les domaines de l’éducation, de la formation, de la santé, de l’animation socioculturelle et des loisirs. Le secrétariat général assure les tâches d’envergure régionale ou nationale et s’engage également en matière de politique sociale. La fondation Pro Juventute finance elle-même plus de 95 % de ses activités par la vente d’articles, par des dons et des legs et par des prestations de services. Grâce, notamment, à sa traditionnelle vente de timbres, elle est connue de près de 100 % de la population suisse.
Site Internet : www.projuventute.ch
Voir : Animation socioculturelle — Jeunes socialement vulnérables — Jeunesse (Politique de la)
Heinz Bruni
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Pro Senectute (Fondation suisse)
La Fondation Pro Senectute est la plus grande organisation privée de Suisse au service de la population âgée. Elle est subventionnée par l’Office fédéral des assurances sociales. De par sa structure fédéraliste, Pro Senectute dispose d’un Secrétariat dans chaque canton, ainsi que de quelque 110 centres de consultation, animés par 730 collaboratrices et collaborateurs. Un secrétariat central offre un service de gestion et de coordination dans les domaines des prestations sociales, de la formation, de l’information, des finances.
Créée en 1917, Pro Senectute s’est engagée dès le début en faveur de l’introduction de l’AVS puis, plus tard, des prestations complémentaires. Aujourd’hui, comme institution de référence dans le champ de l’action gérontologique, elle offre une palette de prestations orientées vers le développement de l’autonomie et de la qualité de vie des personnes âgées.
Plus de 30 000 personnes sont accompagnées chaque année dans les centres de consultation sociale, parmi lesquelles deux tiers de femmes âgées de 70 à 85 ans. 9000 personnes bénéficient d’un soutien financier. 11 000 personnes sont régulièrement soutenues par une aide au foyer. Plus de 20 000 personnes reçoivent un service de repas à domicile, ce qui représente 1 300 000 repas distribués.
Pro Senectute favorise la solidarité entre générations. La Fondation se préoccupe des différents aspects liés à la vie économique, sociale, politique et culturelle, influençant l’intégration des personnes âgées dans la société.
Forte d’un budget consolidé de l’ordre de 140 millions de francs, la Fondation Pro Senectute s’engage activement dans le secteur de la promotion du bien vieillir, en proposant à la population des prestations dans les domaines de la culture, de la formation, des loisirs et du sport. À ce titre, 100 000 personnes participent chaque année aux activités d’Aînés et Sports, soit 5000 groupes constitués. Bon nombre des 4000 responsables techniques, monitrices et moniteurs suivent régulièrement des cours de perfectionnement. Pro Senectute organise dans plusieurs cantons des séminaires de préparation à la retraite, des rencontres pour les chômeurs âgés et offre également un soutien aux groupes d’entraide.
La bibliothèque de Pro Senectute Suisse compte 30 000 ouvrages de référence et prête 4000 publications chaque année. Un programme annuel de formation comprenant 75 cours est organisé à l’intention des professionnels de l’action gérontologique, internes et extérieurs à la Fondation.
Si vieillir en sécurité découle de l’assise financière de l’AVS et des prestations complémentaires, les objectifs de Pro Senectute visent corollairement à lutter contre l’isolement, contre l’insécurité sociale, contre les phénomènes d’exclusion, par la défense des intérêts et des droits des citoyens âgés, par le renforcement des réseaux de solidarité intra- et intergénérationnelle, par la mise en œuvre d’une politique de la vieillesse alliant vision prospective et action sur le terrain.
Site Internet : www.pro-senectute.ch
Voir : Assistant social — Gérontologie — Office fédéral des assurances sociales (OFAS) — Solidarité entre générations — Vieillesse (Politique de la) — Vieillissement de la population
Olivier Taramarcaz
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Problèmes sociaux
Désavantages affectant un grand nombre d’individus et qu’il apparaît à la fois désirable et possible d’atténuer, éventuellement de faire disparaître. Il s’agit de souffrances, de privations, d’injustices ou de simples inconvénients présentant les caractéristiques suivantes :
a) toucher toute la population ou beaucoup de ses membres ;
b) être contraires aux droits de l’homme, à certaines normes juridiques ou à des principes moraux ou à des idéaux, des sentiments faisant l’unanimité ou presque, ou du moins ardents dans certains milieux ;
c) ne pas paraître relever totalement de la fatalité, mais être au contraire considérés, soit comme des conséquences de défauts remédiables de l’état de la société, soit comme des infirmités, des maladies ou d’autres malheurs, dont celle-ci ne peut se désintéresser, bien qu’elle n’en soit pas la cause, ni même l’un des facteurs.
Exemples de problèmes sociaux : oppression politique, vieillesse, pollution, drogue, divorce, pauvreté, chômage, inégalité d’accès à des soins médicaux de qualité, xénophobie, discrimination raciale, échec scolaire, handicap mental.
La liste des problèmes sociaux s’allonge. D’abord, parce que l’évolution des techniques, de l’économie et des modes de vie engendre des maux inédits ou rend accessibles à des interventions, des maux contre lesquels il n’était rien possible de faire. Elle s’allonge également en raison de changements de mentalité (transformation en problèmes sociaux de situations jugées naturelles jusque-là, telles que le partage traditionnel des rôles entre époux et épouse, l’inégalité sociale face aux études).
R. E.-O. Smiegel (Éd.), Handbook on the Study of Social Problems, Rand Mc Nally and Co, 1971. — M. Fehlmann, J.-P. Fragnière, Ch. Haefeli, A. Wagner (Éds), Manuel de l’action sociale en Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 1989. — J.-P. Fragnière e. a., L’étude de la politique sociale, Cahiers de l’EESP, Lausanne, 1990.
Site Internet : www.socialinfo.ch
Voir : Action sociale — Politique sociale — Social
Roger Girod
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Procédure de consultation
La procédure de consultation représente un aspect essentiel dans le processus d’élaboration des règles de droit fédérales de rang constitutionnel, conventionnel, législatif, voire même réglementaire. Située en amont de la phase d’adoption formelle des normes par l’Assemblée fédérale ou, le cas échéant, par le Conseil fédéral, cette procédure permet de recueillir les observations non seulement des autorités cantonales et des formations politiques représentées au parlement mais, dans une perspective plus large, de sonder les “ milieux intéressés ”, c’est-à-dire les organisations et les groupes d’intérêt d’une certaine importance (organisations professionnelles, syndicales, économiques, etc.).
R. C. Bonnard, “ Remarques pratiques sur le législateur et la législation ”, in : Revue de droit suisse 1989 (vol. 108) I, pp. 567-586.
Voir : Démocratie (et politique sociale) — Phase pré-parlementaire
Michel Hottelier
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Procuration
C’est le pouvoir qu’une personne donne à une autre d’agir en son nom. Également, mot utilisé aussi pour désigner l’acte (document écrit) qui confère ce pouvoir. Dans le cadre des services qu’ils sont appelés à fournir à leurs clients, les professionnels de l’action sociale utilisent fréquemment cet instrument.
Voir : Curatelle — Tutelle
jpf
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Productivité du travail
Dans son acceptation la plus simple, la productivité du travail mesure la quantité d’un bien ou d’un service produite par heure de travail. Si l’on pousse l’analyse plus loin, il s’agit de distinguer la productivité physique et en valeur, selon que la production considérée est mesurée en unités physiques ou en termes monétaires. Si la première mesure est influencée essentiellement par les progrès technologiques ou la variation du stock de machines disponibles qui permettent de produire plus avec le même nombre d’heures de travail, la seconde peut varier non seulement en raison de ces deux paramètres mais aussi du fait des modifications du prix des biens ou des services produits. Pour les entreprises qui sont préoccupées par leur rentabilité financière, la productivité mesurée en valeur constitue un indicateur particulièrement important. Il peut être utile également de distinguer les notions de productivité globale et partielle. Le premier concept évalue le rapport entre la production totale (en termes physiques ou monétaires) et l’ensemble des facteurs de production (travail, capital, ressources naturelles) utilisés. Le second rapporte la production totale à l’emploi d’un seul facteur de production, par exemple le travail.
La vie économique et sociale dépend très étroitement de la productivité. Elle influence à la fois l’évolution de l’emploi, les modifications des prix et des salaires ainsi que le rendement du capital. Ainsi, en partant de la définition de la productivité, on constate que si la croissance de la production globale d’une économie (mesurée par le biais du PIB) dépasse la progression de la productivité du travail, le nombre d’emplois s’accroît (pour autant que les horaires de labeur restent inchangés). En revanche, la productivité est susceptible de réduire l’emploi si sa croissance est supérieure à celle de la production. Au niveau sectoriel, on constate que les branches où le progrès technique est créateur d’emploi comprennent aussi bien des activités où la croissance de la productivité est supérieure à la moyenne nationale que des industries caractérisées par des taux inférieurs à la moyenne. Dans les premières (chimie, énergie, informatique…), la productivité tendrait, en raison de sa forte progression, à diminuer l’emploi mais la demande qui s’adresse à ces secteurs augmente suffisamment pour inverser cette tendance. À l’inverse, des activités telles que l’industrie du bois connaissent une progression de la demande qui permet de compenser un progrès technique relativement lent. Finalement, il est clair que dans les activités agricoles, la stagnation de la demande, conjuguée à une forte progression de la productivité engendre nécessairement une forte contraction de l’emploi.
Une hausse de la productivité du travail se traduit, initialement, par une baisse du coût de production qui profite aux entreprises et permet d’accroître le profit distribué ou non aux actionnaires. Cependant, ce gain de productivité n’échoit pas nécessairement au capital uniquement. Il peut être également distribué aux consommateurs, par une baisse des prix des produits, ou aux travailleurs, par un accroissement de leurs salaires réels (rapport entre rémunération du travail et niveau général des prix). Cette répartition des gains est particulièrement importante du point de vue du financement des assurances sociales qui repose, aujourd’hui encore, essentiellement sur le travail. Finalement, les gains de productivité peuvent être distribués sous la forme d’une réduction de la durée du travail. Pour un volume de production donné, et toutes choses égales par ailleurs, lorsque la productivité s’accroît d’un certain pourcentage, la durée du travail peut être réduite d’autant, sans diminution du pouvoir d’achat. La réduction du temps de labeur est d’ailleurs souvent en elle-même un facteur d’accroissement de la productivité horaire du travail.
R. J. Fourastié, La productivité, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1957.
Voir : Activité économique (au sens du BIT) — Partage du travail — Produit intérieur brut (PIB) — Redistribution des revenus — Travail (Marché du)
Yves Flückiger
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Produit intérieur brut (PIB)
Le produit intérieur brut (PIB) mesure la production totale réalisée, pendant une période (annuelle en général) par l’ensemble des entreprises localisées sur le territoire d’un pays, indépendamment du lieu de résidence des détenteurs des facteurs de production qui ont contribué à cet effort. Le PIB peut être obtenu en additionnant l’ensemble des dépenses adressées à ces entreprises (consommation finale des ménages, de l’État et des assurances sociales, investissement et solde entre exportations et importations de biens et services). On obtient également le PIB en additionnant la valeur ajoutée de toutes les entreprises localisées sur le territoire du pays considéré. Celle-ci mesure la différence entre le chiffre d’affaires (valeur de la production) et la somme des achats intermédiaires. Le PIB permet de calculer la croissance des activités économiques réalisées sur le territoire d’un pays. Cette information est importante pour comprendre l’évolution de l’emploi, même si les liens entre les variations du PIB et de l’emploi ne sont pas fixes dans le temps. En ajoutant les revenus du travail et de la propriété reçus de l’étranger par des résidents du pays et en soustrayant les revenus des facteurs versés à des résidents à l’étranger (frontaliers notamment), on obtient le produit national brut (PNB). En Suisse, le PNB dépasse traditionnellement le PIB en raison essentiellement des revenus des capitaux détenus par des résidents suisses à l’étranger qui dépassent largement les revenus versés par des entreprises localisées sur le territoire helvétique à des frontaliers. Lorsque les entreprises sises en Suisse délocalisent une partie de leur production à l’étranger, cela contribue à réduire le PIB tout en augmentant le PNB helvétique. Le PNB par habitant constitue un indicateur fréquemment utilisé pour mesurer le niveau de vie des résidents, même s’il est soumis à de nombreuses critiques liées notamment au fait qu’il n’incorpore pas les activités domestiques, qu’il intègre des productions qui sont à l’origine de coûts externes pour la collectivité (pollution) et qu’il ne dit rien sur la distribution des revenus entre toutes les personnes qui résident dans un pays. Pour appréhender le bien-être de la population, il faut donc compléter cet indicateur par d’autres critères aussi bien quantitatifs que qualitatifs.
Voir : Bien-être social — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques  Office fédéral de la statistique (OFS)
Yves Flückiger
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Produit national brut (PNB) àð Produit intérieur brut (PIB)
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Profession
L émergence des professions n est qu un aspect du processus de division du travail. La profession est la forme selon laquelle des capacités à contenus identiques sont offertes comme marchandises sur le marché du travail. L’existence des professions n’est possible que si l’on admet (ou dissimule dans le non-dit) l’existence d’un résidu de travail constitué par l’ensemble des tâches que l’on peut attendre de tout individu “ non qualifi頔, défini essentiellement par son incompétence. On voit donc que toute définition d’une profession est, dans le même temps, définition d’incompétence (pour les autres…).
Les professions sont des réalités fort complexes, dont la compréhension implique la prise en considération de plusieurs dimensions. En effet, les professions sont à la fois : des éléments qui organisent les pratiques sociales, des formes d’organisation de la division du travail, des référentiels pour les processus de formation institutionnalisés, des dimensions de l’offre sur le marché du travail, des pôles d’orientation des processus individuels de construction de projets de vie et de formation, des formes de distribution et de légitimation de l’inégalité des chances.
Penser l’organisation des professions, discuter leur légitimité, voire leur avenir, c’est nécessairement prendre en considération toutes ces dimensions.
On peut analyser les professions comme le résultat d’un ensemble d’efforts en vue d’insérer l’exercice d’une activité dans le marché du travail. Elles deviennent ainsi un instrument permettant aux individus et aux groupes de consolider leur existence matérielle et sociale. Dans ce contexte, on considérera que les professions, telles qu’elles sont organisées dans un régime de salariat, s’articulent et se structurent de manière à gérer l’inégalité de leur position sur le marché du travail.
R. J.-P. Fragnière, Maîtriser la division du travail dans les professions sociale et les professions de la santé, Réalités sociales, Lausanne, 1984. — U. Beck, M. Brater, H. Daheim, Soziologie der Arbeit und der Berufe, Reinbeck, 1980. — W. Tousijn, Sociologia delle professioni, Bologna, 1979.
Voir : Division du travail (Mécanismes de la) — Travail (Marché du)
jpf
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Professionnels de l’action sociale (Association suisse des) (ASPAS)
L’ASPAS est l’Association suisse des professionnels de l’action sociale. Elle promeut le regroupement et la reconnaissance des spécialistes de formation professionnelle dans le domaine social, en vue de sauvegarder leurs intérêts professionnels, sociaux et économiques et de favoriser leur participation active au développement de la politique sociale.
Les membres de l’ASPAS sont des personnes formées en travail social, en éducation spécialisée, en animation socioculturelle et en enseignement socioprofessionnel, diplômées d’une École supérieure de travail social, d’une Haute École spécialisée ou d’une Université, respectivement des étudiants des branches ci-mentionnées, en cours de formation dans lesdites écoles/universités.
Les prestations de l’ASPAS répondent aux besoins des membres et comprennent en principe : la représentation des intérêts et des préoccupations des membres et de l’Association dans les domaines de la politique sociale, professionnelle et de la politique de formation ; l’action dans le domaine public ; des services qualifiés et orientés dans les domaines suivants : marché du travail, conditions d’emploi et de travail, information. L’ASPAS est active tant au plan national qu’au plan international. Ses sections ont la charge des prestations associatives dans leur région.
Site Internet : www.aspas.ch
Voir : Association romande et tessinoise des institutions d'action sociale (ARTIAS) — Travail social
ASPAS
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Programme national de recherche No 29
Dans le cadre de la cinquième série des Programmes nationaux de recherche (PNR), le Conseil fédéral a chargé le Fonds national suisse de la recherche scientifique de mettre en œuvre le PNR 29 intitulé : Changements des modes de vie et avenir de la sécurité sociale. La grande partie de ses résultats sont publiés et inspirent plusieurs champs thématiques de ce dictionnaire.
L'objectif premier du PNR 29 a consisté à montrer dans quelle mesure il convient de tenir compte des changements de modes de vie pour définir une politique sociale qui s'inspire de l'idée de sécurité sociale. Le but de ce programme de recherche était donc de mettre en évidence les points forts et les limites du système de sécurité sociale actuel et de conduire une réflexion sur la manière d'adapter les mesures et les institutions aux exigences d'une société dont les besoins se transforment ; l'objectif étant de pouvoir garantir une véritable sécurité sociale dans un contexte nouveau. Une synthèse de l'ensemble de ces travaux est publiée par les éditions Réalités sociales.
R. J.-H. Sommer, S. Chütz, Changements des modes de vie et avenir de la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1997.
Site Internet : www.snf.ch
Voir : Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNRS) — Mode de vie (changement des) — Programmes nationaux de recherche — Sécurité sociale
Sophie Barras Duc
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Programme national de recherche No 32
Dans le cadre de la sixième série des Programmes nationaux de recherche (PNR), le Fonds national suisse de la recherche scientifique a mis en œuvre le PNR 32 intitulé : Vieillesses. En partie, ses résultats sont publiés et inspirent plusieurs champs thématiques de ce dictionnaire.
Sites Internet : www.snf.ch — www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Voir : Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNRS) — Programmes nationaux de recherche — Vieillesse — Vieillesse (Politique de la)
Sophie Barras Duc
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Programme national de recherche No 45
Le PNR 45 “ Problèmes de l’État social ” a pour but d'intensifier la recherche dans des domaines importants, mais jusqu'à présent négligés de la politique sociale. Parmi ces domaines figurent les nouvelles orientations de la sécurité sociale, les personnes handicapées, le chômage et le système de santé. Une des tâches importante consistera à élaborer les bases nécessaires à l'adoption de mesures de politique sociale à moyen terme et à collecter des données statistiques susceptibles d'être utilisées ultérieurement.
Le PNR est doté de frs. 12 mio. Il contient les quatre ponts forts suivants : (1) fondements et nouvelles orientations de la sécurité sociale ; (2) personnes handicapées et politique sociale ; (3) chômage et politique sociale ; (4) le système de la santé. 35 projets de recherche ont été mis sur pied. Les résultats de synthèse seront à disposition en 2004.
R. Fonds national de la recherche scientifique, État d’avancement des programmes nationaux de recherche, Berne (chaque année) — Programme national de recherche.
Site Internet : www.snf.ch
Voir : Programmes nationaux de recherche
Christian Mottas
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Programmes nationaux de recherche
Le Conseil fédéral a confié au Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique la tâche d’effectuer régulièrement des programmes nationaux de recherche portant sur divers problèmes qui se posent à la société helvétique. À ce jour, plus de 40 programmes ont été mis en œuvre et une nouvelle série est en préparation. Les résultats de ces travaux constituent un important patrimoine intellectuel dont une partie concerne le secteur de la politique sociale, en particulier les thèmes suivants : sécurité sociale, famille, vieillesse, éducation, santé, migration, travail, logement et intégration sociale, etc. Un bilan de ces travaux, avec les références utiles, est établi chaque année par le Fonds National dans un document intitulé : État d’avancement des programmes nationaux de recherche. Ce document est remis aux personnes intéressées sur simple demande.
R. État d’avancement des programmes nationaux de recherche, Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique, Berne (chaque année).
Site Internet : www.snf.ch
Voir : Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNRS) — Programme national de recherche No 29 — Programme national de recherche No 32 — Programme national de recherche No 45
Miriam Bass
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Prospective
La prospective est une problématique qui, en s’appuyant sur un ensemble de recherches pertinentes, s’efforce d’anticiper l’avenir de la société à long terme. Elle cherche une convergence du probable, du possible et du souhaitable. À cet effet, elle recourt à des prévisions techniquement fondées (démographie par ex.) ; elle identifie des “ tendances lourdes ” qui se dégagent de l’évolution passée et présente, et dont la continuité — ou la rupture — semble possible ; elle imagine des développements (découvertes scientifiques et innovations techniques, qualité de vie en société, environnement et prestations, etc.) ; elle fixe des objectifs, en une synthèse dûment coordonnée, à l’aide de scénarios divers, car les évolutions à venir sont multiples et nul n’est devin! Puis réflexion et regard inversé depuis le lieu de ce futur dessiné (à grands traits mais avec cohérence), elle est un effort raisonné pour élaborer une stratégie et pour énoncer une démarche politique en vue de passer de la situation sociale présente à cet avenir prospecté.
La prospective ne se confond pas avec la futurologie (extrapolation des tendances passées et présentes dans le futur), ni avec l’utopie (rêve d’un monde autre). Elle requiert connaissances, rigueur, esprit critique, circonspection et humilité. Elle est un indispensable questionnement, visant à réconcilier le savoir et le pouvoir (Berger) ; elle est (Decouflé) ambition de philosophe, vertu de gendarme, qualité de savant, morale du regard.
R. G. Berger, Phénoménologie du temps et prospective, PUF, Paris, 1964. — A. C. Decouflé, La prospective, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1987.
Voir : Planification sociale — Précaution (Principe de)
Pierre Gilliand
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Prostitution
La prostitution est un phénomène social qui ne peut être compris qu'en relation avec les normes et modèles dominants dans une société donnée.
La prostitution, ou travail sexuel, est une relation sociale qui met en présence deux types d'acteurs lors d'un échange marchand ; elle est caractérisée par son asymétrie. Les représentations sociales qui sont associées à la personne qui se prostituent sont dévalorisantes et stigmatisantes. Le client quant à lui échappe le plus souvent à l'analyse comme à l'action sociale. Le/la prostitué/é par contre est depuis toujours l'objet d'attentions particulières (médecins, services sociaux, police, etc.).
R. A. Corbin, Les filles de noce, misère sexuelle et prostitution (XIXe), Flammarion, Paris, 1976. — D. Welzer-Lang, O. Barbosa, L. Mathieu, Prostitution : les uns, les unes et les autres, Métailié, Paris, 1994.
Voir : Femmes (Émancipation des) — Stigmatisation
Valérie Dupertuis
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Protection de l’enfant
Personne(s), structure(s), institution(s), autorité(s), ensemble de règles socioculturelles, éducatives, sanitaires et juridiques qui assurent à l’enfant sa protection dans son développement psychique, affectif, social et physique, en vue de son autonomie et de son insertion dans la société. Le(s) détenteur(s) de l’autorité parentale ou la personne désignée pour l’exercer, assure (nt) en premier lieu cette protection, en procurant les soins et l’éducation nécessaires à l’enfant. En cas de négligences, de carences, de mauvais traitements physiques et psychiques, d’abus sexuels, une action liée à la protection des mineurs est mise en œuvre soit sur une base administrative par les autorités compétentes (Service de protection de la jeunesse / Office des mineurs), soit dans le cadre d'un mandat judiciaire. Dans la deuxième hypothèse, l'autorité judiciaire a le pouvoir d'imposer une mesure pour protéger l'enfant et ce sont les règles du droit civil suisse et du droit cantonal qui s'appliquent. Il s'agit de curatelle d'assistance éducative, de retrait de la garde ou éventuellement de nomination d'un(e) tuteur (trice).
En ce qui concerne les mesures pénales, elles sont réservées en cas d'infractions au Code pénal.
R. Code civil suisse, articles 307 et suivants. — Code pénal, article 127/articles 187 et suivants/article 220/article 219. — Lois cantonales en matière de protection de la jeunesse. — Convention internationale des droits de l’enfant.
Voir : Abus sexuel — Autorité parentale — Autorités tutélaires — Droit du placement d'enfant — Enfance (Politique de l’) — Enfance (Politique de la petite) — Maltraitance — Pro Juventute (Fondation suisse)
Jean Vallet
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Protection des consommateurs
Consacrée par l’article 31sexies de la Constitution fédérale, la protection des consommateurs se développe dans trois directions principales :
— Elle tend à fournir aux consommateurs une information neutre, indépendante de toute publicité, aussi complète que possible sur les biens et les services, notamment au moyen de tests et d’enquêtes de marché.
— Elle vise à rendre les consommateurs plus conscients de leurs droits et de leurs responsabilités dans la vie économique et sociale en leur désignant les enjeux de leurs choix.
— Elle permet en outre de représenter les consommateurs et de faire valoir leurs intérêts auprès des commerçants, des institutions étatiques, ainsi que devant les tribunaux.
Les organisations de consommateurs sont reconnues par la loi au même titre que les syndicats ou les organisations professionnelles et sont appelées à représenter leurs membres dans diverses commissions fédérales et cantonales, en particulier dans les domaines de la consommation, de l’agriculture, de l’énergie, de la santé et de l’économie en général.
Dans les faits, elles font connaître leur action au moyen de leurs propres publications ; en Suisse romande, la Fédération romande des Consommateurs édite le journal “ J’Achète Mieux ”.
Site Internet : www.frc.ch
Voir : Consumérisme — Fédération Romande des Consommatrices (FRC) — Procédure de consultation
Dominique Perret et Pascale Erbeia
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Protection sociale
La notion de protection sociale peut être comprise dans un sens étroit ; c’est alors l’équivalent de la sécurité sociale (régimes publics et régimes complémentaires). Elle peut aussi être comprise dans un sens large, qui s’étend au droit du travail ; elle correspond alors au champ couvert par la Charte sociale européenne et par la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs. Le sens étroit est utilisé par les autorités communautaires. Il a l’avantage de se distinguer de ce qu’un État nomme sécurité sociale ; il a l’inconvénient de ne pas bénéficier de l’ancrage que cette dernière trouve, de longue date, dans le droit international et la théorie générale.
Voir : Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs — Charte sociale européenne — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Théorie générale de la)
Pierre-Yves Greber
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Protection sociale (Articles constitutionnels sur la)
Les dispositions relatives aux assurances sociales ont été inscrites progressivement dans la Constitution fédérale. Le développement s’étend sur quelque quatre-vingts ans. Le peuple et les cantons ont ainsi approuvé les textes permettant une protection en cas de maladie et accidents (1890 : art. 34 bis), de vieillesse, de décès et d’invalidité (1925, puis 1972 : art. 34 quater), de maternité et charges de famille (1945 : art. 34 quinquies), de chômage (1947 : art. 34 ter et 1976 : art. 34 novies). L’article concernant l’assistance des personnes dans le besoin a été accepté en 1975 (art. 48). Quelques révisions de la Constitution ont été rejetées : l’assurance-maladie (1974 et 1994), l’assurance-maternité (1984), l’assurance-vieillesse et survivants (1995).
Adoptée le 19 avril 1999, la révision de la Constitution est entrée en vigueur le 1er janvier 2000. Un chapitre consacré aux “ buts sociaux ” prévoit, notamment, que la Confédération et les cantons s’engagent à ce que toute personne “ soit assurée contre les conséquences économiques de l’âge, de l’invalidité, de la maladie, de l’accident, du chômage, de la maternité, de la condition d’orphelin et du veuvage ” (art. 41, al. 2). Les dispositions relatives aux assurances sociales figurent aux articles 111 à 117. Le droit d’obtenir de l’aide dans des situations de détresse fait l’objet de l’article 12 de la Constitution révisée.
Voir : Assurance-maladie — Assurance-accidents (Article constitutionnel sur l’) — Chômage (Article constitutionnel relatif à la protection contre le) — Famille (article constitutionnel sur la protection de la).
Béatrice Despland
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Protection sociale (Évolution de la législation)
En mai 1992, le Conseil fédéral publie un rapport sur la question de l’adhésion à l’Espace économique européen (EEE). Pour que notre pays puisse entrer dans l’EEE, les Chambres fédérales décident — avec célérité — maintes adaptations du Droit suisse des assurances sociales au droit communautaire, dans le cadre du “ Paquet Eurolex ”. Mais le peuple et les cantons opposent un refus à l’adhésion à l’EEE, le 6 décembre 1992. Certaines adaptations sont cependant incluses dans le “ Programme Swisslex ” (accidents, notamment). Une loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LFP) est adoptée en décembre 1993, ainsi qu’une modification au régime de la LPP avec la nouvelle loi fédérale sur l’encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle. Après une longue procédure d’élimination des divergences, une nouvelle loi fédérale sur l’assurance-maladie (LAMAL) est adoptée le 18 mars 1994. Elle est acceptée de justesse en votation référendaire en décembre 1994 et entre en vigueur, pour l’essentiel, le 1er janvier 1996. La dixième révision AVS, qui a traîné en longueur, est enfin adoptée par les Chambres le 7 octobre 1994. L’un des objectifs de la nouvelle loi est la réalisation de l’égalité de traitement entre hommes et femmes ; la loi introduit le système de la rente individuelle, en divisant les revenus pour les personnes mariées (splitting), un régime de bonifications pour tâches éducatives et d’assistance ainsi que la rente de veuf. Il s’agit d’un “ tournant dans la politique sociale ”. Mais le Parlement a inclus une élévation de l’âge ouvrant droit à la rente de vieillesse des femmes ; aussi un référendum est-il lancé ; la loi est acceptée le 25 juin 1995. Deux initiatives visent à contrecarrer cette modification. Durant l’été 1996, le Conseil national rejette une nouvelle fois la ratification de la Charte sociale européenne, que la Suisse avait signée en 1976 déjà. La majorité estime que les objectifs de la Charte, formulés à une époque de prospérité économique, ne sont plus d’actualité. L’assurance-chômage a fait l’objet de nombreux débats. La loi révisée (LACI), adoptée par le Parlement le 23 juin 1995, instaure un nouveau système de prestations et de cotisations ; elle met l’accent sur la réinsertion des chômeurs ; elle entre en vigueur en deux temps : 1er janvier 1996 et 1er janvier 1997, notamment pour les mesures de placement, les cantons devant créer des offices régionaux et 25 000 places d’occupation temporaire.
R. P. Gilliand, S. Rossini, La protection sociale en Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 1997.
Voir : Politique sociale — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Architecture de la)
Pierre Gilliand et Stéphane Rossini
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Protectionnisme
Ensemble des mesures commerciales et financières visant à limiter ou à sélectionner l’entrée des marchandises étrangères en vue d’abriter les producteurs domestiques de la concurrence extérieure. On considère généralement que le libre-échange permet de maximiser le bien-être de la collectivité grâce aux gains obtenus par la spécialisation de chaque pays dans les productions pour lesquelles il détient un avantage comparatif. Différents arguments peuvent être évoqués néanmoins pour justifier une politique protectionniste. Le premier est lié aux différences de développement économique qui risquent de bloquer la croissance ultérieure des pays les plus pauvres en les amenant à se spécialiser dans des activités, telles que l’agriculture ou la production de matières premières, caractérisées par une faible productivité et l’absence de progrès technique. Pour favoriser l’apparition et le développement de productions porteuses d’une croissance plus vigoureuse, des politiques protectionnistes peuvent être justifiées afin d’éviter que ces activités naissantes ne soient étouffées dans l’œuf par la concurrence exercée par les entreprises de pays riches qui bénéficient d’une plus longue expérience et disposent d’une technologie plus avancée. Le protectionnisme vise également à maintenir une production minimale de certains biens jugés indispensables à la survie d’un pays en cas de crise majeure, comme ce fut le cas de l’agriculture suisse destinée à assurer une autosuffisance alimentaire du pays. Dans le même temps, certaines productions peuvent engendrer des bénéfices externes qui ne sont pas pris en considération par le marché qui produira une quantité insuffisante de ce bien. Dans ce cas, une politique protectionniste peut contraindre le marché à tenir compte de l’utilité sociale d’une activité particulière telle que l’agriculture par exemple qui produit des biens directement utiles mais qui fournit aussi un service à la collectivité en entretenant le paysage. Un autre argument fréquemment évoqué est celui de la défense des emplois menacés par les importations, même si ces stratégies se font souvent au détriment des secteurs exportateurs soumis à des mesures de représailles de la part des partenaires commerciaux. De ce point de vue, les politiques protectionnistes peuvent aussi avoir pour motivation de corriger des inégalités de revenus en protégeant par exemple, dans les pays développés bien dotés en capital, des secteurs relativement intensifs en travail. Finalement, les politiques protectionnistes visent également à rétablir des déséquilibres de la balance des paiements en réduisant les importations.
Les principales techniques protectionnistes sont les droits de douane et les quotas sans omettre les restrictions techniques, sanitaires ou réglementaires aux échanges. Les droits de douane sont des taxes prélevées soit sur la valeur (ad valorem) soit sur le volume des importations (droits de douanes spécifiques utilisés par la Suisse notamment). Les quotas constituent des restrictions quantitatives des importations (ou des exportations parfois). La Suisse applique encore, sur de nombreux marchés agricoles, des contingents qui varient parfois en fonction de la saison comme c’est le cas sur le marché des fruits et légumes. Du point de vue économique, les droits de douane présentent plusieurs avantages par rapport aux contingents. Ils sont plus transparents pour les consommateurs qui connaissent immédiatement le prix de la politique protectionniste concrétisé par le biais du tarif douanier. Ils sont plus flexible puisque en cas de diminution du prix sur le marché mondial, les prix domestiques suivent le mouvement à la baisse. Avec le système des quotas, le prix payé par les consommateurs domestiques ne bouge pas alors que la rente obtenue par les importateurs augmente. Finalement, les droits de douane sont plus favorables à la concurrence car les producteurs domestiques ne savent pas quelle quantité de biens sera importée. Avec un système de contingentement, cette information est connue à l’avance et cela peut faciliter la conclusion d’accords horizontaux.
Voir : Concurrence — Externalités
Yves Flückiger
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Psychiatrie de la personne âgée (Accès aux soins en)
La Déclaration de consensus sur l’organisation des soins en psychiatrie de la personne âgée soutient qu’une bonne santé et une bonne qualité de vie sont des droits humains fondamentaux. Ceci concerne également les personnes de tous les groupes d’âge et celles ayant des troubles mentaux. Toute personne a le droit d’accéder à une diversité de services qui puissent répondre à ses besoins sanitaires et sociaux. Ces besoins devraient être satisfaits en respectant le cadre culturel et en se conformant à l’état des connaissances scientifiques et aux exigences éthiques. C’est ainsi que les gouvernements ont la responsabilité d’améliorer et de maintenir la santé en général et la santé mentale des personnes âgées, et de soutenir leurs familles ainsi que leurs soignants par la promotion de mesures sanitaires et sociales adaptées aux besoins spécifiques de la communauté locale. Les personnes âgées ayant des problèmes de santé mentale, ainsi que leurs familles et leurs soignants ont le droit (et même le devoir) de participer individuellement et collectivement à la réalisation et à la mise en place de soins qui leur sont destinés. Les services devraient être conçus pour la promotion de la santé mentale dans l’âge avancé aussi bien que pour l’évaluation, le diagnostic et la prise en charge de toute la gamme des troubles mentaux et des incapacités affectant les personnes âgées. Les gouvernements doivent reconnaître le rôle crucial des agences non-gouvernementales et travailler en partenariat avec elles. Se préparer à faire face à l’augmentation de l’espérance de vie et à ses conséquences en termes de risques de santé, exige des innovations sociales significatives pour l’individu et la société, innovations qui doivent être construites sur une base de connaissances extraites des contributions et de la collaboration des sciences médicales, comportementales, psychologiques, biologiques et sociales. Dans les pays en voie de développement, il peut s’avérer difficile de fournir les ressources pour la promotion des soins. Cela ne doit cependant pas invalider l’objectif d’aider les personnes âgées par l’application des principes généraux énoncés ci-dessus et des principes spécifiques. Malheureusement, beaucoup de personnes âgées avec un trouble mental ne souffrent pas que du fait de leur maladie. Bien souvent elles sont stigmatisées et discriminées à cause de leur âge avancé mais aussi par le fait d’être malades. Ces préjugés expliquent très souvent pourquoi de nombreuses personnes restent sans soins, malgré l’existence de services et de personnes capables de leur apporter des soins adaptées.
R. World Health Organization & World Psychiatric Association, Organization of care in psychiatry of the elderly : a technical consensus statement, WHO/MSA/MNH/MND/97.3, Geneva, 1997. — World Health Organization, La santé mentale â travers le monde. Non à l’exclusion, oui aux soins, WHO/NMH/MSD/WHD/00.2, Geneva, 2001.
Voir : Psychiatrie de la personne âgée (composants des services en) — Réseau de soins — Vieillesse
Carlos Augusto de Mendonça Lima
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Psychiatrie de la personne âgée (Composants des services en)
Les principaux composants des services en psychiatrie de la personne âgée ont été proposés par la Déclaration de consensus sur l’organisation des soins en psychiatrie de la personne âgée. Les patients individuellement ou avec leurs familles et leurs soignants primaires doivent pouvoir accéder à des services de soins articulés de façon flexible, intégrés afin de fournir un système unifié, garantissant la continuité des soins. Les obstacles structurels devraient être réduits au minimum, rendant possible le passage sans heurts d’un service à un autre, selon les exigences voulues par les changements de situations cliniques, sociales, familiales, etc. Ces composants devraient idéalement être sous la responsabilité d’équipes spécialisées composées de professionnels formés et travaillant en psychiatrie de la personne âgée. Les composants sont les :
- équipes communautaires de santé mentale,
- services hospitaliers,
- hôpitaux de jour,
- services ambulatoires,
- services hospitaliers de répit,
- services de soins hospitaliers continus,
- services de liaison,
- services de soins primaires,
- services de soutiens communautaires et sociaux,
- structures de répit de décharge,
- soins résidentiels,
- services de prévention.
R. World Health Organization & World Psychiatric Association, Organization of care in psychiatry of the elderly : a technical consensus statement, WHO/MSA/MNH/MND/97.3, Geneva, 1997.
Voir : Psychiatrie de la personne âgée (Accès aux soins en) — Réseau de soins (Organisation du) — Vieillesse
Vincent Camus
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Psychogériatrie
La psychogériatrie est une branche de la psychiatrie. Cette spécialité est parfois dénommée psychiatrie de la personne âgée, psychiatrie gériatrique ou psychiatrie de l’âge avancé. Elle est partie intégrante de l’organisation multidisciplinaire des soins de santé mentale destinés aux personnes âgées. Cette spécialité se caractérise par son orientation communautaire et par l’approche multidisciplinaire de l’évaluation, du diagnostic et du traitement.
La psychogériatrie s’occupe de l’ensemble des maladies psychiatriques et de leurs conséquences, — particulièrement des troubles de l’humeur et de l’anxiété, des démences, des psychoses de l’âge avancé et des toxicomanies. Une polypathologie psychiatrique n’est pas rare. Dans une majorité de cas, la morbidité psychiatrique coexiste avec des maladies physiques et est susceptible de se compliquer de problèmes sociaux. Les affections mentales du grand âge peuvent être traitées avec succès. Quelques-unes sont chroniques et/ou progressives mais peuvent bénéficier d’interventions appropriées qui contribuent à l’amélioration de la qualité de vie.
Pour gérer les problèmes de santé, l’apprentissage des principes impliqués dans leur identification et dans leur prise en charge doit faire partie intégrante de la formation de base de toutes les professions de santé et des professions sociales.
Pour garantir l’efficacité de ce travail, une variété de ressources doit être disponible et accessible. Cette variété comprend des unités de soins aigus, de réhabilitation, de soins de jour, ainsi que des possibilités d’accueil temporaire et une variété de lieux d’hébergement pour des personnes qui ne sont plus capables de vivre dans leur propre domicile. Les liens avec les services communautaires sont importants.
Un service idéal de psychiatrie de la personne âgée est celui qui met le patient au centre des préoccupations et qui réalise une suffisante coordination entre ses éléments pour assurer une réelle continuité des soins. Ce service doit être intégré dans le système de santé et de sécurité sociale tout en dépendant d’un cadre social, politique, légal et économique approprié et en réalisant sa mission avec un concept qualité pour un coût optimal.
R. Ch. Muller, J. Wertheimer, Abrégé de Psychogériatrie, Masson, Paris, 1981. — OMS/MNH/MND Psychiatry of the elderly : a consensus statement, Genève, 1996.
Voir : Gérontologie — Vieillesse — Vieillesse (Psychologie de la)
Michel Gaillard
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Psychomotricité (Formation en)
La pratique psychomotrice s’intéresse à l’ensemble des relations entre vie mentale, affective et somatique, ainsi qu’à leur expression sur le plan corporel. Elle considère ses manifestations sous l’angle fonctionnel et expressif et dans leur interaction avec les facteurs historiques, culturels, sociaux et physiques qui fondent la personne humaine. Elle ne s’adresse pas à la motricité en tant que telle, mais à ce que la motricité représente, c’est-à-dire à la personnalité en action. Depuis 1995, la formation est dispensée à Genève par l’Ecole romande de psychomotricité (ERP), rattachée à l’Institut d’études sociales (I.E.S.), et en collaboration avec la Faculté de psychologie et des sciences de l éducation de l Université de Genève.
Site Internet : www.ies-geneve.ch/ERP/commission-f.html
Voir : Travailleurs sociaux (Formation des)
jpf
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Pupille àð Tutelle
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Pyramide des âges
Représentée sous la forme d’un double histogramme, la structure par âge et par sexe d’une population traditionnelle (fécondité et mortalité élevées) prend la forme d’une pyramide ; dans les populations occidentales, elle devient obélisque ou champignon. Cet instantané fournit des indications précieuses sur le poids relatif des jeunes et des vieux, des hommes et des femmes, que l’on peut aussi distinguer selon leur état civil, leur statut d’occupation ou leur nationalité. Surtout, il s’agit d’un condensé de l’histoire socio-démographique des générations présentes et passées et de la base pour anticiper leurs évolutions à venir. La structure du moment reflète en effet les tendances séculaires de la natalité, de la mortalité aux différents âges et de la longévité, les accidents de l’histoire, les inégalités devant la mort, les conséquences migratoires de la conjoncture économique. Des phénomènes différents peuvent toutefois converger vers une structure identique, l’image du moment ne peut donc totalement expliquer le passé ; elle ne contient pas non plus le futur. Si la composition de la population permet d’avoir une idée de qui seront les acteurs de demain — combien de parents potentiels, de retraités, d’enfants à l’école — elle ne nous dit pas s’ils auront les mêmes comportements que ceux qui les ont précédés.
R. J. Véron, Arithmétique de l’homme, Seuil, Paris, 1993. — R. Pressat, L’analyse démographique, PUF, Paris, 1983.
Voir : Démographie — Population — Vieillissement de la population
Claudine Sauvain-Dugerdil
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Qualité de vie
La qualité de vie se définit comme un état de bien-être. Elle est un concept plus large que la santé ou le bien-être. Il n’y a pas de consensus sur ce concept qui intègre la capacité fonctionnelle, le degré et la qualité de l’interaction sociale, le bien-être psychologique, les sensations physiques ou somatiques telles que la douleur et la satisfaction de vie. Le terme consacré est la “ Qualité de vie en sant頔 (Health-related Quality of life).
L’état de santé, le bien-être et la qualité de vie sont des concepts interchangeables dans la littérature. Dans le cas de la qualité de vie en santé, des valeurs plus larges que celles qui mesurent spécifiquement la santé sont utilisées telles que la liberté, les aspects économiques, la qualité de l’environnement, la pratique de l’activité physique.
En Suisse, La Fondation suisse pour la promotion de la santé conduit un projet qui a pour but de disposer d’une vue d’ensemble de la situation en matière de promotion de la santé en Suisse, d’identifier les domaines où il convient d’intervenir et de formuler des stratégies concrètes susceptibles d’être intégrées à des politiques de santé nationales ou régionales.
R. G. Antille, L’analyse multidimensionnelle des conditions de vie : méthodologie et application à la Suisse, Série de publications du LEA, Genève, 14, 1997. — M.-J. Manidi, I. Arvanitou-Dafflon (Éds), Activité physique et santé : apport des sciences humaines et sociales. Éducation à la santé par l’activité physique, Masson, Paris, 2000.
Sites Internet : http://www.qualite-de-vie.ch — http://www.radix.ch — http://www.hepa.ch
Voir : Bien-être — Fondation 19 - Fondation suisse pour la promotion de la santé
Marie-José Manidi
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Quart Monde
Couche de la population composée de personnes et de familles confrontées durablement à un cumul de précarités dans les principaux secteurs de l’existence (unité familiale, participation à la vie sociale et culturelle, formation, travail, santé, logement, etc.).
L’appellation “ Quart Monde ” a été créée par le Mouvement ATD Quart Monde (organisation internationale fondée en 1957 par le Père Joseph Wresinski alors engagé dans le bidonville de Noisy-le-Grand, France).
Elle s’inspire de la notion du Quatrième Ordre (“ Ordre sacré des Infortunés ” introduit par Dufourny de Villiers en 1789) et de l’expression Tiers-monde qui devenait usuelle au seuil des années soixante.
L’intention était alors, et demeure dans les regroupements engagés avec cette population, de sortir des désignations individualisantes : reconnaître à ces familles très pauvres une identité collective et envisager toute démarche avec celles-ci dans un esprit de partenariat.
R. H. Beyeler-von Burg, Des Suisses sans nom, Éditions Quart Monde, Treyvaux, 1984. — J. Wresinski, Grande pauvreté et précarité économique et sociale, Rapport présenté au Conseil économique et social, 1987. — Démocratie et pauvreté - du quatrième ordre au Quart Monde, présentation René Rémond, Éditions Quart Monde, Albin Michel, Paris, 1991. — Groupe de reclude, Le croisement des savoirs - quand le Quart Monde et l'Université pensent ensemble, Éditions Quart Monde et de l'Atelier, Paris, 1999.
Voir : Désaffiliation — Illettrisme — Pauvreté — Pauvreté (Nouvelle) — Précarité — Tutelle — Solidarité
Florence Godoy
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Quatrième génération
En relation avec des personnes très âgées (ayant des handicaps fonctionnels), on parle parfois d'une quatrième génération (par opposition à la troisième génération, qui est celle des personnes âgées actives et en bonne santé). Le concept de “ quatrième génération ” est toutefois fortement contesté.
François Höpflinger
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Questions conjoncturelles (Commission pour les)
Sous les auspices de l’Office fédéral des questions conjoncturelles, cette commission est chargée de présenter régulièrement une analyse de la situation économique en Suisse et de son évolution. Les rapports qu’elle publie régulièrement comme supplément au périodique “ La vie économique ” contiennent nombre d’éléments éclairants pour suivre l’évolution des politiques sociales.
Voir : Secrétariat d’État à l’économie (Seco)
jpf
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Quotas
Le quota est d’abord un pourcentage, une part de quelque chose. La Suisse est un pays de quotas, linguistiques et partisans notamment. Mais depuis les années 1980, les quotas sous-entendent surtout des quotas de sexe et ils sont devenus une sorte d’épouvantail pour bon nombre de femmes et d’hommes. Preuve en est le résultat de la votation sur l’initiative “ Pour une représentation équitable des femmes dans les autorités fédérales ”, initiative dite des quotas, lancée en 1993 à l’occasion de la non-élection de Christiane Brunner au Conseil fédéral. Le 12 mars 2000, seuls 18,1 % des citoyens et citoyennes suisses ont dit oui aux quotas de sexe en politique. La France a adopté en juin 2000 une loi sur la parité qui impose de présenter un nombre égal d’hommes et de femmes sur les listes électorales dans les communes de plus de 3500 habitants. En Suisse, si les quotas dits de résultat n’ont pas passé le cap des urnes, les quotas de listes électorales tendent à se généraliser de façon informelle.
R. La participation politique, Questions au féminin, 1/2000, Berne, Commission fédérale pour les questions féminines.
Site Internet : www.observatoire-parite.gouv.fr (Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes)
Voir : Égalité entre hommes et femmes — Femmes (Émancipation des)
Martine Chaponnière
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Quotient familial
À la base de tous les allégements introduits en faveur de la famille, il y a la constatation que le ménage d’une famille avec enfants “ coûte ” plus cher que celui d’une personne seule ou que celui de personnes mariées sans enfant. Dès lors, pour un revenu égal, la capacité contributive d’un couple avec enfants est inférieure à celle d’un ménage sans enfants.
Afin de répondre à cette situation, le canton de Vaud a mis en place, à l’exemple de la France, un système dit de quotient familial. Concrètement, les revenus du couple sont cumulés et leur total est imposé aux taux d’une fraction de ce revenu. Le diviseur est de 1.8 pour le couple et de 0.5 par enfant. Ainsi, le taux d’imposition d’un couple avec deux enfants correspondra à celui de son revenu total divisé par 2.8.
Globalement favorable à la famille, le quotient familial crée de fait une inégalité entre les ménages selon leurs revenus parce que le quotient s’applique de la même façon quel que soit le revenu du foyer.
Le quotient familial engendre un abattement qui croît fortement en francs avec l’augmentation du revenu. En conséquence, alors que pour les classes moyennes, la déduction pour enfants est relativement modeste, elle s’amplifie en revanche pour les couples disposant de revenus élevés.
Ainsi, “ utilisé seul, le quotient familial modifie de manière importante la répartition de la charge fiscale entre les contribuables : les familles aisées et très aisées bénéficient d’abattements supplémentaires importants, alors que les familles modestes sont imposées plus lourdement et qu’elles le sont d’autant plus qu’elles comptent davantage d’enfants. Par ailleurs, les effets du quotient diminuent lorsque le nombre des enfants croît. ”
Afin de limiter la portée de cet effet, le quotient est de plus en plus “ plafonné ”, c'est-à-dire qu'on lui ajoute une limite de revenu ou dessus de laquelle la division n'est plus opérée. On peut s'attendre à ce que ce phénomène se généralise à l'avenir.
R. J. Deiss, “ Budgets familiaux et compensation des charges ”, in : Familles en Suisse, Éditions Universitaires, Fribourg, 1991. — D. Yersin, “ Budgets familiaux et compensation des charges ”, in : Familles en Suisse, Éditions Universitaires, Fribourg, 1991.
Voir : Famille (Imposition de la) — Famille (Politique de la)
François Cuénoud
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Quotients démographiques
Pour les événements démographiques non renouvelables, tels les décès, on calcule le plus souvent des quotients. Ceux-ci sont obtenus en divisant le nombre d’événements pendant la période considérée par l’effectif de la population en début de cette période, celui-ci étant éventuellement corrigé pour éliminer l’influence perturbatrice d’autres phénomènes. Au sens le plus rigoureux, un quotient est une probabilité conditionnelle, c'est-à-dire, qu'il représente la probabilité de connaître un événement durant un intervalle de temps donné, sachant que les personnes n'ont pas connu cet événement antérieurement à cet intervalle de temps. L’ensemble des quotients calculés pour chaque âge constitue une série statistique qui est généralement présentée dans les tables démographiques, par exemple, les tables de mortalité.
R. R. Matos et coll., Population et développement. Lexique multilingue de termes démographiques, DDC, Berne, sous Presses — R. Pressat, Dictionnaire de démographie, Presses Universitaires de France, Paris, 1979.
Voir : Taux démographiques
Jean-Marie Le Goff
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Racisme
Doctrine qui postule une corrélation entre des caractères biologiques et génétiques qui seraient partagés par certains groupements humains appelés races, et les qualités intellectuelles et morales qu’elle attribue à ces groupements. Le racisme est à l’origine d’un certain nombre de catastrophes historiques bien connues. On parle de contre-racisme, pour désigner les réactions, parfois de type raciste, qu’exprime un groupe dominé et victime face aux actes d’un groupe dominant et agresseur.
R. A. Memmi, Le Racisme, Paris, 1982.
Site Internet : www.acorsosracisme.org
Voir : Eugénisme — Immigration — Réfugié — Xénophobie
jpf
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Rapport de dépendance démographique
Il s’agit de la proportion des personnes jeunes encore en formation et des personnes âgées, qui ne sont plus en âge de travailler, par rapport à la fraction de la population en âge de travailler. Plus le rapport de dépendance est élevé, plus la charge sociopolitique de la population active est élevée, surtout dans les systèmes sociopolitiques qui reposent sur un système de répartition des dépenses. Dans le cas de l’AVS notamment, ce rapport s’alourdit depuis quelques années. En Suisse, comme dans la plupart des pays européens, l’allongement de la durée de vie individuelle a des conséquences sur chaque phase de la vie et, de manière générale, le vieillissement démographique a des répercussions non négligeables sur le rapport de dépendance entre les générations. La modification du rapport vie active- vie “ inactive ”, lié à l’allongement de l’âge de la retraite, fait peser une charge de plus en plus importante sur les années de vie active et sur les générations comprises entre 20 et 64 ans. En effet, lorsque l’âge légal de la retraite a été fixé au milieu du XXe siècle, il correspondait plus ou moins à l’espérance de vie : depuis, en une cinquantaine d’années, la durée de la vie à la retraite par rapport à la durée de la vie active s’est significativement allongée. Si pour les hommes de la génération de 1880, les années de vie au-delà de 65 ans représentaient environ 11 % d’une durée de vie totale, ce pourcentage devrait s’élever à 24 % pour ceux qui sont nés un siècle plus tard, soit un quart de leur vie totale. Pour les femmes, ces valeurs sont encore plus élevées. Au vu de la pyramide des âges actuelle et du proche passage à la retraite de la génération du baby-boom, cette tendance va s’accentuer et il va s’avérer difficile de renouveler les générations actives et de trouver un bon équilibre dans le rapport entre actifs et inactifs. Une des solutions proposées pour retrouver un équilibre entre vie active et retraite, consiste à élever l’âge légal de la retraite : pour maintenir l’équilibre constant au cours des cinquante prochaines années entre population en âge de travailler et population en âge de prendre sa retraite, il faudrait relever l’âge de la retraite à 75 ans ! Cette proposition n’est pas réaliste et va complètement à l’encontre de la tendance actuelle du marché du travail, qui veut que les travailleurs âgés quittent de plus en plus tôt la vie professionnelle.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Génération d’entrée retraite — Pyramide des âges —- Taux de remplacement — Travail — Trois piliers
Valérie Hugentobler
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Réadaptation (Mesures de)
Deux sortes de mesures de réadaptation sont prévues par la loi fédérale sur l’assurance-invalidité (LAI) :
Les mesures de réadaptation professionnelle visent à la réintégration professionnelle de l’assuré. Elles se composent des mesures suivantes :
— l’orientation professionnelle des assurés auxquels l’invalidité rend difficile le choix d’une profession ou l’exercice de leur activité antérieure ;
— la couverture des frais supplémentaires causés par l’invalidité pour la formation professionnelle initiale, ainsi que pour le perfectionnement professionnel ou la préparation à un travail auxiliaire ou à une activité dans un atelier protégé ;
— le reclassement dans une nouvelle profession, s’il se révèle nécessaire en raison de l’invalidité ;
— la rééducation dans la même profession ;
— la recherche d’un emploi approprié ;
— une aide en capital à certaines conditions, afin de permettre à l’assuré d’entreprendre ou de développer une activité en qualité de travailleur indépendant, ainsi que de couvrir le coût des transformations de l’entreprise nécessitées par l’invalidité.
Les mesures médicales de réadaptation
Les mesures médicales de réadaptation ne sont pas prises en charge sur la base d’une liste, comme les infirmités congénitales, mais seulement lorsqu’elles répondent à la définition de l’article 12 LAI. Étant donné que le traitement des suites d’une maladie ou d’un accident relève en principe de l’assurance-maladie ou accidents, l’article 12 LAI a été conçu comme une norme de délimitation par rapport à cette dernière assurance. Ainsi, l’AI n’accorde donc aux assurés majeurs que des mesures médicales qui n’ont pas pour objet le traitement de l’affection comme telle, mais qui sont directement nécessaires à la réadaptation professionnelle, de nature à améliorer de façon durable et importante la capacité de gain ou à la préserver d’une diminution notable.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Ergothérapie
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Réalités sociales (Éditions)
Association sans but lucratif, les Éditions “ Réalités sociales ” publient des études et des travaux portant sur les divers aspects de l'activité sociale en Suisse. Leur but est de stimuler les échanges et les débats entre les personnes engagées dans ce champ d'action. Grâce à l'engagement bénévole des animateurs des Éditions et de plus de deux cents auteurs, elles ont publié plus de cent cinquante ouvrages au cours de la dernière décennie. Cette bibliothèque constitue une source incontournable pour l'étude de la politique sociale en Suisse.
Site Internet : www.socialinfo.ch
Voir : Albert le Grand S.A.
Sophie Barras Duc
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Recensement de la population
Les recensements de la population ou dénombrements ont pour but de recueillir des renseignements sur l’état de la population à un moment donné. On recense un jour donné l’ensemble des habitants d’un pays. Le premier recensement moderne réalisé en Suisse a été effectué en 1850 et il est depuis reconduit tous les dix ans, à deux exceptions près (1888 et 1941). Outre des fins statistiques de dénombrement et de connaissance de la population, les résultats du recensement ont aussi des objectifs politico-administratifs, notamment dans le cas de la Suisse, de politiques d’aménagement du territoire. Ainsi, à l’origine de la question sur la langue parlée qui a été posée dès le premier recensement, correspondait un questionnement des pouvoirs-publics sur la langue devant être utilisée dans les équipements collectifs, tels que les postes. Depuis les années soixante, l’évolution du bulletin de recensement fédéral de la population montre un fort intérêt sur les mobilités entre domicile et lieu de travail ou lieu d’études ainsi que sur la population étrangère.
Au cours des années quatre-vingt, la réalisation des recensements en Europe ont connu de fortes résistances auprès de la population, particulièrement en Suisse et en Allemagne. Aujourd’hui, c’est curieusement dans les offices nationaux de statistiques que le recensement est remis en cause, en raison de son coût et de la difficulté de plus en plus grande d’atteindre l’exhaustivité.
R. T. Busset, Pour une histoire du recensement fédéral suisse, OFS, Coll. Recensement fédéral de la population 1990, Berne, 1993.
Voir : Aménagement du territoire — Office fédéral de la statistique (OFS)
Jean-Marie Le Goff
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Recherche épidémiologique
Discipline qui se propose d’évaluer l’influence de divers facteurs (tels que sexe, âge, état civil, scolarité, profession, mode de vie, habitudes comportementales, milieu social, économique ou culturel) sur la fréquence, la distribution et l’étiologie des maladies aiguës, chroniques, invalidantes, létales, ou de tout autre événement potentiellement lié à la santé (accident, suicide, etc.). dans la population générale ou dans une classe de population donnée (par exemple : écoliers, apprentis, étudiants, femmes au foyer, chômeurs, personnes âgées, retraitées, veuves ou institutionnalisées).
Tenant compte des relations soumises à l’étude, le plan de la recherche précise les variables qu’il faut observer, ainsi que les méthodes statistiques requises pour une analyse conclusive des résultats.
La recherche épidémiologique fournit les bases scientifiques sur lesquelles s’appuient les autorités concernées (Département de la Santé Publique, Services médico-sociaux, Services de soins à domicile, Institutions hospitalières, etc.) pour le développement et la mise en place de mesures efficaces de prévention et/ou de traitement visant à une meilleure maîtrise de la situation et même, si possible, à la résolution du problème.
R. A. Manuila, L. Manuila, M. Nicole, H. Lambert, Dictionnaire français de médecine et de biologie en quatre volumes, Masson, Paris, 1970-1975.
Voir : Démographie — Estimation statistique — Mode de vie — Prévention — Risque — Santé publique — Sondage.
Bernard Grab
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Recherche sociale
Tenter de définir la recherche sociale — ou sur le social — implique de préciser au préalable ce dernier terme. Que cet exercice soit relativement malaisé, ainsi qu’en témoignent les innombrables définitions qui sont données du social, tient au fait que le social ne peut être saisi comme un sujet clairement délimitable, circonscrit de manière univoque.
Il est bien plutôt un champ, défini par l’ensemble des rapports de forces et des différentes logiques qui apparaissent et se constituent autour des questions sociales et des modes d’intervention qu’il convient de mettre en œuvre pour les résoudre, un champ dont les objets ne peuvent être construits qu’en prenant en compte leur appartenance à celui-ci.
Lieu où semble se jouer la production de la société, le social revêt une dimension historique en ce sens qu’il condense les divers problèmes sociaux passés et actuels qui agitent ou ont agité la société à un moment de son développement.
Par recherche sociale, il faut donc comprendre les travaux et analyses qui permettent d’interpréter plus justement les éléments constitutifs de ce champ à un moment donné : politique, économique, groupes sociaux, institutions et organisations, intervenants sociaux et usagers.
R. M. Chauvière e. a., Recherche urbaine et recherche sur le social. Pour une généalogie des champs, des chercheurs et des objets, MIRE Plan urbain, GRASS/CNRS, CRTS de l’Université de Caen et LERS de l’Institut régional des travailleurs sociaux de Haute-Normandie, 1987, p. 65 — D. Le Gall, M.-H. Soulet, “ Le social comme champ virtuel ”, in : RIAC 20/60, 1988, pp. 23-31.
Voir : Évaluation — Indicateurs sociaux — Panel des ménages — Prospective — Statistique sociale — Social
Georges Piotet
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Récit de vie
En recourant au linguiste J.M. Adam (1991), rappelons tout d’abord ce qui constitue l’essentiel de la définition du récit.
— Pour qu’il y ait récit, il faut qu’il y ait représentation d’au moins un événement, et ces événements doivent être rapportés ; ils sont donc doublement construits : dans la perception des événements, qui est déjà interprétation, et dans la narration.
— Le récit est forcément porteur d’une chronologie : il raconte une histoire qui se déroule dans le temps.
— Le récit comporte un ordre configurationnel, c’est-à-dire qu’il constitue un tout qui organise et donne sens aux événements rapportés.
— Enfin, le récit se construit dans une interaction, contextualisée.
Dans le récit de vie, il s’agit de raconter sa propre histoire (ou en tout cas une ou plusieurs séquences de celle-ci), oralement ou par écrit. Cette narration peut prendre de multiples formes : confidence ou journal intime (dans un contexte de vie privée) ; mémoire ou autobiographie (avec ambition littéraire ou non) ; on la retrouve également dans le contexte de l’intervention clinique (anamnèse, psychothérapie), dans la recherche en sciences humaines (en particulier dans les approches compréhensives de la psychologie, de la sociologie, de l’ethnographie), ou dans la formation.
Le récit de vie se présente comme un outil privilégié de compréhension de parcours existentiels, mais aussi comme un vecteur de changement : il est porteur d’effets à la fois sur le narrateur et sur ses destinataires (présents ou non) :
Effets sur le narrateur 
Raconter sa vie, c’est la reconstruire, dans le présent et dans la relation avec un interlocuteur : c’est tisser des liens entre les événements vécus, discontinus, pour en faire une histoire, qui a un sens pour l’autre et pour soi. Raconter sa vie à quelqu’un crée une réalité inédite, présente et interactive, et cette création discursive (c’est-à-dire de parole) donne des significations nouvelles à l’expérience du narrateur. Elle lui confère une nouvelle maîtrise de son existence, un rôle d’acteur, c’est-à-dire le transforme lui-même en retour (c’est le caractère performatif du récit).
Raconter sa vie renvoie en outre à ce qui se passe dans toute communication, à savoir une évaluation et une négociation du “ qui je suis pour toi ”, du “ qui tu es pour moi ” (F. Flahault, 1978). Lorsqu’il raconte sa propre histoire, le narrateur bénéficie d’une occasion privilégiée d’affirmer et de faire reconnaître une place et une identité singulières.
Enfin, nous avons analysé ailleurs quelques fonctions complémentaires du récit de vie quant à la gratification narcissique de l’adulte âgé : il peut, entre autres, enrichir son monde interne appauvri par les expériences cumulées de deuil, et lui redonner confiance en ses compétences mnésiques (E. Christen-Gueissaz, 1998-1).
Effets sur le(s) destinataire(s)
Le récit de vie est toujours destiné à quelqu’un, que le destinataire soit immédiat ou non. Or ce dernier, singulier ou pluriel, opère lui-même une construction : il entend ou lit en miroir sa propre histoire – ou ce qu’il voudrait ou croit vivre dans (ou à l’encontre de) l’histoire de l’autre. Certains éléments du récit vont le “ réparer ” ou au contraire réveiller des blessures mal cicatrisées, et il va – bien sûr – réagir (verbalement ou non) à ces interpellations.
Ce bref parcours des fonctions du récit de vie permet de comprendre la séduction qu’il opère, en particulier dans les domaines de la recherche et de la formation : il se présente comme une situation exemplaire de co-construction du sens et comme une “ voie royale ” de compréhension des enjeux sociaux et identitaires de l’interaction humaine.
R. J. M Adam, Le récit, 3e éd., Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1991. — E. Christen-Gueissaz, “ Mémoire et récit de vie chez les adultes âgés ”, in : Gérontologie, 105, Paris, 1998-1, pp. 31-39. — F. Flahault, La parole intermédiaire, Seuil, Paris, 1978.
Voir : Vieillesse (Psychologie de la)
Éliane Christen-Gueissaz
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Reclassement professionnel àð Assurance-Invalidité (AI)  Réadaptation (Mesures de)
Recommandations de l'OIT àð Normes internationales du travail
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Recours (en assurances sociales)
Le recours est une demande tendant à la modification, à l annulation ou à la constatation de la nullité d’un acte — généralement une décision ou un jugement — et adressée à un autre organe qu’à son auteur. Il est formé par écrit et doit contenir des motifs (pourquoi le recourant n’est-il pas d’accord avec la décision attaquée ?) et des conclusions (que désire-t-il obtenir ?). Il doit être envoyé à l’autorité de recours dans le délai fixé par la loi. En droit fédéral des assurances sociales, le recours est adressé à une juridiction cantonale (Tribunal des assurances, Tribunal administratif, Commission de recours) ou parfois fédérale (p. ex. pour les assurés AVS/AI domiciliés à l’étranger). La procédure est simple, rapide et gratuite sauf en cas de recours téméraire ou interjeté à la légère. Les jugements cantonaux peuvent faire l’objet d’un recours de droit administratif devant le Tribunal fédéral des assurances, à Lucerne.
R. A. Grisel, Traité de droit administratif, vol. II, 1984, pp. 884 ss. — R. Spira, “ Le contentieux de la sécurité sociale ”, in : Cahiers genevois de sécurité sociale, No 7, 1990, pp. 127 ss.
Voir : Décision administrative
Raymond Spira
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Redistribution des revenus
En tant qu’instrument visant à l’amélioration des conditions de vie, la redistribution des revenus est devenue un des outils essentiels de la politique sociale. Cette redistribution s’effectue de deux façons : horizontale et verticale. La redistribution horizontale du revenu se retrouve dans tous les régimes de sécurité sociale : entre actifs et retraités, entre travailleurs en emploi et en chômage, entre bien portants et malades, entre personnes sans enfant et les chargés de famille. D’un côté, des cotisations et/ou impôts sont versés, de l’autre, des transferts de revenu sont effectués aux bénéficiaires des régimes. Les volumes de transfert représentent aujourd’hui des montants considérables dans les pays industrialisés, de l’ordre de 15 à 25 % des ressources nationales. La redistribution verticale consiste en un transfert de ressources et de pouvoir d’achat des catégories supérieures de revenu aux catégories moins aisées, au moyen de diverses techniques d’interventions, tels les impôts, le contrôle des prix, les subventions et la fourniture de biens et services tels que éducation, santé et logement. Alors même que cette redistribution est essentiellement mise en œuvre par la fiscalité et par la politique des dépenses publiques, l’instauration d’un revenu et de pensions minimales et l’exonération des contributions des travailleurs faiblement rétribués contribuent également à redistribuer plus équitablement les revenus.
Voir : Budget social — Inégalités sociales — Redistribution inversée — Revenus (Transfert des) — Salaires (Structure des) — Sécurité sociale
Roland Sigg
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Redistribution inversée
L’un des objectifs de la sécurité sociale est la réduction des inégalités en réalisant des transferts de ressources des catégories sociales les plus favorisées vers les catégories sociales dont les revenus sont moins élevés. Dans la pratique, c’est souvent l’inverse qui peut être observé. Les groupes sociaux les plus nantis ont accès à plus de prestations que les groupes de personnes les plus modestes. Souvent, ce sont des facteurs culturels qui expliquent cet état de fait. Exemple : les personnes plus cultivées ont davantage recours aux institutions de santé. Cette situation constitue un défi pour l’avenir de la sécurité sociale. On peut comprendre qu’un soupçon soit ainsi jeté sur la légitimité même de la sécurité sociale.
R. J.-P. Fragnière, Repenser la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1996.
Voir : Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Sécurité sociale
jpf
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Réduction des risques (Aide à la survie)
Le troisième pilier de la politique fédérale en matière de drogue : on parle aussi d'aide à la survie. “ Réduire les risques signifie offrir des soins médicaux, notamment pour prévenir le sida et les hépatites, ou des traitements de substitution, ainsi que des locaux où les toxicomanes peuvent s'injecter de la drogue dans de bonnes conditions d'hygiène. Cela signifie également offrir un emploi, un logement et des possibilités d'aménager la vie quotidienne et les loisirs ” OFSP. En s'adressant à des personnes en phase de consommation, on cherche à leur éviter des séquelles physiques, psychiques ou sociales et à préserver leurs chances de sortir de la drogue. Les mesures principales ont été :
— remise de matériel d'injection stérile (y compris en milieu carcéral),
— locaux d'injection (en Suisse alémanique),
— offres d'emploi et de logement.
La réduction des risques liés à l'usage de drogues est née aux Pays-Bas, puis en Angleterre dans les années 80, c'est aujourd'hui un mouvement international qui cherche une réponse aux contradictions apparentes entre la santé publique et l'ordre public. Ce modèle est critique envers les politiques de “ guerre à la drogue ” et de prohibition. Il se veut pragmatique et respectueux d'instaurer un partenariat avec les usagers de drogue les plus marginalisés.
R. : D. Richard, J. L. Senon, Dictionnaire des drogues, Larousse, Paris, 1999. — OFSP, La politique suisse en matière de drogue, Berne, 2000.
Site Internet : www.infoset.ch
Voir : Dépendances — Prévention — Prévention tertiaire — Toxicomanies
Geneviève Ziegler
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Référendum
Le référendum suisse fait partie des institutions de la démocratie directe et des droits politiques des citoyens. En effet, en Suisse, les citoyens non seulement élisent leurs représentants, mais ils votent aussi sur des questions qui peuvent leur être posées soit par les autorités étatiques, soit par un groupe de citoyens. Le peuple est appelé ainsi à exercer une activité constitutionnelle et législative considérable.
On appelle généralement référendum populaire une consultation du corps électoral par laquelle les citoyens sont appelés à se prononcer pour ou contre une règle ou une décision. Le référendum peut porter sur la Constitution (référendum constitutionnel), ou sur une loi (référendum législatif). On connaît aussi le référendum portant sur un traité international (référendum conventionnel). Le référendum est dit obligatoire lorsqu’il a lieu d’office en vertu du droit constitutionnel (pour être approuvé la double majorité est alors nécessaire, c’est-à-dire la majorité des voix des votants et des cantons), et facultatif (lorsqu’il n’intervient que sur demande des cantons, au moins 8, des députés ou d’une partie du corps électoral, au moins 50 000 ; il peut être alors approuvé si la majorité des votants s’exprime favorablement). Le référendum est suspensif lorsqu’il est une condition à l’entrée en vigueur d’un acte et résolutoire si l’acte est déjà en vigueur avant le scrutin. Enfin le référendum est dit constitutif lorsque le résultat de la votation lie les autorités, et déclaratif quand ce n’est pas le cas.
Étant donné la structure fédérale de la Suisse, il convient enfin de distinguer entre les différents types de référendum existants aux niveaux fédéral et cantonal. Au niveau fédéral nous pouvons distinguer : 1. le référendum obligatoire pour les révisions de la Constitution ; 2. le référendum facultatif en matière de lois ; 3. le référendum facultatif pour les traités internationaux de longue durée ; 4. le référendum facultatif pour les arrêtés fédéraux de portée générale urgents ; 5. le référendum obligatoire pour les arrêtés fédéraux de portée générale urgents qui dérogent à la Constitution ; 6. le référendum facultatif pour les traités internationaux qui prévoient l’adhésion à une organisation internationale ou entraînent une unification multilatérale de droit ; 7. le référendum obligatoire pour l’adhésion à des organisations de sécurité collective ou à des communautés supranationales.
Au niveau cantonal nous pouvons rencontrer, outre le référendum obligatoire pour les révisions de la Constitution cantonale et le référendum facultatif en matière de loi : 1. le référendum financier facultatif (et obligatoire dans 19 cantons) ; 2. le référendum administratif (quelques cantons) ; 3. le référendum conventionnel (obligatoire dans 9 cantons, facultatif dans 7 cantons).
Au niveau communal la situation est plus complexe et diffère selon les cantons et les communes (pour des informations complémentaires voir Kriesi, 1995 : 85-86).
R. J.-F. Aubert, Traité de droit constitutionnel suisse, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1967, Supplément 1967-1982, 1982. — M. Hottelier, Cours de droit constitutionnel, Faculté de droit, Université de Genève, Genève, 1991-1992. — H.-P. Kriesi, Le système politique suisse, Economica, Paris, 1995. — J. Rohr, La démocratie en Suisse, Economica, Paris, 1987.
Voir : Commissions extra-parlementaires — Démocratie (et politique sociale) — Droit de pétition — Droits politiques — Fédéralisme — Initiative constitutionnelle
Paolo Urio
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Réflexivité (dans l’action sociale)
En se développant, le système d’action sociale a produit un ensemble d’activités et de fonctions orientées vers la gestion même du système. Il a fallu former les agents de l’action sociale, mais bien vite, il s’est avéré nécessaire d’instruire les formateurs. Pour conseiller les professionnels et les aidants, on a vu apparaître les superviseurs. Des études ont été entreprises sur la rationalité et le fonctionnement du système. Que fait-on dans ces multiples réunions ou colloques, si ce n’est analyser les activités et les perspectives d’avenir qui les caractérisent ? Cette réflexivité marque un stade de développement de l’action sociale et constitue un fait qu’il importe de prendre en considération pour imaginer l’avenir. Il conviendra sans doute de définir la part de l’activité consacrée au moment réflexif.
R. J.-P. Fragnière, M. Vuille, Assister, éduquer et soigner, Réalités sociales, Lausanne, 1982.
Voir : Centre d’étude de la politique sociale (CEPS) — Certificat de perfectionnement en politique sociale — Supervision
jpf
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Réfugié
Réfugié, asile, droit d’asile, hospitalité. Termes décrivant la relation anthropologique, sociopolitique de persécution-protection, considérée dans le cadre de la logique de pouvoir et de pensée individu-État.
Le terme de réfugié (Convention de l’ONU, 1951) considère la vie, l’intégrité corporelle et la liberté. Un autre motif a été inclus dans la loi suisse sur l’asile (1979), pression psychique insupportable pour les réfugiés du bloc communiste, mais pas appliqué aux réfugiés du “ sud ”. Est réfugié/e celle ou celui, persécuté/e pour cinq motifs (race, religion, nationalité, appartenance à un groupe social déterminé, opinions politiques), qui a besoin d’être protégé. Les États octroient une protection durable qui a tendance à devenir temporaire.
Crise de l’État de droit, du droit classique : restriction/élargissement définition, motifs de persécution, modalités de protection. Ex. Réfugié de la violence (nouvelles formes de violence, guerre) ; persécutions des femmes, déserteurs, prolifération de sous-statuts.
R. J.-Y. Carlier, D. Vanheule (Éds), L’Europe et les réfugiés : un défi ? Tome I, Who is a Refugee, Tome II, Kluwer, Amsterdam, 1997. — E. Bauer, D. Karlen Moussa, Femmes réfugiées en Suisse, Bureau de l’égalité, Berne, 1993. — H.C.R., Guide des procédures et critères, Genève, 1979. — M.-C. Caloz-Tschopp, Le Tamis helvétique. Des réfugiés politiques aux nouveaux réfugiés, Éditions d’En Bas, Lausanne, Éditions Gegenverlag (allemand), Zurich, 1982.
Voir : Asile (Loi sur l’) — Asile (Politique d’) — Asile (Requérant d’) — Office fédéral des réfugiés (ODR)
Marie-Claire Caloz-Tschopp
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Régime de base
Dans un système de sécurité sociale, un régime de base fournit un premier étage de protection, dont l’ampleur peut varier. Généralement public (légal), il a vocation à être relayé par un ou des régimes complémentaires (publics ou privés). En Suisse, l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité (AVS/AI) constitue le régime de base de pensions.
Voir : Assurance-invalidité (AI) — Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Régime professionnel — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Architecture de la) — Universalité
Pierre-Yves Greber
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Régime professionnel
Dans un système de sécurité sociale, un régime est qualifié de professionnel lorsque son champ d’application personnel est déterminé par une condition d’appartenance à une activité professionnelle ; son extension peut aller jusqu’à la couverture de l’ensemble de la population exerçant une activité rémunérée. Il se distingue d’un régime universel, ce dernier s’étendant à l’ensemble de la population résidant dans un pays.
En Suisse, l’assurance-accidents (LAA), la prévoyance professionnelle (LPP et surobligatoire), l’assurance-chômage (LACI), les allocations familiales (avec quelques exceptions) ont la qualité de régimes professionnels.
R. G. Perrin, “ Les nouvelles frontières de la sécurité sociale ”, in : Revue belge de sécurité sociale, Bruxelles, 1977, pp. 214 ss.
Voir : Champ d’application personnel — Régime de base — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Architecture de la) — Universalité
Pierre-Yves Greber
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Regroupement familial
Droit reconnu, sous certaines conditions légales, à un étranger séjournant légalement en Suisse d’y être rejoint par son conjoint et ses enfants mineurs, afin de lui permettre de mener une vie familiale normale (en accord avec l’art. 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme). Les très fortes limitations à l’accès à ce droit sont une caractéristique de la politique suisse à l’égard des étrangers.
Voir : Étrangers (Politique à l’égard des) — Immigration — Permis d'établissement
jpf
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Relation médecin-malade
Dans le modèle médical occidental, issu de la tradition hippocratique, la relation médecin-malade est basée sur les éléments majeurs suivants : 1. Le “ colloque singulier ” entre un individu souffrant qui vient confier ses problèmes à un professionnel qu’il considère comme compétent. On a parlé de la rencontre d’une confiance (du patient) et d’une conscience (du médecin). 2. La confidentialité de ce qui est échangé, protégé par le secret professionnel. 3. La liberté du patient de choisir son médecin. 4. “ En miroir ”, le médecin a — sauf urgence — la liberté d’accepter ou de renoncer à donner ses soins à un patient, si les conditions de la relation thérapeutique ne sont pas remplies de façon satisfaisante.
Le malade a des droits. Le premier est de recevoir une information suffisamment complète et compréhensible sur les observations du médecin, les thérapeutiques envisagées et les perspectives d’évolution de la maladie. Un autre pilier de la relation médecin-malade est le consentement éclairé. Sauf circonstance exceptionnelle, l’accord du malade est une condition préalable à tout acte médical, qu’il s’agisse d’examens ou de traitements.
R. M. Mandofia Berney (Éd.), “ Le partage de l’information médicale dans la relation thérapeutique ”, in : Cahiers médico-sociaux 39, No 4, 1995. — J. Martin, Enjeux éthiques en santé publique, Médecine & Hygiène, Genève, 1991.
Voir : Information du patient — Médecine libérale — Secret médical
Jean Martin
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Relations intergénérationnelles versus rapports intergénérationnels
Dans la recherche récente, la notion de “ relations intergénérationnelles ” est utilisée pour les contacts concrets entre membres de différentes générations, généralement de la même famille. La notion de “ rapports intergénérationnels ” désigne des rapports initiés essentiellement par des institutions sociales étatiques.
François Höpflinger
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Relations intragénérationnelles
Relations entre membres de la même génération ou personnes du même âge. Les contacts “ peer-group ” des jeunes sont des relations exclusivement intragénérationnelles, mais à un âge avancé les contacts avec des personnes (survivantes) du même âge ne sont pas sans importance non plus.
François Höpflinger
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Rélégation sociale àð Disqualification sociale
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Rentes d'invalidité
Le droit fédéral des assurances sociales définit l'invalidité comme l'incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée. Pour les assurés mineurs sans activité lucrative, c'est la probabilité de cette incapacité qui détermine la survenance de l'invalidité, tandis que pour les assurés majeurs qui n'exerçaient pas d'activité lucrative avant d'être atteints dans leur santé physique ou mentale, on prend en considération l'empêchement d'accomplir les travaux habituels.
Quatre régimes fédéraux servent des rentes d'invalidité : l'assuranceinvalidité (AI), la prévoyance professionnelle, l'assuranceaccidents obligatoire et l'assurance militaire. Le montant de la rente dépend notamment du taux d'invalidité. Celuici est évalué en comparant le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide (revenu hypothétique) avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (revenu d'invalide). Pour les personnes sans activité lucrative, on se fonde sur l'évaluation de l'empêchement d'accomplir les travaux habituels (tenue du ménage, éducation des enfants, activité au sein d'une communauté religieuse). Dans toutes les branches d'assurance, ce taux est soumis à révision périodique, ce qui peut entraîner, le cas échéant, la diminution ou même la perte du droit à la rente.
Dans l'AI, le calcul de la rente ordinaire d'invalidité est calqué sur celui de la rente de vieillesse servie par l'AVS (montants minimum et maximum, rente complète ou partielle). De plus, il existe trois paliers en fonction du degré de l'invalidité : un quart de rente pour une invalidité de 40 pour cent au moins, une demirente pour un taux de 50 pour cent au moins et une rente entière à partir de 66 2/3 pour cent. Dans les cas pénibles  c'estàdire lorsque les dépenses reconnues par la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS/AI sont supérieures aux revenus déterminants selon cette loi  une invalidité de 40 pour cent au moins ouvre le droit à une demirente. Aux conditions fixées par la loi, peuvent s'ajouter à cette prestation une rente complémentaire pour le conjoint et une rente pour enfant. Quant au droit à une rente d'invalidité extraordinaire, il est déterminé par la législation sur l'AVS. A certaines conditions, il est aussi ouvert aux invalides étrangers et apatrides. Le droit à la rente d'invalidité s'éteint lorsque s'ouvre le droit à la rente de vieillesse.
Dans la prévoyance professionnelle obligatoire, la personne qui est invalide à raison de 50 pour cent au moins au sens de l'AI et qui était assurée lorsque est survenue l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité a droit à des prestations d'invalidité, en l'occurrence une rente entière d'invalidité si elle est invalide à raison des deux tiers au moins, au sens de l'AI, et à une demirente si elle est invalide à raison de 50 pour cent au moins. Les dispositions réglementaires des institutions de prévoyance peuvent étendre ces droits minimaux. Le montant de la rente est fonction de l'avoir de vieillesse à la naissance du droit et de la somme des bonifications de vieillesse afférentes aux années futures, sans les intérêts. Il peut s'y ajouter une rente complémentaire pour enfant.
Si dans l'assuranceaccidents obligatoire et dans l'assurance militaire la définition légale de l'invalidité est identique à celle de l'AI, et si le degré de celleci se calcule d'après les mêmes principes, en revanche la rente est fixée sur une échelle de 1 à 100. Dans l'assuranceaccidents, l'invalidité doit atteindre 10 pour cent au moins pour ouvrir droit à une rente. En cas d'invalidité totale, cette prestation s'élève à 80 pour cent du gain assuré dans l'assuranceaccidents et à 95 pour cent dans l'assurance militaire. Ce gain assuré est plafonné par la loi.
Diverses dispositions réglementent les cas de concours de rentes et visent principalement à éviter toute surindemnisation des assurés.
Voir : Assuranceaccidents — Assuranceinvalidité — Assurances sociales (Coordination des) — Invalidité — Prévoyance professionnelle — Rentes de vieillesse
Raymond Spira
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Rentes de vieillesse
Le système suisse de sécurité sociale connaît deux sortes de rentes de vieillesse : celles de l'assurancevieillesse et survivants (AVS), ou premier pilier et celles de la prévoyance professionnelle (PP) ou deuxième pilier. Tandis que l'AVS est financée par un système de répartition, la PP repose sur la capitalisation, ce qui a des répercussions très importantes non seulement sur la structure financière de chaque régime mais également sur le montant des rentes.
L'AVS étant un régime universel, peut prétendre une rente ordinaire de vieillesse, en principe, toute personne à laquelle il est possible de porter en compte au moins une année entière de revenus ou de bonifications pour tâches éducatives ou pour tâches d'assistance, lorsqu'elle atteint l'âge terme (65 ans révolus pour les hommes et 63 ans pour les femmes jusqu'en 2004, 64 ans à partir de 2005). Une personne qui ne possède pas la nationalité suisse et qui ne peut se prévaloir d'une convention de sécurité sociale avec son pays d'origine ou qui n'a pas le statut de réfugié ou d'apatride doit, en outre, avoir son domicile et sa résidence habituelle en Suisse.
Selon que l'ayant droit compte une durée complète ou incomplète de cotisations par rapport à sa classe d'âge, il reçoit une rente complète ou une rente partielle. Le montant de la rente complète est fonction de deux éléments : une fraction du montant minimal de la rente de vieillesse (montant fixe) et une fraction du revenu annuel moyen déterminant (montant variable). Le montant maximum de la rente correspond au double du montant minimum (1’030 francs par mois en 2001). Si deux conjoints ont chacun droit à une rente de vieillesse ou si l'un a droit à une rente de vieillesse et l'autre à une rente de l'assuranceinvalidité, la somme des deux rentes ne peut dépasser 150 % du montant maximum de la rente de vieillesse. Aux conditions fixées par la loi peuvent s'ajouter à la rente un supplément pour les veuves et les veufs, ainsi qu'une rente pour enfant.
Il est possible d'anticiper le versement de la rente de vieillesse d'un ou deux ans ou, au contraire, de l'ajourner d'une année au moins et de cinq ans au plus. Dans le premier cas, la rente anticipée est réduite, alors que dans le second la rente ajournée est augmentée. Cette réglementation est au centre du débat actuellement en cours sur l'âge flexible de la retraite (11e révision de l'AVS).
Ont droit à une rente extraordinaire les ressortissants suisses qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse, s'ils ont le même nombre d'années d'assurance que les personnes de leur classe d'âge, mais n'ont pas été soumis à l'obligation de verser des cotisations pendant une année entière au moins.
La législation relative à la prévoyance professionnelle obligatoire fixe quelques règles minimales que les institutions de prévoyance peuvent compléter par voie réglementaire. En principe, l'âge terme est le même que dans l'AVS mais il coïncide généralement avec la fin de l'activité lucrative pour raison d'âge (retraite). Quant au montant de la rente, il est calculé en pour cent de l'avoir de vieillesse acquis par l'assuré lors de l'ouverture du droit (taux de conversion). Peut s'y ajouter une rente complémentaire pour enfant.
Voir : Article constitutionnel relatif aux éventualités vieillesse (retraite), survivants et invalidité — Assurancevieillesse et survivants (AVS) — Capitalisation — Prévoyance professionnelle — Répartition — Retraite (Âge de la) — Universalité
Raymond Spira
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Répartition
Il s’agit d’un système de financement utilisé dans la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité collective (dans l’AVS/AI au premier chef, à certaines conditions aussi dans la prévoyance professionnelle selon la LPP). Il s’oppose à celui de la capitalisation. Sa caractéristique réside dans le fait que les cotisations des actifs sont affectées en premier lieu au paiement des prestations aux retraités, aux invalides et à leurs survivants. Dans ce système, qui repose sur la solidarité entre les générations, il n’est en principe pas nécessaire de constituer des réserves financières autres qu’une réserve de sécurité. Dès lors, pratiqué à l’état pur, ce système ne comporte pas de recettes d’intérêts ; toutefois, en vertu de l’article 107 LAVS, il existe tout de même dans l’AVS/AI un fonds de compensation, dont le montant, en règle ordinaire, ne doit pas tomber au-dessous du montant des dépenses d’une année de l’assurance ; ce fonds produit naturellement des intérêts qui constituent des recettes au même titre que les cotisations et les contributions des pouvoirs publics. Le système de financement par répartition implique que soit réalisée la condition de pérennité de l’assurance, raison pour laquelle il est a priori praticable seulement pour une assurance qui garantit un renouvellement régulier de l’effectif des cotisants (c’est le cas de l’AVS/AI). Il n’est en revanche pas indiqué dans la prévoyance professionnelle (même obligatoire) dans la mesure où la condition du renouvellement des actifs ne peut pas être remplie, ce qui est le cas des institutions de prévoyance professionnelle d’entreprises privées. C’est pourquoi l’article 69 LPP impose aux institutions de prévoyance, pour garantir leur équilibre financier, de ne se fonder que sur l’effectif du moment des assurés et des rentiers ; une dérogation à ce principe du “ bilan en caisse fermée ” n’est admissible qu’aux conditions strictes fixées par le Conseil fédéral, au profit des seules institutions de prévoyance de collectivités de droit public ; les prestations dues en vertu de la LPP doivent alors être garanties par la Confédération, un canton ou une commune.
Avantages de la répartition : elle n’exige pas la constitution préalable d’importantes réserves financières, soumises aux aléas de la dépréciation de la valeur de la monnaie ; l’indexation des prestations s’en trouve aussi facilitée.
Inconvénients de la répartition : elle reporte sur les générations suivantes la charge des prestations et se prive de l’importante source de revenus que constitue le produit des fonds placés.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Capitalisation — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Répartition (méthodes de)
Bernard Viret
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Répartition (Méthodes de)
L’assurance est une méthode de répartition entre les membres de la communauté des risques qui la constituent, des dépenses provoquées par la réalisation des risques assurés (notion de la mutualité au sens large). Le financement des coûts implique la connaissance — scientifique ou empirique — par l’assureur de la fréquence et de l’intensité des sinistres. La répartition de la charge des sinistres survenus pendant un exercice comptable entre ceux qui ont été exposés aux risques au cours de ce même exercice est à la base des opérations d’assurance, à l’exclusion toutefois des diverses formes d’assurances sur la vie, qui relèvent du système de la capitalisation.
L’assurance-maladie sociale est fondée sur le système de la répartition des dépenses (article 60 LAMal), mais l’article 78 OAMal exige des assureurs qu’ils assurent l’équilibre des charges et des produits pour une période de financement de deux ans et prescrit la constitution d’une réserve de sécurité pour garantir la situation financière de l’assurance au cas où les coûts effectifs s’avéreraient trop défavorables par rapport aux prévisions sur lesquelles se fonde la fixation des primes des assurés ; s’y ajoute une réserve de fluctuation. L’importance de ces réserves (exprimées en pour cent des primes à recevoir) est en raison inverse du nombre d’assurés ; des ajustements sont prévus, compte tenu des engagements couverts par la réassurance et de garanties de déficit assumées par les pouvoirs publics ou par des institutions bénéficiant elles-mêmes d’une telle garantie.
La pratique connaît aussi le système mixte de la répartition des capitaux de couverture, qui se distingue de celui de la répartition pure (ou directe) en ceci que les contributions des cotisants doivent être suffisantes pour couvrir en outre la valeur actuelle (ou valeur capitalisée) des prestations périodiques futures nées au cours de l’année. Ce système de la répartition des capitaux de couverture est appliqué, en vertu de l’article 90 LAA, au financement des rentes d’invalidité et de survivants découlant de l’assurance-accidents obligatoire ; les assureurs doivent donc veiller à ce que les réserves mathématiques suffisent à couvrir les droits aux rentes futures qui découleront des accidents déjà survenus. Le système de la répartition directe des dépenses est, en revanche, applicable aux prestations d’assurance de courte durée (indemnités journalières et frais de soins), ainsi qu’aux allocations de renchérissement (dans la mesure toutefois où les excédents d’intérêts produits par les capitaux de couverture ne suffiraient pas).
Voir : Assurance-accidents — Assurance-maladie (AM) — Capitalisation — Répartition
Bernard Viret
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Représentation sociale
Les représentations sociales font partie de l'étude de la pensée quotidienne. Elles constituent un processus par lequel les personnes reconstruisent la réalité et lui donnent sens, produisant un savoir social qui influence la nature des relations entre personnes et entre groupes. Ce processus suppose que la personne, confrontée quotidiennement à une multitude d'informations, les simplifie, les transforme, les interprète et se les réapproprie sous cette nouvelle forme pour pouvoir communiquer et agir en société.
Les représentations sociales reposent ainsi sur une activité mentale consistant à objectiver les choses, c'est-à-dire à rendre concret ce qui pouvait être abstrait, se familiariser avec l'étrange, donner un contenu à ce qui initialement n'était qu'une notion ou un concept. La solidarité, l'égalité ou la justice par exemple sont des concepts flous et généraux auxquels on donne une forme concrète qui permet de les appliquer. Prenons une illustration, l'égalité entre femmes et hommes. Tout le monde peut être d'accord sur l'idée d'égalité, mais c'est sa définition concrète qui constitue un enjeu social réel. Selon que l'égalité est conçue comme un traitement identique de toutes les femmes et de tous les hommes ou comme un respect des différences entre sexes, les décisions prises pour la mettre en œuvre ne seront pas les mêmes. Les représentations sociales de l'égalité sont donc des principes qui structurent nos prises de position et nos comportements envers les femmes et les hommes, tout comme celles de la solidarité ou de la justice orientent nos jugements sur les jeunes et les vieux, les pauvres et les riches, etc.
Les représentations sociales ne résultent pas seulement d'un processus d'objectivation, mais aussi de leur ancrage social. Elles sont en effet largement dépendantes des croyances et des expériences des personnes qui les élaborent. Chacune et chacun se représente le monde à partir de cette forme de connaissance construite antérieurement. L'appartenance à des groupes sociaux (être un jeune, une femme, un ouvrier, etc.) est un facteur déterminant cette construction d'un savoir de sens commun. Dans cette mesure, les représentations sociales des personnes ou des groupes sont un reflet des rapports qu'ils entretiennent. Mais en retour elles structurent également les rapports sociaux, car elles génèrent des prises de position qui orientent la façon dont les personnes ou les groupes se définissent les uns par rapport aux autres.
R. J.-L Beauvois, N. Dubois, W. Doise (Éds), La construction sociale de la personne, Presses Universitaires de Grenoble, Grenoble, 1999. — D. Jodelet, Les représentations sociales, 6e éd., Presses Universitaires de France, Paris, 1999. — S. Moscovici (Éd.), Psychologie sociale des relations à autrui, Nathan, Paris, 1994.
Voir : Communication sociale — Études Genre — Pauvreté (Seuil de) — Socialisation — Stigmatisation
Patricia Roux
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Réseau de soins
De façon générale, un réseau est une forme d’organisation de l’activité productive qui -quel que soit le secteur, notamment industriel- repose sur la coopération entre des producteurs à la fois autonomes et liés par des engagements réciproques. Cette configuration permet d’obtenir de la stabilité grâce aux engagements, et de la flexibilité grâce à l’autonomie, chaque composante collaborant avec les autres composantes en fonction des besoins fluctuants de l’activité. Cette flexibilité, qui fait du réseau un dispositif à géométrie variable, permet d’utiliser au mieux les moyens et compétences des composantes.
Dans le secteur sanitaire, le recours au réseau s’explique par l’évolution des problèmes auxquels le secteur se trouve confronté. En premier lieu, on peut citer la transformation de la structure de la morbidité qui, du fait en particulier du vieillissement de la population, tend à renforcer la part des pathologies chroniques. En second lieu, le déséquilibre entre une spécialisation forte et continue de l’activité médicale, et des mécanismes de coordination limités entre les différents intervenants. En troisième lieu, le contexte économique qui exerce une forte pression pour que le secteur de la santé accentue son efficience, c’est à dire soit plus attentif aux ressources qu’il utilise pour produire les services qu’il fournit à la population.
Grâce à une meilleure coordination, les réseaux de soins devraient permettre, d’une part l’amélioration de la qualité de la prise en charge des patients (continuité, cohérence, globalité, “ protocolisation ”), et d’autre part, une rationalisation de l’usage des ressources (réduction des redondances, économies d’échelle). Cette coordination ne repose pas sur l’autorité d’un centre ; mais plutôt sur des principes de réciprocité, de proximité et de confiance entre les partenaires.
Pour parvenir à cette coopération et aux résultats qui lui sont associés, le réseau doit remplir un certain nombre de conditions. Des conditions techniques correspondant notamment aux exigences d’échange d’information que suppose la coordination. Des conditions sociales d’intéressement des acteurs, ces derniers doivent trouver des avantages pour s’engager dans la coopération. Des conditions culturelles qui amènent les acteurs à collaborer malgré des représentations, des préoccupations, des croyances différentes.
Ainsi, une véritable coopération nécessite des changements dans les comportements, les compétences, et les pratiques. Ces changements à leur tour nécessitent de l’information, de la formation, des transferts d’expérience et des expérimentations, c’est à dire des processus d’accompagnement du changement auxquels tous les acteurs doivent contribuer, et particulièrement les pouvoirs publics. En dépit de ces difficultés, le développement des réseaux de soins ne fait pas de doute parce qu’il n’y a pas beaucoup d’autres solutions pour réaliser la réorganisation dont le système sanitaire a besoin.
Site Internet : www.hospvd.ch/public/chuv/bdfm/cdsp
Voir : Maneged care — Réseau de soins (Organisation du) — Réseau de soins NOPS — Soins (Continuité des)
Pierre Huard
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Réseau de soins (Organisation du)
Forme d’organisation du secteur sanitaire basée sur la différenciation, la coordination et la régulation, le réseau de soins est une alternative à une organisation hiérarchique, et répond aux impératifs de flexibilité dictés par la complexité et l’interdépendance caractéristiques de ce secteur.
Il implique la coopération volontaire entre des établissements sanitaires et autres fournisseurs de prestations, ainsi que des objectifs partagés sur le plan de la gestion des ressources et des prises en charge. Il a donc un cadre juridique et administratif.
En principe, un réseau de soins offre une chaîne complète de prestations incluant des activités préventives, curatives, palliatives, médico-sociales, de réadaptation, activités relevant de prises en charges tant somatiques que psychiatriques.
Articulé à la planification sanitaire quantitative et qualitative, le réseau de soins vise à réduire les coûts de la santé tout en maintenant un pari de qualité : principes d’accessibilité, de continuité, de qualité, de sécurité des prestations de soins.
Exemple : les Nouvelles Orientations de Politique Sanitaire du canton de Vaud (NOPS).
Sites Internet : www.hospvd.ch/public/chuv/bdfm/cdsp/selection/reseaux.htm —
www.eureka.es/webs/alass/fr/calass00-1b.htm
Voir : Maneged care — Réseau de soins — Réseau de soins NOPS — Soins (Continuité des)
Danièle Lanza
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Réseaux de sociabilité
A des degrés différents selon les milieux sociaux, la vie urbaine marque la sociabilité, qui tend à plus de diversité (la parenté cède le pas aux relations amicales), de dispersion (elle ne se limite plus aux frontières du quartier), de sélectivité (les relations se forment sur la base de choix relatifs). Bref, les relations personnalisées que les individus et les familles nucléaires entretiennent dans leur environnement immédiat se présentent dorénavant moins sous la forme du groupe que du réseau. Pour la famille nucléaire contemporaine, orientée sur les valeurs de l’intimité, privée de repères institutionnels, le fait de s’ouvrir aux autres par le biais de la sociabilité n’est donc ni donné, ni contraignant, mais est nécessaire au maintien de sa cohésion. Des études montrent en effet que les réseaux de sociabilité forment pour leurs membres des univers qui ont la propriété d’infléchir les styles de vie, les comportements et les projets familiaux. Ce constat montre l’intérêt de considérer la sociabilité familiale, non pas comme une juxtaposition de liens individuels, mais plutôt comme une configuration de relations significatives aux yeux des acteurs. Ainsi, entre la famille et les instances politiques et économiques, la sociabilité se présente comme une structure intermédiaire dont l’enjeu ne se réduit pas aux seuls soutiens concrets, mais à la possibilité de garder des repères et des recours dans la difficile construction de la réalité familiale et, par extension, individuelle.
R. E Bott, Family and Social Network, Tavistock, London, 1957. — A. Degenne, M. Forsé, Les réseaux sociaux : une analyse structurale en sociologie, A. Colin, Paris, 1994. — M. Modak, Vie privée et intégration sociale. Le cas du groupe familial, Thèse, Faculté des sciences économiques et sociales, département de sociologie, Genève, 1997.
Voir : Famille — Jeunesse — Solidarité
Marianne Modak
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Réseaux de soins NOPS
Au sens des NOPS, un réseau de soins est un dispositif de coopération volontaire entre des acteurs du système de santé, établissements sanitaires et autres fournisseurs ; il n’est pas limité par une base territoriale fixée a priori. Les membres du réseau se regroupent en deux catégories : les membres affiliés qui participent de plein droit à l’instance commune de direction du réseau ; bénéficient et assument les droits et les devoirs fixés par les statuts du réseau, tout en restant indépendants. Les membres associés dont les droits et obligations vis-à-vis du réseau sont fixés par un contrat d'association. Ils ne participent pas, en principe, à l'instance commune de direction du réseau.
Le réseau de soins est reconnu par l'État, sur la base d'un projet qui doit répondre à trois principales catégories de conditions :
- Le réseau doit disposer de la personnalité juridique et de statuts ; la forme juridique est en principe l'association ou la fondation. Ces statuts, adoptés par les membres affiliés, doivent, pour être reconnus par l'État, comporter deux clauses : 1) ils doivent prévoir une instance de direction commune pourvue d'un certain nombre d'attributions. 2) Ils doivent prévoir la mise en commun d'une partie des ressources ordinaires des institution affiliées.
- Le réseau doit offrir une gamme complète de prestations incluant les activités, préventive, curatives, palliatives, médico-sociales, de réadaptation, pour la prise en charge aussi bien somatique que psychique.
- Le réseau doit disposer de la masse critique, c'est-à-dire qu'un hôpital de zone au moins doit faire partie du réseau.
En matière de financement, l'État passe avec chaque réseau, un contrat de prestation qui précise les objectifs et les moyens qui lui sont attribués :
- pour mettre en place les collaborations nécessaires à une pratique de réseau pour les catégories de patients qui en ont le plus besoin comme les personnes âgées dépendantes, les personne nécessitant une prise en charge palliative à domicile, les familles de migrants ou autres situations de patients chroniquement captifs du système de soins.
- pour réorganiser sur une vase commune des services supports tels que la facturation, la comptabilité, la gestion des ressources humaines, le transfert d'informations.
L'information des personnes, l'orientation des patients, la liaison entre professionnels des institutions, la gestion de la chaîne des urgences sont au cœur de la pratique des réseaux de soins.
Site Internet : www.nops.vd.ch
Voir : Maneged care — Réseau de soins — Réseau de soins (Organisation du) — Réseau de soins NOPS — Soins (Continuité des)
Pierre Huard
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Ressources humaines (Gestion des)
Au sein d’une entreprise ou d’une administration publique, on entend par gestion des ressources humaines, la prise en considération des femmes et des hommes qui y travaillent comme ayant une valeur (ressource) à intégrer dans une planification stratégique. Une telle gestion vise à prévoir, selon des objectifs à moyen terme, l’inclusion, le développement, le transfert, voire l’exclusion d’un certain nombre de compétences professionnelles et personnelles. Cette façon d’envisager les ressources humaines peut se trouver en accord ou en conflit avec le destin et les projets des individus. Ainsi, on peut se demander s’il faut mettre l’accent, dans un tel concept, sur le fait de gérer des ressources (financières, matériaux, produits, etc.) et, parmi elles, des ressources humaines ou s’il faut mettre en valeur des humains qui ont des ressources ! Gérer Ressources humaines suppose donc la capacité de relier à la fois les objectifs de l’organisation et le développement de chacun des membres de celle-ci.
R. J. Fombonne, “ Pour un historique de la fonction Personnel ”, in : D. Weiss, La fonction Ressources humaines, Les Éditions d’Organisation, Paris, 1988. — Association nationale des directeurs et cadres de la fonction Personnel, Groupe Terence, Encyclopédie des directeurs et cadres de la fonction personnel, Groupe Terence T. 2 L’Homme, ressource stratégique, “ matière ” à réfléchir, Les Éditions d’Organisation, Paris, 1993. — Le Boterf, Construire les compétences individuelles et collectives, Les Éditions d'Organisation, Paris, 2000.
Sites Internet : www.hrps.org site de The Human Resource Planning Society avec toutes les publications récentes et pour le partage des “ meilleures pratique ”. — www.e-rh.org portail pour les Ressources Humaines.
Voir : Travail (Humanisation du) — Travail (Marché du)
Maxime Morand
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Retraité
Se dit d’une personne qui abandonne ou doit abandonner son activité professionnelle salariée ou indépendante et qui, selon la loi sur l’assurance-vieillesse et survivants (AVS), atteint l’âge lui donnant droit à une rente. Dès lors, elle bénéficie de revenus, pouvant provenir de trois piliers, à savoir, de l’AVS, de la prévoyance professionnelle, de l’épargne.
L’adjectif “ retrait頔 qualifie deux cohortes de population, celles des 3e et 4e âges. Démographiquement, ces nouvelles phases de la vie concernent des retraités de plus en plus nombreux et devenant de plus en plus âgés.
Actuellement, la dixième révision de la LAVS a repoussé l’âge du droit à la rente pour les femmes, tandis que les employeurs mettent à la retraite des salariés de plus en plus jeunes.
R. J.-P. Fragnière, Pour les retraités. Joie et responsabilité, Réalités Socailes, 2001. — C. Lalive d’Épinay, U. Braun, Vieillir en Suisse, rapport de la commission fédérale, Berne, 1995.
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Retraite (Âge de la) — Troisième âge — Vieillesse
Jane-Marie Wust
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Retraite (Âge de la)
L’âge légal de la retraite est celui auquel débute le droit de bénéficier d'une pension à taux plein du système public de retraite (AVS), ou d’une caisse de pension professionnelle dans le cas où celle-ci définit un âge réglementaire différent. Cet âge légal (AVS) est resté stable et fixé à 65 ans pour les hommes ; pour les femmes par contre, il a connu plusieurs changements : de 65 ans à l'origine, il est passé à 63 ans dès 1958, puis à 62 ans dès 1964 ; dans le cadre de la 10e révision de l’AVS, il est retardé à 63 ans dès 2001, puis à 64 ans dès 2005. L'âge légal de la retraite doit être distingué de celui auquel on cesse de manière définitive son activité professionnelle. Si dans les premières années de l’AVS, une majorité des travailleurs continuaient à exercer un emploi au-delà de l’âge légal, cette proportion s'est fortement réduite par la suite, synonyme d'une standardisation de l’âge de sortie du marché du travail sur l’âge légal. Plus récemment, un nouvel écart entre ces deux âges se produit avec le développement des sorties dites anticipées, un mouvement qui a fortement progressé au cours de la dernière décennie.
R. C. Lalive d’Épinay, J.-F. Bickel, “ Le passage à la retraite ”, in : Commission fédérale, Vieillir en Suisse. Bilan et perspectives, Berne, 1995, pp. 39-69. — C. Lalive d'Epinay, J.-F. Bickel, C. Maystre, N. Vollenwyder, Vieillesse au fil du temps (1979-1994) : une révolution tranquille, Réalités sociales, Lausanne, 2000, pp. 266-274. — OFS, Enquête suisse sur la population active (diverses publications).
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS)  Retraité  Vieillesse
Jean-François Bickel
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Revenu d'existence àð Allocation universelle
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Revenu disponible
Il s agit du revenu à la disposition de son titulaire d origine primaire (salaire, revenu de la fortune, etc.) une fois payés les prélèvements obligatoires (cotisations sociales, impôts) et tous les revenus sociaux encaissés (assurances sociales, allocations familiales, etc.).
En économie, il est parfois fait référence au revenu disponible brut après impôts qui est égal au total des revenus versés (travail, financier,…) sans le bénéfice des transferts sociaux mais net des impôts sur le revenu et des cotisations sociales.
La redistribution des revenus par l’État permet d’améliorer le revenu disponible de nombreuses personnes seules ou familles afin de leur permettre de faire face à leurs obligations financières (primes d’assurances, loyers, frais médicaux, etc.).
Voir : Impôt — Rédistribution des revenus
Fabrice Ghelfi
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Revenu (Garantie du)
Lorsque le salaire est perdu en raison de maladie, d’accident ou de chômage, les régimes d’assurances sociales sont, en principe, tenus de verser un salaire de substitution. Une telle obligation figure dans tous les régimes, à l’exception de l’assurance-maladie. La révision de la Loi fédérale (18 mars 1994) a, en effet, maintenu le caractère facultatif de la couverture du salaire. Les travailleurs n’ont donc aucun droit à un revenu de substitution en cas de maladie. Les conventions collectives de travail ou les dispositions prises par l’employeur peuvent, cependant, assurer leur protection, en principe par le biais d’une assurance. Une incapacité de travail prolongée peut entraîner une incapacité de gain. La garantie du revenu prend alors la forme de rentes versées par l’assurance-invalidité, l’assurance-accidents, l’assurance militaire et la prévoyance professionnelle.
R. P. Gnaegi, Le droit du travailleur au salaire en cas de maladie, Schulthess Polygraphischer Verlag, Zurich, 1996.
Voir : Assurance-maladie (AM) — Assurance-accidents — Assurance-invalidité (AI) — Incapacité de travail
Béatrice Despland
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Revenu minimum cantonal d’aide sociale (RMCAS)
Créé à Genève en 1995, il a pour but d’éviter que les personnes ayant épuisé leurs indemnités de l’assurance-chômage ne recourent à l’assistance publique. L’Hospice général a été chargé de sa réalisation. Il comprend trois volets.
— L’aide financière : L’aide financière comprend un minimum cantonal de Fr 1'192.50 par mois imposable et non exportable. Ce montant a un coefficient multiplicateur en fonction du nombre de personnes composant le groupe familial. Il peut être complété par des allocations complémentaires et/ou ponctuelles. Il est non cumulable avec des prestations cantonales, fédérales et d’assistance.
— L’activité de contre-prestation : En principe le bénéficiaire s’engage à exercer une activité compensatoire à temps partiel d’utilité sociale. La formation professionnelle est assimilée à une contre-prestation. Un contrat est établi entre le RMCAS et le bénéficiaire.
— L’allocation d’insertion : Un montant unique, complémentaire au revenu minimum peut être accordé. Le montant varie entre Fr 1000.- et Fr 10'000.- et il est destiné à financer des projets réalistes et réalisables inscrits dans la durée (formation, lancement d’une activité indépendante). Les demandes d’allocation d’insertion sont examinées par une commission d’attribution composée de divers partenaires sociaux.
En projet, pour 2001, l’introduction d’un Revenu Minimum de Réinsertion (RMR) avec contre-prestation, qui remplacera l’assistance publique.
Voir : Contre-prestations — Pauvreté (Nouvelle) — Revenu minimum d’insertion (RMI) — Revenu minimum de réinsertion (RMR)
Eric Etienne
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Revenu minimum d’insertion (RMI)
Le revenu minimum d’insertion est un concept introduit en France avec la loi du 1er décembre 1988.
Cette notion marque un tournant puisqu’elle couple la garantie du minimum vital avec des mesures qui favorisent la (ré) insertion.
Dans notre pays, où la garantie du minimum vital est déléguée aux cantons, il y a une tradition consolidée dans ce domaine ; il suffit de se référer aux normes d’assistance édictées par la Conférence suisse des institutions d’action sociale, qui sont adoptées par la presque totalité des cantons. Les politiques récentes mises en place consistent donc à greffer sur la garantie du minimum vital un dispositif d’insertion, contrairement au cas français où l’on ne disposait pas d’un texte normatif qui définissait le minimum vital.
La notion d’insertion est le revers d’un nouveau phénomène, celui de l’exclusion, qui s’est installé avec la crise économique des années 90. Le découplage entre croissance économique et emploi crée une situation qui s’ajoute avec une dimension nouvelle, quantitative et qualitative, aux aspects déjà connus de la marginalisation.
L’exclusion caractérise ainsi surtout le non-accès au marché du travail qui est considéré comme le lieu privilégié de l’insertion sociale.
L’exclusion s’accompagne de la crise du modèle assuranciel soit sous l’aspect du financement mais aussi, et cela est plus important, en tant que négation de la présence de groupes homogènes qui constituaient la base des communautés de risques.
En fait l’exclusion a montré l’importance de la biographie personnelle qui impose la définition de processus d’insertion personnalisés.
Les dispositifs qui accompagnent la garantie d’un minimum vital considèrent deux formes d’insertion ; l’une sociale, l’autre professionnelle. La première peut être partagée en deux ensembles. D’une part, il s’agit d’une phase qui constitue la prémisse vers une insertion professionnelle, de l’autre elle est un processus défini qui augmente l’autonomie, le droit de citoyenneté de la personne qui n’est pas en mesure de tendre vers une insertion plus complète.
L’insertion professionnelle vise, par des mesures appropriées, notamment par un bilan du besoin de formation, l’accès à une autonomie qui affranchira la personne de l’aide sociale.
Ainsi, l’insertion constitue une contre-prestation de la garantie du minimum vital ; elle se matérialise par la signature d’un contrat.
Le dispositif d’insertion va de pair avec la réflexion sur le troisième secteur. Puisque l’économie ne crée pas d’emploi mais qu’il existe des besoins, notamment relationnels, insatisfaits., il faut organiser l’offre de ces biens et services grâce notamment aux organisations sans but lucratif. Cette demande considère principalement le secteur social et celui de l’environnemental, mais elle vise aussi des niches qui sont abandonnées par le secteur marchand.
R. RMI Le pari de l’insertion, Rapport de la Commission nationale d’évaluation du revenu minimum d’insertion, sous la présidence de P. Vanlerenberghe, La Documentation française, Paris, 1992. — P. Rosanvallon, La nouvelle question sociale, Paris, 1995.
Voir : Aide sociale — Désaffiliation — Minima sociaux — Normes CSIAS — Pauvreté (Nouvelle) — Politiques en matière de lutte contre la pauvreté — Revenu minimum de réinsertion (RMR) — Revenu minimum cantonal d’aide sociale (RMCAS)
Piergiorgio Jardini
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Revenu minimum de réinsertion (RMR)
En vigueur dès 1997 dans le canton de Vaud, le RMR est une aide financière non remboursable destinée à couvrir les besoins minimums des bénéficiaires et des personnes dont ils ont la charge. Octroyé pour une durée maximum de deux ans, il est destiné aux personnes sans emploi qui n’ont pas ou plus droit aux prestations de l’assurance-chômage, dont le revenu et la fortune ne dépassent pas un certain seuil et qui s’engagent à participer à leur réinsertion sociale et professionnelle. Cet engagement est formalisé dans un contrat de réinsertion qui lie le service social ou l’office régional de placement et le bénéficiaire. Les mesures de réinsertion professionnelle s’apparentent à celles mises en œuvre dans le cadre de l’assurance-chômage. Elles comprennent également des allocations uniques d’insertion destinées à soutenir des projets économiquement viables et des programmes d’occupation pour les chômeurs proches de la retraite. Les aides à l’insertion sociale visent à favoriser la création ou le maintien de liens sociaux. Réservées aux personnes inaptes au placement, elles seront mises en place avec la collaboration d’organismes privés à but non lucratif et sous la supervision d’une commission éthique.
R. Exposé des motifs et projet de loi sur l’emploi et l’aide aux chômeurs (sept. 1996). — S. Fattebert, A. Mach, Revenu Minimum de Réinsertion vaudois et Revenu Minimum Cantonal d’Aide sociale genevois : de la dette sociale au droit individuel ? IDHEAP, Chavannes-près-Renens, 1996. — U. Tecklenburg, “ Les nouveaux modèles cantonaux d’aide sociale : prestations et contre-prestations ”, in : Sécurité sociale, No 1, 1997.
Voir : Contre-prestations — Insertion — Minima sociaux — Pauvreté (Nouvelle) — Politiques en matière de lutte contre la pauvreté — Revenu minimum cantonal d’aide sociale (RMCAS) — Revenu minimum d’insertion (RMI)
Georges Piotet
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Revenus (Transfert de)
Par revenu, il faut entendre la rémunération des facteurs de production (travail et capital). Le salaire est ainsi le revenu du travail ; les intérêts et dividendes le revenu du capital.
Lorsqu’une personne — ou une unité de consommation — n’est plus en mesure de se procurer un revenu par le travail (pour des raisons de chômage, maladie, invalidité, vieillesse, etc.), il est possible, si la législation le prévoit, de procéder à des transferts. Ainsi, le revenu ne provient plus par voie ordinaire, mais par le biais des institutions de sécurité sociale (publiques ou privées). Finalité : garantir la capacité de consommation des personnes et des ménages.
Voir : Consommation (Unité de) — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Sécurité sociale — Transferts
Stéphane Rossini
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Révolution clinique
Le bouleversement que constitue la Révolution française va, pendant une courte période, interpeller sinon la pratique médicale, du moins l’idéologie qui la fonde. Ainsi, on va affirmer que la démocratie c’est, finalement, l’exercice d’un pouvoir collectif qui porte aussi sur le milieu. Dans ce contexte, la médecine devient affaire publique au même titre que tout autre secteur de l’activité sociale ; les réformes du système de santé peuvent donc être proposées par des non-médecins.
Il est vrai que ces velléités de réformes ne déboucheront que sur de maigres réalisations. Les projets vont cependant dans le sens d’une remise en question des institutions hospitalières qui sont considérées comme pathogènes pour les individus qui y sont placés et comme génératrices de maladies pour le milieu. Ces projets de transformation reposent sur deux grands mythes : celui de la mise en place d’une profession médicale rationalisée, organisée sur le mode du clergé et investie au niveau du corps et de la santé de pouvoirs semblables à ceux que celui-ci exerçait sur les âmes ; celui d’une disparition totale de la maladie dans une société sans trouble ni passion.
Dans ces conditions, l’assistance au malade devrait être gratuite et obligatoire ; la première tâche du médecin étant de caractère politique : la lutte contre la maladie commençant par une guerre livrée aux mauvais gouvernements. À la limite, il suffirait de diffuser les principes de la préservation d’une vie saine, chacun pouvant devenir son propre médecin. L’assistance devrait être décentralisée et confiée aux instances locales, l’hôpital étant réservé aux malades contagieux et aux sans-famille. Dans ces conditions, la médecine hospitalière deviendrait une tâche nationale fondée sur la conscience et le devoir social.
On sait que pour toute une série de raisons politiques et économiques les réalisations ont été faibles au cours de cette période. C’est plutôt à un “ tri ” des déviants que se livreront ultérieurement la médecine et les agents du contrôle social. Il n’en reste pas moins que cette période a permis l’émergence d’une volonté de faire de la médecine l’affaire de tous, offrant une sorte de sursis historique à la spécialisation et à l’appropriation du savoir médical par les médecins qui marqueront l’évolution au XIXe siècle.
R. A. Chauvenet, “ La qualification en milieu hospitalier ”, in : Sociologie du travail, 2/1973. — J.-P. Fragnière, Maîtriser la division du travail dans les professions sociales et les professions de la santé, Réalités sociales, Lausanne, 1984.
Voir : Division du travail — Politique de la santé
jpf
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Révolution industrielle àð Société industrielle
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Revue suisse de science politique
La Revue suisse de science politique est ouverte à des articles et notes de recherches provenant de tous les domaines de la science politique, quelle que soit leur orientation théorique, empirique, épistémologique ou méthodologique. Elle publie des textes et des dossiers particulièrement précieux pour l'étude de la politique sociale. Quatre numéros par an.
Informations : Éditions Seismo, case postale 313, CH-8028 Zurich, Tél. 01/261 10 94
Site Internet : www.ib.ethz.ch/spsr
Sophie Barras Duc
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Revue suisse de sociologie
Elle est publiée par la Société suisse de sociologie avec l'aide de l'Académie suisse des sciences humaines et sociales.
Depuis plus de vingt ans, la Revue suisse de sociologie propose des études et des travaux qui éclairent les divers aspects de la vie sociale en Suisse et dans une perspective internationale. Quatre numéros par an.
Informations : Éditions Seismo, case postale 313, CH-8028 Zurich, Tél. 01/261 10 94
Site Internet : www.sagw.ch/members2/sgs/publications/journal/f-bottom.htm
Sophie Barras Duc
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Risque
L’existence comporte un certain nombre de risques : atteintes à la santé, invalidité, incapacité de travail due au grand âge, perte de l’autonomie, perte d’un soutien de famille par décès ou divorce, reconversion forcée, chômage. Ces risques entraînent un besoin de protection : soins, revenu de remplacement, garantie de ressources, services. Ils représentent une donnée de la condition humaine et posent la question fondamentale suivante : appartient-il aux individus de les supporter seuls ou convient-il d’instituer des mécanismes collectifs ? Protection individuelle ou sociale ?
R. Bureau international du Travail, Introduction à la sécurité sociale, 3e éd., BIT, Genève, 1986. — J.-J. Dupeyroux, Droit de la sécurité sociale, 13e éd. par R. Ruellan, Dalloz, Paris, 1998.
Voir : Éventualité — Risques sociaux — Sécurité sociale — Société des risques
Pierre-Yves Greber
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Risques sociaux
Malgré l'attention généralisée accordée au concept de risque, on ne relève dans la littérature aucun consensus évident sur une définition précise du mot “ risque ”. Dans les sciences sociales, on s'entend généralement pour dire que le risque est la possibilité de subir un dommage quelconque ou de perdre quelque chose à quoi on attache de la valeur. Ce n'est alors pas étonnant que le terme plus spécifique de risque social donne, lui aussi, lieu à une interprétation qui varie considérablement. D'une part, le terme est utilisé pour la représentation d'un danger potentiel pour la collectivité, en l'opposant à l'échelle des risques personnels. Le risque personnel se situe sur un continuum reposant sur l'idée de choix, qui va des risques qu'on poursuit activement à ceux qu'on accepte ou qu'on assume à contrecœur. Parallèlement, le continuum du risque social est fondé sur les notions sociales d'issues acceptables ou inacceptables pour la société.
D'autre part, le terme de risque social est utilisé par opposition à d'autres catégories de risques, comme le risque naturel, le risque technologique ou encore le risque environnemental. On parle alors de risque social face à l'émergence d'une problématique sociale ou sanitaire jugée dangereuse et menaçante pour la collectivité et qui ne se laisse pas absorber par les connaissances et les expériences de gestion existantes. On peut observer que des phénomènes de nature très différente sont catégorisés en tant que risque social, tels que la nouvelle pauvreté, l'épidémie du VIH/sida, la crise de la vache folle ou encore l'extrémisme de droite ou de gauche. C'est en fait moins la nature même du risque social qui le distingue des autres catégories de risques, mais plutôt la dynamique sociétale qui l'accompagne et qui lui confère sa spécificité. On qualifie de social un risque qui met en question l'ordre symbolique d'une société à un moment précis, ce qui engendre la mobilisation de différents acteurs et groupements sociaux. Pour l'étude scientifique des risques sociaux, le glissement et l'articulation entre l'échelle collective et individuelle d'une part, et entre les différentes catégories de risques de l'autre part, posent un problème méthodologique considérable.
La spécificité du risque social permet aussi de comprendre pourquoi nos sociétés réagissent plus lentement face à un risque social qu'en présence d'une catastrophe naturelle ou d'une défaillance technique. Un tremblement de terre a immédiatement des conséquences néfastes et visibles, la mobilisation des ressources est alors rapide et l'intervention s'appuie sur des procédures de routine. Un risque social, par contre, ne fait souvent pas état de vérité partagée, il doit d'abord être objectivé avant d'être géré, ce qui présuppose en effet la stabilisation des débats sociaux et la construction d'un large consensus sociétal sur son sens. L'augmentation des ouvrages traitant des méthodes participatives dans la gestion des risques est un reflet de cette prise de conscience.
R. C. Bachmann, S. Cattacin, La gouvernance d'un risque social, Working Paper du resop, 6, Université de Genève, 1999. — U. Beck, Risk society : towards a new modernity, Sage, London, 1992. — M. Setbon, “ Le risque comme problème politique ”, in : Revue française des affaires sociales, 2/50, pp. 11-28.
Voir : Éventualité — Risque — Sécurité sociale — Société des risques
Carine Bachmann
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Salaire
Rémunération perçue en échange d’un travail accompli pour un employeur (entreprise privée, publique ou État) et déterminée généralement par un contrat de travail. Le salaire peut être fixé par un accord individuel ou en vertu d’une convention collective (d’entreprise ou de branche) négociée entre les employeurs et les syndicats. Le salaire est généralement calculé au temps (à l’heure, à la semaine, au mois ou à l’année) mais il peut être également versé à la pièce. Dans ce cas, le salaire est fondé sur la quantité d’opérations effectuées (par exemple le nombre de pièces fabriquées). Les différences de salaires dépendent de plusieurs facteurs. Le premier groupe se réfère aux caractéristiques individuelles des salariés. Ainsi, plus le niveau de formation est élevé, plus la rémunération augmente. Cette prime constitue une incitation pour les individus à investir dans leur éducation. En effet, une telle décision implique des coûts directs (liés à la scolarisation) et indirects (renonciation à un salaire que la personne aurait pu obtenir en choisissant de travailler). Ces coûts doivent être plus que compensés par des bénéfices, sous forme d’un salaire supérieur versé aux personnes formées, afin de “ rentabiliser ” un tel investissement éducatif qui autrement ne serait pas entrepris. L’expérience accumulée sur le marché du travail au sein de différents postes de travail et l’ancienneté acquise auprès du même employeur sont autant de facteurs qui accroissent la productivité du travailleur et qui se traduisent par des augmentations salariales. Selon les estimations effectuées en Suisse, il s’avère qu’une année de formation supplémentaire permet d’accroître le salaire de 5,3 % alors qu’une année d’expérience en plus correspond à une hausse de 2,3 %. En ce qui concerne l’ancienneté, la prime s’élève à 0,5 %. Ce facteur semble néanmoins perdre progressivement de son importance depuis le début des années 90. Cette évolution s’explique sans doute par la tendance du marché du travail à valoriser la flexibilité et la mobilité des salariés au détriment de leur fidélisation à l’entreprise. Parmi les autres variables individuelles qui affectent le salaire, il faut citer entre autres le sexe mais aussi, dans le cas de la Suisse, le permis de travail même si a priori ces facteurs n’influencent pas la productivité des employés. En Suisse, les femmes subissent ainsi, toutes choses égales par ailleurs, une pénalité de l’ordre de 16,5 %. Pour les étrangers, ces pénalités se montent à 13,6 % pour les permis A, 4,5 % pour les permis B, 3,6 % pour les permis C et 7,2 % pour les frontaliers, même si, dans ce dernier cas, des différences notables sont observées entre les cantons frontaliers. Le deuxième groupe de variables explicatives du niveau des salaires est lié au poste de travail lui-même et à la fonction occupée au sein de l’entreprise. Ainsi, le salaire varie fortement en fonction des responsabilités assumées. Toutes choses égales par ailleurs, un cadre supérieur gagne en Suisse 44,7 % de plus qu’un personne sans fonction particulière, prime qui s’élève à 29,4 % pour les cadres moyens. Le taux d’occupation influence également le taux de salaire horaire en valorisant, pour les hommes notamment, les emplois à plein temps. Finalement, le dernier groupe de variables explicatives se réfère au secteur ou à l’entreprise qui emploie les travailleurs considérés. En effet, l’employeur peut choisir de payer des salaires supérieurs à la concurrence pour accroître la motivation de son personnel, réduire le taux de rotation ou attirer dans son établissement les employés les plus productifs. La situation de l’entreprise sur son marché peut également jouer un rôle. Si elle dispose d’une position dominante ou même d’un monopole, elle pourra choisir de partager la rente qu’elle obtient en augmentant les salaires de son personnel. Finalement, des primes salariales peuvent être attribuées en compensation de conditions de travail plus ou moins pénibles ou dangereuses selon les secteurs économiques considérés.
R. Y. Flückiger, J. Ramirez, “ Analyse comparative des salaires entre les hommes et les femmes sur la base de la LSE 1994 et 1996 ”, in : Observatoire universitaire de l’emploi, Université de Genève, mai 2000
Site Internet : www.unige.ch/ses/lea/oue
Voir : Inégalités et discrimination salariale
Yves Flückiger
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Salaire minimum
La lutte contre les bas salaires ne se justifie pas seulement pour des motifs d’équité. Elle est indispensable aussi pour des raisons d’efficacité économique. Tout d’abord, parce que dans un monde caractérisé par des imperfections du marché des crédits, les inégalités conduisent à des investissements insuffisants en capital humain, surtout pour les personnes les plus démunies. Les inégalités contribuent ainsi à ralentir la croissance économique. D’autre part, les secteurs à bas salaires se caractérisent par des taux de rotation du personnel élevés, liés à leurs conditions de travail peu attractives. Cette situation n’incite pas les entreprises à développer la formation continue de leur personnel et elle tend à réduire la productivité du travail. Finalement, des salaires insuffisants, trop proches des normes d’assistance, réduisent l’efficacité des mesures de réinsertion professionnelle des chômeurs ou des personnes en fins de droit. Le travail doit rester plus attractif que les prestations sociales. C’est une condition indispensable à la lutte contre le chômage et l’exclusion.
Pour réduire les inégalités de salaire et assurer un niveau de revenu minimum aux personnes actives, différentes solutions existent. Elles peuvent prendre la forme d’une redistribution pure par le biais de la fiscalité (exonération des revenus les plus bas) ou de charges sociales réduites pour les salaires situés en-dessous d’un certain seuil. Cette politique peut prendre aussi la forme de transferts en complétant par exemple les rémunérations les plus faibles par des aides sociales qui protègeraient les travailleurs de la pauvreté. Cette approche est cependant très discutable. Notamment parce qu’elle contribue à reporter la charge des bas salaires sur les budgets de l’État qui subventionne ainsi certains secteurs économiques. Une autre solution consiste à intervenir directement sur le marché pour introduire un salaire minimum. Elle a été adoptée par de nombreux pays et même par les États-Unis ou l’Angleterre pourtant réputés pour leur libéralisme. Par le passé, les économistes ont souvent prétendu que cette politique risquait de créer du chômage en augmentant l’offre de travail et en diminuant la demande émanant des entreprises. Or, des études empiriques récentes ont démontré, qu’à l’exception des jeunes, ces effets négatifs n’existent pas. Même l’OCDE reconnaît aujourd’hui qu’une politique de salaire minimum, adaptée aux conditions de chaque pays et de chaque groupe démographique, n’a pas d’effets négatifs mais contribue à réduire les inégalités et à soulager, partiellement, la pauvreté. Si l’on considère les pays qui ont adopté ce type de politique, on constate que les solutions choisies diffèrent sensiblement d’un cas à l’autre. Ces disparités ne se manifestent pas seulement du point de vue du niveau des salaires minima retenus. Elles se traduisent également par des couvertures différentes selon que la loi s’applique à toute la population active (comme c’est le cas aux États-Unis) ou si elle se limite aux personnes âgées de plus de 18 ans (comme en France), de plus de 21 ans (Belgique) ou même de plus de 23 ans (Pays-Bas). Les différences se manifestent également et surtout par rapport au niveau du salaire minimum adopté. Si en France le salaire minimum correspond à près de 70 % du salaire médian, cette proportion descend à 55 % aux Pays-Bas, 40 % aux États-Unis et au Japon et même à 36 % en Espagne. A titre comparatif, un salaire minimum brut fixé à 2'500 francs en Suisse représenterait 50 % du salaire médian alors qu’une rémunération de 3'350 francs équivaudrait à 67 % de la médiane.
R. J. Dolado, F. Felgueroso, J. Jimeno, “ The Role of the Minimum Wage in the Welafre State : An appraisal ”, in : Revue suisse d’économie politique et de statistique, 136(3), pp. 223-245.
Voir : Inégalités et discriminations salariales — Salaire — Working poor
Yves Flückiger
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Salaires (Structure des)
Les différences entre emplois, employés et employeurs débouchent sur une structure des salaires. Celle-ci constitue l’une des dimensions de la stratification sociale. Les différences salariales renvoient ainsi à l’analyse des inégalités sociales, de leurs causes, mécanismes et des correctifs (formation, fiscalité, etc., y compris sous l’angle des effets pervers).
Les statistiques de salaires et plus encore de leur évolution sont lacunaires et difficilement comparables dans le temps et entre nations. À noter que les revenus ne se réduisent pas aux seuls salaires. Concernant les pays développés, on observe un mouvement séculaire vers l’accroissement de la part du travail, et donc du salaire, dans le revenu des individus. Non régulier, ce mouvement ne va toutefois pas nécessairement de pair avec une réduction des inégalités dans la distribution. La relation entre ces phénomènes et la croissance économique n’est pas établie de façon définitive.
Les transformations du salariat affectent de façon sensible la structure des salaires. L’hétérogénéité croît, vers le bas comme vers le haut, de même que l’individualisation. L’échelle des salaires, singulièrement avant impôts, tend à s’allonger. Cette évolution peut être interprétée tant comme une marque du caractère inégalitaire de nos sociétés que comme l’expression de l’étendue des possibilités offertes à ses membres.
Voir : Inégalités sociales — Redistribution des revenus
Pierre Weiss
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Sanctions pénales
L’imposition d’une sanction par un juge ou une autorité administrative traduit l’exercice par l’État de son droit de punir. Même si le fondement de ce droit reste largement discuté en philosophie politique — les thèses dominantes à l’époque contemporaine opposent les contractualistes et les défenseurs de la pure nécessité sociale — son existence n’est guère contestée à l’époque actuelle.
La plupart des systèmes pénaux connaissent deux types de sanctions pénales : les peines et les mesures de sûreté. Les premières sont les plus classiques ; conformément à l’enseignement de Kant et de Hegel, elles visent à “ rétribuer ” un individu — ou, beaucoup plus rarement, une collectivité — pour une faute qu’il a commise, ce qui revient à lui infliger un “ mal ” (privation ou restriction d’une liberté individuelle) en réponse au mal qu’il a infligé à la société ou à certains de ses membres. Les mesures de sûreté sont des sanctions qui visent à exercer sur un individu (ou une collectivité) une action utile, dans une optique de prévention générale — éviter la commission de nouvelles infractions par un sujet de droit quelconque — ou spéciale — éviter que la personne sanctionnée ne récidive. Les peines traditionnelles sont la privation de liberté et l’amende, auxquelles s’ajoutent plus récemment des peines restrictives ou privatives d’autres droits. La palette des mesures de sûreté est large.
R. P. Avvanzino, S. Heughebaert (Éds), La sanction et le soin, Réalités sociales, Lausanne, 1987 — S. Bauhofer, P.-H. Bolle (Éds), Réforme des sanctions pénales, Ruegger, Zurich/Coire, 1994. — Revue pénale suisse, 1994, fasc.4. — P. Poncela, Droit de la peine, PUF, Paris, 1995.
Voir : Mesures de sûreté — Prison (Privation de liberté) — Peines restrictives de droit (Peines de substitution)
Robert Roth
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Sans domicile fixe (SDF)
Utilisé communément sous l’appellation de SDF. L’usage du sigle déshumanise et donne une distance au propos.
Sans domicile fixe : groupe hétérogène, en croissance constante en Europe, inorganisé, laissé pour compte d’une société dite à deux vitesses. Les sans domicile fixe convergent de tous les chemins de la vie pour mille raisons différentes, se retrouvant dans le monde des “ sans ” : sans abri – sans travail régulier – sans ressources matérielles, physiques et psychologiques – sans solidarité familiale. Sans espoir de s’en sortir véritablement, ces personnes vivent le rejet permanent, renforçant le sentiment d’être inutile à la société. Monde anonyme, au seuil de l’extrême pauvreté, touchant une population toujours plus jeune.
Processus de disqualification sociale mêlant les fragilités psychologiques des individus et les drames objectifs de l’existence sociale. Refus de la dépendance des structures sociales, du monde des assistés, entraînant la rupture complète du lien social. Le degré de rupture sociale est souvent en adéquation avec la capacité ou non de tenir un emploi dans un modèle salarial classique.
Certains se retrouvent dans la situation des sans domicile fixe par accident et sont clairement déterminés à se hisser hors de ce groupe, d’autres espèrent en échapper et s’y appliquent mais n’y parviendront pas, et d’autres, par contre ne caressent plus de tels espoirs (clochardisation).
R. N. Andersen, Le Hobo : sociologie du sans-abri, Nathan, Paris, 1993. — M. Marpsat et al., Les sans-domicile en France et aux États-Unis, L’Harmattan, Paris, 1998,
Site Internet : www.ifrance.com/travailetvie
Voir : Désaffiliation — Exclusion — Pauvreté
Joëlle Libois
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Santé communautaire
La santé communautaire a comme objet le maintien et l’amélioration de l’état de santé au moyen de mesures préventives, curatives et de réadaptation, couplées à des mesures d’ordre social et politique par des équipes pluridisciplinaires travaillant en réseau et faisant largement appel à la participation active de la population.
Cette participation communautaire implique :
— l’apport de la communauté aux stratégies et politiques globales de santé ;
— l’engagement de la communauté à la planification et à la gestion des services de santé ;
— l’organisation des services de santé en réseau permettant un accès facile à tout membre de la communauté.
Il en découle que, dans une perspective communautaire, l’identification des besoins sanitaires de la communauté est une étape importante qui exige la participation de la population, par exemple sous forme de consensus. D’autres éléments importants de l’approche communautaire d’une problématique de santé sont notamment :
— la communication sociale : elle implique le partage d’informations, d’expériences, de vécus entre professionnels de santé et population en vue de l’amélioration des liens sociaux ;
— la conscientisation de la population concernant son rôle : elle implique une dialectique entre une réflexion critique sur les conditions de vie, leurs causes et conséquences, les stratégies technocratiques et participatives et l’action subséquente ;
— l’éducation pour la santé : elle implique l’intervention qui vise non seulement le changement de comportements individuels néfastes à la santé, mais aussi le changement social facilitant le changement de comportements individuels ;
— l’évaluation des actions de santé : elle implique une approche critique à tous les niveaux d’une action ; l’évaluation s’intéresse dès lors aussi bien au questionnement sur les besoins des résultats que du processus lui-même.
De fait, l’approche de la santé dans une perspective communautaire implique l’établissement d’une dynamique sociale au sein de la communauté où le processus démocratique est le point charnière.
R. Groupe de travail sur l’enseignement de la santé communautaire. La santé communautaire. Concepts-Actions-Formation, Centre International de l’Enfance, Paris, 1990, pp. 95-178.
Voir : Coûts de la santé — Éducation pour la santé — Politique de la santé — Santé publique — Sécurité sociale — Soins de santé primaires
Philippe Chastonay
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Santé de la reproduction
Cette notion, qui implique l’existence de droits en matière de sexualité et de reproduction, est la traduction du terme anglais “ reproductive health ”, tel que défini lors de la CIPD (Conférence internationale sur la population et le développement, Le Caire, 1994), dans son article 7.2 : “ […] bien-être général, tant physique que mental et social, de la personne humaine, pour tout ce qui concerne l’appareil génital, ses fonctions et son fonctionnement et non pas seulement l’absence de maladies ou d’infirmités. Cela suppose donc qu’une personne peut mener une vie sexuelle satisfaisante en toute sécurité, qu’elle est capable de procréer et libre de le faire aussi souvent ou aussi peu souvent qu’elle le désire. Cette dernière condition implique qu'hommes et femmes ont le droit d'être informés et d'utiliser la méthode de planification familiale de leur choix [...] qui ne soient pas contraires à la loi, méthodes qui doivent être sûres, efficaces, abordables et acceptables, ainsi que le droit d'accéder à des services de santé qui permettent aux femmes de mener a bien grossesse et accouchement et donnent aux couples toutes les chances d'avoir un enfant en bonne santé. [..]. On entend également par cette expression la santé en matière de sexualité qui vise a améliorer la qualité de la vie et des relations interpersonnelles, et non à se borner a dispenser conseils et soins relatifs a la procréation et aux maladies sexuellement transmissibles. ” On utilise également le terme de santé génésique, santé reproductive ou encore celui de bien-être en matière de sexualité et de procréation.
Site Internet : www.unfpa.org/icpd
Voir : Bien-être — Qualité de vie — Planning familial — Politique de la santé
Rafael Matos
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Santé mentale
La santé mentale est un phénomène complexe, déterminé par de multiples facteurs sociaux, environnementaux, biologiques et psychologiques. Il peut être appréhendé en fonction des symptômes (dépression, anxiété, schizophrénie, handicap mental, suicide, toxicomanie, épilepsie, etc.), des populations concernées (étudiées par âge, sexe ou genre, culture, lieu d’habitation, environnement social, etc.), des méthodes de traitement psychothérapeutique appliquées (pharmacologie, psychanalyse, thérapie de famille, cognitive, comportementale, corporelle, émotionnelle, par l’hypnose, etc.), des domaines scientifiques (ethnopsychiatrie, neurosciences, anthropologie, etc.), des institutions de soins (associations, centres médico-sociaux, hôpitaux psychiatriques, etc.).
Il y a quarante ans encore, la psychiatrie était concernée par la “ folie ” et se limitait à une solution asilaire de contention et de traitement. Son domaine s’étend désormais des états-limites de l’individu au mal-être de masse. Le trouble mental est aujourd’hui une question sociale et politique autant que médicale : elle concerne toutes les institutions, aussi bien la famille, l’école que l’entreprise.
R. A. Ehrenberg, A. M. Lovell (Éds), La maladie mentale en mutation : psychiatrie et société, O. Jacob, Paris, 2001.
Sites Internet : http://www.graap.ch — http://www.who.int — http://www.sante-mentale.net — http://www.carnetpsy.com
Voir : Bien-être — Prévention — Santé publique
Marie-José Manidi
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Santé publique
Une approche ou des programmes, sont dits de santé publique quand ils se réfèrent à la santé d’une collectivité et aux besoins correspondants ; il peut s’agir d’un canton ou pays, d’une classe d’âge, d’une catégorie professionnelle ou d’un groupe présentant un trait ou risque particulier. Selon l’Institute of Medicine des États-Unis, “ la santé publique est ce que, en tant que société, nous faisons collectivement pour assurer des conditions de vie dans lesquelles les gens peuvent être en bonne sant頔. Cela implique que nous devons entrer en contact et en relation avec tous les groupes dans la société.
Il incombe à la santé publique de considérer l’ensemble des paramètres relatifs à un problème donné, pour déterminer le type et la quantité de ressources à y consacrer et les répartir adéquatement entre prévention primaire, dépistage, traitement, réhabilitation ; ceci en tenant compte des facteurs scientifiques, médicaux (qualité des soins), éthiques, économiques (efficience), civiques (équité, solidarité). La qualité des décisions découle de l’appréciation, difficile, du “ poids ” de ce problème (maladie, accident, handicap), en termes d’années de vie perdues ou gagnées et de qualité de vie, de soins hospitaliers ou ambulatoires requis, de souffrances individuelles. De plus en plus ces questions méritent des débats faisant participer tous les citoyens.
Par santé publique, on se réfère aussi aux services du même nom (qui sont en Suisse les ministères cantonaux de la santé), chargés de l’application de la législation pertinente, ainsi que, plus largement, au système de santé en général.
R. F. Gutzwiller, O. Jeanneret (Éds), Médecine sociale et préventive - Santé publique, Hans Huber, Berne, 1996. — J. Martin, Pour la santé publique, Réalités sociales, Lausanne, 1987.
Site Internet : www.admin.ch/bag/f
Voir : Prévention — Politique de la santé — Recherche épidémiologique — Réduction des risques (Aide à la survie) — Santé communautaire — Santé de la reproduction
Jean Martin
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Secret
Le secret est traité dans les lignes qui suivent dans son acception la plus générale, soit, selon la définition de Georg Simmel, comme “ limitation de la connaissance réciproque ”. Ses figures principales sont le non-dit, le mensonge, l’intime et la connivence. On distingue les secrets dyadiques et les secrets triangulaires ; dans ce dernier cas, deux acteurs (individuels ou collectifs) partagent un secret par rapport à d’autres qui en sont exclus.
Dès l’Antiquité, quantité de philosophes et de moralistes ont abordé la question, surtout sous l’angle du mensonge et sous celui, plus général, de l’être et du paraître. Plus près de nous, Machiavel et Rousseau ont construit leur œuvre autour de la problématique du voilement et du dévoilement dans les rapports asymétriques du pouvoir. Erasme et Castiglione se sont intéressés à la bienséance et à la présentation de soi. Molière, La Bruyère, La Rochefoucault ont exploré les coulisses et dénoncé les hypocrisies : tout l’Ancien Régime apparaît fasciné par le théâtre social et particulièrement par les jeux raffinés des cours princières.
L’étude sociologique du secret a été inaugurée par Simmel au début du XXe siècle. Le mérite principal de cet auteur est d’avoir initié l’exploration de l’incidence de notre capacité de voilement/dévoilement sur les formes sociales. L’amitié, l’amour supposent un degré de transparence que le rapport professionnel n’implique pas. L’inclusion/exclusion par les confidences et les secrets de toutes sortes cimente ou distend nos relations à autrui, construit et déconstruit nos réseaux relationnels. Enfin, les sociétés secrètes constituées donnent à Simmel l’occasion de décrire des logiques qui, sous des formes moins ritualisées et cristallisées, sont à l’œuvre dans nombre de groupes sociaux moins hermétiques.
Ce travail de pionnier n’a suscité que peu d’écho dans le milieu des sociologues. Il a fallu attendre les recherches d’Erving Goffman sur la présentation de soi pour que l’intérêt soit relancé sur cette question. Empruntant la métaphore du théâtre, cet auteur s’interroge sur la dynamique des interactions entre des acteurs conscients de l’existence d’un écart entre être et paraître, entre personnage privé et personnage public. Selon Goffman, nos interactions se déroulent selon une sorte de modus vivendi, en vertu duquel le spectateur est tenu de respecter la définition que l’acteur donne de la situation, mais jusqu’à un certain point seulement. Si cette définition est trop invraisemblable ou si elle met en cause le spectateur, celui-ci est autorisé à la contesteR. De son côté, l’acteur est supposé donner une définition de la situation conforme à sa propre pensée, que ce soit par rapport à lui ou par rapport au contexte ; il est donc tenu à la cohérence, à la plausibilité et au respect du spectateur. Étrange double norme, où les partenaires de l’interaction n’exigent pas une authenticité véritable, qui supposerait une identité entre être et paraître, mais où ils jouent le jeu sans être dupes. Entre acteur et spectateur, il existe un niveau, explicite et implicite, où chacun a la possibilité de dire et de ne pas dire, d’envoyer des messages faits de silence, de réticence, d’humour et d’allusion plus ou moins voilée relative à la définition de la situation.
Goffman s’inscrit donc dans le projet de Simmel en dégageant, au niveau interactif, l’effet morphogénétique de notre capacité de voilement/dévoilement. Une simple expérience de pensée nous persuade que cet effet est beaucoup plus profond qu’on ne l’imagine. Si toutes nos pensées étaient accessibles à autrui, en face-à-face ou à distance, nos formes relationnelles les mieux établies seraient altérées ou réduites à néant. Plus de non-dit ni de mensonge ni de connivence ; l’aveu et l’authenticité perdraient toute valeur ; impossible de cacher ses désirs, ses ressentiments, ses jugements ou ses fantasmes ; plus de secret de famille ni de secret professionnel ; nous connaîtrions l’inconnu aussi bien que l’ami ou l’amant ; les politiciens seraient condamnés à la transparence et les espions au chômage ; les tests psychologiques seraient inutiles ; le théâtre juridique s’envolerait ; la délation, la diffamation, la censure, l’intimité, la discrétion disparaîtraient ; les sociologues cesseraient de spéculer sur le dilemme du prisonnier ; Pareto n’aurait jamais eu l’idée d’écrire son Traité, pas plus que Machiavel Le Prince.
La transparence est recherchée par les dominants. G. Orwell, dans 1984, a exploré la variante qui accorde à une minorité le pouvoir de pénétrer la vie privée, les relations intimes et les représentations mentales des dominés. Il nous rappelle l’importance de l’autonomie conférée par la nature cachée des représentations mentales, spécialement dans les relations de pouvoir.
Si tous les travaux sur le secret soulignent son importance morphogénétique, aucun ne s’interroge cependant de façon systématique sur les ressorts de nos jeux de l’être et du paraître. Dans cette direction, l’approche génétique semble la plus féconde. Elle interprète nos jeux de voilement/dévoilement comme la modalité symbolique des rapports entre intérieur et extérieur chez les êtres vivants. Aux niveaux inférieurs de la phylogenèse, les jeux du caché/montré recourent à des signaux pour manifester/cacher/déformer vers l’extérieur des états internes par nature inaccessibles à des congénères ou à des individus d’espèces concurrentes. Les signaux obéissent d’abord à des montages héréditaires et font ensuite une part de plus en plus importante à l’apprentissage et à la contextualisation. La capacité des singes anthropoïdes de se représenter leurs perceptions et celles d’autrui leur ouvre la voie vers les jeux délibérés, anticipés et réfléchis du voilement/dévoilement. Enfin, la révolution symbolique nous dote d’un langage conventionnel utilisable aussi bien pour déguiser que pour exprimer nos représentations mentales et nos émotions.
Finalement, nos jeux symboliques de l’être et du paraître reposent sur trois conditions fondamentales : 1. la capacité de révéler ou de cacher délibérément des représentations mentales par nature invisibles ; 2. la capacité de distinguer entre une version des événements tenue pour vraie et une version mensongère délibérément présentée à autrui ; 3. la capacité de respecter ou de ne pas passer outre nos conventions. Vers trois ans déjà, l’enfant sait que l’adulte ne peut pas lire ses pensées, et il commence à contrôler l’expression naïve et spontanée de ses états internes. Vers trois ans également, il fait nettement la distinction entre un événement ou un objet et sa représentation mentale ; environ une année plus tard, il peut construire avec le langage une version qu’il sait fausse des événements. Enfin, son penchant pour la transgression des conventions, et notamment des conventions verbales, s’exprime très tôt au plan ludique et vers trois/quatre ans au plan stratégique. En résumé, vers quatre ans, la capacité de l’enfant de se représenter ses propres représentations et celles d’autrui le rend apte à induire de fausses croyances dans l’intention de modifier les représentations et par là le comportement de l’autre. Par la suite, cette faculté d’abord exercée au premier degré (je pense que…) s’étend vers six ans au second degré (je pense qu’il pense que…) et vers dix ans au troisième degré (je pense qu’il pense que je pense que…).
Nos jeux symboliques de dissimulation/révélation/déformation se déploient donc à la jonction du signe et des facultés métareprésentatives. Ils reposent sur trois virtualités pivotales intimement liées à notre idée de liberté : dire ou ne pas dire, déformer ou ne pas déformer, respecter ou transgresser les conventions. En croisant ces trois axes, nous obtenons huit catégories du voilement/dévoilement : 1. le mensonge illicite (tromperie, imposture, diffamation…), 2. le mensonge licite (pieux mensonge, farce…), 3. le non-dit illicite (non-dit mensonger ou trompeur, censure…), 4. le non-dit licite (intimité, privé, discrétion, pudeur…), 5. l’expression déformante illicite (exagération, vantardise, parodie, ironie acerbe…), 6. l’expression déformante licite (parabole, ironie ludique, litote, euphémisme…), 7. l’expression non déformante illicite (ostentation, indécence, indiscrétion, dévoilement brutal…) et 8. l’expression non déformante licite (aveu, confession, sincérité, authenticité, innocence…). La combinaison de ces postures de base permet de retracer un grand nombre de figures interactives complexes, dyadiques ou triangulaires. On aperçoit ainsi beaucoup mieux la profondeur avec laquelle nos interactions sont marquées par le secret et la révélation virtuelle. Ce marquage morphogénétique est omniprésent et universel.
Chaque société historique se caractérise par un dosage différent de ces postures interactives. Certaines cultivent le silence, d’autres l’exubérance expressive. Les croyances dans la magie et la sorcellerie stimulent les précautions interactives pour se protéger des mauvais sorts. Certaines sociétés poussent très loin la coupure et le secret entre hommes et femmes, alors que d’autres, à l’inverse, ont développé une vision fusionnelle et transparente de l’amour. Les unes encouragent le repli sur le privé, alors qu’ailleurs individus et familles baignent dans une dense sociabilité. Tantôt les institutions politiques s’entourent d’une épaisse opacité, tantôt elles se tournent vers un idéal de transparence, en particulier les institutions démocratiques.
La société moderne occidentale est prise dans des tendances contradictoires. La révolution démocratique et l’avènement d’un espace public renforcé par les mass media ont indubitablement conduit à une transparence accrue du politique, inconnue sous la monarchie. Parallèlement, les barrières du privé se sont élevées avec la montée de l’individualisme. Ce retrait, sanctionné par des mesures juridiques (notamment le secret professionnel), réaffirmé à chaque pression technologique et institutionnelle menaçante (écoutes téléphoniques, fichiers informatiques, Internet), se double d’une tendance inverse tournée vers l’extériorisation et la mise en scène du Moi et de la vie privée.
Les chercheurs ont été surtout attirés par la frontière privé/public et son évolution, par la notion d’intimité, par les journaux intimes et la correspondance privée, par les secrets de famille, le secret des origines, par la gestion des infidélités et des déviances sexuelles, par le commérage, les rumeurs, la trahison, la politesse et la présentation de soi. Leur attention s’est aussi dirigée vers les sociétés secrètes et le secret dans les organisations, vers le secret professionnel, les tricheries scientifiques, le mensonge interpersonnel et les falsifications de l’histoire, vers l’espionnage et les secrets d’État.
Les théories générales du voilement et du dévoilement débouchent sur la notion d’incertitude : incertitude de la connaissance réciproque, incertitude des postures interactives. L’espace incertain des interactions appelle nécessairement des mécanismes de réduction de l’incertitude qui constituent autant de formes sociales liées aux conditions de base du voilement/dévoilement symbolique : l’intériorisation des conventions, les punitions et récompenses, l’intérêt commun à la continuité des échanges, l’impossibilité du mensonge généralisé, le souci de la réputation, l’exigence de plausibilité et enfin la confiance. La confiance suscite présentement un regain d’intérêt. On peut la définir comme un état d’ouverture affective et cognitive au jeu des échanges. Elle représente une sorte de mise de départ qui soutient l’engagement plus ou moins risqué dans le jeu des échanges.
Le secret est habituellement associé aux postures négatives des interactions. Ce stéréotype nous fait oublier que nos expériences les plus captivantes jouent avec le secret. C’est ainsi que le don implique le non-dit sur le retour ; que la découverte réciproque des amis et des amants procure des joies intenses ; que le respect et le tact figurent dans le plaisir d’être ensemble ; qu’une part de secret entre le plus souvent dans l’idéalisation réciproque ; que nos jeux, du cache-cache au poker, impliquent fréquemment le secret ; que la plupart enfin des productions culturelles utilisent les ressources du secret pour construire des récits fascinants, pour s’emparer de notre attention et faire battre nos cœurs. Les fonctions positives du secret sont tout aussi importantes que ses fonctions négatives. En fait, la médiation du signe et sa jonction avec nos capacités métareprésentatives multiplient nos virtualités interactives et ouvrent ainsi sur une complexification extraordinaire de nos formes sociales. L’efflorescence des formes du secret va de pair avec la diversification subtile du dévoilement et elles marquent toutes deux un immense progrès dans la phylogenèse.
R. A. Petitat, “ Secret et morphogenèse sociale ”, in : Cahiers internationaux de sociologie, 1997. — G. Simmel, Secret et sociétés secrètes, Circé, Paris, 1991.
Voir : Éthique — Secret médical
André Petitat
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Secret médical
Le secret médical consiste en une garantie de confidentialité des informations qu’un patient révèle au soignant qu’il a consulté. Cette garantie existe pour protéger la sphère privée du patient et pour promouvoir la santé publique en encourageant chacun à se confier sans retenue au soignant qu’il a choisi. La violation du secret médical est punissable, sur plainte, en vertu de l’article 321 du Code pénal (s’agissant des médecins, pharmaciens, dentistes, sages-femmes et leurs auxiliaires) ou de l’article 35 de la loi fédérale sur la protection des données (autres professions de la santé exercées à titre indépendant, comme les psychologues). Le patient peut délier le soignant du secret médical. Diverses dispositions légales (maltraitance, épidémies, recherche en santé publique, etc.) prévoient en outre, pour des motifs importants, des exceptions au secret médical.
R. K. Keller, Das ärztliche Berufsgeheimnis gemäss Art. 321 StCB, Zürich, 1993. — O. Guillod, “ Le secret médical, aujourd’hui ”, in : Le secret, Cahiers ERIE, Université de Lausanne, 1996, pp. 49 ss.
Voir : Relation médecin-malade — Secret — Santé publique
Olivier Guillod
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Secrétariat d’État à l’économie (Seco)
Dans le cadre des objectifs assignés par le Conseil fédéral à la politique économique suisse, des pans essentiels de la politique économique intérieure relèvent des compétences du Seco.
Le Seco entend notamment contribuer à :
— augmenter l’attrait de la place économique suisse,
— garantir le plein-emploi,
— atténuer les conséquences du chômage,
— améliorer la flexibilité du marché du travail,
— assurer la protection physique, psychique et juridique des travailleurs,
— coordonner la politique du marché du travail,
— favoriser un développement économique équilibré du point de vue structurel et entre les régions.
Les domaines d’activité du Secrétariat d’État à l’économie sont – au niveau suisse – les suivants : marché du travail, assurance-chômage, protection des travailleurs, travail et santé, droit du travail, inspection du travail, entreprises et financements, tourisme, politique régionale et organisation du territoire, promotion de la place économique.
Le Seco dispose en outre d’un centre de prestations “ Analyses et politiques économiques ”, dont dépendent les secteurs “ Politique conjoncturelle ” et “ Politique de croissance et réformes structurelles ”. Les attributions du Seco couvrent par ailleurs l’essentiel des questions économiques extérieures. Au total, l’Office occupe actuellement quelque 560 collaboratrices et collaborateurs.
Site Internet : www.seco-admin.ch/seco/seco2.nsf/Homepage?OpenForm&l=fr
Voir : Indice des salaires
Seco
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Sécurité sociale
La sécurité sociale est née au milieu du XXe siècle, dans un contexte très difficile marqué par la Seconde guerre mondiale et la reconstruction. L’Organisation internationale du Travail (OIT) a joué un rôle essentiel dans l’élaboration de cette grande institution : elle a notamment adopté la Déclaration de Philadelphie (1944), la Convention OIT No 102 concernant la norme minimum de la sécurité sociale (1952) et plusieurs instruments l’améliorant. Les Nations Unies ont reconnu à chaque être humain le droit à la sécurité sociale (Déclaration universelle des Droits de l’Homme, 1948) ; Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 1966). La sécurité sociale tend à une vision globale : protection de l’ensemble de la population, à l’égard des risques ou éventualités considérés comme les plus importants.
Selon sa définition classique, la sécurité sociale couvre neuf éventualités : soins médicaux, indemnités de maladie, maternité, accidents du travail et maladies professionnelles, vieillesse, survivants, invalidité, chômage, charges familiales. Cette liste tend à être complétée par la dépendance et la pauvreté. Selon sa définition fonctionnelle, la sécurité sociale a pour missions de garantir l’accès aux soins de santé, des ressources de base, un revenu de remplacement, l’insertion et la réinsertion sociale et professionnelle.
La sécurité sociale est une institution complexe, au service des êtres humains, qui peut combiner : des conceptions de la protection (unifiée ou diversifiée) ; des régimes universels ou à portée plus réduite ; des prestations en nature, en espèces et en services, inconditionnelles ou liées à des conditions de ressources ; des techniques de protection (assurances sociales, service public, assistance sociale), différentes institutions (publiques ou privées, mais alors contrôlées) ; des techniques de financement (répartition, capitalisation, systèmes mixtes), liées à des sources (cotisations sur le revenu du travail, sur l’ensemble des revenus, fiscalité directe et indirecte, placements). L’assurance sociale joue généralement un rôle important dans les systèmes.
La sécurité sociale implique la solidarité entre revenus et entre générations. Avec une intensité extrêmement variable (de l’ébauche de régimes à des systèmes quasiment complets), la sécurité sociale est actuellement présente dans le monde entier. Elle constitue un mode essentiel de répartition des richesses créés et amortit les chocs causés par les transitions économiques et par la mondialisation.
R. Bureau international du Travail, Introduction à la sécurité sociale, 3e éd., BIT, Genève, 1986. — J.-J. Dupeyroux, Droit de la sécurité sociale, 13e éd. par Rolande Ruellan, Dalloz, Paris, 1998. — G. Perrin, Histoire du droit international de la sécurité sociale, Association pour l’étude de l’Histoire de la Sécurité Sociale, Paris, 1993.
Voir : Conventions de l’OIT, — Déclaration de Philadelphie — Droits de l’homme (Convention européenne des) — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Prestations de sécurité sociale — Protection sociale — Sécurité sociale (Codification de la) — Sécurité sociale (Architecture de la) — Sécurité sociale (Environnement de la) — Sécurité sociale (Théorie générale de la) — Solidarité — Universalité.
Pierre-Yves Greber
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Sécurité sociale (Architecture de la)
La pyramide est une forme de construction qui illustre bien l’architecture de la sécurité sociale : elle comprend une première partie, la plus large, qui doit être solide puisqu’elle supporte le tout et, sur elle, la figure s’amincit et s’élève. La première partie est constituée par les régimes publics de sécurité sociale qui ont vocation – au besoin par la juxtaposition de plusieurs régimes – à couvrir l’ensemble de la population. La deuxième partie représente les régimes complémentaires de sécurité sociale, pilotés par les partenaires sociaux. La troisième partie est celle des protections complémentaires individuelles.
Le recours à la figure de piliers peut aussi être utilisé : ceux-ci montrent cependant beaucoup moins bien cette protection, qui s’élève progressivement.
La question essentielle, et qui fait l’objet de grands débats, est celle du contenu des régimes publics, des régimes complémentaires, des protections individuelles. C’est dans les premiers que les États s’engagent le plus : ils fixent les normes (finalités, champs d’application personnel et matériel, prestations, organisation administrative, financière et contentieuse). Leur intervention dans le second étage est plus “ légère ”, d’autant plus que le premier sera développé.
Les régimes publics présentent en principe la stabilité propre à l’État, ils sont fondés sur la légalité et l’égalité de traitement. Ils peuvent instituer des solidarités entre revenus, entre générations. Les régimes professionnels, s’ils ne couvrent pas l’ensemble des travailleurs de la même manière, laissent subsister des inégalités qui peuvent être importantes. S’ils ne sont pas obligatoires, ils peuvent pratiquer la sélectivité au moment de l’affiliation, écartant ceux qui représentent des “ mauvais risques ” ; ils sont capables en revanche d’une grande souplesse.
Cette question est donc très marquée par les choix politiques. Ceux-ci devraient tenir compte du fait qu’il s’agit d’une architecture à finalité sociale.
R. OIT-Conférence internationale du Travail (80e session-1993), Assurances sociales et protection sociale, Rapport du Directeur général, BIT, Genève, 1993. — Banque mondiale, Rapport sur la crise du vieillissement. Mesures destinées à protéger les personnes âgées et à promouvoir la croissance, Washington, 1994. — J.-A. Schneider, Les régimes complémentaires de retraite en Europe : libre circulation et participation, Helbing & Lichtenhahn, Basel/Frankfurt am Main, 1994. — M. Voirin, “ Une grille de lecture pour la comparaison internationale des régimes privés de pensions en relation avec les régimes publics ”, in : Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, No 12-1994, pp. 7 ss. — Revue internationale de sécurité sociale, No 1/2000 (la réforme des pensions).
Voir : Régime de base — Régime professionnel — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Théorie générale de la) — Trois piliers.
Pierre-Yves Greber
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Sécurité sociale (Codification de la )
Les systèmes nationaux de sécurité sociale reposent généralement sur un ensemble de lois et d’ordonnances, adoptées à diverses périodes et qui sont plus ou moins coordonnées. Telle est la situation en Suisse. L’idée de codification consiste à rationaliser ces normes et à élaborer un Code de la sécurité sociale. Un tel instrument juridique définit le système, ses finalités, son organisation, ses règles communes et il contient ensuite des parties spécifiques consacrées aux différentes formes de protection (soins de santé, etc.). La codification suppose une vision d’ensemble. La France a un Code de la sécurité sociale. La Suisse n’a pas de Code et elle n’a adopté qu’une Partie générale du droit des assurances sociales.
R. Conseil de l’Europe, Rationalisation et simplification des systèmes de sécurité sociale, Strasbourg, 1987. — J.-J. Dupeyroux, Droit de la sécurité sociale, 13e éd., par Rolande Ruellan, Dalloz, Paris, 1998. — P.-Y. Greber, “ Simplification et rationalisation des systèmes de sécurité sociale ”, in : La sécurité sociale en Europe et en Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 1996, pp. 45 ss.
Voir : Sécurité sociale — Sécurité sociale (Architecture de la).
Pierre-Yves Greber
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Sécurité sociale (Environnement de la)
Un système de sécurité sociale, en Suisse comme dans les autres pays, repose sur un ensemble de règles juridiques (Constitution, lois, ordonnances du Gouvernement, règlements de certaines caisses, le tout éclairé et précisé par la jurisprudence des tribunaux et par la pratique). Il comprend des institutions, publiques ou privées (pour la perception des ressources, le service des prestations) et il organise des flux financiers, de plusieurs provenances (collectivités publiques, employeurs, travailleurs, individus, placements), sources (cotisations, fiscalité directe/indirecte, intérêts) et administrés selon des techniques (répartition, capitalisation, systèmes mixtes).
Mais un tel système s’inscrit aussi dans un environnement - c’est-à-dire une réalité politique, sociale, économique et culturelle - avec lequel il entretient un jeu d’influences réciproques. Cet environnement comprend : les besoins de protection (ils évoluent p. ex. selon les progrès de la médecine et des sciences, le vieillissement, les situations familiales, l’emploi), les valeurs généralement reconnues (elles jouent un rôle sélecteur et pondérateur : sécurité d’existence, solidarité, égalité), les données économiques (marquées actuellement par la mondialisation, la précarisation des emplois et le chômage), les données démographiques (caractérisées par l’allongement de la vie, l’augmentation des personnes très âgées, les migrations), les débats et les choix politiques (social-démocratie, libéralisme social ou néo-libéralisme).
L’environnement des systèmes de sécurité sociale a fortement varié : ces derniers ont émergé dans l’après-guerre, ils ont ensuite bénéficié d’une croissance économique marquée dans les pays industrialisés ; le climat a changé et il est caractérisé par une série de mutations profondes. Dans tous les pays, les systèmes de sécurité sociale sont d’avantage sollicités (augmentation du coût des soins, fragilisation des familles, dépendance, allongement de la vie, montée des travaux atypiques, chômage, précarité), alors qu’une stabilisation voire une réduction de leurs dépenses est recherchée (pour des raisons politiques et de concurrence internationale). La protection garantie atténue les effets des mutations et contribue largement au maintien de la paix sociale.
R. Association internationale de la sécurité sociale, Développements et tendances de la sécurité sociale, 1996-1998. — J.-J. Dupeyroux, Droit de la sécurité sociale, 13e éd., par Rolande Ruellan, Dalloz, Paris, 1998. — La sécurité sociale en Europe à l’aube du XXIe siècle, Helbing & Lichtenhahn, Basel/Frankfurt am Main, 1996. — J.-P. Fragnière (Éd.), Repenser la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Voir : Protection sociale — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Théorie générale de la)
Pierre-Yves Greber
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Sécurité sociale (Généralisation de la)
La généralisation se rapporte au champ d’application personnel des systèmes et régimes de sécurité sociale. Le terme a un contenu qui varie selon les auteurs. Le sens le plus clair, marquant une distinction à l’égard de l’universalité, consiste à relier ce concept à un critère professionnel. Ainsi, deux stades peuvent être caractérisés : 1. une généralisation à tous les travailleurs salariés (cas, p. ex., en Suisse de l’assurance-accidents et de l’assurance-chômage) ; 2. une généralisation à l’ensemble des travailleurs salariés et indépendants (non réalisée en Suisse). Certains auteurs utilisent cependant le terme de généralisation comme un synonyme de l’universalité.
R. P.-Y. Greber, Les principes fondamentaux du droit international et du droit suisse de la sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1984, pp. 94 ss.
Voir : Affiliation obligatoire — Champ d’application personnel — Régime professionnel — Sécurité sociale — Universalité
Pierre-Yves Greber
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Sécurité sociale (Théorie générale de la)
La théorie générale de la sécurité sociale porte sur les principes fondamentaux, les notions essentielles, les grands problèmes. Elle est constamment nourrie par le droit international, le droit émanant d’entités régionales (singulièrement la Communauté européenne et le Conseil de l’Europe), les droits nationaux, qu’elle ne manque pas, à son tour, d’influencer.
Parmi ses domaines, il convient de citer : les principes fondamentaux ou directeurs (le droit à la sécurité sociale ; la garantie des soins de santé, les garanties d’un revenu de remplacement et de ressources de base, la garantie d’insertion et de réinsertion ; le principe de l’égalité de traitement, le principe de la solidarité, le principe de l’affiliation obligatoire, la responsabilité de l’État et la participation) ; l’approche classique (ou analytique) et fonctionnelle ; l’intégration et la mutation des modes de protection ayant précédé la sécurité sociale ; l’architecture des systèmes ; l’environnement de la sécurité sociale ; la recherche d’un financement efficace et équitable.
La théorie générale implique une analyse en profondeur : elle montre que la sécurité sociale est un élément de civilisation, un instrument au service des êtres humains, qui cherche à concilier le besoin de protection et l’incertitude de la condition humaine. Elle ne consiste pas en une sorte de spéculation ou de jeu pour intellectuels : les éléments qu’elle révèle sont au cœur de la sécurité sociale, ils doivent donc être considérés lors de toute révision, quelle soit menée sur le plan international, régional ou national, quelle soit globale ou sectorielle. Au risque sinon de défigurer ou de détruire cette conquête de civilisation.
R. W. Beveridge, Social Insurance and Allied Services, His Majesty’s Stationery Office, London, 1942. — Bureau international du Travail, La sécurité sociale à l’horizon 2000, BIT, Genève, 1984. – J.-J. Dupeyroux : Droit de la sécurité sociale, 13e éd., par Rolande Ruellan, Dalloz, Paris, 1998. — P. Durand, La politique contemporaine de sécurité sociale, Dalloz, Paris, 1953. — G. Perrin, Histoire du droit international de la sécurité sociale, Association pour l’étude de l’Histoire de la Sécurité Sociale, Paris, 1993.
Voir : Sécurité sociale — Sécurité sociale (Architecture de la) — Sécurité sociale (Environnement de la).
Pierre-Yves Greber
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Segmentation (du marché du travail)
Processus de séparation du marché du travail en deux segments principaux plus ou moins hermétiques. Les emplois localisés dans le secteur primaire du marché du travail sont caractérisés par de hauts salaires et des rendements élevés sur le capital humain accumulé. A ces avantages, viennent encore s’ajouter la sécurité de l’emploi, une bonne protection sociale et des perspectives de carrière attractives. Ce secteur est composé surtout de firmes de grande taille qui ont constitué des marchés internes du travail. A l’opposé, le segment secondaire est caractérisé par des emplois mal rémunérés, d’une durée limitée et offrant une protection sociale réduite. De surcroît, le taux de chômage recensé dans le segment secondaire du marché est supérieur à celui observé dans le segment primaire. Finalement, le taux de rotation y est très élevé en raison des conditions de travail peu attractives et de l’absence de toute perspective de carrière. Cette segmentation du marché du travail ne peut se perpétuer que s’il existe des barrières légales, institutionnelles ou économiques empêchant les travailleurs de changer de segment pour tirer profit des différences apparentes entre ces deux parties du marché. De surcroît, les emplois localisés dans le secteur primaire sont rationnés ce qui réduit encore la mobilité des travailleurs entre les deux segments. Cette structure du marché du travail suscite l’apparition d’un chômage involontaire persistant qui forme en quelque sorte le troisième segment d’une économie compartimentée. Parmi les barrières susceptibles de scinder le marché du travail en différents segments, on peut citer notamment le système de permis de travail mis en place par la Suisse à l’encontre de la population étrangère. Ce mécanisme réduit la mobilité sectorielle des travailleurs immigrés qui obtiennent une autorisation de travail limitée au secteur et à la région pour lesquels le permis a été attribué. Des analyses faites en Suisse démontrent ainsi que la population active étrangère est largement confinée dans le segment secondaire du marché. Cette conclusion doit être quelque peu affinée en précisant que les ressortissants des pays de l'Europe de l'Ouest sont en majorité concentrés dans le segment primaire alors que les immigrés provenant des pays traditionnels (Espagne, Italie, Portugal, ex-Yougoslavie) sont largement sur-représentés dans le compartiment secondaire. Malgré le nombre d'années écoulées depuis leur arrivée en Suisse, ils restent “ prisonniers ” du segment secondaire du marché du travail. Cela confirme qu'il existe sans doute peu de mobilité ascensionnelle entre les deux segments du marché.
R. A. de Coulon, Y. Flückiger, “ Analyse économique de l’intégration de la population étrangère sur le marché suisse du travail ”, in : Les défis migratoires, sous la direction de P. Centlivres et I. Girod, Seismo, Coll. Cohésion sociale et pluralisme culturel, Zurich, 2000, pp. 109-119.
Voir : Chômage — Flexibilité du travail — Inégalités et discriminations salariales — Marché du travail — Migrations (Politique des) — Salaire
Yves Flückiger
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Seismo (Éditions)
Créées sous les auspices de la Société Suisse de Sociologie, les éditions Seismo publient (en allemand et en français) des travaux précieux pour la connaissance de la politique sociale. Ils sont diffusés par Albert le Grand S.A.
Site Internet : www.seismoverlag.ch
Voir : Albert le Grand S.A.
jpf
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Sélectivité
La sélectivité des prestations de sécurité sociale, appelée aussi ciblage, consiste à n’octroyer la protection qu’après un examen des revenus et de la fortune. Seul celui qui se trouve en dessous des limites définies (plus ou moins strictement) par une législation recevra les prestations. L’idée est de concentrer l’aide sur ceux qui en ont le plus besoin. La sélectivité s’oppose ainsi aux protections inconditionnelles. En Suisse, les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité sont fondées sur la sélectivité.
L’utilisation de la sélectivité fait l’objet de grands débats à cause des difficultés financières de beaucoup de régimes de sécurité sociale et sous la pression des néo-libéraux. La question est complexe : où placer les limites de ressources, comment éviter de décourager les efforts personnels, comment et jusqu’où exercer un contrôle, qu’en est-il de l’appui des populations à de telles protections ?
R. P. Gilliand (Éd.), Pauvretés et sécurité sociale, Réalités sociales, Lausanne, 1990. — J. Schulz, “ Le débat continue : sélectivité, oui, mais jusqu’où ? ”, in : La sécurité sociale demain : permanence et changements, AISS, Genève, 1995, pp. 45 ss.
Voir : Ciblée (Politique)  Désaffiliation  Minimum vital (Garantie du)  Pauvreté  Prestations complémentaires (PC)
Pierre-Yves Greber
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Sénescence àð Vieillesse
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Sénilité
Terme méprisé par les professionnels en gérontologie car particulièrement péjoratif. Il est particulièrement négatif voire vulgaire. En effet, il associe à la notion d'âge caduc, celles de décrépitude, déliquescence, déchéance et de gâtisme.
Sur le plan psychologique, la sénilité se manifeste, en effet, par une inertie intellectuelle, des troubles de la mémoire, une perte d'adaptabilté, une labilité émotionnelle dont résulte un désengagement social.
Sur le plan médical, le mot sénilité sous entend les adjectifs faible, abattu, disgracieux, déficient voire impotent et surtout ceux de mentalement ramolli ou atteint d'une maladie cérébrale dégénérative.
La sénilité correspond à l'aspect le plus défavorable du vieillissement pathologique.
Pourtant ce terme ne correspond à aucune entité pathologique et donc il n'y aucun critère diagnostique applicable.
Il ne faut plus utiliser ce mot “ sénilit頔 qui correspond de plus en plus à un terme injurieux.
Il faut lui préférer les mots vieillesse, vieillissement voire même celui de sénescence, qui a déjà une connotation fort négative (voir définitions dans ce dictionnaire).
Site Internet : www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Jean-Pierre Michel
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Seniors 
Terme fréquemment utilisé de nos jours pour les personnes de plus de 55 ans. Le terme de seniors désigne aussi les jeunes rentiers/rentières AVS. Il est considéré comme moins négatif que “ vieux ”.
François Höpflinger
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Service cantonal de recherche et d’information statistiques (SCRIS)
Le SCRIS est un service de l’administration cantonale vaudoise composé de 25 personnes. Sa mission est de collecter, traiter et analyser des données statistiques dans le but de les mettre à disposition des autorités cantonales, des communes, des milieux scientifiques, de l’économie, des partenaires sociaux, des médias et des particuliers. L’information statistique disponible porte principalement sur le canton de Vaud mais aussi sur la Suisse. Elle s’étend à des domaines aussi variés que la population, l’économie, les finances publiques, la santé, la vie sociale, l’espace, l’environnement, l’énergie, l’enseignement, la formation professionnelle, la vie politique. Cette information contribue à la connaissance et à l’analyse des phénomènes collectifs et de leurs évolutions. Le SCRIS réalise l’Annuaire statistique du canton de Vaud depuis 1977 ; il publie NUMERUS, courrier statistique de 8 à 12 pages paraissant 7 fois par an, dont l’objectif est de commenter les résultats d’enquêtes récentes. Le SCRIS réalise également des Études qui sont le résultat d’un travail d’analyse commenté et illustré sur un sujet particulier.
Sites Internet : www.unil.ch/BCU/docs/region/bib_vd/bib_spe/scris. htm — www.statistik.admin.ch/findex.htm
Voir : Office fédéral de la statistique — Statistique sociale
Jean Campiche
[Des services analogues, plus ou moins développés, existent dans de nombreux cantons ; le SCRIS est un exemple significatif. Réd.]
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Service de la dette
Total des paiements d'intérêts et des remboursements du principal afférents aux dettes extérieures publiques et aux emprunts garantis par l'État. La dette d'une nation envers les prêteurs de l'étranger n'est pas exclusive au gouvernement central; elle comprend celle contractée par les autres collectivités publiques. Une dette extérieure élevée signifie qu'une partie de moins en moins importante du revenu national et des encaisses fiscales revient au trésor, parce qu'un montant de plus en plus élevé sert à payer des intérêts aux prêteurs étrangers.
Dans certains pays, par exemple en Afrique de l'Ouest, région qui est la plus endettée, la dette représente 135 % du PIB (produit intérieur brut) et son service près de 70 % des recettes d'exportation et 46 % des recettes fiscales. 41 pays en développement jugés "pauvres et très endettés" (PPTE / HIPC) étaient en 2001 au bénéfice d'un programme de désendettement portant sur 30 milliards de dollars (les besoins étant estimés à quelque 100 milliards). La dette de ces pays est passée selon la Banque mondiale de 141 à 214 milliards de dollars entre 1989 et 2001.
Voir : Banque mondiale — Développement durable — Fond monétaire international (FMI) — Indice de développement humain
Jacques Martin
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Service médico-social
Le terme de “ service médico-social ” couvre deux grands types d’institutions ambulatoires œuvrant dans le domaine sanitaire et social : les services spécialisés de ligues et associations et les services de soins et d’aide à domicile.
Il en résulte une relative ambiguïté de la définition du champ des prestations et des professionnels engagés. Une mise en perspective historique explique la diversité des réalités et des perceptions de l’intervention sociale que recouvre l’appellation.
I Aspects historiques
1. A Londres, Bordeaux, Paris en 1910-1915 apparaissent les premières infirmières visiteuses. Elles se donnent pour objectif de participer à la lutte contre la tuberculose, la mortalité infantile et au dépistage des maladies et des tares. De ce courant sont issues les ligues de santé luttant contre les maladies dites sociales. Bras exécutif de la médecine, à l’origine, les services médico-sociaux spécialisés ont développé dès les années 70 une approche pluridisciplinaire des problèmes.
2. Au début des années 70, l’accroissement des coûts de la santé a mis en évidence la nécessité de créer des services médico-sociaux extra-hospitaliers, appelés à faciliter le retour à domicile des patients. Selon les contingences historiques et régionales, ces services se sont constitués avec un statut juridique public ou privé. La construction initiale présentait sous diverses formes deux constantes : une logique allant de l’hôpital au domicile et un personnel de base essentiellement infirmier. Ce modèle s’est progressivement transformé pour développer sa propre approche des problèmes socio-sanitaires, dont les caractéristiques principales sont :
— Une logique allant du domicile à l’hôpital.
— Un système d’intervention pluridisciplinaire.
— Une action fondée sur une définition large de la santé (cf. définition OMS) dépassant le concept trop étroit de maladie.
II Situation actuelle
Les services médico-sociaux ne sont pas tous au même stade de développement et restent plus ou moins liés au modèle originel. Cependant, tous suivent les mêmes tendances.
1. Services spécialisés
— Glissement progressif du champ médical vers le social, la psychologie et le renforcement de l’action préventive.
— Professionnels engagés : assistants sociaux, éducateurs, psychologues, infirmières en santé publique.
2. Services généralistes d’aide et de soins à domicile
— Glissement de l’intervention curative vers une approche socio-sanitaire, sur la base d’un concept de santé élargi au champ relationnel, économique, voire culturel.
— Professionnels engagés : infirmières en santé publique, auxiliaires de la santé, aides familiales, aides au foyer, assistants sociaux, ergothérapeutes, diététiciennes.
Les prestations d’un service médico-social “ généraliste ” vont des soins infirmiers à l’aide au ménage, de l’ergothérapie à l’aide sociale, de l’éducation à la santé au service de repas à domicile, à la mise en place de permanences d’appel, ou encore à l’organisation de réseaux d’appui bénévoles. Les prestations devraient idéalement être assurées 24/24 heures et 7/7 jours.
Conclusion
L’histoire des services médico-sociaux spécialisés ou généralistes résume le rapport nécessaire et contesté du sanitaire et du social, la quête d’identité des professionnels concernés, et met en évidence les processus d’apprentissage d’un travail pluridisciplinaire plus orienté vers les besoins de la personne que vers la description clinique de ses déficiences.
Voir : Politique de la santé — Soins et aide à domicile
Simon Darioli
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Service social de l’armée
Le service social de l’armée vient en aide aux militaires dans les écoles et les cours qui, à cause de leurs obligations militaires, sont en butte à des difficultés d’ordre personnel, professionnel ou familial ; aux survivants de militaires décédés au service ou des suites d’une maladie ou d’un accident survenus au service ; aux patients militaires.
Le service social de l’armée favorise également la création d’activités pour le bien des militaires ou de la troupe.
L’aide est apportée sous forme d’information, de conseils, d’assistance, de médiation et de prestations financières. Les moyens financiers à la disposition du service proviennent intégralement d’attributions faites par des institutions d’entraide.
Adresses : Service social de l’armée, Monbijoustrasse 51A, 3003 Berne
Pour la Suisse romande : Bat. La Pontaise, CP 146, 1018 Lausanne
Site Internet : www.mil.be/sociocult/fr/sociaal_f. asp
Pierre Thétaz
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Service social international (SSI)
Le Service social international est une organisation non gouvernementale (ONG) formée d’un réseau mondial de correspondants dans plus de 140 pays.
La Fondation suisse du Service Social International est une branche nationale du réseau mondial. Son but est d’offrir une aide sociale et juridique à ceux qui rencontrent des difficultés consécutives à une migration volontaire ou forcée.
La Fondation intervient :
— pour des personnes ou des familles dont les problèmes nécessitent une intervention sociale coordonnée dans au moins deux pays différents ;
— pour des étrangers en Suisse qui rencontrent des difficultés liées à leur statut dans le pays. Elle apporte une contribution à la prévention et à l’information relatives aux conséquences sociojuridiques des migrations.
La Fondation suisse du Service Social International est soutenue par les pouvoirs publics avec qui elle entretient des rapports de complémentarité. Elle agit aussi à la demande de collectivités privées et de particuliers.
Site Internet : www.iss-ssi.org/fre
Voir : Migration  Organisation non gouvernementale (ONG)  Travail social
Madeleine Duvoisin
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Seuil d'intervention àð Impôt négatif
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Sida  VIH
L apparition du VIH/sida pose une multitude de problèmes d ordre social, politique et éthique. Il est à la fois un risque sanitaire et un risque social par la création des peurs et des exclusions. En plus, le VIH/sida représente une mise à l’épreuve des capacités organisationnelles de nos sociétés à répondre rapidement à des menaces imprévues dans une situation d’incertitude. L’apparition du VIH/sida a innové l’action étatique : l’administration publique a dû développer des compétences d’action orientées vers les risques sociaux, l’action étatique a dû s’ouvrir à des groupements sociaux normalement exclus de la création et de la mise en œuvre de politiques (tels que les groupements homosexuels), enfin, le VIH/sida a innové substantiellement les contenus des politiques de la santé publique passant de conceptions de médicalisation à des conceptions de prévention et en introduisant l’orientation à la réduction des risques dans le champ des drogues illégales.
R. S. Cattacin, C. Panchaud, en collaboration avec V. Tattini, Du Risque à la Normalisation. Les politiques de lutte contre le VIH/sida en Europe de l’Ouest, L’Harmattan, Paris, 1996.
Voir : Éducation pour la santé — Politique de la santé — Prévention — Santé communautaire — Toxicomanies
Sandro Cattacin
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Social
En dehors, par exemple, d’expressions faisant partie du vocabulaire des affaires (raison sociale), de celui de la politique (social-démocratie) et de celui des sciences naturelles (insectes sociaux), ce mot s’applique à des aspects des rapports humains, envisagés à deux points de vue.
a) Celui des idées et des activités ayant pour objet l’amélioration du sort de toute la population ou de certaines catégories de ses membres, à commencer par les plus démunis et les plus souffrants. Ces idées et activités sont orientées par des jugements de valeur d’essence morale (ou éthique, terme synonyme) explicites ou non, consensuels sur certains points, différents ou divergents sur d’autres, concernant la nature des formes de bien-être à promouvoir, les exigences de l’équité et celles de la solidarité, celles de la compassion, les situations appelant des interventions, les priorités à admettre quand des choix s’imposent pour une utilisation optimale des ressources, etc. Exemples : justice sociale, doctrines sociales, droits sociaux, législation sociale, le social (par opposition à l’économique et au politique), progrès social, problèmes sociaux, inégalités sociales, action sociale, politique sociale, État social, budget social, transferts sociaux, sécurité sociale, travailleurs sociaux, logements sociaux.
b) Au deuxième point de vue, il s’agit de dénominations courantes ou plus techniques ne faisant pas intervenir des jugements du type ci-dessus. Exemples : fait social, corps social, groupe social, conditions sociales, relations sociales, classes sociales, conflits sociaux, changement social, rapports sociaux, interactions sociales, système social, structures sociales, distances sociales, statut social, stratification sociale, mobilité sociale, sciences sociales, psychologie sociale, indicateurs sociaux.
R. J. Brémont, A. Gélédan, Dictionnaire économique et social, 5e édition augmentée, Hautier, Paris, 1993. — A. Piettre, Article “ Social ”, du Dictionnaire des sciences économiques, publié sous la direction de Jean Romeuf, 2 volumes, PUF, Paris, 1956-1959.
Voir : Action sociale — Politique sociale — Travail social
Roger Girod
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Socialisation
Processus par lequel les individus identifient, apprennent, expérimentent et intériorisent les valeurs, normes et codes symboliques de leur groupe social.
Ces acquisitions de manières de faire, de penser et d’agir sont autant formatrices de la personnalité de chacun qu’indispensables à la cohésion et à la stabilité de l’ensemble social d’appartenance.
La socialisation implique donc, pour chaque acteur, qu’il s’adapte au système social dans lequel il vit tout en s’en distançant suffisamment pour construire sa personnalité propre, ce double mouvement pouvant être source de tensions.
Dans cette perspective, la socialisation s’oppose au conditionnement, au dressage et à la contrainte.
On distingue généralement socialisation primaire — correspondant à la période de l’enfance — et secondaire — suite de la vie — la seconde remettant fréquemment en cause les valeurs intériorisées durant la première.
R. G. Bateson, Vers une écologie de l’esprit, T. I, Seuil, Paris, 1977. — P. Berger, T. Luckmann, La construction sociale de la réalité, Méridiens Kreincksieck, Paris, 1986. — F. Dubet, D. Martucelli, “ Théories de la socialisation et définitions sociologiques de l’école ”, in : Revue française de sociologie, 4, 1996. — A. Kardiner, L’individu dans la société, Gallimard, Paris, 1969. — R. Linton, Le fondement culturel de la personnalité, Dunod, Paris, 1959. — G.-H. Mead, L’esprit, le soi et la société, PUF, Paris, 1950. — J. Piaget, Le jugement moral chez l’enfant, PUF, Paris, 1957.
Voir : Acculturation — Contrôle social — Éducation/Socialisation — Instruction publique
Jean-Claude Wagnières
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Société civile
Dans les débats politiques récents, la société civile tend à être présentée comme le lieu des forces créatives des forces de la société qui ne sont pas engagées dans les partis politiques ou les structures d’État. Cette acception a évidemment une connotation moralisante et manifeste une défiance à l’égard du monde politique et des pouvoirs publics.
En fait, elle s’inspire de la pensée de plusieurs auteurs, dont R. Dahrendorf. Pour lui, les aspects non politiques de l’ordre social contemporain sont prédominants. Les codes et les procédures, les organisations économiques et les instances sociales qui opèrent un fonctionnement en dehors de l’État font de la société civile l’élément primordial de la vie en société. C’est là que les hommes luttent, créent et progressent, malgré les contraintes, les obstacles, les adversités. C’est là qu’ils travaillent, seuls ou avec d’autres, pour se réaliser. C’est là que se déroule concrètement l’existence de chacun.
Voir : Démocratie (et politique sociale)
jpf
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Société des risques (Risk society)
Le sociologue allemand Ulrich Beck publie en 1986 un livre intitulé “ La société des risques ” et lance ainsi un large débat sur l’apparition de risques et de dangers jusqu’alors inconnus à l’homme, qu’il s’agisse de ceux liés aux grands appareils de production ou des biotechnologies. La thèse principale de Beck est que le progrès scientifique et technologique produit inévitablement et systématiquement des risques d’une nouvelle qualité, qui ne touchent pas seulement au bien-être et à la santé des personnes, mais - d’une façon nouvelle -aux systèmes écologiques et aux régulations naturelles. Comment peut-on alors prévenir, diminuer et banaliser ces risques pour qu’ils n’entravent pas le processus de modernisation et qu’ils ne dépassent pas le seuil de l’acceptable ? La gestion de ce paradoxe est, selon Beck, le problème central de la société des risques.
R. U. Beck, Risikogesellschaft : auf dem Weg in eine andere Moderne, Suhrkamp, Frankfurt a.M., 1986 — U. Beck, “ De la société industrielle à la société à risques : problématique de la survie, structures sociales et éveil d'une conscience écologique ”, in : Revue suisse de sociologie 19(2), 1993, pp. 311-337.
Voir : Éventualité — Risque — Risques sociaux
Carine Bachmann
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Société duale
Quand on parle de “ dualisation ”, on entend évoquer deux phénomènes complémentaires. D’abord, l’économie duale. C’est-à-dire les grandes firmes multinationales (le système central), avec leur relais du niveau national ; l’ensemble évoluant dans une sphère mondiale à côté des entreprises périphériques vouées à la dépendance et à la sous-traitance, à la précarité, allant jusqu’à une certaine clandestinité (économie souterraine, travail noir, etc.).
Mais aussi, la société duale, c’est-à-dire d’un côté les emplois stables protégés, intéressants et mieux payés ; de l’autre, des emplois instables, précaires, de nouvelles formes de travail à la tâche, des emplois intérimaires, temporaires, contractuels, à temps partiel… Les deux réalités ne se recoupent pas totalement. Il y a toute la complexité liée à l’interdépendance des deux secteurs. Ce qu’il faut mettre en évidence, c’est le développement du phénomène. Le processus a des liens évidents avec le développement de la mondialisation/multinationalisation. Un sous-ensemble adapté aux technologies nouvelles, intégré à l’espace mondial, fait d’hommes “ modernes ”, aptes à manier l’informatique et les techniques de pointe ainsi que les langues étrangères, passant une partie de leur vie à l’étranger. Un sous-ensemble incarnant l’héritage de nos traditions culturelles, constitué d’organisations isolées de la concurrence internationale, faisant pénétrer plus lentement les technologies modernes, d’institutions de redistribution, d’hommes moins hostiles, d’un revenu moindre, mais d’un mode de vie plus convivial et plus classique.
Cette vision des choses se développe de plus en plus et se pare volontiers des mérites du réalisme. Elle constitue une solution tentante pour faire face à l’évolution de la société moderne. Mais, au-delà des mirages, le réalisme devient vite renoncement et annonce une nouvelle dérive inégalitaire inacceptable.
La théorie de la société duale doit être replacée dans le champ des critiques de l’État-providence. Le social, frein à l’économie, engendre des rigidités institutionnelles et des charges financières qui bloquent le dynamisme et la souplesse d’adaptation du marché. Mais il paraît douteux que le secteur convivial puisse être à la fois à l’abri du choc de la compétition et, en même temps, hors de la dépendance et de la tutelle de l’autre secteur.
Il est clair que la plus grande pente de la société duale mène à une société inégalitaire, ségrégative et hiérarchisée. Elle ne constitue donc qu’un leurre, un mirage par rapport auquel il est nécessaire de prendre quelques distances.
R. D. Clerc, e. a., La crise, Syros, Paris, 1983. — A. Gorz, Adieux au prolétariat, Galilée, Paris, 1980.
Voir : Désaffiliation — Flexibilité du travail — Pauvreté — Postfordisme — Société postindustrielle — Temps partiel — Travail (Nouvelle forme de)
jpf
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Société industrielle
Dans la société industrielle, l’essentiel des ressources matérielles et humaines est mobilisé en vue de la production économique organisée dans le cadre de l’entreprise industrielle. L’accumulation du capital est conçue comme le moteur de l’activité technologique et économique dont le projet global est la maîtrise de l’environnement naturel et du monde humain, dont la justification idéologique sont le progrès et le bien-être. Cette forme de société se constitue dans la seconde moitié du XVIIIe siècle en Angleterre puis sur le continent européen, à la suite de la première révolution industrielle et du machinisme.
La société industrielle constitue un système dynamique, producteur de changements selon un rythme qui tend à s’accélérer. Un des moteurs tient dans la chaîne liant science (quelle est la nature d’un phénomène ?), technologie (à quoi une connaissance peut-elle servir ?) et économie (quel profit peut-on retirer d’un savoir-faire ?). Un autre réside dans la coexistence de deux valeurs antagoniques affirmées dans les chartes des grandes révolutions politiques du XVIIIe siècle ; la liberté, comme principe de la connaissance, de l’initiative et de la créativité ; l’égalité, incitation à une meilleure répartition des diverses formes de richesse, étendard de la plupart des mouvements sociaux des deux derniers siècles. La tentative d’édification d’une société industrielle socialiste (“ les soviets plus l’électricit頔, selon la formule de Lénine) en supprimant la tension entre ces deux valeurs cardinales au profit de l’égalité, a conduit non pas, comme l’espérait Marx, au dépérissement de l’État dans une société sans classe, mais au contraire au développement tentaculaire d’une nomenclature générant l’implosion de ce système au cours des années 1980. Dans les pays d’Europe occidentale, l’élargissement de la démocratie, l’expérience des guerres et des crises ont conduit au cours du siècle à l’élaboration d’un principe de solidarité exprimé dans la sécurité sociale, dont la gestion est confiée à l’État. Ce principe n’élimine pas l’inégalité mais garantit le droit à une existence décente de ceux qui sont précipités dans des situations légitimes d’empêchement de travailler : maladie, accident, infirmité, vieillesse, comme aussi service de la patrie.
La dynamique des sociétés industrielles les pousse à se projeter dans le temps en aspirant à maîtriser l’avenir, et dans l’espace en se constituant en centre d’un système planétaire basé sur l’échange inégal. Sur le plan interne, ces sociétés ont développé une structure sociale fondée sur la position des individus dans le système économique ; dans leur première période, marquée par le développement du secteur secondaire (industriel) se distinguaient des ensembles clairement différenciés, appelés classes (bourgeoisie, classe ouvrière, paysannerie, domesticité, artisans et commerçants, etc.). La tertiarisation ultérieure d’une économie qui fait une part de plus en plus grande aux services a entraîné la généralisation du salariat et le développement d’une structure centrée sur les classes moyennes. Mais dans un cas comme dans l’autre, le travail fournit le substrat de l’échange entre les individus et la société. Il est avec le capital le principal facteur de production de la richesse mais en plus, pour la grande majorité, il est l’unique principe de la redistribution de cette richesse et de la survie. Marqueur du statut et de l’identité individuels, il est aussi le régulateur du temps, du temps quotidien comme de celui du cycle de vie. Enfin, il s’inscrit au cœur de sa culture, la société industrielle ayant produit un grand récit épique — évoquant par exemple la figure de Prométhée — qui fait du travail le lieu d’accomplissement de la vie en associant chacun à son projet conquérant et civilisateur.
R. R. Aron, Dix-huit leçons sur la société industrielle, Gallimard, Paris, 1962. — D.-S. Landes, L’Europe technicienne ou le Prométhée libéré, Gallimard, Paris, 1975 (1er éd. angl. 1969). — Nouvelle histoire de la Suisse et des Suisses, vol. II-III, Payot, Lausanne, 1983.
Voir : Industrialisation — Sécurité sociale — Société postindustrielle — Travail
Christian Lalive d’Épinay
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Société postindustrielle
L’expression est apparue dès la fin des années cinquante dans l’œuvre d’analystes comme Riesman, Bell et Touraine. Selon ces auteurs, elle désigne une période historique nouvelle qui succède à la société industrielle, période caractérisée par un déplacement de l’activité économique des biens de production vers les services et les biens de consommation, par les révolutions technologiques du pétrole, de l’atome et des télécommunications, par le démarrage d’une ère de croissance économique soutenue et de plein emploi, par la généralisation du salariat et des classes moyennes, par l’avènement d’une “ société d’abondance ” (Galbraith) qui ménage une place croissante au temps libre, aux loisirs et à la consommation, par le développement de l’État-providence, enfin par le déclin d’un éthos du travail et du devoir (Weber) et l’avènement d’une culture centrée sur l’individu et son épanouissement.
Avec du recul, on se demande s’il s’agissait bien alors de l’avènement d’une formation sociétale nouvelle, et non pas plutôt de la phase ultime de la société industrielle qui, après deux siècles d’activité acharnée, produisait enfin ce qu’elle promettait depuis toujours : l’abondance et le bien-être ? Ne serait-ce pas plutôt la période de stagnation et d’incertitude qui caractérise les anciens pays industrialisés du bassin atlantique depuis la fin des années septante qui marque la véritable fin de la société industrielle et l’annonce d’une société dont le qualificatif de postindustrielle atteste qu’on n’en connaît guère le contour tout en prenant acte qu’il ne sera plus celui de la société de notre passé immédiat ?
Dès le milieu des années soixante-dix, la croissance se fait erratique et surtout, sa courbe et celle de l’emploi cessent de coïncider. En effet, l’innovation technologique permet une amélioration de la productivité qui déséquilibre le rapport entre capital et travail, au désavantage du second déjà fragilisé par la délocalisation du marché du travail. La révolution de l’informatique et des communications transforme les modes de production et les situations de travail ; le salariat et les protections qui lui sont associées sont mis en cause, engendrant précarité et disqualification pour de larges secteurs de la population. Parallèlement, l’effondrement du “ deuxième monde ” communiste marque une nouvelle étape de la mondialisation, caractérisée par une prépondérance du capital financier sans réel contrepoids. Enfin, le mode de développement techno-économique est mis en question par la prise de conscience de son impact sur l’environnement.
La crise qui s’installe est autant culturelle et politique qu’économique : perte de crédibilité des grands discours donneurs de sens et en particulier perte de la croyance selon laquelle l’alliance du travail et de la technique serait la matrice d’un avenir meilleur, mise en cause de l’État-providence, difficulté à imaginer de nouvelles utopies mobilisatrices.
La forme concrète que prendra la société postindustrielle dépendra des réponses apportées à quelques questions, dont celles-ci :
— Comment imaginer et réaliser une mondialisation non plus conçue en termes de centre et de périphérie, mais en ceux du partage sinon de l’abondance, du moins de ressources suffisantes ?
— Comment imaginer et réaliser un développement techno-économique respectueux du milieu naturel ?
— Comment asseoir le lien social et la solidarité collective, alors que le travail perd de plus en plus sa capacité à les assurer ?
R. A. Giddens, Les conséquences de la modernité, L’Harmattan, Paris, 1994 (1er éd. angl., 1990). — C. Lalive d’Épinay, Les Suisses et le travail, Réalités sociales, Lausanne, 1990 (trad. allemande, VdF, Zurich, 1991). — A. Touraine, La société postindustrielle, Denoël, Paris, 1969.
Voir : État-providence — État incitateur — Postfordisme — Société duale — Société industrielle
Christian Lalive d’Épinay et Jean-François Bickel
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Société suisse d’utilité publique (SSUP)
Organisation fondée en 1810, ayant pour but général la promotion de la cause de l’utilité publique et de la bienfaisance en Suisse, aussi bien sur le plan spirituel que matériel.
La SSUP s’est rendue propriétaire de la prairie du Grütli, dont elle a fait don à la Confédération. Elle a fondé l’Aide suisse aux montagnards.
La SSUP fut l’un des moteurs de la création de Pro Juventute, Pro Senectute, Pro Familia et Pro Mente Sana. Elle a également encouragé la création de la Société d’utilité publique des femmes suisses (300 sections). La section genevoise fut à l’origine du CICR.
Forte de 3'500 membres, dont 2800 membres individuels, la SSUP réunit des personnes et organisations s’engageant pour le développement social dans l’intérêt et au service de tous, pour un équilibre social et un soutien aux personnes défavorisées adapté à leur situation.
Ses partenaires sont les milieux politiques, économiques, scientifiques, éducatifs, culturels et le domaine social.
— Elle encourage et diffuse des idées novatrices et des projets-pilotes, seule ou en collaboration.
— Elle soutient diverses organisations sociales.
— Elle prend part aux débats politiques sur les thèmes relatifs à l’utilité publique et milite pour la propagation du sens des responsabilités sociales au sein de la population.
Ses moyens d’action sont notamment :
a) conférences et discussions au sein de l’assemblée générale, du comité central ou de commissions spécialisées ;
b) prises de position ou mémoires (révision du droit pénal des mineurs, libéralisation des jeux) ;
c) activité de son secrétariat central (2,4 postes);
d) édition d’une revue et autres publications sur des problèmes sociaux spécifiques ;
e) gestion de nombreuses fondations placées sous son administration.
Structures
Assemblée générale trisannuelle
Comité central (30 membres et 5 hôtes permanents) et Comité directeur (8 membres)
Secrétariat central à Zürich, gérant notamment une bibliothèque rassemblant tous les rapports d’activité de toutes les sociétés d’utilité publique cantonales, régionales et locales.
Activités et projets
— gestion de fonds et fondations accordant des aides individuelles, à destination contraignante ou non ;
— conduite du projet TikK, équipe d’assistance pour la prévention et la maîtrise des conflits interculturels (conseils, médiation, analyse de situation, recherche de solutions);
— action “ changer de camp ”, offrant aux cadres des entreprises et aux travailleurs sociaux la possibilité d’effectuer un stage dans le “ camp oppos頔.
Projets
— Rassemblement et diffusion de connaissances en matière de bénévolat et volontariat.
— Promotion de l’engagement social et de la responsabilité sociale des milieux de l’économie.
Informations
Secrétariat central : Schaffhauserstrasse 7, 8042 Zürich 6
Organisations locales ou cantonales : tous les cantons sauf JU, FR, VS et NW en Romandie : Bienne, Genève canton, Neuchâtel canton, Vaud.
Site Internet : www.sgg-ssup.ch
Voir : Association romande et tessinoise des institutions d’action sociale (ARTIAS) - Conférence suisse des institutions d’action sociaCSIAS)
Jean-Pierre Rageth
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Sociétés suisses d’employés (Fédération des) (FSE)
La Fédération des sociétés suisses d’employés (FSE) veut être l’organisation faîtière représentant les employés du pays. Fondée en 1918, la FSE est confessionnellement neutre et indépendante de tout parti politique. De structure fédérative, elle s’inspire des principes de la démocratie suisse. En 1997, la FSE compte neuf associations affiliées représentant plus de 120'000 membres. Depuis 1965, elle est également ouverte aux associations de fonctionnaires et d’employés des services publics. Elle comprend également des fédérations cantonales et régionales, voire locales, qui traitent plus particulièrement des problèmes spécifiques à un secteur ou à une région. Elle est appelée à prendre position sur toutes les questions importantes qui concernent des membres dans les domaines de la politique économique, du marché du travail, des conditions de travail, de la politique sociale et financière et de la protection des consommateurs et de l’environnement.
Voir : Syndicat
jpf
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Socio-économie
La socio-économie est une approche globale du comportement économique, où les dimensions humaine, culturelle, éthique, morale et écologique deviennent fondamentales. Elle s’inscrit dans une perspective interdisciplinaire et fait appel aux autres sciences sociales (sociologie, psychologie, philosophie, etc.) pour sortir la théorie économique de son impasse méthodologique, en cherchant de nouveaux instruments, à même d’intégrer les valeurs sociales, éthiques et écologiques dans l’analyse des faits économiques. C’est une science à la fois normative et positive, orientée vers la politique économique et vers la formulation de recommandations dans le domaine de la régulation sociale.
R. B. Bürgenmeier, La Socio-économie, Économie, Poche, Economica, Paris, 1994. — B. Bürgenmeier, Plaidoyer pour une économie sociale, Économie contemporaine, Economica, Paris, 1990.
Voir : Économie sociale — Éthique
Marie-Luce Délez
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Soins (Continuité des)
Critère de qualité et stratégie de réduction des coûts de la santé, la continuité des soins est une notion généralement mal définie et comporte plusieurs acceptions. Elle renvoie tour à tour à la nécessaire globalité de l’offre en soins (véritable continuum de la prévention aux soins curatifs et à la réhabilitation, ou alors offre couvrant tous les âges de la vie), à la coordination des activités des intervenants (professionnels ou organismes) impliqués dans les soins, ou encore à la disponibilité des soins 24 heures/24 et 7 jours/7.
Elle est un des objectifs visés par la création de réseaux de soins et, comme eux, suppose la complémentarité et la coordination entre prestataires de soins dans un but d’optimisation et d’efficience du système de santé.
Les moyens propres à éviter les ruptures de continuité, et en particulier la duplication inutile de certaines interventions dans les trajectoires de santé des individus sont, notamment, le carnet de santé, le dossier unique informatisé, les systèmes d'information, le référent ou coordonnateur de soins.
Voir : Coordination — Coûts de la santé — Prévention — Réseaux de soins — Réseaux de soins (Organisation)
Martine Rossel
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Soins de santé primaires
Les soins de santé primaires sont des soins de santé essentiels fondés sur des méthodes et une technologie pratiques, scientifiquement viables et socialement acceptables, rendus universellement accessibles aux individus et aux familles dans la communauté par leur pleine participation et à un coût que la communauté et le pays puissent assumer à chaque stade de leur développement dans un esprit d'autoresponsabilité et d'autodétermination. Ils font partie intégrante tant du système de santé national que du développement économique et social d'ensemble de la communauté. Ils sont le premier niveau auquel les individus, la famille et la communauté entrent en contact avec le système national de santé, rapprochant le plus possible les soins de santé des lieux où les gens vivent et travaillent, et constituent le premier élément d'un processus continu de protection sanitaire. Ils comprennent au minimum : une éducation concernant les problèmes de santé, la promotion de bonnes conditions alimentaires et nutritionnelles, un approvisionnement suffisant en eau saine et des mesures d'assainissement de base, la protection maternelle et infantile y compris la planification familiale, la vaccination contre les grandes maladies infectieuses, la prévention et le contrôle des endémies locales, le traitement des maladies et lésions courantes et la fourniture de médicaments essentiels. (Extraits de la définition de Alma Ata).
Voir : Coûts de la santé — Droit à la santé — Médicaments essentiels — Santé communautaire
Jacques Martin
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Soins et aide à domicile
Les soins et l’aide à domicile font appel à un ensemble de services, plus ou moins coordonnés entre eux selon l’époque et la région considérées. Ils comportent le plus souvent les soins infirmiers, les soins de base, l’aide au ménage et à la famille, ainsi que la distribution de repas à domicile.
Ils sont parfois complétés par un service de biotélévigilance, par des prestations de mobilisation ou de réadaptation, par une assistance pour démarches auprès du système de sécurité sociale ou encore, par un soutien psychiatrique de premier recours.
Enfin, les services à domicile s’appuient sur d’autres institutions pour des prestations de décharge, telles que les courts séjours ou l’accueil temporaire en établissement, pour un jour, une nuit ou un week-end.
Historiquement, les soins et l’aide à domicile étaient accomplis dans le milieu familial, au point d’être reconnus comme un devoir de la famille. Depuis la fin du XIXe siècle, la pratique évolue lentement et combine : soutien de la famille, entraide avec le voisinage par solidarité réciproque et intervention de services extérieurs professionnalisés.
Outre le devoir familial, la racine première des services à domicile est caritative. Les soins et l’aide se fraient un chemin dans le dédale des activités paroissiales. S’adressant aux plus démunis, ils reposent sur une gratuité, alimentée par les bienfaits des classes aisées. La deuxième origine est en rapport avec l’évolution de la domesticité, plus particulièrement, avec la rétribution des tâches familiales, destinée à libérer les femmes de la bourgeoisie d’une part de leurs obligations matérielles.
La troisième origine des services de soins et d’aide à domicile est plus moderne. Elle est le produit de la différenciation du réseau de soins. Elle est liée à l’évolution des traitements et de la conception de l’hôpital. Dans ce processus de transformation du système de santé, les soins et l’aide à domicile s’ouvrent une voie comme partenaires organisés du réseau de soins et acquièrent un statut d’autant plus important qu’ils sont efficients et que la pression économique est forte.
R. B. Bachelard e. a., Tout compte fait : synthèse des résultats, Expérience pilote, SCRIS, Lausanne, 1986. — M.-F. Collière, “ L’avenir du soutien à domicile et son financement ”, in : Soins, No 474, mars 1986. — A. Jamieson, Home care for older people in Europe, Oxford University Press, 1991. — N. Raffy-Pihan, L’hospitalisation à domicile : un tour d’horizon en Europe, aux États-Unis et au Canada, CREDES, Paris, 1994.
Sites Internet : www.hospvd.ch/public/ise/livres/sad.htm — www.spitexch.ch/f-intern.htm
Voir : Maintien à domicile (Quelques caractéristiques) — Organisme médico-social vaudois (OMSV) — Politique de la santé — Service médico-social
Bernard Bachelard
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Soins palliatifs
Les soins palliatifs sont des soins actifs, complets à des personnes gravement malades et de tous âges. Médecine et soins palliatifs valorisent, dans le temps qui reste, la meilleure qualité possible de vie grâce au contrôle des symptômes, principalement la douleur. Ces soins optent pour la vie, voient dans la mort un processus normal et donc ne hâtent ni ne retardent la fin. Pour l’équipe soignante, multidisciplinaire, la personne, prise en compte aux niveaux physique, psychologique, social, spirituel et relationnel forme un tout avec son entourage.
Rattaché à l’Hospice Movement né en Angleterre dans les années soixante, grâce à Cecily Saunders, ce mouvement connaît aujourd’hui deux orientations complémentaires : l’une, débordant la médecine strictement palliative, transforme la conception générale de tout soin en favorisant l’interdisciplinarité dans la relation soignant/soignant, soignant/soigné ; l’autre instaure une médecine plus complexe de fin de vie.
R. D. C. Saunders, (Dir.), Soins palliatifs : une approche pluridisciplinaire, Lamarre, Édisem, Paris, 1994. — C. Couvreur, Nouveaux défis des soins palliatifs. Philosophie palliative et médecines complémentaires, Savoirs et Santé, De Boeck, Bruxelles, 1995.
Sites Internet : www.fxb.org/palliative/cdi/syntheses_b3.html — www.iukb.ch
Voir : Gériatrie — Gérontologie — Soins et aide à domicile
Annie-Moria Venetz
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Solidarité
Elle exprime une relation entre personnes ou groupes sociaux ayant conscience d’une communauté d’intérêts. Elle entraîne une obligation morale de ne pas desservir les autres et de leur porter assistance. Par extension, on parle de politique de solidarité, de solidarité nationale, d’impôt de solidarité. La solidarité est une composante plus ou moins développée de presque toutes les dimensions de la politique sociale. L’assurance-vieillesse et survivants (AVS) est souvent citée comme un lieu exemplaire d’exercice de la solidarité.
Voir : Don — Réseaux de sociabilité — Solidarité entre générations — Solidarités (Devenir des)
jpf
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Solidarité entre générations
C’est l’un des principaux enjeux pour l’avenir de la sécurité sociale. Les jeunes qui atteignent aujourd’hui la maturité civique constituent la première génération qui aura connu un système presque complet d’assurances sociales. C’est aussi une génération qui entre dans la vie dans un lourd climat d’incertitude. Sera-t-elle prête à jouer le jeu de la solidarité ? Les premiers résultats d’études récentes sur les regards que ces générations portent l’une sur l’autre montrent que les “ jeunes aiment les vieux ” et réciproquement. Au moins dans la sphère de la vie quotidienne proche, la solidarité et le sens de la responsabilité ne semblent pas entamés par les avatars du siècle et de la conjoncture.
Les “ quadras ” en savent plus que leurs grands enfants sur les besoins réels d’un système de sécurité sociale. Ils manifestent plus d’ouverture à la diversité des situations. Ils sont plus sensibles aux accidents de la vie et donc généralement plus tolérants.
Leurs enfants expriment volontiers des élans généreux. Ils se déclarent prêts à assurer une vieillesse sereine à leurs grands-parents et à leurs parents. Ils peuvent être sévères contre l’injustice et les formes d’égoïsme qu’ils observent autour d’eux… chez les adultes.
En fait, leur générosité est teintée d’ignorance et de discriminations. Ils sous-estiment la réalité des problèmes sociaux, ils ne sont guère amènes avec les réfugiés ou “ celui qui est tombé par sa faute ”. Comme leurs parents, ils considèrent que la famille est au cœur de la protection sociale. Ils tendent à prôner la démarche individualiste pour assurer l’insertion sociale. En cela ils ne s’éloignent pas trop de la conception de leurs parents.
Deux préoccupations majeures structurent la pensée des deux générations. D’abord, un plébiscite pour le système AVS dont on sait qu’il contient une solide dose de solidarité. Ils semblent même prêts à l’étendre à d’autres régimes des assurances sociales, en particulier à l’assurance-maladie.
C’est la santé qui remporte la palme. Ce domaine est le monde des positions inconditionnelles. Il faut tout faire pour la garantir, et presque à n’importe quel prix. Cette “ chère sant頔 a de beaux jours devant elle.
Les positions ne sont pas monolithiques. Des différences significatives apparaissent entre les Romands et la Suisse alémanique, entre les gymnasiens et les apprentis, entre les fils de famille et ceux qui ont la vie dure. Le contexte régional influe également sur les attitudes comme d’ailleurs les choix politiques dominants. Cela se manifeste particulièrement en ce qui concerne les prestations offertes aux toxicomanes.
Ces observations invitent à relativiser les alarmismes qui fleurissent en période de crise. Le chantage à la fin des solidarités intergénérationnelles est à prendre pour ce qu’il est : une dimension de l’offensive contre la sécurité sociale. En revanche, on peut s’interroger sur la fragilité de l’information (et de la formation) sur des questions dont on mesure l’importance économique et politique.
R. A. Clémence, M. Egloff, N. Gardiol et P. Gobet, Solidarités sociales en Suisse, Réalités sociales, Lausanne, 1995.
Site Internet : www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Don — Génération — Solidarité — Vieillesse
jpf
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Solitude
La solitude est un sentiment subjectif éprouvé par quelqu’un qui se sent seul et qui le vit comme un manque, une absence douloureuse de liens. Ce sentiment ne découle pas simplement et uniquement d’un isolement réel objectif, car il peut aussi être éprouvé en présence d’un réseau relationnel important. Néanmoins, l’étude de la solitude ne peut être menée sans appréhender également les processus d’isolement social.
La psychologie associe la souffrance liée au sentiment de solitude à une élaboration insuffisante des angoisses de séparation et de perte, influencée par la prime enfance et par le parcours de vie. La représentation sociale négative qui, dans notre société, entoure la solitude et l’isolement est également une composante importante de la souffrance liée au sentiment de solitude. La solitude est un facteur de risque pour la santé et accroît les risques de dépression et le risque suicidaire ; par ailleurs, la dégradation de la santé et la perte d’autonomie augmentent le sentiment de solitude. Difficile à mesurer et quantifier, cette problématique complexe nécessite une approche pluridisciplinaire pour être appréhendée.
R. Groupe SOL, La solitude, ça s’apprend !, Ed. Georg, Genève, 1992. — Groupe SOL, Vivre sans elle, Ed. Georg, Genève, 1996. — C. Fry, Solitude et isolement : Approches pluridisciplinaires, Département de sociologie, Université de Genève, 2000.
Voir : Isolement
Colette Fry
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Sondage
Procédure d’enquête reposant sur l’observation, et le plus souvent l’interrogation, d’un nombre limité d’individus, appelés échantillon, sélectionnés selon une méthode représentative (par choix au hasard ou raisonnée au sein d’une population parente plus vaste). Le recours à cette technique a pris des proportions très importantes au cours des dernières décennies. Divers secteurs de la politique et de l’action sociales y font appel.
R. P. F. Lazarsfeld, La Philosophie des sciences sociales, Mouton, Paris, 1970.
Voir : Étude de marché  Enquête sociale  Marketing social  Recherche sociale
jpf
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Spitex àð Soins et aide à domicile
Spitting àðAssurance-Vieillesse et survivants AVS)
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Statistique sociale
Par statistique sociale il faut entendre l'observation et l'analyse, sur une base systématique et régulière, des conditions de vie et de bien-être de certaines catégories de la population ou de la population tout entière. Une statistique sociale doit pouvoir se fonder sur une ample base de données provenant de sources fort différentes, notamment les statistiques administratives établies par les services publics dans le cadre de leur travail de surveillance et les relevés auprès des ménages, des personnes et d'autres unités d'observation. Dans un sens étroit, le terme est également utilisé pour désigner les statistiques portant sur les prestations sociales (recettes et dépenses des institutions de sécurité sociale). Une statistique sociale implique la collecte, le stockage, l'exploitation et la mise à disposition des données et des informations récoltées. Elle implique aussi la publication d'un “ Rapport sur les questions sociales ” (“ Sozialberichterstattung ”). L'OFS prévoit la création d'une nouvelle série de publications accueillant de tels rapports. Ceux-ci devraient, dans leur conception la plus large, porter sur les domaines suivants : formation et qualification professionnelles, activité professionnelle et conditions de travail, revenu et dépenses, conditions de logement et évolution des loyers, santé, sécurité sociale, intégration sociale, sécurité publique et criminalité, loisirs et emploi du temps, environnement. Ils devraient intégrer également des analyses ayant trait à des problèmes plus spécifiques tels que la pauvreté, les inégalités et les conditions de vie de certains groupes de la population (les personnes âgées, les étrangers, les familles monoparentales, etc.). Une statistique sociale, que les résultats soient consignés ou non dans un “ Rapport sur les questions sociales ”, comporte toujours une dimension de transversalité. L'Office fédéral de la statistique (OFS) joue un rôle important de prestataire de services dans ce domaine, car il assure la production de données quantitatives dans tous les domaines mentionnés et en garantit la diffusion par les canaux les plus divers, y compris Internet.
R. R. Habich, H.-H. Noll, avec la collaboration de W. Zapf, Soziale Indikatoren und Sozialberichterstattung. Internationale Erfahrungen und gegenwärtiger Forschungsstand, avec un résumé en français, Office fédéral de la statistique, Berne, 1994. — Info : social. La sécurité sociale dans les faits, ce nouveau bulletin de la section de la sécurité sociale de l'Office fédéral de la statistique, présente régulièrement à un large public des informations statistiques ayant trait à la sécurité sociale ainsi que des résultats d'analyses.
Voir : Budget social — Estimation statistique — Eurostat-Sespros — Financement de la sécurité sociale : aspects économiques — Indicateurs sociaux — Office fédéral de la statistique (OFS)
Spartaco Greppi
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Statuts
Acte constitutif d’une société ou d’une association rédigé par écrit comportant un certain nombre de mentions obligatoires prévues par le Code Civil (art 60 ss) qui posent les objectifs ainsi que les règles de fonctionnement de la société ou de l’association.
R. M.-C. Collaud, Comment créer et animer une association, Réalités sociales, Lausanne, 1990.
Voir : Associations
jpf
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Stigmatisation
Réaction d’un groupe ou d’une société envers des personnes ou des groupes minoritaires, différents ou défavorisés (minorités ethniques, homosexuels, malades, handicapés, alcooliques, toxicomanes, chômeurs, délinquants, etc.), consistant à attribuer une étiquette qui les catégorise comme déviants. Les personnes à la source de la stigmatisation éprouvent des sentiments de gêne et de ressentiment, et manifestent des comportements d’abandon, d’exclusion, de rejet et de constitution d’une “ brebis galeuse ”. La stigmatisation produit chez les personnes cibles des sentiments de vulnérabilité, de honte, et des comportements de retrait, d’entraide, ou parfois d’agression. Sa fonction sociale est de détourner l’attention du problème posé par les personnes stigmatisées (maladie, chômage, etc.), et d’en justifier l’exclusion en les désignant comme responsables de leurs maux.
R. E. Goffman, Stigmate : les usages sociaux des handicaps, Les Éditions de Minuit, Paris, 1993. — C.-N. Robert, “ Fabriquer la délinquance juvénile ”, in : Revue Suisse de Sociologie, 3, 1977, pp. 31-65.
Voir : Déviance — Étiquetage (Théorie de l’) — Image de soi — Représentation sociale
Fabrizio Butera
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Subsidiarité
Ce qu’on appelle le principe de subsidiarité a été formulé pour la première fois par Pie XI dans son encyclique Quadragesimo anno (1931) : “ Il est vrai sans doute, et l’histoire en fournit d’abondants témoignages, que, par suite de l’évolution des conditions sociales, bien des choses que l’on demandait jadis à des associations de moindre envergure ne peuvent plus désormais être accomplies que par de puissantes collectivités. Il n’en reste pas moins indiscutable qu’on ne saurait ni changer ni ébranler ce principe si grave de philosophie sociale : de même qu’on ne peut enlever aux particuliers, pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de s’acquitter de leur seule initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d’une manière très dommageable l’ordre social, que de retirer aux groupements d’ordre inférieur, pour les confier à une collectivité plus vaste et d’un rang plus élevé, les fonctions qu’ils sont en mesure de remplir eux-mêmes. ” (Quadragesimo anno, 1931, 86.)
Ce principe de décentralisation et de répartition des responsabilités est au cœur du processus démocratique moderne dont on a dit (Bergson) qu’il avait des racines évangéliques : reconnaissance à tous d’une dignité née de la filiation divine.
Ce principe a été repris de manière presque officielle dans le cadre de la République fédérale allemande au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, et il vient de connaître un renouveau d’intérêt dans les débats de la Communauté européenne, même si l’interprétation qu’on en a donnée appelait quelques réserves. On peut dire qu’aujourd’hui ce principe fait partie intégrante du débat démocratique, et si la terminologie varie (variante : principe de proximité), la réalité reste présente.
On peut faire remarquer ici que ce principe de subsidiarité est, avec le principe de solidarité et celui du bien commun, un des trois piliers de l’enseignement social chrétien, qui est centré sur l’épanouissement des personnes. Mais il convient de conserver un équilibre pour éviter une hypertrophie d’un principe par rapport aux autres. C’est ainsi que si le principe de subsidiarité connaissait une hypertrophie, on pourrait voir se développer un corporatisme qui serait préjudiciable au bien commun. Ceci nous renvoie aux trois dimensions de la justice : civile (commutative), sociale (distributive) et politique (légale), qui doivent trouver un équilibre pour rendre à chacun selon son dû dans le cadre du bien commun.
Voir : Subsidiarité dans l’Union européenne (Principe de) — Fédéralisme
Patrick de Laubier
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Subsidiarité dans l’union européenne (Principe de)
Il a été introduit dans le traité de Maastricht, pour chercher à définir le jeu du partage des compétences entre les États membres et la Communauté, et pour répondre à la critique d’extension indéfinie du champ de l’action communautaire. La Communauté intervient seulement “ si et dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire ”.
Voir : Subsidiarité
jpf
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Subventions
Il n'existe pas une définition univoque de subvention. Dans le système de comptabilité nationale, l'octroi d'une subvention est lié à une opération de production. Les subventions sont définies comme étant des transferts courants sans contrepartie que les administrations publiques, dans le cadre de leur politique économique et sociale, versent à des producteurs résidants dans le but d'influencer leurs niveaux de production, leurs prix ou la rémunération des facteurs de production. Cette définition ne recouvre que partiellement celle arrêtée dans la loi sur les subventions du 5 octobre 1990 (LSu) qui définit pour la première fois la notion (légale) de subvention au niveau fédéral. Jusqu’alors, les divers textes législatifs utilisaient une terminologie très variée pour parler de subventions : contribution, aide financière, indemnité, aide à l’investissement, prime, subside, etc. La LSu utilise le terme de subventions pour désigner à la fois les aides financières et les indemnités prévues par le droit fédéral.
Les aides financières sont des avantages monnayables accordés à des bénéficiaires ne faisant pas partie de l'administration fédérale afin d'assurer ou de promouvoir la réalisation d'une tâche que l'allocataire a décidé d'assumer. Les avantages monnayables peuvent notamment prendre les formes suivantes : prestations pécuniaires à fonds perdu, conditions préférentielles consenties lors de prêts, cautionnements ainsi que prestations en nature et services accordés à titre gracieux ou à des conditions avantageuses. L’aide financière est toujours appelée à soutenir une activité facultative, dont la réalisation n’est pas prescrite par la loi et dont l’accomplissement n’a pas non plus été délégué par la Confédération.
Les indemnités sont des prestations accordées à des bénéficiaires ne faisant pas partie de l'administration fédérale et destinées à atténuer ou à compenser les charges financières découlant de l'accomplissement de tâches prescrites par le droit fédéral ou de tâches de droit public déléguées par la Confédération.
Les besoins de la statistique déterminent souvent l'extension de cette notion (légale) de subventions à tous les transferts dont les effets économiques et sociaux ainsi que les procédures d'octroi présentent des analogies avec ceux des subventions. Ainsi, dans le rapport du Conseil fédéral sur les subventions, la notion légale de subvention se double d'une notion plus large, issue de la statistique des finances publiques, incluant les parts cantonales aux recettes de la Confédération et les dédommagements versés à d'autres collectivités publiques. En 1998, les “ Parts, subventions et dédommagements ” de la Confédération (subventions au sens large) dans le domaine de la prévoyance sociale se sont montés à quelque 12.4 milliards de francs, dont 11.2 milliards de francs en faveur des assurances sociales.
R : Rapport du Conseil fédéral sur l'examen des subventions fédérales du 25 juin 1997 (Rapport sur les subventions). — Office fédéral de la statistique, Le système de comptabilité nationale. Méthodes et concepts, OFS, Berne, 1997. — Administration fédérale des finances, Finances publiques en Suisse 1998, Office fédéral de la statistique, Neuchâtel, 2000.
Site Internet : www.statistik.admin.ch/findex.htm
Voir : Transferts
Spartaco Greppi
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Suicide
Le suicide est un phénomène transversal à toutes les cultures, les époques, les couches sociales et les âges. Il ne peut être totalement considéré ni comme une problématique de santé physique ou mentale, ni comme un comportement social. Il s’agit en effet d’un phénomène complexe et multidimensionnel, résultant de l’interaction de plusieurs types de facteurs : les prédispositions individuelles, les facteurs liés au milieu social et les événements circonstanciels.
Historiquement, le suicide a suscité des réflexions dans des domaines aussi variés que la philosophie, la théologie, la psychiatrie classique, la psychologie et la sociologie, plus récemment la bio-chimie et la génétique. Jusqu’au XIXe siècle le suicide a été du ressort de la philosophie et de la théologie (notions de libre arbitre, de choix). A quelques exceptions près (stoïcisme, par exemple), il a été le plus souvent reprouvé du point de vue moral et social.
Les tenants de la psychiatrie classique ou d’approches psychologiques ont problématisé la notion de volonté ou d’intentionnalité de l’acte. Pour ces courants le suicide serait dû à des dysfonctionnements et/ou à des troubles pathologiques, relevant de la maladie mentale, pouvant avoir un substrat organique et/ou des origines dans un développement (types d’attachement) problématique. Shneidman, “ initiateur ” de la suicidologie, définit le suicide comme un “ psychache ”, une souffrance psychique insupportable et multidimensionnelle (modèle du cube).
La sociologie s’est penchée sur les relations qui existent entre le suicide et des facteurs et/ou des variables sociaux (sexe, âge, état civil, statut, religion). Son chef de file, E. Durkheim (1887), a relié le suicide à un courant suicidogène propre à toute société ainsi qu’au type et au degré d’intégration de l’individu à la société, explicant ainsi le suicide en termes de régulation et de cohésion sociales.
Des études récentes dans le domaine de la biochimie du cerveau et de la génétique envisagent le suicide comme une série de déséquilibres bio-chimiques et neuromorphologiques (neurotransmetteurs, récepteurs, enzymes).
Si il est communément admis de considérer le suicide comme la résultante de constellations complexes et enchevêtrées de facteurs environnementaux et personnels et/ou de personnalité, la pondération et le rôle de chaque catégorie de facteurs dans le processus suicidaire font encore l’objet de débats dans la communauté scientifique. Un certain consensus semble s’établir autour du concept de résilience, c’est-à-dire la capacité d’un individu de faire face à l’adversité grâce à ses ressources, tant personnelles (biologiques et psychologiques) que sociales (ressources socio-économiques, réseaux d’intégration et de sociabilité, statuts et rôles sociaux). A la recherche sur les facteurs prédisposants s’ajoutent ainsi des études sur les facteurs de protection. Le suicide en effet est considéré actuellement comme l’aboutissement d’un processus constitué par plusieurs phases (paradigme de la crise). La notion de processus suicidaire ouvre la voie et implique une politique d’action face au suicide articulant trois niveaux : la prévention, l’intervention et la postvention. La prévention porte sur les conditions de vie en général et de santé mentale en particulier. Son but est d’anticiper la survenue et la cristallisation d’une crise. L’intervention prend en charge les situations de crise, afin d’empêcher le passage à l’acte, l’accomplissement du suicide et la récidive. La postvention enfin est constituée par l’ensemble de mesures d’accompagnement et de soutien aux personnes touchées, à un titre ou à un autre, par le suicide.
R. F. Gratton, “ Sociology of suicide ”, in : Neil, J. Smelser, P. B. Baltes (Éds) International Encyclopedia of the Social and Behavioral Sciences, Elsevier Science Limited Pergamon, Forthcoming Spring Oxford, 2002 (Un résumé de cet article est à consulter sur le site : www.iesb.com/contents.html). — K Hawton, K. Van Heeringen, International Handbook of Suicide and Attempted Suicide, John Wiley and Sons, Chichester, 2000. — Ministère de la Santé et des Services sociaux, Gouvernement du Québec, S’entraider pour la vie , Stratégie québecoise d’action face au suicide, 1998. — R. Ramsay, B. Tanney, L. Tierney, J. Roger, A. Lang, Suicide Intervention Handbook, Living Works Éducation Inc., Calgary, 1997. — E. Fizzotti, A. Gismondi, Il suicidio. Vuoto esistenziale e ricerca di senso, SEI (Società editrice internazionale), Torino, 1991.
Sites Internet : www.infosuicide.org — www.cam.org/aqs — www.msss.gouv.qc.ca (Ministère de la Santé et des Services sociaux)
Voir : Solitude — Prévention
Dolores Angela Castelli
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Supervision
La supervision est une pratique d’accompagnement pédagogique qui se déroule individuellement, en petit groupe ou en équipe. Elle s’adresse à des personnes en formation ou à des professionnels. La supervision a été introduite dans le travail social dans les années 70.
Son point d’ancrage est une relation institutionnalisée dans un contrat (durée, rythme, objectifs, mode d’évaluation, confidentialité, financement) entre un superviseur formé à cet effet et un ou des supervisés qui fait ou font la demande de supervision.
Le superviseur est en principe extérieur à l’institution dans laquelle le supervisé travaille.
Le but de la supervision est l’amélioration des compétences professionnelles par la prise de recul, l’élucidation et l’analyse méthodique de situations professionnelles. On lui attribue la qualité d’être une réponse préventive au traditionnel “ burnout ” des travailleurs sociaux.
R. C. De Jonckeere, S. Monnier, Miroir sans tain pour une pratique sans phare. La supervision en travail social, Éditions I.E.S., Genève, 1996.
Voir : Formation continue — Réflexivité (dans l'action sociale) — Travail social — Travailleurs sociaux (Formation des) — Usure professionnelle.
Charles Chalverat
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Surassurance
La surassurance est une notion qui relève du droit des assurances privées et non du droit des assurances sociales. (En ce qui concerne celles-ci, la loi parle de surindemnisation et, en matière de prévoyance professionnelle, d’avantage injustifié.)
La loi fédérale sur le contrat d’assurance (LCA) qualifie de surassurance la situation dans laquelle la somme assurée dépasse la valeur d’assurance le jour de la survenance du sinistre. La surassurance peut se présenter dans les assurances de choses ; elle n’existe pas dans les assurances de personnes. La surassurance n’est pas prohibée en tant que telle car, en vertu du principe indemnitaire propre aux assurances contre les dommages, l’assureur dédommage l’ayant droit jusqu’à concurrence seulement du préjudice effectivement subi. La surassurance est sanctionnée lorsqu’elle est frauduleuse, autrement dit lorsque le preneur d’assurance a conclu le contrat dans l’intention de se procurer, par ce moyen, un profit illicite ; l’assureur n’est alors pas lié par le contrat, mais il conserve son droit à la prime convenue. Il lui incombe d’administrer la preuve libératoire de l’intention dolosive du preneur.
La LCA réglemente aussi la double assurance (ou le cas d’assurances multiples), qui se présente lorsque les mêmes objets sont assurés, contre le même risque et pour le même temps, par plus d’un assureur, de telle manière que les sommes assurées réunies dépassent la valeur d’assurance.
Voir : Avantage injustifié — Surindemnisation
Bernard Viret
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Surendettement
Le surendettement est un processus d’endettement en chaîne, souvent qualifié de spirale ou de cercle vicieux. Le consommateur endetté et dans l’incapacité de rembourser ses dettes, cumule la plupart du temps différentes formes d'emprunts : un ou plusieurs petits crédits, leasing de biens de consommation, découverts sur les cartes de crédit ou sur les cartes clients des grands magasins. A noter d'ailleurs que ce foisonnement de formes d’emprunt empêche le consommateur d'avoir une vue d'ensemble de ses engagements.
En 2000, parmi les ménages ayant un crédit en cours recensés par la Centrale d’information de Crédit (CIC, banque de données privée des professionnels de la créance), 18 %, soit près d’un sur cinq, cumulent deux emprunts ou davantage.
Si le phénomène est souvent considéré comme révélateur de nouvelles tendances consommatoires, il est également lié à une banalisation de l’emprunt, ainsi qu’à la forte incitation à la consommation véhiculée par les messages publicitaires. Cette dernière, dans une société où il faut “avoir” pour “être”, ne s’est pas réduite dans le contexte socio-économique défavorable des années 90, contrairement à la capacité financière des ménages.
La question du surendettement des ménages est sujette à controverses. Considérée par les milieux économiques comme étant du strict ressort de la liberté et de la responsabilité individuelles, elle est dénoncée par les défenseurs des consommateurs et par les services d’utilité publique pour une double raison : source de situations inextricables et de détresse pour les ménages concernés, elle implique également des conséquences négatives pour les ressources publiques (poursuites et faillites privées en augmentation, pertes fiscales, etc.).
Deux organisations sont actives dans le champ de la prévention du surendettement, de la défense des intérêts des consommateurs endettés, et de l’assainissement de dettes. Fondée dans le but de défendre une législation fédérale qui protège efficacement les personnes privées du surendettement, la Communauté suisse de travail sur le crédit à la consommation (CSC) réunit des organisations de protection des consommateurs, des œuvres d’entraide, des associations faîtières d’institutions publiques et privées d’aide sociale et des services de consultation pour les questions d’endettement.
Sur un plan plus pratique, l’Association faîtière suisse des services d’assainissement de dettes à but non lucratif regroupe les services privés spécialisés dans l’assainissement de dettes. Elle coordonne les différents services d’utilité publique, cherche à étendre et à harmoniser les méthodes d’assainissement, rassemble des données statistiques, exerce une influence sur la législation aussi bien que sur la pratique des tribunaux et des offices.
R. P. Aubort, Les bénéfices de la dette : pour une politique du désendettement, Institut de hautes études en administration publique, Lausanne, 1992. — J.-P. Tabin et al., Misères à crédit, l'endettement en Suisse et ses conséquences, Ed. La Passerelle, Lausanne, 1992.
Voir : Crédit à la consommation — Petit crédit — Dettes — Désendettement
Caroline Regamey
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Surindemnisation
Le concours de prestations des différentes assurances sociales instituées par le droit fédéral est de nature à conduire, en cas de cumul de ces prestations, à une surindemnisation, autrement dit à un enrichissement, considéré comme non souhaitable, de l’ayant droit. La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales (LPGA) vise à éviter la survenance de telles situations ou du moins à en limiter les effets ; aussi comprend-elle des dispositions relatives à la coordination des prestations des assurances sociales. Une situation de surindemnisation se présente lorsque, du fait de la réalisation du risque, les prestations sociales légalement dues dépassent à la fois le gain dont l’assuré est présumé avoir été privé, les frais supplémentaires et les éventuelles diminutions de revenu subies par les proches.
Prescrivant que doivent être prises en compte, dans le calcul de la surindemnisation, uniquement les prestations de nature et de but identiques qui sont accordées à l’assuré en raison de l’événement dommageable, la LPGA dispose en outre, fondamentalement, que les prestations en espèces doivent être réduites du montant de la surindemnisation. Toutefois, sont exceptées de toute réduction les rentes de l’AVS et de l’AI, de même que les allocations pour impotents et les indemnités pour atteinte à l’intégrité. Pour les prestations en capital, c’est la valeur de la rente correspondante qui est prise en compte.
Les dispositions légales relatives à la surindemnisation en matière de prévoyance professionnelle relèvent d’un concept spécial, celui de l’avantage injustifié.
Voir : Assurances sociales (Coordination des) — Avantage injustifié — Surassurance
Bernard Viret
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Syndicat
Les syndicats sont des organisations de défense des travailleuses et des travailleurs (salarié-e-s). En Suisse, le premier syndicat à être apparu est la Fédération suisse des typographes (1858). Leur principale tâche consiste à négocier avec les organisations patronales des conventions collectives de travail (CCT) qui fixent les conditions de travail et de rémunération des travailleuses et des travailleurs. Afin de défendre au mieux les intérêts de leurs membres, et cela non seulement face aux patrons, les syndicats disposent de tout un arsenal de mesures dites “ de lutte ” : manifestation de protestation, grève d’avertissement, débrayage, grève perlée, grève du zèle. Les syndicats sont en principe organisés par branche et en sections régionales et/ou locales. Ils participent également à la vie politique à tous les niveaux (national, cantonal, local), par le biais des procédures de consultation, de manifestations publiques, d’initiatives ou de référendums, de communiqués et de conférences de presse, de débats publics, etc. Les syndicats offrent également à leurs membres cotisants un certain nombre de services qui vont des conseils juridiques aux maisons de vacances. La plupart sont dotés d’organes de presse. Sur le plan suisse, les syndicats se retrouvent principalement dans trois centrales (confédérations) syndicales : l’Union syndicale suisse, USS (1999 : 380’384 membres), la Confédération des syndicats chrétiens de Suisse, CSC (102’274, l’USSA l’ayant rejointe) et la Fédération des sociétés suisses d’employés, FSE (104’861). Pour sa part, l’Union fédérative du personnel des administrations et des entreprises publiques regroupe des syndicats des services publics, dont une part est également membre de l’USS. D’autres organisations de salarié-e-s ne sont affiliées à aucune centrale. Parmi les plus grandes, citons : l’Association faîtière des enseignantes et enseignants suisse (1999 : 49’654 membres), la Fédération centrale du personnel des cantons et des communes (30’089) et l’Association suisse des infirmières et infirmiers (26’278). Les syndicats sont en principe regroupés sur le plan régional (cantonal) au sein d’unions syndicales cantonales ou locales, pour ce qui est des syndicats membres de l’USS. Sur le plan européen, ils peuvent se retrouver dans des Fédérations syndicales européennes, elles-mêmes en principe membres de la Confédération européenne des syndicats, CES ; on les retrouve dans certains conseils syndicaux interrégionaux, une nouvelle structure transfrontalière active sur le continent et, sur le plan mondial au sein de fédérations mondiales.
R. Les syndicats en Suisse, Centrale suisse d’éducation ouvrière, (aujourd’hui : Institut de formation syndicale de Suisse), Berne, 1986.
Sites Internet : www.uss.ch — www.etuc.org — www.cisl.it — www.etuc.org/etui — www.oit.org
Voir : Boycott — Convention collective de travail (CCT) — Grève — Participation — Procédure de consultation — Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT) — Syndicats chrétiens de Suisse — Union syndicale suisse (USS)
Fernand Quartenoud
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Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT)
Le SIT — Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs — est une organisation implantée uniquement à Genève et a pour caractéristique son aspect entièrement interprofessionnel. Il regroupe des travailleuses et travailleurs — actifs et non actifs — de toutes les branches professionnelles et est particulièrement présent dans les secteurs les plus précaires. Il fait partie de la Communauté genevoise d’action syndicale, qui regroupe tous les syndicats genevois, des secteurs privé et public.
Le SIT a pour objectifs aussi bien de lutter pour l’amélioration des conditions de salaire, de travail et de vie que de construire une société fondée sur la solidarité et la justice sociale. Pour ce faire, il défend individuellement et collectivement les salarié-e-s, il les organise sur les lieux de travail, il élabore des dossiers, publie des brochures et édite un journal mensuel (Sit-info), et est présent dans toutes les instances de concertation. Indépendant de tout parti politique et de toute confession, il n’existe que par la seule volonté de ses membres. Ses ressources économiques proviennent donc des seules cotisations des syndiqué-e-s. Il compte un peu plus de 10'000 membres.
Site Internet : www.sit-syndicat.ch
Voir : Syndicat
Georges Tissot
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Syndicats chrétiens de Suisse (Confédération des) (CSCS)
La Confédération des Syndicats chrétiens de la Suisse (CSC) est une organisation de travailleurs qui, dans ses objectifs et ses moyens d’actions, se réfère à l’éthique sociale chrétienne et à la doctrine sociale chrétienne. La CSC reconnaît l’État démocratique et social fondé sur le droit. Elle est politiquement et professionnellement indépendante et est ouverte à toutes les organisations et tous les travailleurs qui respectent ses orientations fondamentales. En tant que Confédération, elle rassemble une quinzaine de fédérations constituées sur une base régionale ou professionnelle. Elle compte plus de 100’000 membres.
Son statut d’organisation nationale lui permet d’être présente dans tous les débats politiques qui concernent la politique sociale suisse.
Voir : Syndicat
jpf
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Système scolaire àð Instruction publique
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Taux d activité, d activité occupée et de chômage (au sens du BIT)
Les taux d activité, d activité occupée et de chômage au sens du BIT sont estimés à partir des données d enquêtes qui, à l instar de l enquête sur la population active (ESPA) en Suisse, s’appuient sur le modèle des enquêtes sur les forces de travail du BIT. Le taux d’activité rapporte le nombre de personnes âgées de plus de 15 ans qui, au moment de l’enquête, soit exercent une activité professionnelle, rémunérée ou non, soit sont au chômage au sens BIT, à l’ensemble des personnes âgées de 15 ans ou plus. Le taux d’activité occupée ou taux d’emploi est l’ensemble des personnes âgées de 15 ans ou plus occupant une activité professionnelle rapporté à l’ensemble de la population. Le taux de chômage, ou taux de sans emploi, est le rapport de l’ensemble des personnes âgées de plus de 15 ans au chômage au sens du BIT sur l’ensemble des personnes actives (actifs occupés et chômeurs au sens BIT). Ces taux sont exprimés le plus souvent en pourcentage. Ils peuvent être calculés pour des sous-populations (hommes-femmes, statut matrimonial, état civil, groupes d’âge).
R. R. Hussmanns, F. Mehran and V. Verma, Surveys of economically active population, employment, unemployment and underemployment : An ILO manual on concepts and methods, International of Labour Office, Geneva, 1990. — L’enquête suisse sur la population active, OFS, Berne-Neuchâtel, publication annuelle.
Voir : Activité et travail — Activité économique au sens du BIT — Bureau international du travail (BIT) — Enquête sur la population active (ESPA) — Productivité du travail
Jean-Marie Le Goff
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Taux de fécondité et taux de natalité
Le taux de fécondité donne le nombre de naissances (vivantes) par femme durant une période, généralement l’année. Le taux global de fécondité (ou taux de fécondité tous âges) correspond au taux de fécondité calculé sur l’ensemble de la période de procréation (généralement entre 15 et 45 ans). Le taux de fécondité générale par âge exprime le taux de fécondité chez les femmes ayant le même âge (ou appartenant au même groupe d’âge).
Obtenu par addition des taux de fécondité par âge observés l’année considérée, l’indicateur conjoncturel de la fécondité mesure la fécondité du moment. Appelé aussi indice synthétique de fécondité, fécondité cumulée ou encore somme des naissances réduites, cette mesure s’interprète comme le nombre d’enfants que mettrait au monde, en moyenne, une génération de femmes qui, à chaque âge, seraient soumises aux taux de fécondité des différentes générations présentes l’année considérée. L’indicateur conjoncturel de la fécondité n’est pas à confondre avec la descendance finale. Cette dernière est la somme des taux de fécondité générale par âge (ou par durée de mariage) durant la totalité de la période de procréation dans une génération ou une cohorte de mariage. La descendance finale d’une génération sert de base pour calculer le taux brut de reproduction, que l’on obtient en multipliant cette descendance finale par le taux de féminité des naissances (ou proportion de naissances féminines).
Le taux de natalité, quant à lui, mesure la fréquence des naissances (vivantes) dans une population durant une année. Employé sans autre précision, il désigne le taux brut de natalité, obtenu en divisant le nombre annuel des naissances vivantes par l’effectif moyen de la population durant l’année.
R. R. Matos et coll. sous presses, Population et développement. Lexique multilingue de termes démographiques, DDC, Berne. — R. Pressat, Dictionnaire de démographie, Paris, Presses Universitaires de France, 1979.
Voir : Mesures de fécondité — Santé de la reproduction — Taux de reproduction
Rafael Matos
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Taux de mortalité
Le taux de mortalité s’obtient en divisant le nombre de décès enregistré dans une population par l’effectif de celle-ci. On distingue entre :
— le taux brut de mortalité, qui concerne la population totale d’un pays ou d’une région. Cet indicateur est fortement influencé par la structure par âge de la population étudiée, la mortalité dépendant en premier lieu de l’âge ;
— le taux de mortalité par âge (nombre de décès à un âge donné divisé par la population de cet âge), qui sert notamment au calcul de tables de mortalité ;
— le taux standardisé de mortalité qui, par un artifice de calcul, estime ce que serait le taux de mortalité si la population étudiée présentait une structure par âge “ standard ” (généralement la structure par âge observée dans le monde ou en Europe), ceci afin de permettre des comparaisons entre différentes régions présentant des niveaux de vieillissement différents.
En Suisse, où l’on compte chaque année quelque 60 000 décès pour une population de 7,2 millions, le taux brut de mortalité reste stable à environ 9 pour 1000. En revanche, suite à l’augmentation de l’espérance de vie à la naissance, le taux standardisé de mortalité poursuit sa diminution. Les taux de mortalité par âge diminuent également.
R. P. Wanner, Tables de mortalité pour la Suisse 1988/93, Office fédéral de la statistique, Berne, 1996.
Voir : Espérance de vie — Mortalité — Mortalité infantile
Philippe Wanner
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Taux de natalité àð Taux de fécondité et taux de natalité
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Taux de remplacement
Dans le domaine de la retraite, il indique dans quelle proportion les revenus de la prévoyance vieillesse (AVS  LPP) remplacent le salaire que recevait précédemment la personne active. C est le rapport dont le numérateur est constitué par les prestations moyennes versées aux retraités et le dénominateur le salaire moyen des actifs occupés (dans les cas concrets, la définition est évidemment beaucoup plus précise). On peut définir des taux de remplacement pour d’autres prestations sociales (maladie, accidents, chômage). En Suisse, le taux de remplacement visé par les deux premiers piliers de la prévoyance vieillesse est de 60 %.
Voir : Trois piliers
jpf
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Taux de reproduction
Indice qui mesure dans quelles conditions s’effectue le remplacement (ou renouvellement) des générations. Pour que ce dernier ait lieu il faut que la génération des filles remplace au moins la génération des mères, c’est-à-dire que chaque femme ait, en moyenne, une fille. Le taux de reproduction en tant que tel est obtenu en rapportant à l’effectif initial d’une génération féminine ou masculine, le nombre d’enfants nés vivants du même sexe qui en sont issus. Sauf indication contraire, on se réfère aux taux de reproduction féminine. Les taux de reproduction sont généralement exprimés en pour cent. Le taux de reproduction à la naissance (à l'âge 0) est plus couramment appelé taux net de reproduction. Celui-ci indique combien 100 filles nouveau-nées mettraient de filles au monde, en tenant compte des conditions de mortalité et de fécondité avant la fin de la période de reproduction. Le taux brut de reproduction, qui indique le nombre moyen de filles par femme d’une génération, fait, en revanche, abstraction des conditions de mortalité durant la période de reproduction.
R. R. Matos et coll. sous presses, Population et développement. Lexique multilingue de termes démographiques, DDC, Berne. — R. Pressat, Dictionnaire de démographie, Paris, Presses Universitaires de France, Paris, 1979.
Voir : Mesures de fécondité — Santé de la reprosuction — Taux de fécondité et taux de natalité
Rafael Matos
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Taux démographiques
Dans les disciplines démographiques, les taux sont obtenus en divisant le nombre d’événements (naissances, mariages, changements de résidence, décès, etc.) survenus au cours d’une période (généralement une année ou cinq ans) par le produit de l’effectif moyen du groupe observé durant cette période et de la durée en années de cette période. Il est important de noter que, contrairement à l'usage du terme de taux qui est fait dans les disciplines économiques, un taux, en démographie, ne correspond pas à une proportion ou à une fréquence : la population moyenne qui est prise au dénominateur est, en effet, une estimation de la somme des temps de présence de chaque individu durant la période prise en compte (par exemple, si la période prise en compte est une année, les immigrés et les émigrés auront un temps de présence dans la population inférieur à 1). Au taux correspond donc une unité métrique qui est l'événement (mariage, naissance, décès) par personnes-années.
R. R. Matos et coll., Population et développement. Lexique multilingue de termes démographiques, DDC, Berne, sous Presses. — R. Pressat, Dictionnaire de démographie, Presses Universitaires de France, Paris, 1979.
Voir : Quotients démographiques — Taux de fécondité et taux de natalité— Taux de mortalité — Taux de reproduction
Jean-Marie Le Goff
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Temps de travail
Le mode de production industriel, en séparant le temps de l’activité productive des autres temps sociaux, la fait entrer dans des cadres temporels beaucoup plus étroits et rigides. Dans une première période, fort longue, les travailleurs résisteront au travail régulier imposé (célébration de la Saint Lundi), mais le développement inexorable du mode de production industriel les contraindra à lutter pour diminuer la durée du temps passé à travailler pour un salaire (10 heures, puis 8 heures par jour). Les trente années de quasi plein emploi en Europe donneront lieu à un débat sur la possibilité d’aménager son temps de travail (travail à la carte notamment). Mais actuellement, avec la crise et le chômage croissant, la question à l’ordre du jour n’est plus l’aménagement du temps de travail, mais bien le développement de nombreuses modalités de travail, précaires très souvent, dont l’objectif est de permettre d’ajuster le volume d’emploi aux exigences de la production sur demande. La flexibilité est dorénavant le maître mot.
R. D. Landes, L’Europe technicienne ou le Prométhée libéré, Gallimard, Paris, 1980. — C. Lalive d’Épinay, C. Garcia, Le Mythe du travail en Suisse : splendeur et déclin au cours du XXe siècle, Georg, Genève, 1988.
Voir : Flexibilité du travail — Temps partiel — Travail — Travail (Durée du)
Françoise Messant-Laurent
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Temps partiel
Modalité de travail très largement féminine, le temps partiel fut longtemps considéré comme un aménagement du temps de travail, qui offrait l’avantage de concilier contraintes professionnelles et domestiques. Plusieurs recherches sur le sujet, émanant de chercheuses pour la plupart, ont remis en cause cette conception restrictive et largement idéologique. Elles ont montré que le temps partiel, loin d’être une simple réduction du temps de travail, est en réalité un mode d’emploi, qui confère à celle ou celui qui l’occupe, un statut et des conditions de travail spécifiques : mobilité ascendante fortement restreinte ; accès limité à la formation continue ; facteur de maintien de la répartition traditionnelle des rôles féminins et masculins notamment. Les services, en priorité, et le tertiaire sont les secteurs où se concentrent les gros bastions du temps partiel, lequel concerne aujourd’hui en Suisse plus d’une femme active sur deux.
R. B. Despland (Éd.), Femmes et travail, IDHEAP, Réalités sociales, Lausanne, 1991. — M. Maruani, C. Nicole-Drancourt, La flexibilité à temps partiel, conditions d’emploi dans le commerce, La documentation française, Paris, 1989.
Voir : Égalité des chances — Égalité de traitement entre femmes et hommes — Femmes (Émancipation des) — Travail féminin — Travail (Nouvelles formes de)
Françoise Messant-Laurent
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Tertiarisation
Processus lié au développement économique des nations qui conduit progressivement à une réallocation des ressources de la production de biens vers la production de services (secteur tertiaire). Ce processus se manifeste en particulier par un accroissement de la part des activités de services dans le PIB et par une hausse du pourcentage de personnes actives occupées dans le tertiaire. En soi, ce secteur économique est très diversifié, plus que le secteur secondaire en tous les cas. Il est composé d’activités caractérisées par une valeur ajoutée par tête et par une productivité moyenne très élevées, telles que les banques, les assurances ou les services de conseils informatiques aux entreprises. Mais on y trouve aussi des activités marquées par une faible valeur ajoutée par personne occupée et par des rémunérations qui se situent souvent au bas de l’échelle salariale comme c’est le cas du nettoyage, de l’hôtellerie ou de la restauration. En Suisse, la part des working poors dans ces activités s’élevaient ainsi en 1999 à 18,8 % dans les services de nettoyage, 18,6 % dans l’hôtellerie et la restauration et 9,6 % dans le commerce de détail contre une moyenne de 7,5 % pour l’ensemble des secteurs économiques. Le processus de tertiarisation s’accompagne donc fréquemment d’un accroissement des inégalités de salaire en raison de son caractère très hétérogène.
Voir : Inégalité et discrimination salariale — Produit intérieur brut (PIB) — Working poor
Yves Flückiger
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Testament de vie àð Directives anticipées
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Thèse de l'ambivalence des relations intergénérationnelles
Selon Kurt Lüscher, spécialiste de la recherche sur les générations, les relations intergénérationnelles se caractérisent par une ambivalence fondamentale - par exemple entre continuité et changement, proximité et distance, solidarité réciproque et individualité. Cette ambivalence se manifeste concrètement par exemple dans les processus de détachement des adolescents à l'égard de leurs parents ou dans les soins dispensés à des parents âgés. C’est un concept qui est apparu à la base en psychiatrie, qui a été utilisé ultérieurement en psychothérapie, en thérapie familiale, psychologie du développement, puis plus récemment en sociologie. On parle d’ambivalence non seulement dans les sentiments développés à l’égard des proches, mais également dans la construction des rapports entre les générations. Dans le cadre d’une prise en charge d’un parent âgé, dément par exemple, on peut retrouver la volonté d’aider certes, mais aussi l’incapacité d’assumer le rôle de l’“ enfant indigne ” qui place son parent dans une institution ou un sentiment de ressentiment développé en raison de la perte de liberté et d’une prise en charge qui se fait au prix de sacrifices personnels (impossibilité pour une femme par exemple de poursuivre une carrière professionnelle). A une échelle plus large, évoquons la répartition entre population active et retraitée : le discours alarmiste sur le coût des personnes âgées pour la société (tant du point de vue de la santé que des assurances sociales) est monnaie courante dans les médias, mais aussi dans le discours politique ou économique. Pourtant, le système des rentes AVS n’a pas sérieusement été remis en question (par exemple en proposant un plafonnement de la rente en fonction de la fortune) et la solidarité entre les générations est bien ancrée dans les mentalités, le retraité étant considéré par les jeunes générations comme un légitime bénéficiaire de droits.
Valérie Hugentobler et François Höpflinger
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Tiers secteur
Le tiers secteur existe par opposition à deux secteurs bien caractérisés qui sont le public (régulation démocratique) et le privé (régulation marchande). Le tiers secteur couvre des activités qui ne correspondent à aucun de ces deux domaines.
Macro économiquement, il s’agit de subventionner des gens avec une enveloppe qui correspond à ce que coûte à la société le fait qu’il y ait des chômeurs. De cette manière, la société n’y perd strictement rien. Au contraire, elle va y gagner ce que feront ces gens.
L’activité générée par le tiers secteur couvre des tâches que n’effectuent ni le privé ni le public. Il s’agit par exemple de l’insertion professionnelle, de l’aide aux personnes aux ressources faibles, des travaux de protection de l’environnement, au sein d’associations. Ainsi, le tiers secteur correspond à une multitude d’activités utiles à la société, à la cohésion sociale et qu’absolument personne ne peut facturer.
Le Tiers secteur favorise de nouvelles relations entre les personnes avec un projet de société tendant à la non-domination, à la solidarité, un nouveau rapport aux biens et à l'argent tendant à l'autogestion, à l'égalité, une nouvelle relation à l’environnement.
Le Tiers secteur correspond à une organisation d'économie sociale – à but lucratif ou non - qui privilégie la constitution d'un patrimoine collectif par rapport au retour sur investissement individuel.
Sites Internet : www.ulb.ac.be/project/feerie/AA25.html — www.globenet.org/transversales/generique/57/ecosolidaire.html
Voir : Économie sociale
Fabrice Ghelfi
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Toxicomanies
Le concept de toxicomanie est en soi, plutôt flou. Il se réfère aux termes de pharmacodépendance, de drogues, de stupéfiants, d'accoutumance, qui sont d'ailleurs des notions subjectives, liées à un contexte social, à des choix de société, à une époque. La définition de la toxicomanie n'a donc de valeur qu'à travers les normes de la société observée. Il n'en existe d'ailleurs pas de définition scientifique ; celle-ci est uniquement politique et légale. En Suisse, c'est la loi sur les stupéfiants (LStup) qui définit ce qu'est une drogue. Cette loi de 1951 a été adaptée en 1975. Elle a fait l'objet d'une proposition de modification par la “ Commission d'experts pour la révision de la loi du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants ”.
Les produits psychotropes et leur usage
Les produits psychotropes sont des substances qui modifient la perception, les pensées ou le comportement. Ces substances peuvent être légales ou illégales. Citons, entre autres, pour les substances légales : le café, le tabac, le cacao, l'alcool et pour les médicaments : les sédatifs, les stimulants, les neuroleptiques, les antidépressifs. En ce qui concerne les substances illégales, il s'agit du cannabis, de l'opium et de ses dérivés, de la cocaïne et des hallucinogènes.
Nombre de produits psychotropes sont utilisés, la plupart du temps, de manière récréative.
La toxicodépendance est un phénomène qui fait appel à plusieurs aspects liés à des problèmes :
- psychologiques (dysfonctionnement psychique, difficultés dans les rapports sociaux),
- physiologiques et neurobiologiques,
- sociologiques (contexte socioculturel).
Il faut encore préciser que l'usage hédonique n'est pas nécessairement la toxicodépendance. Celle-ci intervient lorsqu'il y a compulsion, obsession et perte de maîtrise des compétences relationnelles et sociales.
La toxicodépendance n'est pas liée à un seul type de produit. Les diverses causes de dépendance peuvent, elles, être cumulées ou séparées.
La politique de lutte contre les toxicomanies en Suisse
Depuis 1990, la Confédération a élaboré un système de lutte contre les toxicomanies reposant sur quatre piliers :
• la prévention qui cherche à toucher la population en général, des groupes précis et des groupes dits “ à risque ”,
• la réduction des risques ou l'aide à la survie par la distribution de seringues propres, l'ouverture de lieux d'accueils, la prescription médicale de méthadone et les essais de prescription médicale d'héroïne,
• le traitement - sevrage, traitements ambulatoires et résidentiels, postcure,
• l'interdiction de la consommation, du commerce, de l'importation et la lutte contre le crime organisé.
Des positions
Le débat sur les politiques de lutte contre les toxicomanies est ouvert mais caractérisé par deux positions contradictoires : d'un côté les partisans d'une interdiction légale de la consommation, de traitements basés uniquement sur l'abstinence et, de l'autre, les partisans de l'accès légal et contrôlé à certains produits. Dans ce débat, nombre de professionnels et d'experts considèrent que l'essentiel réside dans la lutte contre l'exclusion, le respect de la personne toxicomane et l'accès à des traitements qui répondent aux différents besoins. Ils considèrent qu'il est indispensable de prendre en compte, dans une loi, l'ensemble des drogues, légales ou illégales. Ils proposent aussi la dépénalisation de la consommation.
R. Cahiers des ARIA, No 1, 1993 ; No 2, 1993 ; No 5, 1993. — Dépendances, No 0 et No 1, 1997. — Rapport de la Commission d’experts pour la révision de la loi du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants, OFSP, Berne, 1996.
Site Internet : www.infoset.ch
Voir : Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA) — Prévention — Sida – VIH
Gérald Progin
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Transferts
La notion de transfert est complexe, ambiguë et supporte de multiples interprétations. Généralement, un transfert représente un ou plusieurs mouvements financiers entre deux (ou plus) entités économiques distinctes (entreprises, ménages, institutions publiques, etc.). Les transferts sont constitués notamment de redistributions et de subventions et peuvent être utilisés à des fins de péréquation.
En ce qui concerne les transferts sociaux, ils représentent le déplacement du pouvoir d'achat de l'individu opéré à la suite d'une décision obligatoire ayant pour origine la volonté des pouvoirs publics ou des partenaires sociaux, dans le but de remédier aux inégalités par redistribution du produit social.
Voir : Budget social — Eurostat-Sespros — Financement de la sécurité sociale : aspects juridiques — Revenus (Transfert de)
Stéphane Rossini
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Transferts intergénérationnels
Terme technique désignant l'échange d'argent, de services pratiques et de soutien entre membres de plusieurs générations (d'une même famille). Des études récentes montrent que ces transferts ne s'effectuent pas seulement dans le sens des jeunes générations vers les générations plus âgées, mais aussi dans le sens inverse (garde des enfants par les grands-parents, donations aux petits-enfants, soutien moral de jeunes familles, etc.). Il s’agit d’une des composantes de l’aide que l’on qualifie “ d’informelle ” (avec l’aide du voisinage et la solidarité sociale) par opposition à l’aide “ formelle ” dispensée par les services professionnels d’aide ou de soins à domicile.
Voir : Soins et aide à domicile
François Höpflinger et Valérie Hugentobler
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Transferts sociaux
Par transferts sociaux, on entend tout paiement d'un organisme étatique destiné à alléger la charge que représente la survenance de certains besoins (par exemple, ceux découlant de la maternité ou de la vieillesse) ou risques (par exemple : l'invalidité, le chômage) pour les ménages et les particuliers, lorsque ces besoins ou risques entrent dans le champs des “ politiques sociales ”. Les paiements provenant d'organismes privés ou non-gouvernementaux appartiennent à une autre catégorie, celle des aides et des transferts caritatifs.
Pour que les prestations soient considérées comme sociales, elles doivent premièrement être fondée sur la solidarité, ce qui implique un mécanisme de redistribution. Il y a rupture, au moins partielle, entre la participation au financement des prestations et le droit à la prestation. En outre, le transferts doit être financier et prendre la forme d'une allocation ou d'un dédommagement monétaire. Une bourse d'étude financée par le budget public, donc l'impôt, est un exemple. La solidarité s'exprime le plus souvent, mais pas exclusivement, en termes financiers liés à la capacité économique des personnes concernées, payeurs et bénéficiaires : on attend des individus plus fortunés ou ayant un revenu élevé qu'ils participent plus, respectivement reçoivent moins, que des personnes de condition modeste. Mais il existe d'autres formes de solidarité par compensation des risques (par exemple selon les types d'activité), de l'âge (lorsque la distinction jeunes / vieux est abandonnée), du sexe.
Deuxièmement, le transfert doit se faire dans une des fonctions attribuées à la politique sociale, au sens large du terme. Pour la Suisse, Greppi et Ritzman (2001) répertorient 8 champs d'intervention de “ politique sociale ”: (1) maladie et soin de santé, y compris les contributions publiques aux établissements participant au système de santé (hôpitaux, cliniques psychiatriques, homes médicalisés par exemple); (2) invalidité; (3) vieillesse; (4) survie (veuvage); (5) famille et enfants (allocations familiales, assurance maternité, pensions alimentaires, structure d'accueil de la petite enfance); (6) chômage; (7) logement, (8) aide sociale. Dans cette énumération manquent (9) la politique fiscale envers les familles et les contribuables avec enfants (déductions fiscales, plus rarement crédits fiscaux, liés au statut familial, au nombre d'enfants, à certaines catégories de dépenses comme la garde d'enfants); (10) la politique de formation (bourses et prêts d'études ou d'apprentissage).
R. OFAS, Sécurité Sociale, revue bimensuelle, Berne. — P. Gilland, S. Rossini, La protection sociale en Suisse, Réalités Sociales, Lausanne, 1995. — S. Greppi, H. Ritzman, “ Les Comptes globaux de la protection sociale ”, in : Info : Social, Office fédéral de la Statistique, Neuchâtel. — La sécurité sociale dans les faits, février 2001, No 4.
Voir : Assurance sociale (Notion générale) — Comptes globaux de la protection sociale
Bernard Dafflon
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Transition démographique
Sur la base de l'observation de l'histoire démographique des pays européens, les spécialistes ont élaboré un modèle connu comme la théorie de la transition démographique. A un régime démographique de natalité et mortalité élevées succède un déclin de la mortalité qui entraîne un accroissement de la population qui ne se résorbe que lorsque la natalité aura a son tour diminué suffisamment pour que l'on retrouve un équilibre entre naissances et décès. La transition démographique, démarrée à la fin du 18e s., a marqué l'Europe du 19e siècle et a progressivement gagné la majeure partie de la planète. Aujourd'hui, la longévité s'est accrue partout, grâce au déclin quasi universel de la mortalité des enfants. Un fossé continue toutefois à séparer le nord du sud, l’espérance de vie à la naissance s’étalant entre 81 ans au Japon (80 ans en Suisse) et 37 ans en Zambie. Bien qu’elle commence à diminuer, en particulier en milieu urbain, la fécondité moyenne reste très élevée (>= 5 enfants) dans la quasi totalité de l'Afrique subsaharienne et une part importante du Moyen-Orient. Les grandes tendances ne doivent pas cacher la diversité des situations, des rythmes et des circonstances. Le déclin de la mortalité n'a pas toujours précédé celui de la fécondité. La transition européenne, étalée sur un siècle, est liée à un fort contrôle du mariage et une lente amélioration des conditions sanitaires, alors que les pays du sud ont connu une diffusion rapide d'innovations techniques dans des contextes extrêmement divers. Le déclin de la fécondité est généralement indice d'amélioration du statut de la femme, mais il peut aussi être la conséquence de la détérioration des conditions économiques. La situation théorique d'un équilibre entre naissances et décès provisoirement rompu et retrouvé est certainement très loin de la réalité : l'histoire démographique de l'humanité est celle de déséquilibres permanents et d'imprévisibilité. Le modèle n'avait pas anticipé la poursuite du déclin de la fécondité en occident bien en dessous du seuil de renouvellement, ni l'arrêt des progrès en matière de longévité dans les pays de l'est dus à des détériorations de la situation économique et, en Afrique, aux conflits armés, génocides et sida. La notion de modèle de référence est de plus en plus substituée par celle de processus aux modalités propres aux divers contextes sociétaux.
R. D. Tabutin, T. Eggerickx, C. Gourbin (Éds), Transitions démographiques et sociétés, Académia / L'Harmattan, Louvain-la-Neuve/Paris, 1995. — J.-C. Chesnais, “ La transition démographique : trente ans de bouleversements (1965-1995) ”, in : Chasteland et al., La population du monde. Enjeux et problèmes. Paris, INED, Trav & Doc 139, 403-419, 1997. — C. Sauvain-Dugerdil,, Six milliards d'humains. Une aventure à déchiffrer, OFS - DDC, Neuchâtel - Berne, 1999.
Voir : Démographie — Mortalité — Taux de fécondité et taux de natalité — Taux de mortalité
Claudine Sauvain-Dugerdil
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Transparence (Principe de)
Le développement des activités humaines devrait supposer leur (parfaite) maîtrise. Ainsi, qu'il s'agisse d'économie, d'environnement, de transports ou de politiques sociales, la gestion de ces domaines (notamment par les processus décisionnels qui les sous-tendent) se fondera sur une connaissance rigoureuse de la réalité à laquelle ils se rapportent.
Le principe de transparence peut se définir comme l'ensemble des dispositions structurées et finalisées visant l'accroissement de la visibilité d'un domaine particulier ou d'un phénomène. Il contribue à l'objectivation de faits et à la production de savoirs à partir de buts prédéterminés.
Ce principe est une des conditions du fonctionnement démocratique des institutions. Il favorise le passage du mythe au réel et comporte une dimension politique évidente, d'où les luttes et enjeux qui caractérisent la production statistique.
Voir : Budget social — Eurostat — Statistique sociale
Stéphane Rossini
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Travail
Activité humaine visant à assurer les moyens d’existence, le travail est organisé et défini socialement. Pour l’économie actuelle, c’est un des facteurs de production fondamentaux, avec les matières premières, le capital (équipement et finances) et les savoirs ou technologies (dont une partie non négligeable appartient aux travailleurs : qualification, expérience).
Travail et société : Dans les sociétés complexes, modernes ou anciennes, le travail occupe une place centrale qui fait de son contrôle un enjeu majeur. Le caractère marchand des sociétés hautement industrialisées ou postindustrielles a pour conséquence que de plus en plus, les produits et les services personnels sont échangés non plus selon des règles de réciprocité, négociées par les interlocuteurs directs, mais s’acquièrent sur des marchés monétarisés. Ainsi, la survie physique et sociale dépend du volume d’argent dont dispose l’acteur individuel. Le travail professionnel étant l’unique source de revenu pour la majeure partie de la population adulte, l’emploi détermine une large part des conditions de vie ainsi que les options et les opportunités pour les parcours biographiques. Ensemble avec la valeur culturelle attribuée au travail, cette centralité factuelle explique l’impact désastreux du chômage (à long terme : dépersonnalisation, désocialisation).
Cadre social et organisationnel : Le secteur économique, jouissant en régime capitaliste d’une large autonomie face aux autres secteurs de la société nationale et à plus forte raison internationale, organise le “ monde du travail ”. Contrairement au modèle idéal du marché qui suppose la rencontre sans entrave d’acheteurs et de vendeurs d’égale capacité d’action, ce secteur connaît en réalité des structures institutionnelles fortes, surtout dans la sphère du travail. Mentionnons les structures hiérarchiques au sein des entreprises (en termes de subordination et de pouvoir, de prestige, d’autonomie ou dépendance, de rémunération), mais aussi la multiple “ segmentation ” du marché de l’emploi en domaines professionnels, plus ou moins cloisonnés selon le type de profession, le genre, le niveau de qualification exigé par l’entreprise, sa taille, etc.
Statut des travailleurs : La prépondérance du salariat par rapport à l’indépendance professionnelle (27.4 % d’indépendants parmi les personnes professionnellement actives en 1900, 11.1 % en 1990) et les structures de domination donnent lieu à un rapport de pouvoir entre patronat et salariat qui dépend de la conjoncture (relation numérique entre places de travail et main-d’œuvre), de la force des syndicats et du remplacement du travail humain par des machines (automatisation, rationalisation, robotisation, informatisation).
Types d’activité : L’évaluation sociale (rémunération, prestige) des métiers et des activités professionnelles est fondamentale. La distinction entre travail manuel et intellectuel a longtemps constitué une barrière entre ouvriers et employés, le décalage de prestige “ justifiant ” le décalage salarial. Elle subsiste sur le plan du prestige, mais s’effrite par rapport au salaire et au positionnement hiérarchique en raison de la robotisation de larges secteurs de la production et de l’informatisation du monde du travail dans son ensemble, également suite à une relative prolétarisation (surtout féminine) d’une partie des activités de service. Des différences importantes persistent sur le plan de la “ nature ” du travail, notamment quant à l'importance relative de trois composantes : travail sur des objets (p. ex. production, réparation), sur des symboles (dessiner, calculer, écrire…) et sur des relations sociales (soins, conseil, formation…). Ces différences influencent le fonctionnement psychique ainsi que les styles éducatifs.
R. W. Bierter e. a., Quel avenir pour le travail humain ? Un scénario, Réalités sociales, Lausanne, 1988. — R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Fayard, Paris, 1995. — R. Levy (Dir.), La vie au travail et son avenir, Réalités sociales, Lausanne, 1988. — U. Pfister, B. Studer et J. Tanner (Dir.), Le travail en mutation. Interprétation, organisation et pouvoir, du Moyen Âge à nos jours, Chronos, Zurich, 1996.
Voir : Chômage — Contrat de travail — Revenu — Temps de travail — Travail (Humanisation du) — Travail (Nouvelles formes de) — Syndicat
René Levy
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Travail au noir
L’expression “ travail au noir ” désigne en général toutes les activités échappant aux statistiques officielles parce qu’exercées d’une façon ou d’une autre en violation des prescriptions légales. On parle aussi, parfois, de travail “ occulte ”, “ non institutionnel ”, “ précaire ”, etc., ou encore d’“ économie immergée ”, “ parallèle ”, “ souterraine ”, “ marginale ”, “ périphérique ”, même si toutes ces expressions, assez imprécises, ne se recouvrent pas toujours.
Le phénomène du “ travail au noir ” couvre à vrai dire une réalité complexe, voire des réalités différentes, allant des activités en soi régulières mais dont le caractère illicite résulte de ce qu’elles s’exercent en violation de la législation sociale et/ou fiscale (travailleurs étrangers clandestins, enfants occupés avant l’âge minimal, personnes exerçant une activité accessoire non déclarée, etc.), aux activités en elles-mêmes illicites (production de contrefaçons de marque, par exemple) ou même criminelles (trafic d’armes, de stupéfiants, d’objets d’art, criminalité organisée, etc.).
Le “ travail au noir ” existe dans toute société, développée ou en voie de développement, au nord comme au sud, en Suisse comme à l’étranger. Compte tenu de la diversité de ses manifestations, sa “ mesure ” est toutefois difficile : elle peut se faire par l’estimation de la part “ cachée ” du PNB (le PNB “ parallèle ”), soit par l’estimation de l’importance en unités humaines de l’occupation clandestine.
R. A. Sauvy, Le travail au noir et l’économie de demain, Paris, 1984. — P. Mahon, L’économie souterraine : le cas italien, Réalités sociales, Lausanne, 1989. — “ Rapport du Conseil fédéral sur l’économie souterraine ”, in : Feuille Fédérale, juin 1987, II 1241.
Voir : Immigration — Travail — Travail (Loi sur le)
Pascal Mahon
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Travail d’intérêt général
Le travail d’intérêt général (couramment nommé par son acronyme TIG) désigne une forme récente d’exécution de peine dite alternative ou substitutive à l’emprisonnement. Découlant d’une évolution de la conception de la sanction pénale, l’accomplissement d’un travail utile à la collectivité en remplacement d’une incarcération met en œuvre les principes d’anti-répressivité et de réparation.
Admise dans la plupart des pays européens comme peine alternative (et appliquée de manière encore expérimentale dans certains pays), cette disposition est apparue en Suisse en 1974 dans le cadre de la justice pénale des mineurs (art. 82-99 Code pénal suisse).
L’ordonnance 3 relative au Code pénal suisse, dans sa modification du 4.12.1995, consacre l’exécution de courtes peines, soit d’une durée de trois mois au plus, sous forme de travail d’intérêt général. L’exécution ne peut être ordonnée qu’avec le consentement du condamné, et se déroule au profit d’un organisme à but social ou d’utilité publique désigné par l’autorité compétente. Quatre heures de travail d’intérêt général correspondent à un jour de privation de liberté. Le condamné doit en règle générale fournir au moins dix heures de travail par semaine.
À l’heure actuelle, le TIG en phase expérimentale est appliqué par la plupart des cantons.
R. M. Tomic-Malic, “ Étude de droit comparé sur l’application du Travail d’Intérêt Général dans les pays de l’Europe occidentale ”, in : Le Travail d’Intérêt Général a dix ans, le résultat en vaut la peine, Études et Recherches, Ministère de la Justice, Paris, mars 1994.
Voir : Mineurs (Droit pénal des) — Peines restrictives de droit (Peines de substitution) — Sanctions pénales
Caroline Regamey
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Travail dans les fabriques (Loi sur le)
La première loi fédérale concernant le travail dans les fabriques (LTF) a été adoptée par l’Assemblée fédérale en 1877. Cette loi fixait en principe la durée maximum du travail (11 heures par jour) ainsi que l’âge minimum (14 ans) et prévoyait la responsabilité objective du fabricant en cas d’accident du travail. En 1914 était votée la deuxième loi sur le travail dans les fabriques, elle-même amendée par la loi de 1919, qui instituait la semaine de 48 heures. Enfin, la LTF a été abrogée par la loi sur le travail de 1964, les dispositions sur la conciliation étant seules maintenues.
R. H.-P. Tschudi, La protection des travailleurs en droit suisse, Berne, 1987.
Voir : Travail — Travail (Loi sur le)
Alexandre Berenstein
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Travail (Durée du)
Temps pendant lequel un salarié exerce son activité au service de l’employeur. La durée du travail varie notablement selon les secteurs économiques et les régions. En Suisse, elle est parmi les plus élevées des pays industrialisés.
Voir : Temps de travail — Temps partiel — Travail — Travail (Marché du)
jpf
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Travail éthique
Le travail éthique devient une composante explicite de l’activité professionnelle dans les secteurs social et sanitaire. Il peut être considéré comme une activité collective conduite dans le cadre de leur pratique professionnelle et/ou de leurs relations personnelles ou sociales par tous les acteurs chargés d’une responsabilité à l’égard d’une personne dont ils ont la charge en vue de prendre des décisions qui concernent sa santé, son mode de vie et les traitements médicaux et sociaux qui leur seront proposés.
Ce type de préoccupations et de pratiques s’impose en raison du nouveau contexte démographique, des modes de vie actuels, des possibilités techniques disponibles et, surtout, de la diversité des valeurs auxquelles adhèrent les personnes concernées. Face à ces enjeux de taille, les choix ne peuvent être improvisés et ne sauraient être arrêtés sur des bases bureaucratiques. La capacité de pratiquer ce travail éthique s’apprend et s’exerce. C’est une nouvelle dimension des pratiques professionnelles auxquelles les instances de formation auront à porter une attention soutenue.
R. J.-P. Fragnière, “ Le rôle des professions sanitaires et sociales ”, in : J. Martin, Éthique et santé publique, Médecine et Hygiène, Genève, 1992.
Voir : Éthique — Profession
jpf
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Travail féminin
Les recherches sur le travail féminin rémunéré et non rémunéré se sont multipliées durant ces vingt dernières années, inspirées par l’idée centrale de la complémentarité de la sphère du travail et de la sphère privée. Ces recherches qui ont remis en cause le modèle d’analyse dominant — à savoir l’occultation de la dimension “ famille ” dans les études consacrées aux hommes au travail et la priorité donnée à cette dimension dès lors qu’il s’agit de femmes au travail — ont ouvert un champ d’étude novateur. Citons ici les principaux aspects qui ont fait l’objet d’études : les qualifications féminines (non reconnues, non rémunérées parce que soi-disant innées) ; les modalités de travail féminin (le temps partiel notamment) ; le travail domestique ; les professions féminines (infirmière, secrétaire, caissière) ; la ségrégation sexuelle et la mixité au travail.
R. C. Jobin, La discrimination sexuelle. Entre les activités professionnelle et domestique, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1995. — Vers l’égalité. La situation des femmes et des hommes en Suisse, Office fédéral de la statistique, Berne, 1996.
Voir : Égalité de traitement entre femmes et hommes — Femmes (Émancipation des) — Temps partiel — Travail
Françoise Messant-Laurent
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Travail (Humanisation du)
La mouvance de l'humanisation du travail fait partie d'une succession, au cours du XXe siècle, d'au moins 7 doctrines sur l'organisation optimale du travail :
1. l'organisation scientifique du travail selon Taylor (1910 - 1930) ;
2. la rationalisation fordiste (1920 - 1930) ;
3. les idées de communauté d'entreprise et de “ relations humaines ” (1930 - 1955) ;
4. le débat sur l'automatisation (1950 - 1960) ;
5. les doctrines de l'humanisation du travail et des systèmes socio-techniques (1965 - 1985) ;
6. les réflexions sur les “ nouvelles technologies ” et la “ société de l'information ” (1980-1990) ;
7. la rentabilisation accrue par le “ re-engineering ” des entreprises (1990 - ).
Lancée dans une période d'essor économique, l'humanisation du travail veut favoriser, davantage que les autres courants, la motivation et le développement de la personne, sa créativité et son initiative, par des mesures telles que l'élargissement et l'enrichissement des tâches (par rapport à leur émiettement précédent), l'autonomie partielle de groupes (hiérarchies plus plates), les systèmes de propositions pour améliorer les procédures, les cercles de qualité etc. On peut émettre l'hypothèse d'une relation entre la conjoncture économique et l'oscillation de ces doctrines entre un pôle de rationalisation technocratique et un pôle plus englobant, “ humaniste ”.
R. W. Bierter et al., Quel avenir pour le travail humain? Un scénario, Réalités sociales, Lausanne, 1988. — G. Friedman, Où va le travail humain?, Gallimard, Paris, 1963.
Voir : Bien-être social — Contrat de travail — Travail — Travail (Durée du) — Travail féminin — Travail (Loi sur le) — Travail (Marché du)
René Levy
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Travail (Loi sur le)
La loi fédérale sur le travail a pour but d'assurer la protection de la santé et de la vie des travailleurs dans l'exercice de leur activité salariée, en imposant aux employeurs le respect de règles minimales obligatoires dans les domaines suivants : hygiène ; prévention des accidents et des atteintes à la santé sur la place de travail ; durée du travail et du repos ; réglementation de l'activité nocturne et dominicale ; protection des jeunes, des femmes enceintes, de celles qui allaitent et des travailleurs ayant des responsabilités familiales ; règlements d'entreprises.
La loi sur le travail s'applique en principe à toutes les relations de travail existantes en Suisse, avec toutefois d'importantes exceptions. Sont notamment soustraites à son application, souvent en raison du fait que d'autres dispositions légales ou réglementaires leur sont applicables, les administrations fédérales, cantonales et communales, les entreprises de transports publics et de l'agriculture, de même que d'autres professions particulières.
Les offices cantonaux du travail sont chargés de vérifier l'application de la loi sur le travail. Les violations sont sanctionnées par la mise à l'amende et, exceptionnellement, par la poursuite pénale.
R. W. Hug, Commentaire de la loi sur le travail, Stämpfli, Berne, 1971.
Voir : Droit social — Flexibilité — Postfordisme — Travail
Jean-Bernard Waeber
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Travail (Marché du)
Le travail constitue collectivement l’ensemble des activités menées pour produire des biens et des services ; il se réfère à la contribution des individus à ce résultat. Le travail peut être rémunéré ou bénévole. Son évolution est influencée par son coût, à côté d’autres facteurs tels notamment l’existence d’une demande, l’organisation de la production, l’innovation technologique et la croissance de l’économie. Certains théoriciens réfléchissent sur le sens du travail et sa place dans la société et pour l’individu aujourd’hui, face à la crise, et demain, dans un monde informatisé, voire robotisé.
Le manque de travail crée des problèmes d’emploi appelés chômage depuis un siècle environ ; le plein emploi est atteint lorsque le marché du travail connaît des difficultés uniquement “ frictionnelles ”, à l’exclusion des problèmes conjoncturels ou structurels. Diverses interventions sont possibles pour favoriser la croissance de la demande de travail dans le cadre des politiques de l’emploi.
Face à la crise de l’emploi affectant plus spécifiquement certains pays développés, divers organismes internationaux dont l’OCDE et l’UE ont proposé des mesures visant à rendre plus souples les marchés du travail nationaux et à augmenter le niveau de qualification des travailleurs.
Site Internet : www.seco-admin.ch
Pierre Weiss
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Travail (Nouvelles formes de)
Le marché du travail est confronté actuellement à de profondes mutations marquées du sceau de la flexibilité. Celle-ci se manifeste en particulier par le développement de nouvelles de formes de rémunération (bonus, salaire au mérite, mais aussi stock options), de nouveaux modes d’organisation du travail, l’extension des conditions de travail atypiques, l’annualisation du temps de travail et l’accroissement des emplois à temps partiel. Ainsi, en Suisse, le nombre d’emplois à temps partiel s’est régulièrement accru au cours des deux dernières décennies. Le mouvement s'est encore accéléré depuis 1991 et le pourcentage de personnes occupées à temps partiel s’élève aujourd'hui à 28,3 % de la population active, un taux qui place la Suisse parmi les leaders mondiaux en la matière. De même, on constate qu’après des décennies de diminution continue, le pourcentage d’indépendants au sein de la population active helvétique s’est accru à nouveau, passant de 15,2 % en 1991 à 18 % en 2000. La récession du début des années 90 a encore accentué cette évolution puisque de nombreuses personnes ont trouvé dans ce statut une voie de sortie, souvent précaire, du chômage. Ce revirement de tendance s’explique aussi par le nombre croissant d’entreprises qui ont recours à “ l’outsourcing ” pour accomplir des tâches assumées auparavant par leurs employés.
Si ces mutations s’inscrivent dans une évolution à long terme des nos économies, elles remettent aussi en cause les fondements de nos assurances sociales qui ont été bâties sur une norme du travail salarié à plein temps. Compte tenu de ces changements, il conviendrait d’adopter des mesures visant à supprimer les différences de traitement qui existent dans le système actuel des assurances sociales entre le statut de salarié à plein temps et celui des indépendants ou d’employé à temps partiel. Il faudrait en particulier revoir la notion de revenu minimum de coordination qui fixe actuellement à 24'720 francs par année, quel que soit le taux d’occupation, le niveau de revenu professionnel à partir duquel la prévoyance professionnelle devient obligatoire. Contrairement aux années 80, où le travail à temps partiel constituait une source de revenu accessoire, le plus souvent temporaire, cette forme d’emploi touche aujourd’hui de plus en plus de personnes qui vont demeurer durablement dans ce statut, parfois jusqu’à la fin de leur vie active. Les salariés qui n’auront pas contribué à un deuxième pilier, en raison d’un taux d’occupation insuffisant, risquent de se retrouver dans une situation très précaire au moment de leur retraite. Il faudrait donc supprimer la clause relative au revenu minimum de coordination ou tout au moins l’abaisser en proportion du taux d’occupation des personnes concernées. Dans le même ordre d’idée, il ne faudrait pas limiter l’assurance accident non professionnel aux seules personnes employées plus de 8 heures par semaine. Ces réformes se justifient d’autant plus que le travail à temps partiel est associé, aujourd’hui encore, à des pénalités subies par les personnes qui choisissent ou qui sont contraintes d’adopter ce type d’emploi.
R. Y. Flückiger, “ Les conséquences des mutations de l’emploi pour le financement des assurances sociales ”, in : Le travail, nouvelle question sociale, édité par M.-H. Soulet, Éditions Universitaires Fribourg, Res socialis, Fribourg, 1999, pp. 97-125.
Voir : Flexibilité — Flexibilité du travail — Indépendant (Travail) — Inégalité et discrimination salariales — Marché du travail — Prévoyance professionnelle — Temps partiel — Working poor
Yves Flückiger
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Travail social
Dénomination globale des professions sociales et de leur champ d’action. La finalité du travail social est de remédier aux défectuosités de la vie en collectivité en portant une attention particulière aux populations les plus fragiles, en favorisant leur accès aux ressources : assurances sociales, aide sociale ou éducative.
Les travailleurs sociaux, qu’ils soient assistants sociaux, éducateurs spécialisés, éducateurs de la petite enfance, maîtres socioprofessionnels ou animateurs socioculturels, sont d’abord en contact direct avec les usagers, individus et groupes en difficultés ou susceptibles de le devenir. Réhabilitation, réinsertion, prévention, promotion, vont être selon la situation mises en priorité.
Le terme de travail social est parallèlement utilisé pour qualifier la discipline qui étudie les champs, les théories, les méthodes et les fonctions de ces activités dites sociales et éducatives. Le travail social constitue donc aussi un ensemble de savoirs systématiques.
L’action des travailleurs sociaux s’exerce habituellement dans des institutions ou services de type public ou privé. Au moyen d’aide matérielle, de services individuels ou collectifs, d’actions éducatives, d’apprentissage ou de stratégies spéciales, le travail social vise à améliorer la position d’un individu, d’une famille, d’un groupe ou d’une population-cible.
En donnant forme à ce qu’ils ont saisi des conditions de vie de leurs clients, les travailleurs sociaux peuvent rendre accessibles à un public plus large les revendications qui en découlent. Ils sont susceptibles d’apporter aux décideurs des informations capitales pour le pilotage des politiques sociales. En effet, le travail social nécessite en général une collaboration étroite avec les instances administratives et politiques et il a recours à la collaboration d’auxiliaires bénévoles.
Les praticiens du travail social bénéficient d’une formation réglementée et officiellement reconnue qui leur donne une culture commune et précise leur spécificité. Une vingtaine d’écoles supérieures en travail social délivrent en Suisse des diplômes ESTS pour un ou plusieurs métiers du travail social. Une protection officielle des titres entre en vigueur en 1997.
La force du travail social est son éthique qui valorise la dignité des personnes, l’attention à la qualité du lien social. Le travail social participe à la création de nouvelles formes d’aide et de service collectif correspondant aux problèmes sociaux du moment : lutte contre les fragmentations sociales en cours, gestion des conséquences de la dualisation de la société produisant de l’exclusion de manière quasi endémique. Les nouveaux problèmes appellent une rénovation en profondeur des professions sociales et des conceptions du travail social.
R. P. Berlie, V. Degoumois, e. a., Introduction au travail social et à l’action sociale, CORAS, Lausanne, 1982. — J.-P. Fragnière, M. Vuille, (Éds), Assister, éduquer et soigner, Réalités sociales, Lausanne, 1982.
Voir : Action sociale — Assistant social — Travailleurs sociaux (Formation des)
Charles Chalverat
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Travail social de groupe (TSG)
Modèle d’intervention sociale venu des États-Unis dans les années 50, s’appuyant sur des concepts de dynamique de groupe (K. Lewin - J.-L. Moreno) et, plus largement, des théories de la psychologie sociale.
Le travail social de groupe est utilisé comme support de conscientisation, d’éducation et d’animation, visant la créativité, le changement personnel, la médiation, le développement social et sociétal. Le groupe est envisagé comme un support momentané limité dans le temps et dans le lieu.
Il s’adresse en principe à des personnes concernées par les mêmes questions ou ayant un intérêt individuel ou collectif commun/des besoins non satisfaits.
Grâce au groupe, les participants peuvent entrer dans un processus d’entraide, de lutte contre l’isolement, la pauvreté, la marginalisation.
Le TSG s’enrichit des techniques d’intervention de réseaux.
Cette méthode est enseignée dans les Écoles de travail social comme moyen de prévenir la perte des liens sociaux.
Site Internet : www.sassa.ch
Voir : Action communautaire — Assistant social — Travail social
Charles Chalverat
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Travail sur appel
Le travail sur appel est une forme de travail atypique qui tend à se généraliser dans divers secteurs (la vente, par exemple, où un emploi sur trois est concerné, les assurances, les banques). D’occasionnel, comme il a toujours existé (remplacements pour cause de maladie ou de vacances par des personnes qui ne souhaitaient pas s’engager avec un contrat de longue durée), il est en passe de devenir la forme de flexibilité à outrance désirée par certains milieux patronaux qui la justifient pour des motifs économiques pour lutter contre des marges se rétrécissant sous l’influence de la concurrence et de la mondialisation. Par cette forme de travail, le patron reporte entièrement le risque de l’entreprise sur l’employé-e. Certains juristes y voient une violation du Code des obligations (art. 324, al.1, art.362).
Le contrat d’un-e travailleu-r-se sur appel ne précise ni durée, ni horaire de travail. La régularité de l’appel au même travailleur (contrats en chaîne) permet d’examiner la situation sous l’angle de la durée indéterminée des rapports de travail et non plus sous celui d’une activité irrégulière avec des rapports de travail distincts les uns des autres et de contrats de durée déterminée. Cette distinction n’est pas sans importance sur couverture sociale. En effet, si chaque appel est indépendant (contrat de travail de durée limitée), il n’y aura pas de versement du salaire en cas de maladie puisque seules les heures de travail sont payées, ni de délai de congé puisque l’engagement s’achève automatiquement à la fine de la période convenue, ni indemnité de l’assurance-chômage entre deux appels. Par contre, une indemnité pour vacances devra être versée. (8,33 %).
Le travail sur appel est donc à distinguer du travail occasionnel. Tous deux ont pour caractéristiques que le travailleur ne peut exercer son activité que si l’employeur lui propose du travail et qu’il n’est pas rémunéré pour le temps d’attente à disposition de l’employeur.
Le travail occasionnel offre une certaine souplesse pour celui qui ne souhaite pas avoir un travail fixe. Le travailleur n’a aucune obligation d’accepter la mission proposée et il a droit à des indemnités de l’assurance-chômage s’il ne travaille pas. Il est souvent conçu comme un gain accessoire.
Le travail sur appel présente des inconvénients majeurs pour celui ou celle qui doit l’accepter sans l’avoir choisi, parce que le marché de l’emploi ne lui offre pas d’alternative.
L’employé doit être à disposition de l’employeur en tout temps. Le travailleur n’a ainsi aucune possibilité de planifier sa vie privée. Des conséquences néfastes sur la vie de famille sont inévitables. La relation de dépendance envers le patron est totale. Ce dernier décide seul si son employé travaillera ou non. Sous peine de perdre cet emploi, le travailleur n’est pas en position de refuser le travail proposé. La notion d’heures supplémentaires disparaît bien évidemment.
Le contrat ne porte ni indication du taux d’occupation, ni mention d’un salaire garanti. L’absence de ces deux éléments serait contraire aux règles impératives du Code des Obligations (art. 39, al.1 et 2 CO, art 326, al.4 CO) et certains juristes souhaitent que le Tribunal des Assurances ait à se prononcer à ce sujet. Sans ces indications, l’employeur n’a donc aucune obligation à fournir du travail. Sans salaire sur lequel il peut compter, le travailleur ne peut ainsi établir aucun budget et sa situation risque rapidement de se détériorer et de se précariser.
C’est pour cela que l’on parle de nouvelles formes d’esclavage qui a pu être bannie à Genève dans la branche du commerce de détail non alimentaire grâce à une bonne convention collective renouvelée pour la période de 1998-2000 par les syndicats et le patronat. L’annualisation du temps de travail a représenté une alternative acceptable pour les deux parties. Elle allie la flexibilité réclamée par le patronat et la dignité humaine à laquelle chaque travailleur a droit.
Le travail sur appel se distingue également de l’horaire irrégulier à temps partiel dont le contrat prévoit un degré d’occupation fixe avec un salaire fixe. Il s’agit là d’une forme autorisée d’aménagement du temps de travail.
Voir : Convention de travail — Contrat de travail — Contrat type de travail — Flexibilité du travail — Marché du travail — Précarité — Syndicat — Temps de travail — Temps partiel — Travail — Travail (Nouvelles formes de)
Antoinette Meister-Borer et Anne-Françoise Paris
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Travailleurs âgés
Le terme de travailleur âgé, ou travailleur vieillissant, est une traduction du terme anglo-saxon “ ageing workers ”. Bien qu’il n’y ait pas de définition précise des travailleurs âgés, ce terme désigne la population des personnes actives de 50 ou 55 ans et plus mais n’ayant pas atteint l’âge de la retraite. La définition officielle du Bureau International du Travail (BIT) ne fait cependant pas explicitement mention de l’âge : les travailleurs âgés regroupent ainsi “ tous ceux qui, parce qu’ils avancent en âge, sont susceptibles de rencontrer des difficultés en matière d’emploi et de profession ”.
Depuis la fin des années septante dans de nombreux pays européens, un peu plus tardivement en Suisse (début des années nonante), un grand nombre d’observateurs ont constaté une diminution de la participation des personnes de plus de cinquante ans à la vie active. A cette diminution correspond, soit des départs en retraite anticipée, soit des situations de chômage pour une longue durée. Ces observations ont progressivement conduit au développement de nombreux travaux de recherche sur cette catégorie de population dans les disciplines des sciences humaines et sociales, notamment en économie. L’intérêt scientifique pour cette population n’est cependant pas nouveau, puisque des travaux de recherche pionniers ont été réalisés à partir des années trente, avant de connaître à partir des années cinquante une parenthèse ayant duré le temps des trente glorieuses. De manière semblable à notre contexte contemporain, les années trente se caractérisaient en effet, en premier lieu, par une crise de l’emploi de forte ampleur ayant touché particulièrement les travailleurs âgés et, en second lieu, par des préoccupations naissantes des pouvoirs publics envers le phénomène de vieillissement de la population.
Les travaux réalisés en économie se situent sur trois niveaux. Dans la perspective micro-économique, le postulat de base est que le départ en retraite anticipée est un acte volontaire et rationnel de la part d’un travailleur vieillissant, ce dernier ayant évalué coût et bénéfice qu’il peut retirer entre, d’une part, diminution des revenus et augmentation du temps de loisir, et d’autre part, maintien du revenu et temps partagé entre temps de travail et temps de loisir. La perspective méso-économique porte plus attention à la signification de la crise de l’emploi des années récentes. Plutôt qu’un simple effet de conjoncture, cette crise refléterait une transformation majeure des modalités du fonctionnement du marché du travail, avec, notamment, l’apparition de nouvelle techniques de management privilégiant la mobilité professionnelle plutôt que l’ancienneté dans les entreprises. Ces transformations ont eu pour conséquence une mise à l’écart des travailleurs âgés par le biais de la mobilisation des différents secteurs des assurances sociales (prévoyance professionnelle, chômage, invalidité). L’approche macro-économique est celle du financement des assurances sociales, notamment, des assurances vieillesse. Le retrait anticipé des travailleurs âgés est alors perçu constituer une situation paradoxale par rapport au coût engendré par le vieillissement de la population.
Bien que ne pouvant être négligé, cette troisième perspective, de par son caractère strictement comptable, rencontre néanmoins une critique sociologique qui s’appuie sur le constat que le phénomène des retraits anticipés du marché du travail d’une part, l’augmentation des espérances de vie et de vie sans incapacité d’autre part, ont créé une situation dans laquelle le risque retraite, lié au marché du travail, et le risque dépendance, qui se rapporte à la vieillesse, se sont désynchronisés, alors que leur synchronisation au moyen de la fixation d’un âge légal de la retraite constituait l’un des principes de base ayant présidé à la création des régimes de retraite nationaux lors de la première moitié du XXe siècle.
R J.-M. Le Goff, Les trajectoires des travailleurs âgés sur le marché du travail en Suisse et en Europe. Analyse socio-démographique, Réalités sociales, Lausanne, 1999. — M. Gognalons-Nicolet, J.-M. Le Goff, “ Retraits anticipés du marché du travail avant l’âge AVS : un défi pour les politiques de retraite en Suisse ”, Aspects de la sécurité sociale, No 1, OFAS, Berne, 2001.
Voir : Marché du travail — Marché du travail et vieillissement — Vieillissement de la popululation
Jean-Marie Le Goff
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Travailleurs sociaux (Formation des)
En Suisse, les travailleurs sociaux se forment actuellement dans 14 écoles. Certaines de ces écoles ont déjà obtenu le statut de Haute école spécialisée cantonale (HES), d’autres fonctionnent toujours sous le régime d’école supérieure de travail social (ESTS). En principe, dès 2003, toutes les filières de travail social seront proposées au niveau HES. Il existe également des formations débouchant sur une licence et/ou un diplôme aux universités de Fribourg et Zurich.
Les ESTS et HES-TS organisent la formation dans le cadre des exigences minimales définies par le Département fédéral de l’Intérieur (Ordonnance du 18 décembre 1995) ainsi que sur la base du Profil de la formation pour le travail social dans le cadre des hautes écoles spécialisées de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) du 4 novembre 1999 et du règlement concernant la reconnaissance des diplômes cantonaux des hautes écoles spécialisées du 10 juin 1999. D’une durée minimale de trois ans, la formation compte au moins 3200 heures. Elle comprend des enseignements théoriques de sciences humaines et sociales et de travail social, une formation pratique encadrée et un travail de diplôme. Les écoles offrent, de façon variable, des formations à plein temps et en emploi, dans les options suivantes : service social, éducation spécialisée, animation socioculturelle.
Sites Internet : www.hes-so.ch/fr/ — www.sassa.ch
Voir : Conférence suisse des hautes écoles spécialisées et des écoles supérieures de travail social (SASSA) — Conférence latine des écoles supérieures de travail social (CLESTS) — Formation continue en travail social (Diplôme de) — Hautes écoles spécialisées (HES)
Regula Villari
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Travaux atypiques et sécurité sociale
Depuis plusieurs années, dans un contexte de libéralisation de l’économie, de déréglementation, l’on observe une extension des travaux dits atypiques. Ceux-ci se démarquent des travaux qualifiés de typiques : généralement pratiqués à plein temps et pour une durée indéterminée. Le mot-clé est précarité (vu du côté des travailleurs) ou flexibilité (vu du côté des employeurs).
Généralement, le terme de travail atypique est associé à un statut qui n’est pas choisi par le travailleur : celui-ci ne peut accéder qu’à un emploi à temps partiel (alors qu’il veut un plein temps), ou à durée déterminée et courte (# indéterminée), ou intérimaire (# stable). Le maximum de précarité/flexibilité est atteint avec le travail sur appel (l’employeur décide seul de l’exécution de l’emploi). Certains travaux indépendants relèvent de la même problématique : à nouveau le statut n’est pas choisi (le travailleur ne trouve rien d’autre ou essaie de sortir du chômage), l’indépendance économique est discutable.
Les travaux atypiques posent des problèmes en matière de sécurité sociale :
— les personnes concernées sont fragilisées (davantage de besoins, moins de contributions au financement),
— elle peuvent être écartées de certains régimes (si l’accès dépend d’un minimum de rémunération ou d’horaire ; s’ils sont réservés aux salariés) ;
— les prestations en espèces peuvent être réduites (si le calcul prend en compte la rémunération ; si la protection est établie en référence à une période courte et que celle-ci correspond à un ou des emplois précaires).
Des solutions peuvent consister : à déconnecter du travail rémunéré certaines protections (soins, prestations familiales) ; à prévoir des garanties de revenu minimales (liées à des conditions de ressources) ; à ouvrir des régimes aux travailleurs indépendants ; à protéger spécifiquement les travaux atypiques ; à valoriser, en termes de droits à la protection, certains événements (maternité, garde d’enfants, accompagnement de personnes âgées ou handicapées).
R. L. Germani, “ Travail flexible et protection du travailleur ”, in : Cahiers genevois et romands de sécurité sociale, No 24-2000, pp. 61 ss. — P.-Y. Greber, “ La sécurité sociale face aux mutations actuelles du travail ”, in : Revue suisse des assurances sociales et de la prévoyance professionnelle, 2000, pp. 391 ss.
Voir : Flexibilité du travail — Sécurité sociale — Temps partiel — Travail — Travail (Nouvelles formes de) — Travail sur appel
Pierre-Yves Greber
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Trente glorieuses
Nom donné à la période 1945-1975, pendant laquelle les taux de croissance de la production, de la productivité, des revenus et de l’État social ont été exceptionnellement élevés. La notion est due à l’économiste Jean Fourastié (1907-1990).
Voir : État-providence — Sécurité sociale
jpf
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Tribunal fédéral des assurances
La Constitution fédérale ne fait pas mention du Tribunal fédéral des assurances. Ce dernier a été institué par la Loi fédérale sur l’assurance-maladie du 13 juin 1911. Depuis le 1er octobre 1969, son statut est contenu dans la Loi fédérale sur l’organisation judiciaire. Composé de 11 juges (et 11 juges suppléants), le Tribunal fédéral des assurances statue, en dernière instances, sur les recours de droit administratif. Sa compétence s’étend à l’ensemble des branches de la sécurité sociale. Il connaît également, en instance unique, des actions de droit administratif en matière d’assurances sociales. Selon le droit fédéral, le Tribunal fédéral des assurances (dont le siège est à Lucerne) tient lieu de cour des assurances sociales du Tribunal fédéral (dont le siège est à Lausanne). Il dispose, cependant, d’une large autonomie, notamment en ce qui concerne son organisation.
Site Internet : www.bger.ch/index.cfm?language=french
Voir : Assurance-maladie et l’assurance-accidents (Loi fédérale sur l’) — Recours (en assurances sociales)
Béatrice Despland
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Trois piliers
En Suisse, la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité repose sur une construction à trois étages ou trois piliers qui se complètent. Ce système a été ancré dans l’article 34quater de la Constitution fédérale en 1972. Une assurance fédérale, l’AVS/AI constituant le premier pilier, doit permettre de couvrir les besoins vitaux de manière appropriée. Le deuxième pilier, à savoir la prévoyance professionnelle, permet de maintenir dans une certaine mesure le niveau de vie antérieur (pour les personnes qui y sont affiliées). Enfin, la prévoyance individuelle, ou troisième pilier, a pour but d’encourager les personnes à se constituer une épargne pour améliorer leur niveau de vie antérieur, notamment au moyen de mesures fiscales et par une politique facilitant l’accession à la propriété du logement. Le système est complété par des prestations complémentaires qui ont pour but d’assurer un revenu supplémentaire et régulier aux rentiers de l’AVS/AI dont la situation économique et personnelle le justifie.
La conception des trois piliers n’a pas été le fruit d’une idée absolument nouvelle. En proposant de la faire figurer dans la Constitution fédérale, l’objectif du Conseil fédéral n’était pas d’abandonner l’ordre existant mais de poursuivre, par des améliorations décisives, l’aménagement de l’édifice existant, à savoir l’assurance d’État, la prévoyance professionnelle et la prévoyance individuelle. À ce propos on notera les déclarations contenues dans le “ Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale à l’appui d’un projet portant révision de la Constitution dans le domaine de la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité et le rapport sur l’initiative populaire pour une véritable retraite populaire (FF 1971 II p. 1625) ”. Pour atteindre ce but, il fallait dès lors définir les caractéristiques de chacun des piliers afin d’éviter que les pouvoirs publics n’interviennent au-delà de ce qui est nécessaire, tout en s’assurant que le système proposé garantit effectivement le degré de protection voulu. Un objectif que l’on estima prioritaire puisqu’on le rappela expressément à l’alinéa 4 de l’article 34quater de la Constitution qui demande à la Confédération de veiller “ à ce que la prévoyance professionnelle aussi bien que l’assurance fédérale puissent à long terme se développer conformément à leur but ”. Le système des trois piliers est donc le fruit de la recherche d’un équilibre qui permet aux diverses branches de se compléter et de diminuer les risques qui sont inhérents à chaque système. La coexistence d’un système de répartition (celui de l’AVS/AI) et de la capitalisation (celui de la prévoyance professionnelle) permet d’allier une très forte solidarité de base à la constitution du capital indispensable à l’économie. En outre, ce système permet de répartir au mieux entre les piliers, en raison de leurs méthodes de financement respectives, les risques inhérents à l’évolution démographique et au renchérissement. Un autre de ses points forts réside dans le fait que la responsabilité de la prévoyance est partagée entre l’État et l’initiative privée. En effet, si le premier pilier a un caractère nettement centralisé, le deuxième pilier repose quant à lui pour l’essentiel sur la responsabilité des institutions de prévoyance, des employeurs et des salariés. Les mesures qui visent à encourager la prévoyance individuelle ont enfin leur importance notamment pour les personnes qui ne peuvent se constituer un deuxième pilier. Le système n’est cependant pas exempt de faiblesse. Un grand nombre de personnes n’ont pas accès au régime de la prévoyance professionnelle et la variété des caisses entraîne des grandes différences de traitement, notamment en matière de compensation du renchérissement. De nombreux problèmes restent enfin à résoudre sur le plan de la coordination. L’œuvre de la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité n’est donc pas terminée et elle devra être consolidée au cours des prochaines années. Le système des trois piliers a cependant fait ses preuves et la portée des trois piliers ne devra pas être fondamentalement déplacée. Ce sont les conclusions auxquelles ont abouti cinq experts mandatés par le Département fédéral de l’Intérieur en 1990, ainsi que le rapport dudit département concernant la structure actuelle et le développement futur de la conception helvétique des trois piliers de la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité publié en 1995. Suite à la révision de la Constitution fédérale, ce n'est plus l'art. 34quarter, mais l'article 111 qui rappelle le principe des trois piliers.
R. E. Carigiet, J.-P. Fragnière, Le concept des trois piliers a-t-il un avenir?, Réalité Sociales, 2001.
Site Internet : www.bsv.admin.ch
Voir : Assurance-vieillesse et survivants (AVS) — Prévoyance professionnelle — Sécurité sociale (Architecture de la) — Taux de remplacement — Troisième pilier (ou prévoyance individuelle)
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Troisième âge (Universités du)
La première Université du troisième âge a été créée à Toulouse en 1972. Le mouvement s’est rapidement étendu à l’Europe (Belgique, Suisse, Italie), puis à l’Amérique du Nord (Canada) ; il se poursuit aujourd’hui dans d’autres pays et continents : on compte actuellement de 250 à 300 institutions de ce type, groupées en une Association internationale fondée en 1975. Il y a en Suisse une UTA dans chaque ville universitaire et au Tessin.
Dans le cadre d’une Université ou en liaison contractuelle avec elle, l’UTA rassemble sans considération de diplôme acquis des personnes en âge de retraite, voire de préretraite. Elle leur propose un programme de niveau académique dans tous les domaines du savoir et des arts. Les cours ont lieu l’après-midi et sont généralement assurés par des enseignants et gradués universitaires. À côté de ces rencontres plénières, des groupes d’étude et séminaires sont organisés à la demande des participants, ainsi que des cours de langues et des visites et voyages culturels. Dans plusieurs UTA, des actions de solidarité sont entreprises par les membres eux-mêmes. Autant que possible, les participants sont invités à prendre en main leur propre effort culturel.
Tous les deux ans, l’Association internationale des Universités du troisième âge réunit un Congrès où les membres des UTA apportent le résultat de leurs travaux particuliers, et ont l’occasion d’entendre et de discuter un certain nombre de conférences magistrales sur un thème commun.
R. R. Jeanneret (Éd.), Universités du troisième âge en Suisse, Peter Lang, Berne, 1985. — S. Mayence, R. Jeanneret (Éds), La recherche pour et avec les personnes âgées dans les Universités du troisième âge, (Actes du XIe Congrès de l’AIUTA), I.E.I.A.S., Université de Neuchâtel, 1987.
Site Internet : www.aiuta.asso.fr
Voir : Adultes (Éducation des) — Retraité — Vieillesse
Claude Bridel
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Troisième pilier (ou prévoyance individuelle)
Les systèmes des 1er et 2e piliers satisfont de façon collective les besoins de chacun en matière de prévoyance vieillesse, décès et invalidité, ce qui n’est pas le cas du 3e pilier dit de la prévoyance individuelle. Ce dernier laisse à chaque individu le soin de fixer lui-même les moyens financiers dont il entend disposer et de veiller au financement de ceux-ci. La prévoyance individuelle est favorisée par le biais de mesures fiscales et par une politique favorisant l’accession à la propriété du logement.
La prévoyance individuelle liée (pilier 3a) :
Ce système de prévoyance existe depuis 1987, il est réglé par l’ordonnance du 13 novembre 1985 sur les déductions admises fiscalement pour les cotisations versées à des formes reconnues de prévoyance. Deux formes de prévoyance y sont mentionnées :
— la police de prévoyance liée est une forme de prévoyance identique à l’assurance qui peut être conclue auprès d’une compagnie d’assurance,
— et le compte de prévoyance lié qui est principalement constitué d’une épargne auprès d’une fondation bancaire.
Le taux de déduction fiscale autorisé dans le cadre de la prévoyance individuelle liée diffère selon que la personne concernée est ou non assurée auprès d’une institution du 2e pilier. Les personnes sans activité lucrative n’ont pas accès au pilier 3a.
La prévoyance individuelle libre (pilier 3b) :
La prévoyance individuelle libre, autrement dit la prévoyance qui n’est pas liée à des obligations de droit public, comprend essentiellement l’épargne et les assurances privées. Contrairement aux piliers 1, 2 et 3a, elle fait en partie seulement office de prévoyance vieillesse, survivants et invalidité. Cette forme de prévoyance étant totalement libre, les sommes épargnées peuvent en principe être touchées et dépensées en tout temps. Les allégements fiscaux sont de ce fait restreints.
On ne peut estimer de manière fiable le capital global accumulé dans la prévoyance libre, mais cette somme représente probablement plusieurs fois le capital total accumulé dans le 2e pilier et dans le pilier 3a. Selon certaines estimations, elle atteindrait 1 à 2 billions de francs, ce qui démontre l’importance énorme de la prévoyance libre non seulement sur le plan de la politique de l’État, mais aussi sur celui de la politique économique et sociale.
R. E. Carigiet, J.-P. Fragnière, Le concept des trois piliers a-t-il un avenir?, Réalité Sociales, 2001.
Voir : Trois piliers
Michel Valterio et Brigitte Dumas
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Tutelle
La tutelle est un régime de protection volontaire ou imposé par l'État. L'autorité tutélaire nomme un/e tuteur/rice chargé/e d'assurer l'assistance et la représentation d'un/e pupille, à savoir une personne considérée comme partiellement ou totalement incapable de pourvoir à ses intérêts ou à ceux de sa famille, voire comme menaçante pour la sécurité d'autrui, en raison :
— de son jeune âge : tutelle des mineurs qui ne sont pas sous autorité parentale (art.368 CCS) ;
— d'une altération de ses facultés mentales (art. 369 CCS) ;
— de sa mauvaise gestion, de son inconduite, de son ivrognerie ou sa prodigalité (art. 370 CCS). Depuis les années 1980, la tutelle a souvent été utilisée pour tenter de maîtriser les situations toujours plus nombreuses de précarité, de surendettement et de pauvreté, ce qui a fréquemment mené à une impasse ;
— d'une condamnation à une peine privative de liberté d'une année ou plus (art. 371 CCS). Dans les faits, cette tutelle dite “des détenus” n’est quasiment plus prononcée aujourd’hui.
La tutelle a pour le/la pupille la conséquence de lui interdire ou de limiter fortement l'exercice de ses droits civils (notamment sa capacité contractuelle).
Le droit et le système de protection tutélaires sont actuellement l'objet d'une révision complète et opportune. Un premier groupe d’experts désigné en 1993 par l’Office fédéral de la Justice a rendu ses propositions de révision en 1995. Après avoir été publiquement débattues, celles-ci ont fait l’objet d’un premier avant-projet remis à une nouvelle commission interdisciplinaire d’experts instituée par le Conseil fédéral en 1999. Cette commission a été chargée de présenter d’ici la fin de l’an 2000 un avant-projet destiné à être mis en consultation.
R. B. Schnyder, M. Stettler, C. Haefeli, Zur Revision des schweizerischen Vormundschaftsrechts, Office fédéral de la Justice, Berne, 1995. — N. Queloz et al., Pauvretés sous tutelle, Armut unter Vormundschaft, Rapport scientifique au FNRS, Université de Fribourg, 1993.
Voir : Autorités tutélaires — Contrôle social — Curatelle — Tutelle (Droit de la)
Nicolas Queloz et Ariane Senn-Gromelle
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Tutelle (Droit de la)
Ensemble des normes de droit civil régissant le domaine de la protection des adultes. Le code civil (CCS), aux articles 360 à 455, prévoit différentes mesures de protection qui, du point de vue de l'atteinte portée à la liberté de la personne concernée, peuvent être classées - de la plus légère à la plus incisive - de la manière suivante : la curatelle (de représentation, de gestion, volontaire), le conseil légal (volontaire, coopérant, gérant, combiné), la tutelle (volontaire, non-volontaire).
Les dispositions du CCS règlent également l'organisation des autorités de tutelle et l'administration de la tutelle. Les mesures de protection sont mises en œuvre par les autorités de tutelle (autorité tutélaire et autorité de surveillance) et par les personnes qui exercent l'une des trois fonctions tutélaires (tuteur, curateur et conseil légal).
Font également partie du droit tutélaire, les normes traitant de la privation de liberté à des fins d'assistance, soit du placement ou du maintien d'une personne, pour des motifs déterminés, dans un établissement afin que lui soit apportée l'aide exigée par son état.
Le droit de la tutelle fait actuellement l'objet d'une révision complète. Une commission d'experts pour la révision du droit de la tutelle a été chargée de présenter un avant-projet de loi destiné à être mis en consultation.
R. Code civil suisse, art. 360 à 455. — M. Stettler, “ Représentation et protection de l'adulte ”, in : Droit civil I, 4e éd., Ed. Universitaires, Fribourg, 1997. — H. Deschenaux, P.-H. Steinauer, Personnes physiques et tutelle, 3e éd., Ed. Stämpfli, Berne, 1995.
Voir : Autorités tutélaires — Conseil légal — Curatelle — Tutelle
Margit Moser-Szeless
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TVA (Taxe à la valeur ajoutée)
Forme d’impôt. Née en France en 1954, la taxe à la valeur ajoutée (TVA) a été adoptée dans de nombreux pays, particulièrement ceux de l’Union Européenne. La TVA renchérit d’un certain pourcentage (réduit pour certains groupes de produits) les ventes des entreprises aux consommateurs indigènes. En Suisse, elle a été introduite récemment avec un taux relativement bas. Le peuple Suisse a donné son accord de principe pour une augmentation de 1 % de la TVA en faveur de l’AVS.
Voir : Fiscalité — Impôt (et sécurité sociale)
jpf
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Underclass
Le terme “ underclass ” (qu’on peut traduire par “ lumpen-prolétariat ” ou “ sous-prolétariat ”) est devenu d’un usage commun dans la littérature sociologique moderne. La question de l’underclass renvoie en premier lieu à des éléments dits objectifs : la concentration de la pauvreté au cœur des villes américaines, une pauvreté qui touche de plus en plus une population jeune, noire en rupture de scolarité, enfin une pauvreté qui semble s’accompagner d’un “ déclin des valeurs morales ”, du développement de la délinquance et de la violence urbaine.
Dans ce débat sociologique classique, une place à part doit être accordée aux travaux du sociologue de Chicago William Julius Wilson (1987). Le point de vue de William Wilson diffère nettement de celui de la gauche traditionnelle. Alors que celle-ci assimile les pauvres à des victimes du système social (le racisme, la discrimination raciale, etc.), Wilson admet (dans un premier temps) la pertinence du concept d’underclass pour désigner le développement au sein des ghettos d’une culture de la pauvreté caractérisée par le rejet des normes sociales de l’Amérique traditionnelle. Par contre, refusant de s’inscrire, à l’instar des conservateurs, dans une problématique de la responsabilité individuelle, il met l’accent sur les causes structurelles de la création d’une underclass. Son développement est la résultante de quatre facteurs essentiels : a) la récession économique qui a diminué l’employabilité d’une main-d’œuvre noire faiblement qualifiée ; b) les transformations spatiales de l’économie urbaine. Les entreprises qui se trouvaient autrefois au cœur des villes se trouvent désormais dans les banlieues ; c) la croissance continue des familles monoparentales et des naissances illégitimes relève partiellement des mêmes causes. Les conduites sexuelles sont beaucoup plus précoces et libres qu’autrefois, mais selon Wilson, la croissance du chômage a conduit à un manque “ d’hommes épousables ”. Les jeunes femmes noires ne voient pas grand intérêt à épouser des jeunes gens à la rue ; d) mais le facteur décisif, résulte enfin d’une modification de la composition sociale des quartiers du centre ville. La création d’emplois tertiaires dans les banlieues a drainé les couches ascendantes et privé les jeunes de modèles sociaux de référence. L’underclass constitue donc un problème réel et grave.
La paupérisation relative de certains quartiers des villes européennes, la croissance rapide de problèmes sociaux dans ces mêmes quartiers font penser inévitablement à la situation américaine. De nombreux sociologues britanniques se demandent aujourd’hui si la question de l’underclass n’est pas en train de devenir une question européenne.
Jusqu’à présent, les sociologues français partagent un point de vue différent. La ségrégation sociale étant plus faible en Europe, on note une moindre liaison entre l’exclusion spatiale et les facteurs raciaux, ainsi qu’une forte tradition d’intervention de l’État. Cependant, un certain nombre d’entre eux jugent que les évolutions en cours peuvent, potentiellement, conduire à des situations similaires.
R. F. Dubet, D. Lapeyronnie, Les quartiers d’exil, Seuil, Paris, 1992. — L. Wacquant, “ L’hyper-ghetto ”, in : P. Bourdieu, La misère du monde, Seuil, Paris, 1993. — W. J. Wilson, Les oubliés de l’Amérique, Montchrestien, Paris, 1995.
Voir : Désaffiliation — Pauvreté — Pauvreté (Nouvelle)
François-Xavier Merrien
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UNESCO
L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture est l’une des seize institutions spécialisées du système des Nations Unies. Elle a été juridiquement fondée en 1946.
R. J.-C. Zarka, Les institutions internationales, Ellipes, Paris, 1996.
Site Internet : www.unesco.org
Voir : Organisation des nations unies (ONU)
jpf
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Union européenne (Instruments de l’)
L’action de l’Union européenne en matière de politique sociale s’est progressivement étoffée au cours des années. Après des débuts extrêmement modestes (le Traité de Rome de 1957 ne contenait que fort peu d'articles concernant spécifiquement la politique sociale), l'Acte unique européen de 1986 donne une impulsion nouvelle à la politique sociale, notamment dans les domaines de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail, ainsi du dialogue avec les partenaires sociaux.
L'adoption de la Charte des droits sociaux fondamentaux (1989) répond au même souci de ne pas négliger la dimension sociale dans le cadre de la mise en place d’un marché unique européen. Elle fixe les grands principes sur lesquels se fonde le modèle européen du droit du travail. Elle énonce notamment les objectifs suivants : l’amélioration des conditions de vie et de travail, la promotion de la liberté d'association et de la négociation collective, l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes, la protection des personnes âgées et des personnes handicapées.
Le Traité de Maastricht (1992) marque une étape supplémentaire avec l'adoption du Protocole sur la politique sociale, qui renforce les compétences et moyens d’action de l’Union dans ce secteur. Suite à l’adoption du Traité d’Amsterdam (1997), la promotion de l'emploi fait son entrée dans les objectifs communautaires et l’Union européenne s’attelle à l’élaboration d’une stratégie coordonnée pour l'emploi, dont l'élément clé est constitué par l’adoption de lignes directrices communes. Avec le Traité d’Amsterdam, l'égalité entre hommes et femmes devient également un objectif central de l’Union, qui affirme sa volonté d’éliminer les inégalités entre hommes et femmes dans tous les domaines.
R. O. Quintin, B. Favarel-Dapas, L’Europe sociale, Enjeux et réalités, coll. Réflexe Europe, La Documentation française, Paris, 1999. — P. Rodière, Droit social de l’Union européenne, LGDJ Montchrestien, Paris, 1998.
Site Internet : www.europa.eu.int
Voir : Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs — Communauté européenne et sécurité sociale — Union européenne (Réglementation de l') — Union européenne (UE) — Sécurité sociale
Jean-Michel Bonvin
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Union européenne (Réglementation de l’)
L’un des principaux actes de l’Union européenne en matière sociale est le règlement No 1408/71 du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, ainsi que ses modifications ultérieures. Il s’agit de la coordination des régimes de sécurité sociale, nécessaire à l’amélioration de la mobilité à l’intérieur de l’Union.
Plusieurs directives sont destinées à réaliser le principe de l’égalité entre hommes et femmes qui figure à l’article 119 du traité de Rome : 1975, égalité des rémunérations ; 1976, égalité de traitement dans le travail ; 1978, en matière de sécurité sociale ; 1986, dans les régimes professionnels de sécurité sociale ; 1986, hommes et femmes exerçant une activité indépendante et protection de la maternité.
En 1989, le Conseil a adopté une directive-cadre relative à la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail ; il a par la suite adopté une série de directives particulières, relatives à des aspects spéciaux de ces mesures.
Il n’est au surplus pas possible, dans le cadre de cet article, de s’étendre sur les autres règlements ou directives adoptés en matière sociale par l’Union européenne. On citera néanmoins les textes suivants : règlement sur la libre circulation des travailleurs (1968), directives relatives aux licenciements collectifs (1975), au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d’entreprises (1977), à l’insolvabilité de l’employeur (1980), à la sécurité et à la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (1992), à l’aménagement du temps de travail (1993), au comité d’entreprise européen (1994), à la protection des jeunes au travail (1994), au congé parental (1996).
R. G. Guéry, La dynamique de l’Europe sociale, Paris, 1991. — G. et A. Lyon-Caen, Droit social international et européen, 8e éd., Paris, 1993.
Site Internet : www.europa.eu.int
Voir : Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs — Communauté européenne et sécurité sociale — Union européenne (Instruments de l') — Union européenne (UE) — Sécurité sociale
Alexandre Berenstein
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Union européenne (UE)
Organisation supranationale fondée sur les Communautés européennes (CE – CECA – EURATOM), complétée par les formes de coopération des deuxième et troisième pilier (politique étrangère et de sécurité commune et coopération policière et judiciaire en matière pénale). Le traité sur l’Union européenne est entré en vigueur le 1er novembre 1993. Son article G portant modification du traité CE n’a pas substantiellement changé les règles communautaires relatives à la politique sociale. Des compétences supplémentaires en matière de législation sociale ont en revanche été attribuées à la Communauté européenne par traité d'Amsterdam en vigueur depuis le 1er mai 1999.
R. V. Constantinesco, La structure du Traité instituant l’Union européenne, Cahiers de droit européen, 1993, pp. 251 ss.
Site Internet : www.europa.en.int
Voir : Communauté européenne — Sécurité sociale — Union européenne (Instruments de l') — Union européenne (Réglementation de l')
Bettina Kahil-Wolff
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Union libre
Le terme union libre (ou le concubinage) désigne la communauté de vie durable et, en principe, exclusive que forment deux personnes sans se marier. Cette communauté présente, en général, une composante affective, spirituelle, corporelle et économique. Les deux personnes qui forment l’union libre peuvent être de sexe opposé ou du même sexe.
Il peut y avoir différentes raisons pourquoi le couple ne veut pas s’engager juridiquement par le mariage : le but de mieux faire connaissance avant le mariage, la volonté de ne pas mélanger la relation affective avec des obligations juridiques, la sauvegarde d’avantages économiques ou l’impossibilité de se marier (empêchements du code civil, divorce en suspens, interdiction du mariage des couples homosexuels).
L’attitude de la société envers l’union libre a beaucoup évolué pendant le XXe siècle. À son début, la majorité des cantons – tous alémaniques, sauf le Valais – interdisait encore le concubinage. La dernière de ces interdictions, celle du canton du Valais, a été levée en 1995. L’union libre est, aujourd’hui une forme de vie répandue et largement acceptée par la société.
Selon les chiffres du recensement populaire de 1990, 8,8 % des couples hétérosexuels vivant en ménage commun n’étaient pas mariés, dont 17 % avaient des enfants (97 % des couples avec enfants sont alors mariés). On peut donc estimer à 300'000 au moins le nombre de personnes vivant en concubinage hétérosexuel en Suisse, à quoi s’ajoutent un nombre difficile à estimer de couples homosexuels (chiffre qui peut s’élever entre 50 et 200'000 personnes, mais des statistiques à ce sujet n’existent pas).
L’union libre est protégée par la Constitution fédérale : d’une part, toute discrimination à cause du “ mode de vie ” est interdite par l’art. 8 al. 2, d’autre part, la vie en concubinage fait partie de la “ vie privée ” protégée par l’art. 13.
L’union libre n’est pas prévue dans la législation suisse. Le mariage est la seule structure juridique offerte par le droit suisse pour la vie en couple. Cela ne veut toutefois pas dire qu’il y a absence de droit : l’union libre est soumise aux règles ordinaires du droit, notamment du droit des contrats. Sous certaines circonstances, la vie commune peut alors déclencher des obligations mutuelles. En ce qui concerne les rapports avec les enfants, il n’y a que peu de différences entre couples mariés et couples non mariés. En revanche, en droit des assurances sociales ou en droit des étrangers par exemple, la vie commune des concubins, considérés comme des personnes célibataires, n’entraîne ni un droit à des prestations pour survivants ni un droit à l’octroi d’une autorisation de séjour pour le partenaire étranger.
La moitié des pays de l’Union européenne connaît une institution juridique pour les couples non mariés, soit limitée aux couples de même sexe, soit ouverte à tous les couples non mariés. En Suisse, depuis 2001, le canton de Genève permet aux concubins – de même sexe ou de sexe opposé – l’enregistrement de leur partenariat. Au niveau fédéral, une initiative parlementaire, à laquelle le Conseil national a donné suite le 17 septembre 1999, demande une législation sur un partenariat enregistré, initiative qui vise toutefois avant tout la situation des couples homosexuels.
R. Centres sociaux protestants, Aspects juridiques de l’union libre, et : Parents célibataires, les deux : Lausanne, 1996 — F. Guillaume, R. Arn, Cohabitation non maritale. Évolution récente en droit suisse et étranger, Genève 2000. — B. Pulver, L’union libre, Réalités sociales, Lausanne, 1999 — B. Pulver, “ Les effets juridiques de l’union libre. Union libre et assurances sociales ”, in : Aspects de la sécurité sociale, 4/2000, pp. 36-42.
Voir : Couples de même sexe — Divorce — Famille — Mariage
Bernhard Pulver
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Union suisse des syndicats autonomes (USSA) àð Syndicat
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Union suisse pour décriminaliser l'avortement (USPDA)
L Union suisse pour décriminaliser l avortement (USPDA) est une organisation apolitique et non confessionnelle. Elle est ouverte à toute personne qui partage ses opinions : c'est la femme qui est la mieux placée pour juger si elle est prête à assumer la responsabilité d’élever un enfant. Toute femme doit pouvoir décider d’interrompre une grossesse non désirée en toute dignité, selon ses convictions et sans contraintes. Depuis 1973, l'USPDA s'engage pour la modification du code pénal suisse qui interdit l’avortement. Elle soutient le régime du délai qui légalise l’interruption de grossesse dans les premières semaines, ainsi que tout effort de diminuer le recours à l’avortement (éducation sexuelle, développement des centres de planning familial). L'USPDA collabore avec d'autres organisations pour défendre le droit au libre choix. Elle fournit une information objective sur l’avortement. Son centre de documentation est à la disposition du public, des médias et des politicien(ne)s.
USPDA, case postale, 3052 Zollikofen
Site Intenet : http://www.svss-uspda.ch
Voir : Avortement — Femmes (Émancipation des) — Planning familial
Anne-Marie Rey
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Union syndicale suisse (USS)
L’Union syndicale suisse (USS), créée en 1880, est une confédération (ou centrale) syndicale dont le siège est à Berne et regroupe 13 fédérations syndicales membres et une fédération associée (état en 2001). Elle représente un effectif de 380’384 adhérent-e-s (1999) sans les 17'000 adhéren-e-s environ de la fédération associée. Au niveau des cantons et des régions, l’USS est présente sous la forme d’unions syndicales constituées de sections cantonales ou régionales des fédérations membres. Dans ses activités, l’USS s’engage notamment pour la défense et le développement des assurances sociales, la défense des chômeuses et des chômeurs et la lutte contre le chômage. Les moyens qu’elle préconise sont entre autres : le partage et la réduction du temps de travail, l’égalité de traitement entre femmes et hommes, l’intégration des ressortissant-e-s étrangers, l’intégration européenne, la démocratie au niveau de l’entreprise, le respect de l’environnement, une composante sociale dans le commerce mondial, le respect des droits de l’homme, etc.
L’USS est active publiquement en prenant position sur tous les sujets qui l’intéressent, par le biais de communiqués ou conférences de presse. Elle exerce ses activités de lobby en participant aux travaux de nombreuses commissions extra-parlementaires ainsi qu’aux procédures de consultation fédérale. L’USS collabore surtout avec les partis de gauche (Parti socialiste suisse d’abord) et les “ Verts ” du Parlement. Elle entretient également des contacts réguliers avec des membres du Conseil fédéral et de l’Administration fédérale.
L’USS intervient aussi directement dans la vie politique, en lançant des initiatives ou des référendums, seule ou dans le cadre d’alliances avec d’autres organisations syndicales, politiques ou autres. Elle apporte également son soutien à des initiatives ou des référendums lancés par d’autres organisations et met sur pied, seule ou avec d’autres organisations, des manifestations nationales à Berne.
Le personnel politique de l’USS se compose de 8 secrétaires syndicaux et 2 rédacteurs qui se répartissent les dossiers suivants : économie (Suisse et relations extérieures), droit du travail, sécurité sociale, santé et sécurité au travail, main-d’œuvre étrangère et ressortissant-e-s étranger-e-s, questions féminines, formation professionnelle, etc.
Les organes de l’USS sont : le Comité présidentiel, le Comité, l’Assemblée des délégué-e-s et le Congrès qui se réunit tous les 4 ans. L’USS est aussi dotée d’un Institut de formation syndicale de Suisse (ceo). Elle est cofondatrice de l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière (OSEO) et du Solifonds (Fonds de solidarité pour la libération sociale dans le Tiers-monde). Au niveau international, l’USS est membre de la Confédération européenne des syndicats (CES) et de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL). Chaque année, elle participe activement à la Conférence internationale de l’Organisation internationale du travail (OIT). L’USS édite un Service de presse en trois langues et publie aussi des études sur les sujets qui la concernent directement (Séries Documentation de l’USS et Dossier, coll. Documents de l’Union syndicale suisse aux éditions Réalités sociales).
R. Union syndicale suisse, Un siècle d’Union syndicale suisse 1880 - 1980, Office du Livre, Fribourg, 1980 (épuisé).
Sites Internet : www.uss.ch — www.etuc.org — www.cisl.it — www.etuc.org/etui — www.oit.org
Voir : Syndicat
Fernand Quartenoud
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Unité d’accueil temporaire (UAT)
L’unité d’accueil temporaire (UAT) est une structure de prise en charge pour personnes âgées dépendantes ou seules et pour handicapés vivant à domicile. Ce service des établissements sanitaires vaudois consiste à offrir à des bénéficiaires extérieurs la gamme des prestations qu’un établissement offre habituellement à ses propres pensionnaires ou patients. Pour cela, l’établissement accueille temporairement des personnes à qui il offre, selon les besoins, un repas, un lit, des soins ou un temps d’animation, et ceci pendant la journée, pour une nuit ou au cours d’un week-end.
L’UAT est donc une structure intermédiaire entre domicile et établissement. Elle utilise les ressources de l’établissement au profit d’une population vivant à son domicile. La gestion de l’UAT revient à l’établissement, la population prise en charge vit par contre dans la communauté. L’UAT est une structure d’appui et de décharge dans une perspective de santé communautaire. Elle contribue également à ouvrir les établissements sur leur environnement.
R. F. Couchepin e. a., Une expérience sans fin, AVDEMS, Lausanne, 1990.
Site Internet : www.renova-vd.ch
Voir : Home/Établissement médico-social (EMS) — Organisme médico-social vaudois (OMSV) — Politique de la santé — Soins et aide à domicile
Bernard Bachelard
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Universalité
L’universalité se rapporte au champ d’application personnel des systèmes et régimes de sécurité sociale. Elle en représente l’extension maximale (sous réserve de protections facultatives s’étendant à l’étranger). L’universalité consiste dans la couverture à titre obligatoire de l’ensemble de la population résidant dans un État (limitée éventuellement par un critère de nationalité) : salariés, indépendants, personnes sans activité rémunérée. Elle se situe dans la perspective de la reconnaissance du droit à la sécurité sociale à chaque être humain. L’universalité est parfois appelée généralisation. En Suisse, l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité (AVS/AI) et l’assurance-maladie (assurance obligatoire des soins) sont universelles.
R. G. Perrin, “ Les nouvelles frontières de la sécurité sociale ”, in : Revue belge de sécurité sociale, Bruxelles, 1977, pp. 214 ss.
Voir : Affiliation obligatoire (Principe de l’) — Champ d’application personnel — Sécurité sociale — Sécurité sociale (Généralisation de la)
Pierre-Yves Greber
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Urbanisation
Phénomène qui correspond à la croissance de la proportion des personnes qui habitent une ville par rapport à l’ensemble de la population. Des transformations liées à l’urbanisation ont induit d’importants changements des modes de vie. À ce titre, ils posent des problèmes nouveaux qui appellent une redéfinition et un élargissement de secteurs entiers de la politique sociale.
Voir : Modes de vie — Société industrielle
jpf
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Usure professionnelle – Burnout
Le burnout, ou usure professionnelle, est un état d’épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’une implication à long terme avec des personnes (usagers, clients) dans des situations émotionnellement exigeantes et stressantes.
Il peut présenter des symptômes aux niveaux :
a) des sentiments : insatisfaction, irritabilité, rigidité, impuissance, indifférence ;
b) des somatisations : insomnie, ulcères, maux de dos, migraines, etc. ;
c) de la vie personnelle : dépression, abus d’alcool, de médicaments, troubles familiaux, etc. ;
d) des relations : retrait, condescendance, paranoïa, cynisme ;
e) du travail : absentéisme, évitement des usagers ou surinvestissement improductif.
Les études sur le burnout mettent l’accent sur les causes environnementales ou contextuelles plutôt que sur les facteurs individuels.
L’axe prioritaire de prévention devrait consister en une redéfinition du poste de travail et une clarification des objectifs institutionnels et supra institutionnels en fonction des ressources, du sens et de l’efficacité pour les problèmes des usagers.
R. A.-M. Pines e. a., Le Burnout, Le Jour éditeur, Montréal, 1990. — N. Aubert, M. Pagès, Le stress professionnel, Éditions Klincksieck, Paris, 1989.
Voir : Bien-être —Personnalité (Protection de la) — Travail (Nouvelles formes de) — Travail social — Supervision
Louis-Pierre Roy
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Victimes d’infractions (Loi fédérale sur l’aide aux) (LAVI)
La prise en considération progressive des conséquences des actes de violences sur les victimes a abouti à l’introduction dans la Constitution fédérale de l’art. 64ter dont la teneur est la suivante : “ La Confédération et les cantons veillent à ce que les victimes d’infractions contre la vie et l’intégrité corporelle bénéficient d’une aide. Celle-ci inclura une indemnisation équitable lorsqu’en raison de l’infraction, ces victimes connaissent des difficultés matérielles. ” Accepté par le peuple suisse en votation populaire en 1984, ce nouvel article fonde l’élaboration de la loi fédérale sur l’aide aux victimes d’infractions (LAVI) entrée en vigueur le premier janvier 1993.
Le législateur accorde ainsi une place spécifique à la victime dans la procédure pénale et précise, par ailleurs, les devoirs de la collectivité publique à son égard.
La LAVI reconnaît comme victime toute personne ayant subi — du fait d’une infraction pénale — une atteinte directe à son intégrité physique, sexuelle, psychique. Elle concerne également l’entourage des victimes directes : parents, enfants et conjoint(e) principalement.
La LAVI déploie ses effets dans trois domaines :
1. L’aide et les conseils aux victimes, par la création de centres de consultation (LAVI, art. 3). Les victimes et leur entourage sont souvent en état de choc car elles viennent d’être confrontées à un événement qui a bouleversé leur vie. Elles ont besoin d’être entendues et soutenues dans leur effort pour surmonter le souvenir traumatisant. Ce travail de “ dé-victimisation ” est sans doute la raison essentielle de l’existence des centres LAVI car les connaissances actuelles dans ce domaine démontrent bien la nécessité d’une approche centrée sur l’intégration du traumatisme dans le parcours de vie des personnes victimisées.
2. La protection et le renforcement de la position de la victime dans la procédure pénale (LAVI, art. 5 à 10). Citons notamment les possibilités :
— de se faire accompagner par une personne de confiance aux auditions de police ou chez le juge ;
— de demander à éviter la confrontation avec l’auteur de l’infraction ;
— de demander le huis clos durant les audiences de jugement ;
— de pouvoir être entendu(e) par une personne du même sexe s’agissant de victimes d’agressions sexuelles ;
— d’obtenir une décision judiciaire ;
— de faire valoir ses prétentions civiles et de former un recours dans ce domaine.
De plus, la LAVI précise que la police informe la victime de l’existence des centres de consultation et que les autorités l’informent de ses droits à tous les stades de la procédure.
La réparation par l’État du préjudice. La victime peut en effet demander une indemnisation pour le dommage et le tort moral subis dans le canton où l’infraction a été commise, pour autant qu’elle ne puisse pas être dédommagée par l’auteur ou par les assurances sociales ou privées.
Les cantons sont chargés de l’application de la loi fédérale.
R. G. Piquerez, “ La nouvelle loi sur l’aide aux victimes d’infractions : quels effets sur la RC ? ”, in : Revue jurassienne de jurisprudence, No 1, 1996. — A. Kuhn, “ Les fondements historiques et théoriques de la loi fédérale sur l’aide aux victimes d’infractions ”, in : Actes du colloque Violence et aide aux victimes : réflexions et expériences, Centre LAVI, Lausanne, 1994. — R. Hellbrunn, C. Lienhard, P. Marin, Peut-on aider les victimes ? Éditions Erès, Toulouse, 1985. — B. Corboz, “ Les droits procéduraux découlant de la LAVI ”, in : La semaine judiciaire, No 4, 1996. — Aide aux victimes d’infractions, Troisième Rapport de l’Office fédéral de la justice au Conseil fédéral concernant l’exécution et l’efficacité de l’aide aux victimes (1993-1998), Berne, mai 2000.
Voir : Sanctions pénales — Travail social — Violence
Maryse Bloch
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Vie associative
Mouvement créé en 1998 et rassemblant des représentants d’une multitude d’associations d’utilité sociale défendant les intérêts des milieux associatifs, des familles, des femmes, des consommateurs, des personnes “ vulnérables ” (étrangères, handicapées, jeunes, sans travail), dans le but de présenter une liste de candidats à l’Assemblée constituante vaudoise. Vie associative a obtenu d’emblée 4 sièges au sein de cette assemblée de 180 membres et en avait 9 en 2001 suite à plusieurs ralliements. Vie associative a été un des facteurs contribuant à un climat d’ouverture de la Constituante à des préoccupations plus larges que celles de la politique usuelle. Sur la base d’un travail substantiel de préparation, elle a contribué à faire adopter des propositions ayant trait à la reconnaissance de la place du bénévolat, des associations, des familles, à une assurance-maternité cantonale, aux personnes handicapées, aux consommateurs, à l’égalité hommes-femmes, à la médiation, etc.
Sites Internet : www.appel-vaud.vd.ch — www.vaud.ch — www.benevolat.ch
Laurence Martin
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Vieillesse
“ La dernière période de la vie humaine, caractérisée par un affaiblissement global des fonctions physiologiques et des facultés mentales ” (Le Grand Robert). Cette définition d’ordre biologique et physiologique, qui fait rimer vieillesse et sénescence coexiste dans nos sociétés avec une représentation collective selon laquelle l’entrée dans la vieillesse est marquée par le passage à la retraite, donc l’arrêt d’une forme d’insertion dans la société caractérisée par le travail. Or, au fil des dernières décennies, s’est opérée la dissociation croissante entre le moment de la retraite — toujours plus précoce — et celui de la sénescence — toujours plus tardif —, ce qui provoque une tension entre la perception sociale de la vieillesse et sa définition biologique.
La longévité croissante a fait surgir la crainte qu’elle ne conduise à une augmentation massive de la morbidité dans le grand âge. Les travaux récents de l’Université de Duke (E.-U.), confirmés aujourd’hui pour la Suisse par ceux de l’Université de Genève, établissent au contraire que l’évolution récente des sociétés occidentales a produit une amélioration significative de l’état de santé de la population âgée.
R. Commission fédérale, Vieillir en Suisse, Office fédéral des imprimés, Berne, 1995. — G. Heller (Éd.), Le poids des ans. Une histoire de la vieillesse en Suisse romande, Éditions d’En Bas, Lausanne, 1994.
Voir : Cycle de vie — Espérance de vie — Gérontologie — Retraite (Âge de la) — Vieillissement de la population
Christian Lalive d’Épinay
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Vieillesse (Politique de la)
A proprement parler, il n’y a pas de politique de la vieillesse en Suisse. Il existe cependant un ensemble de mesures qui correspondent aux interventions des pouvoirs publics dans le domaine de la vieillesse. Elles concernent :
a) le revenu des personnes âgées (en particulier par le système des trois piliers),
b) la santé : par les mesures concernant les établissements médico-sociaux et le maintien à domicile,
c) le soutien à l’insertion sociale des personnes âgées et aux pratiques associatives qu’elles développent.
L’ampleur des phénomènes liés au vieillissement de la population et à la forte présence des retraités dans le tissu social conduit les pouvoirs publics à multiplier les initiatives dans tous ces domaines. De nombreux articles de ce dictionnaire développent ces différents aspects.
R. Commission fédérale, Vieillir en Suisse, Office fédéral des imprimés, Berne, 1995.
Site Internet : www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Voir : Cycle de vie — Espérance de vie — Gérontologie — Retraite (Âge de la) — Solidarité — Vieillesse — Vieillissement de la population
jpf
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Vieillesse (Psychologie de la)
Dire ce qu’est la psychologie de la vieillesse exige de définir, dans un premier temps, ce qu’est la vieillesse. Or la notion de vieillesse est à la fois polysémique et imprécise :
— Tantôt elle renvoie à une étape, la “ dernière période de la vie normale qui succède à la maturit頔 (Petit Robert 1). Mais quand commence et quand finit cette étape ? Nul ne peut en décider, tant il est vrai que le vieillissement procède d’une grande variabilité interindividuelle - nous ne vieillissons pas tous au même rythme - et intra-individuelle : premièrement, nous vieillissons différemment sur les plans biologique, psychologique et social ; deuxièmement, notre vieillissement individuel est lui-même différentiel (nos organes s’usent plus ou moins vite en fonction de notre hérédité, de nos circonstances et contextes de vie – paramètres influencés à leur tour par le milieu social, culturel, économique, politique, géographique et historique dans lequel nous vivons).
— Tantôt la notion de vieillesse évoque un état : “ le fait d’être vieux ” (Petit Robert 1) – mais qu’est-ce qui constitue, plus précisément, cet état ? Comment en rendre compte, objectivement ?
— Enfin, “ la vieillesse ” sert également à désigner un collectif, celui des personnes âgées, des vieillards. Mais qui sont les personnes âgées, les vieillards ainsi désignés ? Cette catégorisation, au-delà de son utilité pragmatique, ne contribue guère à une définition rigoureuse de “ la vieillesse ”.
La mise en évidence de l’imprécision de cette notion conduit à nous interroger sur le sens de l’utilisation de certains termes, donc sur le sens de nos représentations et de notre construction de la réalité. Dit autrement : le recours à une notion ambiguë comme celle de “ vieillesse ” ne sert-elle pas notre réticence à nous sentir concernés à titre personnel (“ les vieux, ce sont toujours les autres ”), à nous confronter trop crûment à la réalité de notre propre vieillissement ?
La psychologie privilégie ce type de questionnement, et une “ psychologie du vieillissement ” pourrait ainsi être définie comme une tentative de compréhension des interprétations/constructions singulières du vieillissement (dans leurs aspects psychiques et comportementaux) - vieillissement entendu comme participant du processus de vie même, tissé d’un rapport dialectique et changeant entre évolution et involution. Mieux encore, nous pourrions la désigner comme une “ psychosociologie du vieillissement ”, notre rapport à la réalité étant de fait médiatisé socialement.
R. S. Arslan, Vieillir, c’est... ? Essai sur le sens du vieillissement, Paris, à paraître. — “ Approche psychosociale du vécu de la retraite. Statut, place, rôles et gestion identitaire des nouveaux retraités ”, in : Perspective soignante, 1, avril 1998, pp. 52-67. — Mémoire et récit de vie chez les adultes âgés, Gérontologie, 105, 1998-1, pp. 31-39. — Miroir social, estime de soi au temps de la retraite, L’Harmattan, Paris, 1994.
Sites Internet : www-ssp. unil. ch/Hotes/uniger/uniger. html — www.socialinfo.ch/inag/default.htm
Éliane Christen-Gueissaz
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Vieillissement de la population
Le vieillissement de la population — ou vieillissement démographique — est défini comme l’augmentation, au cours du temps, de la proportion des personnes âgées habitant un territoire délimité (pays, canton, commune, etc.). Il se réfère donc à des modifications de la structure d’âges. On distingue le vieillissement par la base, lorsque la proportion des jeunes diminue (basse fécondité, émigration) et que cette baisse se répercute arithmétiquement sur la proportion du groupe âgé ; et le vieillissement par le sommet, quand la proportion des personnes âgées croît en raison d’un allongement de la durée de vie aux âges élevés.
Le vieillissement de la population ne se confond pas avec l’espérance de vie à la naissance, qui mesure la longévité humaine. Le vieillissement démographique est attribué, de manière fréquente et erronée, à la seule diminution de la mortalité. Or celle-ci a d’abord chuté chez les enfants en bas âge, avec un effet parfois de rajeunissement démographique ; et la baisse de la mortalité générale a coïncidé avec un recul de la fécondité.
La baisse de la fécondité durant le XIXe et la première moitié du XXe siècles a été — dans les pays européens — la cause fondamentale du vieillissement démographique ; elle reste une cause importante, tant que la fécondité demeure en dessous du seuil de remplacement des générations (dans les conditions actuelles, environ 2.1 enfants par femme en âge de procréation ; en Suisse, l’indice synthétique de fécondité est de 1.5 environ depuis 1975). Dorénavant, les taux de mortalité par âge chez les jeunes et les adultes ne diminueront guère ; en revanche, ils continueront de reculer chez les personnes âgées, accentuant le vieillissement par le sommet.
Le vieillissement de la population est inéluctable ces 4 à 5 prochaines décennies (une forte immigration de jeunes venant combler les creux à la base de la pyramide des âges est possible, mais peu plausible). Du point de vue de la politique sociale, les conséquences de ce phénomène importent. En effet, plus l’âge s’élève, et plus augmente la probabilité d’être malade, hospitalisé ou hébergé en institution médico-sociale, et plus croissent les coûts. En outre, l’allongement de la durée de vie en âge de retraite accroît la durée de versement des pensions-vieillesse. En revanche, le rapport actifs/retraités s’amenuise. Les progrès techniques améliorent la productivité en maints domaines et permettront de financer les politiques sociales de la santé et de la prévoyance vieillesse. Cependant, des modifications des modes de financement et de l’allocation des ressources seront nécessaires.
R. Vieillissement de la population en Suisse 1900, 1950, 1990 : Population résidante lors des recensements Scénario “ tendance ”, Office fédéral de la statistique, Berne, 1996, Population résidante permanente.
Voir : Mortalité — Espérance de vie — Fécondité — Pyramide des âges
Pierre Gilliand
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Violence
Du point de vue des usages courants
Les dictionnaires du français contemporain en général définissent la violence comme : a) le fait d'agir sur quelqu'un ou de le faire agir contre sa volonté en employant la force ou l'intimidation ; b) l'acte par lequel s'exerce la violence ; c) une disposition naturelle à l'expression brutale des sentiments ; d) la force irrésistible d'une chose ; e) le caractère brutal d'une action.
De quelque côté que l'on se tourne, on trouve donc au cœur de la notion de violence l'idée d'une force, d'une puissance naturelle dont l'exercice contre quelque chose ou contre quelqu'un fait le caractère violent. Au fur et à mesure que l'on se rapproche de ce noyau de signification, s'estompent les jugements de valeur pour laisser place à la force non qualifiée. Cette force, vertu d'une chose ou d'un être, est ce qu'elle est sans considération de valeur. Elle devient violence lorsqu'elle dépasse la mesure ou perturbe un ordre.
Un autre enseignement de l'examen des usages courants touche à la marge de variation des significations du mot. L'idée de force en constitue le noyau central et contribue à lui faire désigner en priorité une gamme de comportements et d'actions physiques. La violence, c'est d'abord une affaire de coups et de mauvais traitements. C'est pourquoi nous la considérons comme évidente : elle laisse des traces. Pourtant cette force prend sa qualification de violence en fonction de normes définies qui varient beaucoup. De ce point de vue, il peut y avoir presque autant de formes de violence qu'il y a de sortes de normes.
Du point de vue du Travail social
Evoquer la violence c'est basculer dans la représentation, c'est engager une lecture, cela évoque des situations vécues, des récits souvent dramatiques. Lorsque une définition prétendument précise, ne retient de la violence que ses manifestations spectaculaires, sanguinaires, en oubliant ses formes plus discrètes, légitimes ou institutionnelles, alors le point de vue déjà très partiel n' est plus que partial ; de manière sous-jacente et induite se glisse l' idée ou le projet d' un ordre pré-établit, légitime, que certaines violences viendraient menacer de leur incohérence. Pourtant nous savons bien que nous ne pouvons vivre sans elle. Son éradication absolue nous renvoie aux pires formes du totalitarisme ou de fanatisme.
Les réponses données aux comportements violents sont généralement de l'ordre de l'exclusion ou de l'enfermement. Face à ces réponses existerait-il des alternatives qui œuvreraient à d’une prise en compte de la violence
R. P. Baudry, Une sociologie du tragique, Cerf, Paris, 1986. — J.-C. Chesnais, Histoire de la violence, Laffont, Paris, 1981. — Société et violence, Vivre ensemble dans le respect de chacun, Hospice général, Service d’information sociale, 2000.
Site Internet : www.bigfoot.com/-sedyre
Voir : Lien social — Prévention — Travail social — Victimes d’infraction (Loi fédérale sur l’aide aux) (LAVI)
Pierre Avvanzino
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Voies de recours
Moyens mis à la disposition des individus pour leur permettre d’obtenir un nouvel examen des décisions dont ils font l’objet (ou d’une partie de celles-ci) ou de faire valoir les irrégularités observées dans le déroulement des procédures. Des voies de recours sont généralement prévues dans la législation sociale suisse.
Voir : Décision administrative  Recours (en assurances sociales)
jpf
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Volontariat àð Bénévolat
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Welfare
Dans la notion de Welfare State, il faut comprendre que le devoir de l État s étend non seulement à la protection des pauvres ou des ouvriers, mais à l’ensemble des citoyens de manière à leur fournir une protection et à répondre à leurs besoins chaque fois que cela est nécessaire. Aux États-Unis, “ filet de sécurit頔 de l’aide sociale versée par l’État fédéral sans limitation de durée et sans contrepartie de travail aux plus démunis (treize millions de personnes) ; créé par le président Franklin D. Roosevelt à l’époque du New Deal et renforcé dans le cadre de son programme de “ Grande Sociét頔 (1964-1968) par le président Lyndon B. Johnson. C’est un autre président démocrate, Bill Clinton, qui donne son aval à sa remise en cause radicale en 1996 par une nouvelle législation nettement plus conservatrice. Et nous verrons ce que nous réserve la législature pilotée par le Président G. W. Bush.
R. F.-X. Merrien, L’État-providence, Que Sais-Je ?, PUF, Paris, 1997.
Voir : État-providence — Sécurité sociale
jpf
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Workfare
La notion fait son apparition en 1971 dans un discours de Nixon aux États-Unis. Dès cette date, elle symbolise un rejet des politiques traditionnelles d’assistance qui enfermeraient les pauvres dans le piège de la dépendance. L’idée de base de ce concept est que pour recevoir des secours publics il fallait en contrepartie, fournir un travail.
Dans cette perspective, les droits sociaux sont réinterprétés dans une optique contractualiste qui articule les droits et les obligations. L’Etat-providence doit porter son attention sur les individus particuliers et beaucoup moins sur les populations. Mais dans ce sens la notion de workfare possède un sens équivoque . D’une part elle signifie une nouvelle approche des droits sociaux et de l’insertion, d’autre part elle est une stratégie d’encadrement et de mise au pas des pauvres (et des chômeurs).
La notion de Workfare est à rapprocher de celle de mesures actives utilisée en Europe continentale et du nord, et de celle de “ Welfare to work programs ” en usage au Royaume uni. Dans les trois cas, il ya une référence explicite à la conditionnalité des droits et une conception plus comportementaliste du social. Néanmoins, il est nécessaire de distinguer les notions de “ Workfare ” et “ Welfare to work ” qui trouvent leur enracinement dans une philosophie néo-libérale de la société, de la notion de mesures actives. Les premières se caractérisent par la défiance vis à vis des pauvres et des chômeurs et mettent l’accent sur le caractère punitif et contraignant des mesures à adopter à leur égard. Les secondes possèdent généralement un sens progressiste.
R. N. Gilbert, R. van Voorhis (Éds), Activating the unemployed. A comparative appraisal of work-oriented policies, Transaction books, New-York, 2001. — S. Morel, Les logiques de la réciprocité. Les transformations de la relation d’assistance aux États-Unis et en France, PUF, collection “ Lien social ”, Paris, 2000. — P. Rosanvallon, La nouvelle question sociale. Repenser l’Etat-providence, Seuil, Paris, 1995.
Voir : Contre-préstations — Contrôle social — État-providence — Mesures d'insertion sociale (MIS)
François-Xavier Merrien
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Working poor
Ce terme, emprunté de l’anglais, désigne un groupe de personnes actives qui, malgré leur emploi, ne parviennent pas à obtenir un revenu suffisant à les préserver de la pauvreté. Pour mesurer l’ampleur de ce phénomène, il faut tout d’abord déterminer l’indicateur utilisé pour mesurer le bien-être individuel. Si le revenu est considéré en général comme la mesure la plus adéquate du niveau de vie, la consommation peut être également employée à cette fin en partant du principe que des personnes, notamment à la retraite, peuvent parfois disposer d’un revenu inférieur à leur consommation grâce à l’épargne qu’elles ont pu accumuler dans le passé.
La seconde étape de ce processus consiste ensuite à définir le seuil de revenu (ou de consommation) à partir duquel une personne tombe dans le dénuement. De ce point de vue, deux approches peuvent être employées. La première repose sur une définition absolue du seuil de pauvreté. Dans ce cas, on utilise généralement le niveau de revenu à partir duquel une personne peut obtenir une aide sociale. La deuxième approche consiste à définir un seuil relatif de pauvreté en le rapportant par rapport au revenu (ou à la consommation) moyenne ou médiane de la population. Ce concept est fréquemment utilisé par des organisations telles que l’OCDE ou le PNUD pour établir des comparaisons internationales qui partent d’un seuil de pauvreté défini comme étant égal à 50 % (ou 2/3) du revenu médian ou moyen.
Finalement, un dernier problème lié aux recherches sur les working poor consiste à décider si l’analyse doit se limiter à l’échelle individuelle ou s’il s’agit au contraire de placer chaque personne dans le cadre de son ménage. Si la deuxième optique paraît effectivement la plus logique, elle pose en revanche des difficultés qu’une analyse individuelle ne connaît pas. En effet, une comparaison entre des ménages de taille différente oblige les chercheurs à définir une échelle d’équivalence susceptible d’être utilisée pour diviser le revenu d’un ménage comprenant “ k ” personnes et obtenir ainsi un niveau de revenu qui peut ensuite être comparé avec celui d’un ménage constitué d’une personne seule célibataire. La difficulté provient en l’occurrence du fait qu’on ne peut pas dans ce cas diviser le revenu du ménage par “ k ” personnes car il apparaît effectivement que la vie en commun permet de réaliser des économies d’échelle. Ainsi, l’OCDE a choisi de considérer que chaque personne adulte en plus dans un ménage équivaut à 0,7 personne supplémentaire alors qu’un enfant de plus est l’équivalent de 0,5 personne. En adoptant ce principe, le revenu d’une famille composée de 2 adultes et 2 enfants doit être divisé par 2,7 pour pouvoir être comparé avec le revenu d’un ménage formé d’une seule personne adulte.
En Suisse, un actif occupé sur 13 (soit plus de 250'000 personnes) faisait partie, en 1999, de la population des working poor définie à partir du seuil de pauvreté fixé par la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS). En réalité, 535'000 personnes sont directement touchées par ce phénomène si l’on tient compte des autres membres du ménage et notamment les enfants. Les groupes les plus affectés par ce phénomène sont les femmes, les ressortissants étrangers, les familles monoparentales, les travailleurs peu qualifiés, les indépendants sans employés, les actifs occupés à temps partiel ou ayant des conditions d’emploi flexibles et le personnel des secteurs à bas salaires.
R. Y. Flückiger, Y. Deutsch, J. Silber, “ La population des bas salaires et des working poor en Suisse ”, in : Comprendre la pauvreté, pour mieux la combattre : rapport sur la pauvreté sous l'angle de la statistique, éd. par R. Fluder, M. Nolde, T. Priester, A. Wagner, OFS, Neuchâtel, 1999, pp. 247-275.
Voir : Conférence suisse des institutions d’action sociale — Flexibilité — Flexibilité du travail — Indépendant (Travail) — Inégalité et discrimination salariales — Migrations (Politique des) — OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) — Pauvreté — Salaire miimum — Travail (Nouvelles formes de)
Yves Flückiger
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Xénophobie
La notion de xénophobie s'apparente à celle d'ethnocentrisme qui évoque la méfiance voire la crainte qu'éprouvent les indigènes à l'égard des personnes étrangères au groupe d'appartenance. Ce concept se réfère aujourd'hui à une attitude latente de refus des étrangers, qui peut se manifester dans un rejet de l'étranger et une politique de compartimentage des espaces de vie.
Alors que certains auteurs considèrent que xénophobie et racisme constituent deux points sur un même continuum de discours de plus en plus excluant , d'autres insistent sur la différence entre ces concepts. La xénophobie naît du contact entre les groupes et, à l'aide de stéréotypes, délimite les groupes et différencie les appartenances ; le racisme consiste à inférer la supériorité d'une catégorie de population sur une autre à l'intérieur d'un même espace culturel.
R. M. Wieviorka, Le racisme, une introduction, La Découverte, Paris, 1998.
Voir : Racisme
Rosita Fibbi Carton

Concepts – dic.pol.soc – version j.-p. fragnière
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